Art. 5
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Art. 7

Article 6

La haute autorité peut procéder ou faire procéder à la résolution amiable des différends portés à sa connaissance, par voie de médiation.

Lorsqu'il est procédé à cette médiation, les constatations et les déclarations recueillies au cours de celle-ci ne peuvent être ni produites ni invoquées ultérieurement dans les instances civiles ou administratives, sans l'accord des personnes intéressées.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 58 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery et Khiari, MM. Assouline, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :

La haute autorité assiste la victime de discrimination dans la constitution de son dossier. Elle aide la victime à identifier les procédures adaptées à son cas.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Les directives communautaires disposent que les organismes de lutte contre les discriminations doivent apporter aux victimes « une aide indépendante pour engager une procédure pour discrimination ».

En effet, le problème des victimes de discrimination tient à la difficulté qu'elles ont à constituer un dossier et à apporter la preuve de la discrimination.

Comme le préconisait M. Bernard Stasi dans son rapport, nous souhaitons que les services de l'autorité aident les plaignants à constituer leur dossier et à rassembler les éléments circonstanciés pertinents pour le règlement du litige, en s'efforçant d'identifier, puis de proposer les procédures adaptées à leur cas : médiation ou recours pénal, civil ou administratif. L'objectif est que le service chargé du traitement des réclamations puisse offrir une expertise juridique et technique afin d'aider à la constitution des dossiers de discrimination et, le cas échéant, à l'administration de la preuve.

Cette aide nous paraît essentielle. C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'elle soit inscrite dans la loi.

M. le président. L'amendement n° 33, présenté par Mmes Assassi, Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

La Haute Autorité assiste la victime de discrimination dans la constitution de son dossier et le rassemblement des éléments permettant le règlement du litige. Elle aide la victime à identifier les procédures adaptées à son cas : recours devant une juridiction ou médiation.

La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Cet amendement a le même objet que celui que vient d'exposer Mme  Boumediene-Thiery : nous souhaitons renforcer les missions de la Haute autorité, en particulier dans le domaine de l'assistance aux victimes de discrimination.

On le sait, et c'est ce que montre le besoin que nous éprouvons de disposer de telles instances, il est la plupart du temps très difficile aux victimes de constituer elles-mêmes le dossier et de rassembler les éléments d'information, d'appréciation ou de preuve aux fins d'établir la réalité des faits, car elles sont souvent seules, démunies et en difficulté du fait même des discriminations qu'elles subissent.

Madame la ministre, vous avez rappelé que les associations étaient déjà actives dans ce domaine. Il me semble que, bien évidemment sans les « coiffer », sans non plus, j'y tiens beaucoup, se substituer à la justice, l'instance que nous sommes en train de créer, dans la mesure où elle a une certaine autorité, doit jouer un rôle dans l'aide à la médiation et au recours en justice, qui ne va pas du tout de soi.

Peut-être est-ce sous-entendu, mais cela ira mieux en le disant !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission était favorable à l'esprit des deux amendements, mais, pour des raisons de cohérence formelle, souhaitait qu'ils soient rectifiés sur quelques points.

Ces rectifications ayant été apportées par Mme Boumediene-Thiery, la commission est favorable à l'amendement n° 58 rectifié et souhaite le retrait de l'amendement n° 33, qui se trouvera satisfait.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.

M. le président. Madame Borvo, l'amendement n° 33 est-il maintenu ?

Mme Nicole Borvo. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 33 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 58 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Art. 6
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Art. 8

Article 7

La haute autorité peut, après avis adressé aux personnes intéressées et avec leur accord, procéder à des vérifications sur place, dans les locaux administratifs, ainsi que dans les lieux, locaux, moyens de transport accessibles au public et dans les locaux professionnels, à condition que ces derniers soient exclusivement consacrés à cet usage.

Lors de ses vérifications sur place, elle peut entendre toute personne susceptible de fournir des informations.

Les agents de la haute autorité qui sont autorisés à procéder à des vérifications sur place en application du présent article reçoivent une habilitation spécifique donnée par le procureur général près la cour d'appel du domicile de l'agent dans des conditions et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa de cet article, avant le mot :

procéder

insérer les mots :

charger un ou plusieurs de ses membres ou de ses agents de

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que les vérifications sur place peuvent être confiées par la Haute autorité à ses membres aussi bien qu'à ses agents. Les membres de la Haute autorité jouiraient ainsi des mêmes prérogatives que ceux de la CNIL ou de la CNDS.

En tant que membres, ils ne seraient pas tenus d'obtenir une habilitation du procureur général de la cour d'appel de leur domicile, à la différence des agents qui les accompagneront et dresseront ensuite le procès-verbal de la vérification.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. L'avis est favorable, car le Gouvernement estime comme le rapporteur que, conjointement avec les agents habilités des services de la Haute autorité, pour lesquels cela est prévu à l'article 7, les membres du collège doivent pouvoir procéder aux vérifications sur place.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Türk, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

En cas d'opposition du responsable des lieux, le Président de la haute autorité peut saisir le juge des référés d'une demande motivée afin qu'il autorise les vérifications sur place.

La parole est à M. Alex Türk.

M. Alex Türk. Monsieur le président, je rappelais ce matin que l'élément déterminant du fonctionnement d'une autorité administrative indépendante réside évidemment dans le mécanisme de contrôle et des investigations sur place. Or, en l'état actuel des choses, l'accord des personnes intéressées est nécessaire.

Mon amendement vise donc d'abord à préciser que les personnes intéressées sont, en l'occurrence, les responsables des lieux. Il tend ensuite à prévoir la possibilité de passer outre au défaut d'accord, évidemment sous le contrôle du juge. Sinon, il suffirait de s'opposer à un contrôle pour que celui-ci n'ait pas lieu : autant fermer boutique tout de suite !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission a donné un avis favorable, car elle estime que l'amendement renforce utilement les pouvoirs d'investigation de la HALDE.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. J'aurais souhaité que, après avoir entendu les explications que je vais lui apporter, M. le sénateur puisse retirer cet amendement.

Dans le cas visé à l'article 7, où des vérifications sur place sont envisagées, le texte prévoit que ces vérifications ont lieu avec l'accord des personnes intéressées, ce qui donne à celles-ci la possibilité de les refuser. Il n'est donc pas tout à fait cohérent avec ce système de prévoir explicitement une intervention du juge des référés pour réduire le désaccord et autoriser directement l'entrée dans les lieux.

Pour autant, la rédaction actuelle de l'article 8, qui a trait à l'intervention du juge des référés, est de portée tellement générale qu'elle n'exclut pas, à mon sens, la saisine de ce juge dans le cadre de la mise en oeuvre par la HALDE des pouvoirs que lui confère l'article 7. Je pense cependant qu'il faut laisser ouverte cette possibilité sans dicter sa conduite au juge des référés, qui pourra prendre, s'il est saisi, toutes mesures utiles.

M. le président. Monsieur Türk, l'amendement n° 20 rectifié est-il maintenu ?

M. Alex Türk. Je suis très préoccupé, car j'ai beaucoup de mal, madame la ministre, à vous rejoindre sur ce point.

Le texte est tout à fait explicite : s'il n'y a pas d'accord, la procédure s'arrête ! Dans quelque sens que l'on prenne le problème, je ne vois pas comment on peut échapper au recours au juge des référés.

Je ne suis pas en mesure de retirer cet amendement, qui me paraît au contraire très clair et qui, je le rappelle, porte sur un point extrêmement important. Ce serait d'ailleurs la seule hypothèse que l'on puisse connaître en la matière ! Par définition, il faut que le contrôle et les investigations aient lieu et qu'aucune entrave ne soit possible.

J'avais envisagé de déposer un amendement visant à réintroduire le délit d'entrave. Je ne l'ai pas fait, parce qu'il me paraissait suffisant de préciser que l'on pouvait passer outre à l'opposition. Mais sans délit d'entrave et sans possibilité de passer outre à l'opposition, très sincèrement, le dispositif perd pratiquement tout son effet !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je tiens à préciser que la commission, ce matin, a longuement examiné cet amendement avant de lui donner un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Art. 7
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Art. 9

Article 8

Lorsque ses demandes ne sont pas suivies d'effet, la haute autorité peut mettre en demeure les personnes intéressées de lui répondre dans un délai qu'elle fixe.

En cas de refus, le président de la haute autorité peut saisir le juge des référés d'une demande motivée aux fins d'ordonner toute mesure d'instruction que ce dernier juge utile.

M. le président. L'amendement n° 21 rectifié, présenté par M. Türk, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa de cet article, après les mots :

ses demandes

insérer les mots :

formulées en vertu des articles 4 et 5

La parole est à M. Alex Türk.

M. Alex Türk. Cet amendement vise à préciser le cadre juridique de la mise en demeure.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission a émis un avis favorable.

Même si la rédaction de l'article 8 ne lui paraissait pas par trop ambiguë, elle pense que la modification proposée, sans rien changer à ce qui était initialement prévu, rendra malgré tout le texte un peu plus clair.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Je suis désolée, monsieur Türk, mais il ne nous paraît pas souhaitable de limiter la portée de l'article 8 à la mise en oeuvre des pouvoirs que confère à la Haute autorité le seul article 4, qui est relatif à ses relations avec les personnes privées, et d'exclure de son champ la mise en oeuvre des pouvoirs de la HALDE à l'égard des organismes de la sphère publique, qui sont eux-mêmes visés à l'article 5.

Certes, il ne s'agira sans doute pas du même juge des référés dans les deux cas, puisque ce sera le juge des référés civil dans le cadre de l'article 4 et le juge des référés administratif dans le cadre de l'article 5.

Il est donc vrai que, à l'article 8, la notion de juge des référés comporte une certaine ambiguïté, mais cela ouvre deux possibilités, et il ne me paraît pas souhaitable de nous priver de l'une d'entre elles.

Monsieur le sénateur, n'y voyez pas de ma part un quelconque acharnement, mais j'apprécierais vraiment que vous acceptiez de retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je rappelle que l'amendement n° 21 a été rectifié et que la version que nous examinons vise également l'article 5. Peut-être cette précision vous permettra-t-elle, madame le ministre, de faire évoluer votre position.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. En effet, monsieur le rapporteur : dans ces conditions, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 21 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 59, présenté par Mmes Boumediene-Thiery et Khiari, MM. Assouline, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

peut mettre

par le mot :

met

Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots :

peut saisir

par le mot :

saisit

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à donner à la Haute autorité le pouvoir de contraindre de déférer à l'une de ses demandes.

Le dispositif prévoit une procédure en deux temps. Lorsqu'une de ses demandes n'est pas suivie d'effet, la HALDE aura la possibilité de mettre en demeure la personne intéressée de lui répondre dans un délai donné. En cas d'échec de la mise en demeure, le président de la HALDE pourra saisir le juge des référés d'une demande motivée aux fins d'ordonner toute mesure d'instruction que ce dernier juge utile.

Je rappelle que la mission Stasi préconisait une mesure plus coercitive consistant à faire du refus de déférer aux demandes de la HALDE une infraction sanctionnée par le code pénal selon un dispositif proche de celui qui est prévu pour la CNIL.

Nous proposons, quant à nous, de faire obligation à la Haute autorité de mettre les personnes intéressées en demeure de lui répondre et, en cas de refus de leur part, de lui faire obligation de saisir le juge des référés.

Si nous voulons optimiser l'efficacité de cette instance, il faut lui donner les moyens nécessaires : nous ne pouvons nous contenter, pour lutter contre la discrimination, d'un discours qui, tout en énonçant de bonnes intentions, laisserait en réalité à toute procédure un caractère facultatif.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission a estimé dans sa majorité qu'il convenait sur ce point de laisser une marge d'appréciation à la Haute autorité. Elle a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. L'avis est également défavorable, car cet amendement ne nous paraît pas utile.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Türk, est ainsi libellé :

Au début du second alinéa de cet article, remplacer les mots :

En cas de refus

par les mots :

Lorsque la mise en demeure n'est pas suivie d'effet.

La parole est à M. Alex Türk.

M. Alex Türk. Cet amendement tend à préciser la condition préalable à la saisie du juge des référés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Art. 8
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Art. 10

Article 9

Les personnes astreintes au secret professionnel ne peuvent être poursuivies en application des dispositions de l'article 226-13 du code pénal pour les informations à caractère secret qu'elles auront pu révéler à la haute autorité, dès lors que ces informations entrent dans le champ de compétence de la haute autorité tel que prévu à l'article 1er de la présente loi.

Les membres et les agents de la haute autorité ainsi que les personnalités qualifiées auxquelles il est fait appel sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments nécessaires à l'établissement des avis, des recommandations et des rapports.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 28 rectifié est présenté par MM. de Richemont, Cambon, Béteille, Gélard et Guené, Mme Michaux-Chevry et M. Peyrat.

L'amendement n° 60 rectifié est présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes Boumediene-Thiery et Khiari, MM. Assouline, Collombat, C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le premier alinéa de cet article, après les mots :

haute autorité

insérer les mots :

, à l'exception de celles visées à l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques

La parole est à M. Christian Cambon, pour présenter l'amendement n° 28 rectifié.

M. Christian Cambon. Cet amendement a trait à la protection de la profession d'avocat en matière de secret professionnel.

L'article 9 du projet de loi prévoit notamment que les personnes astreintes au secret professionnel ne pourront être poursuivies en application des dispositions de l'article 226-13 du code pénal pour les informations à caractère secret qu'elles auront pu révéler à la Haute autorité, dès lors que ces informations entrent dans le champ de compétence de la Haute autorité tel qu'il est prévu à l'article 1er du présent projet de loi.

Je rappelle que l'article 226-13 prévoit une peine d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, ce qui n'est pas négligeable.

Si nous comprenons bien que l'objet de cette disposition n'est en aucun cas d'obliger une personne à enfreindre le secret professionnel, mais qu'il est seulement de la soustraire à des poursuites pénales, on peut néanmoins s'interroger sur la dimension de la fenêtre ouverte en matière de secret professionnel au détour de ce texte.

En effet, à ce jour, les exceptions en matière de poursuites pour atteinte au secret professionnel sont limitées à des cas extrêmement graves, dans lesquels l'absence de divulgation des informations conduit à la perpétuation des faits. Ces cas sont exhaustivement prévus à l'article 226-14 du code pénal, qui distingue trois types de situations - seul le premier concerne les avocats. Ne peut être poursuivi pour atteinte au secret professionnel « celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes sexuelles, (...) infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ».

Dès lors, il semble qu'il y ait une disproportion entre l'atteinte au secret professionnel que permet cet article et les conditions impératives qui justifient l'exception mentionnée précédemment. Il semble donc utile de rappeler que le secret professionnel de l'avocat est d'ordre public, qu'il est général, absolu et illimité dans le temps.

L'avocat doit pouvoir demeurer le confident nécessaire de son client et ce en toute quiétude, parce que ce secret est établi dans l'intérêt public. L'avocat ne doit pouvoir en être relevé par quelque autorité que ce soit.

Afin qu'il ne soit pas porté atteinte à ces principes et que la profession d'avocat et ses spécificités soient protégées, il conviendrait donc de modifier le premier alinéa de l'article 9 du projet de loi.

L'amendement que nous vous proposons d'adopter tend à sortir du champ de l'ouverture du secret professionnel les informations visées à l'article 66-5 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, à savoir « les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, en toute matière, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention "officielle", les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier ».

M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour présenter l'amendement n° 60 rectifié.

M. Robert Badinter. L'objet de cet amendement est identique à celui que vient de présenter M. Cambon à l'instant et se justifie par les mêmes motifs, sur lesquels je tiens à attirer l'attention de la Haute Assemblée.

Le secret professionnel de l'avocat n'a pas été instauré pour la commodité de celui-ci. Dans un Etat de droit, il est nécessaire que les confidences, les pièces et les correspondances échangées entre l'avocat et son client ne puissent être ensuite utilisées contre ce dernier. Le secret professionnel de l'avocat est l'un des principaux fondements de la liberté dans les Etats de droit.

On peut à l'extrême rigueur concevoir que l'on puisse y déroger dans des cas tout à fait extraordinaires. Un exemple a été cité, on pourrait s'interroger sur d'autres cas, mais ils doivent absolument demeurer exceptionnels et constituer des raretés dans notre droit. Dans le cas contraire, il s'agirait purement et simplement d'une atteinte aux droits des justiciables et, au-delà, aux libertés elles-mêmes.

Par conséquent, dans le cas précis, l'exception au secret professionnel ne se justifie pas. Il est donc nécessaire de soustraire les avocats à l'obligation prévue par l'article 9.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission est parfaitement consciente qu'il s'agit ici d'un problème de conciliation entre, d'une part, le respect du secret professionnel, pas exclusivement celui de l'avocat d'ailleurs, et, d'autre part, la révélation nécessaire des discriminations.

Sur ce point, la commission estime que l'évolution résultant des amendements proposés va effectivement dans le bon sens. Elle émet donc un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Avis favorable sur les deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.

M. Christian Cointat. Je partage tout à fait le point de vue de notre collègue M. Badinter. Je suis donc favorable à ces deux amendements identiques.

Je suis toutefois inquiet. En effet, le secret professionnel n'a pas été créé pour satisfaire les uns ou les autres. Il a été créé dans l'intérêt de la société, voire dans celui de l'Etat. Dans certains cas, l'Etat est concerné au plus haut niveau par le secret professionnel ; je fais allusion au secret défense.

L'article 9 ne risque-t-il pas d'occasionner des dérapages et de remettre en cause l'ensemble du dispositif relatif au secret professionnel ?

Il faudra en effet prendre des mesures, notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou de certaines opérations militaires. De plus, si les membres de la Haute autorité eux-mêmes sont liés par le secret professionnel, certaines précautions devront être prises, un secret risquant moins d'être diffusé lorsqu'il est détenu par une, deux ou trois personnes que lorsqu'il l'est par onze personnes ou plus, ou que les services eux-mêmes en sont informés.

Madame la ministre, pourriez-vous apaiser mes inquiétudes, afin que je puisse allégrement voter ces amendements ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, il est évident que je partage tout à fait votre point de vue sur ce sujet. Je suis en mesure d'apaiser vos inquiétudes. : le secret professionnel existe, et, comme l'a dit M. Badinter, il n'a pas été instauré pour faire plaisir. Il s'impose dans certaines affaires.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 28 rectifié et 60 rectifié.

(Les amendements sont adoptés à l'unanimité.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

(M. Guy Fischer remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

Art. 9
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Art. 11

Article 10

La haute autorité peut formuler des recommandations tendant à remédier à tout fait ou à toute pratique qu'elle estime être discriminatoire, ou à en prévenir le renouvellement.

Les autorités ou personnes intéressées sont tenues, dans un délai fixé par la haute autorité, de rendre compte à celle-ci de la suite donnée à ces recommandations. La haute autorité peut rendre ses recommandations publiques dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

M. le président. L'amendement n° 61, présenté par Mmes Boumediene-Thiery et  Khiari, MM. Assouline,  Collombat,  Dreyfus-Schmidt,  C. Gautier,  Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Dans le premier alinéa de cet article, remplacer le mot :

peut

par le mot :

doit

II - Dans la seconde phrase du second alinéa de cet article, remplacer les mots :

peut rendre

par le mot :

rend

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. L'article 10 dote la Haute autorité d'un pouvoir de recommandation visant à remédier à tout fait ou à toute pratique qu'elle estime discriminatoires ou à en prévenir le renouvellement.

Les autorités ou personnes concernées seront tenues de rendre compte des suites données à ces recommandations, qui pourront être rendues publiques.

Comme nous l'avons proposé à l'article 8, nous souhaitons que la Haute autorité ait l'obligation de formuler des recommandations et que ces dernières soient impérativement rendues publiques.

C'est, en effet, en étant connues et médiatisées que ces recommandations donneront de la force à cette instance et que, la réflexion s'installant, les mentalités évolueront. La publicité est dissuasive dans ce domaine.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission estime qu'il convient de laisser à la Haute autorité une plus grande autonomie s'agissant de la publication de ses recommandations. Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 61.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

En l'absence de compte rendu des personnes intéressées ou si elle estime, au vu du compte rendu qui lui est communiqué, que sa recommandation n'a pas été suivie d'effet, la haute autorité peut établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel de la République française.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement a pour objet de renforcer la pression que pourra exercer la Haute autorité auprès des organismes et des personnes auteurs de discriminations, en lui permettant de publier au Journal officiel un rapport spécial, lorsque ses recommandations ne seront pas suivies.

Cet amendement permet également de donner partiellement satisfaction aux auteurs de l'amendement n° 61.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)