SEANCE DU 12 NOVEMBRE 2002
M. le président.
Avant de mettre aux voix les conclusions du rapport de la commission des
affaires sociales sur la proposition de la loi n° 33, je donne la parole à M.
André Vantomme, pour explication de vote.
M. André Vantomme.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a des
aspects paradoxaux de la situation à laquelle cette proposition de loi vise à
répondre.
Le premier paradoxe est le déni d'assurance par retrait des assureurs ou, plus
subtilement, par des majorations vertigineuses de cotisations. Je pense qu'il
faudra s'interroger sur les conséquences de ces dysfonctionnements et sur la
conception qu'ont certains assureurs de leur rôle social. Imaginons que, dans
d'autres aspects de la vie sociale, d'autres catégories commencent à
sélectionner leur activité en fonction de ce qui est rentable et de ce qui ne
l'est pas.
J'en viens au deuxième paradoxe : la possibilité réservée à certains
établissements hospitaliers importants de s'auto-assurer pose le problème de
l'assurance sous un angle différent. Si certains établissements sont contraints
à ce choix, c'est bien parce qu'il y a dans le monde de l'assurance des
absences de réponses qui doivent nous amener à nous interroger : d'autres
solutions publiques ne sont-elles pas à envisager pour l'avenir ? Après tout,
la mise en place de l'office national des indemnisations des accidents
médicaux, des affections iatrogènes et des affections nosocomiales est déjà une
première étape d'intervention publique. Souhaitons que les assurances l'aient
bien compris. La nature a, dit-on, horreur du vide. On pourrait demain trouver
dans l'attitude des assureurs des motifs légitimes pour aller vers des
solutions plus plubliques et moins libérales.
Pour toutes ces raisons et pour les motifs qui ont été défendus tout au long
de cette discussion par nos collègues MM. Gilbert Chabroux et Jean-Pierre
Godefroy, le groupe socialiste s'abstiendra sur ce texte.
M. Paul Blanc.
Ah ! Abstention positive ?
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai exprimé
très explicitement notre opposition à cette proposition de loi, même si nous
reconnaissons qu'un certain nombre de points doivent être traités.
Nous remarquons surtout que nous travaillons de plus en plus dans l'urgence et
que nous sommes de plus en plus confrontés à des textes très complexes. Ainsi,
nous n'avons découvert les amendements déposés par le Gouvernement que ce matin
!
Cette manière d'élaborer la loi en répondant dans d'aussi courts délais à des
interrogations qui peuvent être légitimes pose problème.
Mais nous sommes convaincus que l'adoption de cette proposition permettra
surtout de satisfaire les demandes médiatisées et très fortes de la fédération
française des sociétés d'assurance, qui est en train d'opérer un recentrage sur
des activités plus lucratives ! Alors que je pensais l'action des sociétés
d'assurance fondée sur une certaine forme de mutualisation et de partage des
risques, j'observe, depuis un certain nombre d'années, un désengagement de ces
compagnies : bien que les primes augmentent, nous assistons actuellement à un
transfert sur la solidarité nationale de ce qui pourrait être légitimement
partagé. En spéculant comme elles l'ont fait, en perdant des dizaines, voire
des centaines de milliards, les sociétés d'assurance, comme certains
établissements bancaires d'ailleurs, contribuent à rendre notre société plus
inégalitaire, plus ultra-libérale et plus injuste.
C'est véritablement en raison d'une accentuation des inégalités et de
transferts toujours plus importants sur la solidarité nationale de charges
devant au contraire être partagées que nous confirmons notre opposition à cette
proposition de loi.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain,
rapporteur.
Je souhaite situer dans un contexte plus général la manière
dont nous avons abordé la loi Kouchner et la proposition de loi que nous vous
soumettons aujourd'hui.
Au-delà des procès d'intention que l'on nous fait, nous devons développer un
esprit de médiation. C'est ce que je retiendrai de l'approche de cette
proposition de loi.
Il est certain que, si nous délivrons une information très précoce, beaucoup
moins de recours seront déposés. Nous avons également constaté que l'ordre des
médecins était de plus en plus saisi. Les malades pensent en effet que l'Ordre
doit sanctionner les praticiens. Le nombre de plaintes a été multiplié par deux
en dix ans. Mais cela n'aboutit pas obligatoirement à des poursuites sur le
plan pénal.
Il faut aussi préciser que notre souci est avant tout le patient. Et notre
souhait de voir les pratiques médicales se dérouler dans des conditions
sereines vise aussi l'intérêt des malades.
Les tribunaux ont tendance, c'est vrai, à indemniser le maximum de victimes,
et de mieux en mieux. Mais notre souci est non seulement d'apporter une réponse
dans l'urgence, mais aussi de donner à ce gouvernement les moyens de sa
politique sanitaire.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifiées, les conclusions du rapport de la commission des
affaires sociales sur la proposition de loi n° 33 (2002-2003).
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Monsieur le président, monsieur le ministre
délégué, mes chers collègues, ce texte étant adopté, je tiens à remercier tous
nos collègues qui ont contribué à l'élaboration de cette proposition de loi. Un
grand quotidien du matin a dénommé ce texte abusivement « loi About ». Ce sera
non « loi About », mais la loi de la République !
Si je n'ai pas souhaité m'exprimer sur ce texte tout à l'heure à la tribune,
c'est non seulement parce qu'il est d'inspiration gouvernementale, mais aussi
parce qu'il est le fruit de la réflexion des associations de malades, des
professionnels de santé et des professionnels de l'assurance du risque médical.
Il n'était donc pas normal que le président de la commission des affaires
sociales tente de s'approprier ce travail commun !
En revanche, après le vote qui vient d'intervenir, je tiens à remercier une
fois encore tous nos collègues, et en particulier M. le rapporteur, du travail
qu'ils ont accompli.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR
et des Républicains et Indépendants.)
11