PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Annoncé depuis 2003, ce projet de loi a subi une dizaine de modifications avant de nous être présenté ce jour. Et le résultat est très décevant.
Ce texte n'est d'ailleurs pas celui sur lequel les différents partenaires se sont exprimés, du moins pour ceux qui ont été consultés, ce qui n'est pas le cas de l'Association nationale des élus communistes et républicains, l'ANECR.
M. Gérard Le Cam. Le Gouvernement ne sait peut-être même pas ce que c'est !
Mme Josiane Mathon-Poinat. Le Gouvernement présente ce projet de loi comme un moyen de rendre la fonction publique territoriale plus attractive, plus efficace et plus professionnelle.
Nous partageons ces objectifs, mais nous estimons que le but, inavoué, de ce texte est d'ouvrir une brèche dans le statut de la fonction publique territoriale.
Après la réforme des retraites et l'introduction du contrat à durée indéterminée dans la fonction publique, le Gouvernement continue son travail d'escamotage du statut des fonctionnaires en s'attaquant à la fonction publique territoriale !
Certes, cette fonction publique territoriale doit s'adapter, afin de faire face aux nombreux départs à la retraite de ses agents et de mieux prendre en compte les nouveaux métiers. Elle devra même être résolument attractive et active pour satisfaire les besoins.
Mais, contrairement au credo que nous assène le Gouvernement depuis 2002, cette adaptation ne passe pas nécessairement et uniquement par la baisse des effectifs de la fonction publique, ni d'ailleurs par la disparition des services publics, auxquels nous sommes particulièrement attachés.
Nous ne sommes pas les seuls à partager ce point de vue. Nos concitoyens font également la même analyse, comme le montre très précisément un sondage réalisé par l'IFOP à l'occasion du troisième Salon de l'emploi public. Le chiffre clé qui se dégage de ce sondage est sans ambiguïté : 51 % des Français souhaitent le maintien des effectifs de fonctionnaires.
Ainsi, une majorité des personnes interrogées rejettent l'idée qu'il faille réduire les effectifs supposés pléthoriques de la fonction publique en ne remplaçant qu'un départ en retraite sur deux.
Décidément, le CPE n'est pas le seul sujet sur lequel le Gouvernement n'est pas en phase avec la population : c'est également le cas s'agissant des fonctionnaires et des services publics !
Les conclusions à tirer de ce sondage sont claires : il n'est pas question de sacrifier la qualité ou la quantité des services que leur fournissent les administrations, en particulier les services de proximité, au nom d'une meilleure efficacité ou d'un moindre coût de fonctionnement. Nos concitoyens sont décidément partisans non pas du « moins d'État », mais du « mieux d'État ».
Toujours selon ce sondage, plus l'administration rend un service concret et proche de la vie de chacun, plus s'affirme la volonté de maintenir - et même de renforcer - les effectifs consacrés à ces services. L'idée qu'il y aurait trop de fonctionnaires est rejetée par 54 % de nos concitoyens s'agissant des ministères, par 66 % d'entre eux s'agissant des collectivités locales et par 96 % des Français s'agissant des hôpitaux publics.
Les efforts déployés par le Gouvernement pour réduire les effectifs de fonctionnaires sont ainsi à l'opposé des souhaits des femmes et des hommes de ce pays !
À force de remettre en question le statut de la fonction publique, c'est le service public lui-même qui est remis en cause, ce qui est particulièrement grave. Si l'égalité d'accès à certains services n'est plus assurée, ce sont les fondements mêmes de l'unicité des territoires qui sont en danger.
Ce projet de loi n'est donc guère rassurant. Voici quelques points de désaccord.
Le texte prévoit de transposer dans le statut de la fonction publique territoriale, de manière quasi mécanique, la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, aujourd'hui applicable au seul secteur privé.
Le projet de loi instaure un droit individuel à la formation, un DIF, pour les agents territoriaux, de vingt heures par an, cumulables sur six ans.
Le système prévu par le chapitre Ier du projet de loi est critiquable à un double titre.
Premièrement, le DIF permettra aux agents de la fonction publique territoriale, sur leur demande ou sur celle de leur employeur, de se perfectionner au cours de carrière et de se préparer aux concours et aux examens professionnels de la fonction publique.
Aujourd'hui, les agents ne disposent d'aucune restriction horaire quant à leur préparation aux concours. Celle-ci peut d'ailleurs durer jusqu'à trois cents heures. Or le DIF plafonne la durée de cette formation à vingt heures par an : même si l'agent les cumule sur six ans, le compte n'y est pas ! D'autant moins que peuvent venir s'imputer sur ce quota des actions de formation de perfectionnement !
Mais le principal problème est ailleurs : parce qu'il n'est pas mutualisé, contrairement à ce qui prévaut pour le CNFPT, qui, lui, bénéficie du 1 % formation - taux au demeurant déjà bien faible -, le DIF est source d'inégalités. En effet, comme le prévoit d'ailleurs l'article 3, les frais de formation relevant du DIF sont à la charge de l'autorité territoriale. Cela signifie donc que seules les grandes collectivités disposant de moyens financiers importants pourront assumer les formations de leurs agents.
Je ferai également quelques remarques sur l'exercice, par l'agent, de son droit à la formation.
D'une part, il est inquiétant de prévoir que le DIF est mis en oeuvre sur l'initiative de l'agent, mais en accord avec l'autorité territoriale. Cela confère un droit de regard à l'élu sur le contenu même de la formation, souvent étroitement lié aux besoins de la collectivité. Or une formation pour être réellement individualisée ne peut par définition se comprendre que sur la base d'un choix personnel.
D'autre part, il est tout aussi préoccupant que cette formation puisse avoir lieu en dehors du temps de travail, contrairement à ce qui existe aujourd'hui. Cela rendra l'exercice de ce droit encore plus improbable.
Le volet « formation » du projet de loi constitue donc bel et bien une régression par rapport aux dispositions actuelles en matière de formation des agents territoriaux.
La logique est identique à celle qui prévaut dans le secteur privé. Le Gouvernement encourage l'individualisation des relations entre l'agent et la collectivité territoriale avec, à terme, le risque que les fonctionnaires territoriaux deviennent agents d'une collectivité déterminée et non plus de la fonction publique territoriale.
Nos craintes concernant l'éclatement du statut sont bel et bien fondées, voire peut-être déjà consacrées dans ce projet de loi !
Avoir des agents compétents et efficaces au sein des collectivités contribue pourtant au bon fonctionnement des services publics. La réécriture du droit individuel à la formation des agents est loin de constituer une avancée en termes d'efficacité et de qualité des services publics.
Se pose également le problème de l'avenir du CNFPT et de la distinction opérée par le projet de loi entre la mission de formation et la mission de gestion des personnels, cette dernière étant dévolue aux centres de gestion.
Aujourd'hui, il existe un lien fort entre formation et emploi. Ce lien est d'ailleurs présent dans des lois votées par l'actuelle majorité, qu'il s'agisse de la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social ou de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.
Or le Gouvernement envisage exactement le contraire s'agissant de la fonction publique territoriale : il déconnecte la formation de la gestion des personnels.
Une telle distinction entre les missions pose également le problème du financement du CNFPT. Ce dernier rencontre de nombreuses difficultés pour assurer l'offre de formations en raison d'un manque évident de moyens. Or, si les centres de gestion et le centre national de coordination des centres de gestion doivent bénéficier, comme le prévoit le texte, d'une compensation financière pour les missions relevant jusqu'à présent du CNFPT, la part dévolue à la formation risque au final d'être bien maigre. Ce sera d'autant plus vrai que le CNFPT sera chargé des missions de mise en oeuvre de la reconnaissance de l'expérience professionnelle et de la validation des acquis de l'expérience.
C'est pourquoi nous tenons à ce que les deux missions relatives à la gestion des personnels et à la formation continuent d'être assurées par le CNFPT et soient financées de manière collective et non individualisée.
Ce projet de loi vise prétendument à rendre plus lisibles et à clarifier les compétences entre le CNFPT et les centres de gestion, mais il instaure en réalité un nouveau système porteur de cloisonnements et de déséquilibres. Si la formation concerne le développement des compétences et la valorisation des parcours professionnels, comment peut-elle être pertinente sans vision sur les métiers et l'évolution des emplois ? De même, comment envisager une gestion pertinente des emplois sans prendre en compte la dimension de la formation ? Comment anticiper les besoins et les départs à la retraite ? À moins bien sûr, et c'est là peut-être la faille, qu'il s'agisse en réalité d'externaliser les services !
Ce cloisonnement entre les compétences du CNFPT et celles des centres de gestion est donc loin d'être cohérent et judicieux.
S'agissant du chapitre relatif aux organes institutionnels de la fonction publique territoriale, nous craignons que la régionalisation des concours ne remette en cause le principe de l'égalité des candidats devant l'emploi public.
En dévitalisant le CNFPT dans ses compétences et dans ses moyens de financement, pour ne lui laisser qu'une fonction résiduelle de formation, et en régionalisant les concours, ce projet de loi risque donc d'accroître les inégalités entre les agents territoriaux, ce qui ne sera pas sans conséquences sur les missions de service public assurées par les collectivités.
Je ne m'exprimerai pas plus longuement, ma collègue Gélita Hoarau devant intervenir à son tour. J'ai simplement voulu mettre en lumière ces deux problèmes particuliers.
Messieurs les ministres, aujourd'hui, la demande est d'abord sociale et traduit une exigence légitime des fonctionnaires. Parallèlement à ce texte, il eût été opportun de rencontrer les organisations syndicales et d'organiser des négociations - elles étaient d'ailleurs fortement souhaitées - sur les salaires et les carrières.
Par ailleurs, ce texte ne contient aucune mesure en faveur d'une véritable égalité entre les hommes et les femmes ou tendant à lutter contre la précarité dont sont, hélas ! victimes nombre d'agents de la fonction publique.
Nos amendements viseront à modifier ce texte, qui, pour l'heure, ne nous satisfait pas et ne peut recueillir que notre désapprobation. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Plus de vingt ans après l'organisation de la fonction publique territoriale dans la foulée des premières lois de décentralisation de 1982 et de 1983, un toilettage de la loi de 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale était devenu nécessaire. Il était attendu par beaucoup de monde.
Les objectifs du projet de loi dont nous débattons aujourd'hui portent notamment sur le développement de la formation professionnelle des agents territoriaux, sur la clarification du rôle des institutions de gestion de la fonction publique territoriale et sur l'introduction d'un peu plus de souplesse dans la gestion des ressources humaines. On ne peut qu'y souscrire.
Sans vouloir entrer dans le détail du projet de loi - vous l'avez largement fait, monsieur le ministre délégué-, on ne peut en effet que se féliciter des dispositions relatives à la formation professionnelle.
La création du droit individuel à la formation, qui rapproche le régime applicable à la fonction publique territoriale de celui qui existe déjà dans le secteur privé, devrait permettre, d'une part, aux agents de se perfectionner plus facilement et de progresser dans leur carrière et, d'autre part, aux collectivités locales de disposer d'un personnel mieux formé et plus apte à évoluer.
Il restera cependant à trouver une solution équilibrée pour éviter que l'usage de ce droit n'entraîne de trop nombreuses absences pour les collectivités locales, comme c'est déjà le cas au titre de la formation initiale, problème que nous déplorons et que le projet de loi vise précisément à régler.
La réforme de la formation initiale avant la titularisation et son recentrage sur une durée plus courte, grâce notamment à la reconnaissance de l'expérience professionnelle et à la validation des acquis de l'expérience, répondent en effet à des attentes fortes tant des agents que des collectivités elles-mêmes.
Nous attendons également beaucoup des négociations en cours sur les statuts particuliers des cadres d'emploi, notamment sur le moment où devrait avoir lieu cette formation initiale. Ne faudrait-il pas également mener une réflexion sur le contenu même de cette formation ?
Je compte actuellement au nombre de mes collaborateurs de la mairie et de la communauté de communes un attaché et deux rédacteurs stagiaires qui sont astreints à suivre des formations préalables à leur titularisation et qui sont fréquemment éloignés une semaine entière de leurs bureaux. Je mesure donc réellement ce que cela représente en termes de désorganisation des services et de retard pris dans le traitement des dossiers.
Par conséquent, le projet de loi permettra d'améliorer une situation aujourd'hui très préoccupante pour les petites et moyennes collectivités.
Une autre disposition de ce projet de loi n'est pas dénuée d'intérêt pour les collectivités locales, celle qui prévoit qu'une collectivité accueillant, dans les trois ans suivant sa titularisation, un agent venant d'une autre collectivité devra rembourser à cette dernière les frais engagés pendant le temps de la formation suivie par l'agent au cours de ces trois années.
Cette disposition répond, en effet, à un problème particulièrement sensible dans beaucoup de petites et moyennes collectivités qui, après avoir supporté le coût de la formation initiale d'un agent, voient trop souvent celui-ci partir vers une collectivité plus importante qui lui offre de meilleures perspectives de carrière et un régime indemnitaire plus généreux.
Je suis moins optimiste s'agissant de la réforme des institutions de gestion de la fonction publique territoriale et je suis opposé à certaines des mesures qui nous sont proposées. Comme plusieurs de mes collègues parlementaires, je suis membre de la COSA, la commission pour les simplifications administratives. Tout un programme ! (Sourires.) Nous passons une partie de notre temps à faire la chasse aux empilements de structures créées au fil de l'adoption de lois et de la publication de décrets, dont, on le sait, notre pays est particulièrement friand.
Quelques-uns de ces organismes, comités ou commissions diverses, remplissent heureusement un rôle réel, mais un certain nombre d'entre eux font doublon avec d'autres, n'existent que sur le papier ou n'ont plus de raison d'être. L'actuelle majorité en est d'ailleurs pleinement consciente puisqu'elle a déjà, au travers de deux lois habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, en 2003 et en 2004, fait adopter un ensemble de mesures concourant à la simplification administrative. Un troisième projet de loi allant dans le même sens est actuellement en préparation.
D'ailleurs, pas plus tard que la semaine dernière, notre assemblée a adopté le projet de loi pour l'égalité des chances, dont l'une des dispositions prévoit le regroupement des missions et des moyens de divers organismes et administrations au sein d'une agence unique, dénommée Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, permettant ainsi une simplification et une clarification institutionnelle dans les domaines de l'intégration, de la politique de la ville et de l'égalité des chances. Cette mesure s'inscrit dans la démarche de simplification qui doit être, dans l'intérêt de notre pays et de nos finances publiques, une préoccupation constante.
Or ici, messieurs les ministres, au lieu de simplifier et de clarifier l'architecture des organismes de gestion de la fonction publique territoriale, vous nous proposez de la compliquer, inutilement à mon avis !
En effet, nous avons déjà le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, le Centre national de la fonction publique territoriale, les centres de gestion départementaux de la fonction publique territoriale, les centres de gestion coordonnateurs, et vous nous proposez aujourd'hui - sans que cela ait d'ailleurs figuré dans l'avant-projet de loi soumis au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale - de créer le centre national de coordination des centres de gestion. Autrement dit, après le CSFPT, le CNFPT et les CGD, voilà maintenant le CNCCG ! (Nouveaux sourires.)
Franchement, messieurs les ministres, pensez-vous qu'il soit réellement utile de créer un nouvel organisme ? Ne croyez-vous pas qu'il en existe déjà suffisamment ? Pensez-vous vraiment que c'est en ajoutant une strate supplémentaire que l'on facilitera et simplifiera la gestion de la fonction publique territoriale ?
Par ailleurs, peut-on réellement croire que la création d'un établissement supplémentaire n'entraînera pas de surcoûts pour les collectivités locales ? Pour ma part, je n'y crois pas un seul instant.
J'approuve donc pleinement, messieurs les ministres, la position de la commission des lois qui nous propose de supprimer l'article 10 de votre projet de loi et de redistribuer entre les organismes existants les missions qu'il était proposé de confier au centre national de coordination des centres de gestion.
Il ne faut pas oublier, en effet, que plus des trois quarts des 36 000 communes que compte notre pays ont moins de 1 000 habitants et que ce qu'elles demandent, dans ce domaine comme dans les autres, c'est d'abord de la simplification et de la lisibilité.
C'est dans cet esprit que le groupe de l'UC-UDF propose un certain nombre d'amendements ; ils visent notamment à unifier les seuils proposés pour la création des emplois fonctionnels entre les communes et les groupements de communes à fiscalité propre, à harmoniser les régimes indemnitaires entre les communes et les intercommunalités, à permettre aux agents territoriaux de participer aux réunions des commissions d'examen des offres de délégation de service public en vue de faire bénéficier les élus de leurs compétences juridiques et techniques, à supprimer nombre de saisines inutiles du comité technique paritaire lorsqu'il s'agit simplement, par exemple, de modifier d'une demi-heure les horaires d'un agent. Enfin, nous proposerons une solution pour les communes qui se retrouvent avec un agent sans emploi en raison d'une décision qui leur échappe et qui n'ont pas d'autre choix aujourd'hui que de mettre cet agent à la disposition du centre de gestion pour un coût supérieur à celui de sa rémunération antérieure, et ce sans aucune contrepartie.
Vous l'aurez compris, messieurs les ministres, nous souhaitons examiner le texte qui nous est aujourd'hui soumis en tenant compte de la réalité des problèmes de gestion auxquels nous sommes quotidiennement confrontés dans les collectivités locales dont nous sommes les élus.
Je l'ai déjà dit, ce projet de loi, qui vise à moderniser la fonction publique territoriale, va globalement dans le bon sens. Mais certaines de ses dispositions n'échappent pas, hélas ! à ce défaut bien français consistant à concevoir des dispositifs très élaborés, mais ne prenant pas assez en compte la diversité et la réalité du terrain.
Je souhaite donc que ce débat permette aux représentants et aux gestionnaires des collectivités territoriales que sont les sénateurs d'être entendus. En effet, les élus locaux en savent souvent plus sur la gestion d'une collectivité territoriale que les hauts fonctionnaires de l'État, croyez-en l'énarque repenti que je suis ! (Sourires et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.)
M. Paul Raoult. Enfin !
M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la loi dite Le Pors portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale a fêté ses vingt-deux ans le 26 janvier dernier. Le bel âge, me direz-vous !
Mais ces vingt-deux années n'ont pas été sans évolutions, ce qui impose une réforme de la fonction publique territoriale, réforme très attendue de la part tant des agents des collectivités territoriales que de leurs représentants syndicaux et des élus. Il convenait de tirer les leçons de l'expérience, d'adapter la fonction publique territoriale à son nouvel environnement - intercommunalité, Acte II de la décentralisation, construction européenne - et de lui donner les moyens de faire face aux défis du XXIe siècle, notamment en termes d'attractivité, de formation et de démographie.
Or le texte que nous examinons aujourd'hui manque de souffle et d'une vision constructive porteuse d'avenir pour la fonction publique territoriale.
Certes, il faut le reconnaître, ce projet de loi a de réels mérites. Il faut saluer les avancées qui y sont proposées en matière de droits à la formation professionnelle, de droit syndical, d'hygiène et de sécurité. Ce texte tente de clarifier les missions des institutions de la fonction publique territoriale en les spécialisant et introduit plus de souplesse dans la gestion des ressources humaines.
Cependant, derrière une trompeuse apparence technique, ce texte cache mal des objectifs politiques. Votre gouvernement, messieurs les ministres, dans la droite ligne des précédents, poursuit avec beaucoup de constance une politique qui consiste à prendre des décisions et à les faire payer par les collectivités territoriales et leurs établissements.
M. Jacques Mahéas. Je suis déjà le deuxième intervenant à le dire !
Qui peut se laisser abuser par la promesse d'une réforme « à coût constant » ? Il est bien évident que, dans les faits, création d'organismes nouveaux - peut-être ! - et transferts se traduisent toujours par une augmentation des dépenses, et donc des charges des collectivités territoriales.
Monsieur le ministre délégué, vous avez eu beau vous targuer, devant la commission des lois, d'un texte faisant « l'objet d'un avis favorable, largement consensuel », les différentes auditions auxquelles nous avons procédé nous ont fait entendre un écho un peu différent : si le volet « formation » de ce projet de loi donne satisfaction, sa partie « financement » suscite une certaine perplexité et donc une inquiétude s'agissant de la concrétisation de ces droits et de la qualité de la formation.
Quatre ans ont été nécessaires à la préparation de ce texte. Trois ministres de la fonction publique et quatre ministres chargés des collectivités territoriales y auront travaillé. Au total, onze versions pour un texte qui, au bout du compte, ne recueille plus qu'un avis mitigé de la part de la plupart des acteurs de la fonction publique territoriale !
Il faut se souvenir que, le 16 novembre dernier, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale avait émis un avis favorable sur le texte qui lui avait été soumis, après acceptation par le Gouvernement d'une quarantaine d'amendements.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui, et c'est bien !
M. Jacques Mahéas. Merci de le reconnaître !
Or, avec un curieux sens du dialogue social, votre gouvernement n'a pas cru bon de respecter le texte qui avait fait l'objet de cet accord. Le présent projet de loi en est en effet une version différente, que le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale n'aurait certainement pas votée !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais si !
M. Jacques Mahéas. Le CSFPT a d'ailleurs adopté un voeu unanime demandant au Gouvernement de respecter ses engagements.
Dans l'intervalle, vous vous êtes appuyés sur l'avis du Conseil d'État pour introduire des modifications, techniques pour certaines, beaucoup plus substantielles, pour d'autres. Vos nouveaux arbitrages politiques hypothèquent ainsi l'équilibre au sein des institutions de la fonction publique territoriale.
Ce projet de loi, dans la version qui nous est soumise, ne répond pas à l'objectif affiché de clarification. Il ne permettra pas à la fonction publique territoriale de préserver son originalité, à savoir la conciliation entre statut national et gestion de proximité.
Depuis 2002, c'est une réforme de la fonction publique dans son ensemble qui nous est promise, mais il faut croire que la fonction publique ne vous intéresse pas suffisamment ! (M. le ministre de la fonction publique s'exclame.)
En effet, au lieu de nous soumettre un projet d'envergure, vous ne nous proposez qu'un saupoudrage de mesures disparates, enfonçant autant de coins dans le statut de la fonction publique territoriale, le tout mâtiné de discours souvent peu amènes envers les fonctionnaires, qui sont réduits au rôle de simple variable d'ajustement budgétaire.
Le volet territorial de ce projet de loi, détaché du grand projet de réforme avorté, pouvait nous laisser espérer un changement de cap et l'affirmation d'une ambition réelle. Or voilà encore une occasion manquée ! C'est en effet un texte « bricolé » qui nous échoit en discussion.
Il est à craindre que la déception ne soit à la hauteur de l'attente suscitée, car non seulement le dialogue social a péché, mais, en quatre ans de chantier, aucune évaluation sérieuse n'a été réalisée, aucune étude d'impact n'a été menée pour accompagner ce projet de loi. Nous sommes donc en droit d'avoir de sérieux doutes au moment d'approuver ce texte, qui ressemble fort à un chèque en blanc !
C'est ainsi que, si nous ne pouvons que souscrire à des droits à la formation renforcés, il nous paraît mensonger de prétendre les mettre en oeuvre à moyens constants.
En matière de formation, ce texte contient des propositions très attendues des agents et dont nous ne pouvons que nous féliciter : droit individuel à la formation, extension de la formation initiale pour les agents de catégorie C, reconnaissance de l'expérience professionnelle, validation des acquis de l'expérience.
La formation est un investissement primordial pour la qualité de nos services publics : il faut le faire. Il est toutefois évident que ces nouvelles formations suscitent un besoin de financement supplémentaire, d'autant que, tout le monde s'accorde à le dire, le 1 % formation obligatoire versé au Centre national de la fonction publique territoriale est déjà insuffisant et ne permet pas de répondre aux besoins actuels des fonctionnaires territoriaux.
Dans les faits, les collectivités territoriales consacreraient déjà à la formation de leurs agents non pas 1 % de la masse salariale, mais, souvent, entre 2 % et 3 %. La différence profite souvent au marché privé de la formation !
Le projet de loi remet en cause le financement de la formation professionnelle mutualisée. En effet, il est prévu un transfert de moyens du CNFPT au profit du futur centre national de coordination des centres de gestion - création contestable et contestée par tous - et des centres de gestion eux-mêmes, afin de financer les transferts de missions.
Le CNFPT se voyant par ailleurs attribuer de nouvelles missions, il risque d'être forcé - quel choix regrettable !- de sacrifier la formation professionnelle continue. Ce sont donc les agents des plus petites collectivités, celles qui n'ont pas les moyens de payer de telles formations, qui seront les plus pénalisés.
La loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004 entraîne le transfert de 130 000 fonctionnaires de l'éducation nationale et de l'équipement. En toute logique, cette nouvelle étape de la décentralisation requiert des personnels bien formés, notamment à l'exercice de nouveaux métiers.
L'arrivée de 60 000 à 75 000 TOS dans les départements et les régions représente un coût supplémentaire pour ces collectivités, mais également pour le CNFPT. Certes, ces collectivités territoriales cotiseront pour ces personnels, et l'État devrait compenser à due concurrence de ce que ceux-ci lui coûtaient auparavant. Mais c'est là que le bât blesse : il faut en effet admettre que l'État remplissait fort mal - et depuis longtemps, d'ailleurs - ses obligations en matière de formation.
De surcroît, à compter de 2006, les générations nombreuses du baby-boom vont atteindre l'âge de la retraite. Ce choc démographique va occasionner des départs massifs en retraite, ce qui devrait, mécaniquement, conduire à des recrutements plus nombreux et donc accroître les besoins en termes de formation, tant initiale que continue.
Si la question du financement n'est pas réglée, il est évident que la mutualisation de la formation des agents territoriaux sur l'ensemble du territoire risque d'être remise en cause. Une telle situation aggravera les inégalités entre fonctionnaires territoriaux et entre collectivités territoriales elles-mêmes, selon qu'ils travailleront dans une collectivité pauvre ou riche et que cette collectivité pourra donc aisément ou non accompagner, par exemple, leurs projets de formations autofinancés, comme la validation des acquis de l'expérience et le bilan professionnel.
D'ailleurs, on voit bien que le problème essentiel tient effectivement à la richesse ou à la pauvreté des collectivités territoriales. La formation sera d'autant plus poussée que la collectivité sera riche, tout le monde le sait.
Le déroulement de carrière des agents sera suspendu à des motifs étrangers à leurs compétences, et la qualité du service rendu va diminuer.
En outre, le CNFPT, en perdant l'observatoire de l'emploi, des métiers et des compétences de la fonction publique territoriale, est privé d'un outil d'observation indispensable pour efficacement anticiper les besoins et les programmes et permettre ainsi le développement d'une politique de formation adaptée.
Bref, pour conclure sur ce chapitre essentiel de la formation, je souligne que la mise en oeuvre des mesures proposées et l'absence de clarification sur leur financement les rendent impropres à satisfaire les attentes des agents et à leur permettre d'assumer les missions qui leur sont confiées.
Le projet de loi prévoit également diverses dispositions tendant à conférer aux employeurs territoriaux une plus grande souplesse dans la gestion des ressources humaines.
Ces mesures vont dans le bon sens, qu'il s'agisse de prendre en compte plus largement l'expérience professionnelle lors du recrutement des agents, d'ouvrir davantage la possibilité de recruter des agents sur emplois fonctionnels, de permettre aux régions et aux départements de s'affilier aux centres de gestion pour la gestion des TOS, de prévoir que la collectivité qui a financé la formation initiale d'un agent nouvellement recruté sera désormais remboursée par la collectivité qui « débaucherait » ledit agent dans un délai de trois ans à compter de sa titularisation.
De manière positive, le texte introduit aussi un nouveau titre dans le statut général de la fonction publique territoriale, relatif à l'hygiène, à la sécurité et à la médecine préventive.
Quant à la question de l'action sociale, elle reste encore en suspens.
Nous déplorons, en revanche, que le projet de loi fasse montre d'un paritarisme trop étroit, pour ne pas dire qu'il le remet en cause, car les deux institutions paritaires que sont le CNFPT et le CSFPT voient leur rôle réduit.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pas du tout !
M. Jacques Mahéas. Le CNFPT est recentré sur la formation, mais il perd l'observatoire de l'emploi, des métiers et des compétences, ainsi que la tenue du répertoire national des emplois de direction au bénéfice du futur centre national de coordination des centres de gestion.
Le CSFPT perd ses compétences en matière de synthèse des bilans sociaux au profit de ce même centre national de coordination des centres de gestion. Il s'est vu refuser la reconnaissance du caractère d'instance de représentation de la fonction publique territoriale qui lui aurait permis d'engager la responsabilité de chacune des deux parties - collège des fonctionnaires, collège des élus - et ainsi d'être le lieu où les uns et les autres pourraient confronter leurs points de vue, trouver et proposer eux-mêmes des solutions aux problèmes rencontrés, plutôt que de laisser ce soin à d'autres.
On peut penser, avec le CSFPT, qu'il conviendrait de mettre un terme à une situation qui crée de fait un lien de subordination de la fonction publique territoriale à la fonction publique de l'État. Ce refus de faire explicitement du CSFPT l'instance représentative de la fonction publique territoriale, couplé à la réduction de son champ d'intervention, pourrait résonner comme la manifestation d'une volonté de faire reprendre en main la fonction publique territoriale par l'État.
Je sais que vous êtes ouverts à certains des amendements de la commission, messieurs les ministres, et je vous en remercie, mais je suis obligé de commenter le texte initial.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. N'hésitez pas à évoquer les travaux de la commission !
M. Jacques Mahéas. C'est ce que je viens de faire !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pas assez !
M. Jacques Mahéas. Je sais parfois rendre hommage à la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela donne un tour plus positif à vos propos !
M. Jacques Mahéas. Sur certains points, je suis positif, monsieur le président de la commission !
De surcroît, tous les transferts de compétences vont dans le sens de la réduction du champ du paritarisme dans la mesure où tous ces transferts, que ce soit, au niveau national, du CNFPT vers le centre national de coordination des centres de gestion ou, du niveau national au niveau régional, du CNFPT vers les centres de gestion, se font vers des instances sous le seul contrôle des employeurs.
En revanche, nous pouvons saluer l'esprit d'ouverture de la commission des lois (M. Pierre-Yves Collombat applaudit) qui propose, par amendement, de créer un « collège des employeurs publics territoriaux ». D'ailleurs, sur tous ces points, nos propositions et celles de la commission des lois se rejoignent, ce dont nous nous réjouissons.
La clarification des missions des institutions de la fonction publique territoriale, autre ambition revendiquée de ce projet de loi, s'avère bien moins opérante qu'il n'y paraît a priori.
La création d'une nouvelle structure administrative au niveau national - toujours ce fameux centre national de coordination des centres de gestion - pouvait, de prime abord, sembler séduisante : au CNFPT, la formation, et au CNCCG et aux centres de gestion, la gestion. Mais est-ce la solution adéquate ? Permettez-moi d'en douter, et je ne suis pas le seul !
De quoi s'agit-il ?
Cette nouvelle structure, apparue sous forme d'amendement du Gouvernement à la dixième mouture du texte, serait créée sous forme d'établissement public administratif et permettrait l'affiliation de tous les centres de gestion et le versement par tous d'une cotisation. C'est d'ailleurs une proposition générale, contenue dans le rapport remis au nom du CSFTP et intitulé Réussir la mutation de la fonction publique territoriale, vingt après sa création, mais ce n'était qu'une possibilité parmi d'autres et, à mon avis, ce n'est pas la bonne solution.
Ce centre national de coordination serait doté d'un conseil d'administration composé de représentants des centres de gestion, ce qui paraît logique, sauf que, ce faisant, on reste dans un système où seules les petites communes sont représentées, ce qui n'est pas sans implication politique !
Seul l'exposé des motifs mentionne qu'un décret prévoira l'association des représentants des collectivités non affiliées à titre consultatif. Or rien n'est dit dans la loi...
Nous comprenons vite que ce projet de loi, s'il procède à une manière de recentralisation de chaque institution sur une mission donnée, formation ou gestion, ne va pas, tant s'en faut, au bout de sa logique affichée de clarification et de simplification.
Nous pouvons, dès lors, nous interroger sur l'opportunité pratique de créer une telle structure, sur son apport en termes d'efficacité, d'amélioration du fonctionnement de la fonction publique territoriale et de valeur ajoutée dans la gestion des fonctionnaires.
Pour parler simplement, il nous apparaît que ce centre national de coordination a toutes les caractéristiques d'une inutile usine à gaz, qui se doublerait d'une pompe à finances ! En effet, de toute évidence, au regard des missions qui seraient transférées au centre national de coordination, le financement prévu, assis sur la cotisation des collectivités territoriales aux centres de gestion et la compensation financière du CNFPT, ne saurait suffire.
S'agissant des modalités du transfert des missions et « le cas échéant » des personnels, ainsi que de la compensation financière entre le CNFPT et les centres de gestion, l'article 13 est d'un mutisme confondant. Il ne prévoit aucune disposition concernant les conditions des transferts de nature à garantir une certaine homogénéité en termes d'équité, de qualité du service rendu, d'égal accès de tous les agents à la formation sur l'ensemble du territoire. En deux mots, cet article ne garantit ni l'objectivité ni la transparence de ces transferts ; il se contente de renvoyer sans plus de précisions à des conventions et de spécifier qu'en cas de désaccord les modalités seront déterminées par décret. Tout ou rien !
Des garanties s'imposent pourtant afin de s'assurer que les moyens mutualisés affectés à la formation ne seront pas rognés au profit de missions de gestion qui ne sont pas financées par le projet de loi.
Mais le problème majeur soulevé par ce texte reste le financement - ou, plutôt, le non-financement ! - des mesures proposées, tant pour les collectivités territoriales que pour les organismes de gestion et de formation. Même si vos déclarations, messieurs les ministres, se veulent rassurantes à cet égard, je crains qu'elles ne soient que lénifiantes, car, malheureusement, ces mesures risquent fort de se traduire, de fait, par un accroissement des charges des collectivités territoriales.
Faute d'un financement supplémentaire, la formation des fonctionnaires territoriaux, notamment, serait remise en cause, qu'il s'agisse des nouveaux droits - droit individuel à la formation, formation initiale pour les agents de la catégorie C, validation des acquis de l'expérience ou de la formation continue.
Il est fort dommageable que le Gouvernement ne prenne pas ses responsabilités en la matière et n'avance aucune proposition, abandonnant les solutions au Parlement et aux élus locaux qui, au final, seront contraints d'augmenter les impôts locaux.
Ce manque de moyens financiers suscite une crainte largement exprimée. Il n'y a pas de cohérence entre les intentions et les moyens. Une telle situation n'est pas conforme à l'esprit du quatrième alinéa du fameux article 72-2 de la Constitution : « Tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. »
Une fois de plus, le Gouvernement se décharge sur les collectivités territoriales et leurs institutions et continue de prendre les fonctionnaires, qu'ils soient fonctionnaires d'État ou territoriaux, comme une variable d'ajustement budgétaire.
Depuis bientôt quatre ans, les agents subissent la même antienne : le Gouvernement leur demande de faire plus et mieux avec moins. Désormais, il leur accorde des avancées en matière de formation, mais sans moyens.
C'est pourquoi il nous paraît difficile de souscrire à un texte dont les innovations n'ont pas d'assise financière digne de ce nom.
Nous attendons des assurances en termes de financement et réservons notre vote en fonction du sort qui sera réservé aux amendements, en reconnaissant - une fois n'est pas coutume - que bien des amendements adoptés par la commission des lois rencontrent les nôtres. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Paul Raoult. Il a des choses à dire !
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'avais préparé une intervention d'une douzaine de pages, mais après avoir écouté attentivement les ministres, le rapporteur et les intervenants des différents groupes politiques qui m'ont précédé dans la discussion générale, j'ai préféré la mettre de côté.
M. Paul Raoult. Ce sera pire !
M. Alain Vasselle. Si je ne suis pas un spécialiste de la fonction publique, je la connais quand même un peu, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, je préside le centre de gestion de la fonction publique territoriale de mon département depuis maintenant près d'une quinzaine d'années.
M. Charles Gautier. C'est trop ! (Sourires.)
M. Alain Vasselle. Par ailleurs, j'ai présidé pendant plusieurs années ...
M. Paul Raoult. C'est trop !
M. Alain Vasselle. ...le groupe de travail sur la fonction publique territoriale constitué au sein de l'Association des maires de France. Enfin, j'ai siégé, aux côtés de Jean-Jacques Hyest et de bien d'autres collègues, au Conseil national de la fonction publique territoriale.
La fonction publique est un domaine d'une grande complexité, auquel peu d'élus sont initiés. D'ailleurs, à en juger au nombre de sénateurs aujourd'hui présents dans l'hémicycle, on voit que ce sujet ne mobilise pas les foules, ...
M. Paul Raoult. Pour le CPE, vous n'étiez pas là, mais il y avait beaucoup de monde !
M. Alain Vasselle. ...encore que les membres de la Haute Assemblée soient sans doute, de tous les parlementaires, ceux qui connaissent le mieux le fonctionnement de la fonction publique territoriale.
M. Bernard Murat. De toute manière, il y a la qualité !
M. Alain Vasselle. N'est-ce pas ce que l'on dit toujours en pareil cas, mon cher collègue ?
J'ai déposé un certain nombre d'amendements, et, à cet égard, je prie le président de la commission des lois et le rapporteur de m'excuser d'avoir ainsi un peu prolongé leurs travaux.
M. Paul Raoult. Pas trop !
M. Alain Vasselle. Pas trop ? Je pense savoir pourquoi !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vos amendements sont toujours très intéressants !
M. Alain Vasselle. Cela étant, ceux qui les ont examinés s'étaient sans doute déjà fait une religion quant au devenir de ce texte, mais il me semble quand même qu'un certain nombre de dispositions méritent d'être discutées, ce que l'examen des articles devrait permettre.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Bien sûr, c'est le rôle du Parlement !
M. Alain Vasselle. C'est effectivement le propre d'une assemblée parlementaire en démocratie.
Je n'imagine pas un seul instant d'ailleurs que le président de la commission des lois, son rapporteur ou l'un quelconque de ses membres aient pu gagner l'hémicycle cet après-midi tout imbus de la certitude d'avoir raison et avec le projet de faire s'incliner notre assemblée devant leurs amendements et ceux du Gouvernement. Cela n'a sans doute jamais même effleuré l'esprit du président ou du rapporteur... (Sourires ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
D'ailleurs, mes chers collègues, pas plus tard que la semaine dernière, lors de l'examen du projet de loi pour l'égalité des chances, la Haute Assemblée a démontré qu'elle était capable de modifier en séance les dispositions qui avaient été présentées par le Gouvernement ou par la commission.
M. Charles Revet. C'est son travail !
M. Alain Vasselle. C'est le rôle du Parlement, en effet !
Je ne désespère donc pas que le débat puisse nous permettre de déboucher sur quelques avancées. En tout état de cause, il me semble que nous devrons être guidés, dans l'examen de ce texte, par quelques principes et quelques objectifs.
Je ferai tout d'abord deux remarques d'ordre général à l'intention du Gouvernement, ainsi qu'à celle de notre président de séance, afin qu'il puisse en être fait écho auprès du président du Sénat et du président de l'Assemblée nationale.
En premier lieu, les présidents des deux assemblées ont indiqué à plusieurs reprises, au cours de diverses allocutions d'ouverture de session, qu'il conviendrait que le Gouvernement ne soumette plus aucun projet de loi au Parlement sans qu'il soit accompagné des textes réglementaires d'application correspondants.
En second lieu, je formulerai une suggestion qui n'a pas été reprise par les présidents des assemblées : il faudrait que, pour chaque texte, il soit procédé à une étude d'impact financier des dispositions présentées, pour les budgets des collectivités territoriales et pour celui de l'État. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Claude Domeizel. Très bien !
M. Alain Vasselle. Trop souvent, mes chers collègues - et nous en faisons l'expérience, notamment, lorsque nous examinons les projets de loi de finances ou les projets de loi de financement de la sécurité sociale -, nous prenons des mesures qui ont une incidence financière sans pouvoir harmoniser les choses et définir un équilibre, faute précisément de disposer d'études d'impact financier.
M. Paul Raoult. Il a raison !
M. Alain Vasselle. L'obligation de réaliser de telles études devrait même devenir, à mon sens, une disposition de nature organique, voire constitutionnelle.
M. Paul Raoult. Et les diminutions de recettes liées aux exonérations ?
M. Alain Vasselle. Certains de mes collègues siégeant sur les travées de gauche semblent partager mon sentiment à cet égard ; j'espère cependant qu'ils n'approuvent pas mon analyse dans le seul souci de manifester une opposition politicienne. Pour ma part, je dis ce que je pense, et je le dirais de la même manière si c'était un gouvernement de gauche qui était au pouvoir ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.) En effet, j'estime que nous devons tous prendre nos responsabilités.
M. Paul Raoult. Et l'évolution de l'endettement depuis quatre ans ?
M. Alain Vasselle. En ce qui concerne le texte lui-même, certains principes devraient régir sa rédaction.
Le premier de ces principes, qui d'ailleurs a guidé ou aurait dû guider l'élaboration des lois de décentralisation, c'est celui de subsidiarité : pourquoi renvoyer à un échelon plus élevé ce qui peut être accompli à un échelon de proximité ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous sommes d'accord !
M. Alain Vasselle. De ce point de vue, une même préoccupation nous anime donc. Qu'un grand nombre de concours et la quasi-totalité de la gestion relèvent des centres de gestion, à l'échelon départemental ou, quand ce dernier n'est pas le plus pertinent, à un échelon interdépartemental, régional ou interrégional, ne me choque pas.
Le second principe a été évoqué à la fois par MM. les ministres, par Mme le rapporteur et par plusieurs orateurs qui m'ont précédé : c'est celui de la clarification des compétences.
C'est là un exercice auquel on essaie de s'astreindre depuis maintenant quelques décennies. Ainsi, depuis plus de dix ans que je siège au Sénat, j'ai pu entendre nombre de mes collègues, ainsi que d'éminents membres du Gouvernement, défendre des textes visant à une telle clarification, mais je constate que l'on rencontre quelques difficultés pour atteindre cet objectif. Or nous avons ici une occasion rêvée d'appliquer le principe de la clarification des compétences.
En effet, chacun reconnaît que le CNFPT souffre d'une confusion des genres, puisqu'il doit accomplir des missions tant dans le domaine de la formation que dans celui de la gestion. Dans ces conditions, il ne parvient pas à exercer pleinement toutes ses compétences, parce que les moyens financiers dont il dispose sont peut-être insuffisants, comme cela a été souligné, mais également - je le rappelle à l'intention de ceux de nos collègues qui critiquent la création du centre national de coordination des centres de gestion -parce que, dans le cadre de l'accomplissement de ses missions de gestion, le CNFPT ne se réunit pas en conseil d'administration paritaire, seul le collège des employeurs étant alors appelé à siéger. Les représentants des syndicats de salariés ne sont associés que pour tout ce qui concerne le domaine de la formation. Par conséquent, si l'on devait invoquer la défense du paritarisme pour s'opposer à la clarification des compétences, un tel argument ne serait, à mon sens, guère recevable.
Quoi qu'il en soit, la gestion de proximité représente sans aucun doute la solution la plus pertinente à chaque fois que l'on peut y recourir, par application du principe de subsidiarité. Cela étant, nous devons tout de même chercher à faire preuve, au travers de nos propositions, d'un minimum de cohérence. On ne peut affirmer un principe sans aller jusqu'au bout de la démarche qu'il sous-tend.
Par ailleurs, Mme le rapporteur a beaucoup insisté, ainsi que plusieurs intervenants, sur un autre point important : la mise en place du nouveau dispositif institutionnel n'entraînera pas de coût supplémentaire pour les collectivités territoriales. Je pense que c'est bien ainsi que le Gouvernement l'entendait lorsqu'il a proposé la création du Centre national de coordination des centres de gestion, qui doit s'opérer à moyens constants, par le biais du redéploiement, au profit du nouvel établissement, de moyens financiers et humains du CNFPT. Cela concerne la gestion des cadres d'emploi de catégorie A, ainsi que toutes les autres missions qui seraient assignées au centre national de coordination des centres de gestion.
À cet égard, contrairement à Mme le rapporteur, à Yves Détraigne et à Jacques Mahéas, je ne suis pas de ceux qui pensent que l'institution d'une nouvelle structure nationale serait injustifiée. Sur ce point, j'ai entendu les arguments qui ont été avancés par Mme le rapporteur : la création du Centre national de coordination des centres de gestion engendrera des coûts supplémentaires, et les missions qu'il est prévu de lui confier sont insuffisantes.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Non !
M. Alain Vasselle. C'est ce que vous avez dit, madame le rapporteur !
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Non, je n'ai pas dit cela !
M. Alain Vasselle. Le compte rendu des débats permettra de trancher ce point, mais c'est ce que j'ai retenu des propos que vous avez tenus tout à l'heure.
En tout état de cause, on ne peut critiquer la création d'une nouvelle structure, qui contreviendra à la volonté de simplification administrative, et affirmer en même temps qu'elle devra avoir un champ d'action suffisamment large. L'objectif du Gouvernement était bien de créer une structure légère de coordination et de régulation pour des missions que les collectivités territoriales ne peuvent assumer de manière pertinente à l'échelon le plus bas.
De ce point de vue, je suis d'accord avec Mme le rapporteur pour estimer que les centres de gestion peuvent gérer les agents de catégorie A, les attachés, en faisant jouer l'échelon régional ou interrégional. À mes yeux, cela ne soulève pas de difficulté, ces centres ayant d'ailleurs démontré qu'ils savaient remplir de telles missions s'agissant des agents de catégorie B. Je ne vois pas pourquoi il n'en irait pas de même pour les cadres de catégorie A.
Le seul problème qui se pose, c'est que l'on n'a pas poussé jusqu'au bout la logique de la clarification des compétences, ce qui met en question la cohérence du texte. Le Gouvernement n'a pas tranché cette difficulté, à laquelle seul M. Mahéas a fait allusion.
En effet, la gestion des agents de catégorie A+ est laissée au CNFPT. Pourquoi cette exception ? Parce que l'on sait bien que l'échelon pertinent, pour la gestion de ces agents, ce ne sont pas les centres de gestion, ce n'est pas l'échelon régional, ni même interrégional. La preuve en est que la commission des lois a accepté un amendement de compromis de notre collègue Hugues Portelli, qui vise à confier à un centre national, non encore désigné, la gestion des agents de catégorie A+.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Ce n'est pas un centre national !
M. Alain Vasselle. C'est reconnaître que la gestion des agents de catégorie A+ doit être assurée à l'échelon national !
M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas bon !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur Vasselle, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Alain Vasselle. Je vous en prie, monsieur le président de la commission. Je vous écoute toujours avec plaisir !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il est vrai, monsieur Vasselle, que vous êtes l'un des meilleurs connaisseurs de la fonction publique territoriale. Cela étant, mon cher collègue, vous caricaturez tout de même quelque peu la position de la commission.
En ce qui concerne la création du Centre national de coordination des centres de gestion, nous avons estimé non pas que les missions qu'il est prévu de lui confier sont insuffisantes, mais qu'il n'est pas nécessaire de créer un centre national pour des fonctions aussi restreintes. C'est complètement différent ! Il nous est apparu possible, conformément aux principes de simplification et de subsidiarité que nous sommes tous soucieux de respecter, de confier la gestion de quelques dizaines de fonctionnaires de catégorie A+ à un centre de gestion, certaines de ces structures étant, nous le savons, très bien organisées et parfaitement à même d'accomplir cette mission.
En outre, mon cher collègue, vous avez dit que la mise en place du Centre national de coordination des centres de gestion ne serait pas coûteuse. Certes, des transferts de moyens du CNFPT sont prévus à son profit, mais il est également proposé d'instaurer une cotisation à la charge des centres de gestion, ce qui représenterait pour ceux-ci une dépense supplémentaire, ou plutôt une réduction de leurs moyens. Tout cela figure dans le projet de loi.
Afin de bien clarifier notre position, je tenais à préciser ces deux points. Si nous avions jugé indispensable de créer un Centre national de coordination des centres de gestion, nous ne proposerions pas de supprimer cette disposition, mais il nous est apparu que, dans un souci de simplification et d'économie de moyens, on pouvait très bien se dispenser d'instituer une telle structure, les missions visées pouvant parfaitement être assumées par un centre de gestion dans de bonnes conditions.
Telle est la réalité de notre position, monsieur Vasselle.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur Hyest, je pense que nos positions ne sont pas tellement éloignées. Je partage vos analyses et vos objectifs, ce qui m'a amené, entre autres raisons, à déposer des amendements qui s'inscrivent dans l'esprit du texte mais vont plus loin que celui-ci. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de m'en expliquer avec M. Jacob, même si cette question relève non pas de sa compétence directe, mais de celle de M. Hortefeux.
Effectivement, le texte prévoit une cotisation à la charge des centres de gestion. Cependant, j'ai prévu pour ma part, au travers de mes amendements, que le fonctionnement du Centre national de coordination des centres de gestion soit assuré grâce à un transfert de moyens du CNFPT. Ce point est clair.
Il est également clair que la modestie du champ des missions qu'il est prévu de confier au nouveau centre national pouvait amener, très naturellement et très légitimement, à s'interroger sur la pertinence de la création de ce dernier.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Exactement !
M. Alain Vasselle. Or je propose d'étoffer ces missions, en allant bien au-delà de ce que prévoit le texte, pour leur donner un maximum de consistance et de cohérence,...
M. Jacques Mahéas. Vous vous expliquerez plus tard sur ce point ! Nous sommes dans la discussion générale !
M. Alain Vasselle. ...tout en restant dans la logique de la clarification des compétences, afin de permettre à chaque organisme de remplir au mieux ses missions, à savoir la formation professionnelle continue, voire initiale, pour le CNFPT, et, par application du principe de subsidiarité, la gestion des agents de catégories A et A+ pour le Centre national de coordination des centres de gestion, ainsi que toute une série d'autres missions que l'on me permettra de ne pas développer ici, puisque nous sommes dans la discussion générale, mais sur lesquelles je reviendrai en présentant mes amendements.
M. Jacques Mahéas. Oui !
M. Alain Vasselle. Je ne m'attarderai pas plus longtemps sur la pertinence ou non d'instaurer un Centre national de coordination des centres de gestion, mais je tenais tout de même à dire que, quand je vous ai entendue, Mme le rapporteur, affirmer que les élus étaient, à la quasi-unanimité, opposés à la création d'une telle structure...
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Au sein de la commission des lois !
M. Alain Vasselle. Ah bon ! Vous ne visiez donc pas les élus locaux ?
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Non, j'ai fait un compte rendu de la réunion de la commission des lois. Je l'ai bien précisé, monsieur Vasselle !
M. Alain Vasselle. Dont acte ! J'avais cru comprendre que vous parliez de l'ensemble des élus, or je puis vous dire que les élus représentant les communes non affiliées regroupées au sein de l'Union nationale des centres de gestion de la fonction publique territoriale, l'UNCDG, sont favorables à la création du Centre national de coordination des centres de gestion.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Pas tous !
M. Alain Vasselle. La très grande majorité d'entre eux, en tout cas, puisque c'était la position exprimée par le président, après délibération du conseil d'administration.
En outre, j'ai participé, la semaine dernière, à une réunion du groupe de travail sur la fonction publique territoriale de l'Association des maires de France. Lorsque je l'ai interrogée sur la mise en place d'un Centre national de coordination des centres de gestion, sa présidente, Mme Descamps-Crosnier, m'a indiqué qu'elle était souhaitée par l'Association des maires de France. Cela figurera, je pense, dans le procès-verbal des travaux de ce groupe.
Par ailleurs, si je n'ai pas recueilli la position de l'Assemblée des départements de France, je sais néanmoins que son président, M. Claudy Lebreton, qui a longtemps présidé un groupe de travail au sein de l'UNCDG, était favorable à cette idée, puisqu'il avait préparé un projet allant en ce sens lorsqu'il était membre du conseil d'administration de cette instance. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas vrai !
M. Alain Vasselle. Quant à la position de l'Association nationale des élus régionaux, je ne la connais pas.
Je me permets de livrer ces informations à nos collègues, tout en leur demandant, ainsi qu'à M. le président de la commission et à Mme le rapporteur, de bien vouloir m'excuser si ma façon de m'exprimer donne parfois le sentiment que je développe une forme d'agressivité à l'encontre de ceux qui ont travaillé sur ce projet de loi.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non ! (Sourires.)
M. Alain Vasselle. Je voudrais que l'on ne se méprenne pas sur mes intentions : j'essaie simplement d'apporter ma contribution à l'élaboration d'un texte, compte tenu de l'expérience qui est la mienne, mais je me plierai, le cas échéant, à la volonté de la majorité. Il n'est pas question pour moi de livrer des batailles inutiles, mais il est de mon rôle et de mon devoir de faire part de mes convictions, qui sont partagées par un certain nombre de parlementaires et d'élus.
En ce qui concerne la formation, la référence aux acquis de l'expérience est un progrès considérable et je tiens à saluer cette initiative du Gouvernement. Cela fait de nombreuses années que nous y travaillons et que nous en parlons dans toutes les associations représentatives d'élus.
Il était quand même incompréhensible d'obliger les candidats souhaitant faire carrière dans la fonction publique à passer un concours sans tenir compte des acquis de l'expérience qui étaient les leurs dans ce domaine. De même, il était incompréhensible de ne pas tenir compte, dans certaines filières, des diplômes acquis dans le cadre de la formation initiale.
Je me réjouis d'avoir entendu que, dans le cadre du dispositif réglementaire, les concours seront organisés en tenant compte des acquis de l'expérience et des diplômes : cela rendra plus attractives les carrières de la fonction publique.
Ainsi que l'ont souligné à juste titre certains collègues, les problèmes auxquels nous devrons faire face sont inhérents au papy-boom. Nous ne sommes pas suffisamment préparés à l'explosion qu'entraînera ce phénomène et qu'il nous faudra affronter dans les dix prochaines années : une pénurie de candidats pour occuper des postes importants dans la fonction publique territoriale. Les besoins seront d'autant plus importants que l'intercommunalité a évolué, que de nouveaux métiers sont apparus et que les collectivités territoriales doivent exercer de nouvelles compétences. Il y a donc lieu, aujourd'hui, de simplifier les procédures de recrutement.
Aussi, je me réjouis que le Gouvernement ait pris l'initiative non seulement de tenir compte des acquis de l'expérience, mais également de prévoir des passerelles entre la fonction publique d'État et les autres fonctions publiques.
La fonction publique d'État a trop longtemps guidé le statut de la fonction publique territoriale, lequel doit désormais s'adapter à son temps et aux besoins de nos collectivités territoriales, quelle que soit leur nature. Pour ce faire, il est impératif que les passerelles entre les différentes fonctions publiques fonctionnent correctement dans tous les sens : de la fonction publique d'État vers la fonction publique territoriale, et inversement.
Je me réjouis également de cette avancée, tabou il y a encore quelque temps : la possibilité de cumuler une activité dans la fonction publique et dans le secteur privé. Nous devons nous adapter et évoluer et, sans être persuadé que les pas que nous faisons seront suffisants, je considère, en tout état de cause, qu'ils vont dans la bonne direction.
Bien d'autres sujets devront être abordés, sur lesquels je ne m'attarderai pas, sachant que nous les évoquerons lors de la discussion des amendements.
Je me contenterai donc de citer le compte épargne-temps, dont la gestion, difficile, aurait pu être confiée au Centre national de coordination des centres de gestion s'il avait existé, et la mutualisation des moyens pour les contrats d'assurance maladie et accident : le coût de ceux-ci a explosé dans des proportions telles qu'il est très difficile pour les centres de gestion ou les collectivités d'y faire face.
M. Claude Domeizel. À cause de la loi sur les retraites !
M. Alain Vasselle. Il faudrait prévoir une mutualisation au niveau national ou, au moins, permettre de signer au niveau national des contrats d'assurance pour le compte des collectivités.
Je pourrais citer encore le problème de l'hygiène et de sécurité et de nombreux autres sujets qui ont été évoqués ici et là, mais nous aurons l'occasion de les aborder au cours de l'examen du texte.
Pour ma part, je me réjouis que ce projet de loi fasse l'objet de deux lectures. Celles-ci permettront de poursuivre la concertation, de maintenir les contacts à tous les niveaux, d'échanger, de contribuer à la modernisation du statut de la fonction publique que nous devrons faire vivre, mes chers collègues, non seulement au niveau national, mais également à l'échelle européenne. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. Monsieur Vasselle, tout d'abord, connaissant votre tempérament, nous n'avons pas ressenti votre intervention comme agressive. Ensuite, je ne prétends pas me faire l'écho de tous les élus de France : c'est en tant que rapporteur de la commission des lois que je m'exprime. Cela étant, malgré votre exposé brillant et habile, je ne pense pas non plus que vous représentiez ici toutes les associations d'élus.
M. Alain Vasselle. Loin s'en faut !
M. Jacques Mahéas. Heureusement !
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur. J'ai reçu les représentants de toutes les associations et l'ARF et l'ADF se sont prononcées contre le Centre national de coordination des centres de gestion.
Pour ce qui est de l'AMF, comme dans toutes les associations d'élus - et vous savez pourquoi je m'attarde sur celle-ci, même si je ne parle pas en son nom aujourd'hui - si toutes les sensibilités sont représentées en commissions, ce sont les bureaux qui prennent les décisions. C'est vrai pour la création du Centre national de coordination des centres de gestion, mais également, par exemple, pour un autre sujet qui ne manquera pas d'être abordé : le socle social que l'on pourrait imaginer dans ce projet loi.
Il faut distinguer les positions exprimées dans les commissions des décisions prises par les bureaux. Je puis vous confirmer que l'AMF était favorable à la coordination nécessaire au niveau national, mais qu'elle n'était pas favorable à la création d'un établissement public nouveau.
M. le président. Monsieur Vasselle, je ferai savoir à M. le président du Sénat que vous partagez son souhait que les décrets d'application soient présentés au Parlement en même temps que les textes de loi.
La parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la véritable mutation que la France a connue en matière de décentralisation depuis le début des années quatre-vingt a fait de la fonction publique territoriale un outil essentiel de la réforme.
Avant la loi de 1984, les agents des communes, des départements et des régions étaient soumis à des règles juridiques différentes. La décentralisation a généré la fonction publique territoriale.
De nouveaux métiers sont apparus, ne serait-ce qu'avec l'émergence de l'intercommunalité. Une nécessaire adaptation des personnels et de leur formation en découle, qu'il s'agisse d'agents recrutés à dessein ou d'agents transférés.
Le texte que nous examinons aujourd'hui a pour objet de rendre cet outil le plus efficace et le plus opérationnel possible.
Ainsi, je me félicite que ce projet de loi instaure pour la fonction publique territoriale un droit individuel à la formation professionnelle qui reprend le principe du droit individuel à la formation, en vigueur pour le secteur privé. Celui-ci concernera tous les agents de la fonction publique territoriale occupant un emploi permanent.
Le parcours de formation de l'agent tout au long de sa vie doit être pris en compte pour réduire la durée des formations obligatoires à caractère statutaire ou dans le cadre de la promotion interne. Un livret individuel de formation qui suivra l'agent pendant toute sa carrière verra le jour et retracera les formations et bilans professionnels dont l'agent aura bénéficié.
Ce document devrait faciliter la gestion des ressources humaines et éviter des incohérences dans les parcours professionnels, favorisant des stratégies de progression individuelle et collective
Le texte prévoit aussi la possibilité de dispenser d'une partie des formations obligatoires les agents disposant d'une expérience professionnelle en rapport avec les missions du cadre d'emplois concerné. Il s'agit là d'un progrès essentiel.
La promotion « au choix » en fonction de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience des agents éligibles au regard des conditions statutaires répondra à une attente souvent, et depuis bien longtemps, exprimée.
Je me félicite que ce projet de loi fasse oeuvre de clarification. Dans cet esprit, le CNFPT est recentré sur sa mission essentielle, à savoir la formation, et sur son action dans les domaines de la reconnaissance de l'expérience professionnelle et de la validation des acquis de l'expérience.
Il paraît en effet indispensable que soit organisée la coordination de l'ensemble des acteurs en matière d'emploi et de formation des agents territoriaux, sur le modèle des conférences régionales de l'emploi. Le CNFPT se verrait déchargé de plusieurs compétences de gestion qu'il exerce jusqu'à présent.
Ce texte constitue également un progrès non négligeable pour les personnes handicapées. En tant que membre de la commission des affaires sociales, j'y suis très sensible. La loi de 1984 prévoit pour elles la possibilité d'acquérir la qualité de fonctionnaire par une procédure dérogatoire au principe du concours, le recrutement s'effectuant par un contrat au terme duquel l'agent a vocation à être titularisé.
La loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a modifié cet article en précisant que la durée du contrat est équivalente à la période de stage prévue par le statut particulier des différents cadres d'emplois.
Afin que les personnes handicapées souhaitant accéder, dans le cadre de cette procédure, à l'un des cadres d'emplois des administrations territoriales puissent bénéficier de la même formation que celle qui est dispensée aux lauréats des concours, il est proposé d'adapter la durée du contrat qui leur est applicable.
L'organisation des concours est elle aussi clarifiée afin de distinguer les trois voies d'accès par concours. Les concours internes seront désormais ouverts aux militaires et aux magistrats.
Le projet de loi prend enfin en compte le devenir des emplois fonctionnels correspondant à des emplois de direction pouvant être créés dans des collectivités territoriales ou des établissements publics locaux répondant à certains seuils démographiques.
Ces postes sont essentiels pour le bon fonctionnement de la collectivité et constituent des charnières entre les élus locaux et les services administratifs. Il s'agit avant tout de reconnaître la responsabilité et le poids que peuvent induire de tels postes au sein d'une collectivité.
Je souhaite attirer votre attention sur un point, monsieur le ministre : depuis la publication du décret du 6 janvier 2005, les fonctionnaires du grade de directeur relevant du cadre d'emplois des attachés territoriaux peuvent être détachés sur l'emploi fonctionnel de directeur général adjoint des communes de 150 000 à 400 000 habitants. Or cette possibilité n'a pas été étendue aux communes de plus de 400 000 habitants. La situation des fonctionnaires occupant déjà ces emplois fonctionnels et relevant de cette strate démographique est désormais moins favorable que celle de leurs homologues de la strate inférieure.
Une solution technique, la plus simple, aurait consisté à modifier les textes réglementaires traitant cette question. Le Gouvernement est-il prêt à faire un geste dans cette direction ? Je vous remercie, monsieur le ministre, de me préciser votre position à ce sujet.
Au total, ce projet de loi a le grand mérite de faire oeuvre clarification. Il est facteur de progrès en termes de reconnaissance de la formation tout au long de la vie, de l'expérience professionnelle, d'une meilleure intégration dans la fonction publique territoriale pour les personnes handicapées.
Le groupe du RDSE dans son ensemble a donc, sous réserve des débats à venir, un préjugé favorable concernant ce projet de loi.
Je tiens à saluer le travail précis et inspiré par un sens pratique essentiel qu'a effectué la commission des lois sur l'initiative de son président, Jean-Jacques Hyest, et de son rapporteur, Jacqueline Gourault.
Je tiens également à saluer, monsieur le ministre, la grande efficacité des discussions que vous menez avec les organisations syndicales. Ce sont incontestablement votre autorité personnelle et vos convictions pour mener à bien les négociations qui vous ont permis d'aboutir à l'accord du 25 janvier dernier.
Le texte que nous allons examiner vient compléter la modernisation de nos institutions, que le Gouvernement mène avec une grande détermination.
Nous allons franchir aujourd'hui une nouvelle étape importante parce qu'elle concerne l'existence des personnes qui, aux côtés des élus, ont vocation à entretenir le sens du bien commun, sans approche partisane et dans le respect de l'unité de la République. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Mme Gélita Hoarau. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'élue de la Réunion que je suis ne pouvait pas ne pas intervenir sur ce texte relatif à la fonction publique territoriale.
Comment ne pas évoquer, à l'occasion de l'examen de ce projet de loi sur la fonction publique territoriale, la situation, à la Réunion, des milliers de personnels non titulaires en attente depuis de trop nombreuses années d'un véritable statut ? Pour bien mesurer ce que cela représente, il faut avoir à l'esprit que ces personnels non titulaires représentent dans notre île près de 8 000 personnes, soit presque 80 % de l'effectif de l'administration communale.
Cette question, non réglée depuis des années, semble inextricable. Il est pourtant de la responsabilité de l'État, dans la concertation avec l'ensemble des partenaires et notamment avec les organisations syndicales, de favoriser et d'ouvrir les voies pour une solution globale du problème. Il y va de l'avenir de notre administration communale.
Nul ne conteste la difficulté de la question. Elle résulte essentiellement des contradictions nées à la fois de l'existence chez nous d'une fonction publique à plusieurs vitesses et de la faiblesse des ressources des communes.
Chacun connaît la situation de disparité entre, d'une part, le personnel titulaire bénéficiaire du régime dit des surrémunérations, instauré par décret, et, d'autre part, la masse d'employés communaux non titulaires rémunérés pour nombre d'entre eux au SMIC. Leur aspiration légitime à la titularisation se heurte à l'impossibilité pour les communes réunionnaises, déjà exsangues financièrement, d'y répondre, du fait notamment du régime de la surrémunération.
Dans la concertation avec les organisations syndicales, un certain nombre de communes réunionnaises ont procédé à l'alignement de la rémunération du personnel non titulaire sur la grille de la fonction publique métropolitaine. D'autres sont restées en retrait.
Il appartient au Gouvernement, qui a instauré par décret le régime des surrémunérations, au coeur des contradictions actuelles, de prendre les initiatives attendues par tous et de favoriser la relance de ce processus, d'autant que la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique n'a en rien réglé le problème.
Sous couvert de permettre la signature de CDI pour les non-titulaires, cette loi, qui prévoit la possibilité de conclure un CDD de trois ans, renouvelable une fois, avant de déboucher ou non sur un CDI, aggrave en fait la précarité et rend les bénéficiaires de ces contrats « taillables et corvéables à merci », pour reprendre l'expression des organisations syndicales de la Réunion, qui se sont toutes prononcées contre cette mesure.
À l'évidence, pour la Réunion, une solution juste et acceptée par tous ne peut être trouvée que dans la mise en oeuvre d'une large concertation entre l'Association des maires, les organisations syndicales et l'État.
Je voudrais également formuler quelques observations d'ordre général sur un dossier qui me tient particulièrement à coeur, celui du transfert du personnel TOS vers les collectivités.
Tirant les conséquences d'une décision du Conseil constitutionnel sur cette question, j'ai déposé une proposition de loi visant à tenir compte des caractéristiques particulières de la Réunion et de son indiscutable singularité, notamment au niveau de la démographie scolaire, afin d'exclure la Réunion de cette mesure. Une telle mesure, vous le savez, est largement contestée à la Réunion, tant par les personnels que par les principales collectivités concernées, c'est-à-dire la région et le département.
Faut-il rappeler que le transfert du personnel TOS vers les collectivités risque d'engendrer une aggravation des dépenses de fonctionnement de ces collectivités et d'obérer la réalisation de leurs priorités en termes d'investissement ? Faut-il rappeler qu'à la Réunion la dynamique démographique scolaire exige de soutenir un rythme de construction d'environ un lycée et demi tous les deux ans pour la région et de deux collèges tous les ans pour le département ?
Aussi, c'est tout naturellement que je m'associe aux amendements visant à refuser le transfert du personnel TOS vers les collectivités.
Pour autant, si ces collectivités étaient en définitive contraintes d'accepter ce transfert, j'invite le Gouvernement à se montrer attentif et ouvert aux propositions des régions, notamment d'outre-mer, en faveur d'une plus grande souplesse dans la mise en oeuvre de la loi. Je défendrai un amendement en ce sens.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, telles sont les quelques remarques que je voulais formuler sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Arnaud. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. Philippe Arnaud. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la fonction publique territoriale que nous examinons aujourd'hui était attendu ; il est donc le bienvenu.
Vos propositions, messieurs les ministres, complétées et amendées par la commission des lois et son rapporteur, notre excellente collègue Jacqueline Gourault, vont indiscutablement dans le bon sens.
À défaut d'une réforme en profondeur du statut de la fonction publique territoriale, pourtant tant attendue par les élus locaux, les adaptations proposées clarifient les champs de compétences et les missions des centres de gestion et du CNFPT, simplifient les règles de promotion interne des fonctionnaires territoriaux, notamment par une meilleure prise en compte des compétences acquises par l'expérience, mettent un terme à l'absurdité de certaines formations obligatoires pour valider après un concours un changement de cadre statutaire. Tout cela est positif.
Mais, messieurs les ministres, de grâce, résistez à la tentation de créer un « machin » supplémentaire avec le Centre national de coordination des centres de gestion.
Je le sais, on ressent parfois le besoin de coordonner les coordinations et, dès que l'on confie des compétences à des entités, pourtant réputées responsables et par ailleurs encadrées, naît un sentiment d'inquiétude légitimant la création d'une nouvelle instance pour veiller au grain. La nature est ainsi faite : les institutions produisent des institutions, les administrations génèrent de nouvelles administrations. Les usines à gaz, messieurs les ministres, si complexes soient-elles, ont le mérite de fabriquer du gaz, et l'on peut s'interroger sur l'utilité des usines à brasser de l'air...
Messieurs les ministres, nous vous demandons le retrait de cette proposition, la gestion de quelques dizaines de cadres de catégorie A+ pouvant être assurée par les structures existantes.
J'en viens à un sujet qui me tient à coeur, relayant en cela les graves difficultés des élus des communes rurales quand ils sont confrontés à la suppression d'un service - donc d'un poste d'agent titulaire de la fonction publique territoriale - à la suite d'une décision prise par une autorité supracommunale, qui s'impose donc à la collectivité.
Déjà, en 1998, j'étais intervenu à cette tribune sur ce sujet, largement soutenu sur toutes les travées de notre assemblée, et j'avais obtenu du Gouvernement à l'époque l'engagement que ce problème serait réglé dans le cadre d'une réforme des statuts de la fonction publique territoriale.
La meilleure illustration de mon propos est la situation née de la fermeture d'une classe dans une petite commune, décidée - et c'est légitime - par l'autorité académique, c'est-à-dire par l'État, et qui s'impose donc, souvent douloureusement, à celle-ci.
Je dis « douloureusement », parce que, outre la désolation pour des élus de voir une classe ou une école fermer, le budget de la commune peut en être très sensiblement grevé. Dans certains cas, la contribution nouvelle auprès des centres de gestion, qui représente 150 % du salaire de l'agent qui a perdu son poste, peut en effet représenter 30 % des recettes fiscales de la collectivité.
Par ailleurs, il convient de rappeler que les communes dont l'école aura été fermée seront appelées à contribuer par la suite aux frais de fonctionnement de l'école voisine.
Les communes se trouvent donc pénalisées par une décision qui n'est pas de leur fait. Cette situation n'est pas conforme à l'esprit de la loi qui, à l'époque, avait voulu responsabiliser davantage les collectivités au regard de leurs actes.
En 1998, lors du débat que nous avions eu sur ce sujet, notre collègue Michel Charasse avait suggéré que, dans le cadre d'une réforme du statut de la fonction publique territoriale, le Gouvernement examine la possibilité, en cas d'ouverture de classe, d'autoriser les communes rurales et leurs EPCI à engager des contractuels non titularisables si le conseil municipal en délibérait ainsi. Si la classe venait à être supprimée, ces agents pourraient alors prétendre à l'allocation chômage versée par les ASSEDIC, puisque les communes ont le droit d'adhérer à ce régime. Il avait ajouté avec insistance que cette question était importante et ne devait pas être évacuée.
Vous l'aurez remarqué, messieurs les ministres, mes chers collègues, il ne s'agit que de situations particulières intéressant des postes fonctionnels dont la création ou la suppression est totalement indépendante du bon vouloir des élus locaux.
Il conviendrait donc, pour respecter un autre principe fondamental de la fonction publique territoriale qu'est la titularisation des agents et la garantie de l'emploi, que la décision de pourvoir ces postes par des agents contractuels soit dûment motivée par délibération du conseil municipal. C'est pourquoi je vous proposerai un amendement en ce sens. Je vous appelle, mes chers collègues, à saisir l'opportunité de ce projet de loi pour lui donner une suite favorable. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce n'est ni fait ni à faire ! Cette expression populaire résume bien ce que l'on ressent à l'examen du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Un peu plus de vingt ans après le vote de la loi fondatrice d'une fonction publique territoriale, il n'est pas surprenant qu'élus et syndicats sollicitent un rafraîchissement du texte, même si celui-ci avait déjà subi quelques profondes retouches, en 1987 avec la loi Galland et en 1994 avec la loi défendue par notre ancien collègue Daniel Hoeffel.
Les acteurs de l'époque se souviennent des débats qu'a suscités la loi du 26 janvier 1984. Véritable monument législatif, ce texte était le troisième volet de la décentralisation voulue par François Mitterrand, portée par Pierre Mauroy et Gaston Defferre.
Ce fut aussi une étape capitale pour la nouvelle fonction publique à trois versants : fonction publique d'État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière. Pour les agents territoriaux, ce fut la reconnaissance de leur statut de fonctionnaire. Pour les collectivités, c'était la condition indispensable pour qu'elles puissent faire valoir pleinement leur autonomie.
La loi du 26 janvier 1984 a donc contribué à la réussite de la grande loi de décentralisation.
Après ce bref rappel, j'en viens au projet de loi dont le Sénat est saisi aujourd'hui, projet dont l'élaboration s'apparente à un véritable parcours du combattant, chaotique, hésitant, incertain, avant d'être adopté en conseil des ministres : trois ministres, douze versions, quatre ans de réflexion, de rapports et d'études diverses et variées...
Au sujet des études, monsieur le président, je ne peux m'empêcher de m'insurger de nouveau sur les méthodes de notre assemblée. Je veux parler d'un groupe de travail chargé de réfléchir aux voies et moyens d'une réforme de la fonction publique territoriale, présidé par notre collègue Jean-Jacques Hyest. Par deux fois, le 6 mai et le 9 octobre 2003, j'ai demandé pour quelles raisons l'opposition en avait été écartée.
Par deux fois, j'ai demandé des éclaircissements au président de notre assemblée : ou bien le groupe de travail était exclusivement réservé à l'UMP, et dans ce cas les moyens du Sénat n'avaient pas à être mis à sa disposition ; ou bien il s'agissait d'un groupe de travail sénatorial - comme Mme Gourault le laisse croire dans son rapport -, auquel cas il devrait être ouvert à tous les groupes politiques !
Je regrette que mes questions soient toujours en attente de réponses. Surtout, monsieur le président, je m'insurge contre le fait que ce rapport reçoive abusivement aujourd'hui le sceau du Sénat.
Nous avons lu ce projet de loi qui, en trente-six articles, apporte diverses dispositions concernant la formation et la gestion des agents territoriaux, les organes de la fonction publique territoriale, l'hygiène, la sécurité et la médecine du travail.
Monsieur le ministre, je n'ai trouvé dans ce texte ni fil conducteur, ni perspective, ni aucune ambition. Certes, tout n'est pas à jeter, loin de là, car votre projet de loi comporte des avancées qui répondent à de nombreuses attentes des élus et des agents.
« Ni fait, ni à faire », disais-je au début de mon propos : telle est sans aucun doute la raison du rejet quasi-unanime des acteurs de la fonction publique territoriale.
Or la préparation de ce projet de loi aurait pu être l'occasion d'approfondir certains sujets, par exemple les effets des avancements et des promotions. Il ne faut pas perdre de vue qu'en moyenne les agents atteignent le dernier échelon entre vingt-cinq et trente ans de carrière, ce qui engendre découragement et démotivation en fin de parcours professionnel.
Peut-être faudrait-il trouver un nouvel équilibre entre la formation tout au long de la vie et la formation initiale dispensée aux fonctionnaires nouvellement recrutés. D'autant que le contenu de ces formations est souvent, pour ces derniers, la répétition de formations qu'ils ont reçues quelques mois auparavant, lors de leur préparation au concours.
Peut-être faudrait-il également revoir la partition des lauréats entre les concours internes et les concours externes. La question est simple : faut-il accueillir plus de nouveaux fonctionnaires venant de l'extérieur afin d'apporter du sang neuf, ou bien faut-il donner plus de chance aux fonctionnaires en place, et ainsi les motiver pour aborder la deuxième partie de leur carrière ?
Certes, la loi aborde certains sujets intéressants, mais elle ne tient pas assez compte de l'inadaptation de la législation en vigueur pour les communes rurales, tant en matière de recrutement qu'en termes de progression de carrière.
Dans mon département, je partage quotidiennement les difficultés que rencontrent les maires des petites communes lorsqu'ils doivent recruter un secrétaire de mairie, par exemple. La polyvalence et parfois le sentiment d'isolement sont des freins pour susciter des candidatures.
En ce qui concerne la progression de carrière de leurs agents, les maires acceptent également mal les effets des quotas.
Je reviendrai sur ces deux points lors de la discussion des articles.
Voilà quelques sujets, parmi d'autres, qui auraient mérité une expertise plus poussée. Néanmoins le temps m'oblige à laisser ces considérations générales pour en revenir au projet de loi lui-même.
Après le passage devant le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, patatras ! Vous appuyant sur l'avis du Conseil d'État, abusivement à mes yeux, vous avez introduit des modifications substantielles. Croyez-vous sincèrement, monsieur le ministre, qu'aujourd'hui le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale approuverait cette nouvelle version du texte, profondément remaniée ? J'en doute fort !
Pour respecter l'ordre des chapitres, j'aborderai alternativement la formation et les organes de la fonction publique territoriale, avec un fil conducteur : tenter de déterminer la bonne frontière entre les tâches de formation et celles de gestion.
Certes, en matière de formation, ce texte comporte de judicieuses propositions. Ce volet formation prendra d'autant plus d'importance que, du fait du grand nombre de départs en retraite, nous devons nous attendre à davantage de recrutements, donc à un plus grand besoin en matière de formation.
Cependant, qui dit formation dit également examens et concours, ce qui me conduit à prononcer quelques mots sur l'Observatoire de l'emploi, des métiers et des compétences de la fonction publique territoriale. Comment conduire des politiques de formation sans maîtriser un certain nombre d'informations concernant les métiers exercés, l'évolution des politiques publiques territoriales et les flux des agents ?
C'est pourquoi nous considérons que l'Observatoire de la fonction publique territoriale, parce qu'il est l'élément pivot du dispositif de formation, doit demeurer de la compétence du Centre national de la fonction publique territoriale. Cela doit s'accompagner, c'est l'évidence même, d'un partage des informations avec tous les autres partenaires concernés : Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, centres de gestion et services de l'État.
À ce propos, l'absence de coordination nationale en matière de concours, notamment pour les catégories A, présente un risque réel d'éclatement du statut
Ce projet, qui relève du « bidouillage », ne répond au fond ni à la situation des centres de gestion ni à celle du Centre national de la fonction publique territoriale.
Sans remettre en cause les capacités des centres de gestion, se pose néanmoins la question particulière des concours des cadres d'emplois supérieurs de la fonction publique territoriale.
Depuis plusieurs années, le CNFPT s'est engagé dans une profonde réforme de son dispositif de formation des cadres supérieurs, en se rapprochant notamment des grandes écoles de l'État. Ce mouvement de réforme doit être poursuivi en plaçant le CNFPT sur un pied d'égalité avec ses homologues de l'État pour réaffirmer le principe de comparabilité, principe fondamental inscrit dans la loi de 1984.
Enfin, toujours en ce qui concerne le volet concours, rien n'est prévu pour tenter de régler la délicate question des « reçus-collés », qui, soit dit en passant, n'existaient pas dans la loi du 26 janvier 1984 d'origine !
On a beaucoup parlé, ici ou là, de clarification des missions des organes de la fonction publique territoriale. Nous y souscrivons totalement, mais il faut être prudent dans ce domaine. D'autant que, bon an, mal an, les élus, les fonctionnaires et les personnes extérieures à la fonction publique se sont finalement bien adaptés au dispositif, malgré sa complexité.
Il faut dire que, dans de nombreux départements - et c'est une bonne chose -, se créent des maisons de la fonction publique qui regroupent en un même lieu le centre de gestion et le Centre national de la fonction publique territoriale. Alors, ne bouleversons pas tout à chaque changement de majorité !
C'est ainsi que l'idée de créer une nouvelle structure à l'échelon national, le Centre national de coordination des centres de gestion, est a priori séduisante : au CNFPT serait attribuée la formation, au Centre national de coordination des centres de gestion reviendrait la gestion. Mais apporte-t-elle réellement un plus en termes de clarification ?
Au passage, je veux souligner qu'il s'agissait non pas d'une proposition de M. Claudy Lebreton, mais d'une des propositions de M. Claudy Lebreton.
M. Jacques Mahéas. Absolument !
M. Claude Domeizel. J'ai noté, dans le rapport rendu par l'Association des départements de France, que cette dernière prenait acte, tout simplement, de la création de ce Centre national de coordination des centres de gestion.
L'un des inconvénients majeurs de cette disposition est que l'on reste dans un système où seules les petites communes sont représentées. Rien n'est prévu dans la loi sur l'association des représentants des collectivités non affiliées.
Enfin, le texte reste muet sur la question du financement ; j'y reviendrai. Les compensations financières seront-elles à la hauteur des compétences transférées ?
Je reviens sur les concours de la fonction publique territoriale.
Pour les collectivités obligatoirement affiliées, les centres de gestion organisent l'ensemble des concours et examens professionnels des catégories A, B et C, à l'exception des concours et examens professionnels de niveau A+. Les collectivités non affiliées gardent la possibilité d'organiser les concours de catégorie C.
Même si le principe d'unité de la fonction publique territoriale est quelque peu altéré, nous approuvons les principes de ce montage.
S'agissant des modalités du transfert des missions, mais également des personnels, ou de la compensation financière entre le CNFPT et les centres de gestion, le projet de loi demeure vague : il se contente de renvoyer sans plus de précision à des conventions et, à défaut d'accord, à un décret. Aussi voit-on poindre un danger, celui de rogner sur les crédits de formation au profit d'actes de gestion.
L'article 12 prévoit l'affiliation volontaire des départements et des régions aux centres de gestion pour les seuls personnels transférés par la loi du 13 août 2004 : les TOS. Ce qui pourrait être pris à première vue pour un gag n'est, en fait, qu'un nouveau révélateur de la préparation hasardeuse de l'acte II de la décentralisation du gouvernement Raffarin ; nous reviendrons sur ce point lors de l'examen de l'article.
J'en viens aux questions financières.
Le projet de loi ne comporte aucune analyse des conséquences financières qu'il induit tant pour les collectivités territoriales que pour les institutions de la fonction publique territoriale.
Certes, le président de notre assemblée, M. Christian Poncelet, a largement fait savoir qu'il fallait réformer la législation sur la fonction publique territoriale à coût constant. Mais que se passerait-il, monsieur le ministre, s'il s'agissait d'une proposition de loi plutôt qu'un projet de loi ? Je suis certain que le Gouvernement invoquerait l'article 40 de la Constitution sur bon nombre d'articles, si bien qu'au final la proposition de loi serait réduite comme peau de chagrin.
Pour rester fidèle au voeu de M. Christian Poncelet, devons-nous utiliser une sorte d'article 40 symétrique pour rejeter le projet de loi du Gouvernement ?
Monsieur le ministre, nous ne sommes pas opposés au droit individuel à la formation, le DIF, bien au contraire, car il représente à nos yeux, pour la société comme pour les personnes, un précieux investissement à long terme. Néanmoins, lorsqu'on affirme que la mise en place du DIF se fera à moyens constants cela témoigne soit d'une méconnaissance fondamentale du projet de loi, soit d'une volonté de masquer la réalité.
Ayons les pieds sur terre ! Le projet de loi prévoit que chaque agent territorial devra bénéficier de trois jours par an de formation individuelle, le tout étant cumulable sur six ans. Cela représente, pour 1,4 million d'agents territoriaux concernés, 4 millions de journées formation-stagiaires ! Savez-vous, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'aujourd'hui, toutes formations confondues, le CNFPT fournit environ 1,7 million de journées formation-stagiaires ?
En supposant, dans le meilleur des cas, que les agents territoriaux n'utilisent que les deux tiers de leurs droits, le reste étant inclus dans la formation continue, le besoin de financement supplémentaire pour le CNFPT peut être estimé à 100 millions d'euros.
M. Paul Blanc. Il faut supprimer les 35 heures !
M. Claude Domeizel. Le transfert des TOS vers les départements et les régions induira, naturellement, le versement par les conseils généraux et régionaux d'une cotisation au Centre national de la fonction publique territoriale, laquelle ne sera d'ailleurs pas compensée par l'État puisqu'il ne versait pas, à l'époque, de cotisation pour ces fonctionnaires.
Cela engendrera une ressource supplémentaire pour le Centre national de la fonction publique territoriale, certes, mais il n'en devra pas moins faire face à des coûts considérables en termes de formation. C'est une nouvelle démonstration que la « décentralisation Raffarin » a été bâclée au détriment des collectivités territoriales.
S'agissant des autorisations spéciales d'absence, le projet de loi prévoit une compensation des centres de gestion au profit des collectivités privées momentanément d'un de leurs agents chargés d'obligations syndicales : commissions administratives paritaires, réunions, etc. C'est une démarche généreuse à laquelle je peux souscrire.
Mais pensez-vous sincèrement, monsieur le ministre, que la compensation financière s'effectuera à coût constant ? Qui peut croire un instant que les centres de gestion disposent de marges de manoeuvre financières sans une cotisation additionnelle ?
Cette désinvolture sur les questions financières, en l'absence de la moindre étude d'impact, est inadmissible et irresponsable. On peut même s'interroger sur la constitutionalité de ce texte (Exclamations sur les travées de l'UMP.), car la loi fondamentale prévoit que toute charge nouvelle pour les collectivités territoriales doit faire l'objet d'un financement spécifique.
Le Centre national de la fonction publique territoriale, chargé de missions nouvelles, amputé par ailleurs de crédits transférés aux centres de gestion, devra diminuer son budget pour la formation continue, ...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !
M. Claude Domeizel. Mais oui !
...ce qui aggravera les inégalités entre les fonctionnaires territoriaux : il y aura ceux qui pourront se former parce qu'ils travaillent dans des collectivités riches, et il y aura les autres !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est déjà le cas aujourd'hui !
M. Claude Domeizel. Où est l'unité de la fonction publique territoriale ?
Les responsables d'hier et d'aujourd'hui du Centre national de la fonction publique territoriale savent combien s'est dégradée, au fil du temps, l'offre de formation continue du fait de l'érosion des crédits disponibles.
Le Centre national de la fonction publique territoriale, qui est chargé en permanence depuis plusieurs années de nouvelles tâches - prise en charge des fonctionnaires privés d'emploi, formation initiale post-recrutement, recrutement des lauréats des concours de catégorie A+, etc. -, voit fondre comme neige au soleil ses crédits pour la formation continue.
Le Centre national de la fonction publique territoriale sera tout simplement un peu plus asphyxié financièrement.
À ce propos, il convient de constater que, pour la première fois depuis 1972, on légalise le fait que les moyens mutualisés pour la formation des personnels territoriaux puissent être inférieurs à 1 % de la masse salariale.
Mes chers collègues, voilà l'essentiel de ce que je souhaitais développer avant l'examen des articles. Comme vous avez pu le constater, les observations que je viens de formuler conduisent à se poser au moins une question : faut-il se contenter d'un tel projet de loi pour répondre aux préoccupations des élus et des agents ? Sans doute pas ! Quitte à réformer la loi, messieurs les ministres, il fallait sans aucun doute aller un peu plus loin.
M. Paul Blanc et M. Roger Karoutchi. C'est déjà pas mal !
M. Claude Domeizel. Nous serons donc très attentifs à la suite qui sera donnée à nos amendements. Notre groupe se déterminera en fonction de l'approche qui sera faite en matière de partition des actes de gestion et de formation, ainsi que des réponses que nous obtiendrons à nos interrogations concernant le financement.
D'ores et déjà, nous affirmons notre volonté de faire évoluer la loi afin que les élus locaux disposent, pour une bonne exécution de leurs décisions, d'une fonction publique territoriale attrayante, dotée d'un personnel formé et motivé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Alduy.
M. Jean-Paul Alduy. À ce stade de la discussion, je peux me permettre d'être bref. En effet, vos interventions, messieurs les ministres, ont été très détaillées, ...
M. Roger Karoutchi. Et brillantes ! (Sourires.)
M. Jean-Paul Alduy. ... votre rapport, madame Gourault, est excellent et vos discours particulièrement argumentés, mes chers collègues, ont permis de bien cerner le sujet. En outre, lors de l'examen des articles, nous aurons l'occasion de poursuivre les débats qui n'ont pas trouvé leur conclusion.
Je voudrais finalement centrer mon intervention sur un sujet en marge du projet de loi. Peut-être trouvera-t-on ce point anecdotique, mais je le crois au contraire révélateur : la politique sociale des employeurs publics souffre d'une vraie lacune.
Le texte que nous examinons aujourd'hui concerne principalement la gestion des ressources humaines des collectivités territoriales : il vise à compléter, à corriger, à moderniser, à rendre plus performante l'organisation institutionnelle qui gère les carrières et les formations.
Mais force est de constater que, malgré trois années de discussion, ce projet de loi n'aborde pas le thème de la politique sociale des employeurs. Pourtant, chaque fois plus innovante, celle-ci assure la cohésion, la solidité humaine de nos administrations territoriales qui sont confrontées à des mutations accélérées sur le plan tant économique que social.
L'action sociale n'a pratiquement jamais été codifiée dans notre corpus législatif. J'ai noté qu'un chapitre du projet de loi porte sur les conditions d'hygiène et de sécurité, sur la médecine préventive, mais il faut aller plus loin.
J'aimerais vous convaincre, messieurs les ministres, qu'il est souhaitable de saisir l'opportunité de ce texte pour sécuriser des décisions que de nombreux exécutifs ont prises afin de prendre en charge tout ou partie des cotisations acquittées par leurs agents au titre des garanties sociales complémentaires. En effet, un arrêt récent du Conseil d'État fragilise totalement la participation de l'employeur public au dispositif de protection sociale. En conséquence, nous risquons de nous retrouver devant un véritable vide juridique à partir du 26 mars prochain.
C'est dire si ce projet de loi est l'occasion de combler les lacunes de notre droit dans un domaine très sensible, tout particulièrement pour les agents de catégorie C, qui, je le rappelle, représentent les deux tiers de nos fonctionnaires territoriaux. Je me suis donc permis de déposer des amendements visant non seulement à sécuriser les décisions prises par les collectivités locales - toutes sensibilités confondues, je tiens à le dire -, mais aussi à illustrer la nécessité de préparer d'autres textes de loi centrés sur la politique sociale des employeurs publics.
Mes chers collègues, imaginez l'embarras des maires - toutes sensibilités confondues, je le répète - découvrant à la veille des prochaines élections municipales qu'ils sont obligés d'abroger les décisions relatives aux allègements de cotisations de mutuelle, qui apparaissent aujourd'hui comme un véritable acquis social. Voilà ce qui nous attend si nous ne saisissons pas l'opportunité de ce projet de loi pour sécuriser les décisions des collectivités territoriales dans le registre de la politique sociale.
Messieurs les ministres, je souhaitais vous alerter sur ce sujet en espérant qu'une solution soit trouvée avant le 26 mars. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, vingt-deux ans après le vote de la première loi relative à la fonction publique territoriale nous voici à nouveau appelés à modifier un texte dont on nous avait pourtant dit à l'époque qu'il apporterait un bonheur parfait aussi bien aux fonctionnaires territoriaux qu'à leurs employeurs. Force est de reconnaître que tel ne fut malheureusement pas le cas.
Le « calage » de la fonction publique territoriale sur la fonction publique de l'État a entraîné de nombreux effets pervers non seulement au détriment des collectivités territoriales, mais aussi, dans certains cas, aux dépens des fonctionnaires territoriaux eux-mêmes. Je peux d'ailleurs dire que je n'ai pas entendu beaucoup de maires vanter les mérites de cette réforme. Avec le nouveau statut, la promotion interne était rendue bien plus difficile que par le passé.
Il est assez piquant de constater qu'il aura fallu attendre vingt-deux ans pour réintroduire cette mesure de bon sens : le texte que vous nous présentez, messieurs les ministres, prévoit désormais la reconnaissance de l'expérience professionnelle et la validation des acquis de l'expérience pour la promotion interne des fonctionnaires territoriaux et annonce plusieurs dispositions réglementaires complémentaires allant dans ce sens.
Je ne peux qu'approuver ces mesures, mais je souhaiterais pouvoir disposer de plus de précisions sur les modifications d'ordre règlementaire que vous envisagez dans ce domaine. Je crains fort en effet que les textes imposés pour la reconnaissance de cette professionnalisation ou la future commission qui sera créée demeurent trop éloignés du besoin réel. Je n'ai pas trouvé dans le texte le moindre élément qui irait dans le sens d'un peu plus de facilité.
L'autre grande avancée de la loi de 1984 était constituée par la possibilité de créer des passerelles entre toutes les fonctions publiques : fonction publique de l'État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière. Bien évidemment, sur le papier, tout était merveilleux, mais, dans les faits, cela s'est toujours avéré aussi difficile, et je ne suis pas certain que le texte d'aujourd'hui y contribue véritablement.
Quant au coût de la fonction publique territoriale, il n'a échappé à personne, et surtout pas à la Cour des comptes, que les collectivités territoriales, même hors créations d'emplois, ont vu celui-ci exploser au cours des vingt dernières années. Cela s'explique essentiellement par la revalorisation indiciaire de la catégorie C, qui est très répandue dans nos petites collectivités, notamment dans les communes, par les augmentations répétées des traitements des fonctionnaires et du fait de l'application des 35 heures, qui, contrairement à ce qui s'est passé pour les entreprises, n'a été accompagnée d'aucune compensation financière pour les collectivités.
À cet égard, permettez-moi de regretter à nouveau que les associations d'élus n'aient pas été parties prenantes dans les négociations salariales concernant la fonction publique. Tout se passe en effet comme s'il n'y avait que la fonction publique de l'État. Mais n'oublions pas que, lorsque des mesures générales d'augmentation de traitement sont prises, ces décisions s'appliquent également à tous les fonctionnaires territoriaux. En d'autres termes, dans ce cas de figure et une fois de plus, qui commande ne paie pas !
Je suis heureux que notre commission des lois partage ce point de vue et propose la création d'un « collège des employeurs publics territoriaux », que le Gouvernement consulterait sur toute question relative à la politique salariale ou à l'emploi public territorial.
Le projet de loi que vous nous présentez, messieurs les ministres, accordera également de nouveaux droits aux fonctionnaires territoriaux, notamment un droit individuel à la formation ainsi que des droits en matière d'hygiène, de sécurité et de médecine préventive. Ce sont des dispositions que j'approuve pleinement. Mais il faut que les fonctionnaires territoriaux sachent qu'ils ont également des devoirs vis-à-vis de leurs employeurs et, au-delà, à l'égard de la population tout entière.
À ce propos, j'ai été stupéfait d'apprendre que l'un de nos anciens collègues, plutôt de gauche et maire d'une importante ville de l'Île-de-France, avait instauré un système de « primes d'assiduité » afin de réduire autant que faire se peut l'absentéisme dans sa collectivité. S'il l'a fait, c'est tout simplement parce qu'il n'avait pas la possibilité de sanctionner financièrement les absences répétées et injustifiées. Cela n'est pas normal, et j'irais presque jusqu'à dire que c'est le monde à l'envers !
Tout cela n'est plus possible à gérer raisonnablement, surtout dans les petites collectivités où il n'y a qu'un ou deux employés.
Laissons, une fois pour toutes, aux élus en charge d'une collectivité la possibilité de récompenser les fonctionnaires territoriaux donnant toute satisfaction. Nous le savons, il est difficile de rémunérer correctement un agent en début de carrière dans la fonction publique. Il est donc nécessaire d'avoir un peu de liberté en la matière et de pouvoir, dans certains cas, pénaliser ceux qui s'abritent derrière leur statut, à mon sens bien trop protecteur, pour quelquefois en faire le minimum.
Je proposerai donc au Sénat quelques amendements, qui, par dérogation aux dispositions de la loi du 12 juillet 1984, permettraient, dans un premier temps et à titre expérimental, aux maires des communes de moins de 3 500 habitants et aux présidents d'EPCI de moins de 10 000 habitants de disposer d'une certaine liberté dans le recrutement et la promotion de leurs collaborateurs, de faire varier leur rémunération en fonction de leurs résultats et de sanctionner financièrement les absences injustifiées. Il faut savoir en effet que ces dernières pénalisent bien plus les petites collectivités que les grandes, car les possibilités de remplacement y sont faibles, voire inexistantes. Dans la mesure où ces dispositions donneraient satisfaction, elles pourraient être étendues à d'autres collectivités.
Le texte du Gouvernement tente également de clarifier le rôle des différentes institutions intervenant au bénéfice des agents territoriaux et de leurs employeurs. J'ose espérer que tel sera bien le cas dans les faits, car, je le répète, ce que souhaitent par-dessus tout les maires et les présidents de Codecom, c'est qu'on leur accorde la souplesse nécessaire afin de pouvoir gérer leurs personnels au mieux des intérêts de leurs collectivités.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. Claude Biwer. Il ne faut pas confondre les méthodes habituelles des grandes structures et des villes, où les services comptent un effectif de plusieurs employés en plus des cadres, des chefs de service, etc., et celles de la plupart des collectivités - 90 % d'entre elles d'ailleurs -, où les services comptent moins de trois personnes, quand ce n'est pas un poste unique à temps partiel. Le temps de vivre et de gérer en fonction des réalités du terrain, et non à l'heure parisienne, trop souvent en décalage, me paraît être venu.
Sous le bénéfice de ces observations et des modifications qui pourront être apportées - je le souhaite en tout cas - grâce à l'adoption de certains de mes amendements ou de ceux de mon groupe, ou encore suggérées, je n'en doute pas, par notre excellente rapporteure, j'espère trouver les arguments qui me permettront d'apporter mon soutien à ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je limiterai mon propos à deux problèmes qui intéressent particulièrement les petites et moyennes collectivités : l'amélioration des possibilités de recrutement de ces collectivités et des perspectives de carrière de leur personnel, d'une part, et le financement des personnels déchargés de fonction, d'autre part.
S'agissant du premier point, tout le monde s'accorde à dire que les obligations actuelles des petites et moyennes collectivités n'ont plus rien à voir avec ce qu'elles étaient voilà vingt ans, d'où la nécessité pour elles de recruter et de conserver, quand elles l'ont recruté et formé, du personnel compétent, dans les domaines tant administratif et juridique - responsables de tout, les maires risquent fort, un jour, d'être coupables de quelque chose ! - que technique, éducatif, culturel, social, etc.
La rétraction continue de l'ingénierie publique - services de la DDE, de la DDA ou de la DDASS - pour toutes les collectivités et le choix, pour certaines, d'une gestion en régie du service public communal renforcent encore plus cette obligation de recruter du personnel compétent.
Pourtant - et là encore le diagnostic est partagé -, aux handicaps « naturels » de recrutement que connaissent ces collectivités s'ajoutent des difficultés artificielles d'ordre législatif et réglementaire.
Le texte soumis à notre examen se veut, notamment par ses articles 19, 21, 23 et 24, une réponse à ce lancinant problème. Mais si c'est effectivement un début de réponse, vous me permettrez de trouver le progrès largement insuffisant.
Sur le plan des principes d'abord, les collectivités territoriales s'administrant librement, on ne voit pas pourquoi leur est contesté, lorsqu'elles ont les moyens de leurs choix, le droit de recruter le personnel qui leur semble nécessaire au niveau de qualification requis et d'assurer sa promotion.
La loi et la réglementation devraient se limiter à fixer les conditions de diplômes et d'expérience, les modalités d'organisation des concours pour le recrutement et les règles garantissant l'équité des promotions. Le reste est affaire de liberté locale.
Ainsi peut-on douter que la notion de « seuil démographique » ait encore un sens, si tant est qu'elle en ait jamais eu un ! Il en est de même de la notion de « quota d'avancement de grade ».
Selon l'exposé des motifs, les présentes dispositions législatives seraient complétées par des modifications statutaires d'abaissement d'un certain nombre de seuils de création d'emplois de grade et des évolutions seraient apportées aux règles relatives aux quotas d'avancement de grade et de promotion interne. Fort bien, mais on souhaiterait savoir lesquelles !
On peut surtout légitimement contester le bien-fondé d'un principe d'organisation strictement pyramidale de la fonction publique territoriale sur le modèle de la fonction publique de l'État, et plus encore pour les petites et moyennes collectivités.
Par exemple, pourquoi tous les agents administratifs de catégorie C d'une petite commune ne pourraient-ils pas être des agents administratifs qualifiés si leur travail est de qualité et si le budget communal le permet ?
M. Claude Domeizel. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. Dans le même esprit d'assouplissement et d'amélioration des conditions de recrutement d'agents de bon niveau, il serait souhaitable de favoriser l'intégration des personnels de cabinet.
Si, dans les grandes collectivités, ces emplois sont d'abord politiques, dans les collectivités de tailles modestes, ils sont souvent l'unique façon de renforcer les moyens et les compétences du secrétariat général.
Nous déposerons donc un amendement visant à prévoir la création de concours de recrutement sur titre, ouverts, sous certaines conditions d'ancienneté et d'expérience, aux collaborateurs de cabinet. Cette « déprécarisation » de la fonction donnerait une chance supplémentaire à nombre de communes de pouvoir recruter le personnel dont elles ont besoin.
Le second point que je souhaite aborder concerne le financement des personnels déchargés de fonction.
Comme chacun le sait ici, les centres de gestion ont en charge les personnels déchargés de fonction, y compris ceux des collectivités non affiliées qui ne cotisent pas aux centres de gestion. À certaines époques, et dans certains départements touchés par un prurit de privatisations, cela peut représenter des effectifs très importants.
Les règles de participation financière des collectivités non affiliées aux charges de cette gestion ont varié, mais elles demeurent inacceptables.
Actuellement, celles-ci contribuent à hauteur du double des charges salariales les deux premières années, du montant de ces charges les deux années suivantes et de 75 % par la suite, suite qui peut être longue ! Mathématiquement, la treizième année, les collectivités affiliées - les petites et moyennes communes essentiellement - paient donc une partie du prix de décisions prises par des collectivités qui, par ailleurs, ont souhaité rester en dehors de la gestion mutualisée des personnels. En réalité, elles sont financièrement impliquées bien avant les treize ans.
La gestion des personnels ainsi « mis à disposition » a un coût non négligeable pour l'institution. Cette situation qui revient à faire payer aux collectivités petites et moyennes les conséquences de décisions qu'elles n'ont pas prises est profondément choquante. Nous déposerons donc un amendement visant à remédier à cette situation.
M. Claude Domeizel. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. Amélioration des conditions de recrutement et des carrières, rétablissement de l'équité s'agissant du financement des déchargés de fonction, sur ces deux points qui devraient faire l'unanimité, nous comptons sur le soutien du Sénat et sur le vôtre, messieurs les ministres. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite aborder le problème des relations entre le CNFPT et les centres de gestion. C'est là un sujet délicat, quelquefois conflictuel. Depuis des années, ces organismes font l'objet de critiques fortes et, pour ce qui concerne le CNFPT, de critiques violentes, souvent excessives, je le dis franchement, même si je suis bien placé pour connaître les lacunes de cet établissement.
Vous recentrez l'action du CNFPT sur la seule formation ; on ne peut que s'en féliciter. Il y a trop longtemps qu'est exprimée la demande de recentrage ou d'augmentation de la cotisation. C'était l'un ou l'autre, mais, dans les deux cas, cela ne s'est pas produit.
On peut estimer en effet que les différentes missions, qualifiées quelquefois d' « indues », qui, au-delà de la formation, sont confiées au CNFPT représentent 0,3 % de l'activité de ce centre. Par conséquent, il ne reste globalement que 0,7 % pour la formation. Le fait de recentrer le CNFPT sur la seule formation, afin qu'il soit uniquement dédié à cela, est donc une bonne mesure.
Mais il me semble que vous passez à côté d'une évolution complémentaire. Le CNFPT est un établissement unique ; la Cour des comptes l'a rappelé dans un rapport voilà une quinzaine d'années. Cet établissement public national est composé de vingt-huit délégations, dont les présidents élus ont chacun la signature. Il en découle une tendance naturelle à l'éclatement et la difficulté pour le pouvoir central de l'établissement de contrôler effectivement le fonctionnement des délégations. Tout cela peut aboutir - c'est en tout cas ce qui est arrivé dans le passé - à des dérives fâcheuses et quelquefois dangereuses.
Le paradoxe est que cet organisme mal fini est presque pris pour modèle pour créer le Centre national de coordination des centres de gestion, établissement public national qui remplacerait la fédération existante. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il y aurait fort à parier que ce centre serait tiraillé entre ses différentes composantes, comme l'a été, et l'est sans doute encore, le CNFPT, avec des présidents élus, puissants, et des directeurs sur qui la direction centrale n'aura aucun pouvoir.
Vous affirmez que cette évolution se fera à coût constant. Mais comment imaginer, avec toutes les charges nouvelles qui ont été pointées notamment par Claude Domeizel, que les transferts de personnels au centre de gestion seront aisés ?
M. Claude Domeizel. Évidemment !
M. Jean-Claude Peyronnet. Nous avons affaire à des fonctionnaires territoriaux qu'il n'est pas facile, ni souhaitable d'ailleurs, de muter d'office, d'une part, pour des questions de motivation et, d'autre part, pour des raisons familiales.
Par ailleurs, la masse des missions nouvelles confiées au Centre national de coordination des centres de gestion est telle que, comme pour le CNFPT, le siège sera forcément hypertrophié, lourd et donc coûteux.
Pour toutes ces raisons, nous ne sommes pas favorables à la construction institutionnelle que vous imaginez. La commission des lois ne retient pas la création de ce centre ; nous non plus. Nous nous félicitons donc de cette position de la commission. Mais, de grâce, ne concentrez pas les pouvoirs sur un seul centre de gestion ! Laissez les centres de gestion s'organiser au niveau régional ou interrégional ; ils le font très bien. Je suis persuadé qu'il en sera de même à l'échelon national ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Demande de priorité
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Monsieur le président, j'indique dès maintenant que je demande l'examen par priorité de l'article 10, avant l'article 8. Cela nous permettra, le moment venu, de nous prononcer sur le principe du Centre national de coordination des centres de gestion avant d'en tirer les conséquences dans les autres articles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La priorité est de droit.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Guy Fischer.)