SEANCE DU 4 DECEMBRE 2002


M. le président. Dans la suite de l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant l'outre-mer, la parole est à M. Paul Vergès.
M. Paul Vergès. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, donner tout son sens à un budget oblige à dépasser son caractère statique et à appréhender la réalité mouvante dans laquelle il s'inscrit. C'est aussi se dégager de la limite de l'annualité budgétaire et garder les yeux fixés sur un horizon qui, déjà, se dévoile.
Assurément, le nouveau paysage de l'outre-mer prendra forme au cours de l'année 2003, tant cette année verra la convergence des rendez-vous qui conditionneront notre avenir.
C'est tout d'abord l'année de la décentralisation et de l'entrée en vigueur de la réforme constitutionnelle. Je n'insisterai pas, madame la ministre, sur l'absence d'audace des uns et de fermeté des autres, qui a conduit à vider en partie la réforme de ses potentialités positives pour la Réunion. Toutefois, les assises de la décentralisation, qui seront organisées dans notre région au début de l'année prochaine, pourraient, tout en augmentant les responsabilités locales, permettre une clarification des compétences entre les différentes collectivités.
Ces assises de la décentralisation pourraient aussi permettre une contribution réunionnaise à l'élaboration des futures lois organiques : il est impérieux de corriger le caractère pénalisant pour l'outre-mer de la rédaction du projet de loi constitutionnelle en matière de transferts financiers.
Les collectivités d'outre-mer ne demandent pas de responsabilités nouvelles pour gérer - de plus en plus difficilement, d'ailleurs - la pénurie des moyens. Elles demandent, pour exercer efficacement ces responsabilités nouvelles, des moyens adéquats correspondant à une juste reconnaissance de leurs retards, qui sont amplifiées par la progression démographique.
Mais, au-delà de l'environnement juridique, l'acquisition de la responsabilité est aussi affaire d'audace, d'imagination et de volonté politique. J'en veux pour preuve l'importance de la rencontre organisée la semaine dernière, à la Réunion, par les acteurs associatifs, qui ont affirmé leur volonté de créer une véritable chambre consulaire de la vie associative. Cette initiative inédite et originale peut constituer l'un des premiers exemples d'expérimentation de la « République décentralisée ».
La façon dont l'épineux dossier du désenclavement et de la desserte aérienne a trouvé un début de solution dans notre île en est un autre. Dans un consensus exemplaire entre les deux collectivités, la Réunion a fait le pari de maîtriser son désenclavement et d'offrir aux Réunionnais, avec l'effort attendu de l'Etat en matière de continuité territoriale, des conditions pérennes et satisfaisantes de mobilité.
En juin 2003 débuteront les vols entre la Réunion et Paris assurés par la compagnie régionale Air Austral. Les récents développements en matière de desserte aérienne de l'outre-mer témoignent de la justesse de la position réunionnaise.
Dans ce domaine comme dans d'autres si essentiels, nous avons la conviction que le développement durable serait en permanence menacé si il était tributaire de contingences extérieures.
Cela est particulièrement vrai en matière d'énergie. La région Réunion a fait le choix stratégique de parvenir à l'autonomie énergétique d'ici à vingt ans. Dans notre île, par définition entourée d'eau, dans notre île tropicale, montagneuse, volcanique, ensoleillée et soumise aux alizés, l'indépendance énergétique est possible.
L'année 2003 est aussi la dernière année avant l'élargissement de l'Union européenne. Cela me conduit à faire deux remarques.
Premièrement, il nous faut saisir le mouvement de l'histoire et nous rendre à l'évidence, sans porter de jugement de valeur : les départements d'outre-mer seront de plus en plus des régions ultrapériphériques d'Europe.
Pour autant, l'élargissement de l'Union vers l'est ouvre également une période d'incertitudes. Cela signifie que nous devons consolider ce statut avec le plus grand soin, au cours de cette année, et lui donner un véritable contenu positif pour le développement de nos régions. J'ai eu l'occasion de le dire lors des rencontres de la délégation pour l'Union européenne, je le redis aujourd'hui : il est d'une haute importance que l'ultrapériphéricité demeure inscrite au plus haut niveau dans l'ordre juridique communautaire qui sera issu de la nouvelle architecture institutionnelle de l'Union. Souhaitons à ce propos que les incohérences de la révision constitutionnelle n'affaiblissent pas l'argumentation qui sera développée auprès de Bruxelles pour que soient prises en compte nos spécificités.
Ma deuxième remarque porte sur le dossier de l'octroi de mer. L'année 2003 sera celle de la prorogation d'un an du dispositif. C'est un sursis, certes important, mais rien de plus. Il ne doit pas occulter que l'enjeu essentiel réside dans la sauvegarde de l'économie générale du régime actuel pour une nouvelle période de dix ans. Nous devons donc, d'ores et déjà, veiller à ce que la chronique de cette réforme annoncée ne se transforme pas insidieusement, à terme, en chronique d'une extinction annoncée.
L'année 2003 doit surtout voir l'entrée en vigueur de la loi de programme pour l'outre-mer. Cette loi, qui régira les quinze prochaines années, s'appliquera dans une période où la population active n'aura jamais été aussi nombreuse à la Réunion, puisqu'elle coïncidera avec la dernière partie de notre transition démographique.
En effet, la population active réunionnaise pourrait augmenter de 34 % dans l'hypothèse basse et jusqu'à 48 % dans l'hypothèse moyenne durant cette période. Cette force profonde qui agit silencieusement est, je crois, la donnée fondamentale. Elle indique très clairement que la problématique de l'emploi est et restera au coeur des priorités pour de nombreuses années encore.
Le budget de l'outre-mer comme la loi de programme annoncée font du développement de l'économie marchande et de l'objectif d'égalité économique les axes essentiels de la politique gouvernementale pour relever ce défi.
Si l'objectif de développement est bien évidemment partagé, trois remarques s'imposent.
Premièrement, pour peu que le concept d'égalité économique recouvre un sens précis, les Réunionnais savent que l'égalité ne se divise pas et qu'elle n'en est pas moins politique et sociale.
Deuxièmement, la corrélation entre les exonérations de charges accordées aux entreprises et le nombre d'emplois créés doit pouvoir être rigoureusement établie.
Aussi, il me semble essentiel, avant toute amplification, qu'une évaluation des dispositifs de la loi d'orientation pour l'outre-mer soit conduite.
Il serait souhaitable, pour la clarté des débats, que la commission nationale prévue à cet effet soit réunie avant la discussion de la loi de programme au Parlement.
Troisièmement, cela relève presque du bon sens, la complémentarité entre le secteur marchand et celui de l'économie sociale doit être recherchée. En la matière, nous devons davantage faire confiance aux statistiques qu'à l'idéologie ! Les chiffres indiquent sans contestation possible que notre secteur productif, performant qu'il puisse être, ne pourra absorber, dans les quinze ans qui viennent, le nombre de jeunes qui arriveront en masse sur le marché du travail.
Dans ce contexte se pose avec gravité la question actuelle du devenir des emplois-jeunes dont les contrats arrivent à expiration.
Il ne s'agit pas de faire de procès d'intention aux uns ou autres autres, il s'agit simplement d'interroger l'Etat sur l'avenir réservé à des milliers de jeunes qui ne demandent qu'à continuer à travailler et à participer au développement du pays.
Une importante réunion s'est déroulée sur cette question dans le cadre de la région, le 4 novembre dernier. De nombreuses solutions ont été esquissées dans un dialogue avec les jeunes. Une unanimité s'est dégagée en faveur de la prorogation d'un an des contrats arrivant à expiration. Rien qu'en 2003, 2 400 contrats arriveront à expiration. Au total, plus de 7 000 jeunes sont concernés ; c'est autant que le nombre de planteurs installés dans notre île.
Ne pas trouver de solution à ce problème, c'est obérer, d'ores et déjà, toutes les conditions de mise en oeuvre et de réussite de la loi de programme.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour conclure, j'appellerai votre attention sur un fait majeur qui, dès le début de l'année 2003, dominera l'actualité dans l'océan Indien.
Dans un mois et demi, le président des Etats-Unis, M. George Bush, accompagné du secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, M. Colin Powell, présideront, à l'île Maurice voisine, une rencontre de trente-huit pays africains. L'importance nouvelle accordée par les Etats-Unis à cette zone en pleine mutation nous interroge, comme elle devrait interroger la France et l'Union européenne.
Si l'avenir de la Réunion est lié à celui de l'océan Indien, n'oublions jamais que l'océan Indien, zone de paix, est aussi la condition de la stabilité mondiale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Monsieur le président, mes chers collègues, j'ai plaisir cette année à prendre la parole sur le premier budget que nous présente Mme la ministre de l'outre-mer.
Alors que l'année dernière j'avais voté contre un budget dont le montant était à peu près le même - à 1,5 % près - que celui que vous nous présentez, on ne manquera pas de me demander comment je pourrai voter le vôtre, madame la ministre.
A cette objection, je répondrai qu'un budget, ce n'est pas seulement un problème de volume, c'est aussi un problème de volonté politique. Or, comme vous l'avez dit, madame la ministre, avec la clarté et la passion qui vous caractérisent, nous allons passer cette année d'un budget déclaratif à un budget concret, réel, adapté aux réalités de nos départements et territoires d'outre-mer.
Je vais vous donner un exemple pour illustrer cette évolution. Le budget 2002 prévoyait 23 000 mesures nouvelles... mais il n'en est resté que 7 000 à l'arrivée.
Pour votre part, dès votre prise de fonctions, vous avez annoncé le passeport mobilité et vous l'avez mis en oeuvre, permettant à des milliers de jeunes de passer des concours, de venir travailler en métropole et de trouver ainsi une dignité par le travail.
C'est la raison pour laquelle nous tenons dès à présent à apporter, à travers ce budget, notre soutien à la volonté politique qui vous anime pour avancer avec courage, avec détermination, avec résolution.
La réélection du Président de la République et l'arrivée du nouveau gouvernement au pouvoir ont suscité un grand espoir, espoir justifié par l'annonce d'une loi devant porter sur quinze ans et ayant pour objectif l'égalité économique.
Au moment ou il est procédé aux arbitrages, je voudrais vous dire, madame la ministre - et à travers vous, à tout le Gouvernement, notamment à son chef, Jean-Pierre Raffarin - que cet espoir ne doit pas être déçu. Il va donc falloir tenir compte, dans ces arbitrages, de nos handicaps, de nos retards, de notre jeunesse, de notre isolement, de notre éloignement.
Mieux vaut investir dans le développement économique, qui rapporte à la collectivité nationale et à nos régions, que de continuer à jeter l'argent dans le panier percé de la solidarité nationale passive, qui annihile, qui inhibe et finit par mécontenter les populations d'outre-mer.
C'est la raison pour laquelle nous choisissons résolument la voie de l'éducation, du travail, de l'effort, de la responsabilité et de la dignité.
M. Roland du Luart, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Très bien !
M. Jean-Paul Virapoullé. Sur ce chemin, nous avons besoin de vous. Faites-nous confiance et investissez dans l'homme, dans les outils de production, dans la réduction de nos handicaps. Vous récolterez alors le développement au lieu de renforcer le besoin d'assistance ! (Marques d'approbation sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Paul Vergès vient d'aborder la question des emplois-jeunes. J'ajouterai à ce qu'il a dit que les emplois-jeunes sont pour nous un cadeau empoisonné.
En métropole, il y en avait 300 000, mais la métropole est riche, elle a un tissu industriel, un tissu commercial, un tissu productif. La Réunion, au contraire, est pauvre, le tissu commercial et industriel y est limité. Si l'on souhaite se rendre dans le département voisin, il faut franchir la mer ; au-delà se trouve l'Afrique, et bien plus loin encore la France métropolitaine et l'Europe.
Résorber 9 000 emplois-jeunes dans notre économie va nous être très difficile compte tenu des 12 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail.
Aussi, madame la ministre, nous serons à vos côtés pour demander au Gouvernement de réintégrer ces jeunes dans l'économie productive, si possible, mais aussi pour lui rappeler que ces emplois-jeunes sont utiles dans bien des domaines.
Ils ont, en effet, démontré leur utilité tant au sein des collectivités locales que dans les associations. Or, dans les pays pauvres, les associations jouent un rôle de cohésion sociale et de lien culturel extraordinaire. Le Gouvernement ne pourra pas échapper à la définition d'une politique d'intégration d'un certain nombre - à mon avis important - d'emplois-jeunes, politique à laquelle il faudra bien consacrer les moyens budgétaires nécessaires.
Quand vous plaiderez cette cause, madame la ministre, vous pourrez vous prévaloir de l'accord de tous les élus de la Réunion. On ne peut pas, comme vous l'avez si bien dit, laisser des jeunes qui ont fait la preuve de leur efficacité et de leur dévouement au travail sur le bord du chemin.
Je voudrais maintenant aborder le problème du logement des Réunionnais en liasion avec leur intégration en métropole. A ce propos, j'ai lu avec beaucoup de plaisir dans un quotidien national, madame la ministre, que vous entendiez faire des efforts pour trouver en métropole les moyens de loger nos compatriotes.
Aujourd'hui se tiennent à la Réunion des forums d'entreprises. Des entreprises nationales, parmi les plus célèbres, viennent y recruter de la main-d'oeuvre locale qualifiée grâce à nos lycées, nos collèges, nos lycées professionnels et nos centres de formation d'apprentis, les CFA. Nous avons passé convention avec la chambre permanente des métiers, qui a ouvert tous les CFA métropolitains aux jeunes Réunionnais. Nous ferons de même avec l'APCI, l'assemblée permanente des chambres de commerce et d'industrie, avec les écoles d'infirmières, etc.
Toutefois, nous nous heurtons au problème du logement. Vous avez remarqué, comme moi, qu'il ne fait pas chaud dehors : on ne peut pas laisser les enfants des Réunionnais loger sous les ponts ! Il faut donc trouver des logements. Si nous parvenons à résoudre ce problème du logement, si, en 2003, nous nous consacrons à l'humanisation de la mobilité des jeunes qui veulent suivre un cursus d'intégration par le travail en France métropolitaine ou en Europe, nous aurons fait un grand pas pour l'accès de ces jeunes à la qualification.
J'en viens à la loi de programme que vous préparez, pour vous assurer de notre soutien : nous sommes au coude à coude avec vous.
Selon nous, quatre grands chantiers doivent être ouverts.
Tout d'abord, l'égalité économique voulue par le chef de l'Etat suppose l'égalité d'accès au savoir. Quand les entreprises Bénéteau, Renault ou Peugeot viennent à la Réunion, ce qui les intéresse, c'est la main-d'oeuvre qualifiée.
La région et le département font de gros efforts, mais il faut aller encore plus loin et, si l'on ne peut pas avoir cette égalité d'accès au savoir à la Réunion, il faut qu'elle soit possible en Europe, en métropole. C'est le premier pilier, j'allais dire le pilier indispensable à l'épanouissement de notre jeunesse. Pour cette raison, nous sollicitons l'accès des jeunes Réunionnais à tous les lieux de savoir européens.
Le deuxième pilier, madame la ministre, c'est la réduction du handicap qu'est la distance. Après avoir quitté la France, un conteneur de matières premières devant être transformées à la Réunion passe par dix intervenants : ce n'est pas un parcours du combattant, c'est un parcours du résistant, avec les coûts y afférents, et pourtant, la Réunion se développe !
La continuité territoriale, c'est la baisse du coût des matières premières, c'est la baisse du coût de revient des touristes qui passent dans nos régions, de telle sorte que se dégagent pour les Antillais des marges d'investissement et des bénéfices.
La continuité territoriale, c'est aussi la baisse du coût des communications dans les NTIC, les nouvelles technologies de l'information et de la communication. Les centres de travail et de téléservices se développent dans mon département, le dessin animé ayant fait la preuve que nous pouvons devenir des lieux de production.
Le quatrième pilier, c'est la compétitivité. Madame la ministre, vous allez baisser le coût du travail. Vous allez mettre en place le chantier de la défiscalisation. Mais, si l'Etat n'a pas les moyens de faire tout, il faudra cibler. Comme la Réunion veut exporter dans la région et sur l'Europe, ciblez sur l'export, prenez des mesures décisives qui, dans les domaines que nous choisirons ensemble, avec tous les élus locaux, nous permettront de nous inscrire sur la carte du développement économique. Nous ne sommes pas plus bêtes que les autres et, grâce à la solidarité, nous possédons un savoir-faire.
Le dernier pilier - et cela rejoint la mission que vous avez eu l'amabilité de me confier - c'est l'intégration irréversible, automatique et proportionnée, compte tenu de nos handicaps, aux mécanismes européens. Dans la nouvelle Constitution européenne, nous devrons être inscrits en tant que région ultra-périphérique.
Mais la volonté du Gouvernement ne suffit pas. Il faut aussi celle des populations et des élus locaux. Nous aussi, nous devons changer de culture. Nous ne pouvons plus passer notre temps à nous plaindre alors même que nous n'utilisons pas tous les moyens mis à notre disposition, notamment les moyens européens. Nous devons passer de la culture de l'enfant gâté, renfermé sur lui-même, à l'envie de relever le défi de la compétition, de la conquête des marchés, de la mobilité, du bon usage de la solidarité nationale. Nous devons avoir le courage de passer de la solidarité passive à la solidarité active. Nous avons le devoir de dire que les populations de l'outre-mer veulent inscrire cette nouvelle mandature sous le signe de l'égalité économique, de la liberté par le travail et la dignité. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Rodolphe Désiré.
M. Rodolphe Désiré. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget pour 2003 du ministère de l'outre-mer, qui s'élève à 1 084 millions d'euros, est en faible augmentation - 0,60 % - par rapport au budget voté l'année dernière. Cependant, il faut signaler qu'il ne représente que 11 % de l'ensemble des sommes allouées par l'Etat à l'outre-mer.
J'ai toujours pensé, et je le déclare ici même à chaque débat budgétaire, que la politique du Gouvernement en direction des départements d'outre-mer devait être une politique de projet de développement plutôt qu'une politique de guichet. Il est évident que, si le budget de l'outre-mer n'a cessé d'augmenter ces dernières années - de 50 % en cinq ans -, nous n'avons malheureusement pas connu pour autant une baisse corrélative du chômage et que la situation économique s'est même globalement aggravée, notamment aux Antilles.
J'ai bien noté les mesures que vous comptez engager, madame la ministre, concernant le développement de l'emploi dans le secteur marchand et le logement. Cela constitue une première étape, en attendant la mise en place d'une loi de programme pour quinze ans, consacrée au rattrapage économique. Cette durée est nécessaire, me semble-t-il, pour obtenir des résultats durables. Mais cette loi de programme ne devra pas décevoir.
Je ne m'attarderai pas sur l'analyse des masses financières, et mon intervention portera surtout sur les conditions d'une véritable relance de l'économie, plus particulièrement à la Martinique.
Dans le secteur agricole, on ne peut que déplorer la mauvaise santé de la filière de la banane. C'est la survie de ce pilier de l'économie martiniquaise - il emploie 20 000 personnes -, qui est aujourd'hui menacée par la baisse des cours. S'il faut se réjouir du préfinancement, par la Banque de développement pour les petites et moyennes entreprises, des aides compensatoires, la récente revalorisation de ces dernières demeure insuffisante pour résorber l'inquiétude et les contestations légitimes des producteurs. Mais je pense que l'aide à l'exportation, si elle est mise en place rapidement, pourrait aider la filière à résister.
La filière ananas, malgré de gros efforts de restructuraion fournis par les professionnels, souffre d'un endettement chronique. Il convient d'apporter d'urgence à cette filière les moyens financiers et d'encadrement qui lui sont nécessaires si l'on ne veut pas qu'elle s'effondre définitivement.
Les fruits et légumes, notamment à la Martinique, n'ont pas de crédits de promotion inscrits au volet correspondant du FEOGA. Il faudrait y penser lors de la renégociation du DOCUP, le document unique de programmation, pour 2003-2004.
En manifestant son intention de faire voter une loi de programme, de mettre en place une défiscalisation plus efficace et d'installer un climat de confiance favorable à une relance des investissements vers les départements d'outre-mer, le Gouvernement donne un signe fort en faveur du rattrapage économique.
Mais il faudra probablement envisager aussi la mise en place de zones franches puisque ce système s'est révélé particulièrement efficace en Corse. C'est l'une des revendications des professionnels du tourisme.
Les PME de la Martinique, qui ont un poids déterminant dans le tissu économique local, sont actuellement très inquiètes devant la reprise de la Société de crédit pour le développement de la Martinique, la SODEMA, par la BRED, banque privée, alors même que l'Agence française de développement s'est engagée à renforcer ses interventions aux Antilles.
Concernant le tourisme, comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat au tourisme, c'est d'un véritable « plan Marshall » que nous avons besoin. Il faut rappeler l'importance de ce secteur qui, malgré ses difficultés actuelles, est à l'origine, pour l'économie martiniquaise, de retombées financières deux fois plus importantes que celles qu'induit le secteur de la banane.
J'insisterai plus particulièrement aujourd'hui sur la nécessité d'intervenir rapidement dans le domaine de la plaisance. Ce secteur à forte valeur ajoutée, même s'il a résisté à la crise, connaît d'énormes difficultés, essentiellement dues à la réticence du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à délivrer les agréments nécessairs à la reconstitution de la flotte de location. Signalons pour mémoire que la plaisance rapporte à la Martinique deux fois plus que la navigation de croisière.
Je n'insisterai pas sur le problème du transport aérien, que vous avez abordé concrètement, madame la ministre, en préconisant d'appliquer le principe de continuité territoriale. J'apprécie, en outre, les efforts entrepris pour consolider la position d'Air Lib : le maintien d'une concurrence sur ces destinations est en effet salutaire, et même indispensable.
La loi Perben du 25 juillet 1994, qui a institué une négociation annuelle sur le fret, devrait être étendue au transport de passagers de façon que soient mieux maîtrisés les capacités en sièges et les tarifs sur les lignes des Antilles et de la Guyane.
Il me reste, concernant la continuité territoriale, à vous dire que ce principe devrait aussi concerner les nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Compte tenu du temps qui m'est imparti, j'évoquerai brièvement la nécessaire relance, dès 2003, de l'économie antillaise, notamment par la commande publique. La réactivation de celle-ci, qui connaît une baisse constante, permettrait de sortir le secteur du BTP de la crise à laquelle il est actuellement confronté. Cela nécessite la mobilisation des collectivités territoriales, en particulier des communes, et de l'Etat pour qu'un certain nombre de projets soient accélérés. Je compte sur vous, madame la ministre, en ce qui concerne la mobilisation des services de l'Etat.
Je voudrais enfin insister rapidement sur deux points.
D'une part, une intervention de l'Etat et de l'Europe s'avère indispensable pour aider à la rénovation et à la construction d'écoles primaires à la Martinique, chantier qui est très au-dessus des moyens financiers des communes. Par exemple, les besoins sont évalués à 35 millions d'euros pour Fort-de-France, ville de 100 000 habitants, et à 9 millions d'euros pour Le Marin, ville de 9 000 habitants.
D'autre part, je soulignerai une fois de plus la nécessité d'aborder de manière déterminée le problème de la sécurité et de la lutte contre les trafics de stupéfiants et l'immigration clandestine. A quand des accords de coopération avec nos voisins - la Dominique, Sainte-Lucie et Saint-Vincent - comme la France a su en passer avec la Roumanie ? Le développement économique n'a aucune chance de se réaliser dans un environnement instable et violent.
En conclusion, je me réjouis des perspectives qu'ouvre la réforme de la Constitution en cours pour l'accession à la responsabilité locale des populations des Antilles et de la Guyane dans le cadre de la République. Dès lors, le rattrapage économique doit être à l'ordre du jour.
Madame la ministre, comme le dit un proverbe chinois, « un chemin de mille lieues commence par un pas ». L'effort de rattrapage économique qu'entreprend le Gouvernement sera long. Et ce n'est pas une mince affaire ! Amener le PIB des départements d'outre-mer de 52 % à 80 % du PIB moyen métropolitain en vingt ans devrait être notre objectif. J'ai conscience qu'aujourd'hui vous faites le premier pas dans cette direction. C'est la raison pour laquelle je voterai votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens d'abord à saluer une nouvelle fois l'initiative qu'a prise le Président de la République en nous dotant d'un grand ministère de l'outre-mer, montrant par là même son attachement aux territoires ultra-marins et l'importance qu'il leur accorde.
Madame la ministre, ce projet de budget, même s'il ne répond pas dans l'immédiat à toutes les attentes, car il est « transitoire », nous donne une idée de l'ambition de votre future loi de programme.
Fixé à 1,084 milliard d'euros, il affiche une augmentation de 0,56 % par rapport à 2002, et je m'en réjouis. Certains critiquent cette hausse modérée du budget. C'est oublier trop vite la politique d'affichage du gouvernement précédent et les budgets virtuels que vous avez dénoncés lors de votre audition devant la commission des affaires sociales : le montant cumulé des reports de crédits des derniers budgets s'élève à 727 millions d'euros, l'équivalent d'un budget non consommé tous les quatre ans ! Face à l'ampleur des besoins de l'outre-mer, cela est inacceptable.
Il faut absolument procéder à la simplification de certains circuits administratifs et mettre fin à la sous-consommation des crédits. Cette demande est formulée depuis de nombreuses années par les élus de l'outre-mer. Je note que le Gouvernement s'y emploie par l'utilisation du levier fiscal et la création d'une cellule de contrôle mensuel de gestion au sein du ministère.
Les engagements pris par Jacques Chirac pendant la campagne pour l'élection présidentielle vont se concrétiser.
Vous avez axé vos actions autour de deux secteurs prioritaires l'emploi et le logement, en leur consacrant plus des deux tiers des crédits, et je m'en réjouis.
Le passeport mobilité destiné à aider les jeunes souhaitant poursuivre leurs études ou une formation en métropole, se met en place et près de 16 000 jeunes en bénéficieront. C'est une avancée majeure pour notre jeunesse, qui manque de perspectives. Leur offrir cette possibilité révèle une réelle considération pour les jeunes de l'outre-mer. C'est un moyen, parmi d'autres encore à venir, de concrétiser le principe de continuité territoriale.
Je tiens également à souligner les effort qui sont consentis en faveur de la formation professionnelle dispensée dans le cadre du service militaire adapté. En 2003, 3 000 jeunes seront concernés par des mesures d'insertion et par une formation dont la qualité est unanimement reconnue.
Madame la ministre, la création de véritables emplois durables est un enjeu pour l'outre-mer, et vous tentez d'y répondre par des mesures concrètes. La multiplication des emplois aidés ne participe pas d'une véritable politique pour l'emploi. Afin de répondre à la forte demande des jeunes sans formation, en 2003, 65 % des crédits du FEDOM seront consacrés aux emplois non marchands et seulement 35 % aux emplois marchands. Cependant, vu la détermination qui est la vôtre, madame la ministre, je suis sûre que vous saurez inverser cette tendance.
Vous montrez déjà que vous en avez la volonté en augmentant le nombre de contrats d'accès à l'emploi de plus de 11 %. Ce nombre avait en effet diminué de plus de moitié à la Réunion et des deux tiers dans l'ensemble de l'outre-mer depuis leur création, en 1997, par l'ancien gouvernement.
Le logement, qui constitue l'autre volet de ce projet de budget, attire toute mon attention parce qu'il est primordial.
Vous connaissez bien la Réunion, madame la ministre, et vous savez donc que nous avons besoin de 9 000 logements par an, dont 6 000 logements sociaux.
Je retiens deux points dans vos déclarations sur ce sujet.
Le premier est l'engagement du Gouvernement de consommer en totalité la ligne budgétaire unique pour 2003. La mise en place d'un contrôle mensuel de la consommation des aides publiques permettra de suivre au plus près la gestion de cette ligne budgétaire et de parvenir à cet objectif.
Le second concerne la résorption de l'habitat insalubre. Je constate, à cet égard, une volonté forte de la part du Gouvernement puisque je relève dans le projet de budget une augmentation de 10 % par rapport aux crédits de 2002, soit 30 millions d'euros.
Enfin, je tiens à saluer la volonté du Gouvernement d'aligner les allocations logement sur le niveau intermédiaire de la métropole.
L'ensemble de ces mesures répond aux demandes des élus, des professionnels et de la population. Ce budget pour l'outre-mer est réaliste et pragmatique.
Je terminerai mon propos, madame la ministre, en soulignant quelques attentes auxquelles ce budget « de transition » ne répond pas mais qui devront nécessairement être prises en compte dans la loi de programme pour l'outre-mer.
La mise en place du passeport mobilité est la mesure phare de ce budget et ouvre de véritables chances pour nos jeunes. Il me semble toutefois nécessaire d'encourager également la mobilité à l'intérieur de nos départements.
La création de foyers de jeunes travailleurs dans les principales agglomérations permettrait à notre jeunesse de lever le handicap de la distance entre le lieu de travail et le domicile. C'est une étape nécessaire dans l'appréhension du monde du travail, étape complémentaire du passeport mobilité.
Pour conclure, je voudrais vous rappeler la gravité du problème de l'effet de seuil de la CMU, qui prive plus de 20 000 Réunionnais d'une prise en charge totale de leurs frais médicaux. Il n'est pas acceptable qu'en France les populations les plus fragiles, à faibles revenus, retraités et handicapés, hésitent à se soigner parce qu'ils n'ont pas les moyens financiers qui leur permettraient de souscrire une assurance complémentaire.
Madame la ministre, vous avez récemment déclaré que, pour régler ce problème, il fallait une loi. Soyez assurée de mon soutien, car il est difficilement concevable d'attendre l'entrée en vigueur de la loi de programme pour répondre aux attentes des personnes intéressées. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

(M. Christian Poncelet remplace M. Serge Vinçon au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La parole est à M. Simon Loueckhote.
M. Simon Loueckhote. Monsieur le président, nous apprécions beaucoup que vous consacriez une part de votre emploi du temps, déjà très chargé, à la discussion des moyens consacrés à l'outre-mer. C'est un témoignage fort de votre soutien à son égard. Vous vous y êtes rendu à plusieurs reprises, vous venez cet après-midi de marquer une nouvelle fois cet attachement et nous vous en sommes très reconnaissants. (Applaudissements.)
Madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances pour 2003 ne saurait être évoqué, s'agissant des crédits réservés à l'outre-mer, sans rappeler le projet de révision constitutionnelle, dont nous avons débattu il y a quelques semaines au sein de la Haute Assemblée.
Affirmer l'intégration de l'outre-mer au sein de la nation française est un témoignage de reconnaissance et un signe de fraternité qu'attendent de la représentation nationale les populations d'outre-mer. Car notre souhait le plus élémentaire, faut-il le rappeler, est que l'on nous considère effectivement comme des citoyens français, ce dont nul ne saurait douter.
Permettez-moi d'ailleurs de dire qu'il est grand temps que l'outre-mer soit enfin reconnu au sein du texte fondateur de la Ve République dans sa volonté et sa fierté d'appartenir à la France et non pas uniquement dans son aptitude à en sortir.
En proposant ce projet de décentralisation en faveur de nos compatriotes d'outre-mer, réalisant ainsi une volonté du Président de la République, le Premier ministre et vous-même, madame le ministre, avez choisi de transformer ce regard porté sur eux en substituant à la notion de dépendance celle d'appartenance.
Il est bon que le Gouvernement, comme la représentation nationale, puisse contribuer à corriger cette image quelquefois peu flatteuse de l'outre-mer, que tend malheureusement à véhiculer la presse.
En effet, mes chers collègues, notre appartenance à la République française est bien une réalité.
Elle exprime le choix de toute une communauté et je veux, à cet égard, souligner l'importance de l'obligation de consultation des populations intéressées en matière d'évolution statutaire, qui est un principe clairement énoncé dans cette réforme de notre Constitution.
Ainsi, favoriser l'émancipation des populations d'outre-mer tout en réaffirmant leur place au sein de la République n'est pas un paradoxe, et leur donner plus d'autonomie n'est pas non plus la voie ouverte à l'indépendance.
Nos collègues de la Réunion nous ont exprimé, dans un vibrant témoignage, leur attachement à la nation.
A mon tour, je tiens une nouvelle fois à affirmer, s'agissant de la Nouvelle-Calédonie, que cette collectivité est bien ancrée dans la République française, contrairement à ce que certains pourraient penser.
En Nouvelle-Calédonie comme partout au sein de la République, nous sommes particulièrement attachés à un principe démocratique fondamental, qui est le fait majoritaire.
Sachez, mes chers collègues, que nous venons d'observer une nouvelle démonstration de la pression que veut exercer la minorité sur la majorité issue du suffrage universel.
Le nouveau statut issu de l'accord de Nouméa a introduit le principe d'un gouvernement collégial, élu par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie à la représentation proportionnelle des groupes d'élus qui le constituent.
La récente démission de l'un de ses membres et de tous ses suivants de liste a eu pour effet d'emporter la démission du gouvernement dans son ensemble.
Nous avons découvert, à nos dépens, que la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie ne prévoyait aucun rempart face à de telles manoeuvres subversives ayant pour seul objectif la déstabilisation.
Nous avons donc été contraints de procéder à de nouvelles élections et je veux vous alerter, mes chers collègues, sur les conséquences d'une telle dérive.
En Nouvelle-Calédonie comme partout ailleurs au sein de la République française, il n'est pas acceptable qu'une minorité dicte sa loi et il nous appartient à tous de faire respecter le droit de la majorité, en ce qu'elle est l'indiscutable expression du suffrage universel, principe fondateur de notre démocratie ! (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il résulte sans nul doute de l'intégration des populations d'outre-mer dans la nation française que l'Etat doit assumer ses obligations en tous points de son territoire : nous ne pourrions comprendre qu'il en soit autrement.
C'est pourquoi nous attendons beaucoup de la politique du Gouvernement pour l'outre-mer, car les besoins en matière de développement sont notoires, et les efforts des populations, qui donnent à ces archipels toute leur dimension économique et culturelle méritent d'être davantage soutenus par l'Etat.
C'est ainsi que je formule de nouveau, madame le ministre, une demande maintes fois réitérée concernant les conditions d'accueil de la population scolaire en Nouvelle-Calédonie, qui est en pleine croissance, notamment dans le Sud.
Vous n'ignorez pas, en effet, que la province Sud se trouve aujourd'hui dans une véritable impasse budgétaire, car elle assume la part de financement incombant à l'Etat en matière de construction des collèges, de dépenses relatives à l'enseignement privé et à la médecine scolaire.
Nous espérons, madame le ministre, que vous ne vous contenterez pas d'une réponse de principe à ce sujet.
L'outre-mer a toujours permis à la France de rayonner économiquement, socialement et culturellement partout dans le monde. Mais sa diversité, qui constitue son extraordinaire richesse, se traduit aussi par de fortes disparités en termes de développement.
S'il convient notamment de se féliciter de l'attribution aux départements d'outre-mer d'un statut de région ultrapériphérique au regard de la réglementation européenne, ce qui leur ouvrira la porte à de nouvelles aides, je tiens aussi à souligner le lourd handicap que continuent de subir certaines collectivités d'outre-mer en matière de financements européens.
Ainsi, l'effort particulier qui a été annoncé dans ce projet de budget pour favoriser le développement de Wallis-et-Futuna est un premier pas que nous saluons, tant sont importants les besoins de cet archipel, dont plus de la moitié de la population réside en Nouvelle-Calédonie.
Je voudrais, à cet égard, vous interroger, madame le ministre, sur l'épineuse question du non-recouvrement des créances du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie, qui accueille régulièrement des malades de Wallis-et-Futuna.
Votre prédécesseur s'était empressé d'ignorer ce problème, qui ne fait qu'empirer au fil du temps et constitue une source sérieuse de déséquilibre pour le fonctionnement de l'hôpital.
Vous avez souvent insisté, madame le ministre, sur un élément marquant de la politique du Gouvernement pour l'outre-mer, qui est de responsabiliser les acteurs locaux, de faire en sorte que l'activité prenne le pas sur l'assistance.
C'est un langage que nous comprenons parfaitement - Jean-Paul Virapoullé s'est longuement exprimé tout à l'heure sur cette nouvelle volonté politique qui anime l'ensemble de l'outre-mer - puisqu'il correspond pleinement à notre conception du développement.
Il est en particulier essentiel que nous puissions continuer à bénéficier d'un dispositif de défiscalisation renforcé. Nous souhaiterions donc qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2003 vous puissiez nous apporter quelques assurances à ce sujet.
Une autre de nos préoccupations majeures est la continuité territoriale avec la métropole. Nous nous réjouissons, à cet égard, de la mesure que vous avez prise et qui vise à accroître la mobilité des jeunes de l'outre-mer, tant il paraît essentiel que nos étudiants puissent compléter leur formation et acquérir une expérience en métropole, élargissant ainsi leur horizon.
Cependant, donner à l'outre-mer les moyens de son développement passe incontestablement par une baisse des coûts du transport aérien. Je vous saurais gré, madame le ministre, de nous apporter quelques précisions sur les engagements du Gouvernement dans ce domaine.
Depuis plusieurs années, la collectivité territoriale de Nouvelle-Calédonie et ses provinces sont tenues, pour soutenir les filières de production agricole tournées vers l'exportation, de subventionner massivement ces secteurs, afin de compenser la charge que représente le fret maritime et aérien.
Sur le plan interne même, l'activité économique est fortement pénalisée par la lourdeur des coûts de transport entre les différents pôles économiques de l'archipel : c'est particulièrement le cas en Polynésie française, comme en Nouvelle-Calédonie.
Le Gouvernement a-t-il l'intention, madame le ministre, de prendre en compte le problème de la continuité territoriale ? Et, si oui, dans quelle mesure ?
Pour conclure, je voudrais témoigner ma confiance au Gouvernement quant à sa capacité à donner aux populations d'outre-mer la place qui leur revient. Nous sommes sensibles, à cet égard, madame le ministre, à la façon dont vous appréhendez la situation et les enjeux de l'outre-mer. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Madame le ministre, le budget pour 2003 que vous présentez devant notre Haute Assemblée n'appelle de ma part aucune critique. Les critiques, vous les avez certainement entendues à l'Assemblée nationale et vous risquez de les entendre ici. Pour autant, je ne me livrerai pas au petit jeu qui consiste à brosser dans le sens du poil pour faire plaisir ou dans l'autre sens pour déplaire.
Vous l'avez dit, il s'agit d'un budget de vérité et de transition. Les priorités sont l'emploi et le logement.
La lecture du budget et l'analyse faite par notre excellent rapporteur, M. Roland du Luart, révèlent l'insuffisance, sinon la réduction des crédits pour ce qui concerne les infrastructures en Guyane.
Vous n'ignorez pas, madame la ministre, l'immense chantier que nous avons à réaliser dans ce pays de Guyane pour relier les régions entre elles - car la Guyane comprend plusieurs régions - et pour créer des espaces nouveaux pour développer l'activité des hommes et des femmes de ce pays.
Je suis persuadé que les explications que vous nous apporterez pourront peut-être nous faire comprendre les raisons de ce choix et, peut-être, nous convaincre de son bien-fondé.
Par ailleurs, je souhaiterais que vous puissiez nous indiquer l'état de la réforme du fonds d'investissement des départements d'outre-mer, le FIDOM, que vous allez nous proposer.
J'observe que le FIDOM régional et départemental avait permis pendant de très nombreuses années aux conseils régionaux et départementaux de l'outre-mer de concourir, en partenariat avec l'Etat, à l'aménagement du territoire et aux investissements d'ordre économique.
Pourrais-je vous suggérer, au stade où vous en êtes de votre réflexion sur l'élaboration de ce nouveau décret, de créer, tout en prenant en compte la nécessaire obligation de maintenir le FIDOM général de l'Etat, une section du FIDOM communal ? Ce dispositif pourrait permettre à chaque commune d'outre-mer d'obtenir une certaine somme et de se voir attribuer des subventions complémentaires, soit par le département, soit par la région, ou d'accéder à l'emprunt. En effet, vous n'ignorez pas que bon nombre de communes d'outre-mer ne disposent pas de recettes fiscales suffisantes pour entreprendre des actions dans ce domaine.
S'agissant des crédits alloués au logement social en outre-mer, qu'il me soit permis de vous indiquer que ce secteur mérite des réajustements significatifs et une réforme de fond. A défaut de telles mesures, la situation ne pourra que continuer à se dégrader.
La production de terrains viabilisés reste la priorité pour permettre la relance de la construction de logements sociaux. Pour répondre à ces besoins, il faut encore insister sur la mise en place des fonds régionaux d'aménagement foncier et urbain, les FRAFU, assortis des dotations financières adéquates.
Dans le secteur locatif, le logement social et le logement très social bénéficient de procédures efficaces.
Néanmoins, il nous faut adapter les plafonds, car les coûts de production divergent d'un département à un autre et le secteur du bâtiment et des travaux publics reste très fragile dans certains départements.
La situation est encore beaucoup plus grave dans le domaine de l'accession. Il faut envisager une refonte complète des produits destinés à l'accession très sociale, compte tenu du blocage du logement évolutif social et de l'inexistence d'autres produits destinés à la clientèle sociale et intermédiaire.
Votre ministère a en charge la gestion de la ligne budgétaire unique. Depuis 2002, cette ligne est ouverte au financement des résidences sociales pour personnes âgées et des foyers pour étudiants, de même qu'à la diversification des aides à l'amélioration des logements.
Cependant, aucune disposition réglementaire n'est prévue pour l'attribution de cette aide aux gestionnaires des établissements sociaux et médico-sociaux des départements d'outre-mer, qui doivent obligatoirement restructurer les locaux, en application de l'arrêté du 26 avril 1999 fixant le contenu du cahier des charges et de la convention pluriannuelle imposée par l'article 23 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997.
En effet, jusqu'ici, cette aide n'était accordée qu'aux propriétaires occupant les lieux, aux opérateurs de logements sociaux dans le cadre d'une opération programmée d'amélioration de l'habitat ou d'un programme d'intérêt général et dans le cadre de travaux présentant un intérêt architectural. Madame le ministre, je vous demande de porter une attention particulière à ce sujet et d'envisager la réforme nécessaire.
Le gouvernement précédent avait annulé les dispositions de l'article 199 sexies C du code général des impôts, qui ouvrait droit à une réduction d'impôt sur le revenu pour dépenses de grosses réparations, d'amélioration ou de ravalement d'immeuble payées entre le 31 décembre 1999 et le 31 décembre 2002. Pour amorcer votre politique de l'habitat et du logement, je vous demande de renouveler le bénéfice de cette disposition en intervenant auprès de M. le ministre délégué au budget.
En effet, une telle mesure permettrait d'encourager l'activité et la création d'emploi dans les PME et les TPME de l'artisanat et du bâtiment des départements d'outre-mer. Il faut créer le travail avant de créer l'emploi.
Pour ce qui est de la Guyane, l'immensité du chantier à entreprendre est telle que la loi de programme n'y suffira pas.
La Guyane mérite mieux. Une loi de programmation d'investissements pour son aménagement et pour le rattrapage des équipements et infrastructures à réaliser serait mieux adaptée, et ce sur une période d'au moins quinze ans pour seulement permettre d'amorcer le développement économique.
L'une des grandes causes du sous-développement de la Guyane est l'immigration. Ce phénomène constitue une plaie en Guyane.
En France métropolitaine, le ministère de l'intérieur a engagé une lutte pour régler le problème de l'immigration avec la fermeture du camp de Sangatte. Hier, c'était l'opération à Choisy-le-Roi, avec l'expulsion des Roms.
La Guyane est depuis de très nombreuses années une terre d'accueil : accueil des Martiniquais après l'éruption de la montagne Pelée en 1802, des Polonais dans les années cinquante, avec la création du bureau pour l'immigration en Guyane, des Hmongs en 1977. Mais, aujourd'hui, il nous est insupportable de voir arriver dans notre pays des populations qui n'ont ni notre culture ni notre histoire.
Il ne peut plus être question de seuil de tolérance. Ces immigrés ne contribuent pas à nous aider à bâtir ce pays de Guyane. L'Etat est responsable de ce que nous appelons un génocide par substitution du peuple guyanais.
Force est de constater que le laxisme dont ont fait preuve les gouvernements successifs pour régler ce problème a contribué à faire perdurer le sous-développement.
Le temps est venu pour que des dispositions énergiques mais humaines soient prises. Nous sommes prêts à intégrer ceux qui sont présents aujourd'hui dans notre communauté guyanaise et s'engagent à participer avec nous à la construction et au développement de la Guyane.
Cette immigration me conduit à penser qu'il s'agit d'une subvention déguisée de l'Etat, de prestations sociales versées insolemment aux peuples des pays limitrophes ou venus d'ailleurs. Les Guyanais en ont assez !
Puisque vous prenez des dispositions en France métropolitaine, faites de même en Guyane !
J'aurais pu vous demander où en est le remboursement de la CMU dans le département de la Guyane, où en sont les 35 % de recettes d'octroi de mer perçus par le département de la Guyane au détriment des communes.
J'aurais pu vous interroger sur l'ODEADOM, l'Office de développement de l'économie agricole dans les départements d'outre-mer, sur la situation difficile de la trésorerie de l'UAG, l'université des Antilles-Guyane, ou sur la situation sanitaire catastrophique en Guyane... Madame la ministre, il nous faut « mieux d'Etat », mais non pas « plus d'Etat ».
Si, en France, au nom des droits de l'homme, certains esprits chagrins refusent le principe de la double peine, cette disposition me paraît extrêmement importante pour la Guyane. Il importe que vous puissiez, avec le ministère des affaires étrangères, engager rapidement - comme je l'avais demandé à votre prédécesseur, par courrier en date du 2 mai 2001 - la mise en place d'une représentation diplomatique du Guyana en Guyane française, puisque les autorités de cet Etat ne reconnaissent pas comme leurs citoyens ceux qui viennent exercer la violence dite sud-américaine sur le territoire français de Guyane.
Vous le devez, vous le pouvez, car, bientôt, un climat xénophobe et raciste s'installera dans ce pays.
Dans vos revendications, il y a le souhaitable, mais votre budget nous propose le possible. Ainsi donc, c'est dans la raison - et avec beaucoup de raison - que je voterai les crédits que le Gouvernement et vous-même apportez à l'outre-mer. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, conçu comme un budget de transition dans l'attente du vote d'une loi de programme sur quinze ans, le projet de budget de l'outre-mer pour 2003 « redéploie » les crédits de ce ministère vers deux priorités annoncées : l'emploi, l'insertion et la formation, d'une part, le logement, d'autre part.
Par ailleurs, ce projet de budget témoigne d'une réelle volonté d'apporter un soutien financier aux collectivités d'outre-mer, notamment aux moins avancées, les îles Wallis et Futuna et Mayotte.
Je voudrais ici, au nom du groupe de l'Union centriste - et comme le ferait mieux que moi mon collègue Marcel Henry -, souligner avec intérêt les principales mesures concrètes en faveur de Mayotte, sans toutefois taire nos préoccupations pour l'avenir.
L'évaluation de l'impact des orientations prioritaires fixées par le Gouvernement sur le développement économique et social de Mayotte est facilitée par la présentation individualisée des lignes budgétaires consacrées à la lutte pour l'emploi, la formation et l'insertion sociale.
Les crédits consacrés aux contrats emplois-solidarité et aux contrats emplois consolidés sont augmentés sensiblement alors que ceux qui financent les mesures en faveur de l'emploi sont maintenus à leur montant de l'année 2002.
La formation est également soutenue largement grâce au doublement de la dotation affectée au paiement des bourses en faveur des étudiants mahorais et à l'extension à Mayotte du passeport mobilité, la nouvelle mesure, ô combien justifiée ! du Gouvernement en faveur des jeunes d'outre-mer.
L'ouverture d'une ligne budgétaire réservée aux actions de santé à Mayotte laisse augurer non seulement d'une évaluation précise des dépenses sanitaires supplémentaires engendrées par l'immigration clandestine, qui est toujours en hausse dans l'île, mais aussi de leur prise en charge effective par l'Etat, conformément aux règles de droit commun.
Enfin, la notable majoration des crédits de la dotation de rattrapage et de premier équipement des communes de Mayotte ainsi que de ceux du fonds mahorais de développement traduit en actes l'ambition de votre ministère, madame la ministre, d'être à la fois pragmatique et ouvert aux adaptations nécessitées par la situation particulière de chaque composante territoriale de l'outre-mer.
L'idée de développer chaque territoire ultramarin non pas seulement en fonction de son statut institutionnel, mais surtout en raison de ses besoins réels en matière de progrès économique, social et culturel est comparable aux généreuses dispositions de l'article 299, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne qui permettent d'adapter la solidarité européenne aux handicaps structurels et aux retards économiques des régions ultrapériphériques. Et je vous remercie de mettre à l'étude, en liaison avec nos partenaires de l'Union, l'application de ces dispositions à Mayotte, puisque notre île demeure pénalisée par sa simple éligibilité au fonds européen de développement.
Nous saluons, en outre, le rétablissement, si souvent réclamé, en faveur de Mayotte du principe d'une « convention de développement », en complément des actions financées par le contrat de plan. Une telle procédure, initiée dans l'île en 1987 et appliquée jusqu'en 1999, a fait ses preuves en matière de rattrapage des retards de développement.
Ce contrat de progrès est d'autant plus le bienvenu que le contrat de plan Etat-Mayotte pour la période 2000 à 2004 n'a quasiment pas reçu de commencement d'exécution. Il importe, dans ces conditions, de veiller à concrétiser les engagements de l'Etat afin de renforcer la confiance, notamment des investisseurs.
A ce sujet, nous croyons devoir souligner combien les projets de réalisation d'une piste d'aviation de 3 000 mètres et d'un deuxième quai en eau profonde à Longoni, que l'ensemble des Mahorais attendent, demeurent déterminants pour le développement de l'île.
D'une manière générale, nous appelons votre attention sur la nécessité de compléter par des textes d'application un certain nombre de dispositions importantes applicables à Mayotte. Ces textes sont en effet sans portée, faute de mesures spécifiques d'application. On peut citer, à cet égard, les dispositions relatives au fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le FISAC, au fonds de compensation de la TVA, le FCTVA, et à la mise en place du décret relatif au fonds mahorais de développement.
Compte tenu du tarissement progressif des ressources du FIDOM et des difficultés constatées sur le contrat de plan, il semble plus que jamais indispensable d'élaborer un véritable plan de développement de Mayotte, qui pourrait, je le répète, être financé par les fonds structurels européens.
C'est pourquoi il est grand temps que le Gouvernement dépose officiellement auprès de l'Union européenne la candidature de Mayotte au statut de région ultrapériphérique. L'étude de faisabilité commandée par M. le Président de la République à M. Jean-Paul Virapoullé, sénateur en mission sur la réforme du statut des départements d'outre-mer français en Europe, offre l'occasion de faire le point sur ce sujet en recueillant l'avis des élus de Mayotte.
Pour terminer, nous voulons insister, madame la ministre, sur la non-consommation, cette année, des crédits du fonds de coopération régionale pour Mayotte. Nous sommes prêts pour cette coopération, comme nous demeurons ouverts au dialogue, dès lors que la volonté mahoraise d'ancrage dans la République française est respectée par tous.
Mais il ne peut y avoir d'effort de coopération en direction des Comores voisines sans un engagement précis et des actes concrets venus des autorités comoriennes pour juguler le fléau, nuisible à tous, d'une immigration clandestine qui pervertit aujourd'hui tous les équilibres sociaux mahorais. A cet égard, nous comptons sur la ferme détermination que vous avez affichée lors de votre visite à Mayotte au mois de septembre dernier.
Sous le bénéfice de ces observations, les élus du groupe de l'Union centriste, en particulier M. Marcel Henry, voteront, madame la ministre, en faveur de l'adoption du projet de budget de votre ministère pour 2003. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu.
M. Robert Laufoaulu. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, étant donné le peu de temps imparti aux orateurs et parce que les rapporteurs - que je remercie de leur excellent travail - ont déjà dit l'essentiel sur l'ensemble du budget de l'outre-mer pour 2003, je me concentrerai sur les questions relatives à Wallis-et-Futuna.
Mais auparavant, je voudrais profiter de cette prise de parole pour rendre un hommage appuyé à Mme Girardin et à son équipe. En effet, depuis quelques mois, nous ressentons bel et bien un changement d'état d'esprit au ministère. Nous sommes passés d'une logique d'assistance à une politique volontariste de développement. Et c'est de cela que nous avons besoin, particulièrement à Wallis-et-Futuna, pour créer les conditions de notre propre développement économique et social.
Ce budget, avant même la prochaine loi de programme pour l'outre-mer voulue par le Président de la République, illustre déjà cette orientation.
Pour Wallis-et-Futuna, l'effort que vous consentez est important, puisqu'il correspond à une hausse de 11,5 %, et je tiens à vous en remercier, madame la ministre.
La desserte aérienne inter-îles reçoit une aide tout à fait bienvenue.
La convention de développement promise par le Président de la République prend forme. Des crédits liés à cette convention sont d'ores et déjà inscrits dans le budget ; cette convention sera, je le rappelle, discutée dans les prochains jours avec la mission du territoire. Cette dernière est arrivée ce matin et vous avez bien voulu accepter de la recevoir, madame la ministre, avant de nous rendre visite dans le Pacifique.
Cette visite sera pour vous, madame la ministre, l'occasion de vous rendre compte sur place que les mesures prises en faveur de notre territoire n'ont rien de superflu ! Elles se justifient pleinement par le retard de développement de Wallis-et-Futuna et la nécessité d'un rattrapage économique urgent.
Chez nous, certains chiffres parlent d'eux-mêmes : 2 500 salariés sur 15 000 habitants, dont près de la moitié dans le secteur public ou para-public et presque un quart dans les chantiers de développement. Reste donc seulement un peu plus d'un quart dans le secteur privé. Cela se passe de commentaires !
Mais cet effort financier consenti par l'Etat risque d'être sans impact si, parallèlement, des moyens humains ne sont pas mis en place pour la réalisation de ces projets. Je sais que la sous-consommation des crédits est un problème général et récurrent, mais, à Wallis-et-Futuna, cela devient critique.
L'expérience montre que les crédits ne sont pas consommés par manque de personnel compétent au sein du service des travaux publics, qui est chargé des études, de la réalisation et du suivi des projets et des grands travaux sur le territoire. Est-il normal qu'en quarante ans de statut de territoire d'outre-mer Wallis n'ait que quarante kilomètres de routes goudronnées ? Un kilomètre par an ! Pour un territoire faisant partie de la France, pays qui compte de très grandes entreprises pour la réalisation des routes, cela ne manque pas de surprendre.
Il faut que cela cesse. Nous avons besoin de personnels et je vous demande instamment, madame la ministre, de faire le nécessaire pour augmenter le nombre des ingénieurs qui doivent mettre en oeuvre les projets dont le territoire a tant besoin.
L'argument consistant à dire que la question du foncier serait la raison du retard des réalisations d'infrastructures est fallacieux. La vérité tient au nombre insuffisant d'ingénieurs et à la mauvaise gestion des crédits. Si ce problème n'est pas réglé, la convention sera un échec.
Après ce point essentiel, je voudrais aborder la question de notre agence de santé et, tout d'abord, de sa dette à l'égard de la compagnie Air Calédonie et du centre hospitalier universitaire de Nouméa. Cette dette est essentiellement due aux évacuations sanitaires vers la Nouvelle-Calédonie.
Mon collègue et ami Simon Loueckhote se soucie aussi de ce problème et vient de l'évoquer ; nous aimerions savoir quelles mesures sont envisagées pour y remédier, puisque l'agence de santé est un établissement public national.
Enfin, le recrutement des médecins pose également un problème. Je souhaiterais ainsi, pour la continuité et la qualité des soins dispensés, que le territoire puisse bénéficier d'un recrutement de médecins de la fonction publique.
Madame la ministre, nous avons toujours l'impression de mendier et de demander toujours trop pour la santé de nos populations isolées. Mais comparons les chiffres des dépenses de santé entre la métropole et le territoire de Wallis-et-Futuna : 2 300 euros environ par habitant et par an pour la métropole, et 590 euros pour Wallis-et-Futuna. Aussi, est-ce vraiment sans honte ni scrupule que je me permets de demander l'aumône : accordez-nous le droit à la santé !
Enfin, pour terminer, je souhaite attirer votre attention, comme M. Brial l'a déjà fait à l'Assemblée nationale, sur les graves difficultés que nous rencontrons du fait de la situation de monopole dans laquelle se trouve l'unique banque présente sur le territoire. Il faut absolument mettre fin à cette situation et, pour cela, nous avons besoin de l'aide de l'Etat.
D'une manière générale, madame la ministre, je voudrais vous redire toute notre confiance et aussi tout l'espoir que suscite pour nous la stratégie de développement durable qui se met en place et pour laquelle nous savons pouvoir compter sur votre soutien personnel et sur l'expertise de vos services. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Larifla.
M. Dominique Larifla. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on dit du budget qu'il est l'âme d'une politique. Je m'efforcerai donc, à travers ce propos, de vous faire part avec franchise et concision de mon opinion dans les cinq minutes qui me sont imparties.
Il ressort de la lecture de ce projet de budget, en dépit des explications apportées, que son taux d'augmentation est inférieur à celui de l'inflation.
Or, dans le même temps, lorsque l'on parle de la situation de la Guadeloupe à la faveur de l'actualité de ces derniers jours, elle est dite « préoccupante », voire « catastrophique ».
Cette année, sous les feux médiatiques, jamais la situation n'est apparue aussi alarmante. Ce contexte justifie la mise en oeuvre sans tarder d'une politique active et volontariste.
Nos départements, qui ont à surmonter de nombreuses difficultés, sont maintenus dans l'attente de la loi de programme annoncée pour la fin de cette année et doivent se contenter d'une transition sans ambition et sans réelle nouveauté.
La politique et surtout la gestion des crédits de l'ancien gouvernement ont largement fait l'objet de vos critiques, madame la ministre. J'y reviendrai.
Vous avez annoncé maintenir le cap de la priorité accordée à la lutte contre le chômage et au rattrapage dans le domaine du logement.
Pourtant, s'agissant du chômage, les perspectives offertes par les mesures mises en place depuis 2000 sont réduites cette année. A travers l'offre, c'est, en effet, l'horizon de nombreux chômeurs qui est limité par la réduction des mesures potentielles.
Même si l'on peut en contester la philosophie, les emplois aidés ont constitué un véritable traitement social de l'inactivité avec, de surcroît, pour nombre d'entre eux, une véritable utilité collective.
Il faut souligner, madame la ministre, que vous avez eu la sagesse de poursuivre, en le renforçant, le dispositif de formation par le SMA, le service militaire adapté.
Indéniablement - je peux en témoigner au quotidien - le SMA joue un rôle essentiel dans la formation des jeunes et les résultats sont encourageants.
Dans la perspective de l'arrivée de nombreux jeunes sur le marché du travail, vous déclarez, madame la ministre, ne vouloir laisser « personne au bord de la route ». Nous partageons cette préoccupation.
Vous annoncez donc des cellules de reclassement. Le principe est lisible, certes. Je vous saurais gré, cependant, de m'en communiquer le contenu et de m'indiquer la direction de ce reclassement.
En matière de formation, j'attire votre attention sur la qualité de l'enseignement dispensé par l'université Antilles-Guyane, malheureusement handicapée par d'importants coûts de fonctionnement qui résultent de son éclatement sur trois pôles. Les étudiants y suivent leur cursus dans des conditions qui tendent à se dégrader.
La situation hospitalière de la Guadeloupe, singulièrement celle du CHU, appelle des mesures d'urgence pour faire face notamment au sous-encadrement en personnel et au déficit en moyens matériels.
En matière de logement, une augmentation de l'offre, traduction de la consommation effective des crédits, ne peut être possible sans une simplification administrative de l'accès à la ligne budgétaire unique par les bailleurs sociaux, entre autres.
La direction départementale de l'équipement doit les accompagner et jouer pleinement le jeu.
Ni nos jeunes, ni nos malades, ni nos chômeurs, ni nos familles ne peuvent attendre ! Bref, dans cette situation, les départements d'outre-mer ne peuvent patienter.
J'en reviens donc à la question de la gestion budgétaire qui a largement justifié la révision des crédits de l'outre-mer.
Le budget de l'outre-mer, les années précédentes, n'a pas échappé aux différents gels de crédits et autres contrats de gestion, qui expliquent la sous-consommation des crédits votés en loi de finances initiale.
Réduire les crédits, c'est fermer les perspectives sans même chercher à agir sur les moyens de réalisation, d'autant que vous avez eu la charge de l'exécution d'une part du budget de 2002.
Qualifier d'« affichage » le niveau des crédits votés en 2002 revient à anticiper l'exécution du présent budget pour 2003, établi sur des hypothèses de croissance et, partant, sur des recettes incertaines.
Votre politique pour l'outre-mer ne peut donc se lire, pour l'heure, qu'à l'aune de vos intentions.
Je reste donc dans l'attente de la loi de programme. (Applaudissements sur les travées du RDSE. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Victor Reux.
M. Victor Reux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget de l'outre-mer affiche une augmentation de 1,50 % par rapport au précédent, ce qui peut paraître peu mais, comme chacun le sait, il ne représente que le dixième environ des transferts des divers ministères vers la France ultramarine.
Vous avez raison, madame la ministre, de stigmatiser le laxisme de ceux qui vous ont précédée, laxisme entraînant ainsi un haut niveau des budgets non utilisés et reportés alors qu'il y a tant à faire outre-mer.
Focalisé sur des projets concrets, ce budget de terrain, mais également de transition, traduit bien la volonté de situer l'emploi et la formation au centre des priorités de votre gouvernement.
Pour autant, il ne néglige pas les autres volets essentiels ou innovants tels que la création du passeport mobilité, l'augmentation des crédits pour le logement - la ligne budgétaire unique augmente de 7,5 % -, dont la dotation a été doublée pour Saint-Pierre-et-Miquelon, ou encore la promotion de moyens particuliers destinés à permettre le rattrapage économique et social des collectivités qui en ont le plus besoin.
Enfin, tout comme en métropole, vous ne tirez pas un trait sur les emplois-jeunes, puisque vous prévoyez même un accompagnement individualisé en fin de contrat.
J'aborderai quelques sujets plus spécifiques à ma collectivité.
Le premier est le secteur de la pêche artisanale, notamment s'agissant la campagne 2002, laquelle, vous le savez, madame la ministre, s'est soldée par de mauvais résultats, tout simplement parce que, pour certaines espèces, la ressource n'était pas au rendez-vous.
Cette filière d'activité a vu, au cours de la décennie précédente, la naissance et le développement d'inititives pour que ne meure pas localement un métier de tradition. Leurs auteurs ont dû faire des investissements importants. S'ils n'étaient pas aidés et si l'année à venir et la suivante n'était pas meilleures, ce secteur de notre diversification économique se trouverait en péril.
Vous sachant sensible à cette question, je renouvelle donc la demande que j'avais faite ici-même à votre prédécesseur, qui, à l'évidence, ne l'a pas entendue, afin que puisse avoir lieu dans les eaux avoisinant l'archipel, et ce dès que possible, une mission française d'évaluation de la ressource halieutique qui pourrait être effectuée par l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, l'IFREMER. Ainsi, les divers acteurs de la pêche locale, disposant de données scientifiques plus fiables, se trouveront aidés dans le choix de leurs orientations.
Par ailleurs, dans ce même secteur - vous pourrez le constater lors de votre prochaine visite -, le projet en cours de réalisation d'exploitation de coquilles Saint-Jacques lancé à Miquelon est porteur d'emplois. Il a nécessité aussi de lourdes mises de fonds de la part des actionnaires locaux : 860 000 euros en 2002 seulement.
Toutefois, les aides publiques normalement prévues ne semblent pas se concrétiser, alors que les deux années à venir seront cruciales pour la viabilité de l'entreprise. Pouvez-vous m'indiquer où est la participation de l'Etat dans cette entreprise prometteuse ?
Dans le secteur de la pêche et dans l'archipel, je veux également souligner, madame la ministre, l'émotion soulevée par l'annonce faite par le Canada, à l'instar de la Commission de Bruxelles récemment, d'une probable et forte réduction de quotas autorisés de cabillaud déjà bien maigres.
La situation économique de l'archipel ne s'est guère améliorée depuis le changement de majorité au conseil général en mars 2000. Elle n'a fait qu'empirer.
En parallèle, la dégradation de notre situation budgétaire constitue un facteur défavorable pour la commande publique, ainsi que pour l'investissement en général.
S'agissant de la commande publique, et compte tenu des troubles sociaux qui ont eu lieu récemment du fait des errements de l'exécutif local, je suis également demandeur de la venue sur place d'une commission d'enquête sur les marchés publics pour faire le point en ce domaine, où se posent de nombreuses questions.
S'agissant de la situation budgétaire, la collectivité est confrontée à un endettement semblable à celui qu'elle connaissait avant 1994, notamment en raison de la charge des emprunts qu'elle a dû contracter pour participer aux dépenses liées à la construction du nouveau complexe aéroportuaire. C'est pourquoi je demande, cette année encore, qu'une partie de la dette de la collectivité territoriale soit exceptionnellement prise en charge par l'Etat.
Pour ce qui est des investissements, j'espère que, dans la future loi de programme, Saint-Pierre-et-Miquelon, malgré son régime fiscal spécifique, pourra être mieux loti que par le passé en matière de défiscalisation, laquelle est indispensable pour les investissements.
Madame la ministre, nous venons tout récemment de voter le projet de loi relatif à la décentralisation. S'agissant du transfert de compétences relatif à notre zone économique exclusive, notre ZEE, au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, au profit de la collectivité territoriale, votre prédécesseur n'a jamais répondu à la question suivante, que je tiens donc à poser à nouveau à cette tribune : où en est-on de l'élaboration du cahier des charges prévu et de son approbation par le Conseil d'Etat pour ce transfert de compétences ?
Cette interrogation se greffe sur l'important sujet de la prospection et de l'exploitation éventuelles des hydrocarbures dans les fonds sous-marins avoisinant l'archipel, et dans notre zone économique exclusive en particulier.
Dans cette zone, vous le savez, depuis le forage intervenu en avril 2001, tout semble au point mort, mais le contexte s'est modifié avec le règlement du contentieux existant entre les provinces canadiennes de Nouvelle-Ecosse et de Terre-Neuve, lequel avait entraîné un moratoire sur les forages en zone maritime canadienne.
Ce moratoire n'ayant plus de raison d'être, il est normal que l'on se pose la question de savoir si les compagnies étrangères qui se sont montrées intéressées par notre ZEE le seront autant que par le passé.
Quel que soit le cas de figure envisagé, il me semble indiqué que notre zone économique exclusive soit, pour le futur, concrètement prise en compte dans le « Plan hydrocarbures » français. Madame la ministre, me rejoignez-vous sur ce point ?
Autre sujet que je voudrais aborder touchant la santé, celui des évacuations sanitaires d'urgence par voie aérienne, majoritairement vers le Canada, et, dans une bien moindre mesure, en inter-îles vers Saint-Pierre à partir de Miquelon.
Il s'agit pour la compagnie Air Saint-Pierre d'une contrainte forte puisqu'en fait - et c'est le cas depuis quarante ans - l'Etat, la collectivité et les particuliers comptent sur elle pour ce type d'évacuation qui peut intervenir à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, dans des conditions météorologiques souvent difficiles.
Cette astreinte effective de mise à disponibilité du matériel et des hommes vingt-quatre heures sur vingt-quatre engendre des coûts importants, qui vont augmenter avec le remplacement incontournable du petit bimoteur affecté à ce service depuis longtemps.
Compte tenu du fait que nous n'avons pas sur place de SAMU ou d'autre organisme public susceptible d'assurer les missions d'urgence, d'assistance et de protection sanitaire du citoyen, il me paraît indiqué que, dans la future loi de programme, des dispositions soient prévues afin que l'Etat prenne en charge une partie des coûts induits par ces missions permanentes qui ne relèvent pas d'un service commercial ordinaire.
J'ajouterai quelques remarques au sujet de la loi d'orientation, qui est appliquée dans l'archipel pour ce qui relève de l'exonération des charges sociales, des projets initiatives jeunes, les PIJ, de l'apurement des dettes sociales et le fonds d'échanges culturels.
Des difficultés inhérentes aux particularités locales freinent cependant la concrétisation des mesures prévues en matière de congé-solidarité et de parrainage, notamment.
L'application de la loi d'orientation pour l'outre-mer se poursuivra en attendant que la loi de programme prenne le relais.
Dans cette perspective, afin de faire le point, peut-on envisager la mise en action de la commission de suivi - c'est l'article 74 -, de manière à savoir si tous les acteurs économiques concernés jouent le jeu en matière de création d'emplois et de maîtrise des coûts du travail ? Compte tenu de la situation à ce sujet dans l'archipel, le rapport de cette commission permettrait d'y voir plus clair et de mieux encadrer les dispositions en gestation en vue de leur finalité.
Enfin, sur un plan culturel et économique, j'appelle votre attention sur l'avenir de la station locale RFO, et précisément sur la diffusion de son signal hertzien sur le Canada.
Avec une retransmission vers 300 000 abonnés, soit environ un million de téléspectateurs, ce média constitue à partir de l'archipel une véritable vitrine de la France et de la francophonie vers un public très attaché à notre culture.
Avec de 70 à 80 salariés, RFO tient une place importante dans notre fragile équilibre économique. Recrutant majoritairement sur place, cette station est un excellent vecteur de formations valorisantes dans les métiers d'avenir porteurs. Elle mérite donc d'être défendue contre les pressions destinées à restreindre sa diffusion chez nos voisins.
Madame la ministre, je pense que le pragmatisme et le réalisme qui caractérisent la démarche du Gouvernement dans son approche des problèmes de l'outre-mer marqueront vos réponses, aujourd'hui et par la suite, à mes interrogations en faveur de mes concitoyens. Aussi est-ce bien volontiers que j'apporterai mon total soutien à votre budget, tel que vous nous le présentez. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est avec plaisir et conviction que j'ai l'honneur de défendre devant votre assemblée, pour la première fois, le budget du ministère de l'outre-mer. C'est pour moi l'occasion de vous présenter les grandes orientations de l'action du Gouvernement pour les dix collectivités dont j'ai la charge.
Ce projet de budget est d'abord une première concrétisation des engagements du Président de la République pour l'outre-mer.
Le premier engagement tenu est celui d'une attention particulière accordée à la création d'emplois dans le secteur marchand, qui est la base du développement économique outre-mer. Le projet de budget pour 2003 prévoit une réorientation des crédits du FEDOM vers la création de vrais emplois durables dans ce secteur productif. Je vous remercie, madame Létard, de l'avoir relevé avec satisfaction. On en revient à l'esprit de la loi Perben, qui avait créé le FEDOM ; il est ainsi prévu d'augmenter de plus de 11 % le nombre de contrats d'accès à l'emploi.
Je tiens à vous rassurer, monsieur Lise : je ferai en sorte que les CAE conservent leur attractivité pour les employeurs. Cela est possible, notamment par le relèvement du montant des exonérations de charges sociales qui y est associé. Je note qu'une telle amélioration aurait pu être apportée par la loi d'orientation de mon prédécesseur pour relancer l'emploi dans le secteur marchand. Nous veillerons à le faire dans la loi de programme.
La persistance, outre-mer, d'un taux de chômage trois fois supérieur à celui de la métropole justifie amplement cette réorientation du FEDOM.
Si le budget pour 2003 contient encore des financements importants pour les emplois aidés, qui sont par nature des emplois précaires, c'est qu'il s'agit d'un budget de transition - vous l'avez remarqué, monsieur Raoul - dans l'attente de la loi de programme qui vous sera présentée au début de l'année prochaine et dont l'objectif est de substituer une logique d'activité à une logique d'assistance. Nous devons offrir à la jeunesse d'outre-mer de véritables perspectives d'emploi.
Pour répondre à votre interrogation, monsieur Lise, je vous indique que si, comme je le souhaite, la loi de programme est votée au plus tard le 1er juillet prochain, elle sera financée en loi de finances rectificative en 2003 et en loi de finances initiale en 2004.
Les moyens financiers en faveur des emplois aidés augmentent encore en 2003 pour tenir compte des engagements pris et de cette période transitoire. Ce n'est qu'en 2004 que les effets de la loi de programme seront pris en compte. Il est inexact de dire que les moyens du FEDOM diminuent ; je le dis en réponse aux quelques critiques que j'ai entendues.
Je vous rappelle que les moyens du FEDOM représentent 44 % de mon budget. Les dotations pour les contrats emploi-solidarité, les contrats emploi consolidé et les emplois-jeunes augmentent en 2003 de 6 %. Je vous rappelle aussi que 15 % de mon budget est consacré aux emplois-jeunes !
Beaucoup d'entre vous, notamment MM. Lise, Vergès, Virapoullé, Larifla et bien d'autres, ont exprimé à juste titre sur le devenir des emplois-jeunes une inquiétude que je comprends parfaitement.
Ainsi que je l'ai maintes fois précisé, tous les contrats iront à leur terme et chaque jeune en fin de contrat bénéficiera d'un accompagnement individualisé afin qu'aucun d'eux, j'y insiste, ne soit laissé au bord du chemin.
Je vous rappelle, monsieur Larifla, monsieur Lise, que le précédent gouvernement n'avait pas pris de disposition pour assurer à ces jeunes une sortie positive du dispositif. Mon objectif est donc qu'une solution soit trouvée, au cas par cas, pour chaque jeune. A cet effet, j'ai donné instruction aux préfets de travailler avec les structures de reclassement mises en place dans chaque collectivité. Un dispositif transitoire est en cours de finalisation pour les jeunes qui n'auront pu sortir de ces emplois. Il s'appliquera jusqu'à ce que l'on aboutisse à une solution pérenne.
En outre, pour répondre aux besoins du monde associatif, nous étudions actuellement, avec le ministre des affaires sociales, un nouveau dispositif d'insertion des jeunes qui comportera un volet spécifique pour l'outre-mer.
Nous devons tous nous mobiliser - et j'ai bien entendu M. Jean-Paul Virapoullé sur ce sujet - et nous montrer créatifs afin de trouver de vraies solutions en matière d'emploi pour tous ces jeunes qui arrivent au terme du dispositif. C'est en tout cas la volonté que j'ai au plus profond de moi-même et que j'ai affichée. Mais je ne fais pas preuve de naïveté. Compte tenu du nombre de jeunes qui arrivent chaque année sur le marché de l'emploi, il serait illusoire de penser que le secteur marchand les absorbera dans leur totalité. Nous travaillons donc à des solutions intermédiaires.
Dans ce budget, nous avons fait un effort particulier en créant 500 postes supplémentaires pour le SMA, qui est un véritable instrument d'insertion et de formation. Son succès n'est plus à prouver, et je note d'ailleurs que vous vous en êtes tous félicité, ce dont je vous remercie. Je vous rappelle que pratiquement tous les jeunes qui passent par le SMA trouvent un emploi à la fin de cette formation et de cette insertion.
Le deuxième engagement tenu est celui d'un premier contenu donné au principe de continuité territoriale, avec la création du passeport mobilité au profit de 11 000 étudiants et de 5 000 jeunes en formation.
Ce passeport - dont vous avez tous salué la création - répond à une attente forte des jeunes d'outre-mer et permet de faciliter leur mobilité vers la métropole ou une autre collectivité d'outre-mer dans le cadre de leurs études, de leur formation ou de leur accès à un premier emploi. Il est en vigueur depuis le 1er septembre pour les jeunes en formation, et même depuis le 1er juillet pour les étudiants.
La continuité territoriale pour nos jeunes ne doit cependant pas se limiter à prendre en charge le coût de leur transport. Il faut aussi organiser leur accueil en métropole. A cet égard, je partage pleinement le souhait de M. Jean-Paul Virapoullé de répondre à cette attente et, notamment, de régler le problème du logement. Effectivement, il faut mettre en place une véritable politique du logement pour ces jeunes.
Dès que je suis arrivée à la tête de ce ministère, j'ai constaté que l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer, qui devrait normalement jouer ce rôle, n'avait malheureusement plus de structures dirigeantes depuis plusieurs années, qu'il s'agisse de président ou de directeur général. Je me suis donc employée à remédier à cette situation. J'ai demandé à l'ANT, l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer, de prendre des contacts avec les bailleurs sociaux de métropole pour que des logements soient réservés aux jeunes d'outre-mer dans leurs parcs immobiliers. Le CNARM, le comité national de l'action des Réunionnais en mobilité, pourrait appuyer cette démarche. On peut aussi envisager que l'Etat réserve un volume de logements pour ces jeunes d'outre-mer dans le parc HLM, selon des modalités financières à préciser.
Il faut faire vite pour concrétiser cette continuité territoriale au profit de la jeunesse, qui est la principale richesse de l'outre-mer. C'est pourquoi je souhaite que ces mesures soient mises en place dès le printemps prochain.
Après le passeport mobilité et le renforcement de l'ANT, nous engagerons une deuxième étape, dans le cadre de la future loi de programme, pour améliorer les transports terrestres, maritimes et aériens, et faire baisser leur coût, problèmes que vous avez été très nombreux à évoquer.
Je souhaite favoriser la concurrence dans le transport aérien et éviter les situations de monopole. Plusieurs mesures en faveur des compagnies existantes et d'une nouvelle compagnie dédiée à l'outre-mer sont actuellement soumises à l'arbitrage du Premier ministre. Elles permettraient aux compagnies aériennes de consolider leurs conditions d'exploitation sur la desserte de l'outre-mer et de mettre en place un dispositif d'allégements du coût du transport, en partenariat avec les collectivités locales concernées et avec le soutien des fonds européens.
MM. Virapoullé et Désiré ont évoqué la question des NTIC, qui est importante et étroitement liée à la continuité territoriale.
Les télécommunications entre la métropole et l'outre-mer posent en effet de sérieux problèmes, notamment en termes de coûts. Ceux-ci sont encore trop élevés, même s'ils ont, il faut le reconnaître, baissé depuis trois ans.
Cette baisse devrait se poursuivre dans les mois à venir grâce à la libération des canaux satellitaires par le ministère de la défense et à l'évolutions des techniques qui permettent précisément d'envisager des coûts plus réduits. Je veille avec mes deux collègues du Gouvernement - Mme la ministre déléguée à l'industrie et Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies - à ce que toutes les dispositions soient prises pour faciliter la concurrence entre les opérateurs et faire ainsi baisser les coûts d'accès et les abonnements.
Le troisième engagement tenu consiste à mettre en place des moyens financiers supplémentaires pour le développement économique et social des collectivités nécessitant un effort particulier de rattrapage. Il s'agit des deux conventions de développement pour Mayotte et pour Wallis-et-Futuna, pour un montant respectif de 20 millions d'euros et 2,5 millions d'euros sur cinq ans, qui s'ajoutent aux contrats de plan.
Je tiens à remercier tout particulièrement les élus de ces deux collectivités, avec lesquels nous avons travaillé de façon très constructive, pour que ces conventions puissent être signées avant la fin de l'année. J'espère, monsieur Laufoaulu, que nous construirons ainsi plus d'un kilomètre de route par an à Wallis-et-Futuna !
Ces moyens viennent renforcer de manière pragmatique ceux qui existent déjà et qui sont insuffisamment mobilisés, comme le fonds mahorais de développement, ou qui sont enlisés dans les arcanes de l'administration, tel que le fonds d'aide au développement de Wallis-et-Futuna. Ce n'est pas acceptable alors que les besoins sont patents. Nous allons donc faire aboutir ces projets d'ici à la fin de l'année, afin de les rendre opérationnels en 2003.
J'ajoute que les moyens des chapitres 68-01 et 68-90, qui regroupent notamment ceux du FIDOM et du FIDES, augmentent. Ils prennent en compte avec réalisme l'ensemble des besoins contractualisés au titre des contrats de plan ou de développement et financent certains besoins importants, tel le plan global de développement de l'agriculture en Guyane.
Monsieur Othily, je suis d'accord avec vous sur la nécessité de moderniser la gestion du FIDOM, mais je crois qu'il faut d'abord tirer tous les enseignements de l'expérience un peu controversée du FIDOM décentralisé ces dernières années avant d'envisager de créer de nouvelles sections territoriales. Je rappelle, en effet, qu'une dette de 5 millions d'euros a été réglée par le Gouvernement cet été, lors de l'élaboration du collectif budgétaire.
J'ai bien noté, monsieur Othily, les remarques que vous avez formulées sur les mécanismes à mettre en oeuvre pour faciliter l'accès au logement. Sachez que nous avons travaillé sur ces sujets dans le cadre de la préparation de la loi de programme.
Je partage également votre analyse sur les besoins d'infrastructures que connaît la Guyane. Je suis favorable au maintien d'un chapitre budgétaire destiné spécialement à financer ces besoins et je procèderai, en 2003, à une analyse de l'emploi des crédits qui doivent être recentrés sur les grandes infrastructures, notamment les infrastructures de communication.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la place privilégiée que le Gouvernement souhaite donner à l'outre-mer dans l'action gouvernementale se reflète dans ce projet de budget. Vous l'avez presque tous souligné : à périmètre constant, il augmente de 1,5 %, soit une progression supérieure à celle du budget de l'Etat, ce qui témoigne de l'effort accompli en faveur de l'outre-mer dans un contexte budgétaire difficile.
Cet effort se réalise au profit des préoccupations majeures de l'outre-mer, à savoir, d'une part, l'emploi, la formation et l'insertion et, d'autre part, le logement, toutes préoccupations qui sont au coeur de mes priorités.
L'effort du Gouvernement pour l'outre-mer est d'autant plus remarquable que, ces dernières années, les budgets ont enregistré un taux de consommation qui n'est pas convenable.
Monsieur du Luart, vous l'avez noté dans votre intervention, et je tiens à répondre aux critiques que j'ai entendues, notamment de la part de M. Lise : ce n'est pas l'existence même d'une sous-consommation des crédits que je critique, car c'est un constat que l'on peut faire dans d'autres secteurs ; c'est son ampleur, que je ne peux accepter au regard des besoins à financer. En effet, j'ai constaté, à mon arrivée au ministère, que plus de 727 millions d'euros avaient été reportés en cumul ces dernières années.
M. Roland du Luart, rapporteur spécial. Eh oui ! malheureusement !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Nous avons donc perdu, au cours de la précédente législature, l'équivalent d'un budget de l'outre-mer. C'est un véritable gâchis ! Je ne peux que déplorer que de telles occasions aient été manquées au profit de l'outre-mer.
Les crédits reportés représentent ainsi, l'équivalent de trois années de dotations de la ligne budgétaire unique pour le logement, ou près de deux années de crédits pour l'emploi du FEDOM.
Afficher, comme auparavant, des augmentations de budget pour ne pas consommer l'ensemble des crédits est, à mon avis, un non-sens et relève d'une logique avec laquelle je souhaite rompre résolument. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Roland du Luart, rapporteur spécial. La commission vous suivra !
Mme Brigitte Girardin, ministre. L'essentiel de notre travail ne se résume pas à la simple présentation d'un budget une fois l'an. Il faut agir au jour le jour pour consommer les crédits, utilement et efficacement.
M. Roland du Luart, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Quelle ne fut pas ma surprise en constatant que, dans le même temps où les reports de crédits progressaient au rythme de l'augmentation du budget, l'Etat était complètement défaillant dans la tenue de ses engagements à l'égard de plusieurs collectivités d'outre-mer !
Je vais vous en donner quelques exemples.
Dans les quatre DOM, les budgets des assemblées départementales ont subi des prélèvements indus au titre de la couverture maladie universelle pour un montant de 70 millions d'euros. (M. Georges Othilly fait un signe d'approbation.)
Dès 2003, nous mettrons un terme à ces erreurs inadmissibles. J'espère aussi traiter la situation particulière des communes de Guadeloupe qui ont été injustement pénalisées par une augmentation brutale de leurs contingents d'aide sociale, grevant ainsi leur budget.
Par ailleurs - c'est un deuxième exemple - le gouvernement précédent a instauré l'obligation légale pour l'Etat de financer le fonds intercommunal de péréquation des communes de Polynésie à hauteur de 7,9 millions d'euros par an. Mais il n'a pris aucune mesure budgétaire pour respecter son engagement sur les années 2001 et 2002. Nous sommes en train de régler cette question.
Monsieur Flosse, vous avez souligné également la situation financière des communes de Polynésie, dont les ressources propres doivent être réévaluées. C'est une demande que je comprends parfaitement. Elle est notamment liée à l'instauration d'une fiscalité propre des communes, que vous avez d'ailleurs évoquée à l'occasion de la présentation du budget à l'assemblée territoriale le 19 septembre dernier. Il conviendra alors de définir une base fiscale et de laisser la liberté aux communes de fixer le taux en fonction des recettes attendues. La part du territoire dans le financement des communes pourra, dans ces conditions, être réduite.
J'ajoute, monsieur le sénateur, que la dotation de rattrapage que vous évoquez pourrait prendre, pour l'Etat, la forme d'une défiscalisation. Vous savez que je propose, dans le cadre de la loi de programme, l'éligibilité à la défiscalisation de certains équipements structurants pour les communes, comme, par exemple, les stations d'épuration, les unités de dessalement de l'eau de mer ou de production d'électricité.
Un autre exemple de non-respect par l'Etat de ses engagements peut être relevé en Nouvelle-Calédonie. La dotation pour la construction et l'équipement des collèges a été insuffisamment abondée. Monsieur Loueckhote, vous avez raison de vous élever contre cette situation : l'Etat n'a pas respecté le critère des effectifs scolarisés fixé par la loi. Ce sont plusieurs millions d'euros qui manquent, alors que les besoins sont criants. Là aussi, nous sommes en train de mettre fin à ce manquement inacceptable de l'Etat.
Le projet de budget que je vous présente rompt résolument avec ces pratiques et s'inscrit dans une dynamique pragmatique, au plus près des réalités de terrain et des attentes de nos compatriotes d'outre-mer. Répondre aux attentes, faire ce que l'on annonce, c'est aussi respecter celles et ceux pour lesquels nous travaillons.
Le développement économique et social durable de l'outre-mer passe par un respect mutuel des engagements dans le cadre d'un partenariat financier clairement exprimé entre l'Etat et les collectivités. C'est pourquoi je veillerai à ce que les concours financiers de l'Etat aux collectivités d'outre-mer soient effectivement versés, conformément aux engagements pris, et soient adaptés aux besoins spécifiques de l'outre-mer.
Pour assurer, précisément, une bonne prise en compte des spécificités de nos dix collectivités d'outre-mer, il me paraît essentiel d'insister sur la nécessaire cohérence de l'action de l'Etat outre-mer.
Je le souligne avec d'autant plus de plaisir que, cette année, l'outre-mer a retrouvé toute sa place au coeur de l'organisation gouvernementale avec un ministère à part entière, dont la vocation interministérielle est enfin réaffirmée. C'est à la fois une marque de respect, de reconnaissance et d'estime à l'égard de ces Français d'outre-mer, qui sont une part irremplaçable de notre communauté nationale et qui apportent à l'épanouissement de notre pays une immense et généreuse contribution. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) C'est avant tout pour eux que le Gouvernement a la volonté de mener une action ambitieuse fondée sur la confiance, avec pour objectif l'égalité économique, définie par le Président de la République comme l'étape ultime de l'accès à la pleine citoyenneté de chacun par le travail et la dignité.
En effet, vous le savez, les moyens de mon ministère ne représentent pas l'ensemble de l'effort que l'Etat consacre à l'outre-mer : il s'agit seulement d'un dixième des crédits qui y sont affectés. Il est donc de ma responsabilité d'intervenir auprès de mes collègues du Gouvernement pour qu'ils mettent en place, dans les domaines qui relèvent de leur compétence, les financements et les moyens propres à satisfaire les besoins de l'outre-mer.
J'ai bien noté les demandes qui ont été formulées par M. Flosse. Bien entendu, je les transmettrai à mes collègues du Gouvernement.
Dans cet esprit, et à titre d'exemple, j'ai décidé de relancer l'action de la commission interministérielle de coordination des investissements de l'Etat outre-mer, afin de garantir, sous mon autorité, la cohérence des actions économiques et des investissements de l'Etat. Je constate d'ailleurs que cette commission ne s'est plus réunie depuis quatre ans, témoignant sans doute du faible intérêt porté à l'action concrète de l'Etat outre-mer.
Cette action est d'autant plus essentielle qu'il existe outre-mer une très forte imbrication entre les contrats de plan et les actions financées au titre des DOCUP. Il importe donc de dynamiser cette synergie, que l'on ne retrouve pas en métropole. Je rappelle que 85 % des actions des contrats de plan des quatre DOM bénéficient d'un financement européen. Mon ministère a donc participé activement à l'élaboration des mesures de simplification administrative permettant une meilleure consommation des crédits européens pour éviter des dégagements d'office qui seraient une catastrophe pour les collectivités concernées. Je réponds sur ce point à l'interrogation de M. Raoul.
Mon ambition est de faire simple et pratique, surtout quand on connaît le poids des investissements publics dans les économies d'outre-mer.
Mon souci de cohérence de l'action de l'Etat outre-mer s'illustre aussi dans la lutte contre l'insécurité - MM. Balarello, Hyest et Othily l'ont souligné -, qui est aggravée outre-mer, en particulier en Guyane et à Mayotte, par le poids de l'immigration clandestine.
Je veille à ce que les particularités de l'outre-mer soient pleinement prises en compte, et ma présence comme membre permanent du conseil de sécurité intérieure me permet de faire valoir certaines spécificités et d'obtenir un renforcement significatif des moyens de police et de gendarmerie, comme ce fut le cas en Guyane cet été.
En matière de sécurité, vous attendez tous légitimement des faits. Je peux vous dire que nous sommes en train de renverser la tendance, puisque la délinquance de voie publique a sensiblement fléchi grâce aux mesures prises par le Gouvernement avec, en particulier, la création, comme en métropole, des groupements d'intervention régionaux.
Nous avons, vous le savez, engagé en Guyane une action déterminée pour lutter intensivement contre l'orpaillage clandestin, et les premiers résultats sont encourageants. Je tiens à remercier à cet égard M. Othily de nous avoir aidés à modifier le code minier, afin de permettre la destruction sur place du matériel des orpailleurs clandestins.
Sur l'initiative du préfet de Guyane, les opérations ciblées se succèdent depuis le 30 septembre dernier. Plusieurs tonnes de matériels, des milliers de litres de carburant, des groupes électrogènes, du ravitaillement ont été saisis et détruits, et une centaine de personnes en situation irrégulière ont été interpellées.
Il faut que les orpailleurs clandestins, et surtout leurs commanditaires, comprennent que, désormais, ces activités ne seront plus rentables en Guyane pour ceux qui les exercent dans l'illégalité.
J'ai bien noté votre souci, monsieur Othily, de faire en sorte d'activer, sur le plan de la coopération régionale, la conclusion d'accords. C'est déjà le cas avec le Brésil, et nous travaillons actuellement pour en conclure avec le Surinam et le Guyana.
Cependant, toutes ces actions seraient vaines si elles n'étaient pas accompagnées par des mesures significatives pour moderniser la gestion des crédits du ministère.
Je sais que votre assemblée s'est montrée soucieuse de faire réaliser des économies à l'Etat. C'est un point sur lequel j'ai veillé lors de l'élaboration de mon budget, en ne reconduisant pas les 31 millions d'euros de la compensation de la créance de proratisation. Comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, cette créance comportait deux volets : l'un consacré au logement, l'autre destiné à l'insertion.
Le volet du logement, qui était le plus important, a été inscrit durablement dans la base budgétaire de la ligne budgétaire unique, conformément aux engagements du Président de la République. L'autre volet a été supprimé, car le maintien de la part « insertion » de la créance de proratisation ne se justifiait plus du fait de la disparition, à compter du 1er janvier 2002, du différentiel entre le niveau du RMI dans les DOM et celui de la métropole.
Je précise que, compte tenu du mode de financement des agences départementales d'insertion, les ADI, cette économie de structure se réalisera sans bouleversement de la situation financière de celles-ci. En effet, le réalignement du montant du RMI outre-mer sur celui de la métropole augmente mécaniquement la dépense de RMI et donc d'autant la part que le conseil général doit lui consacrer.
En maintenant la compensation de cette créance, l'Etat organisait au profit des ADI un effet d'aubaine les conduisant à bénéficier à la fois d'une dotation du département augmentée et d'une créance qui n'avait plus lieu d'être.
J'ajoute que les quatre ADI disposent d'un confortable fonds de roulement, de 120 millions d'euros, correspondant à quatre années de créance.
J'estime, par ailleurs, nécessaire d'accomplir un effort pour mieux mobiliser les moyens financiers des ADI.
De même, les mesures de la loi d'orientation pour l'outre-mer de mon prédécesseur ont été financées, cette fois-ci, de manière plus réaliste. En effet, sur les 23 000 mesures affichées au titre du projet initiatives-jeunes, du congé solidarité et du retour à l'activité, seul un tiers au mieux aura été réalisé. Une réflexion au premier euro dépensé a permis de réajuster ces mesures à 9 300, ce qui représente, par rapport à ce qui sera effectivement réalisé en 2002, une augmentation de 23 %. Nous évitons ainsi d'immobiliser inutilement 30 millions d'euros que l'on sait ne pas pouvoir dépenser.
Plus généralement, j'entends, à compter de 2003, commencer à combler le retard de modernité dont souffre le ministère et faire en sorte que l'outre-mer participe activement aux efforts de modernisation de la gestion des crédits publics et s'inscrive pleinement dans les orientations de la réforme de l'Etat.
Mon objectif est simple : dynamiser la ressource budgétaire du ministère, avec cette conviction qu'un bon budget n'est pas un budget qui augmente systématiquement dans des proportions importantes. C'est d'abord un budget qui optimise les ressources pour faire plus et mieux.
M. Roland du Luart, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Parmi les mesures que j'ai retenues, figure une déconcentration plus importante de crédits, notamment ceux du FEDOM et ceux qui concernent la réhabilitation de l'habitat insalubre. Cela va donc dans le sens que vous souhaitez, monsieur le rapporteur spécial.
Une expérimentation sera conduite en Martinique pour déconcentrer des crédits du FEDOM. Il n'est pas davantage normal que ce soit à Paris que l'on décide, par exemple, des bourses pour les étudiants, des crédits pour la formation des cadres ou de certains crédits de rémunération pour du personnel embauché localement.
Enfin, la modernisation de la gestion des crédits du ministère se concrétise par la mise en place d'un contrôle de gestion, afin de me permettre de connaître régulièrement l'état des dépenses et la réalisation des objectifs, pour ne pas être en situation de justifier le besoin en constatant la dépense. Le contrôle de gestion est un outil aujourd'hui indispensable pour piloter correctement un budget.
Ces différents outils, mesdames, messieurs les sénateurs, me permettront d'améliorer de façon significative le taux de consommation de mes crédits au profit de l'outre-mer.
Je répondrai maintenant plus précisément aux questions que, les uns et les autres, vous m'avez posées.
Vous avez été nombreux à évoquer la « crise » du tourisme, relayée par la presse de façon sans doute un peu exagérée. Mme Létard, MM. Lise, Désiré et Larifla ont souligné, avec raison, l'importance de ce secteur clé du développement économique de l'outre-mer, notamment aux Antilles.
Compte tenu des difficultés actuelles, j'estime indispensable de bâtir rapidement un plan d'action pour la sauvegarde et la relance du tourisme outre-mer. Je précise que les choix en matière de développement touristique sont d'abord une affaire locale et qu'il appartient, en premier lieu, au corps social, aux élus, aux entrepreneurs et aux collectivités d'outre-mer de définir la place que cette activité doit occuper dans leur économie.
Face à cette situation préoccupante, le secrétaire d'Etat au tourisme, M. Léon Bertrand, et moi-même avons engagé, dès le mois de septembre dernier, au sein de nos ministères, une réflexion concertée avec les forces vives locales, afin de définir un plan d'action pour la relance du tourisme outre-mer. Nous détaillerons très prochainement ces mesures.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, le levier fiscal doit être plus largement utilisé pour remettre à niveau nos infrastructures touristiques. J'ai proposé des mesures spécifiques pour ce secteur dans le cadre de la future loi de programme et du nouveau système de défiscalisation qui sera mis en place.
Monsieur Lise, je vous remercie d'avoir évoqué le dossier important et sensible des agences des cinquante pas géométriques. Il est vrai que, créées en 1996, ces agences n'ont réellement été mises en place qu'à partir de 2000. Ce délai s'est traduit par un retard important dans l'accomplissement des missions qui leur sont imparties.
Aujourd'hui, ces agences rencontrent des difficultés de financement. Nous étudions plusieurs solutions. Je vous confirme, d'ailleurs, que les premiers reversements du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie au titre des occupations et des cessions interviendront dans les semaines qui viennent.
M. Vergès a bien voulu souligner, et de façon opportune, les potentialités extraordinaires de nos collectivités d'outre-mer en termes d'environnement ; elles ont, de surcroît, un véritable besoin d'indépendance énergétique.
J'ai, pour ma part, eu l'occasion d'évoquer la nécessité de développer le recours aux énergies renouvelables lors du séminaire gouvernemental consacré au développement durable qui s'est tenu voilà quelques jours. L'outre-mer a effectivement des potentialités extraordinaires : le soleil pour l'énergie solaire, le vent pour les éoliennes, les volcans pour la géothermie et, en Guyane, l'eau pour l'hydroélectricité.
Malheureusement, les potentialités ne sont pas suffisamment exploitées. Il faut que nous donnions un coup d'accélérateur afin que les collectivités territoriales aient accès à une électricité à moindre coût. Je pense à Mayotte, où le coût de l'électricité est près de sept fois supérieur à celui qui est pratiqué en métropole. Je compte, dans le cadre de la loi de programme, user notamment du levier fiscal pour donner une nouvelle impulsion au développement de tels investissements, qui, je le crois, sont de nature à améliorer la vie quotidienne de nos compatriotes d'outre-mer.
MM. Lise et Désiré, notamment, ont évoqué certains problèmes agricoles bien connus, ceux de la banane et de l'ananas.
Les producteurs de bananes antillais connaissent une grave situation financière.
Avec l'appui d'Hervé Gaymard, nous avons obtenu diverses mesures d'urgence pour aider les producteurs et leurs groupements à refaire surface. Il s'agit, tout d'abord, d'une revalorisation de 2,84 centimes d'euro par kilo de l'avance sur l'aide compensatoire au titre de l'année 2002. Je reconnais que ce résultat, qui n'a pas été facile à obtenir, est loin d'être satisfaisant, mais il devrait, je pense, permettre aux groupements de producteurs et aux planteurs de retrouver un peu d'oxygène.
Pour répondre au manque de trésorerie des groupements de producteurs, vous savez que deux autres mesures ont été obtenues : tout d'abord, une augmentation du préfinancement de l'avance sur l'aide compensatoire à 100 % par la BDPME, la banque du développement des PME, ensuite, l'élaboration, à l'échelon national, d'un dispositif d'urgence, par la transformation partielle en subventions des prêts de l'ODEADOM - l'office de développement de l'économie agricole dans les départements d'outre-mer - et, à l'échelon local, par l'appui à la mise en place de fonds de garantie permettant aux groupements de producteurs d'accéder à des emprunts destinés à préfinancer une plus grande partie de l'aide compensatoire.
J'en suis tout à fait consciente, ces mesures d'urgence ne suffisent pas. C'est pourquoi, avec M. le ministre de l'agriculture, nous allons lancer, dès le début de l'année 2003, une grande concertation des professionnels afin d'anticiper l'avenir de l'OCM banane dans l'Union élargie et dans la perspective de l'éventuelle révision de 2006.
Je peux vous assurer, monsieur Lise, que nous défendrons toujours aussi bien le volet interne que le volet externe de l'OCM banane, avec la même détermination et la même conviction, même si la tâche n'est pas facile car, hormis les Espagnols et les Portugais, nous n'avons guère de soutien au sein de l'Union.
S'agissant de l'ananas de Martinique, monsieur Désiré, j'ai envoyé, en accord avec M. le ministre de l'agriculture, une mission en Martinique, afin de faire le point sur la situation technique et financière de la SOCOMOR. Ce travail d'évaluation et de concertation mené à l'échelon local devrait nous permettre de répondre, d'ici à la fin du mois de janvier, à l'attente de la Commission européenne, qui souhaite que la France présente un programme 2003-2006 plus équilibré entre la commercialisation en frais et la transformation. Et je veillerai, avec M. Hervé Gaymard, à ce que le calendrier soit respecté et à ce qu'un programme quadriennal solide soit présenté à la Commission pour approbation.
Monsieur Désiré, vous avez également souhaité avoir des précisions sur les conditions de financement de l'économie outre-mer. Vous avez fait part de vos inquiétudes sur l'accès au crédit, au financement des entreprises et à la SODEMA, la société de crédit pour le développement de la Martinique.
La baisse du coût du crédit dans les départements d'outre-mer depuis 1995, même si elle n'a pas éliminé les écarts de taux d'intérêt avec la métropole, a tout de même favorisé le financement des activités des entreprises et des particuliers.
Par ailleurs, l'accès au crédit des entreprises est désormais facilité par des outils d'ingénierie financière mis en place dans les quatre régions d'outre-mer par l'Etat et par les collectivités régionales, avec le concours du FEDER, tel le fonds de garantie dénommé « Fonds Dom ».
Face aux difficultés des filiales financières de l'Agence française de développement, notamment de la SODEMA, dont les parts de marché se réduisent de plus de 10 % chaque année, la recherche d'une solution durable est en cours, après concertation avec les collectivités locales. Nous sommes donc très vigilants sur ce dossier, et nous allons essayer de trouver la solution la plus adaptée.
Vous avez également évoqué, monsieur Désiré, le problème des constructions scolaires. Je partage votre souci et votre constat sur la nécessité d'un plan de rattrapage pluriannuel en ce domaine. Les besoins sont effectivement très importants pour faire face à une forte poussée démographique et à un bâti existant qui présente, vous l'avez dit, de sérieuses lacunes en termes de sécurité.
Notre jeunesse d'outre-mer, bien évidemment, doit bénéficier sur place d'une formation de qualité, ainsi que de véritables perspectives d'emploi durable. Aussi, je partage votre avis sur la nécessité de mettre en oeuvre un véritable plan de rattrapage partout où le besoin est criant. C'est la raison pour laquelle je vais envoyer prochainement sur place, avec l'accord du ministre chargé de l'éducation nationale, une mission d'évaluation qui sera chargée de dresser un état des lieux et d'établir des priorités.
Madame Payet, vous avez évoqué la CMU, dossier qui requiert toute mon attention depuis mon entrée en fonctions. Vous avez traité avec beaucoup de pertinence du problème de seuils instaurés par la loi du 27 juillet 1999. Le dispositif mis en place n'est absolument pas adapté aux spécificités de l'outre-mer, et tout particulièrement celles de la Réunion, où, pour des raisons historiques, la culture mutualiste est peu étendue. Le système a conduit à une régression sociale d'autant plus injustement vécue que le coût des prestations de santé est plus élevé outre-mer qu'en métropole.
Je partage donc pleinement votre analyse et souhaite faire en sorte que les moins démunis outre-mer ne soient plus pénalisés par l'instauration de la CMU.
J'ai donc pris contact, depuis plusieurs mois déjà, avec le ministre chargé de la santé, M. Jean-François Mattei, qui partage complètement mon analyse, pour que nous essayions de régler ce dossier au plus vite.
Nous avons réfléchi à deux pistes possibles.
La première consisterait à majorer, dans les départements d'outre-mer, le montant de l'aide à la mutualisation et à faire en sorte que les personnes concernées soient couvertes par une bonne assurance complémentaire.
La seconde piste - je ne cache pas qu'elle a ma préférence - consisterait à relever, toujours dans les départements d'outre-mer, le plafond des ressources ouvrant droit à la CMU complémentaire. Cette proposition figure dans le projet de loi de programme actuellement soumis à l'arbitrage du Premier ministre.
Pour rester sur les problèmes de santé, je voudrais répondre à la fois à M. Loueckhote et à M. Laufoaulu sur la dette de l'agence de santé de Wallis-et-Futuna envers l'hôpital Gaston-Bourret de Nouméa du fait des évacuations sanitaires vers la Nouvelle-Calédonie. Cette dette est préoccupante, car elle grève le développement de l'agence de santé ; elle sera progressivement apurée dans le cadre d'un accord mutuel en cours de discussion entre l'agence de santé et l'hôpital Gaston-Bourret.
Je vous précise, à cette occasion, que le directeur de l'agence de santé doit prendre ses fonctions le 1er janvier prochain. J'espère donc que nous pourrons régler ce problème dans les meilleurs délais.
Vous avez également évoqué monsieur Laufoaulu, le problème des travaux publics à Wallis-et-Futuna. J'avais déjà été interrogée à l'Assemblée nationale sur cette question par M. Victor Brial, dans le cadre de la discussion budgétaire.
Depuis, la situation a progressé, et je suis intervenue de nouveau pour que le recrutement du chef du service des travaux publics à Wallis-et-Futuna avance. Je peux d'ailleurs vous annoncer que l'intéressé sera sur le territoire avant Noël. Il lui reviendra de prendre la mesure des moyens humains et budgétaires à la disposition de son service. S'il le juge nécessaire, il pourra proposer des ajustements en fonction des tâches et des chantiers à venir.
Je veillerai, avec mon collègue chargé de l'équipement, à ce que ses propositions soient étudiées avec l'attention qu'elles méritent.
J'en viens maintenant à Mayotte. Madame Gourault, vous avez bien voulu exprimer les préoccupations de votre collègue Marcel Henry, notamment sur certains fonds au profit de Mayotte.
Je précise que le décret ouvrant le droit au fonds de compensation pour la TVA aux communes de Mayotte est actuellement en cours de signature et devrait être publié d'ici à la fin de l'année. Il en est de même pour le décret fixant le fonctionnement du fonds de coopération régionale.
La mise en place du fonds mahorais de développement a pris du retard sous le gouvernement précédent, retard que nous nous sommes attachés à combler. Le décret organisant le fonctionnement de ce fonds a été signé par les ministres concernés et sera publié dans les tout prochains jours.
Quant au fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales, le FISAC, outil majeur pour le développement local de l'artisanat, il fait actuellement l'objet d'une réforme. Un nouveau cadre juridique est prévu pour 2003. M. le Premier ministre a pris l'engagement de maintenir pour les trois années à venir la dotation de 71 millions d'euros, soit 3,9 millions d'euros de plus qu'en 2002. Je veillerai à ce que Mayotte puisse bénéficier de ces crédits dès 2003.
Enfin, vous avez insisté sur la nécessité pour Mayotte de bénéficier du statut de région ultrapériphérique. Je peux vous assurer que, sur ce sujet, le Gouvernement tout entier est mobilisé dans le cadre, notamment, des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe pour que nous puissions obtenir de nos partenaires une modification de l'article 299-2 du traité d'Amsterdam. M. Jean-Paul Virapoullé, que j'ai chargé d'une mission sur l'application de cet article, nous y aide. Nous ferons tout pour que Mayotte puisse accéder au statut de région ultrapériphérique, et ainsi bénéficier des fonds structurels européens.
Monsieur Reux, j'aurai, dans quelques jours, l'occasion de me rendre dans votre bel archipel et je détaillerai, alors, mes réponses aux nombreuses questions que vous m'avez posées concernant Saint-Pierre-et-Miquelon.
La filière pêche est effectivement un sujet de préoccupation permanent. Vous savez, monsieur le sénateur, que j'ai déjà obtenu des résultats, dont une aide exceptionnelle à l'investissement au bénéfice des Nouvelles pêcheries. Nous travaillons actuellement à la mise en oeuvre d'une mesure d'urgence en faveur des petits pêcheurs artisans.
Pour l'avenir, afin de déterminer les potentialités en matière halieutique, je souhaite que soit réalisée le plus rapidement possible une étude exhaustive des ressources halieutiques de la zone économique de Saint-Pierre-et-Miquelon. Les discussions sont en cours entre mes services et les organismes compétents, dont l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, l'IFREMER, afin d'élaborer un programme de travail.
Vous avez évoqué la situation financière des collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon : elle est effectivement préoccupante. Nous sommes en train d'analyser ces difficultés pour imaginer des solutions pérennes. J'estime, en effet, qu'une approche d'ensemble des finances locales est nécessaire et qu'il ne faut pas se limiter à des mesures ponctuelles.
S'agissant des perspectives d'exploitation d'hydrocarbures au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, le Gouvernement a pleinement conscience de l'enjeu et c'est déterminés que nous menons, avec le Canada, des négociations, au demeurant difficiles, sur la répartition des retombées économiques à venir.
Je compte d'ailleurs, sur le chemin de Saint-Pierre-et-Miquelon, m'arrêter à Ottawa pour discuter avec le gouvernement canadien de ce dossier important pour l'économie et l'avenir de l'archipel.
Concernant Air Saint-Pierre et le coût des astreintes liées aux évacuations sanitaires, je voudrais préciser que le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, qui est géré par le ministère chargé des transports, intervient pour compenser en totalité le déficit d'exploitation des liaisons internationales régulières vers le Canada.
Je terminerai avec un dossier un peu délicat : la diffusion de Radio France Outremer, RFO, au Canada. Il est vrai que cette diffusion est une bonne chose pour la francophonie, mais elle soulève un certain nombre de problèmes juridiques pour les ayants droit des programmes diffusés par Télé Saint-Pierre-et-Miquelon, problèmes que nous ne pouvons pas ignorer.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ces éléments de réponse ne constituent qu'une première étape de la politique ambitieuse que mènera le Gouvernement pour l'outre-mer, dans le strict respect des engagements pris par le Président de la République.
Je tiens à remercier vivement les rapporteurs de la qualité de leur analyse de projet de budget et à les assurer que je tiendrai le plus grand compte de leurs remarques.
Dans quelques jours, les assemblées locales d'outre-mer seront consultées sur le projet de loi de programme qui tracera pour quinze ans l'avenir économique et social de nos collectivités d'outre-mer. J'aurai le plaisir, avant l'été prochain, de défendre devant vous ce projet de loi de programme promis par le Président de la République. Je le ferai avec beaucoup de conviction, beaucoup de détermination et beaucoup d'enthousiasme aussi, car, au-delà de l'égalité économique, qui est un droit pour nos concitoyens d'outre-mer, il faut que, ensemble, nous puissions bâtir un vrai projet de société, où la participation etl'épanouissement de chacun sera la règle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Serge Vinçon remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président

M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le ministère de l'outre-mer et figurant aux états B et C.

ÉTAT B