TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES

À L'ACTION PUBLIQUE, AUX ENQUÊTES,

À L'INSTRUCTION, AU JUGEMENT

ET À L'APPLICATION DES PEINES

Art. additionnels après l'art. 16 undecies
Dossier législatif : projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité
Art. 17

Article additionnel avant le chapitre Ier

M. le président. L'amendement n° 227, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Avant le chapitre Ier du titre II, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Les dispositions des chapitres Ier, II, III et IV du présent titre sont adoptées à titre expérimental pour une durée allant jusqu'au 31 décembre 2005.

« Le Parlement sera saisi par le Gouvernement, avant cette date, d'un rapport d'évaluation sur l'application des dispositions du présent chapitre adoptées pour une durée allant jusqu'au 31 décembre 2005. »

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je renouvelle ma demande d'évaluation du présent projet de loi. En effet, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, nous estimons qu'il n'est pas normal que le Parlement vote de multiples lois bouleversant de fond en comble notre procédure pénale, quelque trois ans et demi après le vote de la loi renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes, sans que soit prévue une évaluation du dispositif.

Le présent texte modifiant profondément les fondements mêmes de notre procédure pénale, ce en contradiction avec les exigences de la Commission nationale des droits de l'homme et des libertés, nous demandons la réserve de cet article.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette demande de réserve ?

M. François Zocchetto, rapporteur. J'ai déjà expliqué hier pourquoi nous étions étonnés que Mme Borvo demande l'adoption à titre expérimental de certains des chapitres du projet de loi, puisque par ailleurs elle requiert un moratoire. Cette démarche ne me paraissant pas très cohérente, je ne vois pas l'intérêt de cette demande de réserve sur laquelle j'émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de réserve formulée par le groupe CRC.

La réserve n'est pas ordonnée.

La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 227.

Mme Nicole Borvo. Il a été défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François Zocchetto, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l'action publique

Section 1

Dispositions générales

Art. additionnel avant le chapitre Ier
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Art. 18

Article 17

Après l'article 29 du code de procédure pénale, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :

« Chapitre Ier bis

« Des attributions du garde des sceaux,

ministre de la justice

« Art. 30. - Le ministre de la justice conduit la politique pénale déterminée par le Gouvernement. Il veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République.

« A cette fin, il adresse aux magistrats du ministère public des instructions générales d'action publique.

« Il peut dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance et lui enjoindre, par instructions écrites et versées au dossier de la procédure, d'engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes. »

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 251, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 186, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 30 du code de procédure pénale :

« Art. 30. - Le ministre de la justice définit les orientations générales de la politique pénale destinées aux magistrats du ministère public et veille à la cohérence de l'application de la loi. Ces orientations sont portées à la connaissance des magistrats du siège et rendues publiques.

« Il ne peut donner aucune instruction dans les affaires individuelles. »

L'amendement n° 55, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 30 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "la politique pénale" par les mots : "la politique d'action publique". »

La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 251.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le garde des sceaux, comme nous l'avons déjà dit, les membres du groupe CRC s'opposent à l'article 17 du projet de loi qui révèle la volonté de « reprise en main » du parquet par le Gouvernement.

En effet, lorsque l'on croise le rétablissement des instructions dans les affaires individuelles - et uniquement dans ce cas car, du point de vue des directives de politique pénale, cela ne pose pas de problème - avec le renforcement sans précédent des pouvoirs du parquet, notamment au travers de la composition pénale ou de la procédure du plaider-coupable que nous examinerons ultérieurement, les présentes dispositions sont susceptibles de graves dérives.

Au-delà du soupçon, toujours latent, de l'intrusion du politique dans le judiciaire - je rappelle tout de même qu'au plus haut rang de l'Etat des personnes sont susceptibles d'être inquiétées par la justice -, il se pose une question de cohérence du système. Soit on a un système d'opportunité des poursuites et il ne faut pas permettre l'intrusion de l'exécutif dans les procédures judiciaires, soit on met en place un système de légalité des poursuites pour éviter ce type de soupçon.

Tel est le sens de notre amendement de suppression.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 186.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je ne vais pas faire de longs développements et rappeler ce que nous pensons des magistrats du ministère public tels qu'ils ont été repris en main et que l'on veut les reprendre en main. Je ne dirai pas non plus qu'il vaudrait mieux modifier le statut des membres du parquet et en faire des représentants du ministre de la justice, certes, mais non plus des magistrats, qui ne siègent plus dans les palais de justice à côté des autres magistrats, qui ne passent plus de l'une des professions à l'autre, et que, pour équilibrer le procès pénal, il faudrait qu'il y ait d'un côté le parquet, de l'autre, la défense et, au milieu, indépendamment des uns et des autres, le tribunal, c'est-à-dire les magistrats du siège.

Le texte ne va pas dans cette direction. Nous pensons pour notre part qu'il serait préférable d'introduire la disposition que nous proposons par notre amendement, à savoir : « Le ministre de la justice définit les orientations générales de la politique pénale destinées aux magistrats du ministère public et veille à la cohérence de l'application de la loi. Ces orientations sont portées à la connaissance des magistrats du siège et rendues publiques.

« Il ne peut donner aucune instruction dans les affaires individuelles. »

Or ce n'est pas du tout ce qui est indiqué dans le texte qui nous est proposé pour l'article 17. La formulation de cet article est tellement peu claire qu'un malentendu est intervenu entre l'Assemblée nationale et le Sénat, car l'Assemblée nationale comprend les choses telles que les veut en vérité le Gouvernement.

Le premier paragraphe du texte adopté par le Sénat en première lecture dispose : « Le ministre de la justice conduit la politique d'action publique déterminée par le Gouvernement. Il veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République. » Or il est bien évident que c'est la politique d'action publique, et non pas la politique pénale, comme le dit l'Assemblée nationale, que conduit le ministre de la justice. Celui-ci ne peut en effet s'occuper que de l'action publique : il ne peut prétendre régenter la politique pénale dans la mesure où celle-ci concerne évidemment aussi les condamnations, lesquelles sont prononcées par des magistrats du siège qui, eux, sont indépendants.

J'ignore ce qui va se passer en commission mixte paritaire. Nous avons eu l'occasion de constater que l'Assemblée nationale a parfois employé les termes « politique d'action publique » et non pas « politique pénale. » Toutefois, notre amendement a l'avantage de mettre les choses au point en précisant que les orientations générales de la politique pénale sont destinées aux magistrats du ministère public. C'est clair, net et précis !

Je sais bien que vous n'êtes pas d'accord avec le deuxième alinéa : « Il ne peut donner aucune instruction dans les affaires individuelles. » Pourtant, ce serait judicieux. Mais vous pourriez peut-être adopter le premier alinéa qui, lui, clarifie les choses dans l'esprit même où vous prétendez les comprendre.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 55 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 251 et 186.

M. François Zocchetto, rapporteur. En première lecture, à la suite d'une discussion assez consensuelle au sein de la commission des lois, nous étions convenus que les termes exacts étaient « politique d'action publique » et non pas « politique pénale. » C'est peut-être par erreur que l'Assemblée nationale a parlé, parfois, de politique pénale, parfois, de politique d'action publique.

Nous vous proposons, par l'amendement n° 55, de revenir au texte qui a été adopté en première lecture par le Sénat : « Le ministre de la justice conduit la politique d'action publique déterminée par le Gouvernement. »

Par conséquent, nous sommes défavorables à l'amendement n° 186. Du reste, M. Dreyfus-Schmidt y fait allusion à la politique pénale, ce qui est un peu curieux, puisqu'il faisait partie de ceux, de tous bords politiques, qui préféraient les termes « politique d'action publique. »

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je rectifie mon amendement, monsieur le président, en remplaçant les mots : « politique pénale » par les mots : « politique d'action publique. »

M. François Zocchetto, rapporteur. Nous sommes également défavorables à l'amendement n° 251 du groupe CRC.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement, n° 186 rectifié, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, et qui est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 30 du code de procédure pénale :

« Art. 30. - Le ministre de la justice définit les orientations générales de la politique d'action publique destinées aux magistrats du ministère public et veille à la cohérence de l'application de la loi. Ces orientations sont portées à la connaissance des magistrats du siège et rendues publiques.

« Il ne peut donner aucune instruction dans les affaires individuelles. »

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je suis défavorable à la suppression de l'article proposée par l'amendement n° 251.

Je suis également défavorable à l'amendement n° 186 rectifié.

J'indiquerai simplement à M. Dreyfus-Schmidt que l'orientation qui figure dans la première phrase du premier alinéa n'est pas vraiment compatible avec les dispositions du deuxième alinéa. Car, pour veiller à la cohérence de l'application de la loi, il vaut mieux pouvoir donner des instructions individuelles. Sinon, je ne vois pas bien comment on fait !

Voilà bientôt vingt mois que j'assume les fonctions de garde des sceaux et c'est justement lorsque des juridictions prennent manifestement des décisions très différentes, qui créent une sorte d'inégalité à travers le territoire, qu'il est nécessaire d'intervenir. Par exemple, en matière de feux de forêt - puisque c'est un exemple très précis, que j'ai encore en mémoire, d'instruction individuelle que j'ai donnée l'été dernier - j'ai demandé aux procureurs de requérir avec la plus extrême sévérité dans un certain nombre de cas très précis. Ces feux de forêt ayant concerné plusieurs départements, il fallait faire en sorte que les parquets des différentes juridictions adoptent la même attitude.

Pour veiller à la cohérence de l'application de la loi, c'est ainsi que le ministre de la justice doit agir. Sinon, c'est un discours, une circulaire sans applicabilité réelle.

Par ailleurs, vous le savez, ma vision constitutionnelle, qui est conforme, bien sûr, à celle du Premier ministre et du Président de la République, me conduit à penser que les termes « action publique », figurant dans l'amendement n° 55, sont plus exacts que ceux de « politique pénale », qui sont des termes usuels, et non pas juridiques.

Par conséquent, pour des raisons constitutionnelles, je suis favorable à la possibilité, pour le ministre de la justice, de pouvoir donner des instructions au parquet, parce qu'il représente la légitimité démocratique et l'exécutif dans un processus qui, par ailleurs, respecte intégralement l'indépendance du juge, lequel, bien entendu, ne doit pas recevoir d'instructions. Du reste, il ne doit pas non plus, me semble-t-il, recevoir copie des instructions que l'on a pu transmettre au parquet. Cela pourrait être considéré par le magistrat du siège comme une volonté d'intervenir dans son propre processus de jugement.

Par ailleurs, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 55.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 251.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 186 rectifié.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. S'il est demandé que les orientations soient portées à la connaissance des magistrats du siège et rendues publiques, c'est dans un but de transparence. Bien entendu, les magistrats du siège en feraient ce qu'ils voudraient.

S'agissant de l'exemple des incendies de forêt que vous avez évoqué, monsieur le ministre, il nous semble que des orientations générales sont suffisantes. Vous dites que votre vision constitutionnelle est conforme à celle du Président de la République. Or ni les uns ni les autres n'avons oublié cette conférence de presse au cours de laquelle il avait expliqué qu'il n'était plus utile de donner des ordres aux procureurs, car ils n'obéissaient pas. Je ne l'ai pas inventé !

C'est dans cette optique, en accord avec le Président de la République - c'était le même qu'aujourd'hui -, que le gouvernement de Lionel Jospin avait précisément « mis en branle » une politique consistant à ne pas donner d'instructions aux membres du parquet. Evidemment, encore une fois, cela n'empêche pas le garde des sceaux de définir des orientations générales, mais il n'a pas à être informé des affaires en cours dans chaque département pour pouvoir donner des instructions individuelles. Au pire, les procureurs généraux sont là pour cela, et nous avons d'ailleurs voté hier des dispositions attribuant à certains procureurs généraux la mission de coordonner le travail des autres procureurs généraux.

Mme Nicole Borvo. Des superprocureurs !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bref, nous ne sommes pas d'accord ! C'est un problème qui n'est pas résolu et qui rebondira. Il suffira qu'un garde des sceaux - pas vous, bien sûr, monsieur le ministre ! - envoie un hélicoptère dans l'Himalaya, afin de rechercher un procureur, pour que l'opinion réagisse à nouveau à la manière dont vous concevez maintenant les choses.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 186 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié.

(L'article 17 est adopté.)

Art. 17
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Art. 22 A

Article 18

Les deux premiers alinéas de l'article 35 du code de procédure pénale sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le procureur général veille à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la cour d'appel et au bon fonctionnement des parquets de son ressort.

« A cette fin, il anime et coordonne l'action des procureurs de la République ainsi que la conduite de la politique pénale par les parquets de son ressort.

« Sans préjudice des rapports particuliers qu'il établit soit d'initiative, soit sur demande du procureur général, le procureur de la République adresse à ce dernier un rapport annuel sur l'activité et la gestion de son parquet ainsi que sur l'application de la loi. »

M. le président. L'amendement n° 56, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots : "La politique pénale" par les mots : "la politique d'action publique". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Zocchetto, rapporteur. C'est un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié.

(L'article 18 est adopté.)

Section 2

Dispositions relatives à la composition pénale

et aux autres procédures alternatives aux poursuites

Art. 18
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Art. 23 (début)

Article 22 A

L'article 41-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

Non modifié ;

bis Dans le 2°, après le mot : « professionnelle ; », sont insérés les mots : « cette mesure peut consister dans l'accomplissement par l'auteur des faits, à ses frais, d'un stage ou d'une formation dans un service ou un organisme sanitaire, social ou professionnel, et notamment d'un stage de citoyenneté ; »

Non modifié. (Adopté.)

Art. 22 A
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Art. 23 (interruption de la discussion)

Article 23

I. - L'article 41-2 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Les premier à sixième alinéas sont remplacés par quatorze alinéas ainsi rédigés :

« Le procureur de la République, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, peut proposer, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée, une composition pénale à une personne physique qui reconnaît avoir commis un ou plusieurs délits punis à titre de peine principale d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans, ainsi que, le cas échéant, une ou plusieurs contraventions connexes qui consistent en une ou plusieurs des mesures suivantes :

« 1° Verser une amende de composition au Trésor public. Le montant de cette amende est fixé en fonction de la gravité des faits ainsi que des ressources et des charges de la personne. Son versement peut être échelonné, selon un échéancier fixé par le procureur de la République, à l'intérieur d'une période qui ne peut être supérieure à un an ;

« 2° Se dessaisir au profit de l'Etat de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit ;

« 2° bis Remettre son véhicule, pour une période maximale de six mois, à des fins d'immobilisation ;

« 3° Remettre au greffe du tribunal de grande instance son permis de conduire, pour une période maximale de six mois ;

« 4° Remettre au greffe du tribunal de grande instance son permis de chasser, pour une période maximale de six mois ;

« 5° Accomplir au profit de la collectivité un travail non rémunéré pour une durée maximale de soixante heures, dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois ;

« 6° Suivre un stage ou une formation dans un service ou un organisme sanitaire, social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois ;

« 7° Ne pas émettre, pour une durée de six mois au plus, des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés et ne pas utiliser de cartes de paiement ;

« 8° Ne pas paraître, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise et qui sont désignés par le procureur de la République, à l'exception des lieux dans lesquels la personne réside habituellement ;

« 9° Ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, la ou les victimes de l'infraction désignées par le procureur de la République ou ne pas entrer en relation avec elles ;

« 10° Ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, le ou les coauteurs ou complices éventuels désignés par le procureur de la République ou ne pas entrer en relation avec eux ;

« 11° Ne pas quitter le territoire national et remettre son passeport pour une durée qui ne saurait excéder six mois ;

« 12° Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de citoyenneté. » ;

2° Les douzième et treizième alinéas sont ainsi rédigés :

« Si la personne n'accepte pas la composition pénale ou si, après avoir donné son accord, elle n'exécute pas intégralement les mesures décidées, le procureur de la République met en mouvement l'action publique, sauf élément nouveau. En cas de poursuites et de condamnation, il est tenu compte, s'il y a lieu, du travail déjà accompli et des sommes déjà versées par la personne.

« Les actes tendant à la mise en oeuvre ou à l'exécution de la composition pénale sont interruptifs de la prescription de l'action publique. » ;

3° A la troisième phrase du quatorzième alinéa, après les mots : « le tribunal », sont insérés les mots : « , composé d'un seul magistrat exerçant les pouvoirs conférés au président, » ;

bis Le quatorzième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La victime a également la possibilité, au vu de l'ordonnance de validation, lorsque l'auteur des faits s'est engagé à lui verser des dommages et intérêts, d'en demander le recouvrement suivant la procédure d'injonction de payer, conformément aux règles prévues par le nouveau code de procédure civile. » ;

4° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article ne sont applicables ni aux mineurs de dix-huit ans ni en matière de délits de presse, de délits d'homicides involontaires ou de délits politiques. »

II. - Les deux premiers alinéas de l'article 41-3 du même code sont ainsi rédigés :

« La procédure de composition pénale est également applicable aux contraventions.

« La durée de la privation du permis de conduire ou du permis de chasser ne peut dépasser trois mois, la durée du travail non rémunéré ne peut être supérieure à trente heures, dans un délai maximum de trois mois, et la durée d'interdiction d'émettre des chèques ne peut dépasser elle aussi trois mois. Les mesures prévues par les 8°, 9°, 10° et 11° de l'article 41-2 ne sont pas applicables. La mesure prévue par le 5° dudit article n'est pas applicable aux contraventions de la 1re à la 4e classes. Il en est de même des mesures prévues par les 2°, 2° bis, 3°, 4° et 7° de cet article, sauf si la contravention est punie des peines complémentaires visées aux 1° à 5° de l'article 131-16 du code pénal. »

III. - Le dixième alinéa (5°) de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« 5° Les détenus exécutant un travail pénal, les condamnés exécutant un travail d'intérêt général et les personnes effectuant un travail non rémunéré dans le cadre d'une composition pénale pour les accidents survenus par le fait ou à l'occasion de ce travail, dans les conditions déterminées par décret ; ».

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous abordons un col, qui sera sans doute franchi plus rapidement qu'en première lecture, parce que nous l'avons déjà reconnu. Il s'agit de faire de la composition pénale un moyen de ne pas juger les gens, c'est-à-dire de faire proposer une peine, d'ailleurs très minime, par le procureur de la République et non par un magistrat du siège, pour tous les délits passibles d'une peine inférieure ou égale à cinq années de prison. Ce n'est pas rien !

Cette proposition nous paraît très choquante, car le recours à la composition pénale n'a pas été très développé jusqu'à présent : c'est une procédure qui n'en est qu'à ses balbutiements. Et tout à coup, on l'étend à de très nombreuses infractions qui peuvent être importantes, et aux auteurs desquelles il sera proposé - il suffit de lire l'article 23 - de verser une amende de composition au Trésor public, de se dessaisir au profit de l'Etat de la chose qui a servi à commettre l'infraction, de remettre leur véhicule pour une période maximale de six mois à des fins d'immobilisation, de remettre au greffe du tribunal leur permis de conduire pour une durée maximale de six mois, vous voyez le contraste qui existe entre la peine encourue pour des délits importants et la composition pénale, fixée par le procureur de la République - de remettre au greffe du tribunal leur permis de chasser pour une période maximale de quatre mois, d'accomplir au profit de la collectivité un travail non rémunéré pour une durée maximale de soixante heures, de suivre un stage, de ne pas émettre pendant une durée de six mois au plus des chèques, etc.

Cela soulève une question, notamment en ce qui concerne les infractions sexuelles : seront-elles inscrites dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ? Dans l'affirmative, comment allons-nous procéder pour ce faire, alors que, vous le savez, la composition pénale peut, certes, être proposée directement par le procureur de la République, mais elle peut aussi être proposée par l'intermédiaire d'une personne habilitée ? Comment fera-t-on pour, éventuellement, inscrire dans ce fichier l'auteur d'une infraction sexuelle, qui, normalement, entraîne l'inscription au fichier, alors que celui-ci n'aura été, pour toute punition, que privé pendant quatre mois au maximum de son permis de chasser ?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que la justice doit être rendue par un tribunal collégial, publiquement, c'est-à-dire sous le contrôle du peuple souverain, et non pas en catimini, par un accord entre le procureur de la République et la personne concernée.

C'est pourquoi nous demandons la suppression pure et simple de l'article 23.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Daniel Hoeffel.)

PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

5

Art. 23 (début)
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Art. 23 (suite)

MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. le président. La parole est à M. Joseph Ostermann.

M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, mes chers collègues, lors de la séance de jeudi dernier, consacrée à l'examen des articles du projet de loi relatif à la politique de santé publique, un amendement n° 231, défendu par notre collègue Gilbert Chabroux, a été adopté à l'unanimité.

Retenu dans ma commune touchée par de très graves inondations - il s'agissait d'une crue centennale -, je n'ai pu exprimer mon vote sur cet amendement, qui tend à rétablir la situation antérieure au vote, en novembre 2002, d'un amendement au projet de loi de finances concernant le privilège des bouilleurs de cru.

Le dispositif voté alors par le Sénat, sur mon initiative, visait à prolonger l'allocation de franchise de dix litres de cinq à dix ans afin de permettre une extinction progressive du privilège parallèlement à la diminution naturelle du nombre des personnes concernées.

La lutte contre l'alcoolisme, qui est l'argument aujourd'hui avancé, ne tient pas face à une production très marginale. En effet, permettez-moi de vous rappeler que l'eau de vie familiale ne représente que 0,14 % de la consommation d'alcool des Français.

Le dispositif voté en 2002 avait pour objet, dans le respect de la politique de lutte contre l'alcoolisme, de favoriser la mise en valeur de l'espace rural en encourageant l'entretien des vergers, ainsi que de préserver des traditions et un savoir-faire.

Je le répète une fois de plus, les arboriculteurs font partie des « jardiniers de l'espace », et je regrette que notre collègue Gilbert Chabroux veuille en faire les boucs émissaires de la consommation d'alcool en France. Ils méritent incontestablement un meilleur traitement !

C'est pourquoi je suis non seulement fermement opposé à l'amendement adopté par la Haute Assemblée jeudi dernier, mais également indigné qu'un tel amendement ait pu être voté sans véritable débat et avec l'accord - mitigé - du Gouvernement, alors que celui-ci avait approuvé le dispositif voté un an plus tôt et s'en était même largement félicité dans la presse.

Je demande par conséquent que mon vote sur l'amendement n° 231 soit rectifié.

Cette rectification est d'ailleurs sollicitée par l'ensemble des sénateurs alsaciens : pour le Bas-Rhin, MM. Philippe Richert, Francis Grignon et Daniel Hoeffel, qui préside ce soir nos débats ; pour le Haut-Rhin, MM. Daniel Eckenspieller, Hubert Haenel et Jean-Louis Lorrain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Acte vous est donné de votre mise au point, mon cher collègue.

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais indiquer à M. Ostermann, car j'étais présent lors de ce débat, que l'amendement de M. Chabroux a été approuvé à l'unanimité des présents - je n'avais d'ailleurs pas remarqué qu'autant de sénateurs alsaciens étaient absents - et qu'il a donné l'occasion à notre collègue Jean Chérioux de nous apprendre qu'il était sans doute un des rares sénateurs à être personnellement bouilleur de cru et de nous dire à quel point il trouvait scandaleux que l'on puisse produire de l'alcool à aussi bon marché.

Il a également été rappelé que lorsque Pierre Mendès France avait porté atteinte pour l'avenir au privilège du bouilleur de cru, il y fallait beaucoup plus de courage sans doute qu'à notre époque, où les dégâts causés par l'alcool sont bien davantage reconnus.

M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, je vous donne également acte de votre déclaration, et j'ajoute qu'il n'y a rien d'anormal à ce qu'un sénateur fasse, au nom de ses collègues appartenant à un même « groupe » géographique, une mise au point au sujet d'un vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je comprends votre solidarité, monsieur le président !

M. le président. La solidarité géographique, en l'occurrence, doit être sans failles ! (Sourires.)

6

CANDIDATURES

À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

J'informe le Sénat que la commission des lois m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité actuellement en cours d'examen.

Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.

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ÉVOLUTIONS DE LA CRIMINALITÉ

Suite de la discussion d'un projet de loi

en deuxième lecture

M. le président. Nous reprenons la discussion en deuxième lecture du projet de loi adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Le Sénat a commencé cet après-midi l'examen de l'article 23, dont je rappelle les termes :

Art. 23 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité
Art. 24 A

Article 23 (suite)

I. - L'article 41-2 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Les premier à sixième alinéas sont remplacés par quatorze alinéas ainsi rédigés :

« Le procureur de la République, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, peut proposer, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée, une composition pénale à une personne physique qui reconnaît avoir commis un ou plusieurs délits punis à titre de peine principale d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans, ainsi que, le cas échéant, une ou plusieurs contraventions connexes qui consiste en une ou plusieurs des mesures suivantes :

« 1° Verser une amende de composition au Trésor public. Le montant de cette amende est fixé en fonction de la gravité des faits ainsi que des ressources et des charges de la personne. Son versement peut être échelonné, selon un échéancier fixé par le procureur de la République, à l'intérieur d'une période qui ne peut être supérieure à un an ;

« 2° Se dessaisir au profit de l'Etat de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit ;

« 2° bis Remettre son véhicule, pour une période maximale de six mois, à des fins d'immobilisation ;

« 3° Remettre au greffe du tribunal de grande instance son permis de conduire, pour une période maximale de six mois ;

« 4° Remettre au greffe du tribunal de grande instance son permis de chasser, pour une période maximale de six mois ;

« 5° Accomplir au profit de la collectivité un travail non rémunéré pour une durée maximale de soixante heures, dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois ;

« 6° Suivre un stage ou une formation dans un service ou un organisme sanitaire, social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois ;

« 7° Ne pas émettre, pour une durée de six mois au plus, des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés et ne pas utiliser de cartes de paiement ;

« 8° Ne pas paraître, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise et qui sont désignés par le procureur de la République, à l'exception des lieux dans lesquels la personne réside habituellement ;

« 9° Ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, la ou les victimes de l'infraction désignées par le procureur de la République ou ne pas entrer en relation avec elles ;

« 10° Ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, le ou les coauteurs ou complices éventuels désignés par le procureur de la République ou ne pas entrer en relation avec eux ;

« 11° Ne pas quitter le territoire national et remettre son passeport pour une durée qui ne saurait excéder six mois ;

« 12° Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de citoyenneté. » ;

2° Les douzième et treizième alinéas sont ainsi rédigés :

« Si la personne n'accepte pas la composition pénale ou si, après avoir donné son accord, elle n'exécute pas intégralement les mesures décidées, le procureur de la République met en mouvement l'action publique, sauf élément nouveau. En cas de poursuites et de condamnation, il est tenu compte, s'il y a lieu, du travail déjà accompli et des sommes déjà versées par la personne.

« Les actes tendant à la mise en oeuvre ou à l'exécution de la composition pénale sont interruptifs de la prescription de l'action publique. » ;

3° A la troisième phrase du quatorzième alinéa, après les mots : « le tribunal », sont insérés les mots : « , composé d'un seul magistrat exerçant les pouvoirs conférés au président, » ;

bis Le quatorzième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La victime a également la possibilité, au vu de l'ordonnance de validation, lorsque l'auteur des faits s'est engagé à lui verser des dommages et intérêts, d'en demander le recouvrement suivant la procédure d'injonction de payer, conformément aux règles prévues par le nouveau code de procédure civile. » ;

4° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article ne sont applicables ni aux mineurs de dix-huit ans ni en matière de délits de presse, de délits d'homicides involontaires ou de délits politiques. »

II. - Les deux premiers alinéas de l'article 41-3 du même code sont ainsi rédigés :

« La procédure de composition pénale est également applicable aux contraventions.

« La durée de la privation du permis de conduire ou du permis de chasser ne peut dépasser trois mois, la durée du travail non rémunéré ne peut être supérieure à trente heures, dans un délai maximum de trois mois, et la durée d'interdiction d'émettre des chèques ne peut dépasser elle aussi trois mois. Les mesures prévues par les 8° , 9° , 10° et 11° de l'article 41-2 ne sont pas applicables. La mesure prévue par le 5° dudit article n'est pas applicable aux contraventions de la 1re à la 4e classe. Il en est de même des mesures prévues par les 2° , 2° bis, 3° , 4° et 7° de cet article, sauf si la contravention est punie des peines complémentaires visées aux 1° à 5° de l'article 131-16 du code pénal. »

III. - Le dixième alinéa (5° ) de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« 5° Les détenus exécutant un travail pénal, les condamnés exécutant un travail d'intérêt général et les personnes effectuant un travail non rémunéré dans le cadre d'une composition pénale pour les accidents survenus par le fait ou à l'occasion de ce travail, dans les conditions déterminées par décret ; ».

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 187 est présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

L'amendement n° 252 est présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme Terrade.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 189, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé par le 1° du I de cet article pour remplacer les premier à sixième alinéas de l'article 41-2 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "cinq ans" par les mots : "deux ans". »

L'amendement n° 190, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour remplacer les premier à sixième alinéas de l'article 41-2 du code de procédure pénale, après les mots : "Le montant de cette amende", insérer les mots : ", qui ne peut excéder ni la moitié du maximum de l'amende encourue ni 7 500 euros,". »

L'amendement n° 57, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa du paragraphe I de cet article, après les mots : "de cette amende", insérer les mots : ", qui ne peut excéder la moitié du maximum de l'amende encourue,". »

L'amendement n° 188, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Compléter le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le 1° du I de cet article pour remplacer les premier à sixième alinéas de l'article 41-2 du code de procédure pénale par deux phrases ainsi rédigées :

« La personne à qui il est proposé une composition pénale est informée qu'elle peut se faire assister par un avocat avant de donner son accord à la proposition du procureur de la République. Cet accord est recueilli par procès-verbal dont une copie lui est remise ; »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 187.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Même si certains de nos collègues, présents cet après-midi, ne le sont plus forcément et que d'autres, présents maintenant, ne l'étaient pas avant le dîner, le Gouvernement et la commission, par son président et son rapporteur, eux, étaient et restent présents. Sans doute voudrez-vous donc bien considérer, monsieur le président, qu'en m'exprimant sur l'article 23 avant la suspension de la séance j'ai du même coup présenté cet amendement de suppression.

M. le président. Non seulement j'accepte, mais je vous en exprime ma profonde reconnaissance, monsieur Dreyfus-Schmidt ! (Sourires.)

La parole est à Mme Nicole Borvo, pour défendre l'amendement n° 252.

Mme Nicole Borvo. Par cet amendement de suppression nous renouvelons notre hostilité à l'extension considérable du champ de la composition pénale.

Qu'on en juge : désormais pourront être traités selon cette procédure les délits punis d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans. Ni M. Dreyfus-Schmidt ni moi n'avons répertorié les délits punis de telles peines, mais on peut considérer qu'une grande partie des infractions pourront être traitées par cette voie, qui concerne donc la corruption, le vol, l'escroquerie, l'abus de biens sociaux, les violences contre les personnes comme les agressions sexuelles et notamment le viol, agressions dont la gravité est pourtant telle qu'elle justifie, vient-on de nous expliquer, que leurs auteurs soient inscrits au fichier des délinquants sexuels.

On est donc loin de la vocation initiale de la composition pénale, qui, je le rappelle, se bornait dans la loi de 1999 aux tous petits contentieux. Or, déjà, nous avions exprimé des réserves sur les incidences d'une telle procédure au regard des exigences d'équité et de transparence du procès pénal.

Nous ne pouvons pas accepter la banalisation de cette procédure dérogatoire, dont la portée est accentuée par la liste impressionnante des peines qui pourront être fixées par le parquet : interdiction d'utiliser certains moyens de paiement, obligation d'accomplir un travail d'intérêt général... Certaines d'entre elles, notons-le, portent atteinte à la liberté d'aller et venir : interdiction de paraître dans certains lieux, interdiction de quitter le territoire national, alors même que la Constitution exige que de telles restrictions soient prononcées par un juge indépendant.

Tel n'est pas, quoi que l'on puisse en dire, le cas, puisque le juge des libertés et de la détention n'a en l'espèce qu'un pouvoir de validation a posteriori et non un pouvoir de décision : il ne peut qu'accepter ou refuser la mesure, sans la modifier.

Nous voyons dans l'extension de ce procédé, combinée à l'institution du plaider-coupable, la marque d'une conception de la justice essentiellement inspirée par la volonté de gérer des flux. D'ailleurs, le rapporteur de l'Assemblée nationale a été parfaitement clair lorsque sur ce point il a invoqué la baisse de la capacité de jugement.

Evidemment, si c'est « la baisse de la capacité de jugement » qui oblige maintenant la justice à juger rapidement, nous ne pouvons que demander la suppression de l'article 23 !

M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour présenter les amendements n°s 189 et 190.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'amendement n° 189 est évidemment un amendement de repli puisque nous sommes opposés à la composition pénale et plus encore à son extension. Aussi cet amendement de repli tend-il non seulement à empêcher l'extension du champ de cette procédure, mais aussi à le réduire.

Dans le cadre de cette procédure tout à fait particulière, le procureur ou son délégué peut proposer un arrangement prévoyant des peines ou, plus exactement, car ce ne sont même pas des peines, des mesures extrêmement réduites alors qu'il peut s'agir d'actes graves. Je rappelle, notamment à Mme Borvo, qu'en première lecture j'ai énuméré l'ensemble des infractions passibles d'une peine inférieure ou égale à cinq ans : elles sont en effet très importantes. Si cette procédure devait, hélas ! être maintenue, nous proposons de la limiter aux délits pour lesquels la peine encourue est inférieure ou égale à deux ans d'emprisonnement.

L'amendement n° 190 peut paraître curieux.

Le texte tel qu'il nous parvient de l'Assemblée nationale prévoit que le procureur peut inviter l'auteur de l'acte à « verser une amende de composition au Trésor public. Le montant de cette amende est fixé en fonction de la gravité des faits ainsi que des ressources et des charges de la personne ».

Après tout, pourquoi en effet ne fixerait-on pas une amende très lourde ? Mais il y aurait deux inconvénients. D'abord, l'intéressé peut être amené à refuser, et que se passera-t-il ensuite ? On n'en sait rien ! Ensuite et surtout, autoriser un procureur de la République à infliger une peine dont le maximum n'est pas fixé par la loi serait un cas d'inconstitutionnalité évident et contraire à tous les principes.

Peut-être avons-nous tort de faire preuve d'un esprit aussi constructif, mais c'est en tout cas la raison pour laquelle nous proposons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 57.

M. François Zocchetto, rapporteur. Actuellement, les amendes de composition ne peuvent excéder ni la moitié de l'amende encourue ni 3 750 euros d'amende.

L'Assemblée nationale a supprimé toute limite au montant de l'amende de composition, ce qui ne paraît pas raisonnable à la commission des lois.

D'une part, le principe même de la composition pénale est que les peines encourues soient inférieures aux peines normalement prévues ; d'autre part, avec le texte de l'Assemblée nationale, il deviendrait possible de prononcer une peine d'amende plus importante que celle qui est prévue par le code pour l'infraction en cause.

Je vous propose donc de revenir à un texte plus modéré et plus raisonnable en prévoyant que l'amende de composition sera limitée à la moitié du maximum de la peine d'amende encourue.

Pour répondre à l'observation de M. Dreyfus-Schmidt, j'ajoute qu'il n'est pas nécessaire de fixer un plafond de 3 750 euros, puisqu'un plafond existe. C'est précisément la moitié du maximum de l'amende encourue.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 188.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je réponds à mon tour à M. le rapporteur : en première lecture, c'est sur sa proposition que le Sénat avait adopté la rédaction suivante : « Le montant de cette amende, qui ne peut excéder ni la moitié du maximum de l'amende encourue ni 7 500 euros. » C'est donc que nous sommes allés à bonne école si nous proposons un plafond, même s'il est différent de celui que vous aviez fixé, monsieur le rapporteur. Mais tout cela n'a pas une importance fondamentale.

Ce qui est regrettable, c'est que l'extension de cette procédure va permettre à des gens ayant commis des délits graves de s'en tirer d'une manière discrète et à extrêmement bon compte. Je laisse maintenant à M. Badinter le soin de présenter l'amendement n° 188.

M. le président. La parole est donc à M. Robert Badinter.

M. Robert Badinter. Cet amendement n° 188 traite du droit fondamental de toute personne à se faire assister par un avocat dès l'instant où elle se trouve engagée dans une procédure ayant un caractère pénal et prévue dans le code de ce nom.

Le texte de notre amendement se justifie par lui-même : « La personne à qui il est proposé une composition pénale est informée qu'elle peut se faire assister par un avocat avant de donner son accord à la proposition du procureur de la République. » Tout le monde ne sait pas qu'il s'agit d'un droit et chacun comprendra donc l'importance de cette information.

Quant à la mention au procès-verbal et à la remise d'une copie, elles assurent la mise en oeuvre effective de ce droit de la défense.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François Zocchetto, rapporteur. Sur les amendements qui visent à supprimer les nouvelles dispositions concernant la composition pénale, à savoir les amendements n°s 187, 252, 189 et 190, la commission émet un avis défavorable.

En effet, elle considère, à l'inverse de M. Dreyfus-Schmidt ou de Mme Borvo, que la composition pénale est une très bonne chose. Cette procédure commence à entrer en pratique, et il faut lui donner le maximum de chances de réussir, car elle relève de la bonne administration de la justice dans certaines circonstances. J'ajoute que la personne à laquelle une amende est proposée n'est pas obligée d'accepter.

Quant aux dispositions proposées dans l'amendement n° 188, elles sont déjà prévues dans le dixième alinéa de l'article 41-2 du code de procédure pénale.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je veux tout d'abord rappeler que la composition pénale a été créée en juin 1999. Ce n'est donc pas ce gouvernement qui l'a inscrite dans la loi, monsieur Dreyfus-Schmidt.

Où en est-on aujourd'hui ? Lors de sa création en juin 1999, la mise en oeuvre de la composition pénale était assez complexe et préjugeait, par exemple, qu'après la garde à vue il y ait eu libération de la personne et nouvelle convocation, ce qui explique que le démarrage ait en effet été assez lent.

Ainsi, en 2001, il n'y a eu que 1 500 compositions pénales. En 2002, le chiffre a augmenté sensiblement puisqu'il est passé à 6 800 pour atteindre en 2003 - indication que je donne au Sénat - 12 100. Le dispositif se met donc en place et la modification de la procédure que j'ai introduite dans la loi de septembre 2002 semble porter ses fruits.

Je crois très sincèrement, monsieur Dreyfus-Schmidt, que ce dispositif est très bien adapté à la petite délinquance, dans la mesure il permet des sanctions rapides. Si ces sanctions sont effectivement modestes, elles peuvent avoir un impact éducatif et constituer des sanctions - au sens positif de ce mot - tout à fait efficaces.

Je suis donc défavorable à l'amendement n° 187.

Madame Borvo, vous avez avancé des arguments erronés. Ainsi, vous avez cité la corruption. Je rappelle que la peine encourue est de dix ans et que la corruption ne peut donc entrer dans le dispositif.

Vous avez également cité le viol. Or, le viol est un crime et, à ce titre, il n'entre évidemment pas dans le champ de la composition pénale. On est vraiment là dans l'improvisation !

De quoi s'agit-il en vérité ?

Le texte initial de 1999 donnait la liste des infractions et délits concernés. Nous proposons nous de remplacer le système de la liste par un quantum de peine maximum de cinq ans, dispositif plus simple à utiliser.

Je précise que la liste de 1999 visait des violences légères, l'abandon de famille, le vol simple, des destructions ou dégradations légères, soit des actes relevant de la petite délinquance, auxquels le dispositif est adapté.

Je suis donc défavorable à l'amendement n° 252.

Je suis également défavorable à l'amendement n° 189.

Je crois que le quantum de peine de cinq ans est adapté et qu'il ne faut pas le réduire à deux ans.

S'agissant des amendements n°s 190 et 57, qui traitent du même sujet, je suis favorable à l'amendement n° 57 de la commission.

En quoi le dispositif proposé modifie-t-il la situation actuelle ?

Aujourd'hui, le montant de l'amende que le procureur de la République peut proposer dans le cadre d'une composition pénale fait l'objet d'un double plafond, comme l'a rappelé M. le rapporteur voilà un instant. Il ne peut dépasser ni la moitié de l'amende encourue, ni 3 750 euros.

L'Assemblée nationale a supprimé ces deux plafonds, ce qui ne m'apparaît pas souhaitable. La commission des lois du Sénat a proposé de maintenir un seul plafond et a prévu que l'amende de composition pénale ne puisse excéder la moitié de l'amende encourue. C'est une proposition cohérente et équilibrée, et c'est également la plus logique.

Quant à l'amendement n° 188, je vous confirme, monsieur Badinter, comme vient de le dire M. le rapporteur, que les dispositions que vous prévoyez figurent déjà dans l'article 41-2 du code de procédure pénale.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous le retirons !

M. le président. L'amendement n° 188 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques n°s 187 et 252.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 189.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 190.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cet amendement vise à maintenir un plafond. Quand il nous est proposé que le montant de l'amende que le procureur de la République peut infliger dans le cadre d'une composition pénale ne puisse excéder la moitié de l'amende encourue, il faut savoir que les amendes peuvent être très élevées. L'intéressé, qui peut d'ailleurs être innocent, peut être tenté d'accepter une procédure extrêmement discrète par crainte que le procureur qui lui propose cet arrangement ne se déchaîne s'il le refuse et que l'affaire soit en définitive jugée par le tribunal correctionnel puis, éventuellement, par la cour d'appel.

Il est donc légitime de fixer un plafond. Le plafond de 7 500 euros, somme qui n'est pas négligeable, me paraît s'imposer, car certaines amendes encourues pour des délits passibles d'une peine inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement sont de beaucoup supérieures à cette somme, ce que l'on néglige de nous rappeler.

C'est pourquoi notre amendement, qui vise à instituer un plafond de 7 500 euros, me paraît parfaitement justifié. C'était d'ailleurs l'avis de la commission des lois du Sénat en première lecture. Je n'ai pas attendu qu'il nous soit expliqué pourquoi la commission des lois du Sénat et son rapporteur avaient changé d'avis et abandonné cette notion de plafond.

Nous persistons, nous, dans ce qui était une idée sage.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 190.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 23, modifié.

(L'article 23 est adopté.)