SEANCE DU 1ER OCTOBRE 2002
M. le président.
Avant de mettre aux voix les conclusions du rapport de la commission des
affaires économiques sur la proposition de loi n° 436, je donne la parole à M.
Francis Giraud, pour explication de vote.
M. Francis Giraud.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est plus
le médecin que le parlementaire qui s'exprime. Ce jour où le Parlement débat du
problème des noyades en piscine, problème terrifiant pour les familles, était
attendu depuis longtemps par les médecins d'enfants, en particulier par les
médecins réanimateurs, notamment dans le sud de la France.
Témoin impuissant, avec Jean-François Mattei, pendant des décennies, de ces
drames à l'hôpital d'enfants de la Timone de Marseille, je veux simplement
évoquer devant vous le calvaire enduré par les familles représentant les deux
tiers des enfants victimes d'une noyade et qui gardent des séquelles
neurologiques le plus souvent irréversibles.
Pour ces parents, la souffrance ressentie devant le handicap grave de leurs
enfants se double d'un terrible sentiment de responsabilité et de culpabilité.
A l'heure où la priorité est à la prévention des handicaps, quelle qu'en soit
la cause, les mesures proposées doivent être mises en place avec
détermination.
C'est tout à l'honneur de Jean-Pierre Raffarin, initiateur de ce texte, de
permettre à notre pays de rejoindre les législations étrangères qui ont déjà
statué sur ce problème.
Bien entendu, je voterai ce texte en pensant aux enfants et à leurs familles.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la session
parlementaire 2002-2003 s'ouvre sur un texte important puisqu'il s'agit de
protéger les enfants contre le risque de noyade dans les piscines privées.
La recrudescence, ces dernières années, de ce type d'accidents majeurs
exigeait sans aucun doute le renforcement des dispositifs de sécurité.
Ce sont plus particulièrement les enfants de moins de cinq ans qui sont
touchés. Hélas ! on sait qu'il suffit parfois de quelques secondes
d'inattention pour que le drame survienne et plonge toute une famille dans la
détresse.
La mise en place de dispositifs passifs de sécurité, en l'occurrence de
barrières de protection, comme le recommande cette proposition de loi, devrait
permettre d'assurer une meilleure protection des enfants face à de tels
risques. Mais, comme le souligne à juste titre, dans son rapport, M. Revet, la
présence de tels dispositifs ne doit pas avoir pour contrepartie un relâchement
de la surveillance exercée par les parents à l'égard des enfants. Ils ne
doivent donc constituer qu'une aide subsidiaire et en aucun cas suppléer la
surveillance des parents.
Il n'en demeure pas moins qu'un renforcement de la législation concernant les
piscines enterrées non couvertes à usage individuel ou collectif s'avère
nécessaire vu le développement de ce type d'équipements ces dernières années.
Le groupe communiste républicain et citoyen votera donc cette proposition de
loi.
Mais permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur la
situation des piscines publiques. Là aussi, il apparaît nécessaire de renforcer
la législation face au risque élevé d'accidents par noyade, qui, lorsqu'ils se
produisent, sont dans la majorité des cas mortels. L'enquête « Mairies 2000 »
menée par l'Association nationale pour la prévention des accidents en piscine
estime qu'il y a chaque année entre soixante-dix et quatre-vingts noyades
mortelles dans les piscines municipales, ce qui représente un à deux morts
chaque semaine. Cette situation est particulièrement préoccupante et exige que
l'on étudie rapidement ce problème pour prendre les mesures préventives
nécessaires.
Il s'agit ici non pas de vouloir faire peser de nouvelles contraintes sur les
élus mais bien de réfléchir à des solutions qui permettent d'améliorer les
dispositifs de sécurité concernant ce type d'équipement sportif et de loisir,
je pense plus particulièrement au renforcement des moyens humains de
surveillance.
Je tenais donc, monsieur le ministre, à attirer votre attention sur cette
situation des plus inquiétantes, qui exige une réaction de la part des
autorités publiques.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Emmanuel Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Cette proposition de loi relative à la sécurité des piscines privées, que nous
devons à l'initiative de notre ancien collègue Jean-Pierre Raffarin, est un
texte positif. Par conséquent, je la voterai.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Claude Frécon.
M. Jean-Claude Frécon.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme M.
Jean-Marc Pastor l'a annoncé tout à l'heure, le groupe socialiste votera cette
proposition de loi, dont l'objet est d'améliorer la sécurité des enfants,
préoccupation à laquelle nous sommes naturellement sensibles.
Cela étant, et puisque la responsabilité des maires a été évoquée tout à
l'heure, je m'interroge. Pour les piscines qui seront construites après le 1er
janvier 2004, c'est au constructeur qu'il incombera de fournir au maître
d'ouvrage une note technique précisant le dispositif de sécurité retenu. En
revanche, en ce qui concerne les piscines existantes, la date retenue est celle
du 1er janvier 2006. J'aimerais savoir si, à cette date, ce sont les maires qui
devront faire contrôler toutes les piscines existantes.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
C'est bien volontiers que je prends la parole sur ce texte, en ce premier jour
de session, car nous manifestons ici l'intérêt que nous portons à la vie de nos
concitoyens.
Médecin comme notre collègue Francis Giraud, lui hospitalier, moi généraliste,
j'ai été confronté à ces accidents de la vie particulièrement douloureux. La
noyade d'un enfant marque à jamais un praticien, qui sait que le jeune enfant
mettra plusieurs jours à mourir, et dans d'atroces souffrances. Alors, une
démarche de santé publique comme celle que nous entreprenons ne peut qu'honorer
nos assemblées.
La discussion de cette proposition de loi est également pour nous l'occasion
de rendre hommage aux parents qui ont vécu de tels drames.
En tant que maires, nous avons aussi un rôle à jouer. Certes, nous avons déjà
beaucoup de responsabilités à assumer, mais je crois qu'il nous incombe
d'informer et de sensibiliser nos concitoyens, surtout en période estivale,
notamment par le biais de nos bulletins municipaux.
Notre devoir est de rappeler, par tous les moyens dont nous disposons,
l'importance du risque.
Monsieur le ministre, il s'agit de santé publique, de prévention et
d'éducation. Vous avez d'ailleurs, à juste titre, élargi le débat en proposant
une réflexion sur les accidents domestiques qui impliquent des enfants ; on
pense à l'absorption de produits toxiques, aux brûlures, aux chutes. Si, en
effet, dans le futur, nous pouvions débattre des accidents domestiques, qui
sont aussi importants que les accidents de la route, nous ferions encore oeuvre
de santé publique.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Revet,
rapporteur.
Notre collègue M. Jean-Claude Frécon souhaite savoir si les
maires seront concernés par l'obligation de mise en sécurité des piscines
existantes.
Je tiens à préciser que, si nous avons souhaité accorder un délai
supplémentaire, c'est que, notamment, les dispositifs existants ne sont pas
encore toujours normalisés. Le constat sera d'ailleurs vrai également, mais
dans une moindre mesure, pour les piscines qui seront construites dans les mois
qui viennent. Il fallait donc laisser le temps nécessaire à la normalisation
des systèmes, compte tenu de la diversité du parc existant. Pour avoir
rencontré notamment les responsables de l'AFNOR, j'ai tout lieu de penser -
sans doute M. le ministre le confirmera-t-il dans un instant
(M. le ministre
opine) -
qu'à cette date les systèmes seront normalisés.
S'agissant maintenant de la responsabilité des maires, il n'y a aucune raison
qu'elle soit engagée : il s'agit d'un contrat entre le propriétaire de la
piscine et le fournisseur du dispositif normalisé de sécurité.
Sans vouloir prolonger à l'excès cette discussion, je voudrais simplement dire
ma satisfaction devant l'unanimité qui semble se dégager sur toutes les travées
de notre assemblée. Comme chacun l'a souligné, la sécurité des enfants est un
sujet extrêmement grave, et il ne s'agit pas ici d'exonérer les parents de leur
responsabilité en la matière. Mais, lorsque l'on sait qu'il suffit de quelques
minutes - le temps d'un appel téléphonique - pour qu'un enfant se noie, on
perçoit la nécessité de tout faire pour faciliter la surveillance, d'autant que
le parc de piscines continuera de se développer, comme il est normal et
naturel.
Pour conclure, je sais l'importance que M. le Premier ministre, notre ancien
collègue Jean-Pierre Raffarin, attachait à ce dossier, ainsi qu'en témoignent
les deux propositions de loi qu'il avait déposées.
Comme il me l'a confirmé la semaine dernière, lors de notre entretien, je puis
vous dire, mes chers collègues, que le Sénat s'inscrit pleinement dans sa
démarche, au point, semble-t-il, d'adopter cette proposition de loi à
l'unanimité.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien,
ministre.
Avant que la Haute Assemblée se prononce, je tiens à répondre à
certaines interrogations qui se sont exprimées, de façon à ne laisser vraiment
aucune question dans l'ombre.
M. Jean-Marc Pastor s'est interrogé sur les portillons. Les décrets
d'application y pourvoiront.
M. Jacques Pelletier et M. Yves Coquelle se sont interrogés sur les piscines
publiques, municipales et intercommunales, notamment. Elles ne peuvent entrer
dans le champ de ce texte, qui concerne la mise en sécurité des piscines
privées.
Sachez, cependant, que le Gouvernement est loin d'être insensible au problème.
Je saisirai de vos questions mon collègue chargé des sports, puisque cette
compétence-là relève de son département ministériel.
Enfin, M. Frécon s'est interrogé sur le contrôle : y aura-t-il des inspecteurs
pour contrôler les piscines privées ? Non ! Il s'agit d'un texte de
responsabilité, qui crée une obligation à la charge du maître d'ouvrage et du
fournisseur. A partir de là, les responsabilités sont clairement établies. Les
accidents doivent évidemment être évités, mais si, un jour, hélas ! il devait
s'en produire encore un, du moins ce texte permettrait-il de déterminer si,
véritablement, tous les engagements ont bien été tenus.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifiées, les conclusions du rapport de la commission des
affaires économiques sur la proposition de loi n° 436.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président.
Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité.
(Applaudissements.)
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