SEANCE DU 25 NOVEMBRE 2002
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté
par l'Assemblée nationale.
Je vous rappelle que les articles et les amendements tendant à insérer des
articles additionnels relatif aux collectivités locales seront examinés demain,
mardi 26 novembre.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous poursuivons
l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après
l'article 9.
L'amendement n° I-164, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 3°
bis
de l'article 278
bis
du code général des impôts
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... gaz naturel utilisé comme combustible et consommation d'électricité dans
la limite de 5 000 kwh/an. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement vise à appliquer à la consommation domestique d'électricité et
de gaz le taux réduit de TVA.
Il s'agit d'abord, tout comme la baisse du taux normal de TVA que nous avons
réclamée, d'une mesure propre à soutenir la consommation populaire, qui
constitue, à nos yeux, une priorité pour entraîner une croissance saine,
durable et créatrice d'emplois.
Cette mesure nous paraît d'autant plus justifiée qu'électricité et gaz sont
incontestablement des produits de première nécessité.
Le coût du chauffage, notamment, pèse très lourd dans le budget des abonnés
aux revenus les plus modestes. La facture EDF d'un RMIste vivant dans un studio
chauffé à l'électricité peut représenter jusqu'à 10 % de son budget.
Je rappelle aussi que 12 % des Français renoncent au moins occasionnellement à
chauffer leur logement, faute de moyens, et que 5 % n'arrivent pas à régler
leurs factures EDF et GDF.
La loi de finances pour 1999 avait amorcé ce processus de baisse de la TVA que
nous préconisons en appliquant le taux réduit aux abonnements EDF et GDF, ce
qui représente environ, 700 millions d'euros par an. Cette disposition est
aujourd'hui attaquée par la Commission européenne, qui entend la faire annuler
au nom de l'unicité des taux pour un même type de prestations. A cette fin,
elle a saisi la Cour européenne de justice à l'encontre de notre pays.
Aussi, je vous demande, monsieur le ministre, de réaffirmer clairement le
maintien définitif de la disposition de justice sociale que constitue
l'application du taux réduit de TVA aux abonnements de gaz et d'électricité.
Je précise que l'application du taux réduits de TVA sur l'ensemble de la
consommation d'électricité fait partie des baisses de TVA déclarées «
eurocompatibles », ce qui donne la possibilité de « sortir par le haut » du
piège de Bruxelles.
Le coût de cette nouvelle mesure est estimé à 2 milliards d'euros,
c'est-à-dire nettement moins que le montant de la baisse de l'impôt sur le
revenu, dont nous avons déjà largement dénoncé l'inefficacité sur la
consommation et la croissance.
Le monopole de distribution de EDF et de GDF pour l'énergie domestique est une
garantie du plein effet de la mesure.
Je fais également observer que la très forte augmentation du prix du gaz
depuis plusieurs années - la dernière augmentation, le 1er novembre dernier, a
été de 3 % - a apporté à l'Etat un supplément susbtantiel de recettes de TVA
qu'il serait juste de restituer aux usagers.
En vertu des mêmes préoccupations vis-à-vis des usagers domestiques, je tiens
à exprimer mon inquiétude devant l'évolution de la politique tarifaire de EDF
et de GDF, en liaison avec la remise en cause progressive de leur statut
d'entreprise nationale et de leurs missions de service public.
GDF ne répercute plus automatiquement, il s'en faut, les baisses du cours du
brut sur ses tarifs domestiques, bien que ses contrats d'achat soient indexés
sur ce cours. L'abandon progressif du principe de péréquation tarifaire au
bénéfice des « clients éligibles », sur lesquels, par exemple, n'a pas été
reportée la dernière hausse du prix du gaz, pénalise scandaleusement les autres
usagers et donc, au premier chef, les ménages.
Nous aurons l'occasion d'intervenir à nouveau sur ces questions, qui sont
également au coeur du mouvement des électriciens et des gaziers contre la
privatisation rampante de leurs entreprises.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'avis de la commission est malheureusement
défavorable à cet amendement, pour des raisons qui sont strictement liées au
contexte budgétaire très difficile que nous connaissons.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Les abonnements à l'électricité et au gaz sont d'ores
et déjà soumis au taux réduit de la TVA. La mesure qui est proposée par Mme
Beaudeau aurait un coût budgétaire de 1,7 milliard d'euros, ce qui se situe
très au-dessus de nos marges de manoeuvre. Je la prie donc de bien vouloir
retirer son amendement, faute de quoi je devrai en demander le rejet.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-164.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-70, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 278
bis
du code général des impôts est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« ...° Protections pour incontinence adulte. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I est compensée à
due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jean-Pierre Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat.
Les personnes âgées et les adultes handicapés qui souffrent d'incontinence
acquittent une TVA de 19,6 % sur leurs protections personnelles. Ce type de
produit étant, de toute évidence, de première nécessité, nous proposons, dans
un souci de justice sociale, d'y appliquer le taux de 5,5 %.
Nous voyons d'ailleurs là une mesure à prendre d'urgence eu égard à
l'importance croissante de la population de notre pays en état de dépendance
physique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission note l'enjeu social ou tout simplement
humain qui est sous-jacent à cet amendement, et elle partage, bien sûr, les
préoccupations de ses auteurs.
Tout ce qui peut réduire les dépenses auxquelles doivent faire face des
personnes dépendantes est effectivement de nature à faciliter leur maintien à
domicile.
Cependant, on peut craindre que le coût budgétaire d'une telle mesure ne soit
significatif, et il me paraît difficile, dans ces conditions, d'émettre un avis
favorable. Je souhaiterais néanmoins connaître l'avis du Gouvernement sur cette
question.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
En raison de la sensibilité du sujet au regard des
personnes concernées, je tiens à dire à Jean-Pierre Demerliat que le
Gouvernement partage le souci qu'il a exprimé.
Je dois cependant rappeler que le taux réduit s'applique déjà à la plupart des
appareillages pour handicapés ainsi qu'à des équipements médicaux spéciaux, qui
sont conçus exclusivement pour compenser les incapacités graves dont souffrent
certains handicapés.
Ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de le dire à l'Assemblée nationale, nous
nous heurtons, s'agissant de la mesure proposée, à une difficulté pratique : il
serait en effet quasiment impossible de ne pas l'étendre à l'ensemble des
produits similaires, notamment aux couches pour les jeunes enfants. Dès lors,
le coût budgétaire serait d'au moins 145 millions d'euros.
Puisque les évaluations que j'ai produites ont tout à l'heure été mises en
question, je précise bien que ces 145 millions d'euros ne représentent pas le
coût direct de votre amendement, monsieur Demerliat : ce montant inclut le coût
de l'inévitable extension de la mesure que vous préconisez aux couches pour les
jeunes enfants, car il est impossible de différencier les produits.
Pour cette raison, je suis conduit à solliciter le retrait de votre amendement
et, à défaut, son rejet.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-70.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-46, présenté par M. Girod, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 3 du I de l'article 278
sexies
du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3
bis.
Le premier apport de logements sociaux à usage locatif dont la
construction a fait l'objet d'une livraison à soi-même mentionnée au 2 du
présent article, réalisé dans les cinq ans de l'achèvement de la construction
au profit d'un organisme d'habitations à loyer modéré visé à l'article L. 411-2
du code de la construction et de l'habitation, à la condition que l'acte
d'apport prévoie le transfert de la société cédante à la société bénéficiaire
de l'apport, du prêt prévu à l'article R. 331-1 du code précité et de la
convention mentionnée aux 3° et 5° de l'article L. 351-2 du même code. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je le reprends, monsieur le président.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° I-46 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre collègue Paul Girod avait souhaité, par cet
amendement, aligner, du point de vue de la TVA, le régime des apports de
logements sociaux neufs sur celui des ventes de logements sociaux.
Il s'agit en quelque sorte de réparer un oubli. En effet, l'article 278
sexies
du code général des impôts soumet au taux réduit de TVA les
ventes de logements locatifs sociaux qui remplissent un certain nombre de
conditions : les logements visés doivent être conventionnés, bénéficier de
prêts aidés et avoir fait l'objet d'une décision favorable du préfet. Mais cet
article ne mentionne pas les apports de logements neufs d'une société d'HLM à
une autre.
Le transfert de logements sociaux à usage locatif dans les cinq ans qui
suivent sa construction - transfert entre deux organismes d'HLM par voie
d'apports en nature -, est une opération spécifique visant un immeuble précis
et dont l'objectif principal peut être de réorganiser le patrimoine pour lui
apporter plus de rationalité géographique et assurer une meilleure gestion de
l'ensemble.
La mesure ici proposée par notre collègue Paul Girod ne vise que les
organismes dont le capital est constitué en actions, c'est-à-dire les sociétés
anonymes d'HLM.
En 2000 et 2001, ce ne sont que cinquante à cent logements qui auraient fait
l'objet de tels apports en nature. Compte tenu du faible nombre de logements
concernés chaque année, il semble que la conséquence financière de la mesure
soit mineure. Monsieur le ministre, c'est naturellement l'une des raisons pour
lesquelles j'ai accepté, au nom de la commission, de soutenir cet amendement,
qui me paraît tout à fait raisonnable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement est en effet favorable à cette demande,
mais il souhaitait que les organismes professionnels soient consultés et que
les dispositifs soient affinés. Compte tenu des précisions qui ont été
apportées par les organismes professionnels, - seul le premier apport est
concerné - et du fait que les conditions d'application du logement social
restent remplies, il m'est désormais possible d'émettre un avis favorable sur
l'amendement n° I-46 rectifié.
Par ailleurs, je lève le gage.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° I-46 rectifié
bis
.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 9.
L'amendement n° I-167, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278
septies
du code général des impôts, il est
inséré un article ainsi rédigé :
«
Art. ... -
La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 %
en ce qui concerne les opérations d'achat d'importations, d'acquisition
intracommunautaire, de courtage, ou de façon portant sur les casques
motocyclistes homologués et sur les sièges auto homologués pour enfants. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Notre amendement a pour objet de porter le taux de TVA sur les casques
motocyclistes homologués et sur les sièges auto homologués pour enfant à 5,5 %.
Il ne s'agit pas, j'y insiste, de répondre à des demandes de sociétés
productrices de matériel voulant améliorer leur chiffre de vente. Je ne parle
évidemment au nom d'aucun lobby, si ce n'est celui de la sécurité publique. Je
me permettrais même de dire que je parle au nom du Président de la
République...
MM. Denis Badré et Jean-Jacques Hyest.
Oh !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
... qui a souhaité qu'une action nouvelle forte et responsable soit mise en
oeuvre pour faire diminuer le nombre des accidents et celui des victimes de la
route.
Notre amendement, s'il était adopté, ne ferait peut-être pas significativement
baisser le nombre des accidents, on a en effet vu, au cours de la dernière
période, qu'il ne diminuait que très peu. En revanche, il serait susceptible de
faire diminuer le nombre et la gravité des accidents pour deux types de
passagers d'engins les plus vulnérables.
La circulation et la sécurité des motocyclistes demeurent un problème majeur,
permanent, aggravé. Réduire la vitesse, protéger les voies de circulation sont,
bien entendu, des mesures préventives nécessaires, mais la protection des
motards par le port de casques sophistiqués de grande qualité permettrait de
réduire le nombre des victimes. Encore faut-il évidemment qu'ils soient
fabriqués et achetés.
L'incitation à rendre plus performants les casques est certainement un
objectif à faire valoir, à condition que le prix de vente reste accessible au
plus grand nombre. La baisse de la TVA va dans ce sens : le fait de passer son
taux de 19,6 % à 5,5 %, soit une baisse de quatorze points, a une répercussion
non négligeable sur les prix de matériels qui coûtent plusieurs centaines
d'euros. D'ailleurs, personne ne peut contester qu'un casque parfaitement
protecteur peut permettre de sauver une vie humaine.
Il faut donc prendre nos responsabilités.
Ce ne sont pas de pauvres arguments de non-compatibilité avec la
réglementation européenne qui aideront à sauver des vies humaines ! J'ose
espérer que ce ne sont pas uniquement des arguments de non-rentrées financières
qui pourront, monsieur le rapporteur général, être retenus. La vie n'a pas de
prix, même pour le budget de l'Etat, surtout pour le budget de l'Etat,
oserai-je dire.
Permettez-moi de noter que l'argument que vous avez avancé à l'Assemblée
nationale, monsieur le ministre, est quand même singulier. Il serait
incohérent, avez-vous dit, de faire pour les casques de moto ce que l'on ne
ferait pas pour d'autres équipements de sécurité !
Je souhaite améliorer tous les équipements de sécurité.
S'agissant des sièges auto pour enfants, la situation est encore plus
préoccupante, mais elle est évidemment perfectible.
Premièrement, les enfants doivent être protégés impérativement, et je ne
parlerai pas de ceux qui sont laissés sans protection - je pense à la ceinture
de sécurité - car, dans ce cas, la responsabilité incombe aux seuls
parents.
Deuxièmement, permettre l'acquisition et l'aménagement de dispositifs
protecteurs pour les sièges d'enfant nous concerne tous. Fabriquons donc des
protections performantes, à des coûts aussi abordables que possible.
Troisièmement, l'argument de la compatibilité européenne ne tient pas. Nous
sommes libres ! Vous avez, mes chers collègues, des petits-enfants - vous
faites souvent référence à eux lorsqu'il est question de l'avenir des retraites
- et je propose que nous les protégions.
J'ose espèrer, monsieur le ministre, que vous ne me demanderez pas de retirer
mon amendement, comme vous l'avez demandé à certains de mes collègues à
l'Assemblée nationale. Ce serait, à mon sens, moralement condamnable. En effet,
vous voulez de la cohérence, et je souhaite, comme vous, défendre la vie des
enfants de manière globale, certes, mais aussi ponctuelle, car selon moi, c'est
là l'expression de la vie.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission ne peut qu'être sensible au plaidoyer
de Marie-Claude Beaudeau...
M. Denis Badré.
Surtout quand il est fait au nom du Président de la République !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Un obstacle cependant demeure, au moins pour les
casques motocyclistes sinon pour les sièges d'enfant dans les voitures : c'est
la liste de l'annexe H de la sixième directive européenne de 1977 sur la TVA,
bien connue de notre collègue Denis Badré.
Il semble bien que, pour les casques, le passage au taux réduit ne soit pas
eurocompatible. Peut-être, monsieur le ministre, pourrez-vous nous dire si,
dans le cadre de prochaines négociations, surtout s'il devait y avoir un jour
un taux intermédiaire, il sera possible d'évoquer le cas de ces équipements de
sécurité sensibles compte tenu de l'insécurité routière dont de très nombreux
jeunes sont, hélas ! victimes chaque année.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le président, vous me permettrez de peser
chaque mot, Mme Beaudeau m'ayant indiqué que j'avais déjà tenu des propos
moralement condamnables à l'Assemblée nationale et que mon argumentation était
singulière.
Je vais donc m'efforcer de lui transmettre des éléments objectifs : les
casques de moto, et plus généralement le matériel destiné à la sécurité des
personnes, notamment au transport des personnes, ne figurent pas sur la liste
des biens auxquels le droit communautaire autorise l'application du taux réduit
de la TVA, à la seule exception, en effet, des sièges d'enfant pour les
véhicules automobiles.
Toutefois, seule une révision globale et cohérente des règles de TVA en la
matière est envisageable. En effet, les mêmes questions ne manqueront pas
d'être posées pour d'autres matériels - et cela fait écho à la question de M.
le rapporteur général - qui participent aussi à un objectif de sécurité, qu'il
s'agisse des systèmes intégrés aux véhicules tels que les aides au freinage,
les antipatinages, les coussins gonflables, etc. ; et, de fil en aiguille,
pratiquement tous les équipements devraient se voir appliquer ce taux réduit de
TVA.
C'est ce qui me conduit, en espérant ne pas vous avoir choquée, madame
Beaudeau, à vous demander le retrait de votre amendement, faute de quoi j'y
serais défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-167.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-38, présenté par MM. Ostermann, Bailly, Besse et Bizet, Mme
Bout, MM. Del Picchia, Doublet, Dubrule, Fournier, Gérard, Karoutchi, Leclerc,
Murat et Natali, Mme Olin, MM. Peyrat, de Richemont, Rispat, Schosteck et
Valade, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le
a quinquies
de l'article 279 du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«
a
sexies. Les prestations de restauration. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-49, présenté par M. Badré et les membres du groupe de
l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278
septies
du code général des impôts, il est
inséré un article 278
octies
ainsi rédigé :
«
Art. 278
octies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux
de 5,5 % en ce qui concerne :
«
a)
La fourniture de repas à consommer sur place ;
«
b)
Les ventes de boissons non alcoolisées réalisées à l'occasion des
prestations visées au
a
ci-dessus. »
« II. - La perte de recettes générée par l'application des dispositions du I
ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts.
« III. - Les dispositions du I et II ci-dessus entreront en vigueur le 1er
juillet 2003. »
L'amendement n° I-50, présenté par M. Badré et les membres du groupe de
l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278
septies
du code général des impôts, il est
inséré un article 278
octies
ainsi rédigé :
«
Art. 278
octies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux
de 5,5 % en ce qui concerne :
«
a)
La fourniture de repas à consommer sur place ;
«
b)
Les ventes de boissons non alcoolisées réalisées à l'occasion des
prestations visées au
a
ci-dessus. »
« II. - La perte de recettes générée par l'application des dispositions du I
ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts.
« III. - La date d'application du I ci-dessus sera fixée par décret. »
L'amendement n° I-68, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le
a quater
de l'article 279 du code général des impôts est
rétabli dans la rédaction suivante :
«
a quater
. La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - Les pertes de recettes résultant des dispositions à I sont compensées
par le relèvement du taux de l'impôt sur les sociétés à due concurrence. »
L'amendement n° I-168, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le
a quater
de l'article 279 du code général des impôts est
rétabli dans la rédaction suivante :
«
a quater
. La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Joseph Ostermann, pour présenter l'amendement n° I-38.
M. Joseph Ostermann.
Il s'agit d'un amendement récurrent, qui est également un amendement
d'appel.
Le secteur de la restauration est soumis à deux taux de TVA : l'un à 5,5 %
pour la vente à emporter et la livraison de repas à domicile, l'autre de 19,6 %
pour la restauration à consommer sur place.
Le taux de 19,6 % met en difficulté un certain nombre de restaurateurs qui ne
peuvent assurer la rentabilité de leurs équipements, notamment en zone rurale,
où les prix sont bien souvent en deçà de ceux qui sont pratiqués par leurs
concurrents.
Par ailleurs, la coexistence de ces deux taux provoque, au sein d'une même
entreprise, des difficultés de comptabilité.
Le présent amendement vise, par conséquent, à assujettir le secteur de la
restauration dit traditionnel au taux réduit de TVA, soit 5,5 %.
Cet amendement a déjà été adopté par le Sénat sur ma proposition, mais il est
resté sans suite. Je tiens à préciser également que notre collègue Bernard
Murat a saisi M. le Premier ministre, qui lui a répondu : « J'ai signalé votre
démarche à M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie, en lui demandant de vous tenir informé de l'évolution de ce
dossier. » Pourrions-nous, ce soir, connaître l'évolution de ce dossier ?
M. le président.
La parole est à M. Denis Badré, pour présenter les amendements n°s I-49 et
I-50.
M. Denis Badré.
Je vais essayer d'aller un peu plus loin encore que notre collègue M.
Ostermann afin que le Gouvernement puisse, lui aussi, aller encore plus loin
dans ses réponses et nous faire savoir où il en est exactement sur cet
important sujet.
Je ne reviendrai pas - tout a été dit au cours des dernières années - sur les
raisons pour lesquelles nous présentons avec une belle constance des
amendements tendant à faire passer au taux réduit l'ensemble des prestations de
restauration, qu'il s'agisse de la restauration collective, de la restauration
rapide ou de la restauration traditionnelle.
Le président de la commission des finances, tout à l'heure, nous rappelait
encore combien il était choquant, quand on voyage à bord du TGV, de s'entendre
demander si l'on désire emporter le sandwich que l'on a acheté ou si l'on
préfère le consommer sur place.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
De toute façon, ce n'est pas bon !
M. Denis Badré.
On pourrait multiplier les exemples d'aberration de ce genre. Ainsi, autre
injustice, selon qu'un restaurant d'entreprise utilise ou non les services
d'une entreprise de restauration collective, il peut, alors qu'il s'agit
manifestement d'une prestation de grande qualité, acquitter la TVA à 5,5 %. Et
je ne parle pas ici de tous les repas livrés à domicile ou servis en magasin
par les traiteurs ! On aboutit donc a une situation d'une complexité
exceptionnelle, entraînant de très nombreuses injustices qui desservent, dans
le contexte européen, notre restauration.
Je rappelle simplement, puisqu'il a été chiffré avec une grande précision, le
coût du passage complet de tout le secteur de la restauration à un taux de TVA
à 5,5 %. Contrairement à ce qui se disait encore il y a deux ans - je suis
parvenu, semble-t-il, a en convaincre les responsables des services compétents
à Bercy -, ce coût ne s'élève pas à 4,5 milliards d'euros, ce qui
correspondrait à un chiffre d'affaires, toutes formes de restauration
confondues, de 170 milliards d'euros. En effet, si la différence de rendement
entre une TVA à 19,6 % et une TVA à 5,5 % pour l'ensemble de la restauration
est effectivement de 4,5 milliards d'euros, il ne faut pas oublier que de très
nombreuses prestations se voient déjà appliquer un taux de 5,5 %, et que nous
ne proposons pas de faire passer l'ensemble des consommations à 5,5 %. Par
exemple, les boissons alcoolisées resteraient à 19,6 %. Par ailleurs, un
certain nombre de dérogations sont prévues.
C'est ce qui me permet de confirmer que le coût de la mesure proposée est non
de 4,5 milliards mais de 1 milliard d'euros par an.
S'agissant maintenant de la difficulté communautaire, effectivement, la mesure
n'est pas actuellement euro-compatible et l'accord de Bruxelles est nécessaire.
On peut obtenir cet accord de deux manières : en modifiant l'annexe H, qui
définit la liste des biens et services qui sont justifiables d'un taux réduit -
à charge pour les Etats membres d'avoir recours ou non aux possibilités
ouvertes par cette annexe H - ou en se fondant sur l'article 29 de la
directive, qui prévoit des dérogations temporaires.
La Commission est tout à fait opposée à la modification de l'annexe H, parce
que c'est selon elle une boîte de Pandore que l'on ne peut pas prendre le
risque d'ouvrir.
La seule modification qui a été apportée concernait les services à haute
intensité de main-d'oeuvre, voilà maintenant trois ans. En s'appuyant sur
l'article 29 de la directive, il a été décidé de lancer un certain nombre
d'expérimentations et d'examiner, trois ans après, au vu des résultats de ces
expérimentations, s'il fallait modifier l'annexe H. C'est une manière de
reporter la décision. On a encore décidé de prolonger la réflexion d'un an
parce que, sur le fond, la Commission reste très réservée.
Il reste l'article 29, qui a été utilisé pour appliquer le taux réduit aux
prestations de floriculture, par exemple. Il est en effet possible d'utiliser
cet article, et les services à haute intensité de main-d'oeuvre sont arc-boutés
sur cette position. C'est temporaire, mais c'est du temporaire qui peut durer.
Donc, on peut le faire, mais il faut l'accord de Bruxelles. Or pratiquement
tous les Etats de l'Union européenne qui l'ont demandé ont pu maintenant
l'obtenir, y compris le Portugal, qui était encore notre allié voilà trois ans
lorsque nous demandions à bénéficier du dispositif pour les services à haute
intensité de main-d'oeuvre. Entre-temps, le Portugal a cependant trouvé une
autre dérogation : n'arrivant pas à entrer par la porte, il est entré par la
fenêtre !
La France est donc pratiquement le seul pays à connaître de telles différences
de situation au sein même de la restauration. Les différences sont d'autant
plus sensibles, que, comme M. le président de la commission des finances le
rappelait tout à l'heure, la France a l'un des taux normaux les plus élevés et
l'un des taux réduits les plus faibles de l'Union européenne.
Dans ce contexte, les plus hautes autorités de l'Etat ont souligné leurs
préoccupations face à ce problème. Si j'ai bien compris, le Gouvernement s'est
saisi de la question. Les amendements n° I-49 et I-50, dont l'un est un
amendement de repli, visent à l'aider à régler le problème sans peser sur
l'équilibre du budget de 2003.
L'amendement n° I-49 tend à prévoir - et j'avais déjà déposé un amendement
identique l'année dernière - que toutes les prestations de restauration, à
l'exception des boissons alcoolisées, je le rappelle, bénéficient du taux
réduit de la TVA à compter du 1er juillet 2003, ce qui donne six mois pour
obtenir la dérogation de Bruxelles. Cela me paraît possible, et je suis prêt à
apporter ma contribution au Gouvernement pour l'appuyer dans sa démarche auprès
des autorités communautaires. Je ne veux pas m'élever au-dessus de ma
condition, mais si je puis être utile, je le ferai.
La difficulté de l'euro-compatibilité est donc levée et mes amendements, de ce
point de vue, sont parfaitement recevables.
En revanche, subsiste la difficulté du coût budgétaire. Il serait ramené à 500
millions d'euros, ce qui, je le concède, est encore important et de nature à
rompre l'équilibre de notre exercice budgétaire. C'est pourquoi je propose
l'amendement n° I-50, qui prévoit que la date de mise en oeuvre de la mesure
soit fixée par décret.
Ce peut donc être le 15 décembre 2003 ou, à la limite, le 31 décembre 2003.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le 31 décembre, pour le réveillon !
(Sourires.)
M. Denis Badré.
Cette disposition, monsieur le ministre, présente un avantage important. Non
seulement elle ne grève pas votre budget, mais, en plus, les professionnels
concernés, qui sont las des paroles, auront enfin le sentiment qu'une démarche
est engagée et qu'on leur propose une mesure concrète de nature à leur redonner
confiance dans le Gouvernement et dans la représentation parlementaire et à
redonner à ce secteur confiance en lui-même. Cela me paraît important, monsieur
le ministre ! C'est pourquoi je plaide pour qu'au moins cet amendement de repli
puisse être examiné avec intérêt.
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour défendre l'amendement n° I-68.
M. Gérard Miquel.
Nous proposons, par cet amendement, d'abaisser le taux de TVA sur la
restauration. En effet, s'il est bon que les baisses ciblées de TVA
s'appliquent aux produits de première nécessité, il est tout aussi souhaitable
qu'elles s'appliquent aux produits et services offerts par les secteurs
d'activités qui emploient de la main-d'oeuvre. Mais, pour que cette baisse ne
soit pas un cadeau à sens unique, il conviendrait évidemment d'exiger de la
profession une contrepartie à l'emploi, c'est-à-dire un engagement précis sur
l'embauche de personnels.
D'une façon plus générale, il s'agit, en adoptant l'amendement que nous vous
proposons, non seulement d'aider le Président de la République et le
Gouvernement à tenir leurs engagements électoraux, mais aussi et surtout
d'atteindre trois objectifs : aider les petites et moyennes entreprises à
oeuvrer pour l'emploi et, partant, pour la croissance ; aider ces mêmes PME à
oeuvrer pour le tourisme ; enfin, aider le secteur de la restauration française
à se rapprocher de celui de nombreux autres pays européens.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour présenter l'amendement n°
I-168.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Par notre amendement, nous proposons d'harmoniser à 5,5 % les taux de TVA
applicables à l'alimentation sur place et à l'alimentation à emporter, et de
profiter de l'ouverture des négociations relatives à la sixième directive, qui
doivent, si j'ai bien compris, démarrer début 2003, pour faire des
propositions.
Premièrement, il faut en finir avec les situations ubuesques et illogiques. Un
collègue a pris l'exemple d'un voyageur qui veut s'alimenter au cours d'un
voyage en train en provenance de l'Italie. Il connaîtra un taux de 0 % au
départ si la restauration est assurée par les Italiens, puis un taux de 5,5 %
ou de 19,6 % suivant qu'il descendra ou non du train. Vous reconnaîtrez que
c'est assez absurde, voire risible, et pourtant... c'est réel !
Deuxièmement, le Conseil d'Etat s'enlise dans des situations de plus en plus
inextricables, sans solution valable pour tous.
Troisièmement, le moment est venu de trancher : avec l'ouverture des
négociations relatives à la sixième directive, c'est possible. Il y va de
l'intérêt du tourisme français et de l'industrie hôtelière, qui emploie 600 000
salariés et qui réalise un chiffre d'affaires de plus de 30 milliards d'euros,
lequel pourrait être sensiblement amélioré par une baisse du taux de TVA
entraînant une baisse des prix et donc une reprise de l'activité. Il y va aussi
de la qualité culinaire de la restauration française traditionnelle. Celle-ci
ne mérite-t-elle pas un peu plus de considération ? C'est également très
important pour l'activité économique et pour l'emploi.
La profession estime que 80 % des restaurateurs investiraient pour améliorer
les prestations de service et que 80 % des entreprises concernées seraient
prêtes à embaucher au moins une personne par établissement, ce qui
représenterait plusieurs milliers d'embauches : certains estiment à 40 000 le
nombre d'emplois supplémentaires susceptibles d'être créés dès la première
année,grâce à une baisse de taux de TVA à 5,5 % !
J'ajoute qu'on ne peut pas continuer à faire des déclarations officielles dans
ce sens sans prendre les décisions qui s'imposent. Le Président de la
République s'était engagé dans un discours prononcé à Saint-Cyr-l'Ecole, le 27
février dernier, à promouvoir un taux réduit pour la restauration. Je n'ose pas
croire qu'il s'agit là d'une simple promesse électorale, d'autant que cette
position a été confirmée par une lettre de M. Mer au commissaire européen
chargé de la fiscalité.
M. Raffarin lui-même, le 16 septembre dernier, a exprimé au président de la
Commission, M. Prodi, la même volonté. Mme Lenoir prétend d'ailleurs que la
Commission européenne est disposée à étudier cette proposition.
N'y aurait-il que nous, mes chers collègues, pour bouder cette proposition,
alors que, dans tous les départements, nos discours, les vôtres comme les
miens, correspondent à ce que je vous propose ? Alors j'ai envie de vous dire,
mes chers collègues : courage, votez ces amendements, la cuisine française vous
en sera reconnaissante !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je m'exprimerai sur l'ensemble de ces amendements,
qui ont une inspiration très voisine même si quelques facteurs techniques les
différencient.
Comme chacun le sait ici, la Commission de l'Union européenne a prévu de
revoir la politique globale concernant les taux réduits au cours de l'année
2003.
La France, par la voix du Gouvernement, en particulier du nouveau
gouvernement, a déjà manifesté son souhait de voir la restauration bénéficier
du taux réduit en raison de son caractère de service à forte intensité de
main-d'oeuvre.
Il est tout à fait exact que l'application du taux réduit aurait pour
conséquence, comme plusieurs d'entre vous l'ont souligné, de créer de nombreux
emplois et que l'incidence sur le tissu économique et social serait loin d'être
négligeable, compte tenu du très grand nombre d'entreprises de restauration de
notre pays et du marché de la main-d'oeuvre.
Les négociations entre les Etats membres et la Commission aboutiront, nous
a-t-on dit, à une décision concernant la restauration au cours de l'année 2003.
Dès lors, il serait, me semble-t-il, très maladroit de la part de la France de
s'arroger unilatéralement un droit dont elle ne dispose pas encore du point de
vue communautaire. C'est une question de respect des procédures et des
négociations. Nous ne devons pas agir comme si la décision - qui doit, je le
rappelle, être prise à l'unanimité par le Conseil européen - était déjà
intervenue. Chacun le sait bien, en particulier l'orfèvre de la commission des
finances en matière de droit communautaire et de budget communautaire qu'est
notre collègue et ami Denis Badré.
La commission des finances est évidemment favorable sur le fond à l'ensemble
des amendements, même si elle nuance cette approbation au regard de certains
gages. Mais cela n'est qu'un point de détail.
Elle demande toutefois à leurs auteurs de vouloir bien retirer ces amendements
compte tenu des efforts constants et réitérés du gouvernement actuel pour faire
avancer ce dossier, efforts qui sont, sans conteste, tout à fait fidèles aux
engagements pris auprès des professionnels et de l'opinion publique voilà
quelques mois à peine, lors des compétitions électorales nationales.
Mes chers collègues, cette demande s'applique donc à l'amendement n° I-38,
présenté par M. Ostermann, à l'amendement n° I-49, présenté par M. Badré, à sa
version « dégradée » - si j'ose dire -...
M. Jean-Jacques Hyest.
Allégée !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... ou de repli que constitue l'amendement n° I-50,
également de M. Badré, à l'amendement n° I-68 de M. Miquel et, enfin, à
l'amendement n° I-168 de Mme Beaudeau.
Tous ces amendements sont excellents sur le fond, même si Mme Beaudeau
prévoit, dans le sien, un gage sur l'impôt sur les sociétés...
M. Paul Loridant.
Eh bien, levez le gage !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... qui n'est pas considéré comme recevable par la
commission.
Indépendamment de cette remarque vraiment très ponctuelle, tous ces
amendements ont pour objet de défendre une excellente cause et les arguments
avancés l'ont été avec efficacité et talent. Nous touchons très probablement au
but. Espérons que M. le ministre nous le confirmera !
Après avoir entendu l'avis du Gouvernement et après que le débat aura eu lieu
au sein de la Haute Assemblée, il sera nécessaire de retirer les amendements,
afin que le Gouvernement ait les coudées franches au cours des négociations qui
l'attendent et qui permettront, n'en doutons pas, de concrétiser les
engagements pris et de bien servir un secteur économique qui est l'un des
fleurons de la qualité de vie à la française !
(Très bien ! sur les travées
du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Pour prolonger ce débat qui a déjà permis de bien
clarifier les choses, je confirme que, dès son installation, le Gouvernement a
manifesté sa détermination en la matière. Il a en effet déjà présenté la
demande officielle à l'Union européenne, ce qui n'avait pas été fait.
(M. le
rapporteur général s'exclame.)
M. le Premier ministre a d'ailleurs
rencontré le président de la Commission, M. Prodi, pour lui confirmer toute la
détermination du gouvernement français. Mme Lenoir, ministre déléguée aux
affaires européennes, a été chargée de suivre le dossier pour l'ensemble des
ministères concernés par cette mesure qui nécessite, M. le rapporteur général
l'a rappelé, un vote à l'unanimité par les Etats membres.
Pour répondre à la question de M. Badré, je dirai qu'après avoir été, c'est
vrai, réservée sur l'opportunité de soutenir cette demande de la France la
Commission est aujourd'hui, je le pense, convaincue. Nous allons d'ailleurs lui
transmettre très prochainement l'étude économique qu'elle nous a demandée et
qui a pour objet de démontrer l'importance qu'aurait une telle mesure sur
l'emploi dans notre pays. Nous nous appliquerons à ce que cette étude soit
aussi convaincante que possible pour tous nos partenaires européens.
La question qui se pose maintenant au Parlement - je l'ai dit à l'Assemblée
nationale - est de savoir comment nous devons nous y prendre ensemble pour
faire aboutir cette demande.
Mesdames, messieurs les sénateurs, deux solutions se présentent à vous : soit
vous estimez que votre vote sera déterminant pour convaincre nos partenaires
européens, soit vous estimez qu'il est préférable - et c'est ma conviction - de
ne pas introduire dans notre droit interne une disposition qui requiert
préalablement un vote unanime de nos partenaires européens. C'est une question,
me semble-t-il, de diplomatie, je dirai même de délicatesse et de
courtoisie.
A partir du moment où l'on doit prendre une décision en commun, mieux vaut
avancer les arguments destinés à convaincre nos partenaires d'approuver
unanimement notre position avant de modifier notre droit interne plutôt que de
faire l'inverse, ce qui donnerait à penser à nos partenaires que nous sommes
par avance indifférents à la réponse qu'ils nous feront !
Je ne suis pas un spécialiste des questions internationales, mais j'ai, comme
vous tous, un peu d'expérience dans ce domaine. On a, me semble-t-il, plus de
chances de convaincre quand on respecte ses interlocuteurs que quand on leur
donne le sentiment de les mettre devant le fait accompli.
L'Assemblée nationale comme le Sénat ont manifesté, sur cette question, une
volonté claire et unanime. Le Gouvernement s'en fait l'interprète là où il
faut, c'est-à-dire autour de la table du Conseil européen. Toute indélicatesse
risquerait d'affaiblir la négociation et d'empêcher le dossier d'aboutir, ce
qui irait à l'encontre des intérêts de la France, en particulier dans le
secteur de la restauration.
Monsieur le rapporteur général, puisque nous sommes sur la bonne voie, nous
devons, pour mettre toutes les chances de notre côté, nous abstenir de traduire
immédiatement dans notre droit interne une telle mesure. C'est la raison pour
laquelle je souhaite vivement le retrait de ces cinq amendements. Leurs auteurs
ont pu exprimer leur détermination. Je veux qu'ils ne doutent pas de celle du
Gouvernement : tous les actes qu'il a accomplis depuis son installation
l'attestent. Je pense qu'il faut lui faire confiance pour obtenir satisfaction
dans les meilleurs délais.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
L'amendement n° I-38 est-il maintenu, monsieur Ostermann ?
M. Joseph Ostermann.
J'ai affirmé d'emblée qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Les
signataires de cet amendement comptent sur la détermination du Gouvernement
pour que ce dossier soit enfin réglé et acceptent de retirer cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-38 est retiré.
Les amendements n°s I-49 et I-50 sont-ils maintenus, monsieur Badré ?
M. Denis Badré.
Je retire l'amendement n° I-49.
En revanche, avant de retirer l'amendement n° I-50, je souhaite m'expliquer
sur cette question importante, puisque les plus hautes autorités de l'Etat ont
de nouveau marqué leur volonté de trouver une solution.
Nous devons tout faire pour y parvenir. Il est vrai que cela aurait été plus
facile voilà trois ans : notre situation budgétaire était favorable et nous
avions une opportunité avec l'expérimentation sur les services à haute
intensité de main-d'oeuvre. Ce fut une occasion manquée.
Voilà deux ans l'opportunité de l'expérimentation sur les services à haute
intensité de main-d'oeuvre n'existait plus, mais d'un point de vue budgétaire,
cette démarche aurait été plus facile.
Aujourd'hui, nous sommes dans la situation la plus difficile. La vraie
question est de savoir si un vote du Parlement est de nature à aider ou non le
Gouvernement.
Il l'aurait, à l'évidence, aidé à convaincre la Commission. Le ministre nous
dit que c'est fait. J'en prends acte, et j'en suis heureux. Mais permettez-moi
de rappeler que nous avions réussi, voilà cinq ans, à convaincre M. Mario
Monti, alors commissaire chargé de la fiscalité, et obtenu que la Commission
renonce à mettre en place immédiatement le régime commun de TVA, car celui-ci
aurait braqué contre l'Union européenne toutes les entreprises et tous les
contribuables d'Europe. Cela aurait été, permettez-moi l'expression, une
ânerie, et M. Monti a retenu nos arguments. Cela prouve, que de temps en temps,
un vote du Parlement peut peser sur une décision de la Commission.
Mais il s'agit maintenant de la réticence du Conseil, nous dit M. le ministre.
A ce propos, je rappelle que l'amendement n° I-50 présente deux avantages. Le
premier, c'est de réduire le coût. Ainsi, l'affaire franco-française n'existe
pratiquement plus. Le second est d'ouvrir un délai sans limite car,
effectivement, le fait de fixer une date d'application donnerait le sentiment
que le Gouvernement, coincé en quelque sorte, est finalement en mauvaise
position pour négocier avec ses partenaires. C'est la raison pour laquelle j'ai
retiré l'amendement n° I-49. Je suis parfaitement convaincu par cet
argument.
Mais, à partir du moment où aucune date n'est fixée dans l'amendement n° I-50
et que le Gouvernement, en fonction de l'évolution de la négociation, peut
choisir la date et la fixer ultérieurement par décret, non seulement on lève
cette difficulté, mais on marque une volonté parlementaire sur laquelle le
Gouvernement peut s'appuyer pour emporter l'adhésion de ses partenaires.
La seule question qui subsiste est celle du coût à payer. Le ministre évoquait
tout à l'heure la courtoisie que nous devons avoir vis-à-vis de nos
négociateurs. Je sais comment ont lieu les négociations communautaires, pour
avoir participé à une dizaine de sommets agricoles, de marathons agricoles ! Si
la courtoisie est de mise dans un premier temps, elle devient formelle ensuite
et, au bout d'un certain temps, il faut mesurer la détermination du partenaire
et, surtout, chiffrer le coût de l'opération. C'est cela qui est important.
Il faut savoir que nos partenaires nous veulent courtois, mais que les
Allemands ne tiennent pas du tout à ce que le taux réduit soit adopté car, pour
le moment, ils bénéficient largement de la différence entre leur taux, qui est
réduit, et le nôtre, qui ne l'est pas. Et les frontaliers - je parle sous le
contrôle du président de séance - savent très bien que cela coûte moins cher, à
qualité ou à prestation égale - ce qui est difficile à obtenir du fait que nos
prestations sont au-dessus de toute qualité...
M. le président.
Elles sont incomparables ! Surtout dans le Bas-Rhin !
(Sourires.)
M. Denis Badré.
... de l'autre côté de la frontière. Voilà pourquoi les Allemands sont contre
cette mesure.
Il faut maintenant savoir ce que nous serons prêts à lâcher par ailleurs pour
obtenir l'accord des Allemands sur ce point. Il faut, dans la négociation,
obtenir satisfaction sans payer trop cher le vote de la mesure d'un côté, et
sans trop céder aux Allemands de l'autre.
Monsieur le ministre, la pression du Parlement, grâce à l'adoption d'un
amendement qui ne fixe aucune date butoir, peut-elle aider le Gouvernement à
obtenir satisfaction au moindre coût, en ayant bien mesuré l'exacte
détermination de l'ensemble de nos partenaires au sein du Conseil ? C'est la
seule vraie question à mon sens.
M. Roland du Luart.
Il pourrait y avoir un vote unanime !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Pour le bon ordonnancement de nos débats, je dirai
simplement à M. Denis Badré que, s'il veut rendre service au Gouvernement, il
vaut mieux qu'il retire son amendement.
Si vous pensez savoir mieux que moi ce qui est bon pour le Gouvernement, je
m'en remets à votre science. Mais je crois préférable - et pardonnez-moi de le
souligner aussi franchement - que cet amendement ne soit pas voté par le
Parlement.
Dans un système démocratique comme le nôtre, c'est l'exécutif qui représente
les intérêts de la nation. Il demande au Parlement de lui faire confiance. Le
peuple souverain pourra en décider autrement, mais je le sollicite, car les
meilleures chances de réussite sont celles que je viens de vous décrire.
Cher ancien collègue et ami Denis Badré, je vous le dis franchement, cet
amendement ne nous arrange pas, il nous pénalise plutôt pour atteindre
l'objectif commun que nous fixons.
M. le président.
Monsieur Badré, l'amendement n° I-50 est-il toujours maintenu ?
M. Denis Badré.
Je ne veux nullement mettre le Gouvernement dans une impasse ni le gêner dans
la négociation avec ses partenaires. Mon seul souci est d'aller au bout de la
réflexion et, sans vouloir peser sur le choix qui sera celui du Gouvernement,
en qui nous avons une confiance totale, de confronter les expériences que nous
avons pu avoir, les uns et les autres, de négociations communautaires. Je
n'avais aucune autre prétention.
Par conséquent, je retire mon amendement, tout en rappelant que son adoption
aurait été aussi un moyen d'envoyer un signal fort aux professionnels du
secteur, qui attendent, au-delà des promesses et des engagements, une mesure
concrète.
M. le président.
L'amendement n° I-50 est retiré.
L'amendement n° I-68 est-il maintenu ?
M. Bernard Angels.
Avant de retirer cet amendement, nous voudrions obtenir des précisions : je
n'étais pas l'un de ces sénateurs qui étaient jusqu'au-boutistes lorsque le
gouvernement était différent.
On m'a toujours répondu que cette mesure était impossible à mettre en oeuvre
du fait de la directive européenne. Et comme, en général, je suis quelqu'un de
sage, je le croyais. Or, entre-temps est intervenue l'élection présidentielle,
où l'un des candidats, l'éminent président sortant -, s'est permis, tout au
long de sa campagne, de faire croire aux restaurateurs que cette directive
n'avait pas de raison d'être. Il a promis par écrit et oralement que, s'il
était élu, le taux de TVA sur la restauration serait baissé à 5,5 %. Or,
aujourd'hui, monsieur le ministre, membre du Gouvernement de ce Président de la
République, vous dites que c'est impossible. Par conséquent, je ne comprends
pas ! Comment se fait-il qu'un Président de la République puisse se tromper de
manière aussi grave et faire des promesses qu'il ne peut pas tenir ? Peut-être
suis-je naïf, mais, pour ma part, je pense qu'un homme politique, quelle que
soit sa position, ne doit jamais promettre ce qu'il ne peut pas tenir !
Par ailleurs, monsieur le ministre, quel est le coût réel de cette mesure ?
Les ministres qui vous ont précédé ont cité des chiffres annuels faramineux. Or
M. Badré, qui est très compétent en la matière puisqu'il est le rapporteur
spécial du budget des affaires européennes, a parlé de 1 milliard d'euros. Ce
n'est pas du tout le chiffre qui est annoncé ! Qu'en est-il exactement ?
Enfin, monsieur le ministre, il faudrait arrêter de dire - vous ou votre
majorité - que c'était plus facile avant : vous êtes au pouvoir, mais vous
n'avez pas les moyens d'agir !
M. Jean Chérioux.
C'est vrai !
M. Bernard Angels.
C'est un problème de choix.
Ou alors, cela signifie que, lorsque vous arrivez au pouvoir, c'est la poisse,
et les caisses se vident.
M. Jean Chérioux.
C'est vous qui les avez vidées avant !
M. Bernard Angels.
Combien coûte la baisse de l'impôt sur le revenu ? Vous avez fait le choix
politique d'accorder cette baisse d'impôt, qui ne concerne qu'une faible partie
de la population - celle qui est très nantie -, alors que vous auriez très bien
pu procéder à une baisse ciblée de la TVA sur la restauration. Tout le reste
n'est que mensonge ! Vous êtes majoritaires ! Vous faites des choix ! Vous
serez jugés sur les résultats dans quelques années, comme nous l'avons été
nous-mêmes !
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je souhaite reprendre la parole après avoir entendu
notre collègue Bernard Angels. Je suis en effet assez surpris de la manière
dont il pose la question et du registre qu'il utilise.
Alain Lambert nous a indiqué, voilà quelques instants, que la demande
officielle déposée auprès de la Commission l'a été par le gouvernement auquel
il appartient. Il a rappelé toutes les démarches qui ont été effectuées en vue
de sensibiliser nos partenaires, de convaincre la Commission et de conduire la
négociation dans de bonnes conditions.
Que je sache, ce n'est pas M. Lionel Jospin qui a reçu M. Romano Prodi à
Matignon pour parler du taux de TVA applicable à la restauration ! Il s'agit là
de faits et non pas de promesse !
M. Christian Demuynck.
Exactement !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La façon dont M. Angels s'en est pris au chef de
l'Etat me semble tout à fait déplacée
(M. Bernard Angels s'exclame),
puisque, depuis la mise en place du Gouvernement, qui a toute sa confiance,
des actes concrets ont été accomplis en vue du déblocage de la situation. Il ne
s'agit ni de promesses ni de lettre envoyée à une corporation : c'est la
réalité des démarches effectuées par la France pour aboutir à un traitement
convenable de ce problème.
Je trouve « un peu fort de café », pardonnez-moi l'expression, que ceux qui,
au cours des années passées, ont, par solidarité politique, soutenu un
gouvernement qui n'en a pas fait autant, s'étonnent que l'on n'aille pas assez
vite !
(Marques d'approbation sur les travées du RPR.)
Permettez-moi de
le dire avec toute la modération qui est la mienne dans ce débat.
Par ailleurs, mes chers collègues, voilà quelques années - cela a été rappelé
par plusieurs d'entre nous -, il y avait des choix à effectuer. Il eût été
possible de pousser le dossier de la restauration et, consciemment, cela n'a
pas été fait.
(Très bien ! sur les travées du RPR.)
Alors, cher collègue, compte tenu des bonnes relations que sont les nôtres et
des débats très francs que nous avons, de grâce, pas vous, et pas cela !
M. Christian Demuynck.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je dirai tout d'abord à Denis Badré que, s'agissant de
signal concret à donner aux professionnels, nous recevons ceux-ci très
régulièrement. J'ai moi-même reçu longuement M. Daguin et nous avons parlé de
la meilleure tactique à mettre en oeuvre pour atteindre l'objectif fixé. La
profession sait donc parfaitement que le gouvernement français considère comme
moins habile le vote d'un texte par le Parlement avant la négociation. Cette
question a été évoquée directement avec les professionnels, et très longuement,
je peux vous en assurer !
Je souhaite maintenant répondre à Bernard Angels de la manière la plus honnête
possible. Vous disiez, monsieur le sénateur, qu'au moment des élections
présidentielles le cheminement administratif était connu. Tout à fait !
Simplement, la détermination d'aboutir était totale et le choix fiscal était
fait. Il ne s'agit pas de s'adresser des reproches, mais il est incontestable
qu'un rendez-vous a eu lieu en 1999 : alors que cette mesure aurait pu être
insérée dans le cadre de la directive sur les services à forte intensité de
main-d'oeuvre, ce choix fiscal n'a pas été effectué ! Je ne porte pas de
jugement !
La volonté du présent gouvernement, à la suite de l'engagement du Président de
la République, est de faire ce choix maintenant. Il va de soi que cette
disposition se substituera à d'autres mesures fiscales. C'est ainsi : il faut
faire des choix ! Il ne me paraît pas utile de nous reprocher soit des
déclarations, soit des positions. Ce qu'il faut, c'est aboutir ! En tout cas,
je vous demande d'aider le Gouvernement à y parvenir, quelles que soient les
travées sur lesquelles vous siégez. Ainsi, vous rendrez service à la France -
si vous n'avez pas spontanément envie de rendre service au Gouvernement, ce qui
peut se comprendre dans certains cas -, et vous rendrez service au secteur de
la restauration en permettant au Gouvernement de mener la négociation à son
terme dans les meilleures conditions possibles.
Cela me conduit à solliciter, une dernière fois, le retrait de ces
amendements.
S'agissant de l'estimation du coût de la mesure, je propose qu'elle soit
effectuée de manière contradictoire.
Je suis désolé de ne pas pouvoir confirmer le chiffre qui a été donné tout à
l'heure par M. Badré.
(M. Denis Badré s'exclame.)
A un moment donné,
lorsqu'il s'agit de mathématiques, il ne doit y avoir qu'un chiffre. Par
conséquent, utilisons des procédures pour faire en sorte que ce chiffre-là soit
incontestable.
Je regrette qu'à l'heure où je vous parle, et après tant de mois, quelle que
soit la bonne volonté commune, nous ne soyons pas en état d'avancer un chiffre
qui soit incontestable. Eh bien ! prenons les moyens pour qu'il le devienne !
Monsieur le rapporteur général, je suis à votre disposition pour que nous
puissions ensemble donner à la représentation nationale un chiffre qui sera
incontestable.
A l'heure où je vous parle, selon les calculs qui ont été faits - ils sont
peut-être erronés, mais, pour ma part, je ne donnerai pas, pour faire plaisir,
un autre chiffre que celui qui m'a été communiqué conjointement par la
direction de la législation fiscale et par la direction de la prévision - le
chiffre est de trois milliards d'euros.
Je vous livre l'information dont je dispose. Si ce chiffre est faux, je ferai
amende honorable et je viendrai devant vous pour vous donner des explications.
En tout état de cause, nous allons, avec M. le rapporteur général, adopter la
méthode pour parvenir à un chiffre incontestable, car on ne peut pas travailler
dans de telles conditions.
M. Christian Demuynck.
Très bien !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est la bonne méthode !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Personnellement, je viens de prendre un engagement
solennel devant vous, et je le tiendrai. Cela étant, si vous voulez vraiment me
faire plaisir - mais je sais que votre vote en conscience ira au-delà de votre
volonté de me faire plaisir -, je continue de solliciter le retrait des
amendements.
M. le président.
Après avoir entendu M. le rapporteur général et M. le ministre, maintenez-vous
l'amendement n° I-68, monsieur Miquel ?
M. Gérard Miquel.
Monsieur le ministre, même si nous avons envie de vous faire plaisir, un
argument avancé par M. Badré nous conforte dans notre volonté de maintenir
l'amendement.
Nous comprenons tous ici les contraintes européennes qui nous lient, mais les
professionnels, eux, ne les comprennent pas. Ils sont très nombreux dans mon
département à m'interroger chaque fois que je les rencontre : on nous a promis
la baisse de la TVA, mais elle n'arrive pas !
C'est donc pour leur donner un signe fort que je propose le maintien de cet
amendement. Je ne crois pas qu'il soit de nature à gêner le Gouvernement dans
ses négociations à Bruxelles : au contraire, cela ne pourrait que le
conforter.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Permettez que ce soit à moi d'en juger ! Et cela me
gêne !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le rôle d'un élu est de dire la vérité !
M. le président.
Madame Beaudeau, l'amendement n° I-168 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous semblons être tous d'accord, mais ce n'est pas la première fois : je me
souviens de plusieurs discussions budgétaires où tous les groupes
parlementaires du Sénat avaient déposé un amendement tendant à la baisse de la
TVA. Ce qui nous différencie, ce soir, c'est le meilleur moyen pour y
parvenir.
Je vous rappelle, monsieur le ministre, que les restaurateurs avaient défilé
dans la rue pour obtenir cette baisse de TVA. Mon collègue Gérard Miquel vient
de le dire : ils ne croient pas du tout que ce soient les contraintes
européennes qui nous empêchent de voter cet amendement. Par conséquent, nous le
maintenons.
Contrairement à ce que vous pensez, monsieur le ministre, si le Sénat votait
ce soir cette mesure, ce geste soutiendrait encore plus le Gouvernement et lui
permettrait de mener la négociation à son terme, afin d'obtenir cette baisse de
TVA. Pour reprendre ce que vous avez dit tout à l'heure, ce serait le meilleur
service à rendre à la France.
M. le président.
La parole est à M. Jacques Oudin, contre l'amendement n° I-68.
M. Jacques Oudin.
Depuis plusieurs années, je me bats pour que le taux de cette TVA diminue, car
nous nous trouvons dans une situation paradoxale : première destination
gastronomique mondiale, première destination touristique mondiale, la France a
l'un des taux de TVA les plus élevés. Cette situation est incompréhensible et
inacceptable.
Tout à l'heure, M. le président de la commission des finances citait un
exemple que j'avait déjà pris, celui de la TVA dans le TGV : que le taux de TVA
soit de 5,5 % ou de 19,6 %, le consommateur paie le même prix. Je suppose qu'un
arrangement doit permettre à la SNCF ou aux prestataires de service de payer
aux environs de 12 % ! Mais peu importe.
Nous savons que nous sommes tous favorables à un ajustement de la TVA. Mais
nous savons également que le Gouvernement a pris les contacts nécessaires avec
les instances bruxelloises pour engager une négociation.
J'ai été convaincu par les arguments du rapporteur général et du ministre du
budget sur le fait qu'il était préférable de soutenir le Gouvernement dans
cette négociation plutôt que de lui créer des difficultés.
En dépit du combat que nous avons mené au cours des dernières années, cette
avancée ne pourra avoir lieu qu'en soutenant le Gouvernement et non pas en lui
mettant des bâtons dans les roues.
Je suis donc non pas contre les mesures proposées par les deux amendements
restant en discussion, mais contre la stratégie qui est suggérée. Par
conséquent, je vous propose, mes chers collègues, de ne pas adopter ces deux
amendements.
Cela peut paraître paradoxal, mais je lance un appel aux professionnels pour
qu'ils comprennent bien le sens de la démarche qui est la nôtre : il s'agit
d'aider le Gouvernement dans une action difficile. Il est vrai que les
Allemands ou les autres pays européens n'ont peut-être pas le même souci que
nous de soutenir ce gouvernement ! Nous ne pouvons cependant pas continuer à
appliquer un taux de TVA qui est parmi les plus élevés d'Europe ! Pour
l'instant, la Commission est un peu arc-boutée sur cette annexe qu'elle ne veut
pas modifier ; Denis Badré nous l'a expliqué de façon fort pertinente.
Par conséquent, mes chers collègues, nous devons, en conscience, voter contre
ces amendement, mais pour le succès de la baisse de la TVA. Cela peut paraître
paradoxal, mais les choses sont parfois un peu compliquées.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Roland du Luart, pour explication de vote.
M. Roland du Luart.
J'ai écouté attentivement les uns et les autres développer leur position. J'ai
d'abord été assez sensible aux arguments de Denis Badré s'agissant de la
tactique à suivre, et j'espérais que notre assemblée voterait ces mesures à
l'unanimité. Puis j'ai écouté les explications de M. le ministre, qui a demandé
le retrait des amendements.
Finalement, ce qui compte, c'est le résultat ! Nous mandatons donc le
Gouvernement pour obtenir, dès 2003, un résultat qui corresponde à l'engagement
du Président de la République, à l'engagement de l'ensemble de la majorité
devant les Français. Nous faisons confiance au Gouvernement ! Mais si, par
malheur, nous n'aboutissions pas à un résultat au cours de l'année 2003, notre
position serait différente l'année prochaine. Nous ne pourrions pas, en effet,
tromper les gens à qui nous avons promis d'obtenir une avancée sur ce sujet.
Nous savons que c'est très difficile pour le Gouvernement. Mais, puisqu'il nous
demande d'avoir recours à cette tactique, eh bien ! je me rallie à cette
position et je voterai contre l'amendement n° I-68.
M. le président.
La parole est à M. Paul Loridant, pour explication de vote.
M. Paul Loridant.
J'ai suivi avec attention le débat relatif à l'abaissement du taux de la TVA
pour la restauration. Vous me permettrez de rappeler que le candidat qui a été
élu à la présidence de la République l'avait promis ! D'ailleurs, il n'était
pas le seul, puisque le candidat que je soutenais s'était également engagé à le
faire.
Vous nous expliquez, monsieur le ministre, que les démarches sont engagées.
Dont acte ! Cela signifie que le dossier a mûri et qu'aujourd'hui tout le monde
va dans le même sens. Cependant, vous me permettrez d'être en désaccord avec
vous d'un point de vue tactique. Ou alors, vous finassez trop !
Si vous le voulez, vous pouvez arguer du fait que vous avez le soutien du
Parlement. C'est limpide ! Vous nous objectez que le vote de ces amendements va
compliquer votre tâche lors des négocations. Au contraire ! Si le peuple
souverain, que nous représentons, demande l'abaissement du taux de la TVA, vous
vous présenterez devant les commissaires européens, qui, eux, n'ont pas la
légitimité du suffrage universel,...
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Ce n'est pas la Commission européenne, c'est le Conseil
!
M. Paul Loridant.
... ou devant les membres du Conseil, en leur disant que c'est le Parlement
qui demande l'abaissement du taux de la TVA ! Que puis-je vous dire de plus
?
Les parlementaires représentent le peuple souverain, qui les a élus pour voter
la loi. Eh bien ! Nous la votons et, en adoptant cet amendement, nous vous
soutenons, monsieur le ministre !
M. le président.
La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard.
Je serai bref. Si l'on soutient le Gouvernement, il faut lui laisser le choix
des armes. Il a peut-être tort de ne pas vouloir être lié par nos votes, mais
faisons-lui confiance, puisque c'est lui qui est à la table des
négociations.
M. Roland du Luart.
C'est le bon sens !
M. Yann Gaillard.
Par conséquent, j'émettrai le même vote que mes amis Roland du Luart et
Jacques Oudin.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-68.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-168.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-127, présenté par MM. Oudin et Ostermann, est ainsi libellé
:
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le
a
de l'article 279 du code général des impôts est complété
in fine
par un alinéa ainsi rédigé : "à la fourniture du logement et aux
trois quarts du prix de pension ou de demi-pension dans les croisières
fluviales".
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jacques Oudin.
M. Jacques Oudin.
J'ai quelques scrupules à présenter cet amendement.
(Sourires.)
Les prestations relatives à la fourniture de logements dans des meublés ou des
établissements d'hébergement, dans des maisons de retraite ou, dans certaines
conditions, dans des campings bénéficient d'un taux de TVA réduit à 5,5 %.
Alors que les croisières fluviales constituent une forme de tourisme populaire
tout à fait essentielle tant par la qualité des prestations qu'elles offrent
que par leur rôle économique pour les bassins concernés, il apparaîtrait
souhaitable de faire bénéficier ces croisières d'un taux de TVA réduit.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement ne laisse pas la commission
indifférente. Il convient de rappeler le régime de TVA qui s'applique à cette
profession : pour les prestations de transport, c'est le taux réduit ; pour le
reste des prestations, logement et restauration, c'est le taux normal. Ce
régime a été décrit dans une réponse ministérielle du 29 mai 2000 à M. Demange,
député de la Moselle.
Les professionnels concernés pratiquaient différemment jusqu'à cette réponse
ministérielle : ils appliquaient le taux réduit non seulement sur les
prestations de transport, mais aussi sur les trois quarts des prestations de
pension, de logement et de restauration.
Le passage brutal, en 2000 - auquel veille, semble-t-il, le contrôle fiscal -,
du régime appliqué de façon coutumière, en quelque sorte, au régime défini par
la réponse ministérielle change la donne économique pour les organisateurs de
croisières fluviales, ce qui est d'autant plus regrettable que ce petit secteur
connaît une forte croissance depuis dix ans et que ses perspectives semblent
bonnes. Or une vague de redressements fiscaux significative est actuellement en
cours ou vient d'avoir lieu, nous a-t-on dit.
Enfin, la commission souligne, après avoir procédé à des comparaisons à
l'échelon international, que les croisières fluviales sont imposées à 6 % en
Hollande et à 5,5 % en Belgique et en Allemagne. Pourtant, lorsqu'on navigue
sur le Rhin, pour ne prendre que cet exemple, on passe d'un pays à l'autre.
M. Joseph Ostermann.
Tout à fait !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il semble donc que la préoccupation de nos collègues
MM. Jacques Oudin et Joseph Ostermann soit frappée au coin du bon sens. Aussi
la commission souhaiterait-elle entendre l'avis du Gouvernement sur cette
question.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
M. Jacques Oudin a attiré mon attention sur les
contrôles opérés par l'administration auprès des organisateurs de croisières
fluviales. Je veux vous dire, cher ami, que j'ai à coeur de régler ce
problème.
Je viens de demander à mes services de contacter les professionnels afin de
faire le point sur toutes les prestations qui sont offertes et de définir avec
eux un régime simple et clair, qui ne donne plus lieu aux difficultés
d'application rencontrées aujourd'hui.
Ce dossier devrait aboutir dans des délais très rapprochés. Je vous
consulterai afin que vous puissiez me confirmer qu'aucune difficulté ne
subsiste à l'issue de ces concertations. De deux choses l'une : soit le fruit
de ces consultations nécessite une modification législative, et je proposerai
que nous le traduisions dans la loi, soit il suffira de prendre une disposition
réglementaire permettant d'aboutir à une doctrine d'application stable, donnant
satisfaction aux professionnels concernés.
Je vous propose de mener à bien ce travail, afin que la traduction en droit se
fasse dans les meilleures conditions de sécurité fiscale. Telle est la
solution, pratique et efficace, que je préconise.
M. le président.
Monsieur Oudin, l'amendement n° I-127 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin.
Monsieur le ministre, nous sommes, il est vrai, dans le cas de la bûche de
plus ou moins 1,20 mètre... Cet exemple restera dans les annales du Sénat !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Même si c'est une bûche en chocolat !
(Sourires.)
M. Denis Badré.
A consommer sur place !
(Nouveaux sourires.)
M. Jacques Oudin.
Les trois quarts d'une prestation taxée à un taux et le reste à un autre...
Monsieur le ministre, nous pouvons en tirer quelques enseignements, le premier
étant qu'il faudrait entreprendre un toilettage de la TVA.
M. Denis Badré.
C'était l'intérêt de mon rapport !
M. Jacques Oudin.
Nous ne pouvons pas maintenir des caractéristiques de cette nature, qui
donnent d'ailleurs lieu à des interprétations divergentes et à des contrôles
incompréhensibles pour les assujettis.
Je voudrais souligner que les croisières fluviales sont organisées dans des
provinces françaises qui ne sont guère fortunées, je pense par exemple à la
Bourgogne, à la Bretagne ou au Sud-Ouest.
Nous devons faire un effort par rapport aux pays européens où le réseau
fluvial est plus développé et dont l'attractivité financière est meilleure.
Les croisières fluviales sont un atout pour la dynamisation de notre milieu
rural. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour aboutir très
prochainement à des résultats intéressants.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
J'espère que ce sera le cas avant la fin de l'année
!
M. Jacques Oudin.
Monsieur le ministre, en raison de vos engagements et de la confiance que nous
vous témoignons, je retire l'amendement. Je souhaite toutefois que vous ne
perdiez pas de vue l'intérêt du petit secteur des croisières fluviales pour la
dynamisation du secteur rural.
M. le président.
L'amendement n° I-127 est retiré.
L'amendement n° I-161, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le
a quinquies
de l'article 279 du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les locaux appartenant à des établissements publics de santé. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Actuellement, s'agissant, d'une part, des travaux d'équipement et de
modernisation de locaux appartenant à des établissements publics de santé et,
d'autre part, de la construction d'un nouvel établissement hospitalier, le taux
de TVA est fixé à 19,6 %, et cette TVA n'est pas récupérable.
Seules les maisons de santé bénéficient de la TVA au taux de 5,5 %. Pourtant,
les établissements de santé sont confrontés à des difficultés que tout le monde
connaît. En Ile-de-France, région que je connais le mieux, ces derniers
enregistrent pratiquement tous un déficit.
De l'avis de tous les directeurs d'établissement hospitalier qui ont réuni
leur conseil d'administration, comme cela a été dit par mes collègues lors de
l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, il aurait
fallu prévoir une dotation spéciale de 6 % ou 7 % afin de stopper l'aggravation
des déficits. Or la dotation prévue n'est que de 5 % ; les déficits vont donc
s'aggraver.
Le budget d'un hôpital, ce sont d'abord, bien entendu, des dépenses de
fonctionnement, dont 70 % de frais de personnels, des médicaments ; mais ce
sont aussi des travaux liés à la modernisation, à l'adaptation des locaux ou à
la création de nouveaux équipements. Nombre d'hôpitaux sont vétustes et les
appels d'offre sont, vous le savez, trop souvent infructueux.
L'application d'un taux réduit de TVA aiderait de façon efficace à régler
certaines dépenses et comblerait en partie l'insuffisance de crédits et de
dotations pour 2003.
Je vous donnerai un exemple : l'union régionale hospitalière d'Ile-de-France,
qui se réunit après-demain sous la présidence de notre collègue Gérard Larcher,
aura à décider d'actions importantes concernant le fonctionnement des
établissements hospitaliers pour 2003. Je ne doute pas que notre collègue
serait bien accueilli s'il pouvait annoncer le vote par le Sénat de la mesure
qui est prévue par notre amendement.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
C'est sûr !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Vous l'aurez compris, le refus que vous pourriez opposer à notre amendement
serait, en revanche, très mal perçu. C'est pourquoi, mes chers collègues, je
vous invite à voter notre amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souhaite, bien entendu, que le
président de la fédération hospitalière de France rencontre un très grand
succès auprès de ses mandants.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je n'en doute pas !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
De ce point de vue, elle partage totalement
l'inspiration de Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cela ne suffit pas !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cependant, il faut bien se référer au droit
communautaire. Celui-ci permet d'appliquer le taux réduit aux travaux réalisés
non seulement dans les logements privés, mais aussi, par extension, dans les
établissements d'hébergement tels que les maisons de retraite, les
établissements de convalescence, les établissements de vie pour personnes
handicapées ou les lieux de vie des congrégations religieuses, en d'autres
termes les couvents.
Toutefois, les établissements de santé, lorsqu'ils ne sont pas à titre
essentiel des établissements d'hébergement de longue durée, ne peuvent pas, au
regard du droit communautaire, bénéficier du taux réduit.
Pour cette raison, la commission souhaite le retrait de cet amendement, sans
même insister sur le caractère inacceptable du gage qui est prévu pour cette
mesure.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Madame Beaudeau, vous avez insisté pour que nous soyons
sensibles à votre demande. Nous vous écoutons toujours avec grand intérêt, mais
vous devez reconnaître que nous avons besoin d'un accord - qui est d'ailleurs
en passe d'aboutir -, pour confirmer l'application du taux réduit de TVA aux
travaux portant sur les logements.
Tout le monde est satisfait de cette disposition. Nous sommes en cours de
discussion et nous sommes tout à fait confiants dans le succès de la
consolidation de cette mesure. Rien ne serait plus dangereux, pour rendre cette
baisse définitive, que de chercher à en étendre l'application à des travaux qui
n'y figurent pas encore.
Mais, chaque chose en son temps, prenons garde à ne pas charger la barque au
risque de faire échouer nos négociations.
Telles sont les raisons qui me conduisent, madame Beaudeau, à vous demander de
bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, je serais contraint d'émettre
un avis défavorable.
M. le président.
Madame Beaudeau, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il l'est, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-161.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-69, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le b
decies
de l'article 279 du code général des impôts,
les mots : "les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité et de gaz
combustible" sont remplacés par les mots : "les abonnements relatifs aux
livraisons d'électricité, de gaz combustible et d'énergie calorifique". »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont
compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux
droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-162 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M.
Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi
libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« ... Les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorifique
distribuées par réseaux publics, alimentés par la géothermie et la
cogénération. »
« II. - Le prélèvement libératoire prévu à l'article 220 A du code général des
impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° I-69.
M. Gérard Miquel.
La loi de finances pour 2000 a permis d'appliquer le taux réduit de TVA aux
abonnements aux réseaux d'électricité et de gaz des clients domestiques - M. le
ministre vient de confirmer sa volonté de maintenir ce dispositif - mais pas
aux abonnements aux réseaux de chaleur, c'est-à-dire aux réseaux de
distribution publique d'énergie calorifique qui, de ce fait, se trouvent
pénalisés par rapport aux autres modes de chauffage.
Cette situation a des conséquences socialement regrettables, car les
utilisateurs de réseaux de chaleur habitent principalement dans les quartiers
de grand habitat collectif, équipés d'un réseau de chauffage organisé autour
d'une chaufferie centrale, en général polyvalente, l'eau chaude étant
distribuée jusqu'aux immeubles par un réseau de canalisations. Ces réseaux
desservent pourtant trois millions de personnes, particulièrement dans
l'habitat social, dans près de quatre cents villes françaises.
Cette situation a également des conséquences regrettables du point de vue de
la protection de l'environnement, car les réseaux de chaleur sont des vecteurs
d'énergie peu émetteurs de polluants chimiques et de gaz à effet de serre,
comme telles que les énergies produites par le bois, la géothermie, les déchets
ou la cogénération. Ces réseaux de chaleur sont donc d'excellents moyens de
développer les énergies renouvelables, et d'utiliser rationnellement
l'énergie.
La directive européenne 92/77 ne prévoit la possibilité d'adopter le taux
réduit de TVA que pour l'électricité et le gaz. Cette limitation n'ayant pas de
justification, la France en a déjà demandé la modification afin d'étendre cette
possibilité à la chaleur.
Le processus d'harmonisation du dispositif pouvant durer plusieurs années et
la France étant le seul pays de l'Union européenne à appliquer des taux
différents aux réseaux de distribution d'énergie, l'amendement que nous
présentons vise à anticiper la modification attendue, d'autant qu'il semble que
la commission européenne souhaite aujourd'hui qu'un taux unique s'applique à un
même bien, en l'occurrence la production d'énergie.
Monsieur le ministre, le Gouvernement souhaite, semble-t-il, promouvoir les
énergies renouvelables. En donnant un avis favorable à cet amendement, vous
corrigeriez une injustice fiscale pénalisante pour tous les projets de réseaux
de chaleur qui sont conçus pour utiliser lesdites énergies renouvelables.
Le particulier qui se chauffe individuellement au bois acquitte une TVA de 5,5
% ; celui qui est desservi par un réseau de chaleur au bois paie une TVA de
19,6 %. C'est une injustice que vous devons corriger.
C'est la raison pour laquelle je vous engage, mes chers collègues, à voter cet
amendement.
M. le président.
La parole est à M. Paul Loridant, pour présenter l'amendement n° I-162
rectifié.
M. Paul Loridant.
Notre amendement procède de la même inspiration que celui qui est présenté par
notre collègue Gérard Miquel.
Il vise à assujettir les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie
calorifique distribuée par des réseaux alimentés par la géothermie, la
cogénération ou, plus simplement, par les réseaux de chaleur au taux réduit de
TVA.
Cette proposition, qui est une mesure de justice fiscale, avait été présentée
l'année dernière. Je rappelle que, dans sa grande sagesse, le Sénat l'avait
adoptée, contre l'avis du Gouvernement. La Haute Assemblée avait estimé, à
juste titre, qu'il s'agissait de rectifier une anomalie, l'abonnement au réseau
de chaleur ne bénéficiant pas du taux réduit de TVA à la suite, m'a-t-on
confirmé, d'un oubli de la part de la Commission et non pas d'une volonté
d'écarter cette forme d'énergie distribuée dans les appartements, notamment
dans les grands ensembles.
Je vous rappelle que les sites de géothermie permettent d'absorber l'énergie
du sous-sol, ce qui permet de préserver l'environnement. Quant à la
cogénération, elle est la forme la plus avancée de production d'énergie dans
les meilleures conditions, puisqu'elles permet de produire à la fois de la
chaleur et de l'électricité. Lorsque la cogénération provient du gaz, elle
permet en outre de réduire l'incidence sur l'effet de serre.
De surcroît, nous évitons les désagréments provoqués par les camions de
livraison de fioul lourd destiné aux cuves des chaufferies des grands
ensembles.
En résumé, il nous semble que cette mesure va dans le bons sens. Monsieur le
ministre, vous ne pourrez pas nous enjoindre une fois de plus de ne pas voter
cet amendement au motif qu'il traite d'un point que vous n'avez pas encore
négocié ! A notre connaissance, le dossier a été déposé. Par conséquent,
monsieur le ministre, acceptez que nous vous aidions ; vous pourrez invoquer à
la fois le vote de l'an passé et le vote de cette année, avec votre accord.
Mes ches collègues, par souci de cohérence et en vue d'aider le Gouvernement,
je vous adjure de voter notre amendement qui tend à imposer au taux réduit de
TVA les abonnements aux réseaux de chaleur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'an dernier, nous avons en effet eu de longs
échanges sur les taux de TVA et examiné, les unes après les autres, toutes les
demandes émanant de secteurs d'activité qui désiraient bénéficier du taux
réduit. Au demeurant, quand on fait la liste des produits et des services
concernés, on se demande parfois s'il en existe qui ne soient pas appelés à
passer, un jour ou l'autre, au taux réduit.
M. Yves Fréville.
Voilà !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Si l'on raisonne sur l'ensemble des activités, des
prestations, des biens et des services pour lesquels on demande, à chaque fois
avec de bons arguments, qu'ils soient soumis au taux réduit, on en arrive à
s'interroger sur le devenir de nos finances publiques et sur la couverture des
charges de l'Etat !
Par ailleurs, quand j'entends certains de nos collègues contester les
raisonnements tenus en faveur de la réduction des prélèvements obligatoires,
affirmer qu'il ne faut pas toucher aux services publics et que chaque euro
dépensé par une administration est indispensable, etc., tout en multipliant les
demandes visant à diminuer le rendement de l'impôt qui est globalement le plus
productif pour le budget de l'Etat,...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Justement !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... je me pose quelques questions sur la cohérence de
leur démarche !
En matière de cohérence, je dois reconnaître que le Sénat avait voté l'an
dernier une disposition identique à celle qui est présentée par les auteurs des
deux amendements en discussion. D'ailleurs, le compte rendu de nos débats de
l'époque en fait effectivement foi, monsieur Loridant.
Cependant, depuis lors, la situation des finances publiques s'est
considérablement tendue, l'audit MM. Nasse et Bonnet a dévoilé de mauvaises
surprises, le premier semestre de 2002 a vu le déficit s'alourdir de 15
milliards d'euros supplémentaires, l'avalanche des promesses électorales faites
par l'ancien gouvernement s'est traduite par toutes sortes de dépenses que nous
avons les plus grandes peines du monde à assumer.
(Exclamations ironiques
sur les travées du groupe socialiste.)
Tous ces faits nouveaux peuvent nous
conduire à réviser certaines des appréciations qui, très honnêtement, dans le
souci du bien commun, avaient pu être portées à la fin de l'année 2001 !
(Mme Marie-Claude Beaudeau s'exclame.)
Je vois que mon argumentation convainc ceux de nos collègues qui siègent du
côté gauche de l'hémicycle !
(Sourires.)
Peut-on sérieusement vouloir la
baisse du taux de la TVA pour tous les biens et services ? Toute une série de
secteurs d'activité ont été évoqués, notamment la restauration, et M. le
ministre, très honnêtement, s'en est remis à une réflexion commune pour mieux
évaluer les pertes de recettes fiscales à attendre. Est-il responsable de
continuer à vendre de l'espoir à un certain nombre de professionnels ou
d'usagers des différents secteurs que nous passons en revue, péniblement,
amendement après amendement, quand on connaît la situation actuelle des
finances publiques ?
M. Gérard Miquel.
On baisse les impôts !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Toutes les demandes de réduction du taux de la TVA
apparaissent-elles responsables, quand on les ajoute les unes aux autres et que
l'on mesure l'ordre de grandeur des pertes de recettes fiscales qui pourraient
en résulter ?
Enfin, comme vous l'avez d'ailleurs reconnu, mes chers collègues, la mesure
relative aux réseaux de chaleur que vous présentez n'est pas compatible avec le
droit communautaire actuel. Il n'est donc pas envisageable d'adopter un
amendement de cette nature dès cette année, ce qui, sans doute, n'insulte pas
l'avenir, parce que nous croyons tous au retour de la croissance, d'une
croissance vigoureuse qui permettra de dégager des marges et de poser de vraies
questions sur le devenir de notre système fiscal et de nos finances publiques.
Mais, dans l'immédiat, mes chers collègues, il conviendrait vraiment que vous
retiriez vos amendements, car ils ne sont pas opportuns.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
L'envolée lyrique de Paul Loridant affirmant qu'il
voulait m'aider était émouvante.
(Sourires.)
Je tiens à le remercier et
à lui dire qu'une bonne manière de m'aider serait de retirer son amendement
!
En effet, le droit communautaire ne permet pas, actuellement, l'application du
taux réduit de la TVA aux prestations visées par celui-ci, quelle que soit la
source d'énergie en jeu, alors que la fourniture d'électricité et de gaz peut y
être assujettie. Le Gouvernement s'attache à promouvoir à l'échelon
communautaire une réflexion sur la nécessité d'une plus grande cohérence dans
ce domaine, et je pense qu'il faut lui faire confiance.
Par conséquent, si les deux amendements n'étaient pas retirés, je serais dans
l'obligation d'émettre un avis défavorable.
M. le président.
La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote sur l'amendement n°
I-69.
M. Yves Fréville.
Je n'ai jamais proposé d'abaisser un taux de TVA. En effet, je pense que la
solution à tous nos problèmes serait d'instaurer un taux unique de TVA, et je
n'ai jamais trouvé de critère permettant de décider si une activité doit être
assujettie au taux de 19,6 % ou au taux de 5,5 %.
Par ailleurs, on affirme que la TVA présente, dans certains cas, un effet
redistributif en faveur des bas revenus, or cela est faux. On dit aussi,
parfois, qu'elle aurait une incidence écologique, qu'il convient de favoriser
les activités à forte intensité de main-d'oeuvre... Bref, on trouvera toujours
des arguments pour justifier la demande que l'on avance !
Dans le cas particulier qui nous occupe, étant donné ce que je viens de dire
sur un plan général, il faudrait tout de même faire preuve de cohérence. Il est
effectivement très difficile d'expliquer à nos concitoyens que, dans certains
cas, les abonnements à une source d'énergie sont soumis à un taux de TVA de
19,6 % et que, dans d'autres cas, le taux de TVA est de 5,5 %, d'autant que,
par exemple, un tiers des habitants de ma ville sont des clients captifs des
réseaux d'énergie.
Cela étant dit, je ne voterai pas l'amendement n° I-69, et ce pour deux
raisons : d'une part, parce que les gages sont exécrables - vous auriez pu en
choisir d'autres, monsieur Loridant ! -, d'autre part, parce que je fais
confiance au Gouvernement pour défendre ce dossier à Bruxelles.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel.
Nous sommes face à un problème important.
En effet, nos concitoyens sont de plus en plus sensibles aux problèmes
d'environnement, et nous souhaitons promouvoir les énergies renouvelables à
chaque fois que cela se révèle possible.
Ainsi, je viens de faire réaliser, dans ma commune, un réseau de chaleur dont
la chaudière est alimentée par du broyat de palettes, palettes qui étaient
jusqu'à présent jetées ou déposées dans des décharges. J'ai donc demandé à mes
concitoyens de cesser de se chauffer à l'électricité, alors que l'abonnement
est taxé à 5,5 %, ou individuellement au bois, lui aussi taxé à 5,5 %, et je
leur fais désormais payer un abonnement soumis à TVA de 19,6 %. Croyez-moi, mes
chers collègues, il faut faire preuve d'une grande force de persuasion pour les
amener à changer leur système de chauffage dans ces conditions !
Par conséquent, maintenir un taux élevé de TVA pour les abonnements aux
réseaux de chaleur n'est pas judicieux, car nous pénalisons alors l'utilisation
des énergies renouvelables que nous appelons par ailleurs de nos voeux, afin
d'économiser les énergies fossiles. C'est la raison pour laquelle je maintiens
l'amendement n° I - 69.
M. le président.
La parole est à M. Paul Loridant, pour explication de vote.
M. Paul Loridant.
Je ne reprendrai pas les arguments déjà exposés sur a défense de
l'environnement, afin de me placer, conformément à l'optique privilégiée par
l'Union européenne, sur le terrain de la concurrence libre et égale.
On ne peut justifier, monsieur le ministre, le fait qu'un abonnement au gaz ou
à l'électricité soit soumis à un taux de TVA de 5,5 %, tandis qu'un abonnement
à un réseau de chaleur, doté d'une chaufferie moderne permettant la
cogénération, des économies d'énergie fossile et une réduction des émissions
polluantes par rapport aux chaudières fonctionnant au fioul lourd, est
assujetti au taux de 19,6 %.
Je veux bien croire que cette anomalie résulte d'un oubli des instances
européennes, mais puisque la Commission européenne ne cesse de faire référence
au libre marché, à la concurrence et à l'égalité qui doit régner entre les
différents acteurs économiques, le taux réduit de TVA doit, à l'évidence,
monsieur le ministre, être appliqué aux abonnements aux réseaux de chaleur.
Je crois savoir que le précédent gouvernement en avait formulé la demande. Je
me souviens même avoir interpellé vos prédécesseurs, avant que la France ne
prenne la présidence de l'Union européenne, afin qu'ils profitent de cette
occasion pour faire progresser le dossier. Vous pouvez, sur ce point, vous
référer au compte rendu de nos débats budgétaires de l'an passé.
La mesure que nous présentons me semble relever du bon sens, et il serait
souhaitable que le Sénat, par cohérence, confirme son vote de l'année dernière
: cela aiderait le Gouvernement !
M. le président.
La parole est à M. Bernard Angels, pour explication de vote.
M. Bernard Angels.
La réponse de M. le ministre est à mes yeux largement recevable. Je sais très
bien que, même s'il partage notre opinion, il est « coincé », comme l'ont été
ses prédécesseurs.
En revanche, monsieur le rapporteur général, je crois que notre débat de ce
soir mérite mieux que la réponse que vous avez faite tout à l'heure. Nous
savons très bien que la France ne peut aujourd'hui obtenir gain de cause, sur
ce dossier, auprès des instances européennes, mais si nous insistons, c'est
pour que nos ministres puissent, demain, s'appuyer sur ce qui est apparu comme
une évidence dans cette assemblée. Quoi qu'il en soit, cessez de prétendre,
monsieur le rapporteur général, pour justifier votre volte-face par rapport à
l'année dernière, que ce qui était possible hier ne l'est plus aujourd'hui ! En
effet, il aurait suffi de décider une baisse de 1 % seulement de l'impôt sur le
revenu pour dégager des marges de manoeuvre et pouvoir procéder à des
réductions ciblées des taux de TVA.
Il faut donc arrêter de dire tout et le contraire ! Défendez clairement la
position qui est la vôtre, monsieur le rapporteur général : vous avez préféré
une réduction de l'impôt sur le revenu à des baisses ciblées des taux de TVA.
Cessez d'invoquer le manque de moyens car on a les moyens que l'on veut bien se
donner !
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud.
Tout à l'heure, M. Marini a évoqué un supposé manque de cohérence de votre
part. En ce qui me concerne, je me demande si le rapporteur général est bien le
même en 2002 qu'en 2001 !
Ainsi, au compte rendu de la séance du 27 novembre 2001 figure l'intervention
suivante de M. Marini, s'agissant du même sujet que celui qui nous occupe
aujourd'hui :
« Compte tenu de tous les arguments que nous avons entendus et de la réponse
que vient de faire Mme le secrétaire d'Etat, et contrairement à ce que je
préconisais tout à l'heure dans le souci de ne pas trop dégrader le solde
budgétaire, j'estime que le signal souhaité par les auteurs de l'amendement
pourrait être donné dès maintenant.
« A la vérité, sur ces sujets, la question est de savoir s'il faut persister à
raffiner sans fin les dispositions relatives à la fiscalité locale et à
complexifier sans fin les dégrèvements de taxe d'habitation, par exemple, ou
s'il ne vaudrait pas mieux essayer d'apporter, par le biais d'un dispositif
comme celui que nous examinons, une contrepartie à des collectivités qui se
sont dotées d'équipements et de réseaux onéreux, financés par les usagers et
sur fonds publics, et destinés, au moins en partie, à préserver l'environnement
et à permettre un développement durable.
« Telles sont les considérations que je souhaitais énoncer à la suite de tout
ce qui a été dit par nos collègues. »
Tels étaient alors vos propos, monsieur le rapporteur général. L'amendement
dont il est question fut, bien entendu, finalement adopté.
J'aurais pu recourir à ce genre de référence à propos d'autres amendements qui
ont été examinés ce soir, mais je souhaitais simplement souligner ici que vous
employez un double langage et que vous manquez de cohérence. Très sincèrement,
cela nous inquiète beaucoup pour la suite des débats.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-69.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-162 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-163, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« ... Les prestations de services funéraires. »
« II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement vise à réduire le taux de la TVA affectant les prestations de
services funéraires. Je me demande comment notre proposition pourrait être
rejetée, étant donné le nombre d'arguments qui militent en sa faveur.
J'ai remarqué, à la lecture du compte rendu des débats à l'Assemblée
nationale, que ni le rapporteur général ni vous-même, monsieur le ministre,
n'avez avancé un seul argument pour rejeter une disposition similaire. Et pour
cause ! Vous vous êttes contenté d'émettre un avis défavorable sur l'amendement
présenté ; j'espère, monsieur le ministre, que vous vous montrerez plus inspiré
devant le Sénat !
Quoi qu'il en soit, je vais maintenant développer les arguments qui fondent
notre proposition.
Premièrement, les transports funéraires sont soumis au taux de TVA de 5,5 %.
Pourquoi les frais d'obsèques demeurent-ils assujettis au taux de 19,6 % ?
Notre amendement vise d'abord à instaurer davantage de cohérence.
Deuxièmement, les frais d'obsèques représentent de un à deux mois de salaire
pour un citoyen moyen. Souvent, la soudaineté du décès ne permet pas à la
famille de faire face à des dépenses importantes et imprévues. Notre amendement
tend donc à plus de justice sociale.
Troisièmement, notre amendement présente un aspect moral non négligeable :
faire du profit sur la mort n'est pas valorisant, et celui qui ne peut pas
honorer une telle dépense en souffre.
Quatrièmement, notre amendement, s'il était adopté, nous permettrait de
profiter des possibilités offertes par la réglementation européenne qui, je
vous le rappelle, figurent à la fameuse annexe H de la directive européenne
relative à la TVA.
Cinquièmement, notre amendement a une certaine valeur, puisque le Sénat
s'était honoré, voilà deux ans, en adoptant à l'unanimité une disposition
analogue à celle qu'il prévoit. Vous ne pouvez, monsieur le rapporteur général,
que le reconnaître. Si ce vote n'a pas eu de suite, c'est parce que,
malheureusement, l'Assemblée nationale n'a pas suivi le Sénat. Le compte rendu
des débats qui se sont tenus l'an dernier au Sénat fait apparaître que vous
aviez alors tenu les propos suivants, monsieur le rapporteur général : « Il
s'agit d'une mesure sociale, car les dépenses importantes occasionnées sont
subies par des familles qui se trouvent souvent dans des situations de grande
détresse morale. »
Bien entendu, vous aviez entièrement raison, et je pense donc que vous ne
pourrez pas, ce soir, rejeter notre amendement.
En effet - je le rappelle - il est moral, il présente une réponse cohérente à
une situation sociale difficile et son coût est supportable, compte tenu du
gage prévu, puisque l'impôt sur les sociétés a baissé ces dernières années.
D'ailleurs, si vous nous proposiez de retenir un autre gage, nous serions tout
disposés à rectifier notre amendement en conséquence.
Enfin, nous n'admettons pas l'argument selon lequel les opérations réalisées
par les pompes funèbres seraient trop nombreuses et variées pour qu'il soit
possible d'envisager une solution d'ensemble. Je pense au contraire que retenir
une telle solution entraînerait une simplification à la fois pour les services
funéraires, pour le Trésor public et pour les familles, qui se sentent souvent
perdues.
Globalement, le coût de la présente mesure s'élèverait à quelques dizaines de
millions d'euros. Reconnaissez, mes chers collègues, que son adoption
permettrait une simplification et, surtout, qu'elle présente un caractère
moral. C'est pourquoi je vous invite instamment à voter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mme Beaudeau, comme tout à l'heure M. Thierry
Foucaud, tente de mettre la commission en contradiction avec la position
qu'elle avait adoptée l'an dernier.
J'avais pourtant exposé avec soin et avec précision, me semble-t-il, les
éléments objectifs et concrets qui ont changé depuis la tenue des débats que
vous évoquez ce soir, madame Beaudeau : le gouvernement n'est plus le même,
mais surtout la situation économique et budgétaire a évolué, et nous devons en
tirer les conséquences. Vous ne m'avez sans doute pas bien écouté, pas plus que
M. Thierry Foucaud, lorsque j'ai évoqué la dégradation de la situation des
finances publiques et les problèmes sans nombre nés d'une gestion extrêmement
hasardeuse.
Vous-même, madame Beaudeau, le répétiez ces dernières années.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je suis d'autant plus à l'aise !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vous ne cessiez de mettre en garde le gouvernement de
l'époque, le gouvernement de la majorité dite « plurielle », et vous ne devez
pas être surprise du spectacle auquel nous assistons aujourd'hui,...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il est vrai que c'est un drôle de spectacle !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... compte tenu des conséquences de cette gestion, en
particulier des dérives des finances publiques, très préoccupantes, auxquelles
elle a abouti.
Le raisonnement de la commission ne présente donc aucun défaut de cohérence,
aucun défaut dans la cuirasse : la situation des finances publiques ne nous
permet pas de faire droit à votre demande, madame Beaudeau.
Voilà deux ans, lorsque nous avons voté la mesure, c'est-à-dire à la fin de
l'année 2000,...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il y avait plein d'argent !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
« Plein d'argent », non, ce n'est jamais le cas,
parce que les budgets sont toujours trop restreints et parce que, dans les
périodes où les recettes abondent, les convoitises sont peut-être plus grandes
encore !
Néanmoins, si la majorité de l'Assemblée nationale et le Gouvernement avaient
eu à l'époque la volonté politique de mettre en oeuvre la mesure que vous
préconisiez - et que nous préconisions avec vous -, nous n'en parlerions plus
aujourd'hui parce qu'elle eût déjà été en vigueur. Malheureusement, cette
occasion a été perdue et la situation objective des faits est aujourd'hui tout
à fait différente.
Après vous avoir rappelé les différentes étapes de son raisonnement, la
commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement I-163.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je fournirai des explications à Marie-Claude Beaudeau,
qui, ayant lu le compte rendu des débats de l'Assemblée nationale, m'a trouvé
trop lapidaire.
Le Gouvernement est sensible à la situations des personnes frappées par un
deuil, puisqu'il ne vous aura pas échappé, madame, que nous avons relevé le
niveau de déductibilité des frais funéraires pour les successions : cela montre
que nous sommes, en effet, attentifs aux misères de ces familles.
Afin d'éviter une trop grande complexité, l'application du taux réduit de la
TVA devrait cependant concerner l'ensemble des prestations funéraires. Or
celles-ci, vous le savez, sont très diverses, le service extérieur des pompes
funèbres ne comptant pas moins de huit catégories. Le coût budgétaire d'une
telle mesure s'élèverait à environ 110 millions d'euros en année pleine. Bien
que compatible avec le droit communautaire - puisque vous insistez sur le fait
que nous ne devons pas en permanence nous réfugier derrière le droit
communautaire -, elle mesure n'est donc pas envisageable dans l'immédiat.
Par conséquant, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement
I-163.
M. le président.
La parole est à M. Jacques Oudin, contre l'amendement.
M. Jacques Oudin.
Je serai bref, monsieur le président. Nous devons, me semble-t-il, entendre
les explications de M. le rapporteur général et de M. le ministre, et je
formulerai deux observations.
Nous pouvons tout à fait comprendre, sur un plan humain les propos de Mme
Beaudeau. En effet, plus les coûts des services funéraires seront minorés,
mieux ce sera pour les familles qui, déjà, vivent une détresse morale.
Cependant, je soulignerai que le taux de la TVA n'est pas le seul responsable
du coût fort élevé des services funéraires : les prestations des pompes
funèbres elles-mêmes ne sont pas bon marché ! Il faudrait donc qu'un accord
entre les pouvoirs publics et les services de pompes funèbres puisse intervenir
sur cette question. N'oubliez pas qu'il fut un temps où existait un monopole.
Or qui dit monopole dit majoration des frais, et le résultat d'un taux de TVA
élevé s'appliquant à des frais élevés ne peut pas être satisfaisant, je vous le
concède.
M. Roland du Luart.
C'est une industrie de main-d'oeuvre !
M. Jacques Oudin.
J'aimerais, chère collègue, que vous preniez note des propos de M. le
ministre, qui a annoncé que le Gouvernement avait pris en considération les
frais funéraires et majoré les déductions dont ils font l'objet dans les droits
de succession. C'est important, car c'est un premier pas intéressant qui
profite directement aux familles.
Dans ces conditions, en attente d'un accord entre les pouvoirs publics et les
entreprises funéraires, nous devons adopter la solution présentée par le
Gouvernement. Je propose donc de ne pas adopter l'amendement du groupe CRC.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-163.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-104, présenté par M. Oudin, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce
qui concerne les opérations de formation à la sécurité routière.
« II. - La perte de recette résultant pour l'Etat des dispositions du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par une augmentation des recettes
prévues aux articles 575 à 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jacques Oudin.
M. Jacques Oudin.
Dans la lutte contre l'insécurité routière qu'ont décidé de mener tant le
Président de la République que le Gouvernement, les pouvoirs publics, associés
aux professionnels concernés - au premier rang desquels les enseignants de
conduite, malheureusement touchés, actuellement, par une grève -,...
M. Jean-Jacques Hyest.
De toute façon, cela coûte moins cher avec les gendarmes !
M. Jacques Oudin.
... réalisent des efforts actifs à travers des actions de sensibilisation et
de formation des futurs jeunes conducteurs.
Outre la modernisation des moyens de contrôle routiers engagée par la loi sur
la sécurité intérieure, la prévention des risques liés à la route passe par
l'éducation à la sécurité routière et par la responsabilisation soutenue de la
population. A l'évidence, dans le cadre du partenariat mis en place par le
Gouvernement, les enseignants de conduite tiennent un rôle majeur dans
l'éducation à la sécurité routière et dans la diffusion des bonnes pratiques
auprès des jeunes conducteurs.
Toutefois, compte tenu du nombre croissant de candidats et du sous-effectif
des inspecteurs, ils ne disposent pas des conditions optimales - notamment en
raison d'un taux de TVA non réduit pour l'activité de formation à la sécurité
routière - pour dispenser une formation suffisamment valorisante aux yeux des
candidats au permis de conduire.
Or il semble que les conditions d'application du taux de la TVA minoré soient
toutes remplies par ce secteur d'activité et qu'une telle réduction de la TVA
contribuerait efficacement à la lutte contre l'insécurité routière.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission estime que cette idée est intéressante
mais que, malheureusement, elle n'est pas applicable en l'état actuel de
l'annexe H de la directive « TVA », bien connue.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
C'est un coup de « H »(sourires) !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cependant, nous partageons totalement les intentions
affichées dans cet amendement.
Peut-être M. le ministre peut-il nous en dire plus sur les chances de voir ce
droit communautaire évoluer au cours des négociations qui auront bientôt lieu
?
Si nous n'avons pas d'assurances à ce sujet, il faudra malheureusement retirer
l'amendement !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je n'ai pasd'assurances à donner au Sénat. J'essaie
d'être sincère et loyal dans toutes mes réponses, et je suis obligé de demander
à Jacques Oudin de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président.
Monsieur Oudin, l'amendement n° I-104 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin.
Pour être honnête, monsieur le président, je n'ai pas très bien saisi les
motivations qui poussent le Gouvernement à me demander de retirer cet
amendement. La situation est complexe, je le reconnais, mais les raisons qui
m'ont amené à présenter cet amendement me paraissent fondées.
Je veux bien, puisque je soutiens le Gouvernement et répondre à sa demande et
retirer ma proposition, mais je ne vois pas l'issue qu'il envisage pour un
secteur qui connaît, chacun le conçoit, une situation difficile du fait des
grèves qui le perturbent, et je n'ai pas saisi les raisons qu'il a avancées
pour refuser cet amendement.
Je le retire néanmoins par solidarité, monsieur le président, mais uniquement
par solidarité !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
C'est dur la solidarité, monsieur Oudin !
M. le président.
L'amendement n° I-104 est retiré.
L'amendement n° I-201, présenté par M. Hyest, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1° du I de l'article 298 du code général des impôts est rédigé comme
suit :
« 1° Ils doivent seulement déposer une déclaration au titre de chaque année ou
exercice dans les conditions fixées au 3 de l'article 287 ; »
« II. - Dans le premier alinéa du 3 de l'article 287 du code général des
impôts, après les mots : "l'article 302
septies
A", sont insérés les
mots : "et au 1° du I de l'article 298
bis".
»
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Cet amendement, de même que les suivants, vise non plus à baisser le taux de
la TVA, mais à rapprocher le régime agricole du régime de droit commun.
Ainsi, l'amendement n° I-201 tend à réduire le nombre de traitements
comptables, permettant de la sorte une simplification administrative de la
comptabilité des agriculteurs ; c'est là, me semble-t-il, un objectif auquel
nous devrions tous souscrire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement de simplification administrative ne
devrait normalement entraîner qu'un décalage de trésorerie.
Le point délicat, en la matière, est que ce coût de trésorerie peut se
traduire par un coût budgétaire. Si la loi organique relative aux lois de
finances était appliquée dans toutes ses dispositions - je parle sous le
contrôle de plus compétent que moi ! -, les écritures budgétaires ne devraient
pas en être affectées. Mais, la mise en oeuvre de la loi n'étant que
progressive, c'est toujours le
statu quo ;
par conséquent, pour 2003,
première année d'application de la mesure, le coût en trésorerie devrait être
budgété.
Tout cela est évidemment assez complexe. Sur le fond, vouloir faire coïncider
la date de clôture de l'exercice comptable des agriculteurs avec la date
obligatoire de déclaration annuelle de TVA, actuellement fixée au 31 décembre
de l'année, semble relever du bon sens, et l'on ne peut que souscrire à cette
orientation. Cependant, c'est la question du coût de la mesure, estimé pour la
première année - c'est la « marche d'escalier » ! - à 53 millions d'euros selon
les règles de la comptabilité budgétaire applicables, qui préoccupe la
commission et la conduit à solliciter l'avis du Gouvernement, afin de vérifier
s'il partage les analyses qu'elle a présentées.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je préciserai d'abord à Jacques Oudin, qui n'avait pas
bien saisi le sens de ma réponse sur l'amendement n° I-104, que celui-ci était
contraire au droit communautaire.
Monsieur Hyest, l'amendement que vous avez présenté a pour objet de permettre
aux exploitants agricoles placés sous le régime simplifié agricole de déposer
une déclaration de TVA correspondant à leur exercice comptable et non à l'année
civile. Cependant, la plupart des exploitants agricoles ne bénéficieraient pas
de la mesure, en particulier ceux qui sont soumis au régime du bénéfice
forfaitaire agricole ainsi que ceux qui ont opté pour le dépôt de déclarations
trimestrielles de TVA.
Le régime simplifié agricole repose sur le principe de l'année civile, qui
constitue un élément essentiel de sa simplicité. Dans ces conditions,
l'adoption de votre proposition, monsieur le sénateur, rendrait le suivi des
déclarations ou des obligations déclaratives plus difficiles, tant pour les
redevables, qui devraient procéder à des calculs supplémentaires pour apprécier
leur situation au regard de la TVA que pour l'administration.
Au demeurant, la demande de remboursement de crédit de TVA devrait être, en
tout état de cause, déposée en même temps que la déclaration annuelle de TVA,
que celle-ci soit établie par rapport à l'année civile ou par rapport à
l'exercice comptable. De la sorte, comme le soufflait à l'instant M. le
rapporteur général en conclusion de son propos, nous ne sommes pas en présence
d'une véritable simplification. De surcroît, le coût de la mesure serait de 53
millions d'euros.
Je suis donc contraint de vous demander de bien vouloir retirer votre
amendement, qui, encore une fois, n'apporterait pas de réelle
simplification.
M. le président.
Monsieur Hyest, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Je comprends bien les arguments de M. le ministre, mais le seul qui ne me
convainque pas est celui de la non-simplification. Il me convainc d'autant
moins que la simplification est précisément l'objet de cet amendement !
Quant au coût, si le texte de l'amendement ne le mentionne pas, c'est que sa
réalité ne me paraissait pas évidente, s'agissant uniquement d'une question de
trésorerie.
Néanmoins, je persévérerai. J'étudierai mieux vos arguments, monsieur le
ministre, et je déposerai peut-être le même amendement l'année prochaine !
En attendant, je le retire.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Merci !
M. le président.
L'amendement n° I-201 est retiré.
L'amendement n° I-23, présenté par MM. François, Hyest, Dubrule, P. André et
Bailly, Mme Bout, MM. Bizet, Braye, de Broissia, César, Cornu, Doublet,
Fournier, Ginésy, Leroy, Natali, Ostermann, Oudin, de Richemont, Rispat,
Trillard et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du sixième alinéa (4°) du I de l'article 298
bis
du code général des impôts est ainsi rédigée : "Toutefois, les
dispositions des I et II de l'article 302
septies
A ne leur sont pas
applicables".
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Cet amendement a sensiblement le même objet que le précédent. Il vise en effet
à faire coïncider l'exercice de TVA des agriculteurs avec leur exercice
comptable et à permettre le remboursement du crédit de TVA à la fin de chaque
trimestre, comme cela se pratique dans le régime général.
La présente disposition tend donc à aligner le régime agricole sur le régime
de droit commun. Elle aurait le double avantage de répondre aux exigences en
matière de simplification administrative - mais je crains que les mêmes
arguments que précédemment ne lui soient opposés ! - et de rapprocher les deux
régimes de TVA.
Vous m'avez répondu tout à l'heure, monsieur le ministre, que cette
disposition ne constituait pas une simplification. Mais elle existe dans le
régime de droit commun, et son extension au régime agricole me paraît
concevable intellectuellement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Outrela disposition qu'il a en commun avec
l'amendement précédent, ce texte vise à permettre le remboursement trimestriel
aux exploitants agricoles du crédit de TVA qu'ils avancent, alors
qu'actuellement ce remboursement n'a lieu qu'après l'expiration de l'exercice
annuel de TVA. Comme le précédent, il entraînerait donc, semble-t-il, un coût
de trésorerie, lequel serait même sensiblement plus important que le précédent,
ce qui me conduit à formuler une réponse analogue.
Par ailleurs, n'oublions pas que l'article 8 du présent projet de loi de
finances permet déjà d'améliorer de manière significative la situation
comptable des agriculteurs acquittant une TVA d'un montant inférieur à 1 000
euros, c'est-à-dire de 75 % des agriculteurs. Cette mesure, qui n'a pas été
évoquée en séance publique parce qu'aucun amendement n'a été déposé à l'article
8, n'en figure pas moins dans le projet de loi de finances !
La commission salue la volonté tout à fait réelle que montre M. Hyest de
simplifier la situation comptable des agriculteurs. Toutefois, compte tenu du
coût de trésorerie et du coût budgétaire de la mesure, elle souhaite le retrait
de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement recherche la même simplification que M.
Hyest. Il semble pourtant que nous ne nous comprenions pas très bien, en effet,
ce qui suppose que nous approfondissions la discussion de nos points de vue.
Il est vrai que les agriculteurs soumis au régime du bénéfice forfaitaire
agricole doivent effectuer leur déclaration en respectant l'échéance de l'année
civile. Je ne pense pas que la disposition que vous proposez, monsieur le
sénateur, leur apporte la simplification que vous souhaitez, mais je suis prêt
à l'étudier, puisque nous nous sommes fixé pour objectif de faciliter et de
simplifier notre fiscalité.
En tout état de cause, ce qui est incontestable, c'est le coût de la mesure,
légèrement supérieur aux chiffres que j'ai annoncés tout à l'heure.
Je suis donc contraint de vous demander de bien vouloir retirer cet
amendement, tout en restant à votre disposition pour étudier les moyens de
simplifier ce point de notre fiscalité, car, je le répète, il s'agit là d'un
objectif commun !
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Hyest ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Je retire cet amendement, d'autant que son application serait apparemment
beaucoup plus coûteuse que je ne l'avais imaginé.
Quoi qu'il en soit, monsieur le rapporteur général, les agriculteurs qui
paient moins de 1 000 euros de TVA et ceux qui acquittent un montant supérieur
méritent le même intérêt, et le sénateur de l'Oise que vous êtes le sait fort
bien ! Il ne faut pas se représenter les agriculteurs comme une catégorie
unique !
M. le président.
L'amendement n° I-23 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-109, présenté par M. Franchis et les membres du groupe de
l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 298
bis
du code général des impôts est
complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Les assujettis placés sous le régime d'acomptes peuvent demander un
remboursement trimestriel du crédit constitué par la taxe ayant grevé
l'acquisition de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est
au moins égal à 760 euros.
« Les remboursements sont effectués dans les conditions prévues par l'article
242
septies
J à l'annexe II. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due
concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-200, présenté par M. Hyest, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 298
bis
du code général des impôts est
complété par un 5° rédigé comme suit :
« 5° Les assujettis placés sous le régime d'acomptes peuvent demander un
remboursement trimestriel du crédit constitué par la taxe déductible ayant
grevé l'acquisition de biens constituant des immobilisations lorsque leur
montant est au moins égal à 760 euros. Les remboursements sont effectués dans
les conditions prévues par l'article 242
septies
J à l'annexe II du code
général des impôts. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensé à due concurrence par la
création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts ».
La parole est à M. Yves Fréville, pour présenter l'amendement n° 109.
M. Yves Fréville.
Cet amendement, qui va dans le même sens que le précédent, vise à rapprocher
le régime simplifié agricole de TVA des autres régimes.
Le problème est simple, comme le soulignait M. le ministre il y a un instant :
les exploitants concernés étant soumis au régime de la déclaration annuelle,
s'ils réalisent un investissement important en juillet alors qu'ils ont rempli
leur déclaration annuelle en mai, ils devront attendre l'année suivante pour
obtenir le remboursement de leur crédit d'impôt sur cet investissement. En
d'autres termes, ils feront l'avance de trésorerie nécessaire. Le problème est
donc identique à celui que soulevait l'amendement précédent : il est logique
que ces agriculteurs obtiennent plus rapidement, si c'est possible, le
remboursement du crédit d'impôt.
L'amendement n° I-109 balise donc le champ du remboursement anticipé en le
limitant aux seuls exploitants soumis au régime des acomptes et pour les
investissements supérieurs à 760 euros, ce qui est une double manière de
réduire le coût de trésorerie.
Je reconnais que la mesure proposée a un coût budgétaire, du moins la première
année, puisque les remboursements d'impôt qui devraient avoir lieu en 2004
seraient avancés à l'année 2003. Il me paraît cependant tout à fait logique que
l'Etat, qui est le débiteur, rembourse sa dette plus rapidement.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour présenter l'amendement n°
I-200.
M. Jean-Jacques Hyest.
Cet amendement a le même objet que le précédent. J'ajouterai simplement que
les entreprises commerciales et artisanales qui relèvent du régime simplifié
d'imposition dans le cadre du régime général de TVA peuvent demander le
remboursement trimestriel du crédit de taxe déductible ayant grevé l'acquisiton
de biens constituant des immobilisations lorsque leur montant est au moins étal
à 760 euros.
Je ne vois pas pourquoi ce que l'on a fait pour les artisans et les
commerçants, on ne le ferait pas pour les agriculteurs, ou alors il faut
changer le système des commerçants et artisans, qui en effet n'est pas simple.
En tout cas, il y aurait un réel intérêt pour les agriculteurs à bénéficier
d'un remboursement trimestriel dans la mesure où ils ont fait des
investissements importants.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces amendements sont d'inspiration tout à fait
analogue aux précédents. Ils induisent un coût de trésorerie et donc un coût
budgétaire non négligeable la première année d'application.
Dans chaque cas, les dispositifs visent à simplifier la situation
administrative et comptable des agriculteurs, ce qui, bien sûr, serait positif.
Seuls des arguments relatifs aux finances publiques me contraignent à sollicier
le retrait de ces amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Certes, il y a une distorsion entre la situation
fiscale des agriculteurs et celle des commerçants ou artisans. Je ne vous
cacherai pas, messieurs les sénateurs, que c'est une raison de coût qui motive
ma réticence par rapport à votre proposition. Le coût de la mesure est en effet
estimé à 812 millions d'euros, ce qui est une somme considérable.
Par ailleurs - et c'est aussi une distorsion par rapport au système fiscal des
commerçants et des artisans - les exploitants agricoles peuvent opter pour le
dépôt de déclarations trimestrielles lorsque, étant dans une situation
créditrice au regard de la TVA, ils souhaitent obtenir un remboursement des
crédits de taxe non imputables sans attendre le dépôt de leur déclaration
annuelle. Toutefois, vous le savez, cette option est irrévocable, ce qui n'est
pas le cas des autres régimes.
Telle est la situation que je vous décris en toute sincérité. J'ai bien
entendu votre appel. Il faudra, c'est certain, aller vers une harmonisation des
régimes fiscaux des différentes activités. Mais la situation budgétaire dans
laquelle nous nous trouvons aujourd'hui ne nous permet pas d'accepter les
propositions qui nous sont soumises. C'est la raison pour laquelle je vous
demande, messieurs, de bien vouloir retirer vos amendements, sinon je serai
obligé d'en demander le rejet.
M. le président.
L'amendement n° I-109 est-il maintenu, monsieur Fréville ?
M. Yves Fréville.
J'ai bien entendu les propos favorables de M. le ministre allant dans le sens
de l'harmonisation des régimes fiscaux des artisans, commerçants et
agriculteurs. Il faudra absolument aller dans cette direction pour l'ensemble
de notre système fiscal. Même si le régime agricole peut comporter un certain
nombre de spécificités, elles ne doivent pas être exagérées. Un droit commun
doit s'établir pour les petites entreprises.
J'en viens au coût de 800 millions d'euros dont vous avez parlé. En fait,
c'est un coût apparent. Le coût réel s'établit, lui, à 800 millions d'euros
multiplié par un taux d'intérêt de 5 %, ce qui fait 40 millions. J'espère que
des jours meilleurs, qu'une croissance retrouvée permettront de réparer cette
injustice.
Dans cet espoir, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-109 est retiré.
L'amendement n° I-200 est-il maintenu, monsieur Hyest ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Je le retire également, mais cela me désole !
M. le président.
L'amendement n° I-200 est retiré.
L'amendement n° I-39, présenté par MM. Ostermann, Besse, Bizet, Cornu,
Doublet, Eckenspieller, Fournier, Gérard, Ginésy, Karoutchi, Leclerc, Peyrat,
de Richemont et Schosteck, est ainsi libellé :
« Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les assujettis soumis de plein droit ou sur option au régime normal
d'imposition et facturant la taxe sur la valeur ajoutée au taux réduit au titre
de l'article 279-0
bis
du code général des impôts peuvent demander
mensuellement le remboursement du crédit de taxe déductible lorsque le montant
de celui-ci est au moins égal à 763 euros.
« Les assujettis placés sous le régime d'acomptes prévu au 3 de l'article 287
du code général des impôts et facturant la taxe sur la valeur ajoutée au taux
réduit au titre de l'article 279-0
bis
du même code peuvent opter à tout
moment pour le régime normal d'imposition et demander immédiatement le
remboursement du crédit de taxe déductible lorsque le montant de celui-ci est
au moins égal à 763 euros. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Depuis que la TVA au taux de 5,5 % sur les travaux d'amélioration, de
transformation, d'aménagement et d'entretien des locaux à usage d'habitation
achevés depuis plus de deux ans a été instaurée, les entrepreneurs paient la
TVA au taux de 19,6 % sur leurs achats de matériels et de fournitures et
facturent au taux de 5,5 %. Pour certains corps de métiers, ces achats
représentent tous les mois un montant important. Pour eux, le montant de la TVA
déductible est désormais beaucoup plus important que celui de la TVA
récoltée.
Ils disposent donc d'un important crédit de TVA, dont ils ne peuvent demander
le remboursement que trimestriellement lorsqu'ils sont soumis au régime normal
d'imposition et qu'annuellement lorsqu'ils sont soumis au régime simplifié.
Pour ces derniers, la réduction autorisée du montant des acomptes versés ne
sert à rien. La trésorerie de ces entreprises est, par conséquent, souvent
asséchée. Celles-ci subissent de ce fait un préjudice important.
Le présent amendement vise donc à permettre aux entrepreneurs du bâtiment de
demander le remboursement mensuel du crédit de TVA dont ils disposent lorsque
celui-ci atteint au moins 763 euros. Il ne s'agit que d'une mesure tout à fait
normale d'accompagnement du dispositif d'instauration de la TVA au taux réduit
pour certains travaux dans le logement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement, qui s'applique non plus à
l'agriculture mais à d'autres professions, a en vérité un objet tout à fait
analogue à la série d'amendements qui vient d'être défendue.
Lors des discussions budgétaires précédentes, l'ancien gouvernement, pour
repousser les suggestions déjà formulées par notre collègue Joseph Ostermann,
avait invoqué des mesures en cours destinées à accélérer les procédures de
remboursement, notamment la modernisation des outils informatiques, ainsi que,
avait-il dit, les efforts de la direction générale des impôts.
Peut être pourrez-vous nous dire, monsieur le ministre, si, en termes de bonne
administration, ces procédures de remboursement ont évolué. En tout état de
cause, vos observations nous seront précieuses.
Cela dit, à l'instar des amendements précédents, celui-ci engendrerait un coût
significatif en trésorerie qui se traduirait dans le budget de la première
année. Ce seul élément nous conduit à suggérer à M. Osterman de retirer son
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
D'abord, les entreprises dont fait état Joseph
Ostermann peuvent réaliser des travaux soumis au taux réduit de TVA pour les
locaux d'habitation de plus de deux ans et au taux normal pour des
constructions d'immeubles neufs. Elles ne se trouvent donc pas, de manière
générale et systématique, en situation de crédit de taxes.
Ensuite, ces entreprises, qui relèvent du régime simplifié d'imposition,
peuvent opter pour le régime réel normal tout en restant placées sous le régime
simplifié d'imposition de leurs bénéfices - il s'agit du régime dit du «
mini-réel -, ce qui leur permet de déposer des demandes de remboursement de
crédits de TVA supérieurs à 760 euros, à l'issue de chaque trimestre civil,
sans condition tenant à la nature des dépenses supportées.
L'instauration d'un régime dérogatoire au bénéfice des seules entreprises du
bâtiment serait discriminatoire vis-à-vis des entreprises d'autres secteurs
économiques, ce qui paraît très difficilement envisageable.
Dans ces conditions, je crois devoir vous demander de retirer votre
amendement, monsieur Ostermann. A défaut, j'émettrais un avis défavorable.
M. le président.
Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann.
Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° I-39 est retiré.
Article 10