Article 11
I. - L'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, l'employeur qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en raison du retrait, prononcé en application des dispositions du deuxième alinéa, de sa carte de séjour temporaire, peut, dans les trois années qui suivent cette obligation, se voir refuser le droit d'exercer une activité professionnelle en France. »
II. - L'article L. 314-6 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, l'employeur qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en raison du retrait, prononcé en application des dispositions du présent article, de sa carte de résident, peut, dans les trois années qui suivent cette obligation, se voir refuser le droit d'exercer une activité professionnelle en France. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l'article.
Mme Bariza Khiari. Avec cet article 11, monsieur le ministre, vous affichez la volonté de lutter contre l'exploitation des étrangers sur notre territoire. Plus spécifiquement, vous prétendez lutter contre l'exploitation clandestine de leur force de travail. Quoi de plus normal ? Nous partageons cette préoccupation.
Mais, une fois encore, cette mesure - comme tout votre projet de loi, d'ailleurs - repose sur une idéologie très contestable. Dans votre projet initial, l'article 11 ne visait que les employeurs étrangers contrevenant aux dispositions du code du travail sur le travail clandestin. Nos collègues de l'Assemblée nationale ont ajouté un article 11 bis, qui renforce les sanctions pénales contre tous les employeurs.
En premier lieu, il me semble inacceptable que le renforcement de la répression du travail clandestin vise essentiellement les employeurs étrangers. Pensez-vous sérieusement, monsieur le ministre, que seuls les étrangers exploitent le travail d'autres étrangers ? Ce serait bien naïf de votre part. Je pense plutôt que vous avez consciemment souhaité réprimer plus durement les étrangers.
Les actes incriminés ici sont gravissimes. Il faut absolument les punir, et durement. Mais je vous rappelle qu'ils concernent non seulement des employeurs étrangers, mais aussi bon nombre d'employeurs français, dans de nombreux secteurs, notamment le bâtiment. Les « négriers » d'aujourd'hui ne sont pas seulement étrangers ; nombre d'entreprises bien françaises fonctionnent également en exploitant le travail des clandestins.
En prévoyant, outre les peines applicables, le retrait du titre de séjour et l'interdiction d'exercer une activité professionnelle en France pour les employeurs étrangers, vous réinstaurez une sorte de double peine. Aux sanctions pénales qui s'appliquent à tous, vous ajoutez pour les étrangers une sanction administrative, ce qui constitue une discrimination évidente.
Je n'ai aucune pitié pour ceux qui exploitent les plus démunis, mais je comprends mal pourquoi les étrangers seraient punis plus durement que les Français pour de tels actes.
En second lieu, l'Assemblée nationale a adopté un article 11 bis qui prévoit la possibilité pour les tribunaux de prononcer une peine complémentaire de déchéance des droits civiques, civils et familiaux dans les cas de travail clandestin pour lesquels une peine de prison est prévue. Cette mesure est bonne en soi, mais je voudrais souligner deux points d'incompréhension.
L'Assemblée nationale a refusé de rendre cette peine automatique, alors même que les sanctions administratives imposées par l'article 11 aux employeurs étrangers le sont. Par ailleurs, j'estime que les actes dont nous parlons sont suffisamment graves pour que les peines de prison et d'amende soient considérablement aggravées, et ce pas seulement par l'ajout d'une peine complémentaire.
En conclusion, ce nouveau dispositif ne contribuera pas efficacement à la lutte contre le travail clandestin. Il réprimera peut-être plus durement les employeurs étrangers, mais les donneurs d'ordres, les groupes qui exploitent ou laissent exploiter des clandestins par leurs sous-traitants resteront relativement protégés, ce qui me semble tout à fait inacceptable.
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste présentera un amendement de suppression de cet article.
Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 163, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Mme Bariza Khiari a déjà tout dit et vous avez sans doute été frappé par la pertinence de son propos, monsieur le ministre.
Pour ma part, je me contenterai de vous poser deux questions.
Rien n'est pire en effet que l'exploitation des travailleurs en situation irrégulière, que des employeurs font travailler sciemment dans l'illégalité. Elle doit être réprimée et nous n'avons aucune indulgence à l'égard de ce type de comportement.
Soyons clairs : qu'un étranger qui dispose d'un titre de séjour régulier emploie des travailleurs étrangers dans l'illégalité et dans la clandestinité nous paraît justifier le retrait du titre de séjour.
Mais j'en viens à ma première question, déjà évoquée par Mme Khiari. Ce matin, monsieur le ministre, vous nous avez longuement expliqué qu'il fallait que les maires puissent donner un avis sur la pratique républicaine des étrangers et sur la conformité de leurs agissements aux valeurs républicaines de la France. Je m'étais permis de vous faire observer que, parmi ces principes républicains, figurait le principe d'égalité.
En dehors du problème que je viens d'aborder, c'est-à-dire le retrait du titre de séjour, ma question est simple : comment pouvez-vous justifier que, pour la même infraction, à savoir faire travailler illégalement des étrangers clandestins, la peine soit différente selon que l'auteur de l'infraction est français ou de nationalité étrangère ? Y a-t-il un argument en faveur de cette différence de traitement ?
Si tel est le cas, je vous remercie de bien vouloir nous l'expliciter. S'il n'y en a pas, vous soutiendrez notre amendement de suppression, monsieur le ministre. C'est une question très sérieuse et très précise, et j'attends de vous un argument solide.
Ma seconde question est encore plus simple : comment pouvez-vous justifier qu'il revienne à l'autorité administrative de prononcer une telle peine, et non au juge judiciaire ?
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Compléter le texte proposé par le I de cet article pour compléter l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par un alinéa ainsi rédigé :
« La carte de séjour temporaire prévue à l'article 313-7 peut être retirée à l'étudiant étranger qui ne respecte pas la limite d'un temps partiel annualisé prévue au même article. »
II. En conséquence, au premier alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
un alinéa
par les mots :
deux alinéas
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 163.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement n° 21 reprend en partie la deuxième phrase du texte proposé pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par l'article 7 du projet de loi.
Il tempère néanmoins la possibilité de retirer la carte « étudiant » à un étudiant qui ne respecterait pas la réglementation du travail. En effet, ce non-respect ne lui est pas forcément imputable. C'est la raison pour laquelle le retrait ne serait possible qu'en cas violation de l'obligation de respecter la durée du temps partiel annualisé que nous avons évoquée tout à l'heure.
Par ailleurs, la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 163.
Je rappellerai simplement que l'un des objectifs les plus importants du projet de loi est de lutter contre les filières constituées, qui nourrissent de façon importante l'immigration clandestine.
Il convient de lutter sans faiblesse contre l'esclavage moderne que représente cette immigration clandestine et contre les comportements indignes de ces employeurs qui profitent de la situation, organisant depuis le pays d'origine l'arrivée de clandestins sur notre territoire, dans un cadre très structuré qui relève non pas de l'amateurisme, mais du professionnalisme.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. M. Sueur, de manière très pompeuse, m'a demandé si j'avais été frappé par la pertinence des propos de Mme Khiari. Eh bien oui, monsieur Sueur, j'ai été frappé, en effet, mais certainement pas par la pertinence des propos de votre collègue ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
M. Roger Karoutchi. Cela nous rassure !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. N'est-ce pas, monsieur le sénateur !
Je vais tout d'abord reposer le problème, car je suis tout de même très étonné, monsieur Sueur, madame Khiari, que vous combattiez systématiquement la détermination du Gouvernement à lutter contre toute forme de travail illégal (Protestations sur les travées du groupe socialiste.),...
Mme Bariza Khiari. Mais non !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous avons dit le contraire !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ...et surtout contre le travail illégal organisé par un certain nombre de chefs d'entreprise, qu'ils soient Français ou étrangers.
M. Jean-Pierre Sueur. Il faut lutter sans faiblesse contre le travail illégal !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous avons d'ores et déjà engagé la lutte contre le travail illégal, mais c'est à croire que vous êtes favorables à son développement ! C'est ainsi que je finis par interpréter vos propos !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous avons dit le contraire ! Vous ne nous écoutez pas, monsieur le ministre !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous avons d'ores et déjà engagé la lutte contre le travail illégal, disais-je, par des opérations coup-de-poing.
À cet égard, je rappellerai quelques chiffres : entre le 1er septembre et le 31 décembre 2005, 601 opérations ont été menées dans cent départements, 15 390 personnes ont été contrôlées et 611 employeurs ont été interpellés. À la fin du mois de juin, nous disposerons du bilan de la seconde vague d'opérations coup-de-poing, mise en oeuvre depuis le début de l'année. Nous ne nous contentons pas de paroles, nous agissons, ce qui n'a certainement pas été le cas du gouvernement de M. Jospin de 1997 à 2002 ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n'est pas vrai !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Pour améliorer ce dispositif et mieux lutter contre les filières esclavagistes, il faut s'assurer que l'employeur étranger de travailleurs clandestins ayant été sanctionné d'une obligation de quitter la France puisse aussi se voir interdire d'exercer toute activité professionnelle dans notre pays pendant trois ans.
Or vous considérez, pour votre part, que cela n'est pas normal, que les employeurs français et les employeurs étrangers ne sont pas traités sur un pied d'égalité.
Je soulignerai d'abord que dans ce texte figurent, à d'autres articles, un certain nombre de dispositions qui sanctionneront également les employeurs français ne respectant pas la législation du travail.
Je pense notamment à l'article 11 bis, qui prévoit pour ceux-ci la perte des droits civiques. Cela n'est pas rien, mais cela vous a peut-être échappé.
Je pense aussi à l'article 15 ter, concernant la lutte contre les employeurs récidivistes, Français ou non, en matière d'emploi illégal de travailleurs étrangers.
Cela étant, je m'étonne, madame Khiari, monsieur Sueur, que, en quelque sorte, vous réclamiez l'automaticité de certaines peines.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce n'est pas possible !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous n'ignorez pas, pourtant, que nous sommes dans un État de droit ! Quoi qu'il en soit, je prends acte du fait que la philosophie du parti socialiste est désormais de préconiser l'inscription dans notre droit d'une automaticité des peines, sans que le juge ait à statuer et à décider ! C'est là une innovation juridique !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous réclamons un même traitement pour les employeurs français et les employeurs étrangers !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est trop drôle !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Votre suggestion est inacceptable dans un État de droit. Il n'est pas possible d'instaurer dans notre pays une automaticité des peines,...
M. Roger Karoutchi. Absolument !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ...et pourtant, c'est bien ce que demande aujourd'hui le parti socialiste. Voilà qui est nouveau !
M. Bernard Frimat. Vous êtes content de vous ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Enfin, vous demandez pourquoi nous ne prévoyons pas exactement les mêmes sanctions pour les employeurs étrangers que pour les employeurs français.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est normal !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Permettez-moi de vous faire observer qu'il est beaucoup plus compliqué de retirer un titre de séjour en France à un employeur français qu'à un employeur étranger ! ... (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà qui est astucieux ! Et convaincant !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vos préconisations sont, à l'évidence, totalement déraisonnables, c'est pourquoi j'appelle au rejet de l'amendement que vous avez présenté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Bernard Frimat. C'est une pantalonnade !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Par ailleurs, j'émets un avis très favorable sur l'amendement n° 21 de la commission.
M. Alain Gournac. La messe est dite !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 163.
M. Jean-Pierre Sueur. La messe n'est pas dite, mon cher collègue. D'ailleurs, nous sommes ici dans une assemblée laïque...
Cela étant, j'ai vraiment été très frappé par le discours de M. le ministre. Certes, c'est là une façon de faire de la politique, celle que vous avez choisie, monsieur le ministre ; il n'en reste pas moins que nous avons bien dit, et le compte rendu de nos débats en fera foi, qu'il ne faut avoir aucune indulgence envers ceux qui emploient illégalement des travailleurs clandestins et qui organisent sciemment cette pratique. Or vous prétendez que nous sommes laxistes et que nous estimons qu'il ne faut pas lutter contre le travail clandestin ! Quel sens cela a-t-il ? C'est absurde ! (Mme Bernadette Dupont s'exclame.)
Je ne fais que dire la vérité, ma chère collègue ! Si ce que j'affirme est faux, démontrez-le ! M. le ministre nous attribue des opinions contraires aux propos que nous avons tenus voilà quelques minutes : nous avons tout de même le droit de protester ! Si vous pensez que j'ai tort, expliquez-moi en quoi. Je suis prêt à vous entendre. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Mme Bernadette Dupont. Cela fait une heure que nous discutons et nous n'avançons pas !
Mme la présidente. M. Sueur a seul la parole, mes chers collègues !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous n'avons pas abusé de notre droit de parole !
Par ailleurs, il est tout aussi absurde d'affirmer, comme vous l'avez fait, monsieur le ministre, que l'on ne s'était nullement soucié, jusqu'à présent, de lutter contre le travail clandestin. Exerçant des mandats locaux dans le même département depuis vingt-cinq ans, j'ai eu l'occasion d'oeuvrer dans ce domaine avec bien des directeurs régionaux ou départementaux du travail, et, par le passé, sur le plan national, les différents gouvernements qui se sont succédé ont consacré des moyens et des efforts à la lutte contre le travail clandestin.
Par conséquent, vous ne pouvez pas prétendre que rien n'avait été fait avant vous et que c'est seulement maintenant qu'une véritable action est engagée. Cela est absurde, tout le monde le sait ! Dans ces conditions, pourquoi tenez-vous de tels propos, monsieur le ministre ?
Enfin, vous nous apprenez qu'un étranger peut être reconduit à la frontière, mais pas un Français. Bravo ! ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On peut essayer, monsieur le ministre !
M. Jean-Pierre Sueur. Je me vois contraint de répéter ce que nous avons dit, puisque vous niez que nous ayons adopté cette position : si un employeur étranger a recours au travail illégal, il est juste de lui retirer son titre de séjour. C'est là, certes, une dimension spécifique du traitement devant être réservé à l'employeur étranger coupable de tels agissements.
Nous sommes donc d'accord avec vous sur ce point, mais nous ajoutons, pour notre part, que pour le reste la peine doit être la même, que l'employeur soit français ou étranger. C'est tout ! Je regrette d'avoir été obligé de rétablir les faits, mais telle est bien notre position.
En tout état de cause, je constate que nous n'avons pas entendu de réponse à cet argument : outre la question du retrait du titre de séjour, il faut que la peine soit la même et qu'elle soit mise en oeuvre dans les mêmes conditions, quelle que soit la nationalité du condamné. On ne nous a, en outre, pas davantage expliqué pourquoi ce sujet ne devait pas relever du juge judiciaire.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il me semble nécessaire de souligner, à cet instant, que notre législation a connu des progrès constants en matière de lutte contre le travail illégal.
M. Bernard Frimat. Nous nous en réjouissons !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je suis parlementaire depuis un certain nombre d'années maintenant. À ce titre, j'ai pu constater que, à chaque occasion, les peines prévues dans ce domaine ont été aggravées.
Mme Hélène Luc. Mais qu'êtes-vous en train de faire avec ce texte ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Les victimes du travail illégal sont généralement, je le rappelle, des migrants.
M. Bernard Frimat. Pas seulement !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Les victimes des employeurs qui ne respectent pas les dispositions du droit du travail, qu'ils soient Français ou étrangers, sont tout de même souvent des migrants, monsieur Frimat.
Cela étant, il faut bien distinguer deux choses.
Tout d'abord, les sanctions pénales et les peines complémentaires telles que, par exemple, l'interdiction d'exercer une activité professionnelle, s'appliquent bien entendu aux Français comme aux étrangers.
Par ailleurs, il existe des sanctions administratives. Ainsi, notre droit prévoit depuis déjà très longtemps qu'un étranger ayant été condamné pour certaines infractions peut se voir retirer son titre de séjour. Il s'agit bien ici, je le répète, d'une sanction administrative, et non d'une sanction pénale. Comme l'a indiqué à juste titre M. le ministre, les condamnés étrangers sont traités différemment des condamnés français dans la seule mesure où, à l'issue de leur peine, on peut les expulser. Cela est normal, et je ne vois pas en quoi les dispositions présentées modifieraient les règles générales de droit s'appliquant déjà à l'heure actuelle.
Par conséquent, je ne parviens pas à comprendre ce que nous racontent depuis une demi-heure les orateurs du groupe socialiste ! Nous souhaitons simplement alourdir les sanctions, rien de plus, l'objectif étant de lutter plus efficacement contre le travail illégal. Tel est bien le souhait du Gouvernement et du Parlement.
Mme Bariza Khiari. Les sanctions s'appliqueront de manière automatique !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non, il n'y aura pas d'automaticité de la sanction pénale ! Ce sont les sanctions administratives qui sont parfois automatiques ! Quand une personne a été condamnée par exemple pour faillite frauduleuse, la sanction administrative qui accompagne la sanction pénale consiste en une interdiction d'exercer et de s'inscrire au registre du commerce. Elle est bien entendu automatique, mais ce n'est pas, je le redis, une sanction pénale !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Un retrait de points, c'est plus compliqué ! (Rires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Je remercie M. Hyest de son intervention. À mon sens, nous devons nous écouter les uns les autres, en veillant à ne pas travestir nos positions respectives.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je n'ai rien travesti !
M. Bernard Frimat. C'est précisément pourquoi je vous ai remercié de votre intervention, monsieur Hyest !
Que vous soyez en désaccord avec nous, monsieur le ministre, ne me gêne pas et ne me choque pas. C'est votre droit. Vous défendez votre texte, cela est normal, et nous sommes, nous aussi, dans notre rôle et dans notre droit quand nous défendons des opinions différentes des vôtres.
M. Bernard Frimat. Cela étant posé, ne dites pas que nous sommes pour le travail illégal ! Nous avons déjà indiqué à plusieurs reprises que nous sommes d'accord avec vous pour lutter contre cette pratique.
M. Bernard Frimat. Toutefois, votre texte répond à une autre logique. (M. le ministre délégué s'exclame.)
En effet, le problème du travail illégal y est assimilé à celui du travail clandestin des étrangers, alors que le sujet est plus large. J'ai dit tout à l'heure que les inspecteurs du travail sont chargés - nous y reviendrons - de lutter contre le travail illégal, mais non pas de s'occuper de vérifier le caractère régulier du séjour des étrangers.
Quoi qu'il en soit, nous prenons acte de notre désaccord, monsieur le ministre. Toutefois, j'estime qu'il serait souhaitable que les intervenants dans ce débat s'abstiennent de travestir la position de leurs contradicteurs. Pour ce qui nous concerne, nous essaierons de nous en tenir à cette attitude.
En tout état de cause, ni Jean-Pierre Sueur, ni Bariza Khiari, ni moi-même ne sommes des partisans du travail illégal et des défenseurs des employeurs ayant recours à cette pratique : qu'ils soient Français ou étrangers, nous souhaitons qu'ils soient condamnés avec la rigueur que méritent leurs actes. En revanche, les salariés employés illégalement, quelle que soit leur nationalité, sont en général des victimes. Or je n'ai pas eu le sentiment, en vous entendant, que vous les considériez d'abord comme tels.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 11 bis
Dans le premier alinéa de l'article L. 364-8 du code du travail, après les mots : « coupables des infractions prévues », sont insérés les mots : « au deuxième alinéa de l'article L. 364-1, à l'article L. 364-2 et ».
Mme la présidente. L'amendement n° 22, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Dans le premier alinéa de l'article L. 364-8 du code du travail, remplacer les mots : « aux articles » par les mots : « au deuxième alinéa de l'article L. 364-1et aux articles L. 364-2, »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. En conséquence, l'article 11 bis est ainsi rédigé.
Article 12
I. - Le chapitre V du titre Ier du livre III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devient le chapitre VII du même titre, et l'article L. 315-1 devient l'article L. 317-1 du même code.
II. - Dans le titre Ier du livre III du même code, le chapitre V est ainsi rétabli :
« CHAPITRE V
« La carte de séjour portant la mention «compétences et talents»
« Art. L. 315-1. - La carte de séjour «compétences et talents» peut être accordée à l'étranger susceptible de participer, du fait de ses compétences et de ses talents, de façon significative et durable au développement économique ou au rayonnement, notamment intellectuel, scientifique, culturel, humanitaire ou sportif de la France ou du pays dont il a la nationalité. Elle est accordée pour une durée de trois ans. Elle est renouvelable.
« Art. L. 315-2. - La carte mentionnée à l'article L. 315-1 est attribuée au vu des aptitudes de l'étranger, du contenu de son projet et en particulier de la nature de l'activité qu'il se propose d'exercer et de l'intérêt de ce projet et de cette activité pour la France et pour le pays dont l'étranger a la nationalité.
« L'étranger peut souscrire sa demande de carte «compétences et talents» auprès de la représentation consulaire française territorialement compétente dans le pays où il a établi sa résidence habituelle. L'autorité administrative compétente pour délivrer cette carte est le ministre de l'intérieur.
« Art. L. 315-2-1. - Il est tenu compte, pour l'appréciation des conditions mentionnées à l'article L. 315-2, de critères déterminés annuellement par la Commission nationale des compétences et des talents.
« Art. L. 315-3. - La carte de séjour mentionnée à l'article L. 315-1 permet à son titulaire d'exercer toute activité professionnelle de son choix, dans le cadre du projet mentionné à l'article L. 315-2.
« Art. L. 315-3-1. - Lorsque le titulaire de la carte de séjour «compétences et talents» est ressortissant d'un pays de la zone de solidarité prioritaire, il est tenu d'apporter son concours, pendant la durée de validité de cette carte, à une action de coopération ou d'investissement économique définie par la France avec le pays dont il a la nationalité.
« Art. L. 315-4. - Le conjoint et les enfants d'un étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 315-1 bénéficient de plein droit de la carte de séjour mentionnée au 3° de l'article L. 313-11. La carte de séjour ainsi accordée est renouvelée de plein droit durant la période de validité restant à courir de la carte mentionnée à l'article L. 315-1.
« Art. L. 315-5. - La carte de séjour mentionnée à l'article L. 315-1 peut être retirée dans les conditions et pour les motifs mentionnés à l'article L. 313-5 et à l'article L. 314-6.
« Art. L. 315-6. - Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'État. »
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, sur l'article.
M. Jacques Legendre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat nous aura décidément réservé un certain nombre de surprises. Pour ma part, j'aurais été tenté de penser que nous pourrions nous retrouver très largement autour de l'idée que notre pays doit reconnaître les compétences et souhaiter pouvoir les attirer.
En le souhaitant et en le faisant, nous nous alignerons sur ce qui se pratique depuis longtemps ailleurs.
J'ai souvent eu des contacts avec les Québécois. Ils souhaitent voir venir dans leur pays des citoyens français, en raison de notre langue commune. Les Québécois, mais aussi les Canadiens francophones et anglophones, espèrent également accueillir des personnes dont la qualification correspond aux besoins de développement de leur pays. Très honnêtement, je n'ai jamais eu le sentiment que le Canada ou le Québec avaient entrepris de piller la ressource nationale française.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il ne faut pas comparer la France avec les pays du Sud !
M. Jacques Legendre. Je peux comprendre la démarche des Français qui, à certains moments et pour des raisons qui leur sont personnelles, souhaitent aller vivre dans un autre pays. Cette attitude permet de développer les échanges entre les pays.
Cela peut néanmoins poser un problème, je le reconnais, dans le cas d'un pays pauvre qui verraient ses quelques cadres, formés à grand mal, partir systématiquement ailleurs. Encore faut-il dire qu'un pays ne se bâtit que si son élite a la volonté d'agir en ce sens et n'a pas pour premier désir d'aller travailler à l'étranger ! La tentation peut en effet être grande à cet égard, pour des raisons humainement compréhensibles.
Il nous faut donc trouver un équilibre entre notre souhait de recevoir des étrangers dotés de compétences et la nécessité d'organiser une circulation des élites entre leur pays d'origine et le pays d'accueil.
Il nous appartient peut-être aussi de concourir à la formation de ces étrangers.
J'ajoute que nous ne devons pas fermer les yeux sur la réalité. J'ai assez mal compris que les dirigeants de certains pays avec lesquels nous entretenons des liens d'amitié semblent dénoncer de notre part une tentation de pillage des cerveaux, alors que nous sommes régulièrement sollicités - tous ceux qui ont l'occasion de se rendre dans ces pays peuvent le constater - par certains de leurs ressortissants souhaitant venir travailler chez nous.
Par ailleurs, dans le cadre de la francophonie, les étudiants ayant fait le choix du français comme langue internationale s'étonnent de se voir fermer la porte de notre pays, alors que l'apprentissage de la langue anglaise leur aurait permis d'exercer leurs compétences dans le vaste monde anglophone.
Si nous ne sommes pas capables de reconnaître les compétences acquises par les francophones et de permettre à ces derniers de circuler dans l'espace francophone, les jeunes étrangers auront alors moins de raisons d'apprendre notre langue, laquelle est déjà en perte de vitesse dans le monde. L'apprentissage du français doit évidemment être un vecteur de leur développement et de l'ascenseur social. Leur demande est donc, à mon avis, tout à fait légitime.
Le projet de loi prévoit de reconnaître les compétences. Il est important que cela se fasse en liaison avec les autres pays - c'est, je crois, l'objet d'un amendement -, dans une sorte de contractualisation, de reconnaissance réciproque. Mais regardons les choses en face : il est souhaitable que ceux qui choisissent de venir en France maîtrisent notre langue ; or, s'ils ont appris cette dernière, c'est avec l'espoir qu'elle leur ouvrira, sous certaines conditions - et on peut souhaiter que ce ne soit pas de manière définitive -, la porte de notre pays. Ne pas accéder à cette demande serait à terme, j'en suis persuadé, condamner la francophonie. Voilà pourquoi j'approuve la démarche.
Mme la présidente. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l'article.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, en créant cette nouvelle carte de séjour « compétences et talents », vous institutionnalisez fortement le caractère utilitariste et discriminatoire de notre politique de l'immigration.
Désormais, le droit au séjour en France sera déterminé par le mérite et les talents, sélectionnés par l'administration, et non plus par l'histoire personnelle, les attaches, la famille, liées à notre pays.
De plus, vous entretenez volontairement un certain flou juridique. Quels seront effectivement les bénéficiaires ? Comment se mesurent les « compétences » et les « talents », et qui va en décider ?
Vous faites revenir la France à une époque où régnait la servitude, pour ne pas faire référence à des heures plus sombres de notre histoire. Il y a toutefois une différence avec ce qui s'est déroulé dans le passé : vous visez, à travers ces dispositions, la composante la mieux formée et la plus compétente des pays en voie de développement. Savez-vous que certains pays dépensent aujourd'hui 40 % de leur budget à la formation et à l'éducation ? Ces dépenses doivent-elles servir aux pays développés ?
Avec ce projet de loi, vous institutionnalisez le pillage à bas prix des cerveaux du Sud. On connaît le scandale des médecins étrangers surexploités et jamais reconnus. On assiste au rançonnage des meilleurs éléments de l'Inde, du Pakistan, du Vietnam, du Maroc, ou du Niger. Vous passez ces étrangers au tamis d'un tri sélectif tout à fait inacceptable et inhumain. Au prétexte de ne vouloir que des chercheurs, des ingénieurs, des sportifs de haut niveau, vous dites « non » à tous les autres étrangers qui ne répondent pas à vos critères capitalistes.
Pis, les rares migrants qui passeront au travers de ce tri administratif extrêmement sélectif se retrouveront dans une situation présentant très peu de garanties juridiques. En effet, l'arbitraire de l'administration étant légalisé, cette dernière pourra choisir qui elle veut, en fonction de critères volontairement flous, sans aucune définition. Ce projet de loi officialise, comme règle générale, le fait du prince : l'administration accorde ou non des faveurs, au cas par cas, selon des critères dont l'appréciation peut changer d'une préfecture à l'autre, puisqu'il n'en existe aucune définition juridique.
Monsieur le ministre, comme vous me l'avez rappelé hier soir, nous sommes dans un État de droit. Pour cette raison, nous ne pouvons pas soutenir votre projet de loi qui officialise l'arbitraire. En effet, le flou des critères renforce le pouvoir d'appréciation discrétionnaire de l'administration, alors que l'égalité de traitement et la justice, qui sont des pouvoirs régaliens de notre État, sont affaiblies.
Par ailleurs, cette carte de séjour « compétences et talents » n'offre pas les mêmes garanties que la carte de résident : valable seulement trois ans, elle n'assure que très peu de garanties aux membres de la famille ; de plus, sa délivrance est subordonnée à la production, ô combien difficile, d'un visa de long séjour.
Un autre élément plaide contre ce nouveau titre de séjour : le demandeur de cette carte de séjour doit remplir les mêmes conditions que pour une demande de naturalisation. Or, ces deux procédures ne concernent absolument pas le même public. Les critères sont beaucoup trop discriminatoires. Vos propos donnent d'ailleurs à penser que le demandeur de cette carte n'aurait à l'esprit que l'obtention, au bout du compte, de la nationalité française. Savez-vous, monsieur le ministre, que cette suspicion ne nous sert pas ? Tous les étrangers ne veulent d'ailleurs pas de cette nationalité, et certains considéreraient même qu'il s'agirait pour eux d'une trahison au regard de leur histoire.
Alors, arrêtez là votre imagination débordante qui ne mène qu'à la suspicion permanente et à un climat désastreux, lequel ne peut avoir que des conséquences dramatiques pour notre pays.
Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, les Verts voteront contre cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, sur l'article.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Avec l'invention de cette carte de séjour « compétences et talents », la France s'installe dans un système de contrôle des migrations complètement verrouillé et extrêmement compliqué, avec une multitude de types de cartes entre lesquelles l'administration, les fonctionnaires s'y retrouveront très mal, et les étrangers encore moins bien ! Nous sommes sur la défensive : nous avons bien conscience du fait que la France n'attire plus spontanément un grand nombre de chercheurs, d'intellectuels ou de personnalités de haut niveau. La contradiction vient du fait que nous voulons, d'un côté, tout verrouiller et, de l'autre, ouvrir un peu les frontières, mais avec beaucoup de contraintes.
Les pays qui attirent des chercheurs et des ingénieurs ont rarement prévu dans leur arsenal juridique des cartes de séjour spécifiques pour ceux-ci. Dans les universités américaines où je me suis rendue, j'ai interrogé les doctorants et les post-doctorants français. Ils restent aux États-Unis parce qu'ils sont bien accueillis dans leur milieu universitaire ; des conditions de travail bien supérieures à celles qu'offre l'université française ou le CNRS leur permettent de donner le meilleur d'eux-mêmes. Par conséquent, si nous voulons que des chercheurs originaires d'autres pays viennent en France, faisons comme les Américains : accueillons-les bien ! Ne mettons pas de nombreuses entraves à leur venue !
Les chercheurs français installés aux États-Unis obtiennent en quelques années une carte verte puis, au bout de cinq ans, la nationalité américaine. Chez nous, c'est toute une histoire ! Tout cela ne rend évidemment pas notre pays très attractif.
Notre discours sur la fuite des cerveaux n'aurait plus lieu d'être, les départs ne s'analysant plus dans ces termes, s'il y avait un échange et si la France réussissait à redevenir un pays de recherche intellectuelle et scientifique attrayant, ce qu'elle n'est pas suffisamment.
Et ce n'est pas avec la carte de séjour « compétences et talents », compte tenu de toutes les restrictions déjà prévues par le projet de loi pour sa délivrance - je me demande d'ailleurs ce que nous réservent les décrets d'application ! -, que nous allons attirer des chercheurs ! Ces derniers viendront en France s'ils trouvent des conditions d'accueil et d'hébergement correctes - l'université de Montpellier a ainsi prévu une structure d'hébergement pour les chercheurs en mission et les professeurs visiteurs -, s'ils sont rémunérés dès leur arrivée et non pas six mois après. Combien ai-je entendu de professeurs visiteurs ou de chercheurs associés vivant en France se plaindre d'avoir dû « tirer la langue » pendant six mois parce qu'ils n'étaient pas rémunérés, leur président d'université ou leur patron de laboratoire ne pouvant rien pour eux à cet égard ! Au Canada ou aux États-Unis, on vous avance l'équivalent de six mois de salaire pour que vous puissiez vous installer !
Heureusement, la France attire encore, pour des raisons historiques et linguistiques, des étudiants et des chercheurs maghrébins et africains. Le directeur d'EduFrance me faisait d'ailleurs récemment remarquer que, sans eux, les études doctorales en sciences exactes n'auraient que très peu d'étudiants.
De même, sans les 7 000 médecins à diplôme étranger, attachés à un exercice médical hospitalier contraint, et sous-rémunérés, que certains chefs de service appellent leur « légion étrangère », certains services d'urgence de CHU parisiens fermeraient, la situation étant encore pire dans les régions !
Au lieu de créer une carte supplémentaire, donnons donc à tous ces étrangers des conditions d'entrée et de séjour sans restrictions mesquines ; traitons-les avec justice et, surtout, facilitons les va-et-vient professionnels. C'est en effet ce qui manque dans notre système. Depuis 1973, tout a tellement été bien verrouillé dans tous les domaines qu'il en est résulté un blocage. Au lieu de faire la navette entre leur pays et la France, les étrangers se retrouvent bloqués d'un côté ou de l'autre, et nous, nous y perdons.
Je ne crois pas beaucoup à l'utilité de cette carte de séjour « compétences et talents » et à tous les ajouts quelque peu paternalistes de l'Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l'article.
Mme Bariza Khiari. Avec cet article 12, nous sommes au coeur de ce que vous appelez « l'immigration choisie ».
Au premier abord, cette carte de séjour pourrait sembler une sorte de gadget destinée à attirer en France certaines catégories d'étrangers. Elle est en fait bien plus que cela ; elle introduit une distinction entre ceux que l'on jugerait dotés de « compétences et talents » et d'autres qui en seraient privés. Mais qui opérera cette distinction ?
La délivrance de cette carte serait de la compétence du ministère de l'intérieur, après avis des consulats du pays d'origine. Les consuls et le ministre auront-ils auprès d'eux des experts pour déterminer si tel deviendra un grand footballeur, un écrivain à succès ou un savant talentueux ?
Cette inégalité est caractérisée par la différence de traitement entre les étrangers bénéficiaires de la carte « compétences et talents » et les autres, notamment en matière de regroupement familial.
Le ministre d'État nous a parlé de codéveloppement lors de la présentation de ce projet de loi ; j'en ai volontiers accepté l'augure, mais je partage les mêmes inquiétudes qu'un certain nombre de mes collègues et crains le pillage des cerveaux, notamment des pays pauvres ou des pays en développement.
De toute façon, cette carte ne permettra pas de renforcer l'attractivité de la France, alors même que nos cerveaux les mieux formés s'expatrient. Si vous voulez rendre notre pays plus attractif pour les intellectuels et les savants, il faudra d'abord mener une réelle réforme de la recherche et de l'enseignement supérieur, au lieu de continuer à paupériser ces secteurs.
De plus, vous n'attirerez pas les compétences et les talents en donnant l'image d'une France forteresse, frileuse et repliée sur elle-même. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste proposera un amendement de suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Luc, sur l'article.
Mme Hélène Luc. Le groupe communiste républicain et citoyen a dénoncé à plusieurs reprises la dangerosité de ce projet de loi et de la notion d'immigration choisie, selon laquelle les étrangers ne doivent être acceptés qu'à la condition qu'ils soient rentables, c'est-à-dire corvéables à merci par le patronat.
Ce texte comporte bien d'autres dispositions dangereuses, comme le durcissement des conditions du regroupement familial, la quasi-disparition de la carte de résident, ou bien encore la fin de l'automaticité de la régularisation au bout de dix années de présence sur le territoire national.
La philosophie de ce projet de loi, c'est l'application de la théorie du marché à la gestion de l'immigration. Elle se traduit par le pillage des pays du tiers-monde en personnes qualifiées, ce qui, loin du codéveloppement, les enfonce encore un peu plus dans le sous-développement.
J'ai eu l'occasion de le vérifier lors d'une mission que nous avons effectuée en Éthiopie, au Soudan et en Érythrée. Les personnes que nous avons rencontrées nous ont bien sûr remerciés de notre aide, mais elles nous ont dit aussi que l'essentiel, pour leur pays, était de former des cadres.
Les membres de la délégation du Bénin que nous avons reçue hier nous ont fait remarquer qu'il y a moins de médecins béninois au Bénin qu'à Paris ! Dans le même temps, en France, certains étudiants en médecine, avec le numerus clausus, sont recalés pour quelques dixièmes de point...
Les membres de cette même délégation considèrent également qu'il faudrait, pour aider les pays d'Afrique, permettre à ces derniers de vendre leurs bananes, leur coton, leur café, et donc que les Etats-Unis et les autres pays développés cessent de subventionner leurs producteurs.
Enfin, monsieur le ministre, je voudrais évoquer les jeunes sans papiers. Les établissements scolaires concernés, en liaison avec les parents, les enseignants et des citoyens, la Ligue des droits de l'homme, le Réseau éducation sans frontières, appellent à protéger ces jeunes.
Hier soir, au cours d'un compte rendu de mandat, j'ai rencontré l'un des quatre lycéens de Thiais à qui l'on refuse une carte de résident. Il passe son baccalauréat et veut s'engager dans des études commerciales longues : le fait de se demander chaque année s'il pourra rester en France pour étudier constitue une véritable épée de Damoclès pour ce jeune homme.
Les comités qui ont été créés ne s'arrêteront pas, monsieur le ministre. Nous avons parrainé ces jeunes et nous voulons, pour qu'ils soient intégrés et vivent tranquillement en France, qu'ils obtiennent une carte de résident, et non pas seulement une carte de séjour temporaire pour terminer leur année d'études.
Je pourrais également vous citer l'exemple de deux soeurs, dont l'une a obtenu un contrat de travail lui permettant de demeurer en France, tandis que l'autre n'a le droit de rester que jusqu'aux épreuves du baccalauréat.
M. Sarkozy et vous-même, monsieur le ministre, avez indiqué que les préfets allaient étudier ces problèmes au cas par cas. Mais ce qu'il faut, c'est donner le droit à ces jeunes de rester en France, d'obtenir des papiers et de vivre librement une vie normale, comme tous les jeunes doivent la vivre !
Mme la présidente. Je suis saisie de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 164 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 304 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 513 rectifié bis est présenté par Mme Dini, MM. About, Amoudry, Arthuis, Badré, J. Boyer et Deneux, Mme Férat, M. C. Gaudin, Mmes G. Gautier et Gourault, M. Jégou, Mme Morin-Desailly, MM. Pozzo di Borgo, Soulage et Vallet, Mmes Payet et Létard.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 164.
M. Pierre-Yves Collombat. La carte de séjour « compétences et talents » se présente comme la mesure phare du projet de loi.
Il peut paraître incongru, en effet, de refuser à notre pays ce que d'autres s'offrent sans complexe ; de plus, si ces immigrés choisis ne vont pas chez nous, me direz-vous, ils iront chez les autres ; enfin, certains considéreront que c'est une façon de participer au codéveloppement des pays dont ces immigrés sont originaires...
Nous avons déjà évoqué les conditions restrictives qui permettraient de limiter l'emploi de médecins africains chez nous, ou des mesures plus positives comme le compte investissement ou la contractualisation. De telles dispositions permettraient de servir les intérêts réciproques des pays et de donner satisfaction aux individus.
Pourquoi soutenir ce que vous considérez comme insoutenable ?
D'abord, la France n'est pas tenue de faire ce que les autres s'autorisent. Au risque de paraître ringard, je rappellerai que la France est le pays de la Révolution et des droits de l'homme. Notre modèle d'intégration et de régularisation des flux d'immigration n'est pas celui des autres. Aussi, je me suis efforcé de montrer, en défendant la motion tendant à opposer la question préalable, que les questions avaient été tranchées à la Libération et qu'il ne fallait ouvrir cette boîte de Pandore qu'en tremblant.
Au demeurant, les modèles étrangers cités en exemple ne donnent pas forcément les résultats qu'on veut bien leur attribuer. La vague de régularisations de 11 à 12 millions de personnes annoncée aux États-Unis devrait nous faire réfléchir ; les Canadiens semblent également rencontrer quelques difficultés.
Plutôt que d'importer de l'étranger des recettes qui ne marchent pas forcément mieux que les nôtres, essayons de moderniser notre propre modèle. Je pense par exemple aux réflexions de M. Legendre sur la francophonie, ou à tout ce que nous avons fait en matière de coopération, dans le respect de nos valeurs.
Je vais maintenant essayer de me placer dans votre logique.
Tout d'abord, le dispositif présenté comme nouveau existe déjà sous une forme légèrement différente avec la fameuse carte « VIP », créée par la loi de 2003 ; il n'a apparemment pas donné les résultats escomptés puisque l'on nous présente une nouvelle loi !
Je profite de l'occasion pour souligner un phénomène auquel nous sommes régulièrement soumis. On constate des problèmes et on en déduit qu'il faut faire une nouvelle loi ; ceux qui s'interrogent sur l'efficacité du nouveau texte sont soupçonnés de ne rien vouloir faire ; le temps passe, les problèmes demeurent, et on présente une nouvelle loi... et ainsi de suite, cela peut durer éternellement !
Si nous contestons les dispositions de ce projet de loi, ce n'est pas par envie de contester, ni pour ne rien faire, c'est parce que nous pensons qu'elles ne donneront pas les résultats attendus. Le dispositif est en effet miné par une contradiction fondamentale : ce sont bien les immigrés qui nous choisiront et non pas l'inverse !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne répéterai pas ce qu'ont dit excellemment Mmes Cerisier-ben Guiga et Khiari sur les conditions de travail, sur les raisons qui motivent le choix de tel pays plutôt que de tel autre.
Dans ces conditions, que leur proposons-nous ? Une carte de séjour de trois ans, obtenue avec difficulté au terme d'un véritable parcours du combattant ! Croyez-vous franchement que cela va résoudre la question que vous vous posez ?
Plus généralement, et je conclurai par cet argument, croyez-vous vraiment que nous puissions attirer quelques étrangers en particulier en refusant les étrangers en général ? Nous ne pouvons pas présenter un visage de méfiance et de suspicion à l'égard des étrangers et prétendre, dans le même temps, les attirer.
Telle est, y compris en se plaçant de votre point de vue, la contradiction fondamentale qui nous conduira à nous retrouver, dans deux ou trois ans, pour voter une nouvelle loi !
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 304.
Mme Éliane Assassi. L'article 12 est l'une des clés de voûte de ce projet de loi. Il traduit bien la notion d'immigration choisie ardemment défendue par M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur : sélectionner les étrangers et choisir ceux qui seraient les plus compétents et les plus talentueux, c'est-à-dire ceux qui seraient susceptibles de participer au développement économique et au rayonnement notamment intellectuel, scientifique, culturel, humanitaire ou sportif de notre pays.
Ainsi, en fonction de critères qui sont particulièrement subjectifs, surtout s'ils sont déterminés par la future Commission nationale des compétences et des talents, la France se permettra effectivement de trier les étrangers. Elle mettra, d'un côté, ceux qui ne seront pas reconnus dans leur activité professionnelle - ils se verront remettre un titre de séjour d'un an - et, de l'autre, ceux qui seront reconnus ou auront une certaine notoriété dans leur domaine - ils auront le droit d'obtenir une carte de séjour de trois ans.
Je suis d'accord avec ce qu'a écrit Kofi Annan, dans un journal du soir, au sujet des immigrés : « qualifiés ou pas, beaucoup ont assez d'initiative pour créer leurs propres entreprises qui vont de l'épicerie ouverte jour et nuit à Google, le géant de l'internet ; d'autres sont artistes ou écrivains et enrichissent de leur créativité la culture de leur ville d'accueil ».
Il n'y a donc pas, d'un côté, les mauvais immigrés et, de l'autre, les bons immigrés !
En la matière, nous devrions donc, me semble-t-il, faire preuve un peu plus souvent d'humilité.
Quelle image, en effet, donnons-nous aux pays étrangers ? Cette carte « compétences et talents » est censée être un élément de plus dans la politique de gestion des flux migratoires du Gouvernement.
Cependant, que personne ne se méprenne : les étrangers souhaitant travailler dans des domaines de pointe ou les étudiants-chercheurs ne viennent déjà plus en France, en raison des conditions drastiques mises à l'obtention d'une carte de séjour, sans parler des bas salaires qui leur sont proposés !
La carte de séjour « compétences et talents » n'a pas d'autre objet que de piller les cerveaux étrangers, tout en ne leur garantissant pas les mêmes conditions de travail qu'aux nationaux ; à cet égard, nous avons déjà largement évoqué le cas des médecins étrangers, qui travaillent dans des conditions déplorables.
Dans la pratique, ce sont donc les industriels, les chercheurs, les artistes et les sportifs que le Gouvernement souhaite attirer en France grâce à cette nouvelle carte.
En ce cas, n'aurait-il pas mieux valu faire bénéficier ces étrangers d'une carte de résident ? La carte « compétences et talents » est loin d'offrir à son titulaire les même garanties que la carte de résident, puisqu'elle peut lui être retirée s'il ne remplit plus les conditions de délivrance.
En résumé, cette carte traduit ni plus ni moins la vision utilitariste et élitiste qu'a le Gouvernement de l'immigration, vision que nous ne partageons bien évidemment pas !
C'est donc avec force que nous rejetons l'article 12 et demandons sa suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Denis Badré, pour défendre l'amendement n° 513 rectifié bis.
M. Denis Badré. Un vrai débat, responsable, sérieux et approfondi, s'est instauré au sein du groupe de l'Union centriste-UDF sur cette question qui se trouve au coeur de notre discussion sur l'immigration.
Nous avons pesé tous les points de vue, dont beaucoup viennent d'être évoqués aussi bien par la droite que par la gauche. Certains ont développé des arguments en faveur de cet article, d'autres des arguments contre. J'ai bien entendu, notamment, ce qu'a dit M. Jacques Legendre.
Au terme d'une large réflexion, certains membres du groupe ont finalement décidé de déposer un amendement de suppression de l'article 12, afin de prendre leurs responsabilités sur ce sujet central.
Nous avons pris cette décision au regard de trois critères : pratique, opératoire - le jeu en vaut-il la chandelle ? - et philosophique.
L'aspect pratique ne me paraît pas le plus important des trois. Certes, nous avons retourné tous les problèmes et nous nous sommes aperçus que la mesure serait difficile à mettre en oeuvre. Des zones de flou et d'ombre subsistent. Quels métiers retiendra-t-on ? Pourquoi tel métier et pas tel autre ? Dans un métier donné, à partir de quand sera-t-on considéré comme compétent ? Quel type de recours pourrons-nous offrir aux professions exclues ou aux personnes exclues à l'intérieur d'une profession ?
Sur tous ces points, je fais confiance à ceux qui seront chargés de rédiger les textes d'application de l'article. J'imagine qu'ils arriveront à trouver des solutions à toutes ces questions afin d'éclaircir parfaitement le débat. Il me semble en effet nécessaire d'avancer sur des bases totalement claires.
Quoi qu'il en soit, je ne retiens que pour mémoire les arguments concernant le caractère pratique de la disposition.
J'en viens maintenant au caractère opératoire de la mesure.
Nous voulons maîtriser l'immigration. Dans la discussion générale, j'ai insisté sur le fait que la meilleure manière de le faire consistait à traiter le problème à sa source, et donc à mettre en oeuvre résolument une vraie politique de codéveloppement.
J'ai insisté également sur le fait que la France n'y arriverait pas seule. Les États-Unis ne le feront jamais. C'est donc à l'Europe d'y procéder. Je demande donc à nouveau - je l'ai fait l'autre jour et je le fais en toute occasion ces derniers temps - que la France continue, dans son intérêt, à tenir son rôle d'ouvreur dans la construction européenne en proposant à Bruxelles que l'Europe lance une grande politique de co-développement.
Ce serait bon pour l'Europe et ce serait bon pour l'image de la France en Europe. Par ailleurs, nos jeunes croiraient de nouveau en une Europe qui chercherait à atteindre ce type d'objectif.
Mme Bariza Khiari. Très bien !
M. Denis Badré. J'insiste lourdement sur ce point, car c'est le coeur du problème. !
À partir du moment où l'objectif est de mettre en place une politique de codéveloppement et où nous retenons que la meilleure manière de traiter le problème de l'immigration est de réduire la misère dans les pays d'origine des migrants, ne pillons pas leurs talents !
M. le ministre d'État, dans son intervention liminaire, l'a dit, et il a rappelé les conversions qu'il a eu notamment avec le président Abdoulaye Wade. C'est un vrai sujet.
Le discours que le président Wade nous adresse est exactement celui que nous adressons à nos partenaires américains lorsqu'ils retiennent chez eux nos post-doctorants, en les séduisant et en écrémant les meilleurs des nôtres !
Ils les retiennent, d'ailleurs, en leur offrant autre chose qu'une carte : des conditions de travail, des conditions financières, des conditions d'accueil avec lesquelles nous ne pouvons pas rivaliser. C'est pourquoi nos meilleurs post-doctorants restent aux États-Unis plutôt que de revenir en France.
Il ne faut donc pas refuser d'écouter le président Wade quand il nous dit la même chose que ce que nous disons aux Américains !
Même si nous devons rester très calmes face à ces réalités, nous sommes dans un monde difficile, dans un monde ouvert, et nous devons regarder les choses comme elles sont.
La mesure qui nous est proposée aujourd'hui vise finalement plus à fermer la porte à ceux qui n'ont pas de compétences qu'à l'ouvrir à ceux qui en ont ! (Mmes Bariza Khiari et Monique Cerisier-ben Guiga applaudissent.)
Mais, fermant la porte à ceux qui n'ont pas de compétences, nous ne les empêcherons pas de venir : ils souffrent dans leur pays, ils souffriront de le quitter, mais ils le quitteront tout de même, la mort dans l'âme, pour venir grossir chez nous les rangs des clandestins, car ils n'ont pas la possibilité de rester chez eux !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Tout à fait !
M. Bernard Frimat. Absolument !
M. Denis Badré. On ne traitera donc pas le problème de l'immigration en refusant une carte à certains immigrés. Ils viendront quand même, mais clandestinement !
En revanche, instaurer une telle carte n'attirera pas davantage les immigrés dont nous avons besoin. Ceux-là choisiront la France le jour où notre pays deviendra attractif.
Nous aurons gagné le jour où les post-doctorants français qui sont à Boston auront le souci, en fin d'études, de rentrer en France plutôt que de céder à l'appel des sirènes américaines. Nous aurons gagné lorsque le mathématicien indien, au lieu d'aller retrouver le mathématicien français à Boston, s'arrêtera en France, où le mathématicien français l'accueillera !
À ce moment-là, nous aurons gagné ! Mais ce n'est pas la carte « compétences et talents » qui amènera les uns ou les autres à choisir la France.
En résumé, la création d'une telle carte n'empêchera pas de venir ceux dont nous ne voulons pas, et elle n'incitera pas à venir ceux dont nous voulons. Elle n'est donc pas très opérante à cet égard.
Quand au dernier critère, l'aspect philosophique de cette affaire, je dois avouer que je suis gêné.
Je suis en effet gêné que la France établisse une distinction entre des immigrés qui seraient utiles et d'autres qui ne le seraient pas, car les uns et les autres sont des êtres humains !
Je suis également dérangé par le vocabulaire utilisé pour présenter les choses. D'un point de vue philosophique, je suis gêné d'entendre parler de bons et de mauvais immigrés !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout à fait ! C'est grave et insupportable !
M. Denis Badré. Ce dernier aspect, finalement, me semble beaucoup plus important que les deux précédents, car j'aime bien être en accord avec ce que je pense profondément et humainement.
Cet article 12 pose donc problème à mon groupe.
Néanmoins, nous sommes très désireux de progresser sur le codéveloppement et sur une maîtrise de l'immigration, et non sur un choix. Si choix de l'immigration il devait y avoir, nous voulons que ce soit un choix pour tous, pour nous mais également pour ceux qui viendront.
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Denis Badré. Pour cette raison, nous avons considéré avec un très grand intérêt l'amendement n° 81 rectifié bis de M. Portelli, qui nous semble aller dans le sens de l'établissement de relations bilatérales entre les pays.
À ce moment-là, le choix de l'immigration devient, me semble-t-il, humainement acceptable. S'il y a un vrai débat, une vraie discussion, et si, souverainement, les uns et les autres dialoguent en se respectant mutuellement, nous pouvons accepter d'entrer dans une démarche qui ne serait plus du tout de même nature.
L'amendement n° 81 rectifié bis de M. Portelli nous convient, et un certain nombre des membres de mon groupe l'ont cosigné. Personnellement, j'étais prêt à le faire également, et je suis prêt à plaider tout à l'heure en sa faveur. J'ai d'ailleurs déposé un sous-amendement allant à peu près dans le même sens.
En fonction de la discussion, monsieur le ministre, si vous nous confirmez que vous avez la volonté d'avancer sur le problème du co-développement, que vous ferez tout pour que cette carte n'entrave pas ce codéveloppement que nous appelons de nos voeux, que vous essayerez de trouver des solutions pratiques respectueuses de toutes les souffrances qui sont en jeu, nous pourrions être appelés à considérer d'un autre oeil l'ensemble du sujet.
Quoi qu'il en soit, pour le moment, nous sommes très réservés sur cet article.
Mme la présidente. L'amendement n° 305, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer les mots :
peut être
par le mot :
est
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Il s'agit d'un amendement de repli qui tend à faire en sorte que la carte de séjour « compétences et talents » soit - et non puisse être - accordée par l'autorité administrative compétente, qui n'est autre que le ministre de l'intérieur.
C'est sur l'initiative du rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Mariani, que cette automaticité s'est transformée en une simple faculté, ce qui change évidemment bien des choses pour les étrangers qui auront demandé cette carte !
En effet, si l'étranger remplit les critères - bien trop subjectifs, je le répète - nécessaires à la délivrance de la carte, pourquoi ne pas la lui accorder d'office ?
Les mots « peut être accordée » ajoutent une part d'arbitraire dans un dispositif qui en contient déjà beaucoup.
C'est pourquoi nous souhaitons, si tant est que cela soit possible, améliorer le dispositif de la carte « compétences et talents » et revenir à la rédaction initiale du projet de loi.
Mme la présidente. L'amendement n° 306, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
développement économique
supprimer la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Pour détendre l'atmosphère, je raisonnerai par l'absurde.
Qu'est-ce que ce rayonnement « intellectuel, scientifique, culturel, humanitaire ou sportif » auquel pourraient contribuer les étrangers les plus talentueux et les plus compétents ?
Cela signifie-t-il que les étrangers exerçant d'autres métiers, qu'ils soient techniques ou manuels, par exemple, sont moins talentueux et moins compétents, et qu'ils ne sont donc pas susceptibles de participer au rayonnement de la France ?
Certes, c'est un raisonnement par l'absurde, mais je l'utilise bien volontiers s'il peut vous convaincre du caractère quasi irrationnel des critères censés déterminer la délivrance de cette carte - et je ne parle même pas de la Commission nationale des compétences et des talents qui fera l'objet d'un prochain amendement !
Le choix des critères traduit bien le risque d'arbitraire dans la procédure de délivrance de cette carte par les autorités consulaires, puis par le ministre de l'intérieur.
C'est ce qui a motivé le dépôt de cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 23, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
de la France
rédiger comme suit la fin de la première phrase du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315- 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
et du pays dont il a la nationalité
La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'article L. 315-2, qui dispose que la carte « compétences et talents » est attribuée au vu de l'intérêt du projet pour la France et pour le pays dont l'étranger a la nationalité.
Mme la présidente. L'amendement n° 106 rectifié bis, présenté par MM. Pelletier, Barbier, A. Boyer, Delfau, Laffitte, Marsin, de Montesquiou, Mouly, Othily, Seillier et Thiollière, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque son titulaire a la nationalité d'un pays membre de la zone de solidarité prioritaire son renouvellement est limité à une fois.
La parole est à M. Jacques Pelletier.
M. Jacques Pelletier. La carte « compétences et talents » s'adresse aux meilleurs des étrangers.
Attirer les meilleurs n'est pas choquant en soi. Bien au contraire, la France a tout à y gagner ! C'est parfait quand ces étrangers viennent des États-unis, du Canada, d'Australie, de l'Inde et de bien d'autres pays. En revanche, quand ils viennent des pays en voie développement, un vrai problème se pose alors pour les pays d'origine, qui manquent souvent cruellement de citoyens ayant une formation très poussée.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Jacques Pelletier. Le projet de loi qui nous est présenté prévoit de renouveler sans limite cette carte « compétences et talents ».
C'est pourquoi nous sommes plusieurs sénateurs à avoir souhaité que, lorsque le titulaire d'une telle carte a la nationalité d'un pays membre de la zone de solidarité prioritaire, celle-ci voit son renouvellement limité à une fois.
Les pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire sont parmi les plus en difficulté. Nous pensons donc que, au bout de six ans, ce ressortissant étranger devrait retourner dans son pays d'origine pour le faire bénéficier de ses talents et de ses compétences.
Mme la présidente. L'amendement n° 81 rectifié bis, présenté par MM. Portelli et Lardeux, Mme B. Dupont, MM. Pozzo di Borgo, Seillier et Pelletier, Mme Gourault, MM. Zocchetto, Détraigne, Béteille et Mercier, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - La carte mentionnée à l'article L. 315-1 ne peut être accordée à l'étranger ressortissant d'un pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire que lorsque la France a conclu avec ce pays un accord de partenariat pour le codéveloppement.
La parole est à Mme Bernadette Dupont.
Mme Bernadette Dupont. Cet amendement a pour objet d'éviter la fuite des cerveaux. Il devrait donc satisfaire tout le monde.
Nous demandons que la carte « compétences et talents » ne puisse être accordée à l'étranger ressortissant d'un pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire que lorsque la France a conclu avec ce pays un accord de partenariat pour le codéveloppement.
Il s'agit donc que la France n'accepte d'accueillir un ressortissant étranger qu'avec l'accord de son pays d'origine, afin qu'il puisse retourner y exercer les compétences dont celui-ci a besoin.
Mme la présidente. L'amendement n° 24, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
« Art. L. 315-2. - La carte mentionnée à l'article L. 315-1 est attribuée au vu du contenu et de la nature du projet de l'étranger et de l'intérêt de ce projet pour la France et pour le pays dont l'étranger a la nationalité.
« L'étranger peut souscrire sa demande de carte "compétences et talents" auprès de la représentation consulaire française territorialement compétente dans le pays où il réside. L'autorité administrative compétente pour délivrer cette carte est le ministre de l'intérieur.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement est essentiellement rédactionnel. Il vise à supprimer la référence à l'aptitude de l'étranger pour obtenir la carte « compétences et talents », l'article L. 315-1 la prenant déjà en compte.
En outre, cet amendement tend à simplifier la rédaction, la différence entre « le contenu du projet » et « la nature de l'activité » que l'étranger se propose d'exercer n'étant pas évidente.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 528, présenté par M. Badré et les membres du Groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Remplacer la première phrase du second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 24 pour l'article L. 315-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsque l'étranger souhaitant bénéficier d'une carte "compétences et talents" réside régulièrement en France, il présente sa demande auprès du représentant de l'État dans le département. Lorsque l'étranger réside hors de France, il présente sa demande auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises territorialement compétentes. »
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Ce sous-amendement vise à élargir l'obtention de la carte aux étrangers résidant déjà sur le territoire français. Je pense par exemple aux étudiants ou à des actifs titulaires d'une carte de séjour de salarié.
En effet, beaucoup d'étudiants venant de pays en développement arrivent chez nous pour suivre un premier et un deuxième cycles. Ils s'inscrivent ensuite en troisième cycle aux États-Unis. Ils sont alors perdus pour leur pays et pour le nôtre !
Il faut parvenir à stabiliser ce type de compétences et de talents, soit dans le cadre de l'amendement n° 81 rectifié bis, soit pour un temps, comme le prévoit l'amendement n° 106 rectifié bis. Quoi qu'il en soit, il faut examiner le problème dans toutes ses dimensions. Le sous-amendement n° 528 vise donc à colmater cette voie d'eau particulière.
Mme la présidente. L'amendement n° 307, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement de repli vise à supprimer le second alinéa de l'article L. 315-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Présenter la demande de la carte « compétences et talents » auprès de la représentation consulaire française territorialement compétente dans le pays d'origine - procédure qui n'existe pas pour la délivrance des autres cartes de séjour temporaire - constitue ni plus ni moins un moyen de filtrer les étrangers dans le pays d'origine.
Cette procédure s'inscrit parfaitement dans la logique du tri des immigrés, que rejettent les auteurs de cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 308, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-2-1 de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Après la création de la carte « compétences et talents », voici qu'arrive la Commission nationale des compétences et des talents.
Proposée à l'Assemblée nationale par Claude Goasguen, cette commission est censée mieux encadrer les critères d'attribution de la carte « compétences et talents ». Elle fixera chaque année des critères afin d'aider le ministre de l'intérieur à apprécier l'opportunité d'accorder ou non ladite carte.
Nous nous étonnons de la création d'une énième commission nationale, qui plus est chargée de déterminer les critères à utiliser par les personnels consulaires afin de sélectionner les compétences et les talents des étrangers. Quelle sera sa composition ? Claude Goasguen propose des intellectuels, des artistes. Pourquoi ne comprendrait-elle pas également des philosophes ? En tout cas, ce serait à espérer.
Quoi qu'il en soit, cette disposition n'est pas très sérieuse. C'est la raison pour laquelle nous demandons sa suppression.
Mme la présidente. L'amendement n° 25, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
« Art. L. 315-3-1. - Lorsque le titulaire de la carte de séjour "compétences et talents" est ressortissant d'un pays de la zone de solidarité prioritaire, il apporte son concours, pendant la durée de validité de cette carte, à une action de coopération ou d'investissement économique définie par la France avec le pays dont il a la nationalité.
« Lors du premier renouvellement de cette carte, il peut être tenu compte du non-respect, par l'étranger, de cette obligation.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Outre une modification rédactionnelle, cet amendement vise à lier le renouvellement de la carte « compétences et talents » au respect effectif de l'obligation de participer à une action de codéveloppement. Je sais que cette dernière disposition est chère à chacun d'entre nous, quelles que soient les travées sur lesquelles il siège.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 529, présenté par M. Karoutchi, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 25 pour l'article L. 315-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
« Lors du premier renouvellement de cette carte, il est tenu compte du non-respect de cette obligation.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Il s'agit d'un sous-amendement de précision, qui tend à renforcer l'amendement n° 25. Il est en effet important que, au moment du renouvellement de la carte, un bilan soit établi.
Mme la présidente. L'amendement n° 26, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer les mots :
Le conjoint et les enfants
par les mots :
Le conjoint, s'il est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3
La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le projet de loi dispose que le regroupement familial ne serait plus possible pour les conjoints mineurs.
Par cohérence, il semble nécessaire de prévoir la même disposition pour le conjoint d'un titulaire de la carte « compétences et talents ». Un autre amendement de la commission en disposera de la même façon pour le conjoint d'un titulaire de la carte « salarié en mission ».
Mme la présidente. L'amendement n° 27, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 315-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, supprimer les mots :
et à l'article L. 314-6
La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une mention inutile.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements et des sous-amendements ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Les amendements nos 164 et 304 visant à supprimer le nouveau dispositif, la commission a émis un avis défavorable.
Les garanties encadrant ce dispositif ainsi que l'adoption de certains amendements seront de nature à rassurer les sceptiques ou les opposants. Nous serons donc suffisamment à même d'éviter ce que tout le monde craint, à savoir le pillage des pays en voie de développement.
S'agissant de l'amendement n° 513 rectifié bis, j'ai cru comprendre que ses auteurs liaient son sort à l'avis qui sera donné par le Gouvernement. En attendant, la commission réserve donc sa position.
La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 305, car elle considère que l'administration doit rester libre d'accorder ou non la carte « compétences et talents ».
L'amendement n° 306 restreint la carte « compétences et talents » à la seule dimension économique. Il ne faut pas oublier que ce n'est pas son seul critère d'attribution. Elle peut également être accordée en tenant compte des aspects culturels, intellectuels, scientifiques ou sportifs. La commission émet donc un avis défavorable
L'amendement n° 106 rectifié bis tend à limiter à une fois le renouvellement de la carte « compétences et talents » lorsque son titulaire a la nationalité d'un pays membre de la zone de solidarité prioritaire. Cette mesure contribue à encadrer le dispositif et à nous rassurer quant à l'éventualité d'un pillage des cerveaux. La commission a donc émis un avis favorable.
L'amendement n° 81 rectifié bis subordonne la délivrance de la carte « compétences et talents » à la conclusion d'un accord de partenariat pour le développement avec le pays dont est issu le ressortissant étranger. Cette mesure renforce également les garanties, auxquelles tout le monde est très sensible, que nous souhaitions apporter au dispositif. La commission a donc émis un avis très favorable.
Le sous-amendement n° 528 n'a pas été examiné par la commission. Il a pour objet de préciser qu'un étranger résidant en France et souhaitant bénéficier d'une carte « compétences et talents » peut accomplir les démarches nécessaires sur le territoire national. À titre personnel, cette disposition me paraît être de bon sens. J'émets donc un avis favorable.
L'amendement n° 307 étant un amendement de suppression, la commission émet un avis défavorable. Je tiens tout de même à rappeler que le projet de loi cherche plutôt à simplifier les démarches et les procédures auxquelles seront soumises les personnes susceptibles de recevoir cette carte. Cette disposition a donc tout intérêt à être conservée.
La commission a également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 308, qui tend à supprimer purement et simplement la commission ad hoc, laquelle est susceptible de donner un point de vue et de définir des orientations.
Enfin, le sous-amendement n° 529 n'a pas été examiné par la commission. Il a pour objet de renforcer les garanties en fixant une obligation de coopération. À titre personnel, j'émets un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Avant tout, je tiens à remercier les membres de la Haute Assemblée, qui, depuis que nous avons commencé à examiner l'article 12, ont à coeur de défendre leurs convictions.
Le débat a montré que chacun avait conscience, même si tout le monde n'est pas d'accord avec la réponse apportée par cet article aux problèmes que connaît notre pays, du fait que nous avions une vraie difficulté avec certains pays étrangers et, parfois, avec nous-mêmes.
Jacques Legendre a eu l'occasion de le souligner, comme d'autres intervenants d'ailleurs, lorsque nos propres étudiants sont aspirés par des universités américaines et qu'ils se voient ensuite proposer des postes avec une qualification et un niveau de rémunération que nous ne sommes pas capables de leur offrir, nous voyons que nous sommes nous-mêmes confrontés à des difficultés.
Dans cette compétition de compétences et de talents, qui dépasse notre seule dimension nationale, il était important que nous nous dotions d'une politique qui nous soit propre, dans le respect des autres. L'examen des précédents articles a mis l'accent sur cet aspect. Nous avons d'ailleurs eu un débat hier soir sur le financement du codéveloppement, notamment à propos de l'épargne provenant des revenus des travailleurs étrangers résidant en France.
Je voudrais que chacun soit convaincu que, avec l'article 12, le Gouvernement a non seulement eu la volonté de permettre l'accueil de cadres, de scientifiques, d'universitaires, de techniciens qualifiés étrangers afin de bénéficier de leurs compétences, mais qu'il a aussi eu le désir d'en faire bénéficier leurs pays d'origine et de renforcer notre vision du codéveloppement.
Comme Jacques Legendre vient de le dire, nous cherchons également à renforcer la francophonie et le rayonnement international de notre pays. À cet égard, je voudrais vous remercier, monsieur le sénateur, d'avoir rappelé que beaucoup de ressortissants étrangers souhaitant venir travailler en France - je pense notamment aux cadres - ont d'abord découvert la France en faisant l'apprentissage de notre langue.
Je vous remercie également d'avoir rappelé que ce n'est pas le Gouvernement qui fait appel à des cerveaux étrangers. Ce sont le plus souvent ces cerveaux qui demandent ardemment à venir en France.
Madame Boumediene-Thiery - je le dis de façon modérée -, vous avez choisi de vous exprimer avec un peu d'outrance en assimilant la création de la carte « compétences et talents » à une nouvelle forme de servitude. Je vous le rappelle, la servitude est l'attachement à un maître et à une terre. Or la carte « compétences et talents » est tout le contraire, puisqu'elle encourage la mobilité.
Vos reproches sont d'ailleurs tout à fait contradictoires. Ainsi, vous dites que nous ne nous intéressons qu'aux meilleurs. Mais le projet de loi comporte dans son article 10, et vous l'avez suffisamment dénoncé, une ouverture du marché du travail aux métiers moyennement ou peu qualifiés.
Par conséquent, lorsque vous vous exprimez sur l'article 12, vous ne pouvez pas prétendre que l'ensemble de notre politique en faveur du travail des étrangers se résumerait à ce seul article. En effet, nous avons déjà eu un grand débat sur l'article 10, précisément afin de permettre à un certain nombre de travailleurs non qualifiés d'accéder au marché du travail dans notre pays.
Comme vous pouvez le constater, le présent projet de loi prend bien en compte la diversité des situations.
Madame Cerisier-ben Guiga, ne faites pas semblant de n'avoir pas compris.
D'une part, la délivrance de la carte de séjour « compétences et talents » prendra en compte l'intérêt, tant pour la France que pour le pays d'origine, du projet présenté par l'étranger. C'est l'objet de l'article L. 315-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
D'autre part, le titulaire de cette carte devra apporter son concours au développement de son pays d'origine...
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est absurde !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... par une action de coopération pendant la durée de son séjour en France.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est ridicule !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Pour illustrer le pillage des cerveaux, vous mentionnez le cas des médecins africains exerçant dans des hôpitaux français.
Mais une telle situation n'a pas pour origine la carte de séjour « compétences et talents », qui n'existe pas encore. S'il y a des médecins étrangers dans les hôpitaux français, ce n'est pas lié à cette carte !
Mme Hélène Luc. Personne n'a prétendu cela !
MM. Roger Karoutchi et Alain Gournac. Mais non !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... mais je ne le serai pas, je dirais qu'un tel phénomène est pour une grande part lié aux 35 heures. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mais non ! C'est dû au numerus clausus !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Madame Cerisier-ben Guiga, savez-vous que, du 31 décembre 2001 au 1er janvier 2002, les services de santé publics et privés français ont perdu en moins de vingt-quatre heures 20 % de leur personnel du fait de l'application des 35 heures ?
M. Pierre-Yves Collombat. Nous, nous vous parlons des médecins !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Et le phénomène date des années quatre-vingt-dix !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Peut-être ne le savez-vous pas mais, quel que soit le numerus clausus, il faut au minimum sept ans pour former un médecin et lui permettre d'obtenir son diplôme !
M. Pierre-Yves Collombat et Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cela n'a rien à voir !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Dans ces conditions, la situation était telle qu'il a fallu accueillir des étrangers, et pas seulement des médecins, parmi les personnels de santé.
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas cela qui a posé problème !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. En tout cas, ne me dites pas que ce serait à cause de la carte « compétences et talents » que nous serions aujourd'hui confrontés à un tel phénomène.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mais nous n'avons jamais dit cela !
Mme Hélène Luc. Personne ne l'a dit !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je vous rappelle que la carte « compétences et talents » n'existe pas encore ! La situation que vous décrivez ne peut pas avoir pour origine un dispositif qui, je le répète, n'est pas encore appliqué,...
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Personne n'a prétendu une absurdité pareille !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... alors que l'exode des médecins africains a commencé au début des années quatre-vingt-dix.
Certes, la carte « compétences et talents » n'est pas la panacée.
Mme Hélène Luc. Il ne faut donc pas l'instituer !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. S'il vous plaît ! Nous avons eu un débat intéressant, qui n'est pas fini ! Nous avons tout notre temps et nous prendrons tout le temps qu'il faudra. Un tel débat le mérite vraiment, me semble-t-il. Il y a des contributions passionnantes sur toutes les travées de cet hémicycle, et je souhaite que chacune puisse être prise en compte.
Si elle n'est pas la panacée, la carte « compétences et talents » constitue tout de même un progrès incontestable pour l'attractivité de notre pays et pour le partenariat avec les pays d'origine.
Certes, le dispositif de la carte « compétences et talents » est perfectible. De ce point de vue, le débat à l'Assemblée nationale a permis d'en améliorer le contenu. Ce soir, notre débat s'inscrit dans la même perspective. Au terme de cette discussion, nous aurons amélioré encore, j'en suis certain, le dispositif tel qu'il est ressorti des travaux de l'Assemblée nationale.
Madame Khiari, je vous rassure : pour obtenir une carte « compétences et talents », il ne faut être ni Einstein ni Zidane ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Ce n'est pas une condition requise ! Le dispositif s'appliquera à des professeurs, à des cadres, à des architectes, mais également à des artisans ou à des techniciens. Les compétences et les talents n'excluent personne par principe.
Il s'agit d'avoir non pas un diplôme « bac + 18 », mais un projet et des aptitudes pouvant être utiles à la France et à son pays d'origine. À partir du moment où l'on réunit ces deux aptitudes et où l'on a un projet qui permette de les concilier, on devient parfaitement éligible à la carte « compétences et talents ».
En matière de circulation des compétences en faveur du codéveloppement, je voudrais à présent répondre à quatre questions simples mais essentielles.
Première question : à qui la carte est-elle délivrée ? Elle est délivrée en fonction du profil de l'étranger et de son projet. Nous prenons en compte l'intérêt de ce projet pour la France et, je le répète, pour le pays dont l'étranger a la nationalité.
Certains sénateurs ont mentionné quelques exemples. Ainsi MM. Badré et Legendre ont-ils évoqué le cas de l'Inde : l'appel à des informaticiens indiens posera-t-il un problème à ce pays ? Aucunement, bien au contraire ! Vous le savez, les indiens ont des informaticiens et des techniciens dans le domaine de l'électronique à ne plus savoir qu'en faire ! Pouvoir les accueillir chez nous serait même parfois rendre service à l'Inde.
Mme Hélène Luc. Pour le développement de l'Inde, ce n'est pas forcément une très bonne idée !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. D'ailleurs, si nous ne les accueillons pas, ces informaticiens et ces techniciens iront ailleurs, au Canada, aux États-Unis ou en Australie.
En revanche, le problème du médecin malien ou béninois est une réalité. Le phénomène que vous dénoncez s'agissant des pays africains a commencé au début des années quatre-vingt-dix. Voilà quelques jours, Nicolas Sarkozy s'est rendu en Afrique pour aborder ces questions.
Mme Hélène Luc. Et vous avez vu comment il a été reçu ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Il a rencontré les chefs d'État africains et s'est entretenu très clairement avec eux de ce dossier. Après cela, il a souhaité apporter une réponse très claire et précise à ce problème dans le présent projet de loi.
De ce point de vue, il faut qu'il y ait un accord avec l'État concerné. Nous le voulons impérativement. À l'heure actuelle, il n'y en a pas, et c'est le désordre total. Dans le cadre d'un accord avec le pays d'origine, nous pourrons accueillir un étudiant en médecine du pays concerné, le former, l'amener au meilleur niveau, lui permettre d'exercer un temps et de mettre ensuite cette compétence au service de son pays. C'est ainsi que nous concevons l'échange et la circulation des compétences.
D'ailleurs, l'amendement n° 81 rectifié bis, déposé par M. Portelli et également signé par MM. Mercier et Pelletier, vise précisément à atteindre cet objectif.
Monsieur Pelletier, un étranger ayant la nationalité d'un pays de la zone de solidarité prioritaire, c'est-à-dire d'un pays en voie de développement, ne peut obtenir la carte « compétences et talents » que dans les conditions définies par un accord bilatéral entre la France et son pays.
Ainsi, le Sénégal et la France se mettront d'accord pour définir précisément les critères d'éligibilité de la carte « compétences et talents », en définissant les types de métiers et de projets qui pourront être retenus. C'est donc un accord « gagnant-gagnant » qui sera négocié.
Ce n'est que dans le cadre d'un tel accord que des cartes « compétences et talents » seront délivrées à des ressortissants de pays de la zone de solidarité prioritaire. C'est donc un outil de codéveloppement tout à fait cohérent avec le dispositif du « compte épargne codéveloppement », adopté hier à une très large majorité au travers de l'amendement n°510 rectifié septies, sur l'initiative de Jacques Pelletier. Ainsi l'amendement qui vous est proposé tend-il à compléter le dispositif qui a été adopté ici même hier.
Deuxième question : quelles sont les obligations du titulaire pendant son séjour en France ? À l'Assemblée nationale, l'adoption d'un amendement déposé par Mme Boutin a permis d'apporter une précision. Lorsque le bénéficiaire de la carte est originaire de la zone de solidarité prioritaire, il est tenu de participer durant son séjour en France à une action de coopération définie par la France et son pays d'origine. (Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'exclame.)
C'est la même logique du codéveloppement. Concrètement, cette coopération personnelle de l'étranger sera précisée dans le cadre de l'accord bilatéral.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est vraiment du paternalisme ! C'est incroyable !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. En pratique, nous mettrons ces personnes en relation avec notre réseau d'aide au développement et les organisations non gouvernementales intervenant dans ces pays.
Troisième question : à quelles conditions la carte peut-elle être renouvelée ? La carte, qui est d'une durée de trois ans, est en principe renouvelable. Mais nous voyons bien la nécessité de fixer une limite, monsieur Badré.
Le Gouvernement remercie donc M. Jacques Pelletier d'avoir déposé l'amendement n° 106 rectifié bis, qui tend à résoudre cette difficulté.
Si cet amendement est adopté, la carte de séjour « compétences et talents » délivrée à un ressortissant d'un pays de la zone de solidarité prioritaire sera renouvelée une fois au plus. La règle est donc claire. Le titulaire de cette carte effectue un séjour de trois ans, voire un second séjour de trois ans, puis il retourne dans son pays d'origine.
Quatrième et dernière question : comment ce dispositif fonctionnera-t-il en pratique ? La carte sera délivrée par le ministère de l'intérieur dans une logique de guichet unique. Les critères de délivrance seront précisés par une commission ad hoc, qui évaluera le dispositif au regard de sa contribution au codéveloppement.
Le sous-amendement n° 528, que M. Badré et les membres du groupe de l'UC-UDF ont déposé à l'amendement n° 24 de M. le rapporteur, vise à préciser un élément extrêmement important. Je tiens à en remercier les auteurs. Si cet amendement est adopté, la demande de carte sera adressée au consul lorsque l'étranger réside à l'étranger, et au préfet lorsque l'étranger réside en France.
Cela signifie que nous pourrons tout à fait délivrer cette carte à des étrangers qui sont déjà présents sur notre territoire, bien entendu en situation régulière, et qui ont une autre carte de séjour au statut moins avantageux. Le dispositif « compétences et talents » n'est pas fermé aux étrangers déjà présents sur notre sol, bien au contraire.
Vous avez raison, monsieur Badré. Pourquoi la carte « compétences et talents » et les avantages qui y sont liés - je pense notamment au regroupement familial - pourraient-ils bénéficier aux étrangers qui ne sont pas encore en France et qui y seraient acceptés du fait de ce dispositif, alors que les travailleurs étrangers qui sont actuellement en France et qui remplissent les mêmes critères en seraient exclus ?
C'est pourquoi le Gouvernement est favorable à votre sous-amendement, qui s'inscrit dans cette perspective.
Je souhaite à présent revenir sur les différents amendements.
Les amendements identiques nos164 et 304 tendent à supprimer l'article 12. Nous y sommes bien évidemment défavorables ; cela ne vous étonnera d'ailleurs pas !
M. Bernard Frimat. Si ! Cela nous surprend beaucoup ! (Sourires.)
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous ne devons en effet pas priver la France et les pays en voie de développement d'un tel outil de coopération.
Je remercie une nouvelle fois M. Badré d'avoir clairement annoncé que son groupe envisageait le retrait de l'amendement n° 513 rectifié bis. En effet, non seulement M. Badré ne demande plus la suppression de la carte « compétences et talents », mais il se déclare en plus prêt à en saluer l'importance si l'amendement n° 81 rectifié bis et le sous-amendement n° 528 sont adoptés, ce à quoi le Gouvernement est très favorable.
Madame Assassi, l'amendement n° 305 tend à revenir à la rédaction initiale du projet de loi. C'est donc plus une question de rédaction que de principe. Lors de l'examen du présent projet de loi à l'Assemblée nationale, le Gouvernement s'est rallié à la rédaction que vous proposez de supprimer. Il émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
De même, madame Assassi, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 306, qui me semble relever d'un malentendu. Bien entendu, les travailleurs manuels ou techniques ne sont pas exclus par principe de la carte « compétences et talents ». Avec ironie, vous êtes même allée un peu plus loin, en évoquant des sportifs de dimension planétaire et des artistes. Je ne comprends pas pourquoi vous voyez toujours « rouge » sur de tels sujets ! (Sourires.)
Mme Éliane Assassi. C'est sans doute inné chez moi ! (Nouveaux sourires.)
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous devriez plutôt, à l'instar de Mme Isabelle Debré, dont on connaît la sensibilité pour l'environnement, préférer le vert, couleur de l'espérance...
M. Bernard Frimat. Et vous, vous voyez tout en noir ! Votre projet de loi le prouve !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Sincèrement, si on accorde la carte « compétences et talents » à un danseur étoile, c'est non pas pour qu'il danse le flamenco ou qu'il joue le toréador dans une corrida ! Nous souhaitons apporter des réponses précises à des hommes et des femmes qui peuvent être utiles tant à leur pays qu'au nôtre.
Monsieur le rapporteur, nous ne pouvons bien évidemment qu'être favorables à l'amendement de coordination n° 23.
Nous sommes également très favorables à l'amendement n° 106 rectifié bis, qui est très important. Il vise à préciser de la manière la plus claire que la carte « compétences et talents » délivrée à un ressortissant de la zone de solidarité prioritaire sera renouvelée une seule fois au plus.
De même, nous sommes très favorables à l'amendement n° 81 rectifié bis, qui est essentiel, parce qu'il tend à formaliser la nécessité d'un accord bilatéral entre la France et les pays de la zone de solidarité prioritaire, dans le cadre duquel les cartes « compétences et talents » seront délivrées.
Nous sommes aussi favorables à l'amendement n° 24, qui est de nature rédactionnelle, ainsi qu'au sous-amendement n° 528, tendant à préciser que la carte « compétences et talents » pourra être délivrée à des étrangers déjà présents en France, sous couvert d'une autre carte de séjour au statut moins avantageux. Il s'agit là d'une modification importante du texte.
Nous sommes en revanche défavorables à l'amendement n° 307. Je ne vois pas pourquoi on interdirait aux étrangers résidant à l'étranger de présenter leur demande de carte « compétences et talents » au sein du consulat de France présent dans le pays où ils résident.
Nous sommes également défavorables à l'amendement n° 308, qui vise à supprimer la Commission nationale des compétences et des talents. Je suis persuadé qu'il est utile que le Gouvernement s'entoure de l'avis d'experts du développement, d'économistes, de représentants du monde associatif et de représentants des collectivités locales qui pratiquent la coopération décentralisée afin de préciser les critères de délivrance de la carte et, plus encore, d'évaluer le dispositif au regard de sa contribution au co-développement.
Nous sommes très favorables à l'amendement n° 25, qui tend à préciser utilement que, lors du renouvellement de la carte « compétences et talents » d'un étranger originaire de la zone de solidarité prioritaire, il peut être tenu compte du non-respect de son obligation de participation à une action de coopération.
Le Gouvernement est favorable au sous-amendement n° 529, qui vise à améliorer ce dispositif, monsieur Karoutchi. L'autorité délivrant la carte devra tenir compte du respect par l'étranger de son obligation de coopération. Cela renforce considérablement la portée de l'amendement que l'Assemblée nationale a adopté sur l'initiative de Mme Boutin.
Enfin, nous sommes favorables aux amendements rédactionnels nos 26 et 27.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 164, 304 et 513 rectifié bis.
M. Bernard Frimat. Monsieur le ministre, j'ai cru un instant avec étonnement que vous alliez être favorable à notre amendement ! Vous avez dit tellement de bien de l'amendement de suppression du groupe UC-UDF présenté par M. Denis Badré, ...
M. Denis Badré. Jaloux ! (Sourires.)
M. Bernard Frimat. ... identique au nôtre, que nous nous apprêtions à le voter ! Mais vous avez finalement fait preuve de cohérence, ce dont je ne vous blâme pas.
Comme vous l'avez remarqué, nous n'avons déposé sur cet article qu'un seul amendement, également dans un souci de cohérence. Nous sommes, par principe, opposés à la carte « compétences et talents ». En conséquence, nous n'avons pas déposé d'amendements visant à l'améliorer ou d'amendements de repli.
Vous avez voulu faire preuve d'un certain humour - qui vous en blâmerait ? - même s'il vaudrait mieux, me semble-t-il, éviter d'en faire sur un tel sujet.
Cet article est pour nous la tête de gondole d'un texte répressif, brutal et qui broie du noir, dans tous les sens du terme. (M. Alain Gournac s'exclame.) Monsieur le ministre, nous vous le disons très clairement : nous sommes résolument contre.
Avec la carte « compétences et talents », vous pensez que vous allez pouvoir choisir les immigrés. La démonstration de Denis Badré à cet égard était parfaite. (M. Alain Gournac s'exclame.) On peut être d'accord parfois !
Avec cette carte, vous en revenez finalement à votre concept de France d'en haut et de France d'en bas. Il y a désormais l'étranger d'en haut, qui a des compétences et des talents, et l'étranger d'en bas.
Vous vous préoccupez tout d'un coup de co-développement ; c'est très bien. Mais il faudrait organiser un véritable débat sur ce sujet.
M. Bernard Frimat. Il faudrait affecter des moyens au co-développement, au lieu de tenter d'en faire un alibi sympathique d'un texte répressif, un cache-misère d'un texte dont la finalité est tout autre.
Vous espérez faire venir des étrangers, mais ce n'est pas vous qui les choisirez ! Alors que les étrangers de talent, hautement qualifiés, ne viennent pas chez nous, pensez-vous un seul instant que ce que vous faites là, que l'image répressive que vous donnez de la France leur donnera envie de venir ? Alors que, en France, ils doivent constamment subir des contrôles, prouver qu'ils ne sont pas en situation irrégulière, ne pensez-vous pas qu'ils préféreront se rendre dans d'autres pays, où ils sont mieux considérés et mieux accueillis, où ils ne sont pas suspectés en permanence ? Ne pensez-vous pas qu'ils préféreront un pays où l'on n'utilisera pas le codéveloppement comme un cache-misère - j'utilise ce mot à dessein -, un pays qui ne leur dira pas : « on vous choisit, venez, puis repartez » ?
Nous sommes en désaccord complet avec cette vision.
La carte « compétences et talents » est un produit d'appel destiné à faciliter la vente de votre projet de loi, dont elle ne constitue en fait qu'un tout petit élément. Comme mon ami Pierre-Yves Collombat vous l'a expliqué longuement, il n'y a rien de vraiment nouveau par rapport à la carte VIP que vous aviez inventée il y a trois ans et qui est un échec.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mes chers collègues, j'ai eu l'expérience du développement d'un pays qui est la Tunisie.
Lorsque j'y suis arrivée en 1965, en tant que jeune professeur mariée à un médecin, on menait une vie de chien ! J'avais des classes de quarante-cinq élèves, sans chauffage en hiver, sans tableau sur lequel écrire. Tout était à l'avenant. Mon mari, quant à lui, était de garde une nuit sur deux, avant de l'être quasiment toutes les nuits.
La Tunisie est le pays qui, dans les années soixante, soixante-dix et quatre-vingt, a exporté le plus d'élites. Or, de tous les pays d'Afrique, c'est celui qui s'est le plus développé ! Il n'y a donc pas de contradiction entre le départ des élites et le développement de leur pays.
En revanche, dans les pays de la zone de solidarité prioritaire, les systèmes scolaires et de santé se sont effondrés avec l'ajustement structurel. (M. Roger Karoutchi s'exclame.)
Ces pays ne produisent plus, ou trop peu, de bacheliers et de diplômés de l'enseignement supérieur d'un niveau correct. L'université est en ruines. Alors cela pose évidemment des problèmes lorsque leurs élites s'en vont. Mais, autrement, cela n'en pose aucun !
Regardez le Liban, qui est un pays pauvre.
M. Roger Karoutchi. Le niveau n'est pas le même, enfin !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Il passe son temps depuis un siècle à former des élites que l'on retrouve ensuite dans le monde entier ! Cela ne l'empêche pas, entre deux guerres civiles, de bien se tirer d'affaire.
En voulant nous faire croire que vous voulez accueillir ces étrangers, vous tentez de nous faire oublier que vous rejetez tous les autres ou qu'ils seront dans une situation précaire. Vous ne pouvez pas dire, d'un côté, que vous voulez le développement de ces pays et, de l'autre, que vous voulez attirer leurs élites. C'est vraiment un numéro d'équilibriste !
Le développement dépend des efforts que nous ferons en faveur des systèmes scolaires, universitaires et de formation professionnelle des pays avec lesquels nous sommes en relation. Tout le reste, c'est du pipeau !
Mme Hélène Luc. Elle a raison !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je sais bien que, dans la vie, en particulier dans la vie politique, il faut gérer les contradictions. Mais là, tout de même, monsieur le ministre !
Vous voulez attirer des élites. Or la carte « compétences et talents » ne leur sera renouvelée qu'une fois. Où iront les étrangers ensuite ? Au Canada ? Aux Etats-Unis ?
M. Alain Gournac. Ils rentreront dans leur pays !
M. Pierre-Yves Collombat. Il faut être cohérent ! Nous ne suivons pas votre logique, monsieur le ministre, mais au moins respectez-la ! Votre dispositif ne tient pas ! Mais peut-être n'est-il pas fait pour être appliqué ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, nous avons au moins l'occasion d'apprécier votre humour ! Franchement, il vaut mieux voir rouge que de sombrer dans la déprime...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... que ne manque pas de susciter l'examen de ce texte !
S'agissant des médecins étrangers, je dois préciser que leur situation n'a rien à voir avec les 35 heures. Elle est liée au numerus clausus, à l'absence de système de santé dans un certain nombre de pays et à l'impossibilité pour certains de ces médecins de rester dans le pays dont ils sont originaires.
Ce qui est aussi choquant, c'est qu'ils sont payés entre 40 % et 50 % de moins que les médecins français pour le même travail.
Nous sommes totalement opposés au concept de la carte « compétences et talents ». Comme je l'ai dit en défendant la motion n° 107, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, j'ai honte ...
M. Roger Karoutchi. Oh !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... quand je pense à ceux dont les parents, les grands-parents ou les arrière-grands-parents sont venus travailler en France en tant que maçons ou dockers, comme ce fut le cas pour ma famille. Leurs talents ne seraient pas reconnus aujourd'hui ! Pourtant, ils ont hautement contribué au développement de notre pays. Il y a là quelque chose de paternaliste, voire de néocolonialiste. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Les communistes sont des donneurs de leçons !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La France décide de choisir les étrangers ayant des compétences et des talents. Elle décide que ceux qui viendront travailler en France devront contribuer au développement de leur pays. Or certains le fuient parce qu'ils y sont menacés. Ils n'ont donc aucune raison de contribuer au développement de leur pays ! C'est absolument inacceptable.
Nous devons essayer de trouver des solutions aux problèmes qui ont été évoqués ; encore faut-il évidemment que nous en ayons la même perception. Admettons que ce soit le cas. Ne faut-il pas alors s'interroger sur les raisons profondes qui expliquent que nos talents nationaux soient attirés vers d'autres pays, notamment en matière de recherche ? Pourquoi s'expatrient-ils ? Parce que la recherche française s'effondre, parce qu'ils ne sont pas assez payés, parce qu'ils ne sont pas stimulés professionnellement dans leurs recherches.
Quelles sont les raisons de cette fuite des cerveaux vers l'étranger ? Pourquoi notre pays n'attire-t-il pas des personnes très qualifiées qui pourraient utilement venir y travailler pendant quelque temps ?
Tout en affirmant que nous avons besoin de personnels dans les secteurs de l'informatique, du bâtiment et de bien d'autres, vous créez des catégories différentes de salariés : certains auront une carte « compétences et talents », tandis que d'autres seront considérés comme de simples salariés temporaires.
Franchement, ce dispositif ne tient pas debout et est choquant. Ce n'est pas de cette manière que vous réglerez les problèmes, ainsi que vous affirmez vouloir le faire.
Nous voterons donc contre cet article 12.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Je suis étonné de l'attitude de nos collègues socialistes.
M. Alain Gournac. C'est le moins qu'on puisse dire !
M. Christian Cointat. Puisqu'ils sont dans l'opposition et ne peuvent adopter la position du Gouvernement, je m'attendais plutôt à ce qu'ils nous reprochent de ne pas en faire assez.
Or ils s'opposent à une idée novatrice qui constitue - enfin ! - un véritable outil d'aide au développement nous permettant de former des personnes qui viennent de l'étranger. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Il ne faut pas le faire de cette façon ! Donnez plutôt des bourses aux étudiants !
M. Christian Cointat. Chers collègues de l'opposition, lorsque, au même titre, les jeunes Français vont effectuer des stages à l'étranger pour compléter leur formation, cela ne vous choque pas !
Il s'agit d'un outil de développement partagé, fondé sur le respect entre États et vis-à-vis des citoyens qui viennent en France.
Alors, ne nous racontez pas n'importe quoi ! Vous n'avez pas de politique à proposer, voilà le malheur !
M. Alain Gournac. Aucune !
M. Christian Cointat. Vous ne savez pas ce que vous voulez !
M. Pierre-Yves Collombat. Cessez ces généralités !
M. Christian Cointat. Pour l'instant, vous ne cherchez qu'à critiquer et à démolir une idée novatrice qui mérite d'être creusée. On verra à l'usage ce que cela donnera.
M. Bernard Frimat. Dans un an, on en reparlera !
M. Christian Cointat. Déjà, lorsque nous avons mis en place les échanges étudiants, certains soutenaient que c'était de l'argent inutilement dépensé.
M. Pierre-Yves Collombat. Ce n'est pas nous qui protestions !
M. Christian Cointat. Aujourd'hui, tout le monde reconnaît que c'était une bonne idée. Le programme des visas « vacances-travail » développé avec un certain nombre de pays et qui permet à leurs ressortissants et aux jeunes Français de passer une année à l'étranger, pour y travailler et connaître le pays, fonctionne fort bien.
M. Pierre-Yves Collombat. Quel rapport avec l'article 12 ?
M. Bernard Frimat. Ce n'est pas le sujet !
M. Pierre-Yves Collombat. On ne parle pas des colonies de vacances !
M. Christian Cointat. Les jeunes sont demandeurs, ils sont très satisfaits et reviennent mieux formés.
Là, c'est la même chose. Nous pouvons développer la formation et, pour une fois que l'on se préoccupe véritablement du sort des étrangers, vous devriez nous applaudir plutôt que de nous critiquer ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.
M. Denis Badré. J'ai beaucoup insisté tout à l'heure, comme je l'avais fait dans la discussion générale, sur la nécessité de favoriser le développement des pays les plus pauvres.
Le codéveloppement dans le cadre d'accords bilatéraux apparaît à cet égard comme un bon instrument. Ces accords permettent de prendre en compte des actions de formation, par exemple, pour lesquelles des séjours à l'étranger peuvent commencer à prendre un sens. De ce point de vue, la carte « compétences et talents » ne doit pas être une finalité. À partir du moment où elle est un instrument s'insérant, parmi d'autres, dans une politique de codéveloppement fondée sur des accords bilatéraux, c'est moins grave et l'argument selon lequel cette carte serait peu opérationnelle perd quelque peu de sa pertinence. Les amendements de M. Portelli et de M. Pelletier me rassurent sur ce point.
La seule objection de fond qui demeure est d'ordre philosophique : distinguer entre immigrants utiles et immigrants inutiles m'apparaît gênant ; tous sont des êtres humains qui souffrent.
Toutefois, cette objection peut également tomber à partir du moment où l'on parle d'« immigration choisie » - et, si j'ai bien compris, c'est l'engagement, monsieur le ministre, que vous êtes prêt à prendre. Cela ne signifie pas que nous allons choisir, comme sur un marché, parmi des gens qui souhaitent venir chez nous parce qu'ils cherchent d'abord à fuir leur pays. Dès lors que ce n'est pas nous qui choisissons parmi ces migrants, mais qu'il s'agit d'un choix partagé entre les pays d'origine et les pays d'accueil, dès lors qu'est mise clairement en oeuvre une politique d'accords bilatéraux dans laquelle chacun assume ses responsabilités, cette seconde objection tombe et je retire mon amendement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Pierre-Yves Collombat. Quelle pénitence ! Pourquoi tant de fermeté ?
Mme la présidente. L'amendement n° 513 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 164 et 304.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 200 :
Nombre de votants | 297 |
Nombre de suffrages exprimés | 294 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 148 |
Pour l'adoption | 123 |
Contre | 171 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 305.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'article 12.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Il sera très intéressant de faire, dans trois ans, une étude de résultats de la carte « compétences et talents ». Ce bilan sera très vite fait !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Un rapport annuel est prévu !
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.