SEANCE DU 27 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 32. - I. - Par dérogation aux articles L. 1613-2 et L. 2334-1 du code général des collectivités territoriales, la part revenant aux communes et aux groupements au titre de la régularisation de la dotation globale de fonctionnement pour 2001 vient majorer, en 2003, les montants de la dotation de solidarité urbaine et de la première fraction de la dotation de solidarité rurale calculés conformément aux dispositions des articles L. 2334-13 et L. 2334-21 du code précité. Cette part est répartie entre ces deux dotations en proportion de leurs montants respectifs lors de la précédente répartition.
« II. - La dotation de solidarité urbaine et la première fraction de la dotation de solidarité rurale sont en outre majorées respectivement, au titre de 2003, de 35 millions d'euros et 4 millions d'euros.
« III. - Les majorations prévues aux I et II ne sont pas prises en compte dans le montant de la dotation globale de fonctionnement pour 2003 pour l'application du I et du II de l'article 57 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998). »
Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-96, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent, Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe socialiste et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi cet article :
« I. - Au titre de 2003, le montant de la dotation de solidarité urbaine, calculé conformément aux dispositions de l'article L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales, est majoré de 151 millions d'euros.
« II. - Au titre de 2003, le montant de la première fraction de la dotation de solidarité rurale, calculé conformément aux dispositions de l'article L. 2334-21 du code général des collectivités territoriales, est majoré de 28 millions d'euros.
« III. - Ces majorations ne sont pas prises en compte dans le montant de la dotation globale de fonctionnement pour l'application du I et du II de l'article 57 de la loi de finances pour 1999.
« IV. - Les pertes de recettes résultant du I, du II et du III ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-195 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Supprimer le I de cet article.
« II. - A la fin du II de cet article, remplacer les sommes : "de 35 millions d'euros et de 4 millions d'euros", par les sommes : "de 230 millions d'euros et de 35 millions d'euros".
« III. - Pour compenser la perte de recettes résultant du II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Pour compenser la perte de recettes résultant du relèvement de la dotation de solidarité rurale et de la dotation de solidarité urbaine, le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
L'amendement n° I-97, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent, Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe socialiste et rattachée, est ainsi libellé :
« A. - Supprimer le I de cet article.
« B. - Dans le II de cet article, remplacer respectivement les sommes : "35" et "4" par les sommes : "118" et "21".
« C. - Pour compenser la perte de recettes résultant des A et B ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe rédigé ainsi :
« ... - Les pertes de recettes résultant du maintien de la régularisation de la dotation globale de fonctionnement pour 2001 et de la majoration des prélèvements sur recettes au profit de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-129 rectifié, présenté par MM. Doligé et P. André, Mme Olin et M. J.-C. Gaudin, est ainsi libellé :
« Après le I de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La part de la majoration prévue au I destinée à abonder en 2003 la dotation de solidarité urbaine est répartie entre les communes dont le territoire comprend tout ou partie d'une zone urbaine sensible mentionnées à l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. »
L'amendement n° I-81 rectifié, présenté par MM. Delfau et Collin, est ainsi libellé :
« A. - A la fin du II de cet article, remplacer les mots : "de 35 millions d'euros et de 4 millions d'euros" par les mots : "de 65 millions d'euros et de 15 millions d'euros".
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du A ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de la majoration de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale des "bourgs-centres" sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-17, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« A. - A la fin du II de cet article, remplacer les mots : "de 35 millions d'euros et de 4 millions d'euros" par les mots : "de 58 millions d'euros et de 10,5 millions d'euros".
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la majoration de la DSU et de la DSR « bourgs-centres » est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-196, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Compléter le II de cet article, par un alinéa ainsi rédigé :
« La dotation de solidarité urbaine est par ailleurs majorée de 130 millions d'euros, attribués aux 500 premières communes classées selon l'indice synthétique défini à l'article L. 2334-17 du code général des collectivités territoriales. »
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Pour compenser la perte de recettes résultant du relèvement de la dotation de solidarité urbaine, le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° I-96.
M. Gérard Miquel. Cet amendement tend à supprimer les dispositions de l'article 32 qui conduisent à affecter le montant de la régularisation de la DGF de 2001 des communes - 100 millions d'euros - aux dotations de solidarité communales : la DSU et la DSR.
En conséquence, les 100 millions d'euros de la régularisation de la DGF de 2001 seraient répartis entre les collectivités bénéficiaires, dans les conditions habituelles prévues par le code général des collectivités territoriales.
L'amendement tend également à porter, d'une part, de 35 millions d'euros à 151 millions d'euros les abondements de l'Etat à la DSU et, d'autre part, de 4 millions d'euros à 28 millions d'euros les abondements de l'Etat à la DSR.
Les ressources directement consacrées à la DSU et à la DSR par le projet de loi de finances pour 2003 sont insuffisantes pour permettre une progression de ces deux dotations de 5 %, comme les années précédentes. En effet, l'explosion de la dotation d'intercommunalité - plus 20 % en 2001 - pèsera à nouveau lourdement en 2003 sur les ressources de la dotation d'aménagement, dont le solde alimente la DSU et la DSR.
Selon M. le rapporteur général, les ressources de la DSU et de la DSR devraient croître de 2 % seulement en 2002 compte tenu, d'une part, des moyens financiers que le projet de loi de finances pour 2003 leur affecte et, d'autre part, de l'estimation de la progression de la dotation d'intercommunalité. En 2002, ces dotations avaient bénéficié d'une hausse de 5 %.
Cette politique volontariste du précédent gouvernement a d'ailleurs été soulignée par l'Observatoire des finances locales, qui indique, très objectivement, que l'année 2002 a été marquée par la poursuite de l'important effort de péréquation engagé les années précédentes.
L'adoption du présent amendement permettrait donc aux ressources de la DSU et de la DSR d'augmenter de nouveau de 5 % en 2003 et aux communes de bénéficier de la régularisation de la DGF de 2001. Bref, le budget pour 2003 deviendrait ainsi presque aussi généreux pour les communes que le budget de 2002.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l'amendement n° I-195 rectifié.
M. Thierry Foucaud. Par cet amendement, nous proposons de répondre à deux attentes des élus locaux.
Tout d'abord, il s'agit de répartir le produit de la régularisation positive de la dotation globale de fonctionnement de 2001. C'est d'ailleurs ce que souhaitait le comité des finances locales lorsqu'il a annoncé le montant de cette régularisation en juillet dernier. Les élus, vous le savez, monsieur le ministre, s'étaient alors mobilisés pour formuler la même demande, à savoir que les 136,5 millions d'euros supplémentaires soient attribués à ces bénéficiaires dans le cadre du collectif de 2002, soit une augmentation de 0,7 % de la DGF de 2002. Loin d'apaiser leurs inquiétudes, vous n'aviez alors donné aucune piste ni aucune garantie quant à l'utilisation de cette régularisation positive.
Aujourd'hui, avec l'article 32, vous voulez faire ce que craignaient les élus locaux, c'est-à-dire prendre de l'argent à l'ensemble des collectivités pour combler, ici ou là, le manque de crédits.
S'agissant du détournement de cette régularisation positive, disposition que l'Association des maires de France condamne dans son communiqué relatif à cette loi de finances, nous vous proposons de la supprimer.
Par ailleurs, comme les abondements en matière de dotation de solidarité sont nettement en deçà des besoins, nous vous proposons de les augmenter : plus de 200 millions d'euros sont nécessaires pour la DSU. Ce chiffre fait d'ailleurs l'objet d'un consensus : c'est celui qu'a avancé l'Association des maires de grandes villes de France, association pluraliste.
Les 230 millions d'euros que nous demandons représentent une goutte d'eau eu égard aux baisses d'impôt que comporte le présent projet de loi de finances. Ces 230 millions d'euros sont encore insuffisants pour les villes les plus pauvres, qui attendent beaucoup de la réforme des finances locales.
Il faut bien avoir à l'esprit que des communes ont à faire face à des charges importantes compte tenu de leurs caractéristiques sociologiques. Certaines, vous le savez, se trouvent dans des situations réellement catastrophiques.
S'agissant des communes rurales, nous proposons un abondement de 35 millions d'euros, lequel ne peut suffire, d'ailleurs, à résoudre tous les problèmes financiers qu'affrontent les élus de ces collectivités ; nous en avons parlé ce matin. Leur résolution est subordonnée à la mise en oeuvre d'une politique spécifique en direction de la ruralité ayant pour objet de soutenir les investissements des collectivités concernées, d'y maintenir mais aussi d'y développer les services et d'absorber l'augmentation des dépenses de fonctionnement qu'elles connaissent au même titre que les autres collectivités.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° I-97.
M. Gérard Miquel. Il s'agit d'un amendement de repli ; le montant prélevé sur le budget serait moins important pour la DSU et la DSR.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous rappeler que vous vous étiez engagé, devant le Sénat, à l'occasion de l'examen du collectif budgétaire de juillet dernier, à ce que la régularisation de la DGF de 2001 soit bien versée aux collectivités locales qui en étaient bénéficiaires en 2002. Or tel ne sera pas le cas puisque vous avez alimenté la DSU et la DSR avec le montant qui devait être affecté aux diverses communes qui ont perdu le bénéfice de la DGF à la suite de votre proposition.
M. le président. La parole est à M. Pierre André, pour présenter l'amendement n° I-129 rectifié.
M. Pierre André. Cet amendement a pour objet de renforcer l'effet péréquateur de la DSU au profit des communes qui supportent le plus de charges liées, notamment, à la présence de quartiers en difficulté et comportant au moins une zone urbaine sensible.
Cet amendement vous est présenté par les trois rapporteurs de la politique de la ville - les rapporteurs de la commission des finances, des affaires sociales et des affaires économiques - ainsi que par Jean-Claude Gaudin, ancien ministre chargé de la ville et maire de la deuxième ville de France.
Nous mesurons chaque jour combien la situation se dégrade dans les quartiers les plus sensibles. Le temps d'en faire le constat est dépassé. Il faut agir et telle est, je crois, la volonté du Gouvernement.
M. de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer disait, voilà quelques jours, à cette tribune : « Pour soutenir la politique de la ville et celle de la rénovation urbaine que lance le Gouvernement, il est indispensable de renforcer l'effet de solidarité des dotations de l'Etat. La DSU, aujourd'hui, ne répond plus à la nécessité de provoquer une discrimination suffisamment positive pour aider les villes qui en ont vraiment besoin. »
Ces derniers jours, tout au long de nos débats, notre collègue Michel Mercier, rapporteur spécial et nous-mêmes avons tous insisté sur la nécessité de renforcer la péréquation. Dans son rapport, notre collègue évoque « une amélioration de la qualité de la dépense en faveur de la péréquation en réservant l'éligibilité aux dispositifs péréquateurs aux collectivités les plus en difficulté ».
Actuellement, la DSU est répartie entre 75 % des communes de plus de 10 000 habitants. Elle ne peut donc avoir un effet suffisant pour l'ensemble des communes en difficulté. C'est la raison pour laquelle l'amendement que nous vous proposons tend à concentrer la répartition sur les communes qui ont à supporter les charges sociales et urbaines les plus lourdes au regard de l'existence, sur leur territoire, d'une zone urbaine sensible, c'est-à-dire d'un quartier en difficulté. Dans ce cas, un peu plus de 50 % des communes de plus de 10 000 habitants verraient leur DSU augmenter de l'ordre de 17 % à 20 %. Cela ne coûtera rien à l'Etat.
Mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter cet amendement qui apportera une bouffée d'oxygène à nos quartiers en difficulté, qui en ont bien besoin.
M. le président. L'amendement n° I-81 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° I-17.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les dispositions de ce projet de loi de finances permettent d'envisager, pour 2003, une progression de la DSU de 3 % et une progression de la DSR « bourgs-centres » de 1,5 %. Au regard de l'objectif de péréquation, bientôt de portée constitutionnelle, il est apparu à la commission que ces taux étaient insuffisants.
Notre amendement a donc pour objet d'assurer aux deux dotations une progression de 5 % de 2002 à 2003. L'arithmétique montre que pour atteindre les 5 % il faut majorer de 23 millions d'euros la DSU et de 6,5 millions d'euros la DSR « bourgs-centres ».
Sans anticiper sur les choix futurs du comité des finances locales, et dans le cadre de ce principe d'une évolution de 5 %, il convient, par rapport au montant résultant des mécanismes de répartition de la DGF prévus par le code général des collectivités territoriales, de prévoir 58 millions d'euros de plus pour la DSU et 10,5 millions d'euros de plus pour la DSR « bourgs-centres ».
Mes chers collègues, la commission s'est efforcée, au cours des dernières semaines, de défendre l'amendement n° I-17 auprès du Gouvernement, avec tous ses arguments et toute sa conviction. Cet amendement nous paraît être la limite raisonnable d'un effort susceptible d'être réalisé malgré les contraintes lourdes des finances publiques pour 2003.
Considérant que les sommes que je viens de citer représenteraient un effort important, mais raisonnable, la commission souhaiterait, monsieur le président, que l'amendement n° I-17 soit mis aux voix par priorité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Dans la mesure où il ne s'agit que d'une priorité de vote, et sachant que les auteurs des différents amendements auront pu s'exprimer tout à loisir, je suis favorable à cette demande formulée par la commission.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Vous connaissant, monsieur le ministre, je savais que vous auriez le souci de laisser le débat aller à son terme. (Sourires.)
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-196.
M. Thierry Foucaud. Il s'agit d'un amendement de repli, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande à nos collègues du groupe socialiste, pour les amendements n°s I-96 et I-97, et à nos collègues du groupe CRC, pour l'amendement n° I-195 rectifié, de bien vouloir se rallier à l'amendement n° I-17 de la commission que j'ai eu l'honneur d'exposer et sur lequel le Sénat va se prononcer en priorité.
S'agissant de l'amendement n° I-129 rectifié, je me tourne vers notre collègue Pierre André, qui s'est beaucoup investi, au nom de la commission des affaires économiques, en matière de politique de la ville.
Qu'il me soit permis, monsieur le ministre, de souligner en particulier le rapport très récent de notre collègue sur les zones franches urbaines, ces zones franches qui ont été tant critiquées au cours de la précédente législature, mais dont les effets économiques, notamment en termes de créations d'emplois, sont incontestables, comme l'a montré Pierre André.
Les zones franches urbaines sont, de par la volonté du législateur de 1996, l'instrument utile de la discrimination positive. Si l'on considère que certains points particuliers du territoire souffrent de handicaps lourds, il est important de rééquilibrer, en quelque sorte, la situation par une politique ciblée de réductions de charges, de déductions fiscales et d'incitations à la vie économique. Cette discrimination positive a montré ses effets bénéfiques dans de nombreuses communes, dont la liste a été dressée avec beaucoup d'objectivité par la commission des affaires économiques, sous la signature de notre collègue Pierre André.
Un peu dans la même logique, on nous invite ici à cibler la majoration de la DSU en 2003 en fonction de l'existence des zones où un maximum de problèmes se posent, c'est-à-dire les zones urbaines sensibles, selon la terminologie du ministère de la ville.
L'amendement cosigné par MM. Eric Doligé et Pierre André et Mme Nelly Olin tend à réserver aux communes sur le territoire desquelles se trouve une zone urbaine sensible le bénéfice de la part de la régularisation positive de la dotation globale de fonctionnement de 2001, qui doit être versée en 2003 aux communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine.
Par dérogation aux règles qui régissent le versement des régularisations positives, l'article 32 prévoit, dans sa rédaction actuelle, que la régularisation de 2001 abonde la DSU et la DSR en 2003. La DSU devrait ainsi être majorée de 83 millions d'euros et la DSR de 17 millions d'euros.
L'amendement n° I-129 rectifié vise non pas à majorer la DSU de 83 millions d'euros, mais à créer une nouvelle enveloppe, une seconde répartition, une seconde part, en quelque sorte, qui serait réservée aux communes non seulement éligibles à la DSU, mais aussi sur le territoire desquelles se trouve une zone urbaine sensible.
Donc, on se réfère ici au zonage de la politique de la ville, donc à des critères que l'on estime objectifs et précis, et l'on détermine en fonction la répartition de la seconde part de DSU.
Les simulations qui nous ont été montrées par le ministre délégué à la ville illustrent les effets d'un tel système. Car tout ciblage amélioré joue, bien entendu, au détriment d'un certain nombre de communes, en l'occurrence une centaine, qui sont aujourd'hui éligibles à la DSU mais qui, pour une raison ou pour une autre, n'ayant pas sur leur territoire de zone urbaine sensible, ne pourraient bénéficier de la nouvelle enveloppe. Elles ne seraient pas privées pour autant de ce que j'appelle la « première part de DSU », qui leur resterait acquise en tout état de cause. Reste que les simulations qui m'ont été communiquées montrent que la somme totale que percevraient cette centaine de communes en 2003 au titre de la DSU serait inférieure de 13 %, en euros courants, à la somme totale perçue en 2002.
Voici les termes du débat, mes chers collègues : améliorer le ciblage au profit des communes dont on peut estimer, en raison de leur classement en zone urbaine sensible, qu'elles sont les plus en difficulté, mais porter préjudice à une centaine de communes de taille plus réduite - une dizaine de milliers d'habitants - qui peuvent connaître des problèmes sociaux, mais sans que ces problèmes aient donné lieu à zonage, pour des raisons qui sont certainement très contingentes ; il faudrait les examiner au cas par cas.
Le ciblage est donc assurément un bon objectif. Dans le cadre de la réforme de la dotation globale de fonctionnement que nous examinerons l'an prochain, sans nul doute, l'une des priorités sera d'améliorer le ciblage des dotations de solidarité, soit par une réduction des bénéficiaires, soit par un renforcement de la progressivité des attributions versées. Donc, vous sentez bien que le rapporteur général que je suis, et qui s'efforce d'être pleinement objectif dans cet exposé, est tiraillé entre différentes considérations. ( Sourires. )
L'amendement anticipe la réforme de l'année prochaine, pour des raisons tout à fait louables. Cependant, par définition, cet amendement arrive en cours de procédure parlementaire, par une voie éminemment respectable, mais il aurait peut-être pu être préparé un peu plus en amont. Loin de moi l'idée de critiquer mes collègues. Je pense plutôt au ministère délégué à la ville qui, à mon avis, aurait pu anticiper cette difficulté plusieurs semaines à l'avance, nous permettant ainsi de mieux saisir les avantages et les inconvénients de cette réforme, en clair, de savoir qui en bénéficie et qui en pâtit, et ce pour que nous tentions de trouver les correctifs adéquats. La concertation n'a pas réellement fonctionné. Si nous adoptons cet amendement, une centaine de communes en difficulté et qui n'ont pas été averties vont se trouver pénalisées à hauteur de 13 % du montant de la DSU qu'elles auront perçu en 2002.
Dans mon département, et pour la ville dont je vous parle un peu trop souvent (Sourires), l'adoption de l'amendement procurerait un gain de quelques centimes d'euros par habitant, et ce n'est pas significatif. Mon approche est donc tout à fait neutre. S'agissant des autres villes importantes du département ayant des zones urbaines, elles sont sensiblement bénéficiaires. Nous constatons, en revanche, des disparités de traitement sans raison objective pour les communes de taille plus moyenne, d'une quinzaine de milliers d'habitants, selon qu'elles disposent ou non d'une zone urbaine sensible sur leur territoire. Quand on regarde la liste, sur un département que l'on connaît, avec des communes que l'on connaît, les choses apparaissent évidemment de façon plus concrète, mes chers collègues !
Bref, je ne sens pas très bien la réforme ici préconisée tout en partageant l'ambition de nos collègues. A mon avis, il faut les remercier de donner un coup de pied dans la fourmilière, tant il est vrai que la répartition de ces dotations de solidarité mérite d'être réexaminée. Il y a, d'ailleurs, beaucoup d'arbitraire dans les modalités qui ont été retenues depuis que le système existe. Le bon moment se présentera lors du débat sur les concours financiers aux collectivités locales. Si nous suivons la voie qui nous est proposée, nous allons créer une seconde part de la DSU obéissant à des critères différents de la première, ce qui reviendra à ajouter un étage supplémentaire à un édifice déjà branlant. Le résultat, je vous le laisse prévoir, mes chers collègues...
J'ajoute, pour conclure, que, dans le contexte actuel, la DSU, même si elle est critiquable par certains aspects, est très progressive s'agissant du montant de ses attributions et qu'une part vraiment prédominante de cette dotation se trouve aujourd'hui concentrée sur une centaine de communes considérées comme les plus défavorisées.
Tels sont les éléments d'appréciation que je peux vous donner : réexaminer ce dossier s'avère, encore une fois, très opportun. L'initiative de nos collègues est un intéressant appel à la réflexion et à la remise en cause de ces systèmes administratifs. La commission s'en remet, monsieur le ministre, à l'avis que vous formulerez au nom du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je m'adresserai tout d'abord à M. Miquel.
Monsieur le sénateur, vous ne trouverez dans aucun compte rendu de nos travaux un engagement de ma part sur une éventuelle régularisation au bénéfice de toutes les communes. Vous y lirez même le contraire, parce que je me souviens que le malicieux Michel Charasse avait déposé un amendement qui prévoyait explicitement cette répartition et sur lequel j'avais par précaution émis un avis défavorable : je réfléchissais, en effet, à la façon dont nous pouvions renforcer la péréquation, ce que nous faisons en la circonstance.
Plutôt que de répartir la DGF en pluie fine sur l'ensemble des communes, peut-être faut-il, en effet, et à titre exceptionnel, la concentrer sur les communes qui sont à l'épreuve et qui bénéficient de la DSU et de la DSR. Vous voyez, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est animé, tout comme vous, d'un esprit de péréquation. Nous ne sommes peut-être pas d'accord sur les modalités, mais l'objectif nous est commun. Nous avons déjà, de ce point de vue-là, fait un premier pas !
A ce propos, le prélèvement de 100 millions d'euros sur la régularisation permet d'accroître notablement l'effet péréquateur des concours de l'Etat. Une répartition dans les conditions de droit commun, telle que vous proposez de la réinstaurer, conduirait à un saupoudrage des crédits assez peu efficace. Les calculs qui ont été faits montre que cela entraînerait une augmentation de 0,76 % de la DGF initiale et qu'une commune percevant 100 000 euros de DGF bénéficierait de 760 euros supplémentaires, ce qui ne serait sans doute pas significatif pour elle, mais le serait pour les communes éligibles à la DSU.
J'ajoute que la péréquation est un objectif que le Gouvernement non seulement partage avec vous mais qu'il encourage. Ainsi, il a souhaité garantir la progression des dotations de péréquation. Des abondements exceptionnels de la DSU et de la DSR ont été prévus à cet effet, pour un montant total de 162 millions d'euros, ce qui représente un effort substantiel. Je suis sûr que vous serez sensibles à ces explications, mesdames, messieurs les sénateurs, et que vous consentirez à retirer vos amendements.
Quant aux abondements exceptionnels de l'Etat en faveur de la DSU et de la DSR « bourgs-centres », je souhaite faire trois observations principales.
Tout d'abord, les collectivités territoriales ont fait l'objet, en 2003 - je sais que tel n'est pas votre avis, même s'il me semble objectivement difficile de contester les faits - d'un traitement très avantageux compte tenu du contexte budgétaire actuel. Rappelons ainsi que les concours de l'Etat progresseront, en 2003, de 3,3 % par rapport à 2002 : beaucoup de nos compatriotes voudraient avoir l'assurance de voir leurs ressources évoluer dans la même proportion...
La DGF augmentera, à elle seule, de 422 millions d'euros, soit une augmentation de 2,3 %, ce qui est tout de même considérable.
Ensuite, je me suis engagé à compenser les effets des nouvelles modalités d'indexation des dotations qui sont allouées aux établissements publics de coopération intercommunale décidées par l'Assemblée nationale sur la DSU et la DSR.
Enfin, je partage l'objectif de progression de la DSU et de la DSR bourg-centre que souhaite la commission des finances.
C'est ce qui me permet, monsieur le président, d'émettre un avis favorable sur l'amendement n° I-17, qui est présenté par M. le rapporteur général et dont je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-17 rectifié.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre délégué.
M. Alain Lambert, ministre délégué. J'en viens à l'amendement n° I-129 rectifié. M. le rapporteur général a salué les travaux que M. Pierre André mène au titre de la politique de la ville ainsi que l'expérience qui est la sienne, en tant que maire d'une ville comportant une zone urbaine sensible. Je comprends sa préoccupation. En effet, je connais très bien une ville de Basse-Normandie qui se trouve exactement dans la même situation et qui serait certainement favorisée par cet amendement. Je crois néanmoins qu'il faut, comme en toute chose - et c'est votre cas à tous -, être aussi objectif que possible !
L'amendement que vous proposez comporte des effets secondaires qui sont extraordinairement pénalisants pour des communes auxquelles le Sénat doit porter un intérêt tout aussi attentif et scrupuleux.
Après M. le rapporteur général, je veux vous dire que la DSU est issue d'un mécanisme extraordinairement compliqué. En aparté, nous sommes convenus qu'il faudrait le revoir, le nombre de bénéficiaires faisant perdre une partie de l'efficacité à la dotation. Tout le monde en est convaincu et l'instrument mérite d'être remis à plat. Pour autant, le modifier, sans doute à la marge, mais au dernier moment, ferait sortir du système des communes dont la situation est également préoccupante.
Par conséquent, je ne conteste pas l'utilité, pour les communes ayant une zone urbaine sensible, d'une mesure comme celle que vous proposez, mais elle s'appliquerait aux dépens d'autres communes dont la situation peut être aussi préoccupante et qui n'ont absolument pas, à quelques semaines de la préparation de leur budget, anticipé une perte de recettes de cette nature, susceptible de les mettre dans une situation intenable.
C'est la raison pour laquelle, quel que soit le bien-fondé de votre proposition, de l'esprit qui l'anime ainsi que de votre souhait de contribuer à l'amélioration du mode de calcul de la dotation, je suis au regret de vous demander, monsieur André, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi je serais obligé d'émettre un avis défavorable.
Au-delà de votre personne dont je connais l'expérience - car la pratique de la politique de la ville est plus importante que la théorie -, je voudrais adresser un message subliminal à ceux qui pratiquent la politique de la ville en théorie seulement et qui peuvent parfois inspirer de telles idées.
Qu'ils se méfient des mécanismes technocratiques aboutissant à des dotations devenues incalculables, qui entraînent les pires injustices. Ce n'est pas au dernier moment que nous pourrons réellement faire du bon travail, alors même que nous sommes incapables d'opérer les simulations qui nous éclaireraient sans contestation possible sur leurs véritables effets.
C'est pourquoi je suis contraint, je le répète, car j'ai de la sympathie à la fois pour son auteur, pour la ville dont il est le premier magistrat et pour les villes qui sont dans la même situation, d'indiquer au Sénat qu'il serait tout à fait déraisonnable d'adopter l'amendement n° I-129 rectifié.
Quant aux autres amendements en discussion commune, monsieur le président, le Gouvernement y est également défavorable.
M. le président. Je mets aux voix par priorité l'amendement n° I-17 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s I-96, I-195 rectifié et I-97 deviennent sans objet.
L'amendement n° I-129 rectifié est-il maintenu, monsieur André ?
M. Pierre André. Je tiens au préalable à remercier M. le ministre et M. le rapporteur général des propos sympathiques qu'ils ont tenus à l'égard de la commission des affaires économiques et des travaux que nous menons.
Je souscris à l'analyse qu'ils ont développée. Vous l'avez bien compris, par cet amendement, nous souhaitions attirer fortement l'attention du Gouvernement sur la nécessité de revoir la DSU, afin que son effet péréquateur soit sensible dans nos villes.
Dans ces conditions, ne voulant pas être l'auteur d'un amendement qui pénaliserait une centaine de communes qui sont en train de préparer leur budget, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° I-129 rectifié est retiré.
Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-196 n'a plus d'objet ?
M. Thierry Foucaud. Il n'a plus d'objet, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-196 est retiré.
Je mets aux voix l'article 32, modifié.

(L'article 32 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 32