compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
1
PROCÈS-VERBAL
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
égalité des chances
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour l'égalité des chances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale aux termes de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après déclaration d'urgence (nos 203, 210, 211, 212, 213, 214).
Rappels au règlement
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la présidente, mon rappel au règlement se fonde sur l'article 42. Je le précise, car nous sommes très soucieux de respecter le règlement du Sénat !
Je voudrais qu'il nous soit expliqué en vertu de quel article du règlement les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 3 quater sont devenus sans objet, hier, en séance de cette nuit.
Je vous remercie par avance de votre réponse.
M. Guy Fischer. Nous y avons réfléchi cette nuit et nous pensons qu'il y a eu un abus de pouvoir !
M. Roland Muzeau. On peut toujours commettre une erreur, mais là...
M. Guy Fischer. En l'occurrence, nous avons été muselés et bâillonnés !
Mme la présidente. Madame Borvo, je ne présidais pas les débats, hier, lors de la séance de nuit. Je ne suis donc pas en mesure de vous apporter les éléments de réponse les plus pertinents. Dès que je les aurai, je vous fournirai une explication détaillée.
La parole est à M. Guy Fischer, pour un rappel au règlement.
M. Guy Fischer. Madame la présidente, nous avions travaillé en vue de l'examen de ces articles additionnels après l'article 3 quater et nous avions préparé des explications de vote.
Or, après l'examen de l'amendement n° 19 de la commission, les amendements suivants, notamment ceux de M Desessard, ont été déclarés sans objet. Sur le moment, nous avons fait confiance à la présidence. Après y avoir réfléchi à la fin de la séance, nous pensons que, contrairement à l'interprétation qui a été faite du règlement, nous aurions dû examiner ces différents amendements tendant à insérer des articles additionnels.
Mme la présidente. Monsieur Fischer, nous examinons ce qui s'est passé au cours de la séance de nuit pour vous apporter une réponse satisfaisante.
La parole est à M. François Marc, pour un rappel au règlement.
M. François Marc. Madame la présidente, je m'associe bien entendu aux propos de mon collègue Guy Fischer.
En outre, en me fondant sur l'article 48 de notre règlement relatif aux amendements, je souhaite obtenir des explications sur l'attitude de la présidence du Sénat et du service de la séance au cours de la séance de nuit d'hier concernant la non-discussion des amendements nos183 et 184. Ils auraient dû être examinés, car ils répondaient tout à fait au troisième alinéa de l'article 48, selon lequel « les amendements ne sont recevables que s'ils s'appliquent effectivement au texte qu'ils visent ou, s'agissant d'articles additionnels, s'ils ne sont pas dépourvus de tout lien avec l'objet du texte en discussion ».
Par conséquent, je voudrais que l'on nous apporte la preuve que les amendements en question étaient dépourvus de lien avec l'objet du texte et que l'on nous fournisse les précédents sur lesquels s'est appuyée la présidence pour déclarer que des amendements ne pouvaient être examinés.
Il nous apparaît curieux que des amendements, à notre sens tout à fait pertinents au regard de l'objet du texte, ne puissent être présentés et faire l'objet d'un examen. C'est pourquoi je souhaite obtenir des explications très précises sur ce point.
Mme la présidente. Monsieur Marc, je vous fais remarquer que, l'amendement n° 20 de la commission tendant à rédiger l'article 3 quinquies ayant été adopté, vos amendements nos183 et 184 devenaient sans objet.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ils ne pouvaient se raccrocher à un amendement tendant à rédiger l'article.
M. Alain Gournac, rapporteur de la commission des affaires sociales. Effectivement !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Christine Blandin. Ce rappel au règlement porte également sur l'article 48 de notre règlement.
Il y a déjà eu de tristes précédents et j'apprends que, cette nuit, des amendements ont à nouveau été déclarés sans objet.
Je vais donc appliquer le principe de précaution et signaler par avance à la commission des affaires sociales qu'au cas où le vote de l'amendement n° 48 de M. Gournac, à l'article 13, rendrait sans objet les autres amendements déposés sur cet article nous transformerions ces derniers en sous-amendements. J'invite par conséquent la commission des affaires sociales à regarder, par anticipation, leurs objets avec précision, afin qu'il ne nous soit pas objecté que la commission n'était pas informée !
Mme la présidente. Madame Blandin, cette méthode me semble être excellente et répondre en partie à la question posée. Je vous suggère de prendre contact avec le service de la séance, afin que vous puissiez adopter la meilleure façon de procéder.
Dans la discussion des articles, nous en étions parvenus aux articles additionnels après l'article 4 bis, dont nous poursuivons l'examen.
Articles additionnels après l'article 4 bis (suite)
Mme la présidente. L'amendement n° 695, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 117-11-1 du code du travail est abrogé.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Je vais m'efforcer de convaincre nos collègues de la nécessité d'abroger l'article L. 117-11-1 du code du travail, selon lequel « les apprentis ne sont pas pris en compte dans le calcul de l'effectif du personnel des entreprises dont ils relèvent pour l'application à ces entreprises des dispositions législatives ou réglementaires qui se réfèrent à une condition d'effectif minimum de salariés, exception faite de celles qui concernent la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles ».
Les observations que nous avons faites hier soir s'appliquent également à cet amendement. Il recouvre toutefois des motivations qui sont plus spécifiques et sur lesquelles je souhaite revenir.
Comme la discussion l'a montré, l'un des objectifs du présent projet de loi est de procéder à un nouvel essor de l'apprentissage, essor qui se fait au demeurant quelque peu attendre du fait, notamment, de la trop faible implication actuelle des plus grandes entreprises en ce domaine. En séance de nuit, nous avons déposé une série d'amendements destinés à instaurer des incitations, des contraintes et des modes de financement.
Mais ce qui ressort de l'analyse de la situation présente de l'apprentissage appelle à la réflexion.
Tout d'abord, nous avons eu l'occasion de le dire, le profil de l'apprenti évolue depuis plusieurs années. Les apprentis sont de moins en moins jeunes - aujourd'hui, 50 % d'entre eux ont dix-huit ans révolus au moment de leur entrée en contrat d'apprentissage - et préparent des diplômes de plus en plus élevés - la part des apprentis préparant un diplôme professionnel égal ou supérieur au baccalauréat progresse en effet de manière constante depuis plusieurs années.
Par conséquent, nous sommes de plus en plus éloignés du schéma des années soixante-dix à quatre-vingt-dix, où, de manière générale, l'apprentissage ne concernait que des jeunes en difficulté scolaire dès la fin de la cinquième de collège ou souhaitant s'engager dans la vie professionnelle une fois passé le brevet des collèges, anciennement le BEPC.
Pour autant, les apprentis sont encore aujourd'hui, pour l'essentiel, employés dans des entreprises de caractère artisanal où, le plus souvent, les effets de seuil ne jouent pour ainsi dire pas. Mais cela ne retire rien au fait que nous devons tenir compte de cette évolution de l'apprentissage et de la nature des apprentis.
Certes, de par leur statut d'adulte en formation, ils bénéficient du droit de désigner des représentants au sein du conseil de perfectionnement de leur centre de formation d'apprentis. Mais ils doivent également, nous semble-t-il, pouvoir être reconnus comme salariés à part entière dans l'entreprise où se déroule leur apprentissage, tout simplement et entre autres raisons parce qu'ils sont de plus en plus nombreux à être majeurs au moment de la signature du contrat.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement très important.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur de la commission des affaires sociales. L'article L. 117-11-1 du code du travail prévoit que les apprentis ne sont pas pris en compte dans le calcul de l'effectif du personnel pour l'application des dispositions posant une condition d'effectif minimum de salariés, exception faite de celles qui concernent la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles.
À l'heure où l'on met en oeuvre un vaste dispositif afin de développer l'apprentissage et où l'on crée des quotas d'apprentis dans les entreprises de plus de deux cent cinquante salariés, quel signal donnerait le Sénat s'il supprimait cette disposition adoptée en juillet 1985 ? Aussi, cher collègue, bien que l'amendement soit très important, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Nous avons déjà débattu hier soir de la question du seuil.
Je voudrais rappeler que les petites et moyennes entreprises, les entreprises de l'artisanat notamment, contribuent sept fois plus à l'apprentissage que les entreprises de plus de 250 salariés.
L'effet de seuil que vous évoquiez dans votre intervention, monsieur Muzeau, jouerait à partir de dix salariés. Or les entreprises de moins de dix salariés sont très nombreuses.
À partir de dix salariés, l'employeur est assujetti à la contribution versée au fonds national d'aide au logement et à la contribution à la formation professionnelle.
La mesure que vous proposez pourrait dissuader les employeurs d'embaucher et de signer des contrats d'apprentissage. Elle pourrait décourager l'engagement dans la formation en alternance et particulièrement dans l'apprentissage.
Mme la présidente. L'amendement n° 692, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 322-4-9 du code du travail est abrogé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Madame la présidente, nous persistons et signons. Je crois véritablement nécessaire, dans ce débat, de poser les questions qui s'imposent.
L'article L. 322-4-9 du code du travail porte sur la prise en compte des contrats d'avenir et des contrats d'accompagnement à l'emploi - contrats auxquels ont d'ailleurs recours les conseils généraux - dans la détermination des seuils d'effectifs retenue par le droit social dans un certain nombre de situations.
Permettez-moi d'insister, comme l'a fait M. Muzeau, sur les termes de l'article : « Les bénéficiaires des contrats visés aux articles L. 322-4-7 et L. 322-4-10, ainsi que des contrats institués à l'article L. 322-4-15, ne sont pas pris en compte, pendant toute la durée du contrat, dans le calcul de l'effectif du personnel des organismes dont ils relèvent pour l'application à ces organismes des dispositions législatives et réglementaires qui se réfèrent à une condition d'effectif minimum des salariés, exception faite de celles qui concernent la tarification des risques d'accidents du travail et des maladies professionnelles. »
Notre volonté est bien entendu totalement différente de celle que vient d'exprimer M. le ministre.
L'ensemble de ces dispositifs, destinés à faciliter l'emploi des personnes les plus vulnérables dans le cadre des collectivités territoriales et des associations, ne saurait priver ces salariés d'un certain nombre de droits.
L'abrogation d'une telle disposition constituerait un pas supplémentaire sur la voie d'une réelle appropriation de la citoyenneté et d'une reconnaissance en tant que citoyens à part entière de ces personnes, qui affrontent déjà toutes les difficultés liées à leur situation sociale. Il est nécessaire d'apporter une solution à ce problème.
Encore une fois, ne pas prendre en compte les personnes sous contrat d'avenir, contrat d'accompagnement à l'emploi, ou contrat d'insertion - revenu minimum d'activité, dans le calcul des seuils d'effectifs, est une manière de ne pas reconnaître leur présence dans le collectif de travail.
Or les personnes qui bénéficient de ces contrats font partie des catégories les plus modestes, elles habitent des quartiers populaires - ces quartiers qui ont fait l'objet de très vives préoccupations lors des événements de novembre 2005 - et il me semble que, même si elles relèvent de ces contrats, les considérer comme de véritables salariés leur rendrait leur dignité.
J'ajoute, madame la présidente, que nous demandons un scrutin public sur l'amendement n° 692.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Je pensais m'être expliqué tout à l'heure, mais je rappellerai que l'article L. 322-4-9 du code du travail prévoit que les bénéficiaires d'un contrat d'avenir ou d'un contrat d'accompagnement à l'emploi « ne sont pas pris en compte, pendant toute la durée du contrat, dans le calcul de l'effectif du personnel ». Cette disposition est une incitation à l'embauche.
Il faut tout mettre en oeuvre pour que le jeune puisse entrer dans l'entreprise : je le dirai sans relâche.
Abroger cet article, ce serait freiner l'embauche. Comme M. le président de la commission l'a dit, il est très important de conserver cette disposition.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Pour les raisons déjà évoquées par M. le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Ce sujet avait été abordé lors de la mise en place du contrat d'avenir et du contrat d'accompagnement à l'emploi.
C'est un sujet plus ancien encore, puisqu'il en avait été question lors du débat précédant l'adoption de la loi du 16 octobre 1997, relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes.
Notre approche de cette question ne s'est pas modifiée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Nous soutiendrons l'amendement qui vient d'être présenté.
M. le rapporteur a dit vouloir « tout mettre en oeuvre » pour ne pas décourager l'embauche.
M. le ministre a mentionné les contributions à différents organismes auxquelles sont soumis les employeurs, contributions assises sur le nombre de salariés des entreprises.
Dans une logique de création de bénéfices, on peut comprendre que demander de l'argent à une entreprise la décourage d'embaucher.
Il est en revanche un domaine où l'argument de M le rapporteur visant à « tout mettre en oeuvre » ne peut s'appliquer, c'est celui de la santé, de la médecine du travail et de l'inspection du travail.
Or, en tenant à l'écart les bénéficiaires des nouveaux contrats et les apprentis, nous affaiblissons aussi la vigilance qui doit s'exercer à l'égard de la santé des travailleurs.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 692.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 101 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 127 |
Contre | 200 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 693 rectifié, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 981-8 du code du travail est abrogé.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Cet amendement est la dernière d'une série de propositions du groupe CRC tendant à établir une égalité de droits entre les salariés. La question se pose ainsi lorsque les salariés sont employés sous des formes dérogatoires au droit commun du travail.
Les contrats de professionnalisation, notamment destinés aux jeunes, participent de ces formes dérogatoires.
Il n'est pas inutile de rappeler les termes de l'article L. 981-1 du code du travail, relatif aux contrats de professionnalisation.
« Les personnes âgées de seize à vingt-cinq ans révolus peuvent compléter leur formation initiale dans le cadre d'un contrat de professionnalisation. Le contrat de professionnalisation est également ouvert aux demandeurs d'emploi âgés de vingt-six ans et plus.
« Ces contrats de professionnalisation ont pour objet de permettre à leur bénéficiaire d'acquérir une des qualifications prévues à l'article L. 900-3 et de favoriser leur insertion ou leur réinsertion professionnelle. »
Dans le code du travail, figure la description des conditions générales de passation et de déroulement de ces contrats de professionnalisation, dont la durée s'avère dans les faits au moins équivalente à six mois et peut atteindre vingt-quatre mois.
On notera également que les entreprises d'accueil des personnes sous contrat de professionnalisation bénéficient d'une large exonération de cotisations sociales, prévue à l'article L. 981-6 du code du travail.
Cela ne justifie pas pleinement au demeurant les dispositions de l'article L. 981-8.
Dans les faits, les seuils d'effectifs s'appliquent donc à l'ensemble des contributions destinées à la formation continue ou à l'aide au logement, ou encore en ce qui concerne les élections de représentants du personnel.
Il est regrettable, compte tenu des objectifs auxquels répondait l'article L. 981-1 - favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle -, que cette insertion n'aille pas jusqu'à permettre l'exercice des droits afférents à la qualité de salarié à part entière.
Nous vous invitons donc à adopter cet amendement, qui tend à conférer davantage de dignité à la situation des jeunes sous contrat de professionnalisation, jeunes dont je rappellerai in fine qu'ils sont nombreux à jouir de leurs droits civiques dans la cité.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Les contrats de qualification, d'adaptation et d'orientation ont été remplacés, en application du décret du 15octobre 2004, par un dispositif unique, le contrat de professionnalisation, mentionné à l'article L. 981-1 du code du travail.
Ce dispositif est lié à la formation en alternance. Il a été mis en place sur l'initiative des partenaires sociaux, dans le cadre de l'accord national interprofessionnel du 20 septembre 2003.
L'objectif de ce contrat est de favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle, en permettant l'acquisition d'un diplôme, d'un titre ou d'une qualification professionnelle.
Ce contrat s'adresse non seulement aux jeunes âgés de seize ans à vingt-cinq ans sans qualification professionnelle ou souhaitant compléter leur formation initiale, mais également aux demandeurs d'emploi âgés de vingt-six ans et plus lorsqu'un parcours de professionnalisation est nécessaire pour favoriser leur retour vers l'emploi. Ce contrat est donc particulièrement utile.
En conséquence, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable sur cet amendement tendant à supprimer le dispositif d'exclusion du décompte visé à l'article L. 981-8 du code du travail.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous partageons l'analyse de la commission.
Je tiens à préciser que, comme toujours, il a fallu un temps d'appropriation pour le contrat de professionnalisation, issu du fruit d'un accord entre les partenaires sociaux et qui a remplacé l'ensemble des contrats existants ; ce fut l'année 2005. Or nous avons signé 90 000 contrats de professionnalisation au cours de l'année dernière. Il faut savoir que les anciens et les nouveaux contrats coexistaient.
Si nous comparons le mois de janvier 2005 avec celui de janvier 2006, le taux de croissance est de 31 %. Considérant le fait que nous avons signé 13 000 contrats de professionnalisation pour le seul mois de janvier 2006, notre objectif d'en signer 160 000 peut être atteint.
Mon propos nous ramène aux seuils de 1%, 2%, 3 % que nous avons évoqués hier. Je rappelle que l'obligation d'engagement des entreprises de plus de 250 salariés en matière de formation concerne aussi bien l'apprentissage que la professionnalisation. C'est pourquoi j'ai indiqué hier qu'il était tout à fait possible que 130 000 contrats supplémentaires soient signés dans les entreprises de plus de 250 salariés.
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 4 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le2° du II de l'article 1er de la loi n° 71-578 du 16 juillet 1971 sur la participation des employeurs au financement des premières formations technologiques et professionnelles est complété par les mots : « et les contributions aux dépenses d'équipement et de fonctionnement de centres de formation d'apprentis et de sections d'apprentissage ».
II. - Les dispositions du I ci-dessus s'appliquent à la taxe d'apprentissage due par les employeurs à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2005.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Gournac, rapporteur. La réforme de la taxe d'apprentissage et de ses modalités d'acquittement a contribué, dans le cadre de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, à assurer une meilleure allocation des ressources en taxe au profit de l'apprentissage.
Cet amendement vise à apporter des précisions rédactionnelles de nature à faciliter une allocation optimale des ressources au profit des centres de formation d'apprentis et des sections d'apprentissage.
Ces structures peuvent recevoir des ressources en taxe d'apprentissage, non seulement au titre de la fraction de cette taxe réservée à l'apprentissage, appelée « quota », mais aussi au titre du montant restant dû au-delà de cette fraction, ce que l'on appelle le « hors quota ».
Cet amendement confirme expressément la possibilité, pour les employeurs, de procéder à des dépenses libératoires de la taxe d'apprentissage sous la forme de subventions aux CFA et aux sections d'apprentissage au titre du « hors quota ».
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement établit clairement que les employeurs conservent la possibilité de procéder à des dépenses libératoires de la taxe d'apprentissage sous la forme de subventions aux CFA et aux sections d'apprentissage au titre du « hors quota ».
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement vise à permettre aux employeurs d'effectuer, au titre du « quota » et du « hors quota », des dépenses libératoires de la taxe d'apprentissage au profit des CFA de leur choix. Toutefois, nous craignons que l'adoption de cet amendement n'aboutisse à créer de fortes disparités entre les différents organismes de formation.
M. Guy Fischer. Au bénéfice de l'enseignement privé !
M. Jean-Pierre Godefroy. Quel rapport cette disposition a-t-elle avec l'égalité des chances ?
Pour cette raison, nous ne voterons pas cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 bis.
Article 4 ter
Après le premier alinéa de l'article L. 311-10 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les maisons de l'emploi mènent auprès des employeurs privés et publics des actions d'information et de sensibilisation aux phénomènes des discriminations à l'embauche et dans l'emploi. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l'article.
Mme Éliane Assassi. L'article 4 ter, adopté sans débat par l'Assemblée nationale en raison de l'application de l'article 49-3 de la Constitution, prévoit la participation des maisons de l'emploi à la lutte contre les discriminations à l'embauche et dans l'emploi.
Vous connaissez, monsieur le ministre, notre position de principe sur les maisons de l'emploi, disposition introduite dans le code du travail par le biais de la loi de programmation du 18 janvier 2005 pour la cohésion sociale ; je n'y reviendrai donc pas.
Avec le présent article, il s'agit d'ajouter aux attributions de ces structures une mission de sensibilisation des employeurs aux discriminations. Si l'objectif est certes louable en soi, j'estime qu'il relève, pour le moins, d'une belle déclaration d'intention.
En France, par leur aggravation et leur étendue, les discriminations sont une réalité à laquelle il faut avoir le courage de s'attaquer avec fermeté, et ce d'autant que cette situation a tendance à être structurelle. Trop de personnes - des jeunes, des moins jeunes, des salariés ou non, des citoyens français, des migrants, des femmes - sont victimes de discriminations qui touchent tous les domaines de la vie, qu'il s'agisse de l'accès à l'emploi, du monde du travail, du logement, de la formation, de l'école, de la santé ou encore des loisirs. Peu à peu, d'actes quotidiens en paroles publiques, les discriminations, les exclusions, les rejets de l'autre, fondés sur le sexe, l'origine ethnique, les convictions politiques ou religieuses, l'appartenance syndicale, le handicap, l'état de santé, l'âge ou l'orientation sexuelle, entraînent des dérives répréhensibles. Aujourd'hui, les discriminations continuent de gangrener notre société, menaçant la paix sociale.
Comment pourrait-il en être autrement quand le Gouvernement s'applique à faire passer à un rythme soutenu depuis 2002 des lois plus sécuritaires et antisociales les unes que les autres ?
Comment pourrait-il en être autrement quand le Gouvernement et sa majorité remettent en cause les droits sociaux, la retraite, la protection sociale, les services publics ?
Comment pourrait-il en être autrement quand le Gouvernement mène une politique sociale et économique qui privilégie la place de l'argent à celle de l'homme ?
Comment pourrait-il en être autrement quand les lois sont discriminantes, stigmatisantes, et désignent publiquement une catégorie de la population, suscitant ainsi des réactions qui mêlent la méfiance à l'égard d'autrui, le repli sur soi, voire le communautarisme qui fragilise la cohésion sociale ?
Dans ces conditions, il ne faut donc pas s'étonner que les discriminations et le rejet de l'autre s'aggravent en France.
Il est clair que la lutte contre les discriminations nécessite d'autres moyens que cet article « poudre aux yeux ».
Le décalage entre l'ampleur de ce phénomène et le faible nombre de suites judiciaires est symptomatique de l'insuffisante prise en considération des discriminations ethniques à l'embauche. Les condamnations pénales restent très rares, même si notre arsenal législatif est complet.
En raison du manque de temps, de formation, d'expérience et d'intérêt porté par les officiers de police judiciaire et par les procureurs à ces dossiers, on aboutit trop souvent à un classement sans suite par les parquets. N'est-il donc pas enfin temps de mobiliser notamment les inspecteurs du travail, les policiers et les magistrats pour combattre les discriminations, mais aussi et surtout de leur donner les moyens adéquats pour le faire ?
Telles sont les observations que je tenais à formuler sur cet article, qui n'est, pour résumer ma pensée, qu'un supplément d'âme. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Absolument !
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, sur l'article.
M. Roland Muzeau. L'article L. 311-10 du code du travail dispose que « des maisons de l'emploi, dont le ressort, adapté à la configuration des bassins d'emploi, ne peut excéder la région ou, en Corse, la collectivité territoriale, contribuent à la coordination des actions menées dans le cadre du service public de l'emploi et exercent des actions en matière de prévision des besoins de main-d'oeuvre et de reconversion des territoires, notamment en cas de restructurations ».
Les maisons de l'emploi sont organisées, si l'on peut dire. Ainsi, aux termes de l'article L. 311-10-1 du code du travail, « les maisons de l'emploi peuvent prendre la forme de groupements d'intérêt public. Ces groupements associent obligatoirement l'État, l'Agence nationale pour l'emploi, les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 et au moins une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale. Le groupement est administré par un conseil d'administration composé de représentants de ses membres constitutifs. Ce conseil élit son président en son sein. »
Pour mémoire, les dispositions de l'article L. 351-21 du code du travail concernent expressément les ASSEDIC.
Nous sommes en présence d'une extension de compétences, au demeurant toute relative, des maisons de l'emploi, qui constituent aujourd'hui, selon les éléments dont on dispose, cent vingt-six structures interinstitutionnelles réparties sur l'ensemble du territoire.
En l'espèce, il s'agit pour ces maisons de l'emploi de mener des actions d'information et de sensibilisation aux phénomènes de discrimination à l'embauche et dans l'emploi. Quelles formes cette sensibilisation peut-elle objectivement prendre ?
Sans préjuger le contenu des réunions d'information qui pourraient être organisées sur le sujet, force est de constater que cet article additionnel, qui, soulignons-le, n'a pas été débattu par l'Assemblée nationale, mais qui a été validé par l'application de l'article 49-3 de la Constitution, procède quelque peu du voeu pieux.
Vous voulez informer et sensibiliser les employeurs aux phénomènes de discrimination, monsieur le ministre. Mais, à qui fera-t-on croire qu'un employeur pratiquant de manière plus ou moins ouverte la discrimination répondra à l'invitation d'une maison de l'emploi ? Je doute qu'il ait la moindre envie de venir justifier en public son attitude.
De même, ceux qui seront informés et sensibilisés n'auront pas à reconnaître de telles pratiques. Tout au plus, seront-ils peut-être plus attentifs à quelques candidatures émanant de personnes souffrant de cette discrimination, sans que, cependant, leur stratégie d'embauche soit réellement modifiée.
À la vérité, l'information et la sensibilisation au sujet de ces questions est sans doute utile, mais c'est bien loin d'être nécessaire. Ce qui serait nécessaire, c'est de renforcer, pour une fois, les procédures, notamment juridiques, visant à pénaliser les pratiques discriminatoires. Le racisme, l'ostracisme, le refus d'embaucher tel ou tel demandeur d'emploi au motif de la consonance étrangère de son nom, de sa pigmentation, de son sexe - ne l'oublions jamais, les discriminations frappent singulièrement les femmes -, de sa supposée appartenance religieuse ou philosophique, se combattent avec des armes juridiques, avec des dispositions pénales qui soient à la hauteur du préjudice moral subi et des atteintes à la dignité dont souffrent les victimes.
Au demeurant, rien dans ce texte ne vient réellement combattre ces pratiques ; vous ne visez, monsieur le ministre, qu'à renforcer les pouvoirs de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, laquelle ne peut décemment pas se substituer à des procédures juridiques renforcées. Car il s'agit bien de cela, monsieur le ministre. Au-delà d'une insupportable atteinte à la dignité de la victime, la discrimination à l'embauche et dans l'emploi constitue une atteinte à l'ensemble du corps social. C'est en ce sens que nous devons renforcer les procédures juridiques qui sont offertes pour poursuivre les auteurs de discriminations.
Vous nous proposez donc ici, monsieur le ministre, une mesure sans portée normative.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Après la signature de la charte de la diversité par plus de 400 entreprises, les partenaires sociaux ont engagé depuis le 1er février dernier une négociation interprofessionnelle sur la diversité dans l'entreprise.
À l'issue de la première réunion, plusieurs objectifs ont été retenus : un objectif d'innovation, les différences devant être perçues sous cet aspect ; un objectif économique, car, compte tenu des évolutions démographiques, outre les aspects éthiques, l'intérêt partagé doit prévaloir ; et un objectif d'efficacité.
La deuxième grande réunion de cette négociation interprofessionnelle ayant lieu à la fin du mois de mars, nous aurons alors à en traduire certaines conclusions sur le plan législatif.
En outre, nous devrions parvenir à ouvrir, d'ici à la fin de cette année, deux cents maisons de l'emploi. Ce guichet unique servant d'accompagnement entre les composantes du service public de l'emploi devrait être plus efficace.
Le bureau de l'UNEDIC examine actuellement une convention tripartite qui devrait, d'ici à la fin de ce mois, nous permettre d'aller vers ce guichet unique, ce dossier unique, vers cet accompagnement unique du demandeur d'emploi, pas simplement sur le réseau informatique, mais aussi dans la formation des personnels, dans la gestion immobilière.
L'efficacité du service public est un sujet majeur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, je ne crois pas que le règlement autorise les sénateurs à demander la réserve d'un article. Néanmoins, j'estime qu'il serait logique que nous discutions ce dispositif lors de l'examen de l'article 19, qui vise précisément à renforcer les moyens de lutte contre les discriminations.
M. Alain Gournac, rapporteur. Cela viendra !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le cas échéant, nous pourrions avoir une vision plus large des différents dispositifs qu'il est possible de mettre en oeuvre pour s'attaquer aux discriminations à l'embauche.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Ces maisons de l'emploi encourent beaucoup de critiques sur leur mode de fonctionnement, sur la manière dont elles sont aidées. Leur création n'est pas récente ; elle ne date pas du gouvernement actuel. Citons les permanences d'accueil, d'information et d'orientation, les PAIO, les PLI.
M. Jean-Pierre Godefroy. Un certain nombre de collectivités locales ont, depuis une dizaine d'années, créé des maisons de l'emploi. À cet égard, la communauté urbaine de Cherbourg a eu un rôle pilote. Sa maison de l'emploi, qui fonctionne depuis plus de dix ans, a été implantée dans le quartier le plus sensible de l'agglomération, parce qu'il nous semblait utile qu'elle soit au plus près des administrés qui ont besoin d'aide.
Ne refaisons pas le débat que nous avons eu avec M. Borloo et vous-même sur ces maisons de l'emploi. Simplement, la proposition de Mme Borvo Cohen-Seat de réserver cet article et de renvoyer son examen à l'article 19 me paraît judicieuse.
En outre, il est difficile de s'opposer à l'article 4 ter dans la mesure où il n'est que déclaratif.
Plusieurs voix sur les travées du groupe CRC. Voilà !
M. Jean-Pierre Godefroy. Il serait nécessaire que les maisons de l'emploi fassent oeuvre de pédagogie en informant les chercheurs d'emploi de leurs droits, de l'interdiction qui est faite de les écarter d'un emploi en raison notamment de leurs convictions religieuses, de leur couleur de peau et en expliquant aux employeurs quels sont les interdits qui pèsent sur eux en la matière.
Aussi, nous ne nous opposerons pas à cet article 4 ter, qui, je le répète, est purement déclaratif. Il peut être intéressant de rappeler notamment aux employeurs qu'ils ne peuvent pas pratiquer de discrimination à l'embauche.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4 ter.
(L'article 4 ter est adopté.)
Article additionnel après l'article 4 ter
Mme la présidente. L'amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 4 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet avant le 31 décembre 2006 au Parlement un rapport, établi en concertation avec les partenaires sociaux, sur les moyens de promouvoir la diversité dans l'entreprise.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Gournac, rapporteur. Avant de présenter cet amendement, je voudrais dire à l'ensemble des mouvements de jeunes et d'étudiants que j'ai reçus lors de la préparation de ce texte que j'ai parfaitement entendu ce qu'ils m'ont dit sur la discrimination. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Certains collègues m'ont mis en garde, craignant que ces jeunes ne parlent avec moi que du CPE. Certes, ils m'ont donné leur avis sur le CPE, mais ils m'ont surtout parlé de la discrimination.
À cet égard, madame Assassi, la liste que vous avez citée tout à l'heure est incomplète. Elle ne mentionne pas l'adresse, qui est aussi à l'origine de discriminations.
On m'a rapporté qu'un jeune s'était porté deux fois candidat à un poste, en mentionnant une fois l'adresse correspondant au siège de l'organisation étudiante dont il est membre et une autre fois l'adresse correspondant à son domicile situé dans un quartier populaire.
M. Guy Fischer. Pour notre part, cela fait vingt ans que nous le savons !
M. Alain Gournac, rapporteur. Or il a reçu une réponse différente à chacune de ces deux lettres.
C'est inacceptable ! Vous n'avez rien fait. Qu'elle porte sur la couleur de peau, sur l'adresse et même sur la situation personnelle, la discrimination est inadmissible.
La France, notre cher pays, ne peut plus l'accepter. Nous devons lutter partout contre la discrimination, même dans nos communes.
Certes, la proposition que fait la commission des affaires sociales ne réglera pas tout. Mais je propose que le Gouvernement remette avant le 31 décembre 2006 au Parlement un rapport sur les moyens de promouvoir la diversité dans l'entreprise établi en concertation avec les partenaires sociaux et - pourquoi pas ? - avec tous ces jeunes que j'ai rencontrés et qui souffrent.
Cet article additionnel vise à encourager la négociation récemment entamée par les partenaires sociaux sur la diversité et à inciter le Gouvernement à réfléchir aux modalités de prise en compte de la question de la diversité.
Certains me critiquent. Mais il faut bien partir d'une base. À défaut, comment pouvoir dire au Sénat que les choses évoluent dans le bon sens ou, malheureusement, dans le mauvais sens ? À tout le moins, examinons ouvertement quelle est la situation aujourd'hui pour pouvoir l'améliorer. C'est impératif.
Ces discriminations sont insupportables et ne peuvent être acceptées. Il ne faudrait pas que les jeunes qui sont venus m'en entretenir pensent qu'ils ont perdu leur temps. Je les ai écoutés attentivement.
Cette proposition est un petit pas, qui, avec d'autres actions, permettra une prise de conscience et une évolution positive des choses.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer à la fois sur la charte de la diversité et sur la négociation entre les partenaires sociaux.
On parle de l'entreprise, mais elle n'est pas seule concernée par cet impératif de diversité.
M. Alain Gournac, rapporteur. L'administration aussi !
M. Jean-Luc Mélenchon. Et la politique !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La fonction publique et les collectivités territoriales doivent, elles aussi, veiller à cette diversité. Nous travaillons d'ailleurs à cette fin en liaison avec Christian Jacob. Il ne serait pas envisageable qu'on se pose ce genre de questions dans les seules entreprises.
Avec l'opération que nous menons actuellement visant à placer cinq mille jeunes diplômés issus de zones urbaines sensibles, je mesure combien est présente la discrimination dans la recherche d'un emploi, mais pas seulement dans les entreprises.
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Chers collègues, vous nous dites que le combat contre les discriminations dans l'entreprise est une priorité. Je suis heureuse d'apprendre que M. le rapporteur découvre l'ampleur des discriminations, y compris celles qui ont cours dans nos lieux de vie. Vivant cette situation depuis quarante-sept ans, je ne la découvre pas aujourd'hui. Je n'ai d'ailleurs pas attendu d'aller à la rencontre des jeunes pour prendre conscience du problème.
Monsieur le rapporteur, vous nous proposez que le Gouvernement remette au Parlement d'ici au 31 décembre un rapport sur les moyens de promouvoir la diversité dans l'entreprise. Les rapports sont certes utiles, mais je pense que les jeunes que vous avez reçus auraient souhaité que des actes forts soient pris en matière de lutte contre les discriminations à l'embauche dans les entreprises ?
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. M. le rapporteur vient d'indiquer qu'il s'agissait d'encourager la négociation engagée avec les partenaires sociaux. Bravo et enfin, serais-je tenté de dire ! Nous avons travaillé sans relâche sur deux aspects forts de ce texte, le parcours d'initiation aux métiers pour les jeunes dès quatorze ans et la possibilité de conclure un contrat d'apprentissage dès quinze ans. Cet article nous a beaucoup occupés.
Il en a été de même pour l'article visant à créer le CPE, introduit par le Gouvernement à l'Assemblée nationale au moyen d'un amendement. Nous avons dit tout le mal que nous en pensions.
Ces deux articles n'ont fait l'objet d'aucune concertation avec les partenaires sociaux. En revanche, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche ainsi que le conseil d'administration de la Caisse nationale d'allocations familiales ont émis l'un et l'autre un avis négatif, qui a été balayé d'un revers de main. La concertation avec les partenaires sociaux, c'est du flan !
Certains faits s'imposent à vous, monsieur le rapporteur. Par exemple, L'Humanité publie aujourd'hui les résultats d'un sondage réalisé par l'institut CSA. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Je vous rassure, le CSA n'est pas une filiale de L'Humanité ! (Sourires.) Achetez-le ! Vous y apprendrez plein de choses !
M. Josselin de Rohan. C'est un journal à la diffusion confidentielle ! Heureusement qu'il bénéficie de fonds publics ! (Sourires.)
M. Alain Gournac, rapporteur. Y a-t-il encore des gens pour l'acheter ?
M. Roland Muzeau. Bien sûr, et de plus en plus ! Prenez donc connaissance des résultats de ce sondage, lesquels éclaireront vos explications ultérieures !
Ainsi, 66 % des Français estiment que le CPE risque d'accroître la précarité du travail en France ; 63 % des Français pensent que le CPE ne permettra pas de réduire le chômage des jeunes ; 61 % des Français ont de la sympathie pour les manifestations annoncées pour le 7 mars ; 67 % des Français refusent l'extension de ce type de contrat à tous les salariés.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est normal qu'ils répondent cela s'ils ont lu L'Humanité auparavant ! Il est dangereux de lire ce journal ! (Sourires.)
M. Roland Muzeau. Monsieur About, je vous sens impatient. (Sourires.)
Désormais, M. le rapporteur a soif de concertation. Mais alors il ne fallait pas y déroger s'agissant de sujets qui fâchent aujourd'hui les Français et notre jeunesse.
Il est vrai que vous avez du mal avec la jeunesse. Cela a été vrai avec le contrat d'insertion professionnelle, le CIP, que M. Balladur a tenté de mettre en place et qu'il a dû retirer sous la pression. Cela est vrai avec le CPE, avec l'apprentissage à quatorze ans, voire à treize ans et neuf mois dans certains cas.
Comment voulez-vous que nous votions l'amendement n° 23 rectifié de la commission dans la mesure où il ne sert à rien ? Un rapport, c'est un voeu pieu qui ne fait ni de bien ni de mal.
On peut dire qu'une jurisprudence s'est instaurée en la matière, monsieur About. Lorsque nous réclamons un rapport, nous nous heurtons systématiquement à une fin de non-recevoir. C'est ce qui s'est passé pour le CNE, pour lequel nous n'avons toujours pas de rapport. Nous avons donc entamé la discussion du CPE sans connaître les dégâts éventuels du CNE, dont nous avons pourtant dénoncé les effets durant quelques heures. Nous agirons de la même manière pour le CPE, s'il est mis en oeuvre.
« Un rapport de plus ou de moins » dites-vous.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est sûr que cela réduit les risques !
M. Roland Muzeau. Il est vrai que, s'il faut attendre aussi longtemps certains décrets d'application,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je vous en donne acte.
M. Roland Muzeau. Monsieur About, il y a quelques semaines, vous établissiez un bilan concernant les lois qui ne sont pas mises en oeuvre, faute de décrets. Ces lois inappliquées se chiffrent par centaines, mais je suis incapable d'en citer le nombre exact, car il évolue tous les jours.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y a même des lois de gauche qui ne sont jamais sorties !
M. Roland Muzeau. Je suis entièrement d'accord avec vous, monsieur About.
Donc, un rapport de plus, un rapport de moins...
Mme la présidente. Mon cher collègue, veuillez conclure !
M. Roland Muzeau. ...si cela peut permettre aux partenaires sociaux de se réunir au moins une fois, c'est toujours ça... (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat rit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. Les propos de M. Muzeau reflètent assez bien ma pensée.
Pour ma part, je ne voudrais pas que l'on donne à ce rapport - dont l'intérêt n'est sans doute pas contestable - une dimension qui lui serait étrangère.
D'abord, ne l'oublions pas, c'est un gouvernement de gauche qui a proposé aux deux assemblées de pénaliser la discrimination raciale à l'embauche, y compris pour les stages. Il faut commencer par nous rendre ce qui doit nous revenir.
Ensuite, il faudrait mesurer les raisons pour lesquelles perdure cette discrimination - nous n'avons pas besoin d'une commission d'étude pour cela - et examiner les moyens que nous pourrions mettre en avant pour réprimer ces comportements odieux et attentatoires à ce qu'il y a de plus fondamental pour l'unité de notre république.
Mme la présidente. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.
Mme Bariza Khiari. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les rapports concernant la discrimination sont nombreux. J'en citerai deux : le rapport Bébéart et le rapport Fauroux.
Un rapport de plus, pourquoi pas ? Mais, à l'instar de Mme Borvo Cohen-Seat, j'estime que les questions concernant la discrimination sont suffisamment graves et importantes pour mériter une vision d'ensemble, au lieu d'être traitées par petits bouts, comme c'est le cas aujourd'hui. Il aurait donc été plus judicieux de les traiter lors de l'examen de l'article 19 relatif aux sanctions pécuniaires prononcées par la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE.
Je suis d'accord avec M. Muzeau pour dire que la concertation n'a pas à être à géométrie variable. Or, sur des sujets aussi importants, elle n'a pas eu lieu, en dépit des promesses qui avaient été faites de la part de membres éminents du Gouvernement, notamment M. Borloo.
Ce sujet me touche personnellement, puisque, comme Mme Assassi, je connais la discrimination depuis ma naissance.
Nous présenterons un amendement à l'article 19, qui aura pour objet une réunion annuelle des partenaires sociaux sur cette question. Nous considérons que le thème de la lutte contre les discriminations et de la promotion de l'égalité est une affaire au long cours et qu'il faut maintenir la pression. Les progrès doivent en effet être appréciés sur la durée, parce que la suppression des préjugés et des opinions préconçues est un travail très long.
J'espère que nous n'allons pas nous battre sur cet amendement : un rapport de plus, cela ne mange pas de pain,...
M. Michel Mercier. C'est sûr !
Mme Bariza Khiari. ...mais il y va aussi du respect de la démocratie et de la laïcité. Les défenseurs de ces valeurs très importantes dans notre société attendent que nous agissions, parce que des différences de traitement existent en fonction de la couleur de la peau, du patronyme et de l'endroit où l'on habite.
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. On nous a refusé tant de rapports dans le passé sur des problèmes que nous estimions essentiels ! Comme nous l'avons rappelé, il eût fallu attendre quelques mois de mise en oeuvre du contrat nouvelles embauches pour proposer le contrat première embauche. Mais ce qui dérange a été reporté aux calendes grecques...
Pour une fois que M. le rapporteur s'en préoccupe ! S'il a reçu de nombreuses associations d'étudiants, il nous semble pourtant qu'il s'agit d'une opération médiatique d'affichage,...
M. Alain Gournac, rapporteur. Médiatique ?
M. Guy Fischer. ... pour bien montrer qu'il lutte contre les discriminations - en l'occurrence, il s'agit de celles qui ont lieu dans l'entreprise - et pour la promotion de la diversité.
M. le ministre, quant à lui, met l'accent sur les quatre cents entreprises qui sont d'accord pour promouvoir la diversité.
Dans des villes comme la mienne, Vénissieux, nous avons tenté plusieurs expériences. Nous nous sommes aperçus que, dans les deux principales entreprises - Renault Trucks, leader mondial dans l'automobile et le poids lourd, et Bosch, célèbre entité où les 35 heures ont été remises en cause -, des discriminations existent envers certains salariés qui ont pourtant un niveau équivalent aux autres travailleurs.
Les discriminations à l'emploi touchent dans la plupart des cas des personnes qui, bien qu'ayant la nationalité française, sont originaires des départements et territoires d'outre-mer. Sont également visés, monsieur le ministre, les salariés d'origine magrébine, qui sont embauchés en contrat à durée déterminée et sont « virés » les premiers.
M. Roland Muzeau. Exactement !
M. Guy Fischer. Il faut déployer des efforts considérables pour que ces jeunes, qui ont une qualification et des savoirs, puissent être intégrés dans l'entreprise. Quand ils le sont, croyez-moi, la proportion avoisine 1 %, 10 ?.
Afin d'élargir le champ de la discussion, il faudrait examiner le problème des discriminations en ce qui concerne notamment le logement et la santé, et ce à l'article 19 du projet de loi.
Les médecins étrangers, qui sont de plus en plus nombreux à exercer en France, expriment des revendications, car ils subissent de fortes disparités de salaires alors que leur présence est indispensable pour les services d'urgence, notamment la nuit et les week-ends. C'est une véritable exploitation ! (M. Jean-Luc Mélenchon approuve. - M. Jacques Baudot s'exclame.)
Et que dire des grandes entreprises publiques ? Je pense à la SNCF ou à EDF. Si certains efforts ont été faits, on n'y retrouve pas, comme dans certains corps de métiers, la représentation de la diversité française, l'image de ce qu'est notre pays et de ce qu'il sera de plus en plus. C'est l'un des points qui méritaient d'être débattus.
Nous ne sommes pas dupes, monsieur le rapporteur. Cet amendement n° 23 rectifié va être adopté, mais le problème méritera d'être approfondi, notamment lorsque nous serons parvenus à l'article 19. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Gournac, rapporteur. Je voudrais dire immédiatement à M. Fischer qu'il m'a blessé. Me dire que je fais de l'affichage quand j'évoque la discrimination ! J'en suis scandalisé !
M. Roland Muzeau. Mais si !
M. Alain Gournac, rapporteur. C'est mal me connaître, monsieur Fischer. Vous avez le droit de dire tout ce que vous voulez. Ici, on est libre. Mais vous n'avez pas le droit de dire que je fais de l'affichage. La lutte contre la discrimination n'est ni de droite ni de gauche, elle est nécessaire. Vous dites que je n'ai rien fait, monsieur Muzeau,...
M. Roland Muzeau. Moi, je n'ai rien dit !
M. Alain Gournac, rapporteur. Vous ne suivez pas le texte, monsieur Muzeau, puisque vous affirmez que je me contente de demander des rapports. Vous n'avez pas lu l'article additionnel après l'article 3 par lequel j'ai amélioré le dispositif de lutte contre les discriminations exercées à l'occasion du recrutement des apprentis.
M. Roland Muzeau. Je parle de l'amendement n° 23 rectifié. Ne mélangez pas les genres !
M. Alain Gournac, rapporteur. Et moi je vous dis que j'ai déjà renforcé la lutte contre les discriminations en ce qui concerne les apprentis, monsieur Muzeau. Vous n'êtes pas propriétaire de ce sujet.
M. Roland Muzeau. Je ne suis propriétaire de rien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La propriété, c'est le vol !
M. Alain Gournac, rapporteur. La preuve, si vous étiez propriétaire, on serait dans une meilleure situation aujourd'hui ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 ter.
Article 4 quater
Dans la première phrase du troisième alinéa de l'article L. 620-10 du code du travail, après les mots : « y compris les travailleurs temporaires, », sont insérés les mots : « et à l'exclusion des salariés intervenant dans l'entreprise en exécution d'un contrat de sous-traitance, ».
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, sur l'article.
M. Roland Muzeau. Cet article a été introduit à l'Assemblée nationale avec l'accord du Gouvernement, après l'utilisation du 49-3. Nous allons répéter souvent cette phrase, puisque seulement trois articles ont été discutés à l'Assemblée nationale.
Cela apparaît encore une fois d'autant plus insupportable que le même amendement avait déjà été introduit par la majorité au moment de l'examen du projet de loi relatif au retour à l'emploi, il y a quelques semaines à peine.
Cet article tend donc à exclure les travailleurs intervenant dans une entreprise en exécution d'un contrat de sous-traitance du décompte des effectifs.
Le rapport de la commission des affaires sociales rappelle que ce décompte des effectifs dans les entreprises est pris en compte en vue des élections professionnelles. Mais le calcul des effectifs intervient dans d'autres domaines, qui se trouvent ici passés sous silence.
En effet, L'article L. 620-10 du code du travail fixe les modalités de calcul des effectifs pour la prise en compte de tous les effets de seuil, dont on sait le rôle qu'ils jouent dans le droit social.
Cela concerne effectivement la représentation des personnels - existence des institutions, nombre d'élus, prérogatives -, mais cela touche aussi les dispositions en matière de santé et de sécurité au travail.
Or on sait aujourd'hui à quel point, dans les entreprises, la constitution des comités d'hygiène et de sécurité, les CHSCT, est la plupart du temps difficile, sauf dans les très grandes entreprises où la représentation syndicale est puissante.
Monsieur le ministre, nous avons eu l'occasion d'insister de nombreuses fois, tant en commission que lors des auditions menées par la mission d'information sur l'amiante, sur l'importance primordiale de ces CHSCT et sur les difficultés majeures dans lesquelles se retrouvaient les salariés des entreprises sous-traitantes, qui sont maintenant légions dans les grandes entreprises. Il y a même des sous-traitants de sous-traitants. On les appelle des entreprises de deuxième ou de troisième main. (M. Jean-Pierre Godefroy approuve.) Le contrat n'est pas exécuté par la personne qui l'a signé. C'est cela la réalité.
Par ailleurs, ce calcul des effectifs a des effets moins connus, mais tout aussi importants, tels que l'emploi des personnes handicapées, sujet qui nous est cher.
Cet article aura donc des conséquences loin d'être négligeables sur les différents domaines que je viens d'évoquer. L'importance des pratiques d'externalisation est telle que la disposition proposée peut bouleverser le droit du travail, en particulier sur les grands sites industriels.
Aujourd'hui, en effet, de nombreuses activités sont presque exclusivement externalisées. C'est le cas, par exemple, des services de sécurité. Si vous en connaissez encore qui portent le même nom que l'entreprise qui les emploie, citez-les-moi, car ils doivent se compter sur les doigts d'une main ! Il en est de même des services de nettoyage.
On dit que les entreprises ne gardent aujourd'hui que leur coeur de métier. Mais ce coeur se rétrécit de jour en jour !
Ces catégories d'emplois rassemblent bien évidemment des salariés peu qualifiés, qui maîtrisent souvent mal leurs droits, qui ne sont pas épaulés et n'ont pas d'organisation syndicale.
Il serait donc dangereux et particulièrement inacceptable que, par cet article, le droit à la représentation du personnel soit une fois encore réduit.
Par ailleurs, il est tout de même assez cynique de la part de ce gouvernement de glisser une telle disposition, qui va clairement vers une réduction des droits des travailleurs, dans un projet de loi sur l'égalité des chances ! C'est fort tout de même !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vrai !
M. Roland Muzeau. De quelle égalité parle-t-on, lorsque l'on s'apprête à réduire la représentation du personnel, que l'on est sur le point de réduire la possibilité pour les handicapés d'accéder à l'entreprise, ou encore lorsque l'on met en cause indirectement le droit des travailleurs à la sécurité et à la santé dans leur entreprise et dans celle dans laquelle ils effectuent leur mission ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. À la suite de mon collègue Roland Muzeau, je rappelle que l'article 4 quater du projet de loi a été introduit après le déclenchement à l'Assemblée nationale de la procédure de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Le Gouvernement doit donc en assumer toute la responsabilité ! (M. le ministre délégué fait un signe d'assentiment.). Ce n'est pas sans conséquences, monsieur le ministre ! Vous nous en expliquerez certainement les raisons !
Le Gouvernement et sa majorité sont décidément très attentifs à la représentation des salariés. Mais ce n'est pas, bien entendu, au sens où nous l'estimons nécessaire, c'est-à-dire pour favoriser le dialogue et le respect des droits des salariés.
Depuis toujours, c'est une obsession récurrente des gouvernements et des parlementaires de droite que de rehausser ou contourner les seuils d'effectifs. Il a même fallu récemment, monsieur le ministre, que le Conseil d'Etat rappelle au Gouvernement que l'on ne peut exclure les jeunes de moins de vingt-six ans du décompte des effectifs, sauf à commettre une discrimination par l'âge. Nous avions alerté le Gouvernement en lui demandant de ne pas introduire une telle disposition. Mais il s'est obstiné, et le Conseil d'Etat a dû le rappeler à l'ordre !
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Jean-Pierre Godefroy. Il reste cependant quelques « niches » à combattre, qui n'ont pas échappé à la vigilance de nos collègues députés et sénateurs de droite.
L'une d'elles, que nous avons entrevue récemment lors de l'examen du texte pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs de bénéficiaires de minima sociaux, concernait précisément le décompte dans l'entreprise d'accueil des salariés d'une entreprise sous-traitante. Elle a fait l'objet d'un amendement proposé par notre collègue M. de Montesquiou, mais qui n'a pu être introduit dans le projet de loi puisqu'il s'agissait manifestement d'un cavalier.
Mais ce n'était que partie remise, car voilà le même sujet qui réapparaît dans le projet de loi pour l'égalité des chances.
J'entendrai volontiers la réponse de M. le ministre à la question suivante : quel est le rapport entre le thème de l'égalité des chances et le fait de s'assurer, en modifiant la loi, que des salariés ne seront pas comptés deux fois dans l'entreprise pour éviter qu'ils ne votent deux fois ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Demandez l'irrecevabilité !
M. Jean-Pierre Godefroy. S'agit-il de l'égalité des chances entre les employeurs ? En réalité, c'est à nouveau un cavalier, que nous ne manquerons pas de dénoncer comme tel.
Quant au fond, le problème est beaucoup plus grave : il concerne l'utilisation de la sous-traitance par des entreprises donneuses d'ordre pour leur éviter l'embauche directe de salariés. C'est le cas, notamment, dans les grandes entreprises, comme France Telecom, ou certains groupes du secteur du bâtiment et des travaux publics, où les salariés bénéficient encore d'un statut ou, au moins, de CDI.
Pour ne pas embaucher directement en CDI ces salariés - vous allez donner un coup de main aux employeurs avec le CPE et le CNE - qui auraient ainsi très rapidement droit à une certaine sécurité de l'emploi, les directions de ces entreprises contractent avec des sociétés sous-traitantes qu'elles ont elles-mêmes contribué à créer, parfois avec des cadres issus de l'entreprise.
Cela leur permet aussi de maintenir leurs effectifs en deçà du fameux seuil qu'ils entendent contourner.
Les salariés des sous-traitants travaillent continûment sur les mêmes chantiers, dans les mêmes bureaux et les mêmes ateliers que les personnels de l'entreprise.
M. Jean-Luc Mélenchon. Eh oui !
M. Jean-Pierre Godefroy. Mais, étant salariés d'une autre entreprise, souvent même sous contrat précaire, ils ne sont pas rémunérés de la même façon, n'ont pas droit aux mêmes avantages que le personnel de l'entreprise donneuse d'ordre et voient peser sur eux en permanence la menace du licenciement et du non-renouvellement du contrat précaire.
C'est un détournement de fait du droit du travail. Et le plus choquant est que l'on voit se développer ces pratiques dans les groupes nationaux que vous finissez de privatiser à marche forcée. Les salariés de Gaz de France vont bientôt être confrontés à ce problème.
Nous condamnons avec fermeté l'utilisation abusive de la sous-traitance, détournée de sa finalité première.
Roland Muzeau l'a rappelé à juste raison, la sous-traitance implique souvent une deuxième sous-traitance et une troisième sous-traitance ; les travailleurs de ces secteurs échappent ainsi à tout contrôle de leur protection.
M. Roland Muzeau. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, vous nous parlez d'égalité des chances, mais, avec cet article, vous allez encore aggraver l'inégalité des travailleurs ! Il n'a donc véritablement pas sa place dans le présent texte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. L'amendement n° 697, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Cet amendement vise à supprimer l'article 4 quater.
Au cours de son intervention, mon ami et collègue Roland Muzeau a rappelé en quoi cet article met en cause, directement et indirectement, un certain nombre de droits des travailleurs.
Une telle disposition, au regard du recours croissant des entreprises à la sous-traitance, aura des conséquences très graves dans les entreprises, qui perdront, de fait, le droit à élire des représentants ou encore le droit à disposer d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, CHSCT, ou enfin d'intégrer des personnes handicapées dans le monde de l'entreprise.
Ce sont là de nouvelles discriminations qui sont tout à fait inacceptables et, je pense, de nature à provoquer l'indignation de M. le rapporteur !
Une telle mesure n'a donc certainement pas à être prise par le biais d'un cavalier législatif. Elle devrait, au contraire, faire l'objet de discussions préalables avec, ou plutôt, entre les partenaires sociaux. N'était-ce pas d'ailleurs le principe posé par la loi Fillon du 4 mai 2004, dans sa partie consacrée au dialogue social ? Mais là encore, entre le discours et les actes...
Par ailleurs, on peut se demander en quoi l'exclusion de salariés dans la prise en compte des effectifs constitue un pas vers l'égalité des chances ? D'un point de vue purement juridique, non seulement cette mesure va à l'encontre de toute la jurisprudence existante sur le sujet, mais elle risque, en outre, de conduire à des situations aberrantes.
Plus précisément, en modifiant l'article L. 620-10 du code du travail, comme le prévoit le présent projet de loi, vous vous mettez en contradiction avec d'autres dispositions de ce même code.
Par exemple, l'article L. 422-1, dans son deuxième alinéa, dispose : « Les salariés d'entreprises extérieures qui, dans l'exercice de leur activité, ne se trouvent pas placés sous la subordination directe de l'entreprise utilisatrice peuvent faire présenter leurs réclamations individuelles et collectives concernant celles des conditions d'exécution du travail qui relèvent du chef d'établissement par les délégués du personnel de cet établissement dans les conditions fixées au présent titre. »
Ainsi, les délégués qui seraient amenés à présenter les revendications de certains personnels disposeraient de moyens affaiblis, puisque ces personnels ne seraient plus comptabilisés pour la détermination du nombre et des prérogatives des délégués !
Enfin, la mesure proposée revient à annuler la jurisprudence de la Cour de cassation qui, depuis 2000, interprète très clairement la portée de la phrase « mis à disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure ». Je vous livre un court résumé des principaux arrêts ayant marqué cette construction.
L'arrêt n° 98-60440 du 28 mars 2000 indique qu'il importe peu que les salariés en question soient ou non sous la subordination de l'entreprise utilisatrice.
L'arrêt n° 00-60252 du 27 novembre 2001 indique qu'il importe peu que les entreprises extérieures réalisent « des prestations pour un travail réalisé en toute indépendance, avec des moyens humains et matériels utilisés sous leur exclusive responsabilité ».
L'arrêt n° 03-60125 du 26 mai 2004 soutient la prise en compte de tous les salariés mis à disposition participant aux activités nécessaires au fonctionnement de l'entreprise utilisatrice, cette participation n'étant pas « restreinte au seul métier de l'entreprise ou à la seule activité principale de celle-ci ».
Enfin, l'arrêt n° 05-60124 du 10 janvier 2006 apporte la confirmation des précédents arrêts dans un cas où les entreprises extérieures intervenaient « uniquement dans le cadre de contrats de sous-traitance dont l'objet se limitait à la réalisation d'une prestation ».
C'est pourquoi, contre ces nouvelles discriminations, je vous demande, mes chers collègues, de voter pour la suppression de cet article.
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Chacun comprendra aisément que la commission émette un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je souhaite répondre à un certain nombre de questions qui ont été posées lors des interventions sur l'article ainsi que sur l'amendement, et indiquer à M. Godefroy pourquoi le Gouvernement a introduit cette disposition dans un texte pour l'égalité des chances.
Tout d'abord, contrairement à ce qui a été affirmé, il ne s'agit pas de limiter le droit à la représentation des salariés. Il s'agit de clarifier un certain nombre de points liés à des jurisprudences qui ne vont pas toutes dans le même sens.
Jusqu'en mars 2000, la Cour de cassation considérait que, parmi les salariés mis à disposition, seuls devaient être comptabilisés ceux entretenant un lien de subordination avec l'entreprise utilisatrice.
Une autre jurisprudence estime, au contraire, que les entreprises doivent comptabiliser tous les salariés participant à leur processus de travail.
Cette jurisprudence pose un certain nombre de problèmes dans la mesure où les effectifs deviennent difficiles à établir pour l'entreprise d'accueil. Elle induit, en outre, une insécurité qui donne lieu à une recrudescence de contentieux.
Comment, en effet, identifier précisément les salariés extérieurs, sachant que leur nombre et leurs conditions de présence dans l'entreprise peuvent être variables et, parfois, difficiles à appréhender ? C'est pour mettre fin à cette source d'ambiguïté que ce texte vous est proposé.
Au surplus, il est difficilement imaginable d'être électeur dans les instances représentatives de deux entreprises.
Vous n'avez pas mentionné le travail illégal dans le cadre de la sous-traitance, qui constitue pourtant une source majeure de contournement de l'ordre public social. Le Gouvernement en a fait le quatrième objectif du plan national de lutte contre le travail illégal pour les années 2006 et 2007, notamment au travers des contrôles des bonnes pratiques en matière de sous-traitance.
Vous avez évoqué plus particulièrement la santé et la sécurité au travail.
À cet égard, je vous renvoie, en premier lieu, à la loi de juillet 2003, relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, loi qui, je le rappelle au passage, a été votée par la majorité et qui prévoit, notamment, une formation d'accueil dispensée par l'entreprise utilisatrice au bénéfice des salariés des entreprises extérieures sur les risques spécifiques de leur intervention, ainsi que l'institution d'un CHSCT commun pour les sites dangereux. De la sorte, un lien est bien établi entre donneur d'ordre et sous-traitant.
Je vous renvoie, en second lieu, au décret d'octobre 2005, qui a été pris à la suite d'un rapport que j'ai demandé à l'inspection générale des affaires sociales - le premier, du reste, que j'ai demandé en arrivant au ministère - sur la responsabilité sociale entre donneur d'ordre et sous-traitant. Il prévoit l'obligation pour le donneur d'ordre de vérifier, tous les six mois, que son sous-traitant a satisfait aux règles d'ordre public social, à ses obligations de déclarations sociales, de déclarations fiscales, d'inscription aux différents registres, etc.
En outre, nous avons introduit dans le code des marchés publics des mesures destinées à favoriser ceux qui respectent réellement les bonnes pratiques qu'il contient.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement ; il est clair qu'une partie des préoccupations exprimées ce matin ont largement été prises en compte.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Cet amendement exige vraiment une explication de vote, surtout après l'intervention de M. le ministre.
Il me semble que nous pourrions être tous d'accord au moins sur ma première question : quoi de mieux que d'essayer de savoir à quoi aboutirait l'application de l'article 4 quater si notre assemblée choisissait de l'adopter ? Quand le législateur s'interroge sur les effets de ses décisions, il fait oeuvre utile.
Je vais donc tenter de vous éclairer.
La modification que vise à introduire cet article va totalement à l'inverse de la jurisprudence établie par la Cour de cassation en la matière et à l'inverse des jugements rendus lors des demandes d'annulation des protocoles électoraux qui excluaient de fait des élections professionnelles les salariés mis à la disposition d'entreprises extérieures. C'est là un fait !
Les syndicats CGT d'Airbus France des quatre établissements de Méaulte, Nantes, Saint-Nazaire et Toulouse ont demandé que tous les salariés sous-traitants et intérimaires travaillant in situ chez Airbus soient comptabilisés dans les effectifs et soient inclus dans le corps électoral pour les élections professionnelles des délégués du personnel.
Des recours ont donc été déposés devant les tribunaux d'instance pour que les protocoles électoraux précisent que le décompte des effectifs inclut les intérimaires et sous-traitants, que les informations pertinentes sur la détermination des effectifs et des collèges sont fournis aux organisations syndicales, que les intérimaires et sous-traitants sont inclus dans le corps électoral. Dans les quatre établissements d'Airbus, la CGT a gagné devant le tribunal et a obtenu l'annulation des protocoles électoraux.
Il n'est peut-être pas inutile de vous donner lecture de quelques extraits de ces jugements, en particulier de celui du tribunal d'instance de Péronne :
« Dit que les salariés mis à disposition sur le site par des entreprises extérieures et qui participent à son fonctionnement doivent être pris en compte dans l'effectif au prorata de leur temps de présence.
« Dit que la société Airbus doit communiquer aux organisations syndicales sur leur demande les documents nécessaires à la détermination des effectifs incluant les salariés visés au paragraphe précédent.
« Dit que ces salariés seront inclus dans l'électorat des délégués du personnel pour autant qu'ils remplissent les conditions de l'article L. 423-7 du code du travail. »
Les syndicats CGT Airbus France ont donc interpellé par courrier tous les députés, tous les sénateurs - chacun d'entre vous l'a reçu -, pour leur demander de supprimer du projet de loi pour l'égalité des chances l'article 4 quater, aux termes duquel les salariés sous-traitants intervenant chez un donneur d'ordre doivent être exclus de la communauté de travail de cette même entreprise.
Les sous-traitants, souvent, n'ont pas ou ont peu de représentation syndicale et sont dispersés sur plusieurs chantiers. Pouvoir être reconnus au sein du donneur d'ordre était donc d'un intérêt direct pour les salariés qui interviennent régulièrement et de façon continue au sein de l'entreprise cliente.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ah non ! Ils ne peuvent pas voter deux fois !
M. Roland Muzeau. Les syndicats CGT d'Airbus France rappellent donc que cet article 4 quater doit impérativement être supprimé du projet de loi.
Voilà un avis qui vient du terrain, un avis concret, et mon explication de vote ne fait que retracer l'analyse faite par des gens de terrain, confirmée et approuvée par les tribunaux, qu'il me semblait intéressant de porter à la connaissance du Sénat.
Je souhaite que cet appel des quatre syndicats CGT d'Airbus soit entendu, parce qu'il vaut pour toutes les entreprises de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 697.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 102 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 126 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. de Montesquiou.
L'amendement n° 518 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
À l'article L. 423-7 et à l'article L. 433-4 du code du travail, après les mots : « Sont électeurs », le mot : « les » est remplacé par les mots : « dans l'entreprise ses ».
La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Les conditions requises pour avoir la qualité d'électeur lors des élections des délégués du personnel sont fixées à l'article L. 423-7 du code du travail : « Sont électeurs les salariés des deux sexes âgés de seize ans accomplis, ayant travaillé trois mois au moins dans l'entreprise et n'ayant encouru aucune des condamnations prévues par les articles L. 5 et L. 6 du code électoral. »
Depuis quelques mois, il a été jugé à plusieurs reprises que les salariés intervenant dans l'entreprise en exécution d'un contrat de sous-traitance devaient être inscrits comme électeurs pour les élections des délégués du personnel se déroulant dans l'entreprise d'accueil au motif que l'article L. 423-7 précité ne subordonnait pas la qualité d'électeur à l'existence d'un contrat de travail mais n'exigeait que l'exercice d'un travail dans l'entreprise pendant une durée minimale.
Cette nouvelle interprétation aboutit à inscrire sur les listes électorales de l'entreprise d'accueil les salariés des entreprises de nettoyage, d'entretien industriel des machines, de restauration, de gardiennage, alors que les intéressés ne partagent aucune communauté d'intérêts avec les salariés de l'entreprise utilisatrice et qu'ils sont déjà électeurs pour les élections des délégués du personnel dans l'entreprise de sous-traitance. Cette situation entraîne dans l'entreprise d'accueil une modification du corps électoral susceptible d'affecter l'équilibre de la représentation du personnel.
Le présent amendement a pour objet de remédier à cette situation. Il s'appuie sur le bon sens et la justice : un homme - ou une femme -, une voix.
J'ajoute que, pour des raisons de cohérence rédactionnelle, il convient également de modifier l'article L. 433-4 du code du travail fixant la composition de l'électorat pour l'élection des membres du comité d'entreprise.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour présenter l'amendement n° 518.
M. Philippe Nogrix. Bien que le groupe du RDSE et le groupe de l'Union centriste-UDF ne fassent pas appel à une entreprise extérieure pour traiter leurs amendements, (sourires) il se trouve que la proposition qui vient d'être défendue est exactement la même, au mot pour mot, que celle que je vais vous présenter.
M. Guy Fischer. Elles ont la même origine, ce sont les patrons qui vous les ont fournies ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Nogrix. Monsieur Fischer, arrêtez de critiquer les patrons à tout bout de champ ! On le sait, vous ne les aimez pas ! Ils vous ont tout de même permis d'être là !
M. Dominique Braye. Vous, c'est la CGT qui vous les fournit !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tiens ! Voilà longtemps qu'on ne l'avait pas entendu !
M. Dominique Braye. Staliniens !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dès qu'il est là, les staliniens reviennent !
Mme Éliane Assassi. Je vais vous apprendre une bonne nouvelle : Staline est mort !
M. Philippe Nogrix. Madame Assassi, j'ai des choses à vous dire !
Mme Éliane Assassi. Mais je vous écoute !
M. Philippe Nogrix. Oui, mais faites respecter le silence dans vos travées : vous savez que je déteste parler dans le brouhaha ! Le seul bruit que je supporte, c'est celui du vent du large.
Notre collègue M. Godefroy évoquait le travail externalisé - c'est effectivement là le noeud du problème -, et nous sommes d'accord sur l'analyse qu'il a présentée de ses raisons d'être.
La première, c'est que, lorsque les entreprises ont un métier qu'elles savent faire, des travailleurs qui ont été formés pour cela, une équipe qui a décidé de le faire au mieux, de plus en plus souvent, ces entreprises veulent rester dans ce coeur de métier et préfèrent, pour les travaux qui lui sont étrangers, faire appel à d'autres qui savent mieux s'en acquitter. C'est ce que, en politique, on appelle la subsidiarité.
La seconde est liée à la complexité de notre législation et de notre code du travail, qui conduit les entreprises à ne pas vouloir franchir certains seuils d'effectifs. Passer de 49 à 50 salariés, par exemple, fait changer de catégorie et entraîne de nombreuses conséquences.
C'est peut-être sur ce point qu'il nous faudrait réfléchir, puisque c'est notre rôle que d'essayer de trouver les solutions. Or ces solutions doivent être négociées, et nous savons bien que les négociations, si nous avons, les uns et les autres, le courage de les engager, seront difficiles, complexes, longues et progressives. Mais, plus on les retarde, plus on retarde la mise en oeuvre de la solution ! Alors, montrons-nous, tous, raisonnables dans nos critiques à l'encontre des entreprises, petites ou grandes, et réservés quant aux solutions que les salariés attendent.
Pour moi, l'important est de relancer l'emploi. Il nous faut donc, mes chers collègues, c'est vrai, travailler et non pas critiquer : travailler sur le devenir des seuils, travailler sur les contraintes imposées aux entreprises, travailler sur les véritables formations professionnalisantes, travailler pour que les jeunes retrouvent le sens de l'effort (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)...
M. Dominique Braye. Il a raison ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. Il n'y a pas que vous qui travailliez !
M. Dominique Braye. Vous avez cassé la jeunesse !
M. Jean-Luc Mélenchon. Est-il déjà arrivé que le sens de l'effort soit perdu ?
M. Philippe Nogrix. Mais oui, monsieur Mélenchon ! On ne peut pas indéfiniment encourager les jeunes à s'amuser en allant manifester ou en étant dans les rues ! Il y a d'autres choses à faire pour eux que de leur apprendre seulement cela ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.) La vie, ce n'est pas cela ! La vie, c'est le travail, c'est la rigueur ! La vie, c'est essayer de trouver les meilleures conditions pour éduquer ses enfants et former une famille. Et c'est pour cette raison qu'il nous faut travailler aussi sur le sens de la persévérance, sur le sens du travail effectué, sur la valeur du travail effectué, qui est la reconnaissance de la personnalité même. Je crois que c'est la seule voie qui aboutira à l'égalité des chances. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Dominique Braye. Tout à fait !
M. Philippe Nogrix. Car si tous les jeunes respectaient ces valeurs-là, je pense qu'ils seraient reconnus par la société, qui serait fière de les accueillir. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. À force de vouloir donner des leçons, on en reçoit !
Les amendements n°s 6 et 118 sont des amendements de cohérence avec le texte adopté à l'Assemblée nationale...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Adopté, mais pas discuté à l'Assemblée nationale !
M. Alain Gournac, rapporteur. ...et ils le font même avancer. La commission émet donc un avis favorable.
M. Guy Fischer. Ce n'est pas étonnant !
M. Alain Gournac, rapporteur. Ah non, c'est lassant ! Je vous invite à venir à côté de moi, madame la présidente, vous allez entendre : et bla bla bla et bla bla bla tout le temps, c'est infernal ! Mais laissez-nous travailler ! Les communistes sont en forme, je peux le dire ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous avons déjà eu des échanges sur ce point et ces amendements vont nous permettre d'être totalement cohérents avec l'analyse que nous faisons sur l'ensemble de l'article et sur l'amendement précédent.
En fait, il n'est pas possible que certains continuent à être électeur dans deux entreprises à la fois. C'est aussi simple que cela : un homme, une voix, une femme, une voix. Ces amendements rétablissent une cohérence entre la notion d'effectifs et l'électorat ; il ne s'agit nullement d'une atteinte au droit à la représentation des salariés.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis de sagesse favorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Nous sommes en total désaccord avec l'analyse qui a été faite.
M. Dominique Braye. Nous sommes donc sur la bonne voie !
M. Guy Fischer. Nous ne sommes pas surpris du dépôt de ces deux amendements. Nous avons effectué des recherches, ces amendements ont déjà été présentés dans le cadre du projet de loi pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux. Ils apparaissent ici une nouvelle fois sous prétexte d'égalité des chances, mais en fait ils visent à combattre les décisions des tribunaux : nous ne nous y trompons pas.
Compte tenu des réactions enregistrées tout à l'heure et de celles que nous constatons maintenant, nous en avons la preuve : ces amendements émanent des fédérations patronales (Ah ! sur les travées de l'UMP.)...
M. Roland Muzeau. Exactement !
M. Guy Fischer. ...du nettoiement et du secteur de la restauration, par exemple,...
M. Josselin de Rohan. Quelle horreur ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. ...et je pense que MM. de Montesquiou et Mercier sont, en l'occurrence, les représentants de ces fédérations.
M. Josselin de Rohan. Vampires !
M. Dominique Braye. Les affreux patrons !
M. Josselin de Rohan. C'est Mme Parisot qui est là !
M. Guy Fischer. Monsieur de Rohan, vous savez fort bien que c'est un débat qui mérite d'être approfondi. La représentation des salariés est contestée par le Gouvernement et nos collègues de la majorité. Mais ces fédérations sont certainement celles dans lesquelles le droit du travail est le plus difficile à être appliqué, où les conditions de travail sont les plus terribles, parce que l'embauche se fait à l'heure, sur le carreau, très tôt le matin et très tard le soir.
Bien souvent, dans le domaine du nettoiement, ce sont des femmes qui travaillent ; elles saisissent les quelques heures que l'on veut bien leur donner. Et c'est précisément dans ces secteurs où il est le plus difficile d'être représenté, que l'on conteste la représentation syndicale ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous m'avez vu réagir un peu violemment avec certains de mes collègues en vous écoutant tout à l'heure expliquer vos raisons, et ce pour deux motifs.
Le premier tient aux conditions particulières du travail dans les branches d'activités dont il est question. Ce sont les branches dans lesquelles l'amplitude du travail est la plus grande. Je vous prie de vous renseigner sur ce sujet. C'est là que vous trouvez des gens qui travaillent quatre heures, qui ont une pause de trois à quatre heures pendant laquelle ils ne peuvent rentrer chez eux. Ils reprennent le travail pour trois ou quatre heures et ainsi de suite. Par conséquent, c'est dans les secteurs les plus durs, dans lesquels le travail est le plus rude à vivre, où aucun d'entre nous ici, je nous mets au défi, ne supporterait de travailler deux ou trois jours, que l'on va encore donner des facilités à ceux qui tiennent le manche.
Supposons - vous voyez que je suis de bonne compagnie - que l'on suive vos raisonnements. Chaque fois qu'il y a une règle protectrice, on la discuterait. Chaque fois qu'il y a une norme qui est non pas favorable aux travailleurs, mais qui leur permet d'être partie prenante au moins d'un dialogue, on la mettrait en cause. Allez voir qui travaille ! J'ai parlé du nettoyage, je pourrais parler de la restauration. Avec tous les égards que j'ai pour ces métiers et pour ceux qui organisent ces entreprises, je vous dis : allez voir comment cela se passe ! Faites-nous la démonstration une seule fois que l'une des « contraintes » que nous aurons levée ait une seule fois créé un seul poste de travail ou bien que, par miracle, elle permette à ce poste de travail d'être occupé plus humainement. Faites-nous une seule fois la démonstration de cela !
Je me rappelle comment, pendant des mois, vous nous avez expliqué - relayant la propagande du MEDEF - que, si l'on supprimait l'autorisation administrative de licenciement, on créerait 400 000 emplois dans le pays. Nous n'en avons pas vu un seul après que l'autorisation administrative de licenciement a été supprimée.
M. Josselin de Rohan. Pourquoi ne l'avez-vous pas rétablie ?
M. Jean-Luc Mélenchon. J'achève pour ne pas dépasser mon temps de parole.
M. Alain Gournac, rapporteur. Vous étiez au gouvernement, vous n'avez rien rétabli.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est autre chose. Ne venez pas nous demander pourquoi nous n'avons pas fait la révolution socialiste puisque vous n'en voulez pas. Alors, s'il vous plaît, mettez cela de côté. (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.)
Nous parlons là du sort concret des personnes qui travaillent aujourd'hui et qui auront à pâtir davantage demain de leurs conditions de travail après que vous aurez voté ces dispositions.
J'achève mon propos car le but du groupe socialiste n'est pas de faire de l'obstruction (nouvelles exclamations sur les mêmes travées) et la parole est répartie entre nous suivant les thèmes.
J'ai réagi lorsque vous avez dit qu'il fallait que la jeunesse retrouve le goût de l'effort.
À votre avis, quand a-t-elle cessé de l'avoir ?
M. Philippe Nogrix. En 1981 !
M. Dominique Braye. Quand vous êtes arrivés au pouvoir ! Vous avez tout détruit, tout cassé dans notre société !
M. Jean-Luc Mélenchon. De qui parlez-vous ? Des 350 000 apprentis qui se lèvent tous les matins pour aller au boulot, des 693 000 jeunes qui vont dans l'enseignement professionnel, des milliers de jeunes qui sont au travail et qui n'aspirent qu'à travailler mieux ? (M. Dominique Braye vocifère.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Faites-le taire ! Vous n'êtes pas obligés de hurler pareillement pendant que je parle. Vous m'obligez à monter la voix.
M. Dominique Braye. Il n'y a plus de patrons, donc plus d'emplois, plus d'entreprises !
M. Jean-Luc Mélenchon. On vous connaît, vous avez une mentalité de négriers ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
La jeunesse de France est courageuse. Elle travaille, elle en est mal rémunérée, mal traitée ! Si seulement les jeunes pouvaient vous voir en train de dire qu'ils manquent du goût de l'effort alors qu'ils s'épuisent à la tâche véritablement ! Tenez-vous le pour dit : jamais ces propos ne seront prononcés sans qu'on y réponde.
M. Dominique Braye. Vous tenez des discours populistes et vous vivez comme des bourgeois !
Mme Hélène Luc. Connaissez-vous le nombre d'étudiants qui sont obligés de travailler pour poursuivre leurs études ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. J'ai travaillé une nuit sur deux pendant toutes mes études de médecine !
Mme la présidente. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Les communistes ont perdu la classe ouvrière : elle ne vote plus pour eux !
Mme la présidente. Monsieur Braye, je vous prie de laisser s'exprimer M de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Les descriptions qu'a faites M. Mélenchon traduisent hélas ! quelquefois la réalité.
Mais je voudrais répondre à M. Fischer. Je ne suis stipendié par personne. Je ne m'appuie sur aucune idéologie. Je m'appuie sur le bon sens et sur la justice de la démocratie : un homme, une voix, une femme, une voix. C'est aussi simple que cela.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Tout d'abord, je tiens à dire qu'il est inacceptable d'entendre stigmatiser les jeunes de cette façon-là.
Tous les jeunes que j'ai embauchés, tous les jeunes que je côtoie, quand ils ont du travail, ils y vont et ils n'y vont pas du tout à reculons !
M. Dominique Braye. Venez dans les banlieues ! Vous verrez ! Ça suffit, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Merci, madame la marquise !
Mme la présidente. Monsieur Braye, s'il vous plaît !
M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la présidente, il est impossible de se faire entendre et de se faire comprendre sur un champ de foire. Le Parlement n'est pas un champ de foire, monsieur Braye !
M. Dominique Braye. C'est ce que vous en avez fait !
M. Jean-Pierre Godefroy. Mais c'est vous qui hurlez en permanence !
Mme Éliane Assassi. Si vous voulez la parole, demandez le micro, monsieur Braye ?
M. Dominique Braye. C'est insupportable d'entendre les absurdités que vous proférez !
Mme la présidente. Monsieur Braye, vous n'avez pas la parole. Poursuivez, monsieur Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur Braye, vous êtes en train de hurler tout seul dans votre coin. Écoutez-vous : vous aurez honte quand vous relirez le procès-verbal.
M. Dominique Braye. La vérité mérite d'être dite même si elle dérange et surtout si elle dérange !
Mme la présidente. Monsieur Braye, laissez parler M. Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Chacun appréciera : on voit bien qui essaie de comprendre les problèmes de notre jeunesse et le problème des banlieues.
J'en reviens à mon explication de vote.
Vous devriez faire très attention, parce que les entreprises de sous-traitance peuvent sous-traiter à une deuxième, voire à une troisième entreprise.
Mes chers collègues, nous avons créé ici au Sénat une mission d'information sur l'amiante. Nous avons vu qu'une des grandes difficultés pour reconstituer les droits des salariés, notamment de ceux qui travaillent dans le secteur du nettoiement, venait de cette cascade d'employeurs, de ces emplois qui venaient en première ou en deuxième sous-traitance et qui étaient souvent occupés par des femmes. Ainsi, on les a envoyées dans des ateliers où il y avait de l'amiante. Ensuite, comme les entreprises de sous-traitance ont disparu, elles ne peuvent plus reconstituer leur carrière. Or ces femmes-là, ont désamianté sans protection.
M. Roland Muzeau. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Godefroy. Et ce sont ces travailleurs que vous risquez de fragiliser !
Ce n'est pas l'égalité des chances, c'est l'inégalité des chances que vous voulez instaurer. C'est pourquoi la mission commune d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante, présidée par M. Jean-Marie Vanlerenberghe, dont le rapporteur était M. Gérard Dériot et dont j'étais le rapporteur adjoint, a préconisé, pour faire valoir les droits auprès des Caisses régionales d'assurance maladie, les CRAM, non pas que les entreprises soient reconnues, parce que l'on sait très bien que c'est très difficile pour des raisons financières, mais qu'il y ait un recours individuel avec reconstitution du parcours du salarié.
Je le répète, ce sont ces salariés que vous voulez fragiliser, ceux que l'on met en difficulté tous les jours, qui font le sale boulot, dans des endroits où la sécurité n'est pas obligatoirement assurée.
En fait, monsieur le ministre, vous renforcez l'inégalité de traitement des travailleurs. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.
M. Philippe Nogrix. Comment se fait-il qu'un article qui n'a pour but que de rétablir une cohérence entre deux textes soulève tant de protestations ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Parce qu'il y a de l'argent derrière !
M. Alain Gournac, rapporteur. Les comités d'entreprises et tout le reste !
M. Philippe Nogrix. Serait-ce parce que tout d'un coup notre collègue Jean-Luc Mélenchon - qui est un spécialiste - veut nous faire une grande démonstration de son talent que l'on ne peut qu'admirer et de sa haine pour l'entreprise et de son amour pour les jeunes ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le pouvoir et l'argent !
M. Philippe Nogrix. Je ne peux pas laisser dire, par exemple, que rien n'est fait pour les entreprises sous-traitantes.
Nous vivons dans une société qui est régulée, notamment, par ce que l'on appelle le « contrat de travail ». Le contrat de travail, c'est un papier qui décrit certaines conditions et au bas duquel il y a deux signatures.
Les entreprises de sous-traitance sont des entreprises qui, elles aussi, ont l'obligation d'appliquer le code du travail.
Quel était l'objet de ces deux amendements ? Ils visaient simplement à préciser que les syndicalistes multicartes qui essaiment dans sept ou huit entreprises ne votent pas sept ou huit fois, qu'ils ne votent qu'une fois pour exprimer ce que leur syndicat leur demande. Nous n'avons pas essayé de diminuer les droits des uns ou des autres.
Monsieur Mélenchon, ne tombez pas dans la caricature, même si les gens adorent les caricatures ! C'est sympathique... sauf, bien entendu, quand cela provoque des problèmes internationaux...
Quand j'ai parlé de redonner aux jeunes le sens de certaines valeurs - je n'ai pas dit qu'ils les avaient forcément perdues - c'était simplement pour qu'ils soient plus à l'aise dans la société dans laquelle ils vivent et pour qu'ils ne se sentent pas malheureux alors qu'ils ne le sont pas. C'est le principe des enfants gâtés d'être malheureux quand ils ne le sont pas.
Mme Catherine Tasca. Ils ne sont pas gâtés !
M. Philippe Nogrix. Monsieur Mélenchon, qui a créé pour la première fois dans notre République un ministère du temps libre ? (Rires sur les travées de l'UMP.) Était-ce absolument nécessaire, un ministère du temps libre ! Voilà un message fort !
Mme Hélène Luc. Quand cela a été fait, c'était très bien !
M. Guy Fischer. Il y a la moitié des Français qui ne peuvent pas prendre de vacances !
M. Philippe Nogrix. Quels sont les gouvernements qui ont estimé qu'il fallait limiter le temps de travail à trente-cinq heures ? C'était aussi un message fort, alors que ce qui intéresse les jeunes et les travailleurs, c'est de travailler et de gagner leur vie !
Tout à l'heure, vous avez parlé des négriers. Mais, mon cher collègue, vous avez, comme nombre d'entre nous, participé à presque tous les débats. Rappelez-vous donc les amendements du groupe UC-UDF visant à ramener de deux ans à six mois la durée du CPE, cherchant à revenir sur certaines dispositions qui nous paraissaient excessives -je pense à la non-motivation de la rupture du contrat ! Aussi, au lieu de mettre les gens dans des catégories, efforcez-vous d'avoir une vue un peu plus large !
En fait, les jeunes ont besoin d'un message d'exemplarité. Nous devrions, nous-mêmes, leur donner un meilleur exemple, déjà en travaillant dans la rigueur et non dans le brouhaha. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mes chers collègues, si vous voulez montrer aux jeunes toute l'attention que vous leur portez, il serait de bon ton, d'une part, de ne pas stigmatiser ceux qui sont issus des milieux populaires - car c'est bien de ceux-là qu'il s'agit et non pas de vos propres enfants - et, d'autre part, de retirer cet article qui n'a pas sa place dans un projet de loi pour l'égalité des chances ou, en tout cas, dans un texte que vous intitulez ainsi parce que vous voulez donner l'impression que vous traitez de l'égalité des chances.
Mes chers collègues, vous devriez aussi veiller à l'image que vous voulez donner de nos débats, M. Braye notamment.
Lorsque le Gouvernement a déposé son amendement visant à créer le CPE, pas moins de trois ministres ont justifié cette décision en donnant l'exemple de leurs propres enfants qui ne parvenaient pas à obtenir un contrat de travail.
Il faut savoir ce que vous voulez : faire passer l'image d'un gouvernement qui veut donner un emploi à tous les jeunes en supprimant les discriminations existantes, ou bien - et c'est la réalité - exprimer le sentiment que les jeunes des milieux populaires sont des feignants.
M. Alain Gournac, rapporteur. Continuons le combat !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Savez-vous que la moitié de la population ne peut pas partir en vacances ? Il serait intéressant de parler du temps libre, car je présume que vous êtes tous des défenseurs acharnés du tourisme.
M. Dominique Braye. Donnez du travail aux jeunes, ils pourront partir !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Baudot, pour explication de vote.
M. Jacques Baudot. Depuis le début des débats, j'ai eu le temps de lire Fier d'être français, dont l'auteur, Max Gallo, est un de vos amis, monsieur Mélenchon.
M. Alain Milon. Un ancien ami !
M. Jacques Baudot. Oui, un ancien ami, car il a changé. Je suis d'ailleurs persuadé que, si M. Mélenchon lisait ce livre, il ne s'y retrouverait pas.
Aujourd'hui, c'est moi qui ne suis pas fier d'être Français lorsque j'entends certaines interventions, notamment celles de ses anciens amis. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la présidente, cela mérite une suspension de séance. De tels propos sont intolérables. M. Baudot ferait mieux de lire le projet de loi !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote.
MM. Alain Gournac, rapporteur et Josselin de Rohan. Oh ! Il en manquait un !
M. Jean-François Voguet. Permettez-moi de revenir sur ce qui vient d'être dit à propos de la « jeunesse gâtée » de notre pays et sur la nécessité de lui redonner le goût de l'effort, d'autant que, dans le cadre du présent projet de loi on parle plutôt des enfants ou des jeunes qui sont en difficultés sociales.
Je suis maire d'une ville de la banlieue parisienne qui n'a pas connu de violences urbaines, dans laquelle est implantée une ZUP de 6 500 logements : je sais donc de quoi je parle.
Je passe beaucoup de temps à rencontrer des jeunes, dont la plupart sont issus des milieux populaires. Tous connaissent des conditions de vie très difficiles, et nombre d'entre eux sont marqués par l'échec scolaire. Il faut savoir ce que signifie l'échec scolaire pour un enfant de CM 1 ou de CM 2 ; c'est insupportable ! Il vit l'exclusion, y compris dans sa classe. Cela le conduit souvent à se singulariser, à se faire remarquer, mais pas toujours de la meilleure façon.
Cette situation insupportable est presque exclusivement liée au milieu social de l'enfant, à ses conditions de vie, de logement, à la situation économique de ses parents.
La plupart des jeunes qui viennent dans nos permanences veulent un travail. Ils nous disent : je suis prêt à prendre n'importe quoi, une place de cantonnier par exemple ; vous verrez, je ferai mes preuves. Tous nous demandent, voire nous supplient de leur trouver un emploi. Et on les retrouve souvent dans le milieu associatif, se dévouant pour les autres.
Ces jeunes ont besoin de considération, de respect, mais surtout d'une formation et d'un travail. Il faut repenser l'école. Il faut aussi que les entreprises acceptent de les prendre dans des formations en alternance, pour leur permettre d'obtenir un CAP par exemple. (M. Philippe Nogrix applaudit.)
En effet, bien souvent, ils trouvent une place dans une école, mais pas de formation en entreprise. Ils nous demandent de les aider à trouver une entreprise qui accepte de les former, car ils veulent faire leurs preuves. En cas d'échec, certains sont tentés de se marginaliser. C'est insupportable, car la cause de cette situation tient à leur condition sociale, à la situation économique de leur famille. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. Philippe Nogrix applaudit également.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 et 518.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 103 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 320 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 161 |
Pour l'adoption | 201 |
Contre | 119 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote sur l'article 4 quater.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cette explication de vote va me permettre de répondre à ce qui apparaît, à maints égards, comme une mise en cause. Je sais que le règlement prévoit que les mises en cause font l'objet d'une réponse à l'issue du débat, mais notre discussion y gagnera en cohérence.
Monsieur Nogrix, je tiens à vous dire, aussi calmement que je peux le faire, que je n'ai pas de haine pour l'entreprise.
M. Dominique Braye. C'est déjà bien de le dire !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je ne confonds pas l'entreprise avec le métier. Le métier c'est une chose, l'entreprise en est une autre : c'est un organisme complexe de production. Je ne peux toutefois pas vous cacher qu'en écoutant certains d'entre vous j'entends l'expression de la haine de classe. (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Dominique Braye. C'est vous qui l'avez la haine !
M. Jean-Luc Mélenchon. Il faut vraiment être étrangement né pour penser que la jeunesse de France est faite d'enfants gâtés. Que nous soyons parents ou grands-parents, nous savons tous que la jeune génération, contrairement aux précédentes, vit avec le poids de l'incertitude du lendemain et dans une morosité qui tient à la difficulté de ses conditions d'existence.
Certains parlementaires, qui ont souvent l'épiderme si délicat dès qu'il s'agit de la psychologie du patronat, de celui-ci ou de celle-là, devraient avoir la même sensibilité pour les jeunes. Veillons à ce que l'on ne puisse dire d'aucune manière que nous avons à un quelconque instant oublié que l'essentiel de la jeunesse de France s'arc-boute au travail !
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, mais permettez-moi de le répéter, 400 000 étudiants travaillent et sont classés sous le seuil de pauvreté. Et 693 000 jeunes se rendent tous les matins dans leur lycée professionnel après avoir travaillé la veille, souvent de nuit, dans une entreprise pour payer leurs études. (Mme Catherine Tasca approuve.) Ils sont des milliers de jeunes encore dans ces situations, je ne saurais en faire la liste.
C'est tout ce que j'ai voulu dire. Je n'ai pas voulu adresser un reproche particulier à l'un ou l'autre d'entre vous. Je dis seulement que cette situation doit être prise en considération et que l'on ne peut pas nous objecter que les jeunes sont des enfants gâtés.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas l'objet de l'article.
M. Jean-Luc Mélenchon. Un collègue, croyant bien faire, a évoqué 1981 et le temps libre. Je l'invite à nous respecter. Aussi longtemps qu'il restera un souffle de gauche et de socialisme, nous nous battrons pour le temps libre. Une des luttes historiques du mouvement ouvrier porte sur la diminution du temps de travail, sur l'augmentation du temps libre, du temps non contraint, du temps choisi, du temps pendant lequel la personne humaine se construit en tant que personne et réclame à l'existence le minimum de ce qu'elle peut réclamer : sa part de bonheur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.
Mme Catherine Tasca. La passion qui marque notre discussion ce matin est très révélatrice des enjeux de notre débat et de la nature du présent projet de loi.
J'ai bien entendu les arguments qui ont été avancés, par la droite de cet hémicycle et par le Gouvernement, sur une disposition somme toute limitée. Il s'agissait d'un discours global qui ne me paraît pas compatible avec le mandat qui est le nôtre.
Dois-je rappeler que nous représentons toutes les générations ? Et c'est parce que ce texte vise, comme on vise une cible, la jeunesse de ce pays que nous sommes amenés à résister comme nous le faisons depuis des heures.
Monsieur Braye, les quartiers difficiles de nos communes, je les connais aussi bien que vous...
M. Dominique Braye. Sûrement pas !
Mme Catherine Tasca. ... et depuis plus longtemps.
Je veux dire avec force que certains jeunes connaissent la dureté du travail bien plus tôt que vous ne l'avez connue.
Jean-Luc Mélenchon vient de rappeler qu'une grande partie des élèves des lycées professionnels arrivent le matin fatigués et, de l'aveu même de leurs enseignants, au bord du sommeil. Ils éprouvent de grandes difficultés pour suivre les cours qui leur sont prodigués, parce qu'ils sont obligés, pour apporter une ressource complémentaire à leur foyer, de travailler aux heures où la plupart de nos enfants dorment dans des logements bien plus confortables que les leurs.
Beaucoup d'entre vous n'ont pas été confrontés au monde du travail dès le plus jeune âge.
M. Josselin de Rohan. Vous non plus !
Mme Catherine Tasca. Vous devez bien mesurer que le procès que vous intentez à la jeunesse de ce pays, vous l'intentez à vous-mêmes, parce que chaque génération est responsable du passage de relais aux générations suivantes.
Si vous jetez un regard si critique - que je ne partage pas - sur le comportement des jeunes d'aujourd'hui, prenez-vous en à vous-mêmes car ces jeunes sont tels que leurs parents les ont faits. En tout cas, vos discours ne leur rendront pas la confiance nécessaire dans leur avenir, qui est aussi le nôtre !
Rappelez-vous un peu plus souvent que notre mandat dans cette assemblée nous impose aussi de représenter toutes les générations de ce pays ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote.
M. Josselin de Rohan. Nous devons à la jeunesse de ne pas chercher à l'embrigader...
Mme Catherine Tasca. Absolument !
M. Josselin de Rohan. ... ni de prétendre détenir le monopole de sa défense !
Or je viens d'entendre sur ces travées des propos qui m'incitent à penser que, de la même manière que vous avez revendiqué, il y a un certain temps, le monopole du coeur (murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.), vous revendiquez aussi le monopole de la défense de la jeunesse.
Vous n'êtes pas propriétaires de la jeunesse de France ! (Exclamations sur les mêmes travées.) Pas plus que nous d'ailleurs !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je suis heureuse de vous l'entendre dire !
M. Josselin de Rohan. La jeunesse est diverse et doit être respectée dans sa diversité ! Croyez-moi, un très grand nombre de jeunes ne partagent pas vos convictions ni votre vision de la société !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En tout cas, 67 % des Français ne partagent pas votre avis !
M. Josselin de Rohan. Nous sommes tous, les uns et les autres, confrontés aux mêmes problèmes. Je suis moi-même père de famille, mes enfants sont sur le marché du travail...
M. Alain Gournac, rapporteur. Les miens aussi !
M. Josselin de Rohan. ... et ils cherchent du travail, tout comme vos enfants. Soyez un peu respectueux de la situation de tous !
Que voulions-nous dire tout à l'heure, quand nous parlions de réhabiliter le travail dans la société ? Depuis un certain nombre d'années, il devient effectivement difficile de trouver du travail. La génération actuelle a certainement infiniment moins de chance que ma génération, parce qu'il était assez facile de trouver du travail dans les années 1960, alors qu'aujourd'hui cela devient très difficile.
Je fais miens les propos qu'a tenus Jean-Luc Mélenchon. Nous vivons dans une société d'insécurité, et je comprends très bien que les jeunes aspirent à trouver une certaine sécurité.
Mais voilà, nous sommes le pays - ou l'un des pays - d'Europe où l'on travaille le moins (protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC), ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est faux !
M. Josselin de Rohan. ... où l'on entre le plus tard sur le marché du travail et où l'on en sort le plus tôt. Nous sommes l'un des pays où, malheureusement, l'adéquation entre le système d'enseignement et de formation et la demande des entreprises est la moins bonne ou l'une des moins bonnes !
M. Voguet l'a d'ailleurs reconnu, en déclarant qu'il fallait réformer notre enseignement professionnel pour faire en sorte que nos centres de formation donnent à l'économie française la main-d'oeuvre et les cadres dont elle a besoin. Vous ne pouvez pas nier non plus qu'un très grand nombre de métiers ne trouvent pas preneurs aujourd'hui.
Je voudrais revenir aussi sur votre action passée, parce que c'est cela qui nous distingue. Vous avez créé dans ce pays une culture du non-travail (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) ...
Mais si ! Avec les trente-cinq heures, vous avez donné le sentiment que le partage du travail était la solution ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Vous avez tué nos hôpitaux !
M. Josselin de Rohan. Vous avez pénalisé les entreprises françaises. Voilà l'erreur majeure du gouvernement Jospin...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mme Royal elle-même l'a dit !
M. Josselin de Rohan. Si, aujourd'hui, les jeunes - comme d'ailleurs beaucoup d'adultes et même de seniors - ne trouvent pas de travail, c'est parce que vous avez pénalisé les entreprises françaises, qui ne peuvent plus offrir à tous le travail auquel ils aspirent !
De grâce, soyez un peu modestes et ne prétendez surtout pas annexer la jeunesse, elle ne vous appartient pas ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Personne n'a le monopole du coeur, de la jeunesse ou autre. Dans cette assemblée, chaque loi, chaque sujet, donne lieu à débat...
M. Alain Gournac. On n'a encore examiné que huit amendements dans la matinée !
M. David Assouline. Chacun dit ce qu'il a à dire et, ce matin, nous avons tous perçu que la tonalité dominante de vos propos tendait à attribuer les difficultés du moment à un certain état d'esprit de la jeunesse.
Bien sûr, vous le dites d'une manière détournée, en invoquant « la culture du non-travail », du « moindre effort », du « je veux tout sans rien faire ». Tout n'est pas faux d'ailleurs ! Mais qui accusez-vous ?
M. Dominique Braye. Vous !
M. Henri de Raincourt. Les parents !
M. David Assouline. Puisque vous en appelez tout le temps au civisme, laissez-moi vous faire part de mon expérience personnelle. Avant d'entrer dans cette assemblée, il y a encore dix-huit mois, j'étais enseignant dans une ZEP, et ce depuis dix-huit ans.
Lorsque je dispensais un cours d'une heure d'éducation civique, pendant lequel j'essayais de dire en quoi la solidarité, la fraternité, l'égalité sont des valeurs fondamentales qu'il faut respecter dans les comportements quotidiens, je savais que je devais combattre les effets de vingt-deux heures de télévision ingurgitées par chaque élève. Quelles étaient les valeurs véhiculées majoritairement par ces programmes ? L'argent facile, la loi du plus fort, voire le sexisme !
Quand donnerez-vous avec la même véhémence des leçons d'éducation civique à ceux qui dirigent ces grandes chaînes de télévision ? À ces grands groupes de communication qui acceptent, au jour le jour, que le corps enseignant éduque notre jeunesse à armes inégales ! Les enseignants peuvent bien s'évertuer, ils ne feront jamais le poids face à ce matraquage !
Quand donc mettrez-vous en accusation ceux qui dominent idéologiquement la société et véhiculent ces valeurs qui empoisonnent chaque jour le corps social ? Quand vous le ferez, vous pourrez être entendus. Quant aux familles en difficulté et aux enseignants qui doivent, au quotidien, éduquer et donner le goût de l'effort, ils font déjà tout ce qu'ils peuvent.
Laissez-moi vous dire que, si personne ne détient le monopole de la jeunesse, celle-ci a le sentiment que vous ne lui faites pas de cadeau !
M. Alain Gournac. Nous n'avons discuté que huit amendements ce matin et il est déjà midi et demi !
M. David Assouline. Elle a le sentiment que, lorsque vous faites une loi pour l'égalité des chances, vous prenez en compte les difficultés du patronat pour embaucher, sans vous préoccuper des difficultés des autres !
Vous voulez déréguler, casser le code du travail pour faciliter la vie des pauvres chefs d'entreprise qui ont du mal à embaucher ! Or, si le chômage est vraiment une cause nationale, vous devriez dire que, malgré toutes les contraintes de l'économie mondiale qui pèsent sur eux, nos chefs d'entreprise doivent, comme toute la société, faire les efforts nécessaires pour que les jeunes soient, en priorité, sécurisés dans leur parcours professionnel ! Mais, en réalité, puisqu'il n'y a pas grand-chose à donner, vous voulez imposer à cette génération, pour être intégrée dans la société, un retour en arrière de plusieurs dizaines d'années, un retour à une situation pire que celle qu'avaient connue ses parents. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oh là, là !
M. Dominique Braye. Comme chacun d'entre nous, j'ai entendu échanger de nombreux arguments ce matin. Je reconnais un certain nombre de points d'accord manifestes avec ma collègue des Yvelines, Mme Tasca, même si je suis totalement en désaccord sur beaucoup d'autres points.
Je suis, par exemple, en désaccord sur le fait qu'elle connaisse bien les quartiers, puisque, pour bien les connaître, il ne faut pas simplement être parlementaire, mais aussi élu local. C'est la seule façon d'entrer dans les quartiers, je vous le dis. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Bricq. Pas de leçons !
M. Jean-Luc Mélenchon. Moi, j'y ai habité !
M. Dominique Braye. Si vous connaissiez ces quartiers, vous ne parleriez pas de « la » jeunesse, vous parleriez « des » jeunesses. Car il y a manifestement plusieurs jeunesses !
La majorité de la jeunesse est extrêmement méritante et travailleuse ; elle est dans une situation de précarité parce que notre génération a tout simplement souhaité conserver un certain nombre de privilèges. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Nous savons bien que nous vivons actuellement sur le dos de notre jeunesse ! Comme je le dis souvent, nous avons croqué l'argent de nos parents, nous avons consommé l'argent de nos enfants, et nous sommes en train de vivre sur l'argent de nos petits-enfants !
Et cela, vous tous, comme nous tous, nous l'acceptons ! (Protestations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Arrêtez !
M. Dominique Braye. Ne dites pas que vous avez le souci de la jeunesse ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Sur les thèmes de la jeunesse, de la culture du non-travail, je rejoins les propos de mon président de groupe.
Je sais, en tout cas, que tous les jeunes n'ont pas le même désir de travailler. Je le dis à mon collègue maire d'une ville qui compte 6 500 logements sociaux dans une ZUP - c'est beaucoup moins qu'au Val-Fourré -,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le Val-Fourré est sur votre commune, maintenant !
M. Dominique Braye. ... toutes les jeunesses ne se ressemblent pas ! Vous avez donné à une certaine jeunesse la possibilité de faire le choix entre le travail et autre chose...
M. Roger Madec. C'est incroyable !
M. David Assouline. C'est n'importe quoi !
M. Dominique Braye. Monsieur Assouline, si vous n'en connaissez pas, je suis prêt à vous présenter des jeunes qui vivent en ayant effectivement fait le choix de ne pas travailler ;...
Mmes Hélène Luc et Nicole Borvo Cohen-Seat. Ces propos sont inacceptables !
M. Dominique Braye. ... ils ont choisi de laisser le travail de côté et de se mettre à trois ou quatre, vivant, pour les uns du RMI ou, pour les autres, de revenus accessoires comme la cueillette des pommes à Montpellier, les vendanges, etc. !
Mme Catherine Tasca. C'est une honteuse caricature !
M. Jean-Luc Mélenchon. La voilà, la haine de classe !
M. David Assouline. On croirait entendre le Front national !
M. Dominique Braye. Oui, il existe bien plusieurs jeunesses ! Et, puisque vous nous stigmatisez en prétendant que nous détruisons le code du travail, laissez-moi vous dire que nous ne sommes nullement en train de le détruire, mais de l'assouplir !
Mme Nicole Bricq. Le code du travail est déjà très souple!
M. Dominique Braye. Pourquoi une grande partie de nos jeunes quittent-ils la France pour un pays pas si lointain, l'Angleterre, dont le code du travail est beaucoup plus souple que le nôtre ?
Pourquoi partent-ils ? Tout simplement - et tout le monde le sait - parce que les très petites entreprises et les PME, qui emploient chez nous 3,8 millions de salariés, ne sont pourvues qu'à 80 % ou 85 % des possibilités d'emplois qu'elles pourraient offrir, alors qu'en Angleterre elles le sont à 100 % ou 102 %. Il nous reste donc 10 % à 15 % à gagner.
Combien d'emplois seraient créés si on assouplissait le code du travail ? Nous savons, parce que nous en connaissons tous, que les chefs d'entreprise éprouvent actuellement beaucoup de réticences à embaucher puisqu'ils sont ensuite prisonniers...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est faux !
M. Dominique Braye. ...et qu'ils ont des comptes à équilibrer, excusez-moi de le rappeler.
Il n'y a d'ailleurs rien d'étonnant à ce que nous connaissions d'aussi grandes divergences d'interprétation quant à la situation du pays. Je m'amusais ce matin à comparer les situations socio-professionnelles des membres de notre assemblée selon qu'ils siègent à gauche ou à droite. Je me suis aperçu - et je suis prêt à mettre quiconque au défi de démontrer le contraire - que l'ensemble de nos collègues qui siègent à droite reflètent à peu près exactement la composition de la société civile française, alors que vous, mes chers collègues de gauche, vous ne la représentez nullement ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roger Madec. C'est n'importe quoi !
M. Dominique Braye. Calculez simplement le nombre de professeurs, d'enseignants, de fonctionnaires qui siègent dans vos rangs...
M. Bernard Vera. Combien d'ouvriers chez vous ?
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est inadmissible !
M. Dominique Braye. ... et vous comprendrez pourquoi vous ne pouvez que tenir le même discours corporatiste et partisan ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Je terminerai en évoquant la réunion de la mission d'information sur les quartiers en difficultés à laquelle nous avons participé hier, M. le rapporteur Pierre André et moi. Tous les participants, de droite comme de gauche, ont admis que les domaines d'intervention prioritaires étaient l'éducation et la formation - certains d'entre vous, mes chers collègues, dont je tairai le nom, étaient présents également.
Sur quatre interventions, toutes ont conclu à l'impossibilité d'améliorer l'éducation et la formation avec l'éducation nationale telle qu'elle existe. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Exactement ! Des sénateurs de l'opposition ont fait ce constat !
M. Jean-Luc Mélenchon. Non ! Mais qu'est-ce qu'il dit à la fin !
M. Dominique Braye. Donc, la messe est dite ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. Je voudrais d'abord répondre à M. de Rohan. Heureusement que personne n'a le monopole de la jeunesse ! Parce que la jeunesse est libre. Elle est capable de travailler et de dire ce qu'elle veut. N'ayez crainte, mardi prochain, vous vous en rendrez compte ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Josselin de Rohan. Des menaces ?
Mme Hélène Luc. Toutes les universités, tous les jeunes seront présents, et vous allez avoir des surprises !
M. Josselin de Rohan. Ce sont les jeunes que vous avez embrigadés !
M. Dominique Braye. ... et à qui vous mentez !
Mme Hélène Luc. Je vais maintenant rappeler quelques vérités sur la situation des jeunes et les stages en entreprise...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela n'a rien à voir ! Encore une pseudo-explication de vote !
Mme Hélène Luc. Pourquoi cela n'aurait-il rien à voir ? Nous venons justement de parler des jeunes et de leurs difficultés !
Chaque année, trois semaines après la rentrée des classes, dans le Val-de-Marne, en liaison avec l'inspection académique, le conseil général organise des stages en entreprise pour tous les lycéens qui n'ont pas encore d'établissement scolaire. En 2005, ils étaient au nombre de 470, et certains n'avaient pas trouvé d'entreprise où effectuer leur stage de préparation au CAP ou au BTS.
Vous dites que la jeunesse ne veut pas travailler. Mais si vous saviez toute l'émotion que me procurent ces réunions où je vois ces jeunes qui cherchent et qui ne trouvent pas d'établissement scolaire ou d'entreprise pour effectuer leur stage, vous ne feriez pas une telle réflexion !
Vous parlez d'enfants gâtés. Moi, j'en connais beaucoup qui ne sont pas gâtés.
M. Alain Gournac, rapporteur. Qu'on passe au vote !
Mme Hélène Luc. Une enquête dans le Val-de-Marne a révélé que certains jeunes devaient se contenter des restes de la cantine pour pouvoir manger à midi. Le conseil général a alors décidé de verser une prestation supplémentaire aux familles afin de les aider à se nourrir.
M. Alain Gournac, rapporteur. Ça dérive !
Mme Hélène Luc. Écoutez-moi, monsieur Gournac.
M. Alain Gournac, rapporteur. Vous répétez dix fois la même chose !
Mme Hélène Luc. À partir de ce jour-là, le nombre de collégiens mangeant au moins un bon repas à midi a augmenté de 38 %.
M. Alain Gournac, rapporteur. Je vais lire le journal au micro !
Mme Hélène Luc. Tous ces jeunes font partie des nouveaux pauvres, dont Martin Hirsch nous a parlé. Ces enfants en lycée professionnel, qui partent souvent très tôt le matin, car ils habitent loin, ne mangent pas à midi. Entendez cela !
Mes chers collègues, vous n'avez pas non plus le monopole de l'entreprise.
M. Josselin de Rohan. SKF !
Mme Hélène Luc. Dans les départements et les communes que nous dirigeons, renseignez-vous auprès du responsable départemental du MEDEF, par exemple celui du Val-de-Marne ou de Seine-Saint-Denis, et ils vous diront ce que font les conseils généraux pour faciliter la venue des petites entreprises, les aider à s'installer ou créer avec elles des partenariats dans le domaine de la recherche !
Les entreprises sont riches parce que les salariés y travaillent et qu'ils produisent des richesses. Ils ont donc raison de se battre. D'ailleurs, vous verrez, il y aura de nombreux salariés du secteur privé dans le cortège, le 7 mars ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Josselin de Rohan.
M. Josselin de Rohan. Madame la présidente, le Sénat s'est largement exprimé sur l'article 4 quater. Par conséquent, afin de ne pas allonger excessivement le débat et de lui conserver un minimum de sérénité, je demande, en vertu des dispositions de l'article 38, alinéa 1, du règlement, la clôture des explications de vote. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. En application de l'article 38 du règlement, je suis saisie d'une demande de clôture de la discussion de l'article 4 quater.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'article 4 quater, modifié.
(L'article 4 quater est adopté.)
Rappels au règlement
M. Jean-Pierre Bel. Je voudrais demander à nos collègues de la majorité de mesurer leurs propos et d'éviter les interpellations de collègue à collègue dont ils se rendent de temps en temps coupables, ce qu'interdit l'article 36, alinéa 10, de notre règlement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y en a qui font de la provocation !
M. Jean-Pierre Bel. Nous siégeons ici en tant que représentants de la nation. Nous pouvons donc avoir des débats francs et directs, mais nous n'avons pas à passer au crible l'activité, le passé ou les responsabilités des uns ou des autres. Introduire cette dimension dans nos discussions n'est pas à la hauteur des enjeux qui président à nos débats ni digne de la Haute Assemblée.
Je demande donc à nouveau à nos collègues de bien vouloir cesser d'interpeller et d'invectiver certains d'entre nous et de s'en tenir au débat qui nous occupe aujourd'hui.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui, mais on était hors sujet !
M. Jean-Pierre Bel. Il s'agit d'un débat sur la jeunesse.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non !
M. Jean-Pierre Bel. Nous avons le droit d'en parler. Cependant, il ne faut pas mettre personnellement en cause ceux qui siègent dans cet hémicycle.
Mes chers collègues, j'espère de vous un sursaut dans les heures à venir afin que nous puissions débattre sereinement d'un texte qui mérite véritablement que l'on s'y intéresse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. Je vous donne bien volontiers acte de ce rappel au règlement.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si l'on veut que la discussion se passe bien, il suffit simplement de s'attacher aux articles qui sont soumis à notre examen. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Il est évident que l'objet de l'article 4 quater n'est pas la jeunesse. Il a trait au droit de vote des salariés. Cela étant, je comprends que certains aient intérêt à défendre leurs amis qui veulent contrôler les comités d'entreprise et les moyens mis à leur disposition. (Applaudissements sur les travées de l'UMP - Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Si certains de nos collègues ont cédé à la provocation, je le regrette. Néanmoins, ceux qui se sont livrés à une telle provocation sont tout aussi responsables. (Nouveaux applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Roland Muzeau. Monsieur About, vous vous trompez.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je me suis juste référé au texte de l'article 4 quater !
M. Roland Muzeau. Moi aussi, je sais lire. (M. Braye s'exclame.) Monsieur Braye, vous savez que vous avez le droit de lever la main quand vous souhaitez parler ?
Je ne pense pas que nous nous soyons peu ou prou écartés du sujet.
Mon groupe, pas plus que nos amis socialistes, n'a jamais réclamé qu'un salarié puisse voter plusieurs fois. Certains ont même dit tout à l'heure qu'il y en avait qui votaient sept ou huit fois. C'est n'importe quoi ! Et pourquoi pas cinquante fois pendant qu'ils y sont ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si ça peut servir les intérêts de la CGT ...
M. Roland Muzeau. Nous nous sommes seulement appuyés sur les décisions des tribunaux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais la loi est supérieure à la jurisprudence !
M. Roland Muzeau. J'ai lu un arrêt de la Cour de cassation.
M. Alain Gournac, rapporteur. Ici, on fait la loi !
M. Roland Muzeau. M. le ministre a d'ailleurs répondu sur ce thème.
Je n'ai donc rien exprimé d'autre que mon souhait de ne pas voir remettre en cause la jurisprudence par un cavalier qui revient de manière subreptice après avoir été écarté d'un texte relatif au retour à l'emploi. Nous débattions donc bien du sujet, monsieur le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas parlé de vous !
M. Roland Muzeau. Pour ma part, j'ai plaidé pour que la législation ne change pas et que le code du travail soit respecté. Vous, vous soutenez la modification du code du travail afin que les tribunaux ne puissent plus rendre de telles décisions.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Là, nous sommes effectivement dans le débat !
Mme la présidente. Avant de suspendre la séance, je donne la parole à M. le ministre délégué, qui tient à faire une mise au point.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En effet, madame la présidente.
Monsieur About, hier soir, vous avez présenté l'amendement n° 828, qui tendait à ce que la Conférence des chefs d'établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel rende un rapport sur les voies alternatives d'accès à l'enseignement supérieur.
À la suite de mon intervention, qui mettait en cause l'existence légale de cette Conférence, vous avez retiré votre amendement. Ensuite, vous avez à nouveau interrogé le Gouvernement sur la réalité de cette Conférence.
Dès hier soir, je me suis rapproché de mon collègue Gilles de Robien afin de faire le point sur l'application de la loi et, plus particulièrement, sur les compétences de la Conférence des chefs d'établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel. Cette Conférence existe bel et bien, ce dont je vous donne acte. Je vous prie donc de ne pas me tenir rigueur de ma précédente affirmation.
Aux termes de l'article qui l'institue, « elle étudie toutes les questions intéressant les établissements qu'elle représente. Elle peut formuler des voeux à l'intention du ministre chargé de l'enseignement supérieur. » Toutefois, elle ne peut modifier d'elle-même les modalités d'accès aux études supérieures. Cette Conférence n'a donc pas de pouvoir de décision. Elle n'a qu'un pouvoir de suggestion, d'analyse ou d'étude.
Compte tenu de l'intérêt de votre proposition, le ministre de l'éducation nationale m'a confirmé qu'il interviendrait auprès des établissements organisant une sélection à l'entrée afin que ceux-ci développent des modalités d'accès alternatives aux dispositifs actuels. Je l'avais d'ailleurs évoqué à l'occasion d'une question portant sur les lycées.
Comme vous le souhaitiez dans votre amendement, un rapport sera rédigé, en lien avec la Conférence et ses membres, sur les voies alternatives d'accès à l'enseignement supérieur de manière à mettre en oeuvre l'égalité des chances.
Demande de réserve
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout d'abord, je veux remercier M. le ministre de sa mise au point. Je prends également acte de l'engagement du Gouvernement, qui me donne entière satisfaction.
Ensuite, madame la présidente, pour rester dans la substance du texte et ne pas nous en écarter comme c'est le cas depuis plus d'une heure, je demande la réserve de tous les amendements tendant à insérer des articles additionnels à partir de l'article 4 quinquies jusqu'à la fin du titre Ier. Ils seront examinés à l'issue du vote des amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 3 bis, dont nous avons également demandé la réserve.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
Mme la présidente. La réserve est de droit.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)