compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Bernard Angels

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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CANDIDATURE À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein du Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire.

La commission des affaires économiques a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. François Gerbaud pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

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assistants maternels et assistants familiaux

Discussion d'un projet de loi

 
Dossier législatif : projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 201, 2003-2004), relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux. [Rapport n° 298 (2003-2004).]

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureuse d'exposer devant vous les grandes lignes du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

Vous connaissez parfaitement, chacune et chacun d'entre vous, ces métiers dont l'utilité sociale est unanimement reconnue, qu'il s'agisse de l'accueil des enfants dont les parents travaillent dans la journée, ou de l'accueil permanent d'enfants confrontés à des difficultés sociales et placés à titre permanent, généralement par le service de l'aide sociale à l'enfance.

Quelques chiffres suffisent à prendre la mesure de cette activité : ce sont environ 740 000 enfants de moins de six ans, dont près de 500 000 de moins de trois ans, qui sont aujourd'hui accueillis par près de 300 000 assistants maternels à titre non permanent. C'est plus du double qu'en 1992, date de la dernière réforme de leur statut.

A côté des structures d'accueil collectif - crèches, haltes-garderies, jardins d'enfants -, de la garde au domicile des parents, des centres de loisirs maternels et des accueils périscolaires après la classe, ces professionnels contribuent au premier chef aux politiques locales d'accueil des jeunes enfants. Cette forme d'accueil est devenue indispensable dans notre société, où, parmi les enfants de moins de six ans, près de six sur dix vivent dans une famille où les deux parents travaillent.

Dans le champ de la protection de l'enfance, 65 000 enfants étaient accueillis, en 2002, par environ 42 000 assistantes maternelles à titre permanent. Celles-ci demeurent le mode d'accueil privilégié des enfants séparés de leur famille puisqu'elles représentent 55 % de l'ensemble des mesures d'hébergement.

Je voudrais aussi replacer ce projet de loi dans le cadre de la politique volontariste destinée à améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle que mène le Gouvernement depuis maintenant deux ans.

Cette politique repose sur deux piliers. Il s'agit, tout d'abord, d'améliorer l'accès des familles aux différents modes d'accueil, notamment aux modes d'accueil individuels, dont les familles à bas et à moyens revenus étaient de fait jusqu'à présent exclues : c'est le sens de la création, au 1er janvier 2004, du complément de libre choix du mode de garde de la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant.

Cette prestation revalorise très fortement les montants d'aide accordés aux parents qui ont recours à une assistante maternelle et permet de faire converger la participation des familles vers un taux d'effort de l'ordre de 12 % de leurs revenus correspondant à l'accueil en crèche. Cela signifie concrètement, par rapport au dispositif antérieur, une aide supplémentaire de la branche famille de 150 euros par mois pour les parents ayant un revenu inférieur à trois Smic, soit une augmentation de 75 %.

Cette mesure est en cours de mise en oeuvre. Elle témoigne de la volonté du Gouvernement de mettre concrètement en oeuvre un principe d'équité sociale pour l'ensemble des familles face aux charges générées par les contraintes matérielles de la garde des enfants.

Permettre l'accès des familles au mode d'accueil de leur choix nécessite également de développer l'accueil collectif, qui reste très concentré dans les grandes agglomérations et qui est loin de répondre aux demandes des parents. C'est tout l'objet du « plan crèches » que je viens de lancer avec la CNAF, la Caisse nationale des allocations familiales, financé à hauteur de 200 millions d'euros, qui permettra la création de 20 000 places supplémentaires d'ici à 2007.

Le développement de l'offre d'accueil individuel est également au coeur des préoccupations du Gouvernement et constitue le deuxième pilier de cette politique. Il s'agit d'améliorer et de promouvoir la qualité de l'accueil des enfants, ainsi que l'intégration professionnelle des accueillants.

Certes, les qualités de coeur, de générosité, de patience des assistants maternels à l'endroit des tout-petits accueillis dans la journée ou des enfants, dont l'histoire personnelle est souvent très lourde, intégrés durablement dans la famille sont essentielles. Je veux ici rendre solennellement hommage à ces femmes - car ce sont presque toujours des femmes - qui assument le rôle, trop souvent méconnu, d'assurer la continuité d'attention, d'affection et de disponibilité lorsque les parents sont provisoirement absents ou d'élargir leur propre famille aux enfants qui ne peuvent grandir dans la leur.

Je souhaite aussi que les assistants maternels soient reconnus comme des professionnels à part entière qui délivrent un service de qualité au bénéfice des enfants accueillis. Car c'est aussi la condition du développement de ces métiers.

Cette meilleure reconnaissance comporte deux volets.

D'abord, la professionnalisation des métiers de l'accueil individuel suppose de bien distinguer l'assistant maternel stricto sensu, qui assure l'accueil non permanent, et l'assistant familial, qui assure l'accueil permanent d'enfants. Cela suppose notamment de préciser les modalités d'agrément et de renforcer les exigences de formation.

Ensuite, en revalorisant le statut des assistants maternels, il s'agit de faire converger les droits de ces professionnels vers le droit commun chaque fois que cela sera possible, tout en maintenant le caractère dérogatoire de certaines dispositions dès que la spécificité du métier et l'intérêt de l'enfant le rendront nécessaire. De nouveaux droits leur sont ainsi reconnus, notamment en matière de rémunération, de temps de travail, de projets ou de protection en cas de licenciement.

Telle est la logique de ce projet de loi, qui, je le souligne, a fait l'objet d'une concertation longue et approfondie et qui s'inspire très largement des conclusions des groupes de travail réunis par les services du ministère chargé de la famille en 2002.

Toutes ces propositions ont été discutées avec une vingtaine d'organisations syndicales ou professionnelles représentant les assistantes maternelles et leurs employeurs, la Caisse nationale des allocations familiales, l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France.

Le projet de loi vise à améliorer la qualité de l'offre d'accueil et à répondre aux besoins par des compétences mieux définies.

Actuellement, l'accueil d'enfants au domicile ne fait pas l'objet d'une reconnaissance distincte en tant que métier selon qu'il concerne les jeunes enfants de parents qui travaillent pendant la journée, ou bien qu'il constitue un mode de suppléance parentale permanente pour des jeunes reconnus en difficulté et confiés à des familles par l'aide sociale à l'enfance.

Or il s'agit bien de deux métiers fondamentalement différents. C'est pourquoi l'appellation « assistant maternel » sera réservée aux professionnels de l'accueil non permanent, qui accueillent principalement des enfants âgés de moins de six ans, avec un objectif de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle des parents.

Sera désormais attribuée l'appellation « assistant familial » aux professionnels qui ont pour fonction d'intégrer de façon permanente, dans leur propre famille, des enfants ou des adolescents - parfois même au-delà de leur majorité - qui ont été séparés de leur famille pour des raisons graves, le cas échéant pour des raisons de maltraitance ou parce que les parents sont dans l'incapacité de s'acquitter de leurs responsabilités éducatives.

L'assistant familial doit répondre aux besoins psychiques, éducatifs ou sanitaires de ces jeunes. Il s'agit donc bien d'un autre métier, exercé dans le cadre d'une équipe pluridisciplinaire qui associe éducateurs, assistants sociaux et psychologues.

Mieux distinguer ces deux professions répond d'ailleurs à une demande forte des professionnels concernés. Cela permet également de prendre des dispositions adaptées à chacun de ces métiers en vue d'améliorer l'accueil des enfants, ce qui constitue le premier objectif de ce projet de loi.

La qualité de ce service sera améliorée par un renforcement spécifique sur quatre points : l'agrément des professionnels, en particulier des assistants maternels ; le renforcement du contrôle des assistants maternels et des familles d'accueil, mais aussi de l'accompagnement et du soutien sur lesquels ils doivent pouvoir compter - notamment pour les assistants familiaux - en raison de la difficulté des enfants accueillis ; les modalités et le niveau de la formation initiale et continue des assistants maternels et des assistants familiaux ; enfin, l'accompagnement des professionnels dans la prise en charge des enfants et l'amélioration des relations entre les parents - s'agissant des assistants maternels - et des professionnels de l'enfance.

Le premier point est l'agrément, porte d'entrée aux métiers d'assistant maternel et d'assistant familial.

Aux yeux des parents, qui confient souvent avec inquiétude ce qu'ils ont de plus précieux, leurs enfants, bien souvent lorsque ceux-ci sont très jeunes, l'agrément des assistants maternels constitue une garantie de sérieux et de sécurité.

De la même manière que les crèches, qui doivent depuis 2000 élaborer un projet éducatif, les candidats au métier d'assistant maternel seront agréés aussi au vu de leurs capacités éducatives. C'est une précision utile du projet de loi.

Cet agrément continuera à être limité dans le temps, pour une durée qui sera fixée réglementairement à cinq ans. Il définira précisément le nombre et l'âge des mineurs que l'assistant maternel sera autorisé à accueillir. L'agrément pour un nombre d'enfants accueillis simultanément opéré par la loi du 2 janvier 2004 est naturellement repris par le présent projet de loi.

Le Gouvernement verra, à la lumière de vos propositions et de vos amendements, mesdames, messieurs les sénateurs, s'il y a lieu de fixer une limite supplémentaire au nombre d'enfants pouvant être accueillis : il faut éviter que ce mode de garde ne se transforme, pour les assistants maternels, en une forme de baby-sitting à temps partiel répété.

Je précise que les assistants familiaux continueront à faire l'objet d'un agrément plafonnant également à trois le nombre d'enfants accueillis.

Pour ces deux professions, le président du conseil général aura cependant la possibilité de déroger à cette règle de plafonnement lorsqu'il lui apparaîtra qu'elle doit être adaptée à des besoins spécifiques, notamment à l'accueil de fratries ou à l'accueil intermittent d'enfants confiés à d'autres assistants familiaux, pendant les périodes de congés.

A la différence de ce qui se pratique aujourd'hui, l'agrément des assistants familiaux sera à durée non limitée, dans la mesure où ils auront satisfaits à un diplôme venant sanctionner une formation initiale.

Les conditions d'octroi de l'agrément seront rendues plus objectives : un formulaire unique sera défini à l'échelon national afin d'harmoniser les exigences des départements en direction des candidats et, surtout, afin de limiter l'intrusion dans la vie privée de personnes sans lien avec les exigences de la profession.

Le deuxième point est un meilleur contrôle des conditions de prise en charge et un meilleur accompagnement des accueillants. Agréés suivant des critères plus adaptés à leur responsabilité réelle, les assistants maternels devront aussi être mieux contrôlés.

Le projet de loi pose le principe d'un contrôle administratif par les conseils généraux des assistants maternels. Les modalités en seront définies par voie réglementaire. Il s'agira, par exemple, de l'obligation pour l'assistant maternel d'envoyer certaines informations au service de protection maternelle et infantile, ou de tenir à jour des plannings d'accueil pouvant être mis à sa disposition, sur demande.

Le troisième point est l'amélioration de la formation, élément essentiel de la revalorisation de ces professions. Cela faisait l'objet de demandes.

A l'heure actuelle, plus personne ne considère qu'être mère suffise à conférer les compétences nécessaires pour assurer l'accueil, les soins, les activités éducatives ou d'éveil, auprès d'enfants d'autres parents.

MM. Jean Chérioux et Charles Revet. Mais c'est tout de même essentiel !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela peut aider si on a élevé les siens !

Mme Marie-Josée Roig, ministre. Certes, mais ce n'est pas une condition suffisante !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai : on élève les enfants des autres plus difficilement que les siens !

Mme Marie-Josée Roig, ministre. En 1992, l'instauration d'une obligation de formation de soixante heures dans un délai de cinq ans suivant l'attribution de l'agrément avait constitué une avancée certaine.

Le projet de loi pose le principe de l'obligation de formation des assistants maternels pour partie avant tout accueil d'enfants. C'était une attente légitime des parents et un besoin légitimement exprimé par les assistants maternels.

Pour les nouveaux professionnels, il est en effet indispensable que cette formation vienne plus tôt dans le déroulement de l'exercice professionnel. Les premiers enfants accueillis auront ainsi les mêmes garanties que les autres en termes de sécurité minimale d'accueil, ce qui est bien le moindre !

Des travaux sont en cours sous l'égide du ministère de l'éducation nationale afin d'articuler cette formation obligatoire, dont la durée sera par ailleurs augmentée, avec un CAP petite enfance réformé.

Mieux formés pour mieux accueillir, les assistants maternels pourront ainsi être mieux reconnus et évoluer plus tard et plus facilement, s'ils le souhaitent, vers d'autres qualifications et vers d'autres secteurs d'activité, comme l'accueil collectif ou l'école maternelle.

Je souligne également que, depuis l'adoption définitive, il y a quelques semaines, de la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, les assistants maternels employés par des particuliers ont désormais accès à la formation professionnelle continue, alors qu'ils en étaient préalablement exclus. Par ailleurs, l'ouverture progressive des diplômes et des qualifications à la validation des acquis de l'expérience favorisera, avantage considérable, la professionnalisation en cours d'activité.

En ce qui concerne les assistants familiaux, ils ont actuellement l'obligation de suivre une formation minimale, d'une durée de cent vingt heures, dans les trois ans suivant le premier contrat de travail consécutif à l'agrément. Désormais, ils bénéficieront d'une formation en deux temps, plus cohérente avec les fortes exigences des enfants, souvent psychologiquement déstabilisés, qu'ils accueillent.

Tout d'abord, dans les deux mois qui précèdent l'accueil du premier enfant au titre du premier contrat de travail, ils bénéficieront d'un stage préparatoire à l'accueil d'enfants organisé par leur employeur durant lequel ils seront indemnisés.

Ensuite, dans les trois ans après le premier contrat de travail, ils devront suivre une formation adaptée aux besoins spécifiques des enfants accueillis. Cette formation devrait déboucher sur un diplôme accessible, soit par les épreuves de certification, soit, notamment pour les personnes en activité depuis longtemps et ayant suivi la formation de cent vingt heures instituée par la loi de 1992, par la voie de la validation des acquis de l'expérience.

Là encore, il me paraît absolument indispensable que les accueillants de jeunes ayant vécu des situations difficiles soient pleinement formés à l'exercice, au quotidien, de leurs lourdes responsabilités.

Le quatrième point est l'accompagnement et le soutien des assistants maternels et familiaux, ainsi que la régulation de leurs relations avec leurs employeurs.

Les assistants familiaux ont besoin d'être soutenus et accompagnés dans la prise en charge des enfants qui leur sont confiés, en particulier lorsque ceux-ci rejouent dans leur famille d'accueil les troubles graves résultant de leur histoire familiale.

Le projet de service de l'aide sociale à l'enfance qu'il vous est proposé d'inscrire dans la loi, mesdames, messieurs les sénateurs, permettra de préciser les conditions du placement familial et d'intégration des assistants familiaux dans l'équipe qui sera chargée du suivi du jeune. Il s'agit là de garantir aux assistants familiaux qu'ils ne seront pas seuls pour exercer des missions auxquelles ils seront confrontés en accueillant chez eux des enfants en grande difficulté.

Quant aux assistants maternels, par leur activité, ils sont quotidiennement confrontés à des difficultés imprévues et à des interrogations sur leurs pratiques, notamment dans leurs relations avec les familles.

Les commissions départementales de l'accueil des jeunes enfants, les CDAJE, qui réunissent l'ensemble des acteurs concernés, ont tout à fait vocation à réfléchir sur les modalités d'accompagnement des assistants maternels et à les organiser. Les relais assistants maternels, les RAM, aussi bien que les services de protection maternelle et infantile, les communes et les associations peuvent y contribuer. Tout assistant maternel, où qu'il se trouve, doit pouvoir bénéficier du soutien de professionnels de la petite enfance, sans jugement a priori sur son travail.

Toutes ces mesures ont donc pour objet de donner des garanties supplémentaires aux parents qui font appel à une offre familiale de garde, ainsi qu'aux départements qui ont la responsabilité de trouver des familles d'accueil pour des enfants ou des adolescents en souffrance. Elles ont aussi pour objet de donner un cadre plus professionnel à une activité caractérisée par les exigences croissantes des parents et - peut-être même surtout - par les besoins de plus en plus complexes des enfants accueillis.

Le deuxième volet de ce projet de loi est parallèlement d'apporter à ces professionnels des améliorations aux conditions de travail en tenant compte du caractère très particulier de leur activité.

Notre souci a été de donner un cadre juridique et statutaire à la fois souple et plus protecteur aux assistants maternels et familiaux. Le droit du travail qui leur est applicable est aujourd'hui largement dérogatoire au droit commun.

Le Gouvernement est animé par le souci d'apporter des améliorations concrètes à leur situation professionnelle sans pour autant porter atteinte au maintien de la spécificité de ces formes d'accueil. Ces améliorations donnent lieu à des dispositions qui peuvent se traduire, soit par un rapprochement avec le droit commun chaque fois que c'est pertinent, soit par des dérogations au droit commun lorsque celui-ci ne suffit pas à régler les problèmes rencontrés.

S'agissant des assistants maternels, les améliorations du droit du travail s'articulent autour de trois axes : le contrat de travail, la rémunération, ainsi que la durée du travail et les congés.

Le premier axe est l'obligation d'un contrat de travail écrit. C'est une nouveauté qui donne plus de poids à ce contrat. Pour la première fois, les assistants maternels et leurs employeurs - point particulièrement important lorsque les employeurs sont les parents - disposeront d'un document, juridiquement opposable, précisant leurs droits et leurs devoirs respectifs. Cette formalisation sera un instrument de transparence qui permettra de mieux prévenir et régler les éventuels conflits. Les caractéristiques minimales du contrat de travail seront fixées par décret.

S'agissant toujours des assistants maternels et de leurs employeurs lorsqu'il s'agit de particuliers, le projet de loi prévoit également qu'en cas de rupture du contrat de travail par l'une ou l'autre des parties, la durée du préavis sera augmentée. S'agissant des assistants maternels de crèches familiales, la procédure de licenciement sera calquée sur celle du droit commun.

En cas de retrait de l'agrément et, pour les assistantes maternelles employées par des particuliers, en cas de suspension de celui-ci, le contrat de travail sera rompu, ce qui permettra de mettre fin à des situations de non-droit.

Le deuxième axe vise à sécuriser la rémunération.

De ce point de vue, le projet de loi apporte aussi des améliorations substantielles.

Les assistants maternels souffrent aujourd'hui de ne pas avoir de visibilité sur leur niveau de rémunération : actuellement une rémunération n'est due que lorsque l'enfant est effectivement présent, et non pas dès que l'assistant maternel s'est rendu disponible pour l'accueillir, ce qui est tout de même quelquefois source de conflit. Elle n'existe pas lorsque l'enfant est absent pour raison médicale ; elle est réduite de moitié lorsque l'absence est occasionnée par un autre motif.

Avec le projet de loi, toutes les heures prévues seront rémunérées, quel que soit le motif de l'absence : seule l'absence pour raison médicale sera rémunérée à mi-taux, sur la présentation d'un certificat médical. Il s'ensuit que la rémunération des assistants maternels sera beaucoup plus régulière qu'aujourd'hui.

La rémunération des assistants maternels se trouvera également définie en référence à une unité de temps au lieu de la journée, de manière à pouvoir facilement, dans un second temps et par voie réglementaire, évoluer d'une rémunération journalière à une rémunération horaire qui assurera sans nul doute une plus juste reconnaissance du travail effectif.

J'en profite d'ailleurs pour rappeler que les assistants maternels bénéficient d'une hausse mécanique de plus de 11% entre juillet 2003 et juillet 2005, au titre de l'harmonisation des SMIC.

S'agissant des assistants familiaux, la structure de leur rémunération est redéfinie, afin qu'elle ne soit plus uniquement liée au nombre d'enfants accueillis. Il s'agit d'une évolution importante. La rémunération sera, en effet, construite en deux parties : d'une part, la rémunération de la fonction globale d'accueil, c'est-à-dire la disponibilité requise indépendamment du nombre et des jours de présence des enfants, et, d'autre part, la rémunération liée à l'accueil de chaque enfant.

Une autre disposition entièrement nouvelle, applicable aux assistants familiaux et aux assistants maternels employés par des personnes morales, vise à résoudre le devenir du contrat de travail en cas de suspension d'agrément. En pratique, un certain nombre de suspensions d'agrément interviennent dans des situations où sont suspectés, mais non avérés, des faits de maltraitance à l'égard des enfants accueillis.

Il sera ainsi créé un régime de suspension des fonctions d'accueil pendant le temps de la suspension d'agrément, pour une durée maximale de quatre mois. Pendant cette période, le professionnel percevra un minimum de rémunération. Il est ainsi mis fin à un vide juridique qui conduisait à une absence totale de protection des salariés dans des situations qui étaient humainement difficiles.

Dans le droit applicable aux assistants familiaux, il existe également un dispositif dit « d'attente » permettant de maintenir le contrat de travail d'un assistant familial qui n'accueille plus d'enfants moyennant le versement d'une indemnité et dans l'attente de la réalisation d'un nouveau placement. Ce dispositif permet de tenir compte du caractère aléatoire des besoins d'accueil d'enfants et de la nécessité de respecter une adéquation entre le profil d'un enfant et celui de l'assistant familial qui le prendra en charge.

L'organisation actuelle de ce dispositif était source de précarité pour les assistants familiaux, en raison en particulier du faible niveau auquel est fixé le plancher de l'indemnité. Il est donc prévu de revaloriser ce plancher de manière à inciter les employeurs à mieux réguler l'activité de leurs assistants familiaux. Les conditions de licenciement à l'issue de la période d'attente, prolongée d'un mois pour mieux répondre aux aléas des besoins d'accueil, sont également clarifiées.

Le troisième axe de l'amélioration des conditions de travail des assistants maternels concerne le temps de travail.

Aujourd'hui, les assistants maternels ne sont soumis à aucune disposition limitant leur durée de travail et leur garantissant un repos hebdomadaire et quotidien. Or, si les caractéristiques de leur activité et les besoins auxquels elles répondent rendent impossible un alignement complet sur le droit commun du travail, elles ne justifient pas pour autant l'absence de toute règle, ce qui serait source d'abus possibles de certains employeurs et de conflits inévitables avec les assistants maternels.

Le présent projet de loi permet de faire bénéficier les assistants maternels, comme tous les salariés, de durées minimales de repos quotidien et hebdomadaire, celles du droit commun du travail, ainsi que d'une durée maximale du travail ne pouvant être dépassée sans leur consentement.

Ainsi, les assistants maternels pourront bénéficier d'un repos quotidien de onze heures par jour et d'un repos hebdomadaire de trente-cinq heures, comme le prévoit le droit commun. Par ailleurs, ils ne pourront être employés plus de quarante-huit heures par semaine sauf avec leur accord.

Ces dispositions permettront de concilier la nécessité d'assurer une amplitude élargie pour répondre aux besoins d'accueil des parents et celle de protéger les professionnels et les enfants qui leurs sont confiés du risque d'une exigence d'horaires d'accueil excessifs.

Ces seuils et les modalités retenus tiennent compte des obligations européennes et du souci de préserver à ce mode d'accueil la souplesse qui lui vaut la faveur des parents.

S'agissant des congés, il a fallu au contraire s'éloigner du droit commun pour tenir compte de la situation spécifique dans laquelle des assistants maternels sont salariés de plusieurs particuliers. Désormais, à défaut d'accord avec les parents, les assistants maternels pourront fixer eux-mêmes la date de leurs congés. Cette disposition permettra de leur garantir des congés effectifs sans enfant.

Là encore, au-delà de l'amélioration légitime des conditions de vie des professionnels, ce temps de repos ne peut qu'être favorable à une meilleure qualité d'accueil.

Le financement du remplacement des assistants maternels employés par des personnes morales et des assistants familiaux sera assuré en cas de mandat syndical ou de mandat de représentant du personnel.

Enfin, une disposition commune aux deux professions leur rend applicables les textes du code du travail sur la protection contre le harcèlement et les discriminations.

Le droit aux congés des assistants familiaux sera, lui aussi, modifié afin de leur permettre de bénéficier d'un minimum effectif de jours de congés annuels et de journées à répartir dans l'année, ce qui n'est pas actuellement le cas. Obligation sera donc faite aux employeurs d'organiser des accueils de remplacement pour les enfants, pendant les temps correspondant à des congés de leurs assistants familiaux, et ce en veillant à ce que ces solutions de remplacement soient de qualité.

Ces importantes améliorations devraient par ailleurs être complétées, pour les assistants maternels employés par des particuliers, par de nouveaux droits dans le cadre d'une convention collective nationale qui est en cours de négociation par les partenaires sociaux. Cette convention collective pourra comporter des dispositions supérieures à ce que la loi prévoit de faire fixer par voie réglementaire.

Enfin seront créés un fonds commun d'aide au fonctionnement du paritarisme visant à assurer la gestion de la future convention collective des assistants maternels et ses modalités d'évolution et un fonds de prévoyance santé et accidents du travail.

Le premier sera financé par une contribution des employeurs et le second par une cotisation reposant à la fois sur les employeurs et les assistants maternels.

La création de ces fonds relève entièrement de la future négociation collective.

Le Gouvernement a cherché à apporter des réponses visibles, concrètes et justes aux attentes des professionnels, mais aussi des parents qui recourent aux prestations de ces professionnels. Il l'a fait aussi avec le souci du réalisme : celui de ne pas alourdir exagérément les coûts pour les familles, les communes, les conseils généraux ou la branche famille de la sécurité sociale.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela va être lourd quand même !

Mme Marie-Josée Roig, ministre. C'est notamment la raison pour laquelle il a renvoyé à des textes réglementaires certaines dispositions comme les rémunérations plancher des assistants maternels et familiaux.

Bien entendu, cette réforme aura un coût et comme chaque fois qu'il y a un coût, il est légitime que chacun y prenne part.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Surtout l'Etat !

Mme Marie-Josée Roig, ministre. S'agissant de la formation continue des assistants maternels employées par des particuliers, dont le bénéfice vient d'être ouvert par la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie, elle sera financée par une contribution des particuliers employeurs. Cette contribution, dont le coût est évalué entre 4 et 5 millions d'euros en année pleine, sera intégralement prise en charge par la branche famille de la sécurité sociale, dans le cadre de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, l'AFEAMA, et du complément de mode de garde de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE.

Ceux qui sont employés par des crèches familiales occupant moins de dix salariés bénéficieront, grâce à cette réforme, de la formation professionnelle continue. La contribution due par les employeurs sera partiellement prise en charge par la CNAF sur son fonds d'action sociale et par les communes en tant qu'employeur ou responsable du financement de ces crèches.

Au total, la branche famille participera à hauteur de plus de 50 millions d'euros au financement des améliorations des droits des assistants maternels employés par des particuliers.

Les départements aussi devront faire un effort, s'agissant notamment des mesures visant à améliorer la formation des assistants maternels et familiaux. Cependant, je voudrais souligner que les dispositions transitoires prévues permettent d'alléger les obligations de formation pour les professionnels qui seraient déjà agréés. Ainsi, pour les assistants maternels agréés avant la mise en oeuvre du décret fixant les nouvelles modalités de formation, les conseils généraux, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, devront assurer seulement soixante heures de formation dans un délai de cinq ans suivant l'attribution de l'agrément, dont vingt au cours des deux premières années.

Quant aux assistants familiaux en cours de formation à la date de publication de la loi, ils seront simplement tenus de suivre une formation minimale de cent vingt heures.

Tels sont les principaux axes de ce projet de loi très attendu par les professionnels concernés et qui, je pense, marquera, après les lois de 1977 et de 1992, une étape très importante dans la promotion des métiers de l'enfance.

Mesdames, messieurs les sénateurs, en donnant à ces professions la reconnaissance et la crédibilité qu'elles méritent, vous ne ferez pas seulement droit à de légitimes attentes, vous contribuerez également à structurer un secteur de services devenu indispensable pour un grand nombre de parents. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui tente de concilier deux exigences qui ne paraissent pas toujours compatibles actuellement : d'une part, aider les familles à faire garder leurs enfants dans de bonnes conditions de sécurité et d'épanouissement ; d'autre part, professionnaliser ceux qui remplissent cette mission.

Ce projet de loi établit une nette distinction entre les assistants maternels et les assistants familiaux. Ces deux métiers sont pourtant confrontés à une même exigence de revalorisation, laquelle passe notamment par une meilleure définition de leurs conditions de travail et de rémunération.

Force est de constater d'emblée qu'il existe des besoins importants en matière d'accueil non permanent des jeunes enfants et qu'il est difficile de trouver des familles acceptant de recevoir des mineurs confiés par l'aide sociale à l'enfance.

Je tiens à souligner également en préambule que l'intérêt des enfants gardés ou placés doit toujours demeurer au coeur de notre débat : quels que soient les textes et les mesures que nous évoquons, ce doit être notre priorité absolue.

M. Jean Chérioux. Très bien ! C'est effectivement essentiel.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Les assistants maternels, qui sont presque toujours des assistantes - mais le Conseil d'Etat nous oblige à employer le masculin alors que, par ailleurs, on féminise toutes les dénominations de profession ou de fonctions, ce qui prouve que la cohérence n'est pas toujours là où l'on est en droit de l'attendre -...

M. Alain Gournac. C'est un peu bizarre, en effet !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. ... sont ces personnes qui gardent des enfants à la journée pendant les heures de travail de leurs parents.

Les familles privilégient ce mode de prise en charge, qui concerne 20 % des 2,3 millions d'enfants de moins de trois ans : plus de 480 000 d'entre eux sont gardés, à temps plein ou à temps partiel, par 265.000 assistants maternels travaillant à domicile et par 25 600 employés au sein d'une crèche familiale, tous étant agréés par le service départemental de la protection maternelle et infantile, la PMI.

Avec l'amélioration progressive de l'ancienne AFEAMA, l'allocation de garde par un assistant maternel, et surtout avec la création de la PAJE par la dernière loi de financement de la sécurité sociale, l'accueil par un assistant maternel est financièrement intéressant pour les familles. Il constitue une solution intermédiaire attractive entre la crèche et la garde à domicile par une employée. C'est aussi le système le moins coûteux pour la collectivité.

En outre, ce mode de garde présente l'avantage de s'adapter aux horaires de travail des parents, horaires qui n'ont cessé d'évoluer ces dernières années.

M. Jean-Pierre Godefroy. Notamment le travail le dimanche dans la grande distribution !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Cependant, l'offre de garde par assistant maternel est aujourd'hui insuffisante dans certaines régions, notamment en Ile-de-France et en PACA, et beaucoup d'assistants maternels peinent à répondre aux souhaits des parents. Face à cette situation, madame la ministre, la concertation lancée par votre prédécesseur, M. Christian Jacob, a associé toutes les professions et tous les syndicats intéressés pour essayer de résorber les difficultés et d'améliorer le dispositif inhérent aux assistants maternels.

S'agissant de la profession d'assistant familial, le nombre des candidats est aujourd'hui largement insuffisant. A l'heure actuelle, 46.800 assistants familiaux sont en activité auprès de 65.000 enfants et ce mode d'accueil représente 55 % des placements d'enfants. Les enfants concernés, placés dans 90 % des cas sur décision de justice, sont souvent issus de foyers en difficulté et présentent donc eux-mêmes des difficultés personnelles. Ainsi, désormais, les assistants familiaux se voient confier des « cas » que les établissements spécialisés refusent de prendre en charge, et cela fait l'objet de la principale revendication de leurs syndicats représentatifs, car il y a là une cause évidente de dégradation des conditions de travail de cette profession.

L'exercice de ce métier comporte donc des contraintes et des risques qui découragent de nombreux candidats, notamment dans les départements où la rémunération est faible.

Telles sont les raisons pour lesquelles il devenait urgent de compléter les textes de 1977 et de 1992 et d'améliorer le statut des professions dont il est question.

Madame la ministre, vous venez d'exposer en détail les objectifs définis à travers ce texte et les innovations qu'il apporte : la reconnaissance du rôle éducatif des assistants familiaux, que le projet de loi associe à l'équipe pluridisciplinaire ; le développement de la formation, initiale et continue, à quoi s'ajoute l'ouverture d'un droit à la formation continue pour les assistants maternels employés par des particuliers, avec un financement de la caisse d'allocations familiales ; l'application aux personnes considérées de la validation des acquis de l'expérience.

Cependant, ce développement de la formation ne nous dispense pas d'une réflexion plus globale sur l'adéquation de l'enseignement proposé par l'éducation nationale à l'ampleur des besoins en matière d'accueil d'enfants et, plus généralement, de service à la personne. J'appelle donc de mes voeux la mise en place de filières adaptées en plus grand nombre dans les lycées professionnels, de façon à former des jeunes à ces métiers. En effet, il n'est pas normal que les filières scolaires ne s'intéressent que très peu à ces métiers qui sont appelés à se développer de manière très importante dans les prochaines années.

Dans le souci de répondre à l'attente des professionnels, le texte rapproche le statut juridique des assistants maternels et familiaux de celui des personnes relevant du droit commun du code du travail.

Vous nous avez expliqué, madame la ministre, comment, en matière de contrat de travail, de licenciement, de durée du travail et de congés annuels, le projet de loi était profondément novateur. Ce texte consensuel a fait l'objet d'un accueil tout à fait favorable de la part de la commission des affaires sociales. Toutefois, l'examen attentif des dispositions qui nous sont soumises l'a conduite à proposer quelques précisions et un certain nombre d'innovations.

Concernant tout d'abord l'agrément, sujet auquel tout le monde est très sensible, je proposerai de limiter à six le nombre maximal de mineurs pouvant être accueillis par un même assistant maternel, outre la limite de trois enfants gardés simultanément, afin de conserver à l'accueil sa qualité première : s'adapter à la personnalité de chaque enfant.

Toutefois, conscient des réalités et compte tenu des travaux antérieurs de la commission, je suis favorable aux dérogations qui pourront être prévues, notamment en matière d'accueil périscolaire, pour répondre aux besoins dans ce domaine, en particulier en milieu rural.

Nous avons également estimé préférable de mieux encadrer la possibilité d'accorder aux assistants familiaux un agrément sans limitation de durée, en imposant une condition d'obtention d'une qualification après la période de formation initiale et en conservant à la PMI sa mission de contrôle.

Enfin, il nous est apparu opportun d'aménager les délais de notification de la décision du président du conseil général en matière de demande d'agrément, aujourd'hui de trois mois pour les assistants maternels et de six mois pour les assistants familiaux. Le projet de loi tend à les ramener à deux mois, conformément au délai qui s'applique aux notifications de décisions administratives. Or l'expérience que nous avons du fonctionnement de nos institutions départementales montre qu'un tel délai est un peu court.

C'est pourquoi nous vous proposerons de le fixer respectivement à trois mois pour l'agrément des assistants maternels et à quatre mois pour celui des assistants familiaux. Cela permettra d'accélérer la procédure tout en laissant aux services de PMI le temps de mener à bien les contrôles nécessaires auprès des candidats. Nous tenons en effet à ce que les conditions de sécurité qui doivent entourer l'exercice de ces professions soient le mieux possible garanties.

Il a également semblé indispensable à notre commission d'introduire une priorité pour les assistants maternels et familiaux dans l'attribution des logements sociaux.

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La définition des critères appliqués au logement pour l'obtention de l'agrément relève, en effet, de la libre appréciation des services départementaux, ce qui entraîne de véritables inégalités pour les candidats. Certains départements délivrent ainsi l'agrément en fonction du nombre d'étages à gravir jusqu'au logement et de la présence ou non d'un ascenseur. D'autres exigent que l'enfant placé chez un assistant familial dispose d'une chambre individuelle, ce qui constitue souvent une difficulté insoluble pour un ménage souhaitant devenir famille d'accueil.

Le fait d'accorder aux professionnels agréés une priorité pour l'attribution d'un logement social et de leur permettre de disposer d'un logement d'une taille supérieure à celle à laquelle ils auraient normalement droit compte tenu de la composition de leur foyer, comme je le proposerai par voie d'amendement, devrait développer l'offre de garde, notamment dans les zones urbaines.

La commission des affaires sociales proposera également de favoriser l'accompagnement et le soutien des assistants maternels et familiaux, qui sont parfois confrontés à des réalités familiales et humaines douloureuses et qui se sentent isolés dans leur immeuble ou dans leur quartier.

C'est pourquoi nous souhaitons que, à travers ce texte, les relais assistants maternels, les RAM, se voient reconnaître une existence légale, ce qui ne veut pas dire que leur création sera imposée aux communes et aux caisses d'allocations familiales.

Ces RAM ont une mission d'information des assistants maternels sur leurs droits et leurs obligations, de formation et de conseil pour l'exercice de leur métier et de mise en relation et de médiation entre les professionnels et les employeurs. Ils constituent en outre des lieux de rencontre et d'échange. Dès lors, même si le texte du Gouvernement ne traite pas des employés qui gardent les enfants au domicile de leurs parents, il nous a paru souhaitable de permettre également à ces employés de fréquenter les RAM, de manière que tous ceux qui gardent des enfants puissent se rencontrer et échanger leurs expériences.

S'agissant des assistants familiaux, nous avons voulu renforcer leur place au sein de l'équipe pluridisciplinaire, afin qu'ils y trouvent un soutien dans l'exercice de leur profession.

Les autres propositions de la commission concernent l'exercice difficile consistant à appliquer notre droit du travail à ces professions tout à fait spécifiques.

Il faut savoir que la France est le seul pays d'Europe à avoir fait entrer les assistants familiaux dans un véritable statut de salariat, même si cette profession est très particulière en raison de sa mission de type parental et du fait qu'il est, par nature, impossible de limiter la pression horaire.

Cela doit nous conduire à réfléchir, notamment, sur la possibilité d'exercer cette profession en tant que travailleur indépendant. En effet, compte tenu de l'augmentation des besoins et sachant qu'il sera de plus en plus difficile de concilier activité professionnelle et vie familiale, il faudra bien se poser la question de savoir s'il faut en rester à un système impliquant nécessairement le salariat ou, comme en Suède, en Allemagne, en Espagne, etc., s'orienter vers un système ouvert aux travailleurs indépendants.

Concernant les assistants maternels, la limitation de leur temps de travail que le projet de loi envisage d'introduire nous a semblé un peu trop rigide au regard des spécificités de cette profession. Nous proposerons donc d'assouplir son mode de calcul, dans le respect des droits des professionnels concernés, en créant un forfait annuel de 2.250 heures de travail et en appréciant la limite de 48 heures de travail par semaine en moyenne sur douze mois.

L'autre spécificité des assistants familiaux tient à ce qu'ils se trouvent, en pratique, bien souvent amenés à partir en congé avec les enfants qui leur sont confiés, ce qui rend difficilement applicables les règles relatives à la prise effective de congés. Nous proposons, par conséquent, de mettre en place un système de compte épargne temps correspondant aux congés pris en présence des enfants ou à l'absence totale de congés. Ce sera un élément favorable pour le calcul des retraites des assistants familiaux.

Nous avons enfin souhaité que la convention collective des assistants maternels employés par des particuliers, actuellement en cours d'adoption, soit visée dans le corps même du texte, dans la mesure où son application améliorera sensiblement le statut des assistants maternels.

Vous nous proposez un texte, madame la ministre, dans lequel la plupart des mesures importantes sont renvoyées au décret. Il faut, en effet, en renvoyer au décret, mais également à la convention collective, car nous estimons que la ligne de séparation entre la loi et l'accord collectif est un point important sur lequel nous devons, en tant que législateur, veiller de manière particulière.

J'en viens à la revalorisation des salaires des assistants maternels et des assistants familiaux, qui n'est qu'indirectement abordée par le texte sous l'angle des indemnités applicables en cas d'absence ou d'attente entre deux enfants à garder. C'est un sujet difficile.

Les niveaux de rémunération des assistants maternels et des assistants familiaux posent en effet un triple problème : leur faiblesse, en cas de travail à temps partiel, l'existence de nombreuses disparités entre les départements et le développement, sur une partie du territoire national, d'une véritable « crise des vocations ».

Il serait souhaitable que la revalorisation salariale permette d'atteindre, dans les meilleurs délais, un salaire mensuel correspondant à 169 SMIC horaires, pour trois enfants gardés en équivalent temps plein par un assistant maternel. Néanmoins, l'harmonisation, en cours, des différents niveaux de salaire minimum aura déjà pour effet mécanique d'augmenter la rémunération des assistants maternels et des assistants familiaux de 11,4 % entre le 1er juillet 2002 et le 1er juillet 2005. Il ne nous a donc pas paru nécessaire, comme à vous, madame la ministre, de légiférer sur ce point.

D'une façon générale, mes chers collègues, le bon sens nous a incités à privilégier des règles souples et simples aisément applicables. Les solutions rigides auraient pour inconvénient d'encourager ce qu'on appelle pudiquement le travail dissimulé, et ce que d'autres nomment le travail au noir. Vous savez que, dans ce domaine, le travail dissimulé est déjà très répandu. Personne ne sait exactement ce qu'il représente, mais on peut estimer qu'il concerne plusieurs centaines de milliers d'enfants. Par conséquent, nous devons tout faire pour sortir l'ensemble de ces professions du travail au noir et pour leur donner des conditions de travail et de rémunération qui soient satisfaisantes.

Ce projet de loi offre à ces deux professions un début de statut et une chance de professionnalisation. Il apporte des améliorations tangibles en matière d'accueil du jeune enfant et, surtout, de prise en charge des mineurs en difficulté. Mais, comme vous l'avez vous-même reconnu, madame la ministre, il risque d'aggraver les charges pesant sur les collectivités territoriales, principalement sur les départements. Il faudra donc envisager d'appliquer à ce texte les dispositions constitutionnelles qui traitent de ce sujet. C'est la raison pour laquelle je présenterai un amendement de compensation.

M. Michel Mercier. Très bien !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Ce texte répond au souci constant de notre commission des affaires sociales de promouvoir la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.

C'est pourquoi, sous réserve de ses observations et des amendements, peu nombreux mais importants, ...

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. ... qu'elle soumettra à votre approbation, votre commission s'est prononcée en faveur de l'adoption du présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 50 minutes ;

Groupe socialiste, 28 minutes ;

Groupe de l'Union centriste, 13 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social, européen, 10 minutes ;

Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 7 minutes ;

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je souhaite tout d'abord vous faire part de ma satisfaction de voir ce texte enfin soumis à l'examen de notre Haute Assemblée.

Il est en effet l'aboutissement d'un processus de concertation amorcé lors de la Conférence sur la famille en 2003. A cette occasion, le Gouvernement avait annoncé la création d'une nouvelle aide, la « prestation d'accueil du jeune enfant », la mise en place d'un crédit d'impôt ouvert au profit des entreprises contribuant à la politique familiale et, enfin, la réforme du statut des assistants maternels.

Si la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 a déjà mis en oeuvre certaines de ces dispositions, le problème lié au cadre professionnel nécessitait un texte législatif spécifique.

En dépit des avancées apportées par la loi du 12 juillet 1992 relative aux assistants maternels, il était devenu indispensable de viser deux objectifs : dissocier les métiers en fonction de la nature de l'accueil et en améliorer le statut.

Car, sous le vocable d'« assistants maternels », nous englobons les formes d'accueil non permanent et permanent. Or, si le premier constitue une réponse adaptée aux besoins des parents de concilier leur vie familiale et professionnelle, le second entre dans le champ de la protection des enfants séparés de leur famille. La distinction proposée par ce texte me paraît donc empreinte de bon sens.

Il est, bien évidemment, impossible de comparer ces deux types d'activité.

L'accueil non permanent constitue un service sollicité par les parents, de plus en plus sollicité, oserais-je affirmer. Pas moins de 740 000 enfants de moins de six ans sont ainsi accueillis par 300 000 assistants maternels, soit plus du double qu'il y a dix ans.

Quant à l'accueil permanent, il représente un service palliatif de protection de l'enfant séparé de sa famille.

En dépit de cette distinction, ces professionnels partagent une même ambition : la qualité de l'accueil réservé à l'enfant.

De plus, ces professionnels souffrent des mêmes maux : les conditions de rémunération, la précarité, le déficit de formation, le manque de reconnaissance ...

Aussi, en réponse au souhait exprimé par tous de renforcer leur professionnalisation, leur reconnaissance et leurs conditions de travail, ce texte tend effectivement à l'affirmation d'un véritable statut.

Le consensus sur ces deux aspects ne signifie pas pour autant qu'il faille délivrer un blanc-seing au Gouvernement dans la mise en oeuvre de cette réforme.

Ainsi, des zones d'ombre persistent. Il conviendra, par conséquent, de les lever, en particulier pour ce qui concerne la place accordée à l'enfant et les incidences financières liées à la revalorisation de la rémunération des assistants familiaux.

Mon groupe parlementaire souhaite d'ailleurs formuler des propositions en ce sens. Il est indispensable qu'elles soient adoptées par la Haute Assemblée pour assurer la réussite de cette réforme.

Par ailleurs, conseiller général du département de la Marne depuis 1992, j'ai pu apprécier les qualités humaines et professionnelles de nombreuses assistantes maternelles spécialisées dans l'accueil permanent.

Elles font en effet preuve d'un investissement sans bornes, mais peuvent subitement en perdre le bénéfice à cause d'une parole, d'un geste ou d'un regard incompris.

Elles considèrent chaque enfant accueilli comme un membre à part entière de la famille, mais doivent, dès lors, abandonner toute idée d'intimité familiale.

Elles ont un métier éprouvant, mais qui ne laisse pourtant aucune place à un moment d'égarement ou de faiblesse.

Au regard de la difficulté de leur mission, il était donc tout à fait essentiel que ces assistantes bénéficient non seulement de certains égards, mais aussi d'une reconnaissance parfaitement méritée.

Cette reconnaissance s'appuie sur la revalorisation et la modification de la rémunération, ainsi que sur l'introduction de nouveaux éléments dans le contrat d'accueil.

Cette reconnaissance se traduit par le rattachement systématique de l'assistant à une équipe pluriprofessionnelle.

Cette reconnaissance s'exprime aussi par l'allongement de la durée de l'agrément, qui peut, sous conditions, devenir illimité.

Cette reconnaissance se fonde sur la distinction entre le licenciement pour insuffisance professionnelle et celui intervenant en fin de période d'attente si aucun enfant n'a été confié.

Cette reconnaissance s'établit par la création d'un régime de suspension de la fonction d'accueil pendant le temps de la suspension de l'agrément, avec une indemnisation pendant quatre mois et un soutien psychologique.

Cette reconnaissance se caractérise, enfin, par la mise en place de stages préparatoires et d'une formation débouchant sur l'obtention d'un certificat exonérant son titulaire de la démarche de renouvellement d'agrément.

Madame la ministre, sur cette question éminemment importante de la formation, je souhaiterais attirer votre attention sur la nécessité de prévoir, en complément des stages préparatoires et de la formation continue, un accompagnement pratique de l'assistant par les professionnels en charge du suivi de l'enfant dans les deux semaines suivant le placement.

Ce soutien lui permettrait de solliciter une aide sur des situations concrètes et d'éviter ce sentiment d'abandon dans les tout premiers jours de l'exercice de son activité.

Comme vous pouvez le constater, à l'image de ce texte, mon groupe parlementaire et moi-même, nous sommes « pavés de bonnes intentions ». (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.

M. Jean-Louis Lorrain. Madame la ministre, le texte que vous nous présentez aujourd'hui prévoit de revaloriser le statut de la deuxième profession exercée en France après les enseignants et d'améliorer la qualité d'accueil des enfants par les assistants maternels et les assistants familiaux.

Ces professions se sentent encore aujourd'hui peu reconnues. Pourtant, en 2002, au cours d'une semaine type allant du lundi au vendredi, plus de 780 000 enfants ont été gardés au moins une fois par un assistant maternel.

Les assistants maternels sont légalement définis comme les personnes qui peuvent accueillir régulièrement à leur domicile, moyennant rémunération, des mineurs, dès lors qu'ils ont obtenu à cet effet un agrément délivré par le président du conseil général.

II existe, à l'heure actuelle, deux formes d'exercice du métier : les assistants maternels non permanents, qui accueillent à la journée des enfants confiés par leurs parents, et les assistants permanents, qui accueillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre, dans le cadre d'un placement, des enfants qui ne peuvent demeurer dans leur propre famille.

S'agissant des premiers, le nombre d'agréments délivré par les services de la PMI, la protection maternelle et infantile, ne cesse de croître depuis 1990, en particulier depuis 1995. Les agréments en cours de validité ont ainsi augmenté de 30 % entre 1995 et 2001 ; le nombre d'assistants maternels réellement en activité est, quant à lui, passé de 166 700 en 1995 à 258 400 en 2001, soit une hausse de 150 %.

Pour les familles, il s'agit d'un mode de garde qui n'est pas plus coûteux que la crèche, beaucoup moins cher qu'une employée à domicile et qui présente des modalités relativement souples en termes d'organisation et d'horaires.

Les collectivités locales ont joué un rôle déterminant dans le devenir de la profession. Il s'agit, en effet, d'un système moins onéreux pour elles que les créations de places en crèches qui ont un coût de fonctionnement élevé.

Certaines collectivités ont ainsi mis en place des réseaux multipliant les possibilités de garde sur leurs territoires en faveur d'une meilleure conciliation des vies personnelles et professionnelles des familles.

Dans mon canton alsacien, qui compte 20 000 habitants et vingt communes, plus de 250 assistants maternels sont concernés. Je dois témoigner que les relais assistants maternels, les RAM, jouent un rôle fédérateur et conciliateur entre les familles et les assistants. Ce sont aussi des lieux d'accueil qui permettent la tenue de réunions. Toutefois, il faut savoir que leur budget est supporté par les caisses d'allocations familiales, les communautés de communes ou les communes.

Pourtant, il existe encore une inégalité de répartition de ce mode d'accueil sur le territoire qui se traduit par des pénuries de places dans certaines communes.

Face à une demande croissante, il nous fallait réagir et revaloriser sur tous les plans cette profession.

Celle-ci a été encadrée par la loi, il y a moins de trente ans.

En effet, le statut des assistants maternels a été institué par la loi du 17 mai 1977, qui a fait de l'ancienne activité de « nourrice » une profession réglementée, l'accès étant soumis à l'obtention préalable d'un agrément.

Puis, la loi du 12 juillet 1992, qui a confirmé le principe de l'agrément, a été l'occasion de l'élaboration d'un premier statut, définissant les conditions d'exercice de la profession de façon globale.

Cette loi a représenté en son temps un progrès considérable du fait qu'elle a doté les assistants maternels d'un cadre juridique mieux structuré, couvrant tous les champs de leur activité professionnelle : apportant protection juridique et sociale en faveur d'un développement de la profession.

Cette loi avait pour caractéristique que les assistants maternels non permanents et permanents étaient régis par des textes communs, mais aussi par des dispositions particulières, propres aux deux catégories.

Or, on constate que chacune de ces deux grandes catégories se trouve confrontée à des réalités et à des attentes spécifiques. Il était donc nécessaire de prévoir une refonte complète du statut des assistants maternels traçant une séparation claire entre ces deux métiers.

Nous nous félicitons que, conformément au souhait du Président de la République, le Gouvernement se soit donné comme priorité, en matière de politique familiale, la réforme de l'accueil des jeunes enfants.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui est, par ailleurs, l'illustration de la méthode de dialogue et de concertation voulue par le Gouvernement.

C'est ainsi qu'une vingtaine d'organisations syndicales ou professionnelles ont travaillé sur ce texte et que le conseil d'administration de la CNAF, comme les conseils supérieurs des fonctions publiques territoriale et hospitalière, ont donné un avis favorable.

Les orientations du projet de loi sont triples et vont dans le bon sens.

Premièrement, la distinction entre assistants maternels et assistants familiaux permettra la reconnaissance des spécificités de chaque métier.

Deuxièmement, l'obligation de formation imposée à ces professionnels permettra d'améliorer et de promouvoir la qualité de l'accueil des enfants.

Troisièmement, il est procédé à l'extension, partielle en raison des spécificités de la profession, des règles de droit commun issues du code du travail.

Ainsi, ce texte permettra une meilleure protection sociale et juridique de ces personnes et offrir une véritable amélioration du statut des assistants maternels, en rendant ce métier beaucoup moins précaire et en proposant de réelles avancées sociales, telles que l'obligation d'un contrat écrit, la modification de la procédure de rupture du contrat ou l'instauration d'une réglementation pour la durée du temps de travail.

Le projet de loi donne les moyens de rendre ces professions plus attractives et de lutter ainsi contre la pénurie de l'offre. Il apporte également des pistes de solutions aux problèmes d'accueil des jeunes enfants, comme des mineurs en difficulté.

Permettez-moi d'insister, madame la ministre, sur plusieurs points.

D'abord, la proposition du rapporteur limitant à six le nombre maximal d'enfants pouvant être accueillis par un même assistant maternel devrait, selon moi, être retenue.

Cette mesure me paraît très importante pour conserver un accueil de grande qualité et pour que des liens puissent se nouer avec toute l'intensité nécessaire entre les personnes qui accueillent et l'enfant.

Il s'agit, selon moi, d'une mesure de bon sens, qui doit bien évidemment, comme le propose Jean-Pierre Fourcade, pouvoir être aménagée dans certaines hypothèses.

En outre, afin de favoriser l'accompagnement et le soutien des assistants maternels et familiaux, M. le rapporteur propose que les RAM, les relais assistants maternels, se voient reconnaître une existence légale sans que leur création s'impose aux communes et aux CAF ; je me suis exprimé à ce propos.

Cette disposition me paraît nécessaire pour ces professions parfois confrontées à des réalités familiales et humaines douloureuses.

De plus, je voudrais me faire l'écho d'interrogations entendues au sein de certaines associations familiales.

S'il est indispensable de mettre en place un statut juridique et social plus sûr en faveur des assistants familiaux, comme maternels, il convient de veiller à ne pas déséquilibrer les relations entre employé et employeur et à établir des modes de fonctionnement non conflictuels : choix de la période des congés payés ou conditions de rupture du contrat de travail.

En outre, il est prévu que les améliorations proposées pour le statut de ces professionnels soient complétées par de nouveaux droits conventionnels dans le cadre d'une convention collective nationale.

Pouvez-vous dès à présent, madame la ministre, nous faire connaître l'état d'avancement des négociations entre les partenaires sociaux concernant cette convention collective ?

Enfin, le projet de loi prévoit de développer les actions d'information et les actions de formation initiale des assistants maternels, comme des assistants familiaux.

Cette mesure, très importante pour améliorer la qualité d'accueil des enfants, pourrait avoir comme conséquence d'alourdir le budget des départements.

D'autres dispositions du texte génèrent également de nouvelles dépenses liées à des extensions de compétences ou à l'accroissement du coût d'une compétence. Cela a bien évidemment eu pour effet de susciter quelques interrogations des conseils généraux.

M. le rapporteur propose que les charges résultant de l'extension de compétences soient compensées par l'attribution de ressources.

Cet amendement me paraît essentiel si l'on veut que ce projet de loi puisse être appliqué véritablement et si l'on souhaite éviter d'augmenter le poids des charges supportées par les collectivités locales.

Je voudrais, enfin, saluer le travail du rapporteur de la commission des affaires sociales et la justesse de ses propositions, qui viendront opportunément compléter ce projet de loi attendu tant par les professionnels que par les familles.

L'accueil des jeunes enfants et des mineurs en difficulté sera amélioré, et notre politique familiale renforcée. Nous ne pouvons que nous en réjouir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, indiscutablement, comme l'a rappelé le Haut Conseil de la population et de la famille dans son rapport de janvier 2003, « en un siècle, une question qui ne se posait pas - comment faire garder ses enfants ? - est devenue une préoccupation de premier plan pour la majorité des familles », voire un parcours du combattant pour une majorité de femmes professionnellement actives et une question douloureuse pour les familles monoparentales.

Les parents des 2 300 000 enfants de moins de trois ans expriment des besoins nécessairement évolutifs, notamment eu égard aux contraintes liées à leur emploi, à la déréglementation du travail, aux journées éclatées, à l'évolution des modes de vie. Mais, avec constance, ils portent l'exigence de la qualité de l'accueil de leurs jeunes enfants. Exigence, somme toute légitime, la petite enfance étant un moment clé pour la structuration de l'individu.

En retour, les réponses apportées par l'Etat, les collectivités locales, les associations, le régime de protection sociale restent insuffisantes, très disparates selon le territoire et trop inégalitaires. De nombreuses études le montrent, la liberté de choix des modes de garde n'est que théorique et souvent illusoire.

Je sais, mes chers collègues, qu'il est confortable de penser que, si nos concitoyens optent majoritairement pour l'accueil par un assistant maternel, c'est parce qu'ils considèrent ce mode de garde comme le meilleur. Du moins cela évite-t-il ainsi de réfléchir aux responsabilités qui sont les nôtres pour encourager, sans exclusive, l'offre des différents modes de garde et pour solvabiliser véritablement les parents.

La réalité quant au choix des familles, c'est qu'il est largement contraint par la pénurie quantitative et qualitative des modes de garde disponibles.

C'est aussi que ce choix est fortement prédéterminé par le niveau des revenus des foyers.

C'est en tenant compte de l'ensemble de ces éléments que nous abordons aujourd'hui le débat du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

On ne peut pas faire grief au Gouvernement de vouloir avancer dans ce domaine, tant il est vrai qu'un réel consensus existe autour de la nécessité de faire évoluer le statut des assistants maternels tel qu'il résulte de la loi de 1992, « statut dérogatoire et contesté », pour reprendre l'intitulé d'une étude publiée en 1999 dans L'actualité juridique -fonction publique.

Comment, en effet, se satisfaire plus longtemps du fait que le statut des assistants maternels fasse « référence à un droit mixte », autrement dit, « dépendant pour partie du droit privé et pour partie du droit public », qu'il diffère selon la qualité de l'employeur et qu'il soit source d'instabilité et de fortes inégalités, notamment en matière de rémunération ?

De même, comment continuer plus longtemps à justifier la place singulière faite au sein de la fonction publique aux assistants maternels qui ne bénéficient ni du statut de fonctionnaire, ni pleinement du statut de droit commun des agents non titulaires de droit public des collectivités locales ?

Enfin, comment rester sourd aux revendications, anciennes et légitimes, des héritières des nourrices - assistants familiaux accueillant à titre permanent des mineurs extrêmement fragiles, maillons essentiels de la politique sociale à l'enfance, assistants maternels accueillant des enfants à la journée - exerçant toutes une activité sociale certes particulière en ce sens qu'elle mêle intimement un espace privé, familial et un investissement professionnel, mais essentiel pour la société ?

En 2001, le gouvernement précédent, par l'intermédiaire de Ségolène Royal, s'était à juste titre saisi de ces questions touchant à la réforme du statut des assistants maternels et, plus globalement, à la professionnalisation des métiers de la petite enfance, gage de fidélisation des intervenants et de qualité pour les parents.

Votre prédécesseur, madame la ministre, a poursuivi la concertation avec la profession.

Pour autant, on ne peut pas dire que le Gouvernement ait tout mis en oeuvre pour lever les obstacles afin de faire aboutir les propositions convergentes des organisations syndicales visant, à terme, à concevoir des cadres de métiers pour les assistants familiaux et assistants maternels employés par les collectivités.

Auditionnée la semaine dernière par la commission des affaires sociales, vous vous êtes, madame la ministre, ouvertement déclarée défavorable à l'intégration des assistants maternels dans la fonction publique territoriale, « estimant qu'un tel statut serait incompatible avec la nécessaire souplesse de l'accueil ».

Si vous concédez qu'il « convient désormais de leur reconnaître - aux assistants maternels - toutes les caractéristiques d'un véritable métier de l'enfance », vous n'en tirez pas toutes les conséquences. Autant dire, dans ces conditions, que la reconnaissance des personnels accueillants restera partielle.

On ne peut pas dire non plus que le Gouvernement ait fait preuve d'une réelle volonté politique pour structurer et développer un véritable service public d'accueil des jeunes enfants, en l'occurrence, un service diversifié, de qualité.

Je dois dire que la rupture dans la conception même des modes de garde est largement consommée.

Au lieu de gommer la concurrence existant de fait entre les différents modes de garde, par le biais d'aides fiscales, par la création d'équipements ou par l'attribution de prestations, vos choix, traduits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, comme dans la loi relative à la protection de l'enfance, illustrent, au contraire, votre volonté de privilégier l'accueil individuel par des assistantes maternelles, la plupart du temps trop isolées, ou par des employées de maison échappant, elles, aux exigences minimales de professionnalisation.

L'objet de mon propos n'est ni de stigmatiser tel mode de garde ni de dévaloriser certains accueillants. Il s'agit uniquement de dénoncer les options de garde ne satisfaisant pas au préalable, pourtant incontournable en ce domaine, de l'extrême professionnalisation des intervenants, en l'occurrence.

Cette condition pour que l'accueil soit réussi dans un mode de garde est essentielle, comme l'a rappelé Sylviane Giampino, psychanalyste et psychologue, dans la revue Réalités familiales de mars 2001. Sont évidemment nécessaires des connaissances approfondies en puériculture, en psychologie et en pédagogie, la formation permanente et le travail en réseau pluriprofessionnel.

Les structures collectives ne sont pas à l'abri de ce problème qualitatif dans la mesure où la réactualisation du décret de 2000 est justement voulue pour revoir à la baisse certaines exigences en termes de qualification des personnels et normes d'encadrement.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, nous ne sommes pas, par principe - comment l'être d'ailleurs ? - opposés à tout développement quantitatif de l'offre de garde privée. En revanche, nous ne pouvons cautionner que, pour des raisons idéologiques, mais surtout budgétaires, le Gouvernement cède en quelque sorte - ou ne soit pas assez ambitieux - sur le développement qualitatif de l'offre de garde et favorise ainsi l'accueil le moins coûteux pour la collectivité.

Vous me répondrez que le Gouvernement a créé la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant, dont le complément de libre choix de mode de garde est censé solvabiliser l'ensemble des familles, y compris les plus modestes.

Je tiens néanmoins à vous faire observer à nouveau que la PAJE n'est qu'un pis-aller, un leurre. D'abord, elle ne concerne pas les parents dont les enfants sont accueillis dans un équipement public.

Ensuite, cette prestation, censée permettre aux parents de choisir librement le mode de garde de leur enfant, incite justement les mères à rester au foyer.

Enfin, faute de construire des structures collectives nouvelles, la pauvreté persistante du choix en matière d'offre, conjuguée au peu d'avancées concrètes induites pour les assistants maternels par le présent texte, conduira les familles à devoir augmenter leur taux d'effort pour le financement de la garde de leurs enfants.

Dois-je également rappeler que jamais le Gouvernement n'aura autant pesé pour pousser l'envol des structures collectives privées ? Ces dernières peuvent désormais largement bénéficier des fonds d'investissement et de fonctionnement des CAF, ainsi que du complément du mode de garde versé aux parents, sans oublier les aides défiscalisées des employeurs !

Décidément, tout, dans la politique familiale de ce gouvernement, semble aller à rebours des besoins du plus grand nombre !

Et que dire du contexte économique et social, d'une violence sans précédent pour le pouvoir d'achat, l'emploi, le logement des familles ?

On ne peut prétendre tout à la fois tenir au principe d'égalité entre les hommes et les femmes, vouloir aider à la conciliation entre l'activité professionnelle et la vie familiale et privilégier parallèlement les formes de travail précaire, dont le travail à temps partiel, ou envisager le dynamitage des 35 heures !

Pour apprécier à sa juste valeur le texte que nous examinons ce jour, je crois que les précédents développements replaçant ce dernier dans le cadre plus global de la politique familiale suivie depuis deux ans s'imposaient.

Sans entrer véritablement dans le détail des articles du projet de loi que nous examinons aujourd'hui, nous y reviendrons lors de la présentation de notre vingtaine d'amendements, je tiens maintenant à vous livrer les premières impressions des sénateurs du groupe CRC sur le texte lui-même.

Elles sont moins tranchées, plus en demi-teinte, que nos remarques portant sur les orientations de la politique familiale du Gouvernement ou sur la méthode choisie, parcellaire et sous dimensionnée pour traiter, au détours de textes épars, de la protection de l'enfance, et ce alors même que les professionnels attendent une loi-cadre.

Nous sommes conscients de la difficulté de trouver le juste équilibre entre la souplesse attendue de ce mode de garde pour les parents, la protection contre la précarité défendue par les assistants maternels et la qualité requise pour le bien-être et la dignité de l'enfant.

Reste tout de même un sentiment d'incomplète satisfaction.

Ce texte, censé permettre le franchissement d'étapes décisives pour les assistants maternels, reste muet sur des questions essentielles, telles que la protection sociale, la garantie du niveau de salaire ou la professionnalisation des métiers.

C'est comme si les propositions formulées pour les assistants maternels exerçant dans le cadre des crèches familiales n'existaient pas.

M. le rapporteur de la commission des affaires sociales semble, lui aussi, regretter l'absence de mesures plus détaillées, puisqu'il formule, au nom de la commission, un certain nombre de voeux, dont un concernant la rémunération des assistants familiaux comme des assistants maternels.

Sur ce sujet, comme sur la retraite ou les passerelles, servant à la qualification, nous avons, quant à nous, jugé utile de finaliser diverses propositions d'amendements.

D'une manière générale, les renvois quasi systématiques à des mesures réglementaires s'agissant de dispositions ayant des incidences financières évidentes sur les départements ou les employeurs privés nous semblent préjudiciables. C'est le cas notamment de la formation antérieure à l'accueil et de la formation continue.

Concernant la délivrance de l'agrément, son contenu et son contrôle, dans l'intérêt de l'assistant maternel et de l'enfant, là encore nous proposons d'être plus précis pour assurer sur l'ensemble du territoire une égalité de traitement et rappeler l'Etat à ses responsabilités.

Enfin, sur un autre aspect important du texte, celui de l'application des règles de droit commun du code du travail, nous divergeons plus radicalement.

Vous semblez, madame la ministre, ouverte aux préconisations de M. le rapporteur visant à assouplir les limitations introduites à la durée du temps de travail notamment, alors que ce sont des contreparties nécessaires, mais insuffisantes, à l'assouplissement des conditions de l'agrément portant à un nombre indéterminé le nombre d'enfants pouvant être accueillis.

Finalement, entre les dispositions que nous apprécions positivement et celles dont la présence ou l'absence nous semble être difficilement acceptable, le bilan reste négatif. Je crains fort que nos discussions, l'adoption de certains amendements de la majorité ne nous obligent à nous abstenir sur un texte qui, je le rappelle, n'apporte pas les réponses adéquates aux enjeux de la professionnalisation des assistants maternels et des assistants familiaux.

Nous suivrons donc avec attention la suite des débats. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz.

Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, autrefois appelée nourrice, puis gardienne d'enfants, l'assistante maternelle a été amenée au fil du temps à assurer beaucoup plus que de simples fonctions vitales et de gardiennage. Ainsi, le développement, la professionnalisation et les particularités de la garde d'enfants ont justifié la définition en 1977, puis en 1992, d'un statut professionnel propre à ce métier, distinguant les différentes formes d'accueil - garde permanente ou non permanente - et les différents types d'employeurs - particuliers, personnes morales de droit privé ou personnes morales de droit public.

Cette forme d'accueil indispensable a crû de manière considérable cette dernière décennie, et l'on compte aujourd'hui près de 740 000 enfants de moins de six ans, dont près de 500 000 enfants de moins de trois ans, qui sont aujourd'hui accueillis par environ 300 000 assistantes maternelles à titre non permanent, soit plus du double qu'en 1992. Elle constitue désormais, aux yeux des Français, le premier mode d'accueil des enfants. En outre, et comme il est précisé dans l'exposé des motifs, d'après un rapport du Commissariat général du Plan de novembre 2002, cette profession pourrait constituer dans les années à venir un gisement important de création d'emplois.

Dans le champ de la protection de l'enfance, ce sont près de 65 000 enfants qui étaient accueillis en 2002 par environ 42 000 assistantes maternelles à titre permanent. Celles-ci sont le mode d'accueil privilégié des enfants séparés de leur famille, puisqu'elles représentent 55 % de l'ensemble des mesures d'hébergement.

Au-delà de ces chiffres, j'ai pu constater, à l'écoute des représentants d'assistants maternels et familiaux que j'ai rencontrés ici même et dans mon département, que nous étions en présence d'une profession composée essentiellement de femmes et de quelques hommes qui aiment beaucoup l'activité qu'ils exercent pratiquement en marge du droit du travail, qui souffrent d'un réel manque de considération et de reconnaissance. Paradoxalement, à l'heure où ils sont de plus en plus recherchés, peu de choses sont faites pour encourager les vocations. Il est fréquent que de nouvelles recrues abandonnent l'idée de devenir assistant maternel en se rendant à la journée d'information censée les sensibiliser au métier. La révision de leur statut était très attendue. C'est l'objet du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.

Malheureusement, celui-ci survient dans un contexte où le montant des dépenses de la branche famille, qui a été voté dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2004, est insuffisant, notamment en ce qui concerne le fonds d'investissement pour la petite enfance, le FIPE. De plus, les mesures prises dans le cadre de cette politique sont discutables, la création de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, en est un exemple très significatif.

En effet, aucune des assistantes maternelles que j'ai pu rencontrer n'y est favorable. Alors qu'elles demandent un statut aligné dans la mesure du possible sur le droit du travail, avec un bulletin de paie établi en brut comme celui de tous les salariés, elles vont se retrouver avec « une attestation d'emploi valant bulletin de salaire ».

Ainsi, pour obtenir un bulletin de paie, preuve de son travail, il faudra que cette catégorie professionnelle attende que les employeurs veuillent bien renvoyer leur formulaire au centre PAJE et que celui-ci prenne le temps d'expédier chaque mois et à chaque salarié son attestation d'emploi valant bulletin de paie. La PAJE va bel et bien à l'encontre de l'esprit du projet de loi que nous examinons aujourd'hui ; nous n'y sommes pas favorables. Nous demandons à ce que les assistants maternels puissent bénéficier d'un vrai bulletin de salaire.

J'en arrive au projet de loi lui-même.

Ses objectifs sont tout à fait louables puisqu'il a pour vocation, d'une part, de mettre en oeuvre les conditions d'une plus grande qualité des soins apportée aux enfants accueillis par une meilleure intégration professionnelle des accueillants et, d'autre part, d'améliorer le statut de ces professionnels, afin de le rendre plus attractif.

Ce projet de loi comporte de bonnes mesures. Il en est ainsi de la nouvelle appellation qui distinguera désormais les professionnels de l'accueil non permanent, qui resteront dénommés assistants maternels, et ceux de l'accueil permanent, qui deviendront assistants familiaux. Même si ce terme ne fait pas l'unanimité, il était indispensable de mieux différencier ces deux professions, car ceux qui les exercent n'ont pas vraiment la même activité.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !

Mme Gisèle Printz. Si ce texte comporte des mesures intéressantes, d'autres le sont beaucoup moins. Nous défendrons donc des amendements en vue d'améliorer les points faibles de ce texte lors de l'examen des articles.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pour en renforcer les points forts !

Mme Gisèle Printz. Certaines questions n'ont pas été prises en compte, nous y reviendrons.

Enfin, nous regrettons le renvoi presque systématique à des décrets, qui nous empêche d'apprécier actuellement la portée réelle de toutes les mesures proposées.

Au cours de mon intervention, j'évoquerai d'abord les questions se rapportant aux assistants maternels, puis celles concernant les assistants familiaux.

La précarité constitue le problème majeur de l'activité de l'assistant maternel. C'est pourquoi l'obligation d'établir un contrat de travail écrit et d'assurer une meilleure protection des droits des salariés par l'harmonisation de la procédure avec celle du droit commun est bien accueillie.

Les assistants maternels demandent aussi qu'en cas de litige avec leur employeur l'affaire soit portée devant le conseil des prud'hommes. En effet, si ce n'est pas cette juridiction qui est compétente nous doutons de l'efficacité réelle de ces mesures ; les assistants maternels ne seront ni plus écoutés ni plus défendus qu'à l'heure actuelle et resteront confinés dans la précarité de leur poste.

En effet, leur situation est vraiment précaire : l'agrément ne tient qu'à un fil et peut être retiré en raison du non respect d'un règlement parfois trop exigeant. Quelques exemples de cette rigidité m'ont été rapportés : interdiction de recevoir de la visite, interdiction d'emmener les enfants dans les magasins, interdiction d'avoir d'autres enfants que ceux en garde, interdiction de faire garder l'enfant par le mari...

Madame la ministre, ces situations sont bien réelles et contribuent fortement au sentiment de dévalorisation et au complexe d'infériorité que ressent la profession. Les parents qui choisissent de faire garder leur enfant au domicile de quelqu'un d'autre le font souvent parce que ce mode de garde reproduit l'esprit de famille, favorable à l'épanouissement de l'enfant. Or celui-ci se retrouve finalement dans un système aux règles parfois abusives, qu'il faudrait peut-être assouplir.

En ce qui concerne l'agrément délivré par le conseil général, le formulaire unique exclusif de tout autre questionnaire est accueilli très favorablement dans la profession. Le respect de la vie privée est en effet primordial : nombre d'assistantes maternelles m'ont fait part de questions indiscrètes qui leur ont été posées à l'occasion de la procédure d'obtention de l'agrément ; d'autres ont même évoqué des méthodes « inquisitoriales » lors d'inspections à domicile.

De tels actes contribuent fortement au sentiment de dévalorisation qui prédomine dans la profession. Les décrets d'application devront donc veiller au respect de la vie privée. Nous proposerons par ailleurs un amendement pour que les candidats à l'agrément soient évalués selon des critères identiques sur tout le territoire, la notion de « capacité éducative » pouvant être très subjective.

Sur le contenu de l'agrément de l'assistant maternel, nous proposerons aussi deux amendements. L'un tend à supprimer la mention de l'âge des mineurs. En effet, figer l'âge des mineurs dans l'agrément est extrêmement restrictif et peut également, après le départ d'un enfant, exclure l'accueil de fratries. Un autre amendement vise à classer en deux catégories les enfants accueillis : les enfants scolarisés et ceux qui ne le sont pas. Il existe en effet actuellement trois catégories qui vont de la naissance à 18 ans, de 3 ans à 18 ans, ou de 6 ans à 18 ans. Ces catégories sont en décalage avec la réalité puisque les enfants concernés ont rarement plus de treize ans.

Parmi les mesures que nous approuvons, il y a la mise en place de la rémunération à taux plein des absences non justifiées par un certificat médical les jours où l'enfant aurait dû être accueilli. L'absence pour cause de maladie sera, quant à elle, rémunérée à mi-taux alors qu'elle ne donne lieu à aucun salaire actuellement. Mais il reste le cas des longues maladies, qui est pénalisant et sur lequel il faudra réfléchir.

La formation des assistants maternels est une question très importante, car l'absence de qualification pèse, elle aussi, sur la reconnaissance de ce métier de plus en plus difficile à exercer.

A l'heure actuelle, les débutants sont souvent livrés à eux-mêmes sans explication ni conseils préalables de la part des PMI. Ils doivent donc s'en remettre à leur syndicat ou à leur association, si toutefois ils existent, pour obtenir des renseignements. Nous accueillons donc favorablement l'idée d'une formation préalable avant l'agrément. Nous proposerons également un amendement pour que celle-ci ne soit pas éloignée dans le temps de l'accueil du premier enfant. Cependant, nous souhaiterions savoir si cette formation préalable à la garde du premier enfant sera rémunérée et à quel taux.

Le projet de loi prévoit d'augmenter sensiblement la durée de la formation continue mais, là encore, nous ne pouvons que regretter que tout soit subordonné à des décrets : nous ne savons rien de sa durée exacte ni de son contenu alors que les attentes portent sur ces questions.

Je sais par exemple que la demande de formation aux cours de secourisme est très forte, afin que les assistants maternels puissent intervenir en cas d'accident. De même, il serait bon de faire inscrire systématiquement, dans le protocole d'accord avec les parents, la possibilité d'autoriser les assistants maternels à donner les médicaments prescrits par ordonnance aux enfants dont ils ont la charge.

La formation des assistants maternels devrait déboucher sur une qualification, mais nous n'en savons pas plus sur le sujet. Cette qualification aura-t-elle une valeur nationale ? Pouvez-vous, madame la ministre, nous éclairer sur cette question ?

Concernant les salaires, le projet de loi ne change rien à ce qui est applicable actuellement. Les évolutions éventuelles ne doivent intervenir qu'ultérieurement et par décret. D'après nos informations, le salaire pourrait être scindé en plusieurs parts : une part liée à la fonction globale d'accueil, plus une part pour chaque enfant accueilli. Mais rien n'est officiel ; nous resterons donc attentifs.

Par ailleurs, il semble que la mensualisation prévue par la loi de 1992, qui assure aux assistants maternels un minimum de sécurité dans l'exercice de leurs fonctions, soit loin d'être appliquée partout. Il serait peut-être opportun d'évaluer son application sur le terrain et de mener une réflexion pour qu'elle soit systématique.

Pour les congés payés, la disposition dérogatoire permettant aux assistants maternels employés par des particuliers de fixer eux-mêmes in fine leurs congés est accueilli favorablement par la profession, étant donné la multiplicité des employeurs. Les décrets sont attendus avec impatience.

Concernant l'indemnité d'entretien, le projet de loi prévoit qu'elle soit fixée par décret. Nous proposerons d'aller plus loin en inscrivant dans la loi le caractère uniforme de cette indemnité pour l'ensemble du territoire. C'est une mesure qui répond à une attente de longue date, quasi unanime des assistants maternels, et nous préférons ne pas nous en remettre à un décret qui pourra prendre encore des mois après la publication de la loi.

J'en arrive au chapitre des mesures intéressant plus particulièrement les assistants familiaux.

Avant d'aborder les aspects techniques du projet de loi sur ce sujet, je souhaite rendre hommage à cette profession difficile et à toutes les familles d'accueil qui font un travail remarquable. En effet, l'accueil d'un enfant au sein de sa propre famille n'est pas une décision qui se prend à la légère ; il s'agit d'un véritable investissement à tous les niveaux.

Cela demande tout d'abord des travaux de rénovation et de sécurisation du domicile pour obtenir l'agrément ; certaines familles vont même jusqu'à déménager !

Ensuite, cela demande un investissement personnel très important au service d'enfants souvent difficiles, en manque de repères, et qu'on ne parvient pas à placer en foyers d'accueil.

Les assistants familiaux doivent aider les enfants brisés par des années de maltraitance à surmonter leur souffrance et à se reconstruire. Ils doivent aussi prendre en charge leur éducation et leur instruction, car le retard scolaire chez ces enfants est souvent important. Ces derniers requièrent une attention particulière et accaparent les parents jusqu'à provoquer parfois la jalousie des enfants naturels de la famille. Il faut ajouter qu'ils peuvent à tout moment être déplacés vers une autre famille d'accueil alors qu'ils sont là depuis des années, d'où un profond déchirement pour ces familles, qui font ce travail essentiellement par amour des enfants.

Comme pour les assistants maternels, la précarité constitue le problème majeur de leur statut. Le projet de loi prévoit que l'employeur ne peut envisager de licencier un assistant familial que pour un motif « réel et sérieux ». Mais cela ne suffira pas à résoudre le problème, car cette notion figure déjà pour toutes les professions dans le code du travail. Cela n'empêche nullement que des milliers d'assistants familiaux de l'aide sociale à l'enfance soient licenciées chaque année. Si l'on veut protéger sérieusement cette profession, il est impératif que la loi interdise de licencier un assistant familial tant que l'employeur est en mesure de lui confier l'accueil d'un ou de plusieurs enfants. Nous proposerons un amendement en ce sens.

Nous proposerons également des amendements visant à uniformiser, sur l'ensemble du territoire national, les indemnités et fournitures destinées à l'entretien des enfants afin d'éviter les disparités qui existent entre les départements.

S'agissant du temps de travail, nous regrettons qu'il ne soit pas défini par la loi. La rémunération n'en tenant pas compte, cela veut dire qu'un assistant familial peut travailler vingt-quatre heures sur vingt-quatre, 365 jours par an, si l'employeur l'exige. Ce n'est pas vraiment ce que l'on peut appeler une amélioration...

Nous sommes favorables à la réforme du régime de l'attente qui permet de maintenir le contrat de travail d'un assistant familial entre deux accueils d'enfants moyennant le versement d'une indemnité, car elle répond à une demande de longue date des assistants familiaux. Mais si le projet de loi prévoit de porter de trois à quatre mois l'indemnité d'attente après le départ des enfants, il n'est pas possible d'apprécier la portée de cette modification tant qu'on ignore le montant de cette indemnité. Nous le regrettons.

Au chapitre des conditions de travail des assistants familiaux, on ne peut que déplorer la dureté des règles auxquelles ils sont, eux aussi, soumis. Certes, quant il s'agit d'enfants, on n'est jamais trop prudent. Mais peut-on vraiment parler de « bien-être d'un enfant » quand il se voit appliquer des règles aussi draconiennes que l'interdiction d'aller chez des amis, des voisins, de jouer avec d'autres enfants dans la rue même sous la surveillance d'adultes autres que l'assistant familial lui-même ? Tout manquement à ces règles peut signifier la perte de l'agrément et cela ne fait qu'accroître le sentiment de dévalorisation et le manque de considération dont se plaint la profession.

Nombre d'assistants familiaux souffrent aussi de ne pas être consultés ni informés de la situation du mineur et, surtout, d'être tenus à l'écart des réunions le concernant. La solution envisagée dans le projet de loi est encore une fois très floue, et nous craignons que l'employeur demeure libre d'organiser le service en fonction de ses moyens ou de ses choix, indépendamment des besoins et des droits des accueillants. Nous serons très attentifs à ce point, car il est indispensable qu'une personne qui a la garde d'un enfant soit consultée, qu'elle puisse participer aux réunions d'évaluation et qu'elle rencontre au moins une fois par an les services départementaux pour une autre raison que celle de se faire contrôler.

A cet égard, il nous semble aussi important de veiller à ce que les contrats d'accueil soient établis au plus tard à l'arrivée de l'enfant, car il est fréquent qu'ils soient rédigés plusieurs semaines, voire plusieurs mois après l'accueil.

Concernant la formation, les remarques que je formulais pour les assistants maternels valent aussi pour les assistants familiaux. C'est une bonne chose qu'elle soit étendue et puisse aboutir à une qualification, mais, là encore, nous ne savons rien, ni sur le contenu, ni sur la durée de la formation, ni sur la rémunération de la personne durant cette période, ni sur l'éventuelle reconnaissance nationale de la qualification, car toutes ces questions primordiales sont renvoyées à des décrets.

Enfin, la prise en compte de l'accueil des jeunes majeurs jusqu'à l'âge de vingt et un ans est un progrès. En effet, les lois de 1987 et de 1992 limitaient l'application du code du travail à la prise en charge des enfants mineurs, ce qui posait un réel problème aux familles confrontées à un dilemme lorsque l'enfant atteignait l'âge de dix-huit ans.

Avant de conclure, je soulignerai que des questions concernant à la fois les assistants maternels et les assistants familiaux n'ont pas été prises en compte, contrairement à ce que ceux-ci pouvaient légitimement attendre d'un projet de loi relatif à leur statut.

Il s'agit, tout d'abord, en ce qui concerne le droit syndical, de la diffusion des informations et de la protection des militants syndicaux contre toute intimidation ou de mesures de rétorsion de la part de l'employeur.

Il s'agit aussi de la question des retraites et, en particulier, de la validation des périodes travaillées avant 1992. En effet, jusqu'en 1991, n'était validé qu'un trimestre par an et par enfant. L'article 29 de la loi Fillon d'août 2003 a certes ouvert la possibilité de racheter les périodes d'affiliation au régime général qui n'ont pas donné lieu à validation de quatre trimestres par an. Mais les conditions de rachat sont exorbitantes et hors de portée des assistantes maternelles et familiales. La loi aurait dû mettre fin à cette injustice et permettre la validation de la totalité des périodes effectivement travaillées avant 1992.

Enfin, de nombreuses mesures de ce projet de loi seront à la charge des conseils généraux. Pourront-il y faire face ? Quelles compensations l'Etat a-t-il prévu ?

Madame la ministre, ce que les assistants maternels et familiaux espèrent, c'est un véritable statut et la considération et le respect qu'ils méritent, car ils exercent un travail difficile impliquant de grandes responsabilités. Ces responsabilités ne doivent toutefois pas leur ôter toute possibilité d'initiative et les réduire à être de simples exécutants. Pour nous, ils sont des professionnels de l'enfance à part entière et doivent être considérés comme tels.

Madame la ministre, votre projet de loi répond en partie à leurs attentes, mais il ne va pas assez loin. En outre, et comme je n'ai cessé de le répéter, trop d'articles renvoient à des décrets, ce qui, pour l'heure, confère un caractère trop incertain à ce texte. Nous ne pouvons donc le voter en l'état ; c'est pourquoi nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui correspond - nous sommes unanimes à le reconnaître - à une véritable attente des assistants maternels mais également des familles.

Le statut des assistants maternels date de 1977. Il a instauré l'agrément par le président du conseil général comme préalable à la garde des enfants et la mise en place de premières actions de formation.

Ce statut a été renforcé par la loi du 12 juillet 1992, qui a rendu la formation initiale obligatoire, a simplifié la procédure d'agrément et a institué une mensualisation des rémunérations.

Toutefois, face à l'insuffisance de l'offre de garde pour la petite enfance constatée dans la France entière, et non pas seulement en région parisienne ou dans le sud du pays, il était urgent de réformer et de valoriser le statut des assistants maternels.

Ce texte répond à une triple attente.

Tout d'abord, il opère une nécessaire clarification entre les statuts des assistants maternels permanents, qui seront désormais appelés assistants familiaux, et les assistants maternels qui accueillent des enfants chez eux pour la journée.

Ensuite, le projet de loi prévoit une rénovation du statut juridique des assistants maternels.

Enfin, il rend possible une amélioration de la qualité de l'accueil des enfants qui leur sont confiés.

La Conférence de la famille de 2003 a souligné la nécessité de développer des modes de garde pour les jeunes enfants alors que le taux de natalité et le taux d'activité féminine continuent de croître. La garde par un assistant maternel, qui concerne 20% des enfants de moins de trois ans, est le mode de garde le moins coûteux pour la collectivité, tout en garantissant aux enfants un accueil plus personnalisé que dans une structure collective.

Face à la forte demande des familles, qui devrait augmenter avec la mise en place de la PAJE, l'offre de garde par un assistant maternel est aujourd'hui largement insuffisante. C'est pourquoi ce texte, en professionnalisant davantage les assistants maternels et en rapprochant leur statut juridique du droit commun du code du travail, devrait favoriser de nouvelles « vocations ».

Je ne reviendrai pas sur le détail des mesures proposées dans le projet de loi. Toutefois, je me permettrai de souligner une lacune du texte et d'émettre quelques réserves.

Face aux problèmes que rencontrent aujourd'hui les familles pour trouver un mode de garde pour leurs jeunes enfants, je regrette que ce texte ne traite pas des modes de garde dans leur globalité. Alors que la Conférence de la famille de 2003 a permis de mettre en place une réflexion au niveau national sur l'accueil de la petite enfance, il est dommage de ne traiter ici que d'un mode de garde, même s'il s'agit du mode de garde privilégié par les Français.

Par ailleurs, s'il est indéniable qu'il est urgent de réformer le statut des assistants maternels, il ne faut pas non plus déséquilibrer le rapport contractuel avec les parents employeurs. En effet, s'il est nécessaire de rendre obligatoire l'établissement d'un contrat de travail écrit, de redéfinir les modalités de rupture du contrat de travail, la mise en place de mesures contraignantes pourrait entraîner un effet inverse de celui qui est recherché et entraîner éventuellement une hausse de la « garde au noir ». C'est un point sur lequel nous devons rester vigilants.

Pour cela, il est indispensable de créer une certaine souplesse, notamment en matière de durée de temps de travail ou de fixation des congés annuels.

Les propositions faites par notre rapporteur et la commission des affaires sociales sur ces deux points sont tout à fait pertinentes. Instaurer non pas une durée de travail hebdomadaire maximale mais un plafond annuel me paraît tout à fait judicieux, étant donné la nécessaire flexibilité demandée à cette profession.

Toutefois, il me semble nécessaire d'apporter aussi un certain nombre de garanties aux parents. On a en effet beaucoup parlé du statut des assistants maternels. Selon moi, un partenariat, un contrat, est bien géré et bien vécu lorsqu'il est bien compris par les deux parties.

Ainsi, la première garantie nécessaire concerne la qualité de l'accueil offert aux enfants. C'est pourquoi je souhaite que les assistants maternels reçoivent une formation de soixante heures consécutives avant d'accueillir les enfants, et non après, afin que celle-ci soit efficace. Jusqu'à présent, cette formation était en effet étalée dans le temps et avait souvent lieu après l'accueil.

La deuxième garantie concerne la pérennité du contrat de travail. Je propose donc que les assistants maternels soient soumis aux mêmes contraintes que les parents en cas de rupture abusive du contrat de travail et qu'ils versent alors des dommages et intérêts à leurs employeurs.

Enfin, il faut prévoir la garantie d'une concertation avec l'assistant maternel en matière de fixation de la durée et des dates des congés.

Malgré ces remarques de fonds qu'il m'apparaissait nécessaire de formuler et de vous exposer, mon jugement global sur ce texte et celui du groupe de l'Union centriste, que je représente, reste nettement positif. Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.

M. Alain Gournac. Le projet de loi que vous nous présentez, madame le ministre, répond à une véritable attente et vient compléter la politique familiale poursuivie depuis deux ans par le Gouvernement.

Les chiffres sont pour le moins parlants et nous rappellent l'urgence de ce dossier : 300 000 assistants maternels accueillent 740 000 enfants de moins de six ans, dont près de 500 000 de moins de trois ans, sans parler des structures d'accueil collectif, de la garde au domicile des parents, des centres de loisirs maternels et des accueils périscolaires après la classe. Par ailleurs, 43 000 assistants familiaux accueillent de façon permanente 65 000 enfants ou adolescents séparés de leur famille pour des raisons graves.

Je n'aime pas particulièrement les chiffres, mais ceux-là nous permettent, si besoin est, de mesurer combien il est nécessaire de revaloriser la profession d'assistants maternels.

Et je ne dis pas uniquement cela parce que notre pays en a grand besoin mais aussi, madame le ministre, parce que, comme vous, j'aime cette profession.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bravo !

M. Alain Gournac. Je connais bien les assistants maternels. En tant que maire, je sais avec quelle satisfaction les parents leur confient leurs enfants. C'est une profession formidable, un peu à part du fait des attentes mêmes auxquelles elle répond.

Et notre souci à tous - j'en ai souvent parlé avec les élus de mon département des Yvelines - est de la professionnaliser toujours plus et toujours mieux sans la dénaturer.

Il faut, et nous y arrivons peu à peu - ce texte en est la preuve -, la rendre plus dense sans lui faire perdre sa souplesse, afin qu'elle colle le plus possible à la vie moderne.

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Alain Gournac. Le rapport « Avenirs et métiers » du Commissariat général du Plan estimait à 600 000 assistants maternels les besoins de notre société à l'horizon 2010, dont 150 000 pour remplacer les départs à la retraite, et à 450 000 les besoins en créations nettes de postes.

Ce doublement des effectifs par rapport à la situation actuelle anticipe une forte augmentation de l'activité des mères de jeunes enfants. Ce ne sont certes que des projections. Toujours est-il que cette profession - le sait-on assez ? - est la deuxième de France après celle d'enseignant.

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Alain Gournac. Nous sommes donc devant une réalité sociale et professionnelle qui s'impose à notre sagacité et à notre vigilance.

L'accueil d'enfants à domicile est devenu une véritable profession faisant appel à la fois à des qualités humaines bien particulières et à des compétences techniques, comme celles des métiers de l'enfance. II est plus que temps de considérer cette activité comme une activité professionnelle à part entière et de lui reconnaître toutes les caractéristiques d'un véritable métier.

La loi du 17 mai 1977 avait reconnu le statut de salarié aux assistants maternels. Celle du 12 juillet 1992 avait amélioré leurs conditions d'exercice et leur niveau de rémunération.

Votre projet de loi, madame le ministre, permet de franchir un cap important, notamment en rapprochant cette profession du droit commun.

Mais, tout d'abord, vous avez souhaité que soit améliorée la qualité de l'offre de garde et que les compétences soient définies avec précision. Cette définition était la condition sine qua non de toute reconnaissance pour cette profession.

Accueillir un enfant à la journée, un enfant qui vous a été confié par des parents, est un métier différent de l'accueil permanent d'un enfant ou d'un adolescent séparé de ses parents pour des raisons graves et qui vous a été confié par les services de l'aide sociale à l'enfance.

Effectuer cette distinction, c'est du même coup reconnaître des compétences différentes et donc commencer de s'interroger sur la spécificité des agréments. C'est reprendre la question de la formation professionnelle sur des bases plus adaptées. C'est examiner les conditions d'exercice de cette activité professionnelle et faire des propositions innovantes. C'est enfin apporter aux professionnels des améliorations à leurs conditions matérielles de travail en matière de contrat, de rémunération, de durée du travail et de congés.

Malgré les attentes des professionnels et les recommandations du rapport remis en avril 2002 au ministre délégué à la famille de l'époque, le précédent gouvernement n'avait pas souhaité revenir sur le statut unique issu de la loi du 12 juillet 1992.

Aussi la décision du présent Gouvernement d'opérer cette distinction ne peut-elle que recueillir notre totale approbation. C'était le verrou qui empêchait d'ouvrir la voie de la reconnaissance.

Nous avons donc désormais des assistants maternels, d'une part, et des assistants familiaux, d'autre part, avec un agrément mieux adapté aux exigences de chacun de ces deux métiers.

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Alain Gournac. Il convient de souligner que le présent projet de loi conforte la professionnalisation progressive de ces deux métiers en ce qu'il reconnaît l'importance du rôle éducatif de ces professionnels.

Aussi, il était important de proposer que la capacité éducative des candidats à ces métiers soit prise en compte dans l'agrément.

II est tout aussi important que les critères de logement, qui doivent demeurer rigoureux - sans excès toutefois -, ne soient pas un obstacle à l'émergence des vocations. Aussi notre excellent rapporteur a-t-il souhaité que les candidats sérieux soient aidés et encouragés. Ce n'est là que justice et bon sens.

Or, dans les zones fortement urbanisées, ces critères sont ressentis comme draconiens et dissuasifs.

II convient donc de donner la priorité aux assistants maternels et familiaux dans l'attribution d'un logement social ainsi que la possibilité d'obtenir un logement supérieur à celui correspondant à la taille de leur foyer. (M. Jean Chérioux applaudit.)

M. Roland Muzeau. Il faut construire des logements !

M. Guy Fischer. C'est bien mal engagé !

M. Alain Gournac. Ces différents points - distinction claire des deux métiers, prise en compte de la capacité éducative des candidats, aide dans l'acquisition de ce qu'il faut bien appeler l'outil de travail - sont des avancées significatives qui précisent les contours de cette profession.

Permettez-moi de dire, mes chers collègues, sans vouloir polémiquer, qu'avant d'imaginer de nouveaux emplois et de nouveaux services, il eût été bon de s'occuper de cette profession, qui est là sous nos yeux, dans notre vie quotidienne, et qui est appelée à y être de plus en plus présente.

II y a là une vraie demande, un vrai besoin, un vrai métier avec une utilité sociale forte.

C'est la raison pour laquelle le volet formation du projet de loi du Gouvernement est si important. C'est la raison pour laquelle il fallait définir la rémunération des assistants maternels sur une base horaire et non plus journalière, et adapter leurs horaires de travail.

Je crois qu'ensemble, et ce depuis les premières concertations, nous avons fait progressé les choses dans le bon sens. Nous avons fait même plus en suggérant d'inclure dans la loi la référence à la convention collective nationale des assistants maternels. Les négociations actuellement en cours ne pourront que compléter utilement et adapter les dispositions du texte.

L'éducation est le plus beau et le plus difficile des métiers, quel que soit l'âge des enfants. Aussi, quelques principes assurés et beaucoup de pragmatisme constituent la bonne méthode.

Ne soyons donc pas étonnés que, dans la revalorisation et la reconnaissance de cette profession, cette méthode ait été spontanément requise par les uns et les autres. Nous pouvons nous en féliciter et être persuadés que toutes les conditions sont désormais réunies pour un développement harmonieux de cette activité, que notre travail en commun va enfin installer dans l'univers des métiers.

Ai-je besoin de dire qu'en votant ce texte, je me réjouirai profondément pour toutes ces personnes dont j'ai pu éprouver, sur le terrain et depuis toujours, le sens des responsabilités allié à un besoin d'élever, au sens fort du terme, les enfants qui leur sont confiés. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Josée Roig, ministre. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous aurons l'occasion de discuter tout à l'heure et au cours de la séance de mardi prochain, de la plupart de vos remarques, qui correspondent à des amendements que vous présenterez les uns et les autres.

Au demeurant, certains des propos tenus par votre excellent rapporteur ayant été repris par d'autres sénateurs, toutes tendances confondues, je vais essayer d'y répondre dès maintenant.

Je pense notamment à la compensation financière, qui a constitué l'un de vos arguments, madame Gautier. Il se trouve que le projet de loi n'organise pas en fait de transfert de compétences puisque l'article 77-2 de la Constitution ne s'applique pas.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Si ! Il y a extension des compétences ; nous aurons l'occasion d'en reparler.

Mme Marie-Josée Roig, ministre. La nécessité d'un transfert de moyens ne nous paraît pas indispensable dans la mesure où l'on se trouve sur un périmètre inchangé de compétence. Mais nous en reparlerons lors de la discussion des articles.

Pour l'instant, je souhaite donner l'accord du Gouvernement sur un certain nombre de vos propositions. Je pense notamment à la possibilité donnée aux présidents de conseils généraux de déroger au nombre d'enfants accueillis, qui me semble tout à fait compatible avec l'esprit du texte. De même, l'idée de faire passer les délais pour les notifications d'agrément à trois ou quatre mois me paraît tout à fait acceptable, tout comme d'ailleurs l'inscription dans la loi des relais assistants maternels, les RAM ; ce n'est que justice, et nous aurons l'occasion de revenir sur ce point.

Madame Férat, je suis, comme vous, satisfaite de voir ce texte inscrit à l'ordre du jour des travaux du Parlement et je suis aussi attentive que vous à l'amélioration des rémunérations des assistants maternels et familiaux. Mais, comme je vous l'ai dit, le projet de loi prévoit déjà des améliorations considérables, grâce notamment à l'effet de convergence des SMIC et à la rémunération des absences.

Je rassure M. Lorrain, qui m'a posé la question de savoir où en était la convention collective : Mme Levaux, présidente de la fédération nationale des particuliers employeurs, la FEPEM, m'a indiqué, très récemment, que la signature devrait intervenir courant juin.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Très bien !

Mme Marie-Josée Roig, ministre. Je précise que ce sera la première convention collective en la matière. Elle viendra conforter les dispositions du présent projet de loi visant à la revalorisation de ces métiers. Ce sera une belle réussite dans les négociations.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Très bien !

Mme Marie-Josée Roig, ministre. Madame Terrade, il sera difficile d'intégrer les assistants familiaux dans la fonction publique territoriale. Je vous rappelle que la loi de 1992 n'avait déjà pas retenu cette idée. Si cela n'a pas été fait, c'est que le statut de fonctionnaire est difficilement conciliable avec la souplesse de l'accueil que demandent les employeurs.

Je ne partage pas votre pessimisme sur l'offre de garde. Celle-ci a considérablement augmenté depuis dix ans, avec un doublement du nombre des assistantes maternelles. Le plan crèche permettra, en outre, de proposer aux parents dans les années à venir 20 000 places nouvelles de crèche, grâce aux 200 millions d'euros qui ont été dégagés à cet effet. Cela n'est pas insignifiant.

De même, la PAJE permet, vous l'avez vous-même souligné, de verser 150 euros mensuels aux familles les plus modestes, afin de les aider à rémunérer les assistants maternels. Cette disposition représente un coût de 800 millions d'euros. Là encore, je ne peux pas considérer que ce soit tout à fait insignifiant !

Madame Printz, vous trouvez anormal de demander des justificatifs d'emploi pour le règlement de la PAJE. Il me paraît indispensable de fournir la justification d'un emploi réel, car la PAJE ne peut pas financer des emplois au noir.

Par ailleurs, vous évoquez les nombreux renvois au décret : dans un débat aussi riche que celui-ci, où la discussion est très ouverte, tout ne peut pas être fixé par la loi. Un grand nombre de points concrets feront donc l'objet de textes réglementaires.

Madame Gautier, certes, le texte ne traite pas de l'offre de garde dans sa totalité, mais je vous rappelle l'existence du fameux plan crèche.

S'agissant de la formation des assistants maternels, je vous indique qu'elle sera de soixante heures avant l'accueil du premier enfant. Ce point me paraît important parce qu'on avait l'impression que les assistants maternels se formaient « sur le tas », si vous me permettez cette expression triviale, et, quand il s'agit d'enfants, cela n'est absolument pas acceptable ! Je me réjouis donc de cette formation préalable à tout accueil.

A l'occasion de cette formation, une indemnisation sera versée aux assistants maternels, dont le montant sera également fixé par décret. Il me paraît important d'apporter cette précision.

Madame Terrade, je souscris totalement à l'idée des passerelles de formation. Cela va absolument dans le sens dans lequel nous travaillons avec l'éducation nationale. C'est une ouverture intéressante compte tenu des débouchés qu'elle peut offrir ; je pense à l'équivalence d'un certificat d'aptitude professionnelle petite enfance. Les assistants maternels, ou assistantes maternelles - il faudra tout de même revenir à cette appellation - y seront particulièrement sensibles.

J'ajoute enfin, point important, que les assistants familiaux sont membres à part entière de l'équipe pluridisciplinaire.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j'espère avoir résumé vos interventions. Bien entendu, nous allons retrouver les différents points au cours de la discussion des articles, mais je me réjouis de la richesse de cet échange entre nous, qui montre que ce texte vous paraît à tous nécessaire. Il sera, je crois, apprécié tant par les parents que par les assistants maternels et familiaux. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.