M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. L'article 1er bis vise à élargir les pouvoirs de réquisition du préfet en l'autorisant en cas d'urgence, lorsqu'une atteinte à l'ordre public l'exige, de réquisitionner tout bien et tout service, de requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service et de prescrire toute mesure utile jusqu'à ce que l'atteinte à l'ordre public ait pris fin.
Quel pouvoir est ainsi placé entre les mains du préfet ! Quel empiètement sur les libertés publiques et individuelles !
En effet, le champ d'application de ce pouvoir de réquisition est bien trop étendu. Vous savez parfaitement que la notion d'atteinte à l'ordre public peut être interprétée très largement, puisque n'importe quel trouble - un excès de vitesse, bientôt la présence d'une prostituée sur un trottoir - peut suffire à constituer un tel délit.
Par ailleurs, quels sont ces biens et ces services que le préfet aura le pouvoir de réquisitionner ? Comment peut-on exiger que toute personne réponde à cet ordre de réquisition sous peine d'encourir six mois d'emprisonnement et 10 000 euros d'amende ?
Non seulement les nouveaux pouvoirs de réquisition dévolus aux préfets ne sont pas strictement définis ni encadrés, mais, de plus, la protection des libertés des personnes réquisitionnées n'est aucunement garantie.
Le préfet dispose ainsi d'un pouvoir discrétionnaire qui est de nature à porter atteinte à une liberté individuelle et qui échappe cependant au contrôle de l'autorité judiciaire. Seule la juridiction administrative sera compétente en cas d'excès de pouvoir ; mais, que je sache, l'article 66 de la Constitution ne fait pas encore de la juridiction administrative la gardienne de la liberté individuelle !
Chers collègues de la majorité sénatoriale, cet article est représentatif de l'ensemble du texte : un pouvoir omnipotent est accordé aux représentants de l'Etat et aux forces de l'ordre, aux dépens d'une autorité judiciaire qui en est réduite à s'effacer derrière ce pouvoir policier.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. L'article 8 bis vise à accroître encore les possibilités accordées aux officiers de police judiciaire en matière de fouille des biens personnels.
Avec les articles 5 et 6 du projet de loi, un pouvoir démesuré leur est déjà accordé. Ils peuvent en effet fouiller les véhicules, quasiment sans limite de temps, lors de la commission d'un grand nombre d'infractions, ou lorsqu'ils ont une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner le conducteur ou l'un de ses passagers d'avoir commis un crime ou un délit flagrants.
Ces fouilles s'effectueront bien sûr avec un contrôle de l'autorité judiciaire réduit au minimum puisque, dans le cas d'un flagrant délit, le procureur de la République n'en sera averti qu'a posteriori, lorsqu'il recevra le procès-verbal de l'opération.
Autrement dit, n'importe quel officier de police judiciaire peut arrêter un véhicule sur le bas-côté de la chaussée sans aucun contrôle de l'autorité judiciaire.
Avec l'adoption de l'article 8 bis, les officiers de police judiciaire pourront aussi, lors d'une perquisition, accéder à un système informatique détenu par la personne mise en cause, et ce, une fois encore, sans aucun contrôle du juge judiciaire, puisque cette intrusion pourra avoir lieu sans réquisition du procureur de la République. Cela constitue ni plus ni moins une atteinte au respect de la vie privée, ce qui ne manquera certainement pas d'intéresser également le Conseil constitutionnel.
Une telle mesure est parfaitement révélatrice de la volonté du Gouvernement de rendre les forces de l'ordre toutes-puissantes, au mépris du respect le plus élémentaire des libertés fondamentales.
Celles-ci sont également bafouées par les dispositions de l'article 8 ter, aux termes duquel les organismes publics et privés seront obligés de fournir des renseignements et des informations utiles à la manifestation de la vérité. Encore une fois, le champ d'application de ces dispositions est bien largement défini, d'autant plus que ces organismes seront passibles d'une amende de 3 750 euros en cas de refus de coopération. Bien entendu, tout cela se déroulera sans aucun contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, ni même du procureur de la République, cette dernière garantie ayant été supprimée par la commission mixte paritaire, monsieur le rapporteur !
Notre collègue Alex Türk, rapporteur du projet de loi relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, que le Sénat doit bientôt examiner, avait pourtant fait à ce sujet des remarques pleines de bon sens.
Cette série d'articles marque une régression majeure des droits et des libertés des citoyens en matière de respect de la vie privée. Pour notre part, nous ne pouvons pas l'accepter ; je ne sais pas s'il en va de même pour vous.
M. Jean-Pierre Schosteck. Nous, ça va !
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. L'article 8 quater vise tout simplement à supprimer l'obligation de notifier à toute personne gardée à vue qu'elle peut choisir de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui seront posées, ou de se taire.
Ce droit au silence, on s'en souvient, avait été introduit dans la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence,...
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Mais non !
M. Robert Bret. ... complétée par la loi du 4 mars 2002, dont l'adoption, nous le savons tous, embarrasse quelque peu les policiers.
Curieusement, le législateur était demeuré silencieux - c'est le cas de le dire ! - sur la question, en droit pénal, de la liberté qu'a toute personne mise en cause de garder le silence, liberté qui est pourtant le corollaire de la présomption d'innocence, monsieur le ministre !
Bien entendu, il découle du principe de la présomption d'innocence que la charge de la preuve incombe au représentant du ministère public, ce qui entraîne nécessairement que la personne mise en cause ne peut être contrainte à témoigner contre elle-même, puisqu'elle est présumée être un citoyen respectable jusqu'à ce que le procureur prouve le contraire et démontre sa culpabilité « hors de tout doute raisonnable ».
C'est bien en cela que la notification du droit au silence est si importante. Sa suppression est un premier pas vers une restriction des droits de la personne gardée à vue qui sera sans doute confirmée dans le projet de loi que prépare M. le garde des sceaux et que j'ai mentionné au cours de la discussion générale.
En effet, M. Perben adopte une vision de plus en plus policière de la procédure pénale en la faisant glisser progressivement vers un système accusatoire.
Cela commence par le fait que le policier ne sera plus obligé de notifier à la personne en garde à vue qu'elle a le droit de garder le silence, notamment en attendant l'arrivée de son avocat.
L'avocat arrivera d'ailleurs de plus en plus tardivement, car il semble que sa présence entrave grandement le travail de la police...
Il est même prévu, toujours dans le projet de loi du garde des sceaux, que l'avocat ne pourra plus intervenir avant la trente-sixième heure de garde à vue pour les affaires commises en bande organisée. Or cette circonstance aggravante s'étend à de nombreux crimes et délits, et la notion de « bande » peut s'appliquer dès qu'il existe au moins un complice.
La régression que constitue pour les justiciables la suppression de la notification du droit au silence n'est, hélas ! qu'un commencement.
Pourtant, le droit au silence n'est-il pas la manifestation externe de la présomption d'innocence ? Si le silence ne vaut pas consentement en droit des obligations, pourquoi vaudrait-il aveu de culpabilité en droit pénal ?
C'est pourquoi nous sommes fermement opposés à cet article qui nous donne une raison supplémentaire de ne pas voter l'ensemble du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Je prie mes collègues de bien vouloir m'excuser de reprendre la parole, mais les questions que je soulève méritent d'être discutées.
M. Jean-Pierre Schosteck. Absolument !
M. Robert Bret. Est-il encore nécessaire de dire que nous sommes résolument opposés à l'extension des fichiers de police ?
M. André Ferrand. Mais oui !
M. Robert Bret. Le texte qui a été présenté au Sénat était déjà pour le moins critiquable.
Il prévoyait, en effet, que les fichiers pourraient contenir des informations non seulement sur tout crime ou délit, mais aussi sur les contraventions de la cinquième classe, qui sont pourtant des infractions de moindre gravité que les crimes et les délits.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Comme la détention d'armes à feu !
M. Robert Bret. Surtout, les fichiers seraient susceptibles de contenir des informations sur les suspects, ce qui contrevient bien évidemment au principe de la présomption d'innocence, et cela, monsieur le ministre, sans limitation d'âge. Non seulement la protection pénale des mineurs s'est envolée, mais, depuis le passage du texte à l'Assemblée nationale, les fichiers de police pourraient également contenir des informations sur les victimes ! A ce rythme, une bonne majorité des Français pourraient demain se retrouver fichés par les fonctionnaires de la police et de la gendarmerie nationales. On comprend d'autant mieux que la Commission nationale de l'informatique et des libertés ait regretté de ne pas avoir été consultée préalablement à la rédaction de cet article 9.
Les dispositions sur les fichiers de police sont, par ailleurs, à juste titre contestées parce qu'il n'y est fait aucune référence à la loi sur l'informatique et les libertés de 1978, qui définit l'utilisation des fichiers nominatifs.
C'est d'autant plus regrettable qu'à l'heure actuelle, selon la CNIL, le système de traitement de l'information criminelle, le STIC, contiendrait au moins 20 % d'erreurs, ce qui n'est pourtant pas étonnant puisque ce système de traitement rassemble des informations recueillies dans une multitude de fichiers contenant les procès-verbaux dressés à la suite de plaintes ou d'enquêtes et mêlant ainsi les victimes et les présumés contrevenants.
Le pourcentage d'erreurs ne risque pas de diminuer si les fichiers sont « gonflés » d'informations supplémentaires sur toutes les personnes concernées de près ou de loin par des affaires judiciaires.
C'est d'autant plus grave que ces informations pourront être consultées par un nombre considérable de personnes, parfois pour de simples enquêtes administratives.
Ce sont autant de garanties du respect de la vie privée des justiciables qui sont supprimées, et nous ne pouvons le tolérer.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons déjà exprimé, lors de l'examen de cet article en première lecture, notre inquiétude sur l'emploi de dispositifs temporaires de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules - dispositifs qui permettent une vérification systématique au fichier des véhicules volés de la police et de la gendarmerie nationales - à l'occasion d'événements particuliers ou de grands rassemblements de personnes.
Je le répète une nouvelle fois : nous ne contestons pas la mise en place de dispositifs fixes et permanents afin de repérer des véhicules volés en des points précis, par exemple dans les zones transfrontalières, portuaires ou aéroportuaires, et sur les grands axes de transit national et international, en particulier aux péages des autoroutes.
Ce que nous contestons, mes chers collègues, c'est l'emploi de tels dispositifs, même temporaires, à l'occasion d'« événements particuliers » ou de « grands rassemblements de personnes ». Ces expressions, vous ne pourrez le nier, semblent pour le moins vagues. Elles auraient mérité des éclaircissements et des précisions dans le texte même du projet de loi.
La loi ne doit pas permettre que l'on fasse d'elle un usage abusif. Je ne vous vise pas, vous, monsieur le ministre, mais, demain, cela peut arriver, et c'est bien ce que nous craignons. Nous sommes en droit de savoir si la mise en place de systèmes de contrôle et d'identification des véhicules volés ne constituera pas une entrave à la liberté de manifester, à la liberté d'expression et à la liberté syndicale.
On peut en effet s'interroger sur l'objectif réel d'une telle disposition dans un texte largement sécuritaire qui porte atteinte à nombre de libertés individuelles et publiques.
Les manifestants, le plus souvent bien intentionnés, n'ont pas pour habitude, nous semble-t-il, de défiler avec des voitures volées - les casseurs non plus, d'ailleurs, car il est difficile de casser des vitrines au volant d'une voiture...
M. René Garrec, rapporteur. Quoique !
M. Robert Bret. Il y a, c'est vrai, des voitures-béliers, mais cette disposition permettra surtout aux forces de l'ordre de contrôler et donc de museler l'action syndicale tout en sanctionnant mieux les manifestants un peu trop revendicatifs !
Nous en avons d'ailleurs eu un exemple lundi dernier, lors de la manifestation des personnels d'Air Lib sur les pistes et dans le terminal d'Orly : les forces de l'ordre n'ont pas hésité à asperger les manifestants de gaz lacrymogènes, et je crains qu'elles ne recommencent aujourd'hui.
Est-ce cela la liberté de manifestation, monsieur le ministre ?
Nous ne pouvons avoir confiance dans ces dispositions qui donnent encore un peu plus de pouvoirs aux policiers et aux gendarmes pour contrôler des événements particuliers ou de grands rassemblements de personnes, raison pour laquelle je souhaitais intervenir à nouveau sur l'article 14, raison aussi de ne pas voter le projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, sur l'article.
Mme Nicole Borvo. J'ai noté que M. Schosteck appréciait le débat, mais il n'y a pas de débat.
M. Robert Bret. C'est plutôt un monologue !
Mme Nicole Borvo. Cela ne nous empêchera d'ailleurs pas d'émettre quelques protestations, car nous n'avons pas reçu de réponse convaincante.
Avec cet article 15 A, on se donne pour objet de dépister la présence du virus du sida chez les personnes suspectées d'avoir commis une agression sexuelle, dans l'intérêt prioritaire de la victime - je veux en tout cas le penser - et, éventuellement, dans celui du suspect.
On sait en effet qu'en cas d'exposition à un risque de contamination par le virus du sida il est possible de prendre un traitement antirétroviral pour éviter la contamination. Ce traitement doit commencer le plus rapidement possible, c'est-à-dire dans les quarante-huit heures après la prise de risque, et au mieux avant quatre heures. Cette thérapie lourde dure trente jours.
Après un viol, une des urgences pour la victime est donc de commencer le traitement le plus tôt possible et de le poursuivre pendant un mois, pour éviter une contamination par le VIH.
Eviter aux victimes de viol ce traitement et ses effets secondaires paraît être un argument valable pour imposer un dépistage systématique aux personnes suspectées de viol : dans les cas où le test est négatif, la victime peut arrêter le traitement.
Malheureusement, ce dépistage systématique serait parfaitement inefficace. Il pourrait même semer le doute chez la victime, car chacun sait que, dans les deux mois, voire dans les trois mois qui suivent la contamination, on ne peut détecter sans erreur le virus du sida. L'auteur présumé d'un viol, s'il a contracté le sida dans les deux mois ou dans les trois mois qui ont précédé l'agression, pourrait donc ne pas être dépisté.
J'ajoute que la personne suspectée d'être l'auteur d'un viol n'est pas nécessairement le violeur, et un test négatif effectué sur un suspect ne devrait donc pas dispenser la victime de se soumettre au traitement, même si celui-ci est lourd, car, si le suspect n'est pas le violeur, cela pourrait avoir des conséquences dramatiques.
M. Jacques Mahéas. C'est vrai !
Mme Nicole Borvo. Quel est donc le sens d'une telle mesure ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. C'est une précaution.
Mme Nicole Borvo. Est-ce de l'affichage ou cherchez-vous à faire de la séropositivité une circonstance aggravante du viol ?
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Nous ne pouvons que réaffirmer notre opposition la plus ferme à cet article, qui tend à faire des gens du voyage une catégorie à part, une nouvelle classe de personnes dangereuses, au même titre que les prostituées ou les mendiants, et cela au seul motif que leur mode de vie diffère de celui de la plupart des Français.
Mais, monsieur le ministre, les gens du voyage n'en sont pas moins français eux aussi, à 95 % qui plus est ! Pourquoi chercher à tout prix à les marginaliser davantage en offrant aux maires des moyens supplémentaires pour les chasser de leur territoire communal ? Ces maires auraient-ils la même attitude à l'égard d'autres citoyens ? Certainement pas !
Nous pensons très sincèrement qu'il est inutile d'annoncer de nouvelles mesures pénales, de surcroît difficilement applicables, alors que toutes les aires d'accueil prévues par la loi Besson ne sont pas encore réalisées. Il faut bien que les gens du voyage s'installent quelque part ! C'est le bon sens même !
Les dispositions pénales prévues par ce texte ne feront en réalité que déplacer le problème puisque, une fois expulsés, les gens du voyage iront s'installer sur une commune qui aura, elle, fait l'effort de mettre en place une aire d'accueil.
Ces mesures pénales seront d'autant plus difficilement applicables qu'elles contreviennent au principe de la spécialité des peines. Une peine doit s'appliquer individuellement. Or, sera désormais puni le fait de s'installer en réunion sans autorisation sur un terrain d'une commune ayant respecté les dispositions de la loi Besson.
C'est encore pis puisque l'article 19 bis, introduit par nos collègues députés, prévoit que le juge, saisi par voie de requête, peut étendre les effets de l'ordonnance rendue en la forme des référés à l'ensemble des occupants du terrain non visés par l'ordonnance initiale lorsque le requérant démontre l'impossibilité de les identifier.
Tout ce dispositif « anti-gens du voyage » nous paraît particulièrement choquant, d'autant que l'on ne s'attaque pas aux maires qui ne respectent pas les obligations de la loi Besson en matière d'aménagement d'aires d'accueil alors que les maires devraient donner l'exemple !
Tous les moyens sont bons pour faciliter l'expulsion des gens du voyage, même si la logique n'est pas toujours de mise puisque, lorsque l'installation s'est faite au moyen de véhicules automobiles, il peut être procédé à la saisie de ces derniers en vue de leur confiscation par la juridiction pénale. Drôle de moyens, mes chers collègues, de procéder à une expulsion ! Si vous voulez que ces gens s'en aillent, et rapidement de surcroît, ce n'est pas en procédant à la saisie de leur véhicule que vous y arriverez.
Ces mesures sont disproportionnées et injustifiées, et l'acharnement de M. le ministre de l'intérieur à l'encontre de populations qui ont pour seul tort d'avoir choisi un mode de vie différent nous donne un argument de plus pour ne pas voter le projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, sur l'article.
Mme Nicole Borvo. L'article 45 bis instaure un délit d'outrage à La Marseillaise et au drapeau national puni de 7 500 euros d'amende et de dix mois d'emprisonnement. Bien qu'il soit largement passé inaperçu pendant la discussion - notre sentiment est que nous n'en avons en réalité pas débattu -, cet article a déjà beaucoup fait parler de lui.
Mettriez-vous en prison Aragon, Boris Vian, Serge Gainsbourg et la plupart des surréalistes, monsieur le ministre ?
Comment accepter que, par ce biais, la liberté d'expression soit tout d'un coup limitée ?
Les humoristes - vous le savez d'ailleurs, puisque les hommes politiques, s'ils sont souvent victimes des humoristes, en sont aussi friands - sont encore libres en France. Ne le seront-ils plus s'ils raillent l'hymne national ?
M. Robert Bret. On peut se poser la question !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas de l'humour que de se moquer de l'hymne national !
Mme Nicole Borvo. Vous avez en tout cas réussi à réunir contre vous nombre d'universitaires et d'enseignants, qui, à ma connaissance, ne sont pas des anarchistes,...
M. Jean Chérioux. Ça les regarde !
Mme Nicole Borvo. ... mais qui s'insurgent contre cet article sans précédent.
M. Jean Chérioux. Le drapeau, c'est l'image de la République, et, quand on l'insulte, c'est la République elle-même qui est insultée !
M. André Ferrand. Vous n'avez pas le droit de dire cela, madame Borvo !
Mme Nicole Borvo. C'est vous qui n'avez pas le droit de dire cela !
Ce nouveau délit inspire également de vives inquiétudes et de justes critiques quant à l'adhésion forcée aux symboles de la nation que vous souhaitez imposer aux citoyens. La République est respectée si elle est respectable !
Nous partageons pleinement ces craintes. Imposer le respect de l'hymne national et du drapeau par la sanction et par l'emprisonnement, non, franchement non, d'autant que, comme pour beaucoup de dispositions de ce projet de loi, l'application de la sanction pose problème. Je le répète : arrêteriez-vous les humoristes ? Arrêteriez-vous Serge Gainsbourg, Boris Vian, les surréalistes ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je vais vous répondre !
Mme Nicole Borvo. Posez-vous la question !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je vais y répondre !
Mme Nicole Borvo. Vous visez les réunions dans les enceintes sportives : tel est bien votre propos, tel est bien l'esprit dans lequel les députés - pas tous -, sur la proposition d'un des leurs, ont adopté cet article. Mais comment faire lorsqu'une rangée de supporteurs hue l'hymne national ? Vous avouerez qu'il serait délicat d'envoyer une compagnie de CRS procéder à une arrestation sans provoquer une émeute. Je vous souhaite en tout cas bien du plaisir !
Que proposez-vous, monsieur le ministre ? Qu'entendez-vous par « outrage » à La Marseillaise ou au drapeau tricolore ?
Les parodies de notre hymne, les détournements musicaux dont il a souvent fait l'objet seront-ils visés ? Les déclinaisons vestimentaires en bleu, en blanc et en rouge, pour peu qu'elles soient peu décentes, seront-elles censurées ? Les footballeurs ne connaissant pas La Marseillaise et l'écorchant allègrement commettront-ils un outrage et seront-ils punis ?
Vous voyez bien que l'instauration de ce délit risque de créer plus de problèmes qu'elle n'est censée en résoudre, et je suis persuadée que cela donne une vision erronée de l'identité collective : ce n'est pas en créant un délit d'outrage à nos symboles nationaux que nous arriverons au respect des valeurs communes et au « vivre ensemble » que je souhaite sans doute autant que vous.
M. Robert Bret. Sinon plus !
M. Jean-Pierre Schosteck. Soljenitsyne ! Pasternak !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je souhaite répondre à Mme Borvo qui, soit n'a pas lu avec assez d'attention le texte - ce serait sa meilleure excuse -,...
Mme Nicole Borvo. Je sais lire tout de même !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... et n'a donc pas noté la précision qu'il contient, soit, plus simplement, parlant de caricature, caricature elle-même !
Madame, les premiers mots de l'article 45 bis sont les suivants : « Le fait, au cours d'une manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques... ». C'est d'ailleurs sur l'initiative de M. Garrec que cette précision a été apportée, et c'est donc uniquement dans ce cas-là que l'article s'applique. Gainsbourg, Aragon et quelques autres sont donc à l'abri, madame ! Ceux qui veulent mettre l'hymne national en musique sont à l'abri !
M. Jacques Mahéas. Et si cela passe sur une chaîne publique ?
M. Robert Bret. Pourquoi « manifestation organisée ou réglementée » ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Bret, je ne vais pas vous faire un cours de droit. Tout ce que vous avez dit aujourd'hui était une dénaturation complète de la lettre des textes sur lesquels vous vous appuyez.
M. Robert Bret. On verra à l'usage, monsieur le ministre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Consultez, si vous n'avez pas la formation juridique suffisante, un avocat ! Il y a de bons avocats au Parti communiste ! Il y en a même d'excellents !
Mme Nicole Borvo. Ça suffit ! Nous en avons assez de nous faire insulter !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Consultez autour de vous, madame Borvo ! Ce que vous avez dit n'est pas vrai : Gainsbourg est à l'abri !
Mme Nicole Borvo. J'ai fait des études de droit, figurez-vous ! Je n'ai pas besoin de vos leçons !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il ne vous en reste plus grand-chose !
M. Robert Bret. Vous direz cela au Syndicat de la magistrature !
M. le président. Personne ne demande plus la parole sur l'un de ces articles ?...
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Ce texte est un aveu supplémentaire de l'incapacité de l'Etat d'affirmer son autorité par d'autres voies que l'extension indéfinie de mesures pénales. Au fond, monsieur le ministre, vous appliquez toujours la même recette, déclinée sous des formes différentes : aux problèmes des enfants délinquants, vous répondez « prison » aux rassemblements dans les halls d'immeubles, vous répondez « prison » ; aux occupations de terrains par les gens du voyage, vous répondez encore « prison » ; au racolage sur la voie publique, vous répondez toujours « prison ». Ne craignez-vous pas la saturation des prisons ? Il est vrai que le Gouvernement préfère un secrétariat d'Etat aux prisons à un secrétariat d'Etat au logement ! (M. Robert Del Picchia s'exclame.)
Avec ce projet de loi, les magistrats vont se trouver écrasés sous une masse de procès-verbaux que l'institution judiciaire aura le plus grand mal à traiter en termes de rendu de jugement. Que dira le ministre de la justice à l'ensemble des responsables de juridictions, lui qui a annoncé soumettre dorénavant les moyens accordés aux juridictions aux objectifs qui leur sont assignés, alors qu'il n'a même pas été associé à l'élaboration de ces derniers ?
En présentant un ensemble de mesures visant à faciliter le travail de la police judiciaire, le projet de loi marginalise le contrôle de l'autorité judiciaire. Ainsi, le cadre légal permettant aux policiers de fouiller les coffres des véhicules est étendu ; le recours au fichier de la police est systématisé et banalisé ; il en va de même pour celui des empreintes génétiques, qui ne concernait jusqu'ici que les personnes définitivement condamnées pour des infractions sexuelles ou des crimes graves.
L'extension du recours à ces fichiers s'accompagne de sanctions pénales en cas de refus de se soumettre au prélèvement. Sur cette question des fichiers, il faut tout de même rappeler la démarche inhabituelle de la CNIL qui, faute d'avoir été consultée par le ministre de l'intérieur, s'est autosaisie en demandant que l'accès aux bases de données de la police soit entouré de réelles garanties.
Les orientations sécuritaires du Gouvernement se manifestent également par sa volonté de renforcer la pénalisation des désordres de voie publique « qui troublent la tranquillité des citoyens » : prostituées, étrangers délinquants, gens du voyage irrespectueux de la propriété d'autrui, jeunes trop turbulents dans les halls d'immeubles, mendiants et SDF sont ici visés. Le projet de loi pour la sécurité intérieure désigne clairement les nouvelles classes dangereuses pour l'ordre public et la paix des citoyens.
Qui peut ignorer qu'un mendiant ne mendie ni par choix ni par plaisir ? On ne dort dans la rue que par brutale nécessité. Comment ignorer que les jeunes qui « zonent » dans les cages d'escalier le font essentiellement parce qu'ils n'ont pas d'autre endroit où se réunir ? Qui peut penser que les nomades ne préféreraient pas camper dans des lieux autorisés et que les squatters n'aimeraient pas habiter un appartement avec l'eau et l'électricité, sans vivre dans la crainte quotidienne de l'expulsion ?
Les dispositions prévues par le texte du ministre de l'intérieur punissent non pas des actes délibérés, mais des situations misérables. Telle est la principale justification de l'appel lancé le 21 octobre dernier par trente-quatre organisations de gauche, dont le parti socialiste, contre le projet de loi pour la sécurité intérieure.
M. Sarkozy a déclaré que l'Etat est fort lorsqu'il se met au service des plus faibles. On pourrait d'ailleurs souhaiter que tout élu à la tête d'une municipalité soit au service des plus faibles, qu'il soit maire de Neuilly-sur-Seine ou de Neuilly-sur-Marne ! (M. Robert Del Picchia s'exclame.) Quoi qu'il en soit, ce discours est trompeur, car la politique conduite aboutit au contraire à fragiliser ceux-là mêmes qu'elle est censée protéger. J'en veux pour preuve l'action du gouvernement de M. Raffarin qui, depuis son entrée en fonction, n'a eu de cesse de détruire un à un les outils de la politique de l'emploi mis en place sous la précédente législature : les emplois-jeunes ont été supprimés ou vont l'être, le dispositif de réduction du temps de travail a été remis en cause, la loi de modernisation sociale a été vidée de sa substance, le budget de l'emploi a été réduit de 6,5 %, etc. Face à ce démantèlement, le Gouvernement ne propose aucune stratégie de substitution permettant d'endiguer une montée du chômage de plus en plus perceptible.
Or le combat contre l'insécurité publique est étroitement dépendant de la lutte contre l'insécurité économique. Jamais la sécurité ne doit s'opposer aux droits élémentaires sans lesquels il n'est pas de véritable sécurité : le respect de la dignité humaine, la liberté d'aller et venir, les droits de la défense. L'action à mener contre l'insécurité ne légitime pas certaines mesures de répression d'ordre moral. Les sanctions prévues par le projet de loi s'ajoutent bien souvent à des dispositions préexistantes et sont donc inutiles : imbroglio judiciaire, imbroglio juridique !
Ce texte comporte pourtant quelques mesures que nous approuvons et a quelques mérites, dont celui d'« avoir été compris de l'opinion », comme vous venez de le dire, monsieur le ministre. Cependant, il n'a pas le mérite, indispensable, d'être accepté par tous, notamment par les humanistes, les progressistes,...
M. Max Marest. Les intellectuels !
M. Jacques Mahéas. ... les « droits-de-l'hommistes », pour reprendre une expression employée par M. Sarkozy : ceux-là ont trop bien compris pour pouvoir l'accepter !
Les socialistes rejettent catégoriquement ce projet de loi pour la sécurité intérieure.
M. Robert Bret. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo. Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, vous aimez brocarder l'opposition, et vous nous avez même traités en semi-débiles. Permettez-moi cependant de vous faire remarquer, avec le respect dû à votre fonction, que vous ne pouvez pas utiliser les mêmes arguments dans un sens, puis dans un autre quand cela vous arrange.
Vous avez déclaré que les forces de police ne pouvaient pas, pour l'heure, être présentes partout, que les postes nécessaires n'étaient pas encore créés, et que la situation évoluerait prochainement en Seine-Saint-Denis, mais, à peine un mois après sa prise de fonction, M. Sarkozy se vantait d'avoir fait reculer la délinquance dans la capitale ! Voilà des résultats très rapides !
Par ailleurs, si j'ai bien compris vos propos relatifs à l'hymne national, on peut impunément tourner celui-ci en dérision si l'on est un artiste ou une célébrité, mais on encourt une amende de 7 500 euros si l'on est un jeune beur ! C'est assez inquiétant !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ce n'est pas ce que prévoit le texte !
Mme Nicole Borvo. Vous m'avez traitée d'illettrée, monsieur le ministre, mais je sais lire, et j'ai très bien compris le texte !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous le dénaturez !
Mme Nicole Borvo. Mes collègues ont dit ce qu'ils pensaient du débat parlementaire sur ce projet de loi, pour lequel l'urgence a été déclarée et qui a donné lieu à une parodie de commission mixte paritaire. Que dire du réel débat public, au sein de la société, sur les mesures susceptibles de faire reculer l'insécurité ?
Je ne m'étendrai pas sur l'insécurité sociale dont souffrent nombre de concitoyens, alors que des richesses arrogantes et des escrocs de haut vol s'affichent quotidiennement. Les faveurs que vous consentez au grand patronat et aux actionnaires et le mépris que vous manifestez pour les salariés, licenciés par milliers ces jours-ci, ne pourront passer longtemps inaperçus.
S'agissant de l'insécurité publique et de la petite délinquance, que vous voulez combattre, quelles sont les mesures réellement susceptibles de les faire reculer ? Le leitmotiv de M. Sarkozy, lors du débat en première lecture, était : « sanction et prévention, sanction et éducation ». Or, pour l'instant, nous n'avons rien vu venir en ce qui concerne la prévention et l'éducation !
M. Jacques Mahéas. A la trappe ! Moins d'enseignants !
Mme Nicole Borvo. Vous êtes plus pressés d'agir quand vous voulez réformer les modes de scrutin !
En revanche, vous stigmatisez des populations - les jeunes, les mendiants, les prostitués, les gens du voyage - et vous affirmez que la moindre incartade sera sanctionnée. Chacun sait pourtant, en particulier les juristes, que le code pénal prévoit déjà des sanctions pour les actes répréhensibles susceptibles d'être commis par tout citoyen délinquant, qu'il appartienne ou non aux catégories visées par le texte.
Dans ces conditions, de quoi s'agit-il sinon de polariser l'attention de nos concitoyens sur la seule insécurité publique ? Une telle attitude est dangereuse. On mettra de plus en plus de gens en prison, mais on sait quels pays ont adopté une telle politique. Je pense ici, en particulier, aux Etats-Unis.
M. Jean-Pierre Schosteck. Ah bon ? Je pensais que vous évoquiez l'autre côté !
M. Jacques Mahéas. On va « encabaner » !
Mme Nicole Borvo. On sait aussi que, en l'absence d'autres mesures, le recours accru à l'incarcération engendre une montée de la violence. Si c'est cela que vous voulez, dites-le !
Pour conclure, j'indique que le groupe communiste républicain et citoyen votera contre ce texte.
M. Robert Bret. Je crois que vous l'aviez compris, monsieur le ministre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous nous prenez pour des débiles, vous aussi !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck.
M. Jean-Pierre Schosteck. Nous avons entendu sans surprise les représentants de l'opposition dire qu'ils étaient résolument contre ce texte. Je ne surprendrai pas davantage la Haute Assemblée en indiquant que le groupe de l'UMP est résolument pour ce texte ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Le Gouvernement s'est attaqué au problème de l'insécurité avec courage et détermination. Au rebours de toute facilité, il a secoué les tabous.
A cet égard, que ne nous a-t-on pas dit, que n'avons-nous pas entendu ? Il ne faut pas toucher à ceci, il ne faut pas toucher à cela, il ne faut toucher à personne, et il faut donc, en réalité, que les victimes continuent indéfiniment d'être des victimes ! Ce qui nous choque, pour notre part, ce n'est pas que le traitement réservé à ceux qui ont commis des actes de délinquance soit durci, c'est que les victimes restent abandonnées à leur sort. On nous parle de l'occupation des halls d'immeubles, on nous parle des personnes prostituées, on nous parle des mendiants, mais il faut comprendre que des gens exploitent toute cette misère : ce sont ces exploiteurs que nous entendons sanctionner ! Nous soutenons donc résolument le Gouvernement dans l'action courageuse qu'il a entreprise.
En conclusion, je tiens à féliciter M. le rapporteur et M. le président de la commission du remarquable travail qu'ils ont accompli. Leur tâche n'était pas facile, et ils ont fait preuve, eux aussi, de courage, de détermination et d'efficacité.
Vous aurez compris, monsieur le ministre, que le soutien entier et résolu du groupe de l'UMP vous est acquis ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je voudrais relever que, si de nombreux reproches et observations ont été adressés au Gouvernement, l'opposition n'a jamais eu un seul mot de considération pour les victimes ! Manifestement, ce sujet ne l'intéresse pas !
M. Jacques Mahéas. Si !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. En revanche, pour le Gouvernement, il est prioritaire. C'est d'ailleurs avant tout aux classes pauvres qu'appartiennent les victimes, monsieur Bret !
M. Jacques Mahéas. Et vous les pénalisez !
M. Robert Bret. Vous opposez les pauvres aux très pauvres !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. La délinquance frappe d'abord les plus démunis et les plus pauvres. Par conséquent, une politique de sécurité, c'est d'abord une politique sociale.
M. Jacques Mahéas. Vous pénalisez les pauvres !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Mahéas, madame Borvo, vous m'avez reproché tout à l'heure de ne pas faire preuve de suffisamment de diligence pour mobiliser les moyens d'assurer la sécurité, en particulier à Neuilly-sur-Marne. J'ai fait aussi vite que j'ai pu.
M. Jacques Mahéas. Très bien ! (Sourires.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'ai d'ailleurs quatre nouvelles à vous annoncer, monsieur Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Quatre ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Une mauvaise et trois bonnes : par quoi souhaitez-vous que je commence ?
M. Jacques Mahéas. Par les bonnes nouvelles ! (Nouveaux sourires.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Très bien !
Le 31 mars prochain, un nouveau commissaire, Mme Lombard, prendra ses fonctions au commissariat de Neuilly-sur-Marne.
M. Jacques Mahéas. Il aura fallu attendre six mois ! Avouez que c'est long !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il y a une procédure à respecter. C'est la loi ! Vous n'êtes jamais content !
M. Jacques Mahéas. Un établissement scolaire resterait-il six mois sans principal ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous êtes mauvais joueur, et je vais le prouver !
M. Jacques Mahéas. Six mois pour nommer un commissaire, ce n'est pas une bonne nouvelle ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vraiment ? Quoi qu'il en soit, les commissions paritaires se sont tenues, et le nouveau commissaire entrera en fonctions le 31 mars.
La deuxième bonne nouvelle est que, dans votre circonscription, la délinquance a reculé à hauteur de 4,7 %. Il faut croire que le Gouvernement n'est pas aussi maladroit que vous le pensez ! Ce n'est pas mal ! (M. Robert Del Picchia applaudit.)
M. Jacques Mahéas. On ne peut plus porter plainte ! J'ai des exemples précis à vous donner !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Bien sûr ! Monsieur Mahéas, interrompre systématiquement comme vous le faites n'est pas argumenter !
M. Jacques Mahéas. Vous dites des contrevérités !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous pouvez ne pas être d'accord avec mes propos, mais, puisque vous avez cité Voltaire tout à l'heure, je vous rappellerai cette phrase, qui est de lui : « Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu'au bout pour que vous puissiez le dire. » Souvenez-vous-en !
M. Jacques Mahéas. Vous avez le droit de parler, mais j'ai le droit de répondre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'en viens à la troisième bonne nouvelle : au cours de ce premier semestre, cinq policiers supplémentaires seront affectés au commissariat de Neuilly-sur-Marne.
Et voici la mauvaise nouvelle : vous nous avez raconté des histoires ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. Jacques Mahéas. Et allons-y !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. En effet, au 1er janvier 2001, le commissariat de votre ville comptait 116 policiers ; au 1er janvier 2003, l'effectif était de 117 : la situation est donc stable. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Jacques Mahéas. J'ai parlé de septembre ! C'est invraisemblable ! Je demande la parole. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Je ne souhaite pas monopoliser la parole, mais je tiens quand même à souligner que l'on ne peut considérer comme une bonne nouvelle la nomination d'un commissaire au terme d'un délai de six mois ! Admettez-le, monsieur le ministre !
M. Robert Bret. Peut mieux faire !
M. Jacques Mahéas. Auparavant, la vacance était de deux mois, ce qui était déjà trop ; six mois, c'est vraiment tout à fait excessif !
M. Max Marest. C'est mieux que sept !
M. Jacques Mahéas. Par ailleurs, vous avez établi une comparaison de janvier à janvier. Or, comme je l'ai dit et redit, notre commissariat compte aujourd'hui trente policiers, dont trois officiers, de moins qu'en septembre. Vous savez fort bien quand sortent les promotions de policiers,...
M. Jean-Pierre Schosteck. Ils y sont ou non, ces policiers ?
M. Jacques Mahéas. ... mais vous manipulez quelque peu les chiffres. Quoi qu'il en soit, il est difficile de travailler dans ces conditions. On démantèle la police de proximité. C'est la réalité des choses !
Par conséquent, monsieur le ministre, vous m'avez apporté quatre mauvaises nouvelles. Cela étant, je reste optimiste, vous ne pouvez que progresser !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)