SEANCE DU 20 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 22. - I. - Après le cinquième alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dépenses médico-sociales des centres de soins spécialisés aux toxicomanes relevant des catégories d'établissements mentionnées au 9° du I de l'article L. 312-1 sont prises en charge par l'assurance maladie sans préjudice d'autres participations, notamment des collectivités locales, et sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie, à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base aux remboursements ainsi qu'au forfait mentionné à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale.
« II. - Le premier alinéa de l'article L. 3411-2 du code de la santé publique est complété par les mots : ", à l'exclusion des dépenses mentionnées au sixième alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles".
« III. - La section 3 du chapitre IV du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 174-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 174-9-1 . - Les centres de soins spécialisés aux toxicomanes mentionnés à l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles sont financés sous la forme d'une dotation globale annuelle.
« La répartition des sommes versées à ces centres au titre de l'alinéa précédent entre les régimes d'assurance maladie est effectuée chaque année suivant la répartition des charges des dotations globales hospitalières pour l'année considérée, telle qu'elle résulte de l'application de l'article L. 174-2.
« IV. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« A titre transitoire, la première autorisation délivrée aux centres de soins spécialisés aux toxicomanes conformément aux dispositions du présent article a une durée de trois ans.
« V. - Les organismes gestionnaires des centres de soins spécialisés aux toxicomanes ayant passé convention avec le préfet du département où ils sont implantés à la date de publication de la présente loi disposent, à compter de cette même date, d'un délai d'un an pour solliciter l'autorisation mentionnée à l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles et selon la procédure fixée par l'article L. 313-2 dudit code. La convention devient caduque si cette autorisation n'a pas été sollicitée à l'expiration de ce délai.
« VI. - Dans l'attente de l'arrêté fixant la dotation globale pour l'année 2003, les caisses d'assurance maladie versent à chaque centre de soins spécialisés aux toxicomanes antérieurement financé par l'Etat des acomptes mensuels sur la dotation globale de financement, égaux au douzième de la participation de l'Etat allouée à chaque centre au titre de ses activités médico-sociales en 2002, déduction faite, le cas échéant, des financements des collectivités locales. Tout refus d'autorisation d'un centre met fin à son financement par l'assurance maladie. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux, sur l'article.
M. Gilbert Chabroux. L'article 22 prévoit le transfert à l'assurance maladie du financement des dépenses médico-sociales des centres de soins spécialisés aux toxicomanes, les CSST. Nous voudrions obtenir de la part de M. le ministre quelques précisions sur ce point.
Le financement des CSST intègre des activités à la fois de prévention et de soins ambulatoires. Si le transfert du budget de l'Etat à celui de la sécurité sociale peut fort bien se concevoir, en cela qu'il banalise les pathologies addictives et leurs soins dans l'ensemble des dispositifs de santé publique français, on peut toutefois regretter que l'alcoolisme soit traité séparément, sans doute sous la pression de la viticulture française, qui refuse d'assimiler l'alcool aux drogues.
Le problème le plus préoccupant que j'évoquerai maintenant est celui des moyens.
L'ensemble des professionnels de la lutte contre les drogues et leur pathologie déplorent une baisse de crédits qui les a déjà contraints à fermer dix-huit CSST en France et qui se traduit par un gel des crédits de paiement au cours du deuxième trimestre de cette année. De nombreux CSST sont ainsi en état virtuel de cessation de paiement et envisagent de cesser leurs activités.
Il apparaît donc nécessaire que nous débattions de cet article 22, non seulement sur l'orientation du nouveau dispositif - que nous acceptons -, mais surtout sur l'enveloppe de crédits qui sera consacrée à ce secteur de santé, exposé, comme nous le savons tous, à des besoins, hélas ! croissants.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. Je souhaite répondre le plus précisément possible aux questions qui m'ont été posées.
Je rappelle tout d'abord que le Gouvernement, dans son souci de clarification des dépenses de soin et de santé publique, a choisi de transférer à l'assurance maladie tout ce qui relevait du soin et de garder à sa charge tout ce qui concerne la prévention, l'éducation, le dépistage, la réduction des risques. C'est la raison pour laquelle il n'est pas possible aujourd'hui de dire que l'on transfère la totalité du financement des dépenses médico-sociales des CSST à l'assurance maladie. Il restera naturellement à la charge de l'Etat les subventions destinées à faire vivre les associations qui s'engagent dans la prévention, l'accompagnement, la prise en charge au quotidien.
Vous m'avez également interrogé sur les moyens. Le montant total des sommes qui seront transférées à l'assurance maladie est évalué à 107,5 millions d'euros.
J'en viens à votre question sur l'alcool. Je n'ose pas croire que vous mettez sur le même plan la drogue et l'alcool. Si les deux sont naturellement nuisibles à la santé,...
M. Gilbert Chabroux. Absolument !
M. Jean-François Mattei, ministre. ... on ne peut quand même pas établir un parallèle tout à fait identique. En effet, ce n'est pas parce qu'il n'est pas interdit de boire un verre de vin qu'il faudrait autoriser nos concitoyens à fumer un joint ! On ne peut donc pas aborder ces problèmes sous le même angle.
Il est vrai qu'en 1997, lorsque Mme Maestracci a été nommée responsable de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT, des travaux scientifiques, dont le rapport du professeur Roques, démontraient que le mécanisme de réponse du cerveau était identique sur les neurones et les récepteurs, qu'il s'agisse de l'alcool, du tabac, des médicaments psychotropes, des drogues douces ou des drogues dures. Mais, de là à étendre cette généralisation à une prise en charge préventive identique, il y a un pas ! D'autant que les résultats que nous avons obtenus ne sont pas, c'est le moins que l'on puisse dire, convaincants. Il n'en demeure pas moins que le concept de dépendance ne doit pas être oublié.
Lorsque le Dr Didier Jayle a succédé à Mme Maestracci, je lui ai dit que je ne voulais pas le mettre dans une situation subie. J'ai donc différé la fusion des centres de lutte contre l'alcoologie et des centres de lutte contre la toxicomanie, mais ce n'est pas une position définitive. Ce sera à lui de nous préciser, dans trois ou quatre mois, s'il faut que les structures restent indépendantes - tout en étant voisines, car elles connaissent des problèmes similaires -, ou s'il faut, au contraire, procéder à leur fusion.
Le Gouvernement respecte ainsi la libre responsabilité de celui à qui on a confié la direction de la MILDT. Vous voyez donc bien, monsieur le sénateur, que le Gouvernement n'a pas de position dogmatique sur ce sujet ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 22.

(L'article 22 est adopté.)

Article 23