MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement, la lettre suivante :
« Monsieur le président,
« J'ai l'honneur de vous informer qu'en application de l'article 48 de la Constitution et des articles 29 et 32 du règlement du Sénat, le Gouvernement demande au Sénat de poursuivre la discussion du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le lundi 1er mars, l'après-midi et le soir.
« Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'expression de mes sentiments les meilleurs.
« Signé : JEAN-FRANÇOIS COPÉ »
Quel est l'avis de la commission sur cette demande ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Favorable.
M. le président. En application de l'article 32, alinéa 2, du règlement, je vais consulter le Sénat sur la tenue d'une séance le lundi 1er mars, à quinze heures et le soir.
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Comme notre collègue M. Gilbert Chabroux l'a fortement souligné lors de la présentation de la motion tendant au renvoi à la commission de ce projet de loi, nous avons dû travailler dans des conditions déplorables. Nous essayons néanmoins d'avoir un vrai débat, riche et argumenté. Chacun a consenti un effort particulier.
La suite de la discussion du projet de loi était prévue mardi prochain. Or nous apprenons qu'elle aura lieu lundi. Nous avons tous déjà pris des engagements. Il n'est pas sérieux de nous faire travailler dans de telles conditions.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. J'abonde dans le sens de Mme Michelle Demessine. L'ordre du jour prévoyait que l'examen de ce projet de loi se poursuivrait le 2 mars l'après-midi et, éventuellement, le soir. Bien sûr, la conférence des présidents en a peut-être décidé autrement, mais nous n'en avons pas été informés. Il est vrai que nous avons des obligations, nous prévoyons notre calendrier de travail. C'est pourquoi je rejoins les critiques formulées hier par notre collègue M. Alain Vasselle.
Pour ma part, je ne suis pas favorable à cette modification de l'ordre du jour. Il faut évidemment achever l'examen de ce texte. Ce report au lundi 1er mars aurait pour seul avantage - c'est une plaisanterie - de nous permettre d'examiner les amendements en commission autrement qu'en mangeant. On risque sinon de faire des taches de graisse sur les papiers ! (Sourires.)
Il faudrait travailler dans de meilleures conditions. Tout le monde déplore ou pourrait déplorer, en effet, les conditions dans lesquelles nous abordons ce texte. C'est tout à fait dommageable.
Aussi, nous voterons contre cette modification.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je voudrais répondre à Mme Demessine et à M. Godefroy.
La date du mardi, c'est moi qui l'ai indiquée, et non le Gouvernement. Je vous envoie régulièrement par courtoisie, en commission, des projets de calendrier pour essayer d'organiser nos travaux.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Heureusement que vous êtes là !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, c'est normal d'essayer d'organiser notre travail.
Si vous lisez attentivement les documents que je vous envoie, vous verrez qu'il y est mentionné que le calendrier est susceptible de changements, car je ne connais pas les décisions qui seront prises par le Gouvernement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Ce n'est donc pas parole d'Evangile !
Comme nous ne voulons pas bâcler l'examen de ce projet de loi,...
M. Gilbert Chabroux. C'est un mot que nous n'avons pas employé !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai qu'il nous arrive, comme vous l'avez dit, monsieur Godefroy, de travailler et de manger rapidement après. Mais nous ne faisons pas de taches sur nos documents ! (Sourires.)
Nous acceptons la proposition du Gouvernement pour que des jours supplémentaires soient consacrés à ce texte car je ne souhaite pas que, par des procédures quelconques, on tente d'aller plus vite.
M. Roland Muzeau. Mardi !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous allons prendre le temps nécessaire. Mais, comme dans le Curé de Cucugnan, si lundi nous n'avons pas fini, la suite sera reportée à mardi.
M. Guy Fischer. On a tous pris des engagements !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Lundi ne suffira peut-être pas. Mais ne commençons pas à nous priver du lundi alors que nous aurons peut-être besoin de lundi et - pourquoi pas ? - de mardi.
En tout cas, pour ma part, je suis prêt à travailler sur ce projet de loi, qui me paraît si important qu'il n'est pas question d'en reporter l'examen.
M. le président. Je rappelle que la conférence des présidents a inscrit à l'ordre du jour du mardi 2 mars le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics.
Nous verrons ce que nous pourrons faire lundi.
Je fais simplement remarquer qu'un nombre plus élevé que prévu d'amendements ont été déposés sur le texte que nous examinons en ce moment,...
M. Guy Fischer. C'était prévisible !
M. le président. ... ce qui explique sans doute que le débat requiert plus de temps.
M. Gilbert Chabroux. Le texte est inachevé !
M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande du Gouvernement.
La demande est adoptée.
L'ordre du jour est modifié en conséquence.
DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous poursuivons la discussion du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 242 rectifié, présenté par MM. Vial, de Broissia, Pépin, Richert, de Raincourt, Leroy, Revet, Monory et Mercier, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'Etat est garant de l'égalité de traitement des personnes handicapées sur l'ensemble du territoire national. A cet effet, il définit le cadre réglementaire général des politiques conduites en faveur des personnes handicapées.
« Les départements qui en feront la demande seront autorisés à prendre en charge, l'intégralité ou partie des responsabilités et missions liées à la mise en oeuvre des politiques en faveur des personnes handicapées, au-delà des missions de prévention qui leur sont confiées en vertu de l'article L. 114-3 du code de l'action sociale et des familles.
« La collectivité départementale pourrait être ainsi amenée à piloter, à coordonner ou à gérer l'action en faveur des personnes handicapées en apportant les réponses de proximité nécessaires au suivi personnalisé et à l'accompagnement tout au long de la vie, quel que soit le mode de prise en charge : soutien à domicile, accueil institutionnel, formules alternatives.
« Les départements pourront être compétents notamment :
« _ pour piloter et gérer les maisons départementales des personnes handicapées ;
« _ pour gérer les centres d'aide par le travail et les ateliers protégés ;
« _ pour piloter le soutien à domicile et notamment les auxiliaires de vie.
« Dans ce contexte, les ressources de l'Etat, des collectivités locales, de l'assurance maladie et de toutes autres instances concernées concourant au financement des projets en faveur des personnes handicapées seront maintenues, voire renforcées et notamment en matière de soins et de médicalisation. »
L'amendement n° 333 rectifié, présenté par MM. Vial, de Broissia, Pépin, du Luart, Richert, de Raincourt, Leroy, Monory, Revet et Mercier, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'Etat est garant de l'égalité de traitement des personnes handicapées sur l'ensemble du territoire national. A cet effet, il définit le cadre réglementaire général des politiques conduites en faveur des personnes handicapées.
« Les départements au-delà des missions de prévention qui leur sont confiées en vertu de l'article L. 114-3 du code de l'action sociale et des familles, lorsqu'ils souhaitent conduire une politique ambitieuse et novatrice en faveur des personnes handicapées peuvent solliciter auprès de l'Etat un droit à expérimentation dans ce domaine conformément aux dispositions de la loi organique du 16 juillet 2003 ;
« Ils pourront alors être amenés, pendant la durée de l'expérimentation, à mettre en oeuvre une politique globale en faveur des personnes handicapées, à piloter et à coordonner l'ensemble de l'action et à apporter l'ensemble des réponses nécessaires pour assurer le suivi personnalisé et l'accompagnement des personnes handicapées tout au long de la vie, quel que soit le mode de prise en charge : soutien à domicile, accueil institutionnel, formules alternatives.
« En situation d'expérimentation, les départements seront compétents notamment :
« _ pour piloter et gérer les « maisons départementales des personnes handicapées » ;
« _ pour gérer les centres d'aide par le travail et les ateliers protégés ;
« _ pour piloter le soutien à domicile et notamment les auxiliaires de vie.
« Dans ce contexte, les ressources de l'Etat, des collectivités locales, de l'assurance maladie et de toutes autres instances concernées concourant au financement des projets en faveur des personnes handicapées seront maintenues, voire renforcées et notamment en matière de soins et de médicalisation. »
L'amendement n° 262, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le département est responsable de la politique globale en faveur des personnes en situation de handicap. Pour ce faire, il est compétent dans les secteurs suivants :
« 1° Pilotage et responsabilité des maisons départementales du handicap :
« _ Pilotage des instances techniques d'orientation et de décision ;
« _ Détermination du niveau de handicap ;
« _ Evaluation ;
« _ Expertise des situations individuelles avec élaboration d'un projet de vie pour la personne adulte handicapée sur la base de ses souhaits et de ceux de son entourage ;
« _ Suivi individualisé des personnes en situation de handicap sur la base de l'élaboration d'un plan d'aide personnalisé.
« 2° Gestion des centres d'aide par le travail et des entreprises adaptées ;
« 3° Responsabilité du secteur de l'aide à domicile. »
La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour présenter les amendements n°s 242 rectifié et 333 rectifié.
M. Jean-Pierre Vial. Le projet de loi relatif aux droits et aux chances des personnes handicapées a pour ambition de réformer la loi d'orientation du 30 juin 1975 afin de mettre en place une politique globale et équilibrée visant à améliorer la situation des personnes handicapées.
Les avancées développées dans ce texte, plaçant la personne handicapée au coeur des dispositifs qui la concernent, méritent d'être soulignées.
En effet, le projet de loi garantit aux personnes handicapées le libre choix de leur projet de vie, en instituant un droit à compensation, en leur assurant un revenu d'existence, en permettant une meilleure participation à la vie sociale et en définissant une nouvelle méthode pour apprécier les capacités et les aptitudes de la personne handicapée, et pour prendre en compte ses aspirations et celles des familles.
Il est important également qu'il soit réaffirmé que l'Etat est le garant des conditions d'égalité des droits et des chances de tous les citoyens.
Cependant, dans un souci de cohérence par rapport aux principes qui fondent la deuxième phase de la décentralisation, le département, en vertu du rôle prépondérant qui lui est désormais confié lorsqu'il s'agit de questions relevant de la proximité, devrait pouvoir disposer, dans la mesure où il le souhaite, d'un pouvoir de pilotage, de décision, de coordination et de gestion pour assurer le suivi personnalisé et l'accompagnement des personnes handicapées, quel que soit leur mode de prise en charge : soutien à domicile, accueil institutionnel, formules alternatives.
En effet, les départements sont en mesure d'apporter toutes garanties quant à l'efficacité de gestion et à la volonté de développement de politiques performantes en faveur des personnes handicapées ou dépendantes, compte tenu de l'expérience acquise par ces collectivités dans d'autres domaines de l'action sociale tels que les personnes âgées, la cohésion sociale, la politique familiale, le RMI, le RMA.
Enfin, pour permettre aux départements qui auront fait le choix de conduire une politique globale en faveur des personnes handicapées de mener à bien leur projet, les ressources qui concourent actuellement au financement des actions et programmes devront être maintenues, quelle que soit leur provenance, publique ou privée.
Il s'agit de mettre en oeuvre concrètement les principes de l'acte II de la décentralisation dans un domaine aussi sensible que le handicap.
Quant à l'amendement n° 333 rectifié, conformément aux possibilités nouvelles offertes dans le cadre de la deuxième phase de la décentralisation, les départements qui le souhaiteraient pourraient conduire une politique ambitieuse et novatrice en faveur des personnes handicapées, en faisant usage du droit à l'expérimentation qui leur est conféré en vertu de la loi du 16 juillet 2003.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Je comprends les desiderata de notre collègue M. Jean-Pierre Vial, qui sont sans doute partagés par l'ensemble des présidents de conseils généraux. Toutefois, nous sommes là un peu en avance puisque, en ce moment même, l'Assemblée nationale examine le projet de loi relatif aux responsabilités locales et, par ailleurs, nous n'avons pas encore étudié, dans le présent texte, la question de la gestion de la maison départementale des personnes handicapées.
Le souhait que les conseils généraux soient les chefs de file de la compensation du handicap me paraît légitime. Ce sont effectivement les plus grands financeurs. Mais il ne faut pas qu'ils se privent de l'apport d'autres financeurs.
Aussi, je souhaiterais, mon cher collègue, que vous retiriez ces amendements, quitte à compléter, le moment venu, le troisième volet, à savoir le volet institutionnel. Peut-être pourrez-vous alors reprendre ces amendements ou, en tout cas, nous faire part à nouveau de vos préoccupations. Mais, aujourd'hui, ces amendements sont prématurés.
Je le répète, je suis d'accord sur le fond, qui est à notre avis fondamental. Ce sont les conseils généraux, en tant que collectivités de proximité, qui doivent conduire la politique de compensation du handicap dans les départements.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour présenter l'amendement n° 262.
M. Guy Fischer. Le loup sort du bois !
M. Michel Mercier. Si mon collègue M. Vial était un peu en avance, je crains d'être très en avance. (Sourires.) Puisqu'il nous faut à tout prix siéger lundi prochain, alors que cela n'était pas prévu, c'est sans doute parce qu'il faut faire avancer les choses. Pour ma part, je souhaite les faire avancer plus encore en disant qui fera quoi. Il faut, de temps en temps, passer des principes à leur application. S'il ne faut pas aller trop vite, et nous avons beaucoup de temps, notre collègue a parlé de « troisième volet », de volet roulant (Sourires), on va attendre. Mais s'il faut attendre, il n'est peut-être pas nécessaire de siéger lundi. (Sourires.) Je discerne une certaine contradiction dans l'expression de notre excellent rapporteur. Pour ne pas le gêner davantage, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 262 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 242 rectifié et 333 rectifié ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. La position du Gouvernement est très voisine de la position de la commission.
Monsieur Vial, vous posez d'excellentes questions. A l'évidence, les départements, et nous avons eu l'occasion d'en parler plusieurs fois ensemble, y compris dans votre beau département de Savoie, ont fait leurs preuves en matière d'action sociale.
Mon premier souci est l'efficacité, c'est-à-dire que vous votiez une loi réaliste, applicable. L'efficacité doit aussi prévaloir dans les décisions qui seront prises. A mes yeux, cela ne va pas sans une proximité la plus étroite possible, et les départements ont déjà fait leurs preuves en la matière, ne serait-ce que récemment, je pense à la manière dont ils ont su traiter, et bien traiter, la question de l'APA.
Il est évident que nous nous dirigeons vers davantage de responsabilités à l'échelon du département. A la suite de la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie qu'il a annoncée le 6 novembre dernier, le Premier ministre a confié à MM. Briet et Jamet une mission sur ce sujet. Votre amendement me paraît donc prématuré par rapport à la loi et sans doute prématuré dans le temps, même si nous y reviendrons certainement lorsque nous reparlerons de la maison départementale des personnes handicapées.
Aussi, je souhaite, moi aussi, que vous retiriez ces amendements.
M. le président. Monsieur Vial, les amendements n°s 242 rectifié et 333 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Jean-Pierre Vial. Les explications de Mme le secrétaire d'Etat et de M. le rapporteur, si elles ne valent pas gages pour les articles qui seront évoqués par la suite, représentent tout de même une indication forte s'agissant de la position du Gouvernement à l'égard des départements. Aussi, je retire ces amendements, sur lesquels nous aurons l'occasion de revenir lors de l'examen de sujets comme la maison départementale des personnes handicapées.
M. le président. Les amendements n°s 242 rectifié et 333 rectifié sont retirés.
M. Paul Blanc, rapporteur. Merci !
TITRE II
COMPENSATION ET RESSOURCES
TITRE Ier
Compensation des conséquances du handicap
Article additionnel avant l'article 2
M. le président. L'amendement n° 415, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 2° de l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 2° Lorsque l'assuré en situation de handicap a besoin d'une aide technique prescrite par la commission visée à l'article 146-4 du code de l'action sociale et des familles. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par le relèvement à due concurrence du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Par cet amendement, je voudrais, comme je l'ai fait au cours de la discussion générale, soulever un problème de fond, à savoir la prise en charge des aides techniques. Le débat me conduit à y revenir.
Initialement, les aides techniques étaient prises en charge par l'assurance maladie. Ne l'oublions pas ! Or c'est bien parce que l'assurance maladie, au fil du temps, a failli à sa mission, en répondant de plus en plus mal à ce besoin essentiel, que, petit à petit, d'autres financeurs ont dû prendre le relais. Je pense au département, à travers une prestation extralégale, aux mutuelles et à d'autres financements divers et variés qui ont peu à peu compensé la déficience de l'assurance maladie, celle-ci n'ayant pas su faire évoluer son dispositif en fonction des besoins.
Faut-il entériner cette dispersion, la prestation de compensation étant destinée à un énième financeur à côté de l'assurance maladie à laquelle elle sera amenée à se substituer ? J'en reviens aux remarques que nous faisions au début de cette discussion pour m'interroger sur l'opportunité de débattre de ce texte en dehors d'autres qui sont extrêmement concernés, je pense en l'occurrence particulièrement à la réforme de l'assurance maladie, qui serait une bonne occasion de reposer ce problème au fond.
Cette réflexion m'est d'autant plus inspirée que si la prestation de compensation est composée, on le voit, à la fois d'aides techniques, d'aides humaines, des aménagement du logement, la partie occupée par les aides techniques dans la prestation de compensation est très importante, notamment du point de vue de la masse financière qu'elle va absorber.
Les aides techniques ne devraient-elles pas être ramenées à leur niveau d'origine, ouvrant ainsi un espace d'autant plus large pour la compensation ? En effet, le reproche principal adressé à l'encontre de la prestation de compensation, c'est la faiblesse de son périmètre en raison de l'application de divers critères : ressources, taux d'incapacité et âge. Nous y viendrons plus au fond tout à l'heure. Il est très net qu'il ne pourra être donné satisfaction à un certain nombre de demandes de compensation précisément en raison de l'insuffisance des financements.
Si l'assurance maladie jouait pleinement son rôle en matière d'aides techniques, cela nous simplifierait un peu la tâche, d'autant que la situation actuelle génère une inégalité de traitement entre les citoyens.
En effet, un citoyen qui a besoin d'une prothèse, par exemple un pacemaker ou une prothèse de la hanche, a droit au remboursement plein et entier de cette aide technique, alors que ce n'est pas le cas pour les personnes en situation de handicap, et ce le sera de moins en moins.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Je partage le souci des auteurs de cet amendement. Il est inadmissible que les personnes handicapées soient contraintes de prendre à leur charge une partie des aides techniques qui leur sont indispensables pour mener une vie normale.
Cet amendement soulève toutefois deux difficultés et suscite une réserve.
Premièrement, il renvoie à une notion de l'aide technique qui n'est actuellement pas définie en droit. Dans ce contexte, il s'agit d'un élargissement quasi infini des aides à la charge de la branche maladie. Or il n'est pas sûr que l'ensemble des prestations relève réellement du soin, donc de l'assurance maladie.
Deuxièmement, la prestation de compensation permettra de prendre en charge la part qui reste aujourd'hui à la charge de la personne handicapée. Dans ces conditions, l'objectif me paraît atteint.
Enfin, ma chère collègue, reprendre l'expression d'« assuré en situation de handicap » n'est pas une bonne chose, et nous vous l'avons dit à plusieurs reprises.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission.
L'amendement étend le champ actuel de l'exonération du ticket modérateur qui est prévu au 2° de l'article L. 322-3 à toutes les aides techniques destinées aux personnes handicapées. Or c'est l'objet même de la prestation de compensation de prendre en charge le reste à charge de l'assuré. L'amendement introduit ainsi un doute sur la finalité de la prestation de compensation. Il ne saurait donc, à mes yeux, être retenu.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 415.
(L'amendement n'est pas adopté.)
I. - Le chapitre V du titre IV du livre II du code de l'action sociale et des familles est remplacé par les dispositions suivantes :
« Chapitre V
« Prestation de compensation
« Art. L. 245-1. - Toute personne handicapée ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation de l'enfant handicapé, qui n'a pas atteint un âge fixé par décret et a un taux d'incapacité permanente au moins égal à un pourcentage également fixé par décret, a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d'une prestation en nature.
« Peuvent également prétendre au bénéfice de cette prestation les personnes d'un âge supérieur à la limite mentionnée à l'alinéa précédent, mais qui remplissaient, avant cet âge limite, la condition d'incapacité permanente prévue au même alinéa, sous réserve de solliciter cette prestation avant un âge fixé par décret.
« Art. L. 245-2. - La prestation de compensation peut être affectée, dans des conditions définies par décret, à des charges :
« 1° Liées à un besoin d'aides humaines ;
« 2° Liées à un besoin d'aides techniques, notamment aux frais laissés à la charge de l'assuré lorsque ces aides techniques relèvent des prestations prévues au 1° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale ;
« 3° Liées à l'aménagement du logement de la personne handicapée ;
« 4° Spécifiques ou exceptionnelles, comme celles relatives à l'acquisition ou l'entretien de produits liés au handicap ou aux aides animalières.
« Art. L. 245-3. - L'élément de la prestation relevant du 1° de l'article L. 245-2 est accordé à toute personne handicapée qui ne dispose pas d'un droit ouvert de même nature au titre d'un régime de sécurité sociale, soit lorsque son état nécessite l'aide effective d'une tierce personne pour les actes essentiels de l'existence ou requiert une surveillance régulière, soit lorsque l'exercice d'une activité professionnelle ou d'une fonction élective lui impose des frais supplémentaires.
« Le service de cette prestation peut être suspendu ou interrompu lorsqu'il est établi, dans des conditions fixées par décret, que son bénéficiaire ne reçoit pas l'aide effective pour laquelle cette allocation lui a été attribuée.
« L'élément de la prestation relevant du 1° de l'article L. 245-2 est à la charge du département ; les éléments relevant des 2° , 3° et 4° sont à la charge de l'Etat.
« Art. L. 245-4. - La prestation de compensation est accordée dans la limite de taux de prise en charge et de montant déterminés dans des conditions fixées par voie réglementaire, qui peuvent varier selon la nature de la dépense et les ressources du bénéficiaire. Les modalités et la durée d'attribution de cette prestation sont définies par décret.
« Art. L. 245-5. - L'attribution de la prestation de compensation n'est pas subordonnée à la mise en oeuvre de l'obligation alimentaire définie par les articles 205 à 211 du code civil.
« Il n'est exercé aucun recours en récupération de cette prestation à l'encontre de la succession du bénéficiaire décédé.
« Les sommes versées au titre de cette prestation ne font pas l'objet d'un recouvrement à l'encontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune.
« Art. L. 245-6. - La prestation de compensation est incessible en tant qu'elle est versée directement au bénéficiaire et insaisissable, sauf pour le paiement des frais d'entretien de la personne handicapée. En cas de non-paiement de ces frais, la personne physique ou morale ou l'organisme qui en assume la charge peut obtenir du président du Conseil général que celui-ci lui soit versé directement sur l'élément de la prestation relevant du 1° de l'article L. 245-2.
« L'action du bénéficiaire pour le paiement de la prestation se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable à l'action intentée par le président du Conseil général en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration.
« La tutelle aux prestations sociales prévue aux articles L. 167-1 à L. 167-5 du code de la sécurité sociale s'applique également à la prestation de compensation.
« Art. L. 245-7. - Toute personne qui a obtenu le bénéfice d'une prestation de compensation avant l'âge mentionné à l'article L. 245-1 et qui remplit les conditions prévues par l'article L. 232-1 peut choisir, dans des conditions fixées par décret, lorsqu'elle atteint cet âge et à chaque renouvellement de l'attribution de cette prestation, le maintien de celle-ci ou le bénéfice de l'allocation personnalisée d'autonomie.
« Art. L. 245-8. - Les dispositions de l'article L. 134-3 sont applicables aux dépenses résultant du versement de la prestation prévue à l'article L. 245-1.
« Art. L. 245-9. - Les conditions dans lesquelles le droit à la prestation de compensation est ouvert aux personnes handicapées hébergées dans un établissement social ou médico-social ou hospitalisées dans un établissement de santé sont précisées par décret. Ce décret détermine également dans quelles conditions le paiement de cette prestation peut-être suspendu, totalement ou partiellement, en cas d'hospitalisation ou d'hébergement.
« Art. L. 245-10. - Sauf disposition contraire, les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. »
II. - Le neuvième alinéa de l'article L. 131-2 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :
« 3° De l'attribution de l'élément de la prestation relevant du 1° de l'article L. 245-2, dans les conditions prévues par les articles L. 245-3 à L. 245-9 ; ».
III. - A l'article L. 232-23 du même code, les mots : « l'allocation compensatrice » sont remplacés par les mots : « la prestation de compensation ».
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. P. Blanc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« A. _ Avant le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, insérer une division et un article additionnels ainsi rédigés :
« Section 1.
« Plan personnalisé de compensation du handicap.
« Art. L. 245. _ L'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article L. 146-4 propose, à son initiative ou à la demande de la personne handicapée ou, le cas échéant, de ses parents ou de son représentant légal, un plan personnalisé de compensation du handicap. Ce plan comprend les moyens de compensation les plus adaptés au regard des besoins et des aspirations de la personne handicapée, exprimés dans un projet de vie élaboré par la personne elle-même ou, le cas échéant, par ses parents ou son représentant légal.
« Il intègre, le cas échéant, les moyens relevant de la prestation de compensation mentionnée à l'article L. 245-2, de l'allocation mentionnée à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale et les aides techniques couvertes par les prestations prévues au 1° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale. »
« B. _ En conséquence, rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour l'intitulé du chapitre V du titre IV du livre II du même code :
« Chapitre V.
« Compensation du handicap.
« C. _ En conséquence, avant le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du même code, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
« Section 2.
« Prestation de compensation. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Je retire cet amendement, monsieur le président, car ses dispositions ont été reprises dans l'article 1er.
M. le président. L'amendement n° 5 est retiré.
Je suis maintenant saisi de dix amendements faisant l'objet d'une discussion commune. Toutefois, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 181, présenté par MM. Godefroy, Chabroux, Cazeau et Domeizel, Mmes Printz et San Vicente, M. Vantomme, Mme Blandin, MM. Dauge, Le Pensec, Raoul et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles :
« Art L. 245-1. _ Toute personne en situation de handicap répondant aux conditions fixées par l'article L. 114 a droit à une prestation de compensation en fonction de ses besoins. Cette prestation peut être versée, au choix de l'intéressé en nature ou en espèce. Cette disposition est applicable au plus tard trois ans à compter de la publication de la présente loi. »
La parole est à Mme Michèle San Vicente.
Mme Michèle San Vicente. Dans un rapport qu'elle a récemment publié, l'Inspection générale des affaires sociales montre que la majorité des Etats ont évolué vers un système personnalisé de compensation, construit avec la participation de l'intéressé et de ses proches à partir d'une évaluation de ses besoins.
Partout en Europe il s'agit non plus de mesurer l'incapacité à l'aide de grilles et de référentiels, mais d'apprécier les besoins de chacun dans son environnement personnel. Pourquoi la France serait-elle le seul pays à rester en retrait ?
Cet article L. 245-1 est capital, madame la secrétaire d'Etat ; vous le savez, il est au coeur du mécontentement des associations.
Bien sûr, au dernier moment, vous avez fait un geste dans leur direction en retirant la condition de ressources pour l'octroi de la prestation de compensation, mais vous n'êtes pas allée jusqu'au bout, puisque son montant pourra toujours varier en fonction de la nature des dépenses et des ressources du bénéficiaire.
En outre, les critères d'âge et d'incapacité demeurent. En effet, le projet de loi maintient la cohabitation de trois types de prestations de compensation accordées selon le critère d'âge, ce qui a pour conséquence d'entretenir la ségrégation existant actuellement entre les personnes en situation de handicap selon l'âge auquel leur handicap est survenu.
Je regrette, madame la secrétaire d'Etat, mais on ne peut pas admettre qu'une personne soit traitée différemment, et plus ou moins bien prise en charge, selon qu'elle a été handicapée trop tôt ou trop tard !
Notre amendement a donc pour objet, d'une part, d'étendre immédiatement la prestation de compensation aux enfants en situation de handicap et, d'autre part, de prévoir l'extension de ce dispositif, à une échéance de trois ans, à toute personne en situation de handicap, quel que soit son âge.
Par ailleurs, en l'état actuel du projet de loi, il est prévu que la prestation de compensation est accordée sous réserve que la personne handicapée soit atteinte d'une incapacité au moins égale à un pourcentage défini par décret.
Cette condition est contraire au principe même du droit à compensation inscrit dans la loi, dans la mesure où elle a pour conséquence d'exclure certaines personnes en situation de handicap des prestations qui en découlent.
Comme trop souvent, madame la secrétaire d'Etat, le texte du projet de loi n'est pas à la hauteur des ambitions affichées. Comment peut-on parler de compensation universelle lorsque l'on pose des critères restrictifs d'âge et de taux d'incapacité ? Ce ne sont ni l'âge ni le taux d'incapacité, mais bien les besoins de la personne elle-même en situation de handicap qui doivent déclencher la prestation de compensation.
M. le président. L'amendement n° 295, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles :
« Art. L. 245-1. - Toute personne en situation de handicap a droit, en fonction de ses besoins, à une prestation de compensation, qui est servie, selon son choix, en espèces ou en nature. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Dans le prolongement de l'article 53 de la loi de modernisation sociale posant un droit à compensation universel, l'exposé des motifs du présent projet de loi dispose que toute personne handicapée aura droit désormais aux aides qui lui auront été reconnues nécessaires pour compenser les conséquences de son handicap.
Or l'article 2 que nous examinons s'écarte de ce principe, « simple mais essentiel », pour reprendre les termes de notre rapporteur, du droit à compensation en conditionnant la nouvelle prestation aux critères d'âge et de taux d'incapacité.
Autant dire que ce projet de loi reproduit les ségrégations actuelles contre les personnes en situation de handicap, selon l'âge de la survenue de leur handicap, l'origine, la nature, l'importance de ce dernier. Il permettra que perdurent des inégalités de traitement et une segmentation des prises en charge, alors que chacun s'accorde sur l'importance qu'il y a tant à appréhender la personne handicapée dans sa globalité et sa spécificité qu'à garantir à chacun une réponse durable, évolutive, adaptée aux besoins de tous.
Enfin, ce projet de loi est une réponse inadaptée aux enjeux de demain, à l'augmentation du nombre des personnes touchées par des incapacités, à l'allongement de la durée de vie et aux besoins croissants de services d'aide à la personne.
Le Conseil économique et social examine en ce moment même un rapport de M. Bonnet, intitulé Pour une prise en charge collective, quel que soit leur âge, des personnes en condition de handicap, proposant, à rebours des orientations des deux projets de loi prévoyant de nouvelles modalités de prise en charge, pour les personnes handicapées, d'un côté, et les personnes âgées dépendantes, de l'autre, un dispositif permettant d'offrir à chacun, quels que soient son âge et son environnement de vie, une compensation adaptée à ses besoins.
Les parlementaires communistes ont déjà été à l'origine de mains amendements visant à inscrire ce droit à compensation dans le cadre de la sécurité sociale et de la solidarité nationale. Aujourd'hui, en vous proposant une définition du droit à compensation qui ne retient comme critère que celui des besoins de la personne, nous persévérons sur la voie de la reconnaissance d'un nouveau risque handicap-incapacité-dépendance. Hostiles à la barrière d'âge de soixante ans, discriminante, car excluant notamment les enfants âgés de moins de vingt ans sous prétexte qu'existe l'allocation d'éducation spéciale, l'AES - tout en sachant, d'ailleurs, que cette prestation est, par nature, différente -, nous proposons de la supprimer.
Considérant, par ailleurs, que chacun a des besoins spécifiques liés à l'incapacité, quelle que soit l'importance de cette dernière, et devant être pris en charge collectivement, nous supprimons la référence à un taux d'incapacité permanente, au demeurant très élevé, puisqu'il est fixé à 80 %. Dans la mesure où une évaluation individualisée des besoins de la personne est prévue, il ne paraît pas utile de retenir cette référence au degré d'invalidité, à charge pour les équipes pluridisciplinaires d'établir avec la personne concernée ce qui lui est nécessaire.
Enfin, comme l'a rappelé la Commission nationale consultative des droits de l'homme dans son avis du 22 janvier, si la compensation est nécessairement subordonnée à la définition objective d'un besoin, la satisfaction de ce dernier passe obligatoirement par la voie unique et singulière du choix personnel.
En conséquence, la définition proposée par notre amendement s'attache au mode de compensation, en n'optant pas pour une prestation en nature, mais en laissant à la personne handicapée la liberté de choisir une prestation en espèces.
Tels sont les trois éléments clés du présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 247 rectifié, présenté par MM. Joly et Vallet, est ainsi libellé :
« « Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles :
« « Art. L. 245-1. - Toute personne en situation de handicap répondant aux conditions fixées par l'article L. 114 a droit à une prestation de compensation en fonction de ses besoins. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 427 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« « Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles :
« « Art. L. 245-1. - I. - Toute personne handicapée ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale, dont l'âge est inférieur à un âge fixé par décret et dont le handicap répond à des critères définis par décret prenant notamment en compte la nature et l'importance des besoins de compensation, a droit à une prestation de compensation, qui a le caractère d'une prestation en nature.
« « II. - Peuvent également prétendre au bénéfice de cette prestation dans des conditions définies par voies réglementaires :
« « 1° Les personnes bénéficiaires de l'allocation mentionnée à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale ;
« « 2° Les personnes d'un âge supérieur à la limite mentionnée au I du présent article, mais dont le handicap répondait, avant cet âge limite, aux critères également mentionnés au I du présent article, sous réserve de solliciter cette prestation avant un âge fixé par décret.
« « III. - Lorsque le bénéficiaire de la prestation de compensation dispose d'un droit ouvert de même nature au titre d'un régime de sécurité sociale ou lorsqu'il perçoit l'allocation mentionnée à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale, les sommes versées à ce titre viennent en déduction du montant de la prestation de compensation. »
La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Il s'agit d'un amendement important, qui prévoit une nouvelle rédaction du texte proposé pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles.
Tout d'abord, il substitue au taux d'incapacité permanente la référence aux besoins de compensation. Cette mesure, réclamée par beaucoup, nous paraît tout à fait justifiée et rejoint en cela l'amendement n° 8 présenté par M. le rapporteur.
La nouvelle rédaction proposée élargit, par ailleurs, le bénéfice de la prestation de compensation aux bénéficiaires de l'allocation d'éducation spéciale et aux bénéficiaires de la majoration pour tierce personne, en prévoyant que les sommes versées au titre de ces prestations viennent en déduction du montant de la prestation de compensation.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. P. Blanc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, après les mots : "personne handicapée", insérer les mots : "remplissant les conditions prévues à l'article L. 380-1 du code de la sécurité sociale". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement vise à assortir la prestation de compensation, à l'image de l'ensemble des prestations de protection sociale, d'une condition de résidence stable et régulière en France.
M. le président. L'amendement n° 158 rectifié, présenté par MM. Vasselle, Murat, Mouly et Gournac, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, supprimer les mots : "ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation de l'enfant handicapé". »
La parole et à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Cet amendement reprend l'idée, qui a été développée antérieurement, de la suppression du critère d'âge.
Dans la mesure où le droit à compensation s'attache au handicap et vise à en réparer toutes les conséquences, son application doit être étendue à toute personne handicapée, sans considération d'âge.
Toutefois, à la réflexion, je me demande si cet amendement n'est pas satisfait par celui du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 103 rectifié quinquies, présenté par Mmes Desmarescaux, G. Gautier et Henneron, MM. Türk, Lecerf et Darniche, Mmes Brisepierre et Bocandé, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots : "ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation de l'enfant handicapé" par les mots : "âgée de dix-huit ans révolus". »
La parole est à Mme Sylvie Desmarescaux.
Mme Sylvie Desmarescaux. Cet amendement vise à ouvrir le droit à compensation à toute personne handicapée, dès lors qu'elle atteint l'âge de dix-huit ans. C'est, en effet, l'âge de la majorité, mais aussi l'âge du permis de conduire et des études supérieures. De nouveaux besoins se font donc sentir et doivent être compensés. Bien entendu, l'accès à la prestation compensatoire à dix-huit ans entraîne la fin des droits à l'AES, sauf à prévoir une double compensation du handicap.
Un amendement de coordination, l'amendement n° 136, sera proposé ultérieurement.
Bien évidemment, cet amendement n'empêche en rien de mener une réflexion approfondie sur une réforme de l'AES, réflexion au demeurant nécessaire.
Cela étant, comme M. Mouly, je me demande si cet amendement n'est pas satisfait par celui du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 113, présenté par M. About, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots : "ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation de l'enfant handicapé" par les mots : "âgée de dix-huit ans". »
La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. Cet amendement a le même objet que l'amendement n° 103 rectifié quinquies.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements présentés par M. P. Blanc, au nom de la commission.
L'amendement n° 7 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, après les mots : "ouverture du droit à l'allocation", insérer les mots : "d'éducation". »
L'amendement n° 8 est ainsi libellé :
« A. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots : "et à un taux d'incapacité permanente au moins égal à un pourcentage également fixé par décret" par les mots : "et dont les besoins de compensation, évalués sur la base de références définies par décret, le justifient" ;
« B. - En conséquence, dans le second alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots : "condition d'incapacité permanente" par les mots : "condition de besoins de compensation". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 7 et 8 et pour donner l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements restant en discussion, à l'exception de ceux qu'elle a elle-même déposés.
M. Paul Blanc, rapporteur. Les amendements n°s 7 et 8 sont des amendements de coordination.
La commission comprend le souci des auteurs de l'amendement n° 181, relatif aux critères d'accès à la prestation. C'est la raison pour laquelle elle propose elle-même de substituer au critère de taux d'invalidité celui des besoins de compensation, et de programmer, sur une période de dix ans, l'élargissement du bénéfice de la prestation aux enfants.
Ces éléments de programmation lui paraissent de nature à concilier à la fois l'exigence d'une mise en oeuvre rapide de la prestation et l'objectif d'un élargissement, à terme, de l'accès à la prestation.
S'agissant du caractère en nature ou en espèces de la prestation, il me semble qu'une prestation de compensation qui vise à prendre en charge les surcoûts particuliers liés au handicap ne peut qu'être une prestation en nature, c'est-à-dire une prestation affectée. Cela ne fait toutefois pas obstacle au versement d'une prestation mensuelle en espèces.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission souhaite le retrait de l'amendement n° 181.
S'agissant de l'amendement n° 295, il est satisfait par l'amendement n° 427 rectifié du Gouvernement.
En ce qui concerne précisément l'amendement n° 427 rectifié, l'extension du bénéfice de la prestation de compensation constitue une mesure particulièrement attendue. La commission se réjouit d'avoir été entendue sur ce point. Elle s'interroge toutefois sur le mécanisme retenu, à savoir l'ajout d'un étage supplémentaire à l'AES, qui complique le dispositif pour les enfants.
Il conviendra vraisemblablement, dans les années à venir, de réfléchir sur une réforme en profondeur de l'AES, voire sur l'abandon des compléments pour intégrer totalement la compensation pour les enfants dans la prestation de compensation. Cet amendement n'en constitue pas moins une avancée incontestable. Sous ces réserves, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Il est évident que l'actuelle AES ne permet pas une compensation satisfaisante du handicap pour les enfants et les jeunes handicapés. Faut-il pour autant passer totalement, pour ces derniers, d'une logique d'aide à la famille à une logique de prestation personnelle ? Je n'en suis pas sûr, tant les besoins de compensation d'un adulte et d'un enfant sont différents et les modalités de réponse à ces besoins plus encore.
Il reste que l'on ne peut, en effet, laisser les familles devant l'absence totale de réponse que constitue le statu quo. Telle est la raison pour laquelle la commission propose une programmation de l'extension au bénéfice de la prestation de compensation. Si une extension pure et simple paraissait, après réflexion, devoir être écartée, le délai de dix ans que la commission propose pourrait être mis à profit pour préparer une réforme en profondeur de l'AES.
J'en viens à l'amendement n° 103 rectifié quinquies.
Il est vrai que la majorité s'accompagne de besoins nouveaux que l'actuelle AES ne permet pas de compenser. Toutefois, il est déjà possible pour un jeune adulte handicapé d'opter, à compter de seize ans, pour le régime de l'AAH et, par voie de conséquence, pour l'attribution de la prestation de compensation dès lors qu'il s'engage dans un processus professionnel.
Sans doute conviendra-t-il de mettre en place, pour ces jeunes adultes, un droit plus général d'option à compter de dix-huit ans, quelle que soit l'orientation qu'ils choisiront. Mais cette option ne peut que s'accompagner de la fin des droits de l'AES.
En 2002, la réforme de l'AES a en effet mis en place six compléments d'allocation attribués en fonction des besoins de l'enfant, notamment en termes d'assistance pour tierce personne. Dès lors, le champ de l'AES et celui de la nouvelle prestation de compensation se recoupent. C'est la raison pour laquelle la commission est favorable, sous réserve de l'adoption de l'amendement de coordination n° 136, à l'amendement n° 103 rectifié quinquies.
La commission est également favorable, évidemment, à l'amendement n° 113.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 181 porte, d'une part, sur les modalités de versement de la prestation, d'autre part, sur les conditions d'âge.
S'agissant des modalités, le fait de préciser qu'il s'agit d'une allocation ayant le caractère d'une prestation en nature ne fait pas obstacle à ce que le bénéficiaire perçoive la prestation sous forme d'espèces. Cette rédaction existe d'ores et déjà pour l'APA et n'interdit nullement à la personne âgée de percevoir un montant en espèces. Pour l'ACTP, l'allocation compensatrice pour tierce personne, rien n'est précisé alors que cette allocation est versée en espèces. Il nous paraît donc préférable de s'en tenir à la rédaction actuelle.
En ce qui concerne les conditions d'âge, le Gouvernement va proposer un amendement permettant l'ouverture aux bénéficiaires de l'AES de la prestation de compensation. En outre, des dispositions sont prévues dans le projet de loi pour que les personnes handicapées avant soixante ans puissent, si elles le souhaitent, conserver le bénéfice de la prestation de compensation après soixante ans.
En revanche, il n'est pas dans l'intention du Gouvernement d'étendre la prestation de compensation au-delà de soixante ans pour une personne qui n'a pas été reconnue handicapée avant cet âge. Nous avons fait ce choix parce que les besoins et les aspirations d'une personne de vingt ans qui se trouve en fauteuil roulant à la suite d'un accident de la route, par exemple, et qui a tout l'avenir devant elle ne sont pas les mêmes que ceux d'une personne âgée. Les perspectives de participation à la vie sociale, la réversibilité éventuelle de la déficience ou de l'incapacité, les besoins en aide ne sont pas les mêmes. Aussi, il ne me semble pas du tout souhaitable de ne pas envisager, à terme, de distinction entre une personne handicapée et une autre qui, par la force des choses, est devenue une personne âgée.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement n° 181.
Sur l'amendement n° 295, il émet le même avis défavorable. Comme je l'ai dit, le fait d'écrire qu'il s'agit d'une allocation ayant le caractère d'une prestation en nature ne fait pas obstacle à ce que le bénéficiaire perçoive la prestation sous forme d'espèces. L'argumentation présentée tout à l'heure est également valable en l'occurrence.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 6. Il est en effet nécessaire de préciser dans la loi la condition de résidence à laquelle est soumise l'attribution de la prestation de compensation.
Quant aux amendements n°s 158 rectifié, 103 rectifié quinquies et 113, ils sont satisfaits par l'amendement du Gouvernement. J'en souhaiterais le retrait, car ils me semblent faire double emploi.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7, qui est rédactionnel.
Enfin, il est défavorable à l'amendement n° 8, qui est, lui aussi, satisfait par l'amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 181.
M. Jean-Pierre Sueur. Il serait vraiment regrettable que cet amendement n° 181 soit rejeté.
En effet, nous ne méconnaissons pas, madame la secrétaire d'Etat, les améliorations que vous proposez, notamment celles qui sont inscrites dans l'amendement n° 427 rectifié. Toutefois, puisque vous avez l'intention d'avancer, finalement, dans le sens proposé par Mme San Vicente et M. Godefroy, il serait tout à fait dommage que vous n'alliez pas plus loin.
Cet amendement n° 181, qui correspond au souhait de nombreuses associations, vise à poser un droit fondamental pour toute personne humaine atteinte d'un handicap quel qu'il soit. La loi prendrait une dimension tout à fait différente si était inscrite, en son coeur, cette déclaration à caractère général et universel.
Je voudrais rappeler que, dans les travaux préparatoires à la réforme qui a permis de créer l'APA, sous Lionel Jospin, il était bien spécifié que cette création, qui représente une réelle avancée, était en quelque sorte un premier pas vers une vision plus globale des choses.
Par ailleurs, Mme la secrétaire d'Etat, lorsque l'on considère la situation des pays européens, on s'aperçoit que beaucoup de ces pays ont mis en place des prestations de compensation prenant en compte l'ensemble des situations de handicap quelles qu'elles soient.
Enfin, madame la secrétaire d'Etat, serait-il normal qu'une personne de cinquante-neuf ans et onze mois soit un adulte handicapé tandis qu'une personne de soixante ans et quelques semaines serait une personne âgée dépendante ? Il y aurait là quelque incongruité ? C'est pourtant ce qui se passera si le texte reste en l'état.
Poser un principe universel s'appliquant quels que soient l'âge, l'origine, la date d'origine du handicap ou les causes de celui-ci constituerait un symbole fort pour l'ensemble de nos concitoyens concernés à un titre ou à un autre.
Le refuser serait passer à côté de la grande innovation que peut apporter ce texte.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 181.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 295.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, la commission vient de me faire savoir qu'elle a transformé son amendement n° 6 en sous-amendement n° 6 rectifié à l'amendement n° 427 rectifié.
Ce sous-amendement est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de l'amendement n° 427 rectifié pour l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, après les mots : "personne handicapée", insérer les mots : ", remplissant les conditions prévues à l'article L. 380-1 du code de la sécurité sociale, et". »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 6 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il me semble que l'amendement du Gouvernement pourrait être amélioré pour être plus cohérent.
M. Jean-Pierre Sueur. Quelle sollicitude !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous sommes ici pour améliorer le texte !
Il faudrait, dans la première partie...
M. Gilbert Chabroux. C'est du travail de commission !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pas du tout, ce travail doit se faire en séance, en présence du Gouvernement.
Il me semble donc nécessaire de supprimer, dans le deuxième alinéa de l'amendement, les mots : « ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation prévue à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale », puisqu'il est dit le contraire à l'alinéa suivant.
Il suffit ensuite de compléter l'alinéa par les mots : « Toutefois, pour les personnes bénéficiaires de l'allocation mentionnée à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale - c'est-à-dire l'AES -, l'allocation de compensation viendra en complément de l'allocation d'éducation. »
Cela signifie que toute personne handicapée a droit à la compensation en dessous d'un certain âge, mais que les plus jeunes, qui sont naturellement confiés à leur famille, ont droit, en plus de l'allocation d'éducation spéciale, à une prestation de compensation en fonction de leurs contraintes spécifiques.
En tout cas, on ne peut pas les faire sortir du dispositif dans le premier alinéa pour les y réintégrer dans le second.
M. Gilbert Chabroux. Oui !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est une question de cohérence.
M. Gilbert Chabroux. Tout cela a été fait un peu vite !
M. le président. Madame la secrétaire d'Etat, acceptez-vous de rectifier l'amendement dans le sens souhaité par la commission ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est très réservé sur cette proposition. En effet, la rédaction présentée par M. About dénature l'esprit de notre amendement. La question mérite donc une plus ample réflexion.
L'allocation d'éducation spéciale pour les enfants a été revue il y a moins de deux ans ; elle comprend une allocation de base et six compléments, selon le handicap. Nous avons compris, à la suite d'échanges que nous avons eus, entre autres, avec votre commission, que cette allocation d'éducation spécialisée était insuffisante...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On n'y touche pas !
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. ... et instaurait un traitement différencié par rapport aux adultes, aux dépens des enfants.
Nous avons décidé de la garder, ce qui ne veut pas dire que l'on ne reverra pas la question dans les années à venir pour aboutir à une unification.
Pour le moment, soyons réalistes, gardons cette allocation en l'état et, à partir d'elle, ouvrons la possibilité d'une compensation complémentaire pour les enfants !
Tel est exactement l'esprit de l'amendement du Gouvernement. Pour ce qui est de la rédaction proposée par le président de la commission des affaires sociales, je souhaiterais que nous l'étudiions de façon plus approfondie.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je demande une brève suspension de séance.
M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur le président de la commission.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-neuf heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon rappel au règlement se fonde sur l'ensemble du règlement du Sénat, sur les conditions de travail de la Haute-Assemblée et peut-être aussi sur l'attention due à l'ensemble des membres du Sénat ainsi qu'à ceux, nombreux parmi les représentants des associations des personnes handicapées, qui nous font l'honneur et l'amitié de suivre nos débats.
Monsieur le président, vous avez suspendu la séance pour cinq minutes. Or cela fait trente-cinq minutes...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le temps passe vite...
M. Jean-Pierre Sueur. ... que s'affichent sur tous les téléviseurs du Palais l'indication suivante : « La séance est suspendue pour quelques instants. »
Ce dysfonctionnement nous paraît être le signe manifeste de l'état d'impréparation de ce texte. Il y a beaucoup d'improvisation - c'est le moins que l'on puisse dire -, puisque M. le président de la commission, pensant venir au secours du Gouvernement, s'est proposé, par deux sous-amendements improvisés dont vous avez dû noter le texte de votre plume, monsieur le président,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est souvent le cas !
M. Jean-Pierre Sueur. ... d'améliorer le texte du Gouvernement. Mais Mme la secrétaire d'Etat a considéré qu'il ne s'agissait nullement d'une amélioration et que cela était inapplicable.
Tout le monde peut donc constater que la confusion est grande ! On sent une volonté de faire adopter ce texte alors que, finalement, le manque de préparation va empêcher ce dernier de devenir la grande loi fondatrice des droits nouveaux attendue par tous.
Peut-être faut-il en tirer tout simplement les conséquences et en revenir aux sages préconisations de notre collègue et ami Gilbert Chabroux, qui nous incitait hier, en défendant une motion de renvoi à la commission, à prendre un peu plus de temps pour terminer l'élaboration de ce texte afin d'en faire la grande loi que nous espérons et attendons ?
M. le président. Monsieur Sueur, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
Je vous rappelle néanmoins que le problème a été tranché cette nuit puisque la motion de renvoi à la commission n'a pas été adoptée par le Sénat.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout d'abord, je regrette cette polémique sur un tel sujet. Le Gouvernement a déposé un amendement et demande le retrait des autres amendements. C'est logique et nous devons en discuter.
Je trouve le propos de M. Sueur un peu fort de café ! Lors de l'examen de chaque texte, nous entendons les sénateurs de l'opposition déplorer l'absence de débat, considérant qu'ils ont été les seuls à s'exprimer ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Michelle Demessine. Pas cette fois-ci !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. M. Chabroux nous fait le coup sur chaque texte ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Gilbert Chabroux. Sur le dialogue social !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. « Où est l'UMP ? Où est l'Union centriste ? », entendons-nous régulièrement.
Mme Michelle Demessine. Cette fois-ci, c'est bien !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Là, il y a quelqu'un ! Nous discutons !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous attendons ! Trente-cinq minutes de suspension...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. J'arrête la polémique, car elle n'a aucun intérêt face à des problèmes aussi graves ! (Exclamations sur les travées sur groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Michelle Demessine. Il ne fallait pas commencer !
M. Guy Fischer. Nous pouvons le faire aussi !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Là-dessus, je vous fais confiance !
M. Roland Muzeau. Nous n'arriverons pas à votre cheville, mais nous essaierons... (Rires.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous sommes d'accord avec le Gouvernement sur le fond. Cependant, une bonne rédaction s'impose, car il s'agit d'un point essentiel.
Monsieur le président, je demande donc la réserve de l'article 2 jusqu'à la fin du titre II, afin d'affiner la rédaction pendant l'heure du dîner.
M. Gilbert Chabroux. Il va encore nous falloir travailler en mangeant... (Sourires.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pour nous, c'est la règle, monsieur Chabroux ! (Nouveaux sourires.) Mais le Gouvernement travaillera aussi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de réserve ?
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. Avis favorable, monsieur le président.
M. le président. La réserve est ordonnée.