Article 12
Au IV de l'article 244 quater G du code général des impôts, le mot : « six » est remplacé par le mot : « un ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 38 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 154 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Selon le rapport de M. Leclerc, la réduction de six à un mois de la période d'apprentissage justifiant un crédit d'impôt pour l'entreprise, telle qu'elle est prévue par l'article 12, s'explique par le décalage existant entre la période de la session d'apprentissage, la date de la clôture des comptes de l'entreprise et celle de la déclaration fiscale.
S'il suffit de faire travailler un apprenti pendant un mois pour bénéficier du crédit d'impôt, ce n'est plus une justification, c'est un alibi !
Vous prenez donc le risque, monsieur le ministre, d'accroître le nombre d'apprentis vite découragés, ou plutôt encouragés à partir. On prend, on jette ou, encore mieux, on prend, on déclare pour pouvoir bénéficier du crédit d'impôt et on jette !
Nous souhaitons donc le maintien d'une période de six mois de présence de l'apprenti.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 154.
M. Guy Fischer. L'article 12, en proposant de faciliter l'accès à un crédit d'impôt pour les entreprises engageant des apprentis, ne vise à rien d'autre qu'à assouplir la taxe d'apprentissage.
En effet, aux termes de cet article, l'octroi du crédit d'impôt ne sera plus conditionné à la présence de l'apprenti dans l'entreprise depuis six mois puisqu'il suffira d'un seul mois de présence de l'apprenti pour justifier le crédit d'impôt. L'intérêt pour l'entreprise dépendra donc uniquement du nombre de contrats signés.
Une telle réforme ne garantit en rien la qualité de la formation. Pour accueillir correctement les jeunes dans cette voie de formation, les entreprises doivent trouver dans l'apprentissage un intérêt autre que financier, ce que cet article ignore totalement.
Il est par ailleurs contradictoire de prétendre développer l'apprentissage à travers le crédit d'impôt, car il est paradoxal d'inciter les entreprises à développer l'apprentissage en leur accordant un avantage financier alors que le Gouvernement conçoit ce mode de formation comme le moyen d'assurer la pérennité de ces mêmes entreprises.
Si l'on associe à cet article les deux nouveaux articles permettant de faire travailler les apprentis la nuit, le dimanche et les jours fériés, on comprend aisément que ce n'est pas la formation des apprentis qui préoccupe le Gouvernement, mais leur exploitation. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
En somme, ce qui prime, dans votre conception de l'apprentissage, c'est le fait, non d'apprendre un métier à un jeune, mais de lui apprendre à être flexible et corvéable.
M. Roland Muzeau. Voilà la vérité !
M. Guy Fischer. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je n'ose pas rebondir sur les derniers propos de M. Fischer. Je pensais que nous partagions tous un vif intérêt pour l'apprentissage, qui est, pour l'apprenti, l'occasion d'apprendre un certain art et, pour le maître, celle de le transmettre.
M. Guy Fischer. Pas dans n'importe quelles conditions !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Des clichés tels que ceux que nous venons d'entendre proférer ne sont vraiment plus d'actualité. Il y a des mots qui, aujourd'hui, exhalent un singulier parfum de désuétude ! (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Je vais tâcher d'oublier ces propos caricaturaux pour m'attacher à la finalité de ce qui nous est proposé.
Nous voulons certainement tous soutenir l'apprentissage, mais nous divergeons sur le moyen de prodiguer ce soutien.
En l'espèce, j'insisterai simplement sur le fait que la proratisation se fait non par rapport à la totalité du temps d'apprentissage dans l'entreprise mais sur une base annuelle.
Ces deux amendements de suppression vont à l'encontre de la position de la commission, qui émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous avons le même sentiment et donc le même avis que le rapporteur.
L'objet de cet article, monsieur Fischer, n'est pas de diminuer les ressources provenant de la taxe d'apprentissage, mais de tenir compte des difficultés rencontrées dans l'application de la condition de présence requise au sein de l'entreprise pour ouvrir droit au crédit d'impôt.
Dans le cadre du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, nous nous sommes notamment donné pour objectif une réduction du taux de rupture. Aujourd'hui, le taux de rupture au cours des huit premiers mois se situe aux alentours de 25 %. Nous voulons le ramener à 10 %, notamment en agissant sur les conditions sociales, et cette ambition trouve sa concrétisation dans les contrats que nous passons avec les régions.
Par exemple, les difficultés liées au logement ou aux transports doivent être prises en compte. Cela nous renvoie à la notion d'« étudiant des métiers ».
Mais il y a aussi la qualité de l'accompagnement de l'apprenti. A cet égard, il est nécessaire, en particulier, de favoriser le rapprochement entre le maître d'apprentissage et le centre de formation. On a parfois pu observer une méconnaissance mutuelle. Nous avons donc prévu que, dans les mois qui suivent le début du contrat, le maître d'apprentissage et un représentant du centre de formation par alternance se rencontrent, fassent l'évaluation de l'apprentissage et voient quel accompagnement il faut offrir à l'apprenti.
C'est aussi dans cet esprit que nous souhaitons introduire, dans les secteurs où des métiers connaissent certaines tensions, la notion de charte de qualité en matière d'apprentissage.
L'article tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale prend en compte la réalité actuelle du taux de rupture. C'est pourquoi j'ai tenu à rappeler ce qui a été prévu dans le plan de cohésion sociale et ce que nous mettons en oeuvre dans les conventions d'objectifs.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38 et 154.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article additionnel avant l'article 13
M. le président. L'amendement n° 178, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 119-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour le secteur de la jeunesse et des sports, l'inspection de l'apprentissage est assurée par des inspecteurs de la jeunesse et des sports, commissionnés à cet effet par leur ministre. »
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Les formations par apprentissage dans le champ de l'animation et du sport connaissent un développement accéléré depuis quelques mois. A la rentrée prochaine, 1 400 apprentis seront répartis dans dix-neuf centres de formation, implantés dans quatorze régions différentes.
Les directeurs régionaux de la jeunesse et des sports ayant vu confirmer par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales leur qualité d'autorité académique, il importe d'en tirer toutes les conséquences sur le contrôle pédagogique des formations par apprentissage qui conduisent à des diplômes délivrés par le ministre en charge de la jeunesse et des sports, alors que le contrôle est aujourd'hui exercé par les services académiques de l'inspection de l'apprentissage, relevant du ministère chargé de l'éducation nationale.
Les conditions d'organisation de cette inspection seront précisées dans le cadre d'un décret en Conseil d'Etat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Le fait que ces contrôles et inspections soient réalisés par des inspecteurs de la jeunesse et des sports nous apparaît comme une mesure de bon sens, et la commission a émis un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 13.
Article 13
Au sixième et au dernier alinéas de l'article L. 119-1-1 du code du travail et au huitième alinéa de l'article L. 119-1-2 du même code, les mots : « le ministre chargé de la formation professionnelle » sont remplacés par les mots : « l'autorité compétente de l'Etat ». - (Adopté.)
Article 14
I. - L'article L. 118-2-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « formation professionnelle continue » sont insérés les mots : « ou aux centres de formation d'apprentis pour lesquels a été passée convention avec l'Etat » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Les sommes ainsi reversées sont exclusivement affectées au financement : » ;
3° Le quatrième alinéa est complété par les mots : « ou, dans le cas des centres de formation d'apprentis pour lesquels a été passée convention avec l'Etat, des actions de développement et de modernisation arrêtées dans le cadre de ladite convention ».
II. - Au troisième alinéa de l'article L. 118-2-3 du même code, après les mots : « formation professionnelle continue » sont insérés les mots : « ou aux centres de formation d'apprentis pour lesquels a été passée convention avec l'Etat et ».
M. le président. L'amendement n° 104, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
I. Compléter le I de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
... ° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Des actions nationales de communication et de promotion de l'apprentissage. ».
II. En conséquence, compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Au cinquième alinéa (b) du même article, après les mots : « au 2° », sont insérés les mots : « et 3° ».
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Cet amendement vise à étendre la vocation du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage au financement d'actions nationales de communication pour la promotion de l'apprentissage.
Ces actions, indispensables pour renforcer l'attractivité de cette filière de formation auprès des jeunes, des familles et des employeurs, sont en effet de nature à contribuer au développement de l'apprentissage dans notre pays et à la création d'emplois.
Aujourd'hui, les campagnes de promotion, restant cantonnées aux départements et aux régions, n'ont pas une envergure suffisante.
Nos voisins allemands, qui bénéficient d'une forte infrastructure d'apprentissage, ont mené des campagnes nationales dont les conséquences ont été très positives.
La mesure que je propose s'inspire de l'exemple allemand et me paraît susceptible de donner à l'apprentissage le nouvel essor que nous appelons tous de nos voeux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Nous ne pouvons que nous rallier à cette suggestion. Il convient en effet d'améliorer l'image de l'apprentissage auprès des jeunes et de leurs parents.
J'ajoute que, avec l'adoption d'une telle mesure, certains ne pourront plus dire que ce texte ne contient que des incitations fiscales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappelle que le Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage a pour vocation de promouvoir, aux côtés des régions, cette voie de formation.
Nous avons pu mesurer, au cours de la préparation des conventions avec les régions, la nécessité d'accompagner par des campagnes nationales de promotion l'action des régions en faveur du développement de la filière de l'apprentissage.
L'amendement de M. Dassault est donc parfaitement conforme aux objectifs que nous nous sommes fixés en même temps qu'aux attentes d'un certain nombre de régions qui souhaitent voir l'Etat les accompagner au travers de campagnes nationales de promotion de l'apprentissage allant au-delà des campagnes de proximité dirigées vers les bassins d'emploi et les entreprises, en vue de répondre aux besoins de formation et d'emploi de demain.
M. le président. La parole est à Mme Michèle San Vicente, pour explication de vote.
Mme Michèle San Vicente. Cet amendement me surprend, car j'avais cru comprendre que la promotion de l'apprentissage entrait précisément dans les missions de l'Agence...
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. N'ayant pas obtenu de réponse de la part du Gouvernement lors de la discussion générale, je souhaiterais savoir, puisque nous parlons de promotion de l'apprentissage, ce qu'est devenu un des objectifs du plan de cohésion sociale, celui qui concernait l'ouverture de l'apprentissage dans les fonctions publiques, car nous étions nombreux à considérer cette piste comme particulièrement intéressante.
Cette ouverture constituerait aussi un moyen de valoriser l'apprentissage. Nous l'avons pratiqué dans nos collectivités territoriales et cela fonctionne très bien : outre que cette forme d'apprentissage a souvent l'avantage de déboucher sur des professions qui offrent des potentialités en termes de recrutement, il contraint aussi ceux qui deviennent maîtres de stage à évoluer dans leurs pratiques.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Godefroy, le Premier ministre, dans son discours de présentation du projet de loi d'habilitation, a annoncé très clairement qu'une des ordonnances serait consacrée à la mise en oeuvre du pacte social et donc au développement de l'entrée dans la fonction publique, y compris dans le cadre de l'apprentissage.
M. Jean-Pierre Godefroy. Ah ! Ce sera donc par ordonnance...
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Par ailleurs, madame San Vicente, je crains qu'il n'y ait une petite confusion : le projet de loi institue une Agence nationale des services à la personne, mais cette agence n'est pas compétente en matière d'apprentissage.
M. le président. La parole est à Mme Michèle San Vicente.
Mme Michèle San Vicente. Monsieur le ministre, l'Agence nationale des services à la personne n'est peut-être pas compétente pour remplir les missions auxquelles a trait l'amendement de notre collègue, mais cela démontre que le rôle de cette agence n'est pas très clairement défini dans le projet de loi : ou celui-ci est mal rédigé, ou il n'aurait pas dû y être question de l'apprentissage.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Article 15
L'article 49 du code de l'artisanat est abrogé. - (Adopté.)
Article 16
Jusqu'au 1er janvier 2008 et par dérogation aux dispositions de l'article L. 118-2 du code du travail, le montant du concours financier prévu au deuxième alinéa de cet article est au moins égal, dans la limite de la fraction de la taxe réservée à l'apprentissage, à un montant fixé par arrêté des ministres chargés de l'emploi et du budget. - (Adopté.)
Article 17
M. le président. L'article 17 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article additionnel après l'article 17
M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre V du livre II du code de la construction et de l'habitation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Usufruit locatif
« Art. L. 253-1. - Constitue une opération en usufruit locatif soumise aux dispositions du présent chapitre, l'opération dans laquelle une personne morale détient ou acquiert l'usufruit d'un logement ou d'un ensemble de logements et s'engage à le conserver en bon état d'entretien et de réparations en vue de louer ce ou ces logements pendant toute la durée de l'usufruit.
« L'usufruit locatif est conclu pour une durée minimale de quinze ans.
« Art. L. 253-2. - Les logements dont l'usufruit est détenu par les bailleurs visés à l'article L. 253-1 peuvent être financés dans des conditions définies par décret. Ils peuvent faire l'objet d'une convention mentionnée à l'article L. 351-2 du présent code, conclue pour une durée identique à celle de l'usufruit temporaire.
« Art. L. 253-3. - L'article 595 du code civil ne s'applique pas aux baux des logements conférés par l'usufruitier et visés à l'article L. 253-1 du présent code.
« Le bail conclu avec le locataire prend fin de plein droit au plus tard à la date de l'extinction des droits d'usufruit sur l'immeuble. Ce bail doit indiquer, de manière expresse et apparente, le statut spécifique du logement, préciser le terme ultime du contrat et reproduire les modalités définies à l'article L. 253-4 du présent code.
« Un an avant l'extinction de l'usufruit, le bailleur rappelle au nu-propriétaire et au locataire les modalités définies à l'article L. 253-4 du présent code relatives à l'extinction de l'usufruit, communique au nu-propriétaire copie du bail de location en vigueur et communique au locataire l'identité du nu-propriétaire.
« Le non-respect par l'usufruitier de ces obligations est inopposable au nu-propriétaire.
« Art. L. 253-4. - Six mois au moins avant la date d'extinction de l'usufruit, le nu-propriétaire est tenu de notifier au locataire et à l'usufruitier ses intentions :
« - soit en proposant un nouveau bail prenant effet au terme de l'usufruit, conforme aux dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et dont le loyer est fixé selon les dispositions du c de l'article 17 de ladite loi.
« - soit en donnant congé pour vendre ou pour occuper selon les modalités prévues à l'article 15 de ladite loi, avec effet au terme de l'usufruit. Le congé est dans ce cas valablement donné par le seul nu-propriétaire au locataire.
« Le bailleur est tenu, trois mois au plus tard avant la date d'expiration de l'usufruit, de proposer au locataire qui n'a pas conclu de nouveau bail avec le nu-propriétaire et qui remplit des conditions de ressources fixées par décret, la location d'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités.
« Le non-respect par l'usufruitier de cette obligation est inopposable au nu-propriétaire.
« Le locataire qui n'a pas conclu le contrat de location proposé par le nu-propriétaire ou accepté l'offre de relogement faite par l'organisme est déchu de tout titre d'occupation sur le logement à l'expiration de l'usufruit.
« Art. L. 253-5. - Les dispositions du présent chapitre sont d'ordre public. »
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Tous les maires en ont fait l'expérience, il est difficile d'appliquer le principe de mixité sociale dans nos centres-ville compte tenu du niveau, souvent prohibitif, qu'atteignent les prix du foncier.
La technique du démembrement de propriété ou de l'usufruit locatif est un outil efficace pour contourner cet obstacle. Cette technique consiste à partager le coût du logement entre, d'une part, le bailleur professionnel, qui acquiert l'usufruit temporaire, souvent pour quinze ans, et, d'autre part, des particuliers épargnants qui acquièrent la nue-propriété du logement.
Ces opérations intéressent notamment des ménages désireux d'investir à long terme dans l'immobilier de qualité, en particulier dans la perspective de leur retraite, sans avoir à subir les contraintes souvent liées à la gestion locative.
Pour ma part, je ne doute pas que le développement de l'usufruit locatif permettra d'atteindre l'objectif de réalisation de nouveaux logements sociaux et de compléter ainsi les engagements de la loi de programmation pour la cohésion sociale.
Or, si la législation dans son état actuel autorise la mise en oeuvre de ce nouveau mode de propriété - propriété successive, pourrait-on dire -, il apparaît aujourd'hui nécessaire d'en préciser l'usage et d'apporter des garanties juridiques tant aux locataires, notamment au dernier locataire, qu'aux propriétaires.
Le présent amendement vise à compléter à cette fin le livre V du titre II, « Bail à construction et bail à réhabilitation », du code de la construction et de l'habitation par de nouveaux articles qui fixent les règles de l'usufruit locatif pour le locataire comme pour l'épargnant.
Je précise que ce nouveau schéma de cofinancement a déjà reçu l'assentiment de nombreux bailleurs sociaux, de collectivités locales et d'épargnants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Le dispositif que vient de présenter M. Vanlerenberghe nous a paru intéressant mais assez complexe. Il mérite de faire l'objet d'une expertise juridique et d'une réflexion plus approfondie que celle que nous avons pu conduire en commission.
Peut-être certaines améliorations à la marge devront-elles être apportées à ce dispositif pour en assurer le succès dans l'avenir, ce qui pourrait être fait dans le cadre du projet de loi « Habitat pour tous ».
La commission souhaiterait donc le retrait de l'amendement, mais, auparavant, le Gouvernement pourra sans doute nous apporter quelques précisions complémentaires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je ne sais pas si j'ai la capacité d'expertise nécessaire, car c'est en quelque sorte un nouveau chapitre du code de la construction et de l'habitation que nous propose M. Vanlerenberghe !
L'usufruit locatif offre, je le dis d'emblée, un schéma de cofinancement intéressant : il permet aux bailleurs HLM de réaliser des opérations relevant du PLS, le prêt locatif social, dans les zones de forte tension immobilière sans mobiliser leurs fonds propres et sans recourir à des subventions foncières ou à des subventions des collectivités locales.
L'usufruit locatif est déjà possible aujourd'hui en PLS. L'amélioration législative proposée consiste en fait, essentiellement, à introduire une garantie de relogement pour le locataire à la fin de la période de démembrement de la propriété, l'obligation de relogement étant mise à la charge de l'organisme HLM.
Cette garantie est destinée à lever les craintes des investisseurs personnes physiques, qui auraient ainsi la certitude que l'occupant libérera les lieux au terme des quinze années.
Cet amendement fait donc appel à un certain nombre de notions juridiques spécifiques et complexes, qu'il s'agisse de démembrement de propriété ou de garantie de relogement obligatoire. En conséquence, nous souhaiterions examiner à nouveau cet intéressant schéma dans le cadre du projet de loi « Habitat pour tous », qui viendra en discussion à l'automne, ce qui nous permettra de disposer de l'expertise préalable du Conseil d'Etat.
Monsieur Vanlerenberghe, je vous demande donc de retirer cet amendement, tout en prenant l'engagement, au nom du Gouvernement et après en avoir convenu avec Jean-Louis Borloo, puisque ce sujet relève de sa compétence directe, que le débat sur l'usufruit locatif sera repris.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Nous reconnaissons quelques vertus à ce système - il s'agit en fait du système PERL, du nom de la société Pierre Epargne Retraite Logement - de l'usufruit locatif, dont beaucoup d'entre nous ont déjà eu à connaître.
Pour autant, il nous semble prématuré d'arrêter ce soir un dispositif, et cela pour des raisons tant de forme que de fond.
D'abord, pour ce qui est de la forme, nous examinons un texte relatif aux services à la personne et non pas un texte relatif au logement, même si, en fin de lecture à l'Assemblée nationale, et de façon assez subreptice, le Gouvernement a introduit par voie d'amendement quatre articles sur le logement, dont trois nous posent aujourd'hui quelques difficultés.
C'est donc en fait une sorte de cavalier législatif que vous nous présentez, monsieur Vanlerenberghe.
Sur le fond, ensuite, on ne voit pas forcément très bien l'intérêt de multiplier dès ce soir des produits qui ne permettent pas de pérenniser pour un certain temps un parc locatif : quinze ans pour l'usufruit locatif tel qu'il nous est proposé dans cet amendement, de neuf à quinze ans pour le « Robien », le « Robien social » et le conventionnement privé.
L'amendement ne précise pas davantage quel type de logement locatif est visé, si ce n'est qu'il est conventionné, mais admettez que le mot « conventionné » ouvre une très large marge de mise en oeuvre. Néanmoins, en lisant l'amendement de près, on croit comprendre qu'il s'agirait de produits locatifs intermédiaires. Or il existe déjà plusieurs dispositifs qui facilitent la construction de ce genre de produits, dispositifs auxquels M. le ministre a d'ailleurs fait référence, notamment en évoquant le PLS.
Il semblerait ensuite que l'usufruit locatif puisse bénéficier de certaines aides, mais, sur ce point, l'amendement renvoie à un décret. Pour notre part, nous estimons que toute aide publique doit comporter des contreparties réellement sociales et le renvoi à un décret ne nous garantit pas que cet état d'esprit prévaudra lors de la mise en place du nouveau produit.
Quant au bailleur usufruitier, il est simplement tenu de proposer au locataire un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités. L'amendement fait référence au c de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989, mais la consultation du code de la construction et de l'habitation fait apparaître que cela renvoie au domaine du loyer libre ; la personne qui sort de l'usufruit locatif n'a donc pas de garantie de retrouver un logement effectivement accessible.
Enfin, j'indique que le groupe de travail sur les facteurs fonciers et immobiliers de la crise du logement - groupe qui réunit des parlementaires issus de toutes les travées de cet hémicycle et dont je salue le président, Dominique Braye, qui vient de nous rejoindre - présentera demain à la commission des affaires économiques des propositions et que l'usufruit locatif est justement une des pistes qui pourraient trouver une concrétisation. Mais il est évident que celle-ci suppose un approfondissement que ne permet pas le vote, cette nuit, d'un tel amendement.
Je serais donc heureux qu'il soit retiré : cela m'épargnerait d'avoir à voter contre. (Sourires.)
M. le président. Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Vous avez parfaitement compris, monsieur le ministre, l'intérêt de ce dispositif, qui permet de ne pas grever les fonds propres des bailleurs sociaux.
Vous avez formulé des remarques très importantes, et j'invite MM. Braye et Repentin à bien les inscrire dans la réflexion de leur groupe de travail, auquel, au demeurant, je participerais bien volontiers si j'y étais invité.
Aujourd'hui, compte tenu de l'augmentation du coût du foncier, on ne peut réaliser du logement social dans les coeurs de ville que grâce à un apport de plus en plus substantiel des collectivités locales. Et ce phénomène ne concerne pas seulement la région parisienne ou de la côte méditerranéenne : on l'observe progressivement dans toutes les villes de province.
Ce dispositif permettant d'associer l'épargne privée à la production d'un logement social est, par conséquent, vraiment porteur d'avenir. Il faut tenter de recourir aussi à l'argent de l'épargnant privé au lieu de toujours faire appel à l'épargne publique, c'est-à-dire au contribuable.
Pour ce que j'en sais, et d'après ce que les premières expériences ont pu me donner à voir, ce dispositif semble très prometteur et je souhaite donc, rejoignant en cela les propos de M. le ministre, que le projet de loi « Habitat pour tous », dont nous avons souvent entendu parler dans cette enceinte, voie effectivement le jour à l'automne et que cette solution puisse y trouver place. J'ai votre engagement, monsieur le ministre, et celui de M. Borloo, mais j'espère obtenir également celui de l'ensemble du Gouvernement. C'est sous le bénéfice de cet engagement que j'accepte de retirer mon amendement.
M. le président. L'amendement n °53 est retiré.