SEANCE DU 20 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 41. - La part prise en charge par la Caisse nationale des allocations
familiales des dépenses mentionnées au 5° de l'article L. 223-1 du code de la
sécurité sociale est égale à une fraction fixée à 60 % pour l'année 2003. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 111 est présenté par M. Détraigne, Mme Férat et M. Nogrix.
L'amendement n° 158 est présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 46, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi cet article :
« Le 5° de l'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale est supprimé.
»
L'amendement n° 91, présenté par MM. Chabroux et Godefroy, Mme Campion, MM.
Vantomme et Domeizel, Mme Printz, M. Cazeau et les membres du groupe
socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« A. - Dans cet article, remplacer le pourcentage : "60 %" par le pourcentage
: "45 %".
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, compléter
cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour le fonds de solidarité vieillesse résultant
de la réduction de la part prise en charge par la Caisse nationale des
allocations familiales pour l'année 2003 du financement des majorations de
pension pour enfants est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux
droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
« C. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :
"I". »
L'amendement n° 111 n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 158.
Mme Michelle Demessine.
Notre amendement s'oppose à l'accélération des transferts entre la branche
famille et la branche vieillesse. En effet, sans grandes difficultés,
l'Assemblée nationale a entériné le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2003.
Il convient tout de même de noter que, sur le point précis que nous examinons,
à savoir la ponction des crédits de la branche famille au profit du fonds de
solidarité vieillesse, la majorité a bien failli se lézarder !
A juste titre, lorsque vous étiez dans l'opposition, mes chers collègues, vous
n'aviez pas ménagé vos critiques vis-à-vis du gouvernement précédent, qui a
pris l'initiative de la mesure visant à faire prendre en charge par la branche
famille le coût de la majoration de 10 % de la pension vieillesse pour les
parents ayant élevé trois enfants et plus.
Vous avez d'ailleurs saisi le Conseil constitutionnel, considérant notamment
qu'une telle disposition violait le principe d'égalité entre les familles.
Dans sa décision du 26 décembre 2001, le Conseil constitutionnel a écarté le
grief de la rupture d'égalité entre les familles, en prenant soin de préciser
tout de même, comme le note notre rapporteur M. Lorrain, que le montant du
transfert doit rester limité.
Je doute que, cette année, cette disposition soit conforme à la Constitution
dans la mesure où vous amplifiez les transferts de charge.
Outre cet argument constitutionnel, de tels transferts privent la branche
famille des 946,6 millions d'euros qui seraient pourtant nécessaires pour
augmenter les prestations et mettre en oeuvre une politique ambitieuse.
M. le président.
La parole est à M. Michel Mercier, pour présenter l'amendement n° 46.
M. Michel Mercier,
au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Cet amendement vise à supprimer la disposition
du code de la sécurité sociale prévoyant la prise en charge par la CNAF d'une
partie des majorations de pensions pour enfants qui devraient être assumées par
le fonds de solidarité vieillesse.
Dans le présent article, il était prévu de fixer la fraction de ces
majorations de pensions assurées par la CNAF à 60 %.
Par cet amendement, il s'agit, pour la commission des finances, de refuser des
méthodes auxquelles avait déjà recours le précédent gouvernement : les
prélèvements effectués aux dépens de la branche famille ont pour effet de
neutraliser les excédents de la branche et de diminuer les marges financières
qui pourraient être affectées à l'amélioration des prestations des familles
ayant des enfants à charge.
Le Sénat se doit, à mon sens, de continuer de dénoncer aujourd'hui ce qu'il
dénonçait hier dans un souci de bonne gestion et de clarification des relations
financières, y compris à l'intérieur de la sécurité sociale.
Par cet amendement, monsieur le ministre, nous souhaiterions obtenir des
engagements du Gouvernement pour l'avenir.
M. le président.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour présenter l'amendement n° 91.
Mme Claire-Lise Campion.
Je garde en mémoire tout ce qui s'est dit dans cet hémicycle ces deux
dernières années.
Mme Nelly Olin.
Nous aussi !
Mme Claire-Lise Campion.
Je ne parlerai pas de ceux qui ont saisi le Conseil constitutionnel sur les
dispositions de cet article.
L'année passée, en effet, nous avons opéré un prélèvement de 30 %. Le
dispositif devait, en principe, être fixé pour cette année à 45 %.
Malgré les véhémentes critiques soulevées par l'opposition pendant la
précédente législature contre ce transfert, cet article non seulement le
poursuit, mais il l'accélère, en fixant à 60 % la fraction prise en charge pour
2003.
En 2003, la branche famille va donc assurer à ce titre un financement
supplémentaire de 945 millions d'euros, soit un transfert total de 1,8 milliard
d'euros. Autant d'argent qui ne servira pas à financer des actions nouvelles en
direction des familles ! On ne peut que s'en étonner et le déplorer au regard
des besoins qui existent.
Mme Nelly Olin.
C'est sûr !
Mme Claire-Lise Campion.
Ce budget est une occasion perdue d'améliorer la situation des familles.
C'est pourquoi cet amendement tend à rétablir l'échéancier initialement prévu
pour le transfert du financement des majorations de pension pour enfants du
fonds de solidarité vieillesse, le FSV, vers la branche famille, entrepris dans
un souci de clarification des financements.
Plutôt que de servir à accélérer ce transfert, comme le propose le projet de
loi, les excédents de la branche doivent plutôt être destinés à financer des
mesures en direction des familles.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Vous admettrez qu'entendre nos collègues socialistes aller au
secours de la branche famille en disant : « Ne prônez pas un mouvement accéléré
de ce transfert, parce que c'est la branche famille qui va être pénalisée »,
cela prête à sourire !
Il faudrait quand même se rappeler que c'est bien sur l'initiative du
gouvernement précédent que ce transfert a eu lieu. Nous avions contesté un tel
transfert et nous continuons de le faire.
J'ai bien entendu la demande exprimée par notre collègue Michel Mercier, au
nom de la commission des finances. Si M. Gouteyron avait été présent dans
l'hémicycle, il aurait sans doute retiré tout de suite son amendement en raison
de l'annonce, par Jean-François Mattei, des engagements très clairs que le
Gouvernement a décidé de prendre pour tenir compte des amendements que nous
avions déposés au nom de la commission des affaires sociales. Ceux-ci tendaient
à démonter progressivement cette « usine à gaz » pour aller vers plus de
clarification, plus de transparence et plus de lisibilité.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avions accepté de retirer nos
amendements. En effet, une sorte de calendrier a été établi par le ministre,
prévoyant notamment la constitution d'un groupe de travail, auquel le Parlement
serait associé, et qui devrait livrer ses conclusions assez rapidement.
D'ailleurs, cela ne signifie pas, monsieur le ministre, que la présence de
parlementaires dans le groupe de travail dispensera le Gouvernement de tout
pouvoir d'initiative dans ce domaine : il pourra nous proposer un certain
nombre de suggestions quant au démontage de cette « usine à gaz » que nous
n'avons cessé de dénoncer au cours de l'examen des précédentes lois de
financement de la sécurité sociale !
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces
amendements compte tenu des engagements qui ont été pris.
Mais, bien entendu, sur le fond, nous souhaitons que, très rapidement, soit
entrepris le démontage de cette « usine à gaz » pour aller, je le répète, vers
plus de clarification, plus de transparence, plus de lisibilité, et pour
redonner une crédibilité aux comptes de la sécurité sociale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Jacob,
ministre délégué.
M. le rapporteur vient de rappeler les engagements pris
par le Gouvernement.
Si nous avons dû opérer un transfert de cette importance cette année, c'est en
raison de la situation dans laquelle vous avez laissé le fonds de solidarité
vieillesse. Je ne reviens pas sur le financement des 35 heures et sur tout ce
que vous avez mis en place.
Jean-François Mattei l'a dit très clairement : un groupe de travail sera mis
en place très rapidement. D'ailleurs, l'une des propositions tout à fait
pertinentes formulées par la commission des affaires sociales servira de base à
la réflexion de ce groupe.
D'ici au printemps prochain, nous disposerons de tous les éléments nous
permettant d'engager ce que certains d'entre vous avaient appelé le «
détricotage » du FOREC.
A l'évidence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 158.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Monsieur Mercier, l'amendement n° 46 est-il maintenu ?
M. Michel Mercier,
au nom de la commission des finances.
Je souhaite tout d'abord indiquer à
M. le rapporteur Alain Vasselle que, si j'ai présenté l'amendement de M.
Gouteyron, c'est à la demande de ce dernier, qui a été contraint de quitter
l'hémicycle voilà quelques instants. Je ne peux donc pas vous laisser dire,
monsieur Vasselle, ce que vous avez dit, car je crois que ce n'est pas la
vérité : M. Gouteyron a souhaité que le débat ait lieu. Et le débat n'a pas
nécessairement lieu quand vous seul le souhaitez ; il a aussi lieu lorsque des
sénateurs qui représentent une commission déposent un amendement.
(Très bien
! sur les travées du groupe socialiste.)
M. Gouteyron m'a donc demandé de présenter son amendement. Il était de mon
devoir de le faire, comme vous l'auriez fait vous-même.
Je viens d'écouter les explications de M. le ministre, qui a montré qu'il
avait le désir non pas d'aller plus loin dans ces errements, mais de trouver
des solutions nouvelles. Compte tenu des engagements pris par M. le ministre,
je retire donc cet amendement.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Très bien !
M. le président.
L'amendement n° 46 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 91.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 41.
(L'article 41 est adopté.)
Article 42