SEANCE DU 25 NOVEMBRE 2002


PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté par l'Assemblée nationale.
Je vous rappelle que les articles et les amendements tendant à insérer des articles additionnels relatif aux collectivités locales seront examinés demain, mardi 26 novembre.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous poursuivons l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 9.
L'amendement n° I-164, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... gaz naturel utilisé comme combustible et consommation d'électricité dans la limite de 5 000 kwh/an. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement vise à appliquer à la consommation domestique d'électricité et de gaz le taux réduit de TVA.
Il s'agit d'abord, tout comme la baisse du taux normal de TVA que nous avons réclamée, d'une mesure propre à soutenir la consommation populaire, qui constitue, à nos yeux, une priorité pour entraîner une croissance saine, durable et créatrice d'emplois.
Cette mesure nous paraît d'autant plus justifiée qu'électricité et gaz sont incontestablement des produits de première nécessité.
Le coût du chauffage, notamment, pèse très lourd dans le budget des abonnés aux revenus les plus modestes. La facture EDF d'un RMIste vivant dans un studio chauffé à l'électricité peut représenter jusqu'à 10 % de son budget.
Je rappelle aussi que 12 % des Français renoncent au moins occasionnellement à chauffer leur logement, faute de moyens, et que 5 % n'arrivent pas à régler leurs factures EDF et GDF.
La loi de finances pour 1999 avait amorcé ce processus de baisse de la TVA que nous préconisons en appliquant le taux réduit aux abonnements EDF et GDF, ce qui représente environ, 700 millions d'euros par an. Cette disposition est aujourd'hui attaquée par la Commission européenne, qui entend la faire annuler au nom de l'unicité des taux pour un même type de prestations. A cette fin, elle a saisi la Cour européenne de justice à l'encontre de notre pays.
Aussi, je vous demande, monsieur le ministre, de réaffirmer clairement le maintien définitif de la disposition de justice sociale que constitue l'application du taux réduit de TVA aux abonnements de gaz et d'électricité.
Je précise que l'application du taux réduits de TVA sur l'ensemble de la consommation d'électricité fait partie des baisses de TVA déclarées « eurocompatibles », ce qui donne la possibilité de « sortir par le haut » du piège de Bruxelles.
Le coût de cette nouvelle mesure est estimé à 2 milliards d'euros, c'est-à-dire nettement moins que le montant de la baisse de l'impôt sur le revenu, dont nous avons déjà largement dénoncé l'inefficacité sur la consommation et la croissance.
Le monopole de distribution de EDF et de GDF pour l'énergie domestique est une garantie du plein effet de la mesure.
Je fais également observer que la très forte augmentation du prix du gaz depuis plusieurs années - la dernière augmentation, le 1er novembre dernier, a été de 3 % - a apporté à l'Etat un supplément susbtantiel de recettes de TVA qu'il serait juste de restituer aux usagers.
En vertu des mêmes préoccupations vis-à-vis des usagers domestiques, je tiens à exprimer mon inquiétude devant l'évolution de la politique tarifaire de EDF et de GDF, en liaison avec la remise en cause progressive de leur statut d'entreprise nationale et de leurs missions de service public.
GDF ne répercute plus automatiquement, il s'en faut, les baisses du cours du brut sur ses tarifs domestiques, bien que ses contrats d'achat soient indexés sur ce cours. L'abandon progressif du principe de péréquation tarifaire au bénéfice des « clients éligibles », sur lesquels, par exemple, n'a pas été reportée la dernière hausse du prix du gaz, pénalise scandaleusement les autres usagers et donc, au premier chef, les ménages.
Nous aurons l'occasion d'intervenir à nouveau sur ces questions, qui sont également au coeur du mouvement des électriciens et des gaziers contre la privatisation rampante de leurs entreprises.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'avis de la commission est malheureusement défavorable à cet amendement, pour des raisons qui sont strictement liées au contexte budgétaire très difficile que nous connaissons.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Les abonnements à l'électricité et au gaz sont d'ores et déjà soumis au taux réduit de la TVA. La mesure qui est proposée par Mme Beaudeau aurait un coût budgétaire de 1,7 milliard d'euros, ce qui se situe très au-dessus de nos marges de manoeuvre. Je la prie donc de bien vouloir retirer son amendement, faute de quoi je devrai en demander le rejet.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-164.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-70, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 278 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Protections pour incontinence adulte. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jean-Pierre Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Les personnes âgées et les adultes handicapés qui souffrent d'incontinence acquittent une TVA de 19,6 % sur leurs protections personnelles. Ce type de produit étant, de toute évidence, de première nécessité, nous proposons, dans un souci de justice sociale, d'y appliquer le taux de 5,5 %.
Nous voyons d'ailleurs là une mesure à prendre d'urgence eu égard à l'importance croissante de la population de notre pays en état de dépendance physique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission note l'enjeu social ou tout simplement humain qui est sous-jacent à cet amendement, et elle partage, bien sûr, les préoccupations de ses auteurs.
Tout ce qui peut réduire les dépenses auxquelles doivent faire face des personnes dépendantes est effectivement de nature à faciliter leur maintien à domicile.
Cependant, on peut craindre que le coût budgétaire d'une telle mesure ne soit significatif, et il me paraît difficile, dans ces conditions, d'émettre un avis favorable. Je souhaiterais néanmoins connaître l'avis du Gouvernement sur cette question.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. En raison de la sensibilité du sujet au regard des personnes concernées, je tiens à dire à Jean-Pierre Demerliat que le Gouvernement partage le souci qu'il a exprimé.
Je dois cependant rappeler que le taux réduit s'applique déjà à la plupart des appareillages pour handicapés ainsi qu'à des équipements médicaux spéciaux, qui sont conçus exclusivement pour compenser les incapacités graves dont souffrent certains handicapés.
Ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de le dire à l'Assemblée nationale, nous nous heurtons, s'agissant de la mesure proposée, à une difficulté pratique : il serait en effet quasiment impossible de ne pas l'étendre à l'ensemble des produits similaires, notamment aux couches pour les jeunes enfants. Dès lors, le coût budgétaire serait d'au moins 145 millions d'euros.
Puisque les évaluations que j'ai produites ont tout à l'heure été mises en question, je précise bien que ces 145 millions d'euros ne représentent pas le coût direct de votre amendement, monsieur Demerliat : ce montant inclut le coût de l'inévitable extension de la mesure que vous préconisez aux couches pour les jeunes enfants, car il est impossible de différencier les produits.
Pour cette raison, je suis conduit à solliciter le retrait de votre amendement et, à défaut, son rejet.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-70.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-46, présenté par M. Girod, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 3 du I de l'article 278 sexies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3 bis. Le premier apport de logements sociaux à usage locatif dont la construction a fait l'objet d'une livraison à soi-même mentionnée au 2 du présent article, réalisé dans les cinq ans de l'achèvement de la construction au profit d'un organisme d'habitations à loyer modéré visé à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, à la condition que l'acte d'apport prévoie le transfert de la société cédante à la société bénéficiaire de l'apport, du prêt prévu à l'article R. 331-1 du code précité et de la convention mentionnée aux 3° et 5° de l'article L. 351-2 du même code. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-46 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Notre collègue Paul Girod avait souhaité, par cet amendement, aligner, du point de vue de la TVA, le régime des apports de logements sociaux neufs sur celui des ventes de logements sociaux.
Il s'agit en quelque sorte de réparer un oubli. En effet, l'article 278 sexies du code général des impôts soumet au taux réduit de TVA les ventes de logements locatifs sociaux qui remplissent un certain nombre de conditions : les logements visés doivent être conventionnés, bénéficier de prêts aidés et avoir fait l'objet d'une décision favorable du préfet. Mais cet article ne mentionne pas les apports de logements neufs d'une société d'HLM à une autre.
Le transfert de logements sociaux à usage locatif dans les cinq ans qui suivent sa construction - transfert entre deux organismes d'HLM par voie d'apports en nature -, est une opération spécifique visant un immeuble précis et dont l'objectif principal peut être de réorganiser le patrimoine pour lui apporter plus de rationalité géographique et assurer une meilleure gestion de l'ensemble.
La mesure ici proposée par notre collègue Paul Girod ne vise que les organismes dont le capital est constitué en actions, c'est-à-dire les sociétés anonymes d'HLM.
En 2000 et 2001, ce ne sont que cinquante à cent logements qui auraient fait l'objet de tels apports en nature. Compte tenu du faible nombre de logements concernés chaque année, il semble que la conséquence financière de la mesure soit mineure. Monsieur le ministre, c'est naturellement l'une des raisons pour lesquelles j'ai accepté, au nom de la commission, de soutenir cet amendement, qui me paraît tout à fait raisonnable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Le Gouvernement est en effet favorable à cette demande, mais il souhaitait que les organismes professionnels soient consultés et que les dispositifs soient affinés. Compte tenu des précisions qui ont été apportées par les organismes professionnels, - seul le premier apport est concerné - et du fait que les conditions d'application du logement social restent remplies, il m'est désormais possible d'émettre un avis favorable sur l'amendement n° I-46 rectifié.
Par ailleurs, je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-46 rectifié bis .
Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.
L'amendement n° I-167, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278 septies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % en ce qui concerne les opérations d'achat d'importations, d'acquisition intracommunautaire, de courtage, ou de façon portant sur les casques motocyclistes homologués et sur les sièges auto homologués pour enfants. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Notre amendement a pour objet de porter le taux de TVA sur les casques motocyclistes homologués et sur les sièges auto homologués pour enfant à 5,5 %. Il ne s'agit pas, j'y insiste, de répondre à des demandes de sociétés productrices de matériel voulant améliorer leur chiffre de vente. Je ne parle évidemment au nom d'aucun lobby, si ce n'est celui de la sécurité publique. Je me permettrais même de dire que je parle au nom du Président de la République...
MM. Denis Badré et Jean-Jacques Hyest. Oh !
Mme Marie-Claude Beaudeau. ... qui a souhaité qu'une action nouvelle forte et responsable soit mise en oeuvre pour faire diminuer le nombre des accidents et celui des victimes de la route.
Notre amendement, s'il était adopté, ne ferait peut-être pas significativement baisser le nombre des accidents, on a en effet vu, au cours de la dernière période, qu'il ne diminuait que très peu. En revanche, il serait susceptible de faire diminuer le nombre et la gravité des accidents pour deux types de passagers d'engins les plus vulnérables.
La circulation et la sécurité des motocyclistes demeurent un problème majeur, permanent, aggravé. Réduire la vitesse, protéger les voies de circulation sont, bien entendu, des mesures préventives nécessaires, mais la protection des motards par le port de casques sophistiqués de grande qualité permettrait de réduire le nombre des victimes. Encore faut-il évidemment qu'ils soient fabriqués et achetés.
L'incitation à rendre plus performants les casques est certainement un objectif à faire valoir, à condition que le prix de vente reste accessible au plus grand nombre. La baisse de la TVA va dans ce sens : le fait de passer son taux de 19,6 % à 5,5 %, soit une baisse de quatorze points, a une répercussion non négligeable sur les prix de matériels qui coûtent plusieurs centaines d'euros. D'ailleurs, personne ne peut contester qu'un casque parfaitement protecteur peut permettre de sauver une vie humaine.
Il faut donc prendre nos responsabilités.
Ce ne sont pas de pauvres arguments de non-compatibilité avec la réglementation européenne qui aideront à sauver des vies humaines ! J'ose espérer que ce ne sont pas uniquement des arguments de non-rentrées financières qui pourront, monsieur le rapporteur général, être retenus. La vie n'a pas de prix, même pour le budget de l'Etat, surtout pour le budget de l'Etat, oserai-je dire.
Permettez-moi de noter que l'argument que vous avez avancé à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, est quand même singulier. Il serait incohérent, avez-vous dit, de faire pour les casques de moto ce que l'on ne ferait pas pour d'autres équipements de sécurité !
Je souhaite améliorer tous les équipements de sécurité.
S'agissant des sièges auto pour enfants, la situation est encore plus préoccupante, mais elle est évidemment perfectible.
Premièrement, les enfants doivent être protégés impérativement, et je ne parlerai pas de ceux qui sont laissés sans protection - je pense à la ceinture de sécurité - car, dans ce cas, la responsabilité incombe aux seuls parents.
Deuxièmement, permettre l'acquisition et l'aménagement de dispositifs protecteurs pour les sièges d'enfant nous concerne tous. Fabriquons donc des protections performantes, à des coûts aussi abordables que possible.
Troisièmement, l'argument de la compatibilité européenne ne tient pas. Nous sommes libres ! Vous avez, mes chers collègues, des petits-enfants - vous faites souvent référence à eux lorsqu'il est question de l'avenir des retraites - et je propose que nous les protégions.
J'ose espèrer, monsieur le ministre, que vous ne me demanderez pas de retirer mon amendement, comme vous l'avez demandé à certains de mes collègues à l'Assemblée nationale. Ce serait, à mon sens, moralement condamnable. En effet, vous voulez de la cohérence, et je souhaite, comme vous, défendre la vie des enfants de manière globale, certes, mais aussi ponctuelle, car selon moi, c'est là l'expression de la vie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission ne peut qu'être sensible au plaidoyer de Marie-Claude Beaudeau...
M. Denis Badré. Surtout quand il est fait au nom du Président de la République !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Un obstacle cependant demeure, au moins pour les casques motocyclistes sinon pour les sièges d'enfant dans les voitures : c'est la liste de l'annexe H de la sixième directive européenne de 1977 sur la TVA, bien connue de notre collègue Denis Badré.
Il semble bien que, pour les casques, le passage au taux réduit ne soit pas eurocompatible. Peut-être, monsieur le ministre, pourrez-vous nous dire si, dans le cadre de prochaines négociations, surtout s'il devait y avoir un jour un taux intermédiaire, il sera possible d'évoquer le cas de ces équipements de sécurité sensibles compte tenu de l'insécurité routière dont de très nombreux jeunes sont, hélas ! victimes chaque année.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le président, vous me permettrez de peser chaque mot, Mme Beaudeau m'ayant indiqué que j'avais déjà tenu des propos moralement condamnables à l'Assemblée nationale et que mon argumentation était singulière.
Je vais donc m'efforcer de lui transmettre des éléments objectifs : les casques de moto, et plus généralement le matériel destiné à la sécurité des personnes, notamment au transport des personnes, ne figurent pas sur la liste des biens auxquels le droit communautaire autorise l'application du taux réduit de la TVA, à la seule exception, en effet, des sièges d'enfant pour les véhicules automobiles.
Toutefois, seule une révision globale et cohérente des règles de TVA en la matière est envisageable. En effet, les mêmes questions ne manqueront pas d'être posées pour d'autres matériels - et cela fait écho à la question de M. le rapporteur général - qui participent aussi à un objectif de sécurité, qu'il s'agisse des systèmes intégrés aux véhicules tels que les aides au freinage, les antipatinages, les coussins gonflables, etc. ; et, de fil en aiguille, pratiquement tous les équipements devraient se voir appliquer ce taux réduit de TVA.
C'est ce qui me conduit, en espérant ne pas vous avoir choquée, madame Beaudeau, à vous demander le retrait de votre amendement, faute de quoi j'y serais défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-167.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-38, présenté par MM. Ostermann, Bailly, Besse et Bizet, Mme Bout, MM. Del Picchia, Doublet, Dubrule, Fournier, Gérard, Karoutchi, Leclerc, Murat et Natali, Mme Olin, MM. Peyrat, de Richemont, Rispat, Schosteck et Valade, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le a quinquies de l'article 279 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« a sexies. Les prestations de restauration. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-49, présenté par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278 septies du code général des impôts, il est inséré un article 278 octies ainsi rédigé :
« Art. 278 octies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % en ce qui concerne :
« a) La fourniture de repas à consommer sur place ;
« b) Les ventes de boissons non alcoolisées réalisées à l'occasion des prestations visées au a ci-dessus. »
« II. - La perte de recettes générée par l'application des dispositions du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« III. - Les dispositions du I et II ci-dessus entreront en vigueur le 1er juillet 2003. »
L'amendement n° I-50, présenté par M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278 septies du code général des impôts, il est inséré un article 278 octies ainsi rédigé :
« Art. 278 octies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % en ce qui concerne :
« a) La fourniture de repas à consommer sur place ;
« b) Les ventes de boissons non alcoolisées réalisées à l'occasion des prestations visées au a ci-dessus. »
« II. - La perte de recettes générée par l'application des dispositions du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« III. - La date d'application du I ci-dessus sera fixée par décret. »
L'amendement n° I-68, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater . La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - Les pertes de recettes résultant des dispositions à I sont compensées par le relèvement du taux de l'impôt sur les sociétés à due concurrence. »
L'amendement n° I-168, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater . La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Joseph Ostermann, pour présenter l'amendement n° I-38.
M. Joseph Ostermann. Il s'agit d'un amendement récurrent, qui est également un amendement d'appel.
Le secteur de la restauration est soumis à deux taux de TVA : l'un à 5,5 % pour la vente à emporter et la livraison de repas à domicile, l'autre de 19,6 % pour la restauration à consommer sur place.
Le taux de 19,6 % met en difficulté un certain nombre de restaurateurs qui ne peuvent assurer la rentabilité de leurs équipements, notamment en zone rurale, où les prix sont bien souvent en deçà de ceux qui sont pratiqués par leurs concurrents.
Par ailleurs, la coexistence de ces deux taux provoque, au sein d'une même entreprise, des difficultés de comptabilité.
Le présent amendement vise, par conséquent, à assujettir le secteur de la restauration dit traditionnel au taux réduit de TVA, soit 5,5 %.
Cet amendement a déjà été adopté par le Sénat sur ma proposition, mais il est resté sans suite. Je tiens à préciser également que notre collègue Bernard Murat a saisi M. le Premier ministre, qui lui a répondu : « J'ai signalé votre démarche à M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en lui demandant de vous tenir informé de l'évolution de ce dossier. » Pourrions-nous, ce soir, connaître l'évolution de ce dossier ?
M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour présenter les amendements n°s I-49 et I-50.
M. Denis Badré. Je vais essayer d'aller un peu plus loin encore que notre collègue M. Ostermann afin que le Gouvernement puisse, lui aussi, aller encore plus loin dans ses réponses et nous faire savoir où il en est exactement sur cet important sujet.
Je ne reviendrai pas - tout a été dit au cours des dernières années - sur les raisons pour lesquelles nous présentons avec une belle constance des amendements tendant à faire passer au taux réduit l'ensemble des prestations de restauration, qu'il s'agisse de la restauration collective, de la restauration rapide ou de la restauration traditionnelle.
Le président de la commission des finances, tout à l'heure, nous rappelait encore combien il était choquant, quand on voyage à bord du TGV, de s'entendre demander si l'on désire emporter le sandwich que l'on a acheté ou si l'on préfère le consommer sur place.
M. Philippe Marini, rapporteur général. De toute façon, ce n'est pas bon !
M. Denis Badré. On pourrait multiplier les exemples d'aberration de ce genre. Ainsi, autre injustice, selon qu'un restaurant d'entreprise utilise ou non les services d'une entreprise de restauration collective, il peut, alors qu'il s'agit manifestement d'une prestation de grande qualité, acquitter la TVA à 5,5 %. Et je ne parle pas ici de tous les repas livrés à domicile ou servis en magasin par les traiteurs ! On aboutit donc a une situation d'une complexité exceptionnelle, entraînant de très nombreuses injustices qui desservent, dans le contexte européen, notre restauration.
Je rappelle simplement, puisqu'il a été chiffré avec une grande précision, le coût du passage complet de tout le secteur de la restauration à un taux de TVA à 5,5 %. Contrairement à ce qui se disait encore il y a deux ans - je suis parvenu, semble-t-il, a en convaincre les responsables des services compétents à Bercy -, ce coût ne s'élève pas à 4,5 milliards d'euros, ce qui correspondrait à un chiffre d'affaires, toutes formes de restauration confondues, de 170 milliards d'euros. En effet, si la différence de rendement entre une TVA à 19,6 % et une TVA à 5,5 % pour l'ensemble de la restauration est effectivement de 4,5 milliards d'euros, il ne faut pas oublier que de très nombreuses prestations se voient déjà appliquer un taux de 5,5 %, et que nous ne proposons pas de faire passer l'ensemble des consommations à 5,5 %. Par exemple, les boissons alcoolisées resteraient à 19,6 %. Par ailleurs, un certain nombre de dérogations sont prévues.
C'est ce qui me permet de confirmer que le coût de la mesure proposée est non de 4,5 milliards mais de 1 milliard d'euros par an.
S'agissant maintenant de la difficulté communautaire, effectivement, la mesure n'est pas actuellement euro-compatible et l'accord de Bruxelles est nécessaire. On peut obtenir cet accord de deux manières : en modifiant l'annexe H, qui définit la liste des biens et services qui sont justifiables d'un taux réduit - à charge pour les Etats membres d'avoir recours ou non aux possibilités ouvertes par cette annexe H - ou en se fondant sur l'article 29 de la directive, qui prévoit des dérogations temporaires.
La Commission est tout à fait opposée à la modification de l'annexe H, parce que c'est selon elle une boîte de Pandore que l'on ne peut pas prendre le risque d'ouvrir.
La seule modification qui a été apportée concernait les services à haute intensité de main-d'oeuvre, voilà maintenant trois ans. En s'appuyant sur l'article 29 de la directive, il a été décidé de lancer un certain nombre d'expérimentations et d'examiner, trois ans après, au vu des résultats de ces expérimentations, s'il fallait modifier l'annexe H. C'est une manière de reporter la décision. On a encore décidé de prolonger la réflexion d'un an parce que, sur le fond, la Commission reste très réservée.
Il reste l'article 29, qui a été utilisé pour appliquer le taux réduit aux prestations de floriculture, par exemple. Il est en effet possible d'utiliser cet article, et les services à haute intensité de main-d'oeuvre sont arc-boutés sur cette position. C'est temporaire, mais c'est du temporaire qui peut durer. Donc, on peut le faire, mais il faut l'accord de Bruxelles. Or pratiquement tous les Etats de l'Union européenne qui l'ont demandé ont pu maintenant l'obtenir, y compris le Portugal, qui était encore notre allié voilà trois ans lorsque nous demandions à bénéficier du dispositif pour les services à haute intensité de main-d'oeuvre. Entre-temps, le Portugal a cependant trouvé une autre dérogation : n'arrivant pas à entrer par la porte, il est entré par la fenêtre !
La France est donc pratiquement le seul pays à connaître de telles différences de situation au sein même de la restauration. Les différences sont d'autant plus sensibles, que, comme M. le président de la commission des finances le rappelait tout à l'heure, la France a l'un des taux normaux les plus élevés et l'un des taux réduits les plus faibles de l'Union européenne.
Dans ce contexte, les plus hautes autorités de l'Etat ont souligné leurs préoccupations face à ce problème. Si j'ai bien compris, le Gouvernement s'est saisi de la question. Les amendements n° I-49 et I-50, dont l'un est un amendement de repli, visent à l'aider à régler le problème sans peser sur l'équilibre du budget de 2003.
L'amendement n° I-49 tend à prévoir - et j'avais déjà déposé un amendement identique l'année dernière - que toutes les prestations de restauration, à l'exception des boissons alcoolisées, je le rappelle, bénéficient du taux réduit de la TVA à compter du 1er juillet 2003, ce qui donne six mois pour obtenir la dérogation de Bruxelles. Cela me paraît possible, et je suis prêt à apporter ma contribution au Gouvernement pour l'appuyer dans sa démarche auprès des autorités communautaires. Je ne veux pas m'élever au-dessus de ma condition, mais si je puis être utile, je le ferai.
La difficulté de l'euro-compatibilité est donc levée et mes amendements, de ce point de vue, sont parfaitement recevables.
En revanche, subsiste la difficulté du coût budgétaire. Il serait ramené à 500 millions d'euros, ce qui, je le concède, est encore important et de nature à rompre l'équilibre de notre exercice budgétaire. C'est pourquoi je propose l'amendement n° I-50, qui prévoit que la date de mise en oeuvre de la mesure soit fixée par décret.
Ce peut donc être le 15 décembre 2003 ou, à la limite, le 31 décembre 2003.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le 31 décembre, pour le réveillon ! (Sourires.)
M. Denis Badré. Cette disposition, monsieur le ministre, présente un avantage important. Non seulement elle ne grève pas votre budget, mais, en plus, les professionnels concernés, qui sont las des paroles, auront enfin le sentiment qu'une démarche est engagée et qu'on leur propose une mesure concrète de nature à leur redonner confiance dans le Gouvernement et dans la représentation parlementaire et à redonner à ce secteur confiance en lui-même. Cela me paraît important, monsieur le ministre ! C'est pourquoi je plaide pour qu'au moins cet amendement de repli puisse être examiné avec intérêt.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour défendre l'amendement n° I-68.
M. Gérard Miquel. Nous proposons, par cet amendement, d'abaisser le taux de TVA sur la restauration. En effet, s'il est bon que les baisses ciblées de TVA s'appliquent aux produits de première nécessité, il est tout aussi souhaitable qu'elles s'appliquent aux produits et services offerts par les secteurs d'activités qui emploient de la main-d'oeuvre. Mais, pour que cette baisse ne soit pas un cadeau à sens unique, il conviendrait évidemment d'exiger de la profession une contrepartie à l'emploi, c'est-à-dire un engagement précis sur l'embauche de personnels.
D'une façon plus générale, il s'agit, en adoptant l'amendement que nous vous proposons, non seulement d'aider le Président de la République et le Gouvernement à tenir leurs engagements électoraux, mais aussi et surtout d'atteindre trois objectifs : aider les petites et moyennes entreprises à oeuvrer pour l'emploi et, partant, pour la croissance ; aider ces mêmes PME à oeuvrer pour le tourisme ; enfin, aider le secteur de la restauration française à se rapprocher de celui de nombreux autres pays européens.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour présenter l'amendement n° I-168.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Par notre amendement, nous proposons d'harmoniser à 5,5 % les taux de TVA applicables à l'alimentation sur place et à l'alimentation à emporter, et de profiter de l'ouverture des négociations relatives à la sixième directive, qui doivent, si j'ai bien compris, démarrer début 2003, pour faire des propositions.
Premièrement, il faut en finir avec les situations ubuesques et illogiques. Un collègue a pris l'exemple d'un voyageur qui veut s'alimenter au cours d'un voyage en train en provenance de l'Italie. Il connaîtra un taux de 0 % au départ si la restauration est assurée par les Italiens, puis un taux de 5,5 % ou de 19,6 % suivant qu'il descendra ou non du train. Vous reconnaîtrez que c'est assez absurde, voire risible, et pourtant... c'est réel !
Deuxièmement, le Conseil d'Etat s'enlise dans des situations de plus en plus inextricables, sans solution valable pour tous.
Troisièmement, le moment est venu de trancher : avec l'ouverture des négociations relatives à la sixième directive, c'est possible. Il y va de l'intérêt du tourisme français et de l'industrie hôtelière, qui emploie 600 000 salariés et qui réalise un chiffre d'affaires de plus de 30 milliards d'euros, lequel pourrait être sensiblement amélioré par une baisse du taux de TVA entraînant une baisse des prix et donc une reprise de l'activité. Il y va aussi de la qualité culinaire de la restauration française traditionnelle. Celle-ci ne mérite-t-elle pas un peu plus de considération ? C'est également très important pour l'activité économique et pour l'emploi.
La profession estime que 80 % des restaurateurs investiraient pour améliorer les prestations de service et que 80 % des entreprises concernées seraient prêtes à embaucher au moins une personne par établissement, ce qui représenterait plusieurs milliers d'embauches : certains estiment à 40 000 le nombre d'emplois supplémentaires susceptibles d'être créés dès la première année,grâce à une baisse de taux de TVA à 5,5 % !
J'ajoute qu'on ne peut pas continuer à faire des déclarations officielles dans ce sens sans prendre les décisions qui s'imposent. Le Président de la République s'était engagé dans un discours prononcé à Saint-Cyr-l'Ecole, le 27 février dernier, à promouvoir un taux réduit pour la restauration. Je n'ose pas croire qu'il s'agit là d'une simple promesse électorale, d'autant que cette position a été confirmée par une lettre de M. Mer au commissaire européen chargé de la fiscalité.
M. Raffarin lui-même, le 16 septembre dernier, a exprimé au président de la Commission, M. Prodi, la même volonté. Mme Lenoir prétend d'ailleurs que la Commission européenne est disposée à étudier cette proposition.
N'y aurait-il que nous, mes chers collègues, pour bouder cette proposition, alors que, dans tous les départements, nos discours, les vôtres comme les miens, correspondent à ce que je vous propose ? Alors j'ai envie de vous dire, mes chers collègues : courage, votez ces amendements, la cuisine française vous en sera reconnaissante !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je m'exprimerai sur l'ensemble de ces amendements, qui ont une inspiration très voisine même si quelques facteurs techniques les différencient.
Comme chacun le sait ici, la Commission de l'Union européenne a prévu de revoir la politique globale concernant les taux réduits au cours de l'année 2003.
La France, par la voix du Gouvernement, en particulier du nouveau gouvernement, a déjà manifesté son souhait de voir la restauration bénéficier du taux réduit en raison de son caractère de service à forte intensité de main-d'oeuvre.
Il est tout à fait exact que l'application du taux réduit aurait pour conséquence, comme plusieurs d'entre vous l'ont souligné, de créer de nombreux emplois et que l'incidence sur le tissu économique et social serait loin d'être négligeable, compte tenu du très grand nombre d'entreprises de restauration de notre pays et du marché de la main-d'oeuvre.
Les négociations entre les Etats membres et la Commission aboutiront, nous a-t-on dit, à une décision concernant la restauration au cours de l'année 2003. Dès lors, il serait, me semble-t-il, très maladroit de la part de la France de s'arroger unilatéralement un droit dont elle ne dispose pas encore du point de vue communautaire. C'est une question de respect des procédures et des négociations. Nous ne devons pas agir comme si la décision - qui doit, je le rappelle, être prise à l'unanimité par le Conseil européen - était déjà intervenue. Chacun le sait bien, en particulier l'orfèvre de la commission des finances en matière de droit communautaire et de budget communautaire qu'est notre collègue et ami Denis Badré.
La commission des finances est évidemment favorable sur le fond à l'ensemble des amendements, même si elle nuance cette approbation au regard de certains gages. Mais cela n'est qu'un point de détail.
Elle demande toutefois à leurs auteurs de vouloir bien retirer ces amendements compte tenu des efforts constants et réitérés du gouvernement actuel pour faire avancer ce dossier, efforts qui sont, sans conteste, tout à fait fidèles aux engagements pris auprès des professionnels et de l'opinion publique voilà quelques mois à peine, lors des compétitions électorales nationales.
Mes chers collègues, cette demande s'applique donc à l'amendement n° I-38, présenté par M. Ostermann, à l'amendement n° I-49, présenté par M. Badré, à sa version « dégradée » - si j'ose dire -...
M. Jean-Jacques Hyest. Allégée !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... ou de repli que constitue l'amendement n° I-50, également de M. Badré, à l'amendement n° I-68 de M. Miquel et, enfin, à l'amendement n° I-168 de Mme Beaudeau.
Tous ces amendements sont excellents sur le fond, même si Mme Beaudeau prévoit, dans le sien, un gage sur l'impôt sur les sociétés...
M. Paul Loridant. Eh bien, levez le gage !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... qui n'est pas considéré comme recevable par la commission.
Indépendamment de cette remarque vraiment très ponctuelle, tous ces amendements ont pour objet de défendre une excellente cause et les arguments avancés l'ont été avec efficacité et talent. Nous touchons très probablement au but. Espérons que M. le ministre nous le confirmera !
Après avoir entendu l'avis du Gouvernement et après que le débat aura eu lieu au sein de la Haute Assemblée, il sera nécessaire de retirer les amendements, afin que le Gouvernement ait les coudées franches au cours des négociations qui l'attendent et qui permettront, n'en doutons pas, de concrétiser les engagements pris et de bien servir un secteur économique qui est l'un des fleurons de la qualité de vie à la française ! (Très bien ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Pour prolonger ce débat qui a déjà permis de bien clarifier les choses, je confirme que, dès son installation, le Gouvernement a manifesté sa détermination en la matière. Il a en effet déjà présenté la demande officielle à l'Union européenne, ce qui n'avait pas été fait. (M. le rapporteur général s'exclame.) M. le Premier ministre a d'ailleurs rencontré le président de la Commission, M. Prodi, pour lui confirmer toute la détermination du gouvernement français. Mme Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes, a été chargée de suivre le dossier pour l'ensemble des ministères concernés par cette mesure qui nécessite, M. le rapporteur général l'a rappelé, un vote à l'unanimité par les Etats membres.
Pour répondre à la question de M. Badré, je dirai qu'après avoir été, c'est vrai, réservée sur l'opportunité de soutenir cette demande de la France la Commission est aujourd'hui, je le pense, convaincue. Nous allons d'ailleurs lui transmettre très prochainement l'étude économique qu'elle nous a demandée et qui a pour objet de démontrer l'importance qu'aurait une telle mesure sur l'emploi dans notre pays. Nous nous appliquerons à ce que cette étude soit aussi convaincante que possible pour tous nos partenaires européens.
La question qui se pose maintenant au Parlement - je l'ai dit à l'Assemblée nationale - est de savoir comment nous devons nous y prendre ensemble pour faire aboutir cette demande.
Mesdames, messieurs les sénateurs, deux solutions se présentent à vous : soit vous estimez que votre vote sera déterminant pour convaincre nos partenaires européens, soit vous estimez qu'il est préférable - et c'est ma conviction - de ne pas introduire dans notre droit interne une disposition qui requiert préalablement un vote unanime de nos partenaires européens. C'est une question, me semble-t-il, de diplomatie, je dirai même de délicatesse et de courtoisie.
A partir du moment où l'on doit prendre une décision en commun, mieux vaut avancer les arguments destinés à convaincre nos partenaires d'approuver unanimement notre position avant de modifier notre droit interne plutôt que de faire l'inverse, ce qui donnerait à penser à nos partenaires que nous sommes par avance indifférents à la réponse qu'ils nous feront !
Je ne suis pas un spécialiste des questions internationales, mais j'ai, comme vous tous, un peu d'expérience dans ce domaine. On a, me semble-t-il, plus de chances de convaincre quand on respecte ses interlocuteurs que quand on leur donne le sentiment de les mettre devant le fait accompli.
L'Assemblée nationale comme le Sénat ont manifesté, sur cette question, une volonté claire et unanime. Le Gouvernement s'en fait l'interprète là où il faut, c'est-à-dire autour de la table du Conseil européen. Toute indélicatesse risquerait d'affaiblir la négociation et d'empêcher le dossier d'aboutir, ce qui irait à l'encontre des intérêts de la France, en particulier dans le secteur de la restauration.
Monsieur le rapporteur général, puisque nous sommes sur la bonne voie, nous devons, pour mettre toutes les chances de notre côté, nous abstenir de traduire immédiatement dans notre droit interne une telle mesure. C'est la raison pour laquelle je souhaite vivement le retrait de ces cinq amendements. Leurs auteurs ont pu exprimer leur détermination. Je veux qu'ils ne doutent pas de celle du Gouvernement : tous les actes qu'il a accomplis depuis son installation l'attestent. Je pense qu'il faut lui faire confiance pour obtenir satisfaction dans les meilleurs délais.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. L'amendement n° I-38 est-il maintenu, monsieur Ostermann ?
M. Joseph Ostermann. J'ai affirmé d'emblée qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Les signataires de cet amendement comptent sur la détermination du Gouvernement pour que ce dossier soit enfin réglé et acceptent de retirer cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-38 est retiré.
Les amendements n°s I-49 et I-50 sont-ils maintenus, monsieur Badré ?
M. Denis Badré. Je retire l'amendement n° I-49.
En revanche, avant de retirer l'amendement n° I-50, je souhaite m'expliquer sur cette question importante, puisque les plus hautes autorités de l'Etat ont de nouveau marqué leur volonté de trouver une solution.
Nous devons tout faire pour y parvenir. Il est vrai que cela aurait été plus facile voilà trois ans : notre situation budgétaire était favorable et nous avions une opportunité avec l'expérimentation sur les services à haute intensité de main-d'oeuvre. Ce fut une occasion manquée.
Voilà deux ans l'opportunité de l'expérimentation sur les services à haute intensité de main-d'oeuvre n'existait plus, mais d'un point de vue budgétaire, cette démarche aurait été plus facile.
Aujourd'hui, nous sommes dans la situation la plus difficile. La vraie question est de savoir si un vote du Parlement est de nature à aider ou non le Gouvernement.
Il l'aurait, à l'évidence, aidé à convaincre la Commission. Le ministre nous dit que c'est fait. J'en prends acte, et j'en suis heureux. Mais permettez-moi de rappeler que nous avions réussi, voilà cinq ans, à convaincre M. Mario Monti, alors commissaire chargé de la fiscalité, et obtenu que la Commission renonce à mettre en place immédiatement le régime commun de TVA, car celui-ci aurait braqué contre l'Union européenne toutes les entreprises et tous les contribuables d'Europe. Cela aurait été, permettez-moi l'expression, une ânerie, et M. Monti a retenu nos arguments. Cela prouve, que de temps en temps, un vote du Parlement peut peser sur une décision de la Commission.
Mais il s'agit maintenant de la réticence du Conseil, nous dit M. le ministre. A ce propos, je rappelle que l'amendement n° I-50 présente deux avantages. Le premier, c'est de réduire le coût. Ainsi, l'affaire franco-française n'existe pratiquement plus. Le second est d'ouvrir un délai sans limite car, effectivement, le fait de fixer une date d'application donnerait le sentiment que le Gouvernement, coincé en quelque sorte, est finalement en mauvaise position pour négocier avec ses partenaires. C'est la raison pour laquelle j'ai retiré l'amendement n° I-49. Je suis parfaitement convaincu par cet argument.
Mais, à partir du moment où aucune date n'est fixée dans l'amendement n° I-50 et que le Gouvernement, en fonction de l'évolution de la négociation, peut choisir la date et la fixer ultérieurement par décret, non seulement on lève cette difficulté, mais on marque une volonté parlementaire sur laquelle le Gouvernement peut s'appuyer pour emporter l'adhésion de ses partenaires.
La seule question qui subsiste est celle du coût à payer. Le ministre évoquait tout à l'heure la courtoisie que nous devons avoir vis-à-vis de nos négociateurs. Je sais comment ont lieu les négociations communautaires, pour avoir participé à une dizaine de sommets agricoles, de marathons agricoles ! Si la courtoisie est de mise dans un premier temps, elle devient formelle ensuite et, au bout d'un certain temps, il faut mesurer la détermination du partenaire et, surtout, chiffrer le coût de l'opération. C'est cela qui est important.
Il faut savoir que nos partenaires nous veulent courtois, mais que les Allemands ne tiennent pas du tout à ce que le taux réduit soit adopté car, pour le moment, ils bénéficient largement de la différence entre leur taux, qui est réduit, et le nôtre, qui ne l'est pas. Et les frontaliers - je parle sous le contrôle du président de séance - savent très bien que cela coûte moins cher, à qualité ou à prestation égale - ce qui est difficile à obtenir du fait que nos prestations sont au-dessus de toute qualité...
M. le président. Elles sont incomparables ! Surtout dans le Bas-Rhin ! (Sourires.)
M. Denis Badré. ... de l'autre côté de la frontière. Voilà pourquoi les Allemands sont contre cette mesure.
Il faut maintenant savoir ce que nous serons prêts à lâcher par ailleurs pour obtenir l'accord des Allemands sur ce point. Il faut, dans la négociation, obtenir satisfaction sans payer trop cher le vote de la mesure d'un côté, et sans trop céder aux Allemands de l'autre.
Monsieur le ministre, la pression du Parlement, grâce à l'adoption d'un amendement qui ne fixe aucune date butoir, peut-elle aider le Gouvernement à obtenir satisfaction au moindre coût, en ayant bien mesuré l'exacte détermination de l'ensemble de nos partenaires au sein du Conseil ? C'est la seule vraie question à mon sens.
M. Roland du Luart. Il pourrait y avoir un vote unanime !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert, ministre délégué. Pour le bon ordonnancement de nos débats, je dirai simplement à M. Denis Badré que, s'il veut rendre service au Gouvernement, il vaut mieux qu'il retire son amendement.
Si vous pensez savoir mieux que moi ce qui est bon pour le Gouvernement, je m'en remets à votre science. Mais je crois préférable - et pardonnez-moi de le souligner aussi franchement - que cet amendement ne soit pas voté par le Parlement.
Dans un système démocratique comme le nôtre, c'est l'exécutif qui représente les intérêts de la nation. Il demande au Parlement de lui faire confiance. Le peuple souverain pourra en décider autrement, mais je le sollicite, car les meilleures chances de réussite sont celles que je viens de vous décrire.
Cher ancien collègue et ami Denis Badré, je vous le dis franchement, cet amendement ne nous arrange pas, il nous pénalise plutôt pour atteindre l'objectif commun que nous fixons.
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° I-50 est-il toujours maintenu ?
M. Denis Badré. Je ne veux nullement mettre le Gouvernement dans une impasse ni le gêner dans la négociation avec ses partenaires. Mon seul souci est d'aller au bout de la réflexion et, sans vouloir peser sur le choix qui sera celui du Gouvernement, en qui nous avons une confiance totale, de confronter les expériences que nous avons pu avoir, les uns et les autres, de négociations communautaires. Je n'avais aucune autre prétention.
Par conséquent, je retire mon amendement, tout en rappelant que son adoption aurait été aussi un moyen d'envoyer un signal fort aux professionnels du secteur, qui attendent, au-delà des promesses et des engagements, une mesure concrète.
M. le président. L'amendement n° I-50 est retiré.
L'amendement n° I-68 est-il maintenu ?
M. Bernard Angels. Avant de retirer cet amendement, nous voudrions obtenir des précisions : je n'étais pas l'un de ces sénateurs qui étaient jusqu'au-boutistes lorsque le gouvernement était différent.
On m'a toujours répondu que cette mesure était impossible à mettre en oeuvre du fait de la directive européenne. Et comme, en général, je suis quelqu'un de sage, je le croyais. Or, entre-temps est intervenue l'élection présidentielle, où l'un des candidats, l'éminent président sortant -, s'est permis, tout au long de sa campagne, de faire croire aux restaurateurs que cette directive n'avait pas de raison d'être. Il a promis par écrit et oralement que, s'il était élu, le taux de TVA sur la restauration serait baissé à 5,5 %. Or, aujourd'hui, monsieur le ministre, membre du Gouvernement de ce Président de la République, vous dites que c'est impossible. Par conséquent, je ne comprends pas ! Comment se fait-il qu'un Président de la République puisse se tromper de manière aussi grave et faire des promesses qu'il ne peut pas tenir ? Peut-être suis-je naïf, mais, pour ma part, je pense qu'un homme politique, quelle que soit sa position, ne doit jamais promettre ce qu'il ne peut pas tenir !
Par ailleurs, monsieur le ministre, quel est le coût réel de cette mesure ? Les ministres qui vous ont précédé ont cité des chiffres annuels faramineux. Or M. Badré, qui est très compétent en la matière puisqu'il est le rapporteur spécial du budget des affaires européennes, a parlé de 1 milliard d'euros. Ce n'est pas du tout le chiffre qui est annoncé ! Qu'en est-il exactement ?
Enfin, monsieur le ministre, il faudrait arrêter de dire - vous ou votre majorité - que c'était plus facile avant : vous êtes au pouvoir, mais vous n'avez pas les moyens d'agir !
M. Jean Chérioux. C'est vrai !
M. Bernard Angels. C'est un problème de choix.
Ou alors, cela signifie que, lorsque vous arrivez au pouvoir, c'est la poisse, et les caisses se vident.
M. Jean Chérioux. C'est vous qui les avez vidées avant !
M. Bernard Angels. Combien coûte la baisse de l'impôt sur le revenu ? Vous avez fait le choix politique d'accorder cette baisse d'impôt, qui ne concerne qu'une faible partie de la population - celle qui est très nantie -, alors que vous auriez très bien pu procéder à une baisse ciblée de la TVA sur la restauration. Tout le reste n'est que mensonge ! Vous êtes majoritaires ! Vous faites des choix ! Vous serez jugés sur les résultats dans quelques années, comme nous l'avons été nous-mêmes !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je souhaite reprendre la parole après avoir entendu notre collègue Bernard Angels. Je suis en effet assez surpris de la manière dont il pose la question et du registre qu'il utilise.
Alain Lambert nous a indiqué, voilà quelques instants, que la demande officielle déposée auprès de la Commission l'a été par le gouvernement auquel il appartient. Il a rappelé toutes les démarches qui ont été effectuées en vue de sensibiliser nos partenaires, de convaincre la Commission et de conduire la négociation dans de bonnes conditions.
Que je sache, ce n'est pas M. Lionel Jospin qui a reçu M. Romano Prodi à Matignon pour parler du taux de TVA applicable à la restauration ! Il s'agit là de faits et non pas de promesse !
M. Christian Demuynck. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. La façon dont M. Angels s'en est pris au chef de l'Etat me semble tout à fait déplacée (M. Bernard Angels s'exclame), puisque, depuis la mise en place du Gouvernement, qui a toute sa confiance, des actes concrets ont été accomplis en vue du déblocage de la situation. Il ne s'agit ni de promesses ni de lettre envoyée à une corporation : c'est la réalité des démarches effectuées par la France pour aboutir à un traitement convenable de ce problème.
Je trouve « un peu fort de café », pardonnez-moi l'expression, que ceux qui, au cours des années passées, ont, par solidarité politique, soutenu un gouvernement qui n'en a pas fait autant, s'étonnent que l'on n'aille pas assez vite ! (Marques d'approbation sur les travées du RPR.) Permettez-moi de le dire avec toute la modération qui est la mienne dans ce débat.
Par ailleurs, mes chers collègues, voilà quelques années - cela a été rappelé par plusieurs d'entre nous -, il y avait des choix à effectuer. Il eût été possible de pousser le dossier de la restauration et, consciemment, cela n'a pas été fait. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Alors, cher collègue, compte tenu des bonnes relations que sont les nôtres et des débats très francs que nous avons, de grâce, pas vous, et pas cela !
M. Christian Demuynck. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je dirai tout d'abord à Denis Badré que, s'agissant de signal concret à donner aux professionnels, nous recevons ceux-ci très régulièrement. J'ai moi-même reçu longuement M. Daguin et nous avons parlé de la meilleure tactique à mettre en oeuvre pour atteindre l'objectif fixé. La profession sait donc parfaitement que le gouvernement français considère comme moins habile le vote d'un texte par le Parlement avant la négociation. Cette question a été évoquée directement avec les professionnels, et très longuement, je peux vous en assurer !
Je souhaite maintenant répondre à Bernard Angels de la manière la plus honnête possible. Vous disiez, monsieur le sénateur, qu'au moment des élections présidentielles le cheminement administratif était connu. Tout à fait ! Simplement, la détermination d'aboutir était totale et le choix fiscal était fait. Il ne s'agit pas de s'adresser des reproches, mais il est incontestable qu'un rendez-vous a eu lieu en 1999 : alors que cette mesure aurait pu être insérée dans le cadre de la directive sur les services à forte intensité de main-d'oeuvre, ce choix fiscal n'a pas été effectué ! Je ne porte pas de jugement !
La volonté du présent gouvernement, à la suite de l'engagement du Président de la République, est de faire ce choix maintenant. Il va de soi que cette disposition se substituera à d'autres mesures fiscales. C'est ainsi : il faut faire des choix ! Il ne me paraît pas utile de nous reprocher soit des déclarations, soit des positions. Ce qu'il faut, c'est aboutir ! En tout cas, je vous demande d'aider le Gouvernement à y parvenir, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez. Ainsi, vous rendrez service à la France - si vous n'avez pas spontanément envie de rendre service au Gouvernement, ce qui peut se comprendre dans certains cas -, et vous rendrez service au secteur de la restauration en permettant au Gouvernement de mener la négociation à son terme dans les meilleures conditions possibles.
Cela me conduit à solliciter, une dernière fois, le retrait de ces amendements.
S'agissant de l'estimation du coût de la mesure, je propose qu'elle soit effectuée de manière contradictoire.
Je suis désolé de ne pas pouvoir confirmer le chiffre qui a été donné tout à l'heure par M. Badré. (M. Denis Badré s'exclame.) A un moment donné, lorsqu'il s'agit de mathématiques, il ne doit y avoir qu'un chiffre. Par conséquent, utilisons des procédures pour faire en sorte que ce chiffre-là soit incontestable.
Je regrette qu'à l'heure où je vous parle, et après tant de mois, quelle que soit la bonne volonté commune, nous ne soyons pas en état d'avancer un chiffre qui soit incontestable. Eh bien ! prenons les moyens pour qu'il le devienne ! Monsieur le rapporteur général, je suis à votre disposition pour que nous puissions ensemble donner à la représentation nationale un chiffre qui sera incontestable.
A l'heure où je vous parle, selon les calculs qui ont été faits - ils sont peut-être erronés, mais, pour ma part, je ne donnerai pas, pour faire plaisir, un autre chiffre que celui qui m'a été communiqué conjointement par la direction de la législation fiscale et par la direction de la prévision - le chiffre est de trois milliards d'euros.
Je vous livre l'information dont je dispose. Si ce chiffre est faux, je ferai amende honorable et je viendrai devant vous pour vous donner des explications. En tout état de cause, nous allons, avec M. le rapporteur général, adopter la méthode pour parvenir à un chiffre incontestable, car on ne peut pas travailler dans de telles conditions.
M. Christian Demuynck. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est la bonne méthode !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Personnellement, je viens de prendre un engagement solennel devant vous, et je le tiendrai. Cela étant, si vous voulez vraiment me faire plaisir - mais je sais que votre vote en conscience ira au-delà de votre volonté de me faire plaisir -, je continue de solliciter le retrait des amendements.
M. le président. Après avoir entendu M. le rapporteur général et M. le ministre, maintenez-vous l'amendement n° I-68, monsieur Miquel ?
M. Gérard Miquel. Monsieur le ministre, même si nous avons envie de vous faire plaisir, un argument avancé par M. Badré nous conforte dans notre volonté de maintenir l'amendement.
Nous comprenons tous ici les contraintes européennes qui nous lient, mais les professionnels, eux, ne les comprennent pas. Ils sont très nombreux dans mon département à m'interroger chaque fois que je les rencontre : on nous a promis la baisse de la TVA, mais elle n'arrive pas !
C'est donc pour leur donner un signe fort que je propose le maintien de cet amendement. Je ne crois pas qu'il soit de nature à gêner le Gouvernement dans ses négociations à Bruxelles : au contraire, cela ne pourrait que le conforter.
M. Alain Lambert, ministre délégué. Permettez que ce soit à moi d'en juger ! Et cela me gêne !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le rôle d'un élu est de dire la vérité !
M. le président. Madame Beaudeau, l'amendement n° I-168 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous semblons être tous d'accord, mais ce n'est pas la première fois : je me souviens de plusieurs discussions budgétaires où tous les groupes parlementaires du Sénat avaient déposé un amendement tendant à la baisse de la TVA. Ce qui nous différencie, ce soir, c'est le meilleur moyen pour y parvenir.
Je vous rappelle, monsieur le ministre, que les restaurateurs avaient défilé dans la rue pour obtenir cette baisse de TVA. Mon collègue Gérard Miquel vient de le dire : ils ne croient pas du tout que ce soient les contraintes européennes qui nous empêchent de voter cet amendement. Par conséquent, nous le maintenons.
Contrairement à ce que vous pensez, monsieur le ministre, si le Sénat votait ce soir cette mesure, ce geste soutiendrait encore plus le Gouvernement et lui permettrait de mener la négociation à son terme, afin d'obtenir cette baisse de TVA. Pour reprendre ce que vous avez dit tout à l'heure, ce serait le meilleur service à rendre à la France.
M. le président. La parole est à M. Jacques Oudin, contre l'amendement n° I-68.
M. Jacques Oudin. Depuis plusieurs années, je me bats pour que le taux de cette TVA diminue, car nous nous trouvons dans une situation paradoxale : première destination gastronomique mondiale, première destination touristique mondiale, la France a l'un des taux de TVA les plus élevés. Cette situation est incompréhensible et inacceptable.
Tout à l'heure, M. le président de la commission des finances citait un exemple que j'avait déjà pris, celui de la TVA dans le TGV : que le taux de TVA soit de 5,5 % ou de 19,6 %, le consommateur paie le même prix. Je suppose qu'un arrangement doit permettre à la SNCF ou aux prestataires de service de payer aux environs de 12 % ! Mais peu importe.
Nous savons que nous sommes tous favorables à un ajustement de la TVA. Mais nous savons également que le Gouvernement a pris les contacts nécessaires avec les instances bruxelloises pour engager une négociation.
J'ai été convaincu par les arguments du rapporteur général et du ministre du budget sur le fait qu'il était préférable de soutenir le Gouvernement dans cette négociation plutôt que de lui créer des difficultés.
En dépit du combat que nous avons mené au cours des dernières années, cette avancée ne pourra avoir lieu qu'en soutenant le Gouvernement et non pas en lui mettant des bâtons dans les roues.
Je suis donc non pas contre les mesures proposées par les deux amendements restant en discussion, mais contre la stratégie qui est suggérée. Par conséquent, je vous propose, mes chers collègues, de ne pas adopter ces deux amendements.
Cela peut paraître paradoxal, mais je lance un appel aux professionnels pour qu'ils comprennent bien le sens de la démarche qui est la nôtre : il s'agit d'aider le Gouvernement dans une action difficile. Il est vrai que les Allemands ou les autres pays européens n'ont peut-être pas le même souci que nous de soutenir ce gouvernement ! Nous ne pouvons cependant pas continuer à appliquer un taux de TVA qui est parmi les plus élevés d'Europe ! Pour l'instant, la Commission est un peu arc-boutée sur cette annexe qu'elle ne veut pas modifier ; Denis Badré nous l'a expliqué de façon fort pertinente.
Par conséquent, mes chers collègues, nous devons, en conscience, voter contre ces amendement, mais pour le succès de la baisse de la TVA. Cela peut paraître paradoxal, mais les choses sont parfois un peu compliquées.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Roland du Luart, pour explication de vote.
M. Roland du Luart. J'ai écouté attentivement les uns et les autres développer leur position. J'ai d'abord été assez sensible aux arguments de Denis Badré s'agissant de la tactique à suivre, et j'espérais que notre assemblée voterait ces mesures à l'unanimité. Puis j'ai écouté les explications de M. le ministre, qui a demandé le retrait des amendements.
Finalement, ce qui compte, c'est le résultat ! Nous mandatons donc le Gouvernement pour obtenir, dès 2003, un résultat qui corresponde à l'engagement du Président de la République, à l'engagement de l'ensemble de la majorité devant les Français. Nous faisons confiance au Gouvernement ! Mais si, par malheur, nous n'aboutissions pas à un résultat au cours de l'année 2003, notre position serait différente l'année prochaine. Nous ne pourrions pas, en effet, tromper les gens à qui nous avons promis d'obtenir une avancée sur ce sujet. Nous savons que c'est très difficile pour le Gouvernement. Mais, puisqu'il nous demande d'avoir recours à cette tactique, eh bien ! je me rallie à cette position et je voterai contre l'amendement n° I-68.
M. le président. La parole est à M. Paul Loridant, pour explication de vote. M. Paul Loridant. J'ai suivi avec attention le débat relatif à l'abaissement du taux de la TVA pour la restauration. Vous me permettrez de rappeler que le candidat qui a été élu à la présidence de la République l'avait promis ! D'ailleurs, il n'était pas le seul, puisque le candidat que je soutenais s'était également engagé à le faire.
Vous nous expliquez, monsieur le ministre, que les démarches sont engagées. Dont acte ! Cela signifie que le dossier a mûri et qu'aujourd'hui tout le monde va dans le même sens. Cependant, vous me permettrez d'être en désaccord avec vous d'un point de vue tactique. Ou alors, vous finassez trop !
Si vous le voulez, vous pouvez arguer du fait que vous avez le soutien du Parlement. C'est limpide ! Vous nous objectez que le vote de ces amendements va compliquer votre tâche lors des négocations. Au contraire ! Si le peuple souverain, que nous représentons, demande l'abaissement du taux de la TVA, vous vous présenterez devant les commissaires européens, qui, eux, n'ont pas la légitimité du suffrage universel,...
M. Alain Lambert, ministre délégué. Ce n'est pas la Commission européenne, c'est le Conseil !
M. Paul Loridant. ... ou devant les membres du Conseil, en leur disant que c'est le Parlement qui demande l'abaissement du taux de la TVA ! Que puis-je vous dire de plus ?
Les parlementaires représentent le peuple souverain, qui les a élus pour voter la loi. Eh bien ! Nous la votons et, en adoptant cet amendement, nous vous soutenons, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Je serai bref. Si l'on soutient le Gouvernement, il faut lui laisser le choix des armes. Il a peut-être tort de ne pas vouloir être lié par nos votes, mais faisons-lui confiance, puisque c'est lui qui est à la table des négociations.
M. Roland du Luart. C'est le bon sens !
M. Yann Gaillard. Par conséquent, j'émettrai le même vote que mes amis Roland du Luart et Jacques Oudin.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-68.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-168.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-127, présenté par MM. Oudin et Ostermann, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a de l'article 279 du code général des impôts est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé : "à la fourniture du logement et aux trois quarts du prix de pension ou de demi-pension dans les croisières fluviales".
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jacques Oudin.
M. Jacques Oudin. J'ai quelques scrupules à présenter cet amendement. (Sourires.)
Les prestations relatives à la fourniture de logements dans des meublés ou des établissements d'hébergement, dans des maisons de retraite ou, dans certaines conditions, dans des campings bénéficient d'un taux de TVA réduit à 5,5 %.
Alors que les croisières fluviales constituent une forme de tourisme populaire tout à fait essentielle tant par la qualité des prestations qu'elles offrent que par leur rôle économique pour les bassins concernés, il apparaîtrait souhaitable de faire bénéficier ces croisières d'un taux de TVA réduit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement ne laisse pas la commission indifférente. Il convient de rappeler le régime de TVA qui s'applique à cette profession : pour les prestations de transport, c'est le taux réduit ; pour le reste des prestations, logement et restauration, c'est le taux normal. Ce régime a été décrit dans une réponse ministérielle du 29 mai 2000 à M. Demange, député de la Moselle.
Les professionnels concernés pratiquaient différemment jusqu'à cette réponse ministérielle : ils appliquaient le taux réduit non seulement sur les prestations de transport, mais aussi sur les trois quarts des prestations de pension, de logement et de restauration.
Le passage brutal, en 2000 - auquel veille, semble-t-il, le contrôle fiscal -, du régime appliqué de façon coutumière, en quelque sorte, au régime défini par la réponse ministérielle change la donne économique pour les organisateurs de croisières fluviales, ce qui est d'autant plus regrettable que ce petit secteur connaît une forte croissance depuis dix ans et que ses perspectives semblent bonnes. Or une vague de redressements fiscaux significative est actuellement en cours ou vient d'avoir lieu, nous a-t-on dit.
Enfin, la commission souligne, après avoir procédé à des comparaisons à l'échelon international, que les croisières fluviales sont imposées à 6 % en Hollande et à 5,5 % en Belgique et en Allemagne. Pourtant, lorsqu'on navigue sur le Rhin, pour ne prendre que cet exemple, on passe d'un pays à l'autre.
M. Joseph Ostermann. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il semble donc que la préoccupation de nos collègues MM. Jacques Oudin et Joseph Ostermann soit frappée au coin du bon sens. Aussi la commission souhaiterait-elle entendre l'avis du Gouvernement sur cette question.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. M. Jacques Oudin a attiré mon attention sur les contrôles opérés par l'administration auprès des organisateurs de croisières fluviales. Je veux vous dire, cher ami, que j'ai à coeur de régler ce problème.
Je viens de demander à mes services de contacter les professionnels afin de faire le point sur toutes les prestations qui sont offertes et de définir avec eux un régime simple et clair, qui ne donne plus lieu aux difficultés d'application rencontrées aujourd'hui.
Ce dossier devrait aboutir dans des délais très rapprochés. Je vous consulterai afin que vous puissiez me confirmer qu'aucune difficulté ne subsiste à l'issue de ces concertations. De deux choses l'une : soit le fruit de ces consultations nécessite une modification législative, et je proposerai que nous le traduisions dans la loi, soit il suffira de prendre une disposition réglementaire permettant d'aboutir à une doctrine d'application stable, donnant satisfaction aux professionnels concernés.
Je vous propose de mener à bien ce travail, afin que la traduction en droit se fasse dans les meilleures conditions de sécurité fiscale. Telle est la solution, pratique et efficace, que je préconise.
M. le président. Monsieur Oudin, l'amendement n° I-127 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin. Monsieur le ministre, nous sommes, il est vrai, dans le cas de la bûche de plus ou moins 1,20 mètre... Cet exemple restera dans les annales du Sénat !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Même si c'est une bûche en chocolat ! (Sourires.)
M. Denis Badré. A consommer sur place ! (Nouveaux sourires.)
M. Jacques Oudin. Les trois quarts d'une prestation taxée à un taux et le reste à un autre... Monsieur le ministre, nous pouvons en tirer quelques enseignements, le premier étant qu'il faudrait entreprendre un toilettage de la TVA.
M. Denis Badré. C'était l'intérêt de mon rapport !
M. Jacques Oudin. Nous ne pouvons pas maintenir des caractéristiques de cette nature, qui donnent d'ailleurs lieu à des interprétations divergentes et à des contrôles incompréhensibles pour les assujettis.
Je voudrais souligner que les croisières fluviales sont organisées dans des provinces françaises qui ne sont guère fortunées, je pense par exemple à la Bourgogne, à la Bretagne ou au Sud-Ouest.
Nous devons faire un effort par rapport aux pays européens où le réseau fluvial est plus développé et dont l'attractivité financière est meilleure.
Les croisières fluviales sont un atout pour la dynamisation de notre milieu rural. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour aboutir très prochainement à des résultats intéressants.
M. Alain Lambert, ministre délégué. J'espère que ce sera le cas avant la fin de l'année !
M. Jacques Oudin. Monsieur le ministre, en raison de vos engagements et de la confiance que nous vous témoignons, je retire l'amendement. Je souhaite toutefois que vous ne perdiez pas de vue l'intérêt du petit secteur des croisières fluviales pour la dynamisation du secteur rural.
M. le président. L'amendement n° I-127 est retiré.
L'amendement n° I-161, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le a quinquies de l'article 279 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les locaux appartenant à des établissements publics de santé. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Actuellement, s'agissant, d'une part, des travaux d'équipement et de modernisation de locaux appartenant à des établissements publics de santé et, d'autre part, de la construction d'un nouvel établissement hospitalier, le taux de TVA est fixé à 19,6 %, et cette TVA n'est pas récupérable.
Seules les maisons de santé bénéficient de la TVA au taux de 5,5 %. Pourtant, les établissements de santé sont confrontés à des difficultés que tout le monde connaît. En Ile-de-France, région que je connais le mieux, ces derniers enregistrent pratiquement tous un déficit.
De l'avis de tous les directeurs d'établissement hospitalier qui ont réuni leur conseil d'administration, comme cela a été dit par mes collègues lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, il aurait fallu prévoir une dotation spéciale de 6 % ou 7 % afin de stopper l'aggravation des déficits. Or la dotation prévue n'est que de 5 % ; les déficits vont donc s'aggraver.
Le budget d'un hôpital, ce sont d'abord, bien entendu, des dépenses de fonctionnement, dont 70 % de frais de personnels, des médicaments ; mais ce sont aussi des travaux liés à la modernisation, à l'adaptation des locaux ou à la création de nouveaux équipements. Nombre d'hôpitaux sont vétustes et les appels d'offre sont, vous le savez, trop souvent infructueux.
L'application d'un taux réduit de TVA aiderait de façon efficace à régler certaines dépenses et comblerait en partie l'insuffisance de crédits et de dotations pour 2003.
Je vous donnerai un exemple : l'union régionale hospitalière d'Ile-de-France, qui se réunit après-demain sous la présidence de notre collègue Gérard Larcher, aura à décider d'actions importantes concernant le fonctionnement des établissements hospitaliers pour 2003. Je ne doute pas que notre collègue serait bien accueilli s'il pouvait annoncer le vote par le Sénat de la mesure qui est prévue par notre amendement.
M. Jean Arthuis, président de la commission. C'est sûr !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous l'aurez compris, le refus que vous pourriez opposer à notre amendement serait, en revanche, très mal perçu. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaite, bien entendu, que le président de la fédération hospitalière de France rencontre un très grand succès auprès de ses mandants.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je n'en doute pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général. De ce point de vue, elle partage totalement l'inspiration de Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cela ne suffit pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cependant, il faut bien se référer au droit communautaire. Celui-ci permet d'appliquer le taux réduit aux travaux réalisés non seulement dans les logements privés, mais aussi, par extension, dans les établissements d'hébergement tels que les maisons de retraite, les établissements de convalescence, les établissements de vie pour personnes handicapées ou les lieux de vie des congrégations religieuses, en d'autres termes les couvents.
Toutefois, les établissements de santé, lorsqu'ils ne sont pas à titre essentiel des établissements d'hébergement de longue durée, ne peuvent pas, au regard du droit communautaire, bénéficier du taux réduit.
Pour cette raison, la commission souhaite le retrait de cet amendement, sans même insister sur le caractère inacceptable du gage qui est prévu pour cette mesure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Madame Beaudeau, vous avez insisté pour que nous soyons sensibles à votre demande. Nous vous écoutons toujours avec grand intérêt, mais vous devez reconnaître que nous avons besoin d'un accord - qui est d'ailleurs en passe d'aboutir -, pour confirmer l'application du taux réduit de TVA aux travaux portant sur les logements.
Tout le monde est satisfait de cette disposition. Nous sommes en cours de discussion et nous sommes tout à fait confiants dans le succès de la consolidation de cette mesure. Rien ne serait plus dangereux, pour rendre cette baisse définitive, que de chercher à en étendre l'application à des travaux qui n'y figurent pas encore.
Mais, chaque chose en son temps, prenons garde à ne pas charger la barque au risque de faire échouer nos négociations.
Telles sont les raisons qui me conduisent, madame Beaudeau, à vous demander de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, je serais contraint d'émettre un avis défavorable.
M. le président. Madame Beaudeau, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-161.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-69, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le b decies de l'article 279 du code général des impôts, les mots : "les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité et de gaz combustible" sont remplacés par les mots : "les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité, de gaz combustible et d'énergie calorifique". »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-162 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorifique distribuées par réseaux publics, alimentés par la géothermie et la cogénération. »
« II. - Le prélèvement libératoire prévu à l'article 220 A du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° I-69.
M. Gérard Miquel. La loi de finances pour 2000 a permis d'appliquer le taux réduit de TVA aux abonnements aux réseaux d'électricité et de gaz des clients domestiques - M. le ministre vient de confirmer sa volonté de maintenir ce dispositif - mais pas aux abonnements aux réseaux de chaleur, c'est-à-dire aux réseaux de distribution publique d'énergie calorifique qui, de ce fait, se trouvent pénalisés par rapport aux autres modes de chauffage.
Cette situation a des conséquences socialement regrettables, car les utilisateurs de réseaux de chaleur habitent principalement dans les quartiers de grand habitat collectif, équipés d'un réseau de chauffage organisé autour d'une chaufferie centrale, en général polyvalente, l'eau chaude étant distribuée jusqu'aux immeubles par un réseau de canalisations. Ces réseaux desservent pourtant trois millions de personnes, particulièrement dans l'habitat social, dans près de quatre cents villes françaises.
Cette situation a également des conséquences regrettables du point de vue de la protection de l'environnement, car les réseaux de chaleur sont des vecteurs d'énergie peu émetteurs de polluants chimiques et de gaz à effet de serre, comme telles que les énergies produites par le bois, la géothermie, les déchets ou la cogénération. Ces réseaux de chaleur sont donc d'excellents moyens de développer les énergies renouvelables, et d'utiliser rationnellement l'énergie.
La directive européenne 92/77 ne prévoit la possibilité d'adopter le taux réduit de TVA que pour l'électricité et le gaz. Cette limitation n'ayant pas de justification, la France en a déjà demandé la modification afin d'étendre cette possibilité à la chaleur.
Le processus d'harmonisation du dispositif pouvant durer plusieurs années et la France étant le seul pays de l'Union européenne à appliquer des taux différents aux réseaux de distribution d'énergie, l'amendement que nous présentons vise à anticiper la modification attendue, d'autant qu'il semble que la commission européenne souhaite aujourd'hui qu'un taux unique s'applique à un même bien, en l'occurrence la production d'énergie.
Monsieur le ministre, le Gouvernement souhaite, semble-t-il, promouvoir les énergies renouvelables. En donnant un avis favorable à cet amendement, vous corrigeriez une injustice fiscale pénalisante pour tous les projets de réseaux de chaleur qui sont conçus pour utiliser lesdites énergies renouvelables.
Le particulier qui se chauffe individuellement au bois acquitte une TVA de 5,5 % ; celui qui est desservi par un réseau de chaleur au bois paie une TVA de 19,6 %. C'est une injustice que vous devons corriger.
C'est la raison pour laquelle je vous engage, mes chers collègues, à voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Paul Loridant, pour présenter l'amendement n° I-162 rectifié.
M. Paul Loridant. Notre amendement procède de la même inspiration que celui qui est présenté par notre collègue Gérard Miquel.
Il vise à assujettir les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorifique distribuée par des réseaux alimentés par la géothermie, la cogénération ou, plus simplement, par les réseaux de chaleur au taux réduit de TVA.
Cette proposition, qui est une mesure de justice fiscale, avait été présentée l'année dernière. Je rappelle que, dans sa grande sagesse, le Sénat l'avait adoptée, contre l'avis du Gouvernement. La Haute Assemblée avait estimé, à juste titre, qu'il s'agissait de rectifier une anomalie, l'abonnement au réseau de chaleur ne bénéficiant pas du taux réduit de TVA à la suite, m'a-t-on confirmé, d'un oubli de la part de la Commission et non pas d'une volonté d'écarter cette forme d'énergie distribuée dans les appartements, notamment dans les grands ensembles.
Je vous rappelle que les sites de géothermie permettent d'absorber l'énergie du sous-sol, ce qui permet de préserver l'environnement. Quant à la cogénération, elle est la forme la plus avancée de production d'énergie dans les meilleures conditions, puisqu'elles permet de produire à la fois de la chaleur et de l'électricité. Lorsque la cogénération provient du gaz, elle permet en outre de réduire l'incidence sur l'effet de serre.
De surcroît, nous évitons les désagréments provoqués par les camions de livraison de fioul lourd destiné aux cuves des chaufferies des grands ensembles.
En résumé, il nous semble que cette mesure va dans le bons sens. Monsieur le ministre, vous ne pourrez pas nous enjoindre une fois de plus de ne pas voter cet amendement au motif qu'il traite d'un point que vous n'avez pas encore négocié ! A notre connaissance, le dossier a été déposé. Par conséquent, monsieur le ministre, acceptez que nous vous aidions ; vous pourrez invoquer à la fois le vote de l'an passé et le vote de cette année, avec votre accord.
Mes ches collègues, par souci de cohérence et en vue d'aider le Gouvernement, je vous adjure de voter notre amendement qui tend à imposer au taux réduit de TVA les abonnements aux réseaux de chaleur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'an dernier, nous avons en effet eu de longs échanges sur les taux de TVA et examiné, les unes après les autres, toutes les demandes émanant de secteurs d'activité qui désiraient bénéficier du taux réduit. Au demeurant, quand on fait la liste des produits et des services concernés, on se demande parfois s'il en existe qui ne soient pas appelés à passer, un jour ou l'autre, au taux réduit.
M. Yves Fréville. Voilà !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si l'on raisonne sur l'ensemble des activités, des prestations, des biens et des services pour lesquels on demande, à chaque fois avec de bons arguments, qu'ils soient soumis au taux réduit, on en arrive à s'interroger sur le devenir de nos finances publiques et sur la couverture des charges de l'Etat !
Par ailleurs, quand j'entends certains de nos collègues contester les raisonnements tenus en faveur de la réduction des prélèvements obligatoires, affirmer qu'il ne faut pas toucher aux services publics et que chaque euro dépensé par une administration est indispensable, etc., tout en multipliant les demandes visant à diminuer le rendement de l'impôt qui est globalement le plus productif pour le budget de l'Etat,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Justement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... je me pose quelques questions sur la cohérence de leur démarche !
En matière de cohérence, je dois reconnaître que le Sénat avait voté l'an dernier une disposition identique à celle qui est présentée par les auteurs des deux amendements en discussion. D'ailleurs, le compte rendu de nos débats de l'époque en fait effectivement foi, monsieur Loridant.
Cependant, depuis lors, la situation des finances publiques s'est considérablement tendue, l'audit MM. Nasse et Bonnet a dévoilé de mauvaises surprises, le premier semestre de 2002 a vu le déficit s'alourdir de 15 milliards d'euros supplémentaires, l'avalanche des promesses électorales faites par l'ancien gouvernement s'est traduite par toutes sortes de dépenses que nous avons les plus grandes peines du monde à assumer. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Tous ces faits nouveaux peuvent nous conduire à réviser certaines des appréciations qui, très honnêtement, dans le souci du bien commun, avaient pu être portées à la fin de l'année 2001 ! (Mme Marie-Claude Beaudeau s'exclame.)
Je vois que mon argumentation convainc ceux de nos collègues qui siègent du côté gauche de l'hémicycle ! (Sourires.) Peut-on sérieusement vouloir la baisse du taux de la TVA pour tous les biens et services ? Toute une série de secteurs d'activité ont été évoqués, notamment la restauration, et M. le ministre, très honnêtement, s'en est remis à une réflexion commune pour mieux évaluer les pertes de recettes fiscales à attendre. Est-il responsable de continuer à vendre de l'espoir à un certain nombre de professionnels ou d'usagers des différents secteurs que nous passons en revue, péniblement, amendement après amendement, quand on connaît la situation actuelle des finances publiques ?
M. Gérard Miquel. On baisse les impôts !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Toutes les demandes de réduction du taux de la TVA apparaissent-elles responsables, quand on les ajoute les unes aux autres et que l'on mesure l'ordre de grandeur des pertes de recettes fiscales qui pourraient en résulter ?
Enfin, comme vous l'avez d'ailleurs reconnu, mes chers collègues, la mesure relative aux réseaux de chaleur que vous présentez n'est pas compatible avec le droit communautaire actuel. Il n'est donc pas envisageable d'adopter un amendement de cette nature dès cette année, ce qui, sans doute, n'insulte pas l'avenir, parce que nous croyons tous au retour de la croissance, d'une croissance vigoureuse qui permettra de dégager des marges et de poser de vraies questions sur le devenir de notre système fiscal et de nos finances publiques. Mais, dans l'immédiat, mes chers collègues, il conviendrait vraiment que vous retiriez vos amendements, car ils ne sont pas opportuns.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. L'envolée lyrique de Paul Loridant affirmant qu'il voulait m'aider était émouvante. (Sourires.) Je tiens à le remercier et à lui dire qu'une bonne manière de m'aider serait de retirer son amendement !
En effet, le droit communautaire ne permet pas, actuellement, l'application du taux réduit de la TVA aux prestations visées par celui-ci, quelle que soit la source d'énergie en jeu, alors que la fourniture d'électricité et de gaz peut y être assujettie. Le Gouvernement s'attache à promouvoir à l'échelon communautaire une réflexion sur la nécessité d'une plus grande cohérence dans ce domaine, et je pense qu'il faut lui faire confiance.
Par conséquent, si les deux amendements n'étaient pas retirés, je serais dans l'obligation d'émettre un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote sur l'amendement n° I-69.
M. Yves Fréville. Je n'ai jamais proposé d'abaisser un taux de TVA. En effet, je pense que la solution à tous nos problèmes serait d'instaurer un taux unique de TVA, et je n'ai jamais trouvé de critère permettant de décider si une activité doit être assujettie au taux de 19,6 % ou au taux de 5,5 %.
Par ailleurs, on affirme que la TVA présente, dans certains cas, un effet redistributif en faveur des bas revenus, or cela est faux. On dit aussi, parfois, qu'elle aurait une incidence écologique, qu'il convient de favoriser les activités à forte intensité de main-d'oeuvre... Bref, on trouvera toujours des arguments pour justifier la demande que l'on avance !
Dans le cas particulier qui nous occupe, étant donné ce que je viens de dire sur un plan général, il faudrait tout de même faire preuve de cohérence. Il est effectivement très difficile d'expliquer à nos concitoyens que, dans certains cas, les abonnements à une source d'énergie sont soumis à un taux de TVA de 19,6 % et que, dans d'autres cas, le taux de TVA est de 5,5 %, d'autant que, par exemple, un tiers des habitants de ma ville sont des clients captifs des réseaux d'énergie.
Cela étant dit, je ne voterai pas l'amendement n° I-69, et ce pour deux raisons : d'une part, parce que les gages sont exécrables - vous auriez pu en choisir d'autres, monsieur Loridant ! -, d'autre part, parce que je fais confiance au Gouvernement pour défendre ce dossier à Bruxelles.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Nous sommes face à un problème important.
En effet, nos concitoyens sont de plus en plus sensibles aux problèmes d'environnement, et nous souhaitons promouvoir les énergies renouvelables à chaque fois que cela se révèle possible.
Ainsi, je viens de faire réaliser, dans ma commune, un réseau de chaleur dont la chaudière est alimentée par du broyat de palettes, palettes qui étaient jusqu'à présent jetées ou déposées dans des décharges. J'ai donc demandé à mes concitoyens de cesser de se chauffer à l'électricité, alors que l'abonnement est taxé à 5,5 %, ou individuellement au bois, lui aussi taxé à 5,5 %, et je leur fais désormais payer un abonnement soumis à TVA de 19,6 %. Croyez-moi, mes chers collègues, il faut faire preuve d'une grande force de persuasion pour les amener à changer leur système de chauffage dans ces conditions !
Par conséquent, maintenir un taux élevé de TVA pour les abonnements aux réseaux de chaleur n'est pas judicieux, car nous pénalisons alors l'utilisation des énergies renouvelables que nous appelons par ailleurs de nos voeux, afin d'économiser les énergies fossiles. C'est la raison pour laquelle je maintiens l'amendement n° I - 69.
M. le président. La parole est à M. Paul Loridant, pour explication de vote.
M. Paul Loridant. Je ne reprendrai pas les arguments déjà exposés sur a défense de l'environnement, afin de me placer, conformément à l'optique privilégiée par l'Union européenne, sur le terrain de la concurrence libre et égale.
On ne peut justifier, monsieur le ministre, le fait qu'un abonnement au gaz ou à l'électricité soit soumis à un taux de TVA de 5,5 %, tandis qu'un abonnement à un réseau de chaleur, doté d'une chaufferie moderne permettant la cogénération, des économies d'énergie fossile et une réduction des émissions polluantes par rapport aux chaudières fonctionnant au fioul lourd, est assujetti au taux de 19,6 %.
Je veux bien croire que cette anomalie résulte d'un oubli des instances européennes, mais puisque la Commission européenne ne cesse de faire référence au libre marché, à la concurrence et à l'égalité qui doit régner entre les différents acteurs économiques, le taux réduit de TVA doit, à l'évidence, monsieur le ministre, être appliqué aux abonnements aux réseaux de chaleur.
Je crois savoir que le précédent gouvernement en avait formulé la demande. Je me souviens même avoir interpellé vos prédécesseurs, avant que la France ne prenne la présidence de l'Union européenne, afin qu'ils profitent de cette occasion pour faire progresser le dossier. Vous pouvez, sur ce point, vous référer au compte rendu de nos débats budgétaires de l'an passé.
La mesure que nous présentons me semble relever du bon sens, et il serait souhaitable que le Sénat, par cohérence, confirme son vote de l'année dernière : cela aiderait le Gouvernement !
M. le président. La parole est à M. Bernard Angels, pour explication de vote.
M. Bernard Angels. La réponse de M. le ministre est à mes yeux largement recevable. Je sais très bien que, même s'il partage notre opinion, il est « coincé », comme l'ont été ses prédécesseurs.
En revanche, monsieur le rapporteur général, je crois que notre débat de ce soir mérite mieux que la réponse que vous avez faite tout à l'heure. Nous savons très bien que la France ne peut aujourd'hui obtenir gain de cause, sur ce dossier, auprès des instances européennes, mais si nous insistons, c'est pour que nos ministres puissent, demain, s'appuyer sur ce qui est apparu comme une évidence dans cette assemblée. Quoi qu'il en soit, cessez de prétendre, monsieur le rapporteur général, pour justifier votre volte-face par rapport à l'année dernière, que ce qui était possible hier ne l'est plus aujourd'hui ! En effet, il aurait suffi de décider une baisse de 1 % seulement de l'impôt sur le revenu pour dégager des marges de manoeuvre et pouvoir procéder à des réductions ciblées des taux de TVA.
Il faut donc arrêter de dire tout et le contraire ! Défendez clairement la position qui est la vôtre, monsieur le rapporteur général : vous avez préféré une réduction de l'impôt sur le revenu à des baisses ciblées des taux de TVA. Cessez d'invoquer le manque de moyens car on a les moyens que l'on veut bien se donner !
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote. M. Thierry Foucaud. Tout à l'heure, M. Marini a évoqué un supposé manque de cohérence de votre part. En ce qui me concerne, je me demande si le rapporteur général est bien le même en 2002 qu'en 2001 !
Ainsi, au compte rendu de la séance du 27 novembre 2001 figure l'intervention suivante de M. Marini, s'agissant du même sujet que celui qui nous occupe aujourd'hui :
« Compte tenu de tous les arguments que nous avons entendus et de la réponse que vient de faire Mme le secrétaire d'Etat, et contrairement à ce que je préconisais tout à l'heure dans le souci de ne pas trop dégrader le solde budgétaire, j'estime que le signal souhaité par les auteurs de l'amendement pourrait être donné dès maintenant.
« A la vérité, sur ces sujets, la question est de savoir s'il faut persister à raffiner sans fin les dispositions relatives à la fiscalité locale et à complexifier sans fin les dégrèvements de taxe d'habitation, par exemple, ou s'il ne vaudrait pas mieux essayer d'apporter, par le biais d'un dispositif comme celui que nous examinons, une contrepartie à des collectivités qui se sont dotées d'équipements et de réseaux onéreux, financés par les usagers et sur fonds publics, et destinés, au moins en partie, à préserver l'environnement et à permettre un développement durable.
« Telles sont les considérations que je souhaitais énoncer à la suite de tout ce qui a été dit par nos collègues. »
Tels étaient alors vos propos, monsieur le rapporteur général. L'amendement dont il est question fut, bien entendu, finalement adopté.
J'aurais pu recourir à ce genre de référence à propos d'autres amendements qui ont été examinés ce soir, mais je souhaitais simplement souligner ici que vous employez un double langage et que vous manquez de cohérence. Très sincèrement, cela nous inquiète beaucoup pour la suite des débats.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-69.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-162 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-163, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ... Les prestations de services funéraires. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement vise à réduire le taux de la TVA affectant les prestations de services funéraires. Je me demande comment notre proposition pourrait être rejetée, étant donné le nombre d'arguments qui militent en sa faveur.
J'ai remarqué, à la lecture du compte rendu des débats à l'Assemblée nationale, que ni le rapporteur général ni vous-même, monsieur le ministre, n'avez avancé un seul argument pour rejeter une disposition similaire. Et pour cause ! Vous vous êttes contenté d'émettre un avis défavorable sur l'amendement présenté ; j'espère, monsieur le ministre, que vous vous montrerez plus inspiré devant le Sénat !
Quoi qu'il en soit, je vais maintenant développer les arguments qui fondent notre proposition.
Premièrement, les transports funéraires sont soumis au taux de TVA de 5,5 %. Pourquoi les frais d'obsèques demeurent-ils assujettis au taux de 19,6 % ? Notre amendement vise d'abord à instaurer davantage de cohérence.
Deuxièmement, les frais d'obsèques représentent de un à deux mois de salaire pour un citoyen moyen. Souvent, la soudaineté du décès ne permet pas à la famille de faire face à des dépenses importantes et imprévues. Notre amendement tend donc à plus de justice sociale.
Troisièmement, notre amendement présente un aspect moral non négligeable : faire du profit sur la mort n'est pas valorisant, et celui qui ne peut pas honorer une telle dépense en souffre.
Quatrièmement, notre amendement, s'il était adopté, nous permettrait de profiter des possibilités offertes par la réglementation européenne qui, je vous le rappelle, figurent à la fameuse annexe H de la directive européenne relative à la TVA.
Cinquièmement, notre amendement a une certaine valeur, puisque le Sénat s'était honoré, voilà deux ans, en adoptant à l'unanimité une disposition analogue à celle qu'il prévoit. Vous ne pouvez, monsieur le rapporteur général, que le reconnaître. Si ce vote n'a pas eu de suite, c'est parce que, malheureusement, l'Assemblée nationale n'a pas suivi le Sénat. Le compte rendu des débats qui se sont tenus l'an dernier au Sénat fait apparaître que vous aviez alors tenu les propos suivants, monsieur le rapporteur général : « Il s'agit d'une mesure sociale, car les dépenses importantes occasionnées sont subies par des familles qui se trouvent souvent dans des situations de grande détresse morale. »
Bien entendu, vous aviez entièrement raison, et je pense donc que vous ne pourrez pas, ce soir, rejeter notre amendement.
En effet - je le rappelle - il est moral, il présente une réponse cohérente à une situation sociale difficile et son coût est supportable, compte tenu du gage prévu, puisque l'impôt sur les sociétés a baissé ces dernières années. D'ailleurs, si vous nous proposiez de retenir un autre gage, nous serions tout disposés à rectifier notre amendement en conséquence.
Enfin, nous n'admettons pas l'argument selon lequel les opérations réalisées par les pompes funèbres seraient trop nombreuses et variées pour qu'il soit possible d'envisager une solution d'ensemble. Je pense au contraire que retenir une telle solution entraînerait une simplification à la fois pour les services funéraires, pour le Trésor public et pour les familles, qui se sentent souvent perdues.
Globalement, le coût de la présente mesure s'élèverait à quelques dizaines de millions d'euros. Reconnaissez, mes chers collègues, que son adoption permettrait une simplification et, surtout, qu'elle présente un caractère moral. C'est pourquoi je vous invite instamment à voter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mme Beaudeau, comme tout à l'heure M. Thierry Foucaud, tente de mettre la commission en contradiction avec la position qu'elle avait adoptée l'an dernier.
J'avais pourtant exposé avec soin et avec précision, me semble-t-il, les éléments objectifs et concrets qui ont changé depuis la tenue des débats que vous évoquez ce soir, madame Beaudeau : le gouvernement n'est plus le même, mais surtout la situation économique et budgétaire a évolué, et nous devons en tirer les conséquences. Vous ne m'avez sans doute pas bien écouté, pas plus que M. Thierry Foucaud, lorsque j'ai évoqué la dégradation de la situation des finances publiques et les problèmes sans nombre nés d'une gestion extrêmement hasardeuse.
Vous-même, madame Beaudeau, le répétiez ces dernières années.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je suis d'autant plus à l'aise !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous ne cessiez de mettre en garde le gouvernement de l'époque, le gouvernement de la majorité dite « plurielle », et vous ne devez pas être surprise du spectacle auquel nous assistons aujourd'hui,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il est vrai que c'est un drôle de spectacle !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... compte tenu des conséquences de cette gestion, en particulier des dérives des finances publiques, très préoccupantes, auxquelles elle a abouti.
Le raisonnement de la commission ne présente donc aucun défaut de cohérence, aucun défaut dans la cuirasse : la situation des finances publiques ne nous permet pas de faire droit à votre demande, madame Beaudeau.
Voilà deux ans, lorsque nous avons voté la mesure, c'est-à-dire à la fin de l'année 2000,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il y avait plein d'argent !
M. Philippe Marini, rapporteur général. « Plein d'argent », non, ce n'est jamais le cas, parce que les budgets sont toujours trop restreints et parce que, dans les périodes où les recettes abondent, les convoitises sont peut-être plus grandes encore !
Néanmoins, si la majorité de l'Assemblée nationale et le Gouvernement avaient eu à l'époque la volonté politique de mettre en oeuvre la mesure que vous préconisiez - et que nous préconisions avec vous -, nous n'en parlerions plus aujourd'hui parce qu'elle eût déjà été en vigueur. Malheureusement, cette occasion a été perdue et la situation objective des faits est aujourd'hui tout à fait différente.
Après vous avoir rappelé les différentes étapes de son raisonnement, la commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement I-163.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je fournirai des explications à Marie-Claude Beaudeau, qui, ayant lu le compte rendu des débats de l'Assemblée nationale, m'a trouvé trop lapidaire.
Le Gouvernement est sensible à la situations des personnes frappées par un deuil, puisqu'il ne vous aura pas échappé, madame, que nous avons relevé le niveau de déductibilité des frais funéraires pour les successions : cela montre que nous sommes, en effet, attentifs aux misères de ces familles.
Afin d'éviter une trop grande complexité, l'application du taux réduit de la TVA devrait cependant concerner l'ensemble des prestations funéraires. Or celles-ci, vous le savez, sont très diverses, le service extérieur des pompes funèbres ne comptant pas moins de huit catégories. Le coût budgétaire d'une telle mesure s'élèverait à environ 110 millions d'euros en année pleine. Bien que compatible avec le droit communautaire - puisque vous insistez sur le fait que nous ne devons pas en permanence nous réfugier derrière le droit communautaire -, elle mesure n'est donc pas envisageable dans l'immédiat.
Par conséquant, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement I-163.
M. le président. La parole est à M. Jacques Oudin, contre l'amendement.
M. Jacques Oudin. Je serai bref, monsieur le président. Nous devons, me semble-t-il, entendre les explications de M. le rapporteur général et de M. le ministre, et je formulerai deux observations.
Nous pouvons tout à fait comprendre, sur un plan humain les propos de Mme Beaudeau. En effet, plus les coûts des services funéraires seront minorés, mieux ce sera pour les familles qui, déjà, vivent une détresse morale.
Cependant, je soulignerai que le taux de la TVA n'est pas le seul responsable du coût fort élevé des services funéraires : les prestations des pompes funèbres elles-mêmes ne sont pas bon marché ! Il faudrait donc qu'un accord entre les pouvoirs publics et les services de pompes funèbres puisse intervenir sur cette question. N'oubliez pas qu'il fut un temps où existait un monopole. Or qui dit monopole dit majoration des frais, et le résultat d'un taux de TVA élevé s'appliquant à des frais élevés ne peut pas être satisfaisant, je vous le concède.
M. Roland du Luart. C'est une industrie de main-d'oeuvre !
M. Jacques Oudin. J'aimerais, chère collègue, que vous preniez note des propos de M. le ministre, qui a annoncé que le Gouvernement avait pris en considération les frais funéraires et majoré les déductions dont ils font l'objet dans les droits de succession. C'est important, car c'est un premier pas intéressant qui profite directement aux familles.
Dans ces conditions, en attente d'un accord entre les pouvoirs publics et les entreprises funéraires, nous devons adopter la solution présentée par le Gouvernement. Je propose donc de ne pas adopter l'amendement du groupe CRC.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-163.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-104, présenté par M. Oudin, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne les opérations de formation à la sécurité routière.
« II. - La perte de recette résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une augmentation des recettes prévues aux articles 575 à 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jacques Oudin.
M. Jacques Oudin. Dans la lutte contre l'insécurité routière qu'ont décidé de mener tant le Président de la République que le Gouvernement, les pouvoirs publics, associés aux professionnels concernés - au premier rang desquels les enseignants de conduite, malheureusement touchés, actuellement, par une grève -,...
M. Jean-Jacques Hyest. De toute façon, cela coûte moins cher avec les gendarmes !
M. Jacques Oudin. ... réalisent des efforts actifs à travers des actions de sensibilisation et de formation des futurs jeunes conducteurs.
Outre la modernisation des moyens de contrôle routiers engagée par la loi sur la sécurité intérieure, la prévention des risques liés à la route passe par l'éducation à la sécurité routière et par la responsabilisation soutenue de la population. A l'évidence, dans le cadre du partenariat mis en place par le Gouvernement, les enseignants de conduite tiennent un rôle majeur dans l'éducation à la sécurité routière et dans la diffusion des bonnes pratiques auprès des jeunes conducteurs.
Toutefois, compte tenu du nombre croissant de candidats et du sous-effectif des inspecteurs, ils ne disposent pas des conditions optimales - notamment en raison d'un taux de TVA non réduit pour l'activité de formation à la sécurité routière - pour dispenser une formation suffisamment valorisante aux yeux des candidats au permis de conduire.
Or il semble que les conditions d'application du taux de la TVA minoré soient toutes remplies par ce secteur d'activité et qu'une telle réduction de la TVA contribuerait efficacement à la lutte contre l'insécurité routière.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission estime que cette idée est intéressante mais que, malheureusement, elle n'est pas applicable en l'état actuel de l'annexe H de la directive « TVA », bien connue.
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est un coup de « H »(sourires) !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cependant, nous partageons totalement les intentions affichées dans cet amendement.
Peut-être M. le ministre peut-il nous en dire plus sur les chances de voir ce droit communautaire évoluer au cours des négociations qui auront bientôt lieu ?
Si nous n'avons pas d'assurances à ce sujet, il faudra malheureusement retirer l'amendement !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je n'ai pasd'assurances à donner au Sénat. J'essaie d'être sincère et loyal dans toutes mes réponses, et je suis obligé de demander à Jacques Oudin de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Oudin, l'amendement n° I-104 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin. Pour être honnête, monsieur le président, je n'ai pas très bien saisi les motivations qui poussent le Gouvernement à me demander de retirer cet amendement. La situation est complexe, je le reconnais, mais les raisons qui m'ont amené à présenter cet amendement me paraissent fondées.
Je veux bien, puisque je soutiens le Gouvernement et répondre à sa demande et retirer ma proposition, mais je ne vois pas l'issue qu'il envisage pour un secteur qui connaît, chacun le conçoit, une situation difficile du fait des grèves qui le perturbent, et je n'ai pas saisi les raisons qu'il a avancées pour refuser cet amendement.
Je le retire néanmoins par solidarité, monsieur le président, mais uniquement par solidarité !
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est dur la solidarité, monsieur Oudin !
M. le président. L'amendement n° I-104 est retiré.
L'amendement n° I-201, présenté par M. Hyest, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1° du I de l'article 298 du code général des impôts est rédigé comme suit :
« 1° Ils doivent seulement déposer une déclaration au titre de chaque année ou exercice dans les conditions fixées au 3 de l'article 287 ; »
« II. - Dans le premier alinéa du 3 de l'article 287 du code général des impôts, après les mots : "l'article 302 septies A", sont insérés les mots : "et au 1° du I de l'article 298 bis". »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement, de même que les suivants, vise non plus à baisser le taux de la TVA, mais à rapprocher le régime agricole du régime de droit commun.
Ainsi, l'amendement n° I-201 tend à réduire le nombre de traitements comptables, permettant de la sorte une simplification administrative de la comptabilité des agriculteurs ; c'est là, me semble-t-il, un objectif auquel nous devrions tous souscrire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement de simplification administrative ne devrait normalement entraîner qu'un décalage de trésorerie.
Le point délicat, en la matière, est que ce coût de trésorerie peut se traduire par un coût budgétaire. Si la loi organique relative aux lois de finances était appliquée dans toutes ses dispositions - je parle sous le contrôle de plus compétent que moi ! -, les écritures budgétaires ne devraient pas en être affectées. Mais, la mise en oeuvre de la loi n'étant que progressive, c'est toujours le statu quo ; par conséquent, pour 2003, première année d'application de la mesure, le coût en trésorerie devrait être budgété.
Tout cela est évidemment assez complexe. Sur le fond, vouloir faire coïncider la date de clôture de l'exercice comptable des agriculteurs avec la date obligatoire de déclaration annuelle de TVA, actuellement fixée au 31 décembre de l'année, semble relever du bon sens, et l'on ne peut que souscrire à cette orientation. Cependant, c'est la question du coût de la mesure, estimé pour la première année - c'est la « marche d'escalier » ! - à 53 millions d'euros selon les règles de la comptabilité budgétaire applicables, qui préoccupe la commission et la conduit à solliciter l'avis du Gouvernement, afin de vérifier s'il partage les analyses qu'elle a présentées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je préciserai d'abord à Jacques Oudin, qui n'avait pas bien saisi le sens de ma réponse sur l'amendement n° I-104, que celui-ci était contraire au droit communautaire.
Monsieur Hyest, l'amendement que vous avez présenté a pour objet de permettre aux exploitants agricoles placés sous le régime simplifié agricole de déposer une déclaration de TVA correspondant à leur exercice comptable et non à l'année civile. Cependant, la plupart des exploitants agricoles ne bénéficieraient pas de la mesure, en particulier ceux qui sont soumis au régime du bénéfice forfaitaire agricole ainsi que ceux qui ont opté pour le dépôt de déclarations trimestrielles de TVA.
Le régime simplifié agricole repose sur le principe de l'année civile, qui constitue un élément essentiel de sa simplicité. Dans ces conditions, l'adoption de votre proposition, monsieur le sénateur, rendrait le suivi des déclarations ou des obligations déclaratives plus difficiles, tant pour les redevables, qui devraient procéder à des calculs supplémentaires pour apprécier leur situation au regard de la TVA que pour l'administration.
Au demeurant, la demande de remboursement de crédit de TVA devrait être, en tout état de cause, déposée en même temps que la déclaration annuelle de TVA, que celle-ci soit établie par rapport à l'année civile ou par rapport à l'exercice comptable. De la sorte, comme le soufflait à l'instant M. le rapporteur général en conclusion de son propos, nous ne sommes pas en présence d'une véritable simplification. De surcroît, le coût de la mesure serait de 53 millions d'euros.
Je suis donc contraint de vous demander de bien vouloir retirer votre amendement, qui, encore une fois, n'apporterait pas de réelle simplification.
M. le président. Monsieur Hyest, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Hyest. Je comprends bien les arguments de M. le ministre, mais le seul qui ne me convainque pas est celui de la non-simplification. Il me convainc d'autant moins que la simplification est précisément l'objet de cet amendement !
Quant au coût, si le texte de l'amendement ne le mentionne pas, c'est que sa réalité ne me paraissait pas évidente, s'agissant uniquement d'une question de trésorerie.
Néanmoins, je persévérerai. J'étudierai mieux vos arguments, monsieur le ministre, et je déposerai peut-être le même amendement l'année prochaine !
En attendant, je le retire.
M. Alain Lambert, ministre délégué. Merci !
M. le président. L'amendement n° I-201 est retiré.
L'amendement n° I-23, présenté par MM. François, Hyest, Dubrule, P. André et Bailly, Mme Bout, MM. Bizet, Braye, de Broissia, César, Cornu, Doublet, Fournier, Ginésy, Leroy, Natali, Ostermann, Oudin, de Richemont, Rispat, Trillard et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du sixième alinéa (4°) du I de l'article 298 bis du code général des impôts est ainsi rédigée : "Toutefois, les dispositions des I et II de l'article 302 septies A ne leur sont pas applicables".
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement a sensiblement le même objet que le précédent. Il vise en effet à faire coïncider l'exercice de TVA des agriculteurs avec leur exercice comptable et à permettre le remboursement du crédit de TVA à la fin de chaque trimestre, comme cela se pratique dans le régime général.
La présente disposition tend donc à aligner le régime agricole sur le régime de droit commun. Elle aurait le double avantage de répondre aux exigences en matière de simplification administrative - mais je crains que les mêmes arguments que précédemment ne lui soient opposés ! - et de rapprocher les deux régimes de TVA.
Vous m'avez répondu tout à l'heure, monsieur le ministre, que cette disposition ne constituait pas une simplification. Mais elle existe dans le régime de droit commun, et son extension au régime agricole me paraît concevable intellectuellement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Outrela disposition qu'il a en commun avec l'amendement précédent, ce texte vise à permettre le remboursement trimestriel aux exploitants agricoles du crédit de TVA qu'ils avancent, alors qu'actuellement ce remboursement n'a lieu qu'après l'expiration de l'exercice annuel de TVA. Comme le précédent, il entraînerait donc, semble-t-il, un coût de trésorerie, lequel serait même sensiblement plus important que le précédent, ce qui me conduit à formuler une réponse analogue.
Par ailleurs, n'oublions pas que l'article 8 du présent projet de loi de finances permet déjà d'améliorer de manière significative la situation comptable des agriculteurs acquittant une TVA d'un montant inférieur à 1 000 euros, c'est-à-dire de 75 % des agriculteurs. Cette mesure, qui n'a pas été évoquée en séance publique parce qu'aucun amendement n'a été déposé à l'article 8, n'en figure pas moins dans le projet de loi de finances !
La commission salue la volonté tout à fait réelle que montre M. Hyest de simplifier la situation comptable des agriculteurs. Toutefois, compte tenu du coût de trésorerie et du coût budgétaire de la mesure, elle souhaite le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Le Gouvernement recherche la même simplification que M. Hyest. Il semble pourtant que nous ne nous comprenions pas très bien, en effet, ce qui suppose que nous approfondissions la discussion de nos points de vue.
Il est vrai que les agriculteurs soumis au régime du bénéfice forfaitaire agricole doivent effectuer leur déclaration en respectant l'échéance de l'année civile. Je ne pense pas que la disposition que vous proposez, monsieur le sénateur, leur apporte la simplification que vous souhaitez, mais je suis prêt à l'étudier, puisque nous nous sommes fixé pour objectif de faciliter et de simplifier notre fiscalité.
En tout état de cause, ce qui est incontestable, c'est le coût de la mesure, légèrement supérieur aux chiffres que j'ai annoncés tout à l'heure.
Je suis donc contraint de vous demander de bien vouloir retirer cet amendement, tout en restant à votre disposition pour étudier les moyens de simplifier ce point de notre fiscalité, car, je le répète, il s'agit là d'un objectif commun !
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Hyest ?
M. Jean-Jacques Hyest. Je retire cet amendement, d'autant que son application serait apparemment beaucoup plus coûteuse que je ne l'avais imaginé.
Quoi qu'il en soit, monsieur le rapporteur général, les agriculteurs qui paient moins de 1 000 euros de TVA et ceux qui acquittent un montant supérieur méritent le même intérêt, et le sénateur de l'Oise que vous êtes le sait fort bien ! Il ne faut pas se représenter les agriculteurs comme une catégorie unique !
M. le président. L'amendement n° I-23 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-109, présenté par M. Franchis et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 298 bis du code général des impôts est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Les assujettis placés sous le régime d'acomptes peuvent demander un remboursement trimestriel du crédit constitué par la taxe ayant grevé l'acquisition de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est au moins égal à 760 euros.
« Les remboursements sont effectués dans les conditions prévues par l'article 242 septies J à l'annexe II. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-200, présenté par M. Hyest, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 298 bis du code général des impôts est complété par un 5° rédigé comme suit :
« 5° Les assujettis placés sous le régime d'acomptes peuvent demander un remboursement trimestriel du crédit constitué par la taxe déductible ayant grevé l'acquisition de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est au moins égal à 760 euros. Les remboursements sont effectués dans les conditions prévues par l'article 242 septies J à l'annexe II du code général des impôts. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensé à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ».
La parole est à M. Yves Fréville, pour présenter l'amendement n° 109.
M. Yves Fréville. Cet amendement, qui va dans le même sens que le précédent, vise à rapprocher le régime simplifié agricole de TVA des autres régimes.
Le problème est simple, comme le soulignait M. le ministre il y a un instant : les exploitants concernés étant soumis au régime de la déclaration annuelle, s'ils réalisent un investissement important en juillet alors qu'ils ont rempli leur déclaration annuelle en mai, ils devront attendre l'année suivante pour obtenir le remboursement de leur crédit d'impôt sur cet investissement. En d'autres termes, ils feront l'avance de trésorerie nécessaire. Le problème est donc identique à celui que soulevait l'amendement précédent : il est logique que ces agriculteurs obtiennent plus rapidement, si c'est possible, le remboursement du crédit d'impôt.
L'amendement n° I-109 balise donc le champ du remboursement anticipé en le limitant aux seuls exploitants soumis au régime des acomptes et pour les investissements supérieurs à 760 euros, ce qui est une double manière de réduire le coût de trésorerie.
Je reconnais que la mesure proposée a un coût budgétaire, du moins la première année, puisque les remboursements d'impôt qui devraient avoir lieu en 2004 seraient avancés à l'année 2003. Il me paraît cependant tout à fait logique que l'Etat, qui est le débiteur, rembourse sa dette plus rapidement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour présenter l'amendement n° I-200.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement a le même objet que le précédent. J'ajouterai simplement que les entreprises commerciales et artisanales qui relèvent du régime simplifié d'imposition dans le cadre du régime général de TVA peuvent demander le remboursement trimestriel du crédit de taxe déductible ayant grevé l'acquisiton de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est au moins étal à 760 euros.
Je ne vois pas pourquoi ce que l'on a fait pour les artisans et les commerçants, on ne le ferait pas pour les agriculteurs, ou alors il faut changer le système des commerçants et artisans, qui en effet n'est pas simple. En tout cas, il y aurait un réel intérêt pour les agriculteurs à bénéficier d'un remboursement trimestriel dans la mesure où ils ont fait des investissements importants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces amendements sont d'inspiration tout à fait analogue aux précédents. Ils induisent un coût de trésorerie et donc un coût budgétaire non négligeable la première année d'application.
Dans chaque cas, les dispositifs visent à simplifier la situation administrative et comptable des agriculteurs, ce qui, bien sûr, serait positif. Seuls des arguments relatifs aux finances publiques me contraignent à sollicier le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Certes, il y a une distorsion entre la situation fiscale des agriculteurs et celle des commerçants ou artisans. Je ne vous cacherai pas, messieurs les sénateurs, que c'est une raison de coût qui motive ma réticence par rapport à votre proposition. Le coût de la mesure est en effet estimé à 812 millions d'euros, ce qui est une somme considérable.
Par ailleurs - et c'est aussi une distorsion par rapport au système fiscal des commerçants et des artisans - les exploitants agricoles peuvent opter pour le dépôt de déclarations trimestrielles lorsque, étant dans une situation créditrice au regard de la TVA, ils souhaitent obtenir un remboursement des crédits de taxe non imputables sans attendre le dépôt de leur déclaration annuelle. Toutefois, vous le savez, cette option est irrévocable, ce qui n'est pas le cas des autres régimes.
Telle est la situation que je vous décris en toute sincérité. J'ai bien entendu votre appel. Il faudra, c'est certain, aller vers une harmonisation des régimes fiscaux des différentes activités. Mais la situation budgétaire dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui ne nous permet pas d'accepter les propositions qui nous sont soumises. C'est la raison pour laquelle je vous demande, messieurs, de bien vouloir retirer vos amendements, sinon je serai obligé d'en demander le rejet.
M. le président. L'amendement n° I-109 est-il maintenu, monsieur Fréville ?
M. Yves Fréville. J'ai bien entendu les propos favorables de M. le ministre allant dans le sens de l'harmonisation des régimes fiscaux des artisans, commerçants et agriculteurs. Il faudra absolument aller dans cette direction pour l'ensemble de notre système fiscal. Même si le régime agricole peut comporter un certain nombre de spécificités, elles ne doivent pas être exagérées. Un droit commun doit s'établir pour les petites entreprises.
J'en viens au coût de 800 millions d'euros dont vous avez parlé. En fait, c'est un coût apparent. Le coût réel s'établit, lui, à 800 millions d'euros multiplié par un taux d'intérêt de 5 %, ce qui fait 40 millions. J'espère que des jours meilleurs, qu'une croissance retrouvée permettront de réparer cette injustice.
Dans cet espoir, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-109 est retiré.
L'amendement n° I-200 est-il maintenu, monsieur Hyest ?
M. Jean-Jacques Hyest. Je le retire également, mais cela me désole !
M. le président. L'amendement n° I-200 est retiré.
L'amendement n° I-39, présenté par MM. Ostermann, Besse, Bizet, Cornu, Doublet, Eckenspieller, Fournier, Gérard, Ginésy, Karoutchi, Leclerc, Peyrat, de Richemont et Schosteck, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les assujettis soumis de plein droit ou sur option au régime normal d'imposition et facturant la taxe sur la valeur ajoutée au taux réduit au titre de l'article 279-0 bis du code général des impôts peuvent demander mensuellement le remboursement du crédit de taxe déductible lorsque le montant de celui-ci est au moins égal à 763 euros.
« Les assujettis placés sous le régime d'acomptes prévu au 3 de l'article 287 du code général des impôts et facturant la taxe sur la valeur ajoutée au taux réduit au titre de l'article 279-0 bis du même code peuvent opter à tout moment pour le régime normal d'imposition et demander immédiatement le remboursement du crédit de taxe déductible lorsque le montant de celui-ci est au moins égal à 763 euros. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Depuis que la TVA au taux de 5,5 % sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans a été instaurée, les entrepreneurs paient la TVA au taux de 19,6 % sur leurs achats de matériels et de fournitures et facturent au taux de 5,5 %. Pour certains corps de métiers, ces achats représentent tous les mois un montant important. Pour eux, le montant de la TVA déductible est désormais beaucoup plus important que celui de la TVA récoltée.
Ils disposent donc d'un important crédit de TVA, dont ils ne peuvent demander le remboursement que trimestriellement lorsqu'ils sont soumis au régime normal d'imposition et qu'annuellement lorsqu'ils sont soumis au régime simplifié. Pour ces derniers, la réduction autorisée du montant des acomptes versés ne sert à rien. La trésorerie de ces entreprises est, par conséquent, souvent asséchée. Celles-ci subissent de ce fait un préjudice important.
Le présent amendement vise donc à permettre aux entrepreneurs du bâtiment de demander le remboursement mensuel du crédit de TVA dont ils disposent lorsque celui-ci atteint au moins 763 euros. Il ne s'agit que d'une mesure tout à fait normale d'accompagnement du dispositif d'instauration de la TVA au taux réduit pour certains travaux dans le logement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, qui s'applique non plus à l'agriculture mais à d'autres professions, a en vérité un objet tout à fait analogue à la série d'amendements qui vient d'être défendue.
Lors des discussions budgétaires précédentes, l'ancien gouvernement, pour repousser les suggestions déjà formulées par notre collègue Joseph Ostermann, avait invoqué des mesures en cours destinées à accélérer les procédures de remboursement, notamment la modernisation des outils informatiques, ainsi que, avait-il dit, les efforts de la direction générale des impôts.
Peut être pourrez-vous nous dire, monsieur le ministre, si, en termes de bonne administration, ces procédures de remboursement ont évolué. En tout état de cause, vos observations nous seront précieuses.
Cela dit, à l'instar des amendements précédents, celui-ci engendrerait un coût significatif en trésorerie qui se traduirait dans le budget de la première année. Ce seul élément nous conduit à suggérer à M. Osterman de retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. D'abord, les entreprises dont fait état Joseph Ostermann peuvent réaliser des travaux soumis au taux réduit de TVA pour les locaux d'habitation de plus de deux ans et au taux normal pour des constructions d'immeubles neufs. Elles ne se trouvent donc pas, de manière générale et systématique, en situation de crédit de taxes.
Ensuite, ces entreprises, qui relèvent du régime simplifié d'imposition, peuvent opter pour le régime réel normal tout en restant placées sous le régime simplifié d'imposition de leurs bénéfices - il s'agit du régime dit du « mini-réel -, ce qui leur permet de déposer des demandes de remboursement de crédits de TVA supérieurs à 760 euros, à l'issue de chaque trimestre civil, sans condition tenant à la nature des dépenses supportées.
L'instauration d'un régime dérogatoire au bénéfice des seules entreprises du bâtiment serait discriminatoire vis-à-vis des entreprises d'autres secteurs économiques, ce qui paraît très difficilement envisageable.
Dans ces conditions, je crois devoir vous demander de retirer votre amendement, monsieur Ostermann. A défaut, j'émettrais un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-39 est retiré.

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