PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à la régulation des activités postales.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 2, à l'examen de l'amendement n° 142 rectifié.
L'amendement n° 142 rectifié, présenté par MM. Delfau, Baylet, Collin et A. Boyer, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 4 du code des postes et des communications électroniques, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'éventuel surcoût occasionné à La Poste par l'exercice de cette mission de service public fait l'objet d'une compensation intégrale par l'Etat, sur la base de l'avis public prévu à l'article L. 5-2 du présent code.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. La Poste est à un tournant de son histoire puisque, par la transposition de la directive postale européenne, nous actons le fait que, très largement, et peut-être définitivement, le service réservé du courrier est ouvert à la concurrence, et le sera de plus en plus. Par conséquent, si nous voulons confier des missions de service public à La Poste, celles-ci doivent être intégralement compensées.
Or, parmi les missions de service public confiées à La Poste par la loi de 1990, l'une, importante, concerne le transport de la presse. L'objectif, que nous approuvons, était de faciliter le pluralisme de la presse, donc l'accès à l'information pour le plus grand nombre. L'idée que le transport de la presse en soit facilité et que son coût s'en trouve abaissé est l'une des idées-force de notre organisation sociale depuis plusieurs dizaines d'années.
Jusqu'à présent, le coût occasionné par cette implication de La Poste était implicitement compensé par le service réservé et les ressources qu'il génère. Le service réservé disparaissant, il est normal de se demander si La Poste doit continuer à supporter cette charge. La réponse est évidente : il n'appartient plus à La Poste, désormais, de prendre une part, surtout aussi importante, dans ce qui doit devenir une mission financée en totalité par le budget général.
Cet amendement vise donc, très logiquement, à ce que La Poste soit désormais exonérée de cette charge.
Le montant de la charge financière induite par la participation de La Poste au transport de la presse représente l'équivalent de la charge qui lui incombe pour assurer une présence territoriale forte. Adopter la mesure que je préconise contribuerait assez largement à résoudre le problème.
Bien sûr, il nous faudra ensuite, lors de la discussion de la loi de finances, si nous souhaitons conforter le pluralisme, chercher le moyen de financer cette mission. Mais il s'agira de l'étape suivante. Pour l'instant, nous parlons uniquement de La Poste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'objet de cet amendement est d'assurer une juste compensation à La Poste en ce qui concerne sa mission de service public de transport de presse. Cette préoccupation n'est pas nouvelle.
Il est certain que la mission de service public de transport et de distribution de la presse pèse sur le budget de La Poste et grève, bien entendu, son résultat financier d'un montant qui reste considérable, puisque La Poste continue, malgré les accords de juillet 2004, à assumer un coût net d'environ 410 millions d'euros pour le transport de la presse.
Sur ce point, je ne peux, monsieur le ministre, que me tourner vers vous pour solliciter l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement, car il n'apporte aucun élément nouveau sur le plan juridique : le principe d'une juste rémunération par l'Etat des prestations effectuées par La Poste au titre de ses missions de service public est déjà inscrit à l'article 8 de la loi du 2 juillet 1990. Vous le savez certainement, monsieur Delfau.
De surcroît, l'Etat, la presse et La Poste ont, l'été dernier, signé de nouveaux accords pluriannuels, sous la présidence de M. Henri Paul, accords qui sont valables jusqu'en 2008. Aux termes de ces accords, l'Etat verse, chaque année, 242 millions d'euros pour aider la diffusion de la presse d'opinion et permettre le maintien d'un tarif unique. La presse accepte des hausses de tarif, qui, d'ailleurs, portent essentiellement sur les magazines de loisir, et La Poste améliore la qualité et la productivité de ses services.
De très gros progrès ont donc été accomplis afin d'améliorer la viabilité du service et la compensation de la charge pour La Poste. Les choses vont, de ce point de vue, dans le bon sens.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission se rallie à l'avis du Gouvernement.
M. Gérard Delfau. Quelle surprise !
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je suis abasourdi, le mot n'est pas trop fort, par le raisonnement de M. le ministre : ce principe figure dans la loi de 1990 - il oublie que nous nous apprêtons, aujourd'hui, à voter la transposition de la directive postale - et aucun élément nouveau n'est intervenu. Monsieur le ministre, vous le savez comme moi, nous sommes dans une situation nouvelle et il nous faut en considérer l'impact.
Je ne suis pas le seul à m'inquiéter de cette « charge indue », pour reprendre l'expression de Gérard Larcher, lorsqu'il présidait la commission des affaires économiques du Sénat. En effet, outre ce dernier, le Conseil de la concurrence lui-même, dans l'avis qu'il a rendu sur le présent projet de loi, a relevé l'anomalie que présenterait cette situation si elle était pérennisée.
Tout milite donc en faveur d'un comportement plus compréhensif de l'Etat eu égard à l'intérêt même de l'entreprise publique qu'il prétend vouloir défendre. En tout cas, il serait logique que nous, parlementaires, nous prenions la décision de surseoir progressivement, par exemple en fonction de l'ouverture du marché du courrier, à cette compensation de 410 millions d'euros, que La Poste n'a plus les moyens de financer.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le ministre, il ne faut pas appréhender cet amendement d'un point de vue uniquement juridique.
Les chiffres sont extrêmement parlants ! Le coût total de la diffusion de la presse par voie postale s'élève à 1,1 milliard d'euros. La part prise en charge par La Poste est d'environ 40 %, soit 415 millions d'euros en 2005, contre 409 millions d'euros en 2004, et ce à la suite des accords qui ont été signés le 22 juillet 2004 ; vous en avez fait état, monsieur le ministre. La participation de l'Etat s'élève à 242 millions d'euros, soit presque moitié moins que La Poste, et sa contribution est même en baisse par rapport à 2004, puisqu'elle était alors de 290 millions d'euros.
Par ailleurs, a été évoqué dans cet hémicycle, en fin d'après-midi, le Fonds national de péréquation, qui a été qualifié, sur plusieurs travées, de « fonds sans fonds », puisque l'on parle de 150 millions d'euros. Cette somme est à comparer avec les 350 millions d'euros, au minimum, que représente le coût des missions de présence postale.
Si La Poste avait à supporter des coûts moindres pour la diffusion de la presse, qui n'est pas de sa responsabilité, les fonds permettant d'assurer une présence postale de qualité sur l'ensemble du territoire pourraient être aisément trouvés.
M. le président. L'amendement n° 124, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 4 du code des postes et des communications électroniques :
« Le ministre chargé des postes homologue les tarifs des services réservés et du service universel postal. Il en précise et en contrôle la qualité. Il en sanctionne les violations. Il délivre les autorisations mentionnées à l'article L.3.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous souhaitons donner des pouvoirs à M. le ministre, qui ne semble pas vouloir les accepter, malgré notre insistance. (M. le ministre s'exclame.) Nous poursuivrons dans cette voie tout au long de la soirée.
Cet amendement est la déclinaison de ce que nous avons déjà proposé dans des amendements qui ont été examinés tout à l'heure.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. En effet, son adoption contribuerait à alimenter le conflit d'intérêts que dénonçait la Commission européenne dans son avis motivé de juin 2002, auquel j'ai déjà eu l'occasion de faire référence à plusieurs reprises.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je préciserai simplement que c'est bien le ministre qui aura à homologuer les transports de presse.
M. Gérard Delfau. Mais il ne fait pas son travail en la matière
M. Pierre-Yvon Trémel. Je reste très inquiet !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 125, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5 du code des postes et des communications électroniques :
« Il est créé auprès du ministre chargé des postes une Autorité de régulation postale.
« L'Autorité de régulation postale est composée de cinq membres nommés en raison de leur qualification dans les domaines juridique, technique et économique des activités postales. Ils sont nommés pour six ans. Trois membres dont le président sont nommés par décret. Les deux autres membres sont respectivement nommés par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat. Les membres de l'autorité ne sont pas révocables.
« La fonction de membre de l'Autorité de régulation postale est incompatible avec toute activité professionnelle, tout mandat électif communal, départemental, régional, national ou européen, tout emploi public et toute détention directe ou indirecte, d'intérêts dans une entreprise du secteur postal.
« L'Autorité de régulation postale dispose de services qui sont placés sous l'autorité de son président. Elle propose au ministre en charge des postes, lors de l'élaboration du projet de loi de finances, les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Ces crédits sont inscrits au budget général de l'Etat.
« Un décret pris en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application des alinéas précédents.
« L'Autorité de régulation postale instruit pour le compte du ministre chargé des postes les autorisations mentionnées à l'article L. 3. Sur demande du ministre chargé des postes, elle sanctionne les manquements constatés du prestataire du service universel postal ainsi que des titulaires d'une autorisation.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. En défendant notre amendement n° 122, qui avait pour objet de supprimer l'article 2 du projet de loi, nous avons dit notre attachement à la création d'une autorité de régulation spécifique à la Poste, indépendante de l'ART. Tel est l'objet du présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
projets de loi
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5 du code des postes et des communications électroniques :
ou de règlement relatifs aux services postaux et participe à leur mise en oeuvre.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 125.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 8 tend simplement à aligner le champ de consultation du régulateur postal sur celui du régulateur des communications électroniques, défini à l'article L. 36-5 du code en ces termes : l'autorité « est consultée sur les projets de loi, de décret ou de règlement relatifs au secteur des communications électroniques et participe à leur mise en oeuvre. »
S'agissant de l'amendement n°125, malheureusement, la commission a émis un avis défavorable
. Il n'est pas utile, en effet, de créer une nouvelle autorité de régulation consacrée au secteur postal. En dépit de leurs différences, une parenté fondamentale lie le secteur des communications électroniques et celui des postes : ce sont deux industries de réseaux, qui concourent à la cohésion nationale en permettant à nos concitoyens de communiquer. Elles sont chargées, à ce titre, de missions d'aménagement du territoire.
Je ferai d'ailleurs observer que la France, en étendant au secteur postal le champ de compétences du régulateur des communications électroniques, rejoint, contrairement à ce qui a pu être dit, non seulement l'Allemagne, mais encore l'Autriche, la Belgique, les Pays-Bas et la Suède. La France n'est donc pas seule à avoir pris cette initiative, monsieur Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Je me référai aux propos d'un membre de l'ART !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je suis entièrement d'accord avec le rapporteur : la France n'est pas seule !
L'amendement n° 125 est contraire à la directive européenne en ce qu'il vise à créer auprès du ministre une autorité de régulation postale. Or la directive pose une obligation d'indépendance . Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
En revanche, le Gouvernement est favorable aux précisions apportées par l'amendement n° 8.
M. le président. L'amendement n° 126, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Dans les premier et avant-dernier alinéas du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-1 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
L'autorité de régulation des communications électroniques et des postes
par les mots :
Le ministre en charge des postes
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. A l'instar de l'amendement n° 124, il vise à faire du ministre l'autorité de régulation, ce qui est contraire à nos obligations communautaires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué Le Gouvernement émet également un avis défavorable. C'est un amendement de repli.
M. le président. L'amendement n° 127, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-1 du code des postes et des communications électroniques, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'autorisation est subordonnée à la constitution de garanties financières propres à assurer la continuité du service. Les garanties financières à constituer doivent être décrites dans le dossier de demande d'autorisation, lors de son dépôt. Lorsqu'elle constate que les garanties exigées ne sont plus constituées, l'autorité de régulation met en demeure l'exploitant de les reconstituer. Tout manquement constaté un mois après la mise en demeure peut donner lieu au prononcé d'une amende administrative par le ministre de l'industrie. Un décret en Conseil d'Etat détermine la nature des garanties et les règles de fixation de leur montant.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Si un prestataire de services postaux doit, de manière intempestive ou involontaire - par exemple en cas de faillite - cesser son activité, La Poste devra assurer à ses frais l'envoi du courrier resté en souffrance. Aussi est-il logique de subordonner l'autorisation d'exercice d'un prestataire de services postaux au dépôt d'une caution ou d'une garantie couvrant ce risque.
M. le ministre a indiqué, lors de la discussion à l'Assemblée nationale, qu'une telle disposition serait incompatible avec les directives européennes et qu'elle constituerait une entrave inadmissible à la concurrence. Mais tout dépend du type de caution ou de garantie qui est demandé. Si le prestataire est vraiment de qualité, il pourra trouver auprès d'une banque, à un prix acceptable, une garantie, ce qui évitera à La Poste d'avoir à supporter, le cas échéant, le prix de sa défaillance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Le souci de s'assurer de la viabilité financière des prestataires concurrents de La Poste est déjà pris en compte dans le projet de loi. En effet, le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 5-1 prévoit que « l'incapacité technique, économique ou financière du demandeur de faire face durablement aux obligations attachées à son activité postale » constitue un motif pouvant justifier un refus par l'autorité de délivrer l'autorisation. Le principe de précaution est donc appliqué. Dès lors que nous entrons dans le droit commun, il n'est pas nécessaire de prendre d'autres précautions. Certes, une entreprise en parfaite santé à un moment donné peut rencontrer des difficultés à un autre moment. Mais toutes les garanties seront prises lorsque l'autorité de régulation délivrera l'autorisation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il appartient effectivement à l'autorité de régulation de vérifier que le demandeur a bien la capacité financière d'assurer durablement ses obligations.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Il s'agit de deux choses complètement différentes. L'autorité de régulation va en effet s'assurer de la viabilité de l'entreprise. Mais une entreprise viable à un moment donné peut ne plus l'être ultérieurement. Et en cas de défaillance de ladite entreprise, La Poste a l'obligation de distribuer le courrier en souffrance, d'apurer les comptes de l'entreprise défaillante, etc.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, que se passe-t-il dans le cas précis qu'évoque notre collègue Pierre-Yves Collombat ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Si j'ai bien compris, la question est de savoir ce qui se passera dans le cas où, au bout d'un certain temps, le demandeur fait faillite. Eh bien ! il appartient à La Poste, au titre du service universel, de s'y substituer.
M. Gérard Delfau. Et voilà !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Voilà pourquoi votre fille est muette ! Elle reçoit, à ce titre, une contrepartie. Vous avez la réponse !
M. Gérard Delfau. Vous nous confirmez donc que La Poste est effectivement victime !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. La Poste est en charge du service universel. Cela fait partie du service universel !
M. Gérard Delfau. Cela ne signifie pas qu'elle doit prendre en charge les obligations d'une entreprise privée qui fait faillite !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Mais si ! Le service universel consiste à assurer, en tout état de cause, l'acheminement du courrier. En cas de défaillance, cet acheminement est pris en charge au titre du service universel.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Exactement !
M. Gérard Delfau. De qui ?
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-1 du code des postes et des communications électroniques, remplacer le mot :
pour
par les mots :
par une décision motivée, fondée sur
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il convient de préciser non seulement que le refus du régulateur d'octroyer une autorisation est fondé, empêchant ainsi tout arbitraire, mais aussi que les raisons pour lesquelles une autorisation est refusée entièrement ou partiellement sont communiquées au demandeur ; il s'agit de la directive de 1997.
C'est pourquoi cet amendement suggère de préciser que le refus de l'autorité est motivé avant d'énumérer les motifs susceptibles d'être invoqués.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-1 du code des postes et des communications électroniques, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les demandes d'autorisation d'exercice situées sur le territoire d'un département rural au sens de l'article 31 de la loi de finances pour 2005, elle peut invoquer à l'appui de son refus, après avis du ministre chargé des postes, des motifs tirés des nécessités de desserte de l'ensemble du territoire par le service universel.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. le président. L'amendement n° 80, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-1 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
le territoire sur lequel elle peut être fournie
par les mots :
les conditions de desserte de l'ensemble du territoire national
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. S'agissant d'un amendement de coordination, je serai bref. Néanmoins, je souhaite réaffirmer un principe qui me paraît essentiel.
On va demander beaucoup à La Poste. En contrepartie, on lui offre un monopole réduit à sa plus simple expression. Avec cet amendement, nous demandons que toute entreprise autorisée à intervenir sur le marché postal soit en mesure de desservir l'ensemble du territoire national. Il s'agit non pas de partager le service public, mais d'imposer un cahier des charges minimal, valable pour l'ensemble des concurrents.
Vous nous parlez de concurrence. Dans le même temps, vous acceptez une entorse manifeste à celle-ci en autorisant les concurrents de La Poste à ne desservir que les parties du territoire national qui leur conviennent, tout en obligeant La Poste à desservir de façon équitable l'ensemble du territoire. Cette distorsion de concurrence est évidemment inacceptable. Elle ne pourra qu'affaiblir La Poste et, par conséquent, les missions de service public qu'elle continuera péniblement d'assurer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement, dont l'esprit est identique à celui des amendements n° 67 des mêmes auteurs, n° 114 de M. Trémel et n° 155 de M. Retailleau, appelle les mêmes observations. L'amendement de M. Retailleau n'a pas été soutenu, mais je rappelle, monsieur le ministre, que celui-ci était d'accord pour le retirer.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Si l'on demandait à ces entreprises d'assurer une part des missions de service public, il faudrait alors leur concéder, en contrepartie, une réduction du monopole de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je vais essayer de ne pas me laisser gagner par l'indignation. Monsieur le ministre, vous ne pouvez répéter sans cesse, vous qui êtes un partisan de la disparition des monopoles de service public, que La Poste doit payer pour les entreprises privées en raison du monopole, au moment où nous acceptons que celui-ci disparaisse. Ce raisonnement est insoutenable. Je tenais à le dire une fois pour toutes !
M. Gérard Delfau. Du point de vue des entreprises privées, c'est sûr !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 76 est présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 128 est présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 76.
Mme Evelyne Didier. Nous demandons, par cet amendement, la suppression du texte proposé pour l'article L. 5-2 du code des postes et télécommunications.
En effet, nous ne pouvons pas accepter que le Gouvernement délègue à l'ARCEP le pouvoir d'approuver les tarifs du secteur réservé, donc le prix du timbre de base.
Il est vrai que vous semblez avoir du mal à porter la responsabilité des hausses brutales de tarifs des prestations de service public, que ce soit à EDF, GDF, France Télécom, ou encore à La Poste, le prix du timbre étant passé, en à peine un an, de 46 à 53 centimes, soit une augmentation d'environ 15 %.
Plus fondamentalement, en donnant à cette autorité le pouvoir d'approuver les tarifs du secteur réservé, ce texte ne pourra qu'encourager leur augmentation.
A l'évidence, l'ARCEP va encourager une forte concurrence, donc fragiliser La Poste, qui perdra des clients sur les segments de marché ouverts à la concurrence. Pour équilibrer ses comptes, malgré cette perte de chiffre d'affaires, tout en continuant à assumer, comme elle le peut, diverses missions de service public, elle cherchera à augmenter ses tarifs du secteur réservé.
Aussi, nous ne pouvons accepter que ce soit les particuliers qui payent pour combler les déficits.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour présenter l'amendement n° 128.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous restons dans la même logique.
Dans le respect des directives européennes - j'insiste sur ce point - nous souhaitons que le ministre ait davantage de pouvoirs et que l'autorité de régulation indépendante en ait un peu moins.
J'ai relevé, dans le texte proposé pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques, les paragraphes - au nombre de neuf - où sont énumérés tous les pouvoirs accordés à l'ARCEP, et nul doute que M. le rapporteur en rajoutera encore tout à l'heure dans ses propositions d'amendement.
Nous sommes opposés à cette logique et c'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rétablir le troisième alinéa (1°bis) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques dans la rédaction suivante :
« 1°bis Emet, en tant que de besoin, des recommandations sur les conditions techniques d'accès aux moyens indispensables à l'exercice de l'activité postale visés à l'article L. 3-1 ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Le Sénat, en première lecture, avait proposé d'ouvrir à l'autorité de régulation la possibilité d'émettre, en tant que de besoin, des recommandations sur les conditions techniques d'accès aux installations et informations détenues par le prestataire du service universel.
Sans pour autant conférer au régulateur un nouveau pouvoir réglementaire, cela permettrait à l'autorité de régulation de préciser les conditions dans lesquelles elle entend que s'effectue l'accès aux moyens indispensables à l'exercice d'une activité postale, par le moyen de recommandations ou par tout autre moyen de nature à expliciter sa pensée et sa doctrine. En effet, les autorités de régulation existantes sont fréquemment invitées par les opérateurs économiques à publier des lignes directrices sur les affaires dont elles ont la charge.
C'est pourquoi cet amendement prévoit de rétablir le paragraphe 1° bis de l'article L. 5-2 qui ouvre à l'autorité de régulation cette faculté d'émettre des recommandations.
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A. Rédiger comme suit le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques :
« 2° Est informée par le prestataire du service universel des conditions techniques et tarifaires dans lesquelles les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3 peuvent accéder aux moyens indispensables à l'exercice de l'activité postale visés à l'article L. 3-1 et reçoit communication, à cette fin, des conventions d'accès à ces moyens visés à l'article L. 3-1 ;
B. En conséquence, supprimer le cinquième alinéa (2° bis) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement prévoit une fusion des 2° et 2° bis en un seul paragraphe, afin de clarifier les choses : il est plus logique qu'un seul paragraphe traite du sujet de l'information du régulateur s'agissant des conditions faites par l'opérateur historique à ses concurrents pour accéder à son réseau. En effet, si le 2° évoque les conditions de cet accès, le 2° bis renvoie aux conventions d'accès.
L'obligation d'informer le régulateur sur les conditions d'accès pourrait se faire efficacement par le biais d'une transmission systématique et non plus à la demande du régulateur.
M. le président. L'amendement n° 77, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le sixième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques:
« 3° Est consultée sur le choix des tarifs du secteur réservé. Ces tarifs sont fixés par le ministre chargé des postes ;
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. En complément de l'amendement n° 76 exposé par Mme Evelyne Didier, il s'agit, par cet amendement, d'affirmer que la fixation des tarifs du service public est une responsabilité de l'Etat, exercée par le ministre de tutelle des postes.
En créant l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, qui serait chargée de décider des tarifs du secteur réservé, ce projet de loi correspond à un désengagement de la puissance publique.
Il s'agit en effet, de cette manière, de dépolitiser la fixation des tarifs publics puisque ce rôle reviendra à l'ARCEP, qui dispose d'autres prérogatives importantes.
Cependant, l'expérience des autorités de régulation montre que ces structures sont au service de la libéralisation, en dehors de l'intérêt des salariés et de l'intérêt général. Elles favorisent l'arrivée des nouveaux entrants face à l'opérateur historique, comme on l'a déjà vu au cours du débat.
Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à une nouvelle confiscation du pouvoir de contrôle sur l'organisation et la gestion des services publics, telle que vous l'avez déjà opérée dans des secteurs tels que les communications ou l'électricité. C'est un prétexte pour écarter ou éliminer l'autorité politique et administrative des leviers de l'économie.
M. le président. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début du sixième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques :
Décide, après examen de la proposition de La Poste, ou, à défaut de proposition, d'office après l'en avoir informée, des caractéristiques d'encadrement pluriannuel ..
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Confirmant la nécessité de centraliser tout le pouvoir tarifaire entre les mains du régulateur, plutôt que de le partager entre le régulateur et le ministre via le contrat de plan, cet amendement vise à donner au régulateur la compétence pour fixer les caractéristiques d'encadrement pluriannuel, c'est-à-dire non seulement les modalités de mise en oeuvre, mais aussi le niveau, la durée, voire le nombre d'encadrements pluriannuels.
Cet amendement tend également à clarifier le pouvoir du régulateur : le pouvoir de fixer les caractéristiques de l'encadrement pluriannuel ne saurait être lié, ce que la rédaction actuelle implique puisqu'elle donne ce pouvoir au régulateur, « sur proposition de La Poste ou, à défaut d'accord, d'office après l'en avoir informée ».
Il est certain que le régulateur doit prendre en compte toute initiative de La Poste en vue de proposer un price cap, qu'il doit chercher, sur la base de cette proposition, dans la mesure du possible, un accord avec La Poste et qu'en cas de désaccord il peut alors imposer l'encadrement pluriannuel qu'il juge approprié, après en avoir informé La Poste.
Mais dans le cas où La Poste ne proposerait aucun price cap, le texte actuel prive le régulateur de toute possibilité d'en fixer un d'office, ce qui n'est pas souhaitable.
C'est pourquoi cet amendement donne plein pouvoir au régulateur pour fixer le price cap, tout en lui imposant d'examiner la proposition de La Poste, s'il y en a une. A défaut de proposition de La Poste, le régulateur décide d'office, toujours après avoir informé La Poste.
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du sixième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques, supprimer le mot :
approbations
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement rédactionnel vise à supprimer le mot « approbations », qui ne constitue qu'un cas particulier du terme « décisions » figurant déjà dans le texte.
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier membre de phrase du septième alinéa (4°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques, supprimer les mots :
de service
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit également d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 153, présenté par M. Delfau, est ainsi libellé :
Compléter le 6° du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques par une phrase ainsi rédigée :
Cet avis inclut également l'évaluation de la compensation prévue à l'article L. 4 du présent code ;
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du dixième alinéa (7°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques :
Précise les règles de comptabilisation des coûts, établit les spécifications des systèmes de comptabilisation et veille au respect, par le prestataire du service universel, des obligations relatives à la comptabilité analytique fixées dans le décret prévu au premier alinéa de l'article 8 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement vise, s'agissant des obligations relatives à la comptabilité analytique, à renvoyer dorénavant non plus au cahier des charges, dont l'article 17 du texte prévoit la disparition, mais au décret prévu au premier alinéa de l'article 8 de la loi du 2 juillet 1990 précitée, qui fixera désormais les droits et obligations de l'exploitant public.
M. le président. L'amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deuxième, troisième et quatrième phrases du dixième alinéa (7°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques :
Dans le champ du service universel, l'autorité reçoit communication des résultats des vérifications des commissaires aux comptes, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel. Elle fait vérifier annuellement, aux frais du prestataire du service universel, par un organisme qu'elle agrée, compétent et indépendant du prestataire du service universel, la conformité des comptes du prestataire du service universel aux règles qu'elle a établies. Elle veille à la publication, par les soins de l'organisme indépendant agréé, d'une déclaration de conformité.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement tend à faire réaliser l'audit de la comptabilité analytique du prestataire du service universel, au regard des règles qu'établira l'autorité de régulation, par un organisme qui ne sera lié d'aucune façon au prestataire du service universel, conformément à ce que prévoit la directive communautaire.
La rédaction retenue permet par ailleurs d'éviter que des informations relevant du secret professionnel ne soient publiées.
M. le président. L'amendement n° 78, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le dernier alinéa (8°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Le 8° du texte proposé par le paragraphe II de l'article 2 pour l'article L. 5-2 du code des postes et communications électroniques prévoit que l'ARCEP peut recommander au ministre chargé des postes toutes mesures utiles pour garantir la fourniture de service universel dans les cas où le prestataire de service universel ne pourrait plus le financer.
Nous avons déjà fait quelques observations concernant le financement du service public postal. Je tiens à revenir sur certains points.
Monsieur le ministre, parce que le domaine réservé de La Poste diminue, parce que l'ouverture à la concurrence du secteur postal va permettre aux opérateurs privés de se positionner sur les segments les plus rentables, les ressources financières de La Poste vont nécessairement diminuer. Nous devons donc, dès aujourd'hui, prendre les mesures qui s'imposent pour assurer un financement pérenne du service public.
Dans cet alinéa, il revient à l'autorité de régulation de faire état des difficultés rencontrées par le prestataire de service universel et de recommander « toutes mesures utiles ». Nous aimerions bénéficier d'éclaircissement sur ce point. De quoi pourrait-il s'agir exactement ? L'ARCEP pourrait-elle, par exemple, recommander une hausse de tarif ? Sur quels éléments d'appréciation se fondera-t-elle ? S'agit-il, dans un tel cas, d'adapter les tarifs à la réalité des coûts ? Cela ne se fera-t- il pas au détriment des usagers et de la qualité même du service public ?
Les obligations de service public concernent l'ensemble du territoire et nous ne pouvons qu'être inquiets du fait que l'opérateur historique, sans moyen de financement à la hauteur des besoins, puisse se retrouver dans l'incapacité de remplir ses obligations. Et ce n'est pas - nous aurons l'occasion d'y revenir - la mise en place d'un fonds de compensation, lorsque le service public sera réellement en danger, qui constitue la solution.
Nous observons donc que l'octroi des autorisations délivrées aux opérateurs privés, prestataires de services postaux relatifs au courrier - envois de correspondance -, n'est soumis à aucune contribution financière en contrepartie.
Nous observons également, suivant le régime des autorisations, que les prestataires privés n'auront aucune contrainte de desserte de l'ensemble du territoire.
Ainsi, les opérateurs privés pourront effectivement se saisir des niches rentables, desservir, par exemple, des zones entre des grandes villes, tout en délaissant la périphérie urbaine ou les zones rurales.
Je considère qu'il s'agit là d'une véritable discrimination à l'encontre du prestataire du service dit « universel ».
Dans les zones urbanisées, certains prestataires pourraient donc s'installer à moindre coût pour délivrer des prestations concurrentielles à celle de La Poste.
De telles pratiques constituent un cas avéré de concurrence déloyale.
En effet, il s'agit ici non pas seulement de délaisser ce qui relèverait du service universel et qui n'offrirait aucune rentabilité, voire, au contraire, contribuerait à créer des pertes, mais bien de s'imposer dans les créneaux les plus rentables au détriment de l'opérateur historique.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. S'agissant des amendements identiques nos 76 et 128, il est impossible de priver le régulateur de l'ensemble de ses compétences.
L'article 22 de la directive de 1997, dont la transposition s'impose à la France, précise que les autorités réglementaires ont pour tâche d'assurer le respect des obligations découlant de la présente directive et peuvent également être chargées d'assurer le respect des règles de concurrence dans le secteur postal.
La commission est donc défavorable à ces amendements.
En ce qui concerne l'amendement n° 77, la fixation des tarifs constitue sans doute le coeur même du conflit d'intérêts auquel se trouve confronté l'Etat, propriétaire de l'exploitant public La Poste et chargé d'assurer le caractère abordable des tarifs postaux, monsieur le ministre.
A ce titre, il n'est pas sûr, comme l'imaginent les auteurs de l'amendement, qu'attribuer au Gouvernement la compétence pour fixer les tarifs du secteur réservé soit le meilleur moyen de prévenir au mieux la hausse de ces tarifs qui résulterait de la libéralisation du secteur postal.
La commission émet donc un avis défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 153 de M. Delfau, qui est un amendement de coordination avec l'amendement n° 142 rectifié, auquel la commission a déjà donné un avis défavorable.
Sur l'amendement n° 78, la question de la création d'un fonds destiné au financement du service public postal sera creusée à l'occasion de l'examen de l'article 7.
En tout état de cause, il ne m'apparaît pas de bonne politique de supprimer, dans le présent article, une compétence du régulateur, qui, pour une fois, tend précisément à garantir l'objectif qui est également visé par les auteurs de l'amendement : assurer un financement pérenne des missions de service universel postal.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 76 et 128, qui sont contraires à la directive.
S'agissant de l'amendement n° 10, par une mesure de bienveillance tout à fait exceptionnelle, le Gouvernement y est favorable ! (Sourires.)
Il fait preuve de la même faiblesse à l'égard de l'amendement n° 11. (Nouveaux sourires.)
En revanche, s'agissant de l'amendement n° 77, je résiste à la tentation et j'émets un avis défavorable. En effet, la compétence dévolue à l'ARCEP de réguler les tarifs du secteur réservé est un point essentiel du projet de loi ; M. le rapporteur l'a d'ailleurs dit très pertinemment.
Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 12 rectifié, 13 et 14.
En revanche, dans son amendement n° 153, M. Delfau propose une coordination avec un amendement qui ne fait pas l'objet d'un accord du Gouvernement. Je serai donc cohérent en émettant un avis défavorable.
Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 15 et 16 rectifié.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 78, car il importe que l'Autorité de régulation puisse recommander au ministre chargé des postes - auquel l'opposition veut beaucoup de bien, car elle le charge de nombreux « présents », et j'en suis très touché - les mesures utiles pour financer, si besoin est, le service universel assuré par La Poste. Nous en avons suffisamment parlé tout à l'heure pour que cette mesure soit pérenne.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 76 et 128.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 168, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-3 du code des postes et des communications électroniques :
Elles peuvent faire l'objet d'un recours de pleine juridiction et d'une demande de suspension présentée conformément à l'article L. 521-1 du code de justice administrative, devant le Conseil d'Etat.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement tend à apporter une précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Favorable. Cela allait sans dire, mais cela va encore mieux en le disant !
M. le président. L'amendement n° 169, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-4 du code des postes et des communications électroniques par un alinéa ainsi rédigé :
« L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut refuser la communication des pièces mettant en jeu le secret des affaires. Ces pièces sont alors retirées du dossier.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Lors de la procédure de règlement des différents prévue dans le texte proposé pour l'article L. 5-6 du texte du code des postes et des communications électroniques, les parties au litige seraient susceptibles de communiquer à l'ARCEP des documents mettant en cause le secret des affaires.
Pour une protection adéquate du secret des affaires de l'ensemble des acteurs du marché, cet amendement prévoit que le régulateur soit en mesure de refuser la communication de ces pièces et de les retirer du dossier.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-5 du code des postes et des communications électroniques, après les mots :
aux moyens
supprimer le mot :
techniques
L'amendement n° 18, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-5 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
ne sont pas
par les mots :
sont transparentes et non
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit d'amendements de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 79, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-5 du code des postes et des communications électroniques, après les mots :
ne sont pas discriminatoires
insérer les mots :
et n'affectent pas la bonne réalisation des missions de service public du prestataire du service universel
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Les pouvoirs de police octroyés par ce projet de loi à l'ARCEP ne visent, de fait, qu'à contrôler d'éventuels abus de concurrence de la part des entreprises présentes sur le marché postal.
Ainsi, le seul critère de contrôle de cette autorité de régulation réside dans le respect des règles de concurrence et dans la lutte contre les pratiques discriminatoires.
L'atteinte au principe du service public et la concurrence déloyale contre l'opérateur chargé de la défense de ce service public ne sont pas considérées comme répréhensibles.
Avec une telle logique, le contrôle de l'ARCEP sera nécessairement plus sévère à l'encontre de La Poste. Il ne pourra que contribuer à la fragiliser davantage. Il ne pourra que nuire au service public, à la présence postale sur l'ensemble du territoire et à l'égalité devant ce service public.
La finalité de l'organisation de la libre concurrence dans le secteur postal doit en principe, selon vous, aboutir à un meilleur service. Il apparaîtrait donc naturel que le bon accomplissement des missions de service public fasse partie des critères de l'ARCEP, dans son rôle de régulateur de ce marché.
La constitution d'un marché postal au seul bénéfice des grands groupes postaux européens ne peut être la seule finalité de ce texte et donc la seule optique de régulation de l'ARCEP.
C'est pourquoi il nous paraît nécessaire que l'ARCEP contrôle autant les entorses à cette concurrence que les pratiques affectant la bonne réalisation des missions de service public de La Poste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson. La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je conviens que l'amendement du groupe CRC est cohérent. L'Autorité de régulation devrait s'assurer, effectivement, de l'aspect non discriminatoire des conditions techniques et tarifaires d'accès aux moyens de La Poste, mais aussi que celles-ci n'affectent pas les missions de service public de La Poste.
Cet amendement donne ainsi les garanties que l'accès par les concurrents aux moyens de La Poste ne remettra pas en cause les missions de service public ; c'est un élément d'appréciation que l'ARCEP devra retenir.
Je suis en accord avec la philosophie de cet amendement et j'émets donc un avis favorable.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La sagesse légendaire du Sénat s'exprime toujours dans un sens positif. Je vous propose, mes chers collègues, de suivre l'avis du Gouvernement et d'adopter cet amendement. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre !
M. le président. L'amendement n° 170, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-5 du code des postes et des communications électroniques par un alinéa ainsi rédigé :
« L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut refuser la communication des pièces mettant en jeu le secret des affaires. Ces pièces sont alors retirées du dossier.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Lors de la procédure de règlement de différends prévue dans le temps proposé pour l'article L. 5-6 du code des postes et des communications électroniques, les parties au litige seraient susceptibles de communiquer à l'ARCEP des documents mettant en cause le secret des affaires.
Pour une protection adéquate du secret des affaires de l'ensemble des acteurs du marché, cet amendement prévoit que le régulateur soit en mesure de refuser la communication de ces pièces et de les retirer du dossier.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 171, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A - Compléter la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-6 du code des postes et des communications électroniques par les mots :
dans le délai d'un mois à compter de leur notification
B - Après l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-6 du code des postes et des communications électroniques, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le pourvoi en cassation formé, le cas échéant, contre l'arrêt de la cour d'appel est exercé dans le délai d'un mois suivant la notification de cet arrêt.
C - En conséquence, dans le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-6 du code des postes et des communications électroniques, supprimer les mots :
, notamment les délais de recours devant la cour d'appel de Paris et en cassation
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La rédaction de l'article L. 5-6 du code des postes et communications électroniques proposée par l'article 2 du projet de loi renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer les conditions d'application de l'article, notamment les délais de recours devant la cour d'appel et la Cour de cassation.
Cet amendement vise à fixer ces délais dans la loi, comme cela est déjà prévu dans d'autres domaines, comme les communications électroniques ou l'électricité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 82, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-8 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Cet amendement est la conséquence de notre refus de voir le secteur postal entièrement soumis aux règles de la concurrence.
En effet, si ce projet de loi reconnaît que La Poste remplit des missions de service public, il apparaît logique que les règles de droit qui lui seront appliquées soient celles du droit public qui règlementent le domaine d'intervention de la responsabilité de l'Etat, car ces activités correspondent à l'intérêt général de la cité.
Les règles concernant les services publics se sont construites progressivement depuis maintenant plus d'un siècle, depuis l'arrêt Blanco. La jurisprudence a précisé, au fil des années, la définition des grands principes auxquels sont soumis les services publics : l'égalité d'accès, l'égalité de traitement, sa continuité, y compris territoriale, et son adaptabilité.
Ce travail accompli par les juges a marqué une évolution de notre société et a permis de reconnaître l'utilité sociale de ces services et leur spécificité, qui nécessite l'application de règles particulières.
Vous ne pouvez effacer cette construction du droit positif. Il apparaît alors nécessaire que la juridiction qui arbitre les atteintes à la concurrence dans le secteur postal, reconnu d'utilité publique, soit la juridiction administrative et donc le Conseil d'Etat.
M. le président. L'amendement n° 81, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-8 du code des postes et des communications électroniques remplacer (quatre fois) les mots :
Conseil de la concurrence
par les mots :
Conseil d'Etat
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Avec cet article L. 5-8, vous cherchez, toujours dans le même esprit, à accentuer la privatisation du secteur postal.
En renvoyant au Conseil de la concurrence la responsabilité de sanctionner les éventuels abus de position dominante qui pourraient être sanctionnés sur ce marché postal, ce texte renvoie à un juge privé, non compétent pour prendre en compte les préoccupations de service public, l'arbitrage sur d'éventuels abus de position dominante.
Une telle conception ne permet d'envisager la régulation économique que de façon minimale, du seul point de vue de la protection de la concurrence, sans lier cette régulation à d'autres impératifs, de service public, donc selon les règles de droit public.
Aussi, immanquablement, le Conseil de la concurrence jugera La Poste moins en fonction de ses missions ou de ses attributions spécifiques qu'en fonction de l'impact de l'activité de La Poste sur le marché postal. C'est le meilleur moyen pour la pousser, petit à petit, à abandonner toutes ses missions de service public.
C'est bien pourquoi nous proposons, à défaut de supprimer cet article, de renvoyer au seul Conseil d'Etat l'interprétation d'éventuels abus de position dominante ou de pratiques entravant la libre concurrence. Celui-ci sera forcément moins dogmatique que le Conseil de la concurrence.
Dans le même esprit, pourquoi avoir fait de la Cour d'appel de Paris, et non de la Cour administrative d'appel de Paris, le juge d'appel compétent pour les litiges engendrés par les décisions de l' ARCEP ? Nous savons tous que la Cour d'appel de Paris ne fondera ses décisions qu'en vertu du seul droit du commerce et du seul droit de la concurrence. Nous savons aussi que le juge administratif pourrait, lui, fonder ses décisions en se référant non seulement au droit de la concurrence, mais aussi au droit public, aux exigences du service public.
Ainsi, loin d'être potentiellement protecteur de La Poste, comme prestataire du service public, le droit qui régira ce marché postal sera largement inspiré par les valeurs du privé.
C'est bien une nouvelle illustration de votre volonté de faire disparaître un service public qui, sans jamais démérité, a atteint ses objectifs et satisfait les Français.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Si le droit de la concurrence ne relève plus du Conseil de la concurrence, je n'ai rien à ajouter.
La commission est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. L'avis est également défavorable.
Je suis absolument stupéfait que vous ayez employé dans votre exposé l'expression « juge privé » : le Conseil de la concurrence n'a jamais été un juge privé ! Il ne fait aucun doute qu'il est non une juridiction arbitrale, mais une institution de la République.
L'adoption de cet amendement bouleverserait totalement l'organisation de la compétence des juridictions. A supposer qu'on soit en accord avec votre philosophie, elle ne saurait évidemment se traduire de cette manière.
Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements.
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-9 du code des postes et des communications électroniques :
Dans les conditions définies au présent article, le ministre chargé des postes et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peuvent, de manière proportionnée aux besoins liés à l'accomplissement de leurs missions, et sur la base d'une décision motivée, recueillir, auprès du prestataire du service universel et des titulaires des autorisations prévues à l'article L. 3, toutes les informations ou documents nécessaires pour s'assurer du respect par ces personnes des dispositions législatives ou réglementaires afférentes à leur activité, des décisions prises pour garantir la mise en oeuvre de ces dispositions et des prescriptions du titre en vertu duquel ces personnes exercent leur activité.
L'amendement n° 20, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A la fin de la première phrase du sixième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-9 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
et procéder à toutes constatations
par les mots :
sauf autorisation du président du tribunal de grande instance ou du magistrat qu'il délègue à cette fin
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'Assemblée nationale est certainement fondée à ne pas vouloir autoriser les enquêtes uniquement à des fins de sanctions.
Toutefois, il convient de donner une finalité précise aux pouvoirs d'enquête importants dévolus au régulateur et au ministre en précisant leur objet: s'assurer du respect par le prestataire du service universel ou par un prestataire autorisé des dispositions législatives ou règlementaires afférentes à leur activité, des décisions prises pour garantir la mise en oeuvre de ces dispositions et des prescriptions du titre en vertu duquel ces personnes exercent leur activité, selon les termes déjà utilisés dans l'article L. 32-4 pour le secteur des communications électroniques. Tel est l'objet de l'amendement n° 19.
Par symétrie avec ledit article, il est utile de prévoir, par l'amendement n° 20, d'assortir l'interdiction d'accéder au domicile des intéressés d'une exception en cas d'autorisation du président du tribunal de grande instance ou du magistrat qu'il délègue à cette fin. Une telle disposition relève effectivement, vous l'avez dit, monsieur le ministre, du droit commun.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je pense qu'adopter ces dispositions c'est «mieux légiférer», comme on le dit à Bruxelles : le texte sera de meilleure qualité. Même si c'est souvent implicite, une fois de plus, c'est beaucoup mieux en le disant.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 129, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-10 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous abordons là un problème délicat.
Un article introduit à l'Assemblée nationale renvoie à un décret les conditions dans lesquelles non seulement le prestataire du service universel, mais aussi les titulaires d'autorisation peuvent avoir accès aux boîtes aux lettres des usagers pour assurer les prestations de services postaux.
Une atteinte aussi large au droit de propriété, notamment au profit d'opérateurs postaux qui ne sont ni assermentés ni chargés du service public de la distribution, ne nous paraît pas justifiée.
Il nous semble tout à fait certain qu'il ne revient pas à un simple décret de déterminer les conditions dans lesquelles il peut être porté atteinte au droit de propriété. On ne saurait déposséder la loi de ce domaine.
Monsieur le ministre, j'ai lu les comptes rendus des débats de l'Assemblée nationale. Sur cette question délicate, vous avez annoncé que vous attendiez les conclusions du Conseil général des technologies de l'information, le CGTI.
Peut-être en saurons-nous davantage en entendant les explications sur l'amendement et le sous-amendement suivants.
M. le président. L'amendement n° 21 rectifié, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5-10 du code des postes et des communications électroniques :
« Art. L. 5-10 - Afin d'être en mesure d'assurer la distribution d'envois postaux, le prestataire du service universel et les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3 ont accès, selon des modalités identiques et définies par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, aux boîtes aux lettres particulières. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que l'accès aux boîtes aux lettres des destinataires permet non pas d'assurer les prestations de services postaux, mais, plus spécifiquement, la distribution d'envois postaux, qui constitue, aux termes de l'article L.3 du code, le fondement de l'autorisation des prestataires postaux.
Il tend également à exiger des modalités identiques d'accès aux boîtes aux lettres pour tous les opérateurs, prestataires du service universel comme titulaires d'autorisation, accès qui sera assorti de garanties appropriées fixées dans le décret prévu.
M. le président. Le sous-amendement n° 176, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
A. - Compléter l'amendement n°21 rectifié par un paragraphe ainsi rédigé :
II. Compléter cet article par un III ainsi rédigé :
III. 1° Il est créé, dans la section 2, « Dispositions générales applicables aux bâtiments d'habitation » du chapitre premier du code de la construction et de l'habitation, une sous-section 3 : « Accès des opérateurs de services postaux aux boîtes aux lettres particulières ».
2° Il est ajouté au code de la construction et de l'habitation un article L. 111-6-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-6-3.- Pour l'application de l'article L. 5-10 du code des postes et des communications électroniques, les propriétaires ou, en cas de copropriété, le syndicat représenté par le syndic permettent au prestataire du service universel postal et aux opérateurs titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3 du code des postes et des communications électroniques d'accéder, selon des modalités identiques, aux boîtes aux lettres particulières ».
B. En conséquence, au début de l'amendement n° 21 rectifié, insérer la référence :
I.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. M. Trémel a soulevé une vraie question sur un sujet très sérieux ; je suis sensible à son argumentation. J'avais d'ailleurs saisi à cet égard le CGTI, qui m'a remis son rapport : il détermine la faisabilité juridique et technique de l'opération. C'est bien volontiers que je transmettrai ce rapport au Sénat ; en tout cas, j'en ai communiqué les conclusions à M. le rapporteur.
C'est ainsi que la directive du 15 décembre 1997 modifiée, transposée par le projet de loi relatif à la régulation des activités postales, a pour objet de garantir la fourniture d'un service universel postal obligatoire incluant la remise à domicile du courrier.
L'établissement de ce service universel s'accompagne d'une ouverture à la concurrence du marché de la correspondance.
En même temps, la distribution des envois de correspondance par les prestataires des services postaux non réservés est soumise à autorisation par l'article 1er du projet de loi.
Par conséquent, la loi doit donner aux prestataires du service universel postal et aux opérateurs titulaires d'une autorisation les moyens d'accéder, selon des modalités identiques, aux boîtes aux lettres des particuliers.
Les dispositions proposées par l'amendement n° 21 rectifié sont justifiées par l'intérêt général. Elles traduisent la nécessaire conciliation entre le droit de la propriété et les libertés individuelles, dont le droit à recevoir son courrier est indiscutablement une composante. Elles ne constituent ni une privation ni une dénaturation du droit de propriété.
Le sous-amendement tire les conséquences de ces nouvelles dispositions qui figureront dans le code des postes et des communications électroniques en adaptant, dans le même sens, le code de la construction et de l'habitation.
Les propriétaires ou, en cas de copropriété, le syndicat représenté par le syndic doivent permettre aux prestataires du service universel postal et aux opérateurs titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3 du code des postes et des communications électroniques d'accéder, selon des modalités identiques, aux boîtes aux lettres particulières.
Le décret d'application prévu à l'article L. 5-10 du code précité précisera les garanties accompagnant cette mesure. Au titre de ces garanties peuvent être cités, notamment, la publication par le régulateur de la liste des opérateurs autorisés, des références et du périmètre de leur autorisation, la définition de plages d'ouverture et, pour les agents des entreprises concernées, les conditions de moralité, un engagement individuel de respecter le secret et l'intégrité des envois, l'obligation de détention d'une carte professionnelle et le port d'un insigne apparent.
Monsieur Trémel, je vous enverrai dès demain le rapport du CGTI et, comme je l'ai dit tout à l'heure, je le transmettrai évidemment bien volontiers au Sénat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 129 et sur le sous-amendement n° 176 ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 176.
En revanche, elle est défavorable à l'amendement n° 129. Les auteurs font valoir qu'organiser un tel accès porte atteinte au droit de propriété. Pourtant, une atteinte à ce droit est possible, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, si elle est justifiée par des motifs d'intérêt général et si elle est proportionnée au but poursuivi, ce qui sera le cas, puisque des garanties sont prévues pour protéger le propriétaire.
C'est précisément l'objet du décret en Conseil d'Etat auquel renvoie l'amendement n° 21 rectifié de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 129 et favorable à l'amendement n° 21 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote sur l'amendement n° 129.
M. Gérard Delfau. Je souhaite apporter un élément supplémentaire au débat que nous avons sur ce sujet, délicat, vous en convenez vous-même, monsieur le ministre. Nous avons beaucoup parlé du droit de propriété ; je voudrais ajouter le droit à la sécurité des biens et des personnes.
Dans les grandes villes, de nombreux copropriétaires ou syndicats de copropriétés ont souhaité, pour des raisons de sécurité, fermer l'accès de leur immeuble par rapport à la rue, parfois d'ailleurs par deux portes. La question est de savoir qui peut accéder à cette enceinte volontairement close.
M. Gérard Delfau. Un système permet justement d'offrir cette possibilité à la police et, traditionnellement, aux facteurs et aux agents d'EDF et de GDF. Je fais toutefois observer à nos collègues qu'il s'agit là d'agents de la fonction publique qui, en tant que tels, sont soumis à une déontologie ; ils ont pris des engagements lors de leur recrutement.
Nous ne sommes pas dans une telle situation. J'imagine sans peine un opérateur privé ayant obtenu une autorisation et sous-traitant au sous-traitant du sous-traitant l'accès à ces immeubles.
Monsieur le ministre, les enjeux sont beaucoup plus compliqués que vous ne le dites. Je pense, comme nos collègues, que seule la garantie d'opérateurs assermentés offrirait à la population toutes assurances que sa sécurité sera respectée.
Ce débat ne manquera donc pas de rebondir si nous n'adoptons pas l'amendement proposé par nos collègues socialistes.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 2 bis A
Le 3° de l'article L. 311-4 du code de justice administrative est ainsi rédigé :
« 3° Des articles L. 5-3 et L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques contre les décisions de sanction prises par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ; ». - (Adopté.)
Article 2 bis B
Dans la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 9 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, les mots : « des tarifs, » sont supprimés. - (Adopté.)
Article 2 bis C
I. - L'article 31 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée est ainsi modifié :
1° La première phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « , ni celles relatives aux délégués du personnel et aux délégués syndicaux » ;
2° La dernière phrase du dernier alinéa est supprimée ;
3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles les agents de La Poste sont représentés dans des instances de concertation chargées d'assurer l'expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d'organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle. Il précise en outre, en tenant compte de l'objectif d'harmoniser au sein de La Poste les institutions représentatives du personnel, les conditions dans lesquelles la représentation individuelle des agents de droit privé est assurée, et établit les règles de protection, au moins équivalentes à celles prévues par le code du travail pour les délégués du personnel, dont bénéficient leurs représentants. »
II. - Après l'article 31-1 de la même loi, sont insérés deux articles 31-2 et 31-3 ainsi rédigés :
« Art. 31-2. - Il est institué, au sein de La Poste, une commission d'échanges sur la stratégie, visant à informer les organisations syndicales des perspectives d'évolution de La Poste, et à recueillir leurs analyses sur les orientations stratégiques du groupe.
« Il est également institué une commission de dialogue social permettant d'assurer une concertation avec les organisations syndicales sur les projets d'organisation de portée nationale ou sur des questions d'actualité, ainsi que de les informer.
« La Poste recherche par la négociation et la concertation la conclusion d'accords avec les organisations syndicales, tout particulièrement dans les domaines de l'emploi, de la formation, de l'organisation et des conditions de travail, de l'évolution des métiers et de la durée du travail. Des instances de concertation et de négociation sont établies à cette fin au niveau national et au niveau local, après avis des organisations syndicales représentatives.
« Ces instances suivent l'application des accords signés. Une commission nationale de conciliation est chargée de favoriser le règlement amiable des différends.
« Art. 31-3. - Les titres III et IV du livre II du code du travail s'appliquent à l'ensemble du personnel de La Poste, sous réserve des adaptations, précisées par un décret en Conseil d'Etat, tenant compte des dispositions particulières relatives aux fonctionnaires et à l'emploi des agents contractuels. »
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant le 1° du I du présent article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
..° - Au début de la première phrase du premier alinéa, les mots : « Lorsque les exigences particulières de l'organisation de certains services ou la spécificité de certaines fonctions le justifient, » sont supprimés ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement vise à lever une ambiguïté persistante sur le recours par La Poste à des agents de droit privé.
En effet, l'article 31 de la loi du 2 juillet 1990 autorise La Poste à employer des agents contractuels « lorsque les exigences particulières de l'organisation de certains services ou la spécificité de certaines fonctions le justifient ». Pour le législateur de 1990, il s'agissait de permettre aux exploitants publics - La Poste et France Télécom - de disposer de compétences recrutées à l'extérieur des PTT, afin d'accroître la souplesse de leur gestion et de relever les défis techniques et commerciaux qui s'annonçaient.
A l'heure de l'ouverture des marchés postaux à la concurrence, cette souplesse relative se révèle contraignante et décalée pour le groupe La Poste, qui compte déjà un tiers de contractuels, notamment dans des fonctions d'encadrement et au sein des services financiers.
Il semble donc indispensable de supprimer les conditions restrictives à l'emploi de contractuels qui figurent à l'article 31 et de permettre ainsi à La Poste de mener une libre politique de recrutement, alors même qu'elle affronte une concurrence croissante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote.
M. Pierre-Yvon Trémel. Pour des non-initiés, les mesures proposées par la commission pourraient paraître anodines. Les explications que M. le rapporteur vient de donner nous informent quelque peu sur l'arrière plan de cet amendement. La presse du jour nous donne également un éclairage, puisque je relève, par exemple dans Le Figaro économie, un titre tout à fait évocateur : « un amendement pour banaliser le recrutement des contractuels ». Voilà qui est clair !
En fait, ce que vous proposez, monsieur le rapporteur, c'est la suppression de l'article de la loi du 2 juillet 1990 qui rendait exceptionnel le recrutement de contractuels à La Poste.
Vous dites que l'adoption de cet amendement contribuerait à donner à l'opérateur la souplesse nécessaire face à la concurrence. Je pense que d'autres armes pouvaient être fournies à La Poste pour l'aider à faire face à ses concurrents.
Le projet de loi porte en lui les germes d'un démantèlement du service public postal. Le vote des dispositions proposées démantèlerait également le statut de celles et ceux qui, jusqu'à aujourd'hui, ont fait vivre ce service public.
Cet amendement qui tend à banaliser le recrutement de contractuels à La Poste organise, à terme, la disparition d'un corps de fonctionnaires. Ainsi se met en place le scénario de l'évolution de France Télécom. Au fil du temps, nous allons sans doute voir un établissement public, qui emploie majoritairement des fonctionnaires et qui est chargé de missions de service public, se transformer en une société anonyme qui rechignera à exercer ces missions de service public.
Nous ne saurions vous suivre dans cette voie. Nous voterons donc contre cet amendement, sur lequel nous demandons un vote par scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Cet amendement semble anodin. En fait, il préfigure un changement de nature de l'entreprise publique.
Depuis que nous discutons ce texte de loi, nous sommes un certain nombre à dire, sans être entendus, que les charges résultant des missions de service public de La Poste doivent être compensées. Dans le cas contraire, les collectivités territoriales devront supporter la charge financière de ces missions, que La Poste continuera d'assurer.
Par ailleurs, il s'agit ici de faire supporter par les salariés, par le biais de leur précarisation, le déséquilibre financier que ce texte de loi impose à La Poste.
Par conséquent, désormais, les choses sont claires ! Nous ne pouvons vous suivre, et c'est pourquoi le groupe du RDSE, dans sa composante de gauche, votera contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 111 :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 326 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 199 |
Contre | 127 |
Le Sénat a adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 23, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
organisations syndicales
rédiger comme suit la fin de la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 31-2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom :
dans tous les domaines du champ social postal
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Le texte proposé pour l'article 31-2 énumère une série de sujets sur lesquels des accords seraient susceptibles d'intervenir entre La Poste et les syndicats. Cette énumération ne reprend qu'une partie des sujets évoqués par l'accord du 21 juin 2004 conclu entre la direction de La Poste et les syndicats.
Pour éviter que certains sujets de négociation ne figurent pas dans la loi et ne bénéficient pas ainsi de l'incitation à ce que soient conclus des accords entre les syndicats et La Poste, cet amendement vise à renoncer à toute liste et à prévoir, plus largement, des négociations « dans tous les domaines du champ social postal ».
M. le président. L'amendement n° 130, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 31-2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, après les mots :
de la formation,
insérer les mots :
de l'égalité professionnelle,
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Il est intéressant, parfois, de se pencher à nouveau sur les chiffres concernant l'emploi à La Poste. Fin décembre 2003, l'entreprise employait 315 021 agents, 203 165 fonctionnaires, 104 856 salariés et contractuels. Parmi les 315 021 agents, on compte 49,3 % de femmes. Sur ces 150 000 femmes, plus de la moitié sont contractuelles. Elles travaillent, en grande majorité, à l'exécution, avec des contrats qui sont rarement à temps plein.
M. Pierre-Yvon Trémel. Leurs conditions de vie et de travail sont donc très souvent difficiles.
Tout à l'heure, vous parliez, monsieur le rapporteur, de « champ social postal ». On ne sait pas trop ce que cela recouvre. L'égalité professionnelle serait un élément intéressant de ce champ social postal. Nous souhaiterions donc que ce thème soit ajouté aux dispositions figurant dans le texte dans le cadre du dialogue social à La Poste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 130 ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 23 de la commission prévoit d'étendre à tous les domaines du champ social postal la possibilité de négociation d'accords entre La Poste et les syndicats.
Je considère donc que l'amendement n° 130 est satisfait, et je suggère à ses auteurs de le retirer. Sinon, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je suis naturellement favorable à l'amendement n° 23.
Je rappelle d'ailleurs que le gouvernement précédent avait laissé subsister 10 000 emplois précaires à La Poste et que ceux-ci vont être transformés en contrats à durée indéterminée, ce que vous auriez dû faire !
M. Pierre-Yvon Trémel. Continuez ! C'est bien !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Quant aux scandaleux emplois à temps partiel qui s'ajoutaient les uns aux autres et qui ont donné lieu à des contentieux devant les tribunaux, ils sont en voie de résorption. C'est là aussi un héritage !
Par conséquent, les leçons sur le dialogue social...
M. Pierre-Yvon Trémel. Je ne donne pas de leçons !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ...venant de ceux qui ont soutenu le gouvernement précédent ne sont pas très bienvenues, car c'est nous qui réparons les catastrophes sociales que ce dernier a laissées. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
J'ajoute qu'il ne sert à rien d'établir une distinction malvenue entre les agents contractuels et les fonctionnaires de l'Etat. Cela étant, je rappelle qu'à cet égard on est passé de 41 000 contractuels en 1997 à un peu plus de 90 000 à la fin de l'année 2002. Par conséquent, vous n'êtes pas non plus en mesure de donner des leçons de ce point de vue.
Mme Nicole Bricq. Nous n'en donnons pas !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 130, qui est par ailleurs satisfait par l'amendement n° 23.
M. le président. Monsieur Trémel, l'amendement n° 130 est-il maintenu ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Je ne puis être d'accord avec M. le rapporteur lorsqu'il prétend que son amendement me donne satisfaction. Sur ce point, le champ des appréciations que l'on peut porter est extrêmement large !
Par ailleurs, monsieur le ministre, mon intention n'était nullement de vous donner des leçons. Je suis tout à fait disposé à approuver toutes les initiatives que vous pourrez prendre afin de lutter contre la précarité de l'emploi.
Enfin, des chiffres très précis ont été cités sur la proportion de femmes parmi les personnels de La Poste. Il me paraîtrait tout à fait normal que l'on consacre de l'attention, au sein de cet opérateur public qui est le premier employeur de France, à la question de l'égalité professionnelle. Tel était l'objet de mon amendement.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 130 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 24, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 31-2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, remplacer le mot :
local
par le mot :
territorial
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis C, modifié.
(L'article 2 bis C est adopté.)
Article 2 bis
Après le troisième alinéa de l'article 32 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des chapitres III et IV du titre IV du livre IV du code du travail sont applicables à l'ensemble des personnels de l'exploitant public, y compris ceux visés aux articles 29 et 44 de la présente loi. Les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions seront déterminées conformément au contrat de plan de l'exploitant public. » - (Adopté.)
Article 3
L'article L. 6 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :
« Art. L. 6. - Le prestataire du service universel et les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3 communiquent aux autorités judiciaires qui en font la demande en matière pénale, au service des impôts et au régisseur du service de la redevance de l'audiovisuel les changements de domicile dont ils ont connaissance. »
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 6 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
, au service des impôts et au régisseur du service de la redevance de l'audiovisuel
par les mots :
et à l'administration fiscale
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
Le titre VIII du livre Ier du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° L'article L. 17 est ainsi rédigé :
« Art. L. 17. - Est puni d'une amende de 50 000 € le fait :
« 1° De fournir des services réservés à La Poste en application de l'article L. 2 ;
« 2° De fournir des services d'envoi de correspondance en violation des dispositions de l'article L. 3, ou d'une décision de suspension d'une autorisation accordée en vertu de l'article L. 3. » ;
2° L'article L. 18 est ainsi rédigé :
« Art. L. 18. - Les personnes physiques coupables de l'une des infractions définies à l'article L. 17 encourent les peines complémentaires suivantes :
« a) L'interdiction, pour une durée d'un an au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ;
« b) La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou la chose qui en est le produit, à l'exception des objets susceptibles de restitution, dans les conditions prévues à l'article 131-21 du code pénal ;
« c) La fermeture, pour une durée d'un an au plus, des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
« d) L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du même code. » ;
3° L'article L. 19 est ainsi rédigé :
« Art. L. 19. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement de l'une des infractions définies à l'article L. 17 dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal et sont passibles de l'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 dudit code.
« Les personnes coupables de l'une des infractions définies à l'article L. 17 encourent les peines complémentaires mentionnées aux 2°, 3°, 4°, 5°, 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal ; l'interdiction mentionnée au 2° du même article porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. » ;
4° L'article L. 20 est ainsi rédigé :
« Art. L. 20. - I. - Outre les officiers et agents de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale, les fonctionnaires et les agents mentionnés à l'article L. 5-9 peuvent rechercher et constater par procès-verbal les infractions prévues par les dispositions du présent titre.
« En vue de rechercher et de constater les infractions, les fonctionnaires et agents mentionnés à l'article L. 5-9 peuvent accéder aux locaux, terrains ou véhicules à usage professionnel, demander la communication de tous documents professionnels et en prendre copie, recueillir, sur convocation ou sur place, tous renseignements et justifications. Ces fonctionnaires et agents ne peuvent accéder aux locaux qu'entre 6 heures et 21 heures ou pendant leurs heures d'ouverture s'ils sont ouverts au public.
« II. - Les fonctionnaires et agents mentionnés à l'article L. 5-9 ne peuvent effectuer les visites prévues au présent article et la saisie des matériels et de documents que sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les matériels, ou d'un juge délégué par lui.
« Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée doit être menée dans chacun d'eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l'un des présidents compétents.
« Le juge vérifie que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée et comporte tous les éléments d'information de nature à justifier la visite.
« La visite et la saisie s'effectuent sous l'autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées. Le juge désigne un ou plusieurs officiers de police judiciaire chargés d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement. Il peut se rendre dans les locaux pendant l'intervention, dont il peut à tout moment décider la suspension ou l'arrêt. Lorsque l'intervention a lieu en dehors du ressort de son tribunal de grande instance, il délivre une commission rogatoire pour exercer ce contrôle au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite.
« L'ordonnance est notifiée verbalement et sur place au moment de la visite à l'occupant des lieux ou à son représentant qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal. En l'absence de l'occupant des lieux ou de son représentant, l'ordonnance est notifiée après la visite, par lettre recommandée avec avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l'avis.
« L'ordonnance n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues au code de procédure pénale. Ce pourvoi n'est pas suspensif.
« III. - La visite est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant. En cas d'impossibilité, l'officier de police judiciaire requiert deux témoins choisis en dehors des personnes relevant de son autorité ou de celle de l'administration des postes.
« Les enquêteurs, l'occupant des lieux ou son représentant ainsi que l'officier de police judiciaire peuvent seuls prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie.
« Les inventaires et mises sous scellés sont réalisés conformément à l'article 56 du code de procédure pénale. Les originaux du procès-verbal et de l'inventaire sont transmis au juge qui a ordonné la visite. Toutefois, les correspondances dont la conservation n'apparaît pas utile à la manifestation de la vérité sont remises, après inventaire, au prestataire du service universel qui en assure la distribution.
« Le déroulement des visites ou des saisies peut faire l'objet, dans un délai de deux mois qui court à compter de la notification de l'ordonnance les ayant autorisées, d'un recours auprès du juge qui a prononcé l'ordonnance.
« Le juge se prononce sur ce recours par une ordonnance qui n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues au code de procédure pénale. Ce pourvoi n'est pas suspensif. » ;
5° L'article L. 28 est ainsi rédigé :
« Art. L. 28. - Pour l'application des dispositions du présent livre, le ministre chargé des postes ou son représentant peut, devant les juridictions pénales, déposer des conclusions et les développer oralement à l'audience. » ;
6° L'article L. 29 est ainsi rédigé :
« Art. L. 29. - Le fait d'insérer dans un envoi postal des matières ou des objets prohibés par la convention postale universelle est puni d'une amende de 15 000 €.
« Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue au présent article encourent les peines complémentaires mentionnées aux a et b de l'article L. 18.
« Les personnes morales coupables de l'infraction prévue au présent article encourent les peines complémentaires mentionnées aux 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal. »
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le mot :
services
rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le 1° de cet article pour l'article L. 17 du code des postes et des communications électroniques :
postaux que l'article L. 2 réserve à La Poste ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement est rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le 1° de cet article pour l'article L. 17 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
d'une autorisation
par les mots :
de l'autorisation
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit là aussi d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
I. - Les articles L. 16, L. 21, L. 22, L. 24 et L. 36 du code des postes et des communications électroniques sont abrogés.
II. - Non modifié.
III. - Les articles L. 36-1, L. 36-2, L. 36-3, L. 36-4, L. 36-12 et L. 36-14 du même code deviennent respectivement les articles L. 130, L. 131, L. 132, L. 133, L. 134 et L. 135 du même code.
IV. - Le premier alinéa de l'article L. 131 du même code est ainsi rédigé :
« La fonction de membre de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est incompatible avec toute activité professionnelle, tout mandat électif national, tout autre emploi public et toute détention, directe ou indirecte, d'intérêts dans une entreprise du secteur postal ou des secteurs des communications électroniques, de l'audiovisuel ou de l'informatique. Les membres de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ne peuvent être membres de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques. »
V. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 133 du même code, les mots : « L'autorité propose au ministre chargé des communications électroniques » sont remplacés par les mots : « L'autorité propose aux ministres compétents ».
VI. - L'article L. 135 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « des dispositions législatives et réglementaires relatives aux communications électroniques » sont remplacés par les mots : « des dispositions législatives et réglementaires relatives aux communications électroniques et aux activités postales » ;
2° Supprimé ;
3° La dernière phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée :
« A cette fin, le prestataire du service universel postal, les titulaires d'une autorisation prévue à l'article L. 3, les opérateurs ayant effectué la déclaration prévue à l'article L. 33-1 sont tenus de lui fournir les informations statistiques concernant l'utilisation, la zone de couverture et les modalités d'accès à leur service. Les ministres compétents sont tenus informés des résultats de ces travaux. »
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le I de cet article, remplacer les références :
L. 16, L. 21, L. 22, L. 24 et L. 36
par les références :
L. 15, L. 16, L. 21 à L. 25, L. 27 et L. 36
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous devons saisir l'occasion qui nous est offerte de procéder au toilettage du code des postes et des communications électroniques en supprimant certaines dispositions obsolètes ou incongrues.
Ainsi, les articles L. 15, L. 23, L. 25 et L. 27 peuvent être abrogés.
L'article L. 15, qui prévoit que la possibilité d'utiliser un service de poste restante, permettant de retirer son courrier au guichet, ne peut être ouverte à des mineurs non émancipés que sur présentation d'une autorisation écrite parentale contient une disposition qui relève de l'exercice de l'autorité parentale, donc du droit civil, et qui n'a donc pas sa place dans le droit postal.
L'article L. 23, qui tend à charger les agents des douanes de vérifier que le capitaine et les membres d'un équipage ne soustraient pas à La Poste des lettres ou paquets, n'a plus d'objet en raison des nouvelles dispositions du projet de loi visant à assurer le respect du secteur réservé et du champ d'autorisation.
L'article L. 25, qui punit aujourd'hui d'une peine d'emprisonnement et d'une amende l'utilisation sans autorisation des machines à affranchir ainsi que toute tentative de fraude dans leur utilisation est obsolète dans sa rédaction actuelle, dans la mesure où le terme « autorisation » n'est plus approprié. En effet, l'utilisation de machines à affranchir fait l'objet de contrats entre La Poste et ses clients, contrats qui règlent la question de l'utilisation frauduleuse, consistant essentiellement en sous-facturations.
Cela étant, il reste nécessaire de prévoir des sanctions pour les infractions au monopole d'émission de timbres et autres valeurs fiduciaires postales confié à La Poste par l'article 16 de la loi de 1990, mais ces sanctions, de nature contraventionnelle, pourraient être désormais fixées par décret.
Enfin, l'article L. 27, qui étend aux colis postaux les dispositions de l'article L. 26 concernant la sanction d'une déclaration frauduleuse de valeurs, n'a plus d'objet compte tenu du nouveau libellé de l'article L. 26, issu de l'article 13 du présent texte, qui vise les envois postaux.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.. - L'article L. 30 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L.30.- Lorsque les services des douanes ou des contributions indirectes le leur demandent, le prestataire du service universel et les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3 requièrent l'ouverture, par le destinataire, des envois de correspondance de toute provenance, présumés contenir des produits soit soumis à des formalités intérieures de circulation, soit passibles de droits de douane, soit frappés de prohibition. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement tend à réécrire l'article L. 30 du code des postes et des communications électroniques, qui concerne l'autorisation d'ouvrir les plis par le destinataire à la demande des services des douanes ou des contributions directes. Cet article, qui ne vise actuellement que La Poste, doit devenir applicable à l'ensemble des titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant le IV de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L.126 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L.126.- La prescription est acquise au profit du prestataire du service universel et des titulaires de l'autorisation prévue à l'article L.3 pour toute demande en restitution du prix de leurs prestations présentée après un délai d'un an à compter du jour du paiement.
« La prescription est acquise au profit de l'utilisateur pour les sommes dues en paiement des prestations du prestataire du service universel et des titulaires de l'autorisation prévue à l'article L.3 lorsque ceux-ci ne les ont pas réclamées dans un délai d'un an à compter de la date de leur exigibilité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement tend à proposer une nouvelle rédaction pour l'article L. 126 du code des postes et des communications électroniques, qui fixe les délais de prescription, soit un an au bénéfice de La Poste comme de l'utilisateur. Il a pour objet de restreindre le champ d'application de cet article aux seuls services postaux, les services financiers sortant du champ du code des postes et des communications électroniques aux termes de leur réforme opérée à l'article 8 du présent projet de loi.
L'amendement vise également à appliquer ces délais de prescription tant à l'opérateur du service universel du courrier qu'aux prestataires postaux autorisés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 131, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter in fine le texte proposé par le IV de cet article pour le premier alinéa de l'article L. 131 du code des postes et des communications électroniques par une phrase ainsi rédigée :
Cette incompatibilité demeure durant une période de dix ans après la cessation de fonction des membres de l'Autorité.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. L'article 5 prévoit un certain nombre d'incompatibilités pour l'exercice des fonctions de membre de l'autorité de régulation. Nous proposons d'étendre la validité de ces règles d'incompatibilité à une période suffisamment longue après la cessation desdites fonctions.
En effet, compte tenu des pouvoirs énormes qui sont conférés à cette haute autorité, la moindre des choses est de faire en sorte que ses anciens membres ne puissent pas pantoufler trop vite.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
Autant il apparaît essentiel d'assurer l'indépendance des membres de l'autorité de régulation durant l'exercice de leurs fonctions, autant il serait disproportionné de leur interdire, pendant les dix années suivant la cessation de celles-ci, toute activité professionnelle, tout mandat électif national, etc.
En outre, faudrait-il envisager de continuer à payer les anciens membres de l'autorité après la cessation de leurs fonctions, comme cela est prévu, mais seulement pour une année, pour les anciens membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Collombat, aucun fonctionnaire, aucun membre d'une autorité administrative indépendante n'est soumis à un régime aussi sévère que celui que vous préconisez pour l'ARCEP.
Pour autant, je conviens qu'un code déontologique est nécessaire. Toutefois, de mon point de vue, il l'est pour l'ensemble des membres des autorités administratives indépendantes, sans qu'il soit besoin d'opérer des distinctions entre les uns et les autres. Il faut donc mener une réflexion déontologique globale, et certainement pas fragmentée.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 131.
M. le président. L'amendement n° 172, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le IV de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
IV bis.- L'article L. 131 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il est occupé par un fonctionnaire, l'emploi permanent de membre de l'Autorité est un emploi ouvrant droit à pension au titre du code des pensions civiles et militaires de retraites. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il s'agit de faire bénéficier les membres de l'ARCEP des dispositions générales de la loi du 10 février 2000.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa (1°) du VI de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
1° bis Dans la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « les autorités de régulation des communications électroniques » sont remplacés par les mots : « les autorités de régulation des communications électroniques et des postes » ;
1° ter Dans la dernière phrase du premier alinéa, les mots : « les évolutions du secteur des communications électroniques » sont remplacés par les mots : « les évolutions du secteur des communications électroniques et de celui des postes » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Par coordination avec l'extension au secteur postal du champ de la régulation, cet amendement vise à compléter la modification prévue au 1° du VI de l'article 5 par d'autres modifications au premier alinéa de l'ancien article L. 36-14 du code des postes et des communications électroniques. Il s'agit, d'une part, de prévoir que l'analyse annuelle des décisions du régulateur communautaire portera non seulement sur les communications électroniques, mais aussi sur les postes, d'autre part, de donner au régulateur la possibilité de suggérer, dans son rapport annuel, toute modification législative ou réglementaire que lui paraissent appeler les évolutions tant du secteur des communications électroniques que de celui des postes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rétablir le troisième alinéa (2°) du VI de cet article dans la rédaction suivante :
2° A la fin de la première phrase du troisième alinéa, les mots : « information sur le secteur des communications électroniques » sont remplacés par les mots : « information sur le secteur des communications électroniques et sur celui des postes » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il est indispensable de préciser que le régulateur pourra procéder à toute expertise ou étude non seulement sur le secteur des communications électroniques, mais aussi sur le secteur postal.
C'est pourquoi cet amendement a pour objet de rétablir l'alinéa supprimé par l'Assemblée nationale, en en rectifiant la rédaction pour viser le troisième alinéa, et non plus le deuxième alinéa, de l'actuel article L. 36-14 du code des postes et des communications électroniques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 5 bis
I. - Le premier alinéa de l'article L. 130 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est composée de sept membres nommés en raison de leur qualification dans les domaines juridique et technique des communications électroniques, des services postaux et de l'économie des territoires, pour un mandat de six ans. Trois membres, dont le président, sont nommés par décret. Deux membres sont nommés par le Président de l'Assemblée nationale et deux par le Président du Sénat. » ;
2° Dans la première phrase du quatrième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;
3° Le sixième alinéa est supprimé ;
4° Dans la deuxième phrase du septième alinéa, les mots : « l'un ou l'autre des deux alinéas » sont remplacés par les mots : « de l'alinéa ».
II. - Non modifié
III. - Dès la publication de la présente loi, le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat nomment chacun un membre supplémentaire de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, pour un mandat de six ans prolongé jusqu'au 31 décembre de la dernière année de ce mandat.
IV. - Supprimé
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 83, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. La directive communautaire de 1997 engage les Etats à créer une autorité indépendante de régulation du secteur postal.
Cela étant, en centralisant à l'échelon de cette autorité, qui sera composée de personnes non désignées par les citoyens pour assumer cette fonction, la prise des décisions concernant l'avenir du secteur public, on fermera la porte à un possible contrôle démocratique du secteur postal.
Pourtant, les nombreuses mobilisations pour la défense de la présence postale que l'on observe sur le territoire montrent que les usagers sont attachés à la notion de service public. Citoyens, mouvements associatifs et syndicaux, mais aussi universitaires, hommes et femmes politiques sont nombreux à faire savoir qu'en ce qui concerne la gestion des biens communs ils sont opposés à la dépossession de la puissance publique.
La vague de libéralisation engagée actuellement contrevient largement à l'idée démocratique. En effet, si elle est présentée comme une nécessité absolue et comme une évidence, elle n'a été entérinée par aucun vote populaire. Et pour cause : cela risquerait de mettre un frein au mouvement entrepris par les fervents défenseurs du libéralisme et du démantèlement des services publics !
Par exemple, presque chacune des privatisations britanniques a suscité l'hostilité préalable d'une majorité du peuple. En Suisse, c'est une véritable union sacrée pour défendre le service public qui a été mise en place. Le programme ultra-libéral présenté lors de l'élection présidentielle de 2002 n'a recueilli que 3,9 % des suffrages exprimés.
L'ouverture du capital des télécommunications, la privatisation d'EDF, l'ouverture à la concurrence des activités postales sont entérinées par le Parlement sans engager, en dépit des protestations populaires, de débat d'ampleur sur l'opportunité d'une telle décision.
Quand engagerez-vous, monsieur le ministre, un réel débat incluant l'ensemble des forces sociales sur le coût pour la société de l'ouverture à la concurrence des services publics ?
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par le 1° du I de cet article pour le premier alinéa de l'article L.130 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :
dans les domaines juridique et technique des communications électroniques, des services postaux et de l'économie des territoires,
par les mots :
dans les domaines juridique et technique des communications électroniques et des postes et dans le domaine de l'économie des territoires,
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 83.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 33 est purement rédactionnel.
En ce qui concerne l'amendement n° 83, la commission émet un avis défavorable.
Il incombe à la France de créer une autorité de régulation pour les marchés postaux. Il lui revient également d'organiser les modalités de cette création. A ce sujet, la solution retenue par l'Assemblée nationale et préconisée par la commission des affaires économiques du Sénat en première lecture mérite d'être soutenue : elle augmente de cinq à sept le nombre de membres du collège de l'autorité de régulation et, pour ce faire, elle donne aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat le pouvoir de nommer, chacun, un membre de plus au collège de l'autorité de régulation.
A ce titre, les alternances démocratiques permettront l'expression du pluralisme politique auquel se disent attachés les auteurs de l'amendement ; nous en avons déjà parlé.
M. Gérard Le Cam. Ce sont toujours les mêmes qui siègent dans ces commissions !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Pour les raisons qui ont été rappelées, le Gouvernement partage l'avis de la commission sur l'amendement n°83.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement rédactionnel n°33.
M. le président. Je mets aux voix l'article 5 bis, modifié.
(L'article 5 bis est adopté.)
Article 7
Deux ans au plus tard après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement adresse au Parlement, après consultation de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, un rapport faisant des propositions de financement du fonds de compensation du service universel postal en vue d'assurer l'équilibre financier du service universel postal.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 84 est présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 158 est présenté par M. Retailleau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Débattre du financement des services publics est pour le moins une question centrale. Comme nous l'avons déjà dit, les dispositions concrètes destinées à assurer la pérennité du service universel doivent figurer dans le présent projet de loi.
Votre méthode souffre d'une incohérence majeure. C'est après avoir favorisé l'entrée de concurrents sur les segments les plus payants du marché que votre projet de loi se préoccupe du financement du service public.
En effet, vous détruisez d'abord l'équilibre atteint par les entreprises publiques, qui permettait de remplir les missions de service public, avec des comptes équilibrés, puis vous édictez des normes de respect de service universel, alors même que la survie sur le marché concurrentiel que vous avez créé rend ces missions secondaires.
De plus, la directive permet la création d'un fonds de compensation du service universel postal si le monopole accordé à La Poste ne suffit pas à financer ce service. Le Gouvernement doit remettre, dans un délai de deux ans, un rapport au Parlement sur cette question, préférant ainsi ne pas proposer immédiatement la création de ce fonds.
Attendre deux ans pour faire le point et savoir si La Poste sera en mesure de faire face à ses responsabilités ne nous semble pas être la meilleure façon de lui donner les moyens de répondre à ses obligations.
Ainsi, le Gouvernement ne prévoit qu'éventuellement la création d'un fonds de compensation pour le financement du service universel. Cette création n'est envisagée que par décret et il ne serait alimenté que par des contributions des concurrents de La Poste et non par la puissance d'Etat.
C'est oublier que, outre le service universel, La Poste remplit d'autres missions d'intérêt général telles que l'aménagement du territoire et la distribution de la presse, qui représentent de lourdes contraintes d'intérêt général. Par exemple, selon le Conseil de la concurrence, 211 millions d'euros restent à la charge de La Poste pour l'aménagement du territoire.
Avec l'ouverture à la concurrence, 43 % des recettes liées au courrier pourraient être perdus en 2006, notamment en raison de l'importante dérogation au monopole accordé à La Poste concernant les entreprises dont l'activité de courrier est importante.
De plus, un certain nombre d'éléments ont été inclus dans le contrat de plan signé avec La Poste. Ils méritent d'être éclaircis, d'autant que, on l'a compris à l'occasion des débats, plusieurs des pistes proposées impliqueraient la participation des collectivités territoriales à certains fonds. Or celles-ci sont aujourd'hui sollicitées de multiples façons ; on l'a vu pour la couverture des zones blanches dans le domaine des télécommunications.
Un certain nombre des mesures annoncées par le Président de la République telles que la suppression, à brève échéance, de la taxe professionnelle suscitent de vives inquiétudes. Le texte relatif aux responsabilités locales ne prévoit pas les ressources financières permettant de compenser les transferts de compétences qui sont envisagés. Nous estimons donc que des réponses doivent être apportées dans le présent projet de loi.
Il nous paraît en effet inutile, voire dangereux, d'attendre 2007 pour penser à ce fonds de compensation. Notre amendement vise donc à demander au Gouvernement d'anticiper cette date en nous faisant des propositions dès 2005.
Il faut dès maintenant créer les conditions d'un financement public adéquat du service public postal pour garantir son efficacité et l'accomplissement de ses missions d'intérêt général. Des solutions de financements alternatifs existent.
Toutes ces raisons justifient le dépôt du présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 158 n'est pas soutenu.
L'amendement n° 34 rectifié, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. Afin d'assurer la sauvegarde du service universel, il est créé par décret en Conseil d'Etat un fonds de compensation du service universel postal, pour le cas et dans la mesure où l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes établit que les services réservés définis à l'article L. 2 ne procureraient pas au prestataire du service universel des recettes suffisantes pour compenser la charge financière constituée par ses obligations de service universel. La Caisse des dépôts et consignations assure la gestion comptable et financière de ce fonds dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés par la caisse sont imputés sur le fonds.
La contribution de chaque prestataire postal titulaire de l'autorisation prévue à l'article L. 3 est calculée au prorata de son chiffre d'affaires réalisé dans le champ du service universel défini à l'article L. 1. Tout prestataire dont le chiffre d'affaires réalisé dans le champ du service universel défini à l'article L. 1 est inférieur à un montant fixé par décret est exempté de contribution au fonds de compensation.
Le montant des contributions nettes que le prestataire du service universel ou les prestataires autorisés en vertu de l'article L. 3 versent ou reçoivent est déterminé par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Ces contributions sont recouvrées par la Caisse des dépôts et consignations selon les modalités prévues pour les créances de cet établissement.
En cas de défaillance d'un opérateur, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prononce une des sanctions prévues à l'article L. 5-3.
En cas de nouvelle défaillance, elle peut retirer l'autorisation. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées dans un délai d'un an, elles sont imputées sur le fonds lors de l'exercice suivant.
II - Les méthodes d'évaluation, de compensation et de partage des coûts nets liés aux obligations de service universel sont rendues publiques un an au moins avant leur mise en application.
III - Le ministre chargé des postes prend le décret en Conseil d'Etat prévu au I du présent article après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques. Il précise les conditions et la date d'application du présent article. Il établit notamment les méthodes de l'évaluation, de la compensation et du partage des coûts nets du service universel, ainsi que les modalités de gestion du fonds de compensation du service universel postal.
IV - Le ministre chargé des postes adresse chaque année au Parlement un rapport sur l'application des dispositions du présent article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Plutôt que de demander au Gouvernement un rapport sur le fonds de compensation du service universel postal afin d'examiner la pertinence de sa création, cet amendement prévoit d'habiliter le Gouvernement à créer un fonds de compensation du service universel postal en tant que de besoin, afin d'assurer la sauvegarde du service universel.
Ce faisant, la France rejoindrait plusieurs autres pays européens, notamment l'Allemagne, qui ont déjà prévu la mise en place d'un fonds de compensation du service universel. D'ailleurs, la rédaction proposée par l'amendement est inspirée du texte en vigueur en Italie.
Ce fonds pourra être créé à partir du moment où il sera établi par l'ARCEP que les services réservés ne procurent pas au prestataire du service universel des recettes suffisantes pour compenser la charge financière constituée par ses obligations de service universel. Il sera alimenté par une contribution des opérateurs postaux autorisés au prorata de leur chiffre d'affaires réalisé dans le champ du service universel ; les opérateurs dont le chiffre d'affaires est modeste seraient exonérés.
Enfin, il est prévu de renvoyer à un décret la fixation de la date de création et les modalités.
M. le président. L'amendement n° 132, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Au 1er janvier 2006, il est crée un fonds de compensation du service universel postal, en vue d'assurer l'équilibre financier de ce service. Tout opérateur autorisé est tenu de verser une contribution au fonds de compensation. La contribution de chaque opérateur au financement du service universel est calculée au prorata de son chiffre d'affaires réalisé au titre des services postaux.
Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, fixe les modalités d'application du présent article. Il précise notamment les conditions d'attribution, les méthodes de l'évaluation qui répondent à des exigences de transparence et de publicité, de la compensation et du partage des coûts nets du service universel, ainsi que des modalités de gestion du fonds de compensation du service universel postal.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. La directive autorise clairement la création d'un fonds de compensation en vue d'assurer un juste financement du service universel postal. Nous proposons donc la création de ce fonds, et ce dès le 1er janvier 2006, c'est-à-dire à la date de mise en place de la seconde étape de l'ouverture à la concurrence des services postaux.
L'amendement présenté par M. le rapporteur comporte une phrase intéressante : « Afin d'assurer la sauvegarde du service universel, il est créé par décret en Conseil d'Etat un fonds de compensation du service universel postal, pour le cas et dans la mesure où l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes établit que les services... » .
C'est mieux qu'un rapport et je lui donne acte de sa proposition, mais la création de ce fonds reste virtuelle.
M. le rapporteur me dira sans doute tout à l'heure que le présent amendement est satisfait par l'amendement de la commission. Mais tel n'est pas le cas. Nous souhaitons que ce fonds de compensation soit vraiment créé, car le périmètre des services réservés a été considérablement réduit par ce projet de loi. Créer ce fonds dès le 1er janvier 2006, c'est assurer la qualité du service universel, auquel nous sommes très attachés.
M. le président. L'amendement n° 144 rectifié, présenté par MM. Delfau, Baylet, Collin, Laffitte, Fortassin et A. Boyer, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Il est créé un Fonds de compensation du service universel postal en vue d'assurer l'équilibre financier du service universel postal.
Dans les deux ans suivants la promulgation de la présente loi, le Gouvernement, après consultation de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, adresse au Parlement un rapport faisant des propositions de financement de ce fonds.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Le texte de l'Assemblée nationale conditionnait la création du fonds de compensation à un rapport. C'est une étrange manière d'aborder un sujet aussi sérieux, qui détermine en partie la viabilité de l'entreprise publique La Poste.
La proposition de M. le rapporteur constitue un progrès indéniable : outre qu'elle commence par les mots : « Afin d'assurer la sauvegarde du service universel », elle prévoit les dispositions suivantes : « il est créé par décret en Conseil d'Etat un fonds de compensation ». Cependant, dans la suite du texte, on précise que cette création devra être validée par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. C'est donc finalement une autorité de régulation qui décidera, éventuellement en faveur des opérateurs privés - nous avons exprimé notre crainte à cet égard tout au long du débat - s'il doit y avoir compensation.
C'est pourquoi l'amendement que je propose vise à prévoir clairement et sans condition la création d'un fonds de compensation.
Monsieur le rapporteur, je suis prêt à me rallier à votre amendement si vous acceptez de le modifier en supprimant la fin de première phrase après les mots : « service universel postal ». Cette phrase serait donc ainsi rédigée : « Afin d'assurer la sauvegarde du service universel, il est créé par décret en Conseil d'Etat un fonds de compensation du service universel postal. »
La création de ce fonds doit être décidée par le Parlement, et non pas par l'Autorité de régulation.
J'ai l'impression de tenir ce soir des propos qui s'inscrivent dans la longue tradition démocratique française, mais je ne suis pas souvent entendu par la majorité de nos collègues.
M. Gérard Delfau. Mais peut-être la tradition va-t-elle l'emporter ! J'espère que le Sénat décidera de la création de ce fonds de compensation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 84 est satisfait. En effet, l'amendement n° 34 rectifié tend à inscrire d'emblée dans le projet de loi le principe de la création d'un fonds de compensation de service universel postal afin d'en assurer la pérennité.
Monsieur Billout, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, elle émettra un avis défavorable.
Concernant la modification que souhaite apporter M. Delfau à l'amendement n° 34 rectifié, la commission aimerait connaître l'avis du Gouvernement.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel. Il ne faut pas prendre de risque !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Contrairement à ce que pense M. Trémel, l'amendement n° 132 est satisfait. La commission demande donc à ses auteurs de le retirer. A défaut, elle émettra un avis défavorable. Quant à l'amendement n° 144 rectifié, il est, lui aussi, satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 84, pour les raisons clairement expliquées par M. le rapporteur.
S'agissant de la modification de l'amendement n° 34 rectifié, j'ai déjà évoqué dans cet hémicycle en quels termes juridiques se pose la question de la création d'un fonds de compensation.
Il convient de rappeler que cette mesure ne saurait entrer en vigueur tant que le monopole postal fournira suffisamment de revenus pour financer le service universel postal. Par ailleurs, les questions relatives à l'aménagement du territoire ne relèvent pas de ce mécanisme. En outre, aucun pays ne l'a mis en oeuvre, même pas ceux qui ont totalement libéralisé leur marché.
Cependant, le Gouvernement souscrit à l'amendement n° 34 rectifié. Celui-ci établit en effet clairement qu'un fonds peut être créé dans la mesure où sa nécessité a été formellement constatée par l'autorité de régulation. La loi en décrit les principes, ce qui permet d'offrir une meilleure visibilité à toutes les parties concernées. Elle reprend des mécanismes qui existent pour le secteur des communications électroniques, ce qui explique que l'ARCEP puisse réunir à la fois les communications électroniques et l'activité postale. Enfin, un décret permettra de formaliser l'activation du fonds.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à la proposition de M. Delfau. Celle-ci dénaturerait complètement l'amendement n° 34 rectifié, puisqu'elle vise à créer immédiatement ce fonds. Je l'ai déjà expliqué, son activation dépend simplement des constats faits par l'autorité de régulation. Or, à ce jour, ceux-ci ne sont pas intervenus.
M. Pierre-Yvon Trémel. Cela montre que le fonds est virtuel !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Par ailleurs, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s 132 et 144 rectifié. Ils sont en effet satisfaits dans leur principe. Réclamer la mise en oeuvre du fonds alors que son besoin n'a pas été constaté, selon les termes mêmes de la loi et des dispositions que nous adoptons, n'a pas de sens.
M. le président. Monsieur Billout, l'amendement n° 84 est-il maintenu ?
M. Michel Billout. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote sur l'amendement n° 34 rectifié.
M. Gérard Delfau. Monsieur le rapporteur, je souhaite vraiment que le Sénat fasse oeuvre la plus utile possible. C'est pourquoi je cherche un accord.
Dans l'amendement de la commission, je suis gêné non seulement par le fond, mais aussi par la forme. La formulation « pour le cas et dans la mesure où » me semble étonnamment restrictive. Elle oriente presque vers une non-décision.
S'il était possible, tout en maintenant l'intervention de l'autorité de régulation dans le processus, de supprimer cette formulation - sur votre initiative cette fois-ci -, nous accomplirions collectivement un progrès significatif, et le Sénat donnerait un signal. Voilà ce que je vous propose pour essayer d'avancer ensemble.
Monsieur le rapporteur, si je me souviens bien, c'est ce que nous étions convenus hier soir en commission des affaires économiques lorsque nous avons examiné ce point très important. M. Trémel et d'autres peuvent en témoigner.
M. Pierre-Yvon Trémel. Absolument !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Delfau, à l'Assemblée nationale, le Gouvernement avait émis un avis défavorable sur un dispositif identique à l'amendement n° 34 rectifié. Les députés s'étaient alors rangés à son avis.
Au Sénat, le Gouvernement est allé au-devant de sa majorité.
Mme Nicole Bricq. Elle en a de la chance !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Cela prouve qu'il est des gouvernements qui écoutent leur majorité.
Après une large concertation et une forte demande, en particulier des élus ruraux, le Gouvernement a changé d'avis. Nous avons fait un chemin très important. Ne chargez pas la barque !
Mme Nicole Bricq. Ecoutez aussi l'opposition !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Merci, monsieur le ministre, d'avoir rappelé les conditions dans lesquelles la situation a évolué après l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale.
Les arguments que Jean-Paul Emorine et moi-même avons développés vous ont conduit à émettre un avis favorable sur ce dispositif, dont l'importance a été soulignée par l'ensemble des intervenants.
Mes chers collègues, adopter ce soir l'amendement n° 34 rectifié permettrait une avancée significative en arrêtant le principe de la création d'un fonds. C'est tout à fait fondamental. L'Assemblée nationale ne manquera probablement pas - il lui appartiendra, bien entendu, d'en décider - d'adopter le même point de vue en deuxième lecture.
J'en appelle à la sagesse de nos collègues. J'essaie de convaincre M. Delfau de ne pas demander plus que ce que le ministre est prêt à accepter. Si le Gouvernement émet le même avis à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, nous aurons décidé, ce soir, la création d'un fonds de service universel, assorti, il est vrai, d'un certain nombre de conditions.
Il faut en effet rappeler qu'il appartient à l'autorité de régulation de faire un certain nombre de constats avant que la décision d'activer ce fonds soit prise par le ministre.
Dans la mesure où il s'agit d'une avancée significative, je souhaite que nous adoptions l'amendement n° 34 rectifié en l'état, tout en comprenant les arguments qui ont été avancés.
M. le président. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé et les amendements nos 132 et 144 rectifié n'ont plus d'objet.
Article additionnel après l'article 1er bis (précédemment réservé)
M. le président. L'amendement n° 154, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :
Après l'article 1er bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour financer les obligations de service universel visées aux articles L. 1 et L. 2 du code des postes et des communications électroniques, est institué un fonds de compensation des charges de service universel. Ce fonds a pour mission de contribuer à la charge que représente le maintien par La Poste d'un service universel de qualité sur l'ensemble du territoire, y compris en zone non rentable.
Les ressources de ce fonds proviennent d'une contribution versée par tout opérateur visé à l'article L.3 du code des postes et des communications électroniques.
Dans les six mois suivant la promulgation de la loi n° du relative à la régulation des activités postales, un décret en Conseil d'Etat vient préciser les modalités selon lesquelles cette contribution est instituée.
Cet amendement n'est pas défendu.
Article additionnel avant l'article 8
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er octobre 2005, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport sur le bilan des déréglementations dans le secteur financier et bancaire.
Ce rapport examine notamment l'impact en matière de croissance, d'investissement, d'emploi, des politiques menées au niveau européen comme au niveau national, qui ont renforcé la dépendance de nos économies à l'égard des marchés boursiers.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Avant de débattre de la volonté du Gouvernement de faire des services financiers de La Poste une banque comme les autres, il nous paraît nécessaire d'analyser l'impact d'un tel projet sur notre économie.
La déréglementation du système financier français date de la seconde moitié des années quatre-vingt. La privatisation des banques coopératives, comme le Crédit agricole, la priorité accordée aux marchés boursiers ou le développement de nouvelles catégories de titres financiers en ont constitué les principaux piliers.
Cette déréglementation a reposé sur une promesse : renforcer l'efficacité du système financier et mieux allouer les ressources, donc favoriser la croissance économique.
Quel bilan pouvons-nous, aujourd'hui, en tirer ?
Depuis cette période, la croissance économique, en Europe, est relativement atone. Il est vrai que ce déficit de croissance est aussi le résultat de l'adoption de l'euro. L'épargne des européens ne finance ni notre économie ni le développement des pays pauvres. Elle nourrit uniquement la croissance des Etats-Unis et la spéculation financière.
Les problèmes consécutifs à cette déréglementation sont énormes.
Imaginons, par exemple, un jeune entrepreneur désirant fonder une entreprise, quelle qu'elle soit, créer des richesses et des emplois. Il cherchera, bien évidemment, à financer son projet et s'adressera donc aux banques de sa région. Vous savez parfaitement quelle réponse on lui fera.
Si son projet n'est pas très bon, aucune banque ne lui accordera un prêt. S'il est excellent, on lui prêtera de l'argent, mais à un taux d'intérêt de l'ordre de 5 %. Dès lors, toutes les richesses que cette entreprise pourra créer seront accaparées par cette banque.
Ce sont ces expériences qui expliquent, en grande partie, l'atonie de l'économie française.
Je prends un second exemple : Sanofi a eu besoin de 50 milliards d'euros pour racheter son concurrent Aventis. Lui aussi a besoin d'argent dans le cadre de cette opération. Sur le marché obligataire, mais aussi auprès de ses banques, cette entreprise est parvenue à emprunter des dizaines de milliards d'euros à des taux d'intérêt défiant toute concurrence, souvent inférieurs à 2 %. Or cet emprunt ne créera aucune richesse nouvelle, aucun emploi !
M. Gérard Le Cam. Quand une économie prête plus facilement de l'argent à ceux qui ne créent rien, et qui préfèrent spéculer, qu'à ceux qui travaillent, il est urgent de corriger de tels dysfonctionnements.
Avant de franchir un pas de plus dans cette déréglementation de notre système financier, en transformant les services financiers de La Poste en banque postale, il nous paraîtrait pour le moins nécessaire d'effectuer un bilan de l'efficacité des mesures qui ont déjà été prises en termes de croissance et d'emploi. On en conclurait probablement qu'une telle réforme serait tout simplement funeste, et qu'il serait nécessaire, à l'inverse, de réorienter notre système financier vers le soutien à la croissance réelle et à l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La rédaction proposée par nos collègues du groupe CRC paraît trop vague.
De quoi ce rapport devrait-il dresser précisément le bilan ? Quel est le champ géographique de cette étude ? Sur combien d'années doit-elle porter ?
En tout état de cause, les conséquences de la libéralisation des marchés financiers ont déjà fait l'objet de multiples études. La Banque de France assure un suivi régulier de ces sujets, le Conseil des marchés financiers également. Il n'y a donc pas lieu de demander au Gouvernement un rapport supplémentaire, qui plus est sur un sujet aux contours imprécis.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je partage pleinement l'avis du rapporteur. J'ai d'ailleurs fait adopter par l'Assemblée nationale un sous-amendement prévoyant un rapport spécifique sur la mise en place de l'établissement de crédit postal. Donc, eu égard au flou de la proposition du groupe CRC, celle que présente le Gouvernement a le mérite de la précision.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 86.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
I. - 1. L'article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 2. - La Poste et ses filiales constituent un groupe public qui remplit, dans les conditions définies par les textes qui régissent chacun de ses domaines d'activité, des missions d'intérêt général et exerce des activités concurrentielles.
« La Poste assure, dans les relations intérieures et internationales, le service public des envois postaux, qui comprend le service universel postal et notamment le service public du transport et de la distribution de la presse bénéficiant du régime spécifique prévu par le code des postes et des communications électroniques. Elle assure également, dans le respect des règles de concurrence, tout autre service de collecte, de tri, de transport et de distribution d'envois postaux, de courrier sous toutes ses formes, d'objets et de marchandises.
« Elle exerce ses activités financières dans les conditions prévues à l'article L. 518-25 du code monétaire et financier. »
2. Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
a) L'article L. 518-25 est ainsi rédigé :
« Art. L. 518-25. - Dans les domaines bancaire, financier et des assurances, La Poste propose des produits et services au plus grand nombre, notamment le Livret A.
« A cette fin, et sous réserve, le cas échéant, des activités qu'elle exerce directement en application des textes qui la régissent, La Poste crée, dans les conditions définies par la législation applicable, toute filiale ayant le statut d'établissement de crédit, d'entreprise d'investissement ou d'entreprise d'assurance et prend directement ou indirectement toute participation dans de tels établissements ou entreprises. Elle peut conclure avec ces établissements ou entreprises toute convention en vue d'offrir, en leur nom et pour leur compte et dans le respect des règles de concurrence, toute prestation concourant à la réalisation de leur objet, notamment toute prestation relative aux opérations prévues aux articles L. 311-1, L. 311-2, L. 321-1 et L. 321-2 ou à tous produits d'assurance. » ;
b) Au premier alinéa de l'article L. 518-26, après les mots : « sous la garantie de l'Etat », sont insérés les mots : « pour recevoir les dépôts du Livret A dans les conditions définies aux articles L. 221-1 et suivants, sans préjudice des dispositions propres aux caisses d'épargne ordinaires », et les mots : « dans le cadre des missions définies à l'article L. 518-25 » sont supprimés ;
c) Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La Caisse nationale d'épargne est gérée, pour le compte de l'Etat, par un établissement de crédit dont La Poste détient la majorité du capital, dans des conditions déterminées par une convention conclue entre l'Etat, La Poste et cet établissement. »
II. - 1. La Poste transfère à une filiale agréée en qualité d'établissement de crédit dans les conditions définies à l'article L. 511-10 du code monétaire et financier et soumis aux dispositions du titre Ier du livre V du même code, l'ensemble des biens, droits et obligations de toute nature liés à ses services financiers, y compris les participations, à l'exception, le cas échéant, de ceux nécessaires aux activités qu'elle exerce directement. La Poste détient la majorité du capital de cet établissement de crédit.
Dans ce cadre, La Poste transfère notamment à cet établissement l'intégralité des comptes et livrets de toute nature ouverts dans ses livres ainsi que les biens, droits et obligations qui y sont liés. Les comptes courants postaux, dont la dénomination peut être maintenue, sont régis, à compter de ce transfert, par le code monétaire et financier, notamment par ses articles L. 312-1 et suivants.
2. Sous réserve des règles propres au Livret A, l'établissement de crédit mentionné au 1 exerce pour son propre compte l'ensemble des activités antérieurement exercées au titre de la Caisse nationale d'épargne, dans les conditions définies par les textes régissant chacune de ces activités. A cette fin, et sans préjudice des règles spécifiques de centralisation, les biens, droits et obligations liés aux comptes, livrets et contrats de toute nature ouverts ou conclus par La Poste au titre de la Caisse nationale d'épargne, notamment ceux nécessaires au respect des règles de couverture des risques et des obligations prudentielles des établissements de crédit, sont transférés à cet établissement à la date du transfert mentionné au 1. A compter de cette date, à l'exception des dépôts sur le Livret A, la Caisse nationale d'épargne ne reçoit plus aucun dépôt. A compter de la date du transfert prévu au 1, la Caisse des dépôts et consignations est déchargée de toute responsabilité à raison de la gestion, pour le compte de l'Etat, des biens, droits et obligations transférés.
Pendant une durée qui ne peut excéder deux ans à compter de la publication de la présente loi, les fonds des comptes, livrets et contrats transférés en application de l'alinéa précédent bénéficient de la garantie prévue à l'article L. 518-26 du code monétaire et financier dans des conditions définies par une convention conclue entre l'Etat et l'établissement de crédit mentionné au 1.
3. A compter de la date du transfert prévu au 1 et jusqu'à la conclusion de la convention prévue au dernier alinéa de l'article L. 518-26 du code monétaire et financier, l'établissement de crédit mentionné au 1 assure, pour le compte de l'Etat, la gestion de la Caisse nationale d'épargne.
4. Les transferts visés aux 1 et 2 sont réalisés de plein droit et sans qu'il soit besoin d'aucune formalité nonobstant toutes disposition ou stipulation contraires. Ils entraînent l'effet d'une transmission universelle de patrimoine ainsi que le transfert de plein droit et sans formalité des accessoires des créances cédées et des sûretés réelles et personnelles les garantissant. Le transfert des contrats en cours d'exécution, quelle que soit leur qualification juridique, conclus par La Poste dans le cadre des activités de ses services financiers, y compris au titre de la gestion de la Caisse nationale d'épargne, ou conclus par la Caisse des dépôts et consignations, n'est de nature à justifier ni leur résiliation, ni la modification de l'une quelconque de leurs clauses ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en sont l'objet. De même, ces transferts ne sont de nature à justifier la résiliation ou la modification d'aucune autre convention conclue par La Poste ou les sociétés qui lui sont liées au sens des articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de commerce. Ces transferts n'entraînent par eux-mêmes le transfert d'aucun contrat de travail.
5. Les opérations visées au présent II ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit.
6. Les modalités d'application du présent article, notamment les conditions dans lesquelles les biens, droits et obligations visés au 2 sont transférés à l'établissement de crédit mentionné au 1 par l'intermédiaire de La Poste, sont précisées par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.
7. Au plus tard dans les deux ans qui suivent le transfert prévu au 1, la Cour des comptes élabore un rapport sur la création de l'établissement de crédit visé au 1, sur son fonctionnement et sur les relations de toute nature existant entre cet établissement de crédit et les autres entreprises du groupe La Poste. Ce rapport est transmis au Parlement.
III. - 1. La Poste et l'établissement de crédit mentionné au 1 du II concluent une ou plusieurs conventions au sens du deuxième alinéa de l'article L. 518-25 du code monétaire et financier en vue de déterminer les conditions dans lesquelles cet établissement recourt, pour la réalisation de son objet, aux moyens de La Poste, notamment à son personnel. Ces conventions déterminent notamment les conditions dans lesquelles les titulaires de comptes ou livrets ouverts auprès de cet établissement peuvent procéder à toute opération de retrait ou de dépôt auprès de La Poste.
2. Les fonctionnaires en activité à La Poste peuvent, avec leur accord, être mis à la disposition, le cas échéant à temps partiel, de l'établissement de crédit mentionné au 1 du II et des sociétés dont il détient directement ou indirectement la majorité du capital pour une durée maximale de quinze ans. Ces sociétés remboursent à La Poste les charges correspondantes. Les fonctionnaires ainsi mis à disposition peuvent, à tout moment, solliciter leur réaffectation dans les services de La Poste.
IV. - 1. Dans l'article L. 221-10 du code monétaire et financier, les mots : « La Poste » sont remplacés par les mots : « L'établissement de crédit visé à l'article L. 518-26 » et les mots : « ou au nom de laquelle » et : « , dans un de ses établissements » sont supprimés.
2. Dans le premier alinéa de l'article L. 518-1 du même code, les mots : « les services financiers de La Poste » sont remplacés par les mots : « La Poste, dans les conditions définies à l'article L. 518-25 ». Dans le dernier alinéa du même article, les mots : « aux services financiers de La Poste » sont remplacés par les mots : « à La Poste, dans les conditions définies à l'article L. 518-25 ». Dans le 2° de l'article L. 564-3 du même code, les mots : « les services financiers de La Poste » sont remplacés par les mots : « La Poste ».
3. a) Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
- dans le premier alinéa de l'article L. 133-1 et dans le troisième alinéa de l'article L. 141-8, les mots : « les services financiers de La Poste, » sont supprimés ;
- dans les premier et troisième alinéas de l'article L. 312-1, les mots : « financiers de La Poste ou » sont supprimés ;
- dans le deuxième alinéa du même article, les mots : « financiers de La Poste, soit ceux » sont supprimés ;
- dans le premier alinéa de l'article L. 221-18, les mots : « des services financiers de La Poste, » sont supprimés ;
b) Dans le deuxième alinéa de l'article L. 333-4 du code de la consommation, les mots : « ainsi que les services financiers de La Poste » sont supprimés. Dans le dernier alinéa du même article, les mots : « à la Banque de France, aux établissements de crédit et aux services financiers de La Poste » sont remplacés par les mots : « à la Banque de France et aux établissements de crédit ». Les mêmes modifications sont effectuées dans l'article L. 313-6 du code monétaire et financier ;
c) Dans l'article 56 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 2001-1276 du 28 décembre 2001), les mots : « et les services financiers de La Poste » sont supprimés ;
d) Dans l'article 1er de la loi n° 87-416 du 17 juin 1987 sur l'épargne, les mots : « des services financiers de La Poste » sont supprimés.
3 bis. Les références aux « services financiers de La Poste » sont supprimées dans l'ensemble des textes réglementaires en vigueur.
4. Dans l'article L. 315-3 du code de la construction et de l'habitation, les mots : « la Caisse nationale d'épargne et » sont supprimés.
5. Dans l'article 1er de la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992 relative au plan d'épargne en actions, les mots : « , de La Poste » sont supprimés.
6. Le dernier alinéa de l'article 15 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée ainsi que les deux derniers alinéas de l'article 16 de cette même loi sont supprimés.
7. a) Sont abrogés :
- le livre III du code des postes et des communications électroniques ;
- la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code monétaire et financier ;
b) Dans l'article L. 163-11 du code monétaire et financier, la référence : « L. 131-88 » est remplacée par la référence : « L. 131-87 ».
8. a) Le chapitre Ier du titre III du livre Ier du code monétaire et financier est intitulé : « Le chèque bancaire et postal » et les sous-sections 1 à 12 de la section 1 de ce chapitre en deviennent les sections 1 à 12 ;
b) Dans les articles L. 131-1 et L. 131-85 du même code, les mots : « la présente section » sont remplacés par les mots : « le présent chapitre » ;
c) Dans les articles L. 131-40, L. 131-86 et L. 131-87 du même code, les mots : « de la présente section » sont remplacés par les mots : « du présent chapitre ».
V. - 1. Jusqu'à leur échéance, les investissements réalisés conformément aux dispositions de l'article 15 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée dans sa rédaction en vigueur jusqu'à la date de publication de la présente loi demeurent régis par ces dispositions.
2. Les dispositions des I à IV entrent en vigueur à la date du transfert prévu au 1 du II.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l'article.
M. Jean-Pierre Sueur. L'article 8 du projet de loi est très important et nous voudrions que ce débat soit l'occasion de quelques clarifications. En effet, monsieur le ministre, nous vous avons beaucoup écouté et, hier, vous n'avez pas été en mesure de répondre précisément aux questions que nous vous posions. La nuit portant conseil, nous espérons que vous pourrez aujourd'hui nous apporter des réponses.
Le premier point que j'aborderai dans cette intervention liminaire concerne la structure. Il s'agit d'un établissement bancaire qui est une filiale, directe ou indirecte, de la maison mère - La Poste -, c'est-à-dire qu'il s'agit, le cas échéant, d'une sous-filiale. Le paradoxe, c'est que la filiale va passer un accord avec la maison mère pour savoir comment celle-ci concourra au fonctionnement de la filiale !
La situation est extrêmement floue et complexe. Nous nous demandons même si cette complexité n'est pas voulue, de telle manière que l'établissement bancaire soit en quelque sorte dissocié de La Poste. M. Daniel Bouton ne déclarait-il pas dans le quotidien La Tribune : « Cette banque postale n'a qu'une seule vocation dans l'avenir, c'est d'être privatisée. » ? Voilà ce que pense M. le président de la Fédération bancaire française !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cela n'engage que lui !
M. Jean-Pierre Sueur. M. Hérisson dit que cela n'engage que lui...
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Evidemment !
M. Jean-Pierre Sueur. ...et je suis très heureux qu'il le dise, encore faudrait-il que nous prenions des dispositions afin que les objectifs de M. Bouton ne se réalisent pas ! Or le dispositif est élaboré de telle manière que nous avons les plus grands doutes.
Lorsque nous avons évoqué une filiale détenue à 100 % par La Poste, M. le ministre a bien voulu nous répondre que, de toute façon, ce n'était pas une garantie puisque les gouvernements changeaient - vous avez d'ailleurs raison de le souligner, monsieur le ministre -...
M. Jean-Pierre Sueur. ...et qu'un gouvernement pouvait proposer au Parlement de voter une autre mesure, un autre taux, etc.
M. Jean-Pierre Sueur. Je me permets de vous faire observer que ce que vous dites est un artéfact, c'est-à-dire que cela vaut pour l'ensemble des articles de l'ensemble des lois !
M. Jean-Pierre Sueur. Cela ne fait donc pas beaucoup avancer le débat...
M. Jean-Pierre Sueur. En tout cas, nous pensons qu'une plus grande clarté est nécessaire en la matière.
Le second point de mon propos, monsieur le président, a trait à la situation paradoxale dans laquelle l'établissement bancaire postal risque de se trouver, en continuant d'assumer les charges sociales qui sont les siennes - car les services financiers de La Poste jouent un rôle social très important - tout en n'ayant pas la possibilité d'offrir l'ensemble des services financiers que l'on est en droit d'attendre d'un établissement bancaire.
Nous savons que des pressions ont été exercées. Je mentionne de nouveau les propos tenus en mars 2003 par M. Jean Peyrelevade, président du Crédit Lyonnais, repris dans le rapport d'information précédemment cité de M. Larcher : « Les banquiers ne peuvent à la fois se plaindre du fait que le marché bancaire est déjà concentré au point que le rapprochement entre le Crédit Agricole et le Lyonnais fait peser des menaces sur la concurrence, et en même temps s'opposer à une extension des activités de La Poste qui aurait pour premier effet d'accroître ce niveau de concurrence. »
Monsieur le ministre, il nous semble parfaitement incompréhensible que vous ne puissiez pas nous dire à quel moment le Gouvernement entend permettre concrètement au futur établissement bancaire postal de délivrer des crédits à la consommation. Nous voudrions bien savoir pourquoi vous vous refusez à aborder cette question qui est entre les mains du Gouvernement. Le rapporteur, M. Hérisson, souligne d'ailleurs dans ses rapports l'importance du sujet. Comment le Gouvernement peut-il s'en tenir à ce mutisme alors que nous savons très bien que les services financiers représentent aujourd'hui 58 % du chiffre d'affaires des bureaux de poste et que, si la question n'était pas traitée sérieusement, nous serions sur une mauvaise pente ?
C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous vous interrogeons de nouveau et nous espérons que, cette fois-ci, vous ne vous déroberez pas !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat sur la banque postale n'est pas nouveau et nous sommes inquiets de ce que le Gouvernement n'ait pas encore levé, à ce stade avancé du débat, et particulièrement à l'article 8, l'ambiguïté de sa position.
Si nous pouvions approuver la création de l'établissement de crédit postal qui nous est proposée, les conditions dans lesquelles elle sera réalisée ne sont pas bonnes.
La commission des finances, dont je suis membre, a auditionné le 1er mars dernier le président du groupe La Poste, M. Bailly, qui nous a d'une certaine manière rassurés sur les conditions de sérieux dans lesquelles la direction de La Poste a préparé l'échéance de la mise en concurrence selon les règles du droit commun bancaire.
Il a par ailleurs fait remarquer, renforçant notre inquiétude, que les services financiers étaient au coeur de l'activité des bureaux de poste, puisqu'ils représentaient 70 % de l'activité - je rectifie le chiffre plus ancien avancé par M. Sueur -,...
M. Jean-Pierre Sueur. Je citais M. Larcher !
Mme Nicole Bricq. ...observant que la vitalité des services financiers constituait une des conditions du maintien de La Poste dans les zones rurales et les zones urbaines sensibles.
Ce point est important. En effet, nous pouvons craindre que les lieux où pourront s'effectuer la totalité des services financiers ne préfigurent le réseau postal. A cet égard, je rappellerai deux chiffres connus. Le réseau bancaire de proximité du Crédit Agricole - établissement dont je reparlerai ultérieurement au sujet de la concurrence bancaire - compte 7 500 points. La comparaison avec les 17 000 points postaux ne laisse pas de nous inquiéter quant à la maquette future du réseau de La Poste, dont nous craignons, à terme, la normalisation. Je pense donc que les deux problèmes sont liés.
J'observe du reste que, dans les protocoles qui sont soumis aux élus - je dispose du projet de convention territoriale d'une commune avec le directeur départemental de La Poste de Seine-et-Marne -, la présence des services financiers n'est pas explicitement mentionnée.
Notre deuxième inquiétude concerne la fermeté du Gouvernement pour résister à la pression du secteur bancaire, lequel conteste ouvertement, et depuis longtemps, le projet de banque postale - j'ai cité le Crédit Agricole parce qu'il nous a écrit et je suppose que la question est sur la place publique.
Cette inquiétude est renforcée par l'absence de référence explicite, dans le texte, à l'accès immédiat à tous les services financiers de droit commun, évoquée par mon collègue Jean-Pierre Sueur : je veux parler des crédits à la consommation. En effet, au cours de l'audition du 1er mars, le président Bailly indiquait que la possibilité pour La Poste de délivrer des crédits immobiliers sans épargne préalable - « sans apport personnel » dit-on dans le jargon du métier - permettrait à peine de stabiliser la perte annuelle de clients estimée à 70 000 et représentait la seule manière de régénérer la clientèle, notamment chez les jeunes.
Dès lors, on peut s'interroger sur la viabilité, à terme, de l'établissement que vous voulez créer ! Je rappelle le calendrier qui nous a été indiqué : l'établissement de crédit devra être agréé par le CECEI avant que s'opère le transfert des services financiers, prévu avant le 1er janvier 2006.
Ne s'agit-il pas, de la part du Gouvernement, de faire droit à une revendication ancienne de La Poste en donnant une base juridique à la banque postale, prévue dans le contrat de plan 2003-2007, mais de ne pas lui donner les moyens de sa viabilité ? Agir ainsi, je le dis tout net, c'est faire une très grande confiance au marché et, d'une certaine manière, se laver les mains de l'avenir de La Poste !
C'est cette ambiguïté fondamentale dans la position du Gouvernement qui nous inquiète profondément et qui nous conduira, si nos amendements sont rejetés, à voter contre l'article 8. Mais, monsieur le ministre, il n'est pas tout à fait minuit : vous pouvez encore vous expliquer davantage que vous ne l'avez fait tout au long de ce débat parlementaire !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je voudrais tout de même rectifier quelques erreurs qui, en se propageant, finiraient par fausser le raisonnement.
Madame Bricq, vous avez évoqué le taux de 70 % du chiffre d'affaires...
Mme Nicole Bricq. Ce n'est pas moi, c'est le président Bailly !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous ne l'avez certainement pas bien compris, parce qu'il ne dit pas de pareilles énormités !
Mme Nicole Bricq. J'ai ici le compte rendu de la commission !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le chiffre d'affaires de La Poste, pour les services financiers, est de 23 %, et non de 70 % !
Mme Nicole Bricq. Je parle de l'activité !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Pour ce qui est de l'activité du réseau, M. Sueur a cité le bon chiffre, à savoir 58 % !
M. Jean-Pierre Sueur. C'est ce que dit M. Larcher !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. M. Larcher est un parlementaire éminent qui ne se trompe pas sur les chiffres et son sens des responsabilités lui a d'ailleurs permis d'accéder au Gouvernement !
Mme Bricq en est encore éloignée car ses chiffres sont plus qu'incertains.
Sur le principe, je répéterai ce que j'ai dit, puisque vous n'étiez pas présente hier, madame la sénatrice,...
Mme Nicole Bricq. Si j'étais là !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ...à savoir que le présent projet de loi permet parfaitement à La Poste de faire du crédit à la consommation.
M. Jean-Pierre Sueur. Le Gouvernement ne le permet pas !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. En conséquence, pour le débat qui nous occupe, madame Bricq, vous avez satisfaction : le principe de la permission est posé.
M. Jean-Pierre Sueur. Ça, on l'a compris depuis le début !
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, vous jouez au chat et à la souris. Nous sommes un certain nombre dans cet hémicycle à connaître le dossier depuis longtemps.
Le chiffre de 70 %, vous le savez mieux que personne, s'applique à l'activité des bureaux des zones rurales.
Mme Nicole Bricq. Il figure là ! (Mme Nicole Bricq brandit un document.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il ne s'agit pas du chiffre d'affaires ni des services financiers !
M. Gérard Delfau. C'est tout le problème !
Dans la mesure où, en zones rurales, le réseau est essentiellement lié à l'activité financière, nous sommes un certain nombre à nous demander quelle place vous assignez au futur établissement financier de La Poste, dont, personnellement, j'accepte le principe.
Cette filiale, que j'appelle de tous mes voeux, établira-t-elle sa relation avec le réseau des bureaux et points de contact en fonction de sa propre rentabilité, de sa productivité, ou sera-t-elle prise dans un ensemble beaucoup plus global au sein duquel elle participera à l'ensemble des missions de La Poste, notamment à l'accès de tous les citoyens, quels que soient leurs revenus, à ces services financiers de base ?
Tel est le fond de la question, monsieur le ministre, et le chiffre cité à bon droit par Mme Bricq montre qu'il s'agit d'une interrogation fondamentale.
C'est en fonction de ce chiffre que nous commençons à nous inquiéter pour une partie très importante du réseau de La Poste.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je veux bien recevoir toutes les leçons que l'on veut mais il n'empêche que, à la page 3494 du compte rendu des travaux de la commission, on peut lire : « Il a, de plus, fait remarquer que les services financiers étaient au coeur de l'activité des bureaux de poste, puisqu'ils représentaient 70 % de l'activité ».
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. La commission des affaires économiques n'aurait pas fait une erreur pareille !
Mme Nicole Bricq. Je lis également à la page 1 du Postéo, la lettre des partenaires de La Poste, en date du mois de janvier 2005 : « Ceux-ci - les services financiers - constituent également la principale activité du réseau de La Poste, notamment dans les petites villes où, en moyenne, 70 % de l'activité est réalisée par les services financiers. »
M. le président. Je suis saisi de dix-neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 85, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Aux termes de cet article 8, vous proposez, monsieur le ministre, de changer le statut des services financiers de La Poste.
Pour respecter les ratios bancaires, La Poste a déjà dû doter sa filiale Efiposte d'un capital de 150 millions d'euros. Elle a dû également mettre en place une série d'outils de placement et de surveillance.
A l'image de ce qui se passe pour la gestion des fonds des comptes chèques postaux, la Poste serait déjà dans l'obligation d'apporter plusieurs millions d'euros de capital dans sa filiale afin de respecter les ratios prudentiels imposés aux banques.
Bref, faire de La Poste une banque comme les autres aura déjà un coût d'entrée.
Par ailleurs, cet élargissement de l'offre induira d'autres frais : consentir des prêts suppose, évidemment, de proposer des taux avoisinants ceux du marché. Or les intérêts, c'est-à-dire le prix du prêt, intègre nécessairement trois données incontournables : le coût de la ressource, autrement dit le prix payé par la banque pour ramasser des fonds ; le coût du risque - pour le faire baisser, les banques pratiquent une véritable sélection, y compris pour les petites et moyennes entreprises ; le coût de gestion, notamment le traitement des dossiers.
Il est louable de vouloir étendre la gamme des services financiers offerts aux usagers de La Poste, mais la façon dont vous agencez cette décision, monsieur le ministre, conduit à faire entrer en concurrence la banque postale avec les autres établissements sans discuter ni des missions de celle-ci ni de son financement.
En outre, selon le contrat de plan, La Poste ne pourra pas offrir de prêt à la consommation, ce qui limite clairement la diversification de ses offres.
Vous vous contentez de réaffirmer que La Poste se doit d'offrir des services bancaires aux plus démunis. Pourtant, vous portez un coup supplémentaire au livret A puisque vous avez décidé de diminuer d'un dixième de point l'aide de l'Etat à sa rémunération. Il en résultera 680 millions d'euros d'économies dans les caisses de l'Etat, mais assortis du risque qu'à terme La Poste n'abandonne cette forme d'épargne, qui deviendra de moins en moins attractive dans un contexte concurrentiel.
Il est dit dans ce projet de loi que La Poste offre « au plus grand nombre » ses services en matière financière ; ce n'est donc plus à tout le monde.
Par cette mesure, vous entrez en contradiction avec l'article L. 221-10 du code monétaire et financier, qui dispose que « La Poste ouvre un compte sur livret à toute personne par laquelle ou au nom de laquelle des fonds sont versés, à titre d'épargne, dans un de ses établissements ». C'est une rupture d'égalité devant le service public.
Quel sera, monsieur le ministre, l'avenir du service financier public dans l'environnement concurrentiel auquel vous le soumettez ?
Le nouveau pas franchi dans la filialisation de La Poste met manifestement en danger les missions de service public. Mettant à mal le réseau grand public, la séparation des activités financières et des activités de courrier ne pourra que nuire aux usagers.
Préoccupé par la séparation en centres de profit des activités postales, préalable nécessaire à l'ouverture de l'entreprise aux capitaux privés, vous refusez de considérer sérieusement les bénéfices que peuvent tirer les usagers du réseau grand public regroupant les activités colis, courrier et les services financiers de La Poste de façon intégrée.
Ce regroupement d'activités permet une péréquation tarifaire entre les différentes activités de l'entreprise, qui concourt largement à l'équilibre des comptes de l'opérateur public et à la densité du réseau postal.
Désolidarisant les services financiers des autres services, vous organisez donc l'étiolement du réseau.
L'intégration des services financiers dans La Poste permet, en outre, une collecte de l'épargne populaire au plus près des populations et assure ainsi la récolte des fonds dont elle ne pourrait bénéficier si l'implantation des services financiers était réduite.
Séparer les activités financières de La Poste des secteurs colis et courrier, c'est donc modifier le système de collecte de l'épargne populaire. A terme, le nombre des clients bancaires de La Poste risque de s'en trouver modifier. C'est donc aussi une remise en cause du financement des collectivités qui se profile.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le I de cet article.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Monsieur le ministre, dans cet article relatif à la création d'un établissement bancaire autonome, vous allez au-delà des directives communautaires. Vous franchissez un pas supplémentaire dans la mise à mal du circuit bancaire publique.
Ce circuit bancaire a pourtant largement contribué au développement économique et social du pays. Plus précisément, la collecte de l'épargne par La Poste et par les caisses d'épargne a permis de financer l'économie locale, de rénover des villes et des logements, de construire des centres culturels communaux, etc. C'est en tous cas au service de la collectivité que cet argent était utilisé.
Aujourd'hui, ses livrets ne représentent pas moins de 1 200 milliards d'encours, gisement considérable pour le développement public.
Cependant, le secteur bancaire public n'est pas épargné par la logique de course au marché dans laquelle plonge la plupart des secteurs publics mis en concurrence.
Ainsi, l'activité d'aide à l'équipement des collectivités locales a été séparée de la Caisse des dépôts et consignation, puis rapidement privatisée pour devenir le Crédit local de France.
De façon plus générale, l'institution publique presque bicentenaire qu'est la Caisse des dépôts et consignation s'est engagée dans un mouvement de filialisation de ses activités concurrentielles, dont les missions ont pour le moins évolué. Citons, à titre d'exemple, la Société civile immobilière, filiale de la Caisse des dépôts et consignation, qui s'est lancée dans une opération de déconventionnement de milliers de logements.
Mais de véritables questions se posent quant au rôle du service bancaire : peut-on concilier dans un même groupe logique concurrentielle, logique de service public et intérêt général ?
En quoi la course pour s'agrandir constitue-t-elle une réponse appropriée aux défis de l'industrie financière ?
Plutôt que de répondre à ces questions, vous nous proposez une privatisation supplémentaire de l'argent public ; nous ne pouvons l'accepter.
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi 2. du I de cet article:
2. Après le premier alinéa de l'article L. 518-25 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle est, dans ce cadre, partie intégrante du secteur financier public et semi-public défini à l'article 53 de la loi n° 82-155 de nationalisation du 11 février 1982 ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Au travers de cet amendement, nous souhaitons tracer une autre voie que celle que vous destinez aux services financiers de La Poste.
Vous cherchez à faire de La Poste une banque comme les autres, qui serait soumise aux principes de fonctionnement des marchés financiers, mis à part que cette banque s'appellerait La Poste.
C'est bien pourquoi ce projet n'a aucun intérêt. Il n'apportera aucun service supplémentaire aux Français, ou si peu !
En revanche, nous avons déjà pu constater en quoi cette réforme pourrait déstabiliser encore un peu plus un système financier aussi inefficace qu'instable.
C'est bien pourquoi il est nécessaire d'envisager, pour les services financiers de La Poste, un avenir qui ne soit pas celui du droit commun bancaire, un avenir plus noble, basé sur le soutien au développement économique et social de régions sinistrées et au financement des investissements publics qui s'avèrent aujourd'hui incontournables, dans le domaine du logement social, de l'énergie, des transports ou de la recherche notamment. Notre pays souffre d'un déficit d'investissements considérable dans tous ces secteurs économiques pourtant vitaux.
Cette faiblesse des investissements structurants doit appeler une réaction urgente de la part des pouvoirs publics. Il s'agit, bien évidemment, de savoir quels investissements sont absolument vitaux et comment les financer.
Ni les marchés financiers, trop spéculatifs, ni les banques, trop liées à ces mêmes marchés, ni l'Etat, très endetté, ni les collectivités territoriales, asphyxiées par les transferts de compétences imposés par les lois de décentralisation, ne parviendront à financer ces équipements structurants.
Aussi, il devient inévitable de faire intervenir un autre acteur économique qui soit en mesure de financer ces projets.
Cet acteur ne peut être qu'un pôle financier public, indépendant du système financier libéral dominant, capable de financer des projets économiques à long terme, voire à très long terme, utile à toute la collectivité.
Ces circuits financiers existent ; ils relient aujourd'hui, malgré toutes les tentatives opérées pour les assécher, la Caisse des dépôts et consignation, les caisses d'épargne et La Poste avec le livret A et assimilés.
Il est nécessaire de les revitaliser, de les développer afin d'avoir une chance de pourvoir au financement du développement économique de façon durable.
M. le président. L'amendement n° 88, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé par le a du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier :
Dans le domaine bancaire, financier, et des assurances, la Poste propose des produits et services à tous, notamment le livret A. Elle peut proposer des prêts d'épargne logement, mais aussi des prêts à la consommation.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Le développement des activités financières de La Poste prévu par la filialisation que vous proposez, monsieur le ministre, n'est pas celui que nous pensons être utile pour le service public bancaire.
En effet, le développement des activités bancaires de La Poste doit être cohérent avec ses activités postales. Le service public a un important rôle social à jouer. Il doit répondre positivement à tous ceux qui sont exclus du système bancaire classique, mais il doit également être un acteur économique fiable, en mesure de proposer à tous des prestations de qualité en réponse aux besoins de plus en plus divers et multiples de la population.
Par conséquent, les services financiers de La Poste doivent être élargis. Pourtant, le contrat de plan 2003-2007 n'autorise l'établissement de crédit postal qu'à proposer des crédits immobiliers sans épargne préalable. Ainsi, celui-ci ne sera pas autorisé, au moins jusqu'en 2008, à octroyer des prêts à la consommation. Cette décision constitue, pour le lancement de cet établissement, un poids considérable, tout au moins un frein.
La Poste doit aussi s'adresser aux jeunes qui s'installent ou achètent leur première voiture, répondre au besoin en crédit des artisans, bref participer à la vie locale. De toute façon, elle ne peut être considérée comme une banque comme les autres sans disposer des mêmes moyens de fonctionnement pour assurer sa compétitivité.
En restreignant les possibilités de prestations de La Poste, votre projet de loi, monsieur le ministre, met gravement en péril sa pérennité. Le présent amendement vise à corriger ce grave défaut.
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par le a) du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La Poste assure une mission de collecte d'épargne sur l'ensemble du territoire. Cette épargne contribue notamment au financement des activités de service public des institutions financières publiques. Cette mission est assurée par un réseau dense de bureaux de poste qui dessert l'ensemble du territoire.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Cet amendement vise à rappeler l'importance du réseau de bureaux de poste pour le secteur financier du groupe.
En effet, c'est bien la présence de bureaux de poste sur l'ensemble du territoire qui permet la collecte de l'épargne des Français, notamment de ceux qui vivent dans les territoires les plus isolés, dans ces régions d'où sont absentes les institutions bancaires classiques.
La réalité de la présence de La Poste dans les territoires illustre bien la complémentarité de ses deux principales activités.
En quittant ces territoires, La Poste affaiblit le service public, fragilise un peu plus le tissu social de nos villages, mais également la pérennité de ses propres activités financières.
Si la présence de La Poste est réduite, de nombreux habitants de ces territoires feront plutôt confiance aux établissements financiers les plus proches de leur domicile. En effet, un point Poste ne sera pas en mesure d'offrir tous les services financiers d'un bureau de poste : retraits, perception des pensions, versement sur des comptes bancaires, émissions de mandats, etc.
Du fait de la complémentarité entre les différentes activités de La Poste, la filialisation de la banque postale est une erreur. Celle-ci ne pourra qu'affaiblir l'ensemble du groupe La Poste.
C'est pourquoi il est nécessaire, afin de permettre à La Poste de conserver sa clientèle, de préserver un réseau de bureaux de poste desservant la totalité du territoire national.
M. le président. L'amendement n° 133, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. Après les mots :
d'entreprise d'assurance
rédiger comme suit la fin du second alinéa du texte proposé par le a) du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier :
dont elle détient directement 100% du capital
II. En conséquence, dans le texte proposé par le c) du 2 du I de cet article pour compléter l'article L. 518-26 du même code, remplacer les mots :
la majorité du capital
par les mots :
la totalité du capital
III. En conséquence, dans la seconde phrase du premier alinéa du 1 du II de cet article, remplacer les mots :
la majorité
par les mots :
la totalité
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous sommes, me semble-t-il, tous d'accord sur ce point : il faut élargir le champ d'action de La Poste en matière de services financiers. A cette fin, plusieurs solutions peuvent être envisagées. Nous en avons déjà discuté à l'occasion de l'examen d'un amendement présenté par le Gouvernement en première lecture.
La première solution consiste à renforcer le partenariat. En première lecture, nous avions souhaité que La Poste soit dès maintenant en mesure de proposer des crédits à la consommation afin de fidéliser sa jeune clientèle. Cette solution aurait pour avantage de maintenir l'unité de La Poste, de consolider sa clientèle.
Elle présente toutefois des inconvénients. En effet, les bénéfices produits par ceux et celles qui travaillent à La Poste vont en partie alimenter les caisses des partenaires. C'est un argument qui a sa valeur.
Cette solution ne permet pas non plus à La Poste de gérer de façon autonome les produits qu'elle offre. C'est un inconvénient certain. On le voit, par exemple, en ce qui concerne les taux des prêts immobiliers.
La seconde solution est celle que vous proposez, monsieur le ministre. Mais elle nous paraît bancale, comme deux de mes collègues vous l'ont expliqué tout à l'heure.
Vous soumettez La Poste à toutes les règles du droit bancaire sans lui donner toutes les prérogatives d'une banque puisqu'elle ne pourra octroyer de crédit à la consommation.
Vous filialisez tous les services financiers dans une structure ad hoc, mais La Poste sera simplement majoritaire dans le capital de la banque postale.
Vous nous avez dit hier, monsieur le ministre, qu'il fallait permettre à La Poste de nouer des partenariats à l'étranger, mais cet argument ne nous convainc pas du tout. Nous tenons beaucoup à ce que La Poste détienne 100 % du capital de l'établissement de crédit.
M. Pierre-Yvon Trémel. En tout cas, nous ne souhaitons pas que l'évolution du statut de l'établissement de crédit postal ait lieu en catimini. Nous voulons que le Parlement continue à suivre cette affaire. L'enjeu est en effet majeur : il en va de l'unité de La Poste. Sur ce point, toutes les garanties qui s'imposent doivent être prises.
Par ailleurs, nous ne pouvons pas aller trop loin aujourd'hui. Il faut bien entendu laisser La Poste instaurer en interne la relation entre la maison mère et la filiale. Toutefois, des questions se posent.
De quel type sera cette relation ? La filiale sera-t-elle un prestataire, un sous-traitant ? Que contiendront les conventions de service destinées à formaliser les relations entre l'EPIC et La Poste ? Qui, finalement, dictera sa loi ? Les réponses à ces questions sont déterminantes.
Enfin, si la banque postale doit être soumise au droit bancaire commun, elle ne doit pas, en revanche, être une banque comme les autres. C'est tout le sens que nous donnons à la notion de « banque pour tous ». Nous nous en expliquerons tout à l'heure, à l'occasion de l'examen d'un autre amendement.
M. le président. L'amendement n° 147 rectifié, présenté par MM. Delfau, Baylet, Collin et A. Boyer, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par le a) du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier par les mots :
, et notamment le microcrédit, le crédit étudiant
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Je souhaite revenir assez longuement, à l'occasion de la présentation du premier des trois amendements que j'ai déposés à l'article 8, sur la question cruciale de la création de l'établissement de crédit postal.
Je ne remets en cause ni le principe ni la nécessité de la création de cet établissement - j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises -, celle-ci étant, selon moi, la condition de la survie de La Poste entreprise publique.
En revanche, monsieur le ministre, le projet de loi reste muet quant à la finalité de cet établissement. Nous avons plusieurs questions à vous poser sur ce point.
Concrètement, quel est l'avenir des actuels services financiers de La Poste, de leurs dizaines de milliers de salariés ? Comment vivront-ils dans l'entreprise La Poste ? Deviendront-ils, de fait, des salariés de l'établissement de crédit postal que le projet de loi tend à créer ?
Si tel était le cas, ce que personnellement je ne souhaite pas, l'établissement de crédit postal serait-il l'amorce d'un établissement bancaire en voie d'autonomie ? Le risque est alors majeur d'une évolution à la Dexia, le Crédit local de France s'étant émancipé de la Caisse des dépôts et consignations pour donner naissance à une banque privatisée.
Par ailleurs, qui dirigera cet établissement financier ? Pour être précis, la hiérarchie de l'entreprise La Poste sera-t-elle pleinement maîtresse de la stratégie de cet établissement ? La direction de l'établissement financier prendra-t-elle son autonomie par rapport à l'entreprise publique elle-même ? Comme je l'entends dire parfois, de hauts responsables de La Poste pourront-ils en même temps diriger l'établissement financier, ce qui, à mon sens, poserait des problèmes à la fois de déontologie et d'efficacité ?
Enfin, quel type de convention sera passé entre l'établissement financier et le réseau territorial de La Poste ? Concrètement, avec qui le maire qui aura accepté la mise en place d'une agence communale devra-t-il traiter ? Avec un représentant de La Poste ou avec un banquier, même si celui-ci appartient à une filiale de La Poste ? La nature de ces relations et l'évolution du réseau seront très différentes suivant le cas.
Toutes ces questions se résument en une seule, qui n'a rien de symbolique : qui détiendra, et jusqu'où, le capital de La Poste ?
Au demeurant, les réponses à ces questions ne résoudront pas tous les problèmes. Il faut également donner à La Poste la capacité d'élargir et de rajeunir sa clientèle. C'est la raison pour laquelle je propose, dans cet amendement n° 147 rectifié, de prévoir des micro-crédits, des prêts étudiants.
A ce propos, je souhaiterais, monsieur le président, rectifier l'erreur qui s'est glissée dans mon texte. En effet, à la place de « crédit étudiant », il faut lire « prêt étudiant ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 147 rectifié bis, qui est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par le a) du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier par les mots :
, et notamment le microcrédit, le prêt étudiant
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Gérard Delfau. Cet amendement de nature symbolique est destiné à montrer vers quelle clientèle et vers quelle classe d'âge La Poste doit, à mon sens, se diriger.
Telles sont, monsieur le ministre, les questions de fond que je souhaitais vous poser. J'ai le sentiment - mais je me trompe peut-être - que vous ne souhaitez pas entrer dans ce débat. Si tel était le cas, ce serait grave : le Sénat ne serait pas alors en mesure de se prononcer valablement. Ce serait un manque de respect à son égard !
M. le président. L'amendement n° 134, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le a du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier, par les mots suivants :
sans qu'une autorisation de l'autorité de tutelle soit requise.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, vous jouez sur les mots. Vous vous perdez en arguties, et vous le savez très bien !
Vous nous dites, ce que nous savons tous depuis un an, que le présent projet de loi permettra au futur établissement de crédit postal d'octroyer des prêts à la consommation, mais vous avez compris depuis le début que ce n'est pas là que réside le problème.
Aujourd'hui, ces prêts ne sont pas possibles, en raison de la décision du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Sueur. Du contrat, soit.
Monsieur le ministre, vous représentez le Gouvernement. Par conséquent, nous vous demandons quelle est sa position sur la question suivante : pensez-vous permettre à La Poste, qui ne demande que cela, d'offrir des prêts à la consommation dans les plus brefs délais ? Dans le cas contraire, pourquoi un tel refus ? Si vous vouliez bien développer quelques arguments sur ce point, nous serions éclairés. En effet, comme, depuis le début du débat, vous refusez de nous fournir la moindre explication, nous ne comprenons pas.
Mes chers collègues, si nous avons déposé l'amendement n° 134, c'est justement pour que la loi s'applique dès qu'elle aura été votée. Cet amendement a en effet pour objet de permettre à La Poste d'offrir des crédits à la consommation sans que l'autorisation de l'Etat soit nécessaire. Bien entendu, vous pourriez être tentés de ne pas le voter, mais ce serait tout à fait contradictoire avec nos débats.
Monsieur le président, je finirai mon propos par deux citations.
La première est tirée du rapport de M. Hérisson, non pas celui de la deuxième lecture, mais celui de la première lecture. Vous voyez, mon cher collègue, que je me réfère à vos oeuvres complètes !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je vous en remercie !
M. Jean-Pierre Sueur. Dans ce document, à la page 30, vous avez lancé un vibrant appel pour que le futur établissement bancaire postal puisse délivrer très rapidement des crédits à la consommation.
Je vous cite : « Le contrat de plan Etat-Poste, signé le 13 janvier 2004, a repris cette idée de dissociation chronologique d'une extension des compétences financières de La Poste en l'autorisant à distribuer des crédits immobiliers sans épargne préalable et en prévoyant la création, dès cette année, d'un établissement financier postal, mais sans fixer d'horizon à une habilitation pour les crédits à la consommation. » De cela, monsieur le rapporteur, vous ne vous réjouissez pas du tout !
Qu'écrivez-vous, toujours à la page 30 ? Tout le monde peut lire vos écrits, y compris M. Devedjian.
M. Pierre-Yvon Trémel. Il faut les lire !
M. Jean-Pierre Sueur. De surcroît, ces propos figurent en caractères gras, comme si vous aviez eu peur qu'on ne les lise pas ! Vous précisez : « Votre rapporteur préconise que soit entreprise sans plus tarder cette extension des services financiers de La Poste, qui apparaît décisive pour l'avenir du groupe. »
M. Gérard Delfau. Très bien, il a raison !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le rapporteur, je suis sûr que vous allez voter en faveur de l'amendement n° 134, car je suis persuadé que vous resterez fidèle à vos écrits.
Par ailleurs, qu'indique, à la page 58, le rapport de M. Larcher, entré au Gouvernement et qui est donc un collègue de M. Devedjian, rapport que tout le monde a jugé intéressant. M. Larcher ne fait même pas de phrase, il ne met pas de verbe : « L'urgence : habiliter La Poste à offrir du crédit à la consommation ».
M. Pierre-Yvon Trémel. Et voilà !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur Devedjian, vous n'allez pas désavouer votre collègue qui fait partie du Gouvernement, comme vous, et lui-même ne va pas se déjuger !
Si vous n'avez pas encore compris, à la page 59 du rapport de M. Larcher, figure cette phrase : « Autoriser sans délai le crédit à la consommation, ballon d'oxygène indispensable. »
Mes chers collègues, je suis persuadé que vous allez voter cet amendement et je vous en remercie par avance. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. L'amendement n° 52, présenté par MM. Soulage, Amoudry, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le a) du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de la convention mentionnée à l'alinéa précédent, La Poste et l'établissement de crédit ou l'entreprise d'assurance sont solidairement responsables » ;
La parole est à M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. L'article 8 modifie, dans sa rédaction actuelle, l'article L. 518-25 du code monétaire et financier, et prévoit que La Poste « peut conclure avec ces établissements ou entreprises toute convention en vue d'offrir, en leur nom et pour leur compte et dans le respect des règles de concurrence, (...) toute prestation relative aux opérations prévues aux articles L. 311-1, L 311-2, L 321-1 et L 321-2 ou à tous produits d'assurance. »
Cet article, ainsi rédigé, soulève des difficultés en ce qui concerne, d'une part, la protection des intérêts des clients de La Poste et, d'autre part, l'égalité des conditions de concurrence entre les entreprises distribuant des produits et services dans les domaines bancaire, financier et des assurances.
En effet, une réglementation propre auxdits domaines a pour objet d'assurer la protection des consommateurs et le bon fonctionnement des différents marchés. Ainsi, il existe des procédures de contrôle d'autorités administratives indépendantes chargées de veiller au respect, en premier lieu, des règles d'information et de conseil, et, en second lieu, des règles prudentielles qui s'imposent aux établissements de crédit. Les clients de La Poste doivent pouvoir bénéficier de cette protection.
En outre, La Poste doit être soumise à cette réglementation afin d'être placée sur un pied d'égalité avec les autres établissements de crédit.
Pour remédier à ces difficultés, il convient que la convention par laquelle La Poste offrira, au nom et pour le compte d'établissements de crédit ou d'entreprises d'assurance, des produits et services bancaires, financiers ou d'assurance, comporte une responsabilité conjointe du producteur et du distributeur.
Dans ce cas, La Poste, mandataire, se verra appliquer le régime juridique du mandant, c'est-à-dire de l'établissement de crédit ou de l'entreprise d'assurance. Cela va dans le sens de la protection des intérêts des consommateurs ainsi que de l'égalité des conditions de concurrence.
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le a du 2 du I de cet article pour l'article L. 518-25 du code monétaire et financier par huit alinéas ainsi rédigés :
« Une convention passée entre chacune de ces filiales et l'Etat précise les missions de service public que celles-ci assurent au titre du service bancaire universel.
« Ces obligations portent notamment sur :
« - la signature obligatoire d'une convention de compte avec tout nouveau client de l'établissement,
« - la possibilité de retrait d'espèces par les particuliers sans frais auprès de l'ensemble des guichets de la Poste et de l'ensemble des distributeurs automatiques de billets sur le territoire,
« - la mise à disposition gratuite de formules de chèque pour les particuliers,
« - un accès gratuit à des moyens de consultation du compte à distance,
« - la mise en place d'outils spécifiques de financement pour les collectivités territoriales.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application de ces dispositions. »
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. L'article 8 tel, qu'il nous est proposé, fait de La Poste « la banque du plus grand nombre ». Vous en conviendrez, cette formulation est assez vague, pour ne pas dire qu'elle ne signifie rien. Nous aurions préféré que soit retenue l'expression « banque pour tous ».
Nous avons déjà dit que nous ne voulions pas que La Poste soit une banque comme les autres. Nous proposons donc de lui confier par convention la mission d'assurer le service universel bancaire. Nous voulons aller plus loin que ce que la loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite « loi MURCEF », a prévu, c'est-à-dire le droit au compte pour tous.
Effectivement, nous pensons que les services bancaires constituent une mission d'intérêt général. L'accès à ces services conditionne la dignité humaine.
Inutile de préciser que, lorsque nous avons déposé cet amendement, nous avions le secret espoir que soient adoptés un certain nombre des sous-amendements que nous avions déposés à l'article 1er bis. Cette adoption aurait effectivement fait de La Poste une banque pour tous, car présente sur l'ensemble du territoire national.
Hélas ! vous avez rejeté ces sous-amendements qui garantissaient la présence postale. Quand je dis « la présence postale », je vise l'étendue de la gamme des services offerts par La Poste, tels que nous les connaissons aujourd'hui, sur au moins deux sortes de territoires de notre pays, à savoir les secteurs de campagne et les zones urbaines sensibles.
Je reviens sur ce point en quelques mots.
Pour ce qui concerne les ZUS, nous avions proposé que soit donnée l'assurance que perdure le réseau tel qu'il existe aujourd'hui, et qui est garanti par une convention signée en 1998 par le ministre de la ville d'alors, Claude Bartolone, et reprise par le ministre actuel en 2002. Cette convention assure la présence postale dans 750 secteurs, 800 communes et 200 agglomérations, au bénéfice de 4,7 millions de nos concitoyens. Nous pensions que notre sous-amendement serait adopté afin de garantir effectivement cette présence postale à destination de cette clientèle captive.
Nous souhaitions également que la mise en oeuvre de la règle visant à éviter que plus de 10 % de la population d'un département ne se trouve éloignée de plus de cinq kilomètres d'un point Poste s'effectue par le biais non d'un point de contact, mais d'un bureau de poste. En effet, assurer aux communes les plus éloignées la présence d'un point de contact de La Poste chez un commerçant, ce n'est pas la même chose que de leur fournir un bureau de poste qui puisse présenter à sa clientèle, également captive, un service bancaire universel.
Il faut que la loi garantisse l'accès de tous à un certain nombre de ces services, à un prix abordable. En effet, monsieur le ministre, ces derniers mois, les associations de consommateurs vous ont régulièrement alerté, et encore aujourd'hui dans La Tribune, sur les coûts prohibitifs des services, sans commune mesure avec le coût réel appliqué par les organismes bancaires aux personnes qui ont un compte dans leur établissement.
C'est pourquoi nous proposons de confier à La Poste les missions suivantes : la signature obligatoire d'une convention de compte avec tout nouveau client de l'établissement, la possibilité de retrait d'espèces par les particuliers sans frais auprès de l'ensemble des guichets de La Poste et de l'ensemble des distributeurs automatiques de billets sur le territoire, la mise à disposition gratuite de formules de chèques pour les particuliers, un accès gratuit à des moyens de consultation du compte à distance et la mise en place d'outils spécifiques de financement pour les collectivités territoriales. Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle nous semble a minima présentable.
Créer ce service est un peu iconoclaste, nous le reconnaissons, mais c'est une nécessité d'intérêt général, tout particulièrement à l'égard des habitants qui n'auront pas le choix.
M. le président. L'amendement n° 91, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Dans la logique de nos interventions précédentes, nous souhaitons, par cet amendement, montrer notre opposition à la constitution de la banque postale, telle qu'elle est prévue, et, en conséquence, au transfert à cette filiale de droit privé de l'ensemble des biens, droits et obligations liés aux services financiers de La Poste, même, éventuellement, ceux qui sont nécessaires aux activités que La Poste exerce directement.
Nous ne rentrerons pas dans le débat qui consiste à savoir si la Poste doit détenir la totalité ou la majorité du capital de cette filiale. L'expérience nous a trop souvent montré que lorsqu'un établissement public changeait de statut, toutes les promesses de non-ouverture du capital ou de non-privatisation n'engageaient que ceux qui les écoutaient.
La question centrale est donc de savoir non pas si La Poste doit détenir 50 %, 75 % ou 100 % du capital de cette filiale bancaire, mais si l'on accepte le démantèlement de La Poste et sa conséquence directe, c'est-à-dire que ses services financiers soient désormais gérés par une filiale de droit privé, avec des principes de gestion privée, des objectifs de rentabilité qui soient ceux du privé. Ce démantèlement, nous ne l'acceptons pas.
La création de cette filiale pose d'autres problèmes. Comment seront précisément articulées, dans cette filiale bancaire, les missions de service public assumées par la Caisse nationale d'épargne, à travers essentiellement la gestion du livret A, et les missions traditionnelles de toute banque privée ? Quelle sera donc la nature des liens entre les missions de service public bancaires de La Poste et l'activité de cet établissement de crédit postal ? De quelles garanties disposons-nous que cet établissement de crédit n'abandonnera pas, concrètement, la promotion du livret A et le soutien au financement du logement social ? De tout cela, nous ne savons rien. Nous n'avons aucune garantie. C'est pourquoi il nous paraît nécessaire de supprimer le paragraphe II de l'article 8.
M. le président. L'amendement n° 149 rectifié, présenté par MM. Delfau, Collin, Fortassin, Baylet et A. Boyer, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du premier alinéa du 1 du II de cet article, remplacer le mot :
majorité
par le mot :
totalité
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. J'ai déjà évoqué à plusieurs reprises le problème de la détention par La Poste du capital de sa filiale. Ce dernier sera-t-il possédé à 100 % ou en partie seulement par l'entreprise mère ?
Je ne reviendrai pas sur l'argumentation que j'ai déjà développée. Je voudrais simplement relever un contre-argument que M. le ministre a utilisé à plusieurs reprises quand il nous a dit que ce qu'un gouvernement a fait, un autre peut le défaire. C'est une évidence.
Il est tout aussi évident que détenir à 100 % le capital d'une filiale revient à reconnaître une certaine nature publique à cette filiale.
En revanche, accepter qu'une partie du capital de cette filiale soit détenue par d'autres opérateurs - éventuellement privés -, c'est lui conférer une nature totalement différente.
Derrière cette question, surgit cette autre interrogation, que je soulève vainement - avec d'autres - depuis le début de ce débat : que veut-on faire de cette filiale ? Là est la vraie question, et nous demandons au ministre de se prononcer sur ce sujet décisif.
M. le président. L'amendement n° 137, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après la première phrase du 1 du III de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les personnels concernés ne peuvent être que ceux des services d'inspection, de contrôle et d'encadrement des services financiers.
L'amendement n° 136, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la première phrase du 2 du III de cet article :
Avec leur accord, des fonctionnaires en activité à La Poste peuvent, pour une durée maximale de quinze ans, être mis à disposition, de l'établissement de crédit mentionné au 1 du II et des sociétés dont il détient la totalité du capital, dans la limite des nécessités de fonctionnement des missions de contrôle, d'inspection et d'encadrement des services financiers.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour défendre ces deux amendements.
M. Pierre-Yves Collombat. Nous avons affirmé à de multiples occasions que notre souci était de préserver l'unité de La Poste ou, en langage moins diplomatique, de faire en sorte que la filiale bancaire ne « cannibalise » pas la maison mère.
Cela suppose qu'un certain nombre de dispositions soient prises. Nous en avons déjà étudié deux.
La première concerne le capital, et je souscris à ce qu'a dit Gérard Delfau : la situation est totalement différente selon que la maison mère possède 100 % du capital ou que ce dernier est ouvert aux capitaux privés.
La deuxième a trait aux missions. Il est vrai qu'une façon de garantir l'unité de l'établissement, c'est que les objectifs soient communs, notamment en matière de service universel, d'ou notre proposition de service universel bancaire.
La troisième disposition, dont je traite à travers ces amendements, concerne les problèmes de personnel.
Nous souhaitons préciser, comme il semble que ce soit l'intention des auteurs du projet - mais nous voudrions que cela soit plus net - que les personnels qui pourraient être mis à disposition seront ceux du siège, ceux des services d'inspection, de contrôle et d'encadrement des services financiers, ce qui représente entre 500 et 600 personnes. Tel est le sens de l'amendement n° 137.
L'amendement n° 136 va dans le même sens et concerne les conditions de mise à disposition des fonctionnaires.
Monsieur le président, je rectifie ces deux amendements afin d'indiquer que sont également concernés les personnels de direction de la maison mère.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 137 rectifié, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, qui est ainsi libellé :
Après la première phrase du 1 du III de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les personnels concernés ne peuvent être que ceux du siège, des services d'inspection, de contrôle et d'encadrement des services financiers.
Je suis également saisi d'un amendement n° 136 rectifié, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, qui est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la première phrase du 2 du III de cet article :
Avec leur accord, des fonctionnaires en activité à La Poste peuvent, pour une durée maximale de quinze ans, être mis à disposition, de l'établissement de crédit mentionné au 1 du II et des sociétés dont il détient la totalité du capital, dans la limite des nécessités de fonctionnement des missions de direction, de contrôle, d'inspection et d'encadrement des services financiers.
L'amendement n° 35, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la première phrase du 2 du III de cet article :
Avec leur accord, des fonctionnaires en activité à La Poste peuvent, pour une durée maximale de quinze ans, être mis à disposition, le cas échéant à temps partiel, de l'établissement de crédit mentionné au 1 du II et des sociétés dont il détient directement ou indirectement la majorité du capital, dans la limite des nécessités de fonctionnement de cet établissement et de ces sociétés.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La mise à disposition prévue par le projet de loi est formulée de manière générale, quoique conditionnée à l'accord des fonctionnaires.
« Les fonctionnaires en activité à La Poste peuvent, avec leur accord, être mis à disposition. » L'ambiguïté de cette formule s'est développée avec les estimations approximatives et divergentes du nombre de fonctionnaires susceptibles d'être concernés par cette mise à disposition : de quelques dizaines à quelques milliers, selon les sources.
C'est pourquoi, afin d'apaiser les légitimes inquiétudes des 28 000 agents des services financiers, soucieux de la pérennité de leur emploi mais aussi de leur future situation juridique, cet amendement tend à encadrer la possibilité de mise à disposition de fonctionnaires, d'une part en prévoyant que ce sont « des » fonctionnaires et non pas « les » fonctionnaires qui seront concernés, d'autre part en précisant que ces mises à disposition se feront dans la limite des nécessités de fonctionnement de l'établissement de crédit et des sociétés dont il sera actionnaire majoritaire.
Cela doit permettre de rassurer les agents des services financiers sans toutefois entraver le bon fonctionnement du futur établissement de crédit postal.
M. le président. L'amendement n° 150 rectifié, présenté par MM. Delfau, Baylet, Collin et A. Boyer, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du 2 du III de cet article, supprimer les mots :
, le cas échéant à temps partiel,
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. L'amendement de M. le rapporteur permet, me semble-t-il, de lever une inquiétude. De plus, il s'applique, ce qui est intéressant, à l'ensemble des fonctionnaires concernés.
Mon amendement, qui vise à supprimer la formule « le cas échéant à temps partiel », répond à une autre préoccupation : celle d'un cumul de fonctions, au plus haut niveau, entre les dirigeants de La Poste et ceux de l'établissement financier. Il y a là un risque de conflit d'intérêts.
Si je comprends bien qu'il puisse être utile - je n'y vois aucune objection - que des salariés, y compris des cadres ou des cadres intermédiaires, occupant des fonctions classiques dans les services financiers, puissent être employés à temps partiel, je voudrais être sûr qu'il existera une forme d'étanchéité entre les directions ou, plus exactement, que la hiérarchie de La Poste « coiffera » celle de l'établissement financier.
M. le président. L'amendement n° 141, présenté par MM. Barraux et Revet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la deuxième phrase du 2 du III de cet article :
Cet établissement de crédit et ces sociétés remboursent à La Poste les charges correspondantes, majorées, pour les fonctionnaires, de l'écart entre le montant des retenues pour pension opérées sur leur traitement et le montant des cotisations de retraite qui seraient dues pour des salariés de droit privé.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 148 rectifié, présenté par MM. Delfau, Baylet, Collin, Fortassin et A. Boyer, est ainsi libellé :
Compléter le III de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
... - Les personnels de l'établissement de crédit postal sont ceux du siège, de l'inspection et de l'encadrement des conseillers financiers.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Nous sommes toujours dans le même sujet, à savoir qui sera mis à disposition.
L'amendement de M. le rapporteur répond, me semble-t-il, à cette inquiétude. Je pense donc que le mien sera satisfait si celui de la commission est adopté.
M. le président. L'amendement n° 140, présenté par MM. Barraux et Revet, est ainsi libellé :
Compléter le V de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les conventions mentionnées au a) et au c) du 2 du I et au 1 du III du présent article sont rendues publiques par La Poste préalablement à leur signature.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Concernant l'amendement n° 85, qui tend à refuser la création d'un établissement bancaire postal filialisé, la réponse est rapide : il est impossible d'étendre la gamme des services financiers de La Poste sans créer un établissement de crédit de droit commun.
La commission a également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 90, car, comme je viens de l'indiquer, le nécessaire élargissement de la gamme des services financiers proposés par La Poste impose de créer une filiale soumise au droit bancaire, exerçant ses activités financières dans des conditions de concurrence loyale avec les autres établissements de crédit.
Sur l'amendement n° 87, l'avis de la commission est défavorable. Ne limitons pas l'élan que prend aujourd'hui La Poste dans les services financiers ; il s'agit d'en faire un établissement de crédit comme les autres. Les services financiers de La Poste comptent aujourd'hui 28 millions de clients ; la place qu'elle occupe déjà dans le paysage bancaire français ne permet pas de cantonner La Poste au secteur financier public ou semi-public où les grands établissements financiers n'ont pas les mêmes impératifs de proximité et la même vocation à proposer une gamme complète de services financiers à nos concitoyens.
L'avis de la commission est également défavorable sur l'amendement n° 88. La création d'une filiale bancaire de droit commun emporte de droit la possibilité légale pour cette filiale de proposer des prêts d'épargne-logement ainsi que des prêts à la consommation. Il n'est donc pas nécessaire de le préciser dans le texte.
Enfin, en donnant mission à La Poste de proposer des produits et des services financiers au plus grand nombre, le texte consacre la dimension sociale spécifique de cet établissement de crédit postal, sans pour autant l'enfermer dans le seul service aux plus démunis, qui ne constituent qu'une part de sa clientèle. Il faut éviter la ghettoïsation dans ce domaine.
Concernant l'amendement n° 89, la contribution des services financiers à l'aménagement du territoire est déjà affirmée par les premiers mots de l'article 6 de la loi de 1990, dans la rédaction qu'en propose l'amendement n° 6 rectifié de la commission. Celle-ci a donc émis un avis défavorable.
Sur l'amendement n° 133, l'avis est encore défavorable, pour les mêmes raisons.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 147 rectifié. Juridiquement, il ne serait pas rigoureux d'illustrer la règle légale par des exemples produits par l'adverbe « notamment », mais M. le ministre nous le dira peut-être mieux que moi en invoquant la mémoire de Portalis !
Concernant l'amendement n° 134, il est paradoxal que le groupe socialiste demande parfois un plus grand contrôle de l'Etat sur l'exploitant public La Poste, et propose d'autres fois de libérer La Poste de son autorité de tutelle.
C'est encore au ministre que le contrat de plan prévoit de renvoyer la décision d'autoriser la Poste à distribuer des crédits à la consommation.
M. Jean-Pierre Sueur. Et votre rapport ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je vais m'expliquer sur ce rapport ; c'est très simple.
M. Jean-Pierre Sueur. Allez-y, monsieur Hérisson !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Ce rapport reprend effectivement un certain nombre d'arguments qui sont issus du rapport Larcher. Je vous demanderai de retenir que, dans ce que j'ai écrit, ce qui est important, c'est le découplage du crédit à la consommation et du crédit immobilier sans épargne préalable.
Il se trouve qu'effectivement, en première lecture, en fonction des éléments qui étaient en notre possession à ce moment-là, nous avons acté et validé le découplage, donné une priorité au crédit à la consommation et ensuite parlé du crédit immobilier sans épargne préalable.
Mais il se trouve que, par ailleurs, après négociation, le contrat de plan Etat - La Poste a fait état d'une priorité inversée, a validé le découplage et a privilégié ce qui existe aujourd'hui dans le contrat de plan, c'est-à-dire le prêt immobilier sans épargne préalable.
J'ai donc tout simplement repris dans mon rapport - sans aucune ambiguïté, sans aucune préméditation, sans être aucunement magicien, comme cela a été dit tout à l'heure - le contrat de plan qui a été signé entre l'Etat et La Poste : crédit immobilier sans épargne préalable, découplage et, dans un second temps, crédit à la consommation.
La loi le permet puisque, dans le projet de loi, l'article 8 tel qu'il vous est proposé crée l'établissement bancaire d'une manière claire et sans ambiguïté. La Poste peut donc proposer des crédits immobiliers - c'est l'application du contrat de plan -, le découplage étant effectif, et elle pourra bien entendu faire du crédit à la consommation. M. le ministre nous en parlera certainement avec plus de précision.
Il n'y a aucune ambiguïté et, monsieur Sueur, avec tout le respect que je vous dois, la lecture que je fais du rapport est plus conforme à ma pensée que la lecture que vous pouvez faire de mes propres oeuvres !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous êtes des contorsionnistes !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Quant à l'amendement n° 52, il permettrait en effet d'offrir « toutes les garanties aux clients, au regard des obligations d'information et de conseil », tout en assurant l'égalité des conditions de concurrence entre l'ensemble des entreprises distribuant des produits et des services financiers.
Cependant, la convention que conclura La Poste en vue d'offrir des produits financiers pour le compte de partenaires - établissements de crédit ou entreprises d'assurance - emportera, comme toute convention de mandat, une responsabilité conjointe du producteur et du distributeur.
La commission s'en est donc remise à la sagesse du Sénat, mais elle souhaite vous entendre, monsieur le ministre, car il lui semble que l'amendement proposé par MM. Soulage, Amoudry et Deneux vaut la peine que nous nous y arrêtions quelques instants.
La commission est défavorable à l'amendement n° 135 : il n'est pas bien venu de charger La Poste d'une mission de service public supplémentaire en lui demandant d'assurer un service bancaire universel. C'est à l'ensemble des établissements de crédit qu'il incombe d'assurer le service bancaire pour tous.
M. Gérard Delfau. On voit le résultat !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Peut-être ce service doit-il être conforté, mais il n'en reste pas moins qu'il ne faut pas surcharger de missions La Poste, car elle aura déjà bien du mal à se confronter à ses concurrents.
Mme Nicole Bricq. On ne vous le fait pas dire !
M. Gérard Delfau. Voilà le moment de vérité !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Chers collègues de l'opposition, je vous rappelle que nous transposons des directives européennes en droit français...
Mme Nicole Bricq. Cela n'a rien à voir avec la directive postale ! Ne mélangeons pas tout !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. ...et que nous devons respecter un cadre général. Si nous sortons de ce cadre, nous condamnons notre transposition en droit national à n'être que très éphémère, car la Commission de Bruxelles ne tardera pas à s'y intéresser.
Mais, d'ailleurs, vous le savez même mieux que moi, car c'est principalement pour cette raison que, pendant cinq ans, vous avez observé le plus grand immobilisme s'agissant des problèmes de La Poste et de la transposition des directives européennes au secteur postal. Alors, de grâce, ne nous donnez pas de leçons sur le sujet ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Ce n'est pas le sujet de l'article 8 !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L'amendement n° 91 appelle les mêmes commentaires que l'amendement n° 85 des mêmes auteurs.
J'en viens à l'amendement n° 149 rectifié de M. Delfau. Il ne faudrait pas priver l'établissement de crédit postal de la possibilité de nouer des partenariats en capital avec d'autres acteurs financiers. C'est pourquoi la commission préfère n'imposer à La Poste qu'une détention majoritaire du capital de l'établissement privé postal.
L'amendement n° 137 rectifié est satisfait par l'amendement n° 35.
Il en va de même pour l'amendement n° 136 rectifié : l'encadrement de la mise à disposition des fonctionnaires de La Poste est prévu par l'amendement n° 35.
La commission est défavorable à l'amendement n° 150 rectifié de M. Delfau : il serait préjudiciable à l'établissement de crédit postal de le priver de la souplesse que lui offre l'article 8.
L'amendement n° 148 rectifié appelle les mêmes observations.
M. Gérard Delfau. Sur un sujet pareil, c'est un peu rapide ! Heureusement, M. le ministre va nous éclairer...
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je souhaite tout d'abord remercier de sa confiance M. Delfau !
M. Gérard Delfau. Elle est conditionnelle !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'avoue que je m'en doutais !
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement de suppression n° 85, et la commission a, me semble-t-il, parfaitement expliqué pourquoi.
L'amendement n° 90 n'est qu'un amendement de repli et il fait donc aussi l'objet d'un avis défavorable.
L'avis est également défavorable sur les amendements n°s 87 et 88, mais, sur ce dernier amendement, je souhaite m'arrêter un peu plus longuement, car il porte sur un thème repris dans d'autres amendements.
Cet amendement n° 88 a en effet pour objet d'étendre la gamme des services financiers de La Poste aux prêts à la consommation.
Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi rend juridiquement possible la distribution par La Poste de tout produit bancaire, y compris les crédits à la consommation. Un amendement qui prévoirait expressément la distribution de crédits à la consommation n'ajouterait donc rien au texte.
M. Jean-Pierre Sueur. Mais quelles sont les intentions du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'y viens, monsieur Sueur ! Je comprends que vous me posiez la question sur les intentions du Gouvernement et je vais vous y répondre, mais laissez-moi d'abord répondre aux auteurs des amendements.
Je dis donc qu'un amendement comme l'amendement n° 88 n'apporterait rien au texte. A supposer même qu'il soit adopté, le contrat de plan entre l'Etat et La Poste ne permettrait pas à cette dernière de distribuer des crédits à la consommation, ...
M. Pierre-Yvon Trémel. Et la loi ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ...sauf à admettre, monsieur Trémel, que la loi annule le contrat passé entre l'Etat et La Poste, ce qui serait tout de même assez énorme !
Mme Nicole Bricq. Que faites-vous de la hiérarchie des normes, monsieur le ministre ?
M. Jean-Pierre Sueur. La loi est une norme juridique supérieure !
Mme Nicole Bricq. La loi l'emporte sur le contrat, monsieur le ministre.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous ne pouvez obliger La Poste à pratiquer le crédit à la consommation si elle ne veut pas le faire.
M. Gérard Delfau. Ah ?...
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous pouvez lui en donner le droit, mais, si La Poste a contracté avec le Gouvernement,...
M. Gérard Delfau. Vous savez très bien que, si La Poste a signé le contrat, c'est contrainte et forcée, par vous et par le lobby bancaire.
M. Gérard Delfau. Il n'est pas croyable d'entendre des choses pareilles dans cet hémicycle !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. N'ai-je donc pas le droit de m'exprimer, monsieur Delfau ?...
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, ne recourez pas à des faux-semblants !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Delfau, qu'est-ce qu'un contrat ? Ce sont des obligations réciproques entre des parties. La Poste a pris un engagement avec l'Etat...
M. Gérard Delfau. Il lui a été imposé !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Qu'elle l'ait fait pour de bonnes ou de mauvaises raisons, que cela lui ait fait ou non plaisir, elle a pris cet engagement contractuel !
M. Gérard Delfau. Imposé par le lobby bancaire !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Nous sommes dans un pays de liberté, et on ne lui a rien imposé du tout !
La Poste a passé un accord. Dans un accord, il y a toujours des conciliations de part et d'autre ; je veux bien croire que La Poste n'ait pas passé ce contrat avec enthousiasme, mais elle l'a passé, et elle l'a passé librement. Elle s'est donc, comme toute personne qui a librement signé un contrat, engagée, ...
M. Gérard Delfau. Vous pouvez la dégager !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ...et modifier la loi ne changera rien à son obligation contractuelle !
Mme Nicole Bricq. Mais si !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Savoir si le Gouvernement accepte de réviser le contrat, on peut en débattre et je veux bien le faire, mais discuter de la possibilité de modifier la loi pour affecter le contrat n'a pas de sens.
Mais je reviens aux amendements, et au fond.
Le Gouvernement a fait procéder à une analyse détaillée des conséquences d'une extension de la gamme pour les concurrents. Ces derniers se sont aussi beaucoup exprimés et ont fait, c'est vrai, du lobbying, mais quoi de plus naturel ? Tous les gouvernements subissent le lobbying de groupes de pression ; à eux de prendre leurs décisions en conscience ! En tout état de cause, l'expertise a conclu que les conséquences seraient très limitées.
M. Jean-Pierre Sueur. Tout va bien !
M. Jean-Pierre Sueur. Où est-il ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement a toutefois décidé de procéder par étapes et de limiter dans un premier temps, mais dans un premier temps seulement, l'extension de la gamme aux seuls prêts immobiliers sans épargne préalable,...
M. Jean-Pierre Sueur. Et pourquoi donc ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ...décision qui est inscrite dans le contrat de plan.
Si cette décision a été prise, monsieur Sueur, c'est pour des raisons prudentielles. Il apparaît, en effet, que La Poste est d'ores et déjà assez bien outillée pour commencer à pratiquer, vite et bien, des crédits immobiliers sans épargne préalable. En revanche, pour les crédits à la consommation, nous préférons, pour des raisons de prudence, attendre, car nous voulons la réussite de l'établissement de crédit postal. Vous n'ignorez sans doute pas que, sur le marché, il n'y a pas que des personnes bien intentionnées et que certains veulent que cet établissement échoue.
M. Jean-Pierre Sueur. M. Larcher expliquait pourtant que la prudence consistait à aller vite parce que nous étions dans un contexte concurrentiel : plus on attend, plus on perd ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Mais laissez-nous débattre, chers collègues !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous vous êtes exprimé très largement et très librement. Accordez donc aux autres la liberté que vous réclamez pour vous-même, monsieur Sueur !
M. Larcher a dit la même chose que M. Hérisson. Il s'agissait de donner une activité bancaire à l'établissement financier et de découpler les activités.
Il est vrai qu'il y a eu une inversion de l'ordre des priorités dans le contrat de plan, mais, si ce choix a été fait, c'est parce qu'il est apparu que les services financiers étaient mieux outillés pour les crédits immobiliers sans épargne préalable que pour d'autres types de crédit, pour lesquels un peu d'expérimentation était nécessaire.
Nous avons constaté, je l'ai dit, que certains étaient mal intentionnés à l'égard de l'établissement de crédit postal et lui jetaient des mauvais sorts.
M. Gérard Delfau. Vous êtes trop bons !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Nous avons donc voulu être prudents pour donner à La Poste toutes ses chances. Ne nous reprochez pas cette prudence, vous qui n'avez absolument rien fait pendant cinq ans ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.- Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Thierry Repentin. Vous avez réveillé votre majorité, monsieur le ministre !
Mme Nicole Bricq. Chassez le naturel, il revient au galop !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Si vous vouliez permettre à La Poste de pratiquer le crédit à la consommation, que ne l'avez-vous fait pendant les cinq années tout au long desquelles vous auriez dû transposer la directive ?
Vous n'avez rien fait et, aujourd'hui, vous nous reprochez de ne pas en faire assez. Avouez que c'est paradoxal ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.- M. Jean-Pierre Sueur brandit le rapport Larcher.)
En conséquence, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 88, ainsi que sur l'amendement n° 89.
L'amendement n° 133 nous ramène à la question du capital de la filiale.
Je crois l'avoir déjà dit, il s'agit de permettre à La Poste de nouer, à sa diligence, des partenariats. Au départ, La Poste détiendra 100 % du capital. Nous ne lui demandons pas de mettre 49 % du capital sur le marché ; nous souhaitons qu'elle puisse à son gré nouer des partenariats, en particulier sur le territoire européen. Elle s'est déjà, souvent avec beaucoup de sagacité, implantée dans de multiples endroits en Europe.
Cet outil qu'est le capital de son établissement de crédit doit lui permettre d'accroître son implantation sur les marchés extérieurs et de gagner, comme elle l'a fait assez brillamment dans d'autres domaines, des parts de marché.
Ce faisant, monsieur Sueur, on met La Poste à égalité avec ses concurrents, car figurez-vous que d'autres postes européennes, par exemple la poste allemande, la poste suédoise et la poste néerlandaise, disposent déjà de cette possibilité. Pourquoi voulez-vous en priver notre établissement postal ?
La Poste ne sera d'ailleurs pas tout à fait à égalité avec ses concurrents, puisqu'elle devra conserver au moins 51 % du capital, mais elle aura au moins une vraie chance de nouer des partenariats.
Je suis donc défavorable à l'amendement n° 133.
Petit clin d'oeil à M. Hérisson, qui évoquait tout à l'heure Portalis, je suis également défavorable à l'amendement n° 147 rectifié de M. Delfau, car la formule « et notamment le microcrédit » n'a aucun sens juridique, puisqu'elle ouvre toutes les portes.
M. Gérard Delfau. L'adverbe « notamment » est dans le texte du projet de loi !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Eh bien, c'est regrettable ! Je ne vous jette d'ailleurs pas la pierre, monsieur Delfau : faire la chasse au « notamment » demande une attention soutenue, car cet adverbe est une véritable maladie qui se répand à la vitesse d'un virus informatique. J'en suis moi-même victime.
M. Gérard Delfau. Votre argument en est, notamment, d'autant plus faible ! (Sourires.)
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 134, qui tend à permettre l'extension au crédit à la consommation sans autorisation de la tutelle.
Le Gouvernement n'est pas non plus favorable, je le dis au rapporteur, à l'amendement n° 52...
M. Thierry Repentin. Ce n'est pas grave : il passera quand même...
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... parce que les dispositions législatives en vigueur soumettent déjà La Poste aux mêmes obligations d'information des consommateurs que les établissements de crédit.
En outre, les dispositions du présent projet de loi prévoient bien que l'établissement de crédit postal sera soumis à l'ensemble des dispositions applicables aux établissements de crédit.
Enfin, La Poste agissant au nom et pour le compte de l'établissement de crédit postal, le client bénéficiera naturellement des dispositions protectrices de la loi qui mettent à la charge des établissements de crédits un certain nombre d'obligations.
En revanche, cet amendement aboutirait à créer, entre La Poste et ses mandants, une responsabilité solidaire, de portée générale, qui va bien au-delà de ce que prévoit le droit civil. Ce faisant, cet amendement aboutirait implicitement, mais nécessairement, à une forme de garantie générale de La Poste sur l'ensemble de l'activité de ses mandants, ce qui serait certainement critiquable du point de vue du droit de la concurrence. Je suis défavorable à cet amendement...
Mme Nicole Bricq. Nous aussi !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ...qui, non seulement n'améliorerait pas la protection du consommateur, mais nuirait même au projet de création de l'établissement de crédit postal, parce qu'il serait contraire à la concurrence.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Puis-je vous interrompre, monsieur le ministre ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, avec l'autorisation de M. le ministre délégué.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Compte tenu des arguments avancés par M. le ministre, la commission invite M. Soulage à retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Soulage, l'amendement est-il maintenu ?
M. Daniel Soulage. Non, je le retire, monsieur le président.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je vous remercie, monsieur Soulage, de votre compréhension.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n °135, qui vise à faire porter sur le groupe La Poste des obligations de service public nouvelles.
Les discussions intenses d'octobre dernier entre les banques et les associations de consommateurs ont montré toute la complexité de la problématique de la lutte contre l'exclusion bancaire. La question doit mobiliser l'ensemble des établissements bancaires français et ne saurait être traitée par une réponse unique qui serait le service bancaire universel.
Le Gouvernement a fait le choix d'avancer sur ce dossier en adoptant une série de mesures destinées à traiter chacun des différents aspects de l'exclusion bancaire. Il y a d'abord eu, ce qui est une bonne chose, le droit au compte, procédure renforcée par la loi dite « Murcef », ou loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, de 2001. Cette mesure assure déjà à chacun la possibilité d'avoir un compte bancaire et les moyens de paiement associés.
Le Gouvernement lancera prochainement une vaste campagne d'information sur cette procédure qui est encore, effectivement, trop peu utilisée, mais qui prise, avec raison, sur l'initiative de la gauche, a le mérite d'exister.
Par ailleurs, pour les personnes déjà « bancarisées », qui connaissent des difficultés - incidents de paiement ou retrait de chéquier - les banques se sont engagées à proposer d'ici au mois de juin prochain, une offre de moyens de paiement adaptée et à tarifer de manière plus transparente, ce qui est nécessaire, et plus équilibrée, ce qui est non moins nécessaire, les frais pour incidents de paiement.
La Poste est, certes, un acteur tout à fait déterminant de la lutte contre l'exclusion bancaire, mais cette problématique doit associer l'ensemble des établissements bancaires concernés. Seule une démarche partenariale entre l'Etat les banques et la société civile, engagée au sein du comité consultatif du secteur financier permettra de trouver des solutions globales sans recourir à ce que je considère comme un expédient qui conduirait à faire apparaître La Poste comme « la banque des pauvres », alors que cette charge doit être partagée.
La solution proposée serait à la fois injuste et préjudiciable. Elle serait préjudiciable, car elle reporterait tout le travail de l'accès au service bancaire pour les plus démunis sur La Poste seule. Ce n'est pas cette logique que le Gouvernement a retenue : l'approche de la procédure du droit au compte, qui conduit, en effet, à imposer des obligations à l'ensemble du système bancaire sans aucune exception, lui paraît largement préférable.
Mais cette solution serait également injuste, car elle conduirait à la stigmatisation de tous les clients de La Poste. Je suis donc tout à fait défavorable à cet amendement n °135.
M. Gérard Delfau. La loi Murcef de 2001 n'est pas appliquée !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je suis d'accord sur le constat, mais, précisément, il faut se donner les moyens de l'appliquer ! C'est une bonne loi qui doit bénéficier de la publicité dont elle a besoin. Il faut également en tirer toutes les conséquences sur l'ensemble du secteur bancaire et non pas sur un seul de ses acteurs, comme l'amendement le prévoit.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n °91, qui n'est, semble-t-il, qu'un amendement de repli. Il est également défavorable à l'amendement n ° 149 rectifié auquel j'opposerai le même argument sur les 100 %du capital.
Le Gouvernement est aussi défavorable à l'amendement n °137 rectifié, qui vise à encadrer les transferts de personnels à l'établissement de crédit postal.
L'article 8 du projet de loi comprend les dispositions nécessaires à l'établissement de crédit postal. La réussite de ce projet majeur pour La Poste, exige que des fonctionnaires, en activité à La Poste, puissent être, avec leur accord, mis à la disposition de l'établissement de crédit postal, le cas échéant à temps partiel. Tel est le sens du 2 du III de l'article 8, dans sa rédaction actuelle.
Comme le prévoit le texte, aucune mise à disposition ne pourra être effectuée sans l'accord du fonctionnaire concerné. De plus, tout fonctionnaire mis à la disposition de l'établissement de crédit postal pourra à tout moment solliciter se réaffectation dans les services de La Poste.
Conformément aux orientations du Gouvernement, la mesure introduite par le projet de loi offre donc toutes les garanties nécessaires aux fonctionnaires. Ne serait-ce que pour des raisons économiques, elle ne conduira pas, bien entendu, à des mises à disposition excédant les besoins de la filiale. L'établissement de crédit postal ne peut qu'avoir intérêt à une adéquation la plus ajustée possible entre ses besoins et les charges qu'il aura nécessairement à supporter.
La mesure ne saurait donc concerner l'ensemble des agents des services financiers de La Poste. Ce seront, tout au plus, dans un premier temps, quelques centaines de fonctionnaires qui seront concernés, j'y insiste, sur la base du volontariat, et avec une possibilité de retour à tout moment.
Dans ces conditions, je suis défavorable à l'amendement n ° 137 rectifié.
L'amendement n °136 rectifié traitant du même problème, le Gouvernement y est également défavorable, pour les mêmes raisons.
L'amendement n °35 de la commission me pose problème et je veux dire très précisément à M. le rapporteur ce qu'il en est.
En effet, l'article 8 du projet de loi comprend, comme vous le savez, les dispositions nécessaires à la création de l'établissement, mais c'est dans le 2 du III de l'article 8 que se trouvent les éléments offrant toutes les garanties aux fonctionnaires : je viens de mentionner le principe du détachement sur la base du volontariat avec possibilité de retour. Dans la mesure où ces garanties existent et où elles ne touchent que quelques centaines de fonctionnaires, je propose à M. le rapporteur de retirer l'amendement n° 35.
M. le président. Monsieur le rapporteur, accédez-vous à la demande de M. le ministre délégué ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur le ministre, vos explications étaient nécessaires et nous éclairent sur la portée du texte. Dans ces conditions, je retire mon amendement.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n °150 rectifié ; je viens d'expliquer en quoi elle était nécessaire. Pour les mêmes raisons, il est également défavorable à l'amendement n °148 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote sur l'amendement n °85
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, il faut que nous allions au bout de ce débat sur le crédit à la consommation.
Si j'ai bien compris l'argumentation que vous avez développée, pressé par nos demandes et quelque peu acculé dans vos retranchements, vous estimez, et cela nous touche parce que nous aimons La Poste, qu'il faut d'abord que cette dernière fasse ses preuves, qu'elle soit protégée des faux pas et qu'il est donc préférable de la faire attendre.
Monsieur le ministre, je vous connais assez pour le savoir, vous n'êtes pas de mauvaise foi. Donc, vous êtes mal informé. Je vais en effet vous prouver que La Poste, dans les domaines qui sont les siens, bien loin d'aggraver les risques de surendettement, est au contraire un très remarquable acteur de la lutte contre ce phénomène. Sans doute vos services vous ont-ils caché cet aspect des choses...
Vous me permettrez d'illustrer mon propos par quelques éléments chiffrés. Le nombre des ménages surendettés ne cesse d'augmenter : en 2004, 2 199 000personnes étaient inscrites au fichier des incidents de remboursement de toutes sortes. Je passerai sur la répartition, en notant néanmoins que les prêts personnels sont à l'origine de 61,7 % de ces dossiers, ce qui a son importance pour la suite de nos débats, et que la part de La Poste ne représente que 0,80 % du stock global de ces incidents.
M. Gérard Delfau. Oui, mais il faut rappeler que ce résultat s'explique notamment par la rigueur avec laquelle sont gérés les découverts sur compte de dépôt. Au point que l'on accuse parfois les postiers de décourager la clientèle !
D'ailleurs, monsieur le ministre, vous savez mieux que quiconque quels sont les responsables. Je ne vais pas en dresser ici la liste : nous avons tous à l'esprit le nom de ces organismes prêteurs qui, surtout, ne vérifient pas la capacité d'endettement des demandeurs de prêt.
Vous pourriez m'objecter que c'est un problème global qui relève d'un autre débat, le prêt à la consommation.
Précisément, monsieur le ministre, là encore, La Poste, a fait ses preuves. Vous savez sans doute qu'elle peut, et depuis longtemps, consentir des prêts de trésorerie à son personnel. Or, dans ce cas, le taux d'impayés est de 1,12 % du total des encours !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Non, et cela change tout !
M. Gérard Delfau. Cela change tout, surtout quand il s'agit de certains organismes que je ne citerai pas, mais que vous connaissez comme moi !
Les chiffres prouvent que, contrairement à ce que vous disiez tout à l'heure, La Poste n'est pas en la matière un acteur qui en serait encore à devoir apprendre son métier : par sa culture et les pratiques qu'elle a développées, elle a la capacité de faire reculer le surendettement en France.
Si vous ne voulez pas reconnaître cette réalité, c'est que, en fait, vous reculez devant la demande pressante du secteur bancaire. C'est uniquement pour cette raison que vous refusez de nous répondre. Nous le savions, mais nous voulions que la démonstration soit faite ce soir.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 147 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. Pierre-Yvon Trémel. Hélas !
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.