SEANCE DU 20 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 35. - I. - Au 2° de l'article 43 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 2002 (n° 2001-1246 du 21 décembre 2001), la somme :
"76,22 millions d'euros" est remplacée par la somme : "180 millions
d'euros".
« Le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies
professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du
Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, mentionnée au VII de l'article
53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000 1257 du
23 décembre 2000), est fixé à 190 millions d'euros au titre de l'année 2003.
« II. - Le VII de l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 2001 précitée est complété par les mots : "chaque année avant le 15
octobre". »
La parole est à M. Gilbert Chabroux, sur l'article.
M. Gilbert Chabroux.
Je pensais intervenir plus en amont, à l'occasion de l'examen des amendements
tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 35, sur les
problèmes, déjà largement évoqués mais sur lesquels je veux revenir, de la
branche accidents du travail et maladies professionnelles.
Le constat que l'on peut faire en matière d'accidents du travail et de
maladies professionnelles est alarmant. On enregistre d'abord une augmentation
sensible du nombre de sinistres et d'affections professionnels. Les accidents
suivis d'arrêts de travail ont augmenté de 8,7 % entre 1998 et 2001, et les
accidents mortels ont fait 784 victimes en 2001.
Je le répète, la situation est alarmante. Et nous savons que les chiffres
globaux sont sous-estimés puisqu'ils ne prennent pas en compte les arrêts de
travail non indemnisés, ni surtout les accidents non déclarés sous la pression
de l'employeur.
Certes, la hausse peut s'expliquer en partie par l'augmentation des effectifs
salariés entre 1998 et 2001. Mais elle s'explique avant tout, comme chaque fois
que cette évolution négative se manifeste, par l'augmentation considérable du
travail précaire, la sous-traitance en cascade, l'intensification et la
flexibilité imposées aux salariés, avec le stress et la fatigue qui en
résultent, bref, par ce que la direction de l'animation de la recherche, des
études et des statistiques, la DARES, appelle dans son jargon technocratique
les « fluctuations cycliques en phase avec l'économie ».
Le plus préoccupant pour le long terme est la progression des maladies
professionnelles, qui sont passées de 1998 à 2001 de 6 000 à 40 000, soit une
multiplication par sept.
Bien sûr, l'amiante représente 14 % de ce total, et cette proportion est
appelée à augmenter, mais les pathologies articulaires et les troubles
musculo-squelettiques invalidants représentent la majorité des cas constatés.
Là encore, nous naviguons à vue, puisque de nombreuses affections constatées
par la médecine de ville ont un lien direct avec la pénibilité de la profession
du patient, sans que ce lien soit jamais officiellement établi.
Chacun s'accorde donc à reconnaître que cette situation ne peut perdurer, à la
fois pour d'évidentes raisons humaines, mais aussi pour des motifs de
gestion.
Deux questions prioritaires doivent être abordées : celle de la réparation
intégrale, qui doit être mise en oeuvre sans retard, et celle de la
prévention.
Déjà, le processus a été mis en route par le précédent gouvernement. C'est
ainsi que Martine Aubry et Elisabeth Guigou ont commandé deux rapports à MM.
Masse et Yahiel, qui vont dans le même sens. La Cour des comptes, quant à elle,
nous fournit également un diagnostic sur l'actuelle gestion de l'indemnisation
des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui en montre les
carences.
Les conclusions de ces études sont analogues. La branche accidents du travail
et maladies professionnelles ne remplit plus de manière satisfaisante ses
missions de réparation.
Il convient d'opérer une refondation sur la base de ce qui a été mis en place
par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, ou sur celle
des réparations accordées par la jurisprudence récente de la Cour de cassation.
Nous y reviendrons plus en détail à l'article 38.
S'agissant de la prévention, je rappellerai, au titre de l'action du précédent
gouvernement, le décret du 5 novembre 2001, qui est entré en application le 7
novembre dernier. Certes, ce dispositif est encore perfectible, mais,
désormais, les entreprises devront tenir à la disposition des délégués du
personnel, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le
CHSCT, et du médecin du travail un document unique et actualisé recensant de
manière exhaustive les risques dans l'entreprise pour les travailleurs. Des
sanctions ont été prévues pour les contrevenants, qui peuvent atteindre 1 500
euros.
Cette disposition se situe dans la ligne de la loi du 31 décembre 1991, qui
introduisait déjà la notion d'évaluation des risques
a priori
par les
employeurs. Plus tard, ont été mis en place sur les chantiers les chargés de
coordination pour la sécurité.
Au demeurant, il semble que les branches professionnelles, sensibilisées à
l'aggravation de la situation depuis une dizaine d'années, soient prêtes à
s'engager dans une démarche de prévention. C'est d'ailleurs leur intérêt bien
compris au regard des contrats d'assurance.
Nous sommes donc dans une démarche continue, même si elle se révèle encore
trop lente et partiellement infructueuse pour améliorer la sécurité des
salariés.
Nous espérons surtout que les salariés, particulièrement dans les petites
entreprises, se saisiront de l'opportunité qui leur est offerte et demanderont
à participer à l'élaboration de ce document, ce qui impliquera forcément une
action sur la sécurité dans l'entreprise. Même s'il ne s'agit que d'une étape,
elle permettra de développer le dialogue social sur ce sujet trop souvent
négligé.
Au total, ce sont donc les deux bouts de la chaîne, la prévention et la
réparation, qu'il nous faut remettre en état en fonction des évolutions
techniques, sociales et juridiques. La tâche a été entamée ; il est primordial
qu'elle soit menée à bien avec l'ensemble des partenaires concernés, et il me
semble que cela devrait être une préoccupation essentielle de cette partie du
présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. le président.
L'amendement n° 26, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« A la fin du premier alinéa du I de cet article, remplacer la somme : "180
millions d'euros" par la somme : "130 millions d'euros". »
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est relativement simple. Les besoins de financement du
FCAATA sont importants. En revanche, les moyens dont dispose le FIVA sont
quelque peu disproportionnés, compte tenu du niveau de consommation attendu.
Par cet amendement, il s'agit simplement de basculer 50 millions d'euros d'un
fonds à l'autre, afin de donner un peu plus d'aisance au FCAATA et de lui
permettre d'assurer l'ensemble des mesures de cessation anticipée d'activité
qu'il doit financer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Ameline,
ministre déléguée.
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement comprend tout
à fait le sens de l'amendement que vous présentez et il est parfaitement
conscient du souhait de la représentation nationale de disposer d'études et de
chiffrage du coût des dispositifs « amiante » qui relèvent du projet de loi de
financement de la sécurité sociale. C'est d'ailleurs pour cette raison que, à
l'Assemblée nationale, il ne s'est pas opposé à l'adoption d'un amendement de
M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances,
prévoyant « un rapport présentant l'impact financier de l'indemnisation des
victimes de l'amiante pour l'année en cours et les vingt années suivantes ».
Mais je tiens à préciser, s'agissant du FIVA, qu'établir des prévisions de
dépenses n'est pas chose aisée. Nous disposons de peu de données certaines. Le
taux de recours au FIVA nous est encore inconnu.
Par ailleurs, le conseil d'administration n'a pas encore pu fixer les bases de
l'indemnisation. Je note toutefois que le FIVA est saisi, depuis le printemps,
de plus de 1 500 demandes et que la montée en puissance de l'arrivée des
dossiers est très forte.
Lorsque le barème sera établi, le FIVA sera en mesure de décider
d'indemnisations définitives. Il devra disposer au début de 2003 d'un volant
financier suffisant pour faire face à toutes les demandes en instance. Nous
serons mieux armés, dans les prochaines années, pour prévoir une dotation
correspondant au véritable flux des indemnisations.
S'agissant du FCAATA, ce fonds est en phase de montée en charge rapide. Le
Gouvernement a toutefois retenu des hypothèses prudentes, de façon à garantir
son financement quel que soit le rythme de croissance effectif en 2003.
J'ajoute, au regard du dernier état des admissions au bénéfice de la cessation
anticipée d'activité, que c'est plutôt l'hypothèse basse pour 2002, avancée par
le conseil de surveillance en juin 2002, qui se confirme. Cette hypothèse était
de 323 millions d'euros. Notre nouvelle estimation est de 311 millions
d'euros.
La dotation prévue pour 2002 paraît donc suffisante, puisque le FCAATA devrait
dégager un léger excédent de 24 millions d'euros.
Peut-être avez-vous été alerté, monsieur le rapporteur, par la rédaction
quelque peu pessimiste, ou trop prudente, de l'exposé des motifs de l'article
36, qui annonçait que les prévisions de dépenses laissaient « penser que les
excédents des années antérieures pourraient être résorbés avant le 31 décembre
2002 ». Ce ne sera pas le cas.
En espérant avoir répondu ainsi à vos interrogations, je crois qu'il ne serait
pas judicieux de procéder au transfert que vous proposez et je souhaite,
monsieur le rapporteur, le retrait des deux amendements que vous proposez
recpectivement à l'article 35 et à l'article 36.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
En vous écoutant, madame le ministre, je m'attendais à ce que
vous terminiez votre intervention par l'annonce d'une garantie de financement
du FCAATA si le rythme de consommation des crédits venait à être plus soutenu
que vous avez prévu. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir, dites-vous, le rythme
étant tel que, de toute façon, nous sommes pratiquement assurés, aujourd'hui,
que les fonds seront suffisants pour faire face à la demande. Soit ! Dont acte
!
En tant que rapporteur de la commission des affaires sociales, qui soutient le
Gouvernement dans son action, comment pourrais-je mettre en doute les
assurances que vous venez de nous donner ? Je vous alerte simplement sur la
situation de ce fonds. En mai prochain, lors de l'examen du collectif annoncé
par M. Mattei, il sera intéressant de refaire le point. Si nous constations
alors que le rythme de consommation des crédits du fonds est plus soutenu que
ce que vous et nous imaginons aujourd'hui, nous pourrions reprendre la
proposition de la commission des affaires sociales que j'ai présentée voilà
quelques instants pour faire face aux besoins jusqu'à la fin de l'année
2003.
Sous le bénéfice de ces explications, je retire l'amendement n° 26. Et, en
conséquence, je retirerai, le moment venu l'amendement n° 28.
M. le président.
L'amendement n° 26 est retiré.
L'amendement n° 27, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article ».
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Il s'agit d'une question de date. L'assemblée nationale a
souhaité préciser que le rapport annuel d'activité du FIVA serait présenté
chaque année avant le 15 octobre. Or le décret du 23 octobre 2001 prévoit que
ce rapport doit être adressé avant le 1er juillet. Il semble donc inutile de
reporter de trois mois et demi la date de transmission de ce rapport.
La date du 15 octobre apparaît d'ailleurs quelque peu tardive, pour
l'information non seulement du Parlement, mais aussi du Gouvernement, pour la
préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je me
permets de rappeler, en effet, que le montant de la contribution du régime
général au financement du FIVA, qui est fixé par le projet de loi de
financement de la sécurité sociale, doit être déterminé sur la base du rapport
d'activité.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer le II de l'article
35.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Ameline,
ministre déléguée.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 27.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 35, modifié.
(L'article 35 est adopté.)
Article 36