sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Serge Vinçon
2. Service public de l'électricité et du gaz. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Articles additionnels avant le titre Ier (suite)
Amendements nos 232 et 233 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Marie-France Beaufils, MM. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement no 232 ; rejet de l'amendement no 233.
Amendements nos 234 et 244 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Evelyne Didier, MM. Robert Bret, le rapporteur, le ministre délégué, Jean-Pierre Bel. - Rejet des amendements nos 234 et 244.
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
Amendements nos 245 et 246 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 247 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 258 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Hélène Luc, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Article additionnel avant l'article 1er A
Amendement no 139 de M. Bernard Piras. - MM. Jean-Pierre Bel, Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances ; le rapporteur, le ministre délégué, Jean Chérioux, Mmes Marie-France Beaufils, Hélène Luc, M. Robert Bret. - Rejet.
Articles additionnels avant l'article 1er A ou avant L'article 1er
Amendements nos 257, 255, 251, 250, 253 de Mme Marie-France Beaufils, 137, 138 et 158 de M. Bernard Piras. - Mme Evelyne Didier, MM. Daniel Reiner, Robert Bret, Bernard Piras, Mmes Marie-France Beaufils, Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des amendements nos 257, 255, 250, 253, 137, 138, 158 et, par scrutin public, de l'amendement no 251.
PRÉSIDENCE DE M. Serge Vinçon
Articles additionnels avant l'article 1er A
Amendements nos 140 et 142 de M. Bernard Piras. - MM. Jean-Pierre Bel, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Articles additionnels avant l'article 1er A ou avant l'article 1er
Amendements nos 141 de M. Bernard Piras et 252 de Mme Marie-France Beaufils. - MM. Daniel Reiner, Robert Bret, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Amendements nos 143 de M. Bernard Piras et 249 de Mme Marie-France Beaufils. - M. Daniel Reiner, Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Jean-Pierre Bel. - Rejet des deux amendements.
Amendements identiques nos 1 de la commission et 248 de Mme Marie-France Beaufils. - MM. le rapporteur, Gérard Le Cam, le ministre délégué. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.
Articles additionnels avant l'article 1er
Amendement no 254 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 256 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements identiques nos 144 de M. Bernard Piras et 259 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos 145 à 155 de M. Bernard Piras, 261, 264 à 266, 268 à 272 de Mme Marie-France Beaufils et 2 à 5 de la commission. - MM. Bernard Piras, Robert Bret, Jean-Pierre Bel, Mme Marie-France Beaufils, M. Gérard Le Cam, Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur, Daniel Reiner, Daniel Raoul.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
Amendements nos 262 de Mme Marie-France Beaufils, 6, 7 de la commission et sous-amendement no 64 de M. Xavier Pintat ; amendements nos 260, 263, 267, 273 à 277 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements identiques nos 8 de la commission et 156 de M. Bernard Piras ; amendements nos 157 de M. Bernard Piras et 65 rectifié de M. Xavier Pintat. - Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur, Xavier Pintat, Mmes Evelyne Didier, Annie David, MM. Gérard Le Cam, Jean-Pierre Bel, le ministre délégué, Bernard Piras, François Fortassin. - Retrait du sous-amendement no 64 ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 144 et 259 ; rejet des amendements nos 145 à 152, 154, 155, 157 et 260 à 277 ; adoption des amendements nos 2, 3, 153, 4 à 8, 156 et 65 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos 159 de M. Bernard Piras et 386 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos 160, 278 à 288 de Mme Marie-France Beaufils. - MM. Daniel Reiner, Gérard Le Cam, Mmes Marie-France Beaufils, Evelyne Didier, Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet de tous les amendements.
Adoption de l'article.
Amendements nos 290 de Mme Marie-France Beaufils et 9 de la commission. - Retrait de l'amendement no 290 ; adoption de l'amendement no 9 rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 2 bis
Amendement no 161 de M. Bernard Piras. - MM. Bernard Piras, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements nos 291 de Mme Marie-France Beaufils, 10 et 11 de la commission. - Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement no 10 ; rejet de l'amendement no 291 ; adoption de l'amendement no 11.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos 162 de M. Bernard Piras et 388 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos 289, 292, 293 de Mme Marie-France Beaufils, 12, 13 de la commission et 163 de M. Bernard Piras. - M. Bernard Piras, Mmes Odette Terrade, Evelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des amendements nos 162, 388, 289, 292, 293 et 163 ; adoption des amendements nos 12 et 13.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 3
Amendement no 164 de M. Bernard Piras. - MM. Bernard Piras, le rapporteur, le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils. - Rejet par scrutin public.
Amendements nos 165 de M. Bernard Piras et 387 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos 295 à 298 de Mme Marie-France Beaufils, 166 à 168 de M. Bernard Piras, 107 rectifié bis de M. Jacques Valade, 91 rectifié de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, et 14 à 19 de la commission. - M. Daniel Reiner, Mme Evelyne Didier, M. Xavier Pintat, Mme Odette Terrade, MM. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Gérard Le Cam, Daniel Raoul, Mme Marie-France Beaufils. - Retrait de l'amendement no 107 rectifié bis ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 165 et 387 ; rejet des amendements nos 295 à 298 et 166 à 168 ; adoption des amendements nos 91 rectifié et 14 à 19.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 4
Amendements identiques nos 66 de M. Xavier Pintat et 216 de M. Jean Besson. - MM. Xavier Pintat, Michel Sergent, le rapporteur, le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils. - Retrait de l'amendement no 66 ; adoption de l'amendement no 216 insérant un article additionnel.
Amendement no 169 de M. Bernard Piras. - MM. Bernard Piras, le rapporteur, le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils. - Rejet.
Mme Odette Terrade.
Amendements identiques nos 170 de M. Bernard Piras et 389 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos 212 de M. Jean-Pierre Plancade, 300 rectifié et 301 de Mme Marie-France Beaufils. - M. Bernard Piras, Mme Marie-France Beaufils, M. Jean-Pierre Plancade, Mmes Evelyne Didier, Annie David.
Suspension et reprise de la séance
Amendements nos 213 de M. Daniel Raoul, 109 rectifié bis de M. Jacques Valade ; amendements identiques nos 67 de M. Xavier Pintat et 217 de M. Jean Besson ; amendements nos 20 à 22 de la commission et 78 de M. Henri Revol. - MM. Daniel Raoul, Xavier Pintat, Michel Sergent, le rapporteur, Henri Revol, Mme Annie David, M. le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils, MM. Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade. - Rejet, par scrutin public, des amendements identiques nos 170 et 389 ; rejet des amendements nos 212, 300 rectifié, 301, 213 et 299 rectifié ; retrait de l'amendement n° 109 rectifié bis ; rejet, par scrutin public, des amendements identiques nos 67 et 217 ; adoption des amendements nos 20, 21 et 78, l'amendement n° 22 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 390 et 302 à 304 de Mme Marie-France Beaufils. - Mmes Odette Terrade, Evelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Daniel Raoul, Jean Pépin, Mme Marie-France Beaufils. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement n° 390 ; rejet des amendements nos 302 à 304.
Adoption de l'article.
Article additionnel avant l'article 7
Amendement no 171 de M. Bernard Piras. - MM. Daniel Reiner, le rapporteur, le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils, M. Gérard Le Cam. - Rejet.
Amendements nos 391, 305 de Mme Marie-France Beaufils et 23 à 25 de la commission. - MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Mme Annie David, M. le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement n° 391 ; rejet de l'amendement n° 305 ; adoption des amendements nos 23 à 25
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 392, 306 de Mme Marie-France Beaufils, 26 rectifié de la commission et sous-amendements identiques nos 68 de M. Xavier Pintat et 218 de M. Jean Besson. - Mme Marie-France Beaufils, MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Xavier Pintat, Michel Sergent, le ministre délégué. - Retrait du sous-amendement n° 68 ; rejet des amendements nos 392, 306 et du sous-amendement n° 218 ; adoption de l'amendement n° 26 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel avant l'article 9
Amendement no 307 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements nos 393, 308 à 313 rectifié de Mme Marie-France Beaufils, 27 de la commission et 113 de M. Marcel Deneux. - Mmes Odette Terrade, Evelyne Didier, Annie David, MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Paul Amoudry, le ministre délégué. - Rejet des amendements nos 393, 308 à 313 rectifié et 113 ; adoption de l'amendement n° 27.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 394, 314 à 316 de Mme Marie-France Beaufils, 28 de la commission ; amendements identiques nos 69 de M. Xavier Pintat et 219 rectifié de M. Jean Besson ; amendements nos 172, 173 de M. Bernard Piras, 79 de M. Henri Revol, sous-amendement n° 418, amendements nos 29 et 30 de la commission. - Mme Evelyne Didier, M. le rapporteur, Mme Odette Terrade, MM. Gérard Le Cam, Xavier Pintat, Michel Sergent, Daniel Raoul, Henri Revol, le ministre délégué, Mme Marie-France Beaufils. - Retrait des amendements nos 29 et 30 ; rejet des amendements 394, 314, 316, 315 rectifié, 172, 173 ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 69 et 219 rectifié ; adoption de l'amendement n° 28, du sous-amendement n° 418 et de l'amendement n° 79 modifié.
Adoption de l'article modifié
Mme Marie-France Beaufils, M. le président.
Article additionnel avant l'article 11
Amendement no 174 de M. Bernard Piras. - MM. Bernard Piras, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements nos 395 et 317 de Mme Marie-France Beaufils. - Mmes Odette Terrade, Evelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet, par scrutin public, de l'amendement n° 395 ; rejet de l'amendement n° 317.
Adoption de l'article
Amendement no 396 de Mme Marie-France Beaufils. - MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Amendements identiques nos 175 de M. Bernard Piras et 397 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos 31, 32 de la commission, 92 de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, et 176 de M. Bernard Piras. - M. Bernard Piras, Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur, Philippe Marini, rapporteur pour avis ; le ministre délégué. - Rejet, par deux scrutins publics, des amendements nos 175, 397 et 176 ; adoption des amendements nos 31, 32 et 92.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 13
Amendement n° 70 de M. Xavier Pintat. - M. Xavier Pintat, le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Amendements nos 115 et 116 de M. Jean-Paul Amoudry. - MM. Jean-Paul Amoudry, le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait des deux amendements.
Renvoi de la suite de la discussion.
3. Dépôt d'un rapport d'information
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Serge Vinçon
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Service public de l'électricité et du gaz
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 383, 2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières. [Rapport n° 386, (2003-2004) et avis nos 387 et 400 (2003-2004).]
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l'examen des amendements portant articles additionnels avant le titre Ier.
Articles additionnels avant le titre Ier (suite)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 232, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'attente de la réalisation d'un bilan contradictoire sur les effets de la libéralisation du secteur énergétique, la France demande, par l'intermédiaire du Ministre chargé de l'Energie, la suspension de la transposition des directives relatives à l'ouverture à la concurrence et à l'institution des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous souhaitons qu'un bilan contradictoire et transparent sur les conséquences du processus de libéralisation du secteur énergétique soit réalisé ; nous avons déposé un certain nombre d'amendements en ce sens.
Dans l'attente des résultats de ce bilan, nous voudrions que la transposition des directives relatives à l'ouverture à la concurrence et à l'institution de règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz soit suspendue.
Nous connaissons les dangers que comporte la libéralisation pour nos services publics.
Or ceux-ci sont un facteur de cohésion sociale. Il est essentiel de le rappeler aujourd'hui, à l'heure où les inégalités sociales s'accroissent.
Nos services publics font en effet une large place à la redistribution sociale et territoriale à travers les principes de continuité et d'accessibilité des services rendus aux usagers, d'égalité de traitement, de péréquation tarifaire, d'obligation de fourniture, de souci de la qualité des prestations, de minimisation des coûts pour la collectivité, etc.
Ce ne sont donc pas simplement des prestataires de services mais bien aussi des producteurs de lien social et de citoyenneté. Ils portent des valeurs de solidarité essentielles à l'intégration sociale.
Ils comportent peut-être des imperfections, mais ils représentent pour notre pays une belle réussite que nous devons défendre contre la marchandisation.
M. le président. L'amendement n° 233, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'attente d'un réel bilan sur les effets de l'ouverture à la concurrence du secteur énergétique en termes d'emplois, d'efficacité économique et de tarifications, par l'intermédiaire du Ministre chargé de l'Energie, demande, auprès des institutions européennes, un moratoire sur les directives européennes.
Elle s'engage, par ailleurs, à renoncer à l'extension de l'éligibilité aux clients domestiques prévue par les directives 2003/54/CE et 2003/55/CE au plus tard au 1er juillet 2007.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement va dans le sens des amendements précédents.
Nous souhaitons qu'en l'attente d'un réel bilan sur la libéralisation le processus d'ouverture à la concurrence soit suspendu. L'extension de l'éligibilité aux usagers domestiques serait ainsi suspendue.
Nous souhaitons que les petits consommateurs soient protégés des hausses de tarifs que l'on observe aujourd'hui pour les industriels et qui risqueraient, selon un rapport interne, de les affecter également.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Le bilan qui est demandé dans ce rapport a pour objet de suspendre la transposition de la directive à laquelle nous sommes favorables. En conséquence, la commission est défavorable aux amendements nos 232 et 233.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 232.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 202 :
Nombre de votants | 311 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 156 |
Pour l'adoption | 113 |
Contre | 198 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 233.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 234, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
La France, par l'intermédiaire du Ministre chargé de l'Energie, demande la renégociation des directives européennes impliquant l'ouverture à la concurrence du secteur énergétique.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous avons amplement développé les raisons pour lesquelles nous souhaitions la renégociation des directives européennes.
Les bénéfices attendus en matière de diminution des tarifs de l'électricité, par exemple, n'ont pas été obtenus. Les industriels se plaignent de voir leurs factures énergétiques subir des hausses très importantes. Ils ont exprimé leur inquiétude face à cette hausse qui peut remettre en cause leur activité.
Ce constat justifie tout à fait que l'on demande une renégociation des directives impliquant l'ouverture à la concurrence dans le secteur énergétique.
M. le président. L'amendement n° 244, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le gouvernement soumet à ses partenaires européens le projet de renégocier, dans le cadre d'un débat démocratique et contradictoire, les conclusions du Conseil européen de Barcelone des 15 et 16 mars 2002. Dans l'attente de cette renégociation, le processus d'ouverture à la concurrence du secteur de l'énergie est suspendu.
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Au Conseil européen des 15 et 16 mars 2002, des négociations concernant des sujets fondamentaux, notamment sur l'âge de la retraite, les fonds de pension, la libéralisation des services publics, la politique salariale et la flexibilité du travail, ont été menées. Des décisions importantes ont été prises.
Ces décisions n'ont pas été prises par le parlement français ou dans le cadre du conseil des ministres, mais à Barcelone, lors du Sommet des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne.
Elles auront des répercussions sur la vie de nos concitoyennes et concitoyens, répercussions, qui, j'en suis convaincu, n'iront pas dans le sens d'une amélioration, loin de là.
Nous le constatons tous les jours, les inégalités sociales et territoriales se creusent, et le processus européen de libéralisation y participe pour une grande part !
Force est de constater que le document intitulé « Conclusions de la présidence » a été élaboré en toute discrétion et au mépris des principes fondateurs de la démocratie parlementaire. A Barcelone, tout a été entériné dans le plus grand secret.
La grande affaire de ce Sommet européen consistait à déterminer le degré et les délais de libéralisation du marché de l'énergie. Etaient dans le collimateur, entre autres, EDF et GDF du fait de leur situation de quasi-monopole en France.
La présidence espagnole et la Commission européenne exigeaient une libéralisation complète, c'est-à-dire le libre choix du fournisseur en Europe pour tous les usagers, entreprises et ménages, en 2003 pour l'électricité et en 2004 pour le gaz. Mais les résultats obtenus ont été différents. En effet, la libéralisation complète en ce qui concerne la fourniture de gaz et d'électricité pour les entreprises, soit près de 70 % du marché, a été prévue pour 2004, et la décision concernant les ménages doit intervenir avant le printemps 2003.
Les autorités françaises ont donc gagné un an par rapport à ce qui était initialement prévu. Elles ont également obtenu que soit demandée à la Commission de Bruxelles la rédaction d'un projet de directive sur les services d'intérêt économique général, dans le respect de l'article 86 du traité, qui affirme la primauté de la concurrence.
Au demeurant, peut-on décemment parler d'une victoire de la diplomatie française dans de telles conditions ? Nous ne le pensons pas.
Une vraie victoire de la France aurait consisté à subordonner la libéralisation de l'énergie à l'approbation d'une telle directive. Mais cela, nous dit-on, aurait nui à la crédibilité de l'Union européenne aux yeux des marchés, les seuls électeurs qui comptent vraiment.
Voilà, il faut le dire, le véritable scandale du sommet de Barcelone : que des gouvernements s'engagent sur des sujets de la plus haute importance sans en avoir informé au préalable les populations qui sont et seront les premières concernées.
Mais il y a pire : les gouvernements, rejetant a priori toute idée de dresser un bilan des exemples existants - vous l'avez encore confirmé tout à l'heure, monsieur le ministre - ne se sont même pas interrogés sur le bien-fondé de la libéralisation du marché de l'énergie, sans parler des télécoms ou des transports.
Bref, les décisions prises à Barcelone n'ont, à nos yeux, aucune légitimité. Elles constituent un véritable coup d'État à l'échelon européen.
Et l'on s'étonne, dans ces conditions, que dirigeants et commentateurs politiques aient l'audace de déplorer l'abstention croissante des électeurs, comme on a pu le voir il y a quelques semaines ! La raison en est pourtant évidente : une Europe se construisant de cette manière-là n'est pas de nature à rapprocher les citoyens des décisions.
Finalement, le seul intérêt du Sommet de Barcelone fut de permettre au Gouvernement de faire de l'Europe des commissaires de Bruxelles, cette Europe supposée technocratique et en proie aux lobbies de toute sorte, la coupable idéale. Il est des décisions politiquement difficiles à assumer pour ceux qui les ont prises.
Compte tenu de tous ces éléments, nous demandons, dans le cadre d'un processus enfin démocratique et contradictoire, la renégociation des conclusions du Conseil européen de Barcelone des 15 et 16 mars 2002.
En attendant que les citoyens aient été consultés, le processus d'ouverture à la concurrence du secteur de l'énergie mérite d'être suspendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements qui ont pour objet de demander la renégociation des conclusions du Sommet de Barcelone, lesquelles, je le rappelle, ont été négociées par le gouvernement Jospin.
Mme Hélène Luc et M. Robert Bret. Mais nous avons toujours été contre Barcelone !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je m'adressais aux socialistes. En tout cas, j'espère que ceux qui soutenaient le gouvernement à l'époque s'abstiendront au moins sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. C'est vrai, le groupe communiste a toujours été contre le Sommet de Barcelone. Mais, comme l'a dit M. Bocquet, il a eu tort de ne pas quitter le Gouvernement à l'époque. (Rires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour explication de vote sur l'amendement n° 234.
M. Jean-Pierre Bel. Depuis le début de ce débat, le Gouvernement et la majorité n'ont de cesse de masquer leurs décisions d'aujourd'hui derrière des responsabilités antérieures.
J'ai eu l'occasion, hier, de reprendre la chronologie des faits et de rappeler qu'entre les directives de 1996 et 2003 il y a eu la loi de 2000 votée sous le gouvernement de Lionel Jospin, puis le Sommet de Barcelone. Nous avons expliqué dans quel contexte ce Sommet avait eu lieu et précisé que Lionel Jospin avait réussi à poser un certain nombre de principes.
Je considère que l'ouverture à la concurrence du marché de l'énergie ne date pas du Sommet de Barcelone. A cette occasion, a été fixé le calendrier de cette ouverture, dont Lionel Jospin a réussi à exclure les ménages.
Face à l'attitude répétitive qui consiste à s'abriter sous un parapluie bien commode pour se cacher, notre position est claire : comme nous l'avons dit hier, il n'est pas question pour nous de nous écarter du chemin qui a été tracé. C'est pourquoi nous voterons les amendements proposés par le groupe CRC.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 244.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(M. Christian Poncelet remplace M. Serge Vinçon au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 245, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement soumet à ses partenaires européens le projet d'insérer systématiquement une clause de réversibilité dans les futures directives européennes.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cette présentation de l'amendement n°245 vaudra également pour l'amendement n° 246.
Ces deux amendements sont importants.
Ils visent à ce que le Gouvernement soumette à ses partenaires européens le projet d'insérer systématiquement une clause de réversibilité, dans les futures directives européennes pour ce qui concerne l'amendement n° 245, et dans les directives prises ces dernières années pour ce qui concerne l'amendement n° 246.
Les Anglais ont dû faire marche arrière compte tenu des conséquences dramatiques de la libéralisation de leur rail ! Cette expérience devrait vous convaincre de l'utilité de ce principe de précaution.
En effet, on connaît aujourd'hui la nocivité d'un certain nombre de ces directives - sinon de toutes -, en particulier de celle dont nous parlons en ce moment.
Il serait donc de bonne politique pour construire une Europe qui aille dans le bon sens d'offrir à celle-ci le droit à l'erreur, c'est-à-dire la possibilité de faire marche arrière. Hier soir, j'ai cru comprendre, monsieur le ministre, que vous nous invitiez, les uns et les autres, à nous pencher sur notre histoire afin de reconnaître nos erreurs et nous permettre de construire autre chose. Nous vous invitons à faire de même en ce qui concerne la construction européenne.
Le bilan que l'on peut dresser dans le domaine énergétique peut suffire à nous en convaincre ; je pense notamment à l'expérience allemande.
En 1998, l'Allemagne a été la première à libéraliser à 100 % son marché de l'électricité et du gaz. Or, cet empressement des autorités allemandes n'a pas été couronné de succès. En effet, si, légalement, entreprises et particuliers peuvent choisir leur fournisseur d'énergie, sur 50 millions de consommateurs, 700 000 seulement ont changé de fournisseur.
Aujourd'hui, deux grandes compagnies produisent et transportent 80 % de l'énergie consommée. Rappelons au passage que l'Allemagne est le plus gros consommateur d'énergie en Europe.
Avant la libéralisation, il y avait un seul fournisseur, qu'il s'agisse d'une régie municipale, d'un fournisseur régional ou supranational, qui disposait d'un monopole dans chaque localité. La concurrence remet en cause ces monopoles locaux en introduisant une nouvelle contrainte : il convient de sortir de son Land d'origine pour conquérir des marchés dans le reste du pays. Cela exige des investissements que les municipalités financent en ouvrant le capital des régies municipales au capital privé.
Ainsi, pratiquement toutes les régies municipales allemandes ont-elles été transformées en sociétés anonymes, et les communes, comme les régies, ne conservent qu'un faible niveau de participation.
Ce retrait des municipalités du capital, et donc des organes décisionnels des régies, n'est pas sans risque. Rappelons que les régies municipales ont un périmètre d'activité s'étendant bien au-delà de la fourniture d'énergie aux communes. Elles gèrent également l'eau, le chauffage urbain et les déchets.
Attachés à ce mode d'organisation, les syndicats et les usagers se sont mobilisés. Ainsi, à Düsseldorf, ils ont réuni suffisamment de signatures pour faire échouer la vente de la régie par la municipalité.
La loi allemande permet désormais à qui le souhaite de vendre du courant, aux particuliers comme aux industriels. Les entreprises qui disposent du réseau de distribution sont donc dans l'obligation de le louer. L'Allemagne n'a pas instauré d'autorité de régulation ; ainsi, d'un réseau à un autre, le prix d'accès varie-t-il et un protectionnisme voilé s'est-il installé. Les compagnies propriétaires des réseaux de transport ou de distribution ont exigé des droits de passage prohibitifs, quand elles ne refusaient pas tout simplement ce passage, prétextant par exemple une surcharge du réseau.
Dans ce contexte, l'Allemagne connaît des difficultés dans la transposition de la directive européenne et, si elle prend la place du bon élève en libéralisant son marché à 100 % avant les autres, dans les faits, le protectionnisme est bien réel.
Je le répète, l'exemple de la libéralisation qui est intervenue dans ce pays doit nous conduire à la plus grande prudence. Et, à défaut de vous convaincre de ne pas voter ce projet de loi, mes chers collègues, je souhaiterais que nous décidions ensemble de n'avancer dans ce processus de libéralisation qu'après avoir mesuré réellement ses effets à la lueur des expériences étrangères, en particulier de celle de l'Allemagne.
Cet exemple de l'Allemagne m'incite d'ailleurs à vous poser de nouveau une question que j'ai soulevée hier et à laquelle vous n'avez pas répondu. Ce pays a pris des dispositions qui ressemblent fort à une utilisation de la subsidiarité qui ne dit pas son nom. Ne peut-on faire prendre en compte la spécificité française dans le domaine énergétique de manière que nous gardions ces outils absolument efficaces que sont EDF et GDF ?
M. le président. L'amendement n° 246, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement soumet à ses partenaires européens le projet d'insérer une clause de réversibilité dans les directives européennes existantes.
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski., rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements. La clause de réversibilité n'existe pas en droit. Si un gouvernement considère qu'une erreur a été commise, il dispose d'un instrument extrêmement efficace qui consiste à faire voter une nouvelle loi. C'est la seule arme que je connaisse.
Mme Nicole Borvo. Que de temps perdu !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 247, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de permettre, en toute transparence, la réalisation d'un bilan contradictoire sur les effets de la libéralisation engagée par l'Organisation mondiale du commerce depuis 1995, la France, par l'intermédiaire du ministre délégué au commerce extérieur, adresse à cette institution internationale, une demande de gel des négociations actuelles sur les services publics menées dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services.
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Il est dommage que nous ne puissions avoir de débat plus approfondi sur la question de la subsidiarité.
Monsieur le président, ayant défendu hier, par erreur, cet amendement n° 247, je vous ferai grâce d'une seconde explication.
M. le président. C'est la sagesse, encore que la répétition puisse avoir une vertu pédagogique !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Ah, non ! (Sourires.)
Mme Marie-France Beaufils. C'est vous qui avez raison, monsieur le président !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Comme je l'ai dit hier, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Comme je l'étais hier, je suis toujours défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 247.
(L'amendement n'est pas adopté.)
TITRE Ier
LE SERVICE PUBLIC
M. le président. L'amendement n° 258, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé de ce titre :
Pérennisation et modernisation du service public.
La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Il nous semble fondamental que les objectifs de pérennisation et de modernisation du service public soient pris en compte et inscrits dans la loi. A nos yeux, les deux vont ensemble.
Monsieur le ministre, l'absence même de ces objectifs est révélatrice de la nature de votre projet de loi.
L'article 22 vise à ouvrir le capital des entreprises Electricité de France et Gaz de France. Il s'agit d'une première étape, que vous le vouliez ou non, vers la privatisation totale de ces entreprises.
L'exemple de France Télécom est assez éloquent ; il a suffi de privatiser un petit pourcentage du capital de cette entreprise pour faire complètement « capoter » ce grand service public des télécommunications. Et nous voyons aujourd'hui les conséquences des investissements inconsidérés : suppressions d'activités, suppression de boutiques, lesquelles sont de plus en plus éloignées des usagers, suppressions de personnels.
L'ouverture du capital, si minime soit-elle, soumettra plus encore ces entreprises aux exigences de rentabilité. Dans ces conditions, quelles garanties avons-nous que nos services publics seront préservés ? Quelles garanties avons-nous que, dans le respect du principe d'adaptabilité, la modernisation de nos services publics sera effective ?
Nous continuons de penser que la logique de profit ne peut se concilier avec les exigences de service public. La mise en place d'une régulation purement marchande conduira au creusement des inégalités sociales et territoriales, voire économiques, comme cela a déjà été dit.
En fait, nos services publics avaient précisément corrigé ces inégalités. Seules des entreprises organisées en établissements publics industriels et commerciaux, EPIC, comme le sont Electricité de France et Gaz de France, ont pu assumer de telles missions. Et cette belle réussite est incontestablement liée aux investissements à long terme, que seul le service public a pu engager, ainsi- c'est une évidence - qu'au statut du personnel.
C'est parce que nous refusons la logique qui conduit à se satisfaire d'un service public a minima que nous avons déposé sur ce premier titre de nombreux amendements visant précisément au maintien d'un service public de l'énergie de qualité, d'un service qui n'est pas à vendre.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous n'avez pas répondu à la question suivante : en quoi le changement de statut d'EDF et de GDF peut-il garantir à notre pays et plus largement au continent européen, où ces deux entreprises ont vocation à régner sur nos approvisionnements, la sécurité de nos installations ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je voudrais d'abord dire à Mme Luc et à Mme Borvo que le Gouvernement et moi-même avons totalement répondu à leurs questions, aussi bien lors de la discussion générale que depuis qu'a commencé la discussion des articles. Et pour cause : à chaque nouvel amendement que nous présentent nos collègues du groupe CRC, ils avancent systématiquement les mêmes arguments ! (Mme Luc proteste.)
Je considère donc que nous avons répondu, dans le respect du jeu démocratique. Mais ce jeu n'est plus respecté...
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas un jeu, c'est très sérieux ! Vous devriez retirer ce terme !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... puisque vous reprenez chaque fois exactement les mêmes arguments, avec toujours la même chute consistant à dire que nous n'avons pas répondu. Eh bien si, madame Luc, nous avons répondu à chacun des points que vous avez évoqués !
A l'avenir, ne serait-ce que par courtoisie, je m'efforcerai de répondre sur chaque amendement, mais mes réponses seront très brèves. En l'occurrence, la précision que vous proposez n'apporte aucun élément nouveau et la commission a émis un avis défavorable.
Mme Hélène Luc. Dans ce cas, acceptez cet amendement !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J'ajoute que vous jouez sur les mots.
Mme Hélène Luc. Vous n'avez toujours pas répondu. vous ne donnez pas les garanties que nous vous demandons !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis de M. le rapporteur.
J'ajoute, compte tenu de mon expérience, que les amendements présentés par le groupe CRC sont strictement identiques, à la virgule près, à ceux qui ont été déposés à l'Assemblée nationale par les députés communistes. Et les arguments avancés sont rigoureusement les mêmes !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Vous devez les connaître par coeur, monsieur le ministre !
Mme Nicole Borvo. Vous aussi, vous vous répétez !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Forcément : aux mêmes questions, j'apporte les mêmes réponses.
Mme Hélène Luc. C'est notre droit de déposer les amendements que nous voulons ! Je n'ose pas imaginer, monsieur le ministre, que vous contestiez le droit d'amendement des parlementaires ! S'il n'existait pas, que ferions-nous ici ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 258.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 1er A
M. le président. L'amendement n° 139, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article premier A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le service public de l'énergie est un facteur de croissance et de dynamique industrielle.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le ministre, mes chers collègues, j'espère que vous voudrez bien ne pas considérer cet amendement pour un amendement de diversion. Il porte, en effet, toujours sur le même sujet : la future privatisation larvée d'EDF. Nous voulons rappeler certains principes qui fondent le service public et en soulignent les vertus.
Monsieur Marini, j'ai été très étonné de vous entendre affirmer que le prix de l'énergie n'avait pas augmenté et qu'il n'y avait aucun risque à ce sujet. Or, depuis que nous étudions cette question, nous avons eu l'occasion d'auditionner un grand nombre de personnalités, dont le président d'EDF, M. Roussely. Celui-ci nous a expliqué que, contrairement aux prévisions d'un certain nombre d'économistes, l'ouverture à la concurrence n'avait pas fait baisser le prix de l'énergie et que, au contraire, il était orienté à la hausse.
Du reste, de nombreuses études - je pense, en particulier, à un dossier publié par L'Express daté du 14 juin -montrent que le prix de l'énergie est en pleine ascension et détaillent les raisons de cette hausse.
Selon nous, le service public de l'énergie est un facteur de croissance. L'inquiétude majeure que causent les délocalisations, lesquelles renvoient au problème très grave de la désindustrialisation de notre pays a conduit un certain nombre d'entre nous, y compris des collègues de la majorité sénatoriale ici présents, à se rendre récemment en Roumanie et en Bulgarie. Essayant de mieux comprendre ce phénomène de manière à pouvoir l'enrayer, nous avons dressé la liste de nos atouts et handicaps. Or, lors de ce voyage, il nous précisément a été dit - reportez-vous au rapport du groupe de travail sur la délocalisation des activités de main-d'oeuvre industrielle - que, parmi nos atouts, figuraient la qualité et le prix de l'énergie. Ce prix est, en effet, beaucoup moins élevé que dans ces pays d'Europe centrale.
Autrement dit, dans la guerre économique actuelle, nous avons là un réel point d'appui. Le service public de l'énergie constitue un facteur de croissance dans la mesure où c'est la puissance publique, et non pas le jeu de l'offre et de la demande, qui fixe les prix, et ceux qui sont en vigueur aujourd'hui sont parmi les plus bas d'Europe. Il s'agit donc bien d'une question de volonté politique.
Par ailleurs, nous considérons le service public comme un facteur de dynamique industrielle. Il a en effet permis la création et le développement d'une entreprise remarquable ainsi que l'essor d'une industrie extrêmement puissante et performante, dont le savoir-faire n'est plus à démontrer : notre industrie nucléaire est bien un facteur de développement pour notre pays.
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais réagir à l'intervention de notre collègue Jean-Pierre Bel.
Si les prix de l'énergie font de la France un territoire compétitif, ce n'est pas seulement du fait de l'organisation du service public qui, jusqu'à la période toute récente, se trouvait en situation de monopole,...
Mme Nicole Borvo. Un peu quand même !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. ... mais c'est surtout grâce aux choix industriels qui ont été faits dans les années 1970, notamment, avec le plan d'équipement électronucléaire décidé, rappelons-le, par le gouvernement de Pierre Messmer, auquel vous avez d'ailleurs appartenu, monsieur le président.
Je n'ai pas relu les débats de cette époque,...
Mme Nicole Borvo. Vous devriez !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. ... mais d'autres se souviennent mieux que moi des propos que devaient tenir l'opposition d'alors. Je serais surpris qu'elle ait, à l'époque, couvert d'éloges la politique du gouvernement Messmer. Peut-être d'ailleurs, comme cela s'est produit au fil des années, y a-t-il eu, à l'époque, à ce sujet, des différences d'approche entre le Parti communiste et le Parti socialiste.
Pour en revenir à l'évolution des tarifs de l'électricité, je crois avoir rappelé de façon neutre et objective (Rires sur les travées du groupe CRC), hier soir, qu'il fallait examiner en fonction de la structure de la clientèle.
Pour ce qui concerne les ménages, rien ne peut changer avant 2007.
Mme Hélène Luc. 2007, cela va arriver vite !
Mme Nicole Borvo. Il peut s'en passer des choses, d'ici à 2007 !
M. Philippe Marini. C'est la réalité de la concurrence sur le marché qui, tout naturellement, créera les conditions de prix modéré.
Pour ce qui concerne les industriels, ceux qui étaient déjà éligibles depuis plusieurs années ne voient pas leur situation se transformer. Je vous rappelle, chers collègues, que cette situation d'éligibilité a été établie par un gouvernement que vous avez soutenu.
Il reste ceux qui sont concernés directement. Le Gouvernement nous a apporté, avec l'appui de l'analyse économique, les assurances permettant de dire que cette population d'entreprises modestes et moyennes ne devrait pas voir s'alourdir la note d'électricité. C'est au niveau des très grandes entreprises, déjà éligibles depuis plusieurs années, que des doutes sont permis, mais je pense qu'ils seront levés par les conclusions prochaines de la mission de l'inspection générale des finances.
Permettez-moi, chers collègues, de rappeler ces éléments sans aucun esprit de polémique,...
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas votre genre ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini. ... pour que notre assemblée puisse fonder ses délibérations sur une approche concrète et empirique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Nous partageons tout à fait, monsieur Bel, votre souhait de défendre le principe du service public, mais nous considérons que, dans ce texte, toutes les missions de service public sont réaffirmées, voire renforcées, notamment dans l'article 1er.
Je vous rappellerai en outre que, dans le projet de loi d'orientation sur l'énergie que nous avons adopté en première lecture il y a quelques semaines, l'article 1er A - et c'est le fruit du travail du Sénat - dispose : « La politique énergétique repose sur un service public de l'énergie qui garantit une indépendance stratégique et favorise la compétitivité économique et industrielle. » Voilà qui répond tout à fait à votre souhait.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement émet le même avis pour les mêmes raisons.
Je me permets en outre de conseiller à M. Bel la lecture du journal Les Echos de ce matin ; à la page 4, il y est notamment écrit : « Le Syndicat intercommunal d'énergies de la Loire a choisi la Compagnie nationale du Rhône pour lui fournir de l'énergie à la place d'EDF, avec une offre 5 % moins chère que celle de l'opérateur public. » Vous voyez que le gouvernement socialiste a bien fait, à Barcelone, d'ouvrir ce marché à la concurrence : cela fait baisser les prix !
M. Robert Bret. Aujourd'hui, oui ! Mais demain, ils augmenteront de 15 % !
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote.
M. Jean Chérioux. Notre ami Jean-Pierre Bel affirme que ses propositions sont étayées par les constatations qu'il a pu faire à l'occasion d'un voyage en Roumanie et en Bulgarie. J'en suis très étonné : dans ces pays, où tout était organisé administrativement, avec des monopoles d'Etat, il aurait dû surtout observer que les centrales électriques, notamment les centrales nucléaires, ne correspondaient pas du tout à l'image que certains voudraient en donner. On sait - avec des exemples à l'appui, hélas ! - ce qu'il en est de la sécurité dans les centrales nucléaires de ces pays.
Mme Nicole Borvo. Cela n'a rien à voir !
M. Jean Chérioux. On voit donc que ce n'est pas l'organisation administrative qui compte. Ce qui compte, c'est le potentiel des établissements magnifiques d'EDF ! Il est vrai qu'ils ont mis en place par un établissement public, mais ils pourraient tout aussi bien fonctionner avec une autre structure juridique. La structure juridique n'est pas le coeur de la question ...
Mme Nicole Borvo. Bien sûr que si ! L'histoire l'a montré !
M. Jean Chérioux. ... puisque, dans les pays où vous êtes allé prendre vos références, monsieur Bel, les structures comme celle que vous regrettez se sont révélées totalement inefficaces !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. La question que soulèvent nos collègues du groupe socialiste, celle du prix de l'énergie, est très importante, et elle a d'ailleurs déjà été abordée à travers d'autres amendements.
En France, le prix bas de l'énergie a permis à des entreprises grosses consommatrices d'électricité - c'est la réalité que chacun peut constater et c'est ce que disent clairement certains dirigeants d'entreprise - de rester en France et d'empêcher les fameuses délocalisation dont nous pouvons tous mesurer les dégâts dans nos régions.
Mme Hélène Luc. Exactement !
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le ministre, l'évolution des tarifs ne s'apprécie pas simplement au moment où la Compagnie nationale du Rhône fait un peu de dumping, en offrant des prix en apparence intéressants pour trouver de nouveaux clients.
Mme Nicole Borvo. La réponse du ministre était lamentable !
Mme Marie-France Beaufils. Moi, je serais curieuse de savoir comment ce nouveau tarif aura évolué dans un an ou deux.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous protestez quand le prix monte et vous protestez quand le prix baisse !
Mme Marie-France Beaufils. M. Poniatowski l'a écrit dans son rapport et l'a dit en commission : l'exemple de la Grande-Bretagne, qui nous donne un peu plus de recul, a montré qu'il y avait eu une baisse des prix dans un premier temps, puis une remontée. Autrement dit, il est clair que le consommateur britannique paie maintenant plus cher qu'avant.
M. Roussely lui-même l'a affirmé en commission, répondant à des collègues de la majorité qui regrettaient cette augmentation très importante des prix : rien, dans les orientations données par Bruxelles, n'indique que l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité doit se traduire par une réduction des coûts.
Par conséquent, vouloir nous faire croire aujourd'hui qu'il n'y aura pas d'augmentation des prix est une contrevérité. La réalité viendra malheureusement très prochainement apporter un démenti.
Mme Hélène Luc. Tout à fait !
Mme Nicole Borvo. Hélas !
Mme Marie-France Beaufils. M. Marini a parlé du plan d'équipement électronucléaire, auquel nous avons apporté notre appui en son temps, en vertu d'une position que nous réaffirmée dernièrement, lors de l'examen du projet de loi d'orientation sur l'énergie.
Mme Marie-France Beaufils. Ce plan a permis de fixer le niveau des prix. Si un tel résultat a pu être obtenu, ce n'est pas seulement pour des raisons techniques, liées au choix du nucléaire : c'est aussi parce que, dans notre pays, c'est une entreprise publique, non soumise à des exigences de rentabilité du capital et susceptible d'investir à long terme, qui a mis en oeuvre ce plan.
Si vous ne voulez pas admettre cet état de fait, il vous est impossible d'avoir une vision claire des conséquences du débat actuel.
Mme Nicole Borvo. Eh oui ! Avec la baisse de 5 % dont vous avez parlé, on est dans l'immédiat, pas dans le long terme !
Mme Marie-France Beaufils. C'est pourquoi nous voterons cet amendement déposé par nos collègues du groupe socialiste.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. Mon amie Marie-France Beaufils vient de dire l'essentiel. Monsieur le ministre, la citation que vous avez tirée du journal Les Echos va, non pas dans votre sens, mais dans le nôtre.
M. Daniel Paul vous a posé la question à l'Assemblée nationale et vous vous êtes bien gardé de lui répondre. D'autres personnalités s'interrogent également. « Mais pourquoi les tarifs augmentent-ils ? » : ainsi s'exprime le président de la SNCF, se plaignant du renchérissement de la facture d'électricité en 2004 à hauteur de 200 millions d'euros.
Mme Hélène Luc. D'ailleurs, l'UFE, l'Union française de l'électricité, indique que le prix du mégawatt passera de 32,6 euros en 2003 à 34,5 euros en 2004, pour atteindre 40 euros en 2007. Or 2007, c'est très bientôt !
Par conséquent, EDF doit-elle continuer à faire des investissements qui, comme l'ont démontré mes amis, ne vont pas dans le sens de l'intérêt de la France ? Allons-nous nous assister à des délocalisations vers des pays où la production est moins chère, en Russie, notamment, pour reprendre l'exemple pris par Daniel Paul ?
Monsieur le ministre, vous ne répondez pas du tout à ces questions. (M. le ministre délégué demande la parole.) Bien sûr, vous allez nous répéter votre souhait de voir le tarif de l'électricité baisser. Mais alors, n'agissez pas comme vous l'avez fait pour France Télécom. Il faut concentrer les activités d'EDF en France, et non décider des investissements qui sont contraires aux intérêts de notre pays. France Télécom a investi dans des activités qui n'avaient rien à voir avec l'intérêt national, et la démonstration a été faite que les usagers n'y ont pas gagné.
La position de monopole avait donné un avantage concurrentiel à la France. Par conséquent, ce qu'il faut dénoncer, ce n'est pas le statut actuel d'EDF, mais les orientations erronées de la Commission européenne.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Bel. Il s'agit d'un point important, et nous aurions tort de ne pas y consacrer un vrai débat.
Monsieur Chérioux, je ne suis pas allé en Roumanie et en Bulgarie pour étayer des thèses préconçues.
M. Jean Chérioux. Vous vous y référez !
M. Jean-Pierre Bel. Je m'y suis rendu dans le cadre d'un groupe de travail sénatorial, qui comprenait notamment Henri Revol, et je parle sous son contrôle. Nous avons fait, comme cela nous arrive parfois, un certain nombre d'analyses communes.
D'autre part, sans vouloir moi non plus polémiquer, monsieur Marini, je ne suis pas sûr que vous ayez axé votre réponse sur le point qui fait spécifiquement l'objet de notre amendement.
Dès lors qu'il y a dérégulation et que les décisions relèvent donc de l'initiative privée, les prix de l'énergie sont fixés essentiellement par la loi de l'offre et de la demande. Dans le cadre d'un service public, ceux-ci sont fixés par les pouvoirs publics et c'est en ce sens qu'ils sont marqués par une volonté politique.
Voilà pourquoi nous considérons que le service public peut concourir au développement économique et à la croissance.
Monsieur le ministre, vous avez fait état d'une situation régionale particulière. Toutefois, plus généralement, lors de son audition devant la commission des affaires économiques, M. Roussely, qui a quelques qualités à s'exprimer en tant que président d'EDF, a-t-il eu raison, oui ou non, de nous dire, contrairement aux estimations de certains, que le prix de l'énergie avait augmenté ?
Mme Hélène Luc. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Bel. Si vous me dites qu'une telle affirmation est fausse, je suis prêt à revoir mon argumentaire.
Au demeurant, ni M. Roussely ni les nombreux économistes et chefs d'entreprise, notamment M. Peyrelevade dans L'Express du 14 juin, n'ont dit le contraire de ce que je viens de dire.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Personne ne peut affirmer avec certitude, comme l'a fait M. Marini il y a un instant, que l'évolution qu'on nous propose n'aura pas demain, dans une situation de sousproduction mondiale de l'énergie, un effet direct sur le prix du kilowatt.
Aujourd'hui, c'est un tarif qu'acquittent les usagers. Demain, le prix sera fonction du rapport entre l'offre et la demande. L'évolution de ce rapport aura donc nécessairement une incidence directe sur le prix du kilowattheure.
En outre, le tarif acquitté aujourd'hui prend en compte la globalité du coût des services rendus. Ces derniers, notamment l'acheminement ou le dépannage, pourront devenir payants. Nous craignons donc une inégalité de traitement des usagers en fonction des territoires. Pour certaines zones rurales ou de montagne, cela aura des conséquences directes.
Mme Nicole Borvo. Et catastrophiques !
M. Robert Bret. Ceux qui veulent nous faire croire à une stabilité des prix, non seulement ne nous trompent pas, mais ne peuvent pas tromper les Françaises et les Français.
Par ailleurs, la garantie des prix, y compris la baisse de 5 % que vous avez citée, s'appliquera sur de courtes périodes. Comme il n'y a pas d'engagement sur le moyen et le long terme, la stabilité des prix n'est aucunement assurée.
Monsieur le ministre, ne nous racontez pas d'histoires ! Assumez vos choix en présentant clairement leurs effets ! En tout cas, notre rôle d'opposition est de susciter un vrai débat et de faire en sorte que nos décisions soient parfaitement éclairées.
Mme Nicole Borvo. Absolument ! Ne nous racontez pas d'histoires, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le prix de l'énergie est un vrai sujet, tout le monde en convient, et il reviendra souvent au cours de ce débat. Je répondrai donc une fois pour toutes et je me contenterai d'émettre un simple avis sur chaque amendement.
En 2001, année de l'ouverture du marché à hauteur de 30 %, un quart des clients ont changé de fournisseurs. Il faut donc croire qu'ils ont trouvé moins cher !
M. Robert Bret. Certains en sont déjà revenus !
Mme Nicole Borvo. Oui ! Combien en sont revenus ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Dans une économie de marché, on change de fournisseur en fonction de son intérêt !
Le même phénomène se produit depuis le 1er juillet 2004, avec les nouveaux accédants à l'ouverture du marché. D'ailleurs, s'agissant du contrat passé entre le Syndicat intercommunal d'énergies de la Loire et la Compagnie nationale du Rhône, Les Echos précise qu'il s'agit d'un contrat de deux ans.
Au demeurant, vous avez raison, monsieur Bret : la concurrence permet de baisser les prix, mais ne permet pas, naturellement, de garantir leur stabilité.
Mme Nicole Borvo. Il vaut mieux l'admettre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Une multitude d'éléments concourent à l'élaboration du prix, au premier rang desquels figure le prix général de l'énergie ; or le prix du pétrole s'est envolé.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Cela ne peut pas être sans effet sur l'ensemble des prix de l'énergie.
De même, l'électricité étant souvent produite à partir du gaz, le coût élevé du gaz a évidemment une incidence sur le prix de l'électricité.
En fait, la concurrence est un facteur de modération : elle concourt à la baisse des prix, parmi d'autres facteurs qui, eux, concourent à leur hausse.
Un autre phénomène constitue une vraie rigidité à l'égard de la baisse opérée par la concurrence : il s'agit des interconnexions, qui sont souvent très insatisfaisantes sur le territoire national. Dans certaines régions, la connexion ne permet le recours qu'à un seul fournisseur. La concurrence étant impossible, certaines entreprises se trouvent dépendantes d'EDF et ne peuvent pas bénéficier de l'ouverture du marché.
En outre, certaines entreprises grosses consommatrices d'électricité, les « électro-intensifs » ont vu les prix s'élever de manière significative depuis l'ouverture du marché. Vous connaissez tous la raison de cette situation, et j'ai répondu sur ce point à M. Daniel Paul ainsi qu'à M. Jean-Pierre Brard, qui a d'ailleurs assez mal pris ma réponse : pendant toute la durée du monopole, on a fait supporter aux ménages un « surprix », au bénéfice des grandes entreprises, qui ont ainsi bénéficié d'un avantage important.
M. Robert Bret. Nous avons assez dénoncé cette situation, monsieur le ministre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. De fait, les ménages français, y compris les plus démunis, ont financé le capitalisme français.
Aujourd'hui, ce petit jeu n'est plus possible parce que l'ouverture à la concurrence ne le permet plus. Par conséquent, les ménages seront bien les premiers à bénéficier de la transparence du marché et de l'ouverture à la concurrence. (Mme Nicole Borvo s'esclaffe.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Globalement les facteurs concourent plutôt à la modération des prix. Pour autant, il ne serait pas sérieux de garantir la stabilité des prix dans un monde très mouvant. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo. Bien sûr ! Alors, ne nous parlez pas de la baisse de 5 % !
Mme Hélène Luc. Vous ne nous répondez toujours pas !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels avant l'article 1er A ou avant l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 257, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le domaine énergétique, les missions de service public sont assurées grâce au développement équilibré de l'approvisionnement en électricité et en gaz, au développement et à l'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité et de gaz, ainsi qu'à la fourniture d'électricité et de gaz dans le respect des conditions suivantes :
- la sécurité et la continuité d'approvisionnement présents et futurs ;
- l'égalité de traitement entre usagers sur le territoire national grâce notamment à la péréquation tarifaire nationale ;
- les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix, y compris des services associés et d'efficacité économique, sociale et énergétique ;
- les dispositions sociales en faveur des familles modestes et des personnes en situation de précarité.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous souhaitons, au travers de cet amendement, réaffirmer les missions de service public et rappeler les conditions nécessaires à leur accomplissement.
La libéralisation, les privatisations, la dérégulation et la soumission de pans entiers de notre économie aux lois du marché risquent, à terme, de remettre en cause notre service public de l'énergie, facteur important d'aménagement du territoire et de cohésion sociale.
Nous savons en effet combien les services publics sont importants pour l'aménagement du territoire : ils profitent à l'ensemble du territoire national et concernent toute la population.
Nos entreprises nationales EDF et GDF ont assuré l'indépendance énergétique de notre pays. EDF a mis en place un système de gestion des flux de la demande d'électricité original et performant, permettant de conserver des réserves de puissance disponibles très rapidement.
Une règle fondamentale, à la base de notre service public de l'électricité et suivie par EDF jusque dans les années 1990, imposait la permanence de l'équilibre entre l'offre et la demande électriques, au coût le plus bas possible sur l'ensemble du réseau, quelle que soit la conjoncture. L'ouverture à la concurrence remet en question ce système ingénieux, fondé sur l'existence d'une surcapacité de production électrique. Nous risquons donc de sacrifier ce bel outil de régulation de la demande d'électricité, que tous nos partenaires européens nous envient.
On oublie aussi trop souvent que nous avons réussi à développer une industrie gazière de réputation internationale et à assurer l'alimentation en gaz naturel de plus de dix millions de familles.
Ce sont précisément ces hautes exigences en matière de service public qui ont permis, notamment, d'assurer l'indépendance énergétique de la France. Il est donc primordial d'inscrire dans la loi des exigences de cet ordre, afin de préserver notre service public et de le moderniser.
M. le président. L'amendement n° 137, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
La recherche de l'efficacité du service public de l'énergie ne peut entraîner la mise en oeuvre d'un système de tarification contraire au principe d'égalité.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Il s'agit de donner une efficacité maximale au service public de l'énergie. A cet égard, nous considérons qu'il serait risqué de mettre en oeuvre un système de tarification pouvant aller à l'encontre du respect du principe d'égalité. Je ne referai pas ici l'historique de ce système, disant seulement que le choix de la péréquation tarifaire nationale résulte non pas d'une idéologie, mais de la nécessité de fournir de l'énergie, bien précieux à la fois pour les familles, les professionnels et les industriels, à un prix identique en tous points du territoire.
Or ouvrir la voie à la privatisation entraînera naturellement une concurrence entre fournisseurs d'électricité. Si les « électro-intensifs » se désespèrent de l'augmentation des tarifs constatée depuis quelques années et souhaiteraient pouvoir engager des discussions avec leur fournisseur, l'ouverture complète à la concurrence à partir de 2007 et l'éclatement de la péréquation tarifaire engendreront, certaines expériences récentes l'ont prouvé, un cloisonnement de la clientèle et la présentation de tarifs différenciés.
J'illustrerai mon propos avec le précédent des communications téléphoniques. Auparavant, la situation était simple : on connaissait le prix de la communication téléphonique. Aujourd'hui, on nous explique qu'il a diminué, mais, curieusement, tout le monde trouve que les factures acquittées par les familles se sont nettement alourdies ! (Marques d'approbation sur les travées du groupe CRC.) Il est vrai qu'il est très difficile de s'y retrouver parmi tous les tarifs et les forfaits proposés.
M. Daniel Reiner. Nous ne voudrions pas qu'il en aille de même s'agissant de l'électricité. Or on peut parfaitement imaginer que certains producteurs vont privilégier les clients les plus rentables, appartenant par exemple à certaines professions, et en négliger d'autres. Il se pourrait même que les citadins bénéficient de tarifs plus favorables que les habitants de la campagne. Le principe d'égalité serait alors remis en cause.
Mme Nicole Borvo. Ils expliqueront cela à leurs électeurs !
M. Daniel Reiner. Nous souhaitons donc, monsieur le ministre, que vous répondiez aux quelques questions suivantes : qui va fixer les tarifs ? Le ministre interviendra-t-il ? Les tarifs seront-ils administrés ? Va-t-on laisser les fournisseurs faire librement leurs propositions ? Les autorisera-t-on à ne pas couvrir l'ensemble des consommateurs ?
Au Royaume-Uni, on le sait, le marché est totalement ouvert. Il est vrai que les Anglo-Saxons ouvrent parfois des portes qu'ils ont envie de refermer quelques années plus tard ! Vous avez d'ailleurs évoqué le cas, monsieur le ministre, d'une entreprise qui, voilà quelques années, avait renoncé aux services d'EDF, ayant obtenu un prix inférieur auprès d'un concurrent. Vous avez jugé normale cette démarche. Or cette grande entreprise, ERAMET, a souhaité s'adresser de nouveau à EDF pour la fourniture de l'électricité qu'elle consomme.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il ne s'agit pas d'ERAMET ! Ses dirigeants m'ont envoyé une lettre pour le démentir !
M. Daniel Reiner. C'est très étrange !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je vous donnerai copie de cette lettre, monsieur le sénateur.
M. Daniel Reiner. Je vous crois volontiers, monsieur le ministre, mais j'avais cru comprendre que cette entreprise souhaitait être de nouveau fournie par EDF, la base de discussion n'étant naturellement plus la même qu'auparavant.
Quoi qu'il en soit, nous préconisons l'application du principe de précaution : inscrivons dans ce texte que, en aucune manière, on ne peut remettre en cause un système de tarification qui a fait ses preuves et en instaurer un autre qui irait à l'encontre du principe d'égalité.
M. le président. L'amendement n° 255, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le ministre chargé de l'énergie veille à ce que la péréquation tarifaire en matière de gaz qui assure l'égalité d'accès de tous les usagers, quels que soient leur moyen et leur situation sur tout le territoire, soit assurée.
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Cet amendement s'inscrit dans le droit fil de celui qui vient d'être défendu par notre collègue socialiste.
Nous sommes convaincus, monsieur le ministre, que, contrairement à ce que vous déclarez, votre projet de loi remet en cause la péréquation tarifaire et que, à terme, nous serons amenés à constater des inégalités tarifaires sur notre territoire.
Aujourd'hui, en France, en dehors de quelques zones géographiques très spécifiques, chacun peut accéder à l'énergie et à la fourniture d'électricité sur la base d'un simple contrat, qui devient effectif au bout de quelques jours. Qu'en sera-t-il demain ?
Nous proposons donc de préserver, à l'avenir, la péréquation tarifaire, dispositif qui nous semble essentiel.
La généralisation de la hausse des tarifs de l'électricité a été clairement mise en évidence par deux études réalisées en 2004, l'une par NUS Consulting, l'autre par la Commission de régulation de l'énergie, la première établissant de manière intéressante le lien entre la hausse des prix et la déréglementation.
En outre, Les Echos, L'Expansion et La Tribune n'ont pas manqué de souligner, ces derniers jours, le caractère paradoxal de votre projet de loi, qui vise à ouvrir le marché français à la concurrence alors même que les expériences effectuées à l'étranger montrent que la hausse des prix est non pas une donnée conjoncturelle, mais une tendance de fond, concomitante des processus de libéralisation. J'évoquerai une fois de plus, à cet égard, l'exemple de la Grande-Bretagne, où l'on constate déjà l'introduction de tarifs différenciés selon les modes de paiement, ce qui conduit naturellement à pénaliser les titulaires de bas revenus.
Par ailleurs, les crises de pénurie qui sévissent sur les marchés de l'énergie entraînent l'apparition de phénomènes de spéculation, les premières n'allant pas sans les seconds. En Californie - autre exemple souvent cité -, l'électricité a été vendue aux enchères sur Internet, de même qu'au Canada pendant la crise de 2001.
S'agissant d'EDF et de GDF, établissements désormais inscrits dans une logique de rentabilité devant l'échéance de l'ouverture de leur capital, si la péréquation tarifaire est encore garantie, les prix pratiqués pour les services sont déjà discriminatoires. Ainsi, en décembre 2003, il a été procédé à un très fort relèvement de la tarification des interventions des agents, y compris celles qu'ils effectuent chez les usagers les plus démunis à la suite d'impayés. L'augmentation est de 23,5 % pour le déplacement d'un compteur de gaz situé dans un coffret, de 35 % pour le contrôle des appareils de comptage, de 108 % pour le déplacement particulier pour relevé de compteurs et de 390 % pour la protection des gaines.
L'électricité et le gaz sont pourtant, faut-il le rappeler, des biens vitaux, non substituables dans la plupart de leurs usages. En conséquence, la demande est peu sensible aux variations de prix.
Devant ces hausses, que nul n'est en mesure de contester, les usagers sont bien sûr inégalement armés. La libéralisation du marché de l'énergie ouvre donc la voie à un rationnement par l'argent. Nous tenons à souligner que la logique de bénéfice et de profit qui prévaut dans le secteur privé n'est pas compatible avec un tarif social de l'électricité et du gaz. On passera en effet d'une vente au prix de revient, comme le stipulait la loi de nationalisation de 1946, à la recherche de la rentabilité financière maximale.
Nous réitérons donc notre demande d'une pleine péréquation tarifaire, par souci de justice sociale et pour empêcher le rationnement par l'argent.
M. le président. L'amendement n° 138, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Les principes du service public de l'énergie garantissent des prestations d'un haut niveau de qualité et à un prix abordable.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Notre souci est, là encore, d'offrir des prestations de service public de haut niveau et à un prix abordable.
La question du prix est fondamentale dans le domaine qui nous occupe, car il s'agit de biens de première nécessité. Or la directive européenne prévoit que les prix doivent être raisonnables. Cela ne nous semble pas suffisant, d'autant que l'ouverture à la concurrence conduit à rapprocher les prix de vente des coûts réels du marché. Il s'agit donc là non plus de tarifs, mais de prix, et l'on sort du champ du service public.
Les choses se sont passées ainsi dans le secteur des télécommunications, où le prix de l'abonnement s'est envolé. Il en ira de même pour l'électricité. En France, il y aura un lissage des prix aux environs du prix moyen du marché européen, qui sera supérieur aux prix actuellement pratiqués chez nous. Bien entendu, c'est l'usager qui en subira les conséquences, quels que soient ses revenus, et les plus défavorisés seront pénalisés. Nous voulons éviter cela.
M. le président. L'amendement n° 158, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le service public de l'énergie est un moyen privilégié pour la France d'atteindre l'objectif de cohésion économique et sociale qui est le sien.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Cet amendement a pour objet de rappeler que c'est l'Etat qui est le garant de la cohésion économique et sociale du pays, et que seul le service public peut assurer cette dernière.
Les lois adoptées sous le gouvernement de Lionel Jospin ont institué le droit à l'énergie : la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions de 1998 a instauré un droit à l'eau et à l'énergie ; la loi relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité de février 2000 a posé le droit à l'électricité pour tous.
Or le gouvernement actuel est en train de remettre ces droits en question. En effet, au travers du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, il entend transférer aux départements le financement des fonds sociaux permettant la prise en charge des impayés en matière d'électricité. L'Etat se désengage ainsi d'une mission essentielle de solidarité. A situation égale, un ménage ne sera pas traité de la même manière selon son département de résidence.
Le Gouvernement remet donc en cause le principe d'égalité qui est au coeur du service public. Ce texte vise à transformer EDF en société anonyme ; son objectif sera donc désormais de satisfaire les exigences des actionnaires et non de remplir les missions de service public.
M. le président. L'amendement n° 251, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le service public de l'énergie a pour objet de garantir la cohésion nationale, en assurant le droit au gaz et à l'électricité pour tous, en contribuant à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire ainsi qu'à la recherche et au progrès technologique.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous tenons à ce que les objectifs fondamentaux assignés au service public soient réaffirmés dans un tel texte, qui concerne précisément le service public de l'électricité et du gaz.
Le service public de l'énergie a pour objet de garantir la cohésion sociale en assurant le droit au gaz et à l'électricité pour tous, en contribuant à la lutte contre les exclusions et au développement équilibré du territoire, ainsi qu'à la recherche et au progrès technique. Notre service public de l'énergie a joué un rôle primordial, que ce soit en matière d'aménagement du territoire, d'électrification des zones rurales et d'obligation de desserte, de péréquation tarifaire, d'indépendance énergétique ou encore d'emploi qualifié.
De ce dernier point de vue, par la formation et la qualification de ses agents, le service public de l'électricité et du gaz a participé à l'intégration sociale et à la dynamique de croissance. Les tempêtes de décembre 1999 ont mis en évidence la rapidité et la disponibilité avec lesquelles les agents d'EDF, rejoints pour l'occasion par les retraités de l'établissement, savent faire face, réparer les installations et répondre aux besoins de proximité.
Il ne faut pas l'oublier, le service public de l'énergie est également un service de proximité, et c'est grâce à cette conception que l'on a pu de répondre aux besoins de la tempête.
Faut-il encore souligner que, parce qu'ils répondent à des besoins de première nécessité, l'électricité et le gaz ne peuvent être considérés comme des marchandises ? Leur accès constitue un droit pour tous ; autrement dit, ils doivent être ouverts à tous les individus, quel que soit le niveau de leurs ressources.
La lutte contre les exclusions relève des missions même de notre service public, particulièrement à l'heure où notre société se fractionne sur fond d'inégalités croissantes : précarisation d'une partie de notre population, marginalisation, chômage de longue durée sont autant de situations pouvant conduire à couper l'électricité des familles entières en proie à de grandes difficultés et à les priver de chauffage.
Un service public de qualité doit permettre d'éviter que la pauvreté, qui augmente sans cesse, ne devienne, en France comme en Europe, un facteur de privation d'électricité.
L'exemple du Royaume-Uni, pays pionnier de la libéralisation, notamment en matière d'électricité, devrait nous inciter à rejeter radicalement la voie libérale pour préserver le haut niveau de nos services publics et assurer la cohésion sociale.
En Grande-Bretagne, la déréglementation a abouti à la mise en place de compteurs de prépaiement chez les plus démunis. Les quelques essais réalisés dans notre pays, et contre lesquels nous avons fortement réagi, ont montré toute leur nocivité.
En France, le service public de l'énergie doit répondre aux besoins des familles les plus pauvres sans que cela se traduise par une exclusion ou une stigmatisation de celles-ci.
La question est d'autant plus cruciale aujourd'hui que l'ouverture à la concurrence porte atteinte aux services publics en les tirant vers le bas. La notion européenne de service universel, service public a minima, est révélatrice d'un tel phénomène.
Garantir la cohésion sociale suppose non seulement un réel volontarisme politique, visant le long terme et apte à conforter les entreprises publiques qui ont permis par le passé d'atteindre un tel objectif, mais aussi le maintien notre capacité de recherche et de développement dans le contexte actuel de mutation technologique. Or nous devons nous rendre à l'évidence : l'affaiblissement de la recherche est l'une des conséquences du mouvement de dérégulation.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons que soient réaffirmés dans la loi les objectifs fondamentaux de nos services publics de l'énergie.
M. le président. L'amendement n° 250, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et Mme Terrade, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le service public de l'énergie a pour objet de garantir l'approvisionnement en électricité et en gaz sur l'ensemble du territoire national, dans le respect de l'intérêt général.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. L'électricité n'est pas un bien comme les autres, ne serait-ce déjà parce que c'est un bien de première nécessité.
C'est aussi un bien non stockable et difficilement transportable. Pourtant, EDF a réussi, depuis 1946, à assurer une sécurité et une continuité d'approvisionnement qui font d'elle l'une des entreprises les plus sûres dans ce domaine.
La sécurité d'approvisionnement en gaz constitue également un enjeu important pour notre pays et pour l'Europe en général. La France ne produit plus de gaz. La région de Lacq a couvert pendant de nombreuses années une partie de nos besoins, mais le gaz consommé actuellement en France provient majoritairement du nord de l'Union européenne. Nous devons faire venir le reste de pays souvent lointains et situés dans des zones peu sûres. Nous allons donc au-devant d'un certain nombre de difficultés.
Les enjeux sont lourds : nous avons besoin de contrats à long terme pour subvenir aux besoins du pays. En plus de la question du transport, se pose celle du stockage du gaz sur notre territoire afin de faire face aux aléas de la situation internationale et aux variations de prix, sachant que ceux-ci risquent fort d'augmenter dans les années qui viennent.
Les installations de stockage ainsi que les moyens d'acheminement ont par ailleurs une importance stratégique.
Quant aux engagements pris auprès des collectivités locales en matière de desserte gazière, ils touchent à l'organisation et à l'aménagement du territoire.
Or chacun perçoit bien ce à quoi la logique de libéralisation et de privatisation aboutit dans d'autres secteurs, tels que celui de la poste. Les services de proximité postaux sont très fortement menacés, non seulement dans les zones rurales les plus reculées, mais aussi dans les périphéries urbaines. La multiplication des points de contacts afin de pallier la fermeture des bureaux de poste est significative d'une importante régression en matière d'aménagement de notre territoire.
Si certains bureaux de poste resteront traditionnels, d'autres, sous peine de disparition, seront pris en charge par les collectivités locales et d'autres encore seront confiés aux buralistes, de manière à compenser les pertes de recettes que subissent ces commerçants avec la baisse des ventes de tabac.
En tout état de cause, les évolutions constatées dans les secteurs de ce type ont une conséquence : l'aménagement équilibré du territoire, surtout dans les communes les moins rentables au sens libéral du terme, n'est plus assuré. Nous craignons qu'il n'en aille de même en matière d'aménagement gazier et énergétique.
M. le président. L'amendement n° 253, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le ministre en charge de l'énergie prend les mesures appropriées pour garantir l'accès au réseau et la continuité de la distribution en gaz naturel et en électricité pour l'ensemble des usagers et, en particulier, ceux des régions les plus reculées.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous continuons de penser que l'ouverture à la concurrence met en péril l'organisation de notre système énergétique.
A terme, des risques de pénurie peuvent se faire sentir et les usagers seront les premiers à subir les défaillances du système, comme nous avons pu l'observer dans certains pays. Nous craignons également que des zones ne soient plus alimentées en gaz ou en électricité, et ce en raison d'une rentabilité insuffisante ! Cela s'est déjà présenté pour le gaz comme pour l'ADSL : les zones considérées comme non rentables, autrement dit les zones dans lesquelles il n'y a pas assez de clients, ne sont pas pourvues.
Nous souhaitons, à travers cet amendement, que le ministre chargé de l'énergie prenne les mesures appropriées pour que soient assurés l'accès au réseau et la continuité de la distribution en gaz naturel et en électricité pour l'ensemble des usagers, notamment ceux des zones les plus reculées.
Ces dispositions sont prévues par le paragraphe 5 de l'article 3 de la directive 2003/54/CE relative au marché de l'électricité et le paragraphe 3 de l'article 3 de la directive 2003/55/CE relative au marché du gaz. Elles visent à assurer une réelle égalité de traitement des usagers sur tout le territoire national. Rappeler ce principe n'est pas dénué d'intérêt dans la mesure où, dans le contexte de libéralisation, la pénurie est programmée à l'échelon européen.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Concernant l'amendement n° 257, je dirai à Mme Beaufils que la loi d'orientation fait mention, quasiment dans les mêmes termes, des grandes missions de service public. A quoi cela sert-il d'inscrire de nouveau dans un texte ce qui existe déjà dans un autre ? La commission a donc émis un avis défavorable.
Monsieur Reiner, à travers l'amendement n° 137, vous souhaitez défendre le grand principe de l'égalité des usagers, principe auquel nous sommes d'ailleurs également très attachés. Toutefois, ce principe figure dans tous nos textes, que ce soit dans la loi de 2000 ou dans la loi de 2003. Je formulerai donc le même argument : à quoi cela sert-il de reprendre un principe qui figure déjà dans d'autres textes ?
Nous avons également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 255, que nous considérons comme totalement satisfait. Je vous renvoie à l'avant-dernier alinéa de l'article 1er du projet de loi, qui réaffirme ce principe tant pour le secteur de l'électricité que celui du gaz, ainsi qu'au II de l'article 7 de la loi de 2003, qui évoque la notion d'harmonisation des tarifs dans le domaine du gaz.
Monsieur Piras, s'agissant de l'amendement n° 138, auquel la commission est défavorable, je tiens à vous signaler que le projet de loi renforce considérablement les entreprises EDF et GDF en leur donnant notamment les moyens d'assumer leur futur, hors de nos frontières comme sur notre territoire.
Je vous rappelle que, aux termes de l'article 1er, « les contrats portent notamment sur les exigences de service public en matière de sécurité d'approvisionnement et de qualité de la fourniture du service rendu aux consommateurs ».
Sur l'amendement n° 158, qui est relatif à l'objectif de cohésion sociale, je formulerai le même argument, en allant toutefois un peu plus loin.
Là encore, je me permets de citer l'article 1er : « Dans le cadre de leurs activités, en particulier de gestionnaire de réseaux, Electricité de France et Gaz de France contribuent à la cohésion sociale, notamment au travers de la péréquation nationale des tarifs de vente de l'électricité aux consommateurs domestiques, de l'harmonisation de ces tarifs en gaz... »
Madame Beaufils, s'agissant de l'amendement n° 251, je vous avoue ma totale incompréhension. Je vais me permettre vous lire l'article 1er de la loi de 2000, qui s'applique totalement aujourd'hui, et de suivre simultanément le texte que vous proposez : « Le service public de l'électricité concourt à la cohésion sociale, en assurant le droit à l'électricité pour tous, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l'environnement... ». C'est presque mot pour mot votre amendement.
Mme Marie-France Beaufils. Et qu'en est-il du gaz ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je vous renvoie à l'article 1er de la loi 2003, qui a repris les mêmes termes quant au gaz.
Franchement, notre pays est en train de mourir sous les textes, sous la paperasse ! Répéter dans différents textes de loi exactement les mêmes dispositions me semble totalement inutile !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Madame Terrade, ce même article 1er de la loi de 2000 évoque, exactement dans les mêmes termes que ceux de votre amendement n° 250, la garantie d'approvisionnement : « Le service public de l'énergie a pour objet de garantir l'approvisionnement en électricité... ». Et la loi de 2003 apporte la même garantie s'agissant du gaz. Autrement dit, si l'on additionne la loi de 2000 et la loi de 2003, votre amendement est entièrement satisfait ? C'est pourquoi nous avons émis, là encore, un avis défavorable.
L'amendement n° 253 est, lui aussi, totalement satisfait par le droit en vigueur. L'accès de tous au réseau et la continuité de distribution sont précisément au coeur des missions et des obligations de service public.
De surcroît, notre droit actuel dispose que le ministre de tutelle et le régulateur ont pour mission de veiller à ce que ces missions de service public soient remplies. C'est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est exactement du même avis que la commission.
Mme Hélène Luc. C'est court et bien peu convaincant !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 251.
Mme Marie-France Beaufils. J'ai bien entendu les remarques formulées par M. le rapporteur au sujet de notre amendement.
Nous demandons que le service public de l'énergie assure le droit au gaz et à l'électricité pour tous, que la lutte contre l'exclusion, le développement équilibré du territoire soient rappelés, mais aussi la recherche et le progrès technologique soient pris en compte. Certes, vous nous avez indiqué que des éléments approchants figuraient déjà dans deux lois et vous avez aussi fait état de réponses apportées dans le présent projet de loi. Mais ces réponses sont apportées par le biais de contrats.
Or cet amendement prend en compte des questions que vous allez aborder ensuite d'une manière qui, à notre avis, contrecarre l'application des lois précédentes. C'est en cela que notre amendement est tout à fait fondé.
Mme Nicole Borvo. Absolument !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 251.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 203 :
Nombre de votants | 312 |
Nombre de suffrages exprimés | 309 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 155 |
Pour l'adoption | 110 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 253.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(M. Serge Vinçon remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Serge Vinçon
vice-président
Articles additionnels avant l'article 1er A
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 140, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article premier A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
La souveraineté du peuple n'est pas absolue lorsque les services essentiels du pays sont entre les mains d'actionnaires privés.
L'amendement n° 142, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article premier A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Toute entreprise chargée de missions de service public pour la distribution d'énergie, bien de première nécessité, ne peut voir son capital ouvert à des actionnaires privés.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Pierre Bel. Nous avons évoqué hier les origines d'EDF et nous voulons, par ces amendements, reprendre les fondamentaux du Conseil national de la Résistance, qui ont été à l'origine de la loi de 1946. Revenir sur le passé ne signifie pas s'y attarder. Il est des moments importants de notre vie parlementaire où il est nécessaire de se référer aux origines : si nous ne savons pas où nous allons, souvenons-nous au moins d'où nous venons, dirai-je en reprenant une formule célèbre.
Monsieur le ministre, le Conseil national de la Résistance, qui est à l'origine du préambule de la Constitution de 1946, a voulu affirmer des principes et signifier d'une certaine manière que rien ne pouvait plus être comme avant. Car il a bien fallu constater que les intérêts privés avaient donné lieu à des dérapages lourds de conséquences.
Les idéaux de la Résistance ont été bien exprimés par le CNR, au sein duquel étaient représentés le général de Gaulle et les gaullistes, les communistes, mais aussi la SFIO et le MRP. Le CNR a voulu renforcer le rôle de l'Etat, y compris dans l'économie, parce qu'une économie nationale ne peut être la simple juxtaposition des intérêts marchands ou des intérêts particuliers. Il cherchait, me semble-t-il, à endiguer une dérive dans le laisser-aller.
Or ce débat est très actuel. Quel a été l'intitulé du dernier rapport d'information du Sénat sur les problèmes économiques ? Délocalisations : pour un néo-colbertisme européen. Il s'agit bien de cela ! Nous voulons rester fidèles à cette idée, largement gaulliste, ou gaullienne, qu'on appelle le « colbertisme » et selon laquelle l'Etat peut et doit, à certains moments, jouer son rôle, l'incarnation de la souveraineté du peuple devant se manifester pour que les intérêts essentiels du pays soient préservés.
Au travers de ces amendements, nous voulons traduire l'esprit du préambule de la Constitution de 1946, qui a présidé à la mise en place et à l'organisation d'EDF. Nous considérons que ce temps n'est pas révolu, qu'aujourd'hui plus encore qu'hier nous avons besoin de réaffirmer ces principes, parce que nous sommes soumis, avec la mondialisation et l'émergence des intérêts particuliers, au jeu du marché, lequel n'est pas forcément synonyme de service public et de service pour l'ensemble de nos concitoyens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 140, je rappellerai simplement à Jean-Pierre Bel les termes de l'article 22 du projet de loi. Celui-ci dispose explicitement que la part de l'Etat dans le capital ne peut être inférieure à 70 %. Je ne vais pas le répéter indéfiniment ! Ces deux entreprises resteront donc des entreprises publiques nationales. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
A propos de l'amendement n° 142, je dirai qu'il n'y a aucune opposition entre l'actionnariat privé et les missions et obligations de service public. Ces missions et obligations vont s'imposer à tous : à nos opérateurs nationaux et aux nouveaux opérateurs qui vont entrer sur le marché. Par conséquent, cet amendement me paraît satisfait et la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ces deux amendements sont caricaturaux, et le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 142.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels avant l'article 1er A ou avant l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 141, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article premier A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
La mise en oeuvre des obligations de service public relève du principe de subsidiarité et laisse une marge d'appréciation à l'Etat pour imposer le respect d'obligations aux opérateurs intervenant dans les secteurs de l'énergie, de protection des consommateurs vulnérables, de cohésion sociale et territoriale ou encore de sécurité des approvisionnements.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. On a une fâcheuse tendance à se cacher derrière les directives européennes ; or ; en la circonstance, une marge de manoeuvre nous est laissée.
Notre amendement, dont la rédaction n'est pas de style très législatif, j'en conviens volontiers, vise simplement à ouvrir le débat sur la marge de manoeuvre dont dispose l'Etat pour imposer certaines obligations aux opérateurs qui interviennent dans les secteurs de l'énergie : la cohésion sociale, la cohésion territoriale, la sécurité des approvisionnements et la protection des consommateurs dits « vulnérables ».
Il faut noter que ce projet de loi ne fait aucune proposition pour améliorer le service public de l'énergie, se contentant de reprendre les textes précédents. Il était possible d'aller au-delà.
J'insisterai tout d'abord sur la disparition des contrats de plan, c'est-à-dire de la règle que fixait l'Etat à l'entreprise pour un certain nombre d'années, qui permettait effectivement la mise en oeuvre d'une politique souhaitée par l'Etat. Aujourd'hui, on ne parle plus que de contrats d'entreprise, ce qui est tout à fait différent.
Autre point : l'amélioration de la desserte gazière, sujet évoqué en toute occasion. Il conviendrait en l'occurrence de l'évoquer, car elle pourrait faire l'objet d'un contrat.
Mais je voudrais surtout insister sur le point particulier de la présence territoriale d'EDF-GDF Services. Nous croyons fondamentalement qu'elle est, de fait, remise en cause.
Pourquoi est-elle remise en cause ? Parce que la levée de la spécificité autorise EDF à vendre du gaz et GDF à vendre de l'électricité.
En conséquence, les agents d'EDF-GDF Services, qui travaillent pour l'une ou l'autre entreprise, seront amenés - situation proprement invraisemblable ! - à travailler pour deux entreprises concurrentes ! Assureront-il, en priorité, la présence territoriale d'EDF ou celle de GDF ?
Il apparaît donc clairement que le service de conseil rendu à nos concitoyens ne s'en trouvera pas renforcé !
Enfin, le ministère de l'économie, le 8 avril 2004, par décret, s'est engagé sur la voie de la protection des consommateurs vulnérables et des ménages les plus en difficulté. Pour autant, monsieur le ministre, je reste dubitatif, au vu des chiffres qui figurent en annexe à ce décret.
En effet, la consommation mensuelle autorisée est de 100 kilowattheures, ce qui permet, en hiver, de chauffer à l'électricité un logement pendant cinq jours ! Par ailleurs, le taux de réduction, pour un revenu inférieur à 5 500 euros par an, étant de 30 % pour une personne, de 40 % pour deux personnes et de 50 % pour trois personnes, je ne vois pas comment on peut parler, d'un « accès libre » à l'électricité !
M. le président. L'amendement n° 252, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les obligations de service public du gaz et de l'électricité, produits de première nécessité, priment sur le droit de la concurrence. Electricité de France et Gaz de France, entreprises publiques, sont l'instrument essentiel de la mise en oeuvre du service public.
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Il n'y a pas compatibilité entre les obligations de service public et la privatisation des entreprises qui en ont la charge.
Pour éclairer nos débats, je vous donnerai lecture du discours prononcé le 27 mars 1946, lors de l'examen du projet de loi de nationalisation de l'électricité et du gaz, par Marcel Paul, ministre de la production industrielle, qui a marqué de son nom l'histoire de cette grande réalisation qu'est EDF-GDF : « La misère énergétique du pays nous interdit de nous offrir le luxe d'une utilisation irrationnelle des ses disponibilités. Il faut absolument que tous les moyens de production soient mis en commun. Un décalage d'une demi-heure dans l'organisation technique de la production peut permettre l'économie d'un délestage. Voilà pourquoi il est indispensable qu'une conception générale unique préside, sur le plan technique, à la gestion de l'ensemble de nos ressources énergétiques afin que le pays puisse mettre en oeuvre l'intégralité de ces moyens.
« Il faut également mettre de l'ordre dans le plan d'équipement. [...] Allons-nous assister à je ne sais quelle concurrence entre les entreprises d'électrochimie, les entreprises électrométallurgiques, les chemins de fer et notre mécanisme national d'électricité pour l'équipement de nos chutes d'eau ? [...] Dans ce cas, les errements du passé persisteront certainement. [...] et l'on aboutirait ainsi au prix de revient les plus élevés au détriment du consommateur.
« Il faut avoir une vue d'ensemble de ces problèmes. Notre pays ne peut s'offrir le luxe de la disparité dans ce domaine. »
Monsieur le ministre, notre pays peut-il aujourd'hui s'offrir le luxe d'un retour en arrière en mettant en place un système énergétique analogue à celui qui prévalait avant la nationalisation de 1946 ?
Les errements du passé évoqués par Marcel Paul, que certains de nos voisins européens connaissent au présent, seraient pour la France ceux du futur si ce projet de loi devait être adopté.
Mes chers collègues, comme l'a rappelé fort justement Jean-Pierre Bel à l'instant, nous devons aborder cette question non sous l'angle idéologique, mais sous l'angle technique, comme l'ont fait les communistes, les gaullistes, les socialistes et les démocrates-chrétiens, qui, en 1946, ont su se mettre d'accord en faveur de cette nationalisation.
Cet amendement tend à rappeler qu'aucun manquement aux obligations de service public ne peut être justifié sous le prétexte du respect des principes de la concurrence. Ceux-ci ne sauraient s'appliquer que sous réserve du respect des obligations de service public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur Reiner, je suis d'accord avec vous sur le fond, mais je ne vois pas l'utilité qu'il y aurait à faire figurer dans ce texte ce qui se trouve déjà ailleurs.
En effet, pour ce qui concerne les obligations de service public des entreprises énergétiques, je vous renvoie à la loi du 10 février 2000 ainsi qu'à la loi du 3 janvier 2003.
Pour ce qui concerne la garantie et la sécurité de l'approvisionnement en électricité, je vous renvoie à l'article 1er de la loi de 2000.
Pour ce qui concerne la cohésion sociale, je vous renvoie à la loi de 2000, à celle de 2003 et à aux dispositions de l'article 1er de ce projet de loi qui concernent les contrats de service public. Je sais, monsieur Reiner, que vous n'aimez pas ces contrats. Cependant, comme nous, vous souhaitez défendre la cohésion sociale. C'est ce que nous faisons au travers de cet article 1er.
Pour ce qui concerne le développement équilibré du territoire en matière de desserte gazière, je vous renvoie à l'article 16 de 2003.
Autrement dit, monsieur Reiner, l'amendement n° 141 se trouve pleinement satisfait, raison pour laquelle j'y suis défavorable.
Monsieur Bret, il est évident que les obligations de service public priment sur le droit de la concurrence. C'est la raison pour laquelle la loi assigne aux entreprises du secteur énergétique les missions de service public, qui s'imposent entièrement à elles. En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 252.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 143, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article premier A, insérer un article ainsi rédigé :
Les établissements publics à caractère industriel et commercial Electricité de France et Gaz de France sont fusionnés au sein d'un établissement public industriel et commercial dénommé : « Energie de France ».
L'ensemble des biens, droits et obligations, contrats et autorisations de toute nature de ces établissements publics est attribué de plein droit à « Energie de France ».
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Il s'agit d'un amendement de bon sens.
Nous cherchons, paraît-il, un champion européen en matière d'énergie. Levant le principe de spécialité, le Gouvernement propose qu'EDF puisse vendre du gaz et que GDF puisse vendre de l'électricité. Eh bien, nous, nous proposons, par cet amendement, la fusion des deux EPIC en un seul, qui fournirait ainsi à la fois du gaz et de l'électricité. Un certain nombre de problèmes s'en trouveraient résolus, notamment ceux que j'ai évoqués à l'instant au sujet d'EDF-GDF Service.
M. Sarkozy et vous-même, monsieur le ministre, estimez depuis quelques mois que la question mériterait d'être examinée sérieusement. Une étude doit être lancée à cet effet ; nous devrions en connaître les résultats au mois de septembre.
M. Daniel Reiner. Cela dit, M. Sarkozy a avoué, lors de la discussion générale, qu'il n'y croyait guère, ce qui n'est pas surprenant lorsque l'on sait que cette étude est placée sous le double patronage de M. Gadonneix, président de Gaz de France, et M. Roussely, président d'Electricité de France, qui sont opposés à une telle fusion ! Ce qui ne signifie d'ailleurs pas que les agents de ces deux entreprises y soient, eux, opposés.
Une occasion s'offre à nous, ici, de créer le champion européen dans le domaine énergétique. On nous objecte que Bruxelles s'y opposera et qu'il faudra abandonner des pans entiers d'EDF et de GDF. Cela reste à vérifier.
Monsieur le ministre, que pouvez-vous nous dire sur ce sujet ?
A l'échelon national, un tel établissement ferait figure de champion, c'est évident, mais à l'échelon européen, puisque c'est à cet échelon que se traite la question de l'énergie, cela reste à voir.
M. le président. L'amendement n° 249, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour répondre aux objectifs mêmes fixés par la loi d'orientation sur l'énergie n° ... du ... et afin de disposer d'un outil répondant aux exigences de service public, les établissements publics à caractère industriel et commercial Electricité de France et Gaz de France sont fusionnés et forment un établissement public à caractère industriel et commercial dénommé « Electricité et Gaz de France ».
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous avons avancé un certain nombre des raisons pour lesquelles il nous paraît nécessaire de créer un établissement public à caractère industriel et commercial dénommé « Électricité et Gaz de France », issu de la fusion des EPIC EDF et GDF.
Cette fusion nous semble nécessaire à différents points de vue.
Tout d'abord, elle est nécessaire du point de vue commercial. En effet, les entreprises énergétiques européennes, y compris EDF et GDF, mettent en évidence l'importance de l'offre multiénergies. La complémentarité d'EDF et de GDF sur ce plan n'est d'ailleurs contestée par personne.
Elle est aussi nécessaire du point de vue de l'efficacité et de la synergie. En effet, la distribution commune est un exemple unique de synergie et d'économies d'échelle. Le plus difficile, lors d'une fusion, est de réussir le rapprochement des équipes et l'acquisition d'une culture commune. Or en ce qui concerne EDF et GDF, c'est déjà fait !
Cette fusion est également nécessaire du point de vue financier. En effet, si la fusion de ces deux entreprises n'est pas retenue, chacun ira chercher de son côté un gazier et un électricien, à grand renfort de milliards d'euros, ce qui représentera le plus grand gâchis financier de l'histoire d'EDF et de GDF. Une fusion, quant à elle, ne coûterait rien.
La fusion s'impose également du point de vue social. Des fusions avec d'autres énergéticiens engendreraient les difficultés classiques inhérentes à toute fusion. Il faudrait conserver les équipes, les faire travailler ensemble, opérer des suppressions d'effectifs. Des problèmes de cultures d'entreprises divergentes se poseraient. Or, dans le cas précis d'EDF et de GDF, les agents sont largement favorables à la fusion de leurs entreprises.
Par ailleurs, au regard des enjeux à long terme, la fusion serait l'occasion de faire travailler ensemble tous les chercheurs et de renforcer les moyens, au service des enjeux énergétiques d'aujourd'hui et de demain.
Autrement dit, refuser aujourd'hui la fusion d'EDF et de GDF, ou la repousser en attendant les conclusions d'une commission ou les résultats d'un audit, c'est décider délibérément de courir tout droit à la catastrophe.
Faire, aujourd'hui, le choix de la séparation, au nom de la création de deux grands énergéticiens français, c'est aller vers la disparition d'énergéticiens français publics indépendants, vers des revers financiers et commerciaux, vers l'éclatement de la distribution commune et vers les problèmes sociaux liés à ces événements prévisibles.
Sur le plan juridique, aucun obstacle ne s'y oppose, nous y reviendrons plus tard, au regard d'une analyse juridique tout à fait sérieuse et étayée.
Sur le plan organisationnel, la fusion n'est pas à faire, car, pour l'essentiel, elle est déjà faite.
La fusion d'EDF et de GDF, avec le maintien de l'intégration verticale, est stratégique. Ne pas l'opérer mettrait en danger les deux entreprises, en les jetant dans une partie de Monopoly financier coûteuse et risquée.
Grâce à la fusion, les moyens d'EDF et de GDF pourraient être mis au service de la politique énergétique française de court et de long terme. Ce serait un bien meilleur investissement que de viser une course à la taille critique par des achats à l'international dispendieux et peu efficaces.
La fusion ne dépend que de la volonté politique : volonté politique d'éviter la mise en danger tant de GDF que d'EDF ; volonté politique de promouvoir un outil efficace au service de la politique énergétique française.
Or cette volonté politique, le Gouvernement ne l'a pas, et il se cache derrière des arguments aussi douteux les uns que les autres !
Le Gouvernement s'est résolument placé dans une position de soutien à Alstom. Il s'est également prononcé en faveur d'une fusion Sanofi-Aventis. S'agissant de l'énergie, les enjeux sont au moins aussi importants. A défaut de l'accord gouvernemental, le Parlement devrait prendre position en faveur d'une telle fusion, qui - je le rappelle - est d'autant plus facile à réaliser qu'elle est d'ores et déjà en grande partie effective sur le terrain.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission est défavorable à ces deux amendements.
Madame Beaufils, monsieur Reiner, voulez-vous faire condamner la France par Bruxelles pour abus de position dominante ? La Commission européenne a été très précise sur ce point.
Il en résulterait, pour EDF, l'abandon de quelques centrales de production et de quelques marchés territoriaux. Idem pour Gaz de France en matière de stockage.
Autre conséquence : en cas de condamnation, une partie des salariés devra quitter EDF et GDF et devenir salariés des nouvelles entreprises qui reprendront des centrales ou des marchés.
Enfin, la CGT et FO sont peut-être favorables à la fusion, mais, je vous le rappelle, la CFDT et la CGC - je parle bien entendu des sections syndicales concernées - y sont résolument opposées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement émet le même avis défavorable en se fondant, non seulement sur les déclarations de M. le rapporteur, mais également sur les propos que j'ai tenus hier dans la discussion générale. Je n'y reviens donc pas.
MM. Jean-Pierre Bel et Daniel Reiner. A quoi sert, alors, la discussion des articles ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 249.
Mme Marie-France Beaufils. Je suis quand même étonnée par les réponses qui nous sont apportées !
M. Daniel Reiner. Il y a de quoi !
Mme Marie-France Beaufils. A moins que l'on ne cherche à amuser la galerie...
M. Sarkozy a annoncé dans la presse - il nous l'a également déclaré hier après-midi - que l'opportunité d'une fusion ainsi que ses conséquences seraient examinées. Aujourd'hui, on nous dit qu'il est inutile de s'engager dans une telle démarche, car celle-ci va à l'encontre des objectifs recherchés et que l'Europe nous condamnera.
J'ai donc un peu de mal à comprendre que l'on puisse évoquer le travail d'une commission sur ce sujet. On confie d'ailleurs à MM. Gadonneix et Roussely le soin de procéder à une analyse, alors que l'on sait qu'ils sont opposés à la fusion.
J'avais déjà émis des doutes sur la volonté d'étudier de plus près la possibilité d'une telle fusion. Et vous êtes en train de dire aux salariés les plus actifs dans la lutte, ceux qui se sont mobilisés pour résister à l'ouverture du capital qui est en fait une démarche vers la privatisation, que les déclarations de M. Sarkozy dans la presse n'ont aucune incidence pour l'avenir. Cette conception du débat démocratique est lamentable et regrettable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Bel. Moi aussi, je veux dire mon étonnement.
En examinant les amendements en commission, nous pensions que nous aurions largement la possibilité de nous exprimer durant le débat.
Lors de sa réponse aux orateurs, M. le ministre délégué a longuement dit tout le mal qu'il pensait du gouvernement de M. Jospin, mais il n'est pas vraiment entré dans le détail du projet de loi.
Nous sommes quand même en train de transformer en société anonyme un établissement public qui est l'un des fleurons de l'économie nationale ! Nous ne discutons pas, comme lors de l'examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, de détails subtils que seuls quelques initiés peuvent comprendre. Il s'agit ici d'un problème de fond !
Mme Marie-France Beaufils. Absolument !
M. Jean-Pierre Bel. M. le ministre délégué ne répond pas à nos questions, car il estime avoir déjà tout dit dans la discussion générale. Or chaque article, chaque amendement requiert un vrai débat. Vous avez effectué un choix politique, nous ne vous le reprochons pas, mais assumez-le et expliquez-le nous !
M. Bernard Piras. Très bien !
M. Robert Bret. Faut-il encore un Parlement ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je suis moi-même indigné par ces fausses indignations. Dans la discussion générale, le Gouvernement a été très clair.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Premièrement, une commission étudiera la possibilité d'une fusion. A cet égard, les présidents des deux entreprises ont été consultés. Vous nous répondez qu'ils y sont opposés. Mais je vous signale que leur avis est important, car ils connaissent leur entreprise.
Même s'ils sont hostiles à une éventuelle fusion, le rapport qu'ils remettront sera éclairant. Le Gouvernement ne saurait s'en passer pour prendre sa décision, y compris s'il contient des objections.
Deuxièmement, nous devons mener une mission exploratoire auprès de la Commission de Bruxelles, car nous allons a priori nous retrouver en situation d'abus de position dominante.
Avec vos amendements, vous voulez brûler les étapes et nous mettre devant le fait accompli. On vous a expliqué qu'il y avait un processus et qu'il fallait avancer avec prudence. Vous en faites fi. Vous avez également l'audace de dire que nous ne tenons pas compte du Parlement et que les déclarations faites à la presse sont factices.
Votre méthode consiste à passer en force. La nôtre est plus raisonnable, mais elle ne saurait légitimer les fausses indignations que vous exprimez ici.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 249.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er A
Avant le dernier alinéa du II de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« 3° La recherche de la meilleure efficacité énergétique et économique dans les décisions de dépenses d'investissement et de fonctionnement, notamment au travers de travaux de recherche et de développement.
« La mission de développement et d'exploitation des réseaux publics de distribution d'électricité consiste en outre à :
« 1° Assurer l'accueil, le conseil et la gestion clientèle des utilisateurs du réseau, dans les meilleures conditions de qualité et d'efficacité économique et sociale, en préservant la présence du service public de l'électricité sur l'ensemble du territoire et en contribuant à la politique d'aménagement du territoire et à la politique de la ville ;
« 2° Contribuer à la cohésion sociale, au moyen de la péréquation géographique nationale des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 248 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission comprend les motivations qui sous-tendent cet article, lequel vise à élargir le contenu de la mission de développement et d'exploitation des réseaux.
La partie nouvelle de ce dispositif ne présente qu'une faible portée normative puisqu'elle tend essentiellement à indiquer que les investissements réalisés sur le réseau de distribution doivent répondre à une rationalité économique.
Le reste de l'article concerne les éléments relatifs à la définition de la mission de développement et d'exploitation des réseaux de distribution d'électricité. Ces dispositions figurent intégralement dans la loi du 10 février 2000.
En vérité, l'article 1er A affaiblit presque les articles 1er et 2 du projet de loi que nous examinons, qui affirment fortement les missions de service public de l'électricité et du gaz.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 248.
M. Gérard Le Cam. Cet article vise à compléter la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.
Nous ne sommes bien évidemment pas défavorables à l'extension des missions de service public. Nous considérons que les exigences en matière de péréquation tarifaire sont nécessaires, car elles participent au renforcement de la cohésion sociale.
Néanmoins, nous avons eu l'occasion de développer une conception beaucoup plus riche des missions de service public au cours de ce débat et nous continuons de penser qu'il faut aller bien au-delà.
Nous observons aussi que certaines dispositions sont ambiguës ; elles pourraient avoir l'effet contraire de celui qui est recherché. En effet, l'une des dispositions qui complète la loi de février 2000 étend le domaine des missions de service public à « la recherche de la meilleure efficacité énergétique et économique dans les décisions de dépenses d'investissement et de fonctionnement, notamment au travers de travaux de recherche et de développement ».
Cette idée de rechercher la meilleure efficacité énergétique et économique dans les dépenses d'investissement ne sous-entend-elle pas la recherche systématique de la rationalisation et de la réduction des coûts ?
Il ne nous paraît pas judicieux d'orienter a priori les travaux de recherche et de développement vers une meilleure efficacité économique. Nous disons oui à l'efficacité énergétique, oui à l'efficacité environnementale, oui à l'efficacité sociale, mais nous disons non à l'efficacité économique qui conduit très souvent à des aberrations, notamment environnementales et sociales, surtout quand il s'agit de remplir les poches des actionnaires.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Démagogie !
M. le président. L'amendement n° 133, présenté par M. Delfau, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour insérer quatre alinéas avant le dernier alinéa du II de l'article 2 de la loi n° 2000108 du 10 février 2000, après les mots :
à la cohésion sociale
insérer les mots :
et à l'égal accès de tous à l'électricité,
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 et 248.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er A est supprimé.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 254, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le domaine énergétique, les missions de service public de l'électricité et du gaz doivent être réalisées par des agents assujettis au statut du personnel des industries électriques et gazières défini par le décret n° 461541 du 22 janvier 1946.
En particulier, le personnel nécessaire à l'exploitation, à la maintenance et aux améliorations des centrales de production d'électricité d'origine nucléaire doit, dans son ensemble, être assujetti à ces dispositions statutaires.
En ce qui concerne les salariés dont l'activité sur ces centrales est occasionnelle, ils doivent disposer de garanties sociales de haut niveau dont la base minimale est constituée par le statut des industries électriques et gazières.
Les questions de conditions de travail et de santé au travail doivent être examinées au sein d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail unique pour tous les salariés sur chaque site nucléaire.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement porte sur le statut des personnels des industries électriques et gazières, notamment ceux qui travaillent dans les centrales nucléaires. Tous ces personnels, y compris ceux qui y travaillent de façon occasionnelle, doivent être assujettis aux dispositions statutaires.
Dans tous les cas, les questions de conditions de travail et de santé au travail doivent être examinées au sein d'un comité d'hygiène et de sécurité unique pour tous les salariés sur chaque site nucléaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, car les personnels employés par les sous-traitants travaillant dans des centrales nucléaires ne sont pas nécessairement des électriciens.
Votre proposition pourrait revenir à bouleverser de nombreuses conventions collectives, compte tenu des différents métiers intervenant. Il faudrait commencer par discuter longuement avec les syndicats d'un tel bouleversement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 256, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Chaque fournisseur, chaque opérateur, chaque distributeur participe au financement des efforts de recherche dans le domaine des gaz combustibles (production, transformation, transport, distribution, stockage, utilisation, technologies associées). Pour chacun, l'effort financier pour l'année N doit être a minima égal à 3% de la valeur ajoutée de l'année N-1 réalisée dans leur activité gazière, dont 0,5% est consacré à la recherche fondamentale.
II. - Les fonds correspondants peuvent être utilisés à des activités de recherche sur les gaz combustibles au sein même de l'entreprise et/ou d'une de ses filiales et/ou dans un organisme de recherche créé ou géré en coopération avec d'autres entreprises gazières et/ou dans un organisme de recherche publique.
III. - La Commission de régulation de l'énergie veille au respect de ces dispositions. En cas de non-respect, elle en informe les ministres chargés de l'énergie et de la recherche qui prennent les mesures nécessaires.
IV. - Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Je regrette que le Sénat n'ait pas adopté notre amendement précédent, car la sécurité de nos centrales nucléaires et de tous les sous-traitants qui y travaillent est une question importante.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Nous y sommes aussi attachés que vous !
Mme Odette Terrade. L'amendement n° 256 porte sur le financement des efforts de recherche dans le domaine des gaz combustibles.
En application des articles 2 et 3 du projet de loi du 8 avril 1946, EDF et GDF se sont vu confier des activités d'ingénierie et de recherche. Or le présent projet de loi ne précise nulle part qu'EDF et GDF exerceront des activités dans ces domaines essentiels pour l'avenir de notre pays. Cela nous semble particulièrement grave à l'heure où le ministre de l'économie entend faire en sorte que l'Etat se concentre sur les dépenses préparant l'avenir.
Par cet amendement, nous souhaitons mettre l'accent sur le rôle actuel d'EDF en matière de recherche. Ainsi, le budget consacré à la recherche par cet établissement public s'élevait, en 2003, à 450 millions d'euros, soit 1,6 % du chiffre d'affaires et 2,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise.
Cet effort de recherche global est certes important, mais il diminue, ce qui est grave. Cela se comprend dans un contexte où la direction de l'entreprise, désirant et anticipant la privatisation, n'a de cesse de confondre la raison d'être d'un EPCI, un service public, et celle d'une société anonyme. Promouvoir une culture d'entreprise pour affaiblir la culture de service public à laquelle les agents sont particulièrement attachés, tel est le projet qui se met déjà en oeuvre.
Parallèlement à cette course folle aux acquisitions externes dénuées de toute logique industrielle, le budget consacré à la recherche a diminué de 20 % depuis 1999. Une nouvelle baisse de 10 % est annoncée à l'horizon de 2006 et 250 postes devraient alors être supprimés.
Ces choix stratégiques imposés par des dirigeants spécialistes du pilotage à courte vue ont eu pour conséquence la suppression de laboratoires expérimentaux uniques en Europe, qui menaient des recherches de pointe en matière d'expérimentation sur le réseau ou de qualification des matériels de sûreté du nucléaire. Ces compétences sont ignorées.
Le Gouvernement prétend inscrire des objectifs de recherche et développement dans les contrats de service public passés avec les entreprises. Pour notre part, nous proposons que l'effort financier en matière de recherche de chaque fournisseur, de chaque opérateur et de chaque distributeur soit au moins égal pour l'année n à 3 % de la valeur ajoutée de l'année n-1.
Cette disposition permettrait, dans le cas du maintien du statut d'EPCI, non seulement de préserver les compétences d'EDF, mais également de les renforcer. En outre, elle participe de notre volonté de sauvegarder le patrimoine qui appartient à la nation, et non à l'Etat, et dont font partie ces compétences sans lesquelles nos entreprises n'auraient pas pu atteindre, dans certaines filières industrielles, un niveau d'excellence reconnu sur le plan mondial.
Se priver progressivement de telles compétences serait placer l'entreprise dans une voie sans issue. EDF et GDF ont, au contraire, besoin de recherche sur le très long terme.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'avis est défavorable. Nous sommes, nous aussi, attachés à la recherche. Je tiens à le dire, ceux qui sont contre cet amendement ne sont pas contre la recherche.
Ma chère collègue, jusqu'à plus ample information, la France est un pays libre et chaque entreprise y est libre de consacrer les fonds qu'elle désire à ses activités de recherche. C'est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à cet amendement terriblement contraignant.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. L'avis est défavorable. Cet objectif a sa place dans les contrats de service public.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 256.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
Les objectifs et les modalités de mise en oeuvre des missions de service public qui sont assignées à Electricité de France et à Gaz de France par la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie et la présente loi font l'objet de contrats conclus entre l'Etat et chacune de ces entreprises, sans préjudice des dispositions des contrats de concession mentionnés à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales.
Ces contrats se substituent à l'ensemble des contrats mentionnés à l'article 140 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.
Ces contrats et leurs conditions de mise en oeuvre font l'objet d'une évaluation triennale dans le cadre du rapport sur l'Etat actionnaire prévu à l'article 142 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 précitée.
Ce rapport fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Les contrats portent notamment sur :
- les exigences de service public en matière de sécurité d'approvisionnement et de qualité de la fourniture du service rendu aux consommateurs ;
- les moyens permettant d'assurer l'accès au service public ;
- les modalités d'évaluation des coûts entraînés par la mise en oeuvre du contrat et de compensation des charges correspondantes ;
- l'évolution pluriannuelle des tarifs de vente de l'électricité et du gaz ;
- la politique de recherche et développement des entreprises ;
- la politique de protection de l'environnement, incluant l'utilisation rationnelle des énergies et la lutte contre l'effet de serre.
Dans ces contrats sont définis, pour chacun des objectifs identifiés ci-dessus, des indicateurs de résultats. Le Parlement est informé triennalement de l'évolution de ces indicateurs.
Dans le cadre de leurs activités, en particulier de gestionnaires de réseaux, Electricité de France et Gaz de France contribuent à la cohésion sociale, notamment au travers de la péréquation nationale des tarifs de vente de l'électricité aux consommateurs domestiques, de l'harmonisation de ces tarifs en gaz et de la péréquation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution.
L'Etat peut également conclure, avec les autres entreprises du secteur de l'électricité et du gaz assumant des missions de service public, des contrats précisant ces missions.
M. le président. Je suis saisi de quarante-quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 144 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté.
L'amendement n° 259 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Piras, pour défendre l'amendement n° 144.
M. Bernard Piras. Fidèles à notre logique, nous proposons la suppression de cet article qui, à l'origine, était censé - du moins l'espérions-nous - renforcer le rôle d'EDF et de GDF dans la mise en oeuvre des missions de service public définies par les lois de 1946, de 2000 et de 2003.
Nous sommes finalement devant un texte qui dessaisit le Parlement d'une de ses missions premières, celle de définir les missions de service public et ses conditions de mise en oeuvre.
Les contrats de plan et de groupe qui définissaient les relations entre l'Etat et les deux EPIC sont supprimés. Ils sont remplacés par un nouveau type de contrats, aux contours imprécis, incomplets, voire dangereux.
Sur la forme, d'abord, on ne connaît pas la durée de validité de ces contrats. On ne sait pas comment ils seront élaborés. Les personnels seront-ils, comme aujourd'hui, consultés sur les contrats de plan ? Le Parlement sera-t-il destinataire des avant-projets de contrat ?
Sur le fond, ensuite, les impératifs d'aménagement du territoire ne sont pas pris en compte. Il n'est pas même prévu d'assurer un égal accès de tous en tout point du territoire au service public. Il est simplement prévu « l'accès au service public », formulation ouvrant la voie à des réorganisations.
Le dispositif de la loi d'aménagement du territoire, dite loi Voynet, qui prévoyait une consultation des collectivités locales concernées et des commissions départementales de service public dans l'hypothèse d'une réorganisation d'un service public non conforme aux objectifs de contrat de plan, ne s'appliquera plus puisque, désormais, les contrats créés par cet article se substituent aux contrats de la loi Voynet.
Nous avons confirmation de ce que le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux n'est que de la poudre aux yeux et, avec cet article, le Gouvernement va autoriser EDF et GDF à fermer les agences dans des zones rurales sans pour autant imposer la création d'agences dans les zones urbaines difficiles. C'est donc le « déménagement du territoire », comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de la discussion générale !
Par conséquent, cet article s'inscrit dans une logique de banalisation des activités de service public d'EDF-GDF. Il s'agit de leur imposer le moins de contraintes possibles pour améliorer leurs performances financières et satisfaire les exigences des actionnaires à venir.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 259.
M. Robert Bret. Si nous sommes satisfaits de lire dans votre projet de réforme, monsieur le ministre, l'intitulé du titre Ier, « Le service public », force nous est de constater que les modalités et les missions de service public dont nous avons longuement discuté en 1999 et en 2000 sont totalement absentes de cet article 1er, comme de tout le texte.
La loi de 2000 dispose en effet, au troisième alinéa de son article 1er, que le service public « concourt à la cohésion sociale, en assurant le droit à l'électricité pour tous, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire dans le respect de l'environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu'à la défense et à la sécurité publique ».
On peut comparer ce texte avec le dernier alinéa de l'article 1er du projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis : « Dans le cadre de leurs activités, en particulier de gestionnaires de réseaux, Électricité de France et Gaz de France contribuent à la cohésion sociale, notamment au travers de la péréquation nationale des tarifs de vente de l'électricité aux consommateurs domestiques, de l'harmonisation de ces tarifs en gaz et de la péréquation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution. »
Dans le présent projet de loi, la définition de la cohésion sociale se réduit donc, monsieur le ministre, à la question de la péréquation tarifaire. Or l'électricité pour tous, c'est la nécessité de maintenir les tarifs sociaux mis en place par la loi de 2000 et la garantie de service pour les plus démunis.
De leur côté, on le sait, les personnels ont su s'adapter à l'évolution des besoins et des modes de vie, tout en apportant le même service sur l'ensemble du territoire national, jusqu'aux fermes les plus éloignées dans nos campagnes ou dans nos montagnes, quelles que soient les conditions météorologiques.
En fait, deux philosophies s'opposent : l'une sociale, à laquelle nous souscrivons pleinement, l'autre - la vôtre -dogmatiquement financière. Cela se confirme à la lecture de l'article 16 de la loi du 3 janvier 2003 concernant le service public du gaz, article qui se borne à énumérer des règles générales techniques, sans aucune allusion à la philosophie et à la déontologie du service public.
Devant tant d'incompatibilités entre le projet actuel et le texte de 2000, on peut se demander si l'imprécision de votre article 1er, monsieur le ministre, et, plus généralement, la prééminence du contrat ne cachent pas une abrogation implicite de l'article 1er de la loi de 2000, qui revient, dans les faits, à remettre totalement en cause le service public et ses principes.
En outre, l'essentiel est renvoyé au contrat qui, ne pouvant que privilégier les intérêts des agents économiques les plus puissants, évacue l'intérêt général. Dans le même temps, les missions de service public sont pratiquement vidées de leur substance, votre texte en témoigne.
Rien de tout cela ne saurait nous surprendre, surtout si nous nous référons à un article paru dans Le Monde du 28 avril dernier. Le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'État, Renaud Dutreil, y expliquait : « Nous réformons l'État pour que le service public soit avant tout le service du public. » Il y est aussi précisé que les mots « clients » et « salariés » ont remplacé les mots « usagers » et « agents ».
Ces évolutions lexicologiques n'ont rien d'anodin. Elles dénotent une vision rigoureusement opposée à la nôtre parce que totalement étrangère à la notion de service public !
M. le président. L'amendement n° 154, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les objectifs et les modalités de mise en oeuvre des missions de service public qui sont assignés à Electricité de France, à Gaz de France et aux gestionnaires de réseau de transport d'électricité ou de gaz sont définis par la loi n° 46628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité et la loi n° 20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Nous qui sommes tous avertis des réalités du terrain, nous avons des raisons de nous méfier compte tenu des évolutions des services publics dans nos départements, en particulier dans les zones rurales.
Dans la continuité de ce que viennent de dire Bernard Piras et Robert Bret, nous nous fixons comme objectif la préservation du pouvoir du législateur quant à la définition des missions de service public.
Il s'agit de supprimer la référence aux nouveaux contrats et de maintenir les contrats actuels.
M. le président. L'amendement n° 268, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les objectifs et les modalités de mise en oeuvre des missions de service public qui sont assignées à Electricité de France sont fixées par la loi n° 2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.
Les objectifs et les modalités de mise en oeuvre des missions de service public qui sont assignées à Gaz de France sont fixées par la loi n° 20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Alors que le premier alinéa de l'article 1er de la loi de 2000 dispose : « Le service public de l'électricité a pour objet de garantir l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire national, dans le respect de l'intérêt général », le texte que nous soumet aujourd'hui le Gouvernement fait uniquement référence « aux exigences de service public en matière de sécurité d'approvisionnement et de qualité du service rendu aux consommateurs ». Point n'est besoin d'être fort en explication de texte pour comprendre que s'expriment là deux conceptions différentes du service public !
Le quatrième alinéa de l'article 1er de la loi de 2000 était rédigé en ces termes : « Matérialisant le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité, le service public de l'électricité est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité, d'adaptabilité, et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique. » Or dans votre texte, monsieur le ministre, tous ces principes fondamentaux du service public sont résumés en une formule lapidaire : les contrats portent notamment sur «les moyens permettant d'assurer l'accès au service public ».
Le service public a, à notre avis, pour épicentre la citoyenneté. Celle-ci disparaît, comme disparaissent la tarification sociale et les garanties offertes aux usagers par le service public.
Le rôle de l'État en matière d'orientation économique, d'aménagement du territoire, de service au public, n'existe plus, gommé par cet article 1er.
Vous prétendez regretter, au fond, d'être obligé de transformer l'établissement public en société anonyme. Vous n'avez pas réussi à nous en convaincre et, une fois de plus, nous vous demandons d'abandonner vos funestes propositions.
L'article 1er risque de priver le législateur du pouvoir de définir les obligations de service public d'EDF et GDF, en particulier en ce qui concerne la péréquation nationale des tarifs de vente d'électricité et de gaz, qui ne reste réservée qu'aux consommateurs domestiques.
En indiquant qu'il y aura, pour les autres consommateurs, péréquation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution, on laisse le champ libre à une détermination aléatoire du périmètre de la péréquation.
Pour toutes ces raisons, cet article mérite d'être supprimé. Le législateur doit conserver le pouvoir de définir le contenu des missions de service public afin que celles-ci soient respectées par l'ensemble des opérateurs.
La Commission européenne aurait-elle aujourd'hui, comme on voudrait nous le faire croire, une interprétation différente de celle qu'elle donnait il y a un an ? Notre groupe ne cessera de le démontrer tout au long de cet examen, aucun des prétextes que Mme de Palacio ou vous-même invoquez ne résiste à l'analyse : ce texte n'est pas une exigence de l'Europe. Ce n'est pas la « faute à l'Europe » ! C'est bien le résultat du choix que vous faites aujourd'hui.
Cette mise en parallèle manifeste une incompatibilité absolue entre les orientations de ces deux textes. La dimension sociale du service public qui figure dans le texte de 2000 a complètement disparu dans le projet actuel. Vous vous souciez essentiellement du coût des obligations de service public imposées aux entreprises. En clair, la rentabilité financière se substitue à « l'efficacité économique, sociale et énergétique » prévue par la loi de 2000.
Cet article 1er s'inscrit donc dans la logique d'ensemble de démolition sociale qui sous-tend le projet de loi. La présence des mots « service public » dans l'intitulé de son titre Ier relève presque de la provocation, si tant est que ce concept ait encore un sens pour vous, ce dont on peut douter à la lumière de ce débat.
M. le président. L'amendement n° 145, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa de cet article, après les mots :
mise en oeuvre
insérer les mots :
de l'intégralité
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Cet amendement vise à préciser qu'est assignée à EDF et à GDF l'intégralité des missions de service public de l'électricité et du gaz.
A l'occasion de ce débat si important, nous pensons vraiment qu'il ne faut pas banaliser ces missions de service public qui font l'essence même de l'établissement public EDF.
Nous ne voulons pas que tout le monde puisse, demain, faire du service public. Or je considère que ce texte fait courir un grand risque de dilution du service public du fait de l'intervention de plusieurs opérateurs.
Banaliser cette mission de service public conduirait à en réduire la portée. Nous sommes, vous le savez, profondément opposés à ce qui se profile, c'est-à-dire une forme de démantèlement du service public.
M. le président. L'amendement n° 269, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
I. Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :
font l'objet de contrats conclus entre l'Etat et chacune de ces entreprises
par les mots :
sont fixés par le Parlement
II. En conséquence, supprimer les deuxième à dernier alinéas de cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'Etat entend garder la maîtrise de ses relations avec les entreprises, par le biais non de la loi, mais du contrat.
Cette place prééminente du contrat est renforcée par le fait que sa durée n'est nullement précisée.
De surcroît, l'article 140 de la loi de 2001 dispose que les contrats d'entreprise sont réputés ne contenir que des clauses contractuelles. Dans ces conditions, ils ne peuvent en aucune façon se substituer à la loi.
Par l'article 1er du présent projet de loi, l'article 140 de la loi de 2001 relatif aux contrats d'entreprise pluriannuels est expressément abrogé. Ces contrats ne s'imposent plus absolument : l'Etat « peut » en conclure.
Or, dans votre projet de loi - l'indicatif ayant valeur impérative, comme disait le général de Gaulle -, il s'agit d'une obligation absolue puisqu'il est écrit : « Les objectifs et les modalités de mise en oeuvre des missions de service public [...] font l'objet de contrats conclus entre l'Etat et chacune de ces entreprises. »
Nous vous proposons de supprimer la référence aux contrats entre l'Etat et chacune des entreprises, EDF et GDF, et de préciser dans la loi les missions qui sont garanties aux usagers.
Ainsi, nous souhaitons mettre en évidence les problèmes de sécurité et de continuité des approvisionnements présents et futurs.
Dans la Lettre de l'électricité, publication de l'Union française de l'électricité, on peut lire l'analyse suivante : « Le processus de libération du marché réduit le degré de sécurité du système électrique. À court terme, le nouveau cadre concurrentiel dilue les responsabilités et "désoptimise" le système. Alors que, dans le modèle intégré historique, un seul opérateur était responsable de la sécurité du système sur un territoire donné, celle-ci résulte désormais des interactions d'une multitude d'acteurs - producteurs, transporteurs, régulateurs, Bourse -, sans que l'un d'entre eux soit complètement responsable. L'indépendance de gestion des réseaux de transport et de distribution, imposée par la directive, met fin à la coordination et à l'optimisation des moyens de transport et des moyens de production. II en résulte que, pour parvenir au même niveau de sécurité, un système électrique déréglementé nécessite davantage de lignes de transport. »
Cela signifie bien qu'on entre dans une certaine insécurité.
Parlons maintenant de l'égalité d'accès au service public de l'énergie sur tout le territoire, en particulier des notions de raccordement et de services aux particuliers. Voilà quelques années, ces services étaient gratuits. Puis ils sont devenus payants et, depuis le 23 décembre 2003, ils ont littéralement explosé.
D'autres intervenants ont rappelé ces chiffres, mais il faut les répéter, car c'est la réalité quotidienne que vivent nos administrés.
Lorsque chacun d'entre nous retournera dans son département, ceux qui auront voté contre le fait de garantir la sécurité et la continuité des approvisionnements, contre l'égalité d'accès au service public, contre un prix de l'énergie et des services associés au plus près des coûts de revient, devront expliquer pourquoi.
Votre texte n'apporte pas ces garanties, monsieur le ministre, et pour cause ! A vous croire, le contrat, ce serait la liberté, et la loi, l'oppression !
C'est bien le respect des prérogatives du Parlement qui est ici en jeu. Nous souhaitons préserver les prérogatives des représentants du peuple, dans l'intérêt de ce dernier.
M. le président. L'amendement n° 271, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
font l'objet de contrats conclus entre l'Etat et chacune de ces entreprises
remplacer la fin du premier alinéa et les deuxième à derniers alinéas de cet article par les dispositions suivantes :
et garantissent aux usagers :
- la sécurité et la continuité des approvisionnements présents et futurs ;
- l'égalité d'accès au service public de l'énergie sur tout le territoire ;
- le prix de l'énergie et des services associés au plus près du coût de revient ;
- la cohésion sociale par la péréquation nationale des tarifs ;
- la poursuite d'une grande politique de recherche et de diversification des sources énergétiques.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Je reprends l'idée que nous avons évoquée lorsque nous avons défendu notre motion tendant à opposer la question préalable, selon laquelle un enregistrement dans le texte de loi des missions de service public d'EDF-GDF rendrait effectivement hommage, non seulement aux morts de la Résistance au nazisme, toutes tendances philosophiques et toutes nationalités confondues, mais aussi au programme de gouvernement qui a suivi et qui traduisait la nécessité d'une nouvelle justice humaine et sociale.
Les nationalisations réalisées en 1946 reflétaient la volonté politique de rendre à la France sa grandeur et de garantir un niveau de confort nécessaire au bien-être de la population.
Notre amendement n° 271 vise à donner des garanties aux usagers.
A titre d'exemple, le tarif actuel d'un déplacement chez un particulier est passé , pour relever un compteur, de 12,40 à 25,30 euros, soit une augmentation de 108 %, et, pour contrôler un appareil, de 29,90 à 39,47 euros, soit une augmentation de 35 %.
Notre ami Daniel Paul a déclaré fort à propos à l'Assemblée nationale : « Comme une future mariée qui souhaite séduire les prétendants revêt ses plus beaux atours, ... » - argument bien peu féministe, mais que je me permets néanmoins de reprendre ! (Sourires) - « ...l'entreprise publique EDF, pour attirer les actionnaires, cherche à montrer qu'elle peut réaliser de beaux profits. »
Nous demandons que soit garanti aux usagers un prix de l'énergie et des services associés au plus près du coût de revient.
Le prix du gaz a également fortement augmenté au cours des dernières années.
Si les tarifs ne faisaient que répercuter la hausse des coûts d'acquisition du gaz, la marge de GDF devrait être constante, à la différence près de l'augmentation des ventes.
Or, en deux ans, de 2001 à 2003, la marge a progressé de 934 millions d'euros - ce n'est pas négligeable ! -, dont 636 millions d'euros pour les seuls usagers domestiques, qui ne représentent pourtant que 23 % de la consommation. Ces derniers génèrent donc les deux tiers de la marge globale !
Sans doute est-il plus intéressant de faire payer les usagers domestiques que les grandes entreprises !
Cela n'empêchera pas l'Etat de signer un contrat avec les entreprises, s'il y tient.
Nous souhaitons donc que ce qui est garanti aux usagers des services publics soit précisé dans la loi.
M. le président. L'amendement n° 270, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le contenu de ces contrats est soumis à l'approbation du Parlement.
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Nous pourrions envisager que les contrats prévus à l'article 1er définissent les modalités de mise en oeuvre des missions de service public assignées aux entreprises énergétiques et que l'exécutif joue son rôle, qui est précisément d'exécuter la volonté du législateur.
Mais ces contrats fixent également les objectifs des missions de service public. Le projet de loi introduit là une confusion inadmissible entre « objectifs » et « missions », monsieur le ministre.
A nos yeux, c'est au peuple, directement ou par l'intermédiaire de ses représentants, qu'il revient de déterminer les missions de service public.
Cependant, la substitution du contrat à la loi permet de définir une sorte d'intérêt général qui n'est plus l'intérêt de la collectivité, mais celui des agents économiques les plus puissants.
La liberté du contrat, en l'occurrence, ressemble à s'y méprendre à celle du renard dans le poulailler !
Quels sont les principes fondateurs de notre démocratie parlementaire, monsieur le ministre ? La loi, expression de la volonté générale, selon la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, est en fait l'expression de la volonté du peuple souverain et de la collectivité. Seule cette expression permet de déterminer l'intérêt général, qui est l'intérêt de la collectivité.
Le contrat entre l'Etat et une entreprise ne peut pas exprimer l'intérêt général en tant qu'intérêt de la collectivité. L'Etat n'exprime pas la volonté de la nation : il n'en est que le dépositaire.
Forts de ce constat, nous estimons non seulement utile, mais encore nécessaire de préciser que les contrats visés à l'article 1er du projet de loi seront soumis à l'approbation du Parlement.
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Préalablement à leur signature, ces contrats sont soumis au conseil d'administration d'Electricité de France ou de Gaz de France.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement prévoit que, préalablement à leur signature, les contrats de service public conclus entre l'Etat et les entreprises EDF et GDF seront soumis au conseil d'administration de ces entreprises, afin de permettre la consultation, notamment, des représentants des salariés dans ces entreprises.
Une telle disposition permettra de compléter l'information de ces derniers, s'agissant tant des missions de service public que des changements qui interviendront dans le travail quotidien des salariés des entreprises concernées.
M. le président. L'amendement n° 146, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les projets de contrats sont soumis à l'avis des organisations syndicales d'Electricité de France et de Gaz de France, puis des commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat compétentes sur les questions énergétiques.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Dans le prolongement de l'amendement que vient de présenter le rapporteur, nous proposons d'étendre la consultation au-delà des conseils d'administration, où les actionnaires privés représenteront 30 % des voix, selon le degré d'ouverture du capital fixé par le Gouvernement.
Tout d'abord, nous souhaitons que les projets de contrat de service public soient soumis à l'avis des organisations syndicales de ces entreprises.
Ensuite, la rédaction actuelle de l'article 1er écarte totalement le Parlement de la définition des missions de service public assignées à EDF et GDF. Il nous paraît souhaitable de le rétablir dans son rôle, au moins à travers les commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat compétentes sur les questions énergétiques.
M. le président. L'amendement n° 147, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Supprimer le deuxième alinéa de cet article.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Nous ne sommes pas favorables aux contrats de service public. Nous considérons, pour notre part, que les contrats de plan couvrent un champ beaucoup plus large.
Nous estimons, en outre, que des questions aussi importantes que la stratégie de développement ne doivent pas être discutées uniquement au sein du conseil d'administration des entreprises concernées. Il importe, selon nous, que l'Etat reste maître de la politique énergétique.
M. le président. L'amendement n° 150, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa de cet article :
Ces contrats sont définis selon les principes et conditions énoncés par les articles 1er à cinq de la loi n° 2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité et 15 à 18 de la loi n° 20038 du 3 janvier 2003.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Cet amendement vise à rétablir les actuels contrats de groupe et de plan.
Il tend à fixer le cadre des contrats de service public signés par les opérateurs historiques avec l'Etat. A l'inverse de la rédaction actuelle de l'article 1er du présent projet de loi, qui organise le dessaisissement du pouvoir législatif et s'en remet au simple contrat pour la définition des obligations et des missions de service public, cet amendement renvoie aux articles des lois de 2000 et de 2003 qui définissent précisément le service public de l'électricité et du gaz.
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Supprimer les troisième et quatrième alinéas de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Les amendements nos 3, 6, 7 et 8 visent simplement à modifier l'ordre des dispositions qui ont été introduites par l'Assemblée nationale. La commission ne souhaite en aucun cas supprimer ces ajouts, qu'elle estime bons.
Le Sénat effectue là, comme d'habitude, son travail de vigilance, pour améliorer la lisibilité des textes.
M. le président. L'amendement n° 153, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Dans le sixième alinéa de cet article, après les mots :
en matière de sécurité d'approvisionnement
insérer les mots :
, de régularité
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le sixième alinéa de cet article, supprimer les mots :
de la fourniture
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Nous approuvons l'ajout proposé par nos collègues socialistes avec l'amendement n° 153, mais nous suggérons de supprimer ces trois mots qui ont été introduits par l'Assemblée nationale et qui n'apportent rien au texte.
M. le président. L'amendement n° 265, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le sixième alinéa de cet article, remplacer le mot :
consommateurs
par le mot :
usagers
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Je dois reconnaître que les dérives dans le vocabulaire ne sont pas forcément le fait du gouvernement actuel puisque cette terminologie tendant à faire des « usagers » des services publics des « consommateurs » ordinaires a aussi imprégné l'ancienne majorité, comme l'attestent les termes de la loi du 10 février 2000!
Les députés communistes se sont longuement exprimés pour exposer les raisons qui motivent notre rejet des dispositions inscrites dans l'article 1er du projet de loi. Il convient cependant de revenir sur deux aspects.
Tout d'abord, compte tenu de l'incertitude des missions de service public et du lien qui existe entre ces missions et le statut du personnel, nous pensons que le statut du personnel de EDF et de GDF est manifestement menacé, contrairement aux déclarations gouvernementales, d'autant que tout dépendrait du contrat et non de la loi. Mais il me semble que nous avons suffisamment fait part de nos réticences à propos de ce contrat, dont nous dénonçons la fragilité, pour ne pas revenir sur ce point.
Simplement, on peut se poser la question suivante : le juge administratif, qui contrôle la légalité du statut des agents de EDF et de GDF, pourrait-il être compétent pour contrôler la légitimité du maintien du statut de ces agents par rapport aux contrats passés entre l'Etat, d'une part, et EDF et GDF, d'autre part, contrats qui définiraient la substance des missions de service public ? C'est loin d'être certain.
Dans ces conditions, il est légitime de s'interroger - et la question est d'une très grande importance - sur le fondement du maintien du statut des agents de EDF et de GDF. Les actionnaires autres que l'Etat eux-mêmes, en cas de transformation en société anonyme et d'ouverture du capital, s'interrogeraient sans aucun doute sur l'intérêt qu'ils y trouveraient. Nous craignons de deviner leur réponse.
Vous nous mettez constamment au défi de démontrer en quoi ce texte menacerait le statut des électriciens et des gaziers. Mais comme nous ne saurions vous suspecter de duplicité, nous pensons que vous pourriez nous rassurer sur ce point.
Le second aspect qui nous préoccupe a trait à la suppression, consécutive à la mise en place du contrat qui institue une relation duale Etat-entreprises, du contrôle des citoyens sur les entreprises intervenant dans les secteurs de l'électricité et du gaz.
Autrement dit, on peut se demander si, juridiquement, le service public, au sens où on l'entend en droit français, continue à exister.
Cet article 1er sera donc source d'immenses difficultés juridiques et politiques. Substituer à la notion de consommateur celle d'usager témoignerait, de manière symbolique dans un premier temps, mais dans les faits demain, de votre volonté de conforter les principes du service public.
M. le président. L'amendement n° 266, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le sixième alinéa de cet article par les mots :
notamment dans les zones de revitalisation rurale et les zones urbaines sensibles.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Le présent amendement renvoie à la constante alerte que nous déclencherons quand il s'agira de l'égalité et de la fraternité - notion que nous préférons à celle de solidarité - qui doivent présider à l'aménagement du territoire, au rôle de l'Etat dans la décentralisation et à tous les textes soumis aux parlements.
Nos services publics d'intérêt économique général, qui recouvrent aussi bien le secteur des communications - rail, poste, téléphone - que celui de l'énergie - gaz, électricité, eau -ont été construits autour du système de « péréquation tarifaire » pour permettre l'accès de tous et de chacun au réseau : les tarifs appliqués sont déconnectés des prix de revient, les services plus rentables permettant le financement des services moins rentables, tout cela étant organisé dans le cadre de monopoles publics, qui sont donc soumis essentiellement aux choix politiques.
C'est ce système de péréquation tarifaire qui est touché au coeur quand la Commission européenne veut faire entrer dans les faits le principe selon lequel les tarifs doivent tendre vers les coûts.
Pour illustrer ce propos, je prendrai l'exemple de La Poste. Il lui coûte plus cher d'envoyer une lettre en zone rurale qu'en centre-ville, où ce coût n'atteint pas le prix du timbre, qu'il s'agisse du tarif lent ou du tarif rapide. Il en résulte un équilibre qui permet d'éviter des distorsions et des différences de tarif.
C'est ce système de péréquation tarifaire dans le secteur énergétique qui est touché au coeur avec ce projet de loi qui tend à la privatisation d'EDF et de GDF.
En 1996, pourtant, dans une communication sur les services d'intérêt général en Europe, la Commission européenne reconnaissait que « les mécanismes de marché présentent parfois leurs limites et peuvent risquer d'exclure une partie de la population », en particulier celle qui se trouve dans les zones de revitalisation rurale ou les zones urbaines sensibles. Cependant, elle réaffirmait aussitôt son credo libéral en indiquant que « les services d'intérêt général de caractère économique sont en principe soumis aux règles dont la Communauté s'est dotée pour établir un grand marché ».
Le 20 septembre 2000, une communication de la Commission affirme que « la Communauté protège les objectifs d'intérêt général et la mission de service public ». Mais c'est pour indiquer aussitôt que, « dans bien des cas, le marché est le meilleur mécanisme pour fournir ces services ».
Pourtant, le bilan de la déréglementation dans les télécommunications est éclairant.
Le prix des communications « longue distance » a essentiellement baissé sur les axes de trafic fortement utilisés. En revanche, le rééquilibrage tarifaire s'est fait au détriment de la grande masse des usagers.
En France, le prix de l'abonnement a été multiplié par trois depuis 1993. La présence en France de trois grands opérateurs de téléphonie n'a pas permis de couvrir l'ensemble du territoire national. En Grande-Bretagne, on assiste même à des différences de tarifs selon les axes de trafic.
Malgré tous ces exemples, le Gouvernement persiste dans cette voie et va, avec ce projet de loi, mettre fin au principe de la péréquation tarifaire dans le secteur du gaz et de l'électricité, notamment dans les zones où la densité de population est faible, où les entreprises chargées de distribuer l'électricité et le gaz seront probablement beaucoup moins enclines à investir dans des transports onéreux.
Nous pouvons donc avoir des craintes quant à la desserte des personnes habitant dans ces secteurs, à la qualité du service qui leur sera rendu et de l'énergie qu'on leur fournira.
Je vous renvoie au projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, dont nous avons débattu et qui a consacré une grande innovation, à savoir de nouveaux droits pour les communes pauvres et les communes rurales.
En effet, ces communes ont maintenant le droit d'être opérateur de télécommunications lorsque aucun opérateur ne veut venir jusqu'à elles, de payer les études d'un médecin lorsque aucun médecin ne veut venir s'installer, de contribuer à l'installation d'un vétérinaire lorsque aucun vétérinaire n'accepte de venir dans le secteur.
Avec votre libéralisation et la privatisation d'EDF et de GDF, allons-nous vers un système où les communes rurales pauvres devront compenser le surcoût de l'acheminement de l'énergie vers ces territoires ?
C'est pour éviter cet écueil que nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter l'amendement n° 266.
M. le président. L'amendement n° 148, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le septième alinéa de cet article :
- les moyens permettant d'assurer l'égal accès de tous en tout point du territoire au service public ;
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Selon le septième alinéa de l'article 1er, « les contrats portent notamment sur les moyens permettant d'assurer l'accès au service public ».
Pour notre part, nous considérons que la formule est au moins un peu vague.
Une explication sur les moyens et sur l'accès serait bienvenue, monsieur le ministre. Par ailleurs, pourquoi cette rédaction est-elle en retrait par rapport aux lois existantes ?
Vous nous dites que les lois existantes sont intégralement reprises mais, en l'occurrence, ce n'est pas vrai.
Pour notre part, nous disons clairement que les contrats doivent respecter les principes du service public, c'est-à-dire l'égalité et l'universalité.
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, une rédaction beaucoup plus précise.
M. le président. L'amendement n° 264, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le septième alinéa de cet article, remplacer les mots :
l'accès
par les mots :
l'égalité d'accès
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Aujourd'hui, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, sur l'ensemble du territoire, chacun bénéficie du même tarif pour le kilowattheure.
La desserte des zones les plus rentables aide au financement de celles qui le sont moins, conformément au principe de solidarité, qui est la base même de la notion de service public.
Demain, avec la privatisation, monsieur le ministre, la péréquation tarifaire disparaîtra.
L'opacité qui règne dans le domaine des télécommunications nous donne d'ailleurs un avant-goût de ce qui nous attend, demain, avec l'électricité, pour le kilowattheure : aujourd'hui, dans le secteur des télécommunications, le prix des abonnements ne cesse d'augmenter et les tarifs sont incompréhensibles.
Prenons un autre exemple, celui de l'eau.
Le prix du mètre cube peut varier du simple au triple d'une commune à l'autre. Ainsi, dans le Maine-et-Loire, on ne paie pas le même prix partout. En 2002, le prix d'une consommation de 120 mètres cubes a varié de 114 euros dans la commune d'Angers, prise en charge par une entreprise publique, à 181 euros dans celle de Beaufort, gérée par une entreprise privée. Il est même monté à 218 euros dans celle de Durtal et à pas moins de 249 euros dans celle de Seiches. Il y a donc des tarifs à la carte !
Avec la privatisation, c'est la fin de la péréquation.
Pour l'entreprise, il s'agira non plus de répondre aux besoins des populations, mais de vendre une prestation avec une marge bénéficiaire et aussi substantielle que possible.
De ce fait, faute de capacités financières suffisantes, le chômeur, la personne réduite au SMIC ou l'ouvrier sans qualification verront leurs conditions de vie se dégrader.
Solidarité, cohésion sociale et fraternité sont-elles compatibles avec le choix de société que le Gouvernement veut nous imposer à travers ce texte ? Nous considérons que non.
C'est pourquoi nous vous demandons, monsieur le ministre, que le principe de péréquation soit inscrit dans le marbre. S'agissant d'une question d'une telle importance, à savoir assurer l'égalité d'accès à l'énergie, nous ne pouvons pas nous contenter - non plus que les Françaises et les Français - de propos rassurants, monsieur le ministre, selon lesquels le changement de statut d'EDF et de GDF ne vise pas à transformer ces entreprises en sociétés anonymes.
M. le président. L'amendement n° 261, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le septième alinéa de cet article, après les mots :
l'accès
insérer les mots :
et notamment des plus défavorisés
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. M. Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a déclaré voilà quelques jours : « Les valeurs du service public seront maintenues, notamment l'égalité d'accès des Français à l'énergie et la solidarité avec les plus démunis. La péréquation tarifaire sera garantie. Le prix sera le même pour un client habitant à 400 kilomètres ou à 4 kilomètres d'une centrale, tout comme le tarif social et la qualité du courant. »
Pourtant, chacun le sait, la péréquation tarifaire, qui garantit, en vertu de la mission de service public de l'Etat, un tarif unique et l'égalité des usagers sur l'ensemble du territoire, ne pourra, à terme, être maintenue puisqu'il existe une contradiction fondamentale entre les objectifs d'une société anonyme et ceux d'un établissement public, qui est placé sous le contrôle de l'Etat, garant de l'intérêt général.
Dès lors que l'électricité devient une marchandise, elle est, de fait, soumise à la règle de la concurrence, et les coûts réels sont pris en compte sur chaque segment de clientèle ou de territoire.
Dans un premier temps, la péréquation va subsister, sur l'acheminement, mais pas sur la production, la commercialisation et le service, lesquels représentent tout de même près de 50 % de la facture d'électricité acquittée par un ménage.
Du reste, EDF ne s'en cache pas, et depuis quelque temps, M. Roussely ne fait plus mystère de ses convictions profondes.
Ainsi, dans une plaquette, éditée par l'entreprise à l'intention des collectivités, EDF indique : « Dans cette logique de traitement personnalisé, la notion de péréquation ne pourra plus s'appliquer au prix des services. »
M. Roussely s'inscrit donc déjà dans une nouvelle logique qui contredit la déclaration de M. Sarkozy précédemment citée et qui ne traite pas tout le monde de la même façon.
Ce texte remet en cause l'un des principes les plus importants du service public. Il enclenche un processus pernicieux qui entraînera inéluctablement des disparités de traitement entre les collectivités locales ainsi que l'accroissement des inégalités entre les territoires et entre les populations.
C'est pourquoi nous demandons le maintien du principe de la péréquation tarifaire dans le secteur énergétique, au nom de la cohésion économique, sociale et géographique, de la justice et de nos valeurs, celles qui ont inspiré nos prédécesseurs de 1946, guidés par l'esprit du Conseil national de la Résistance, dont le programme n'est pas si obsolète que cela puisqu'il est une expression de l'idéal républicain. Ce sont des références fortes dont nous sommes fiers et dont beaucoup de textes internationaux actuels sont les héritiers.
M. le président. L'amendement n° 149, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Supprimer le neuvième alinéa de cet article.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Il s'agit d'un amendement d'appel.
La rédaction du neuvième alinéa telle qu'elle est actuellement prévue fait, en réalité, perdre au Gouvernement le contrôle de l'évolution des tarifs.
Or, on le voit depuis le début de notre débat, la question de l'évolution des tarifs, notamment en qui concerne le service public, est fondamentale.
Prévoir une évolution pluriannuelle des tarifs de vente donne une marge de manoeuvre relativement considérable et signifie en tout cas une perte de contrôle de l'Etat.
Nous aurions préféré une autre rédaction permettant au ministre chargé de l'énergie, de pouvoir intervenir sur chaque hausse de tarifs, comme c'est actuellement le cas. Le président Roussely ne s'en est d'ailleurs pas caché, toute une série de hausses sont déjà prévues.
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le neuvième alinéa de cet article :
- le maintien des tarifs aux usagers domestiques à un niveau abordable ;
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Nous avons déjà eu, ce matin, l'occasion d'aborder la question de la hausse du prix de l'énergie. Il s'agit là de la hausse des tarifs applicables aux usagers domestiques.
L'amendement n° 155 a pour objet d'empêcher que l'ouverture à la concurrence soit seulement synonyme de recherche du profit et, de ce fait, aboutisse à une hausse des tarifs de vente de l'électricité et du gaz.
Le Gouvernement nous a répondu tout à l'heure que, dans la mesure où les usagers domestiques ne sont pas concernés par l'ouverture à la concurrence avant 2007, les prix de l'énergie ne vont pas augmenter. Nous sommes, pour notre part, très réservés sur ce point. Nous pensons, au contraire, que, pour attirer les capitaux privés nécessaires, il faudra - c'est un peu la logique du système - rémunérer les actionnaires et, par conséquent, augmenter les tarifs.
L'amendement n° 155 vise donc à prévoir que les contrats de service public devront assurer le maintien des tarifs aux usagers domestiques à un niveau que nous qualifions d'« abordable ».
M. le président. L'amendement n° 272, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
A la fin du dixième alinéa de cet article, supprimer les mots :
des entreprises
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous nous sommes aperçus, à la lecture du projet de loi, que le huitième alinéa de l'article 1er pouvait susciter des difficultés.
En effet, cet alinéa dispose que les contrats conclus entre l'Etat et les entreprises exerçant des missions de service public portent notamment sur « la politique de recherche et développement des entreprises ».
A nos yeux, cette rédaction fort ambiguë peut être à l'origine de conflits d'interprétation. Elle mérite d'être corrigée, car elle pourrait donner lieu à une lecture particulièrement perverse. On pourrait, par exemple, en déduire que les contrats de service public visent tout autant à renforcer la politique de recherche qu'à assurer le développement des entreprises, l'un et l'autre se mélangeant sans qu'il y ait de priorité.
On le sait par expérience, service public et recherche du profit par des entreprises privées ne font pas nécessairement bon ménage. Ces dernières années, la croissance externe d'EDF, une entreprise déjà inscrite par anticipation dans la logique libérale, est allée de pair avec la fermeture d'agences en France, alors que la présence d'agences sur tout le territoire constitue, à nos yeux, le coeur des missions de service public.
Le projet de loi d'orientation sur l'énergie prévoit qu'une part de la production sera assurée par des énergies renouvelables, lesquelles dépendent des progrès de la recherche, notamment de la recherche fondamentale. Vous ne pouvez donc restreindre le principe d'une grande politique de recherche et de développement au seul secteur des entreprises, monsieur le ministre. A cet égard, les quatre ou cinq dernières années ont été très instructives, et vous devriez en tirer la leçon.
Dans le domaine des télécommunications, par exemple, les entreprises ont fait très peu d'efforts en termes de recherche fondamentale, et cette carence n'a malheureusement pas été compensée par la recherche publique, victime au même moment de restrictions de crédits.
La recherche et le développement doivent constituer une priorité non seulement dans l'entreprise, mais également dans les laboratoires : on sait bien que les premières coupes claires porteront sur les recherches à moyen et à très long terme, a fortiori lorsque vous aurez privatisé EDF et GDF. Faisons donc en sorte que la recherche publique au moins continue d'être financée. Ainsi, tout en ciblant expressément les entreprises, conformément à votre souhait, monsieur le ministre, la politique de recherche et de développement ne serait pas restreinte à celles-ci.
Par cet amendement, nous souhaitons supprimer de l'avant-dernier alinéa de cet article les mots « des entreprises » afin d'éviter toute méprise sur les intentions du législateur.
Si un contrat de service public peut comprendre des objectifs en matière de politique de recherche et de développement, en revanche, un contrat digne de ce nom n'a pas à se focaliser sur le développement des entreprises au risque de laisser croire que leur croissance, le plus souvent externe ou financière, prime sur le service public.
Quoi qu'il en soit, il semble nécessaire, mes chers collègues, d'adopter cet amendement de portée purement rédactionnelle en apparence, mais qui a le mérite de permettre de lever une ambiguïté tout en montrant que votre attachement au service public ne se réduit pas aux discours, dont nos concitoyens désespèrent souvent d'observer une traduction dans les faits.
M. le président. L'amendement n° 151, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après le dixième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
- l'établissement d'un programme d'enfouissement des réseaux publics de distribution d'électricité ;
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Mes chers collègues, quel que soit les travées sur lesquelles vous siégez, vous savez tous à quel point les collectivités locales sont attachées à l'enfouissement des réseaux publics de distribution : il convient donc de le préciser dans les objectifs assignés à EDF.
Nous nous réjouissons d'ailleurs que M. le rapporteur ait présenté un amendement ayant un objet similaire.
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après le onzième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
- les objectifs pluriannuels en matière d'enfouissement des réseaux publics de distribution d'électricité.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mon amendement est, lui aussi, c'est vrai, consacré à l'enfouissement des réseaux publics de distribution d'électricité, mais M. Reiner ne sera pas surpris si, tout à l'heure, j'ai une préférence pour le mien plutôt que pour le sien, qui sera toutefois satisfait.
Lors des grandes tempêtes de 1999, si les foyers allemands ont recouvré l'électricité plus rapidement que les foyers français, c'est parce que le taux d'enfouissement des lignes allemandes est beaucoup plus important que celui des lignes françaises. Il est donc important que nous rattrapions notre retard en ce domaine.
Par ailleurs, le temps annuel moyen de coupure par abonné raccordé au réseau basse tension oscille, en France, entre quarante-cinq et soixante minutes, alors qu'il n'est que de quinze à trente minutes en Allemagne, toujours pour les mêmes raisons.
Je suis sûr qu'un consensus se dégagera - cela n'a rien à voir avec la privatisation ! - pour que l'enfouissement des lignes électriques soit encouragé et accéléré.
M. le président. L'amendement n° 152, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après le dixième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
- l'établissement d'un programme d'amélioration de la desserte publique en gaz du territoire, établi en concertation avec les collectivités territoriales concernées.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Cet amendement est important, parce qu'il vise à contrecarrer, notamment, l'article 24 du projet de loi d'orientation sur l'énergie, qui tend à abroger l'article 50 de la loi du 2 juillet 1998, lequel oblige GDF à améliorer la desserte gazière.
Rappelons que, par cette loi, a été abaissé le fameux critère de rentabilité qu'opposait GDF s'agissant de l'extension de la desserte gazière et prévue la définition d'un plan triennal de desserte.
Plus de 1 400 communes ont ainsi pu être desservies. Nous regrettons, monsieur le ministre, que vous n'ayez pas voulu signer un accord avec les collectivités locales demandeuses en vue d'élaborer un nouveau plan de desserte.
D'une certaine manière, vous faites croire aux communes rurales qui ne sont pas desservies en gaz qu'il leur suffit de créer un réseau public de distribution et de le concéder à n'importe quelle entreprise pour être desservies.
Nous, nous pensons que c'est un leurre : vous savez bien que, si la rentabilité n'est pas avérée, les entreprises ne viendront pas ou que, si elles viennent, elles le feront payer cher.
Par notre amendement, nous rétablissons l'obligation faite à GDF par la loi de 1998 d'améliorer la desserte gazière, en prévoyant l'établissement d'un programme d'amélioration de la desserte publique en gaz du territoire, établi en concertation avec les collectivités territoriales concernées.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 1er, à l'amendement n° 262.
L'amendement n° 262, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le dixième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
- la politique du développement de production d'énergie par utilisation d'énergies renouvelables ;
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Depuis les années soixante-dix et la première vague d'intérêt pour les énergies propres, des progrès technologiques importants ont permis de développer les énergies renouvelables que sont l'éolien, le solaire, la biomasse et la géothermie. Non polluantes et inépuisables, ces sources présentent l'énorme avantage d'offrir une énergie produite et utilisable localement, au coeur d'un centre ville comme en pleine campagne.
Pour les spécialistes de l'énergie, le secteur photovoltaïque va connaître partout dans le monde un fort développement. En effet, ainsi que le note l'Association européenne de l'industrie photovoltaïque, depuis vingt ans, le prix du kilowattheure photovoltaïque baisse chaque année de 5 %, diminution comparable à celle qui a eu lieu dans le domaine de l'informatique et qui a permis la démocratisation de l'usage des ordinateurs. Au Japon et en Californie, à l'horizon 2010, voire 2005, le prix du kilowattheure solaire sera le même que celui de l'électricité classique.
Certains pays européens investissent massivement dans les technologies renouvelables. A la fin de l'année 2002, les installations photovoltaïques en Allemagne produisaient 278 mégawatts, contre moins de 17 mégawatts en France. Au cours des années 2001 et 2002, l'Allemagne a installé 1,5 million de mètres carrés de capteurs solaires thermiques, contre 0,1 pour la France. A la fin de l'année 2002, notre voisin rhénan comptait 12 000 mégawatts d'éolien, contre 150 en France.
Je n'oublie pas que, dans le même temps, l'Allemagne a décidé de sortir du nucléaire, mais achète l'électricité nécessaire aux besoins de ses habitants à la France qui, elle, a fait le choix de poursuivre sa production nucléaire. Dans ce domaine, les éléments d'appréciation doivent être équilibrés.
D'autres pays comme l'Autriche, le Danemark ou encore l'Espagne ont également une volonté politique marquée en matière d'énergies décentralisées.
Le 13 août 2003, la directrice de l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, invitée de l'émission matinale de France Inter consacrée ce jour-là au réchauffement climatique, expliquait qu'il fallait « avoir des énergies renouvelables qui ne produisent pas de gaz carbonique » et que cela relevait « donc de la recherche ». Faut-il vraiment attendre le résultat d'éventuelles recherches, alors que les énergies renouvelables sont une réalité quotidienne qui peut être effective dans notre pays ?
Au cours de cette émission, Mme Roselyne Bachelot, alors ministre de l'écologie et du développement durable, avait comparé les 3 600 mégawatts produits par la centrale nucléaire de Chinon aux équivalents renouvelables et avait conclu par ces mots : « Les énergies renouvelables, il faut absolument les promouvoir. »
Les gestionnaires de parcs éoliens savent que, pour pallier l'intermittence des productions, il faut avoir divers sites et travailler avec les autres sources propres.
Au-delà des énergies renouvelables, c'est aussi la discussion sur le gaspillage énergétique qui est bien souvent absente. De 1974 à 2000, la consommation électrique de l'Hexagone a été multipliée par quatre. Cela fait plus de vingt ans que des campagnes de publicité vantent l'énergie comme abondante, pas chère et non polluante. Nous continuons à développer une politique de l'offre toujours croissante. Or il faudrait apporter des éléments plus précis dans le domaine de la maîtrise des consommations.
Au cours de l'examen de la loi d'orientation sur l'énergie, j'avais expliqué que le travail mené par nos chercheurs, en particulier ceux du CNRS, devrait nous permettre d'intervenir sur la réduction de certaines consommations d'énergies.
Il est question de rénovation dans le domaine de l'habitat, mais il faudrait prendre en compte l'ensemble des éléments intervenant dans tous les aspects de la vie domestique. Le simple remplacement dans chaque logement des ampoules les plus utilisées par des modèles à basse consommation reviendrait à économiser, nous est-il dit, la production annuelle d'un réacteur nucléaire et demi. Il faut, selon moi, être plus précis dans ce domaine.
Etudier et reconsidérer nos besoins, y adjoindre l'usage des énergies renouvelables sont une façon de nous prémunir efficacement contre d'éventuelles crises énergétiques, même si ce n'est pas suffisant.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le douzième alinéa de cet article :
Ces contrats définissent, pour chacun des objectifs identifiés ci-dessus, des indicateurs de résultats. Ces contrats et l'évolution de ces indicateurs font l'objet d'un rapport triennal transmis au Parlement.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement rédactionnel a été défendu en même temps que l'amendement n° 3.
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après le douzième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
L'Etat peut également conclure, avec les autres entreprises du secteur de l'électricité et du gaz assumant des missions de service public, des contrats précisant ces missions.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement rédactionnel a également été défendu.
M. le président. Cet amendement est assorti de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 64 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
Le sous-amendement n° 214 est présenté par MM. Besson, Raoult et Sergent.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 7, après les mots :
missions de service public,
insérer les mots :
ainsi qu'avec les autorités visées à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales pour les objectifs identifiés ci-dessus dont l'accomplissement relève de leur compétence,
La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter le sous-amendement n° 64.
M. Xavier Pintat. Ce sous-amendement est retiré au profit de l'amendement n° 65 rectifié.
M. le président. Le sous-amendement n° 64 est retiré.
Le sous-amendement n° 214 n'est pas soutenu.
L'amendement n° 260, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa de cet article, supprimer les mots :
, en particulier de gestionnaire de réseaux,
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous ne saurions faire nôtre la formulation selon laquelle l'entreprise nationale doit se limiter à être gestionnaire de réseaux. Le particulier ne doit pas devenir une généralité pour une prestation concernant des marchands d'énergies privés.
Il est indispensable que nous soyons en mesure de répondre aux besoins.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer les mots «, en particulier de gestionnaire de réseaux, », qui atténuent le rôle que doit jouer l'entreprise nationale.
M. le président. L'amendement n° 267, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant dernier alinéa de cet article, après les mots :
cohésion sociale,
insérer les mots :
à la prévention et la lutte contre les exclusions sociales,
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Je veux insister sur le fait que nous sommes en République et que les services publics doivent assurer la continuité républicaine, notamment à l'égard des plus démunis.
Il suffit d'ailleurs de relire la loi du 10 février 2000 : « Les tarifs aux usagers domestiques tiennent compte, pour les usagers dont les revenus du foyer sont, au regard de la composition familiale, inférieurs à un plafond, du caractère indispensable de l'électricité en instaurant pour une tranche de leur consommation une tarification spéciale "produit de première nécessité". » Cet aspect est pris en compte dans le présent projet de loi.
Le fonds de solidarité énergie, le FSE, vient en aide aux personnes en situation de précarité afin de préserver ou de garantir leur accès à l'électricité ou au gaz. Or nous rencontrons à cet égard de sérieuses difficultés dans bon nombre de communes.
La procédure actuelle découle de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, ainsi que du décret d'application du 20 juin 2001, mais également, dans certaines communes, de conventions passées en 2003 entre l'Etat, EDF, les conseils généraux, les ASSEDIC et plusieurs autres structures.
Les dossiers d'aide sont examinés, dans la plupart des cas, deux fois par mois. La commission chargée d'instruire ces dossiers dispose de trois types d'aides.
La première aide, l'aide au paiement des factures impayées, est fondée pour partie sur des critères objectifs, notamment le quotient social calculé en rapportant le nombre d'unités de consommation au total des ressources du foyer. Tous les responsables de collectivités locales connaissent ce genre d'arithmétique. La valeur de l'unité varie selon la composition du foyer. Le comité de pilotage du fonds solidarité énergie, qui regroupe les partenaires que je viens de citer, a fixé un seuil au-dessus duquel la commission est fondée à refuser une aide.
Un autre critère entre en ligne de compte : la part que représentent les dépenses d'électricité dans les ressources du foyer. Le comité de pilotage considère que, dès lors que les charges sont inférieures à 4 % des ressources, aucune aide ne doit être accordée. Ce seuil est toutefois abaissé à 1 % lorsque le quotient social est inférieur à 335 euros.
Enfin, la commission se fonde sur des éléments d'appréciation qui relèvent de l'analyse des dossiers : charges élevées, situation familiale, problèmes de santé, caractéristiques du logement, etc. Une nouveauté importante a été introduite dans le dispositif : la prise en compte, non de la facture réelle, mais de la facture estimative théorique annuelle du foyer, la FETA. Entrent en compte dans le calcul de la FETA certaines données techniques telles que le nombre de personnes vivant dans le foyer, la superficie du logement, les notes de chauffage, etc.
Un deuxième type d'aide existe : l'aide financière, attribuée à titre préventif et accordée en fonction des mêmes critères, qui vise à couvrir tout ou partie de la facture à venir pour un foyer dont on pressent qu'il ne sera pas en mesure de payer. Ce mécanisme est destiné aux personnes n'ayant jamais eu d'impayé comme à celles qui ont déjà bénéficié d'une aide curative. Il faut noter que les aides préventives ne concernent que l'électricité.
Enfin, le troisième type d'aide répond à un souci de prévention. Ce fonds de prévention est destiné à financer des actions en faveur des familles les plus fragilisées, dont les factures d'électricité sont trop élevées.
En 2003, une partie de l'enveloppe a été utilisée pour l'impression d'affiches et de dépliants préconisant des économies d'énergie ! Demeurent donc en 2004 les aides curatives et le fonds de prévention. Toutefois, le report de l'enveloppe non consommée l'année précédente n'ayant pas été reconduit, officiellement pour des raisons comptables, le dispositif s'est vu privé, pour la seule commune dont je vous parle, de plus de 50 000 euros. Il en résulte une diminution significative des aides curatives.
Les nouveaux modes de calcul excluent, de ce fait, un nombre important de foyers, qui ne pourront plus bénéficier d'aide alors que leurs ressources sont proches des minima sociaux. De nombreux dossiers sont passés à titre dérogatoire, mais l'enveloppe 2004, faute de reports, reste très inférieure à celles des années précédentes.
Le montant disponible ne permettra plus de couvrir les commissions de la fin du mois de juin ni celles qui suivront jusqu'à la fin de l'année. De fait, les crédits 2004 seront épuisés dans les tout prochains jours. Cette situation doit être corrigée d'urgence et augure mal du traitement futur des situations de précarité dans un contexte d'abandon des règles du service public.
C'est la raison pour laquelle, ne serait-ce que pour préserver cette notion dans le texte qu'adoptera la majorité, nous souhaitons qu'il soit expressément fait mention de l'impérieuse nécessité de prévenir les exclusions.
M. le président. L'amendement n° 273, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa de cet article, après le mot :
vente
insérer les mots :
et de services
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à élargir le champ de la péréquation nationale des tarifs de l'électricité car le problème ne se résume pas à la seule vente de l'électricité.
Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à être des élus ruraux ; nous connaissons l'importance des services dans les zones d'habitat dispersé et nous devons rendre des comptes à nos électeurs.
Or les différents opérateurs chercheront à réaliser leur marge sur les services, puisque le prix de l'électricité sera encadré et soumis à des règles de transparence.
Les tarifs publics de fourniture doivent donc inclure aussi les services : le branchement, les interventions, le conseil tarifaire, les visites de sécurité, etc.
Ces activités qui se situent à la périphérie de la vente de l'énergie doivent être prises en compte dans la péréquation.
Si cette précision n'est pas apportée, il est à craindre que l'opérateur ne fasse comme bon lui semble et que les augmentations de facture ne soient, par voie de conséquence, considérables.
Il semble d'ailleurs que cela ait déjà commencé. Nous avons déjà donné l'exemple des tarifs appliqués au relevé des compteurs. Je citerai maintenant l'exemple de la modification d'un branchement : en prévision de l'ouverture du marché, le coût de cette prestation est passé de 380 euros à 702 euros.
Si nous ne prévoyons pas, dans la loi, une péréquation pour les services et si nous limitons la péréquation au coût d'achat de l'énergie, cela aura des conséquences désastreuses. On assistera à des différences de prix importantes, en fonction de la distance entre l'abonné et l'exploitant. Les zones rurales et les zones de montagne seront dramatiquement touchées.
Mes chers collègues, il s'agit du devenir de nos territoires. II est donc utile que, dans le contrat liant l'Etat et l'opérateur - puisque c'est le choix que vous avez fait -, le périmètre de la tarification soit bien précisé.
M. le président. L'amendement n° 263, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant dernier alinéa de cet article, remplacer le mot :
consommateurs
par le mot :
usagers
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. J'ai déjà eu l'occasion, ce matin, de défendre la notion d'usager par rapport à la notion de consommateur. Aussi, je serai bref.
Le citoyen est au coeur du service public. Le mot « consommateur » renvoie à une notion de service indéfini, à une notion juridique floue, comme le disent souvent et à juste titre les associations de consommateurs. Nous plaidons pour la préservation de la citoyenneté.
C'est pourquoi nous proposons de remplacer le mot « consommateurs » par le mot « usagers ».
M. le président. L'amendement n° 274, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Tout fournisseur de gaz naturel sur le territoire français doit assumer des obligations de service public, en particulier l'égalité de traitement, la sécurité d'approvisionnement, au travers notamment de la programmation pluriannuelle des approvisionnements, de la continuité de fourniture, la régularité, la qualité et le prix, la protection de l'environnement et le développement équilibré du territoire.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. La multiplicité des acteurs, conséquence de l'ouverture du marché, rend plus fragile l'accomplissement des missions de service public. Il nous semble souhaitable que l'ensemble des fournisseurs y contribue.
M. le président. L'amendement n° 275, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Tout producteur d'électricité fournisseur de clients résidant sur le territoire français doit assumer des obligations de service public, notamment l'égalité de traitement, la sécurité d'approvisionnement, au travers notamment de la programmation pluriannuelle de la production, la continuité de fourniture, la régularité, la qualité et le prix, la protection de l'environnement et le développement équilibré du territoire.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. La discussion porte, d'une part, sur les notions de missions de service public et d'obligations de service public et, d'autre part, sur les objectifs que le Gouvernement entend poursuivre au travers de ce texte.
Au sommet de Lisbonne, au mois de mars 2000, a été décidée l'accélération de la « libéralisation » des secteurs du gaz, de l'électricité, de l'eau, des services postaux ou des transports, en vue d'achever la réalisation d'un marché intérieur des services.
Cette ouverture à la concurrence a été justifiée par l'efficacité économique qu'elle était censée offrir, alors même que les dimensions sociales et les questions relatives aux missions de service public étaient complètement marginalisées, voire exclues du cadre européen.
Dans le domaine énergétique, qui nous occupe actuellement, les risques de disparition des normes et des règles fondatrices du service public de l'électricité sont complètement avérés. Or ces règles et ces normes ont permis d'assurer, notamment, notre indépendance énergétique par le biais d'une politique énergétique visant le long terme et se traduisant par une programmation pluriannuelle des investissements. C'est précisément dans le cadre de l'organisation du service public que la continuité de fourniture a pu être assurée et que les exigences en matière de qualité et de prix, de protection de l'environnement et de développement équilibré de notre territoire ont pu être satisfaites.
En raison de l'ouverture à 70 % du marché de l'électricité à la concurrence en juillet 2004, puis à 100 % à partir de 2007, les risques de perte d'efficacité économique, sociale et environnementale sont avérés.
Les effets pervers se font déjà sentir, notamment en ce qui concerne les prix. Or la baisse des prix est l'une des principales justifications de la réalisation d'un marché intérieur de l'électricité.
Dans un premier temps les clients éligibles, puis les usagers dans leur ensemble, devaient bénéficier de baisses importantes des prix. Force est de constater que tel n'a pas été le cas, pour les gros clients industriels du moins, si bien qu'une hausse des tarifs de l'électricité, jamais égalée en France, pénalise aujourd'hui nos industries.
En mars dernier, la SNCF a déploré le fait de subir une hausse de sa facture d'électricité de l'ordre de 40 %, soit une augmentation de 120 millions d'euros pour 2004.
Lorsque le marché sera complètement ouvert à la concurrence, que restera-t-il des exigences en matière de péréquation tarifaire de l'électricité ? Chaque consommateur, petit ou gros, pourra-t-il choisir librement son fournisseur d'électricité ? De quelles garanties disposeront les consommateurs en matière de service public et de prix ? Les petits consommateurs ne seront-ils pas, eux aussi, pénalisés, lorsque des monopoles privés ou des oligopoles se seront constitués puisque la concurrence entraîne des effets « sauvages », mais finalement logiques, de concentration ?
Sur un marché complètement dérégulé, quel sens pourrait alors conserver la notion d'égalité d'accès à ce bien de première nécessité qu'est l'électricité ?
En Grande-Bretagne, où le marché de l'électricité est complètement ouvert à la concurrence, 6 millions de personnes éprouvent des difficultés pour accéder à une électricité devenue trop chère pour eux. Autrement dit, la libéralisation et la déréglementation sont facteurs d'exclusion sociale. Mais elles sont également facteurs de rupture de l'alimentation en électricité, et donc de rupture de continuité du service public.
En septembre 2003, la Suède et le Danemark ont été privés d'électricité sur une partie de leur territoire tandis que l'Italie subissait l'effondrement de son réseau électrique. II existe d'autres exemples de défaillances des réseaux d'électricité. N'est-ce pas parce que les missions et les obligations de service public ont été considérablement affaiblies dans le contexte d'ouverture à la concurrence que de tels désastres ont pu se produire ?
Pour toutes ces raisons nous considérons qu'il est impératif de conforter notre service public et de l'inscrire fortement dans la loi.
M. le président. L'amendement n° 276, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Tout gestionnaire de réseau de gaz naturel sur le territoire français doit assumer des obligations de service public, notamment l'égalité de traitement, la sécurité et la sûreté des installations gazières, le dimensionnement et la programmation pluriannuelle des investissements de réseaux, de stockages et d'installation de gaz naturel, la continuité de fourniture, la régularité, la qualité et le prix, la protection de l'environnement et le développement équilibré du territoire.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement n 277 car ces deux amendements, qui concernent respectivement l'électricité et le gaz, ont le même objet.
Soumettre l'ensemble des acteurs du marché de l'électricité à certaines obligations de service public est un impératif si nous ne voulons pas être confrontés à des dysfonctionnements aussi graves que ceux qu'a connus la Californie. La sécurité et la continuité de l'alimentation de l'ensemble de notre territoire en dépendent.
Autrement, qui pourrait contraindre Electrabel, la Compagnie nationale du Rhône ou tout autre nouvel opérateur pénétrant sur le marché français, à fournir en priorité notre territoire national lorsque la demande croît subitement, et ce à un prix garanti ?
Les contributions financières des opérateurs, pour compenser les missions de service public qui demeureront à la charge d'EDF, ne suffiront pas à maintenir les exigences du service public, lequel risque, dès lors, de se réduire comme peau de chagrin.
Telles sont les raisons pour lesquelles il nous paraît nécessaire de soumettre tous les nouveaux opérateurs concurrents d'EDF à des obligations de service public.
Devons-nous rappeler que la Compagnie nationale du Rhône a participé à l'aménagement du Rhône, à la construction d'écluses à grand gabarit et à de nombreux barrages hydroélectriques, dans le cadre du développement du service et de l'aménagement de notre territoire ? Cette société possède, par ailleurs, dix-neuf centrales électriques et une trentaine de sites industriels et portuaires. Qu'en sera-t-il maintenant que cette société est détenue à près de 50 % par le groupe Suez via Electrabel ? Qu'en sera-t-il si les collectivités locales encore présentes pour 20 % dans le capital de la Compagnie nationale du Rhône cèdent leurs parts ?
Lorsque tous les opérateurs auront les mêmes obligations en matière de service public, le club interprofessionnel des marchands d'énergie en France se réunira pour envisager de ne pas assumer les charges pesant sur les comptes de leurs compagnies, alors que cela est nécessaire pour la collectivité nationale. Ils s'entendront pour exiger la réduction du périmètre des missions de service public.
En revanche, si la loi indique clairement que ce sont les opérateurs existants - les régies, EDF et GDF - qui sont chargés des obligations de service public, une telle précision permettra à chacun de savoir ce qu'il aura à faire et combien cela lui coûtera. Les autres opérateurs ne seront pas dispensés de tout effort puisqu'ils contribueront à l'accomplissement des missions de service public, mais ils le feront en dehors de toute banalisation.
Par exemple, les efforts effectués en matière d'infrastructures - entretien des berges, des centrales et des barrages - et l'aménagement des territoires seront poursuivis par tous.
Nous pensons qu'il convient de déterminer avec certitude et de façon définitive le périmètre des missions de service public de l'énergie dans notre pays, et donc d'assurer les moyens qui doivent être les siens, autrement dit les financements des charges de service public.
Tel est le sens de ces deux amendements.
M. le président. L'amendement n° 277, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Tout gestionnaire de réseau d'électricité sur le territoire français doit assumer des obligations de service public, notamment l'égalité de traitement, la sécurité et la sûreté des installations, le dimensionnement et la programmation pluriannuelle des investissements de réseaux, la continuité de fourniture, la régularité, la qualité et le prix, la protection de l'environnement et le développement équilibré du territoire.
Cet amendement a déjà été défendu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 8 est présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 156 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le dernier alinéa de cet article.
L'amendement n° 8 a déjà été défendu.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour présenter l'amendement n° 156.
M. Jean-Pierre Bel. Nos collègues députés ont ajouté un alinéa aux termes duquel l'Etat peut conclure, avec les autres entreprises du service de l'électricité et du gaz assumant des missions de service public, des contrats précisant ces missions. Nous considérons que ce n'est pas à des co-contractants de définir les notions de service public. Il existe un risque important de banaliser les missions de service public. Par conséquent, nous proposons la suppression de cet alinéa.
M. le président. L'amendement n° 157, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Ces missions sont définies conformément aux dispositions des lois citées au premier alinéa, à partir d'un cahier des charges type établi par décret en Conseil d'Etat.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Cet amendement vise à encadrer les contrats de service public. Il prévoit que ces contrats sont définis conformément aux dispositions des lois de 1946, de 2000 et de 2003, c'est-à-dire aux obligations de service public.
Pour éviter que ces contrats ne varient d'un signataire à l'autre, il est prévu l'établissement d'un cahier des charges. C'est une garantie qui va dans le sens de ce que nous souhaitons depuis le début de la discussion du projet de loi, à savoir la garantie de la continuité des missions de service public.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 65 rectifié est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
L'amendement n° 215 est présenté par MM. Besson, Raoult et Sergent.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant le treizième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
L'Etat peut en outre conclure, avec le représentant des autorités visées à l'article L. 222431 du code général des collectivités territoriales, des conventions relatives à l'exercice de leurs compétences dans le domaine de l'énergie.
La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter l'amendement n° 65 rectifié.
M. Xavier Pintat. Il s'agit de faire en sorte qu'une bonne cohérence existe entre ce qui est décidé au niveau national et au niveau local entre, d'une part, l'Etat et EDF et, d'autre part, l'Etat et GDF.
Cet amendement permet de passer du contrat national à des objectifs locaux tels que l'enfouissement, l'aménagement du territoire, la qualité de l'électricité, et donc d'intégrer ces objectifs dans le contrat de concession. Il complète parfaitement l'amendement de la commission relatif à l'enfouissement des lignes. (M. le rapporteur opine.)
M. le président. L'amendement n° 215 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Pour tous les amendements qui visent à la suppression de l'article 1er ou d'une partie de celui-ci, je ne me lancerai pas dans de longues explications.
Nous l'avons dit en commission : nous sommes très clairement favorables à ce texte, à tous les articles de ce texte monsieur le ministre.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Aussi, j'émettrai un avis défavorable sur tout amendement de suppression, totale ou partielle, et je n'en dirai pas plus, et je prie leurs auteurs de m'en excuser.
Les amendements identiques nos 144 et 259 sont des amendements de suppression de l'article : avis défavorable.
L'amendement n° 154, défendu par M. Bel, est un amendement de réécriture : avis défavorable.
L'amendement n° 268, défendu par Mme Beaufils, tend à supprimer les contrats de service public. La commission émet bien sûr un avis totalement défavorable, ce qui ne vous surprendra pas.
S'agissant de l'amendement nos 145, défendu par M. Bel, la commission émet un avis défavorable car elle considère qu'il alourdirait la rédaction du texte. Par ailleurs, je tiens à préciser qu'il va de soi que l'intégralité des missions de service public seront développées dans les contrats, je dis bien « l'intégralité ». Aussi, il n'est pas utile d'alourdir le texte en ajoutant le mot.
L'amendement n° 269, défendu par M. Le Cam, remet en cause les contrats de service public : avis défavorable.
Concernant l'amendement n° 271, défendu par Mme Terrade, la commission émet un avis défavorable car cet amendement est doublement satisfait : par le texte de loi, d'une part, et par l'annexe du projet de loi d'orientation sur l'énergie, d'autre part. Nous avions longuement débattu de ce sujet.
L'amendement n° 270, défendu par M. Bret, remet en cause les contrats de service public : avis défavorable.
L'amendement n° 146, défendu par M. Reiner, est satisfait par l'amendement n° 2 de la commission, qui prévoit déjà que les contrats de service public sont soumis au conseil d'administration d'EDF et de GDF. Vous l'aviez dit, ce dont je vous remercie, lorsque vous aviez défendu cet amendement.
La seconde partie de votre amendement, quant à elle, prévoit la consultation des commissions permanentes du Parlement. Rien n'interdit à ce dernier de procéder à des auditions.
M. Daniel Reiner. Ecrivons-le !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. N'alourdissons pas la charge de travail du Sénat et de l'Assemblée nationale ! En revanche, rien n'empêchera une commission qui fait bien son travail - je crois pouvoir dire que c'est le cas de la nôtre - de mener des auditions afin de faire le point de temps en temps sur l'ouverture du marché.
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 147, que vous aviez défendu, est un amendement de suppression : avis défavorable.
Vous aviez également défendu l'amendement n° 150. Il alourdit la rédaction du texte puisque le premier alinéa de l'article 1er renvoie déjà aux lois de 2000 et 2003 pour la définition des missions et obligations de service public : avis défavorable.
L'amendement n° 153 apporte, de notre point de vue, une précision tout à fait utile en matière de régularité : avis favorable.
L'amendement n° 265, défendu par M. Le Cam, a été présenté à deux endroits différents du texte. Je ne souscris par au remplacement du mot consommateur par le mot usager. Certes, l'énergie n'est pas un bien comme les autres, mais il s'agit bien d'un produit marchand. Ce produit est consommé par des clients. A cet égard, en interne, EDF et GDF parlent non pas d'usagers mais de clients.
Mme Annie David. Justement !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. On est usager notamment d'un service public. On est usager dans le cas de monopole. Même aujourd'hui, avant même la modification du statut, l'électricité est un produit marchand. La commission tient à conserver le mot consommateur et elle est donc défavorable à votre amendement.
La commission s'oppose à l'amendement n° 266, défendu par Mme Terrade. Bien sûr, nous sommes favorables à la sécurité de l'approvisionnement, notamment dans les ZRR et les ZUS. Cependant, nous souhaitons que celle-ci soit assurée sur tout le territoire national. Dès lors que vous commencez à apporter une précision, vous risquez d'exclure d'autres parties du territoire national. Madame la sénatrice, je vous rassure : ces secteurs qui vous tiennent à coeur - les ZRR et les ZUS - sont bien sûr intégrés.
La rédaction de l'amendement n° 148, défendu par M. Reiner, n'est pas normative et a une portée trop générale. Je ne comprends d'ailleurs pas bien ce que vous avez voulu faire en ajoutant la notion de territorialité parmi les moyens permettant d'assurer l'accès au service public. La commission émet donc un avis défavorable.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 264, défendu par M. Bret. En effet, cet amendement est satisfait, pour les raisons que nous avons évoquées à plusieurs reprises. Il s'agit de l'égalité d'accès.
L'amendement n° 261, défendu par Mme Beaufils, est satisfait par la loi de 2000, et notamment son article 4. Il n'est pas nécessaire d'introduire dans le présent texte des éléments qui figurent dans la loi de 2000 sur l'électricité.
L'amendement n° 149, défendu par M. Raoul, étant satisfait, la commission émet un avis défavorable. L'évolution pluriannuelle des tarifs de vente définie dans ces contrats restera, par définition, indicative puisque - et c'était l'argument soulevé par M. Raoul - le ministre chargé de l'énergie, sur proposition de la CRE, garde le pouvoir d'arrêter les évolutions tarifaires.
La commission est défavorable à l'amendement n° 155, défendu par M. Bel, car on ne sait pas bien définir, d'un point de vue tant juridique qu'économique, ce qu'est un tarif « abordable ».
La commission est également défavorable à l'amendement n° 272, défendu par M. Le Cam. EDF et GDF sont des entreprises, quel que soit leur statut. Le législateur ne s'est pas trompé ; il n'a pas cherché, par ce texte, à aborder le problème, bien réel j'en conviens, du financement de la recherche publique en général. Ce problème n'a pas sa place ici. Nous maintenons notre rédaction.
L'amendement n° 151, défendu par M. Reiner, est satisfait par l'amendement n° 5 de la commission, qui prévoit que les contrats de service public définissent les objectifs pluriannuels en matière d'enfouissement. La rédaction n'en est que légèrement différente. L'enfouissement vous tient à coeur comme il nous tient à coeur. Vous comme nous sommes satisfaits par l'amendement n° 5. La commission émet donc un avis défavorable sur votre amendement.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 152, défendu par M. Bel. En effet, cet amendement est satisfait par l'article 50 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, qui dispose que le « plan de desserte en gaz énumère, parmi les communes non encore desservies qui souhaitent être alimentées en gaz naturel (...) celles pour lesquelles Gaz de France est tenu d'engager les travaux de desserte dans un délai maximum de trois ans. ». A quoi sert-il de le réécrire ? Il était bon de rappeler que cette disposition figure déjà dans notre législation.
L'amendement n° 262, défendu par Mme Beaufils, a été satisfait par l'Assemblée nationale, qui a précisé que les contrats de service public prévus à l'article 1er portent sur « la politique de protection de l'environnement, incluant l'utilisation rationnelle des énergies et la lutte contre l'effet de serre », ce qui implique bien sûr les énergies renouvelables. Aussi, l'avis est défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 260, défendu par Mme Beaufils. Nous considérons, au contraire, qu'il est opportun de rappeler que l'obligation de péréquation s'impose bien sûr à EDF et à GDF, et tout particulièrement en ce qui concerne les tarifs d'utilisation de ces réseaux.
L'amendement n° 267, défendu par Mme Didier, est satisfait par les dispositifs plus opératoires et plus particulièrement par l'article 50 du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, qui aborde non seulement le fonds de solidarité pour le logement - par conséquent les problèmes de loyers que vous évoquez -, mais aussi les impayés en eau, en électricité, en gaz et en chauffage émanant des personnes en difficulté. Aussi, l'avis est défavorable.
M. Daniel Reiner. Ce ne sont pas les mêmes qui paient !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission est également défavorable à l'amendement n° 273, défendu par Mme David. Les services ne font pas l'objet d'une péréquation. Cette notion recouvre l'ensemble des services et ne se limite pas aux prestations électriques d'EDF. L'adoption de cet amendement poserait un véritable problème.
L'amendement n° 263 a le même objet que l'amendement n° 265 : avis défavorable.
L'amendement n° 274 ne constitue pas un nouvel alinéa, madame Beaufils. Vous avez tout simplement repris ce qui est inscrit à l'article 16 de la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie. Je me permets de vous dire que la rédaction de cet article est beaucoup plus complète. Votre amendement est donc totalement satisfait : avis défavorable.
Je ferai la même remarque sur l'amendement n° 275, puisque vous présentez le même dispositif respectivement pour le gaz, pour l'électricité, pour le gestionnaire et pour le transporteur. Cet amendement est satisfait par le titre Ier de la loi du 10 février 2000, qui reprend beaucoup plus largement ce que vous proposez par votre amendement. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 276, rebelote ! (Sourires.) Rebelote, donc, dans la réponse : l'article 16 de la loi de 2003 est beaucoup plus complet et satisfait totalement Mme David.
L'amendement n° 277, présenté par Mme David, est également satisfait, par le titre Ier de la loi de 2000, beaucoup plus complet. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 156 est identique à l'amendement n° 8.
L'amendement n° 157 vise à établir un système de cahier des charges en lieu et place des contrats de service public. Vous n'en voudrez pas au Gouvernement non plus qu'à la majorité d'avoir une préférence pour ces derniers. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
Enfin, la commission est favorable à l'amendement n° 65 rectifié. Dans un premier temps, elle avait émis un avis de sagesse défavorable, mais cet amendement a été rectifié dans un sens qui lui convient.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je serai bref. En effet, après tant de satisfaction exprimée par le rapporteur, que pourrais-je apporter de plus ? (Sourires.)
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 144 et 259, ainsi que sur les amendements nos 154, 268, 145, 269, 271 et 270.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 2 de la commission.
Il émet un avis défavorable sur les amendements nos146, 147, 150.
Il émet un avis favorable sur l'amendement n° 3, ainsi que sur les amendements nos 153 et 4.
En revanche, il est défavorable aux amendements nos 265, 266, 148, 264, 261, 149, 155 et 272.
L'amendement n° 151 est satisfait par l'amendement n° 5, le Gouvernement y est donc défavorable. Il est en revanche favorable à l'amendement n° 5 de la commission.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 152 et 262.
Il est favorable aux amendements nos 6 et 7.
Il est défavorable aux amendements nos 260, 267, 273, 263, 274, 275, 276, 277.
Il est favorable aux amendements identiques nos 8 et 156.
Il est défavorable à l'amendement no 157.
Enfin, il est favorable à l'amendement n° 65 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 144 et 259.
Mme Marie-France Beaufils. La contractualisation des objectifs et des modalités de service public est extrêmement dangereuse et attentatoire aux droits du Parlement. Si ce seul constat suffit à justifier notre opposition à l'article 1er, il est cependant utile de se pencher sur le contenu de ces fameux contrats.
Sur ce point, le Gouvernement cultive l'imprécision la plus totale. M. le ministre ne nous a pas plus éclairé lors de la présentation de nos amendements, se contentant de nous dire qu'il y était défavorable. Mais nous ne savons pas pourquoi il s'oppose à nos propositions.
Il nous est en effet proposé un inventaire très incomplet. Nous nous sommes exprimés sur ce point à travers un certain nombre d'amendements et nous aurons probablement l'occasion d'y revenir. Permettez-moi de citer le texte de l'article 1er : «Les contrats portent notamment sur ». M. le rapporteur a dit tout à l'heure, s'agissant de l'un de nos amendements dans lequel figurait le mot «notamment», que l'emploi de cet adverbe revenait à exclure ce qui n'est pas cité. J'ai envie de lui retourner le compliment ! Si l'on utilise le mot « notamment » à propos de ces contrats, cela signifie que tout ce qui n'est pas écrit est exclu.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Un «notamment» est toujours dangereux !
Mme Marie-France Beaufils. C'est donc également dangereux dans l'article 1er !
Vous nous avez dit tout à l'heure que nos propositions reprenaient des éléments figurant dans d'autres lois. Or c'est précisément parce que l'article 1er contient ce «notamment» que ces contrats nous semblent plus qu'inquiétants. Ils pourront en effet déroger à d'autres lois.
Par conséquent, si nous demandons la suppression de ces contrats, c'est pour revenir à des textes antérieurs, qui étaient plus efficaces. Puisque vous ne voulez pas l'entendre, nous essayons, à travers nos amendements, de faire au moins en sorte que ces contrats soient moins mauvais.
Dès lors que vous maintenez l'adverbe «notamment» dans l'article 1er et que vous n'y faites pas figurer la totalité des missions de service public prévues dans les précédentes lois, cela signifie que les services publics sont réduits.
En droit, l'adverbe « notamment » est en effet redoutable. Il donne la plus grande liberté quant au contenu desdits contrats. Le Gouvernement cache une fois de plus la réalité de ses intentions. Il abroge de manière implicite l'article 1er de la loi du 10 février 2000 définissant le «service public de l'électricité».
Nous pourrions reprendre les articles définissant le service public de classe... du gaz, veux-je dire !
Mme Marie-France Beaufils. C'était un lapsus, mais il est autant révélateur de votre démarche que de la mienne !
Mme Marie-France Beaufils. Je n'ai aucun problème, j'assume complètement mes choix !
Nous avions donc bien raison de vouloir que le législateur précise dans des articles additionnels avant l'article 1er les missions de service public assignées à EDF-GDF.
Même si la commission supprime l'alinéa précisant la limitation des rôles, en particulier celui des gestionnaires de réseaux, je pense qu'il était bon de revenir sur cette question.
C'est pourquoi nous voterons nos amendements de suppression, qui sont au coeur du débat sur les missions de service public que nous voulons conserver pour notre pays et pour les usagers de ces services publics.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le ministre, vous ne rendez pas service au Sénat.
M. Paul Blanc. On n'est pas là pour ça ! On est là pour rendre service au pays !
M. Jean-Pierre Bel. La manière dont vous considérez les choses ici pose un véritable problème. Nous avons un peu le sentiment que l'exercice auquel nous nous livrons, tout à fait logique dans le débat démocratique, est un passage obligé. Vous ne prenez même pas la précaution de faire ce que, me semble-t-il, vous avez fait à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire de répondre à un certain nombre de questions que nous avons posées à travers nos amendements.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'ai répondu très longuement auparavant. Vous me prenez pour un perroquet !
M. Jean Chérioux. Ils ont des oreilles, mais ils n'entendent pas !
M. Jean-Pierre Bel. Nous avons présenté des amendements. Nous avons posé des questions. Nous avons avancé des arguments avec lesquels vous pouvez, je le conçois, ne pas être d'accord, mais qui méritent au moins une discussion entre nous.
Vous partez du principe simple selon lequel nos amendements sont contraires à l'esprit du projet de loi et que vous n'avez donc pas à y répondre.
M. le rapporteur n'a pas adopté exactement le même comportement. Il a répondu, lui, sur un certain nombre de sujets qui nous paraissent sensibles.
Monsieur le ministre, vous refusez purement et simplement le débat politique que nous souhaitons avoir à l'occasion de l'examen du texte que vous nous proposez. Vous ne rendez pas aujourd'hui service à notre institution.
M. Jean Chérioux. Il faudrait que M le ministre répète ce qu'a dit M. le rapporteur ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 144 et 259.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 204 :
Nombre de votants | 311 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 156 |
Pour l'adoption | 113 |
Contre | 198 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 154.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Didier, pour explication de vote sur l'amendement n° 270.
Mme Evelyne Didier. Je souhaite revenir sur l'idée de contrat.
Les contrats prévus à l'article 1er portent sur les modalités de service public. Cela n'est pas nécessairement choquant. On pourrait en effet considérer que l'exécutif remplit ici son rôle qui est d'appliquer la volonté du législateur. Néanmoins, ces contrats fixent également les objectifs de service public. Alors, objectifs ou missions ? On saisit mal la différence ! Nous avons un peu l'impression que l'on essaie d'éviter le mot «missions».
A nos yeux, c'est au peuple, directement ou par l'intermédiaire de ses représentants, qu'il revient de déterminer les missions de service public. Substituer le contrat à la loi permet de définir une sorte d'intérêt général qui serait non pas l'intérêt de la collectivité, mais l'intérêt des agents économiques les plus puissants. Bref, la liberté du contrat à ce niveau ressemble à s'y méprendre à la liberté du renard libre dans le poulailler. Il n'y aurait, pour vous, que des clients. Tout serait marchandise. Quelle tristesse !
Quels sont les principes fondateurs de notre démocratie parlementaire ? La loi, expression de la volonté générale, d'après la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Seule cette expression permet de déterminer l'intérêt général.
Le contrat entre l'Etat et une entreprise ne peut pas exprimer l'intérêt général de la collectivité.
M. Jean Chérioux. Il peut le rappeler !
Mme Evelyne Didier. L'Etat n'exprime pas la volonté de la nation. L'Etat n'est que le titulaire abstrait du pouvoir. La volonté de la nation s'exprime par les parlementaires.
M. Philippe Marini. Le Parlement est un organe de l'Etat. Votre analyse est surprenante !
Mme Evelyne Didier. Ce n'est pas une analyse, cher collègue,...
Mme Evelyne Didier. ...c'est une constatation !
Fort de ce constat - j'emploie d'ailleurs le mot « constat » à dessein -, il nous semble nécessaire de préciser que les contrats visés à l'article 1er du projet de loi seront soumis à l'approbation du Parlement. C'est la moindre des choses !
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote sur l'amendement n° 2.
M. Charles Revet. M. Piras est favorable à l'amendement ! (Sourires.)
M. Bernard Piras. J'aurais pu y être favorable, mais je regrette - je m'adresse à M. le rapporteur - que le Parlement demeure à l'écart des décisions. Les parlementaires auraient aimé être associés à celles-ci.
M. Philippe Marini. Les parlementaires ne peuvent pas tout faire !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. L'amendement n° 151 prévoit...
M. Philippe Marini. Il a été rejeté !
Mme Marie-France Beaufils. ...que les contrats porteront sur « l'établissement d'un programme d'enfouissement des réseaux publics de distribution d'électricité », alors que l'amendement n° 5 prévoit qu'ils porteront sur « les objectifs pluriannuels en matière d'enfouissement des réseaux publics de distribution d'électricité ».
Inscrire dans un contrat des « objectifs pluriannuels », ce n'est pas établir un programme, c'est-à-dire arrêter des décisions, un plan de financement, des dates précises, bref, élaborer une véritable programmation.
Or, on sait que si l'enfouissement ne fait pas l'objet d'une véritable programmation, nous ne disposerons pas dans les discussions avec l'opérateur - nous représentants des collectivités territoriales - de moyens suffisamment efficaces pour qu'un jour l'enfouissement soit réalisé.
Je me souviens qu'au cours du débat sur la transposition des directives nous avions justement proposé que l'établissement d'un programme d'enfouissement des réseaux publics soit rendu obligatoire. Le Gouvernement nous avait alors répondu qu'il n'était pas possible d'inscrire une telle obligation dans la loi parce que l'entreprise ne pourrait pas financièrement y faire face.
Si je me rapporte à ce qui avait été dit précédemment, je comprends donc la mention dans la loi à des « objectifs pluriannuels » comme signifiant que l'on ne disposera pas des moyens nécessaires. On va se donner des objectifs qui ne seront pas assortis de délais et qui seront très imprécis.
Or, pour véritablement réduire les risques liés à d'éventuelles tempêtes et, plus généralement, pour que nos réseaux soient en mesure d'assurer en toute circonstance la sécurité de l'approvisionnement non seulement de l'ensemble des activités économiques mais aussi des usagers, il est nécessaire et même indispensable de s'engager dans la voie de l'établissement d'un programme d'enfouissement.
C'est la raison pour laquelle mon groupe estime que l'amendement n° 5 est insuffisant : il ne le votera pas.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Madame Beaufils, M. Reiner, qui a d'ailleurs très bien défendu sa position, a lui aussi dit qu'un programme avait plus de force,...
Mme Marie-France Beaufils. Bien sûr !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ...et j'en suis moi-même conscient, mais je vous propose de procéder par étapes.
Le fait d'inscrire l'enfouissement à titre d'objectif dans les contrats de service public est une première étape en même temps qu'un affichage fort. Il faudra, bien sûr, que, progressivement, nous parvenions à des programmes d'investissement.
Mme Marie-France Beaufils. C'est certain.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il faut les financer et il faut aussi que tous les acteurs concernés y soient associés. Nous savons tous comment se passent, dans nos départements respectifs, les travaux d'enfouissement : ce sont les syndicats ou départementaux ou intercommunaux qui exercent cette compétence. Le fait d'afficher l'enfouissement comme mission de service public n'est donc pas suffisant, mais ce n'en est pas moins une première étape de grande importance.
Monsieur Reiner, vous aviez été le premier à dire, en défendant votre propre amendement, que vous souhaitiez que le projet de loi aille plus loin et affiche un engagement plus fort, mais, dans le même temps, vous reconnaissiez que l'étape du programme était plus difficile parce qu'il fallait prévoir d'importants financements.
Nous avons - je suis presque tenté de dire « malheureusement » - voté contre l'amendement n° 151, mais c'est par lucidité que nous l'avons fait. J'aurais donc souhaité, madame Beaufils, que vous vous rangiez à l'amendement n° 5, qui est un affichage fort.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote.
M. Bernard Piras. Monsieur le rapporteur, je vais vous faire une proposition : pourquoi ne pas fondre les deux amendements pour parvenir à une formulation qui n'engagerait pas trop l'entreprise ? « L'établissement d'un programme d'enfouissement et d'une programmation pluriannuelle » pourrait constituer une bonne synthèse... (M. le rapporteur sourit.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. Soyons tout à fait clairs : les « objectifs pluriannuels » laisseront en définitive à l'entreprise toute latitude de procéder à l'enfouissement dans... un demi-siècle !
Mme Marie-France Beaufils. Effectivement !
M. François Fortassin. On serait toujours dans le cadre d'un objectif « pluriannuel ».
On conçoit qu'un délai soit nécessaire pour élaborer une programmation, mais ne pourrait-on pas prévoir que la mission confiée à l'entreprise, à savoir l'enfouissement, devra être menée sur une période de dix ans, voire de quinze ans ?
On sait qu'il faut du temps, mais ces objectifs pluriannuels n'exciteront en définitive que l'esprit de ceux qui ne connaissent pas le fonctionnement de ce type d'entreprise.
C'est un coup d'épée dans l'eau. Dans ces conditions, ayez au moins le courage de ne pas mentionner ces « objectifs pluriannuels » !
Mme Marie-France Beaufils. Très bien dit !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 et 156.
(Les amendements sont adoptés à l'unanimité.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
L'article 5 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 5. - Electricité de France et Gaz de France peuvent, par convention, créer des services communs dotés ou non de la personnalité morale. La création d'un service commun est obligatoire dans le secteur de la distribution, pour la construction des ouvrages, la maîtrise d'oeuvre de travaux, l'exploitation et la maintenance des réseaux, les opérations de comptage ainsi que d'autres missions afférentes à ces activités. Ces services communs peuvent réaliser des prestations pour le compte des distributeurs non nationalisés mentionnés à l'article 23 et des distributeurs et autorités organisatrices mentionnés respectivement aux III et IV de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales.
« Chacune des sociétés assume les conséquences de ses activités propres dans le cadre des services communs non dotés de la personnalité morale.
« Les coûts afférents aux activités relevant de chacune des sociétés sont identifiés dans la comptabilité des services communs. Cette comptabilité respecte, le cas échéant, les règles de séparation comptable prévues à l'article 25 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et à l'article 8 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée. »
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 159 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté.
L'amendement n° 386 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Reiner, pour présenter l'amendement n° 159.
M. Daniel Reiner. Il s'agit d'un amendement de suppression, dont le sort est donc connu, mais que je vais néanmoins exposer.
L'article 2 du présent projet de loi vise à rédiger autrement l'article 5 de loi fondatrice de 1946. La nouvelle rédaction nous paraît à la fois ou trop imprécise ou trop précise.
« Electricité de France et Gaz de France peuvent, par convention, créer des services communs dotés ou non de la personnalité morale. » Question : à quels services communs est-il fait allusion ?
Il est prévu que « la création d'un service commun est obligatoire dans le secteur de la distribution », et l'on a présent à l'esprit EDF-GDF Services, mais la création d'un service commun est également obligatoire pour « la construction des ouvrages, la maîtrise d'oeuvre de travaux, l'exploitation et la maintenance des réseaux, les opérations de comptage ainsi que d'autres missions afférentes à ces activités », ce qui paraît très imprécis.
En revanche, la commercialisation n'est, en particulier, pas mentionnée, ce qui, naturellement, a sa logique. Dès lors que EDF fournit aussi du gaz et que GDF fournit aussi de l'électricité, on voit mal comment les agents d'un service commun pourraient défendre l'une et l'autre entreprises, ce qui signifie que chacune d'elles s'occupera de sa propre commercialisation. Cela rendra tout de même très difficile le recours en matière de distribution jusqu'au client final de personnels pouvant agir pour l'une et l'autre entreprises.
L'article 2 étant à la fois trop imprécis et trop précis, nous proposons de revenir au texte initial de 1946, et donc de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 386.
M. Gérard Le Cam. Dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, on peut lire à propos de l'article 2 : « En application de loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, EDF et Gaz de France ont développé un service commun, dénommé "EDF-GDF Services", et chargé d'assurer la gestion réseaux de distribution et un service public de qualité au plus près du terrain. Il est souhaitable que ce service soit pérennisé afin de continuer à tirer profit des synergies existantes entre les deux entreprises. » Mais la lettre de l'article 2, en fait, loin de pérenniser les services communs à EDF et GDF - en effet, EDF-GDF Services n'est pas le seul service commun aux deux EPIC - fait peser de lourdes menaces sur leur existence à moyen terme.
La fusion des deux EPIC est une nécessité. Aujourd'hui, la direction EDF-GDF Services, commune aux deux établissements, est composée de 102 centres de distribution où travaillent 66 000 agents. C'est un exemple unique de synergie et d'économies d'échelle.
Le choix de la séparation aboutirait à casser cette synergie. Du point de vue commercial, les entreprises compétitives doivent mettre en évidence l'importance de l'offre multi-énergie.
Fusionnés, les moyens d'EDF et de GDF pourraient être mis au service d'une politique énergétique française de grande valeur à court et à long terme. Sans fusion, les entreprises se mettraient en danger en se lançant dans un Monopoly risqué.
Le Gouvernement a soutenu Alstom et a encouragé la fusion Sanofi-Aventis : il devrait aujourd'hui faire de même pour EDF et GDF. Il devrait maintenir dans l'esprit du service de proximité, qui prétendument l'anime, les nombreuses agences locales, rouvrir par exemple les agences des Hauts-de-Seine qui ont été fermées, notamment celles de Suresnes, Rueil-Malmaison et Levallois-Perret. Il devrait également écouter, en milieu rural, les élus locaux, lesquels ont bien compris que faire primer le droit de la concurrence sur les missions de service public, c'est se résigner à la disparition des agences.
Dans ces conditions, comment ne pas voir que les agents d'EDF et de GDF sont confrontés à une véritable crise, sommés d'abandonner une culture de service public patiemment acquise ?
La séparation de la distribution du gaz et de l'électricité nous semble illogique et totalement anti-économique.
C'est à la lumière de cette analyse que nous proposons de fusionner les deux EPIC, aux côtés de nombreuses organisations syndicales qui représentent près de 80 % du personnel, si l'on se fie aux résultats des élections des administrateurs salariés, qui ont eu lieu le 6 mai dernier.
Y a-t-il, au niveau européen, une opposition à la fusion ? A cet échelon, rien ne semble s'opposer à la fusion, si ce n'est la direction d'EDF, qui prétend que les entreprises ne réalisent plus les deux tiers de leur chiffre d'affaires à l'intérieur d'un seul et même Etat, ce qui reste à démontrer !
Pour ce qui concerne les services communs, ils répondent aujourd'hui pleinement aux exigences des directives européennes et ce sont eux qui sont en relation avec la clientèle. La fidélisation que permettrait cet article affaiblirait leur efficacité.
Aussi, il convient, à notre avis, d'exiger la suppression de l'article 2.
M. le président. L'amendement n° 280, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946 :
Sont créés, par convention, des services communs à Electricité de France et Gaz de France.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Peu avant l'été, le ministre de l'économie et des finances a envoyé aux présidents de GDF et d'EDF des courriers valant feuille de route pour préparer les conditions de la privatisation des deux services publics, l'usage de l'expression « ouverture du capital » à la place de son synonyme « privatisation » ne trompant personne.
Malgré les graves événements que l'on connaît tous et qui sont survenus aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Italie - délestages, tensions sur le marché de l'électricité -malgré les difficultés d'EDF pendant la canicule, qui devraient pourtant sonner comme autant d'avertissements ultimes, les présidents d'EDF et de GDF claironnent qu'ils sont prêts au changement de statut des entreprises.
Pourtant, la déréglementation est un échec, en Europe comme ailleurs. La privatisation serait un verrou excluant toute possibilité de retour à une situation sectorielle maîtrisée. L'annonce de la privatisation a profondément amoindri les bases industrielles, sociales et institutionnelles nécessaires à l'accomplissement des missions essentielles.
Aussi est-il urgent de stopper le processus de décomposition entamé, en abandonnant tout projet de privatisation, et de décrire, avec les personnels hautement qualifiés d'EDF et de GDF, les schémas susceptibles de rendre une capacité d'action à l'ensemble EDF-GDF. Il est nécessaire de donner à EDF et à GDF un nouveau projet historique refondateur, au service des citoyens usagers, de l'intérêt général et de la collectivité nationale.
C'est pourquoi nous réaffirmons notre volonté de faire en sorte que les services communs ne soient pas dotés de la personnalité morale.
M. le président. L'amendement n° 282, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946 :
Sont créés, par convention, des services communs à Electricité de France, Gaz de France et, le cas échéant, à leurs filiales de transport.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous avons donné les raisons pour lesquelles nous souhaitons le maintien des services communs à EDF et à GDF, qui n'est absolument pas garanti par l'article 2.
Nous avons évoqué les raisons pour lesquelles nous sommes opposés à la filialisation des activités de transport d'EDF et de GDF, une telle orientation contribuant nécessairement à la désintégration des entreprises et aux ruptures des synergies internes.
Le présent amendement vise à élargir le bénéfice du fonctionnement commun des services aux filiales de transport. Il s'agit de faire en sorte que soient renforcées, à travers les services communs, les synergies et complémentarités entre les deux entreprises.
Le maintien des missions de service public en matière, par exemple, de sécurité d'approvisionnement pour le gaz, de continuité d'alimentation et de fourniture d'électricité, de qualité et de prix, de péréquation des tarifs d'électricité, d'égalité d'accès, et la préservation des synergies industrielles militent en faveur d'entreprises intégrées.
Rien ne justifie la séparation des différentes activités de production, de transport et de distribution pour EDF, d'importation, de transport et de distribution pour GDF. Nous avons de bonnes raisons de croire que, a priori, un groupe intégré sur ces différents segments peut davantage faire jouer les synergies et sera mieux à même d'affronter la concurrence.
Pour Gaz de France, la perte des activités de transport, segment qui dégage la marge la plus importante, serait fatale. Peut-on décemment envisager qu'une telle entreprise, garante de notre service public, qui a permis d'assurer sur le long terme nos approvisionnements en gaz et de desservir de nombreuses communes de France, soit vouée à devenir une simple société de négoce ?
Aucune raison économique ne justifie la filialisation des réseaux de transport. Cette démarche relève en réalité d'une volonté politique européenne, plus inspirée par des choix idéologiques libéraux que par le réel souci d'accroître l'efficacité du système d'organisation énergétique.
D'ailleurs, je suis surpris qu'à l'heure des grandes concentrations nationales et internationales, industrielles et capitalistiques l'Europe nous tance à ce point sur les questions de concurrence.
Les vertus de la concurrence, censée se traduire par d'importantes baisses de prix, par la relance des innovations et de l'initiative économique privée, sont mises en avant sur fond de démantèlement des anciens monopoles publics, taxés, sans que ce morcellement n'assure de bénéfice prouvé. A l'évidence, de tels gains en efficacité n'ont pas été au rendez-vous. On observe même aujourd'hui de grandes pertes en efficacité, qui conduisent certains pays, telle la Grande-Bretagne, à renationaliser, à se réapproprier ce secteur abandonné au miroir de la régulation marchande.
Qui plus est, le processus de déréglementation est mené dans la précipitation. Les premières directives de 1996 pour l'électricité, de 1998 pour le gaz, ont été transposées respectivement en 2000 et en 2003. Aucun bilan n'a vraiment été dressé depuis, malgré les crises récurrentes qu'ont connues de nombreux pays ayant complètement libéralisé ce secteur.
S'entêter dans cette voie serait suicidaire : nous cassons non seulement nos services publics, mais aussi les grandes entreprises qui assuraient notre indépendance énergétique tout en garantissant des services publics de qualité et en jouant un rôle de correcteur des inégalités sociales et territoriales.
Notre amendement vise donc à apporter quelques garanties face à l'éventualité de la filialisation des activités de transport, par l'intermédiaire des services communs à EDF et à GDF mentionnés dans cet article. En effet, tout nous porte à croire que l'on cherche en réalité à mettre en concurrence les deux opérateurs historiques EDF et GDF, au lieu de valoriser les coopérations qui permettraient de conforter notre système énergétique national.
M. le président. L'amendement n° 160, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
A la fin de la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n°46-628 du 8 avril 1946, supprimer les mots :
dotés ou non de la personnalité morale
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. L'amendement n° 159 a naturellement notre préférence puisqu'il vise à supprimer totalement l'article 2. Le présent amendement est un amendement de repli stratégique.
Selon l'exposé des motifs du projet de loi, cet article a pour objet de maintenir l'unité d'EDF-GDF. En réalité, c'est parfaitement faux car, en permettant aux entreprises de se doter d'une personnalité morale, on autorise l'externalisation des missions.
Nous considérons qu'EDF-GDF services doit rester un service intégré. C'est pourquoi nous proposons tout simplement de supprimer les mots « dotés ou non de la personnalité morale ».
M. le président. L'amendement n° 287, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946 de cet article, remplacer les mots :
dotés ou non
par les mots :
non dotés
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. En application de l'article 5 de la loi du 8 avril 1946, ont été mis en place non seulement EDF-GDF Services, mais également deux autres services mixtes : le service de formation professionnelle et le service de la direction du personnel. Il semblerait toutefois que seule serait assurée la pérennisation d'EDF-GDF services, et encore puisqu'une lecture attentive du texte laisse penser que ce secteur pourrait disparaître...
En tout cas, ce qui est certain, c'est que les autres services mixtes, précédemment mentionnés, sont les grands oubliés de l'article 2 du projet de loi.
A ce propos, nous préférerions que le texte dispose que EDF et GDF « créent », et non pas « peuvent créer », des services communs.
Ce matin, notre collègue Robert Bret a cité le général de Gaulle : « L'indicatif est souvent un impératif »... surtout lorsqu'il énonce de bonnes mesures ! Compte tenu de votre volonté d'impulser une concurrence fratricide entre EDF et GDF, on peut douter fortement de la possibilité de voir les directions de ces entreprises exprimer le souhait de multiplier les services communs. Tout porte à croire, au contraire, qu'elles s'en tiendront au strict respect des obligations que vous leur imposerez. Assurer leur survie suppose que ces deux entreprises aient l'obligation de créer des services communs dans les deux secteurs de la formation professionnelle et de la direction du personnel.
Bien entendu, les deux entreprises conserveraient la faculté de créer d'autres services communs, au-delà des services existants.
M. le président. L'amendement n° 279, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946, remplacer les mots :
dotés ou non de la personnalité morale
par une phrase ainsi rédigée :
La création de services communs entre Electricité de France et Gaz de France est obligatoire dans le secteur de la formation professionnelle et de la direction du personnel.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement allant dans le même sens que l'amendement précédent, l'argumentaire est identique.
M. le président. L'amendement n° 284, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946, insérer une phrase ainsi rédigée :
Le service commun de distribution contribue à assurer une présence efficace sur le territoire national et facilite l'accès des citoyens au service public de l'énergie.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Mercredi dernier, sur France 3, M. Roussely, président d'EDF, indiquait que le conflit qui l'oppose, lui et le Gouvernement, aux agents et usagers n'était que l'expression d'une inquiétude normale, une simple angoisse face aux changements dans les entreprises, et qu'il n'y a plus de soucis à EDF. « Tout est pratiquement rentré dans l'ordre », a-t-il indiqué.
De quel ordre parle-t-on ? Depuis hier, l'ouverture du marché permet aux professionnels d'acheter de l'électricité et du gaz auprès d'autres entreprises. Sans revenir sur l'absurdité économique de cette concurrence déloyale pour l'ensemble de la nation, notons que ce sont quelques spéculateurs qui vont s'enrichir, grâce, d'une part, aux investissements d'EDF et GDF et, d'autre part, aux impôts que nous avons payés depuis très longtemps.
Certains, se croyant plus malins, se sont retrouvés hier sans courant, car, ayant résilié leur contrat avec EDF au 1er juillet, ils ont vu leur branchement interrompu par des agents EDF - ce qui est tout à fait normale - et attendent un rétablissement ordonné par un nouvel opérateur. Ce dernier aura bien du mal à joindre son distributeur unique, EDF-GDF, qui est loin d'être prêt à organiser ce « bel ordre » !
Voilà pourquoi nous présentons cet amendement de repli.
M. le président. L'amendement n° 281, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946, après le mot :
commun
insérer les mots :
entre Electricité de France et Gaz de France
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Mon argumentation vaudra également pour l'amendement n° 285.
La réécriture de l'article 5 de la loi du 8 avril 1946, qui nous est soumise, prévoit que les services communs à EDF et à GDF peuvent réaliser des « prestations » pour le compte de distributeurs non nationalisés et de collectivités locales et de leurs groupements, en qualité d'autorités concédantes des réseaux locaux de distribution.
Ces fameux distributeurs non nationalisés, les DNN, sont divers : il peut s'agir de régies communales ou intercommunales, de sociétés d'économie mixte, de coopératives d'usagers, ou encore de sociétés d'intérêt collectif agricole d'électricité, SICAE.
Pour un service commun comme l'actuel EDF-GDF services, la possibilité de réaliser de telles prestations pour les DNN existe dans la loi de 1946 et résulte des stipulations des cahiers des charges des concessions. Cependant, l'article 2 du projet de loi ne mentionne plus expressément la possibilité de créer des structures communes entre EDF et GDF ou leurs services communs et les DNN.
II s'agit désormais de « réaliser des prestations pour le compte de », ce qui n'est assurément pas la même chose que « réaliser des prestations en commun », comme le prévoyait le texte de 1946.
Un tel glissement n'est pas anodin : le Gouvernement développe ici aussi de façon cohérente sa logique, qui consiste à créer de manière totalement artificielle des concurrents à EDF et GDF dotés d'une envergure nationale.
Il suffit, pour s'en rendre compte, de se reporter à la page 23 de l'exposé des motifs du projet de loi relatif à l'article 27, où le Gouvernement souhaite « atténuer les contraintes juridiques de territorialité et de domaine d'activité pesant sur les distributeurs non nationalisés ».
Plutôt que de renforcer les synergies existantes entre les DNN et les deux entreprises nationales, il s'agit, en fait, de les mettre en concurrence. Un tel choix sera encore source de gâchis et risque de compromettre l'avenir des actuels centres de distribution mixtes.
En conséquence, nous proposons que, par convention, Electricité de France, Gaz de France et les distributeurs non nationalisés créent des services communs de distribution.
M. le président. L'amendement n° 283, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946 de cet article, après le mot :
réseaux
insérer les mots :
la facturation du gaz et de l'électricité aux consommateurs domestiques,
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Le service de facturation est commun et doit le rester.
L'article 2 du projet de loi dispose, dans la deuxième phrase de son deuxième alinéa, que la création d'un service commun est obligatoire dans le secteur de la distribution : EDF-GDF Services survivrait donc à la dénationalisation des deux entreprises.
Mais la possibilité pour ces services d'être dotés de la personnalité morale laisse en effet entrevoir une filialisation des activités de distribution, qui, pour l'heure, ne sont soumises qu'à une obligation d'indépendance, et non de séparation juridique, aux termes des directives européennes. Le Gouvernement semble donc résolu à aller au-delà des obligations communautaires.
Quoi qu'il en soit, penchons nous sur le champ d'activité du service commun de distribution.
La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 2 précise que le service commun est obligatoire pour « la construction des ouvrages, la maîtrise d'oeuvre de travaux, l'exploitation et la maintenance des réseaux, les opérations de comptage ainsi que d'autres missions afférentes à ces activités ».
Il manque, dans cet inventaire, un élément essentiel, qui, pourtant, à l'heure actuelle, entre pleinement dans le cadre des compétences d'EDF-GDF Services. Cet élément, c'est le service de facturation du gaz et de l'électricité aux consommateurs domestiques. Ces derniers reçoivent en effet aujourd'hui une facture commune correspondant à leur consommation d'électricité et de gaz.
Cette activité commune doit être préservée pour plusieurs raisons. La plus évidente, ce sont les économies d'échelle qu'elle permet. Et comme le Gouvernement ne cesse de parler de gestion « à la façon du privé », il serait absurde de multiplier et de dédoubler demain sur tout le territoire, d'un côté, des agences EDF et, de l'autre, des agences GDF, situées à quelques centaines de mètres les unes des autres.
Malheureusement, dans le cadre de la mise en concurrence des deux grandes entreprises de service public, la disparition d'agences, notamment en milieu rural, est sans doute programmée.
M. le président. L'amendement n° 278, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946, insérer une phrase ainsi rédigée :
La création de services communs entre Electricité de France et Gaz de France est obligatoire dans le secteur de la formation professionnelle et de la direction du personnel
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Il a été défendu en même temps que l'amendement n° 279.
M. le président. L'amendement n° 285, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946, insérer une phrase ainsi rédigée :
Le cas échéant, Electricité de France, Gaz de France et les distributeurs non nationalisés créent des services communs dans les domaines précédemment énumérés
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 286, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946, insérer une phrase ainsi rédigée :
La création de services communs entre Electricité de France, Gaz de France et, le cas échéant, leurs filiales de transport est obligatoire dans le secteur de la formation professionnelle et de la direction du personnel
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous voyons trois insupportables conséquences à votre réforme.
La première, c'est l'ouverture totale à la concurrence, et, a minima, à tous les clients professionnels dès 2005, avec de lourdes menaces sur l'aménagement du territoire et la péréquation tarifaire.
La deuxième conséquence, c'est le démantèlement du service public par la séparation des activités de production, de transport et de distribution. Cette séparation détruit toute cohérence, toute complémentarité et tout projet industriel. Elle affaiblit considérablement les opérateurs publics, dégrade leur efficacité, constitue un gâchis économique et compromet la proximité du service public.
Enfin, troisième conséquence, cette ouverture à la concurrence permet à tous les opérateurs d'utiliser les stockages souterrains de gaz qui assurent la sécurité de fourniture. Leur gestion passerait alors d'une logique fondée sur la sécurité et la stabilité des prix à un pilotage fondé sur le prix du marché et la spéculation.
Il s'agit d'un amendement d'alerte.
M. le président. L'amendement n° 288, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 5 de la loi n° 46628 du 8 avril 1946 de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Le service commun de distribution est chargé de la gestion des réseaux de distribution électricité et gaz d'Electricité de France, au sens de l'article 11 de la présente loi.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Vous l'avez compris, nous sommes attachés à la préservation des services communs d'EDF et de GDF, qui constituent une sorte de socle sur lequel il est possible de bâtir un nouveau projet industriel au moyen de la fusion des deux EPIC.
Notre position de principe est très simple : il est vain de vouloir dissocier les deux catégories de personnels, d'un côté les électriciens et, de l'autre, les gaziers. Certes, les métiers sont différents, mais quelque chose assure la cohésion de ces agents et permet d'expliquer pourquoi des retraités ont spontanément repris du service lors de la tempête de 1999 - les habitants et les maires des régions traversées par la tempête savent ce qu'ils doivent à cette mobilisation. Contrairement à ce que l'on entend ici ou là, ce quelque chose n'a rien à voir avec de prétendus privilèges : c'est tout simplement la culture de service public à laquelle ces salariés sont attachés. Cette culture est le fruit d'une histoire qui se conjugue au passé, au présent et, ils l'espèrent, au futur.
Une approche comptable ne peut tenir compte de cette particularité. L'esprit de service public est un lien, dont la solidité n'est plus à démontrer, qui unit les agents d'EDF et de GDF, et tout particulièrement les 64 000 hommes et femmes qui font vivre EDF-GDF Services.
Tout cela serait affaibli par le projet du Gouvernement, qui prévoit que les services communs créés adopteront une comptabilité analytique permettant d'identifier les coûts afférents à chacune des deux entreprises. Ces dispositions banalisent l'existence des services communs en portant atteinte à leur spécificité.
Nous le répétons depuis le début de nos débats : c'est autour de ces services que se renforceront les synergies économiques utiles, hier comme demain, à notre pays.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Une seule explication vaut pour au moins huit de ces amendements. Le Gouvernement ne compte pas filialiser la direction EDF-GDF Services : M. Nicolas Sarkozy l'a rappelé lors de la discussion générale, c'est l'aboutissement des négociations qu'il a menées avec les syndicats ; il a été très clair.
Ill faut garder le statut de personne morale pour ne pas interdire la possibilité de créer un GIE entre EDF ou GDF et un DNN. C'est un cas de figure qui se présentera, puisque l'on dénombre cent soixante DNN sur notre territoire ; certains ont compétence en matière d'électricité comme en matière de gaz. La personne morale sert à cela, car un GIE est une personne morale.
La commission a donc émis un avis défavorable sur les 0amendements identiques de suppression nos 159 et 386.
Elle a également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 280, pour les raisons que je viens de donner.
De même, la commission est défavorable à l'amendement n° 282, qui est totalement contraire à la directive européenne qui exige que l'activité de transport soit juridiquement séparée.
La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement de repli n° 160, pour les raisons que j'ai données au début de mon propos.
La commission est défavorable à l'amendement n° 287, car l'intention du Gouvernement n'est pas de filialiser la direction EDF-GDF Services, la DEGS.
Avec l'amendement no 279 et les amendements suivants, les membres du groupe CRC veulent rendre obligatoires un certain nombre de services communs. Par l'amendement n° 279, celui que vous voulez rendre obligatoire relève non pas de la compétence du législateur, mais de la liberté de gestion des entreprises s'agissant des personnels.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 284, car elle considère qu'il est satisfait par les dispositions de la loi du 10 février 2000, relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, mais aussi par les dispositions de la loi du 3 janvier 2003, relative aux marchés du gaz et de l'électricité.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 281, d'abord parce qu'il alourdit le texte, mais aussi et surtout par rapport à l'exposé des motifs et à ce que je viens de dire en ce qui concerne la personnalité morale d'un GIE. Il ne faut pas empêcher la constitution de GIE entre EDF ou GDF et les DNN.
Avis défavorable sur l'amendement no 283 : c'est non pas au législateur, mais aux entreprises de décider s'il y aura un service commun de facturation. Je rappelle que les factures sont actuellement communes pour les consommateurs courants, mais qu'il existe déjà des factures séparées pour les clients éligibles. On ne va pas revenir en arrière. Respectons la liberté de gestion des entreprises.
Même argumentation pour l'amendement n° 278 : la commission émet donc un avis défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 285, car il est totalement satisfait par l'article 27. Peut-être en débattrons-nous plus tard, puisque l'article 27 permet déjà aux DNN de constituer des GIE.
Enfin, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 286 et 288.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux quatorze amendements - il est donc inutile que je les énumère - et je vais dire en quelques mots dire pourquoi.
D'abord, pour l'excellente raison donnée par M. le rapporteur, à savoir que le Gouvernement n'a pas l'intention de filialiser le service commun.
Ensuite, et surtout, parce que tous ces amendements ont la même philosophie : ils tendent à faire du législateur l'organisateur de la gestion de ces entreprises. En transformant le statut pour donner à EDF et GDF une souplesse de gestion dans les termes du droit commun, on aboutirait paradoxalement, si ces amendements étaient adoptés, à une souplesse de gestion inférieure à celle dont EDF et GDF jouissent actuellement. Le Gouvernement veut leur donner davantage de liberté de gestion qu'ils n'en ont en qualité d'EPIC. Vous voulez, par ces amendements, leur en donner moins. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 159 et 386.
Mme Marie-France Beaufils. Mon explication de vote vaudra également pour les autres amendements qui ont été présentés par le groupe CRC.
Vous nous dites que l'intention du Gouvernement n'est pas de filialiser. On peut toujours affirmer que telle est l'intention du Gouvernement lorsqu'il élabore son projet de loi. Mais ce texte donne à un autre gouvernement les moyens de filialiser demain. C'est sur ce point que nous divergeons. En effet, on ne peut raisonner seulement en fonction du gouvernement en place.
Vous nous dites également qu'il faut donner de la souplesse de gestion à EDF-GDF. Bien sûr, car vous vous inscrivez dans une logique de constitution de sociétés anonymes. Vous n'allez donc pas donner des obligations à EDF ou à GDF, que nous voulons garder comme entreprises publiques.
Ce sont bien des questions fondamentales qui nous opposent, puisque nous avons une autre conception de la gestion des services de l'électricité et du gaz dans notre pays.
Vous nous parlez de souplesse de gestion. Mais EDF et GDF en jouissent déjà pour une bonne part. Même les salariés nous disent aujourd'hui qu'ils souhaitent que leur entreprise publique garde cette volonté de réponse en termes de service public, maintienne la qualité des relations avec la clientèle. Je ne suis pas la seule à l'avoir constaté. J'ai rencontré les personnels de mon département pour apprécier leur situation ; une journaliste, qui a mené un travail d'enquête, a également observé cette situation.
Certes, monsieur le rapporteur, il existe, pour les clients déjà concernés par l'ouverture du marché, une facturation séparée. Toutefois, cela n'empêche nullement, pour ceux qui ne font pas partie du secteur soumis à concurrence, que l'on puisse conserver cette part importante de service.
Vous dites qu'il faut mettre en oeuvre ces dispositions car on pourra constituer des GIE avec les sociétés non nationalisées. Il y a d'autres façons de procéder, même avec le service actuel. Des formes de convention sont possibles à l'intérieur du secteur public ; on sait le faire dans d'autres cas. Je ne vois pas pourquoi le fait de maintenir ces services dans leur configuration actuelle entraverait toute possibilité de collaboration.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 159 et 386.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article 2 bis
La dernière phrase du dernier alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Les services liés à la fourniture rendus aux consommateurs bénéficiant de la tarification spéciale «produit de première nécessité» ou mentionnés au troisième alinéa du III de l'article 2 sont inclus dans cette tarification spéciale. Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 290, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 290 est retiré.
L'amendement n° 9, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Le troisième alinéa du III de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est complété par les mots :
« Ces personnes bénéficient de la tarification spéciale, mentionnée au I de l'article 4, pour les services liés à la fourniture. »
II. - La dernière phrase du dernier alinéa du I de l'article 4 de la même loi est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Cette tarification spéciale est applicable aux services liés à la fourniture. Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 2 bis est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 2 bis
M. le président. L'amendement n° 161, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er janvier 2005, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur les mesures prises pour éviter et faire face aux ruptures de fournitures d'électricité.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Il s'agit de préciser les précautions que le Gouvernement prendra pour éviter les ruptures de fourniture d'électricité.
Cet amendement relève du principe de prévention puisque le risque est réel. En effet, de graves ruptures de fourniture d'électricité ont eu lieu dans de nombreux pays qui ont libéralisé le marché de l'énergie et privatisé totalement la fourniture de l'électricité. Par conséquent, il est indispensable que le Gouvernement informe le Parlement sur les moyens mis en oeuvre pour faire face à tels ruptures de la continuité du service, notamment l'organisation des interconnexions avec les réseaux européens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Elle est défavorable à cet amendement. Monsieur Piras, rien n'empêche les auditions sur ce sujet, qui est très technique et qui concerne peut-être plus la commission des affaires économiques que l'ensemble du Parlement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. En effet, il a fait beaucoup mieux que de prévoir des rapports. D'abord, dans le projet de loi d'orientation sur l'énergie, il a prévu des mesures relatives à la fourniture de secours et à la fourniture de dernier recours. Ensuite, dans l'article 2 ter du présent projet de loi, il prévoit des mesures sur le délestage.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 161.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2 ter
Le III de l'article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La totalité de la puissance non utilisée techniquement disponible sur chacune des installations de production raccordées au réseau public de transport est mise à disposition du gestionnaire de ce réseau par les producteurs dans leurs offres sur le mécanisme d'ajustement. Le ministre chargé de l'énergie peut demander aux producteurs de justifier que leurs installations de production ne sont pas disponibles techniquement. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 291, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous proposons de supprimer l'article 2 ter.
Selon M. le rapporteur, cet article « oblige l'ensemble des producteurs installés sur le territoire à contribuer à l'équilibre du système électrique ».
Monsieur le ministre, vous me rétorquerez sans doute que notre attitude est contraire à l'objectif d'intérêt général qui est visé par cet article 2 ter.
Cependant, une analyse plus précise du texte confirme les craintes que nous avons déjà longuement évoquées depuis deux jours.
La politique gouvernementale de l'énergie abandonne une perspective de développement pour se cantonner dans un cadre de gestion d'une pénurie annoncée.
Votre proposition, qui apparaît comme un minimum, suppose implicitement que les opérateurs privés auraient pour premier réflexe de préserver leurs intérêts particuliers plutôt que de répondre solidairement à une situation de crise.
L'article 2 ter démontre en fait la nocivité de l'introduction de la loi du marché comme référence en matière énergétique. C'est bien la démonstration des nouveaux risques qui existeront, après le vote de cette loi, pour la sécurité.
Quel est ce système dans lequel il faut prévoir des structures pour empêcher tel ou tel producteur de provoquer un black-out ou la crise nucléaire ? Aujourd'hui, avec l'entreprise publique EDF, une telle question ne se pose pas.
Nous rejetons donc la logique d'ensemble de ce projet de loi, dont l'article 2 ter démontre par l'absurde toute la nocivité, tous les dangers.
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour compléter le III de l'article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, remplacer le mot :
mécanisme
par le mot :
marché
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur le président, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.
L'amendement n° 11, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
2° L'avant-dernier alinéa de l'article 41 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi rédigé :
« - à une disposition législative ou réglementaire relative à la production, à l'éligibilité, à la fourniture de secours ou de dernier recours ou à l'activité d'achat pour revente d'électricité, telles que définies aux articles 7 à 10, 15 et 22, ou aux prescriptions du titre en vertu duquel cette activité est exercée; »
II. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention : 1°
La parole est à M. le rapporteur pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 291.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'article 2 ter prévoit que les producteurs mettent à la disposition du gestionnaire du réseau la totalité de la puissance non utilisée disponible afin de contribuer à l'équilibre du système électrique, notamment pendant les périodes de pointe de consommation.
Il s'agit donc d'un dispositif très important visant à éviter dans notre pays la survenue de crises comme il a pu s'en produire en Grande-Bretagne où existaient des surcapacités de production qui n'étaient pas utilisées afin de faire monter artificiellement les prix. C'est un sujet que nous avons évoqué dans la discussion générale.
La commission des affaires économiques propose donc un amendement rendant applicables les sanctions prévues à l'article 41 de la loi 10 février 2000 - sanctions pécuniaires, retrait ou suspension pour une durée n'excédant pas un an de l'autorisation d'exploiter une installation - pour donner notamment au ministre chargé de l'énergie la possibilité de les prononcer à l'encontre des producteurs qui ne respectent pas l'obligation de mise à disposition de la puissance non utilisée.
Vous comprendrez que, en conséquence, la commission soit défavorable à l'amendement de suppression n° 291.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 291 et 11 ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. L'article 2 ter, comme l'a très bien pressenti Mme Terrade, a pour objet de permettre la continuité de l'approvisionnement en électricité. C'est la garantie même du service public. Le Gouvernement y tient particulièrement et il est donc défavorable à l'amendement n° 291.
Quant à l'amendement n° 11, il complète très utilement la disposition qui a été adoptée par l'Assemblée nationale, puisqu'il instaure des sanctions pour s'assurer de la mise à disposition des capacités non utilisées.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 ter, modifié.
(L'article 2 ter est adopté.)
TITRE II
LES ENTREPRISES GESTIONNAIRES DE RÉSEAUX DE TRANSPORT D'ÉLECTRICITÉ OU DE GAZ
CHAPITRE Ier
Dispositions communes
Article 3
La gestion d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz doit être assurée par des personnes distinctes de celles qui exercent des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz.
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 162 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté.
L'amendement n° 388 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Piras, pour présenter l'amendement n° 162.
M. Bernard Piras. L'article 3 est court, mais capital. Il pose le principe de la séparation juridique des réseaux de transport dans les entreprises verticalement intégrées comme EDF et GDF.
On nous parle souvent de Barcelone et de la décision qui a été prise d'ouvrir à la concurrence au 1er juillet 2004 le marché des clients professionnels. Mais on fait l'impasse sur d'autres questions fondamentales, notamment la préservation des services publics. Et pour cause, car, si le combat pour l'adoption d'une directive cadre sur les services d'intérêt général a été lancé sur l'initiative du gouvernement Jospin, les gouvernements Raffarin se sont bien gardés de le porter par la suite. Visiblement, le Gouvernement n'a pas entendu, lors des dernières élections, les messages de la population pour plus de solidarité, de cohésion sociale. Or les services publics sont un outil essentiel pour répondre à cette attente.
Vous nous parlez souvent de Barcelone, mais peu de « l'après-Barcelone ». Sur la manière dont vous avez négocié les nouvelles directives, il y a beaucoup à dire. Pourquoi avez-vous accepté la séparation juridique des activités de transport ? Pourquoi ne vous êtes-vous pas battu pour maintenir l'existant, c'est-à-dire une simple séparation fonctionnelle et comptable ? Car le système actuel fonctionne ; il donne satisfaction. Vous nous dites que vous êtes pragmatique, soyez-le réellement !
Au terme de quatre ans de fonctionnement et de l'avis général, l'actuel mode d'organisation donne satisfaction, comme l'attestent les rapports annuels de la CRE. Les utilisateurs du réseau d'électricité sont satisfaits à près de 90 %. La concurrence est réelle, bien plus que dans les pays où le marché est théoriquement ouvert à 100 % comme en Allemagne !
Dans son rapport de 2003, la CRE note que, hormis les pays où l'ouverture à la concurrence est ancienne - Royaume- Uni, Suède -, la France est un des pays où les clients éligibles ont le plus soit changé de fournisseur, soit renégocié les contrats. Pourquoi changer un système qui fonctionne ?
Enfin, un second problème est lié non pas au droit européen mais plutôt aux choix que vous avez opérés. Vous avez décidé que les réseaux de transport seront des sociétés anonymes.
Pour faire accepter cette transformation, vous martelez que le système proposé préserve le caractère intégré d'EDF et les intérêts nationaux en matière de sécurité d'approvisionnement puisque cette société anonyme restera à 100% public. Cette affirmation est fausse : des intérêts privés vont entrer dans le capital de cette société puisque ses actionnaires, qui sont, aux termes de l'article 5, EDF, l'Etat ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public, ne sont pas tous des entités à 100 % publiques.
Qui va entrer dans le capital de ces sociétés anonymes ? Concernant EDF, on parle de la Caisse des dépôts et consignations, pourquoi ? Pour GDF, c'est le black-out.
La représentation nationale a le droit de savoir. Le transport constitue un vrai monopole. Il est le coeur du service public. Même les plus libéraux n'ont jamais envisagé de multiplier les infrastructures ! Comment l'Etat va-t-il s'assurer que les investissements nécessaires soient faits ? Comment l'Etat va-t-il faire pour que les intérêts privés ne prennent pas le pas sur l'intérêt général ? Comment compte-t-il s'assurer de la continuité de la fourniture d'énergie dont il doit être le garant ? Comment empêchera-t-il la cession d'ouvrages nécessaires au transport ?
Rien dans ce projet de loi ne permet de préserver les intérêts de la nation. Tout est renvoyé au statut des entreprises. C'est inacceptable.
Aussi, nous proposons de supprimer l'article 3, qui constitue la première étape du démantèlement d'EDF et de GDF et du désengagement de l'Etat sur une activité stratégique pour assurer la sécurité et la continuité de l'approvisionnement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 388.
Mme Marie-France Beaufils. Nous avons eu l'occasion, lors de la discussion générale, de souligner que le processus de filialisation de la gestion des réseaux de transport faisait peser de lourdes menaces sur la pérennité du groupe, et donc sur sa cohérence. C'est la porte ouverte à la dilution du capital d'EDF, d'autant plus que cette entreprise est, même si vous le niez, en voie de privatisation.
Cet article 3 est donc fondamental, puisqu'il est révélateur de la ligne directrice fixée par votre projet de loi : il consiste à modifier en profondeur l'organisation d'EDF et de GDF avec leur changement de statut, l'ouverture de leur capital et il est la porte ouverte à la filialisation de certaines activités.
L'article 3 instaure, en fait, le principe de séparation juridique de la gestion des réseaux de transport tant de l'électricité que du gaz.
Selon le Gouvernement, il s'agit de la transcription des dispositions des deux directives européennes du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel en matière d'indépendance de gestion des réseaux de distribution et de séparation juridique des réseaux de transport.
On retrouve ici les justifications traditionnelles des obligations venant de Bruxelles sur lesquelles s'appuient les gouvernements qui n'assument pas leurs choix ultralibéraux régulièrement désavoués par notre peuple. L'Europe est un alibi bien commode, mais qui, à la longue, devient dangereux pour la démocratie. La préoccupante abstention de plus de la moitié de nos concitoyens aux élections du 9 juin dernier en est un nouveau et triste témoignage.
L'alibi ne trompe pas grand monde, mais décourage de plus en plus le civisme ; c'est peut-être l'un de rôles qui lui ont été assignés, d'ailleurs. Au passage, il faut redire que M. Mario Monti, commissaire européen à la concurrence, que l'on ne peut guère soupçonner d'étatisme, a clairement indiqué qu'aucune directive européenne ne contraignait le Gouvernement à transformer EDF et GDF en sociétés anonymes ni à ouvrir leur capital.
Avec ce projet, le Gouvernement fait une fois de plus le choix politique d'aller au-delà de ce que les directives exigent.
Nous préconisons, pour notre part, une renégociation des traités européens, dont celui de Barcelone.
M. Romano Prodi, président de la Commission européenne, a ainsi qualifié de « stupide » le Pacte de stabilité et de croissance, ce que nous n'avons cessé de rappeler. Des possibilités de négociation existent donc. Vous-même, monsieur le ministre, après M. le Premier ministre, avez émis bien des réserves et sollicité des accommodements en ce qui concerne le critère jusqu'ici intangible et impératif de limitation du déficit budgétaire à 3 % du produit intérieur brut. Il est vrai que c'est pour financer, entre autres baisses, celle de l'impôt de solidarité sur la fortune ou des plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu.
La préservation de notre pays et de l'Europe des dysfonctionnements constatés partout dans le monde à la suite de la déréglementation et la priorité de la lutte contre l'effet de serre nécessitent de reposer la question énergétique à l'échelle européenne, en privilégiant les coopérations et non les affrontements concurrentiels.
Vous voulez toujours aller vite et le plus loin possible dans la libéralisation et engager un processus que vous souhaitez irréversible vers la privatisation. Le projet de loi est discuté selon la procédure d'urgence, alors que toute une série de questions restent en suspens.
L'énergie, au même titre que l'eau, l'éducation, la santé, les transports, le logement ou la culture, n'est pas une marchandise et doit donc être préservée de la course au profit. La connaissance des gâchis, voire des scandales financiers liés à la libéralisation ou à la privatisation touche de plus en plus de monde.
Nous sommes favorables, je tiens à le rappeler, à une fusion d'EDF et de GDF, dont le Gouvernement répète qu'elle est ouverte. Or cette option changerait toute l'architecture du projet, comme le souligne cet article 3 inséré au chapitre Ier du titre II consacré aux dispositions communes aux réseaux de transport de l'électricité et de gaz, quand les chapitres II et III sont respectivement consacrés au gestionnaire du réseau de transport d'électricité et aux entreprises de transport de gaz.
Au-delà, la représentation nationale et nos concitoyens ignorent toujours les raisons du changement de statut d'établissement public en société anonyme et de l'ouverture du capital.
Nous réitérons donc notre demande de retrait de ce projet, alors que le Gouvernement a annoncé qu'un rapport lui serait remis en septembre prochain sur l'opportunité d'ouvrir le capital ou de regrouper EDF et GDF en une seule entité.
Telles sont les principales raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de cet article 3.
M. le président. L'amendement n° 289, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
La gestion d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz est assurée à minima par un service indépendant de la direction de l'entreprise intégrée.
Pour Electricité de France et Gaz de France, cette gestion est assurée par, respectivement, la direction de transport d'électricité et la direction de transport de gaz, sans qu'il soit créé de personnes morales distinctes.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous avons déjà souligné les dangers de la filialisation. Cet amendement vise donc à maintenir au sein d'EDF et de GDF les gestionnaires de réseaux de transport.
Les articles 3 et suivants du projet de loi transposent les directives européennes du 26 juin 2003 fixant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel. Cependant, il y a un monde entre l'exposé des motifs de l'article 3 et son contenu.
Dans l'exposé des motifs, en effet, il est affirmé que l'article 3 « fixe le principe de l'exercice des activités de gestion des réseaux de transport [...] par des entreprises juridiquement distinctes de celles qui exercent des activités de nature concurrentielle, à savoir la production et la fourniture d'électricité ou de gaz ».
Permettez-moi de citer maintenant le texte de l'article 3 : « La gestion d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz doit être assurée par des personnes distinctes de celles qui exercent des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz. »
L'exposé des motifs fait donc état d'activités exercées par des « entreprises juridiquement distinctes », tandis que l'article 3 parle d'activités exercées par des « personnes distinctes » : ce n'est pas la même chose !
En droit, la personnalité juridique est conférée à des entités qui nécessitent une protection, qu'il s'agisse d'êtres humains - les personnes physiques - ou de groupements d'individus auxquels la loi attribue la personnalité juridique - les personnes morales.
Une entreprise est une personne morale de droit privé. Donc, écrire que l'activité de transport doit être exercée par une entreprise juridiquement distincte de celle qui exerce des activités de production ou de fourniture, c'est considérer que cette activité doit être confiée à une personne morale séparée. Or si l'on prévoit, comme à l'article 3, que l'activité de transport doit être exercée par des personnes distinctes de celles qui exercent des activités de production ou de fourniture, on ne tranche pas la question de savoir si ces personnes distinctes sont des personnes morales ou des personnes physiques.
On le voit, la rédaction de la directive, transposée dans l'article 3, tend à laisser aux Etats membres le choix de décider quelle sera la séparation juridique mise en oeuvre.
Aujourd'hui, l'activité de transport est exercée par un service séparé du point de vue managérial et comptable au sein d'EDF. Il s'agit de Réseau du transport d'électricité, RTE, qui est géré par des personnes physiques distinctes de celles qui exercent les activités de production et de fourniture. En ce sens, la séparation juridique existe déjà, et il n'est nul besoin, de notre point de vue, de créer une société chargée du réseau de transport d'électricité.
En le faisant, le Gouvernement va au-delà des obligations que lui impose le droit communautaire et procède à un choix lourd de conséquences, qui sonne le glas du modèle d'intégration horizontale et verticale d'EDF tel qu'il a été bâti à la Libération.
M. le président. L'amendement n° 292, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer le mot :
doit
par le mot :
peut
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Cet amendement, qui a pour seul objet de remplacer le mot « doit » par le mot « peut », s'inscrit dans la même logique que ceux que nous venons de défendre.
Pour nous, la gestion d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz peut être assurée par des personnes distinctes du producteur ou du fournisseur.
Dans la mesure où la France satisfait déjà aux dispositions de l'article 10 de la directive, c'est-à-dire aux quatre critères d'indépendance que nous avons eu l'occasion de mentionner, il suffit de laisser la possibilité de choisir, d'où le changement de verbe proposé.
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
doit être
par le mot :
est
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 293, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
des personnes distinctes
par les mots :
les mêmes personnes que
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement vise à contrecarrer le démantèlement de l'entreprise intégrée EDF-GDF.
L'efficacité économique et technique du système électrique français réside dans le choix de l'intégration maximale des diverses activités nécessaires au fonctionnement et aux investissements.
Cette intégration est indispensable pour des raisons non seulement d'ordre social mais aussi d'efficacité économique et de sûreté d'approvisionnement. Les soixante dernières années ont prouvé, pour le moins, la pertinence du choix effectué en 1946, qui assure depuis la cohérence de la politique énergétique de la France. D'ailleurs, si nous avons refusé votre loi d'orientation sur l'énergie, monsieur le ministre, c'est précisément parce que les outils que vous proposiez de mettre en place ne permettaient pas de maintenir cette cohérence.
Le réseau de transport d'électricité est un élément essentiel de l'intégration. C'est lui qui détermine un maillage équilibré du territoire et permet que l'usager du fin fond de la Corrèze soit relié et servi avec la même qualité de prestation qu'un usager de la capitale. Le transport est, de plus, une composante essentielle du prix final.
Aujourd'hui, RTE, le transporteur, est un service d'EDF avec séparation comptable. Le séparer juridiquement tout en le soumettant aux exigences du marché va évidemment pousser chacun des opérateurs du secteur à tirer la marge à lui, au risque de léser le consommateur.
Au transporteur qui veut augmenter ses marges, il suffira d'économiser sur les investissements d'équipement. Dans les zones en voie de désertification, on pourra ainsi réduire les investissements sur l'entretien des réseaux, et tant pis pour les pannes éventuelles ! Cela revient à accorder bien moins de considération à un Creusois qu'à un Parisien ou à un habitant du Nord, tout en faisant reculer l'aménagement du territoire.
Il serait conforme à votre pensée décentralisatrice de transférer, à terme, sur les collectivités locales les coûts que vous ne voulez pas laisser à la charge de RTE privatisé. En ces temps d'ouverture au marché, les collectivités locales peuvent avoir le bon goût d'assumer des charges dont vous voulez délester non seulement l'Etat mais également les entreprises qui ont hérité de ses missions.
Le statut social du personnel et les dispositions appliquées aujourd'hui aux agents d'EDF, quel que soit leur secteur d'activité, sont une garantie de cette intégration. Durant la canicule de l'été 2003, c'est grâce à ces agents, je le rappelle, que la France a évité de justesse une deuxième catastrophe.
Notre opposition à l'évolution que vous voulez imprimer au réseau de transport vise à préserver l'esprit qui a permis à EDF et à GDF de développer, depuis 1946, une efficacité que nul ne conteste.
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans cet article, après les mots :
des personnes
insérer le mot :
morales
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement a pour objet de rappeler que les personnes qui gèrent un réseau de transport et qui doivent être distinctes de celles qui exercent des activités de production sont bien des personnes morales.
Il est important d'éviter toute équivoque avec l'article qui suit qui, lui, fait référence aux personnes physiques chargées de la direction générale de ces entreprises.
M. le président. L'amendement n° 163, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Dans cet article, après les mots :
par des personnes
insérer le mot :
publiques
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Dans le projet de loi d'orientation sur l'énergie, l'Assemblée nationale et le Sénat ont tenu à préciser que la conduite de la politique énergétique nécessite le maintien et le développement d'entreprises publiques nationales.
Cet amendement a pour objet de préciser que la gestion du réseau de transport doit être assurée par des personnes publiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission émet un avis totalement défavorable sur les deux amendements de suppression, les amendements nos162 et 388. L'article 3 transpose la directive, qui exige la séparation juridique du transporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Concernant l'amendement n° 289, j'ai bien compris l'objectif, mais confier la gestion du réseau de transport à un service indépendant serait contraire à la directive. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'avis est également défavorable sur l'amendement n° 292, car transformer l'obligation de séparation juridique en une simple faculté serait tout aussi contraire à la directive.
L'amendement n° 293 prévoit la confusion entre producteurs et transporteurs, en totale contradiction avec la directive, qui exige sans ambiguïté la séparation de l'activité de transport. La commission émet donc un avis défavorable.
Enfin, l'amendement n° 163 est satisfait par l'article 5, s'agissant de l'électricité, et par le II de l'article 10, s'agissant du gaz. Il présenterait en outre l'inconvénient de nationaliser les activités de transport, notamment celles de la filiale de Total... La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Les amendements nos162, 388, 289, 292 et 293 sont tout simplement contraires à la directive, et ne peuvent que susciter l'avis défavorable du Gouvernement. Faut-il le rappeler, transposer la directive est une obligation.
L'amendement n° 163 ne me semble pas contraire à la directive mais, comme l'a dit M. le rapporteur, il reviendrait à renationaliser une partie du réseau de Total. Avouez que c'est quand même un peu fort de café ! En outre, il « ressuscite » l'EPIC, puisqu'il prévoit comme gestionnaire du réseau de transport une personne publique indépendante : c'est précisément le contraire du texte gouvernemental ! Le Gouvernement émet, par conséquent, un avis défavorable sur cet amendement.
Enfin, les deux amendements rédactionnels présentés par la commission sont utiles, surtout l'amendement n° 13. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur les amendements nos12 et 13.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 162 et 388.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 164, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aucun intérêt privé ne peut, directement ou indirectement, être présent dans le capital des entreprises ou des organismes chargés de la gestion d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Il s'agit d'un amendement de conséquence.
En effet, lors de l'examen du projet de loi d'orientation sur l'énergie, le Parlement a posé un double principe : d'une part, la politique énergétique repose sur un service public de l'énergie, qui garantit une indépendance stratégique et favorise la compétitivité économique et industrielle ; d'autre part, la conduite de la politique énergétique nécessite le maintien et le développement d'entreprises publiques nationales.
Dès lors, l'indépendance ne peut reposer que sur des gestionnaires de réseaux totalement publics, ce qui n'est pas garanti dans le projet de loi actuel, étant donné l'ouverture du capital d'EDF et de GDF.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur Piras, vous obtiendrez totalement satisfaction en adoptant l'article 5, relatif au gestionnaire du réseau de transport d'électricité, et l'article 10, relatif aux gestionnaires de réseaux de transport de gaz.
Si le capital est ouvert, il le sera exclusivement à des personnes publiques, ce qui doit vous rassurer entièrement.
M. Bernard Piras. On en reparlera !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Piras, votre amendement est effectivement satisfait. En outre, son adoption aurait pour effet de nationaliser, par exemple, GSO, la filiale de Total...
Vraiment, tout cela n'est pas très raisonnable.
M. Bernard Piras. L'amendement est maintenu !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J'apporte mon soutien à la proposition de nos collègues du groupe socialiste.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous nous affirmez que l'adoption des articles 5 et 10 du présent projet de loi nous donnera satisfaction.
Nous pouvons prendre un certain nombre d'exemples d'autres ouvertures partielles du capital. En l'espèce, après un taux de 50 % d'ouverture du capital, vous nous proposez un taux de 30 %. Pour le moment, donc, l'étendue réelle de cette ouverture n'est pas complètement arrêtée. De surcroît, on le sait très bien, à l'occasion de ventes d'actions, même si les structures sont publiques au moment de l'ouverture, la composition de l'actionnariat peut être amenée à évoluer.
Par conséquent, il est faux d'affirmer, comme vous le faites pourtant, que seules des structures publiques pourront entrer dans le capital. En effet, aucune protection n'existe tant que la loi n'est pas claire et ferme sur ce point.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 164.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 205 :
Nombre de votants | 312 |
Nombre de suffrages exprimés | 312 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 157 |
Pour l'adoption | 113 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 4
I. - Les gestionnaires de réseaux de transport d'électricité ou de gaz exploitent, entretiennent et développent ces réseaux de manière indépendante vis-à-vis des intérêts dans les activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz des entreprises qui leur sont liées au sens des articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de commerce ou qui appartiennent au même groupe.
Les statuts des gestionnaires de réseaux prévoient que les résolutions du conseil d'administration ou de surveillance relatives au budget, à la politique de financement et à la création de toute société, groupement d'intérêt économique ou autre entité juridique concourant à la réalisation de l'objet social ou à son extension au-delà du transport de gaz ou d'électricité, ne peuvent être adoptées sans le vote favorable de la majorité des membres nommés par l'assemblée générale. Il en va de même, au-dessus d'un seuil fixé par les statuts, pour les résolutions relatives aux achats et ventes d'actifs ainsi qu'à la constitution de sûretés ou de garanties de toute nature.
II. - Les personnes assurant la direction générale des gestionnaires de réseaux ne peuvent être révoquées sans avis motivé préalable de la Commission de régulation de l'énergie.
Les statuts des gestionnaires de réseaux énumèrent les conditions pouvant justifier la révocation de la personne assurant la direction générale.
Passé un délai de quinze jours à compter de sa saisine, l'avis de la Commission de régulation de l'énergie est réputé donné.
Les personnes assurant des fonctions de direction dans ces entreprises ne peuvent pas avoir de responsabilité directe ou indirecte dans la gestion d'activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz.
Un décret fixe les mesures garantissant que les intérêts professionnels des personnes assurant des fonctions de direction dans la société gestionnaire du réseau de transport d'électricité leur permettent d'agir en toute indépendance.
III. - Tout gestionnaire d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz réunit dans un code de bonne conduite les mesures d'organisation interne prises pour prévenir les risques de pratique discriminatoire en matière d'accès des tiers au réseau. La mise en oeuvre de ce code fait l'objet, par chaque gestionnaire, d'un rapport annuel rendu public et adressé à la Commission de régulation de l'énergie.
La Commission de régulation de l'énergie publie chaque année un rapport sur le respect des codes de bonne conduite par les gestionnaires de réseaux de transport d'électricité et de gaz.
La Commission de régulation de l'énergie évalue chaque année l'indépendance des personnes assurant des fonctions de direction dans les entreprises gestionnaires d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz et propose si nécessaire, aux gestionnaires concernés, des mesures visant à mieux garantir cette indépendance.
M. le président. Je suis saisi de dix-sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 165 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 387 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Reiner, pour présenter l'amendement n° 165.
M. Daniel Reiner. Nous avons déjà dit tout le mal que nous pensions de la séparation juridique des activités de transport ici proposée.
Nous souhaitons mettre de nouveau l'accent sur un point essentiel, à savoir l'interdépendance de la chaîne électrique, composée, comme chacun le sait, de trois maillons : la production, le réseau de transport et le réseau de distribution. Nous considérons qu'il est nécessaire de prévoir une cohérence entre ces trois maillons. Or, pour assurer cette cohérence, les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer ; naturellement, rien n'est prévu à cet égard dans ce projet de loi.
Le système proposé par l'article 4 est particulièrement dangereux, en ce sens qu'il prive les pouvoirs publics des moyens qui lui permettent de veiller à la préservation de l'intérêt général.
Vous renvoyez tout aux statuts des sociétés anonymes et à leur conseil d'administration. Ainsi, le budget, la politique de diversification - on peut d'ailleurs s'interroger sur sa nature exacte - et la vente d'actifs, donc des ouvrages du réseau, sont laissés à la seule appréciation du conseil d'administration. Lors de la discussion générale, je vous avais déjà alertés, mes chers collègues, sur les nombreux risques liés à la vente de ces ouvrages.
Il n'est même pas prévu que l'Etat puisse s'opposer, pour assurer la continuité du service public, à la vente d'ouvrages.
En clair, c'est la spoliation de biens publics que vous organisez, monsieur le ministre, ce qui est, pour nous, parfaitement inacceptable.
Enfin, il faut relever que le texte ne respecte même pas les exigences de la directive, que vous avez pourtant négociée, laquelle interdit notamment à la société mère de donner des instructions dans la gestion quotidienne. Or rien n'est précisé en ce sens dans le projet de loi. La directive impose aussi que le gestionnaire de réseau ait de réels pouvoirs, indépendamment de l'entreprise intégrée, en ce qui concerne les actifs nécessaires à l'exploitation, à l'entretien et au développement du réseau. Rien n'est prévu dans l'article 4 à cet égard.
L'article 4 prévoit que c'est la majorité des administrateurs représentant les actionnaires qui déterminera l'ensemble de la politique de financement, les achats et ventes d'actifs, la création de filiales, la constitution de toute sûreté ou garantie. L'indépendance fonctionnelle des réseaux de transport n'est donc pas véritablement assurée.
En proposant la suppression de l'article 4, nous vous interrogeons : comment allez-vous gérer l'ensemble de ces contradictions ?
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 387.
Mme Evelyne Didier. Comme vous l'indiquez dans votre rapport, monsieur Poniatowski, cet article fixe le principe de l'indépendance des gestionnaires de réseaux de transport d'électricité et de gaz par rapport aux entreprises de production ou de fourniture.
S'appuyant sur les dispositions des nouvelles directives, le projet de loi transpose en droit interne le principe d'indépendance juridique et managériale des gestionnaires de réseaux de transport d'électricité et de gaz.
Le principe était formulé de manière générale dès l'article 3, aux termes duquel la gestion d'un réseau de transport d'électricité ou de gaz doit être assurée par « des personnes distinctes de celles qui exercent des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz ».
Comme cela est rappelé dans l'exposé des motifs du projet de loi, il s'agit là d'un principe général applicable à toute entreprise intégrée, quel que soit son statut, public ou privé.
Selon ce même exposé des motifs, le dispositif de l'article 4 vise en premier lieu à concilier « deux objectifs contraires », en permettant aux gestionnaires de réseaux « d'assurer leur mission de manière indépendante au sein d'un groupe intégré sans qu'il soit pour autant porté atteinte aux intérêts de leurs actionnaires ».
Conformément aux objectifs assignés sur ce point par les directives, il est donc prévu que les résolutions de l'organe d'administration de la filiale relatives au budget, à la politique de financement, à la création de toute société, et, au-dessus d'un seuil fixé, aux achats et ventes d'actifs, ainsi qu'à la constitution de sûretés et de garanties, ne pourront être adoptées sans le vote favorable de la majorité des membres élus par les actionnaires.
Autrement dit, dans la logique du droit communautaire, les décisions les plus importantes, d'un point de vue patrimonial, ne pourront être imposées par la direction de la filiale aux actionnaires, au premier rang desquels figurent EDF et Gaz de France ; la direction de la filiale devra néanmoins disposer de pouvoirs de décision effectifs pour gérer le réseau de manière indépendante.
Il est à noter que la rédaction de l'article 4, qui évoque sans restriction l'extension de l'objet social des gestionnaires de réseau de transport, laisse entrevoir une diversification de leurs activités plus large que la gestion de réseaux de transport et les activités de valorisation des infrastructures prévues aux articles 6 et 9.
L'article 4 précise enfin que l'indépendance de la filiale gestionnaire d'un réseau de transport au sein du groupe est assurée sans préjudice des dispositions du code de commerce relatives aux prérogatives des organes sociaux.
Par cette analyse, j'ai tenté de mettre en lumière le risque d'explosion du transport, de la distribution et de la production de l'énergie. Certains parlent, à juste titre, de « désintégration » du secteur de l'électricité.
Cet article 4, sous le prétexte d'organiser de manière rationnelle l'indépendance des gestionnaires de réseaux, pousse à la filialisation de cette branche.
Nous estimons, pour notre part, et nous aurons l'occasion d'y revenir, que le maintien d'une entreprise de secteur public intégrée est la garantie première de la pérennité des services rendus par EDF.
C'est parce que nous sommes opposés à cette désintégration annoncée du secteur de l'énergie que nous vous proposons de supprimer cet article 4.
M. le président. L'amendement n° 166, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du I de cet article, après les mots :
Les gestionnaires
insérer le mot :
publics
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Cet amendement se justifie par son texte même. Nous restons fidèles à notre position : nous souhaitons que les gestionnaires de réseaux de transport d'électricité ou de gaz demeurent publics.
M. le président. L'amendement n° 107 rectifié bis, présenté par M. Valade, Mme Brisepierre, MM. Cazalet, César, Hérisson, Lanier, Mouly et Pintat, est ainsi libellé :
Remplacer le second alinéa du I de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
A ce titre, les entreprises citées au premier alinéa du présent article ne peuvent donner d'instructions à leur filiale gestionnaire de réseau de transport quant à leur gestion quotidienne ni en ce qui concerne les décisions individuelles relatives à la construction ou à la modernisation des réseaux de transport qui n'excèdent pas les limites du plan financier annuel.
Toutefois, afin de garantir les droits de supervision économique et de gestion des sociétés mères sur leurs filiales, les statuts des gestionnaires de réseaux prévoient que les résolutions du conseil d'administration relatives au plan financier annuel et au niveau d'endettement ne peuvent être adoptées sans le vote favorable de la majorité des membres nommés par l'assemblée générale.
La parole est à M. Xavier Pintat.
M. Xavier Pintat. Il s'agit ici de renforcer l'indépendance des réseaux de transport, en cohérence avec les dispositions de la directive du 26 juin 2003.
En outre, cet amendement a aussi le mérite, pour les collectivités territoriales, d'écarter le risque de voir les gestionnaires de réseaux de transport ne pas agir exclusivement dans l'intérêt de ces derniers.
M. le président. L'amendement n° 296, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du I de cet article :
Les services qui assurent la responsabilité de gestionnaire de réseaux de transport soumettent au conseil d'administration d'Electricité de France ou de Gaz de France, selon le cas, les décisions relatives au budget et à la politique de financement des investissements.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. L'objet de cet amendement est clair : il s'agit d'éviter la désintégration du service public de l'énergie dans notre pays.
Je formulerai d'abord quelques remarques sur la question des investissements.
Pour un transporteur d'énergie autonome, c'est-à-dire n'ayant aucune maîtrise de la production ni de la distribution, prendre une décision d'investissement est d'une difficulté extrême.
En effet, il doit faire face à l'incertitude sur la fourniture - existera-t-elle ? -, à l'incertitude sur le marché -comment se comportera-t-il ? - et au risque lié à l'intervention du régulateur - quelle rémunération laissera-t-il ?
On le voit, les incertitudes sont nombreuses, et d'autant moins négligeables que l'on se projette dans le long terme : qu'en sera-t-il, en effet, dans dix ans, dans quinze ans, dans vingt ans, voire davantage ?
Les incertitudes liées à la myopie et à la volatilité du marché valent donc pour l'activité de production comme pour l'activité de transport.
De ces incertitudes peut naître un risque de sous-équipement chronique. En effet, la pénurie, suscitée par une demande excessive par rapport à l'offre disponible, aurait l'avantage d'engendrer des prix plus rémunérateurs. Ce risque est d'autant plus grave qu'un système électrique doit être suréquipé - EDF évalue à 20 % le taux de suréquipement nécessaire - pour faire face aux imprévus.
Mes chers collègues, pour garantir que les investissements seront effectivement réalisés dans le secteur de la production comme dans le secteur du transport, il ne suffira pas d'écrire dans la loi que notre pays doit toujours disposer de capacités additionnelles.
Il s'agit, en amont, de se poser une série de questions : qui va investir pour construire les capacités additionnelles réclamées par le législateur afin de satisfaire les besoins présents et futurs des entreprises et des ménages ? Comment seront rémunérés ces investissements dans des capacités additionnelles ? En effet, ce sont des capacités additionnelles par rapport à la demande de base ; mobilisées de temps en temps, elles se révéleront très difficiles à rentabiliser à court terme. Il n'est dons pas sûr que les investisseurs, à la recherche de taux annuels de rentabilité voisins de 15 %, se bousculent au portillon, si je puis m'exprimer ainsi !
M. Jean Chérioux. Pourquoi pas 25 %, tant que vous y êtes !
Mme Odette Terrade. Une fois obtenues des réponses satisfaisantes à ces questions, il sera envisageable de se demander quelle est l'organisation des industries électriques et gazières la plus en adéquation avec les enjeux.
Cependant, force est de constater que l'Union européenne n'a pas pris le soin de répondre à ces questions élémentaires, ni même de les poser, et pour cause : le jeu du marché était présenté comme une solution « clés en main », permettant de résoudre toutes les difficultés.
Aussi ce débat doit-il être repris à zéro. Nos concitoyens ont le droit de décider s'ils souhaitent ou non mettre à bas un dispositif qui fonctionne bien pour le remplacer par un système supérieur sur le papier mais qui, en pratique, a fourni de nombreuses preuves de son incontestable infériorité.
J'espère que ces quelques observations vous auront convaincus, mes chers collègues, d'adopter l'amendement n° 296.
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du second alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
au budget,
par les mots :
au plan financier annuel
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. La commission des finances a été très attentive à la situation faite au réseau de transport d'électricité. Nous pensons, en effet, que la neutralité de ce réseau est l'un des éléments clés de l'organisation du nouveau marché de l'électricité.
On nous soumet ici un compromis, qui est à mes yeux équilibré, entre, d'une part, le respect du droit commun des sociétés, et, d'autre part, le respect des directives européennes, c'est-à-dire du droit communautaire.
Nous maintenons, et c'est bien notre droit, le concept d'entreprise publique intégrée. Une filiale est constituée au sein du groupe EDF ; l'actionnaire de cette filiale devra exercer ses droits, notamment en assemblée générale, lors de la désignation des mandataires sociaux. Cependant, pour que le droit communautaire soit pleinement respecté, il convient que le pouvoir de supervision de l'actionnaire ne puisse se transformer en une immixtion dans la gestion de la filiale.
Le mot « budget » nous ayant paru ambigu, nous avons préféré reprendre purement et simplement, à l'amendement n° 91 rectifié, l'expression « plan financier annuel », qui figure dans le texte de la directive européenne.
Il me semble que la préoccupation que nous exprimons ici rejoint largement celle que notre collègue Xavier Pintat a exposée à l'instant au nom des cosignataires de l'amendement n° 107 rectifié bis, en particulier du président Jacques Valade.
Nous nous référons notamment au point de vue de la Commission de régulation de l'énergie, qui a manifesté son souci de ne pas voir la société mère intervenir dans la gestion quotidienne de la filiale. Dès lors que l'on sait se garder de cet écueil, il semble bien que l'on soit en droit, en respectant strictement les directives européennes, de constituer une filiale très majoritairement détenue par EDF et dont la totalité du capital serait entre des mains publiques.
M. le président. L'amendement n° 295, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
le vote favorable de la majorité des membres nommés par l'assemblée générale
par les mots :
l'accord de l'Etat
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'amendement n° 295 est sous-tendu par les mêmes motivations que ceux que nous avons déjà défendus sur cet article 4, que nous estimons de plus en plus dangereux à mesure que le débat avance.
Nous proposons que les résolutions du conseil d'administration ou de surveillance évoquées à cet article ne puissent être adoptées sans l'accord de l'Etat plutôt que sans le vote favorable de la majorité des membres nommés par l'assemblée générale, comme le prévoit la rédaction actuelle du projet de loi. Nous faisons ainsi, encore une fois, le choix de l'intérêt général contre les intérêts privés.
L'amendement n° 295 prend évidemment le contre-pied de la démarche suivie par les promoteurs du projet de loi.
Comme lors du débat sur la réforme des retraites, on nous explique qu'il n'y a pas d'autre voie que celle qui est proposée par le Gouvernement. Ainsi, pour assurer la pérennité d'EDF et de GDF, il serait nécessaire de changer leur statut et d'ouvrir leur capital ; il n'y aurait, semble-t-il, pas d'autre solution ; le « tout marché » et ses bienfaits supposés ne sauraient faire l'objet d'un débat !
Pourtant, d'autres pistes peuvent être explorées. A nos yeux, le maintien du caractère intégré des entreprises et la fusion des deux EPIC sont indispensables. Cela doit être accompagné d'une renégociation des directives européennes.
D'autres choix sont donc possibles, il en existe même, en vérité, une grande variété.
J'évoquerai, à titre d'exemple, une solution proposée par l'économiste François Morin, professeur à l'université de Toulouse-I. Nous ne partageons pas ses vues, car la mise en oeuvre de sa suggestion impliquerait de prendre acte du « tronçonnage » des établissements publics nationaux dans la forme que nous leur connaissons actuellement. Cependant, nous vous livrons le fruit de sa réflexion, qui vous est peut-être inconnue, mes chers collègues ; elle a le mérite de battre en brèche le caractère prétendument irréfutable de ce projet de loi.
Voici donc un extrait d'un article transmis par le professeur François Morin à l'AITEC, l'Association internationale des techniciens, experts et chercheurs :
«Prenons, par exemple, l'organisation suivante :
« - les deux têtes, EDF et Gaz de France, gardent leur statut d'EPIC - on peut même les fusionner dans un EPIC nouveau, " EGF ", puisque, de droite comme de gauche, un tel schéma de fusion est envisagé par certains ;
« - les autres activités sont ensuite filialisées : les activités concurrentielles -production, fourniture - dans des filiales détenues au moins pour les deux tiers par des participations publiques, dont celle, majoritaire, de l'EPIC ; les activités non concurrentielles -transport, distribution, services communs -dans des filiales détenues, elles, à 100 % par des capitaux publics, dont au moins la moitié par l'EPIC.
« Il est évident que, dans un tel schéma, les activités concurrentielles se trouvent dotées de tous les attributs que le Gouvernement prête au changement de statut et à l'ouverture du capital : le principe de spécialité disparaît, le financement est ouvert, la garantie de l'Etat tombe. Quant aux missions de service public, elles sont pour l'essentiel gérées dans le cadre des activités non concurrentielles, mais peuvent aussi l'être au niveau des têtes de groupe, d'où la souplesse de cette organisation. Enfin, avec cette configuration, la construction du marché unique de l'énergie peut se poursuivre sans entraves.
« Pourquoi alors ne pas aller vers cette réforme limitée et qui répond aux critères avancés par le Gouvernement ? Celui-ci n'a-t-il pas finalement une visée politique, probablement à forte connotation idéologique, bien qu'il s'en défende ? On peut le craindre en voyant toutes les concessions récentes qu'il s'apprête à réaliser afin de faire aboutir, coûte que coûte, le changement de statut des deux EPIC.
« Or, l'organisation décrite ci-dessus a un autre avantage, celui de préserver l'avenir, notamment pour le secteur électrique. Le maintien du statut de l'EPIC est en effet le seul cadre - l'histoire d'EDF en est une preuve éclatante sur les soixante dernières années - qui puisse fournir l'horizon très long nécessaire à la réalisation des futurs investissements à venir, dont on sait qu'ils seront particulièrement élevés. »
Comme vous le voyez, monsieur le ministre, des contre-projets autres que ceux des élus communistes existent bien et rien n'interdit, y compris lorsque l'on se place, comme François Morin, dans la perspective de la dérégulation européenne, de conserver leur statut aux EPIC. Votre projet de loi est donc bel et bien le fruit de partis pris idéologiques, c'est-à-dire la traduction d'une aversion de toujours pour les entreprises publiques.
Nous proposons, par notre amendement, de freiner la casse de l'outil EDF-GDF.
M. le président. L'amendement n° 167, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du second alinéa du I de cet article :
Les ouvrages des réseaux publics de transport sont inaliénables.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Même si la loi de 1946 restait ambiguë quant à la notion de propriété des réseaux, ces derniers constituaient bien, de fait, une propriété collective. C'est pourquoi cette propriété a été transmise à l'EPIC lors de la création de celui-ci.
Par cet amendement, nous proposons que les ouvrages des réseaux publics de transport soient inaliénables. Le dispositif actuel du projet de loi prévoit en fait que les gestionnaires de réseaux de transport seront des sociétés anonymes, dont les actionnaires auront évidemment intérêt à réaliser des actifs, donc peut-être à vendre ce que l'on appelle trivialement des « bijoux de famille ». Il peut s'agir de parties de réseau, et l'on sait quels risques sont liés au défaut d'interconnexion.
Par ailleurs, nous débattons d'un texte qui pourra éventuellement permettre de démanteler un réseau public de transport : tel est bien le risque auquel je voudrais essayer de parer par cet amendement.
Il n'existe pas de politique européenne commune dans ce domaine. Or j'estime que des secteurs aussi importants que ceux de la maîtrise de l'énergie et de l'indépendance énergétique mériteraient au moins autant que l'agriculture de faire l'objet d'une telle démarche.
Quoi qu'il en soit, si nous adoptons le projet de loi en l'état, les risques de compromettre l'indépendance énergétique de notre pays seront considérables. Nous voudrions au moins sauver ce qui peut être sauvé, c'est-à-dire les ouvrages des réseaux publics de transport.
M. le président. L'amendement n° 168, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du I de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Les ouvrages des réseaux publics de transport sont inaliénables.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Cet amendement tend à conforter le précédent. (Sourires.)
Il est précisé, dans le projet de loi, que les conseils d'administration des gestionnaires de réseaux pourront décider de vendre des actifs ; nous souhaitons, quant à nous, que les ouvrages des réseaux publics de transport d'électricité ou de gaz ne puissent être vendus, et nous proposons donc d'indiquer qu'ils seront inaliénables.
Pour l'heure, je le rappelle, il en est bien ainsi, ces ouvrages étant aujourd'hui la propriété de l'EPIC après avoir été celle de l'Etat. Dès lors que l'on transforme le gestionnaire de réseau en société anonyme, le caractère public des ouvrages disparaît. Je ne reviendrai pas, à cet égard, sur l'exemple de France Télécom, que j'ai évoqué au cours de la discussion générale.
J'avais d'ailleurs souligné, en souriant, que ce ne serait pas le cas en matière de distribution. Ainsi, dès lors qu'ils sont raccordés à un bien public, les pylônes électriques sur la voie publique demeureraient publics, mais les lignes à haute tension pourraient éventuellement ne plus l'être.
Nous souhaitons faire en sorte que les ouvrages des réseaux publics de transport ne puissent être éventuellement vendus.
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début du premier alinéa du II de cet article :
Toute personne qui assure la direction générale d'un gestionnaire de réseau ne peut être révoquée sans avis...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 297, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
générale des gestionnaires de
par les mots :
des services gestionnaires des
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous proposons de réaffirmer que ce sont les services qui sont gestionnaires.
S'agissant du transport d'électricité, nous restons très attachés à la notion de service. Il s'agit de s'assurer que ces gestionnaires rempliront bien les missions de service public.
Cet amendement s'inscrit donc dans la même logique que les précédents.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Supprimer le deuxième alinéa du II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'Assemblée nationale a jugé souhaitable que la Commission de régulation de l'énergie émette un avis motivé sur une éventuelle révocation du directeur général du réseau de transport.
Parce que c'est une bonne mesure, nous l'approuvons.
Toutefois, l'Assemblée nationale a adopté un autre amendement tendant à insérer un deuxième alinéa dans le II de l'article 4 afin que les statuts des gestionnaires de réseaux énumèrent les conditions de nature à justifier la révocation des dirigeants.
Or il paraît véritablement inopportun que les organes délibérants des sociétés gestionnaires de réseaux fixent les conditions de révocation des dirigeants, surtout si le but est d'éviter qu'il ne soit porté atteinte à l'indépendance de ceux-ci.
C'est la raison pour laquelle nous avons jugé souhaitable de proposer la suppression d'un alinéa qui affaiblit la disposition qui le précède, voire la contredit.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du II de cet article :
L'avis de la Commission de régulation de l'énergie est réputé donné à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de sa saisine.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa du II de cet article, remplacer le mot :
entreprises
par le mot :
services
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous rejetons la désintégration préconisée, l'ouverture à la concurrence, la dérive marchande, la marchandisation du service public de l'énergie.
L'amendement n° 298 tend à faire état, dans l'avant-dernier alinéa de l'article 4, des « services » gestionnaires plutôt que des « entreprises ».
Ce n'est pas une banalité, car, opter pour la notion de service, c'est rappeler clairement l'objectif d'intérêt général de toute activité relevant du secteur énergétique.
M. le président. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du II de cet article, remplacer le mot :
fixe
par le mot :
prévoit
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du premier alinéa du III de cet article :
L'application de ce code fait l'objet d'un rapport annuel établi et rendu public par chaque gestionnaire qui l'adresse à la Commission de régulation de l'énergie.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après les mots :
ou de gaz
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du III de cet article :
et propose, en tant que de besoin, au gestionnaire concerné des mesures propres à garantir cette indépendance.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un autre amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que ceux qu'elle a elle-même déposés?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'article 4, et plus particulièrement son premier alinéa, prévoit très précisément l'indépendance des sociétés de transport par rapport aux activités de production et de fourniture. Nous sommes ici au coeur de la transposition de la directive et, étant favorables à la directive, nous sommes défavorables à ces deux amendements de suppression.
L'amendement n° 166, défendu par M. Reiner, s'inscrit dans la même logique que l'amendement n° 163. La commission émet donc le même avis défavorable sur l'amendement n° 166.
Je demanderais le retrait de l'amendement n° 107 rectifié bis, et ce pour deux raisons principales.
En premier lieu, cet amendement est, me semble-t-il, satisfait par le premier alinéa de l'article 4, qui dispose très clairement que les GRT d'électricité ou de gaz exploitent, entretiennent et développent ces réseaux indépendamment des activités de production.
En second lieu, s'il était adopté, cet amendement reviendrait finalement à instaurer une sorte de contrôle a priori à l'encontre du transporteur. Or le mécanisme mis en place tend au contraire à instituer un contrôle a posteriori de la part du régulateur.
En d'autres termes, s'il y a dysfonctionnement, c'est au régulateur de le signaler. En trois ans, cela s'est très bien passé : le transporteur n'a pas rencontré de gros problèmes et, si je puis dire, il n'a pas triché. A aucun moment, la CRE n'a été amenée à sanctionner ou à exprimer des réticences sur la manière dont le transporteur exerçait sa mission. Il n'est donc pas nécessaire d'instaurer un contrôle a priori.
Il y a une raison supplémentaire de ne pas adopter cet amendement : si nous adoptons l'amendement de M. Valade, celui de la commission des finances, qui a la préférence de la commission des affaires économiques, n'aura plus d'objet, l'un et l'autre étant incompatibles.
C'est pourquoi je demande à ses auteurs de bien vouloir retirer l'amendement n°107 rectifié bis.
L'amendement n° 296 contrevient à l'idée d'une séparation juridique entre le transport et les autres activités. L'avis de la commission est donc défavorable.
En commission, nous avions émis quelques réserves sur l'amendement n° 91 de M. Marini ; mais l'amendement n° 91 rectifié suscite un avis favorable.
L'amendement n° 295 vise à faire en sorte que les résolutions les plus importantes intéressant la vie économique des GRT ne puissent être adoptées sans l'accord de l'Etat. La commission émet, bien sûr, un avis défavorable : cette disposition est complètement contraire au droit commun des sociétés.
Je tiens à donner quelques précisions sur l'amendement n° 167, défendu par M. Raoul.
Certes, tout bien public est inaliénable. Toutefois, cela ne signifie pas qu'un bien public ne puisse pas, à un moment ou à un autre, être cessible.
M. Daniel Reiner. Il faut le déclasser auparavant.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C'est en effet la procédure normale, et elle a été utilisée à plusieurs reprises dans le passé. Nous avons ainsi déclassé plusieurs monuments que nous souhaitions vendre, notamment des châteaux forts côtiers.
Je vous rappelle que le gouvernement de M. Jospin a usé de cette procédure pour faire cesser l'inaliénabilité de tout le réseau de transport de gaz, qui appartenait à l'Etat...
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... et qui a été vendu, d'une part, à Gaz de France, d'autre part, à GSO et enfin à CFM. C'était un bon choix et le gouvernement Jospin a eu raison de le faire.
Rendre aujourd'hui inaliénable un bien public tel que le réseau de transport me semble une erreur, puisqu'il suffit d'un déclassement pour le rendre cessible.
L'avis de la commission est donc défavorable sur l'amendement n° 167 ainsi que sur l'amendement n° 168, qui est quasi identique.
Madame Beaufils, puisque l'amendement n° 297 est de cohérence notamment avec l'amendement n° 296, ma position sera, elle aussi, cohérente, et l'avis de la commission, défavorable.
Quant à l'amendement n° 298, qui est contraire à la logique du projet de loi, il suscite les mêmes observations que les amendements nos 296 et 297, et le même avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 165 et 387 de suppression, qui sont purement et simplement contraires à la directive.
Je note que l'amendement n° 166 tend - encore - à la nationalisation de Total ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances. Quel acharnement !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Cela nous paraît hors de propos. Les pauvres, ils ne s'attendent pas à cela ! (Sourires.)
Quant à l'amendement n° 107 rectifié bis, monsieur Pintat, je suis, comme M. le rapporteur, plutôt favorable à son retrait. En effet, il nous paraît nécessaire de maintenir un contrôle des actionnaires notamment sur les garanties financières ou les engagements hors bilan. Or l'amendement fait l'impasse sur ces éléments.
Pour l'amendement n° 296, même punition, même motif : l'avis est défavorable !
L'amendement n° 91 rectifié tend à remplacer le mot « budget » par l'expression « plan financier annuel ». Je m'interroge, monsieur Marini, dans les éminentes fonctions qui sont les vôtres au sein de la commission des finances, dois-je dorénavant vous donner le titre de « rapporteur général du plan financier annuel » ? (Sourires.)
Vous avez repris les termes de la directive, j'en conviens, mais il s'agit d'un anglicisme, alors que le mot « budget » correspond à une notion de droit français rigoureuse et parfaitement connue. Je pensais que, de par vos fonctions de rapporteur général, cela vous serait apparu aussi évident qu'à moi.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances. C'est vrai pour l'Etat, mais ce n'est pas vrai pour une entreprise !
M. Daniel Reiner. Quel affrontement révélateur...
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Sur le plan comptable, cela correspond à quelque chose.
Je ne formule pas d'objection, mais cela m'a amusé que ce soit le rapporteur général du budget qui présente cet amendement. Je n'ai pas résisté à vous le faire observer, avec un petit peu de malice, mais beaucoup de sympathie, monsieur Marini.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances. Il faut bien s'amuser un peu ! (Nouveaux sourires.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 91 rectifié.
Concernant l'amendement n° 295, il serait curieux de voir l'Etat intervenir dans la gestion d'entreprises privées. Or il en existe dans le secteur gazier. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. Poniatowski vous a expliqué avec humour, mais non sans réalisme que l'amendement n° 167, s'il était adopté, constituerait un recul par rapport à la doctrine de Lionel Jospin ; nous serons là pour la défendre, car, dans ce domaine, Lionel Jospin a été plutôt progressiste.
M. Daniel Reiner. On lui dira !
M. Jean Chérioux. Nous ne sommes pas sectaires, nous !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'espère bien que vous le direz à Lionel Jospin : il pourra constater à cette occasion que tout ce qui vient de moi n'est pas nécessairement négatif !
M. Daniel Reiner. C'est un rôle de composition, monsieur le ministre, vous êtes un intermittent ! (Sourires.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Oui, c'est un rôle de composition, mais il faut bien savoir se prêter à l'exercice, surtout quand vous perdez la mémoire !
Le même raisonnement vaut pour l'amendement n° 168, évidemment.
Le Gouvernement, fidèle à sa jurisprudence, émet un avis défavorable sur les amendements nos 297 et 298.
Le Gouvernement est, par ailleurs, favorable à l'amendement n° 14, ainsi qu'aux amendements rédactionnels nos 15 et 16 et aux amendements nos 17 rectifié, 18 et 19
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, contre les amendements identiques nos 165 et 387.
M. Philippe Marini. Je tiens à intervenir contre cet amendement et à expliquer de nouveau, par la même occasion, mon vote en faveur de l'article 4.
Je considère, et c'est l'analyse de la commission des finances, que nous restons dans l'équilibre de pouvoirs issu de la loi du 10 février 2000. Il y a changement de structure juridique, mais il n'y a pas véritablement de changement en ce qui concerne l'autonomie de gestion du réseau et la neutralité dont il peut se prévaloir à l'égard de l'ensemble des utilisateurs.
Au demeurant, il est bien compréhensible que l'actionnaire majoritaire soit chargé du patrimoine et vérifie les engagements pris avec ses propres capitaux. Il est donc particulièrement opportun que cet actionnaire majoritaire puisse se prononcer sur les plans de financement, les tableaux d'emplois et de ressources, car le réseau va engager des investissements importants dont l'impact ne sera pas neutre dans les comptes consolidés du groupe EDF.
De ce point de vue, il est parfaitement légitime que, conformément au droit commun des sociétés, l'actionnaire majoritaire exerce toutes ses prérogatives dans le domaine patrimonial, y compris s'il s'agit d'accepter des garanties et des cautions, ou pour tous actes de disposition et tous actes par lesquels les contours du réseau viendraient à évoluer : acquisition de filiale, cession d'éléments d'actifs, que sais-je encore.
En conséquence, et toujours en application des mêmes principes, il paraît parfaitement logique que l'on traite différemment la présidence de l'organe délibératif. J'aurais tendance à souhaiter, pour la clarté des responsabilités - mais c'est un point de vue personnel - qu'il y ait un conseil de surveillance et un directoire, que le président du conseil de surveillance émane ainsi des actionnaires et qu'EDF majoritaire exerce toutes ses prérogatives en assemblée générale pour la désignation de ce mandataire social.
Par ailleurs, au niveau de l'organe exécutif, qui me semblerait très opportunément pouvoir être un directoire, le président du directoire serait nommé avec la participation de l'Etat, ce qui renforcerait sa position et lui permettrait réellement d'être le « patron » opérationnel d'un réseau susceptible d'être considéré comme parfaitement neutre et en règle avec les directives communautaires.
Donc, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est bien dans le cadre de cette interprétation de la commission des finances que je me situe pour réaffirmer mon soutien au dispositif du Gouvernement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 165 et 387.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 206 :
Nombre de votants | 311 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 156 |
Pour l'adoption | 113 |
Contre | 198 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 166.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Pintat, l'amendement n° 107 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Xavier Pintat. Je le retire, monsieur le président. Il a néanmoins donné lieu à un débat fort intéressant et nous prenons acte avec satisfaction des explications de M. le rapporteur et de M. le ministre.
M. le président. L'amendement n° 107 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 296.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote sur l'amendement n° 168.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement du groupe socialiste m'amène à interroger M. le ministre.
Du fait de l'aliénation des ouvrages des réseaux publics, on peut imaginer que, demain, des pylônes seront cédés. Or les pylônes ouvrent droit à la perception d'une taxe confortable par les collectivités locales, taxe qui fait beaucoup de bien aux modestes budgets des élus que nous sommes...
Je voudrais donc savoir si, malgré la cession des pylônes, les collectivités locales concernées pourront continuer à bénéficier du produit de cette taxe.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il faut laisser une certaine souplesse de gestion aux entreprises, car les réseaux évoluent. Certains d'entre eux doivent, par exemple, être transformés en réseaux de plus grande intensité et ne passent plus nécessairement aux mêmes endroits. L'ancien pylône peut alors être aliéné et un nouveau pylône installé sur un site différent.
Pourquoi alourdir les procédures ? La situation est déjà suffisamment complexe.
Je veux vous citer un exemple qui, en prenant mes fonctions au ministère de l'industrie, m'a permis de mesurer combien ces affaires étaient délicates : la France paie à l'Espagne une indemnité annuelle substantielle parce qu'elle n'a pas encore honoré son engagement de fournir à son voisin un certain niveau d'électricité, bien qu'elle en ait la capacité. C'est que nous n'arrivons tout simplement pas à placer les pylônes où il le faudrait. Cela nous coûte cher !
Ce n'est donc pas le moment d'accroître les rigidités.
M. André Lejeune. Ce n'est pas la question !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Pour le reste, il est parfaitement légitime que des redevances soient payées aux communes qui supportent sur leur territoire la présence de ces pylônes : ils constituent pour elles une vraie contrainte.
Mme Marie-France Beaufils. C'est pour cette raison qu'il y avait une indemnité !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. C'est tout à fait légitime, mais sans rapport avec le caractère rigide du régime juridique que vous proposez.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Que le pylône appartienne à EDF ou, demain, à RTE, la taxe que perçoivent les collectivités locales sera maintenue. Il n'y a aucune raison qu'elle soit supprimée par ce transfert !
M. André Lejeune. Voilà une réponse digne de ce nom !
M. Bernard Piras. Au moins, c'est clair !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. M. le rapporteur est très affirmatif, mais j'aimerais que M. le ministre le soit tout autant. Même si M. le rapporteur participe comme nous tous au vote du budget et peut donc au même titre que n'importe lequel d'entre nous modifier un certain nombre de textes, son engagement n'a pas pour autant la même portée que celui d'un représentant du Gouvernement. Je souhaiterais donc obtenir de plus amples précisions.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'ai voulu dire, et j'espérais avoir été compris, qu'il peut être nécessaire de déplacer des pylônes. Quand tel ou tel pylône ne sera plus sur le territoire de votre commune, madame la sénatrice, vous ne percevrez évidemment plus la taxe correspondante ! Il faut qu'EDF, ou RTE, puisse déplacer le pylône.
Mme Evelyne Didier. Ce n'est pas la question !
M. André Lejeune. Vous ne répondez pas à la question posée !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. C'est la réponse à la question soulevée par l'amendement, dans lequel il n'est nullement fait référence à la taxe !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C'est vrai !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je veux bien vous répondre au sujet de la taxe, mais ce n'était pas l'objet de l'amendement. Je vous confirme donc, en substance, les propos de M. le rapporteur : le texte qui vous est soumis ne prévoyant pas l'abrogation de cette taxe, je ne vois pas comment celle-ci disparaîtrait !
M. Gérard Le Cam. On verra !
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 4
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 66 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
L'amendement n° 216 est déposé par MM. Besson, Raoult et Sergent.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'avant dernière phrase de l'article 6 de la loi n° 83675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, après les mots : « des représentants de l'Etat » sont insérés les mots : « et, dans la limite d'un maximum de deux membres, des personnalités qualifiées ».
La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter l'amendement n° 66.
M. Xavier Pintat. Il vous est proposé, par cet amendement, de modifier la loi du 26 juillet 1983 pour permettre la désignation de personnalités qualifiées dans les conseils d'administration de toutes les sociétés du secteur public.
Il s'agit, en fait, de pérenniser la présence de ces personnalités qualifiées qui siégeaient au sein des conseils d'administration d'EDF et de GDF. Il est prévu, par la loi précitée, deux personnalités qualifiées au-delà de 90 % de capitaux publics.
M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour présenter l'amendement n° 216.
M. Michel Sergent. Compte tenu des missions de service public qui seront conférées aux gestionnaires des réseaux, il est indispensable de bénéficier de la présence de personnalités qualifiées, garantes de l'intérêt général, au sein des conseils d'administration.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Ces amendements posent deux problèmes.
Tout d'abord, ils tendent à modifier l'article 6 de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. Ils débordent de très loin le sort d'EDF et de GDF, en conséquence de quoi la disposition proposée pourrait s'appliquer à toutes les autres entreprises, ...
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... qu'il s'agisse de la Banque de France, de GIAT Industries ou encore de La Française des jeux.
Par ailleurs, les auteurs des amendements souhaitent que, demain, des représentants de la Fédération nationale des collectivités concédantes et des régies, la FNCCR, siègent au sein du conseil d'administration du transporteur. Cela pose également un problème.
Ce conseil d'administration est composé de dix-huit personnes, soit six représentants des salariés, six représentants de l'Etat et six représentants de l'actionnaire, EDF.
Même si l'on augmentait le nombre des membres du conseil d'administration, cela continuerait de poser problème. Souvenez-vous, mes chers collègues, des dispositions prises temporairement pour Air France, et sur lesquelles nous étions revenus, avant la privatisation de la compagnie aérienne.
Si deux personnalités qualifiées supplémentaires devaient être nommées au sein du conseil d'administration, au détriment de qui cette nomination aurait-elle lieu, notamment dans l'hypothèse où le capital de la société serait ouvert à un autre acteur public ?
M. Daniel Reiner. Par exemple ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Par exemple, la Caisse des dépôts et consignations ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Mais ce n'est que pure imagination de ma part, mes chers collègues...
M. Bernard Piras. Nous en reparlerons tout à l'heure !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. On ne touchera pas à la représentation des salariés ; cela se fera donc soit au détriment de l'Etat, soit au détriment de l'actionnaire.
Or, en droit français, pour qu'une société mère puisse consolider dans son propre bilan les actifs inscrits au bilan de sa filiale, il faut qu'elle détienne la majorité des sièges au sein du conseil d'administration de cette filiale, ce qui pourrait ne plus être le cas si l'on minorait à l'excès la représentation de l'Etat.
Si, demain, mes chers collègues, vous retiriez du bilan d'EDF l'ensemble des actifs du transporteur, vous mettriez EDF dans une situation très grave.
C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis réservé sur ces deux amendements identiques, amendements que je demande à MM. Pintat et Sergent de bien vouloir retirer.
Néanmoins, chers collègues, vous pourriez peut-être vous tourner vers M. le ministre : à l'avenir, l'un des représentants de l'Etat pourrait être - pourquoi pas ? -, une personnalité choisie au sein de la FNCCR, par exemple, sans que cela soit pour autant, comme vous le suggérez, une obligation.
L'autre solution, puisqu'il est possible que le capital de RTE s'ouvre à des acteurs publics, ...
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... serait que la FNCCR, acteur public, achète 1 %, 2 % ou 3 % du capital, voire plus. A partir de ce moment, automatiquement, elle serait représentée au sein du conseil d'administration.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. M. le rapporteur a bien posé le problème. Je veux néanmoins ajouter deux observations.
Premièrement, ce n'est pas à l'occasion de la discussion de ce projet de loi qu'il convient de modifier la loi relative à la démocratisation du secteur public. Une telle entreprise mérite un vrai travail de réflexion et ne doit pas être conduite incidemment.
Deuxièmement, une telle mesure ne s'appliquerait pas à EDF-GDF dans la mesure où, tout du moins au départ, EDF détiendra 100 % du capital de RTE. L'Etat n'aura donc pas de représentant, en tant que tel, au sein du conseil d'administration.
M. le président. Monsieur Pintat, l'amendement n° 66 est-il maintenu ?
M. Xavier Pintat. Cet amendement concerne non pas le capital de RTE, mais la participation de personnalités qualifiées au sein du conseil d'administration de GDF et d'EDF, même s'il est vrai que le même raisonnement vaudra, plus tard, pour RTE !
Le souci des collectivités n'est pas tellement d'être actionnaires d'EDF ou de GDF - elles seraient alors à la fois juge et partie. Elles sont simplement très attachées aux missions de service public et souhaitent, par leur présence, s'assurer que la logique commerciale ne l'emporte pas sur le souci de l'intérêt général.
Par ailleurs, la qualité de l'électricité fournie à nos concitoyens dépend, je tiens à le rappeler, non pas de la qualité de la production, mais de celle du réseau de transport et de distribution. En s'assurant une représentation au sein des conseils d'administration, les collectivités peuvent veiller au bon entretien du patrimoine, car leur crainte, exprimée d'ailleurs de façon récurrente, est que la logique commerciale ne prévale, au détriment de l'entretien des réseaux.
Notre pays accuse, notamment par rapport à l'Allemagne, un certain retard en matière d'enfouissement, M. le rapporteur l'a parfaitement pris en compte. Effectivement, comme il le souligne, le fait d'avoir instauré des seuils de qualité pour l'approvisionnement en énergie doit nous permettre d'y remédier.
Je prends acte de la position de M. le ministre, et je ne m'opposerai pas à la volonté gouvernementale. Pour autant, je souhaite que l'on réfléchisse un peu plus sur les préoccupations exprimées par les collectivités.
M. le président. L'amendement n° 66 est retiré.
Monsieur Sergent, l'amendement n° 216 est-il maintenu ?
M. Michel Sergent. Je comprends la gêne de mon collègue Xavier Pintat, en cet instant, lui qui est président de la FNCCR et auteur d'un amendement identique au nôtre.
Nous connaissons tous ici, au Sénat, le rôle que joue depuis des années le FNCCR en tant que représentant de l'ensemble des collectivités. Je reprends à mon compte toutes les explications que vient de verser au débat notre collègue, notamment sur l'importance d'une présence, ne serait-ce que symbolique, de représentants des collectivités au sein des conseils d'administration. Deux représentants sur dix-huit, cela ne modifiera pas la majorité au sein de ces conseils !
M. Xavier Pintat pouvait sans doute difficilement refuser de retirer son amendement. En ce qui me concerne, je maintiens le mien, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 216.
Mme Marie-France Beaufils. Les explications de M. Pintat me laissent à penser que sa conception du statut public d'EDF et de GDF est véritablement proche de la nôtre.
M. Pintat souhaite que ces deux sociétés ne s'engagent pas dans des démarches trop mercantiles et que le souci de l'intérêt général préside à leurs réflexions et à leurs choix.
Seule la préservation du statut public de ces sociétés peut nous permettre d'avoir plus de poids sur leurs décisions.
Tout en conservant le statut public de ces sociétés, faisons en sorte, mes chers collègues, d'assurer la représentation des collectivités territoriales au sein des conseils d'administration de ces entreprises publiques, afin qu'elles expriment clairement et nettement leurs attentes. Un tel cumul de dispositions nous permettra d'atteindre encore plus d'efficacité.
Cette proposition, bien entendu, dépasse l'objet de cet amendement, mais, à mon sens, c'est vers de telles mesures qu'il nous faudrait tendre. Telle est ma conception de l'entreprise publique, entreprise dont la démocratisation doit également passer par une meilleure représentation de ceux qui en sont partenaires, afin de mieux répondre à leurs attentes.
Les collectivités territoriales sont des partenaires à part entière pour les entreprises publiques, même si, pour le moment, elles ne sont pas véritablement reconnus comme telles.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
L'amendement n° 169, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La mission de fourniture d'électricité consiste à assurer sur l'ensemble du territoire la fourniture électrique à toute collectivité locale au moyen de la péréquation géographique national des tarifs.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Cet amendement tend à assurer à l'ensemble des collectivités, quelle que soit leur taille et quelle que soit leur localisation, le bénéfice du tarif régulé pour la fourniture d'électricité.
Cette disposition est importante pour les collectivités locales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission partage tout à fait votre préoccupation, monsieur Piras. Néanmoins, cet amendement est satisfait par les articles 2 et 4 de la loi du 10 février 2000, consacrés exclusivement à ce problème tarifaire.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. On nous répond à chaque fois que des lois précédentes apportent une réponse au problème que nous soulevons. (Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Parfaitement !
Mme Marie-France Beaufils. Certes, mais elles n'ont peut-être pas non plus toutes les vertus ! Il faut rester raisonnable et considérer que des améliorations sont toujours possibles ! (Exclamations amusées sur les mêmes travées.)
M. Daniel Reiner. C'est exact !
Mme Marie-France Beaufils. Depuis hier, nous avons pu constater précisément qu'un certain nombre de dispositions contenues dans ce projet de loi remettent en cause des lois précédentes.
Par conséquent, il nous faut bien nous assurer, en adoptant des amendements, de la pérennité des mesures que nous souhaitons faire vivre.
C'est la raison pour laquelle le groupe CRC votera cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 169.
(L'amendement n'est pas adopté.)
CHAPITRE II
Le gestionnaire du réseau de transport d'électricité
Article 5
Une société, dont le capital est détenu en totalité par Electricité de France, l'Etat ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public, est le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité défini à l'article 12 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée.
Cette société est régie, sauf dispositions législatives contraires, par les lois applicables aux sociétés anonymes. Elle est soumise à la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. Pour l'application de l'article 6 de cette loi, le conseil d'administration ou de surveillance comporte un tiers de représentants des salariés et l'Etat nomme, par décret, des représentants dans la limite d'un tiers de ses membres.
Le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, ainsi que le directeur général ou le président du directoire de la société mentionnée au premier alinéa du présent article sont nommés, après accord du ministre chargé de l'énergie, par le conseil d'administration ou le conseil de surveillance.
Un décret fixe les statuts initiaux de la société. Ils entrent en vigueur à la date de publication dudit décret au Journal officiel, leurs modifications ultérieures pouvant intervenir selon les conditions prévues par le code de commerce pour les sociétés anonymes.
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.
Mme Odette Terrade. La vague de privatisations qui déferle sur l'Europe trouve sa justification dans la crise que traverse le capitalisme sur le plan mondial depuis les années soixante-dix.
La nécessité d'accroître les profits, dans une période de ralentissement de l'accumulation capitaliste, a poussé les gouvernements et les technocrates à abandonner les recettes néo-keynésiennes, pour former des projets plus conformes aux règles libérales.
Le démantèlement de l'Etat social dans les divers pays de l'est de l'Europe, la transformation des services publics en secteurs soumis aux marchés et celle des consommateurs en clients, a permis - et permettra - une réduction ultérieure de la redistribution des profits : cela répond à la nécessité d'ouvrir aux investissements des entreprises de nouveaux secteurs qui étaient auparavant couverts par l'intervention de l'Etat.
Le fer de lance de ce processus en Europe a été la Grande-Bretagne, qui, en 1979, a initié une politique néo-conservatrice de vente du patrimoine public et de privatisation des organismes et des services publics - transports, postes, énergie, alimentation en eau, télécommunications -, politique qui eut de graves incidences sur les possibilités d'accès aux services, ainsi que sur les conditions de vie et de travail des salariés.
Le reste de l'Europe s'est aligné sur cette orientation dans les années quatre-vingt-dix. La politique progressive de privatisation s'est accompagnée un peu partout d'une campagne idéologique massive fondée sur le dénigrement des services et des organismes publics - inefficacité, retards, moindre qualité, coûts élevés -, sur la glorification des vertus du libre marché et de la libre concurrence ainsi que sur la dramatisation de la situation des comptes publics des Etats, nécessitant une réduction draconienne des dépenses publiques.
La nécessité d'assainir la dette publique a été utilisée comme excuse pour brader le patrimoine public, alors que, sur le plan fiscal, rien n'a été fait pour frapper les revenus des grandes entreprises ; au contraire, on a mis en oeuvre des politiques d'incitations fiscales et de dégrèvements au bénéfice des ces entreprises-là, comme en Allemagne et en Italie, politiques qui ont contribué à aggraver la dette publique.
Exception faite de la Grande-Bretagne, la première vague des privatisations des années quatre-vingt-dix a essentiellement touché les secteurs des télécommunications, des postes et des services publics à l'échelon local.
Aujourd'hui, en conformité avec l'Accord général sur le commerce des services, on assiste à une nouvelle vague massive de privatisations concernant cette fois les secteurs des transports, de l'eau, de l'enseignement public et de la santé.
En France, on le constate avec ce texte, le Gouvernement travaille à la privatisation d'EDF et de GDF, que Total et Suez - liés aux fonds de pensions américains - ont déjà proposé de racheter. Ces dernières années, les secteurs soumis à la privatisation ont été ceux de la santé, de la poste, des services locaux et des télécommunications.
En Allemagne, la distribution de l'eau est en vente ; en juin 1999, la SARL Acqua, une filiale du trust allemand RWE, la Compagnie générale des eaux, qui appartient à Vivendi, et la SARL Allianz Capital Partner ont acquis 49,9 % de l'alimentation en eau de Berlin.
Un processus de privatisation est d'ailleurs actuellement appliqué à l'ensemble des hôpitaux du Land de Hambourg, qui est l'un des plus importants organismes hospitaliers d'Europe.
Les privatisations, contrairement aux belles déclarations sur les vertus de la libre concurrence, ont favorisé, dans toute l'Europe, la formation d'oligopoles, comme le démontrent le secteur des télécommunications et le trust français Vivendi.
On ne doit cependant pas commettre l'erreur de penser que la privatisation d'un service entraîne immédiatement l'augmentation des tarifs pour les consommateurs et une dégradation de son accès ; il n'est pas rare que, dans des secteurs privatisés, on observe initialement une baisse des tarifs visant à l'établissement d'une tranche de marché. Ce n'est qu'à moyen terme que l'on pourra évaluer en connaissance de cause les effets réels des privatisations sur l'accès et la diffusion des services.
Un autre raisonnement peut en revanche être tenu sur la dégradation des conditions de travail et de vie des travailleuses et des travailleurs, dans la mesure où les privatisations ont généralement conduit, jusqu'à présent, à des réductions d'effectifs, à l'introduction de la précarité, à la dégradation des conditions contractuelles, à l'augmentation de la flexibilité.
La libéralisation des services entraînerait l'érosion définitive des droits fondamentaux acquis par des décennies de luttes - de la santé à l'instruction, du travail à la liberté d'information et à l'eau -, le démantèlement définitif de l'Etat social et, en général, d'un espace public et collectif dans lequel on puisse se reconnaître en tant que citoyen.
Vous l'aurez compris, chers collègues, à l'inverse de la casse des services publics que vous nous proposez, nous nous positionnons en faveur de leur modernisation, de leur transformation et en faveur de formes nouvelles et participatives pour leur gestion.
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 170 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 389 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Piras, pour présenter l'amendement n° 170.
M. Bernard Piras. Cet amendement ne surprendra personne dans cette assemblée. Il est en cohérence avec la philosophie qui est la nôtre depuis le début de la discussion.
Nous voulons nous opposer à la transformation en société anonyme du gestionnaire du réseau de transport de l'électricité. Nous maintenons que l'efficacité économique et technique du système électrique français réside dans son intégration et dans le maintien d'une présence très forte de l'Etat. Ce système a su, l'été dernier, montrer son efficacité.
La séparation juridique du transport conduira à la poursuite d'objectifs d'entreprises qui, à terme, seront divergents : l'intérêt financier d'EDF - producteur, fournisseur et trader -, devenue société anonyme, sera de faire monter les prix de l'électricité en maintenant la tension entre l'offre et la demande ; l'intérêt du réseau de transport, lui aussi devenu société anonyme, sera de disposer de capacités de surproduction afin d'assurer la continuité de l'approvisionnement.
Dès lors, comment gérer ces intérêts contradictoires, alors qu'il n'y aura plus d'arbitre pour trancher ? La place de l'Etat sera en effet réduite à la portion congrue, avec pas plus d'un tiers des membres du conseil d'administration.
Il n'y a qu'une solution : rémunérer la disponibilité de la production au prix fort ! Voilà qui ne sert pas la compétitivité du système électrique ni celle des entreprises en général, puisque ce dispositif conduit à renchérir le coût de l'électricité.
Vous me rétorquerez que de tels dysfonctionnements existent déjà aujourd'hui. Peut-être, mais les enjeux ne sont pas financiers : la rémunération des actionnaires n'entre pas encore en ligne de compte ! Nous vous reposons la question, monsieur le ministre : qui seront ces actionnaires ?
M. André Lejeune. Il a raison, nous voulons savoir !
M. Bernard Piras. Nous savons que le RTE fait des envieux. M. le rapporteur nous en a parlé tout à l'heure en faisant allusion à la Caisse des dépôts et consignations. C'est, en effet, une activité rentable, régulée, qui pourra rapporter des bénéfices. Nous souhaitons savoir où iront les dividendes !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 389.
Mme Marie-France Beaufils. Vous le savez, depuis le début de cette discussion, nous souhaitons le maintien d'une entreprise publique intégrée et le développement d'une Europe énergétique définie sur cette base. Cette position serait tout à fait solidaire avec nos voisins, qu'ils soient Autrichiens, Danois, Espagnols, Italiens, Suédois, Suisses ou Portugais, qui ont tous été touchés, dans des proportions différentes, par des coupures de courant.
Les dirigeants politiques, qui ont fait le choix qui nous est proposé ce soir, tout en donnant l'impression de ne pas vouloir en assumer la responsabilité, prétendent l'avoir fait au nom de l'intégration européenne, autrement dit au nom de la mise en place d'un espace énergétique intérieur unique. Pour eux, il s'agirait de renforcer les interconnexions entre les Etats membres.
Cependant, s'il s'était agi uniquement de jeter les bases d'un espace énergétique intégré, on n'aurait sans doute pas procédé à une harmonisation européenne fondée sur la multiplication des attaques contre le statut public des acteurs économiques et sur leur désintégration.
Quelle était la situation en Europe au moment où a été adoptée la directive 96/92 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité ? Elle se présentait différemment selon le critère considéré.
Du point de vue du degré d'intégration verticale et horizontale, un seul pays ne disposait pas de structures appropriées : il s'agissait du Luxembourg, avec ses 400 000 habitants et sa superficie de 2 000 kilomètres carrés.
Du point de vue des statuts patrimoniaux des entreprises, une grande majorité de pays avaient fait le choix de la propriété publique, nationale ou locale.
N'était-il pas plus facile d'inciter nos voisins luxembourgeois à modifier leurs structures, de manière souple et progressive, plutôt que de pousser tous les autres pays membres à changer ? On se demande quel dogme a pu présider à des décisions aussi peu rationnelles !
Les bases d'une coopération industrielle existaient, mais il a été décidé de tout démolir pour tout reconstruire, sans se soucier de savoir si le dispositif mis à bas pourrait être remplacé avantageusement et, a fortiori, sans apporter la preuve que celui qui le remplacerait serait efficace et cohérent.
L'Europe n'a pas de pétrole et son gaz va bientôt être épuisé. La Russie, l'Algérie, l'Iran, le Moyen-Orient et les nouvelles républiques d'Asie centrale disposent des ressources qui peuvent constituer ses bases d'approvisionnement. Pour les garantir, l'Europe ne peut s'en remettre pieds et poings liés aux seules compagnies pétrolières anglo-américaines et à leurs alliées, comme l'ont bien montré chacune des crises pétrolières.
L'Europe a besoin d'acteurs énergétiques forts et indépendants de ces firmes pétrolières ; elle a besoin de firmes électriques et gazières de grande dimension et de grande expérience énergétique industrielle, capables de financer et de construire les très grandes infrastructures énergétiques nécessaires : champs de production, gazoducs et oléoducs de plusieurs milliers de kilomètres.
L'Allemagne vient de se doter, avec la constitution de la firme EON-Ruhrgas, qui réunit le numéro un de l'électricité et le numéro un du gaz, d'un atout fondamental pour assurer sa sécurité d'approvisionnement. Et elle a bénéficié de l'appui des pouvoirs publics ! A-t-elle également subi un rappel à l'ordre de la part de la Commission européenne ? Encore un sujet d'investigation qui nous montrerait peut-être que la question de la subsidiarité doit être à nouveau posée pour notre pays.
Avec EDF et GDF, la France peut constituer un pôle public français équivalent, agissant de plain-pied en coopération avec cette nouvelle firme allemande, donnant ainsi à l'Europe des capacités multipliées.
EDF comme GDF peuvent se développer avec leur statut actuel ; ces entreprises peuvent passer des alliances industrielles et disposer de moyens financiers supérieurs à ceux qu'elles pourraient obtenir en cas d'ouverture de leur capital, en bourse ou au profit d'autres partenaires.
Aujourd'hui, EDF et GDF se développent plus rapidement à l'étranger que toutes les firmes comparables ; il s'agit de mieux contrôler leur développement et de mettre en cause une politique d'acquisition à coups de milliards dans des opérations qui ne correspond pas toutes, loin s'en faut, à leur mission d'intérêt général.
Quelques voix isolées de personnalités étrangères en Europe se sont élevées, ici et là, ces derniers temps, pour réclamer la privatisation d'EDF au motif que son statut public ne devrait pas lui permettre d'acquérir des électriciens à l'étranger. Il s'agit de prises de position de libéraux qui visent à faire disparaître toutes les entreprises à statut public, mais qui ne peuvent en obtenir la privatisation, car aucun traité européen n'interdit le développement des entreprises publiques à l'étranger.
En matière de réciprocité, l'ouverture à la concurrence de la fourniture d'électricité et de gaz non domestiques permet aux firmes étrangères d'intervenir en France et de se développer si elles sont compétitives ; ce sont les règles européennes, et ces règles ne concernent pas le statut des entreprises. Ainsi, aucune firme électrique allemande ne peut être acquise en bourse par un opérateur quelconque, fût-il public ou privé.
Par ailleurs, il est notable qu'aucun argument en faveur de ces privatisations ne relève de l'intérêt des consommateurs, en ce qui concerne tant les prix que l'amélioration du service public. A cet égard, la réussite d'EDF et de GDF est sans doute tellement évidente et reconnue par rapport aux firmes privées équivalentes que personne ne se risque à la mettre en doute.
Personne ne met non plus en avant l'intérêt du personnel pour justifier ces privatisations.
Aucune raison sérieuse n'est donc avancée pour justifier ces privatisations : ni l'intérêt du développement des entreprises, ni les besoins financiers de l'Etat, ni l'intérêt des usagers, ni celui du personnel. C'est pourquoi, en cohérence avec nos précédents amendements, nous vous proposons de supprimer cet article.
M. le président. L'amendement n° 212, présenté par M. Plancade, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Un établissement public à caractère industriel et commercial est le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité défini à l'article 12 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 précitée.
Il est administré par un conseil de dix-huit membres nommés pour cinq ans par un décret pris sur le rapport du ministre de l'énergie, comprenant des représentant de l'Etat, des représentants des collectivités territoriales et notamment des syndicats d'électricité, des personnalités qualifiées, des représentants des salariés.
La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. En proposant la création d'un EPIC, cet amendement vise à assurer l'indépendance réelle du gestionnaire du réseau de transport. Je dis bien « indépendance » et non cette « autonomie que l'on nous propose aujourd'hui, mais qui existait déjà - et elle a très bien fonctionné -depuis la loi de 2000.
En effet, la garantie réelle de l'ouverture à la concurrence demeure l'indépendance totale. A cet égard, on voit bien le débat qui se déroule au sein de la majorité. J'ai entendu tout à l'heure M. Marini parler d'attribuer un statut particulier aux dirigeants. M. Xavier Pintat a même déposé un amendement -j'étais pratiquement prêt à le voter -, estimant qu'EDF ne devait pas donner des ordres tous les jours et qu'il fallait assurer l'autonomie du gestionnaire.
Mes chers collègues, il faut aller jusqu'au bout de vos intentions : c'est l'indépendance qui assure la réalité de la mise en concurrence.
Si nous proposons un EPIC, c'est parce que nous considérons que la propriété et l'investissement doivent rester publics. C'est le plus important. La volonté publique s'exprimera par le biais d'un cahier des charges qui définira les conditions d'exploitation, de transport et de solidarité vis-à-vis des personnes les plus pauvres et des territoires les plus éloignés.
Depuis deux jours, on ne cesse d'entendre que le prix augmente. C'est bien entendu lié aux conditions de production, ce qui justifie encore plus la mise en concurrence. Encore faut-il que cette concurrence soit réelle, totale et sérieuse et qu'elle puisse normalement et véritablement s'exercer. Et c'est bien le rôle de l'Etat et du service public d'y veiller.
C'est la raison pour laquelle je propose qu'un EPIC soit le gardien de la propriété publique. Totalement indépendant, puisqu'il ne sera pas une filiale d'EDF, il donnera aux collectivités locales, à l'Etat et aux particuliers toutes les chances de payer au meilleur prix l'énergie dont ils ont besoin.
M. le président. L'amendement n° 300 rectifié, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa de cet article, après les mots :
secteur public
insérer les mots :
et dont le capital est à 100 % public
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Par l'article 5, il est proposé que la société gestionnaire du réseau de transport d'électricité soit détenue en totalité par EDF, l'Etat ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public.
Pour être alléchante, cette rédaction n'en ouvre pas moins, derrière les apparences, la voie à la privatisation.
Dès le changement de statut d'EDF, le réseau de transport d'électricité deviendra sa filiale. Cela signifie qu'avec l'arrivée de capitaux privés dans EDF sa filiale sera mécaniquement soumise au souci de rentabilité de l'actionnariat privé.
Qu'adviendra-t-il alors de la fameuse neutralité du transporteur ? Des intérêts privés étrangers peuvent se trouver en position de mettre la main sur notre réseau de transport. Qu'est-ce qui s'y oppose ?
L'opération pourrait même se faire sans que le Parlement ait besoin de légiférer sur le statut du transporteur, ce qui nous paraît difficilement acceptable.
On n'a pas imaginé jusqu'à présent meilleur garant de la neutralité que l'Etat républicain, soucieux de l'intérêt public. Ladite neutralité est nécessaire pour un gestionnaire de réseaux de transport qui souhaite mettre ses services à la disposition de différents partenaires en toute impartialité.
Or la privatisation - même partielle - d'EDF permettra à un actionnaire privé d'avoir un droit de regard sur les activités de la filiale chargée du transport, droit de regard qui ne pourra que s'élargir avec l'extension progressive de l'ouverture du capital de la maison mère, EDF.
En outre, il n'est pas acceptable non plus que l'Etat soit mis sur le même plan que des entreprises ou des organismes appartenant au secteur public, car il est, lui, l'expression même de la puissance publique.
Au contraire, le capital d'un organisme ou d'une entreprise du secteur public n'appartient pas forcément en totalité à l'Etat. Le capital public pourrait même y devenir minoritaire, après des prises de participations dans le transport d'électricité.
Dès lors, par le jeu cumulé des différentes participations et en fonction de leur poids relatif, la composition du capital du gestionnaire du réseau de transport d'électricité pourrait passer sous le contrôle d'un actionnariat privé, éventuellement étranger, avant même qu'EDF ne soit complètement privatisée.
Avec la privatisation du transporteur, c'est le principe de neutralité -le législateur avait pourtant prétendu vouloir le défendre - qui disparaît. Est-ce là vraiment ce que vous souhaitez ?
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
de représentants des salariés
remplacer la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa de cet article par les dispositions suivantes :
et un tiers de représentants de l'Etat. Les représentants de l'Etat sont nommés par décret
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. La rédaction de l'article 5 ouvre la voie à une lecture minimaliste de la présence de l'Etat, puisqu'il prévoit que l'Etat peut nommer ses représentants par décret, dans la limite d'un tiers des membres du conseil d'administration ou de surveillance.
Pourtant, il nous paraît évident que l'Etat doit être représenté dans le conseil d'administration ou de surveillance d'une entreprise supposée conserver une mission de service public.
Si l'Etat a droit à un tiers des membres du conseil d'administration ou de surveillance, il faut que ces représentants soient effectivement nommés. Mais la loi ne saurait lui donner la possibilité de nommer moins de membres que ceux auxquels il a droit, sauf à imaginer que le texte anticipe en réalité de nouveaux reculs de la puissance publique que ce projet de loi de privatisation partielle laisse deviner.
On peut penser que ce texte voit déjà plus loin que la présente étape. Il démasque votre volonté de privatiser à terme complètement l'entreprise, monsieur le ministre. Si tel n'était pas le cas, pourquoi laisser à l'Etat la latitude de ne pas nommer tous ses représentants ? Lorsque, de majoritaire, le capital public deviendra minoritaire, la société anonyme ne sera plus soumise à la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du service public.
L'Etat, grâce à cette faculté donnée par le dernier alinéa de cet article, pourra réduire sa représentation au sein du conseil d'administration ou de surveillance sans même devoir attendre une adaptation de la loi.
Le gestionnaire du réseau de transport d'électricité sera passé d'un statut public à un statut privé et le législateur n'aura pas besoin d'y revenir.
La représentation nationale sera donc dépossédée de ses prérogatives, de sa capacité à dire ce qui doit relever de l'intérêt général et demeurer sous le contrôle de la puissance publique.
Cette rédaction est dangereuse parce qu'elle prépare la privatisation complète d'EDF et de ses filiales, le temps de préparer l'opinion à cette prochaine étape. Pire encore, elle dépouille les parlementaires de leur rôle en la matière.
Il faut qu'EDF, avec toutes ses filiales, ait au minimum la garantie de rester dans le périmètre du secteur public pour pouvoir exercer avec efficacité, et sous la vigilance attentive du législateur, sa mission d'intérêt général au service de tous.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 5, à la présentation de l'amendement n° 213.
L'amendement n° 213, présenté par M. Raoul, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du deuxième alinéa de cet article, après les mots :
des représentants
insérer les mots :
dont des représentants des collectivités territoriales
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Cet amendement s'inscrit dans le droit-fil des amendements qui ont été défendus tout à l'heure par MM. Pintat et Besson.
Il me semble d'ailleurs que leurs amendements auraient eu une efficacité plus grande dans le cadre du conseil d'administration du GRT, afin d'améliorer les relations entre les syndicats d'électricité, les collectivités et le gestionnaire des réseaux de transport.
M. le président. L'amendement n° 109 rectifié bis, présenté par M. Valade, Mme Brisepierre, MM. Cazalet, César, Hérisson, Lanier, Mouly et Pintat, est ainsi libellé :
A la fin du deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
dans la limite
par les mots :
à hauteur
La parole est à M. Xavier Pintat.
M. Xavier Pintat. Cet amendement permet de s'assurer que les représentants de l'Etat seront suffisamment nombreux pour veiller au respect des missions d'intérêt général de RTE.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 67 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
L'amendement n° 217 est présenté par MM. Besson, Raoult et Sergent.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter le deuxième alinéa de cet article par les mots :
et des personnalités qualifiées dans la limite d'un maximum de deux membres ».
La parole est à M. Xavier Pintat, pour défendre l'amendement n° 67.
M. Xavier Pintat. Dans le même esprit que la disposition additionnelle après l'article 4 votée tout à l'heure, cet amendement tend à appliquer le principe de la désignation et du maintien des personnalités qualifiées dans le conseil d'administration de RTE.
Je souhaite insister sur ce principe de désignation, monsieur le ministre !
M. Xavier Pintat. Il s'agit de donner à l'Etat la possibilité de désigner au maximum deux personnalités qualifiées. L'Etat jugera de l'opportunité des nominations, puisqu'elles se feront par décret.
La disposition que prévoit cet amendement me paraît particulièrement souhaitable dans le domaine du transport. La distribution repose, en effet, sur l'activité de transport dont elle est, en quelque sorte, le client. La qualité à la fois du transport et de la distribution, à laquelle les collectivités territoriales sont très attachées, conditionne la qualité de l'électricité qui est fournie au consommateur.
M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour présenter l'amendement n° 217.
M. Michel Sergent. Je n'ai rien à ajouter à ce que vient de dire M. Pintat.
C'est un amendement de cohérence avec l'amendement qui a été adopté tout à l'heure par le Sénat, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4. Cette disposition présente encore plus d'intérêt à l'article 5, où la mention des personnalités qualifiées, dans la limite maximum de deux, a tout à fait sa place.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de l'avant-dernier alinéa de cet article :
Le directeur général...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Par cet amendement, la commission tente de répondre à une difficulté qui est due au statut du transporteur. Ce dernier est une filiale d'EDF, conformément à l'objectif du présent texte.
Cependant, dans le droit français, on ne peut retirer à la maison mère tous ses droits. Le futur transporteur ne pourra pas être une société dont la maison mère ne détiendra plus aucun pouvoir d'actionnaire principal, alors même qu'elle possédera, au départ, 100 % du capital et, à terme, encore 80 ou 70 %.
Selon la rédaction retenue par l'Assemblée nationale, l'actionnaire ne désignerait plus le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, ni le directeur.
Certes, l'objectif que se sont fixé nos collègues de l'Assemblée nationale, et auquel je souscris, procède de leur volonté de rendre le transporteur indépendant.
Mais il est impossible de lui donner de l'indépendance et, en même temps, un statut qui priverait l'actionnaire principal, ou unique, de tout pouvoir d'actionnaire.
C'est pourquoi la commission propose, d'une part, de permettre à l'actionnaire principal de conserver au moins une prérogative importante - la désignation du président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance -, d'autre part, de conforter le futur transporteur en lui garantissant une certaine indépendance et en prévoyant que le directeur général soit désigné après avis du ministre de tutelle.
Certes, la solution à mi-chemin qui est proposée n'est pas tout à fait satisfaisante. Mais comment pourrait-elle l'être devant deux exigences également importantes, à savoir le respect du droit des sociétés et la garantie d'une indépendance ?
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission vous propose cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du dernier alinéa de cet article :
Un décret approuve les statuts de la société.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel suivant lequel le décret doit être approuvé, et non pas fixé, de manière à laisser au conseil d'administration du transporteur un pouvoir important, notamment en termes de rédaction.
M. le président. L'amendement n° 78, présenté par M. Revol, est ainsi libellé :
Remplacer la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article par deux phrases ainsi rédigées :
Ils sont pris sur proposition de l'assemblée générale, publiés au Journal officiel et entrent en vigueur à la date de l'apport mentionné à l'article 7. Leurs modifications interviennent selon les conditions prévues par le code de commerce pour les sociétés anonymes.
La parole est à M. Henri Revol.
M. Henri Revol. La garantie supplémentaire de neutralité qu'offre l'approbation des statuts de cette filiale d'EDF par décret ne doit pas conduire à confier leur rédaction à l'Etat. Il est donc souhaitable de lever toute ambiguïté en précisant que l'approbation intervient sur une proposition de l'organe social compétent pour adopter les statuts, à savoir l'assemblée générale extraordinaire. C'est d'ailleurs cette même assemblée générale qui en adoptera ultérieurement les modifications.
Par ailleurs, l'entrée en vigueur des statuts doit être concomitante à l'apport du réseau public de transport, qui marque la transformation du service gestionnaire du réseau de transport en société.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
à la date de publication dudit décret au Journal officiel
par les mots :
à la date de l'apport mentionné à l'article 7
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement a pour objet de fixer l'entrée en vigueur des statuts à la date de réalisation de l'apport d'actifs au lieu de faire référence à la date de publication du décret. Il importe, en effet, de tenir compte du laps de temps qui peut s'écouler entre les deux dates.
M. le président. L'amendement n° 299 rectifié, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
Le personnel de la société gestionnaire du réseau public de transport d'électricité bénéficie des mêmes dispositions de gestion du personnel - statut, règles internes à Electricité de France-Gaz de France, accords Electricité de France-Gaz de France - que le personnel d'Electricité de France et Gaz de France.
La direction du personnel, service commun à Electricité de France, Gaz de France, la société gestionnaire du transport électricité et la société gestionnaire du transport de gaz, issue de Gaz de France, gère pour l'ensemble des quatre sociétés les règles et les accords communs.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à compléter l'article 5 par deux alinéas.
Il tend à préserver un statut et un traitement commun entre le personnel restant à EDF et GDF et celui des nouvelles filiales de transport.
La direction du personnel est un service commun de ces deux entreprises et doit le demeurer.
EDF et GDF ont une direction commune du personnel et une direction unique de la distribution, EDF-GDF Services. Ce service comprend 65 000 agents gaziers et électriciens et dispose de 102 centres sur le territoire national.
Ce service commun a en charge, tant pour l'électricité que pour le gaz, les activités de commercialisation des énergies aux usagers raccordés aux réseaux de distribution, les interventions techniques auprès de la clientèle, la gestion des réseaux, le développement et l'optimisation des réseaux, les relations avec les collectivités concédantes et locales.
Toutes ces activités couvertes par EDF-GDF Services ont contribué avec le temps à forger des pratiques professionnelles et une culture communes, au plus grand bénéfice des usagers et du service public.
Aujourd'hui, ce personnel demande de continuer à avoir un statut commun et une direction commune. On ne peut pas, légitimement, mettre en concurrence et inciter à s'opposer dans leurs métiers respectifs des agents qui se connaissent, se respectent et travaillent ensemble depuis des années. C'est ce qui se produirait si, par le jeu de l'intérêt particulier des filiales, les agents en venaient à abandonner une conception forte de l'intérêt public pour l'intérêt étroit et mercantile de leur nouvel employeur.
Ce n'est pas parce que les entreprises seront dotées d'un statut juridique différent que les personnels devront exercer leur métier dans des cadres professionnels et statutaires différents.
Il n'y a qu'un service public, il n'y en a pas deux. C'est à ce titre que les agents doivent travailler en cohérence où qu'ils se trouvent. Si l'on défend le service public, on ne peut laisser les personnels se mener une guerre commerciale au prétexte qu'ils occupent des secteurs différents à la suite du tronçonnage qui a été opéré.
Il faut sauver ce patrimoine précieux d'une culture professionnelle commune, qui a été patiemment construit pendant six décennies.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos170 et 389, ce qui ne surprendra pas dans la mesure où la suppression de l'article 5 portant création d'une société gestionnnaire du réseau de transport public est totalement contraire à la directive que nous voulons transposer.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 212. Cela dit, monsieur Plancade, le principe que vous prônez de rendre la filiale la plus indépendante possible à travers la création d'un EPIC est un bon principe. Toutefois, ce n'est pas là le choix qui a été retenu dans le présent texte, pour deux raisons.
Tout d'abord, en créant un EPIC, vous maintenez l'adossement à l'Etat, ce qui laisse entier le problème de la garantie, qui a été soulevé par la Commission à Bruxelles.
Ensuite, et c'est un inconvénient encore plus lourd, vous supprimez l'entreprise intégrée qu'est EDF, ce qui me paraît aller à l'encontre du souhait de l'ensemble des salariés de l'entreprise et des syndicats.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n °300 rectifié, qui est contraire à la directive.
Viennent ensuite plusieurs amendements relatifs à la composition du conseil d'administration, dont nous avons longuement débattu tout à l'heure
S'agissant de l'amendement n° 301, suivant lequel un tiers des membres du conseil d'administration doit être réservé à des représentants de l'Etat, je dirai que, si nous allons au delà d'un certain pourcentage, nous mettons EDF en difficulté pour les raisons comptables que je vous ai exposées tout à l'heure.
Dès lors, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements nos 301, 213, 109 rectifié bis, 67 et 217.
L'amendement n° 78 de M. Revol apporte une précision utile et montre le souhait de se rapprocher, dans la mesure du possible, du droit commun des sociétés. Pour cette raison, la commission émet un avis favorable.
S'agissant de l'amendement n° 299 rectifié, je rappelle que le statut des agents de la branche des industries électriques et gazières, les IEG, est totalement garanti à toutes les personnes du domaine électrique, que ce soit les transporteurs, les filiales ou encore les entrants et il n'est absolument pas question de le remettre en cause. Votre amendement est donc satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression nos 170 et 389, parce qu'ils sont contraires à la directive.
Il est défavorable à l'amendement n° 212, parce qu'il fait réapparaître l'EPIC avec tous ses inconvénients.
M. Daniel Reiner. Il n'est pas contraire à la directive !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Si, il est contraire à la directive car l'EPIC serait adossé à l'Etat. C'est l'interprétation du Gouvernement, il a le droit d'en avoir une ! Il a essayé de vous la faire partager en expliquant qu'il se fondait non pas sur les déclarations des uns et des autres mais sur la décision du 16 décembre 2003 que j'ai lue à la tribune du Sénat.
M. Bernard Piras. Nous ne sommes pas convaincus.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Bref, c'est mon opinion et je la partage. (Sourires.)
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n°300 rectifié, qui est contraire à la directive, ainsi qu'aux amendements nos 301 et 213 pour les raisons données par M. Poniatowski.
Monsieur Pintat, j'aurais aimé que vous retiriez vos amendements nos 109 rectifié bis et 67 pour les raisons indiquées précédemment. Je sais bien que le Gouvernement a été battu à l'article 4, mais il espère bien ne pas l'être à l'article 5 !
M. Daniel Raoul. Qui sait !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Et comme vous aviez eu l'amabilité de retirer les deux amendements symétriques de l'article 4, je vous demande de faire de même à l'article 5, étant entendu que je ne compte pas sur M. Sergent pour retirer son amendement n°17.
Je forme l'espoir que, cette fois-ci, le Gouvernement ne sera pas battu !
M. Bernard Piras. L'espoir fait vivre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Heureusement !
Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 20 et 21 de M. Poniatowski, ainsi qu'à l'amendement n°78 de M. Revol.
Je me pose la question de savoir si les amendements nos 78 et 22 sont compatibles.
M. le président. Si l'amendement n° 78 est adopté, l'amendement n° 22 n'aura plus d'objet.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Parfaitement.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement donne donc un avis favorable à l'amendement n° 78. Toutefois, si ce dernier n'était pas adopté, le Gouvernement serait favorable à l'amendement n° 22.
Quant à l'amendement n° 299 rectifié, je confirme qu'effectivement les personnels bénéficient de plein droit du statut des IEG. En ce qui concerne les dispositions spécifiques à EDF, et je m'adresse particulièrement à Mmes Beaufils et Terrade, il est souhaitable qu'elles s'appliquent à EDF Transport de la même manière qu'à la maison mère, j'en conviens volontiers. Mais cela relève de la négociation sociale dans l'entreprise et non pas de la loi. Par conséquent, je donne un avis défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 170 et 389.
Mme Marie-France Beaufils. L'article 5 fonde la constitution de ce gestionnaire de réseau de transport d'électricité. Quelle sera la composition de son capital ? On nous dit que son capital sera détenu en totalité par EDF, par l'Etat ou par d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public. Quels seront ces organismes ? Il a été fait état de la Caisse des dépôts et consignations. D'autres organismes ont-ils été envisagés ? Pour l'instant, la composition du capital de cette future société n'a pas été clairement explicitée. Si demain EDF voit son capital ouvert à 30% et que des évolutions se font, comme dans toute société dont le capital a été ouvert, il se peut que le capital ne soit pas public à 100%. C'est la question posée dans un autre amendement que vous avez rejeté tout à l'heure.
Avant de passer au vote, j'aurais souhaité, monsieur le ministre, que vous nous disiez plus clairement comment vous envisagez la constitution du capital de la société gestionnaire du réseau de transport électrique.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Une société publique, c'est une société dont le capital est détenu à plus de 50% par l'Etat ou par une personne publique. En l'occurrence, si 70% du capital de EDF est détenu par l'Etat, elle reste une société publique, peu importe qu'il y ait des intérêts privés. Cette société publique, dans laquelle l'Etat peut faire prévaloir en tant qu'actionnaire les intérêts de la nation et de l'Etat, enverra au conseil d'administration d'EDF Transport des représentants de la société publique qui seront porteurs des intérêts de l'Etat. Par conséquent, l'existence d'intérêts privés dans la société EDF dans laquelle l'Etat est majoritaire ne porte pas atteinte à son statut juridique. Ce dernier est déterminé par le pourcentage du capital détenu par l'Etat. Si ce pourcentage est de 70% ou même de 51% seulement, EDF reste une société publique.
Elle est donc porteuse, via l'Etat actionnaire, des intérêts de l'Etat et de la nation. Par conséquent, elle veille à ce que sa filiale suive les intérêts dont elle-même est investie.
Mme Marie-France Beaufils. Quels seront les autres partenaires ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le fait de dire que EDF Transport doit être une société publique à 100% implique que tous les autres actionnaires du capital d'EDF Transport devront être des sociétés dans lesquelles l'Etat détiendra au minimum 51% du capital. Cela pourra même être l'Etat directement, la Caisse des dépôts et consignations ou d'autres sociétés encore, la seule contrainte demeurant que chaque actionnaire soit dominé par l'Etat.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote.
M. Bernard Piras. Ce n'est pas une explication de vote. J'accède aux explications données par M. le ministre sur le fond. Mais j'aimerais connaître les intentions du Gouvernement. Le rapporteur a fait allusion tout à l'heure à la Caisse des dépôts et consignations. J'attends des précisions de votre part, monsieur le ministre. Ou alors il ne fallait pas que M. le rapporteur fasse d'allusions.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il n'y a aucune orientation à l'heure actuelle. Nous avons dit que nous faisions une commission qui allait déterminer les besoins de financement. C'est au vu de la détermination de ces besoins de financement éventuels, probables, que nous pourrons envisager un tour de table. En l'état actuel des choses, on ne sait pas encore quels sont les capitaux qu'il faudra apporter. L'Etat a annoncé qu'il mettrait 500 millions d'euros, mais il est possible que cela ne suffise pas. L'Etat dispose de nombreuses possibilités pour satisfaire à l'obligation posée par la loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je ne connais les intentions ni de l'Etat, ni de l'actionnaire principal que sera demain EDF. Je prenais simplement la Caisse des dépôts et consignations à titre d'exemple.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 170 et 389.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 207 :
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 157 |
Pour l'adoption | 114 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, pour explication de vote sur l'amendement n° 212.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, j'ai bien écouté vos réponses, qui ne me satisfont pas vraiment.
Monsieur le rapporteur, vous me dites que vous êtes pour la séparation. Moi aussi, je suis pour la séparation, non pas celle...
M. Bernard Frimat. De l'Eglise et de l'Etat !
M. Jean-Pierre Plancade. ... qui date de 1905. Elle est déjà faite, nous n'allons donc pas la refaire ! (Sourires.)
Comme disait ma grand-mère, à chacun son métier et les vaches seront bien gardées ; je crois qu'elle avait raison.
Aujourd'hui, je propose que l'on sépare les deux sociétés parce que, selon moi, l'indépendance est la garantie d'une mise en concurrence réelle et sérieuse.
Vous m'expliquez, monsieur le rapporteur, que les salariés sont contre. Mais le socialiste que je suis répondra à tous les sénateurs que ce ne sont pas les salariés d'une entreprise qui font les lois, c'est le Parlement de la République.
M. Jean Chérioux. C'est une parole dont nous saurons nous servir ! Elle est tellement rare sur vos travées qu'elle mérite d'être soulignée !
M. Jean-Pierre Plancade. Je cherche à comprendre.
On me dit que le gestionnaire du réseau sera indépendant. Certes, mais le conseil d'administration sera composé d'une filiale d'EDF. Je suis contre parce que je suis pour la séparation, afin de mieux garantir l'exercice de la libre concurrence.
Je comprends ce que vous faites, monsieur le ministre. C'est votre opinion, mais je ne la partage pas.
Vous indiquez, par ailleurs, que telle est l'interprétation du Gouvernement. Je ne sais pas si le fait de dire que c'est la filiale qui dirigera l'établissement peut nous rassurer dans la mesure où le texte prévoit que ce sont les administrateurs qui définiront le plan de financement et le plan d'investissement.
M. Jean-Pierre Plancade. Peu importe ! Si c'est un EPIC, l'autonomie sera totalement respectée, et il s'agira non plus d'autonomie, mais d'indépendance.
Nous n'avons donc pas le même avis, monsieur le ministre. Cela dit, c'est votre projet de loi !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Le débat qu'engage notre collègue Jean-Pierre Plancade me semble important. Je suis favorable à une entreprise intégrée. Je le dis d'autant plus facilement que, dans un récent passé, quelques exemples ont montré que, si nous n'avions eu pas une entreprise intégrée, je ne sais pas comment auraient été résolus les problèmes.
Après la grande tempête de 1999, sans cette entreprise intégrée, je ne sais pas comment on aurait pu réparer l'ensemble du réseau et rétablir si vite l'électricité dans les hôpitaux, les foyers logements pour personnes âgées, les crèches, entre autres. En termes de service public, c'est bien cette entreprise intégrée qui peut apporter une réponse de qualité.
Le statut d'établissement public nous prémunirait, certes, contre des actionnaires qui exigeraient une rentabilité de leur capital, mais cela ne résoudra pas le problème pour autant.
Je regrette d'être obligée de constater cette réalité, mais Réseau ferré de France nous donne quelques exemples des difficultés qu'il rencontre.
RFF est détaché de la SNCF, et on exige aujourd'hui de lui qu'il équilibre mieux son budget. Ainsi, il fait payer à la SNCF des droits de passage sur le réseau, ce qui va la contraindre à ne plus desservir certains secteurs.
Si la proposition qui nous est soumise vise à éviter la création d'une société anonyme, elle ne résout pas le problème de l'entreprise intégrée. En la matière, il s'agit d'un vrai sujet de fond.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 301.
Mme Annie David. Je voudrais m'assurer que M. le rapporteur a bien compris la portée de cet amendement, car sa réponse ne le prouve pas.
Il a parlé d'un pourcentage supérieur alors que, conformément au texte, nous demandons que le conseil d'administration ou de surveillance comporte un tiers de représentants de l'Etat, nommés par décret.
Habituellement, vous en conviendrez, monsieur le ministre, nous ne sommes pas favorables aux décrets. En la matière, nous acceptons que les membres soient nommés par décret dans la mesure où un tiers des représentants de l'Etat siègent au conseil d'administration.
J'ai présenté cet amendement rapidement avant la suspension de séance et M. le rapporteur n'a peut-être pas compris mon explication.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J'avais bien compris que cet amendement comportait deux éléments, madame David. Je n'ai pas évoqué, il est vrai, le second élément, à savoir que les représentants de l'Etat sont nommés par décret. Mais la commission est toujours défavorable à cet amendement, chère collègue.
Mme Annie David. Tant pis ! J'ai essayé !
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 213.
M. Daniel Raoul. J'aimerais savoir ce que signifie exactement l'expression « personnes qualifiées » dans l'amendement de MM. Pintat et Sergent. Quels membres siégeront au conseil d'administration ? Si j'ai une explication, je retirerai l'amendement n° 213 au profit du leur.
M. le président. L'amendement n° 109 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Pintat ?
M. Xavier Pintat. Sensible aux arguments de M. le ministre, je le retire bien volontiers, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 109 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Xavier Pintat, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 67 et 217.
M. Xavier Pintat. Malgré le désir que j'ai de vous être agréable, monsieur le ministre, malgré l'écoute dont vous faites preuve à l'égard des collectivités et la volonté que vous avez d'adopter un projet équilibré, il me semble incohérent de voter un principe à l'article 5, qui serait contraire à l'article 4.
Plusieurs sénateurs socialistes. Eh oui !
M. Xavier Pintat. Quant aux personnes qualifiées, ce sont des représentants des collectivités locales désignés par décret.
M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour explication de vote.
M. Michel Sergent. Le Sénat a adopté tout à l'heure un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 4. Il y a encore plus de raison, à l'article 5, d'adopter le même amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Rassurez-moi, monsieur le président, suis-je bien au Sénat, avec des sénateurs, représentants de la nation et non d'un groupe particulier ?
M. Daniel Reiner. Et aussi des collectivités !
M. le président. Le Sénat, unanime, pourrait vous le confirmer, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 67 et 217.
M. Bernard Piras. Je regrette, monsieur Pintat, que vous ayez retiré l'amendement n° 109 rectifié bis parce que nous aurions voté en sa faveur.
Il vise, en effet, à renforcer la présence de l'Etat au sein du conseil d'administration. Cette disposition était, à nos yeux, importante.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 67 et 217.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 208 :
Nombre de votants | 305 |
Nombre de suffrages exprimés | 305 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 153 |
Pour l'adoption | 107 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote sur l'amendement no 20.
M. Bernard Piras. Nous voterons bien entendu contre cet amendement. Puisque seul le directeur général sera nommé après accord du ministre chargé de l'énergie et que le président ne le sera plus, le futur RTE sera donc encore plus sous la coupe des intérêts des actionnaires.
Le RTE est le coeur du service public. Il faut que son président soit nommé par le conseil d'administration après accord du ministre.
Cet amendement tend à banaliser le RTE pour en faire une société anonyme comme les autres.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je vous ferai simplement remarquer, mes chers collègues, qu'il faudrait choisir entre l'amendement de M. Revol et l'amendement de M. Poniatowski, entre l'indépendance et le contrôle, et qu'en fait une solution bien plus simple consistait à appliquer purement et simplement la directive, sans monter une véritable usine à gaz, d'autant que, de plus, vous vous prenez les pieds dans le tapis !
Franchement, j'ai du mal à comprendre vos raisonnements.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote sur l'amendement no 21.
M. Bernard Piras. Ce n'est pas à l'assemblée générale de fixer les statuts. Ils doivent l'être par décret, comme le prévoit le texte initial, car l'Etat est garant de l'intérêt général.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 22 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 299 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
Les statuts de la société mentionnée à l'article 5 peuvent également l'habiliter à exercer les missions suivantes :
- la gestion directe, en France, d'autres réseaux d'électricité ;
- la gestion indirecte, par des participations ou des filiales, en France ou dans les Etats membres de la Communauté européenne ou de l'Association européenne de libre-échange, de réseaux d'électricité ou de gaz.
Les réseaux mentionnés ci-dessus peuvent en outre faire l'objet d'activités de valorisation par l'intermédiaire de filiales ou de participations. Ces activités de valorisation doivent rester accessoires par rapport à l'activité de gestion de réseaux et ne peuvent en recevoir de concours financiers.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 390, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet article définit les autres missions que la société créée à l'article 5 pour gérer le RTE pourra accomplir. Au lieu d'intituler cet article « missions de la société gestionnaire du RTE », on aurait pu l'intituler : « filialisation et désintégration des activités d'électricité » !
J'observe que, sur cet article, peu d'amendements ont été déposés. Urgence oblige, on se prépare déjà à voter des articles conformes sur un texte qui aurait mérité un large débat.
La filialisation nous mène évidemment tout droit vers la privatisation en multipliant les centres de décision, en rendant plus flous les liens entre les sociétés qui peuvent elles-mêmes multiplier les prises de participations. Si cet article a pour objet de définir le périmètre des missions du gestionnaire du réseau de transport d'électricité, cette définition est particulièrement large et ambiguë. Le problème est que cette ambiguïté peut sembler volontaire et qu'une loi volontairement ambiguë est forcément suspecte.
Ainsi, le deuxième alinéa évoque la possibilité, pour le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité, de gérer d'autres réseaux d'électricité en France. Qu'est-ce que cela signifie ? Quels sont ces autres réseaux qui ne seraient pas, dès l'origine, compris dans son périmètre de gestion ?
Vous voulez, en réalité, favoriser l'extension du .gestionnaire de réseau à l'international au détriment des .missions de service public sur le territoire national.
Le troisième alinéa ouvre à l'entreprise la possibilité de s'étendre, par des filiales ou des participations, dans les États membres de la Communauté européenne.
On a de bonnes raisons de penser que les missions de service public ne pèseront pas lourd face à la tentation de l'expansion à l'étranger.
Pourrait-on en vouloir à ses dirigeants, de surcroît intéressés aux résultats de l'entreprise et pris dans le mouvement de la course à taille critique, de pousser l'entreprise vers de objectifs en contradiction complète avec les exigences du service public ? On le pourrait d'autant moins que le politique ne prend pas ses responsabilités en matière de programme industriel national. Quant à l'Europe, la volonté de politique de coopération en matière industrielle est réduite comme peau de chagrin.
Le dernier alinéa, lui, est particulièrement douteux. Il permet à l'entreprise « des activités de valorisation par l'intermédiaire de filiales ou de participations ».
Autant dire que nous entrons là dans une logique financière qui n'a plus rien à voir avec le service public : un tel langage rend compte que nous sommes là en pleine financiarisation de l'activité, pour ne pas employer le terme de « boursicotage », avant probablement de l'être dans les faits.
Si vous avez pris soin, dans la dernière phrase de l'article, de préciser que « ces activités de valorisation doivent rester accessoires par rapport à l'activité de gestion de réseaux », c'est, au fond, que vous sentiez bien les risques de dérapage auxquels pouvaient conduire ces dispositions !
En effet, pour le dire autrement, on autorise un peu de manipulation financière par le jeu des créations de filiales et des prises de participations, tout en précisant que les intérêts financiers ne devront pas prendre le dessus.
Enfin, cet article autorise expressément RTE à gérer des réseaux de gaz. On va donc se retrouver, après le démantèlement en règle d'EDF-GDF, avec un transporteur d'électricité qui pourra transporter du gaz, et un transporteur de gaz qui pourra transporter de l'électricité.
Il s'agit donc bien de mettre en concurrence les deux firmes plutôt que de favoriser les synergies et complémentarités à travers une fusion. Quel sera le sort des 66 000 agents en commun à EDF et à GDF ?
C'est précisément cette question que vous devriez enfin aborder, plutôt que de nier les conséquences dramatiques sur le plan social auxquelles conduit ce projet de loi !
Sur le plan industriel, ce sera également une catastrophe, car vous allez plomber les comptes de nos deux entreprises par le biais de dépenses que supposent les opérations de rachat ou d'alliance. Cela n'est rien d'autre qu'un gigantesque gâchis économique, une casse industrielle, au mépris d'une histoire industrielle et d'un partenariat de soixante ans entre un gazier et un électricien, qui était dans la logique des choses.
Tout militait, pourtant, en faveur d'un approfondissement de ce partenariat.
Ce n'est manifestement pas la voie que vous avez choisie. Cet article est tout à fait significatif de votre choix. C'est la raison pour laquelle nous en souhaitons la suppression. Par ailleurs, nous demandons un scrutin public.
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le deuxième alinéa de cet article par les mots :
à l'exclusion des réseaux de distributions
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous avons déjà insisté sur les risques évidents qui pèseront sur les services communs entre EDF et GDF, à savoir « EDF-GDF Services ».
Quand je dis cela, je pense, bien sûr, à la question des synergies commerciales que l'on va détruire, mais, surtout, au sort qui sera réservé aux 66 000 agents qui y travaillent.
Notre amendement répond à cette préoccupation et, en cela, il met aussi en lumière les menaces réelles qui pèsent sur ces services communs.
En supprimant l'expression « à l'exclusion des réseaux de distribution » - tel est l'objet de notre amendement - nous voulons éviter une concurrence entre RTE et « EDF-GDF Services » sur les activités de distribution.
On aura entendu tout et son contraire en ce qui concerne la fusion d'EDF et de GDF, ce qui révèle bien l'absence de ligne gouvernementale en matière de projet industriel.
Il est donc proposé, dans le deuxième alinéa de cet article, que les statuts de la société anonyme en charge du réseau de transport d'électricité lui permettent d'exercer la gestion directe d'autres réseaux d'électricité.
En clair, le Gouvernement invite RTE, une fois ce servicetransformé en société par ses soins, à exercer des activités dans le domaine de la distribution.
Par conséquent, le Gouvernement entend donner naissance à une nouvelle entreprise intégrée, sous la forme d'une société anonyme, en charge à la fois d'activités de transport et d'activités de distribution.
Par ce tour de passe-passe, le Gouvernement crée les conditions du développement d'un concurrent puissant dans le domaine des activités de distribution d'électricité exercées pour l'instant par « EDF-GDF Services » et les distributeurs non nationalisés.
On renforce, en réalité, le caractère de spécialité des deux entreprises, alors que les salariés partagent la même culture, celle du service public, qui a fait les preuves de son efficacité.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 302, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa de cet article, supprimer les mots :
en France ou
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l'amendement no 304. Ces deux amendements sont des amendements de repli par rapport à l'amendement no 390.
Avec le troisième alinéa de cet article du projet de loi, nous sommes en présence d'une véritable machine de guerre contre notre service public énergétique et les mécanismes de coopération industrielle patiemment élaborés depuis 1946 dans notre pays.
Cet alinéa dispose que les statuts de la société anonyme gestionnaire du réseau public de transport de l'électricité pourront l'habiliter à exercer « la gestion indirecte, par des participations ou filiales, en France ou dans les Etats membres de la Communauté européenne ou de l'Association européenne de libre-échange, de réseaux d'électricité ou de gaz. »
Il est aussi précisé que la société anonyme gestionnaire du réseau de transport pourra gérer de manière indirecte des réseaux de gaz. Il est évident que cela signifie la mise en concurrence de RTE et de Gaz de France.
On comprend bien les raisons pour lesquelles ce gouvernement confie aux deux directions d'EDF et de GDF le soin d'examiner l'opportunité de la fusion, alors que l'on sait qu'elles y ont toujours été hostiles. C'est qu'en réalité ce gouvernement ne veut pas de cette fusion ! Preuve en est le contenu de cet article, qui favorise la concurrence entre l'électricien et le gazier.
A cela s'ajoute le fait que la même société pourra gérer, toujours de manière indirecte, des réseaux d'électricité et de gaz.
Encore une fois, et comme à l'alinéa précédent, cette référence à la gestion de réseaux, sans plus de précision, laisse à penser que RTE pourrait exercer des activités de distribution.
En clair, la concurrence se ferait avec GDF au niveau du transport de gaz et avec « EDF-GDF Services » au niveau de la distribution de gaz et d'électricité.
Enfin, la gestion par RTE de ces missions sera indirecte. Elle passera par des participations ou des filiales. J'ai déjà eu l'occasion de dénoncer que ce serait la porte ouverte à la financiarisation des activités, ce qui, dans l'absolu, serait incompatible avec les exigences de missions de service public.
Une filiale, c'est une société dont RTE a le contrôle, en en détenant le capital à plus de 50 %.
Ce qui est essentiel, c'est que rien n'est dit sur le régime de propriété des éventuelles filiales de RTE ou encore sur le statut des sociétés dans lesquelles RTE prendra des parts.
Autrement dit, les filiales de RTE pourront à terme exercer des activités de distribution d'électricité et de gaz en France et à l'étranger, sans pour autant être astreintes aux obligations de service public auxquelles sont assujettis EDF et GDF aux termes de l'article 1er.
Ces filiales de la filiale RTE - car il s'agit bien d'ouvrir la voie à une filialisation en cascade - ne seront pas, si j'ai bien compris, liées à l'Etat par des contrats de service public. La question cruciale est donc de savoir qui en aura la propriété : à qui seront cédées les parts du capital et dans quelle mesure le seront-elles ? Combien de parts seront cédées aux investisseurs institutionnels, aux fonds de pension anglo-saxons, aux spéculateurs en chasse de hot money ?
C'est le grand flou : la rédaction de votre texte permet tout !
L'exposé des motifs du projet de loi précisait pourtant que, « compte tenu du caractère de service public national de l'exploitation du réseau public de transport d'électricité, la détention de la totalité du capital de la société gestionnaire du réseau public de transport par l'Etat ou par des entreprises ou organismes du secteur public est expressément garantie. » De qui se moque-t-on alors ?
Il a été démontré que la garantie concernant le capital de RTE est illusoire. Nous aurions aimé que l'exposé des motifs soit plus loquace en ce qui concerne la structure du capital des filiales de RTE. De notre point de vue, cela ne laisse présager rien de bon. A la lumière des prises de participations d'EDF en Amérique latine, on peut craindre que ces filiales ne se comportent en véritables prédateurs !
Ainsi, non seulement on désintègre EDF et GDF, mais on va encore plus loin en faisant en sorte que les filiales deviennent les concurrentes des maisons mères.
Nous ne pouvons cautionner une telle orientation. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que ces amendements de repli nos 302 et 304, qui éviteraient une telle dérive, soient adoptés.
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
A la fin de l'avant-dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
ou de gaz
par les mots :
à l'exclusion des réseaux de distribution
Cet amendement est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 390.
Vous avez clairement expliqué, madame Terrade, que vous étiez hostile à la création d'une filiale de transport ; vous proposez donc la suppression de cet article.
Nous sommes favorables à la création d'une filiale de transport ; nous souhaitons donc le maintien de cet article.
Dans votre présentation de l'amendement n° 303, madame Didier, vous avez dit vouloir éviter une concurrence absurde en RTE et EDF-GDF Services. Je vois mal comment RTE, qui sera, entre 80 % et 100 %, une filiale d'EDF, pourrait demain être en concurrence avec un service interne à EDF. (Mme Odette Terrade s'exclame.) Il n'y a pas de craintes à avoir à ce propos !
J'apporterai une rapide précision sur les amendements nos 303, 302 et 304. L'article 6 porte sur les statuts du gestionnaire du réseau d'électricité, RTE, qui, demain, sera EDF Transport. L'objectif est éventuellement d'interdire que cette entreprise ne se lance dans une activité qui n'aurait rien à voir, par exemple les télécommunications.
En revanche - et cela va à l'encontre des amendements nos 302 et 304 -, dès lors que des statuts précisent que ce transporteur est fidèle à sa vocation, à sa mission et à son métier, il peut avoir des filiales. Je prendrai un exemple très concret : le transporteur doit pouvoir, avec un distributeur non nationalisé, s'appuyer sur une filiale afin de détenir un réseau régional.
Ainsi, dans la région de Colmar, le transporteur a un rôle de distributeur à l'échelon local : c'est ce que nous appelons les boucles locales en matière de distribution d'électricité. Il ne faut surtout pas que, demain, il ne puisse plus exercer ce genre d'activités.
Etant favorables à cet article dans son intégralité, nous ne pouvons qu'être défavorables aux amendements nos 303, 302 et 304.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à ces quatre amendements, dont la philosophie est contraire à celle du projet de loi. La directive permet la gestion des réseaux de transport et de distribution ainsi qu'une organisation combinée des deux. Ce serait folie que de s'en priver !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Bien sûr !
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 390.
M. Daniel Raoul. Cet article est plein d'ambiguïtés et souligne, encore un peu plus, les difficultés que vous rencontrez avec ce projet de loi.
En effet, cet article permet au RTE de créer sans fin des filiales. Pour quoi faire ? Que signifie le fait que RTE peut assurer la gestion directe d'autres réseaux d'électricité ? S'agit-il de l'autoriser éventuellement à gérer le réseau de distribution des collectivités locales ? C'est une possibilité. Une concurrence avec EDF-GDF Services serait alors possible, ce qui est complètement absurde. Que signifie autoriser la valorisation du réseau, même de manière accessoire ? Quelles sont les activités réellement visées par ce texte ? Les courants porteurs en lignes, c'est-à-dire une activité de télécommunications, sont-ils concernés ?
Ce serait une entorse au principe de spécialisation qui aurait pu être imposé à RTE. Il s'agit en réalité de multiplier les sources de profits, mais également les sources de pertes.
M. le président. La parole est à M. Jean Pépin, pour explication de vote.
M. Jean Pépin. Il ne faut pas envisager avec un pessimisme systématique les propositions qui sont avancées.
Mme Odette Terrade. Ce n'est pas du pessimisme !
M. Daniel Raoul. Le pire n'est jamais sûr ! (Sourires.)
M. Jean Pépin. L'article 6 permet le développement de RTE, qui pourra avoir une activité de transport à l'étranger. Cette stratégie est intéressante, en particulier dans les pays de l'Union européenne.
EDF a depuis longtemps ouvert des filiales qui vendent de l'électricité dans le monde, en Europe en particulier. Or, si EDF production, qui est très peu évoquée, continue à se développer - il faut le souhaiter - il y aura des exportations qui rapporteront de l'argent à la France.
Les emplois, loin d'être menacés, seront au contraire confortés. Il faut pour cela appliquer le système tel qu'il est aujourd'hui proposé.
Plus particulièrement, je ne voudrais pas que les personnels d'EDF et de GDF puissent croire que, par la stratégie que nous proposons, nous leur voulions du mal. Au contraire, nous souhaitons qu'ils aient un avenir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 390.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 209 :
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 157 |
Pour l'adoption | 114 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement no 303.
Mme Marie-France Beaufils. Cette explication de vote vaut pour les amendements nos 303, 302 et 304. Vous ne nous avez pas, pour le moment, apporté de réponse sur la concurrence que pourrait déployer RTE. Par des filiales en effet, RTE pourrait intervenir dans des domaines qui appartiennent à la fois à EDF et à GDF.
Vos propos, monsieur Pépin, me confortent dans l'idée qu'EDF et GDF vont pouvoir se retrouver en concurrence avec les structures mises en place par RTE, par l'intermédiaire de la filialisation.
Mme Marie-France Beaufils. Cette façon de mettre en oeuvre une action par l'intermédiaire de RTE n'est pas du tout éclaircie dans le texte et risque d'affaiblir la position d'EDF et de GDF.
Nos amendements sont donc tout à fait fondés.
M. le président. La parole est à M. Jean Pépin, pour explication de vote.
M. Jean Pépin. EDF a une grande capacité de production. Il suffit de lui en donner l'autorisation.
GDF a une grande capacité de stockage. Certes, le gaz peut encore provenir de Lacq, de Parentis ou d'ailleurs, mais les ressources en gaz dans notre pays semblent épuisées. Gaz de France stocke du gaz pour l'importation et a la capacité de choisir le moment où elle revendra ce gaz, qu'elle l'ait stocké pour elle-même ou pour d'autres, s'ils le veulent. Par ailleurs, elle touchera un prix de location lorsqu'il s'agira de gaz dont elle n'est pas propriétaire.
C'est la raison pour laquelle vous trouvez, à juste titre sans doute, que j'ai fait un amalgame. C'est pour avoir voulu être bref ! Ces deux dossiers s'analysent différemment.
Il est vrai que, ensuite, il peut y avoir une apparente concurrence. C'est d'ailleurs ce que font les sociétés qui détiennent la marque et la contremarque, celle-ci valorisant la marque, et réciproquement.
Je prendrai l'exemple d'une société située dans mon département, à savoir le fabricant des meubles Roset et des meubles Cinna. Roset est la marque mère et Cinna la contremarque.
Mes propos n'engagent que moi. Il ne faut pas tout voir avec un pessimisme excessif, mais il n'est pas défendu d'être prudent.
M. le président. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article additionnel avant l'article 7
M. le président. L'amendement n° 171, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les ouvrages du réseau de transport d'électricité sont inaliénables.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. A plusieurs reprises, nous avons essayé de faire admettre que les ouvrages du réseau de transport d'électricité étaient inaliénables. A l'article 2, cette modification n'a pas été acceptée. Il nous paraît opportun de la proposer de nouveau avant l'examen de l'article 7, qui régit le transfert des ouvrages du réseau public de transport d'électricité à la nouvelle société qui sera gestionnaire de ce réseau de transport.
Electricité de France est d'ailleurs propriétaire depuis peu, en réalité depuis 1997, du réseau d'alimentation générale qui, auparavant, appartenait à l'Etat.
Je ne reprends par l'argumentation que j'ai développée précédemment. Mais, dans la chaîne de l'électricité, constituée par la production, le transport, la distribution, le maillon essentiel, qui est le coeur du service public, qui distribue l'électricité aussi bien en direction des professionnels que des usagers, c'est le réseau de transport. Je répète que ces ouvrages-là ne peuvent pas être vendus. Ils sont inaliénables.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission, qui avait exprimé un avis défavorable lors de l'examen des amendements nos 167 et 168, n'a pas changé d'opinion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je rends hommage, monsieur Reiner, à votre courage qui est malheureux parce que le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Je veux soutenir notre collègue M. Reiner...
Mme Marie-France Beaufils. ... parce qu'il a tout à fait raison de soulever cette question relative aux ouvrages du réseau de transport d'électricité. Comment assurer les missions de service public, un égal accès de tous à l'électricité si l'on ne laisse pas la propriété des transports d'électricité à l'entreprise publique EDF ?
Comment peut-on être cohérent si on vend cette partie du réseau de transport ?
A l'inverse de la commission et du Gouvernement, j'estime qu'il faut adopter cet amendement, faute de quoi les uns et les autres nous devrons peut-être faire face sur nos territoires à quelques déboires que nous devrons expliquer.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. Je veux formuler une remarque à propos de ces réseaux de transport. Je ne pense pas que, dans cet hémicycle, nombreux soient les sénatrices et les sénateurs prêts à accepter dans leur collectivité locale que les tuyaux du réseau de distribution d'eau potable appartiennent à Pierre, Paul ou Jacques. La même remarque vaut pour l'électricité. Or c'est ce que vous êtes en train de faire.
C'est scandaleux ! C'est le seul mot qui puisse caractériser ce projet de loi.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 171.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 7
A la date de création de la société mentionnée à l'article 5, Electricité de France lui transfère, par apport partiel d'actifs, les ouvrages du réseau public de transport d'électricité et les biens de toute nature dont elle est propriétaire liés à l'activité de transport d'électricité. Cet apport emporte transfert à la société mentionnée à l'article 5 des droits, autorisations, obligations dont Electricité de France est titulaire et des contrats conclus par celle-ci, quelle que soit leur nature, dès lors qu'ils sont liés à l'activité de gestionnaire du réseau public de transport d'électricité. Le transfert n'emporte aucune modification des contrats en cours d'exécution et n'est de nature à justifier ni la résiliation, ni la modification de l'une quelconque de leurs clauses ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en résultent.
Le bilan d'ouverture de la société mentionnée à l'article 5 est établi à partir du dernier compte séparé de l'activité de transport arrêté en application de l'article 25 de la loi n° 2000 - 108 du 10 février 2000 précitée dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente loi.
Les opérations mentionnées au présent article ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 391, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'article 7 définit les conditions de transfert des actifs du réseau de transport d'EDF à la nouvelle société créée à l'article 5.
Ce transfert vaut également pour les droits, autorisations, obligations et contrats dont EDF était jusqu'à maintenant titulaire.
Dans la continuité des amendements que nous avons défendus jusqu'à maintenant, nous sommes évidemment contre ce transfert de patrimoine. Nous souhaitons la suppression de cet article parce que nous rejetons la filialisation du réseau de transport.
Le risque est avéré de connaître les grandes pannes qu'ont éprouvées les Etats-Unis.
Nous sommes convaincus que la filialisation emporte avec elle une logique de profit à court terme. Or, il est vital, pour éviter les dysfonctionnements, de prévoir des investissements sur le long terme dont la rentabilité n'est absolument pas calculable dans l'immédiat.
Les retours sur investissement dans ce domaine sont lointains et se produiront au moins dans une dizaine d'années, selon les spécialistes d'EDF.
Les décisions concernant le réseau de transport d'électricité doivent être prises indépendamment des considérations de rentabilité immédiate, afin que la qualité du réseau puisse être maintenue.
La filialisation rompt précisément les cohérences et l'intégration d'EDF. Or, jusqu'à maintenant, dans une logique globale évaluant les besoins d'investissement et de maintenance, c'était l'EPIC qui avait à sa charge les lignes de transport de l'électricité sur l'ensemble du territoire.
Sur le plan économique, dans ce secteur énergétique où le coût des infrastructures est élevé, l'intégration aussi bien verticale qu'horizontale se justifie pleinement !
Intégrations horizontale et verticale vont de pair avec la théorie du monopole naturel selon laquelle il serait absurde de construire une seconde infrastructure à côté d'une première non encore saturée. Cela vaut tout aussi bien pour les lignes électriques ou les voies ferrées que pour les infrastructures routières.
C'est sur ces bases que la loi d'avril 1946 a été votée et que notre modèle a été bâti, a bien fonctionné et continue de le faire. Mais, depuis une vingtaine d'années, les économistes libéraux ont attaqué ce modèle. Son principal défaut est peut-être, à leurs yeux, de donner satisfaction à la population et aux entreprises.
On le sait, les économistes néoclassiques sont de savants théoriciens. Ils adorent les mathématiques et délaissent volontiers les sciences sociales et l'histoire, les leçons de l'histoire, pourrait-on dire !
La théorie des marchés contestables, qui s'est imposée dans les années quatre-vingt aux Etats-Unis et a été à l'origine de la casse des monopoles publics, tend à nous faire revenir au modèle de la fameuse concurrence pure et parfaite.
Dans une industrie de réseau - et, comme on l'a vu, le meilleur exemple est ici donné par EDF - cela conduit à découper la chaîne en tronçons avant et après le réseau pour y injecter de la concurrence. C'est la désintégration verticale.
Pour que la concurrence soit pure et parfaite, nous disent les savants, il faut forcer les acteurs présents à faire de la place à leurs concurrents, par vente forcée des actifs de production et des clientèles. C'est la désintégration horizontale.
Le modèle théorique qui nous est proposé doit donc remplacer avantageusement les échanges au sein de l'entreprise intégrée par des marchés. Le problème, c'est que ce nouveau modèle d'échange, supposé avoir tous les avantages, est virtuel tandis que le modèle fondé sur l'entreprise intégrée est bien réel et a démontré son efficacité.
L'histoire a montré que des gains importants sont obtenus par la maîtrise publique de la coordination de l'offre et de la demande d'électricité et non par le libre jeu de la loi du marché.
L'histoire a également montré que la mutualisation dans un réseau intégré réduit le besoin en investissements.
L'histoire a enfin montré que les choses sont plus difficiles à obtenir lorsque c'est la logique de la rentabilité immédiate qui domine.
Nous continuerons pendant tout le débat à mettre en évidence ces réalités, qui sont confortées d'ailleurs par ce qui s'est passé depuis quelques années dans plusieurs pays. Toutes ces raisons expliquent le dépôt de notre amendement de suppression qui s'oppose à la création de filiales de transport.
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de la première phrase du premier alinéa de cet article :
Electricité de France transfère à la société mentionnée à l'article 5, par apport...
L'amendement n° 24, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de la deuxième phrase du premier alinéa de cet article :
Cet apport, réalisé à la valeur nette comptable, emporte...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement n° 23 est un simple amendement de coordination avec l'amendement n° 24 que je vais exposer.
Aujourd'hui, le réseau de transport figure dans les comptes d'EDF à sa valeur comptable, c'est-à-dire la valeur brute moins les amortissements. La valeur au bilan est donc inférieure à la valeur réelle. En conséquence, si l'on transfère les biens à la valeur réelle, on va dégager une plus-value.
Or l'article 7 du projet de loi prévoit une exonération de tout impôt sur les plus-values. En revanche, il n'interdit pas à l'entreprise d'amortir la plus-value. De ce fait, si l'on réalise le transfert à la valeur réelle, l'entreprise va cumuler deux avantages fiscaux : une exonération au titre de cet article 7 et une diminution de son résultat du fait de l'amortissement comptable de la plus-value.
C'est la raison pour laquelle la commission propose de recourir à la valeur nette comptable pour cet apport.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement n° 25, que nous allons examiner dans quelques instants, est un amendement de coordination.
M. le président. L'amendement n° 305, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Les biens appartenant à la société mentionnée à l'article 5 sont inaliénables.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous souhaitons souligner par cet amendement que les biens appartenant à la société nouvellement créée à l'article 5 sont inaliénables.
Mme Annie David. En effet, ces actifs de service public ne peuvent être cédés parce que nous considérons qu'ils sont la propriété exclusive de la nation et de la collectivité. Ils ont été payés par tous les usagers.
Or, toutes les dispositions du projet de loi permettent qu'ils deviennent un jour ou l'autre la propriété privée de quelques grandes firmes multiservices, qu'ils soient détenus par des fonds de pensions américains, britanniques ou encore tout simplement apatrides.
Mme Annie David. En effet, monsieur le ministre !
Le processus de filialisation et de sous-filialisation, que vous tendez à mettre en place dans votre projet de loi, rend extrêmement flous les futurs droits de propriété. On parle d'une filialisation à 100%, mais quelle en sera la signification lorsque le capital d'EDF sera ouvert à 70% ? Nous ne savons pas exactement ce que cette société va devenir. Nous aurions souhaité qu'elle demeure un EPIC, ce qui préserverait son caractère public et les obligations afférentes au service public.
En réalité, la directive n'oblige pas à transférer les actifs et l'ensemble du patrimoine à cette nouvelle société. Considérant que ces biens sont inaliénables, nous affirmons qu'ils doivent être maintenus dans la maison-mère. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de l'avant-dernier alinéa de cet article :
Le bilan d'apport de cette société...
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur Le Cam, vous avez été très clair lors de la présentation de l'amendement n° 391. Vous rejetez la filialisation du réseau de transport. La commission est favorable à cette filialisation. Par conséquent, elle émet un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 305, l'inaliénabilité est « mise à toutes les sauces ». Dire qu'un bien est inaliénable ne signifie pas qu'il ne puisse pas être un jour déclassé. Il est important de conserver cette souplesse. Je ne développerai pas davantage mes explications. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Pour les raisons maintes fois expliquées, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 391.
Il est favorable aux trois amendements présentés par la commission.
Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 24 est particulièrement bienvenu. Il est la traduction d'une réflexion assez fine que le Gouvernement apprécie. Vous êtes le premier à avoir pensé à faire référence à la valeur nette comptable. C'est un apport important au texte. Le Gouvernement vous est très reconnaissant de l'intelligence de cette proposition, au-delà de toute complaisance.
En revanche, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 305.
Sans doute l'orateur n'a-t-il pas mesuré tout à l'heure la connotation - qui lui a sûrement échappé - du concept de capitaux apatrides. Cela rappelle d'autres temps !
M. Philippe Marini. Ce n'est pas très heureux !
Mme Evelyne Didier. L'argent n'a ni odeur ni couleur. C'est ce que nous voulions dire.
Mme Annie David. Il n'a pas de coeur !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ceux qui disaient cela lui attribuaient précisément une odeur et une couleur.
Mme Annie David. Pas nous, monsieur le ministre !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je ne doute pas que telle n'était pas votre intention et que cela vous a échappé.
M. Philippe Marini. Ces relents ne sont pas très sympathiques !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 391.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 210 :
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 305 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 153 |
Pour l'adoption | 106 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 23.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 24.
Mme Marie-France Beaufils. Je souhaiterais un complément d'information.
M. le rapporteur a indiqué qu'il était souhaitable d'utiliser la valeur nette comptable parce que cela permettrait d'éviter la double exonération.
M. Paul Blanc. Il en a d'ailleurs été félicité par M. le ministre !
Mme Marie-France Beaufils. En effet !
Nous parlons d'une société qui, normalement, va devoir gérer le réseau de transport de l'électricité. Or, l'état du réseau de transport exige qu'il soit renouvelé. La nécessité de son enfouissement a été soulignée cet après-midi, si l'on veut assurer la pérennité de l'acheminement de l'électricité dans de bonnes conditions et éviter de revivre les difficultés qu'on a connues lors des tempêtes passées.
Dans quelles conditions la société sera-t-elle en mesure de répondre à ces obligations de service public ? De quels moyens disposera-t-elle à cette fin ? En ne conservant pas la formule en vigueur jusqu'alors, on lui laisse moins de possibilités. Cela signifie qu'il faudra lui permettre de retrouver des moyens. Comment les trouvera-t-elle ? La part du transport pèsera dans le prix de l'électricité. Telles sont les questions que je me pose à propos de l'amendement n° 24.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Madame Beaufils, il va y avoir un très important transfert de capital. Ce réseau de transport qu'EDF va donner à EDF Transport représente un énorme investissement. Il faut y inclure l'ensemble de son amortissement. Voilà pourquoi nous faisons cette proposition. Cela n'a rien à voir avec le problème que vous soulevez.
Je vous signale qu'EDF, qui va rester l'actionnaire, sinon total, à tout le moins très majoritaire, devra continuer demain à garantir le budget de RTE afin de lui permettre de faire face à tous les problèmes que vous soulevez.
Ce transporteur va devoir entreprendre des travaux de maintenance, de développement, d'entretien et EDF devra continuer à assurer les financements importants que devra engager son « transporteur ».
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
Les ouvrages relevant du réseau public de transport d'électricité à la date de publication de la présente loi mais n'appartenant pas à Electricité de France sont, le cas échéant après déclassement, transférés à titre onéreux à la société mentionnée à l'article 5, dans le délai d'un an à compter de la création de cette société. Les différends éventuels sont tranchés par une commission de trois membres présidée par un magistrat de la Cour des comptes, nommé sur proposition du premier président de la Cour des comptes. Un décret fixe les modalités de désignation des deux autres membres. Cette commission règle le différend dans un délai de six mois à compter de sa saisine. Sa décision peut faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant la juridiction administrative.
Les ouvrages de distribution de tension supérieure ou égale à 50 kV qui viendraient à assurer une des fonctions du réseau public de transport d'électricité définies à l'article 12 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée seront transférés, après déclassement du domaine public des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics de coopération, à la société mentionnée à l'article 5 de la présente loi, selon la procédure mentionnée à l'alinéa précédent, dans le délai d'un an à compter de la constatation, par l'autorité administrative, de ce changement de fonction.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 392, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Par cet amendement n° 392, nous proposons, en cohérence avec ce que nous avons proposé jusqu'à maintenant, de supprimer l'article 8. Celui-ci fixe les conditions dans lesquelles la société gestionnaire du RTE recevra les ouvrages relevant de ce réseau et qui ne sont pas la propriété d'EDF.
Le tronçonnage des entreprises intégrées est au coeur de la stratégie de dérégulation, oserai-je dire.
Le problème que rencontrent les partisans de cette solution est qu'ils ne savent pas au juste comment s'y prendre pour déréguler.
L'un de nos collègues parlait tout à l'heure d'une usine à gaz. Je n'avais pas osé employer cette locution mais je crois que je peux la reprendre à mon compte.
Cela permet d'expliquer pourquoi ce qui est parfait sur le papier s'avérera malheureusement catastrophique en pratique.
Au demeurant, désintégrer et déréguler coûtent très cher.
Ce constat n'a pas été dressé par les parlementaires communistes. Il est celui de l'Agence internationale de l'énergie, l'AIE. Cette agence ne peut pas être suspectée de bolchevisme si l'on en juge par les prises de position de son directeur exécutif, Claude Mandil. Dans les colonnes du journal Le Monde daté du 30 septembre dernier, soit deux jours après la coupure géante en Italie, paraissait un article signé par lui et intitulé : « Electricité, gaz : oui, libéraliser ».
Ce rappel étant fait, quels sont les résultats des études rendues publiques par l'AIE ?
Tout d'abord, est formulée une observation générale : il faut dépenser de l'argent pour mettre en place de nouvelles formes de régulation lorsqu'il s'agit de remplacer les formes de régulation offertes par une entreprise intégrée horizontalement et verticalement.
D'où viennent ces coûts ? Il s'agit des coûts de développement des règles et de leur mise en oeuvre, des coûts des lobbies qui se mettent en place pour influencer les législateurs, des coûts des litiges portant sur les transferts de propriété, des coûts de l'imperfection de la régulation, des coûts des tâtonnements, des coûts des transactions entre tous ces nouveaux acteurs, des coûts des nouveaux contrats, enfin des coûts engendrés par les nouveaux intermédiaires venant remplacer la structure verticale intégrée et poussant à la hausse.
Voilà tout ce que mentionne l'étude de l'AIE.
Encore estimons-nous que, compte tenu de l'attachement de cette institution aux dogmes libéraux, un certain nombre de coûts supplémentaires n'ont pas été internalisés.
On peut citer pêle-mêle les coûts liés à la perte de taille et à la volatilité des marchés, les coûts sociaux avec les milliers de pertes d'emplois et la précarisation des statuts, qui ne manqueront pas de survenir avec l'ouverture à la concurrence.
Compte tenu de l'ensemble de ces coûts supplémentaires - nous avons eu et aurons encore l'occasion de les chiffrer sur la base des expériences anglaise et australienne -, il s'avère que la dérégulation n'est pas une bonne affaire pour les usagers, entreprises et ménages.
Quand bien même on observerait une baisse du prix de l'électricité ou du gaz - ce qui est démenti par le cas californien -, il serait nécessaire de mettre en rapport cette baisse plus que virtuelle avec les surcoûts observés.
Cela, les fanatiques du « tout-marché » ne le font jamais !
Il est incontestable que la disparition des entreprises intégrées entraînera des surcoûts.
Les gains sont en revanche plus qu'improbables, à tout le moins bien plus improbables que la survenue de dysfonctionnements à grande échelle.
Le risque de coupure est maîtrisé dans le cadre des entreprises intégrées. Cela ne veut pas dire que le risque zéro est garanti. La panne de 1979 en témoigne ; nous le reconnaissons. Mais, dans le cadre de la régulation, le risque devient systématique.
C'est pour cette raison que nous défendons avec détermination le caractère intégré des entreprises.
Comme nous avons rejeté la filialisation de RTE, nous rejetons donc, en défendant cet amendement n° 392, la filialisation des activités de transport de GDF.
M. le président. L'amendement n° 306, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
La commission comprend obligatoirement un représentant des salariés.
Madame Beaufils, ne souhaitez-vous pas continuer et présenter cet amendement ?
Mme Marie-France Beaufils. M. Le Cam va s'en charger. Différentes voix apportent une certaine variété. (Sourires.)
M. Gérard Le Cam. Chez les communistes, c'est la polyphonie, ce n'est pas la cacophonie ! (Sourires.)
M. le président. La parole est donc à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Avec cet amendement n° 306, nous abordons la question des droits des salariés et de leur capacité d'intervention dans l'entreprise.
L'objet de l'article 8 est d'unifier le réseau public de transport d'électricité en transférant à la filiale d'EDF chargée de la gestion du réseau public de transport un certain nombre d'ouvrages de haute et de très haute tension n'appartenant pas à EDF.
Un tel transfert à titre onéreux des droits de propriété peut être source de litiges entre les actuelles sociétés prioritaires.
Cet article prévoit en conséquence la mise en place d'une commission composée de trois membres et présidée par un magistrat de la Cour des comptes afin de trancher d'éventuels différends.
Par souci de transparence, nous souhaitons que cette commission comprenne obligatoirement un représentant des salariés désigné au sein des organisations syndicales les plus représentatives des industries gazières ou électriques.
Notre amendement n° 306 répond à ce souci. Rien ne justifie d'exclure les représentants du monde salarial d'une commission chargée de trancher d'éventuels litiges. C'est malheureusement trop souvent le cas. C'est contraire au progrès social, qui exige que les salariés soient davantage impliqués.
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d'adopter cet amendement de nature à reconnaître l'importance de l'intervention des salariés dans l'ensemble du secteur.
M. le président. L'amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. Rédiger comme suit le début du second alinéa de cet article :
Les ouvrages de distribution de tension égale ou supérieure à 50 Kv qui viendraient à relever du réseau public de transport d'électricité défini à l'article 12...
II. En conséquence, à la fin du même alinéa, supprimer les mots :
de fonction
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le réseau public de transport est défini dans le nouvel article 12 de la loi du 10 février 2000, tel qu'il résulte de l'article 30 du présent projet de loi.
Désormais, la ligne de séparation entre les fonctions de transport et de distribution est fixée à 50 kilovolts. Je pense que c'est une bonne règle.
Toutefois, des dérogations à cette règle générale seront possibles pour certains ouvrages de tension inférieure à 50 kilovolts lorsqu'ils seront intégrés au réseau de transport, car, dans sa fonction de transport, RTE a des réseaux moins puissants.
Il y aura également des dérogations inverses, car, sur le territoire national, les réseaux électriques d'un certain nombre de distributeurs sont, non pas plus puissants, mais beaucoup plus puissants que 50 kilovolts. Le meilleur exemple se situe à Metz : les lignes à haute tension y sont même de plusieurs centaines de milliers de kilovolts.
Les fonctions que devront remplir les réseaux de distribution pour être intégrés au réseau de transport seront fixées par décret.
Sous réserve de cette dérogation au principe général en vertu duquel c'est désormais la puissance de 50 kilovolts qui marquera la frontière entre transport et distribution, il ne sera plus nécessaire de faire référence aux fonctions du réseau. C'est la raison pour laquelle cet amendement tend à supprimer le mot « fonction » à la fin de l'article.
M. le président. Je suis saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 68 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
Le sous-amendement n° 218 est présenté par MM. Besson, Raoult et Sergent.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi le II de l'amendement n°26 rectifié :
II. En conséquence, à la fin du même alinéa, avant les mots :
changement de fonction
remplacer le mot :
ce
par le mot :
leur
La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter le sous-amendement n° 68.
M. Xavier Pintat. Cet amendement vise à préciser que les reclassements d'ouvrages de distribution d'électricité dans le réseau de transport sont nécessairement liés à un changement de fonction de ces ouvrages. A défaut, des reclassements arbitraires pourraient avoir lieu au détriment de la distribution.
M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour présenter le sous-amendement n° 218.
M. Michel Sergent. Ma proposition est identique, monsieur le président.
Au demeurant, je n'ai pas bien compris les propos de M. le rapporteur. Il veut supprimer le mot « fonction » à la fin du second alinéa de l'article 8. Or celui-ci est particulièrement important. Les sous-amendements nos 68 et 218 n'ont d'ailleurs d'intérêt que si l'on conserve ce mot.
Pourtant, ces sous-amendements sont importants afin de conserver l'esprit de la rédaction initiale du projet de loi, qui prévoit que les ouvrages de distribution publique d'électricité peuvent être reclassés en transport, à condition toutefois que ce transfert soit motivé par un changement de fonction.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Madame Beaufils, l'amendement n° 392 est tout à fait en cohérence avec les positions que vous avez défendues jusqu'ici. Vous êtes hostile à une filiale de transport. Nous y sommes, nous, favorables. Par conséquent, la commission est défavorable à votre amendement.
Monsieur Le Cam, nous sommes également défavorables à l'amendement n° 306, pour une raison très simple.
La commission que prévoit cet article exercera une fonction juridictionnelle ; son rôle sera de trancher les litiges qui pourraient survenir, notamment en ce qui concerne le transfert de ce patrimoine.
C'est la raison pour laquelle cette commission, dont le président sera désigné par la Cour des comptes, ne sera composée que de trois membres. D'ailleurs, monsieur le ministre, il serait intéressant que vous nous précisiez si le Gouvernement a une idée sur qui seront les deux autres membres de cette commission.
Quoi qu'il en soit, je ne vois pas ce qui justifierait la présence d'un représentant des salariés dans une instance purement juridictionnelle. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
S'agissant des sous-amendements no 68 de M. Pintat et n° 218 de M. Sergent, je dois avouer que je ne les avais pas compris. J'avais compris leur objet, mais pas le changement de mots auxquels ils tendent.
Mes chers collègues, dorénavant, la définition des réseaux ne se fera plus en termes de fonctions mais de puissance. Le partage a été, soyez-en sûrs, négocié et discuté avec tous. Les distributeurs, le transporteur et EDF ont tous été consultés.
La règle des 50 kilovolts, c'est-à-dire de puissance, est assez simple à appliquer. Elle permet de déterminer à qui reviendront les ouvrages.
La seule réserve qu'ont émise les distributeurs et le transporteur, donc EDF, était liée au fait que certains distributeurs avaient des lignes plus puissantes et que le transporteur avait des lignes moins puissantes. Il fallait bien sûr les leur laisser.
Je comprends ces sous-amendements, mais ils n'ont plus de raison d'être puisque nous raisonnons désormais en termes de puissance. Je puis vous dire que la proposition du Gouvernement donne tout à fait satisfaction à tous les réseaux.
M. Michel Sergent. Est-elle conforme à la directive européenne ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Tout à fait.
Je souhaiterais donc que ces sous-amendements soient retirés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 392 et 306.
Monsieur Poniatowski, le Gouvernement n'a pas encore pris de décision sur les deux autres membres de la commission. L'un deux pourrait éventuellement être un salarié, mais cela n'a rien d'obligatoire.
Le Gouvernement est naturellement favorable à l'amendement n° 26 rectifié. Par conséquent, il est défavorable aux sous-amendements nos 68 et 218. Je n'ajouterai rien. J'aurais pu dire que l'article 30 renvoie à un texte réglementaire mais vos explications ont été suffisamment claires, monsieur le rapporteur, pour que tout le monde les comprenne.
M. le président. Monsieur Sergent, le sous-amendement n° 218 est-il maintenu ?
M. Michel Sergent. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Pintat, le sous-amendement n° 68 est-il maintenu ?
M. Xavier Pintat. Monsieur le président, je n'ai pas bien compris un point : si la limite est fixée à 50 kilovolts dans le texte, pourquoi faut-il qu'il y ait des reclassements ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Des dérogations à cette règle sont possibles ; c'est pourquoi il est prévu un décret.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Lorsqu'il y aura dérogation, les modalités du transfert seront fixées par décret.
M. Xavier Pintat. Le dispositif reste donc lié à la fonction ?
Mme Marie-France Beaufils. La fonction n'est donc pas abandonnée ?
M. le président. Finalement, monsieur Pintat, le sous-amendement n° 68 est-il maintenu ?
M. Xavier Pintat. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 68 est retiré.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 218.
Mme Marie-France Beaufils. Si un décret est nécessaire, cela signifie bien que la fonction demeure !
Mme Marie-France Beaufils. Oui, mais, que ce soit à titre dérogatoire ou non, on raisonne bien sur une fonction au moment où l'on se prononce. Je ne vois donc pas pourquoi le mot «fonction» doit être supprimé !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Madame Beaufils, des dérogations seront possibles. Dans ce cas, j'en suis d'accord, on se fondera sur la fonction. Mais la règle que nous adoptons dans cet article est fondée sur la puissance et la dérogation est d'ordre réglementaire !
M. le président. La parole est à M. Michel Sergent.
M. Michel Sergent. Dans la mesure où des dérogations seront possibles et que le critère de la fonction subsistera, ...
M. Michel Sergent. ...je maintiens le sous-amendement n° 218.
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
CHAPITRE III
Les entreprises de transport de gaz
Article additionnel avant l'article 9
M. le président. L'amendement n° 307, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour assurer la sécurité d'approvisionnement et la continuité de fourniture sur le territoire national, l'ensemble des réseaux de transport sur le territoire national deviennent propriété de l'entreprise publique Gaz de France.
Les conditions du transfert à Gaz de France des installations de transport n'appartenant pas à Gaz de France à la date de la présente loi sont définies par décret en Conseil d'Etat.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement vise à construire un seul réseau national de transport de gaz afin d'améliorer les conditions d'acheminement du gaz sur le territoire national.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La proposition de Mme Beaufils est intéressante ! Avant 2001, Lionel Jospin a vendu une partie de ce réseau à Gaz de France, une autre à la Compagnie française de méthane, la CFM, et la dernière à Gaz du Sud-Ouest, GSO, filiale de Total. Et aujourd'hui, Mme Beaufils propose de renationaliser le tout pour le donner à Gaz de France !
Mme Marie-France Beaufils. Mais bien sûr !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J'ai bien compris ! La commission est donc totalement défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 307.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9
Les entreprises de transport de gaz issues de la séparation juridique prévue à l'article 3 peuvent exercer directement en France toute activité de construction ou d'exploitation d'un réseau de gaz ou d'installations de gaz naturel liquéfié ainsi que toute activité de stockage de gaz. Elles peuvent également exercer indirectement, par des participations ou des filiales en France, dans la Communauté européenne ainsi que dans les pays membres de l'Association européenne de libre-échange, les mêmes activités ou toute activité de gestion d'un réseau d'électricité et de valorisation des infrastructures.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 393, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet article, qui définit le champ d'activité des entreprises de transport de gaz, entérine la séparation des activités de transport et de fourniture pour GDF.
Je tiens à rappeler de nouveau que, contrairement à ce que vous prétendez, monsieur le ministre, la filialisation du transport n'était qu'une des possibilités pour assurer la séparation juridique imposée par le droit communautaire.
Les directives relatives au gaz et à l'électricité définissent en effet quatre critères d'indépendance qui doivent être respectés par le gestionnaire du réseau de transport : l'indépendance managériale du gestionnaire du réseau à l'égard de l'entreprise intégrée doit être garantie ; des mesures protectrices doivent être prises pour garantir l'indépendance des dirigeants du GRT à l'égard de la maison mère ; le GRT doit disposer de pouvoirs lui permettant de décider en toute indépendance de l'exploitation du réseau et des investissements nécessaires ; des règles doivent être établies pour que le GRT puisse assurer un accès non discriminatoire au réseau.
Or ces quatre critères sont respectés dans l'organisation actuelle du transport de gaz au sein de GDF.
De plus, l'article 9 du projet de loi met un terme à la cohérence entre les différentes activités du métier du gaz, qui constituent pourtant un tout.
Les activités de réseau, de stockage et les terminaux méthaniers sont en effet indissociables. Leur séparation remettrait en cause la satisfaction des besoins du service public. Elle risque en tout cas d'aboutir à la remise en cause de la sécurité d'approvisionnement et de la continuité de fourniture tout en diminuant l'efficacité de l'activité globale du fait de la perte de synergies existantes.
L'ensemble de cet article, qui vise à avaliser la filialisation du transport et à permettre aux nouvelles filiales de prendre des participations ou de créer des filiales à l'étranger, contribue au démantèlement de l'entreprise intégrée, GDF.
A cela s'ajoute le fait que cet article favorise la mise en concurrence des activités gaz et électricité au lieu de faire en sorte que les deux entreprises, EDF et GDF, valorisent leurs complémentarités.
M. le président. L'amendement n° 308, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de cet article, supprimer les mots :
en France
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 308 et 312, qui ont le même objet.
Nous avons déposé tout à l'heure un amendement visant à permettre à Gaz de France de récupérer les réseaux de gaz du Sud-Ouest de la France, actuellement détenus par Total.
Nous considérons en effet qu'un tel fractionnement du territoire, avec deux propriétaires de réseaux différents, nuit considérablement à l'aménagement cohérent de notre territoire et à l'efficacité de notre politique gazière.
Pour le dire autrement, il nous semble tout à fait essentiel qu'en France l'ensemble du réseau soit géré de manière unique par l'opérateur historique, Gaz de France. L'efficacité même de notre politique gazière et du service public du gaz en dépend.
C'est pourquoi nous considérons que cet amendement, qui constitue un amendement de repli, est néanmoins essentiel.
Au fond, si nous comprenons bien, l'article 9 vise à autoriser les filiales qui ont une activité de transport à créer elles aussi des filiales exerçant des activités d'exploitation de réseaux de gaz ou d'installations de gaz naturel liquéfié, voire de stockage, comme elles pourront également créer des filiales dans le domaine de la gestion de réseaux d'électricité.
Il s'agit donc de permettre à Gaz de France de « sous-filialiser » divers segments d'activité et de multiplier les sous-filiales sur des morceaux du réseau ou sur certaines installations de gaz naturel ou de stockage.
Autant le dire clairement, le but est de faire de ces sous-filiales une monnaie d'échange contre d'autres actifs, en Allemagne ou dans tout autre pays de l'Union européenne.
On pourrait ainsi imaginer qu'une nouvelle canalisation de desserte d'une commune soit gérée par une sous-filiale du réseau de transport de Gaz de France ou par une sous-filiale d'une filiale allemande.
Nous pensons qu'en France Gaz de France doit au contraire garder le contrôle de son réseau, au risque sinon d'un morcellement préjudiciable à l'aménagement de notre territoire et à la mise en oeuvre d'une politique gazière cohérente.
La multiplication de ces sous-filiales contribuerait en effet nécessairement au morcellement et au fractionnement de notre territoire. Notre service public énergétique serait totalement remis en cause si nous nous engagions dans cette voie.
On comprend aisément ce que signifie la sous-filialisation lorsqu'on la compare avec la sous-traitance. C'est une même logique qui rend possible la sous-filialisation et tend à diluer les centres de responsabilité en fractionnant l'outil industriel.
Pour toutes ces raisons, nous proposons d'interdire aux filiales de transport de gaz de créer en France des filiales dans les domaines d'activité mentionnés à l'article 9.
M. le président. L'amendement n° 309, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de cet article, après le mot :
réseau
insérer les mots :
de transports
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Dans la ligne de la problématique que nous avons développée concernant l'électricité, cet amendement vise à éviter la mise en concurrence des gestionnaires de réseau de transport de gaz et de EDF-GDF Services sur l'activité de distribution.
Une fois de plus, les dispositions de l'article 9 font apparaître que les orientations retenues vont dans le sens de la désintégration des services communs aux deux entreprises.
Loin de renforcer les synergies commerciales qui existent déjà entre EDF et GDF, cette mise en concurrence sera fortement préjudiciable à nos services publics.
Nous avons déjà eu l'occasion de dire à propos d'EDF que le tronçonnage et la désintégration des entreprises étaient au coeur de vos projets. Il en va de même pour GDF.
C'est d'autant plus vrai qu'il faut dépenser de l'argent pour mettre en place de nouvelles formes de régulation, en remplacement de celles que vous remettez en cause.
Quel sera le coût de développement et de mise en oeuvre des nouvelles règles ? Quel sera le coût des litiges portant sur les transferts de propriété ? Quel sera le coût des imperfections de la régulation et des tâtonnements ?
Ce sont autant d'obstacles auxquels vous allez vous heurter dans les années à venir du fait des difficultés que ne manqueront pas d'entraîner les modifications que vous mettez en oeuvre.
Le coeur de votre argumentation, monsieur le ministre, est que EDF et GDF doivent pouvoir se développer sur le plan international pour compenser les pertes de marchés qu'elles vont inévitablement essuyer sur le plan national.
Dans les deux cas, mais particulièrement dans celui du gaz, cet argument est sans fondement. En effet, l'augmentation des bénéfices nets de Gaz de France, qui ont plus que doublé entre 1999 et 2003 - ils sont passés de 391 millions à 910 millions d'euros -, provient principalement des activités de service public de l'entreprise en France.
En outre, la croissance des résultats n'est pas liée à celle des ventes mais à l'augmentation des marges brutes, qui repose sur la ponction des usagers : plus 24 % depuis 2000. Elle est donc structurellement fragile.
En outre, l'explosion du bénéfice s'appuie quasi exclusivement sur les usagers domestiques, qui ne représentent que 23 % de la consommation mais 66 % de la marge de l'entreprise.
Dans un contexte de pré-privatisation, l'essentiel des marges de GDF repose donc sur le marché national des particuliers.
Pour ce qui est du développement international de GDF pour compenser les pertes envisagées sur les marchés en France, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Avec 6 milliards d'euros d'investissement dans le rachat d'entreprises depuis 1991, la contribution de ces filiales au résultat final est de 120 millions d'euros en 2003, soit un rendement de 2 %, c'est-à-dire un rendement moins élevé que le coût des emprunts, lequel était de 5 %. L'entreprise accentue ainsi sa fragilité par un endettement coûteux et sans aucune utilité pour l'usager.
Le résultat des filiales à l'international est par ailleurs catastrophique. En 2002, les pertes s'élevaient à 143 millions d'euros au Mexique, à 70 millions d'euros en Argentine et à 93 millions d'euros en Italie ; en 2003, elles s'élevaient à 70 millions d'euros en Italie et à 40 millions d'euros au Royaume-Uni.
La stratégie de développement par la croissance financière et par la recherche de la taille critique est loin d'être probante.
Acheter des parts de marché pour compenser les pertes subies sur le marché national relève de la fuite en avant et fragilise tout l'édifice.
Ce modèle de développement, repris par tous les cabinets de conseil, celui de la « course à la taille », a déjà coûté très cher aux contribuables français et conduit d'autres entreprises publiques où l'on sait, ce qui méritait, hélas, d'être rappelé.
Mme Odette Terrade. Absolument !
M. le président. L'amendement n° 312, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase de cet article, supprimer les mots :
en France,
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 311, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase de cet article, supprimer les mots :
ou toute activité de gestion d'un réseau d'électricité et
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Dans le même esprit que les précédents, cet amendement a pour objet d'éviter que les entreprises de transport de gaz ne concurrencent le RTE.
Une telle concurrence serait véritablement fratricide et nous n'y trouverions aucun intérêt, que ce soit sur le plan économique ou sur le plan social.
Nous ne sommes absolument pas opposés à l'abandon du principe de spécialité mais cet abandon doit avoir pour condition la valorisation des complémentarités entre EDF et GDF, et non tendre à favoriser sur tous les segments de l'activité la concurrence.
Or on a le sentiment que les filiales de transport de gaz pourront s'élargir par le biais d'une multiplication sans limite de prises de participation qui contribuera à rendre tout contrôle extrêmement difficile.
On a vu comment certaines entreprises publiques ont bénéficié de conseils avisés pour créer en dépit de la loi des filiales dans l'Union européenne. Je pense en particulier à EDF Trading, qui, ne pouvant être créée en France en application de la loi de 2000, l'a été au Royaume-Uni.
De la même façon, la rédaction qui nous est proposée ne risque-t-elle pas de permettre à RTE ou au réseau de gaz qu'on a voulu encadrer par ailleurs de faire tout et n'importe quoi ?
Je crois que les entreprises de transport, qu'elles soient de gaz ou d'électricité, devraient se voir interdire toute activité de trading. Qu'on le veuille ou non, c'est une possibilité de spéculer, notamment sur les marchés de matières premières : on sait bien que l'entreprise de réseaux a des informations que n'ont pas les autres entreprises et que faire du trading pourrait lui permettre, un jour ou l'autre, de fausser les marchés.
Je ne vais pas revenir sur les divers incidents - découverts il y a quelques semaines seulement - constatés autour de EDF Trading, mais force est de reconnaître que cette filiale d'EDF n'a pas été exempte de reproches lors de ses interventions d'août 2003 sur le marché. Je ne suis pas sûr que le jeu mené par ses responsables ait contribué à calmer le marché, comme cela aurait dû être le cas !
Il ne faudrait pas qu'à travers le processus de filialisation Gaz de France se transforme en firme de pur négoce. Le risque existe, et c'est pourquoi ces points méritaient d'être soulignés.
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter in fine cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le périmètre des activités de ces entreprises est déterminé par leurs statuts.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement tend à permettre à Gaz de France la filialisation de certaines activités, plus particulièrement celle de deux activités importantes : les terminaux méthaniers et les stockages. Ce n'est pas une obligation, mais une simple possibilité, qui relèvera du choix de l'entreprise.
M. le président. L'amendement n° 310, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine cet article par une phrase ainsi rédigée :
La société gestionnaire du transport de gaz issue de la séparation juridique imposée à Gaz de France par l'article 10 exerce toute activité de construction, d'exploitation et de développement de tout le réseau de transport de gaz, de toutes les installations de gaz naturel liquéfié et de toutes les installations de stockages de gaz appartenant à Gaz de France sur le territoire français à la date de promulgation de la présente loi.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Il s'agit bien sûr d'un amendement de repli.
Une fois de plus - mais c'est un combat que nous entendons poursuivre parce qu'il est essentiel pour la pérennité de nos services publics -, nous demandons que la cohérence des différentes activités de transport de gaz soit préservée.
Ainsi, il nous semble tout à fait nécessaire que la société gestionnaire du transport de gaz nouvellement créée à l'article 3 puisse exercer toute activité de construction, d'exploitation et de développement sur tout le réseau de transport de gaz, sur toutes les installations de gaz naturel liquéfié et sur toutes les installations de stockage.
Il y a une véritable cohérence entre ces différentes activités, qui doivent continuer à être gérées par une seule entité appartenant à GDF.
M. le président. L'amendement n° 113, présenté par M. Deneux et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le ministre chargé de l'énergie demande aux entreprises propriétaires d'un réseau de transport de désigner le ou les gestionnaires de ce réseau.
La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. L'article 7 de la directive Gaz du 26 juin 2003 donne aux Etats-membres la faculté soit de désigner eux-mêmes, soit de demander aux entreprises propriétaires d'installations de transport de désigner un ou plusieurs gestionnaires de réseau.
Dès lors que cette deuxième modalité de désignation est prévue, il convient de l'organiser légalement afin que les demandes de l'administration aux entreprises soient fondées sur une base légale.
M. le président. L'amendement n° 313 rectifié, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
Le personnel de la société gestionnaire du réseau public de transport de gaz issue de la séparation juridique imposée à Gaz de France par l'article 3 de la présente loi bénéficie des mêmes dispositions de gestion du personnel - statut, règles internes à Electricité de France-Gaz de France, accords Electricité de France-Gaz de France - que le personnel l'Electricité de France et de Gaz de France.
La direction du personnel, service commun à Electricité de France, Gaz de France, la société gestionnaire du transport électricité et la société gestionnaire du transport gaz, issue de Gaz de France, gère pour l'ensemble des quatre sociétés les règles et accords communs.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement concerne le personnel.
Nous avons eu l'occasion, lors de l'examen des précédents articles relatifs au réseau de transport d'électricité d'expliciter nos préoccupations concernant la situation des personnels.
Le présent amendement vise à ce que le personnel restant à EDF et à GDF et celui des filiales de transport soient traités de façon identique et bénéficient des mêmes dispositions statutaires et de gestion du personnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Nous avons bien compris que tous les amendements déposés par le groupe CRC à cet article sont quasiment les mêmes que ceux qui ont été déposés contre le GRT Electricité.
Comme nous sommes favorables au GRT gazier et que nous souhaitons transposer la directive, nous sommes, par conséquent, hostiles à cette série d'amendements.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 393, ainsi que sur l'amendement n° 308, qui est pratiquement identique puisqu'il vise à ce que le transporteur n'ait pas de pouvoir en France.
L'amendement n° 309 de Mme Didier correspond à ce que j'appelle « un amendement anti-filiales » comme nous en avons vu en débattant du secteur de l'électricité.
Pour ce qui est de l'amendement n° 312, comme l'a bien expliqué Mme David, il relève de la même problématique que les amendements relatifs au transport de l'électricité. Il a donc reçu un avis défavorable de la commission.
J'ai été un peu surpris, monsieur le Cam, de vous entendre dire en présentant l'amendement n° 311 : « Nous ne sommes absolument pas hostiles à l'abandon du principe de spécialité. »
Je m'en réjouis car, comme nous avons été plusieurs à le dire dans la discussion générale, il est important de permettre, demain, à Electricité de France d'avoir éventuellement une activité gazière et à Gaz de France d'avoir une activité électrique, ne serait-ce que pour leur permettre de mieux se défendre face à leurs concurrents sur le marché national.
La logique de cette multi-activité énergétique consiste à donner aux transporteurs d'électricité et de gaz la permission d'intervenir, étant précisé que cette intervention devra toujours rester à la marge. RTE ne deviendra pas, demain, un transporteur de gaz ! Il pourra cependant arriver que, de temps en temps, ou sur certaines zones de France, le transporteur d'électricité ait une activité gazière et le transporteur de gaz une activité électrique. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 311.
L'amendement n° 310 étant un amendement « antifiliales pur », si je puis dire, il a reçu un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 113, il me semble que la précision qu'il apporte va de soi. Vous souhaitez que « le ministre chargé de l'énergie demande aux entreprises propriétaires d'un réseau de transport de désigner le ou les gestionnaires de ce réseau », mais c'est bien ainsi que cela va se passer !
Est-il bien utile de compléter l'article en ce sens ? Le Gouvernement nous donnera son avis sur ce point.
J'en viens à l'amendement n° 313 rectifié, qui vise à confirmer que le statut IEG s'applique bien à tous les agents qui travailleront dans l'entreprise de transport de gaz. Il pourrait être retiré dans la mesure où il est satisfait par le statut IEG lui-même.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il est vrai que la plupart des amendements déposés par le groupe CRC à cet article sont le pendant de ceux qui ont été déposés pour l'électricité. Evidemment, le Gouvernement adoptera la même position.
Il est donc défavorable aux amendements nos 393, 308, 309, 312, 311, 310 et 313 rectifié.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 27, qui me paraît régler tous les problèmes puisqu'il pose effectivement le principe de la filiale et de la libre administration des entreprises de droit commun.
L'amendement n° 113 est, à mon sens, inutile. J'ai bien compris qu'il était issu de la directive, en particulier de son article 7. Mais cette dernière n'offre qu'une simple faculté, qui me semble déjà application dans le système actuel de décision au sein du marché français. Bref, si cet amendement ne fait pas de mal, certes, il ne fait pas de bien non plus !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote, sur l'amendement n° 311.
Mme Marie-France Beaufils. M. le rapporteur a fait allusion à notre conception du principe de spécialité.
Je voudrais préciser notre réflexion en ce domaine. En effet, le principe de spécialité dans lequel on a enfermé EDF et GDF ne nous semble pas pertinent. Cette décision, renforcée dans les années quatre-vingt-dix n'a pas constitué une bonne solution.
En proposant de lever ce principe de spécialité, nous souhaitons le retrouver par l'intermédiaire de la mise en place de la fusion. C'est ainsi que nous pensons donner toute leur efficacité aux deux entreprises EDF et GDF : à partir du moment où elles auront fusionné, elles ne connaîtront plus de difficultés liées à leur spécificité.
M. le président. L'amendement n° 113 est-il maintenu ?
M. Jean-Paul Amoudry. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je souhaiterais apporter une petite précision.
Etes-vous bien conscient, monsieur Amoudry, que, dans la mesure où il n'y a pas un seul réseau de transport de gaz, mais plusieurs, la phrase que vous proposez concerne également Total. Cela veut dire que le ministre chargé de l'énergie demandera à Total, par exemple, de désigner le ou les gestionnaires de son réseau. Je ne vois pas bien ce que cet amendement apporte.
M. Michel Mercier. Vous êtes très bons pour cela !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Justement, nous entendons nous corriger. Puisque M. Mercier nous reproche d'être trop enclins à la bureaucratie - ce en quoi il a raison - nous allons nous corriger en donnant un avis défavorable sur l'amendement.
M. le président. L'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Mercier. Oui, et à plus forte raison, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
I. - La séparation juridique prévue à l'article 3 entraîne le transfert à une entreprise juridiquement distincte :
- soit des biens liés aux activités mentionnées à l'article 9 ainsi que des droits et obligations qui y sont attachés ;
- soit des biens non liés aux activités mentionnées à l'article 9 avec les droits et obligations qui y sont attachés.
Le transfert a lieu sous forme d'apport partiel ou de cession d'actifs. Il n'emporte aucune modification des contrats en cours d'exécution, quelle que soit leur qualification juridique, conclus par les opérateurs gaziers ou les sociétés qui leur sont liées au sens des articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de commerce, et n'est de nature à justifier ni la résiliation, ni la modification de l'une quelconque de leurs clauses ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en résultent.
II. - Le capital de la société gestionnaire de réseaux de transport de gaz issue de la séparation juridique imposée à Gaz de France par l'article 3 est détenu en totalité par Gaz de France, l'Etat ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public. Cette société est régie, sauf dispositions législatives contraires, par les lois applicables aux sociétés anonymes.
La société mentionnée au précédent alinéa et, lorsque la majorité du capital de leurs sociétés mères est détenue directement ou indirectement par l'Etat, les autres entreprises de transport de gaz issues de la séparation juridique imposée par l'article 3 de la présente loi, sont soumises à la loi n° 83-675 du 28 juillet 1983 précitée. Pour l'application de l'article 6 de cette loi, le conseil d'administration ou de surveillance ne peut comporter plus de deux représentants de l'Etat nommés par décret.
III. - Les autorisations administratives nécessaires à l'exercice des activités de transport de gaz, d'exploitation d'installations de gaz naturel liquéfié, de stockage ou de fourniture de gaz sont transférées de plein droit aux sociétés bénéficiaires des transferts, à la condition que ces sociétés soient membres du même groupe au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.
IV. - Les transferts et les opérations rendus nécessaires par l'application des dispositions du I ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit, sous réserve qu'ils aient été réalisés dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi.
V. - Dès lors que les biens auront été transférés en application de l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 2001-1276 du 28 décembre 2001) et du présent article, la promulgation de la présente loi vaut publicité foncière au registre des hypothèques du lieu de situation de ces biens. Ils bénéficient à cette occasion des exonérations prévues au II de l'article 10 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2002-1050 du 6 août 2002) et au IV ci-dessus.
M. le président. Je suis saisi de douze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 394, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Cet article prévoit le transfert des biens existants sous forme de cession d'actifs et d'apport partiel à la société anonyme de transport de gaz créée à l'article 3.
Depuis la loi de nationalisation de 1946, GDF est une entreprise publique, propriété non de l'Etat, nous l'avons déjà dit, mais de la nation. Les actifs de cette entreprise ont d'ailleurs été alimentés depuis 1946 par les usagers, conformément à la loi. Ce transfert patrimonial participe donc d'une dépossession de la propriété nationale : nous ne pouvons que nous y opposer !
Notre amendement de suppression, amendement de cohérence avec les amendements précédents, propose
donc de supprimer les dispositions relatives à la création de filiales de transport.
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du dernier alinéa du I de cet article :
Le transfert a lieu, à la valeur nette comptable, sous forme d'apport partiel ou de cession d'actifs.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement que nous avons déposé à l'article 7 concernant la valeur nette comptable.
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les biens appartenant à la société gestionnaire du réseau public de transport de gaz issue de la séparation juridique imposée à Gaz de France par l'article 3 de la présente loi sont inaliénables.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous avons déposé le même type d'amendement s'agissant du domaine de l'électricité.
Cet amendement très important vise à inscrire dans la loi que les biens appartenant à la nouvelle société gestionnaire de transport de gaz sont inaliénables. Ces actifs appartiennent, en effet, à la collectivité nationale et ne peuvent être cédés ou faire l'objet d'une appropriation privative.
La séparation juridique concernant la gestion du réseau de transport de gaz imposée à Gaz de France à l'article 3 du projet de loi ne doit pas servir de prétexte à ce qui se révélerait un véritable dépeçage de l'EPIC, conduisant à la spoliation des citoyens usagers, seuls propriétaires de Gaz de France.
C'est bien de spoliation qu'il s'agit, et nous ne sommes pas dupes des intentions du Gouvernement de privatiser EDF et GDF en dépossédant la nation de ses entreprises publiques, garantes du service public.
Ce projet est un pas de plus vers la réappropriation par le marché et les intérêts privés de secteurs entiers de notre économie qui, de par leur caractère spécifique de biens publics, appartiennent pourtant à la nation tout entière.
C'est la raison pour laquelle nous voulons réaffirmer que les biens appartenant à la société gestionnaire du réseau de transport de gaz sont incessibles.
C'est une précaution nécessaire dans le contexte actuel de privatisations.
M. le président. L'amendement n° 316, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter la première phrase du premier alinéa du II de cet article, par les mots :
et dont le capital est à 100% public
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est un amendement de repli, qui vise à protéger le réseau de transport de gaz d'une prise de participation de capitaux privés.
Nous souhaitons que le capital reste à 100 % public, ce qui constitue une protection contre la financiarisation des activités et contre la recherche du profit immédiat. C'est une garantie pour la préservation de nos services publics.
M. le président. L'amendement n° 315 rectifié, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
ou de surveillance
remplacer la fin de la seconde phrase du second alinéa du II de cet article par les dispositions suivantes :
comporte un tiers de représentants des salariés et un tiers de représentants de l'Etat. Les représentants de l'Etat sont nommés par décret.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement vise à préciser que le conseil d'administration et de surveillance sera nécessairement composé, pour un tiers de ses membres, par des représentants des salariés et, pour un tiers de ses membres, par des représentants de l'Etat.
Il s'agit de la même logique que celle qui a été suivie précédemment pour l'ensemble des organismes concernés.
M. le président. M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 69 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
L'amendement n° 219 rectifié est présenté par MM. Besson, Raoult et Sergent.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans la seconde phrase du second alinéa du II de cet article, après les mots :
représentants de l'État
insérer les mots :
ni plus de deux personnalités qualifiées
La parole est à M. Xavier Pintat, pour défendre l'amendement n° 69.
M. Xavier Pintat. Il s'agit d'être en cohérence avec les articles 4 et 5 et d'appliquer le principe de désignation des personnalités qualifiées au transport de gaz.
M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour défendre l'amendement n° 219 rectifié.
M. Michel Sergent. Il s'agit également de cohérence avec l'amendement n° 216, que le Sénat a voté dans l'enthousiasme. (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 172, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
L'Etat peut s'opposer à la cession d'ouvrages du réseau de transport et de stockage de gaz.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Nous persistons à penser que l'Etat doit pouvoir s'opposer à la cession d'ouvrages d'un réseau de transport.
Nous l'avons dit pour le réseau d'électricité, nous le répétons pour le gaz.
M. le président. L'amendement n° 173, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance des sociétés mentionnées à l'alinéa précédent, ainsi que le directeur général sont nommés, après accord du ministre en charge de l'énergie, par le conseil d'administration ou le conseil de surveillance.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Cet amendement nous semble de nature à combler un oubli de M. le rapporteur.
En effet, il serait cohérent que soient imposées aux entreprises de transport de gaz les mêmes dispositions que celles qui ont été prévues pour les entreprises gestionnaires de réseaux de transport d'électricité. Or, aucune disposition n'est prévue dans le projet de loi en ce qui concerne le président du conseil d'administration et du conseil de surveillance des sociétés mentionnées.
M. le président. L'amendement n° 79, présenté par M. Revol, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le V de cet article :
V Lorsque les biens sont transférés en application du présent article, la promulgation de la présente loi vaut publicité foncière au registre des hypothèques du lieu où ces biens sont situés. Ils bénéficient à cette occasion des exonérations prévues au II de l'article 10 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 20021050 du 6 août 2002) et au IV ci-dessus.
La promulgation de la présente loi vaut publicité foncière pour les biens qui ont été transférés en application de l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 20011276 du 28 décembre 2001).
La parole est à M. Henri Revol.
M. Henri Revol. Cet amendement vise à distinguer clairement, en deux alinéas séparés, les deux cas d'exonération de publicité foncière des biens transférés.
Les exonérations prévues au premier alinéa ne sont pas nécessaires pour les biens transférés en application de l'article 81 de la loi de finances pour 2001 car elles sont déjà prévues.
M. le président. Le sous-amendement n° 418, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 79 pour le V de cet article, remplacer les mots :
vaut publicité foncière au registre des hypothèques du lieu où ces biens sont situés
par les mots :
autorise le report de la formalité de publicité foncière à la première cession ultérieure des biens considérés.
II - Au second alinéa du même texte, remplacer les mots :
vaut publicité foncière pour les biens qui ont été transférés en application de l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 20011276 du 28 décembre 2001)
par les mots :
autorise le report de la formalité de publicité foncière requise à l'occasion des transferts réalisés en application de l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 20011276 du 28 décembre 2001) à la première cession ultérieure des biens considérés.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ce sous-amendement a pour objet de régler le problème de la publication foncière des titres lors de la cession ultérieure desdits biens.
C'est une affaire un peu compliquée que l'Assemblée nationale a essayé de résoudre en première lecture, d'une façon assez intelligente mais qui ne nous donne pas satisfaction. Le Gouvernement propose donc un autre dispositif, qui permet de reporter l'acte de publicité foncière à la première cession ultérieure, et non pas à la cession initiale, des biens considérés.
C'est une facilité qui est nécessaire compte tenu de la complexité des biens à inscrire.
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début du V de cet article :
Lorsque les biens...
L'amendement n° 30, également présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après les mots :
au registre des hypothèques du lieu
rédiger comme suit la fin de la première phrase du V de cet article :
où ces biens sont situés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission retire ces amendements au profit de l'amendement n° 79.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement de suppression n° 394 est contraire à la logique du projet de loi ; la commission y est défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 314, qui est un amendement d' « inaliénabilité », comme les précédents.
De même, la commission est défavorable à l'amendement n° 316 ; il est en effet entièrement satisfait par le premier alinéa du II de l'article 9, qui prévoit que le capital est détenu en totalité par Gaz de France, l'Etat ou d'autres entités du secteur public. Il est inutile de revenir sur un débat que nous avons déjà eu à propos de l'électricité.
Mme Beaufils, la filiale de transport est soumise à la loi du 27 février 2002 relative à la démocratisation du secteur public. Son conseil d'administration comportera nécessairement un tiers de représentants des salariés. La partie de l'amendement n° 315 rectifié qui traite de ce sujet est donc inutile.
Par ailleurs la partie de l'amendement qui vise à obliger l'Etat à détenir un tiers des sièges au conseil d'administration induit un manque de souplesse auquel nous sommes hostiles. Nous sommes donc défavorables à cet amendement.
MM. Pintat et Sergent ont présenté les amendements nos 69 et 219 rectifié comme étant en cohérence avec leur position sur l'électricité. Je vais donc rester cohérent avec la position de la commission et leur demander de bien vouloir retirer leurs textes, sinon la commission émettra un avis défavorable.
A propos de l'amendement n° 172, M. Raoul a dit qu'il persistait dans sa conception ; la commission persiste elle aussi et émet un avis défavorable.
Avis défavorable également sur l'amendement n° 173. Je tiens à rappeler qu'aucune procédure analogue n'existe actuellement dans le secteur gazier.
La commission est favorable à l'amendement n° 79, puisqu'elle a retiré les amendements n°s 29 et 30 à son profit.
Enfin, j'émets à titre personnel un avis favorable sur le sous-amendement n° 418, qui n'a pas été examiné en commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Nous restons tous cohérents avec des logiques qui ont été amplement exprimées.
Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements n°s 394, 314, 316 et 315 rectifié.
IL est également défavorable aux amendements nos 69 et 219 rectifié et demande à MM. Pintat et Sergent de bien vouloir les retirer.
De même, il émet un avis défavorable sur les amendements nos 172 et 173.
Enfin, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 79, auquel il tient tellement qu'il lui a adjoint le sous-amendement n° 418.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 69 et 219 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 211 :
Nombre de votants | 282 |
Nombre de suffrages exprimés | 274 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 138 |
Pour l'adoption | 107 |
Contre | 167 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 172.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 418.
Mme Marie-France Beaufils. Je m'interroge sur ce sous-amendement, dont nous n'avons pu discuter en commission, comme le disait M. le rapporteur tout à l'heure.
Je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement prévoit un report de la formalité de publicité foncière à la première cession ultérieure des biens considérés alors que, dans l'amendement n° 79, il est bien question de publicité foncière au moment de la promulgation de la loi.
La disposition proposée par M. Revol permet d'avoir une bonne information sur ces transferts de biens et, éventuellement, de réagir. Elle ne peut que favoriser la transparence. Je ne comprends donc pas cette volonté de report de la formalité.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ce report s'explique par la complexité de cette formalité et par le nombre considérable de parcelles qui devront être transférées. Un délai très long sera nécessaire.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. De tels transferts s'appliquent à des biens importants et concernent un grand nombre de secteurs géographiques. Et vous proposez de faire la publicité foncière après coup ? Cela me paraît totalement aberrant dans un pays comme le nôtre où, chaque fois qu'une collectivité territoriale est amenée à faire une intervention de ce type, elle doit se soumettre à une obligation de publicité foncière. Vous nous proposez en fait de mettre en oeuvre un régime dérogatoire. Ce n'est pas acceptable !
M. le président. Nous en arrivons au titre III.
Mme Marie-France Beaufils. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, il me semblait que, lors d'une session extraordinaire, les séances de nuit devaient être strictement limitées. J'ai constaté tout à l'heure que certains parmi nous avaient quelques difficultés à s'exprimer, ce qui montre que les effets de la fatigue commencent à se faire sentir. Il serait donc opportun, compte tenu de l'importance des dispositions qui doivent maintenant être examinées, que nous cessions maintenant nos travaux et que nous les reprenions demain après-midi.
M. le président. Ma chère collègue, je ne pense pas qu'il y ait de règles interdisant les séances de nuit en session extraordinaire, pas plus d'ailleurs qu'en session ordinaire.
Si nous pouvons légitimement être fatigués à cette heure tardive, je crois néanmoins, compte tenu de l'ordre du jour chargé de cette semaine, qu'il est nécessaire que nous poursuivions ce débat.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. On peut passer moins de temps sur les amendements ! (Rires.)
M. le président. D'ailleurs, madame Beaufils, vous nous donnez un bel exemple de résistance ! (Sourires.)
TITRE III
LES DISTRIBUTEURS D'ÉLECTRICITÉ OU DE GAZ
Article additionnel avant l'article 11
M. le président. L'amendement n° 174, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La mise en place de structures et de procédures de participation des usagers doit promouvoir la citoyenneté au sein du service public de l'énergie.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Par cet amendement, nous demandons la mise en place de structures et de procédures de participation des usagers pour promouvoir la citoyenneté au sein du service public de l'énergie.
Compte tenu des pratiques que nous avons connues par le passé, dans les domaines de l'eau, de l'assainissement ou du traitement des ordures ménagères, nous savons qu'il existe des dérives et il serait bon que les citoyens soient associés de façon à limiter ces dernières.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement n'a pas semblé très normatif à la commission, qui a émis un avis défavorable. Par ailleurs, je m'interroge : la citoyenneté a-t-elle vraiment à voir avec le secteur de l'énergie ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 174.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 11
Lorsqu'une entreprise d'électricité ou de gaz exploite, sur le territoire métropolitain, un réseau de distribution desservant plus de 100 000 clients et exerce une ou plusieurs autres activités dans le même secteur, elle constitue en son sein un service chargé de la gestion du réseau de distribution, indépendant, sur le plan de l'organisation et de la prise de décision, des autres activités.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 395, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Par le biais de cet article 11, vous comptez désintégrer les entreprises de l'électricité et du gaz, qui desservent plus de 100 000 clients, en les contraignant à créer un service chargé de la gestion du réseau de distribution indépendant sur le plan de l'organisation et de la prise de décision.
Pourquoi, alors, proposer, comme vous le faites à l'article 13, la possibilité de créer une société gestionnaire sur le même segment d'activité ?
Cet éclatement que vous favorisez sous forme de filialisation privera l'Etat du levier d'action qu'il a aujourd'hui en brisant l'unité actuelle. La création de filiales sous forme de sociétés de distribution leur permettra de se procurer des sources de profits en accaparant une clientèle captive.
Tronçonner comme vous voulez le faire les entreprises intégrées en créant des filiales multiples n'est pas une source d'économie puisque cela suppose une régulation beaucoup plus complexe que pour une seule entreprise.
En fait, désintégrer revient à déréguler, et cela coûte cher : coûts de développement, coûts de mise en oeuvre, coût des lobbies pour influencer le législateur, coût des litiges sur les transferts de propriété, coût de l'imperfection de la régulation, coût des nouveaux contrats... Tous ces coûts engendrés par les nouveaux intermédiaires venant remplacer la structure verticale ne peuvent aller que vers la hausse.
Ce n'est pas moi qui fais du catastrophisme pour appuyer mon argumentaire ; je communique simplement le résultat d'une étude de l'Agence internationale de l'énergie parue dans Le Monde le 30 septembre dernier.
Je pourrais ajouter d'autres coûts que l'étude ne mentionne pas : les coûts liés à la perte de taille, ceux qui sont liés à la volatilité du marché ou encore les coûts sociaux, avec les milliers de pertes d'emploi et la précarisation des statuts qui accompagnent toute privatisation.
Bien évidemment, ces coûts n'intègrent pas les dysfonctionnements inhérents au processus de libéralisation que nous avons déjà évoqués.
Nous pouvons admettre que le risque zéro n'existe pas - M. le ministre rappelait la panne de 1979 - mais, avec la libéralisation, le risque augmente, comme l'ont montré les nombreux dysfonctionnements intervenus ces dernières années.
Vous comprendrez, monsieur le ministre, mes chers collègues, que tous ces éléments nous incitent à demander la suppression de l'article 11.
M. le président. L'amendement n° 317, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine cet article par un alinéa ainsi rédigé :
En ce qui concerne les réseaux de distribution d'Electricité de France et de Gaz de France, ils sont gérés par un seul gestionnaire de réseau et service commun de distribution d'Electricité de France et de Gaz de France prévu par l'article 2 de la présente loi.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Nous déplorons les conséquences concrètes des orientations d'EDF-GDF et la décision de consacrer leurs moyens à un développement financier qui se fera au détriment de leurs missions de service public.
Ainsi, les investissements et les budgets d'exploitation traduisent une baisse régulière des moyens des centres de distribution en ce qui concerne la gestion du réseau, l'activité clientèle et la logistique. De plus, les réformes permanentes, la séparation et l'organisation verticale des activités hypothèquent le fonctionnement tout entier de la distribution, en particulier en abandonnant les atouts que constitue la mixité entre l'électricité et le gaz.
La séparation des domaines techniques entraîne des dysfonctionnements et des gâchis, en ce qui concerne tant le placement de nos deux énergies que l'évolution du réseau et la gestion de la clientèle.
II est nécessaire de maintenir une structure territoriale de synthèse et de proximité, dotée de l'autonomie décisionnelle et des moyens opérationnels pour assurer : le développement des utilisations du gaz et de l'électricité correspondant aux possibilités technologiques et aux exigences de notre époque ; le droit d'accès pour tous à l'énergie ; la qualité, la continuité, la sécurité attendues par les usagers et le personnel ; la garantie du développement de la distribution de l'électricité et du gaz à long terme.
Par ailleurs, les personnels demandent que les profils électricité et gaz, ainsi que les indicateurs de gestion soient systématiquement transmis avec l'examen des résultats en conseil national.
Le présent amendement prévoit aussi le maintien du statut d'EPIC d'EDF et de GDF, de leur caractère d'entreprise intégrée, qu'il faut opposer à la déréglementation du secteur de l'énergie, laquelle a échoué partout où elle a été mise en place en Europe et dans le monde.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet article 11 constitue la transposition des dispositions des directives relatives aux gestionnaires de réseaux.
Les directives permettent de surseoir à la séparation juridique des distributeurs jusqu'au 1er juillet 2007 et donc de ne procéder qu'à une séparation managériale et fonctionnelle. C'est le choix qui a été retenu dans ce texte. Le Gouvernement nous propose une transposition a minima afin de conserver, ce qui est important, le caractère intégré des entreprises EDF et GDF.
Il faut donc maintenir cet article 11. C'est pourquoi nous sommes défavorables à l'amendement n° 395.
Par l'amendement n° 317, madame Didier, vous entendez maintenir la mixité des réseaux de distribution. Cet amendement est bien sûr contraire aux directives européennes qui permettent de disposer, dans chaque activité gaz et électricité, d'un ou plusieurs gestionnaires de réseau de distribution. Nous y sommes donc défavorables.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 395.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 212 :
Nombre de votants | 282 |
Nombre de suffrages exprimés | 274 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 138 |
Pour l'adoption | 105 |
Contre | 169 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 317.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
La création d'un service mentionné à l'article 11 n'emporte par elle-même aucune modification des contrats de concession en cours mentionnés aux I et III de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. Lors de la conclusion de nouveaux contrats de concession ou lors du renouvellement ou de la modification des contrats en cours, le dirigeant du service est cosignataire, avec le responsable de l'entreprise, du contrat de concession.
M. le président. L'amendement n° 396, présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article tire les conséquences de la séparation fonctionnelle des services de production et de distribution sur les modalités de signature des contrats de concession de distribution d'électricité ou de gaz.
L'exposé de motifs pourrait laisser croire que ce texte procède à une pérennisation d'EDF-GDF Services dans son champ de compétences et sous son statut de service commun non doté de la personnalité juridique. En fait, vous programmez un démantèlement dont les 65 000 agents seront les victimes. Pourquoi vouloir mettre ces personnels en concurrence, alors qu'ils étaient habitués à travailler ensemble depuis des décennies, dans un esprit de coopération, pour des clients communs et dans un pôle unique de production énergétique ?
Qu'adviendra-t-il des activités commerciales liées à la distribution, notamment de celles concernant l'offre multi-énergie ? Cette offre est, en effet, un créneau prometteur pour les distributeurs, qui profiteront de la désintégration d'EDF-GDF pour jouer leur carte personnelle plutôt que pour travailler en commun et renforcer la cohérence au service de l'usager.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l'article 12.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'article 12 est, bien sûr, un article de conséquence de l'article 11. Il prévoit la cosignature des contrats de concession par le dirigeant de l'entreprise et le responsable des services de distribution.
Nous étions favorables à l'article 11 ; nous sommes donc favorables à l'article 12 et, par voie de conséquence, défavorables à l'amendement n° 396.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
Les personnes responsables de la gestion d'un réseau de distribution d'électricité ou de gaz qui dessert, sur le territoire métropolitain, plus de 100 000 clients :
1° Ne peuvent avoir de responsabilité directe ou indirecte dans la gestion d'activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz ;
2° Lorsqu'elles exercent la direction générale du réseau, se voient confier leur mission pour un mandat d'une durée déterminée et attribuer les moyens nécessaires à son exécution.
Les personnes assurant la direction générale des gestionnaires de réseaux ne peuvent être révoquées sans avis motivé préalable de la Commission de régulation de l'énergie. Passé un délai de quinze jours à compter de sa saisine, l'avis de la Commission de régulation de l'énergie est réputé donné ;
3° Assurent l'exploitation, l'entretien et, sous réserve des prérogatives des collectivités et des établissements mentionnés au cinquième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, le développement des réseaux de distribution d'électricité ou de gaz de manière indépendante vis-à-vis de tout intérêt dans des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz ;
4° Réunissent dans un code de bonne conduite les mesures d'organisation interne prises pour prévenir toute pratique discriminatoire en matière d'accès des tiers au réseau.
Les statuts de la société gestionnaire d'un réseau de distribution de gaz ou d'électricité s'il en est créé une, ou ceux de la société à laquelle appartient le service gestionnaire du réseau, doivent comporter des dispositions propres à concilier l'indépendance d'action des responsables de la gestion du réseau et la préservation des droits des actionnaires ou des prérogatives des dirigeants de l'entreprise intégrée. A cet effet, les actionnaires ou les dirigeants de l'entreprise doivent, selon le cas, pouvoir notamment :
- exercer un contrôle sur la fixation et l'exécution du budget du gestionnaire de réseau ;
- être consultés préalablement aux décisions d'investissement sur les réseaux, sur le système d'information et sur le parc immobilier, qui excèdent des seuils fixés par les statuts ;
- s'opposer à l'exercice d'activités qui ne relèvent pas des missions légalement imparties au gestionnaire d'un réseau de distribution, à la création ou à la prise de participations dans toute société, groupement d'intérêt économique ou autre entité juridique par ce gestionnaire de réseau et, au-delà de seuils fixés par les statuts, aux cessions d'actifs et à la constitution de sûretés ou garanties de toute nature.
En cas de création de société gestionnaire de réseau de distribution, l'ensemble des contrats relatifs à l'activité de gestionnaire de réseau de distribution peut être transféré à la société nouvellement créée, sans que ce transfert n'emporte aucune modification des contrats en cours d'exécution, quelle que soit leur qualification juridique, et ne soit de nature à justifier ni la résiliation, ni la modification de l'une quelconque de leurs clauses, ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en résultent. Ces transferts, apports partiels ou cessions d'actifs ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit s'ils sont réalisés dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 175 est présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté.
L'amendement n° 397 est présenté par Mme Beaufils, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et Mme Terrade.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Piras, pour présenter l'amendement n° 175.
M. Bernard Piras. Le projet de loi n'oblige pas à filialiser le réseau de distribution, mais il le permet de manière implicite à travers la rédaction de l'alinéa traitant des statuts de la société gestionnaire d'un réseau de distribution de gaz ou d'électricité.
La filialisation des réseaux de distribution n'est pas imposée par les directives. Les articles 30 et 33, respectivement des directives « électricité » et « gaz », permettent de surseoir à la séparation juridique des activités de distribution jusqu'au 1er juillet 2007. Pourquoi le Gouvernement n'utilise-t-il pas cette possibilité ?
La filialisation des réseaux de distribution participe en fait au dépeçage d'EDF et de GDF que ce projet de loi organise. Cet article, combiné à l'article 2 du projet de loi, confirme bien votre volonté de démanteler EDF-GDF Services.
Par ailleurs, ces articles remettent en cause le caractère public de la gestion du réseau de distribution, donc du service public de proximité, puisque, désormais, tous les montages juridiques sont possibles pour gérer le réseau. Nous proposons donc la suppression de cet article.
Enfin, nous prions le Gouvernement de demander à la Commission européenne de revenir sur cette obligation de séparation juridique au 1er juillet 2007. La remise des rapports prévue pour 2006 par les directives de 2003, notamment celui sur les mesures de séparation, devra être l'occasion de rediscuter du bien- fondé de la séparation juridique des réseaux de distribution.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 397.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet entêtement des gouvernements et de la Commission, ainsi que cet aveuglement devant les réalités, s'inscrivent dans la logique profonde de l'Europe actuelle qui a fait de l'ouverture à la concurrence l'axe principal de sa construction. Directement dérivé des traités européens, le droit de la concurrence de niveau communautaire surdétermine les autres droits. C'est un droit fondateur auquel sont subordonnés les droits économiques et sociaux des citoyens qui relèvent du droit national.
Certes, un article récent du traité reconnaît « la place qu'occupent les services d'intérêt économique général parmi les valeurs communes de l'Union. » Mais que vaut cette affirmation de portée générale face à l'impératif de la concurrence sanctifié par l'Acte unique ? La question des services publics touche donc le coeur du projet européen.
L'article 86 du traité a été l'instrument utilisé par la Commission européenne pour libéraliser les services publics. Il comprend trois alinéas.
Le premier indique que « les Etats membres, en ce qui concerne les entreprises publiques, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles du présent traité, notamment à celles prévues aux articles 7 et 85 à 94 inclus. »
L'article 7 interdit tout traitement différencié en raison de la nationalité et les articles 85 à 94 ont trait au bon fonctionnement de la concurrence. Le premier alinéa de l'article 86 indique donc que les entreprises publiques doivent respecter les règles de la concurrence qui sont au coeur du Traité.
Le deuxième alinéa semble néanmoins laisser des marges de manoeuvre aux services publics : « Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. » Mais ces marges de manoeuvre sont aussitôt bornées, car l'alinéa précise que « le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté. »
Le troisième alinéa indique que « la Commission veille à l'application des dispositions du présent article et adresse, en tant que besoin, les directives ou décisions appropriées aux Etats. »
L'article 86 a une portée considérable. Il est mortifère pour les services publics. Ceux-ci sont soumis aux règles de la concurrence. Ils ne peuvent en déroger que si cela n'entrave pas le développement des échanges « dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté. » C'est la Commission qui est juge des dérogations possibles. Elle a ainsi tout pouvoir pour ouvrir les services publics à la concurrence. Cet article existait dès la création de la Communauté. Il n'avait quasiment jamais été utilisé. Il a fallu attendre la vague libérale des années 1980 pour qu'il acquière son poids politique actuel.
Dans la pratique, la Commission a eu l'intelligence politique d'utiliser cet article en y associant les gouvernements. Ainsi, les principales décisions de libéralisation, en particulier dans les télécommunications, ont-elles été prises par le Conseil des ministres.
Aucun gouvernement n'a pensé que la question des services publics était assez importante pour remettre en cause le contenu du traité, ouvrant ainsi une crise qui aurait été salutaire pour l'avenir de l'Europe.
Mais voilà, au lieu de résister, monsieur le ministre, selon une tradition bien ancrée, nous débattons de la présente réforme. La filialisation que vous nous proposez à travers l'article 13 participe de l'absurde désintégration des entreprises d'électricité et de gaz. Cet article doit être supprimé puisqu'il tire les conséquences de l'article 11, lequel ne nous inspire qu'un refus catégorique.
Nous ne pouvons accepter, en matière de distribution, qu'un service commun, emblématique de l'intégration d'EDF et de GDF, soit vidé de sa substance. Je crois que nous devrions, au contraire, demander une renégociation, comme nous l'avons déjà proposé, de ces règles européennes qui pèsent aussi lourdement sur l'ensemble de nos services publics.
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le sixième alinéa (4°) de cet article, après les mots :
code de bonne conduite
insérer les mots :
, adressé à la Commission de régulation de l'énergie,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement tend à ce que le code de bonne conduite soit adressé aux régulateurs, comme nous l'avions fait pour le gestionnaire du réseau de transport, le GRT.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du 4° de cet article, supprimer les mots :
s'il en est créé une,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement est purement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 92, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa du 4° de cet article, supprimer les mots :
et l'exécution
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes toujours en train de traiter des modalités pratiques de l'autonomie fonctionnelle des réseaux de distribution.
Notre commission a adopté cet amendement qui vise à supprimer, s'agissant du contrôle que les actionnaires du réseau peuvent exercer, la référence à l'exécution du budget. Cela doit être compris comme la manifestation de notre souci de garantir l'indépendance des gestionnaires de réseaux.
M. le président. L'amendement n° 176, présenté par MM. Piras, Bel, Raoul, Reiner, Domeizel et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
Supprimer le neuvième alinéa de cet article.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. L'obligation de consulter les actionnaires « préalablement aux décisions d'investissements sur les réseaux, sur le système d'information et sur le parc immobilier, qui excèdent le seuil fixé par les statuts », limite l'indépendance de la société gestionnaire du réseau de distribution.
La directive du 26 juin 2003 limite l'action de la société gestionnaire de réseau non à un seuil fixe, mais à un plan financier approuvé par la société mère et révisable annuellement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'article 13 est, en fait, l'application de l'article 11, que nous avons adopté tout à l'heure. La directive permettait aux gouvernements de surseoir à la filialisation.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C'est ce qu'a fait le Gouvernement. Cela garde ce service intégré à GDF.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cela répond à votre souhait, monsieur Piras. C'est la raison pour laquelle je ne comprends pas pourquoi vous demandez la suppression de cet article. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 175, ainsi que sur l'amendement identique n° 397.
La commission est favorable à l'amendement n° 92, qui nous a semblé tout à fait utile, car son adoption permettrait de garantir une véritable autonomie de gestion.
En revanche, elle a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 176, qui vise à supprimer la disposition permettant aux dirigeants de l'entreprise d'être consultés préalablement aux décisions d'investissement sur les réseaux, sur le système d'information et sur le parc immobilier.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Pour les raisons déjà indiquées, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques de suppression nos 175 et 397. L'article 13 prévoit en effet une transposition a minima qui devrait donner satisfaction à tout le monde.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements nos 31 et 32 de la commission, ainsi que sur l'amendement n° 92.
Enfin, pour les raisons que M. le rapporteur a excellemment exprimées, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 176.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 175 et 397.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 213 :
Nombre de votants | 312 |
Nombre de suffrages exprimés | 312 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 157 |
Pour l'adoption | 113 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 31.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 176.
Mme Marie-France Beaufils. En adoptant l'ensemble des articles portant sur les distributeurs d'électricité ou de gaz, nous sommes allés à l'encontre des objectifs présentés dans l'exposé des motifs du projet de loi.
L'objectif affiché était d'assurer une pérennisation d'EDFGDF Services. En fait, le dispositif adopté ne pérennisera absolument pas cette entité, qui est ainsi promise au démantèlement.
Cela entraînera une situation dans laquelle les stratégies des deux entreprises publiques seront complètement divergentes, à l'opposé de l'objectif visé, à savoir renforcer la place d'EDF et de GDF dans le paysage tant français qu'européen.
L'amendement déposé par nos collègues du groupe socialiste a le mérite de laisser tout de même une petite marge de manoeuvre, de telle sorte que nous ne nous trouvions pas de nouveau face à des obligations imposées par certains actionnaires, qui pourraient choisir des orientations contraires au service public tel que nous l'envisageons.
C'est pourquoi nous voterons cet amendement, sur lequel nous demandons un scrutin public. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 176.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 214 :
Nombre de votants | 312 |
Nombre de suffrages exprimés | 304 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 153 |
Pour l'adoption | 105 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 13
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 70 est présenté par MM. Pintat, J. Blanc, Doligé, Fournier, du Luart et Pépin.
L'amendement n° 220 est présenté par MM. Besson, Raoul et Sergent.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le deuxième alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, les mots : « et à l'amélioration » sont remplacés par les mots : «, et les surcoûts nécessaires à l'amélioration ».
La parole est à M. Xavier Pintat, pour présenter l'amendement n° 70.
M. Xavier Pintat. Il s'agit de préciser que les tarifs d'utilisation des réseaux tiennent compte des surcoûts nécessaires à l'enfouissement de ces réseaux.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur Pintat, si vous additionnez les dispositions prévues, d'une part, à l'amendement n° 5 relatif à l'enfouissement que nous avons adopté à l'article 1er et, d'autre part, au 3° de l'article 30 du projet de loi, selon lequel les coûts résultant de l'exécution des missions de service public sont pris en compte dans la fixation des tarifs d'utilisation de ces réseaux, votre amendement est doublement satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Pintat, l'amendement n° 70 est-il maintenu ?
M. Xavier Pintat. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 70 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos 115 et 116 sont présentés par M. Amoudry.
L'amendement n° 115 est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa du 6° de l'article 10 de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque le bénéficiaire des réserves a exercé ses droits à l'éligibilité prévus à l'article 22 de la loi n° 2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, l'énergie réservée lui est cédée par le concessionnaire de la chute d'eau au tarif de cession mentionné à l'article 4-I de la loi n° 2000108 du 10 février 2000, avec application d'un rabais égal à celui prévu dans la notification d'attribution, ce rabais étant lui même affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,33.
« Le bénéficiaire supporte le prix de l'acheminement de cette énergie du lieu de production au lieu de consommation, tel que prévu dans les décrets relatifs aux tarifs d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution à l'exclusion de toutes autres charges relatives à cette prestation.
« L'énergie réservée est réputée livrée en totalité par le producteur ou le responsable de l'obligation d'achat de l'électricité produite, à ce titre elle sera payée en totalité par le bénéficiaire quelque soit la quantité réellement consommée.
« Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que les autorités concédantes de la distribution publique d'énergie électrique visées à l'article L. 222431 du code général des collectivités territoriales continuent à percevoir, auprès de leurs concessionnaires, les redevances relatives à l'énergie réservée fixées dans les contrats des concessions de distribution de l'électricité applicables à la date d'entrée en vigueur de la loi n° 20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie. »
L'amendement n° 116 est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa du 6° de l'article 10 de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque le bénéficiaire des réserves a exercé ses droits à l'éligibilité prévus à l'article 22 de la loi n° 2000108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, l'énergie réservée lui est cédée par le concessionnaire de la chute d'eau ou celui qui dispose de sa production, au tarif de cession mentionné à l'article 4I de la loi n° 2000108 du 10 février 2000 ou à défaut au coût de l'énergie implicitement compris dans le tarif intégré dont bénéficiait l'attributaire avant de faire valoir son éligibilité, ceci avec application d'un rabais égal à celui prévu dans la notification d'attribution ce rabais étant lui même affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,33.
« Le bénéficiaire supporte le prix de l'acheminement de cette énergie du lieu de production au lieu de consommation, tel que prévu dans les décrets relatifs aux tarifs d'utilisation des réseaux publics de Transport et de Distribution à l'exclusion de toutes autres charges relatives à cette prestation.
« L'énergie réservée est réputée livrée en totalité par le producteur ou le responsable de l'obligation d'achat de l'électricité produite, à ce titre elle sera payée en totalité par le bénéficiaire quelque soit la quantité réellement consommée.
« Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que les autorités concédantes de la distribution publique d'énergie électrique visées à l'article L. 222431 du code général des collectivités territoriales continuent à percevoir, auprès de leurs concessionnaires, les redevances relatives à l'énergie réservée fixées dans les contrats des concessions de distribution de l'électricité applicables à la date d'entrée en vigueur de la loi n° 20038 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie. »
La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Paul Amoudry. Ces amendements visent à assurer la pérennité du dispositif de l'énergie réservée dans le nouveau contexte de l'ouverture à la concurrence du marché de la fourniture d'électricité.
Je rappelle que le dispositif de l'énergie réservée a été mis en place au début du siècle dernier, pour faciliter l'implantation des grands ouvrages de production hydroélectrique dans les zones de montagne et leur acceptation par les populations locales. Il a été instauré par la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique et a été revu par la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
Ce système impose au concessionnaire d'une chute d'eau de mettre à disposition de services publics ou d'entreprises locales une part de la puissance électrique produite par l'ouvrage en concession. C'est au conseil général que revient le soin de choisir les bénéficiaires.
Avec la nationalisation de l'électricité, ce dispositif s'est traduit concrètement par l'application par EDF d'un rabais, de l'ordre de 15 % à 30 %, sur le tarif de vente de l'électricité pour la puissance attribuée au bénéficiaire.
L'organisation de l'ouverture à la concurrence dans le secteur de l'électricité modifie cette situation. Dans ce nouveau contexte, les clients éligibles choisissent leur fournisseur et lui paient un prix librement négocié pour la fourniture d'électricité. En outre, le gestionnaire de réseau leur applique un tarif réglementé correspondant à l'acheminement de l'électricité jusqu'au point de consommation.
L'ouverture du marché, qui concernera tous les clients professionnels à partir du 1er juillet 2004, puis l'ensemble des consommateurs à compter du 1er juillet 2007, devrait donc se traduire, à terme, par la disparition des tarifs actuels de vente d'EDF et l'impossibilité pratique de valoriser l'énergie réservée.
L'adaptation du dispositif de valorisation de l'énergie réservée prévue à l'article 58 de la loi du 3 janvier 2003 consiste à revenir, en quelque sorte, aux dispositions antérieures à la nationalisation. Au lieu du rabais aujourd'hui appliqué par EDF, le concessionnaire de la chute d'eau devra consentir au client éligible bénéficiaire désigné par le conseil général l'énergie réservée à un prix réduit fixé par arrêté ministériel. La différence entre le prix réduit et le prix auquel le client éligible aurait dû acheter cette électricité sur le marché devra correspondre approximativement au montant de l'avantage financier résultant de l'application du rabais actuel. Par ailleurs, le client éligible devra s'acquitter normalement vis-à-vis du gestionnaire de réseau du coût de l'acheminement de cette énergie réservée jusqu'au site de consommation, selon la tarification en vigueur.
Il s'avère que, dix-huit mois après la publication de la loi du 3 janvier 2003, l'arrêté ministériel fixant le prix de cession de l'énergie réservée n'a toujours pas paru. Cette situation est fort préjudiciable aux clients bénéficiant de quotas d'énergie réservée et ayant opté pour l'éligibilité.
L'amendement n° 115 a donc pour objet de pallier l'absence d'arrêté en insérant dans la loi un mode de calcul du prix de l'énergie réservée fondé sur le tarif de cession de l'électricité aux distributeurs non nationalisés prévu à l'article 4 de la loi du 10 février 2000, auquel on appliquera un rabais. Cette idée est d'ailleurs conforme à la réponse que l'administration a faite à une récente question du député Michel Bouvard. La proposition présentée pour le calcul du rabais, consistant à majorer de 33 % le rabais prévu dans l'attribution, ne paraît pas excessive, dès lors que ce rabais ne porte plus que sur la seule part énergie.
Tel est l'objet de l'amendement n° 115, qui vise à fixer dans la loi le plus précisément possible les conditions de cession et de transfert de l'énergie réservée, afin d'éviter qu'elle ne devienne l'enjeu de négociations commerciales.
En ce qui concerne l'amendement n° 116, il s'agit d'une variante du précédent, tendant à anticiper, en quelque sorte, la non-publication du décret relatif au tarif de cession de l'électricité aux distributeurs non nationalisés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J'ai bien compris quel était l'objet de ces deux amendements.
M. Amoudry a notamment exprimé le regret que l'arrêté devant fixer les tarifs n'ait toujours pas été publié. Je crois que M. le ministre répondra sur ce point précis, mais j'indiquerai, pour ma part, que l'examen de ces deux amendements devrait prendre place non pas dans la discussion du texte qui nous occupe, mais dans le cadre de l'élaboration de la loi d'orientation sur l'énergie.
Je rappelle d'ailleurs que, à l'occasion de la première lecture du projet de loi d'orientation sur l'énergie, M. le ministre avait pris l'engagement de conduire une réflexion non pas sur l'énergie réservée, mais sur l'ensemble du secteur de l'énergie hydraulique. Cela devrait répondre, me semble-t-il, à l'autre préoccupation de M. Amoudry.
Par conséquent, je prie notre collègue de bien vouloir retirer ses deux amendements, qui, je le répète, devraient être discutés en une autre occasion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Parce qu'il le peut, le Gouvernement ira un peu plus loin que M. le rapporteur, mais il est, sur le fond, du même avis.
Le problème est réel, et M. Amoudry l'a soulevé à bon droit. Cela étant, M. Poniatowski a raison d'affirmer que ce débat devrait trouver sa place dans la discussion du projet de loi d'orientation sur l'énergie, dont nous sommes d'ailleurs en train de préparer la deuxième lecture. Dans cette optique, le Gouvernement est disposé à vous associer à la réflexion qu'il mène sur le sujet que vous avez évoqué, monsieur Amoudry.
Au bénéfice de cette proposition, je vous suggère donc de retirer vos amendements et de prendre part à la préparation d'un dispositif dont le champ doit, à mon avis, excéder la problématique que vous avez posée.
M. le président. Monsieur Amoudry, les amendements nos 115 et 116 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Paul Amoudry. Une proposition telle que celle de M. le ministre ne peut, bien sûr, être refusée. Je m'y rallierai volontiers, à la condition toutefois que je sois en mesure de participer effectivement à la réflexion projetée, certaines échéances m'attendant à la fin de septembre ! ... Cela étant, des énergies seront de toute façon disponibles sur nos travées !
M. Jean-Paul Amoudry. Sur la foi de cette assurance, j'accepte de retirer les amendements. J'aimerais toutefois que l'on clarifie la situation : l'arrêté que nous attendons et les mesures susceptibles d'être inscrites dans la loi se superposeront-ils, ou le projet d'arrêté est-il purement et simplement abandonné au profit de l'élaboration de dispositions législatives ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. L'arrêté est suspendu, car nous voulons procéder à une refonte du système. C'est pour cette raison que je propose de vous associer à notre réflexion.
M. Jean-Paul Amoudry. Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. le président. Les amendements nos 115 et 116 sont retirés.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de M. Gérard Braun, un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur l'administration électronique au service du citoyen.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 402 et distribué.
4
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mercredi 7 juillet 2004, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 383, 2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.
Rapport (n° 386, 2003-2004) fait par M. Ladislas Poniatowski au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 387, 2003-2004) de M. Dominique Leclerc fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 400, 2003-2004) de M. Philippe Marini fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat d'orientation budgétaire ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : Mercredi 7 juillet 2004, à 17 heures
Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à la politique de santé publique (n° 278, 2003-2004) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : Jeudi 8 juillet 2004, à 17 heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 7 juillet 2004, à une heure trente-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD