sommaire
présidence de M. Jean-Claude Gaudin
2. Secteur de l'énergie. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
Discussion générale : MM. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; François Loos, ministre délégué à l'industrie ; Yves Coquelle, Roland Ries, Daniel Raoul, Philippe Nogrix.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
M. Dominique Mortemousque.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance
présidence de Mme Michèle André
3. Participation et actionnariat salarié. - Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Discussion générale : M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
4. Souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat d'Ouzbékistan
5. Participation et actionnariat salarié. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Discussion générale (suite) : MM. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes ; Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales ; MM. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Alain Dufaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Roland Muzeau, Jean-Pierre Godefroy, Jean-Léonce Dupont, Jean-Pierre Raffarin, Aymeri de Montesquiou, François Marc, Jean Desessard.
M. le ministre délégué, Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur.
Clôture de la discussion générale.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.
Suspension et reprise de la séance
Amendements identiques nos 77 de M. Jean-Pierre Godefroy et 169 de M. Roland Muzeau ; amendement no 233 du Gouvernement. - MM. Jean-Pierre Godefroy, Roland Muzeau, le ministre délégué, Mme le rapporteur, MM. Serge Dassault, rapporteur pour avis ; Jean Desessard. - Rejet des amendements nos 77 et 169 ; adoption de l'amendement no 233.
Adoption de l'article modifié.
M. Guy Fischer.
Amendements nos 30 de la commission et 78 de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mmes le rapporteur, Michèle San Vicente-Baudrin, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement no 30, l'amendement no 78 devenant sans objet.
Suspension et reprise de la séance
7. Participation et actionnariat salarié. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Amendement no 31 de la commission. - Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales ; MM. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes ; Jean-Pierre Godefroy. - Adoption.
Amendement no 32 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 80 rectifié de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 79 de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 33 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 34 de la commission et sous-amendement no 234 rectifié du Gouvernement. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Amendement no 1 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. - M. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Retrait.
Amendement no 35 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 170 de M. Roland Muzeau et 81 de M. Jean-Pierre Godefroy. - M. Roland Muzeau, Mmes Michèle San Vicente-Baudrin, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendements nos 171 de M. Roland Muzeau et 36 rectifié de la commission. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet de l'amendement no 171 ; adoption de l'amendement no 36 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 2
Amendement no 2 rectifié de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. - M. Serge Dassault, rapporteur pour avis ; Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 3 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. - M. Serge Dassault, rapporteur pour avis ; Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rectification de l'amendement.
présidence de M. Roland du Luart
MM. Jean-Pierre Godefroy, Nicolas About, président de la commission des affaires sociales ; Guy Fischer, Serge Dassault, rapporteur pour avis. - Adoption de l'amendement no 3 rectifié insérant un article additionnel.
Amendement no 82 de M. Jean-Pierre Godefroy. - M. Jean-Pierre Godefroy, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendements identiques nos 37 de la commission et 83 de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 38 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 84 de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Mme Annie David.
Amendements nos 199 de M. Roland Muzeau, 39 à 41 de la commission, 85, 86 de M. Jean-Pierre Godefroy et 124 rectifié de M. Michel Houel. - M. Guy Fischer, Mmes le rapporteur, Michèle San Vicente-Baudrin, Gisèle Printz, Adeline Gousseau, MM. le ministre délégué, Jean-Pierre Godefroy. - Retrait de l'amendement no 124 rectifié ; rejet des amendements nos 199 et 86 ; adoption des amendements nos 39 à 41, l'amendement no 85 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 42 de la commission, 137 de M. Jean-Léonce Dupont et 87 de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mme le rapporteur, MM. Jean-Léonce Dupont, Jean-Pierre Godefroy, Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. - Adoption de l'amendement no 42, les autres amendements devenant sans objet.
Amendement no 4 rectifié de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. - M. Serge Dassault, rapporteur pour avis ; Mme le rapporteur, MM. le ministre délégué, Roland Muzeau. - Adoption.
Amendement no 122 rectifié de Mme Catherine Procaccia. - Mmes Catherine Procaccia, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Amendement no 76 rectifié de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 240 du Gouvernement. - M. le ministre délégué, Mme le rapporteur, M. Roland Muzeau. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
MM. Jean-Pierre Godefroy, le président.
Article additionnel après l'article 6
Amendement no 166 rectifié de M. Serge Dassault et sous-amendement no 242 rectifié du Gouvernement. - M. Serge Dassault, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.
Amendement no 43 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 123 rectifié ter de Mme Catherine Procaccia. - Mmes Catherine Procaccia, le rapporteur, M. le ministre délégué, Mme Annie David. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 7
Amendement no 88 de M. Jean-Pierre Godefroy. - Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, le rapporteur, MM. le ministre délégué, Roland Muzeau, François Marc. - Rejet.
Amendement no 44 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 89 de M. Jean-Pierre Godefroy. - M. Jean-Pierre Godefroy, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel avant l'article 9 bis
Amendement no 167 de M. Serge Dassault. - M. Serge Dassault, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Article additionnel avant l'article 10
Amendement no 45 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 46 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 10
Amendement no 5 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. - M. Serge Dassault, rapporteur pour avis ; Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Amendements nos 172 de M. Roland Muzeau, 90 à 92 de M. Jean-Pierre Godefroy, 29 rectifié ter de Mme Catherine Procaccia et 47 de la commission. - M. Roland Muzeau, Mmes Gisèle Printz, Catherine Procaccia, le rapporteur, MM. Jean-Pierre Godefroy, le ministre délégué. - Rejet des amendements nos 172 et 90 à 92 adoption des amendements nos 29 rectifié ter et 47.
Adoption de l'article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
8. Dépôt d'une question orale avec débat
9. Retrait d'une question orale
10. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
12. Dépôt de rapports d'information
13. Dépôt d'un avis
14. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Secteur de l'énergie
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au secteur de l'énergie (n° 55).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au secteur de l'énergie s'est réunie lundi 6 novembre au Sénat.
Elle est parvenue à l'adoption d'un texte sur les principaux points de divergence qui pouvaient exister entre les deux versions du projet de loi adoptées par chacune des assemblées.
Avant d'aborder la présentation des principaux éléments de ce compromis qui est soumis à votre approbation, mes chers collègues, je voudrais rendre un hommage appuyé au président de la commission des affaires économiques, notre collègue Jean-Paul Emorine, qui m'a épaulé et soutenu tout au long des différentes étapes de l'élaboration de ce texte...
M. Daniel Raoul. Vous en aviez bien besoin !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... et qui a présidé la commission mixte paritaire, avec M. Patrick Ollier à ses côtés.
Je souhaiterais également saluer l'ouverture d'esprit de notre collègue député Jean-Claude Lenoir, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, qui a grandement facilité la bonne marche de nos travaux en commission mixte paritaire. Le compromis que nous avons obtenu lui doit beaucoup.
Les débats de la commission mixte paritaire ont porté pour l'essentiel, en définitive, sur la réforme de la Commission de régulation de l'énergie et sur la création du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché.
Sur le premier sujet, je rappellerai que les deux assemblées avaient voté des versions du texte de l'article 2 bis pour le moins différentes. Tout en partageant la volonté des députés de réformer la composition du collège de la CRE en le « déprofessionnalisant » partiellement, nous avions émis des doutes sur l'opportunité de faire siéger des parlementaires au sein de cette instance, qui se réunit près de deux jours et demi par semaine.
Par ailleurs, le Sénat, sur la base des excellentes préconisations émises par notre collègue Patrice Gélard, avait souhaité dissocier, au sein de la CRE, les fonctions de régulation des fonctions de sanction, afin notamment de mettre les règles de fonctionnement de cette instance en conformité avec les dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Nous avions ainsi créé, à côté du collège de la CRE, un comité des sanctions, à qui nous avions également confié les missions dévolues par les députés au médiateur de l'énergie.
Afin de réaliser une synthèse entre ces différentes propositions, la commission mixte paritaire vous propose l'équilibre suivant.
Concernant la composition du collège, nous n'avons pas retenu le principe de la présence de parlementaires, mais, pour accroître les pouvoirs de contrôle du Parlement sur cette autorité administrative indépendante, nous proposons de faire précéder la nomination du président d'un avis des commissions parlementaires compétentes en matière d'énergie. Ce système, tout à fait innovant dans notre droit, s'inspire notamment de l'exemple américain. Il permettra d'associer étroitement la représentation nationale à la procédure de désignation du président, qui reste, en définitive, entre les mains du Gouvernement.
Par ailleurs, sur le modèle de ce qui a été fait pour l'Autorité de sûreté nucléaire, nous proposons de permettre aux présidents de ces mêmes commissions parlementaires de demander au Président de la République la démission d'un membre du collège qui aurait gravement manqué à ses obligations.
La commission mixte paritaire a également retenu le principe de la présence de deux représentants des consommateurs au sein du collège, afin d'assurer une représentation de ces derniers dans leur diversité, l'un représentant plutôt les professionnels, l'autre les consommateurs finaux.
Au total, le collège se composerait de neuf membres : un président et deux vice-présidents désignés par les assemblées parlementaires, tous trois professionnels, ainsi que six autres membres rémunérés à la vacation.
S'agissant du comité des sanctions, a été en définitive retenu le principe de la création d'une telle instance, sans que lui soient confiées les compétences en matière de médiation.
Enfin, l'article 2 quater A instaure un médiateur national de l'énergie public et autonome. Les sommes nécessaires au financement de son action seraient prélevées sur la contribution au service public de l'électricité, la CSPE, même si ce sera vous, monsieur le ministre, qui arrêterez son budget.
Je me félicite de cet équilibre, qui permet de concilier les préoccupations exprimées par les députés et par les sénateurs et qui devrait améliorer substantiellement le fonctionnement de la Commission de régulation de l'énergie.
En ce qui concerne le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché, la commission mixte paritaire a adopté une version du texte de l'article 3 bis très proche de celle qui avait été votée par le Sénat. Afin de ne pas pénaliser les capacités d'investissement d'Électricité de France, impératif plus que jamais d'actualité, les membres de la CMP ont, dans leur majorité, souhaité en rester à un plafond de 25 % pour la définition de ce tarif, étant entendu que le Gouvernement aura la liberté de retenir des seuils plus faibles, notamment pour des consommateurs électro-intensifs. Le caractère non renouvelable de ce mécanisme a lui aussi été validé.
Enfin, s'agissant du dispositif de financement de ce tarif défini à l'article 3 ter, la commission mixte paritaire a entériné la proposition du Sénat visant à faire reposer une partie de ce dernier sur le « disponible » de la CSPE.
À nouveau, je me réjouis de cette décision, qui prend en compte les préoccupations d'un grand nombre d'entreprises françaises, grandement pénalisées par la récente flambée des prix de l'électricité, mais qui sauvegarde également les capacités de développement du parc de production de notre électricien national.
À l'évidence, la rupture d'approvisionnement électrique qui a frappé plusieurs pays européens samedi soir conforte cette analyse. Certes, l'origine de cette crise, liée à la fermeture d'une ligne à très haute tension, est située en Allemagne, et le réseau français a bien résisté ; certes, la panne n'aura duré, en définitive, qu'une heure et demie, grâce aux protocoles et accords désormais bien éprouvés entre les différents transporteurs d'électricité, alors que les conséquences d'une telle situation auraient pu être beaucoup plus graves. Toutefois, cela démontre, s'il en était besoin, que l'Europe manque considérablement de moyens de production et de capacités d'interconnexion entre les différents pays. Au total, je le répète, il est urgent d'investir dans la production d'électricité, en base comme en pointe, afin de garantir la sécurité et la continuité de notre approvisionnement électrique.
S'agissant maintenant de l'article 3 du projet de loi, qui instaure un tarif social dans le domaine du gaz naturel et qui a été amendé à la marge par la commission mixte paritaire, je voudrais, monsieur le ministre, me faire l'écho des débats qui ont eu lieu sur ce sujet et réaffirmer publiquement tout l'attachement des parlementaires à une réforme rapide des conditions d'accès aux tarifs sociaux pour l'électricité et le gaz et du dimensionnement du dispositif.
Vous vous étiez engagé à considérer plusieurs éléments, notamment un éventuel relèvement des plafonds de ressources ouvrant droit au bénéfice de ce tarif social, mais aussi une augmentation du volume de consommation éligible à ce dernier, afin qu'il soit mieux adapté aux besoins des ménages, en fonction de leur taille. Je vous fais bien entendu toute confiance pour effectuer une telle réforme par voie réglementaire, mais je souhaiterais vous rappeler votre engagement, afin que cette réforme puisse entrer en vigueur le plus rapidement possible.
Sur un tout autre sujet, la commission mixte paritaire a intégralement réécrit l'article 4 du projet de loi, consacré aux conditions d'accès aux tarifs réglementés, afin d'en améliorer la rédaction. Il en ressort que les ménages et les petits consommateurs professionnels devront tout d'abord se voir proposer par les opérateurs historiques des offres d'énergie au niveau des tarifs. Le client ne souhaitant pas se voir proposer une telle offre devra y renoncer de manière expresse et écrite.
Dans le même esprit, les offres duales combinant électricité et gaz devront, si elles sont présentées par un de ces opérateurs historiques, être faites au tarif pour l'énergie principale de ces derniers, sauf renonciation expresse du client.
Enfin, concernant toujours cet article 4, nous avons rediscuté et rejeté, en commission mixte paritaire, un amendement visant à apporter une solution aux clients s'étant vu refuser le bénéfice des tarifs réglementés pour le gaz naturel entre le 1er juillet 2004 et le 13 juillet 2005. J'ai eu confirmation du fait que, pour l'essentiel, ces cas avaient été traités et que seules restaient à examiner quelques situations particulières qui devraient recevoir une solution très prochainement.
M. Daniel Raoul. Il y en a quinze ou seize.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Absolument, mon cher collègue !
Pourriez-vous nous confirmer qu'il en sera bien ainsi, monsieur le ministre ?
S'agissant des nombreux articles adoptés par le Sénat, et sans entrer dans le détail, je voudrais préciser que la CMP les a tous retenus, sous réserve pour certains d'entre eux d'ajustements rédactionnels, et à l'exception de l'article 5 ter.
Nous avons estimé que cet article, voté sur l'initiative de votre commission des affaires économiques, qui aurait permis à tous les fournisseurs d'électricité de conclure un contrat d'obligation d'achat pour le développement des énergies renouvelables et d'être éligibles au mécanisme de compensation des charges de service public de l'électricité, devait encore faire l'objet d'un travail important de concertation entre les producteurs d'énergies renouvelables, EDF et le ministère de l'industrie.
À la réflexion, un tel dispositif posait le problème de l'avenir des contrats d'obligation d'achat qui auraient été passés avec des petits fournisseurs susceptibles de faire faillite.
En outre, ce dispositif aurait pu conduire à concentrer sur certains fournisseurs le bénéfice des contrats d'obligation d'achat conclus avec des installations de cogénération, qui présentent la plus grande régularité en termes de flux de production, et sur d'autres les contrats passés avec de plus petites installations utilisant d'autres sources renouvelables et produisant de l'électricité de manière moins prévisible.
Pour les autres articles additionnels, seuls quelques ajustements juridiques ont été adoptés. Ainsi en va-t-il par exemple de l'article 2 octies, qui prévoit une obligation de comptabilité séparée pour les activités de fourniture au tarif, de l'article 5 quater, introduit sur l'initiative de notre collègue Dominique Mortemousque, qui apporte une solution aux industries subissant des problèmes de micro-coupures, de l'article 8 bis relatif au partage des coûts de terrassement pour les opérations d'enfouissement de lignes électriques et de télécommunications, de l'article 9 bis A sur la relance de l'intercommunalité pour la gestion de la distribution d'électricité ou de l'article 9 bis C permettant l'adhésion d'un syndicat mixte à un autre syndicat mixte. De même, les articles 7 bis et 9 bis D, introduits par nos collègues du groupe socialiste, consacrés tous deux aux conditions de l'amélioration de la desserte en gaz naturel de notre territoire, ont été validés par la commission mixte paritaire.
Pour terminer, la majorité de la commission mixte paritaire a bien entendu adopté l'article 10 du projet de loi, ouvrant ainsi la voie à la fusion de Gaz de France avec Suez. Dans ces conditions, un nouveau champion européen de l'énergie devrait voir le jour très prochainement. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
En définitive, j'estime que le texte de la commission mixte paritaire qui est soumis à votre approbation constitue un excellent équilibre et, pour cette raison, je vous demande de l'adopter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de me retrouver parmi vous ce matin pour la discussion finale, dans cet hémicycle, du projet de loi relatif au secteur de l'énergie, tel qu'il a été adopté lundi par la commission mixte paritaire et hier à l'Assemblée nationale.
L'examen de ce texte a donné lieu à des débats approfondis entre nous en octobre. Grâce au travail du rapporteur, Ladislas Poniatowski, et du président de la commission, Jean-Paul Emorine, sans oublier le rapporteur pour avis, Philippe Marini, notre texte a pu être significativement amélioré par votre chambre. Je pense que les enjeux liés à l'énergie ont pu être clairement exposés et partagés entre tous les groupes parlementaires, malgré nos opinions parfois évidemment divergentes.
Au terme de ce travail, je veux saluer l'investissement de tous ceux d'entre vous qui, avant de se forger leur intime conviction, se sont intéressés à ces questions, ont pris en compte toutes leurs dimensions et ont évalué avec soin toutes les options en présence.
Nous avons vécu la semaine dernière un incident important sur le réseau électrique européen, qui est venu nous rappeler que l'Europe de l'énergie existe déjà dans les faits, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah oui !
M. François Loos, ministre délégué. ... et que seule une politique d'investissement résolue nous permettra d'éviter que de tels dysfonctionnements ne se reproduisent.
Je veux saluer le professionnalisme des équipes de Réseau de transport d'électricité, RTE, et d'EDF qui ont su réagir avec rapidité et efficacité...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est le service public !
M. François Loos, ministre délégué. ... afin de limiter, en France et en Europe, les conséquences de cet incident. Cet incident montre que tout effort renforçant encore la coordination effective des réseaux mérite d'être encouragé.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La prochaine fois, la coupure sera de vingt-quatre heures !
M. François Loos, ministre délégué. Dans la préparation de notre projet de loi, puis dans la discussion de ce projet à l'Assemblée nationale et au Sénat, nous avons privilégié une approche favorisant systématiquement la protection des consommateurs. C'est la première grande décision qui vous est soumise à travers ce texte.
Cette volonté se traduit tout d'abord par le fait que tous les consommateurs particuliers d'électricité et de gaz qui le souhaitent pourront rester au tarif réglementé. Elle se manifeste ensuite par la mise en place d'un tarif social pour le gaz. Vos assemblées ont simplifié les modalités d'accès à ce tarif. Nous avons par ailleurs annoncé l'augmentation de l'aide offerte au titre du tarif de première nécessité pour l'électricité. J'ai bien noté la vigilance du rapporteur sur certains points.
M. Bernard Piras. On lui a forcé la main !
M. François Loos, ministre délégué. Le texte qui vous est soumis aujourd'hui est également enrichi, par rapport au projet initial du Gouvernement, d'un dispositif prévoyant l'instauration d'un tarif de transition de l'électricité en faveur des entreprises qui ont opté pour le marché libre. Je suis heureux que vos travaux aient conduit à un texte qui offre une réponse adaptée aux problèmes des entreprises tout en respectant la compatibilité avec nos engagements européens et en préservant l'avenir sans décourager l'investissement.
Vous avez par ailleurs souhaité améliorer le texte du Gouvernement en ce qui concerne la Commission de régulation de l'énergie.
Ces améliorations ont porté sur deux points. Le premier concerne le renforcement des pouvoirs de la CRE pour améliorer le fonctionnement du marché de l'énergie. Je suis favorable à ce renforcement en matière de surveillance des marchés organisés et de vérification de l'indépendance d'exploitation des réseaux de transport.
Le deuxième point a trait à l'évolution de la composition du collège de la CRE. La commission mixte paritaire a trouvé une solution, me semble-t-il satisfaisante, qui donne un plus grand rôle au Parlement dans le processus de désignation du collège, sans remettre en cause son indépendance et sa neutralité. Je suis particulièrement reconnaissant au Sénat pour les améliorations importantes qu'il a apportées sur ce point.
Enfin, l'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté des amendements réaffirmant utilement l'importance des collectivités concédantes dans l'organisation de notre système énergétique.
La deuxième grande décision qui vous est soumise consiste à donner à Gaz de France la flexibilité nécessaire de son capital pour se développer à armes égales avec ses concurrents. C'est dans ce contexte que Gaz de France a développé un projet industriel avec Suez. Ce projet, discuté et mûri de longue date, est fondé sur le rapprochement de Gaz de France avec le groupe qui lui est apparu le plus complémentaire. Il conduit à une fusion pour pouvoir mettre en commun toutes les forces industrielles et financières des deux entreprises.
Avec la minorité de blocage et l'action spécifique, ce texte nous donne des garanties avant une évolution de Gaz de France. Ce n'est pas un « chèque en blanc ». (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Bernard Dussaut. Cela y ressemble en tout cas !
M. François Loos, ministre délégué. Il s'agit de donner à Gaz de France les moyens de choisir le projet industriel qui répondra le mieux aux intérêts de la France, de l'entreprise, de ses salariés et de ses consommateurs.
Il faut aussi préparer le grand marché européen du gaz et de l'électricité, au bénéfice de la compétitivité de nos entreprises, tout en assurant à nos concitoyens que ces évolutions se feront toutes au service de leur pouvoir d'achat et de leur sécurité d'approvisionnement.
C'est un texte difficile, comme en témoignent le nombre d'amendements, la longueur des débats et l'ampleur des questions. Mais je crois que ce texte fait également honneur au Parlement et à la représentation nationale, dans la mesure où il permet à la France d'assurer dans la durée sa sécurité d'approvisionnement tout en donnant aux consommateurs les meilleures conditions d'accès à l'énergie. Je vous remercie donc de l'adopter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cinq millions de foyers ont subi samedi dernier une panne d'électricité de plusieurs heures, qui montre la réalité des questions d'indépendance énergétique. À cet égard, il apparaît urgent, monsieur le ministre, que toutes les explications nous soient fournies sur cet événement, afin d'éviter qu'à l'avenir des pannes plus graves encore ne se reproduisent.
Cependant, la commission mixte paritaire qui s'est réunie le lundi suivant a tranquillement décidé d'entériner un projet de loi visant à privatiser Gaz de France et à libéraliser à terme l'ensemble du secteur de l'énergie. Les discussions en commission mixte paritaire se sont concentrées sur des problèmes qui ne sont certes pas inutiles, mais relativement secondaires par rapport aux autres questions beaucoup plus graves validées sans difficulté.
Ainsi la discussion sur les articles prévoyant l'éligibilité de tous les consommateurs d'électricité et de gaz aux tarifs du marché paraissait superflue. En revanche, il est éminemment important de débattre de la composition de la Commission de régulation de l'énergie ou du rôle du médiateur. Remarquez que la libéralisation du secteur sera certainement une source inépuisable de contentieux.
En bref, la majorité n'a pas entendu empêcher la privatisation de GDF, alors même qu'un amendement de l'opposition l'a encore proposé, comme elle n'a pas souhaité tenir compte des dangers engendrés pour nos concitoyens et pour notre économie par la libéralisation du secteur énergétique.
Nous sommes très inquiets des conséquences de la démission de l'État au regard de la politique énergétique. Alors que la garantie de l'indépendance énergétique de notre pays devrait être l'objectif, tout est fait pour saborder les opérateurs historiques GDF et EDF. Ne nous y trompons pas, c'est bien de la préparation de la privatisation totale du secteur énergétique dont on parle.
Ceux qui soutiennent aujourd'hui une telle privatisation votaient voilà seulement deux ans le maintien de l'État dans le capital de GDF-EDF à hauteur de 70 %. Les mêmes soutiendront demain, si les Français leur en laissent la possibilité, la privatisation d'EDF.
Au contraire, nous restons persuadés que la politique énergétique nécessite des outils de service public contrôlés par l'État, seuls à même d'assurer la continuité, la sécurité du service, ainsi que la solidarité nationale. En outre, la conduite de cette politique exige une présence étatique forte sur le plan international afin d'avoir les moyens politiques pour préserver l'équilibre assuré par les contrats énergétiques à long terme.
Or, en asservissant les secteurs de l'électricité et du gaz au libre-échange et à la rentabilité à court terme, le Gouvernement place les pouvoirs publics en dehors de la sphère des décisions énergétiques au niveau français, européen, et international.
De plus, les impératifs de rémunération du capital et de satisfaction des intérêts privés ne manqueront pas d'entraîner une hausse des prix qui échappera totalement au contrôle de l'État. Vous savez très bien que la recherche de la création de valeur pour les actionnaires est totalement inconciliable avec les missions d'intérêt général inhérentes au service public de l'énergie.
Le bilan, demandé à de multiples reprises, des conséquences de la libéralisation des marchés de l'énergie ne sera jamais établi. Il témoignerait pourtant des conséquences désastreuses en terme d'emplois supprimés ou précarisés, de rupture d'approvisionnement et de hausse des tarifs. Remarquez que sur ce dernier point les entreprises ont déjà fait les frais de votre politique !
Comment pouvez-vous soutenir, monsieur le ministre, que la libéralisation entraîne la baisse des prix alors que l'écart entre les prix du marché et les tarifs réglementés de l'électricité a atteint 61 % et que les factures d'électricité des entreprises ont augmenté de 70 % à 100 % en trois ans ?
Nous vous reposons donc la question, monsieur le ministre : à moins de prendre nos concitoyens pour de piètres gestionnaires, pourquoi ne pas permettre aux consommateurs ayant exercé leur éligibilité de revenir aux tarifs réglementés ? Pourquoi poser une telle interdiction si les tarifs du marché sont si avantageux ?
Le tarif transitoire de retour que vous proposez est un signe manifeste de votre échec. Et, comble du comble, au lieu d'écouter la raison et de mettre un terme à la libéralisation du secteur énergétique, vous prévoyez que son financement sera assuré par EDF ! Cette compensation ne manquera d'ailleurs pas de se répercuter sur les usagers domestiques et les petites et moyennes entreprises.
Quel est le projet ? Fragiliser l'entreprise publique pour mieux la brader dans quelque temps ?
Dans un contexte de libéralisation totale du marché, le maintien des tarifs réglementés est un mythe que vous entretenez pour adoucir la destruction programmée du service public de l'énergie. Cet affichage ne trompe personne, car la volonté, tant à l'échelon national qu'à l'échelon européen, est d'aligner les tarifs réglementés sur ceux du marché, cette opération étant facilitée par l'absence de transparence et de contrôle sur la formation desdits tarifs. D'ailleurs, la lettre de griefs du commissaire chargé de la concurrence met ces tarifs au banc des accusés, et il semblerait que ce soit elle qui dicte la loi !
Je voudrais maintenant revenir sur une autre mesure tant son insuffisance est criante : la tarification de solidarité. Je ne reviendrai pas sur la question des critères d'éligibilité, que vous avez encore balayée d'un revers de la main, alors qu'un amendement de l'opposition en commission mixte paritaire tendait à apporter un certain nombre d'améliorations. Je voudrais juste attirer votre attention sur l'hiver qui est là, sur les expulsions qui se sont multipliées avant la trêve hivernale, sur l'augmentation du nombre de personnes qui ne peuvent plus vivre de leur travail et sur la nécessité d'assurer à tous un toit et un chauffage.
Le droit à l'énergie pour tous doit être garanti par les pouvoirs publics, car c'est un enjeu vital pour les personnes concernées. Dans un contexte de libéralisation totale du service public de l'énergie et de désengagement de l'État, la tarification sociale ne sera pas suffisante pour faire face à la misère grandissante en France et pour mettre fin aux conditions de vie déplorables des plus démunis. Le maintien du seuil de 5 520 euros de revenus permettant aux ménages de bénéficier du tarif dégressif ne réglera certainement pas le problème, même si M. le ministre a pris l'engagement de revoir cette question. Nous aurions pu le faire avant l'adoption de ce projet de loi !
En démantelant les entreprises publiques construites sous la forme d'entreprises intégrées, qui étaient en mesure de réduire les coûts de production et de permettre des péréquations entre leurs activités afin de construire un service public efficace, vous allez encore accroître les inégalités sociales. À cet égard, la fin de la péréquation tarifaire nationale signe la mise à mort des principes de péréquation et de solidarité nationale.
Le service public de l'énergie français est l'un des plus performants au monde. Gaz de France est une entreprise qui se porte bien et qui n'avait aucunement besoin du soutien de Suez pour survivre. Il aurait mieux valu, comme nous l'avons demandé à maintes reprises, créer un pôle public EDF-GDF, mais vous vous y êtes refusé, monsieur le ministre.
D'ailleurs, après que les concessions demandées par Bruxelles ont été acceptées, vos arguments justifiant la fusion n'ont plus aucun sens ! Votre entêtement n'aboutira qu'à la destruction d'un outil qui a fait ses preuves et qui assurait la sécurité et la continuité de l'approvisionnement, la sécurité des installations, ainsi que le droit d'accès à l'énergie pour tous. Avec cette fusion, vous remettez en cause les investissements nécessaires à la satisfaction des besoins énergétiques nationaux de demain.
En raison des risques de libéralisation totale du secteur de l'énergie et parce qu'ils pensent que la mise en oeuvre de la politique énergétique nécessite le maintien et le renforcement des outils publics tant à l'échelon national qu'à l'échelon européen, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Roland Ries.
M. Roland Ries. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de m'étonner de la très faible présence en séance de nos collègues de la majorité pour la conclusion de cet important débat. (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Jean-François Le Grand. Les meilleurs sont là ! (Sourires.)
M. Roland Ries. Certes !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a pas beaucoup de meilleurs !
M. Roland Ries. Je n'ose imaginer que l'absence de nos collègues traduise leur manque d'intérêt pour ce texte.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous vous expliquerez avec vos électeurs !
M. Roland Ries. J'y vois plutôt une manifestation de leur inquiétude, voire de leur réticence à l'égard d'une privatisation qui, après l'incident de la coupure européenne d'électricité, paraît aujourd'hui plus problématique que jamais.
Nous avions défendu sur ce texte une motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité. Notre but n'était pas d'avoir plus de temps pour discuter ce texte et faire valoir notre hostilité. En trois semaines, nous l'avons très largement fait.
Devant notre assemblée, je voudrais solennellement vous mettre en garde.
Ce texte, j'ai déjà eu l'occasion de le dire, est contraire à une disposition constitutionnelle. En l'occurrence, son article 10 est contraire à la Constitution, car il méconnaît l'alinéa 9 du Préambule de la Constitution de 1946, aux termes duquel « Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité. » L'article 34 de la Constitution confère au législateur compétence pour fixer « les règles concernant [...] les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé ». La compétence du législateur est donc très strictement encadrée.
Quelle est donc la portée exacte du Préambule de 1946, qui rend obligatoire l'appropriation ou la propriété publique d'un « service public national » ?
Pour le constituant de 1946, il y a obligation pour le législateur de décider la nationalisation des entreprises exerçant une activité dont il considère qu'elle a les caractères d'un service public national. Il a, parallèlement, le devoir de ne pas décider la privatisation d'une entreprise publique en charge d'une activité de service public.
Pour le grand constitutionnaliste Louis Favoreu, qui s'exprimait en 1997 sur la privatisation de France Télécom, les services publics nationaux non constitutionnels peuvent être gérés par des personnes morales de droit privé, à la condition que l'État reste majoritaire dans le capital.
Le Conseil constitutionnel avait ainsi précisé, dans sa décision du 23 juillet 1996, que la privatisation de France Télécom ne serait à l'avenir possible qu'à la double condition cumulative que l'entreprise n'exerce pas alors un monopole de fait et que le législateur ait fait en sorte que l'entreprise « ne puisse plus être qualifiée au regard de cette prescription de service public national ». C'est parce que France Télécom n'exerçait plus un monopole de fait, en raison de la libéralisation complète des échanges dans le domaine des télécommunications, que sa qualité de service public a pu tomber.
Pour Gaz de France, rien de tel. Ni le projet de loi que nous examinons ni la loi relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières de 2004, dont le titre est évocateur, ne considèrent que GDF n'est plus un service public national.
Si l'on exclut les activités d'importation, d'exportation et de production de gaz, GDF développe aujourd'hui, et ce sera également le cas demain, trois activités principales sur le fondement des textes précités et du présent texte.
En premier lieu, GDF développe une activité de fourniture de gaz à des clients. Je ferai deux remarques à ce sujet.
Premièrement, le projet de loi que nous nous apprêtons à voter définitivement maintient, sans limitation de durée et sans condition liée à la situation intrinsèque du client, un marché réglementé de la fourniture de gaz, dont les prix ne sont pas corrélés à ceux du marché.
Deuxièmement, Gaz de France, désigné dans le projet de loi comme la société tenue de proposer un tarif réglementé, restera le fournisseur quasi exclusif de tous les clients éligibles. On voit là que les termes du débat sont, dans la réalité, assez éloignés de ce que le Gouvernement et les opérateurs concernés ont voulu faire croire non seulement au public, mais également à leur propre majorité parlementaire.
En deuxième lieu, GDF exerce une activité de transport de gaz naturel. Ici encore, il est courant de présenter cette activité comme étant totalement ouverte à la concurrence. En réalité, GDF possède 87,60 % du réseau de transport de gaz. Quel opérateur privé voudra doubler ce réseau et créer le sien propre ? Aucun, évidemment ! GDF restera demain, au travers de sa filiale, en situation largement dominante en matière de transport de gaz sur le territoire métropolitain, faute de concurrents y trouvant un intérêt économique.
Enfin, en troisième lieu, GDF exerce une activité de distribution de gaz naturel pour le compte des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics de coopération, autorités concédantes de la distribution de gaz. Là encore, GDF raccorde à son réseau de distribution 96 % des clients, qu'ils soient éligibles ou non. Comment ce rapport de forces pourrait-il s'inverser ?
En conséquence, le projet de loi a créé les conditions juridiques d'un marché libre totalement virtuel. Nous faisons ici le pari que, du fait même de ce projet de loi, GDF restera encore longtemps en position archi-dominante sur les trois segments de la fourniture, du transport et de la distribution publique de gaz. Autrement dit, cette activité restera un monopole par nature. Votre projet de loi ne fait que transférer ce monopole au secteur privé. Nous soutenons que le législateur ne peut le faire.
Si l'abandon de la participation majoritaire de l'État dans GDF ne peut résulter que d'une loi, le législateur ne peut le décider qu'à une double condition, qui n'est pas réunie ici : s'il considère au préalable qu'il n'existe plus de service public de l'énergie, et, condition constitutionnelle posée en 1996, s'il n'y a pas monopole de fait.
Tout d'abord, une loi ne peut opérer la privatisation d'une entreprise publique disposant de la qualité d'un service public national ou d'un monopole de fait au sens du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 sans lui retirer en même temps cette qualité. C'est pourtant ce que vous avez fait !
Or le Conseil constitutionnel avait rappelé l'exigence de cette démarche en deux temps, ici méconnue, lors du changement du statut d'EDF et de GDF et de leur transformation d'établissement public à caractère industriel ou commercial en société anonyme de droit privé à capital public.
Dans un premier temps, le Conseil constitutionnel a rappelé que, « en maintenant aux sociétés nouvellement créées les missions de service public antérieurement dévolues aux personnes morales de droit public Électricité de France et Gaz de France [...], le législateur a confirmé leur qualité de services publics nationaux ». Puis, dans un second temps, le Conseil constitutionnel a noté que le législateur « a garanti, conformément au neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la participation majoritaire de l'État ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public dans le capital de ces sociétés ».
Ensuite, l'autre obstacle découle d'un paradoxe.
Je me demande si, loin d'avoir affaibli le caractère de service public national, le projet de loi que la Haute Assemblée va voter ne l'a pas renforcé sur certains aspects. Je m'en explique.
Après l'ouverture du marché de la fourniture de gaz à tous les clients le 1er juillet 2007, le projet de loi oblige, dans son article 4, l'entreprise à proposer indéfiniment à tous les clients domestiques et à certains clients non domestiques des contrats de fourniture de gaz naturel à un tarif réglementé.
Dès lors, sans même s'interroger sur la question de savoir si GDF dispose en France d'un monopole de fait sur les réseaux de transport de gaz - il possède tout de même 87,60 % de ces réseaux - ou sur la distribution publique de gaz - 96 % des clients sont desservis par une concession -, force est de constater qu'après le vote du présent projet de loi contesté et au regard du droit positif antérieur applicable à la société, GDF a aujourd'hui et plus qu'hier la qualité d'un service public national !
Sans doute, pour cette raison, le Conseil constitutionnel imposera à l'État de conserver au sein du secteur public au moins les activités de transport. Il pourrait par ailleurs estimer que l'ouverture totale à la concurrence du marché de la fourniture de gaz le 1er juillet 2007 rend caduques les missions de service public national de GDF et qu'il conviendrait alors à tout le moins de ne transférer au secteur privé la propriété de GDF qu'à compter de cette date.
Un autre motif d'inconstitutionnalité est que tout le raisonnement du Gouvernement se fonde sur l'existence d'une action spécifique - la fameuse golden share -, dont la légalité est plus qu'incertaine.
Or cette mesure est de nature à priver l'État de son pouvoir de décision en cas d'annulation de la validité de l'action spécifique. Plutôt que d'organiser lui-même les moyens permettant à l'État de s'y opposer directement, l'article 10 a méconnu les exigences constitutionnelles qui s'attachent à la nécessaire continuité du service public.
Je m'interroge enfin, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur la conformité de l'article 10 aux principes constitutionnels de libre administration des collectivités locales et de liberté contractuelle. Cet article aura demain pour effet, sans limitation dans le temps, d'obliger les collectivités territoriales concédantes, ou en voie de l'être, de la distribution publique de gaz de renouveler leur concession, non pas avec une entreprise publique comme Gaz de France, mais avec un grand groupe privé, GDF-Suez, avec lequel, par ailleurs, elles conduiront des négociations concurrentielles pour l'attribution de leurs autres délégataires de service public.
Où sera, dès lors, la liberté de choix pour les collectivités territoriales ?
Je voudrais enfin mettre l'accent sur le caractère précipité de la procédure que vous nous avez proposée s'agissant d'un projet de loi d'une telle importance.
Vous avez choisi, alors que rien ne vous y obligeait, la procédure d'urgence et, une fois encore, vous avez cherché à court-circuiter le dialogue social, dont vous vous réclamez par ailleurs. Le tribunal de grande instance de Paris, saisi par le comité central d'entreprise, vous a, pas plus tard qu'hier, donné tort puisqu'il a ordonné la poursuite de la procédure d'information des représentants du personnel sur le projet de fusion GDF-Suez jusqu'au 21 novembre. C'est bien la preuve, une de plus, de cette permanente fuite en avant et d'une forme d'improvisation pour acter au plus vite, sans retour en arrière possible, la privatisation de GDF.
Vous l'avez compris, pour toutes ces raisons, la constitutionnalité du projet de loi, et tout particulièrement de son article 10, nous paraît plus que douteuse.
Nous voterons donc contre le texte de la commission mixte paritaire et attendrons sereinement la décision du Conseil constitutionnel. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Vous nous avez fait part, monsieur le ministre, du plaisir que vous aviez à vous retrouver avec nous, je constate que ce plaisir est à peine partagé par les membres de votre majorité... même si les meilleurs sont là ! (Sourires.)
M. Jean-François Le Grand. Bis repetita non placent !
M. Daniel Raoul. Le projet de loi que nous avons examiné s'inscrit dans un contexte géopolitique dangereux qui, jusqu'ici, était inconnu.
Les lisières de la pérennité de l'approvisionnement ne sont plus garanties et, en tout cas, les risques de pénurie de gaz et de pétrole sont réels. L'approvisionnement en gaz n'est dorénavant ni totalement sûr ni suffisamment garanti contre la hausse des prix. Rappelez-vous le traitement infligé par la Russie à l'Ukraine ! À qui le tour ? Ce n'est pas le dîner des Vingt-cinq avec le président Poutine en Finlande qui peut nous rassurer...
Pour garantir un approvisionnement diversifié, des investissements en infrastructures d'un montant énorme seront nécessaires si nous voulons éviter d'être les otages d'une pénurie organisée.
C'est dans ce contexte que vous voulez privatiser l'un de nos fleurons dans le domaine énergétique. C'est un très mauvais coup porté au service public et à la vitalité économique de notre pays, et ce au prix d'un reniement, sinon de la trahison de la parole donnée solennellement voilà deux ans à peine par le ministre d'État, Nicolas Sarkozy, alors ministre des finances.
Je ne veux pas oublier non plus l'incident, évoqué par notre collègue Yves Coquelle, qui s'est produit ce week-end. Ce n'est que grâce à la solidarité d'EDF et de RTE que l'Europe a échappé à un black-out total.
On mesure la fragilité de l'interconnexion, qui est une chaîne, au seuil de résistance du maillon le plus faible. L'élément stratégique qu'est l'interconnexion suppose des investissements importants ; c'est en tout cas ce que demande la Commission européenne.
Je viens de relire le plan d'action visant à renforcer l'efficacité énergétique dans la Communauté européenne : c'est un appel solennel à l'action des différentes nations et de leurs gouvernements. Or ce n'est pas en privatisant l'un des acteurs principaux du secteur énergétique, monsieur le ministre, que vous aurez les commandes pour agir dans le sens demandé par Bruxelles.
Malgré l'exemple des États-Unis et la panne que nous avons évitée samedi dernier, vous persistez dans le démantèlement du secteur public de l'énergie. Est-ce un comportement autiste ou une monomanie, guidés que vous êtes par la seule idéologie libérale ? Jamais l'Union européenne n'a réclamé le démantèlement de ce secteur, elle a simplement demandé l'ouverture à la concurrence.
Vous livrez clés en main l'entreprise publique aux actionnaires prédateurs qui auront pour seul objectif - on peut comprendre leur logique - d'augmenter leurs dividendes. Même les libéraux allemands, à la suite de l'incident de ce week-end, ont rappelé à l'ordre une entreprise privée du secteur électrique.
M. Daniel Reiner. Eh oui !
M. Daniel Raoul. Roland Ries vous a expliqué notre position sur l'article 10, quant à la forme. Roland Courteau vous a déjà fait part de tout le bien que nous pensions du projet de loi dans son ensemble. Je ne reviendrai donc pas sur ce qui a été dit au cours de la discussion en première lecture.
Ce texte comporte deux parties bien distinctes. La première transpose une directive que Mme Nicole Fontaine a avalisée en novembre 2002, en contradiction avec les engagements pris à Barcelone par le Président Jacques Chirac six mois avant. De renoncements en reniements de la parole donnée, que vaut votre engagement aujourd'hui ? Qui doit-on croire, et quand ?
Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé à revoir les niveaux de consommation pris en compte pour le tarif social, ce qui a motivé le retrait de nos deux amendements. Nous avions également demandé, au minimum, l'alignement des seuils de revenus exigés sur ceux de la CMU. Nous prenons acte de votre engagement à revoir ces seuils. Je tiens d'ailleurs à vous remercier de l'attention que vous avez portée à nos attentes lors des débats.
M. Daniel Reiner. Nous serons vigilants !
M. Daniel Raoul. Si je salue, comme mes collègues, le climat dans lequel se sont déroulés nos débats, je me demande si l'application et la disponibilité de notre rapporteur, Ladislas Poniatowski, dont je reconnais d'habitude l'honnêteté intellectuelle, ne relèvent pas de la méthode Coué ou de l'autopersuasion. (Exclamations.)
Notre collègue Daniel Reiner vient pourtant de citer un rapport publié l'année dernière dans lequel est évoqué « l'épouvantail de la privatisation de Gaz de France »...
M. Daniel Reiner. Eh oui !
M. Daniel Raoul. Mes chers collègues, cet épouvantail est sorti du placard et cela ne vous émeut même pas !
C'est donc avec fermeté et conviction que le groupe socialiste votera contre ce texte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'exprime ce matin en mon nom. Chaque membre du groupe UC-UDF prendra position comme il l'entendra, une majorité votant toutefois contre ce projet de loi.
M. Roland Ries. Enfin !
M. Philippe Nogrix. Certains de mes collègues ont également préféré s'abstenir, estimant impossible de voter contre un texte qui transpose des directives européennes. Pour ma part, je suis très nettement opposé à ce projet de loi. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
La panne d'électricité de samedi dernier a révélé les failles de l'Europe de l'électricité et de l'énergie. Elle a plongé cinq millions de Français dans le noir, entre vingt-deux heures et vingt-trois heures. Les délestages ont touché de nombreuses régions, de l'Est à l'Île-de-France, de la région Rhône-Alpes à la Normandie, sans oublier la Bretagne qui m'est chère. Plusieurs TGV ont subi d'importants retards.
Si, pour l'instant, les causes de la panne ne sont pas encore connues avec précision, il n'en demeure pas moins que l'on peut souligner d'ores et déjà certaines faiblesses, voire des lacunes. Il n'y avait samedi ni pic de consommation, ni défaillance des centrales.
Ce qui est en cause, c'est tout d'abord la faiblesse des interconnexions aux frontières et donc l'absence cruelle d'une politique européenne de l'énergie. C'est aussi la faiblesse de notre production : nous sommes à la limite de la sous-production, due pour l'essentiel à une croissance de la consommation électrique plus rapide que celle des investissements.
Aussi, je me demande si ce projet de loi, portant à juste titre sur le secteur de l'énergie et non pas seulement sur le gaz, permettra réellement de combler ces lacunes.
La politique européenne de l'énergie reste à faire, même si l'on a commencé à dessiner quelques objectifs communs. Il y a pour l'instant beaucoup de discours et peu de réalisations. De plus en plus de spécialistes regrettent, comme je le relevais en première lecture, que le gouvernement français n'ait pas pris l'initiative d'une vaste démarche européenne pour définir enfin une politique européenne de l'énergie. Pourtant, tout le monde sait ici que l'énergie constitue le nerf de la guerre, le support du développement économique, donc de la création d'emplois dont nous avons tant besoin.
Or la fusion entre Suez et GDF relève plus d'un étroit patriotisme économique français que d'une vision européenne. Je ne suis même pas persuadé que ce texte permette au Gouvernement d'atteindre son objectif, qui est d'empêcher une OPA hostile sur Suez.
M. Yves Coquelle. Absolument !
M. Daniel Raoul. C'est tout vu !
M. Philippe Nogrix. L'avenir le dira. Au contraire, le risque de rendre GDF opéable ne doit pas être sous-estimé.
Le facteur déclenchant de cette fusion, la menace d'une OPA d'Enel sur Suez avec, à court terme, le risque de démantèlement de ce groupe, reste d'actualité. Preuve en est le remue-ménage qui a été fait autour de l'éventuelle apparition de M. Pinault.
Comme mon collègue Marcel Deneux l'a souligné en première lecture, nous ne sommes pas convaincus par les arguments qui ont été avancés. La fusion Suez-GDF ne pourra pas empêcher à terme, voire à très court terme, le démantèlement du groupe Suez. C'est dans la logique des choses ! Privatiser GDF pour conserver l'intégrité de Suez me semble donc inutile, artificiel et, surtout, très dangereux.
Il ne faut négliger ni la puissance financière des fonds de pensions anglosaxons, ni celle des producteurs de gaz comme Gazprom. Par ailleurs, monsieur le ministre, que se passera-t-il dans le cas d'une augmentation de capital de la future société ? Ce cas de figure n'est pourtant pas purement théorique.
Je ne nie pas que GDF ait besoin d'atteindre une taille critique suffisante qui lui permette de devenir un acteur gazier incontournable à l'échelle européenne et internationale, surtout dans le contexte actuel de concentration du secteur de l'énergie aux mains de quelques grands groupes européens. Pour cela, il est nécessaire d'abaisser la part de l'État dans le capital de GDF, afin de lui donner une nouvelle capacité de financement. Mais il n'y a pas que Enel sur le marché du gaz, il y a aussi le grand groupe pétrolier français Total ! Pourquoi n'avez-vous pas proposé à Total de participer à la fusion ? Cela aurait donné encore plus d'ampleur au rapprochement !
M. Daniel Raoul. Eh oui !
M. Yves Coquelle. Absolument !
M. Philippe Nogrix. Certes, le projet de fusion avec Suez est séduisant à plus d'un titre. Le nouvel ensemble Suez-GDF proposerait une offre duale gaz-électricité qui répond mieux aux attentes des clients.
En outre, cet ensemble deviendrait le numéro un européen de vente de gaz. Il serait également le plus gros acheteur du continent, et la répartition des approvisionnements du groupe à l'horizon de 2007 se ferait à partir d'un portefeuille de fournisseurs plus diversifié. Enfin, le nouvel ensemble disposerait d'une position dominante dans le secteur du gaz naturel liquéfié.
Toutefois, j'estime indispensable que l'État reste un acteur majeur de la politique énergétique. Nous en sommes tous d'accord, l'énergie constitue et constituera de plus en plus un enjeu national.
La sécurité d'approvisionnement représente un objectif géostratégique constant de l'État. Celui-ci doit donc en garder la maîtrise, sinon directement, du moins indirectement. En effet, comme je l'ai rappelé lors de l'examen du projet de loi, les accords sur l'achat et la vente de gaz sont plus politiques que liés au marché : ce sont les États qui décideront de nous vendre ou pas du gaz, de laisser les robinets ouverts ou de les fermer.
En matière d'électricité, il n'existe pas de marché international. Pour des raisons physiques, l'électricité - énergie secondaire - est difficilement transportable sur de longues distances. De surcroît, seul le nucléaire est à la hauteur des défis à venir pour faire face aux besoins grandissants. Cela implique un engagement fort de l'État et une politique industrielle qui n'a rien à voir avec le simple jeu des marchés.
Quant au gaz, il n'est plus guère produit en France et presque plus en Europe, sauf en mer du Nord, en Écosse et en Norvège. Le marché international du gaz est un réel oligopole où règnent et régneront de plus en plus en maîtres les fournisseurs russes et algériens, lesquels viennent d'ailleurs de conclure un accord de coordination pour leur offre.
Face à cette situation, l'État français sera-t-il en mesure d'assurer l'indépendance énergétique de la France et de répondre à la nécessité d'obtenir les meilleurs prix pour les entreprises et les ménages ? En un mot, l'État a-t-il encore les moyens de maîtriser l'évolution de ce secteur primordial ? Ce projet de loi le permet-il ? Je ne le pense pas.
Certes, en conservant une minorité de blocage dans le capital de Gaz de France, l'État garde une certaine influence, mais cette dernière me semble bien ténue au regard des enjeux actuels et de la pression du marché, notamment en ce qui concerne la capacité d'investissement du nouveau groupe. En effet, avec Electrabel, Suez exploite déjà des centrales nucléaires en Belgique. Il est donc raisonnable de penser que le nouveau groupe pourra également en construire en France, surtout dans le contexte actuel de pénurie d'électricité.
Nous aurons besoin très rapidement d'un deuxième réacteur EPR. Or la seule façon pour l'État de convaincre nos concitoyens de la nécessité de recourir aux réacteurs nucléaires les plus modernes qui soient est qu'il reste largement présent dans le groupe qui construira la future centrale nucléaire.
Aujourd'hui, il ne s'agit pas seulement de voter un texte pour résoudre un problème du moment - Enel peut-il ou non acheter Suez ? -, qui a servi de point de départ à la réflexion gouvernementale et à ce projet de loi ; il s'agit de construire une véritable politique énergétique pour demain. Nous sommes donc profondément convaincus que, pour recourir à l'énergie nucléaire avec les progrès technologiques mais aussi les risques que cela comporte, l'État doit rester majoritairement présent, garant du sérieux technologique plus que du profit capitaliste.
On ne peut donc affirmer que l'État doit conserver 70 % du capital d'EDF à cause de la technologie nucléaire, mais qu'une participation de 34 % dans le nouveau groupe suffirait. C'est véritablement vouloir tromper nos concitoyens, qui ont déjà bien du mal à comprendre la cohérence de la démarche gouvernementale. C'est pourquoi je suis opposé à la privatisation de GDF.
Pour conclure, je me permettrai quelques remarques de forme.
Comment ne pas être perplexe face au bras de fer qui a opposé ces dernières semaines Gérard Mestrallet et Jean-François Cirelli sur les questions de gouvernance du futur groupe, au point que le président de Gaz de France a laissé planer la menace de sa démission ? Comment se fait-il que le futur « vice-PDG délégué », M. Cirelli, si l'on en croit la presse, n'ait pas été associé aux négociations avec les autorités de la concurrence belges ? Va-t-on revivre le même psychodrame que celui qui s'est récemment déroulé chez EADS avec une présidence sur siège éjectable ?
Enfin, pour ajouter à la cacophonie ambiante, des actionnaires de Suez, représentant environ 10 % du capital, s'estiment lésés de 10 milliards en raison de la fusion avec GDF, à laquelle ils menacent de s'opposer.
Voilà qui augure bien mal des débuts de notre futur champion gazier. Ce champion - sans doute par la taille - sera-t-il capable de trouver son bon rythme de croissance, sa bonne gouvernance, son juste respect des équipes ? Je n'en suis pas convaincu. Aussi voterai-je contre les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur certaines travées de l'UC-UDF et du groupe CRC, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? ...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12 du règlement, lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
TITRE IER
OUVERTURE DES MARCHÉS ET LIBRE CHOIX DES CONSOMMATEURS
Article 1er A
Le huitième alinéa de l'article 1er de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi rédigé :
« - l'évolution pluriannuelle des tarifs réglementés de vente de l'électricité et du gaz ; ».
Article 1er
I A. - Dans le dernier alinéa du II de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, après les mots : « Électricité de France », sont insérés les mots : « pour les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, la société gestionnaire issue de la séparation juridique imposée à Électricité de France par l'article 13 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières », et les mots : « aux cahiers des charges des concessions ou aux règlements de service », sont remplacés par les mots : « à celles des cahiers des charges des concessions ou des règlements de service ».
I B. - Dans le dernier alinéa du III de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, après les mots : « qu'ils accomplissent », sont insérés les mots : «, pour les clients raccordés aux réseaux de distribution, », et les mots : « aux règlements de service » sont remplacés par les mots : « des règlements de service ».
I. - Le début du 1° du III de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi rédigé :
« La fourniture d'électricité aux clients qui n'exercent pas les droits mentionnés à l'article 22, en concourant à la cohésion sociale au moyen de la péréquation géographique nationale des tarifs, de la mise en oeuvre de la tarification spéciale «produit de première nécessité» mentionnée à l'article 4, du maintien de la fourniture d'électricité en application de l'article L. 115-3 du code... (le reste sans changement) ».
I bis. - Dans le 2° du III de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, la référence : « V de l'article 15 » est remplacée par la référence : « IV bis de l'article 22 ».
I ter. - Le 3° du III de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est abrogé.
I quater. - Le V de l'article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi rédigé :
« V. - Chaque producteur d'électricité raccordé aux réseaux publics de transport ou de distribution et chaque consommateur d'électricité, pour les sites pour lesquels il a exercé les droits mentionnés à l'article 22, est responsable des écarts entre les injections et les soutirages d'électricité auxquels il procède. Il peut soit définir les modalités selon lesquelles lui sont financièrement imputés ces écarts par contrat avec le gestionnaire du réseau public de transport, soit contracter à cette fin avec un responsable d'équilibre qui prend en charge les écarts ou demander à l'un de ses fournisseurs de le faire.
« Lorsque les écarts pris en charge par un responsable d'équilibre compromettent l'équilibre des flux d'électricité sur le réseau, le gestionnaire du réseau public de transport peut le mettre en demeure de réduire ces écarts dans les huit jours.
« Au terme de ce délai, si la mise en demeure est restée infructueuse, le gestionnaire du réseau public de transport peut dénoncer le contrat le liant au responsable d'équilibre.
« Il revient alors au fournisseur ayant conclu avec ce responsable d'équilibre un contrat relatif à l'imputation financière des écarts de désigner un nouveau responsable d'équilibre pour chaque site en cause. À défaut, les consommateurs bénéficient pour chacun de ces sites d'une fourniture de secours dans les conditions visées à l'article 22. »
I quinquies. - Le VI de l'article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est abrogé.
I sexies. - La dernière phrase du deuxième alinéa du IV de l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est supprimée.
I septies. - Après le IV de l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, il est inséré un IV bis ainsi rédigé :
« IV bis. - Afin de prendre en compte le bon fonctionnement, la sécurité et la sûreté des réseaux publics d'électricité et de contribuer à la protection des consommateurs contre les défaillances des fournisseurs ainsi qu'à la continuité de leur approvisionnement, le ministre chargé de l'énergie peut interdire sans délai l'exercice de l'activité d'achat pour revente d'un fournisseur lorsque ce dernier ne s'acquitte plus des écarts générés par son activité, lorsqu'il ne satisfait pas aux obligations découlant du quatrième alinéa du V de l'article 15, lorsqu'il ne peut plus assurer les paiements des sommes dues au titre des tarifs d'utilisation des réseaux résultant des contrats qu'il a conclus avec des gestionnaires de réseaux en application du septième alinéa de l'article 23 ou lorsqu'il tombe sous le coup d'une procédure collective de liquidation judiciaire.
« Dans le cas où le ministre chargé de l'énergie interdit à un fournisseur d'exercer l'activité d'achat pour revente, les contrats conclus par ce fournisseur avec des consommateurs, avec des responsables d'équilibre et avec des gestionnaires de réseaux sont résiliés de plein droit à la date d'effet de l'interdiction.
« Le ou les fournisseurs de secours sont désignés par le ministre chargé de l'énergie à l'issue d'un ou plusieurs appels d'offres. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions et modalités d'application du présent article.
« Ce décret fixe également les conditions selon lesquelles le fournisseur de secours se substitue au fournisseur défaillant dans ses relations contractuelles avec les utilisateurs et les gestionnaires de réseaux. »
I octies. - Le III de l'article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité mentionnées au dernier alinéa du II du présent article sont les autorités organisatrices du service public de la fourniture d'électricité aux clients raccordés à un réseau de distribution qui bénéficient des tarifs réglementés de vente mentionnés au I de l'article 4. »
I nonies. - La seconde phrase de l'avant-dernier alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Par ailleurs, la part des coûts de branchement et d'extension de ces réseaux non couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux publics peut faire l'objet d'une contribution. Celle-ci est versée au maître d'ouvrage de ces travaux, qu'il s'agisse d'un gestionnaire de réseau, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte. »
I decies. - Dans les quatrième, sixième, septième et huitième alinéas de l'article 18 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, les mots : « la contribution » sont remplacés par les mots : « la part relative à l'extension de la contribution ».
I undecies. - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article 18 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, les mots : « cette contribution » sont remplacés par les mots : « la part relative à l'extension de cette contribution ».
II. - Le premier alinéa du I de l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi rédigé :
« Tout consommateur final d'électricité peut, pour chacun de ses sites de consommation, librement choisir son fournisseur d'électricité. Tout consommateur domestique a le droit à la tarification spéciale «produit de première nécessité» mentionnée à l'article 4 de la présente loi s'il réunit les conditions fixées pour le droit à cette tarification. »
III. - Dans les premier et troisième alinéas du I et le dernier alinéa du II de l'article 4, les 1° et 2° du I et le 1° du II de l'article 5, et les premier et troisième alinéas de l'article 46-4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, les mots : « tarifs de vente de l'électricité aux clients non éligibles » ou « tarifs de vente aux clients non éligibles » sont remplacés par les mots : « tarifs réglementés de vente d'électricité ».
IV. - Dans le cinquième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, les mots : « relatifs à la fourniture d'énergie de dernier recours, mentionnée à l'article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et » sont remplacés par les mots : « relatifs à la fourniture d'électricité de secours mentionnée aux articles 15 et 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée ou à la fourniture de gaz de dernier recours mentionnée ».
Article 1er bis
..............................Supprimé..............................
Article 2
I. - Le 2° de l'article 3 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie est ainsi rédigé :
« 2° Les consommateurs finals pour chacun de leurs sites de consommation. »
II. Supprimé.
III. - Dans la deuxième phrase de l'article 4 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, les mots : « tarifs de vente de gaz aux clients non éligibles » sont remplacés par les mots : « tarifs réglementés de vente du gaz naturel » et, dans le premier alinéa des I et II de l'article 7 de la même loi, les mots : « tarifs de vente du gaz naturel aux clients non éligibles » sont remplacés par les mots : « tarifs réglementés de vente du gaz naturel ».
IV. - Après les mots : « ainsi que », la fin de la première phrase du premier alinéa du II de l'article 5 de la loi n° 2003?8 du 3 janvier 2003 précitée est ainsi rédigée : « , pour les clients qui bénéficient des tarifs réglementés de vente mentionnés à l'article 7, raccordés à leur réseau de distribution, par les autorités organisatrices de la distribution publique et du service public local de fourniture de gaz naturel. »
Article 2 bis A
Dans la seconde phrase du dernier alinéa de l'article 3 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, les mots : « à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification par le client éligible à son fournisseur de sa décision, » sont supprimés.
Article 2 bis
I. - L'article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 28. - I. - Dans le respect des compétences qui lui sont attribuées, la Commission de régulation de l'énergie concourt, au bénéfice des consommateurs finals, au bon fonctionnement des marchés de l'électricité et du gaz naturel.
« Elle veille, en particulier, à ce que les conditions d'accès aux réseaux de transport et de distribution d'électricité et de gaz naturel n'entravent pas le développement de la concurrence.
« Elle surveille, pour l'électricité et pour le gaz naturel, les transactions effectuées entre fournisseurs, négociants et producteurs, les transactions effectuées sur les marchés organisés ainsi que les échanges aux frontières. Elle s'assure de la cohérence des offres des fournisseurs, négociants et producteurs avec leurs contraintes économiques et techniques.
« La Commission de régulation de l'énergie comprend un collège et un comité de règlement des différends et des sanctions.
« Sauf disposition contraire, les attributions confiées à la Commission de régulation de l'énergie ou à son président sont respectivement exercées par le collège ou par son président.
« II. - Le président du collège est nommé par décret en raison de ses qualifications dans les domaines juridique, économique et technique, après avis des commissions du Parlement compétentes en matière d'énergie.
« Le collège comprend également :
« 1° Deux vice-présidents nommés, en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique et technique, respectivement par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat ;
« 2° Deux membres nommés, en raison de leurs qualifications dans les domaines juridique, économique et technique, respectivement par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat ;
« 3° Un membre nommé, en raison de ses qualifications dans les domaines juridique, économique et technique, par le président du Conseil économique et social ;
« 4° Un membre nommé, en raison de ses qualifications dans les domaines juridique, économique et technique, par décret ;
« 5° Deux représentants des consommateurs d'électricité et de gaz naturel, nommés par décret.
« Les membres du collège sont nommés pour six ans et leur mandat n'est pas renouvelable.
« En cas de vacance d'un siège de membre du collège, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir. Un mandat exercé pendant moins de deux ans n'est pas pris en compte pour l'application de la règle de non renouvellement fixée à l'alinéa précédent.
« III. - Le comité de règlement des différends et des sanctions est chargé d'exercer les missions mentionnées aux articles 38 et 40.
« Il comprend quatre membres :
« 1° Deux conseillers d'État désignés par le vice-président du Conseil d'État ;
« 2° Deux conseillers à la Cour de cassation désignés par le premier président de la Cour de cassation.
« Les membres du comité sont nommés pour une durée de six ans non renouvelable. Le président est nommé par décret pour la durée de son mandat parmi les membres du comité.
« En cas de vacance d'un siège de membre du comité pour quelque cause que ce soit, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir. Un mandat exercé pendant moins de deux ans n'est pas pris en compte pour l'application de la règle de non renouvellement fixée à l'alinéa précédent.
« IV. - Le collège ne peut délibérer que si cinq au moins de ses membres sont présents. Le comité ne peut délibérer que si deux au moins de ses membres sont présents. Le collège et le comité délibèrent à la majorité des membres présents. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante.
« V. - Le président et les deux vice-présidents du collège exercent leurs fonctions à plein temps. Ces fonctions sont incompatibles avec toute activité professionnelle, tout mandat électif communal, départemental, régional, national ou européen, la qualité de membre du Conseil économique et social, tout emploi public et toute détention, directe ou indirecte, d'intérêts dans une entreprise du secteur de l'énergie.
« Les fonctions des autres membres du collège et du comité sont incompatibles avec tout mandat électif national ou européen et toute détention, directe ou indirecte, d'intérêts dans une entreprise du secteur de l'énergie.
« Les fonctions de membre du collège sont incompatibles avec celles de membre du comité.
« Les membres du collège ou du comité ne peuvent être nommés au-delà de l'âge de soixante-cinq ans.
« Le président du collège reçoit un traitement égal à celui afférent à la première des deux catégories supérieures des emplois de l'État classés hors échelle. Les vice-présidents du collège reçoivent un traitement égal à celui afférent à la seconde de ces deux catégories. Lorsqu'ils sont occupés par un fonctionnaire, les emplois de président ou de vice-président du collège sont des emplois conduisant à pension au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite.
« Les autres membres du collège et les membres du comité sont rémunérés à la vacation dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
« VI. - Les membres du collège ou du comité ne prennent, à titre personnel, aucune position publique sur des sujets relevant de la compétence de la Commission de régulation de l'énergie.
« Le mandat des membres du collège et du comité n'est pas révocable, sous réserve des dispositions suivantes :
« 1° Tout membre du collège ou du comité qui ne respecte pas les règles d'incompatibilité prévues au V est déclaré démissionnaire d'office, après consultation du collège ou du comité, par arrêté du ministre chargé de l'énergie ;
« 2° Il peut être mis fin aux fonctions d'un membre du collège ou du comité en cas d'empêchement constaté par le collège ou le comité dans des conditions prévues par leur règlement intérieur ;
« 3° Il peut également être mis fin aux fonctions d'un membre du collège en cas de manquement grave à ses obligations par décret en conseil des ministres sur proposition du président d'une commission du Parlement compétente en matière d'énergie ou sur proposition du collège. Le cas échéant, la proposition du collège est adoptée à la majorité des membres le composant dans des conditions prévues par son règlement intérieur.
« Le président du collège ou du comité prend les mesures appropriées pour assurer le respect des obligations résultant du présent VI. »
II. - Les membres de la Commission de régulation de l'énergie à la date de publication de la présente loi deviennent membres du collège mentionné au II de l'article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée. Sous réserve des dispositions du VI de l'article 28 de la même loi, ils exercent leur mandat jusqu'à leur terme, y compris le président qui conserve cette fonction jusqu'au terme de son mandat, et conservent leur rémunération. Les dispositions du premier alinéa du V de l'article 28 de la même loi leur sont applicables.
Le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun, parmi les membres qu'ils ont nommés et qui sont en fonction à la date de publication de la présente loi, un vice-président. La première nomination des membres du collège visés au 1° du II de l'article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée intervient au terme du mandat des membres désignés vice-présidents en application du présent alinéa.
La première nomination des commissaires mentionnés aux 2° à 4° du II de l'article 28 de la même loi intervient au terme du mandat des membres de la Commission de régulation de l'énergie à la date de publication de la présente loi, désignés par les mêmes autorités.
III. - Pour la constitution initiale du comité de règlement des différends et des sanctions mentionné au III de l'article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, la durée du mandat de deux membres est fixée, par tirage au sort, à trois ans.
La validité des actes de constatation et de procédure accomplis antérieurement à la première réunion du comité de règlement des différends et des sanctions s'apprécie au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis.
Les procédures de sanction et de règlement des différends devant la Commission de régulation de l'énergie en cours à la date de la première réunion du comité de règlement des différends et des sanctions sont poursuivies de plein droit par celui ci. »
Article 2 ter
I.- Supprimé.
II. - L'article 3 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi modifié :
1° Dans le deuxième alinéa, les mots : « les collectivités locales ayant constitué un distributeur non nationalisé visé à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée et la Commission de régulation de l'énergie définie à l'article 28 de la présente loi » sont remplacés par les mots : « et les collectivités territoriales ayant constitué un distributeur non nationalisé visé à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée » ;
2° Les troisième et quatrième alinéas sont supprimés.
III. - L'article 1er de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est ainsi modifié :
1° Dans le deuxième alinéa, les mots : « les collectivités locales ayant constitué un distributeur non nationalisé visé à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz et la Commission de régulation de l'énergie créée par l'article 28 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité » sont remplacés par les mots : « et les collectivités territoriales ayant constitué un distributeur non nationalisé visé à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz » ;
2° Les troisième et quatrième alinéas sont supprimés.
Article 2 quater A
I. - Après l'article 43 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, il est inséré un article 43-1 ainsi rédigé :
« Art. 43-1. - Il est institué un médiateur national de l'énergie chargé de recommander des solutions aux litiges entre les consommateurs et les fournisseurs d'électricité ou de gaz naturel et de participer à l'information des consommateurs d'électricité ou de gaz naturel sur leurs droits.
« Le médiateur ne peut être saisi que de litiges nés de l'exécution des contrats mentionnés dans la section 12 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation ou à l'article 13 bis de la loi n°.... du .... relative au secteur de l'énergie et ayant déjà fait l'objet d'une réclamation écrite préalable du consommateur auprès du fournisseur intéressé, qui n'a pas permis de régler le différend dans un délai fixé par voie réglementaire.
« Il est saisi directement et gratuitement par le consommateur ou son mandataire. Il formule sa recommandation dans un délai fixé par voie réglementaire et motive sa réponse. La saisine suspend la prescription des actions en matière civile et pénale pendant ce délai.
« Le médiateur est nommé pour six ans par le ministre chargé de l'énergie et le ministre chargé de la consommation. Son mandat n'est ni renouvelable, ni révocable.
« Le médiateur rend compte de son activité devant les commissions du Parlement compétentes en matière d'énergie ou de consommation, à leur demande.
« Il dispose de services qui sont placés sous son autorité. Il peut employer des fonctionnaires en position d'activité ou de détachement ainsi que des agents contractuels.
« Le médiateur dispose de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Son budget est arrêté par les ministres chargés de l'économie, de l'énergie et de la consommation sur sa proposition. Les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne lui sont pas applicables.
« Le médiateur perçoit pour son fonctionnement une part du produit de la contribution mentionnée au I de l'article 5 de la présente loi. »
II. - Au début de l'article 38 de la même loi, il est inséré un I A ainsi rédigé :
« I A. - Le comité de règlement des différends et des sanctions est chargé d'exercer les missions confiées à la Commission de régulation de l'énergie par le présent article. »
III. - Au début du premier alinéa de l'article 40 de la même loi, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Le comité de règlement des différends et des sanctions est chargé d'exercer les missions confiées à la Commission de régulation de l'énergie par le présent article. »
IV. - Le I de l'article 5 de la même loi est ainsi modifié :
1° La première phrase du douzième alinéa est complétée par les mots : «, et le budget du médiateur national de l'énergie » ;
2° Le seizième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle verse au médiateur national de l'énergie une somme égale au montant de son budget le 1er janvier de chaque année. »
V. - Pour l'année 2007, la Caisse des dépôts et consignations verse au médiateur national de l'énergie, à la demande des ministres chargés de l'économie, de l'énergie et de la consommation, les sommes qui sont nécessaires à son installation. Elle verse ensuite, le cas échéant, la différence entre le montant de son budget et les sommes déjà versées au titre de cette année, à la date à laquelle ce budget est arrêté.
Article 2 quater B
L'article 30 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« La Commission de régulation de l'énergie dispose de services qui sont placés sous l'autorité de son président ou, pour l'exercice des missions confiées au comité de règlement des différends et des sanctions, sous l'autorité du président du comité. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le collège et le comité établissent, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, chacun pour ce qui le concerne, un règlement intérieur qui est publié au Journal officiel. » ;
3° Dans le dernier alinéa, les mots : « le président de la commission a » sont remplacés par les mots : « le président de la commission et le président du comité ont ».
Article 2 quater
L'article 35 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'obligation de secret professionnel ne fait pas obstacle à la communication par la Commission de régulation de l'énergie des informations ou documents qu'elle détient aux commissions du Parlement compétentes en matière d'énergie ou à une autorité d'un autre État membre de l'Union européenne exerçant des compétences analogues à celles de la Commission de régulation de l'énergie, sous réserve de réciprocité et à condition que ses membres et ses agents soient astreints aux mêmes obligations de secret professionnel que celles définies au présent article. »
Article 2 quinquies
Après l'article 37 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, il est inséré un article 37-1 ainsi rédigé :
« Art. 37-1. - Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires, la Commission de régulation de l'énergie précise, en tant que de besoin, par décision publiée au Journal officiel, les règles concernant :
« 1° Les missions des gestionnaires de réseaux de transport et de distribution de gaz naturel en matière d'exploitation et de développement de ces réseaux ;
« 2° Les missions des gestionnaires des installations de gaz naturel liquéfié et celles des opérateurs de stockages souterrains de gaz naturel ;
« 3° Les conditions de raccordement aux réseaux de transport et de distribution de gaz naturel ;
« 4° Les conditions d'utilisation des réseaux de transport et de distribution de gaz naturel et des installations de gaz naturel liquéfié ;
« 5° La conclusion de contrats d'achat, en application du quatrième alinéa de l'article 21 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, et de protocoles par les gestionnaires de réseaux de transport ou de distribution de gaz naturel ;
« 6° Les périmètres de chacune des activités faisant l'objet d'une séparation comptable en application de l'article 8 de la même loi, les règles d'imputation comptable appliquées pour obtenir les comptes séparés et les principes déterminant les relations financières entre ces activités. »
Article 2 septies
I. - L'article 14 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du premier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Il élabore chaque année, à cet effet, un programme d'investissements. Ce programme est soumis à l'approbation de la Commission de régulation de l'énergie qui veille à la réalisation des investissements nécessaires au bon développement des réseaux et à leur accès transparent et non discriminatoire. » ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La Commission de régulation de l'énergie ne peut refuser d'approuver le programme annuel d'investissements que pour des motifs tirés des missions qui lui ont été confiées par la loi. »
II. - Le troisième alinéa de l'article 21 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est ainsi rédigé :
« Il informe le ministre chargé de l'énergie et la Commission de régulation de l'énergie des projets de développement de son réseau et leur communique annuellement un état de son programme d'investissements relatif au transport ou à la distribution de gaz naturel. Les programmes d'investissements des transporteurs de gaz naturel sont soumis à l'approbation de la Commission de régulation de l'énergie qui veille à la réalisation des investissements nécessaires au bon développement des réseaux et à leur accès transparent et non discriminatoire. La Commission de régulation de l'énergie ne peut refuser d'approuver un programme annuel d'investissements que pour des motifs tirés des missions qui lui ont été confiées par la loi. »
Article 2 octies
I. - Le premier alinéa de l'article 25 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi rédigé :
« Électricité de France et les distributeurs non nationalisés visés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée tiennent une comptabilité interne qui doit permettre de distinguer la fourniture aux consommateurs finals ayant exercé les droits mentionnés à l'article 22 de la présente loi et la fourniture aux consommateurs finals n'ayant pas exercé ces droits et d'identifier, s'il y a lieu, les revenus provenant de la propriété des réseaux publics de distribution. Lorsque la gestion des réseaux de distribution n'est pas assurée par une entité juridiquement distincte, ces opérateurs tiennent un compte séparé au titre de cette activité. »
II. - Dans la seconde phrase du premier alinéa du I de l'article 8 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, les mots : « aux clients éligibles et aux clients non éligibles » sont remplacés par les mots : « aux consommateurs finals ayant fait usage de la faculté prévue à l'article 3 et aux consommateurs finals n'ayant pas fait usage de cette faculté ».
Article 3
I. - L'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par un V ainsi rédigé :
« V. - Les clients domestiques ayant droit à la tarification spéciale «produit de première nécessité» mentionnée à l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée bénéficient également, à leur demande, pour une part de leur consommation, d'un tarif spécial de solidarité applicable à la fourniture de gaz naturel et aux services qui lui sont liés. Les modalités d'application de la tarification spéciale «produit de première nécessité» prévues au dernier alinéa du I du même article 4 sont applicables à la mise en place du tarif spécial de solidarité, notamment pour la transmission des fichiers aux fournisseurs de gaz naturel. Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent V, en particulier pour les clients domestiques résidant dans un immeuble d'habitation chauffé collectivement. »
II. - Après le treizième alinéa de l'article 16 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - la fourniture de gaz naturel au tarif spécial de solidarité mentionné au V de l'article 7 de la présente loi ; ».
III. - Après l'article 16-1 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, il est inséré un article 16-2 ainsi rédigé :
« Art. 16-2. - Les charges imputables aux obligations de service public assignées aux fournisseurs de gaz naturel portant sur la fourniture de gaz naturel à un tarif spécial de solidarité sont compensées selon les dispositions du présent article. Elles comprennent les pertes de recettes et les coûts supportés par les fournisseurs de gaz naturel en raison de la mise en oeuvre du tarif spécial de solidarité mentionné au V de l'article 7.
« Les charges mentionnées à l'alinéa précédent sont calculées sur la base d'une comptabilité tenue par les fournisseurs qui les supportent. Cette comptabilité, établie selon des règles définies par la Commission de régulation de l'énergie, est contrôlée aux frais des opérateurs qui supportent ces charges par leur commissaire aux comptes ou, pour les régies, par leur comptable public. La Commission de régulation de l'énergie peut, aux frais de l'opérateur, faire contrôler cette comptabilité par un organisme indépendant qu'elle choisit.
« La compensation de ces charges, au profit des opérateurs qui les supportent, est assurée par des contributions dues par les fournisseurs de gaz naturel. Le montant de ces contributions est calculé au prorata de la quantité de gaz naturel vendue par ces fournisseurs aux consommateurs finals.
« Le montant de la contribution applicable à chaque kilowattheure est calculé de sorte que les contributions couvrent l'ensemble des charges visées au premier alinéa ainsi que les frais de gestion exposés par la Caisse des dépôts et consignations. Le ministre chargé de l'énergie arrête ce montant chaque année sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie. À défaut d'entrée en vigueur d'un nouvel arrêté, le dernier montant fixé est applicable aux exercices suivants.
« La contribution applicable à chaque kilowattheure ne peut dépasser 2 % du tarif réglementé de vente du kilowattheure, hors abonnement et hors taxes, applicable à un consommateur final domestique chauffé individuellement au gaz naturel.
« Les fournisseurs pour lesquels le montant de la contribution due est supérieur au coût des charges de service public mentionnées au premier alinéa qu'ils supportent, versent périodiquement à la Caisse des dépôts et consignations la différence entre cette contribution et ce coût. La Caisse des dépôts et consignations reverse, selon la même périodicité, aux fournisseurs pour lesquels le montant de la contribution due est inférieur au coût des charges de service public mentionnées au premier alinéa supportées, la différence entre ce coût et cette contribution.
« Sans préjudice des sanctions prévues à l'article 31, en cas de défaut ou d'insuffisance de paiement de la différence devant être versée par un fournisseur dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle elle est due, la Commission de régulation de l'énergie adresse à ce fournisseur une lettre de rappel assortie d'une pénalité de retard dont le taux est fixé à 10 % du montant dû.
« Lorsque le montant de la totalité des contributions dues par les fournisseurs ne correspond pas au montant constaté des charges de l'année mentionnées au premier alinéa qu'ils supportent, la régularisation intervient l'année suivante au titre des charges dues pour cette année. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées au cours de l'année, elles sont ajoutées au montant des charges de l'année suivante.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article. »
IV. - Dans le premier alinéa du II de l'article 31 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, après la référence : « 16-1, », est insérée la référence : « 16-2, ».
Article 3 bis
I. - Après l'article 30 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, il est inséré un article 30-1 ainsi rédigé :
« Art. 30-1. - I. - Tout consommateur final d'électricité bénéficie d'un tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché pour le ou les sites pour lesquels il en fait la demande écrite à son fournisseur avant le 1er juillet 2007. Ce tarif est applicable de plein droit pour une durée de deux ans à la consommation finale des sites pour lesquels la contribution prévue au I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est acquittée.
« Ce tarif s'applique de plein droit aux contrats en cours à compter de la date à laquelle la demande est formulée. Il s'applique également aux contrats conclus postérieurement à la demande écrite visée au premier alinéa du présent I, y compris avec un autre fournisseur. Dans tous les cas, la durée de fourniture au niveau du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché ne peut excéder deux ans à compter de la date de la première demande d'accès à ce tarif pour chacun des sites de consommation.
« II. - Le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché, qui ne peut être inférieur au tarif réglementé de vente hors taxes applicable à un site de consommation présentant les mêmes caractéristiques, est établi par arrêté du ministre chargé de l'énergie, pris au plus tard un mois après la publication de la loi n° .... du .... relative au secteur de l'énergie. Ce tarif ne peut être supérieur de plus de 25 % au tarif réglementé de vente hors taxes applicable à un site de consommation présentant les mêmes caractéristiques. »
II. - Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 31 décembre 2008, un rapport sur la formation des prix sur le marché de l'électricité et dressant le bilan de l'application de la création du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché. Ce rapport analyse les effets de ce dispositif et envisage, s'il y a lieu, sa prolongation.
Article 3 ter
Après l'article 30 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, il est inséré un article 30-2 ainsi rédigé :
« Art. 30-2. - Les fournisseurs qui alimentent leurs clients au tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché en application de l'article 30-1 et qui établissent qu'ils ne peuvent produire ou acquérir les quantités d'électricité correspondantes à un prix inférieur à la part correspondant à la fourniture de ces tarifs bénéficient d'une compensation couvrant la différence entre le coût de revient de leur production ou le prix auquel ils se fournissent, pris en compte dans la limite d'un plafond fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie et calculé par référence aux prix de marché, et les recettes correspondant à la fourniture de ces tarifs.
« Le cas échéant, le coût de revient de la production d'un fournisseur est évalué en prenant en compte le coût de revient de la production des sociétés liées implantées sur le territoire national. Pour l'application de ces dispositions, deux sociétés sont réputées liées :
« - soit lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision,
« - soit lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les conditions définies au troisième alinéa, sous le contrôle d'une même tierce entreprise.
« Les charges correspondantes sont calculées sur la base d'une comptabilité appropriée tenue par les fournisseurs. Cette comptabilité, établie selon des règles définies par la Commission de régulation de l'énergie, est contrôlée aux frais des fournisseurs qui supportent ces charges par leur commissaire aux comptes ou, pour les régies, par leur comptable public. La Commission de régulation de l'énergie peut, aux frais de l'opérateur, faire contrôler cette comptabilité par un organisme indépendant qu'elle choisit. Le ministre chargé de l'énergie arrête le montant des charges sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie effectuée annuellement.
« La compensation de ces charges, au profit des fournisseurs qui les supportent, est assurée :
« 1° En utilisant les sommes collectées au titre de la contribution prévue au I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, une fois que la compensation des charges mentionnées à ce même article 5 a été effectuée.
« Pour l'application de l'alinéa précédent, les coûts supportés par les fournisseurs qui alimentent des consommateurs au tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché sont pris en compte par la Commission de régulation de l'énergie pour le calcul du montant de la contribution prévue au I du même article 5. Cette prise en compte, qui ne peut conduire à augmenter le montant de la contribution applicable à chaque kilowattheure à un niveau supérieur à celui applicable à la date de publication de la loi n° .... du .... relative au secteur de l'énergie, couvre ces coûts dans la limite d'un montant de 0,55 euro par mégawattheure qui s'ajoute au montant de la contribution calculée sans tenir compte des dispositions du présent 1° ;
« 2° Par une contribution due par les producteurs d'électricité exploitant des installations d'une puissance installée totale de plus de 2 000 mégawatts et assise sur le volume de leur production d'électricité d'origine nucléaire et hydraulique au cours de l'année précédente. Cette contribution ne peut excéder 1,3 euro par mégawattheure d'origine nucléaire ou hydraulique.
« Le montant de la contribution mentionnée au 2° est calculé de sorte que ce montant, ajouté aux sommes mentionnées au 1°, couvre les charges supportées par les opérateurs. Ce montant est arrêté par le ministre chargé de l'énergie sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie, effectuée annuellement.
« La contribution mentionnée au 2° est versée à la Caisse des dépôts et consignations.
« La Caisse des dépôts et consignations reverse quatre fois par an les sommes collectées au titre du 1° et du 2° aux opérateurs supportant les charges et retrace les opérations correspondantes dans un compte spécifique.
« Lorsque le montant des contributions collectées ne correspond pas au montant constaté des charges de l'année, la régularisation intervient l'année suivante au titre des charges dues pour cette année. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées au cours de l'année, elles sont ajoutées au montant des charges de l'année suivante.
« Les contributions sont recouvrées dans les mêmes conditions et sous les mêmes sanctions que la contribution mentionnée au I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article. »
Article 4
I. - L'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est ainsi rédigé :
« Art. 66. - I. - Un consommateur final non domestique d'électricité bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés au premier alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée pour la consommation d'un site pour lequel il n'use pas de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi, à la condition qu'il n'ait pas été fait précédemment usage de cette faculté, pour ce site, par ce consommateur ou par une autre personne.
« II. - Un consommateur final domestique d'électricité bénéficie, pour un site, des tarifs réglementés de vente d'électricité s'il n'a pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi.
« III. - Lorsqu'ils proposent une fourniture d'électricité ou une fourniture d'électricité et de gaz naturel pour le même site, les organismes en charge de la mission définie au 1° du III de l'article 2 de la même loi sont tenus de proposer une fourniture d'électricité à un tarif réglementé de vente aux consommateurs domestiques pour l'alimentation de leurs nouveaux sites de consommation ou des sites pour lesquels le consommateur n'a pas fait usage de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi.
« Lorsqu'ils proposent une fourniture d'électricité ou une fourniture d'électricité et de gaz naturel pour le même site, les organismes en charge de la mission définie au 1° du III de l'article 2 de la même loi sont tenus de proposer aux consommateurs non domestiques souscrivant une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères une fourniture d'électricité à un tarif réglementé de vente pour l'alimentation de leurs nouveaux sites de consommation ou des sites pour lesquels il n'a pas été fait précédemment usage de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi par le consommateur ou par une autre personne.
« À défaut de renonciation expresse et écrite du consommateur au tarif réglementé de vente d'électricité, le contrat conclu pour les offres mentionnées aux deux précédents alinéas, autres que celles faites au tarif réglementé de vente d'électricité, est nul et non avenu. Le consommateur est alors réputé n'avoir pas fait usage de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi. »
I bis. - Après l'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée, il est inséré un article 66-1 ainsi rédigé :
« Art. 66-1. - I. - Un consommateur final non domestique de gaz naturel bénéficie des tarifs réglementés de vente de gaz naturel mentionnés à l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie pour la consommation d'un site pour lequel il n'use pas de la faculté prévue à l'article 3 de la même loi, à la condition qu'il n'ait pas été fait précédemment usage de cette faculté, pour ce site, par ce consommateur ou par une autre personne.
« II. - Un consommateur final domestique de gaz naturel bénéficie, pour un site, des tarifs réglementés de vente de gaz naturel s'il n'a pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue à l'article 3 de la même loi.
« III. - Lorsqu'ils proposent une fourniture de gaz naturel ou une fourniture de gaz naturel et d'électricité pour le même site, Gaz de France et, dans leur zone de desserte, les distributeurs mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz ou au III de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales sont tenus de proposer une fourniture de gaz naturel à un tarif réglementé de vente aux consommateurs domestiques pour l'alimentation de leurs nouveaux sites de consommation ou des sites pour lesquels le consommateur n'a pas fait usage de la faculté prévue à l'article 3 de loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée.
« Lorsqu'ils proposent une fourniture de gaz naturel ou une fourniture de gaz naturel et d'électricité pour le même site, Gaz de France et, dans leur zone de desserte, les distributeurs mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée ou au III de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales sont tenus de proposer aux consommateurs non domestiques consommant moins de 30 000 kilowattheures de gaz naturel par an une fourniture de gaz naturel à un tarif réglementé de vente pour l'alimentation de leurs nouveaux sites de consommation ou des sites pour lesquels il n'a pas été fait précédemment usage de la faculté prévue à l'article 3 de loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée par le consommateur ou par une autre personne.
« À défaut de renonciation expresse et écrite du consommateur au tarif réglementé de vente de gaz naturel, le contrat conclu pour les offres mentionnées aux deux précédents alinéas, autres que celles faites au tarif réglementé de vente de gaz naturel, est nul et non avenu. Le consommateur est alors réputé n'avoir pas fait usage de la faculté prévue à l'article 3 de la même loi. ».
II. - Le I de l'article 67 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots et trois phrases ainsi rédigées : «, telle que définie par le II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts. Une société industrielle peut demander à la Commission de régulation de l'énergie l'arrêt de la facturation de la contribution au service public de l'électricité, pour un ou plusieurs sites de consommation, dès lors que les prévisions de cette société montrent qu'elle aurait déjà acquitté au titre de l'année considérée un montant égal ou supérieur au montant total plafonné dû au titre de l'année précédente. La régularisation intervient, le cas échéant, lorsque la valeur ajoutée de l'année considérée est connue. Toutefois, si le montant de cette régularisation est supérieur à 20 % du montant total réellement dû pour l'année, la société est redevable de la pénalité de retard mentionnée au I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du I du présent article, notamment les modalités de liquidation des droits par les services de la Commission de régulation de l'énergie. Ce décret entre en vigueur au 1er janvier 2006. »
Article 4 bis
Après le VI de l'article 22 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 précitée, il est inséré un VI bis ainsi rédigé :
« VI bis. - Les contrats de vente d'électricité conclus avec un consommateur final non domestique qui bénéficie d'un tarif réglementé de vente d'électricité, ainsi que les factures correspondantes, doivent mentionner l'option tarifaire souscrite. »
Article 5
La loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est ainsi modifiée :
1° Dans le c des 1° et 2° du II de l'article 18, les mots : « tarifs de vente aux clients non éligibles », dans le cinquième alinéa du III de l'article 18, les mots : « tarifs de vente de l'électricité aux clients non éligibles », et dans le neuvième alinéa du même III, les mots : « tarifs de vente aux consommateurs non éligibles » sont remplacés par les mots : « tarifs réglementés de vente » ;
2° Dans le premier alinéa de l'article 50, les mots : « client non éligible » sont remplacés par les mots : « client bénéficiant des tarifs réglementés de vente » et, dans le troisième alinéa du même article, les mots : « clients non éligibles » sont remplacés par les mots : « clients bénéficiant des tarifs réglementés de vente ».
Article 5 bis A
Après le cinquième alinéa (3°) de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° Les installations qui valorisent des énergies de récupération dans les limites et conditions définies au présent article, notamment au 2°. »
.
Article 5 ter
..........................................Supprimé...........................................
Article 5 quater
Après l'article 10-1 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, il est inséré un article 10-2 ainsi rédigé :
« Art. 10-2. - I. - Lorsqu'un contrat d'achat a été conclu en application des articles 10 et 50 pour l'achat d'électricité produite par une installation utilisant des techniques énergétiques performantes et située dans une zone de fragilité des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité, cette installation peut alimenter directement un consommateur industriel final situé dans la même zone.
« Cette alimentation est autorisée pendant les périodes présentant des risques de perturbation des réseaux publics concernés si elle permet d'éviter des investissements de renforcement de ces réseaux. L'électricité ne peut être vendue dans ces conditions que si un contrat d'îlotage entre l'exploitant de l'installation de production et le consommateur industriel a été conclu après accord du gestionnaire de réseau concerné, dont le refus ne peut être motivé que par des raisons liées à la sécurité, à la sûreté et au bon fonctionnement des réseaux, et information préalable de l'autorité administrative, de la Commission de régulation de l'énergie et de l'acquéreur de l'électricité produite par cette installation dans le cadre du contrat d'achat dont elle bénéficie. Le contrat d'achat est suspendu pour une durée égale à la durée de l'îlotage de l'installation de production et sa date d'échéance demeure inchangée.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent I.
« II. - Un consommateur industriel final qui n'a pas, préalablement à la mise en oeuvre des dispositions du I, exercé pour le site concerné les droits mentionnés à l'article 22, est réputé ne pas exercer pour ce site ces mêmes droits lorsqu'il est alimenté directement dans les conditions définies au I. »
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À LA DISTRIBUTION DE L'ÉLECTRICITÉ ET DU GAZ
Article 6
I. - L'article 13 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 13. - I. - La gestion d'un réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel desservant plus de 100 000 clients sur le territoire métropolitain continental est assurée par des personnes morales distinctes de celles qui exercent des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz naturel.
« II. - Sans préjudice des dispositions du sixième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales et de l'article 23-1 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel est notamment chargé, dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies mentionnés au I du même article L. 2224-31 :
« 1° De définir et de mettre en oeuvre les politiques d'investissement et de développement des réseaux de distribution ;
« 2° D'assurer la conception et la construction des ouvrages ainsi que la maîtrise d'oeuvre des travaux relatifs à ces réseaux, en informant annuellement l'autorité organisatrice de la distribution de leur réalisation ;
« 3° De conclure et de gérer les contrats de concession ;
« 4° D'assurer, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, l'accès à ces réseaux ;
« 5° De fournir aux utilisateurs des réseaux les informations nécessaires à un accès efficace aux réseaux, sous réserve des informations protégées par des dispositions législatives ou réglementaires ;
« 6° De réaliser l'exploitation et la maintenance de ces réseaux ;
« 7° D'exercer les activités de comptage pour les utilisateurs raccordés à son réseau, en particulier la fourniture, la pose, le contrôle métrologique, l'entretien et le renouvellement des dispositifs de comptage et d'assurer la gestion des données et toutes missions afférentes à l'ensemble de ces activités.
« III. - Par dérogation au II, un gestionnaire de réseau de distribution issu de la séparation juridique imposée par le I à un distributeur mentionné à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée a la responsabilité de l'exploitation, de la maintenance et, sous réserve des prérogatives des collectivités et établissements visés au sixième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, du développement du réseau de distribution, dans le but d'en assurer la sécurité, la fiabilité et l'efficacité dans la zone qu'il couvre. Il est également chargé de conclure et de gérer les contrats de concession, d'assurer dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires l'accès aux réseaux de distribution et de faire procéder aux comptages nécessaires à l'exercice de ses missions.
« IV. - Des décrets en Conseil d'État précisent les modalités d'application du présent article. »
II. - L'article 14 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 14. - I. - La séparation juridique prévue à l'article 13 entraîne le transfert à une entreprise juridiquement distincte :
« - soit des biens propres, autorisations, droits et obligations relatifs à l'activité de gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel, détenus le cas échéant en qualité de concessionnaire ou de sous-traitant du concessionnaire, notamment les contrats de travail et les droits et obligations relatifs à la gestion des réseaux de distribution résultant des contrats de concession prévus par les I et III de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ;
« - soit des biens de toute nature non liés à l'activité de gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel, avec les autorisations, droits et obligations qui y sont attachés.
« Le transfert n'emporte aucune modification des autorisations et contrats en cours, quelle que soit leur qualification juridique, et n'est de nature à justifier ni la résiliation, ni la modification de tout ou partie de leurs clauses, ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en résultent.
« Lors de la conclusion de nouveaux contrats ou lors du renouvellement ou de la modification des contrats en cours, les contrats de concession portant sur la fourniture d'électricité aux clients raccordés à un réseau de distribution qui n'exercent pas les droits mentionnés à l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et sur la gestion du réseau public de distribution sont signés conjointement par :
« 1° Les autorités organisatrices de la fourniture et de la distribution d'électricité ;
« 2° Le gestionnaire du réseau de distribution, pour la partie relative à la gestion du réseau public de distribution ;
« 3° Électricité de France ou le distributeur non nationalisé mentionné à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée, ou par sa filiale constituée en application de l'article 13 de la présente loi et du troisième alinéa du présent I, pour la partie relative à la fourniture d'électricité aux clients raccordés à un réseau de distribution qui n'exercent pas les droits mentionnés à l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée.
« Les contrats de concession en cours portant sur la fourniture d'électricité aux clients raccordés à un réseau de distribution qui n'exercent pas les droits mentionnés à l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et sur la gestion du réseau de distribution sont réputés signés conformément aux principes énoncés aux quatre alinéas précédents.
« Dans ce cadre, les protocoles conclus en application de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée entre les services gestionnaires du réseau public de distribution d'électricité et du réseau public de distribution de gaz naturel et les autres services d'Électricité de France et de Gaz de France acquièrent valeur contractuelle entre chacune de ces deux sociétés et les sociétés qu'elles créent en application de l'article 13 de la présente loi pour exercer leurs activités de gestion de réseaux de distribution d'électricité ou de gaz naturel. Il en est de même des protocoles conclus entre le service commun créé en application de l'article 5 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée et les autres services d'Électricité de France et de Gaz de France.
« II. - Les transferts mentionnés au I du présent article ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit, et notamment des droits de publicité foncière et des salaires des conservateurs des hypothèques. Ces transferts ne sont pas soumis au droit de préemption de l'article L. 213-1 du code de l'urbanisme. La formalité de publicité foncière des transferts de biens réalisés en application du présent article peut être reportée à la première cession ultérieure des biens considérés.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas en matière d'impôts sur les bénéfices des entreprises.
« III. - Les dispositions relatives aux transferts mentionnés aux I et II s'appliquent également :
« - lorsqu'un distributeur non nationalisé mentionné à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée et desservant moins de 100 000 clients choisit de mettre en oeuvre la séparation juridique mentionnée à l'article 13 de la présente loi ;
« - en cas de transformation du statut juridique d'un distributeur non nationalisé mentionné à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée, réalisée à l'occasion de la séparation juridique mentionnée à l'article 13 de la présente loi. »
III. - L'article 15 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est ainsi modifié :
1° A Dans le premier alinéa, après le mot : « métropolitain », est inséré le mot : « continental » ;
1° Dans la première phrase du septième alinéa, les mots : « ou ceux de la société à laquelle appartient le service gestionnaire du réseau », et les mots : « ou des prérogatives des dirigeants de l'entreprise intégrée » sont supprimés ;
2° Dans la deuxième phrase du septième alinéa, les mots : « les actionnaires ou les dirigeants de l'entreprise doivent, selon le cas, pouvoir notamment » sont remplacés par les mots : « le conseil d'administration ou de surveillance est composé en majorité de membres élus par l'assemblée générale. Le conseil d'administration ou de surveillance, statuant à la majorité de ses membres élus par l'assemblée générale » ;
3° Dans le huitième alinéa, le mot : « exercer » est remplacé par le mot : « exerce », et après le mot : « budget », sont insérés les mots : « ainsi que sur la politique de financement et d'investissement » ;
4° Dans le neuvième alinéa, les mots : « être consultés » sont remplacés par les mots : « est consulté », et les mots : « sur les réseaux, » sont supprimés ;
5° Au début du dixième alinéa, est inséré le mot : « peut », et dans le même alinéa, après les mots : « les statuts, aux », sont insérés les mots : « achats et » ;
6° Le dernier alinéa est supprimé.
IV. - Après l'article 15 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, il est inséré un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1. - Les sociétés gestionnaires de réseaux de distribution d'électricité ou de gaz naturel issues de la séparation juridique imposée à Électricité de France et à Gaz de France par l'article 13 sont régies, sauf disposition législative contraire, par les lois applicables aux sociétés anonymes.
« Les sociétés mentionnées au premier alinéa, dès lors que la majorité du capital de leur société mère est détenue directement ou indirectement par l'État, sont soumises à la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public sans attendre l'expiration du délai mentionné au 4 de l'article 1er de ladite loi. Pour l'application de l'article 6 de la même loi, le conseil d'administration ou de surveillance ne peut comporter plus de deux représentants de l'État, nommés par décret. »
V. - L'article 23 bis de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La condition de transfert de l'ensemble des contrats de fourniture d'électricité ou de gaz des clients qui ont exercé leur droit à l'éligibilité, définie à l'alinéa précédent, n'est pas applicable aux distributeurs non nationalisés desservant plus de 100 000 clients sur le territoire métropolitain lors de la création d'une société commerciale ou de l'entrée dans le capital d'une société commerciale existante. »
Article 6 bis
L'article 8 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La société mentionnée à l'article 7 peut également participer à l'identification et à l'analyse des actions tendant à maîtriser la demande d'électricité, dès lors que ces actions sont de nature à favoriser l'équilibre des flux d'électricité sur le réseau public de transport et une gestion efficace de ce dernier. »
Article 6 ter
I. - Le dernier alinéa de l'article 9 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est complété par les mots : «, et notamment des droits de publicité foncière et des salaires des conservateurs des hypothèques ».
II. - Les dispositions du I sont applicables aux opérations visées à l'article 9 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée et réalisées à compter de la date de publication de la présente loi.
Article 6 quater
L'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa du I, les mots : « et aux tarifs d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution » sont remplacés par les mots : «, aux tarifs d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution et aux tarifs des prestations annexes réalisées sous le monopole des gestionnaires de ces réseaux » ;
2° La première phrase du troisième alinéa du II est complétée par les mots : « et une partie des coûts des prestations annexes réalisées sous le monopole des gestionnaires de ces réseaux » ;
3° Dans la première phrase du premier alinéa du III, après le mot : « distribution », sont insérés les mots : « ainsi que les propositions motivées de tarifs des prestations annexes réalisées sous le monopole des gestionnaires de ces réseaux ».
.
Article 7 bis
Après le onzième alinéa de l'article 1er de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - conformément à l'obligation de service public relative au développement équilibré du territoire mentionnée à l'article 16 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, l'amélioration de la desserte en gaz naturel du territoire, définie en concertation avec le représentant des autorités visées à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. »
Article 8 bis
I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 2224-35 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Un arrêté des ministres chargés des communications électroniques et de l'énergie détermine la proportion des coûts de terrassement pris en charge par l'opérateur de communications électroniques. »
II. - L'arrêté prévu au I intervient au plus tard six mois après la publication de la présente loi.
Article 8 ter
Le dixième alinéa de l'article 16 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par les mots : «, en particulier l'application de mesures d'économies d'énergie ».
..
Article 9 bis A
Le deuxième alinéa du IV de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, lorsque les attributions prévues par le présent article ne sont, pour les réseaux publics de distribution d'électricité, exercées ni par le département ni, au terme d'un délai d'un an suivant la date de publication de la loi n°.... du .... relative au secteur de l'énergie, par un unique syndicat de communes ou syndicat mixte sur l'ensemble du territoire départemental ou sur un ensemble de territoires départementaux contigus, le ou les représentants de l'État dans le ou les départements engagent, dans le cadre des dispositions prévues au 2° du I de l'article L. 5211-5, la procédure de création d'un syndicat de communes ou d'un syndicat mixte pour l'exercice de ces compétences sur l'ensemble du territoire départemental ou sur un ensemble de territoires départementaux contigus. À défaut d'autorité organisatrice unique sur le territoire départemental, l'évaluation de la qualité de l'électricité réalisée en application de l'article 21-1 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est transmise par le ou les gestionnaires de réseaux publics concernés à une conférence, lorsque celle-ci a été constituée entre l'ensemble des autorités organisatrices du département dans les conditions prévues par l'article L. 5221-2. »
Article 9 bis B
L'avant-dernier alinéa de l'article L. 2333-3 du code général des collectivités territoriales est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« La puissance souscrite prise en compte est celle qui figure :
« - dans le contrat de fourniture d'un consommateur bénéficiant des tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés à l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;
« - ou dans le contrat d'accès au réseau conclu par un consommateur qui a exercé les droits mentionnés à l'article 22 de la même loi ;
« - ou dans le contrat conclu par le fournisseur, pour le compte d'un consommateur, en application de l'article 23 de la même loi. »
Article 9 bis C
I. - Après l'article L. 5711-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5711-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 5711-4. - En matière de gestion de l'eau, d'alimentation en eau potable, d'assainissement collectif ou non collectif, de collecte ou d'élimination des déchets ménagers et assimilés, ou de distribution d'électricité ou de gaz naturel, un syndicat mixte relevant du présent titre peut adhérer à un autre syndicat mixte défini au présent titre ou institué en application de l'article L. 5721-2, suivant la procédure définie à l'article L. 5211-18. L'adhésion d'un syndicat mixte à un autre syndicat mixte est sans incidence sur les règles qui régissent ce dernier.
« Lorsque le syndicat mixte qui adhère à un autre syndicat mixte lui transfère la totalité des compétences qu'il exerce, l'adhésion entraîne sa dissolution.
« Les membres du syndicat mixte dissous deviennent de plein droit membres du syndicat mixte qui subsiste.
« Sauf disposition statutaire contraire, il leur est attribué au sein du comité syndical un nombre de sièges identique à celui dont disposait le syndicat mixte dissous.
« L'ensemble des biens, droits et obligations du syndicat mixte dissous sont transférés au syndicat mixte auquel il adhère. Celui-ci est substitué de plein droit, pour l'exercice de ses compétences, au syndicat mixte dissous dans toutes ses délibérations et tous ses actes.
« Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur échéance, sauf accord contraire des parties. Les cocontractants sont informés de la substitution de personne morale par le syndicat mixte qui subsiste. La substitution n'entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant.
« Le transfert est effectué à titre gratuit et ne donne lieu au paiement d'aucune indemnité, droit, taxe, salaire ou honoraires.
« L'ensemble des personnels du syndicat mixte dissous est réputé relever du syndicat mixte auquel il adhère dans les conditions de statut et d'emploi qui sont les siennes.
« Les transferts de compétences s'effectuent dans les conditions financières et patrimoniales prévues aux quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 5211-17. »
II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 5721-2 du même code, après les mots : « des communes, », sont insérés les mots : « des syndicats mixtes définis à l'article L. 5711-1 ou à l'article L. 5711-4, ».
Article 9 bis D
Les autorités concédantes de la distribution de gaz naturel peuvent apporter leur contribution financière aux gestionnaires des réseaux de distribution pour étendre les réseaux de gaz naturel sur le territoire des concessions déjà desservies partiellement ou pour créer de nouvelles dessertes de gaz naturel sur le territoire des communes non encore desservies par un réseau de gaz naturel, lorsque le taux de rentabilité de cette opération est inférieur à un niveau fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie. En cas de projet de création d'une nouvelle desserte, l'autorité concédante rend public le niveau de la contribution financière envisagée.
Articles 9 ter et 9 quater
................................Supprimés...........................
Article 9 quinquies
Après l'article L. 1321-8 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1321-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 1321-9. - Par dérogation à l'article L. 1321-2, lorsqu'un syndicat de communes est compétent en matière d'éclairage public, les communes membres peuvent effectuer des travaux de maintenance sur tout ou partie du réseau d'éclairage public mis à disposition et dont elles sont propriétaires. »
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES AU CAPITAL DE GAZ DE FRANCE ET AU CONTRÔLE DE L'ÉTAT
Article 10
I. - L'article 24 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 24. - Électricité de France et Gaz de France sont des sociétés anonymes. L'État détient plus de 70 % du capital d'Électricité de France et plus du tiers du capital de Gaz de France. »
II. - Après l'article 24 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, sont insérés les articles 24-1 et 24-2 ainsi rédigés :
« Art. 24-1. - En vue de préserver les intérêts essentiels de la France dans le secteur de l'énergie, et notamment la continuité et la sécurité d'approvisionnement en énergie, un décret prononce la transformation d'une action ordinaire de l'État au capital de Gaz de France en une action spécifique régie, notamment en ce qui concerne les droits dont elle est assortie, par les dispositions de l'article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations.
« Art. 24-2. - Le ministre chargé de l'énergie désigne auprès de Gaz de France, ou de toute entité venant aux droits et obligations de Gaz de France, et des sociétés issues de la séparation juridique imposée à Gaz de France par les articles 5 et 13 de la présente loi, un commissaire du Gouvernement qui assiste, avec voix consultative, aux séances du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de la société, et de ses comités, et peut présenter des observations à toute assemblée générale. »
III. - La liste annexée à la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 de privatisation est complétée par les mots : « Gaz de France SA ».
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TITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES AUX CONTRATS DE FOURNITURE D'ÉLECTRICITÉ OU DE GAZ NATUREL
Article 13
I. - Le chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation est complété par une section 12 ainsi rédigée :
« Section 12
« Contrats de fourniture d'électricité ou de gaz naturel
« Art. L. 121-86. - Les dispositions de la présente section s'appliquent aux contrats souscrits par un consommateur avec un fournisseur d'électricité ou de gaz naturel.
« Art. L. 121-87. - L'offre de fourniture d'électricité ou de gaz naturel précise, dans des termes clairs et compréhensibles, les informations suivantes :
« 1° L'identité du fournisseur, l'adresse de son siège social et son numéro d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou tout document équivalent pour les sociétés situées hors de France et pour les opérateurs qui ne sont pas inscrits au registre du commerce et des sociétés ;
« 1° bis Le numéro de téléphone et, le cas échéant, l'adresse électronique du fournisseur ;
« 2° La description des produits et des services proposés ;
« 3° Les prix de ces produits et services à la date d'effet du contrat ainsi que, le cas échéant, les conditions d'évolution de ces prix ;
« 3° bis La mention du caractère réglementé ou non des prix proposés et de l'irréversibilité de la renonciation aux tarifs réglementés de vente pour un site donné pour la personne l'exerçant ;
« 4° La durée du contrat et ses conditions de renouvellement ;
« 5° La durée de validité de l'offre ;
« 6° Le délai prévisionnel de fourniture de l'énergie ;
« 7° Les modalités de facturation et les modes de paiement proposés, notamment par le biais d'internet ;
« 8° Les moyens, notamment électroniques, d'accéder aux informations relatives à l'accès et à l'utilisation des réseaux publics de distribution, en particulier la liste des prestations techniques et leurs prix, les conditions d'indemnisation et les modalités de remboursement applicables dans l'hypothèse où le niveau de qualité de la fourniture d'énergie ou la continuité de la livraison ne sont pas atteints ;
« 9° Les cas d'interruption volontaire de la fourniture d'énergie, sans préjudice des dispositions de l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles ;
« 10° Les conditions de la responsabilité contractuelle du fournisseur et du gestionnaire du réseau de distribution ;
« 11° L'existence du droit de rétractation prévu aux articles L. 121-20 et L. 121-25 du présent code ;
« 12° Les conditions et modalités de résiliation du contrat ;
« 13° Les modes de règlement amiable des litiges ;
« 14° Les conditions d'accès à la tarification spéciale «produit de première nécessité» pour l'électricité et au tarif spécial de solidarité pour le gaz naturel.
« Ces informations sont confirmées au consommateur par tout moyen préalablement à la conclusion du contrat. À sa demande, elles lui sont également communiquées par voie électronique ou postale.
« Art. L. 121-88. - Le contrat souscrit par un consommateur avec un fournisseur d'électricité ou de gaz naturel est écrit ou disponible sur un support durable. À la demande du consommateur, il lui est transmis à son choix par voie électronique ou postale. Outre les informations mentionnées à l'article L. 121-87, il comporte les éléments suivants :
« 1° La date de prise d'effet du contrat et sa date d'échéance s'il est à durée déterminée ;
« 2° Les modalités d'exercice du droit de rétractation prévu aux articles L. 121-20 et L. 121-25 ;
« 3° Les coordonnées du gestionnaire de réseau auquel est raccordé le client ;
« 4° Le débit ou la puissance souscrits, ainsi que les modalités de comptage de l'énergie consommée ;
« 5° Le rappel des principales obligations légales auxquelles les consommateurs sont soumis concernant leurs installations intérieures.
« Les dispositions du présent article s'appliquent quel que soit le lieu et le mode de conclusion du contrat.
« Art. L. 121-89. - L'offre du fournisseur comporte au moins un contrat d'une durée d'un an.
« En cas de changement de fournisseur, le contrat est résilié de plein droit à la date de prise d'effet d'un nouveau contrat de fourniture d'énergie. Dans les autres cas, la résiliation prend effet à la date souhaitée par le consommateur et, au plus tard, trente jours à compter de la notification de la résiliation au fournisseur.
« Le fournisseur ne peut facturer au consommateur que les frais correspondant aux coûts qu'il a effectivement supportés, directement ou par l'intermédiaire du gestionnaire de réseau, au titre de la résiliation et sous réserve que ces frais aient été explicitement prévus dans l'offre. Ceux-ci doivent être dûment justifiés.
« Aucun autre frais ne peut être réclamé au consommateur au seul motif qu'il change de fournisseur.
« Art. L. 121-90. - Tout projet de modification par le fournisseur des conditions contractuelles est communiqué au consommateur par voie postale ou, à sa demande, par voie électronique, au moins un mois avant la date d'application envisagée.
« Cette communication est assortie d'une information précisant au consommateur qu'il peut résilier le contrat sans pénalité, dans un délai maximal de trois mois à compter de sa réception.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux modifications contractuelles imposées par la loi ou le règlement.
« Art. L. 121-91. - Toute offre de fourniture d'électricité ou de gaz permet, au moins une fois par an, une facturation en fonction de l'énergie consommée.
« Les factures de fourniture de gaz naturel et d'électricité sont présentées dans les conditions fixées par un arrêté du ministre chargé de la consommation et du ministre chargé de l'énergie pris après avis du Conseil national de la consommation.
« Art. L. 121-92. - Le fournisseur est tenu d'offrir au client la possibilité de conclure avec lui un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité ou de gaz naturel. Ce contrat reproduit en annexe les clauses réglant les relations entre le fournisseur et le gestionnaire de réseau, notamment les clauses précisant les responsabilités respectives de ces opérateurs.
« Outre la prestation d'accès aux réseaux, le consommateur peut, dans le cadre du contrat unique, demander à bénéficier de toutes les prestations techniques proposées par le gestionnaire du réseau. Le fournisseur ne peut facturer au consommateur d'autres frais que ceux que le gestionnaire du réseau lui a imputés au titre d'une prestation.
« Art. L. 121-92-1 et art. L. 121-93. - Supprimés.
« Art. L. 121-94. - Les fournisseurs doivent adapter la communication des contrats et informations aux handicaps des consommateurs.
« Art. L. 121-95. - Les dispositions de la présente section sont d'ordre public. »
I bis. - Supprimé.
II. - Après le 3° du I de l'article L. 141-1 du code de la consommation, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis La section 12 ?Contrats de fourniture d'électricité ou de gaz naturel» du chapitre Ier du titre II du livre Ier ; ?.
III. - L'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du VII est supprimé ;
2° Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :
« VIII. - Dans les conditions fixées par l'article L. 121-92 du code de la consommation, les consommateurs domestiques ont la possibilité de conclure un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution d'électricité. »
IV. - L'article 3 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les conditions fixées par l'article L. 121-92 du code de la consommation, les consommateurs domestiques ont la possibilité de conclure un contrat unique portant sur la fourniture et la distribution de gaz naturel. »
V. - Dans la première phrase de l'article 30 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, après les mots : « du 10 février 2000 précitée et », les mots : « au dernier » sont remplacés par les mots : « à l'avant-dernier ».
Article 13 bis
Les dispositions de l'article L. 121-87 à l'exception de ses 11° et 14°, de l'article L. 121-88 à l'exception de son 2° et des articles L. 121-90 à L. 121-94 du code de la consommation sont applicables aux contrats conclus entre les fournisseurs d'électricité et les consommateurs finals non domestiques souscrivant une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères et aux contrats conclus entre les fournisseurs de gaz naturel et les consommateurs finals non domestiques consommant moins de 30 000 kilowattheures par an. Ces dispositions sont d'ordre public.
TITRE V
DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES
Article 14
Les dispositions des I, II et III de l'article 1er, du I et du I bis de l'article 4 et des articles 2, 2 octies, 5, 13 et 13 bis entrent en vigueur le 1er juillet 2007.
Les dispositions du I A de l'article 1er entrent en vigueur à la date du transfert d'actifs mentionné à l'article 14 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée.
..
Article 16
Lorsqu'une des sociétés gestionnaires de réseaux de distribution d'électricité ou de gaz naturel mentionnées à l'article 15-1 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est soumise à la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, son conseil d'administration ou de surveillance siège valablement dans l'attente de l'élection des représentants des salariés qui doit intervenir dans un délai de six mois à compter du transfert prévu par l'article 14 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée.
Tant que la société gestionnaire de réseaux de transport de gaz naturel issue de la séparation juridique imposée à Gaz de France par l'article 5 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est soumise à la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 précitée, son conseil d'administration ou de surveillance ne peut comporter plus de deux représentants de l'État nommés par décret.
Article 16 bis A
Le dernier alinéa de l'article 30-6 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est supprimé.
Article 16 ter
L'article L. 1115-1-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après les mots : « distribution d'eau potable et d'assainissement », sont insérés les mots : « ou du service public de distribution d'électricité et de gaz » ;
2° Sont ajoutés les mots : « et de la distribution publique d'électricité et de gaz ».
Article 16 quater
Le I de l'article 32 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le fait de procéder à des travaux à proximité d'un ouvrage de transport ou de distribution de gaz régulièrement identifié dans les cartes mentionnées à l'article 22-1 sans avoir adressé au préalable à l'exploitant de l'ouvrage concerné le dossier de déclaration d'intention de commencement de travaux constitue un délit au sens de l'article 121-3 du code pénal et est puni d'une amende de 25 000 euros.
« L'auteur d'une atteinte à un ouvrage de transport ou de distribution de gaz de nature à mettre en danger la sécurité des personnes et des installations ou la protection de l'environnement a l'obligation de la déclarer à l'exploitant de l'ouvrage. Le fait d'omettre cette déclaration est puni d'une peine de six mois d'emprisonnement et d'une amende de 80 000 euros. En cas de récidive, ces peines sont portées au double. »
Article 16 quinquies
Après le V de l'article 14 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée, il est inséré un V bis ainsi rédigé :
« V bis - Dans les conditions définies au présent V bis, le ministre chargé de l'énergie peut sanctionner les manquements qu'il constate, de la part des personnes mentionnées au I, aux dispositions du présent article ou aux dispositions réglementaires prises pour son application.
« Le ministre met l'intéressé en demeure de se conformer dans un délai déterminé aux dispositions du présent article ou aux dispositions prises pour son application. Il peut rendre publique cette mise en demeure.
« Lorsque l'intéressé ne se conforme pas dans les délais fixés à cette mise en demeure, le ministre peut prononcer à son encontre une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement, à la situation de l'intéressé, à l'ampleur du dommage et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 2 % du chiffre d'affaires hors taxes du dernier exercice clos, porté à 4 % en cas de nouvelle violation de la même obligation.
« Les sanctions sont prononcées après que l'intéressé a reçu notification des griefs et a été mis à même de consulter le dossier et de présenter ses observations, assisté, le cas échéant, par une personne de son choix.
« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine.
« L'instruction et la procédure devant le ministre sont contradictoires.
« Le ministre ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.
« Les décisions sont motivées, notifiées à l'intéressé et publiées au Journal officiel. Elles peuvent faire l'objet d'un recours de pleine juridiction et d'une demande de sursis à exécution devant le Conseil d'État. Les demandes de sursis ont un caractère suspensif. »
Article 17
Les I sexies, I septies, II et III de l'article 1er, les articles 2 bis, 2 quater A, 2 quater B, 2 quater, 2 sexies, 2 octies, 3 bis, 3 ter, 4, 4 bis, 5 bis A, 5 quater, le III de l'article 13 et l'article 14 de la présente loi ainsi que l'article 50-1 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 précitée sont applicables à Mayotte.
M. le président. Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ? ...
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.
M. Dominique Mortemousque. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons adopter dans les prochaines minutes les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif au secteur de l'énergie.
Nos débats parlementaires, longs, nourris et, finalement, relativement paisibles touchent ainsi à leur fin. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Gérard Le Cam. Très paisibles à l'UMP !
M. Daniel Raoul. Eh oui, ils ne sont pas intervenus !
M. Dominique Mortemousque. Le temps du Parlement touche à sa fin, pour reprendre une expression chère à Thierry Breton.
Ce temps faisait suite, rappelons-le, au temps de la négociation, qui a duré plusieurs mois, et il précède le temps des actionnaires, GDF réunissant son conseil d'administration en fin de semaine.
Parallèlement, le dossier a fait son cheminement au niveau européen, et c'est le 14 novembre que la Commission européenne rendra son avis définitif sur le projet de fusion des deux groupes Suez et GDF.
Par ce texte, nous allons adopter, dans le plein respect de nos engagements européens, l'ouverture complète des marchés électrique et gazier à compter du 1er juillet 2007.
Cette ouverture, contrairement à ce que certains veulent faire croire, est encadrée.
En effet, en même temps que l'ouverture du marché, nous voterons également la création d'un tarif social du gaz, le maintien des tarifs réglementés pour les ménages qui le souhaitent, et une meilleure information des consommateurs.
L'autre volet principal de ce texte porte sur l'ouverture du capital de GDF.
Sur ce dernier point - c'est peut-être celui qui a suscité le plus d'inquiétudes -, je tiens à souligner plusieurs éléments qui doivent rassurer entièrement nos concitoyens.
MM. Michel Sergent et Daniel Raoul. Pour être rassurés, ils vont être rassurés !
M. Dominique Mortemousque. Tout d'abord, l'État restera le premier actionnaire avec plus d'un tiers du capital, au-delà de la minorité de blocage. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Il bénéficiera ensuite d'une action spécifique qui lui permettra de s'opposer à toute décision contraire aux intérêts stratégiques de la France.
Il continuera par ailleurs de détenir ses prérogatives en matière de définition des missions de service public et de contrôle de leur exécution, d'organisation du marché et de mise en place du cadre réglementaire.
S'agissant plus particulièrement du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché, nous notons avec satisfaction que c'est la proposition du Sénat qui a été retenue lors des travaux de la commission mixte paritaire, tant dans ses modalités d'application que dans son financement.
Cette disposition permettra, de toute évidence, de venir en aide aux entreprises qui ont fait valoir leur éligibilité tout en respectant le droit européen.
Enfin, à titre personnel, je ne peux que me féliciter de l'adoption par la commission mixte paritaire de l'article 5 quater, qui a pour origine un amendement que j'avais déposé avec mes collègues Jackie Pierre et Bernard Murat et que le Sénat avait voté en octobre dernier.
Le dispositif proposé doit permettre de garantir à des entreprises locales, souvent isolées des grands réseaux d'acheminement de l'électricité, une alimentation en énergie régulière en recourant, momentanément, à une production d'énergie décentralisée. C'est le seul moyen, pour ces entreprises, de conserver leurs emplois et de participer pleinement au développement de nos territoires ruraux.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, notre objectif, au travers de ce texte, est de permettre à nos entreprises de devenir des groupes industriels cohérents de dimension européenne afin de sauvegarder nos emplois et nos savoir-faire, de devenir des acteurs majeurs sur un marché de l'énergie désormais mondialisé et de plus en plus intégré, tout en assurant la pérennité du service public.
Je tiens à remercier M. Ladislas Poniatowski, qui a su écouter tous les partenaires...
M. Jean-François Le Grand. Très bien !
M. Dominique Mortemousque. ...et a essayé de trier le bon grain de l'ivraie en dessinant une voie solide pour l'avenir.
Le groupe UMP votera donc ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE. -Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 42 :
Nombre de votants | 327 |
Nombre de suffrages exprimés | 308 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 155 |
Pour l'adoption | 170 |
Contre | 138 |
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas brillant !
M. le président. Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Michèle André.)
PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Participation et actionnariat salarié
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié (nos 15, 46, 35, 34).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Madame la présidente, madame le rapporteur, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, avec Christine Lagarde et Gérard Larcher, nous sommes très heureux de vous présenter, cet après-midi, le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
Tout d'abord, je tiens à remercier chaleureusement Isabelle Debré du travail très approfondi qu'elle a réalisé. Avec Gérard Larcher, nous avons beaucoup travaillé ensemble, et je me félicite de la qualité des discussions que nous avons eues. Je remercie également les rapporteurs pour avis, notamment Serge Dassault, qui s'est mobilisé sur un sujet qui, à juste titre, le passionne.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je précise que Christine Lagarde sera présente tout au long des débats tandis que je devrai me partager entre le Sénat et l'Assemblée nationale, laquelle examine actuellement, vous le savez, le projet de loi de finances pour 2007.
S'agissant du texte qui nous occupe aujourd'hui, nous avons tous dressé le même constat : la participation appartient déjà à l'histoire, mais elle reste d'actualité.
En effet, le nombre de salariés bénéficiant d'un dispositif d'épargne salariale n'a jamais été aussi élevé qu'en 2006, et chacun sait que ce dispositif est aussi favorable à l'épanouissement du salarié qu'à celui de l'entreprise. La participation demeure donc une idée neuve dans une économie moderne.
Pour autant, ne tombons pas dans un conservatisme béat, car les relations sociales ont évolué depuis 1967. Ainsi, le rythme économique et financier a changé, l'internationalisation de nos entreprises est sans commune mesure avec celle des années soixante. Le droit de la participation devait donc être modernisé !
Avec ce texte, nous avons la volonté de simplifier les mécanismes existants, de les développer et de les adapter aux réalités des entreprises d'aujourd'hui. En clair, ce projet de loi vise à moderniser la participation sans la dénaturer.
Une des qualités premières de ce texte est de réaffirmer les grands principes de la participation, en maintenant la distinction entre participation et intéressement, en prévoyant le blocage de la participation à cinq ans, et en obligeant les entreprises de plus de cinquante salariés à mettre en place un dispositif de participation, toutes mesures qui vont évidemment dans le bon sens.
Loin de marquer une fracture, ce projet de loi s'inscrit dans la continuité des textes adoptés par les précédentes majorités, car je ne vois pas la participation et l'épargne salariale comme des sujets de discorde entre la droite et la gauche.
M. Roland Muzeau. Ah si !
M. Thierry Breton, ministre. Sur ces bases solides, le débat que nous engageons aujourd'hui est donc l'aboutissement d'un long travail collectif et coopératif, qui a été conçu comme un moteur de cohésion sociale et de dynamisme économique.
Comme vous le soulignez à juste titre dans votre rapport, madame le rapporteur, le projet de loi entend la participation dans son acception la plus large, c'est-à-dire la participation à la vie de l'entreprise. Ce projet ne concerne pas seulement la participation des salariés aux résultats, il englobe aussi l'intéressement des salariés aux performances de l'entreprise, la participation à son capital ainsi qu'à sa gestion.
Je suis heureux de constater que Jean-Pierre Raffarin est présent parmi nous, car il s'est beaucoup impliqué sur ce sujet à titre personnel et en tant que Premier ministre.
Le processus de conception qui a permis d'aboutir à un tel résultat est le reflet de ces objectifs ambitieux.
Je vous exposerai d'abord, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que j'ai souhaité faire dans ce projet de loi en tant que ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avant de revenir sur quelques éléments significatifs, qui ne manqueront pas d'être abordés au cours du débat.
Tout d'abord, j'ai souhaité que ce texte soit un véritable instrument de réussite économique et sociale pour l'avenir de notre pays. Épargner plus dans le cadre de l'entreprise constitue un bon signal pour le pouvoir d'achat du salarié, pour l'accroissement de sa solvabilité. Toutefois, il faut maintenir un juste équilibre, car participation n'équivaut pas salaire ; c'est ce que je retiens des réunions du Conseil supérieur de la participation.
Au demeurant, quand bien même la participation est différée, elle constitue évidemment un élément de rémunération. Je souhaite que les mesures visant à l'étendre contribuent à dissiper le sentiment de baisse du pouvoir d'achat qu'éprouvent ici ou là les Français. Mais ce n'est qu'un des éléments de la politique d'ensemble que je mène au sein du gouvernement, une politique visant à redonner aux Françaises et aux Français le pouvoir d'achat auquel ils peuvent légitimement prétendre.
Par le passé, plusieurs raisons ont pu freiner le pouvoir d'achat.
Sans vouloir polémiquer, la première d'entre elles, et la plus évidente, c'est la mise en oeuvre des 35 heures.
M. Roland Muzeau. Ben voyons !
M. Thierry Breton, ministre. Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'on avait explicitement intégré un ralentissement des salaires pour compenser la perte de productivité mensuelle ! Ce sont les concepteurs eux-mêmes, j'allais même dire les théoriciens, des 35 heures qui l'avaient clairement indiqué. Et c'est exactement ce qui s'est passé entre 2002 et 2003.
C'est la raison pour laquelle les gouvernements de Jean-Pierre Raffarin et de Dominique de Villepin ont fait du pouvoir d'achat et du revenu une de leurs préoccupations majeures, et ce avec succès. En effet, depuis 2002, grâce à l'action vigoureuse de Jean-Pierre Raffarin, fortement soutenu par la majorité parlementaire, et au combat qu'il a mené avec une détermination sereine, la consommation est devenue le pilier de la croissance.
M. Roland Muzeau. Tous coupables !
M. Thierry Breton, ministre. Je tiens à rappeler quelques-unes des mesures significatives qui ont contribué à redonner du pouvoir d'achat aux Français : tout d'abord, l'aménagement des 35 heures, qui était indispensable ; ensuite, l'augmentation du SMIC de près de 25 % en cinq ans, ce qui correspond quasiment à un treizième mois ; l'augmentation du montant de la prime pour l'emploi, qui sera passé, pour un salarié au SMIC à temps plein, de 467 euros à 948 euros, l'an prochain, soit, là encore, un vrai treizième mois, sans oublier l'effort particulier sur le travail à temps partiel.
Non seulement ces mesures ont permis de traverser une passe difficile, mais les chiffres montrent, depuis l'été 2005, une accélération du pouvoir d'achat, avec une augmentation de 2,4 % cette année, après une augmentation de 1,3 % en 2005, selon l'INSEE, augmentation qui devrait atteindre 2,8 % environ l'an prochain, selon les services de mon ministère.
Ce projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié est donc la suite logique des mesures qui ont été prises.
Par ailleurs, j'ai présenté ce matin, devant le conseil des ministres, un projet de loi en faveur des consommateurs tendant à apporter des améliorations concrètes à la vie quotidienne des consommateurs de notre pays, afin de tenir compte de l'évolution des modes de consommation, lesquels sont d'ailleurs de plus en plus tournés vers les services.
Toutefois, l'objectif premier du texte que vous allez examiner aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs, est bien de développer la participation et l'actionnariat salarié dans les entreprises de notre pays.
Le développement de ces instruments d'épargne salariale est, à mes yeux, l'un des plus puissants moyens de nature à faire en sorte que les salariés des entreprises de notre pays puissent participer effectivement au fonctionnement de notre économie. C'est bien dans cette perspective que nous voulons favoriser la participation des salariés à la vie de leur entreprise. En étant actionnaires, les salariés deviennent plus décideurs dans l'entreprise.
Ainsi, nous allons donner aux salariés la possibilité de siéger au sein des conseils d'administration ou des conseils de surveillance, dès lors que 3 % du capital est détenu par des actionnaires salariés. Certains administrateurs seront des salariés actionnaires et ils seront élus - nous y tenons - comme tous les autres administrateurs par l'assemblée générale, mais sur proposition des actionnaires salariés. Ce seront donc des administrateurs à part entière, disposant de droits de vote comme les autres administrateurs et soumis, comme eux, aux obligations liées au secret des délibérations.
Nous avons fait ce choix, et je considère que c'est un bon choix. C'est, encore une fois, un moyen de rapprocher les Français des entreprises et de faire preuve de pédagogie économique.
En effet, les mesures présentées dans ce texte sont aussi un formidable levier pour la pédagogie économique. C'est, du reste, l'un des principaux chantiers que j'ai entrepris, en tant que ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est dans cet esprit que j'ai récemment mis en place le CODICE, le Conseil pour la diffusion de la culture économique. Ces approches sont évidemment complémentaires et cohérentes.
À cet égard, les amendements proposés par vos rapporteurs visant à encourager la formation des salariés à ces questions vont dans le bon sens. Allant encore au-delà des propositions des commissions de l'Assemblée nationale, que j'ai soutenues et qui ont été adoptées, vos propositions s'inscrivent dans le droit-fil de la politique économique du Gouvernement, madame le rapporteur, et vont dans la direction tracée par le Président de la République, le 14 juillet dernier.
L'objectif que nous poursuivons est de créer une plus grande motivation des salariés et davantage de richesses pour tous. Nous avons l'ambition de modifier les comportements, à la fois ceux des employeurs et ceux des salariés et, par voie de conséquence, d'une façon plus générale, le fonctionnement des entreprises.
En outre, plus globalement, nous souhaitons que les montants mobilisés dans le cadre de la participation soient accrus.
Pour créer cette dynamique nouvelle, nous proposons une mesure très novatrice, visant à accorder un avantage fiscal important aux entreprises qui distribueront des actions gratuites à tous leurs salariés ; je dis bien à tous les salariés.
Ce nouveau mécanisme est de nature à engendrer une diffusion rapide et large de l'actionnariat salarié. C'est aussi une mesure de justice sociale !
Au total, monsieur Dassault, je reprends bien volontiers à mon compte la description que vous faites dans votre rapport des quatre besoins des salariés que ce texte contribue à satisfaire.
En premier lieu, vous indiquez le besoin d'être, qui implique à la fois la reconnaissance du travail et la capacité à améliorer naturellement le processus industriel ou de service auquel les salariés participent.
En deuxième lieu, vous soulignez le besoin de savoir, qui doit nous conduire à accorder une importance majeure à la formation des salariés à la gestion de l'entreprise.
En troisième lieu, vous insistez sur le besoin de pouvoir, qui justifie qu'il participe, en tant qu'actionnaire notamment, aux décisions dans l'entreprise.
Enfin, en quatrième lieu, vous mettez en évidence le besoin d'avoir, qui justifie les mécanismes permettant de mieux associer les salariés aux bénéfices des entreprises.
Quels sont les autres enjeux de ce débat ?
D'abord, les amendements déposés sur ce texte nous amèneront à discuter de façon approfondie des questions d'épargne.
Vous le savez, je ne suis pas favorable à « l'épargne pour l'épargne ». Ma politique en ce domaine est claire : il ne nous faut pas plus d'épargne - la France est en effet l'un des pays d'Europe qui épargne le plus, puisque le taux y est de 15 % -, il nous faut une meilleure épargne !
En particulier, je souhaite que cette épargne soit plus productive : il nous faut réorienter l'épargne pour en renforcer le contenu en actions.
J'y ai déjà travaillé avec des mesures permettant de transformer plus facilement les contrats d'assurance-vie en euros - qui sont principalement investis en titres obligataires - en contrats davantage investis en actions.
L'exonération des plus-values d'actions à partir de la sixième année de détention - mesure que j'ai annoncée devant le Sénat, l'année dernière - doit également renforcer l'attractivité de l'épargne en actions et le socle actionnarial de nos entreprises.
Au cours de ce débat, nous aurons l'occasion d'examiner des amendements proposés par votre commission des finances. Le Gouvernement y a bien entendu reconnu la traduction des propositions faites par M. le rapporteur général dans son récent rapport. Je salue ce travail, précis et volontaire, sur l'épargne retraite en France, trois ans après la réforme des régimes de retraites que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin avait menée à bien avec une détermination sereine.
Naturellement, épargne salariale et épargne retraite sont des sujets connexes, et je salue l'initiative prise par le Sénat pour élargir le débat sur ce sujet.
Il est d'ailleurs exact que, économiquement, les conditions sont réunies pour assurer le développement de l'épargne retraite en France : la diminution des taux de remplacement des revenus d'activité crée en effet les besoins d'une épargne retraite complémentaire, constituée dans un cadre individuel ou dans celui, collectif, de l'entreprise.
Vous avez comme moi constaté que l'ensemble des dispositifs concernés est aujourd'hui d'apparence complexe. Certes, au sein des différents instruments français de participation, d'intéressement et d'épargne salariale, le régime le plus ancien est celui de l'intéressement, prévu dès 1959. Il est entièrement facultatif, de même que les différents plans d'épargne salariale, plus récents. La participation aux résultats de l'entreprise est, elle, obligatoire à partir de cinquante salariés.
Par ailleurs, cela s'articule avec les autres dispositifs qui, à titre principal, répondent à l'aspiration des salariés à la constitution d'une épargne en vue de la retraite.
Vous avez donc passé en revue cette ossature dans son ensemble, au-delà de la simple épargne salariale que nous avions choisi d'aborder.
En constatant que vos propositions visent à consolider les équilibres que nous avions ensemble choisi de promouvoir, je rejoins pleinement votre démarche.
Sur la base de cette ossature, nous avions déjà proposé des simplifications certaines. Je pense en particulier au recours plus systématique au plan d'épargne d'entreprise, le PEE.
Nous proposons aussi des mesures visant à permettre que l'épargne des salariés soit gérée avec un lien suffisant et formalisée avec leur intérêt. C'est le sens de la capacité donnée au fonds commun de placement d'entreprise, le FCPE, de conclure des pactes d'actionnaires pour rendre les placements en actions plus liquides dans les entreprises non cotées.
Par ailleurs, je salue le fait que les concertations au sein du Conseil supérieur de la participation aient permis de converger largement sur le maintien de la règle de blocage de l'épargne pendant cinq ans sur les PEE - point sur lequel M. Gérard Larcher a beaucoup travaillé à titre personnel -, qui est pleinement cohérente avec la politique d'épargne longue que je mène.
Vous proposez d'aller plus loin sur quelques autres points.
En particulier, vous proposez un perfectionnement du texte sur les organismes de placement collectif immobilier, les OPCI. Le Gouvernement considère cette réforme comme importante. Nous serons donc en mesure de soutenir votre démarche afin de mettre à la disposition des épargnants de notre pays un instrument toujours plus pertinent de gestion de ce qu'il est convenu d'appeler la « pierre papier ».
En marge des questions strictement liées à la participation, à l'actionnariat salarié et à l'épargne, les débats porteront également sur l'encadrement des stock-options.
Dans ce domaine comme dans bien d'autres, le prix de la liberté de tous, c'est la pleine responsabilité de chacun.
Le Président de la République m'a demandé de réfléchir sur ces questions, en concertation avec les parties prenantes. J'ai acquis la conviction qu'il était utile de prendre quelques mesures d'encadrement ciblées, même si la loi n'est pas, selon moi, la meilleure réponse possible aux questions légitimes qui se posent. Mais la loi doit montrer la direction à prendre.
D'abord, il convient de renforcer le rôle de l'Autorité des marchés financiers, l'AMF.
Ensuite, on peut effectivement inciter les détenteurs de stock-options - je pense en particulier aux dirigeants - à conserver, tout au long de leur carrière, une part des actions ainsi acquises mais également des actions gratuites dont ils auraient bénéficié.
Enfin, il faut renforcer le rôle et la responsabilité des conseils d'administration, qui auront donc à se prononcer sur cette question.
L'objectif est clair et je sais que, comme les députés, vous y souscrivez : éviter pour l'avenir de créer des conditions qui pourraient conduire à ce que certains ressentent comme des abus, sans pour autant légiférer à outrance.
Chaque Français passe un tiers de son temps dans l'entreprise. Il faut faire en sorte que ce temps passé l'enrichisse humainement, professionnellement, mais aussi financièrement. Le souhait du Gouvernement, c'est que chacun soit gagnant. Le temps est révolu où l'on voyait dans l'entreprise un simple moyen de production.
Dans l'économie mondialisée de production qui est celle où nous évoluons, l'économie de services, l'économie de l'immatériel, l'économie du savoir, il faut penser l'entreprise comme un lieu de vie, un lieu d'acquisition des savoirs. Il faut donc nous pencher sur l'organisation du travail et de l'activité salariée, aujourd'hui, au XXIe siècle. Une vraie révolution doit s'engager afin de conjuguer la participation avec la flexibilité et la sécurisation des parcours professionnels. C'est aussi à cette réflexion, à cette évolution que ce texte vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs.
Dans ce projet de loi, notre objectif est simple : renforcer l'effort de cohésion sociale engagé depuis 2002 dans notre pays, en inscrivant dans notre droit une vision plus offensive, mieux comprise et mieux partagée de la participation, de l'intéressement et de l'actionnariat salarié. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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Souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat d'Ouzbékistan
Mme la présidente. Mes chers collègues, j'ai l'honneur et le plaisir de saluer en votre nom la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation du jeune Sénat d'Ouzbékistan, conduite par son président, M. Ilgizar Sobirov, et accompagnée par Mme Monique Papon, présidente déléguée du groupe d'amitié France-Asie Centrale.
Je forme des voeux pour que cette visite contribue à renforcer les liens entre nos deux pays et, en particulier, entre nos deux sénats. (Mmes et MM. les sénateurs ainsi que les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)
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Participation et actionnariat salarié
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le développement et la participation de l'actionnariat salarié.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame et messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis la Libération, la France suit une voie originale dans le droit-fil de la synthèse économique et sociale proposée aux Français par le général de Gaulle.
Cette synthèse est le produit de la rencontre entre différentes traditions philosophiques et politiques qui ont marqué la vie intellectuelle de notre pays et qui vont du libéralisme humaniste de Turgot tel qu'il apparaît en 1766 dans ses Réflexions sur la formation et la distribution des richesses, au socialisme utopique que Proudhon a soutenu en 1863 dans Du Principe fédératif, mais aussi au christianisme social défini dans l'encyclique Rerum Novarum de Léon XIII.
M. Roland Muzeau. Oh là là !
M. Guy Fischer. La totale !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Fondée avant tout sur une certaine idée de l'homme et des rapports sociaux qui doivent exister au sein de l'entreprise, cette voie française, c'est celle de la participation.
M. Guy Fischer. Cela a bien changé !
M. Roland Muzeau. Il n'y a plus de gaullistes !
M. Alain Gournac. Mais il y a M. Muzeau ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La participation est un projet de société dont la construction a été progressive. Cette oeuvre collective, nous souhaitons la poursuivre non pas par nostalgie mais parce qu'elle est absolument nécessaire.
Aujourd'hui, la participation peut être l'une des réponses sociétales et sociales à la mondialisation en ce qu'elle permet d'associer plus pleinement les salariés à la vie de leur entreprise.
Il nous appartient aujourd'hui de franchir ensemble une nouvelle étape.
Je tiens à remercier M. Jean-Pierre Raffarin, qui, lorsqu'il était Premier ministre, nous a demandé d'élaborer un texte en faveur de la participation, l'un des sujets majeurs pour moi dans la tâche qu'il m'avait confiée et que M. Dominique de Villepin nous a demandé de poursuivre.
L'économie mondiale, dans laquelle nous nous insérons, est une économie vivante et dynamique.
Durant les vingt-cinq dernières années, la mondialisation des échanges, l'ouverture des marchés, la révolution des nouvelles techniques d'information et de communication ont transformé en profondeur les ressorts du capitalisme et l'organisation des entreprises.
Nous sommes passés d'un capitalisme patrimonial à composante familiale à un capitalisme financier, et de nouvelles logiques économiques ont pris le pas sur les anciens rapports sociaux. Cette évolution témoigne d'une réorganisation de nos modes de production qui a permis, depuis vingt ans, de formidables gains de productivité.
Ce passage d'un âge du capitalisme à l'autre a été globalement accompli avec succès dans notre pays. Il suffit de regarder ces grands groupes familiaux qui ont réussi leur intégration dans la compétition mondiale et qui, aujourd'hui comme hier, constituent les fleurons de nos entreprises.
Mais cette mutation a eu aussi pour effet de couper le capitalisme de ses racines sociales, historiques et géographiques, déstabilisant les salariés. Certains ont parfois perdu de vue le projet collectif vers lequel ils tendent. D'autres souffrent de la perte de l'« épaisseur humaine » qui donnait chaleur, dynamisme et visages identifiés à nos entreprises familiales.
M. Roland Muzeau. Comme chez Moulinex !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Il est de notre responsabilité de réguler l'impact de cette mutation parce que, en se financiarisant, le capitalisme devenu plus anonyme, parfois sans identité, a affaibli la cohésion sociale et entrepreneuriale des entreprises françaises.
Le premier principe d'une économie solide et compétitive, ne l'oublions pas, est bien celui qu'a posé Jean Bodin : « l'homme, c'est-à-dire les talents et la motivation d'une équipe ».
Que l'entreprise soit devenue la propriété d'un fonds d'investissement ou restée dans le giron d'une famille, la participation a pour ambition de préserver ou de recréer les liens qui se sont distendus au fil du temps pour jeter à nouveau des ponts entre ceux qui détiennent le capital et ceux qui travaillent.
D'ailleurs, une disposition du projet de loi permet aux fonds qui veulent reprendre une entreprise de s'associer aux salariés afin qu'ils puissent participer à l'élaboration de la nouvelle stratégie.
C'est donc à cette conception renouvelée des solidarités à l'intérieur des entreprises et des enjeux de compétitivité qu'aspire la participation.
Dans son économie générale, le texte est sous-tendu par cette ambition. Il vise trois objectifs : tout d'abord, permettre une meilleure participation des salariés aux résultats de leur entreprise ; par ailleurs, assurer un accès plus large aux mécanismes de la participation ; enfin, étendre la participation aux petites et moyennes entreprises.
En effet, comme nous avons pu le constater lors du débat sur les mutations économiques, il y a d'un côté les salariés des grandes entreprises, qui bénéficient des dispositions de la participation, et, de l'autre côté, ceux des petites et moyennes entreprises - au nombre de huit millions - qui n'en profitent pas encore.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La participation, qui n'est pas un substitut aux négociations salariales, c'est plus de pouvoir d'achat pour le salarié lorsque l'entreprise réalise des profits.
M. Roland Muzeau. C'est faux !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. À la négociation salariale, qui s'inscrit dans les moyen et long termes, le texte ajoute deux outils - le dividende du travail et l'intéressement de projet - afin de donner à la direction les moyens de partager les bénéfices exceptionnels.
Ces outils permettent de concilier la compétitivité des entreprises et la juste répartition des fruits produits par le travail de tous.
L'expression « dividende du travail » peut, je le sais, susciter des interrogations.
M. Guy Fischer. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Certains d'entre vous la considèrent inappropriée. Permettez-moi de leur démontrer le contraire en revenant à la racine du mot « dividende ».
Le mot « dividende » est issu de l'adjectif verbal du verbe dividere, qui signifie partager, répartir. Dès lors que le dividende du travail a pour objet le partage du profit entre les salariés et les actionnaires, il n'y a pas d'obstacle linguistique à parler de dividende du travail en contrepoint au dividende du capital.
C'est d'autant plus vrai que le dividende du travail a pour objet de partager, entre les salariés et les actionnaires, les profits exceptionnels, c'est-à-dire les profits qui vont au-delà de la rémunération normale du capital et du risque que l'actionnaire a accepté de prendre. À l'heure actuelle, ces profits exceptionnels sont encore entièrement versés aux actionnaires, ce qui ne nous paraît pas équitable.
Le choix de cette redistribution collective est donc l'occasion d'affirmer une certaine vision de l'entreprise. Face à l'approche anglo-saxonne du bonus individuel, nous défendons la cohésion entrepreneuriale par la prime collective.
La démocratisation de la participation est un autre objectif essentiel. Désormais, les huit millions de salariés des PME pourront, eux aussi, bénéficier plus facilement des dispositions qui permettent d'accéder au capital de leur entreprise et de la participation.
L'équité nous imposait de mettre fin à l'inégalité qui prévaut aujourd'hui. Les branches professionnelles devront, d'ici à trois ans, conclure des accords-types que les petites entreprises pourront transposer afin d'instaurer en leur sein un régime de participation. Le Conseil supérieur de la participation, le CSP, en assurera le suivi.
Cette démocratisation de la participation, son ouverture aux petites et moyennes entreprises, est une priorité. Il faut que les salariés soient partie prenante des choix stratégiques, qu'ils soient associés au développement de leur entreprise en bénéficiant d'une redistribution de la richesse produite. La distribution d'actions gratuites permettra de faire participer les salariés au capital et favorisera la concertation dans les entreprises. Il est indispensable que le dialogue social se saisisse de la question du partage de l'information pour que chacun puisse se sentir engagé dans une aventure commune.
Parce que les petites entreprises ont besoin de lisibilité et de sécurité, le texte nous invite à les leur apporter.
Permettez-moi enfin de rappeler la méthode qui a présidé à l'élaboration progressive de ce texte. C'est essentiel au débat d'en comprendre l'origine.
Notre méthode fut celle du dialogue social et de la concertation approfondie. La réflexion ouverte par Jean-Pierre Raffarin devant le Conseil économique et social fut ensuite approfondie dans les rapports de deux parlementaires en mission, Jacques Godfrain et François Cornut-Gentille. Elle s'est poursuivie avec le Conseil supérieur de la participation, qui rassemble des parlementaires, des représentants des partenaires sociaux et des personnalités qualifiées.
Permettez-moi de saluer les sénateurs, en particulier Mme Isabelle Debré, qui ont pris une très large part aux travaux du Conseil supérieur de la participation.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Permettez-moi aussi de saluer la méthode qui a été suivie : enfin, le ministère de l'économie et des finances et le ministère du travail ont quitté chacun leur monde cloisonné pour travailler ensemble, ce qui n'avait pas toujours été le cas dans l'histoire de la participation. Je tiens à remercier M. Thierry Breton pour sa contribution aux travaux du Conseil, notamment pour les réponses qu'il a apportées aux demandes émanant des partenaires sociaux ou d'autres ministères.
Avec le Conseil supérieur de la participation, en étroite coopération avec son nouveau vice-président délégué, Franck Borotra, ancien ministre de l'industrie, nous nous sommes engagés dans une démarche progressive.
Le Conseil a d'abord été saisi de l'avant-projet de loi, ce qui a permis à chacun de ses membres d'émettre un avis sur les mesures et sur la rédaction qui étaient proposées. C'était, je tiens à le souligner, la première fois qu'un projet de loi était soumis ainsi aux partenaires sociaux. C'est un exemple des bonnes pratiques que nous souhaitons rendre systématiques avec la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.
La synthèse de ces avis a permis de faire évoluer la première mouture du texte. Nous avons pu alors saisir le Conseil d'un projet de loi tenant compte des remarques formulées par les partenaires sociaux, par les parlementaires et par les personnalités qualifiées. Nous avons de nouveau recueilli leurs avis avant que le Premier ministre ne rende les derniers arbitrages.
Cette concertation a certes pris du temps - près de six mois - mais elle a été fructueuse. Elle nous a permis de préparer un texte plus audacieux, plus concret et d'aboutir à un consensus réel chez les partenaires sociaux.
La première lecture du projet à l'Assemblée nationale nous a permis de recentrer le texte sur les dispositions les plus fortes et de fixer des concepts qui marquent les esprits. Cet effort était, me semble-t-il, nécessaire car il nous a permis de donner plus de densité au texte. Je souhaite que nous puissions préserver l'équilibre qui a été trouvé.
Nous avons avancé dans deux directions essentielles. La discussion nous a permis de préciser les moyens de la généralisation de la participation aux petites et moyennes entreprises. Mais le débat fut aussi l'occasion d'élargir le champ de la formation des représentants des organisations syndicales à la gestion de l'entreprise et aux mécanismes de la participation.
Je tiens à saluer le travail remarquable et passionné accompli par les trois rapporteurs du Sénat, Isabelle Debré, Serge Dassault et Alain Dufaut, qui ont mis leurs expériences professionnelles respectives au service de leurs convictions, qui sont fortes dans ce domaine. La participation est un sujet qui trouve un écho dans leur attachement aux valeurs que j'évoquais au début de mon propos. Je les remercie pour les échanges parfois stimulants qui ont été les nôtres.
Je suis persuadé que ce sujet, qui implique la cohésion nationale et le dialogue social, valeurs auxquelles le Sénat est attaché, suscitera l'engagement de chacun. Le Sénat a toujours été très actif dans ce domaine, comme en témoignent - je ne peux pas ne pas l'évoquer ici - les amendements de Jean Chérioux sur les textes passés et la contribution de la Haute Assemblée à la construction d'une société qui intègre davantage la dimension de la participation.
Hier, à Bruxelles, je rappelai l'attachement de notre pays à l'Europe sociale, à la construction d'une Europe qui ne soit pas un simple espace de marché, mais qui soit aussi un espace dans lequel les citoyens européens aient en partage un modèle, une conception des rapports sociaux et humains.
Au travers de la symbolique du temps de travail, ce débat que l'on doit à l'initiative d'un Français, Albert Thomas, au sein de l'Organisation internationale du travail, en 1919, n'est pas un débat du passé, mais un débat de valeurs partagées, qui concerne aujourd'hui plus de 430 millions d'Européens.
Notre ambition est d'avancer dans la modernisation de notre modèle social en faisant en sorte que les Français comprennent mieux l'entreprise - et que, parfois, l'entreprise comprenne mieux les Français - et qu'ils soient mieux associés aux décisions et aux résultats. L'implication des salariés est un élément déterminant de la compétitivité de nos entreprises.
Derrière les différentes dispositions techniques dont nous allons débattre, la compétitivité reste bien l'objectif prioritaire que nous poursuivons. La participation est une voie française originale, qui a été ouverte par le général de Gaulle. Nous souhaitons la renforcer à l'occasion de la discussion du présent projet de loi au Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, la participation et l'épargne salariale représentent un enjeu économique considérable dans notre pays. Quelques chiffres permettent d'en juger : en 2004, dernière année pour laquelle des statistiques sont disponibles, près de 13 milliards d'euros ont été distribués au titre de la participation, de l'intéressement ou de l'épargne salariale. Le montant moyen par salarié bénéficiaire oscille autour de 2 000 euros, ce qui correspond à un surcroît de revenus équivalent à 7 % de la masse salariale.
Au-delà des montants financiers en jeu, la participation et l'intéressement jouent un rôle essentiel pour garantir la qualité du climat social dans nos entreprises et pour améliorer leurs performances dans la mesure où les salariés bénéficient très directement des bons résultats qu'elles réalisent.
Je précise qu'en raison de leur caractère collectif, l'intéressement et la participation se distinguent nettement des pratiques d'individualisation des rémunérations appliquées dans de nombreuses entreprises : ils relèvent d'une démarche de solidarité puisque tous les salariés de l'entreprise en bénéficient.
L'épargne salariale permet également de favoriser les placements à long terme puisque les sommes perçues au titre de la participation, ou placées sur un plan d'épargne d'entreprise, sont bloquées pendant cinq ans.
Plus encore, une part croissante de l'épargne salariale s'oriente désormais vers l'épargne retraite, dont le développement nous paraît indispensable pour compléter les pensions de retraite par répartition.
J'ajoute que l'épargne salariale entretient des liens étroits avec l'actionnariat salarié : sur les 64 milliards d'euros d'encours des fonds communs de placement d'entreprise, qui recueillent une bonne part de l'épargne salariale, 25 milliards d'euros, soit 44 % du total, sont investis en titres de l'entreprise.
Les salariés qui détiennent des titres de leur entreprise participent, comme n'importe quel actionnaire, à la prise de décisions lors des assemblées générales de la société et bénéficient de la distribution de dividendes. Le présent projet de loi vise d'ailleurs à renforcer leur participation à la prise de décision par l'intermédiaire de leurs représentants au sein du conseil d'administration.
En dépit de ce bilan remarquable, des progrès peuvent encore être réalisés : seul un salarié sur deux, soit huit millions de personnes, bénéficie dans notre pays d'un accord de participation ; un tiers seulement des salariés est affilié à un plan d'épargne entreprise. Le présent projet de loi devrait nous permettre d'accomplir une partie du chemin qui reste à parcourir.
La genèse de ce texte doit beaucoup à l'ancien Premier ministre, notre collègue Jean-Pierre Raffarin, qui a pris l'initiative de relancer le débat sur la participation et qui a confié à deux parlementaires en mission, les députés Jacques Godfrain et François Cornut-Gentille, le soin de formuler des propositions sur ce sujet.
Ce projet s'inscrit sur la voie tracée dès les années soixante par le général de Gaulle, qui voyait dans la participation le moyen d'associer le capital et le travail au service du progrès social. La participation ne signifiait pas, dans son esprit, la seule participation aux résultats, elle visait aussi la participation au capital et à la gestion de l'entreprise. Or, il faut le souligner, ces trois dimensions sont bien présentes dans le texte que nous examinons aujourd'hui.
Je n'entrerai pas dans le détail des mesures du présent projet de loi, mesures qui, selon la commission, se répartissent en six objectifs majeurs. Nous en avons donc vu deux fois plus que vous, monsieur le ministre ! (Sourires.)
Ce texte vise tout d'abord à favoriser la diffusion de la participation et de l'épargne salariale, notamment dans les petites et moyennes entreprises, où elles restent trop peu répandues.
En effet, si l'on peut se réjouir du fait que 54 % des salariés en bénéficient déjà, j'observe que, dans 92 % des cas, ils travaillent dans une entreprise de plus de cinquante salariés. Cela signifie donc qu'ils ne sont que 8 % à relever d'entreprises comptant moins de cinquante salariés alors que celles-ci assurent 42 % de l'emploi du secteur privé.
Le projet de loi ouvre plusieurs pistes que je considère riches de promesses : la négociation d'accords de participation « clé en main » au niveau des branches, ce qui facilitera l'adhésion des PME au dispositif de participation, la conclusion d'accords « d'intéressement de projet », des mesures relatives aux groupements d'intérêt économique et aux groupements d'employeurs.
De même, le présent projet de loi tend à mettre en place une procédure renforçant la « sécurisation » juridique des accords d'intéressement ou de participation et des règlements de plans d'épargne salariale. Nous y sommes totalement favorables.
Parallèlement à un tel objectif chiffré, le texte affiche également l'ambition d'augmenter le montant des sommes versées aux salariés en autorisant le versement d'un supplément d'intéressement ou de participation au titre de l'exercice clos. On appellera ce supplément « dividende du travail », bien que cette formule soit impropre selon certains - nous n'avons pas les mêmes sources, monsieur le ministre, (Sourires) -,...
Mme Isabelle Debré, rapporteur.... le terme dividende désignant en toute rigueur la rémunération du capital.
Dans le même souci, le projet de loi envisageait de modifier les règles de calcul du bénéfice fiscal pris en compte pour déterminer le montant de la participation. Afin de tenir compte de la situation des entreprises déficitaires, l'Assemblée nationale est revenue sur ce dispositif, de mon point de vue à juste titre. En effet, il est, me semble-t-il, important de laisser à ces entreprises le temps de reconstituer leurs fonds propres avant d'être de nouveau contraintes de verser de la participation. Nous y reviendrons à l'occasion de l'examen des articles.
Le troisième objectif est de favoriser la participation des salariés au capital de leur entreprise en encourageant l'actionnariat salarié par des incitations fiscales et en créant un dispositif plus souple de reprise de leur entreprise.
Le quatrième objectif est de renforcer la participation des salariés à la gestion de leur entreprise. Je souhaite m'arrêter un instant sur ce point. Le projet de loi vise à rendre obligatoire la représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration d'une société cotée, dès lors qu'ils détiennent plus de 3 % de son capital. D'ailleurs, je le rappelle, cette obligation figurait déjà dans la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, bien qu'elle soit restée lettre morte faute de décret d'application. Elle sera désormais mise en oeuvre par les statuts des sociétés.
De même, pour renforcer la « concertation » dans l'entreprise, les règles d'information du comité d'entreprise ont été améliorées. Ainsi, les partenaires sociaux pourront substituer des obligations contractuelles aux obligations légales d'information du comité d'entreprise, par exemple par la remise au comité d'un rapport annuel de synthèse en lieu et place des multiples documents prévus par la loi.
M. Roland Muzeau. C'est une régression !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'idée est de rationaliser la remise d'informations au comité d'entreprise en s'inspirant des « accords de méthode », qui ont été institués en 2003. Il s'agit d'une possibilité et non d'une obligation.
Notre commission n'est pas hostile à de telles mesures à condition d'en préciser la portée juridique. Nous y reviendrons.
Le cinquième objectif - et ce n'est pas le moindre, étant donné la complexité des dispositifs - est d'améliorer la mise en cohérence de ces derniers. Le projet de loi entend orienter les sommes issues de la participation ou de l'intéressement vers les plans d'épargne d'entreprise, puis vers les plans d'épargne pour la retraite collectifs, les PERCO.
Le dernier objectif est de renforcer l'information et la formation des salariés sur l'épargne salariale. J'y souscris entièrement et je vous proposerai d'étendre cette formation à l'économie de l'entreprise, au sens large.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a demandé au Gouvernement la remise d'un rapport sur la politique d'intéressement dans le secteur public. Bien que notre commission ne soit traditionnellement pas favorable à la remise de rapports,...
M. Alain Gournac. C'est vrai !
Mme Isabelle Debré, rapporteur.... elle a souhaité confirmer cette initiative, qui rejoint ses propres préoccupations.
M. Roland Muzeau. Ah bon ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. En effet, la promotion de l'intéressement dans le secteur public fait partie des sujets que je souhaite voir abordés par le Conseil supérieur de la participation. Nous pourrons d'ailleurs compter sur l'expérience de notre ancien collègue Jean Chérioux, à qui je souhaite rendre hommage pour son investissement constant dans l'évolution positive des systèmes de participation.
J'en viens aux dispositions du texte n'entretenant pas de lien direct avec le thème de la participation.
On peut s'en étonner, mais le fait est que le périmètre du présent projet de loi a connu d'importantes variations. Dès la phase d'élaboration du texte, diverses mesures en matière du droit du travail ont été ajoutées, ainsi que des dispositions relatives à la commercialisation des produits d'épargne. Puis, au mois de septembre dernier, une lettre rectificative y a joint les questions du chèque-transport et de la cotation en bourse des clubs sportifs. Nous avons d'ailleurs confié l'examen au fond de ce dernier dispositif à la commission des affaires culturelles, qui dispose de l'expertise nécessaire pour l'étudier. (M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles acquiesce.) Lors de la première lecture, l'Assemblée nationale a souhaité recentrer le texte sur son objet initial. À cette fin, elle a supprimé une quinzaine d'articles, ce que nous soutenons à quelques réserves près.
Parmi les mesures complémentaires, j'évoquerai un instant les plus significatives qui demeurent dans le projet de loi.
En matière de droit du travail, le texte propose de sécuriser les parcours professionnels en facilitant la mise à disposition de salariés au sein d'un même pôle de compétitivité. Cette mesure est bienvenue et devrait renforcer les synergies. Le projet de loi crée également un congé de mobilité pour mieux accompagner les salariés menacés par un projet de licenciement. Ce congé peut être rendu plus opérationnel, et nous proposerons des amendements en ce sens.
En outre, le texte aborde la question de l'emploi des seniors et supprime la contribution Delalande à compter du 1er janvier 2010. En effet, loin de limiter les licenciements, cette « mise à l'amende » des entreprises qui mettent fin au contrat de travail d'un salarié âgé de plus de cinquante ans constitue en réalité un puissant frein à l'embauche. C'est pourquoi nous sommes favorables à sa disparition et nous proposerons même d'avancer celle-ci à 2008.
Monsieur le ministre, j'ai conscience que le compromis trouvé sur la contribution Delalande résulte de longues négociations entre les partenaires sociaux, mais nous souhaitons par le dépôt de cet amendement vous conforter dans le choix d'une politique de développement de l'emploi des seniors.
Le projet de loi propose également d'instaurer le dispositif du chèque-transport, qui s'adresse principalement aux entreprises situées en dehors de l'Île-de-France. Celles-ci pourront préfinancer des dépenses de transports collectifs de leurs salariés ou leur accorder chaque année une indemnité de 100 euros lorsqu'ils se trouvent dans l'obligation d'utiliser leur véhicule personnel.
Une telle mesure est simplement incitative, et non obligatoire, ce à quoi nous sommes très attachés. Elle représente également un effort financier considérable, qui s'élève à environ 220 millions d'euros d'exonérations sociales et 66 millions d'euros d'exonérations fiscales. Nous estimons pouvoir accepter le point d'équilibre trouvé à l'Assemblée nationale.
Dans un tout autre registre, s'agissant de la commercialisation des produits d'épargne et du financement de l'économie, l'Assemblée nationale a adopté un amendement dit « Balladur » sur les stock-options des dirigeants d'entreprises, dans le souci de moraliser certaines pratiques qui ont ému l'opinion publique. Désormais, selon la décision du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, les mandataires sociaux des entreprises ne pourront plus lever leurs stock-options pendant qu'ils sont en fonction ou devront conserver une partie des titres jusqu'à la fin de leur mandat.
À la demande du ministre des finances, le mécanisme d'encadrement des stock-options a été étendu à la détention d'actions gratuites.
M. Charles Pasqua. Très bien !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Le ministre a justement fait observer, et il l'a répété devant nous en commission, que la pratique de la distribution d'actions gratuites tendait à se répandre.
Plus largement, un rôle majeur est confié à l'Autorité des marchés financiers, qui sera informée des pratiques des entreprises en la matière et pourra définir des règles de place. Cette rédaction est le résultat d'un compromis sur un sujet complexe et délicat. Nous vous proposerons donc globalement de la confirmer.
Comme je le rappelais, l'Assemblée nationale a supprimé une quinzaine d'articles du projet de loi, sans toutefois se prononcer sur le fond des dispositions concernées. Elle a simplement estimé que de telles mesures seraient plus à leur place dans d'autres textes, par exemple dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que nous examinerons la semaine prochaine. Nous comprenons cette analyse. Toutefois, nous sommes conscients de la nécessité d'adopter rapidement certaines mesures qui ne pourront vraisemblablement pas être aisément réintroduites dans un prochain texte. C'est pourquoi nous vous proposerons de rétablir deux d'entre elles, à savoir celle qui concerne le décompte des effectifs dans les entreprises,...
M. Roland Muzeau. Sûrement pas !
Mme Isabelle Debré, rapporteur.... et celle qui est relative à l'apprentissage.
M. Roland Muzeau. Encore moins !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. En conclusion, notre commission a été sensible aux objectifs du présent projet de loi, ainsi qu'à son approche pragmatique et constructive. Pour ces motifs, et sous réserve de l'adoption des amendements que je défendrai, elle vous propose de l'adopter. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, j'ai particulièrement apprécié votre intervention. Vous avez notamment mentionné les quatre besoins essentiels sur lesquels j'insiste tout particulièrement dans mon rapport pour avis, c'est-à-dire « être », « savoir », « pouvoir » et « avoir ».
Monsieur le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, vous souhaitez associer le dividende du travail et le dividende du capital, ce que je considère également comme une démarche très utile.
La commission des finances m'a fait l'honneur de me désigner comme rapporteur pour avis du présent projet de loi, et je l'en remercie.
C'est pour moi un moment particulièrement important. En effet, compte tenu de son efficacité économique et sociale, la participation associée à la « gestion participative » est un dossier auquel j'accorde le plus grand intérêt, et ce depuis très longtemps. J'applique d'ailleurs ce principe dans les entreprises dont j'ai la responsabilité.
Je reviendrai sur la signification que je donne à la gestion participative, s'agissant notamment de sa fonction de motivation des acteurs d'un même secteur.
Mais je voudrais en préalable vous présenter les conclusions de la commission des finances, qui a été saisie pour avis, ainsi que ses propositions. Ces dernières se fondent sur les très nombreuses consultations que j'ai pu organiser à propos du présent projet de loi.
Tout d'abord, la commission des finances a estimé indispensable de renforcer l'épargne salariale. Ainsi a-t-elle jugé nécessaire de compléter la formule légale actuelle de calcul de la réserve spéciale de participation. En effet, celle-ci date de 1967 et accorde aux salariés une part beaucoup trop faible des bénéfices. La commission des finances propose donc d'instituer par dérogation une nouvelle formule, selon laquelle les bénéfices après impôt seraient affectés pour un tiers aux actionnaires sous forme de dividendes du capital, pour un tiers aux salariés sous forme de participation et de dividendes du travail et pour un tiers à l'autofinancement des investissements de l'entreprise.
Cette proposition me paraît fondamentale. Son adoption aurait pour effet de mettre au même niveau participation des salariés et revenu des actionnaires, assurant ainsi l'égalité entre les dividendes du capital et ceux du travail. Voilà qui permettrait de supprimer beaucoup de conflits et de malentendus dans les entreprises, notamment sur le thème des « profits beaucoup trop élevés » et des « salaires toujours trop bas ».
L'entreprise et les partenaires sociaux pourraient choisir entre le dispositif actuel, qui me semble accorder trop peu de pouvoir d'achat, et la nouvelle formule ou toute autre formule dérogatoire.
Toutefois, je tiens à le signaler, la mesure que je vous propose permettrait d'attribuer aux salariés sous forme de participation l'équivalent de deux mois ou de deux mois et demi de salaire, en plus des treize mois officiels. Ainsi, leur revenu correspondrait à quinze mois ou quinze mois et demi de salaire, donc à une part plus importante de la richesse de l'entreprise, et ce sans augmentation des coûts de production. Tout le monde y gagnerait.
En outre, et Mme le rapporteur y faisait allusion, la commission des finances propose d'inclure la formation à la gestion de l'entreprise dans le présent projet de loi, afin d'expliquer aux salariés les règles élémentaires de gestion des entreprises et de leur enseigner certains principes de microéconomie. En effet, d'une manière générale, l'opinion publique et les salariés connaissent mal les objectifs, le fonctionnement et la réalité des entreprises. Il s'agirait donc d'intégrer ce dispositif dans le champ des actions de formation professionnelle, en introduisant ainsi la notion de « gestion participative » dans le code du travail.
La commission souhaite également préserver la souplesse nécessaire aux accords d'intéressement et réduire de trois à deux ans la durée minimale de ces accords dans les PME.
Je sais que le Gouvernement n'est pas très favorable à cette proposition, mais je voudrais quand même insister : les PME ne disposent pas d'une grande visibilité dans la prévision de leurs activités et de leurs commandes. Pour elles, pouvoir discuter et négocier tous les deux ans au lieu de tous les trois ans un accord d'intéressement en fonction de leurs activités serait, à mon sens, une avancée positive. Cette mesure pourrait s'appliquer, par exemple, aux entreprises de moins de deux cent cinquante salariés.
Il s'agit aussi de permettre, dans les entreprises ayant mis en place un accord dérogatoire nettement plus favorable que la loi, que le conseil d'administration ou le directoire puisse décider de ne pas mettre en place le dividende du travail.
Sur l'épargne retraite, la commission des finances proposera l'adoption de six articles additionnels reprenant des propositions du rapport d'information sur l'épargne retraite du rapporteur général, Philippe Marini.
Elle vous demandera également de préciser les conditions d'enregistrement des démarcheurs bancaires et financiers.
Sur le sujet important de la transformation des sociétés civiles de placement immobilier, les SCPI, la commission des finances vous demandera, mes chers collègues, de ratifier l'ordonnance relative aux organismes de placement collectif immobilier, les OPCI, tout en aménageant les règles par la suppression des dispositions qui interdisaient, au-delà du 31 décembre 2009, de créer de nouvelles SCPI et, pour les SCPI existantes, de procéder à des augmentations de capital.
Enfin, la commission des finances vous proposera d'intégrer dans le code général des impôts le dispositif d'exonération obligatoire sur les transports des salariés existant depuis 1982 en Île-de-France.
Je voudrais maintenant, à titre personnel, revenir sur la notion de « gestion participative » et vous faire part de ma propre expérience.
J'ai approuvé depuis le début les décisions du général de Gaulle relatives à l'intéressement et à la participation puisque, dès 1959, j'ai appliqué ces dispositions dans mon entreprise, Dassault Électronique, puis à Dassault Aviation. J'ai également milité pendant plus de quinze ans au sein de l'Association française pour la participation dans l'entreprise, l'AFPE, pour expliquer aux chefs d'entreprises et au CNPF de l'époque, l'intérêt et l'importance de cette méthode de participation. J'ai appliqué moi-même la règle des trois tiers que j'ai évoquée.
J'ai toujours voulu que l'on considère le salarié non comme une main mais comme une tête et, surtout, un coeur, avec pour devise « des salariés heureux dans des entreprises prospères ». Mais la participation financière ne suffit pas à rendre les hommes heureux s'ils ne sont pas non plus informés, responsabilisés et considérés.
Les hommes, quels qu'ils soient, vivent et travaillent ensemble. Pour que cette activité réussisse et soit efficace, il faut absolument adopter une attitude participative, quelle que soit l'activité.
Les salariés, comme tout membre d'une équipe, ont besoin de savoir ce qu'ils font, pourquoi ils le font, où on les mène, quels sont les résultats de leur travail, quelle stratégie est appliquée, etc.
Ils ont besoin de pouvoir décider comment travailler, dans quel environnement, de prendre des décisions eux-mêmes, de choisir et pas seulement d'obéir.
Ils ont besoin d'être considérés, reconnus comme des hommes et non comme des outils ou des machines auxquelles on donne des ordres. Ils veulent aussi être reconnus pour leurs qualités, leurs compétences, leur réussite, être félicités quand ils le méritent - ce qui, effectivement, n'arrive peut-être pas assez souvent.
L'entreprise joue un rôle fondamental dans notre économie car c'est elle qui fournit les emplois mais, pour cela, il faut des clients qui acceptent d'acheter ses produits. Sans clients, pas d'emplois ; sans emplois, chômage ; sans salariés motivés, pas d'entreprises ni de résultats. Les intérêts des salariés et des entreprises sont donc intimement liés, les uns ne pouvant rien sans les autres. Ils sont obligés de s'associer pour remporter le difficile combat consistant à produire toujours mieux que les autres et à rester compétitifs dans un contexte international ô combien difficile.
La notion de gestion participative est donc beaucoup plus large que la notion de participation purement financière ; elle contribue fortement à la motivation des salariés dans leur travail et à la réussite de l'entreprise.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, le chef d'entreprise ne dirige pas son entreprise dans la recherche exclusive des profits, mais pour que ses produits soient appréciés et achetés par des clients à des prix compétitifs, ce qui lui permettra d'embaucher des salariés et de réaliser des bénéfices - s'il le peut - pour développer l'activité de son entreprise. L'objectif premier d'une entreprise n'est pas d'embaucher et de dégager des profits, mais d'être compétitive et de vendre. Si elle ne satisfait pas ses clients, elle ne peut pas vivre et donc pas embaucher.
Le client est roi, il faut le savoir. C'est lui qui dirige l'entreprise, ce ne sont pas les actionnaires, ni les chefs d'entreprises, ni les salariés, ni les syndicats. C'est le client qui choisit une entreprise en achetant ses produits ; celle-ci peut alors se développer.
Grâce à une meilleure information et à une meilleure formation, les salariés comprennent mieux leur intérêt et celui de leur entreprise et deviennent de véritables associés. Tel est l'objectif de la gestion participative.
C'est pour mettre en oeuvre ces principes que je vous proposerai, à titre personnel cette fois, plusieurs amendements utiles aux entreprises qui veulent développer la participation.
Un premier amendement tend à encourager la mise en place de la participation dans les entreprises de vingt à cinquante salariés. On l'a souligné tout à l'heure, il est important que les PME, les entreprises de moins de cinquante salariés, puissent appliquer volontairement, sans obligation, un accord d'intéressement-participation. Elles le peuvent déjà aujourd'hui mais n'y sont pas suffisamment incitées. Trop de salariés de ces entreprises ne bénéficient d'aucun accord.
Un second amendement pourrait donner accès à l'épargne salariale aux fonctionnaires, qui ne participent pas à des activités commerciales ou marchandes mais produisent des services. Il s'appliquerait aussi bien aux fonctionnaires de l'État, des collectivités territoriales et des hôpitaux, sur la base d'un intéressement aux économies. À partir d'un budget prévisionnel donné, les économies réalisées tout en respectant les objectifs fixés pourraient être redistribuées en partie aux fonctionnaires : il serait normal que ceux-ci puissent tirer profit de leur gestion quand elle est bonne.
Un troisième amendement tend à soumettre les montants des droits alloués à un compte épargne-temps au même régime fiscal que les sommes versées au titre de l'intéressement et de la participation.
Je voulais proposer un dernier amendement visant à empêcher la distribution par l'entreprise d'un dividende aux actionnaires quand aucune somme n'a été versée au titre de la participation. Ce projet soulève quelques difficultés et j'ai décidé de le retirer pour y retravailler ; je pense que nous en reparlerons ultérieurement.
Bien entendu, je reviendrai en détail sur ces propositions au moment de la discussion des articles.
En conclusion, je suis heureux que la participation ait fait l'objet d'un projet de loi grâce aux initiatives de M. Jean-Pierre Raffarin, qui a décidé de relancer la participation quand il était Premier ministre. Il se pourrait d'ailleurs qu'il présente lui-même un amendement sur la répartition des bénéfices : je lui laisse le soin de le défendre ! J'espère que nous donnerons tous ensemble à ce texte le souffle qu'il mérite ; car, mieux qu'un projet de loi, la « gestion participative » est un projet de société.
Enfin, c'est avec plaisir que je vous indique, au nom de la commission des finances, que celle-ci s'est déclarée favorable à l'adoption du présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Dufaut, rapporteur pour avis.
M. Alain Dufaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, madame et messieurs les ministres, mes chers collègues, je ne peux que me féliciter du contenu du texte sur la participation et l'actionnariat salarié.
Les valeurs sur lesquelles mon engagement politique s'est fondé depuis toujours accordent une place prépondérante à la participation des salariés à la marge des entreprises. Je souhaiterais cependant rester strictement dans mon rôle : mon intervention sera très courte car je veux la consacrer uniquement à l'article 44 du projet de loi.
En effet, notre commission des affaires culturelles s'est saisie pour avis - de façon assez cavalière, je l'avoue - de l'article 44, qui abroge l'interdiction pour les sociétés anonymes sportives de recourir à l'appel public à l'épargne.
Le sport figure, en effet, au nombre des compétences de notre commission et je remercie le président de la commission des affaires sociales, M. Nicolas About, et son rapporteur, Mme Isabelle Debré, de nous avoir confié le soin d'examiner cet article. C'est sans doute demain ou vendredi, et en présence de M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, que nous serons amenés à débattre de ce sujet particulier.
Je me contenterai, à ce stade de la discussion, de vous rappeler que cet article figure dans la lettre rectificative du Gouvernement qui est venue compléter le texte initial du projet de loi. Cette démarche se justifie par l'urgence du sujet.
En effet, dans son avis motivé du 13 décembre 2005, la Commission européenne a invité la France à modifier sa législation, celle-ci lui apparaissant incompatible avec le droit communautaire, notamment avec le principe de libre circulation des capitaux. Je vous rappelle d'ailleurs que, le 15 juillet 2004, notre collègue Michel Mercier avait déposé une proposition de loi allant dans le même sens. Elle se trouverait donc satisfaite par l'adoption de cet article 44.
Après les lois adoptées ces dernières années en vue de faire évoluer le droit français en matière de sport, il s'agirait d'un pas supplémentaire vers l'harmonisation du statut des sociétés sportives françaises avec le modèle européen.
Je souhaite attirer votre attention aujourd'hui, non pas sur le fond du sujet, mais sur la situation dans laquelle se trouve le Parlement français, contraint d'adopter un texte négocié entre le Gouvernement et la Commission européenne, sans qu'il ait été préalablement informé ni, encore moins, consulté. J'avoue que je n'ai pris que très récemment connaissance du texte de l'avis motivé de la Commission européenne.
M'exprimant au nom de la commission des affaires culturelles du Sénat, je pense qu'il serait souhaitable, dans ces conditions, que notre assemblée demande au Gouvernement de lui transmettre systématiquement les avis motivés de la Commission européenne. Le Parlement pourrait ainsi se saisir, à titre préventif, de sujets qui, sans faire l'objet d'une nouvelle législation communautaire, résultent simplement de l'application du droit européen en vigueur.
La commission des affaires culturelles est convaincue que l'enjeu est de taille pour l'amélioration de l'information et le renforcement de l'influence du Parlement. Elle aimerait connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.
Mme la présidente. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 47 minutes ;
Groupe socialiste, 32 minutes ;
Groupe Union centriste-UDF, 14 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 9 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, selon M. Borloo, le texte que nous examinons aurait vocation « à modifier en profondeur le regard porté sur l'économie de marché et le capitalisme français ».
« Turbo de cohésion sociale et de dynamisme économique », la voie choisie du développement de la participation, au sens large du terme, serait rien moins qu'un « vrai projet de société ».
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Roland Muzeau. Attendez, monsieur Gournac ! (Sourires.)
D'après M. Larcher, ce projet de loi doit être compris comme « une réponse à la société d'aujourd'hui confrontée aux réalités de la globalisation où, parfois, la logique financière semble donner le ton ».
M. Breton, lui, nous invite à passer outre les mesures juridiques et techniques pour ne retenir que l'essentiel : l'esprit du projet de loi et les valeurs gaulliennes qui l'inspirent...
M. Alain Gournac. Il a raison !
M. Roland Muzeau. Oui, monsieur Gournac ! (Nouveaux sourires.)
Nous pourrions presque fermer les yeux et nous laisser bercer par cette douce musique. Nous ne sommes toutefois pas naïfs.
Nous mesurons, chaque jour, les effets pervers et dévastateurs de la financiarisation de notre économie. Au premier semestre, la France a battu un record en matière de fusions-acquisitions : leur montant s'est élevé à près de 111 milliards de dollars, contre 36 milliards de dollars au cours du premier semestre de 2005.
Le résultat de ces concentrations pour les salariés du câble, par exemple, c'est l'annonce par UPC-Noos d'un plan de licenciement touchant un millier de personnes.
Dans ce contexte de « capitalisme de casino », pour reprendre la formule du secrétaire confédéral de la Confédération européenne des syndicats, et alors même que ce gouvernement encourage les stratégies suicidaires de rentabilité absolue à deux chiffres - quels que soient les dégâts collatéraux sur l'emploi -, comment croire que vous ayez pour ambition de développer la participation et l'actionnariat salarié, afin de stabiliser le capital de nos entreprises et de peser sur les choix des investisseurs institutionnels et des actionnaires ?
Nous comprenons, en outre, que votre besoin soudain de « réconcilier le social et l'économique » sert en fait les intérêts du libéralisme. Les salariés ne percevant plus seulement leur salaire, mais disposant également de produits du capital, ils participeront pleinement au système capitaliste.
Vous maquillez le visage de l'exploitation de la force de travail de l'homme, mais elle n'en demeure pas moins sordide.
Quant à votre discours idéaliste sur l'entreprise, sur la place et la considération accordées aux salariés, il prêterait presque à sourire si la réalité du quotidien du salariat, cadres compris, n'était pas aussi dure. Poids du chômage et de la rentabilité, pratiques managériales déstructurantes, fiche de paie en ligne variant selon les résultats des commerciaux, perte de sens et stress au travail, discriminations en tout genre et notamment syndicale : les salariés sont toujours plus nombreux à perdre leur vie en tentant de la gagner.
Des sommets d'hypocrisie sont atteints. Ceux-là même qui, aujourd'hui, défendent ce texte et proposent, à l'instar du rapporteur de la commission des finances, que nous passions de la participation à la gestion participative en insistant sur les « quatre besoins essentiels de l'homme et du salarié » - « besoin d'être », « besoin de savoir », « besoin de pouvoir » et « besoin d'avoir » - et sur l'information régulière des salariés concernant les résultats de l'entreprise, bataillaient farouchement, hier, contre certaines dispositions de la loi de modernisation sociale consacrant des droits nouveaux pour les salariés.
Par exemple, les règles relatives à l'information du comité d'entreprise, préalablement à toute annonce portant sur la stratégie de l'entreprise et ayant des conséquences notamment en matière d'emploi, ont été supprimées, car elles portaient atteinte, selon ces mêmes personnes, au droit boursier.
Votre discours de responsabilisation sociale des entreprises est d'autant moins crédible qu'il est immédiatement contredit par d'autres dispositions contenues dans ce projet de loi ou par les déclarations des organisations patronales auditionnées.
Je citerai deux exemples afin d'illustrer mon propos.
L'article 14 quater permet l'adaptation - en fait, il faut comprendre « la restriction » -, par voie d'accord collectif, des modalités d'information du comité d'entreprise et des salariés.
Désormais, pour appréhender les enjeux économiques et sociaux déterminant la stratégie de l'entreprise, les membres du comité d'entreprise devront se contenter d'une réunion annuelle. Bel exemple de dialogue social, dont se félicitait pourtant tout à l'heure M. le rapporteur pour avis !
M. Guy Fischer. Inacceptable !
M. Roland Muzeau. Absolument, monsieur Fischer ! (Sourires.)
Le représentant du MEDEF s'est ouvertement prononcé contre l'article 15, qui tend à rendre obligatoire la représentation des salariés actionnaires dans les conseils d'administration des sociétés. Selon lui, « il n'est pas opportun de généraliser à l'ensemble de l'économie française le modèle de certaines entreprises ayant fait le choix d'organiser la représentation des salariés dans leur conseil d'administration ». Cela promet un bel avenir à votre projet de société !
Alors, pourquoi ce texte ? Serait-ce pour répondre de manière immédiate et ambitieuse aux questions salariales récurrentes dans le contexte économique et social, marqué par l'insécurité, que nous connaissons ?
S'agissant du débat central sur le partage des fruits de la croissance, permettez-moi, là encore, de mettre en doute votre volontarisme.
Jusqu'à présent, le Gouvernement s'est toujours refusé à répondre véritablement aux demandes d'augmentation des salaires, ces dernières jouant prétendument « contre l'emploi ». Sa politique d'allègement des cotisations sociales patronales - pour une part non compensées -, qui s'applique largement aux rémunérations comprises entre 1 et 1,6 SMIC, est responsable de la « smicardisation » du salariat et des trappes à bas salaires. Désormais, 40 % des rémunérations des salariés à temps plein se situent sous la barre des 1,6 SMIC.
M. Guy Fischer. Voilà la vérité !
M. Roland Muzeau. Il n'y a rien de surprenant alors que, chaque année, avant la revalorisation du SMIC, le débat ressurgisse et prenne un relief particulier, dans la mesure où, depuis trois années consécutives, des actionnaires heureux affichent avec arrogance des profits toujours orientés à la hausse et où les patrons du CAC 40 s'enorgueillissent de recevoir des salaires démesurés qui s'expriment en millions d'euros, grossis de surcroît par diverses primes, bonus et parachutes dorés.
Ainsi, M. Daniel Bernard, l'ancien P-DG de Carrefour, est parti avec 9,5 millions d'euros, auxquels il faut ajouter 29,5 millions pour sa seule retraite. M. Antoine Zacharias, lui, a quitté Vinci avec l'équivalent de 5 766 années du salaire moyen en vigueur dans cette entreprise. Pas mal pour une retraite !
M. Guy Fischer. Scandaleux !
M. Roland Muzeau. Selon le Bulletin de la Banque de France du mois d'août 2006, les profits dépassent désormais 10 % du PIB. Quant aux sociétés qui se situent en tête du CAC 40, elles disposent de plus de 1 100 milliards d'euros de liquidités.
Pourtant, votre majorité continue de nier l'évidence, c'est-à-dire la détérioration du partage de la valeur ajoutée au détriment des salaires.
MM. Raffarin et de Villepin ont accepté le principe de cette pression qui s'exerce sur les salaires. M. Sarkozy, quant à lui, propose aux salariés de recourir aux heures supplémentaires. Tous avancent le leurre du dividende du travail et soutiennent la relance de la participation.
Vous êtes dans la même posture de déni en ce qui concerne la baisse du pouvoir d'achat et la dégradation des conditions de vie de nos concitoyens.
En dépit de votre sous-estimation du poids de certains postes de dépenses, dont le logement, et de l'impact du passage à l'euro sur les prix, les enquêtes les plus récentes de l'INSEE ou de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, confirment toutes les estimations des organisations syndicales, qui évaluent la perte de pouvoir d'achat des salaires de 5 % à 7,5 % entre 2000 et 2005.
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Roland Muzeau. Les dépenses incompressibles des ménages n'ont cessé d'augmenter : hausse des loyers de 28 % en quatre ans, flambée du prix du gaz de 23,5 % en une seule année, hausse de l'essence de 15 % et du fioul de 10 %.
Dans ces conditions, porter le SMIC à 1 500 euros, comme nous le réclamons, est possible et nécessaire. Mais cela n'est pas suffisant, car nombre de salariés sont rémunérés à un taux horaire inférieur au SMIC.
Les réponses passent par des grilles de rémunération qui respectent a minima le niveau du SMIC. C'est malheureusement loin d'être le cas, monsieur Larcher ! Vous aviez pourtant pris l'engagement, ici même, d'entamer des négociations collectives avec les partenaires sociaux et de ramener les seuils des grilles de salaire dans les diverses branches d'industrie au niveau du SMIC.
Or, aujourd'hui, 50 % de ces grilles - y compris dans des branches comme la chimie, dont la grille comprend six échelons inférieurs au SMIC - se situent sous le niveau du SMIC.
Selon nous, cette question des bas salaires appelle aussi des réponses en termes de stabilisation des emplois et de limitation du recours aux emplois précaires, aux stages et aux contrats à durée déterminée. Nous proposerons une série d'amendements allant dans ce sens.
J'espère, sans toutefois me faire d'illusions, que nous serons entendus sur ces différents points car, sur le marché de l'emploi, les conditions ne sont guère favorables. En effet, 15 % de la population active est actuellement sous-employée et presque un emploi sur cinq est un emploi sous contrat à durée déterminée, à temps partiel, ou en intérim.
C'est d'ailleurs l'intérim qui vient soutenir l'emploi en France, car les embauches à temps plein et en contrat à durée indéterminée, qui étaient encore la règle il y a quelques années, disparaissent peu à peu.
Quant aux chiffres du chômage, il est impossible aujourd'hui d'en avoir une estimation crédible. En effet, de l'avis général, le pourcentage annoncé de 8,8 % est bien éloigné de la réalité, malgré les protestations de M. Larcher.
On peut évaluer à 1 million le nombre de demandeurs d'emploi qui échappent aux statistiques officielles du fait des radiations massives ou des déclassements d'une catégorie de demandeurs d'emploi à une autre. Le nombre réel des demandeurs d'emplois est donc largement supérieur à 3 millions.
Travailler ne permet plus de subvenir à ses besoins : 1,3 million de travailleurs, soit 5 % de la population active, sont aujourd'hui considérés comme pauvres, car leur revenu mensuel est inférieur à 650 euros ; plus du quart des sans-abri ont un travail. Enfin, à la fin de 2005, plus de 6 millions de personnes dépendaient directement ou indirectement des minima sociaux.
Non seulement la pauvreté ne régresse plus dans notre pays, mais certains indicateurs témoignent plutôt de son augmentation : le surendettement des ménages a augmenté de 9,8 % en un an et les expulsions locatives pour cause de loyer impayé ont fait un bond de 40 % en six ans.
Tel est, madame, messieurs les ministres, le contexte dans lequel nous examinons ce projet de loi. Cet éclairage renforce le décalage entre votre diagnostic, le discours politique, les solutions proposées et la réalité que vivent nos concitoyens. Il nous permet d'affirmer que ce projet de loi sur la participation sera bien loin de répondre aux attentes des Français.
Ce texte ne règle ni le débat sur le partage des fruits de la croissance ni les questions touchant au niveau et au mode de rémunération des dirigeants d'entreprises. Ce n'est pas la réponse adaptée à l'exigence de gains immédiats en termes de pouvoir d'achat, et ce pour l'ensemble des salariés.
Pis encore, ce texte risque d'accroître davantage les écarts de rémunération entre les salariés.
La récente étude de l'INSEE en date de septembre 2006, intitulée « Épargne salariale, des pratiques différenciées selon les entreprises et les salariés », ne vous fait pas bonne presse. On y lit notamment que « 10 % des salariés les mieux lotis en matière d'épargne salariale ont perçu 40 % des sommes versées à ce titre ».
Les conclusions de cette enquête sont claires : partout où il existe des inégalités de salaires, l'épargne salariale, loin de les corriger, les amplifie.
Il faut ajouter qu'entre 2000 et 2004 l'épargne salariale a fait un bond de 6,7 % par an alors que, sur la même période, les salaires n'ont pas progressé. Nous pouvons en conclure qu'il existe un réel danger de substitution de cette solution à une vraie politique salariale. Mais n'est-ce pas là l'un de vos objectifs ?
Ce texte participe de votre volonté de faire progressivement adhérer l'ensemble de la société, et les travailleurs en particulier, au modèle capitaliste et libéral.
Pour vous et le MEDEF, l'idéal serait que les salariés non seulement concourent à leur propre exploitation, mais la cautionnent. C'est votre rêve ! Pour qu'il se réalise, vous les bercez de l'illusion qu'ils recevront quelques miettes.
En réalité, la participation financière, comme l'actionnariat salarié, est une arme redoutable permettant de flexibiliser les salaires et d'individualiser les rapports sociaux. Avec ce dispositif, la rémunération des travailleurs vient après les profits et devient quasiment subsidiaire, soumise aux aléas des marchés boursiers et des investissements financiers.
Les conséquences sur l'organisation du travail sont lourdes.
De façon insidieuse, ces formes de rémunérations contournent les structures collectives existantes, qui protègent le salarié dans la relation inégalitaire qui le lie à son employeur. Le salarié se retrouve seul face à son patron qui lui, en revanche, dispose de moyens de pression bien plus importants que lorsque la rémunération dépend uniquement des négociations collectives ou des accords de branches.
Tel est le monde du travail dont rêve le MEDEF : une structure sociale organisée autour de l'entreprise, qui aurait assimilé ses salariés à un point tel que toute revendication aurait disparu et où la dégradation des conditions d'emploi et de salaire serait admise au nom de l'impératif de profit. Il suffit pour s'en convaincre de lire les brochures de Mme Parisot !
La lecture de vos intentions est plus évidente encore dans le titre III du projet de loi intitulé « Dispositions relatives au droit du travail ». On y retrouve la même volonté de flexibiliser plus encore la main-d'oeuvre. La mise à disposition de travailleurs équivaut tout simplement à un prêt de salariés, ce qui était jusqu'à présent illégal, selon une jurisprudence constante.
La même volonté d'éclatement du monde salarial s'exprime à travers le congé de mobilité, qui prive le travailleur de la protection de son contrat de travail, sans qu'il dispose pour autant des garanties offertes par le système des ASSEDIC. C'est déjà le cas avec le contrat de transition professionnelle, dont on nous demande de ratifier l'ordonnance.
Le même objectif est enfin présent dans la suppression de la contribution Delalande, qui permettra aux entreprises de licencier plus facilement leurs salariés âgés.
S'agissant enfin de la lettre rectificative venue compléter le projet de loi à la rentrée parlementaire, je ne m'attarderai pas sur la méthode, dorénavant courante pour ce Gouvernement, qui consiste à glisser dans les textes législatifs des dispositions dépourvues de tout lien avec eux, mais qui procèdent, au gré des déclarations ministérielles, de l'opportunisme politique. À cet égard, nous sommes sacrément gâtés !
M. Guy Fischer. Tout y passe !
M. Roland Muzeau. Des clubs de football au chèque-transport, tout y passe, en effet !
Nous examinerons ainsi l'autorisation de cotation boursière des clubs sportifs, une disposition qui est pourtant loin de faire l'objet d'un consensus dans la majorité, tant les exemples étrangers nous incitent à la plus grande réserve.
Nous nous pencherons aussi sur la création du chèque-transport, un dispositif qui, laissé au libre choix de l'entreprise, restera probablement sans effet, mais qui présente tout de même l'avantage pour les entreprises de bénéficier d'un niveau non négligeable d'exonérations de charges.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, les annonces de moralisation des marchés financiers ou les soi-disant déblocages de participation ne parviennent pas à nous convaincre. Alors, sans illusions sur la volonté de la Haute Assemblée d'accepter de recentrer le débat sur les questions de la qualité des emplois et du niveau de la rémunération salariale, nous voterons contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui est à la fois très technique, mais aussi éminemment politique.
Le sujet est complexe parce que l'épargne salariale met en jeu des questions aussi diverses que la motivation des salariés, leur droit de participer aux bénéfices ou à l'enrichissement patrimonial des entreprises, les formes nouvelles de management, l'organisation du pouvoir dans l'entreprise, le droit de chacun d'utiliser cette épargne de manière variée, ou encore le financement des entreprises.
Le sujet est politique parce l'on peut concevoir l'épargne salariale d'au moins deux façons différentes.
Soit on peut y voir une méthode pour faire mieux fonctionner les mécanismes de marché en introduisant des formes nouvelles de flexibilité des rémunérations et d'incitation à la performance. Le but poursuivi relève alors essentiellement de l'optimisation économique.
Soit on peut s'attacher à construire une conception régulationniste et négociée de l'épargne salariale, conçue comme un élément important d'un nouveau contrat social axé sur la recherche d'une performance globale, à la fois économique et sociale.
Enfin et surtout, dans le contexte actuel, le sujet est d'importance car il s'agit de faire face à un triple défi : celui du pouvoir d'achat des ménages, des relations du travail et de la mutation du capitalisme. Sur ces trois sujets, les réponses qu'apporte ce projet de loi me semblent contestables. C'est ce que je m'emploierai à vous démontrer.
Le Gouvernement et la majorité, se référant à l'héritage gaulliste, nous parlent d'un projet de société. C'en est un, certainement. Mais pour ce projet de société, vous avez choisi une conception étroite de l'épargne salariale, celle qui, au nom de la performance économique, s'appuie sur la précarisation du salariat. Depuis 2002, vous avez beaucoup fait en la matière, qu'il s'agisse de l'organisation du travail ou du contrat de travail. Aujourd'hui, vous vous attaquez à une nouvelle cible : le salaire.
Depuis une vingtaine d'années, le salariat connaît une désarticulation et une fragmentation progressive : sa valorisation économique décline, son unité sociale est de plus en plus problématique et ses capacités d'action sont affaiblies. Dans le contexte actuel de croissance modérée, il subit de plein fouet la fragilité de l'emploi, la stagnation des salaires et l'érosion du pouvoir d'achat.
Dans ce contexte, la diffusion de l'épargne et de l'actionnariat salarié n'est pas, contrairement à ce que vous prétendez, la panacée sociale. Aujourd'hui, les dispositifs d'épargne salariale font partie intégrante des politiques salariales dans un contexte de décentralisation des négociations salariales à l'oeuvre depuis les années quatre-vingt. La participation financière est ainsi devenue l'un des vecteurs d'individualisation et de diversification croissante des formes de rémunération.
Il ne s'agit bien évidemment pas de rejeter en bloc le principe de la participation et de l'intéressement. L'idée originelle, qui était d'encourager une certaine synergie entre capital et travail, est toujours d'actualité.
Néanmoins, la logique actuelle, également à l'oeuvre dans ce texte, consiste plus à flexibiliser les salaires qu'à améliorer le pouvoir d'achat des salariés et à promouvoir de nouvelles relations au sein de l'entreprise.
En effet, les dispositifs d'épargne et d'actionnariat salarié favorisent le rapprochement des logiques et des stratégies entre marché financier, entreprises et salariés. La tendance actuelle, qui consiste à accentuer la part du profit dans les rémunérations, a pour conséquence de rendre les politiques salariales dépendantes de la Bourse et de la finance.
Ainsi, le principe du partage des risques devient une composante essentielle de l'emploi et du salaire. C'est ce qu'illustre parfaitement l'introduction dans ce texte de la notion de dividende du travail, qui n'a d'autre objet que de créer une part de salaire complémentaire aléatoire, laquelle se substitue à une véritable hausse du salaire et donc du pouvoir d'achat.
Sans compter que le développement de l'actionnariat salarié, par le biais des actions gratuites ou des stock-options, autres dispositions de ce texte, a tendance à peser fortement sur les choix stratégiques des dirigeants d'entreprises qui font de la rentabilité financière leur objectif unique, bien souvent au détriment de la croissance et de l'emploi dans les investissements.
En fait, les dispositifs qui concourent à faire dépendre la rémunération du travail des résultats de l'entreprise, dans le contexte actuel de maximation de la valeur pour les actionnaires, ont pour résultat, non un partage a posteriori des richesses, mais une rupture avec la garantie statutaire constitutive du salariat, en faisant porter l'ajustement sur les revenus salariaux.
Pour nous, socialistes, la rémunération du travail passe avant tout par le salaire, et non par l'allocation de dividendes. Le risque financier ne peut pas reposer sur les épaules des salariés ;...
M. Jean-Pierre Michel. Très bien !
M. Jean-Pierre Godefroy.... c'est aux associés qu'appartient la charge du risque en contrepartie des dividendes qu'ils perçoivent. Pour les salariés, les dividendes ne peuvent constituer qu'un supplément de rémunération ; la revalorisation des salaires doit, elle, passer par la négociation collective.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
M. Jean-Pierre Godefroy. D'autant plus que le pouvoir d'achat que ce texte prétend leur donner est différé et hypothétique.
Du fait même qu'ils sont employés par une entreprise, le sort des salariés est déjà étroitement lié à celui de leur société, que ce soit en matière de rémunération, de carrière ou de pérennité de l'emploi.
Obliger un salarié à détenir en plus une part significative de son épargne personnelle sous la forme d'actions de cette même entreprise relève d'une grande imprudence. La diversification des placements est normalement un principe de base des investisseurs économiques.
L'épargne et l'actionnariat salarié, ce n'est pas non plus la panacée en matière de patriotisme économique. Le capital des grandes entreprises françaises est très dispersé et plus dépendant d'investisseurs étrangers que celui des firmes équivalentes dans la plupart des autres pays industrialisés.
Cela pose effectivement un problème. La proximité géographique et culturelle entre investisseurs et entreprises facilite incontestablement la stabilité du capital et le déploiement de stratégies industrielles plus ambitieuses et de long terme, car elle rend plus aisé l'établissement de relations dans la durée et permet une compréhension plus fine des objectifs poursuivis.
Pour autant, la solution à ce problème ne peut pas être recherchée seulement du côté de l'actionnariat des salariés eux-mêmes. Elle ne peut venir que d'une mobilisation accrue de l'épargne des autres habitants de notre pays, aujourd'hui prioritairement tournée vers des investissements « sans risque ».
Quant au pouvoir des salariés dans les entreprises, il s'agit, en réalité, d'un faux-semblant : quelles que soient les règles qui encadrent la gestion de l'actionnariat salarié, en pratique, ce sont toujours les directions qui gardent le contrôle.
D'ailleurs, les représentants du patronat que nous avons auditionnés ont d'ores et déjà annoncé qu'ils limiteraient l'actionnariat salarié à 2,99 % pour éviter la présence des représentants des salariés actionnaires dans leur conseil d'administration. On ne peut pas mieux dire !
Si on veut réellement, comme c'est effectivement indispensable, accroître le pouvoir des salariés eux-mêmes, notamment en cas d'OPA, il faut accroître les pouvoirs des instances de représentation du personnel et leur donner, comme en Allemagne, un pouvoir de « codétermination » sur un certain nombre de questions, par exemple, et non plus seulement un rôle subalterne d'information et de consultation, comme c'est le cas aujourd'hui.
Il faut également prévoir la représentation des salariés dans les conseils d'administration - représentation des salariés en tant que tels, et non seulement en tant qu'actionnaires salariés. C'est ce qui est déjà prévu dans la moitié des pays européens.
D'ailleurs, je voudrais que vous m'expliquiez pourquoi il est possible de nommer dans ces conseils d'administration et autres conseils de surveillance des personnalités extérieures, selon l'expression des personnalités dites « qualifiées », et pas les salariés tout aussi « qualifiés » de cette entreprise ! Je ne suis pas sûr que l'on puisse dire que ces personnalités extérieures soient vraiment neutres puisque, de fait, elles sont cooptées par les administrateurs en place.
Un autre danger de l'épargne salariale est de « patrimonialiser » le salariat, c'est-à-dire de confier une partie des fonctions de l'État-providence, notamment les retraites et les cotisations vieillesse, à des instances d'accumulation d'épargne où, par définition, les plus modestes pourront consacrer proportionnellement moins.
C'est exactement ce que fait ce texte : plusieurs dispositions, notamment les articles 11 et 12, organisent le détournement de l'épargne salariale vers l'épargne retraite et, pourquoi pas, demain, vers l'épargne santé, voire l'épargne dépendance !
Mme Gisèle Printz. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Godefroy. En fait, ce projet de loi, loin de permettre d'augmenter la rémunération globale des salariés, entérine et risque d'amplifier un mouvement déjà largement amorcé de substitution de l'épargne salariale aux salaires, ainsi que le manque à gagner pour les régimes de sécurité sociale, sans qu'aucune compensation soit prévue. Cela intéressera certainement notre collègue Alain Vasselle !
Le message que le Gouvernement entend porter est d'autant plus brouillé que sont venues se greffer sur ce texte des dispositions qui n'ont rien à voir avec l'épargne ou l'actionnariat salariés.
Le nombre de cavaliers introduits - j'oserai dire, monsieur Larcher, que c'est le peloton de l'Arc de Triomphe que vous nous offrez aujourd'hui ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) -...
M. Jean-Pierre Godefroy. Cavalier, cheval... et les apprentis à 14 ans ! On y reviendra...
M. Alain Gournac. Je vais vous inviter dans les Yvelines !
M. Guy Fischer. On se croirait à Rambouillet !
M. Jean-Pierre Godefroy. Mais ce qui est quand même le plus frappant, c'est l'article 44 - à défaut de chevaux, on y trouve des joueurs de ballon. Sans doute nous expliquerez-vous ce que cela a à voir avec le sujet initial.
Pour redevenir un peu plus sérieux, venons-en au titre III, ajouté dans la précipitation « post-crise CPE », qui contient, encore une fois, des dispositions régressives pour le droit du travail et les intérêts des salariés.
Dans ce domaine, la politique menée depuis cinq ans a déjà ébranlé en profondeur notre pays : suppression d'un jour férié, relèvement du contingent d'heures supplémentaires, contrat nouvelle embauche, tentative d'exclusion des moins de 26 ans dans le calcul des seuils sociaux, échec frappant du CPE... Ce ne sont que quelques exemples de la politique sociale menée depuis juin 2002 par les gouvernements successifs.
M. Guy Fischer. Voilà la réalité !
M. Jean-Pierre Godefroy. Votre objectif, c'est la destruction du contrat social fondé sur l'égalité des chances et la solidarité, pour mettre en place avec méthode et application, je le reconnais, un modèle libéral où les instruments d'une politique active contre les inégalités sont détruits un à un, où les droits sociaux sont dénoncés et remis en cause de manière quasi systématique.
Résultat : aujourd'hui, « la France est le pays industrialisé où le sentiment d'insécurité de l'emploi est le plus élevé ». Ce n'est pas ainsi que l'on redonnera de l'espoir à notre pays.
M. Jean-Pierre Michel. Très bien !
M. Jean-Pierre Godefroy. Alors que la droite met au coeur de son programme l'aggravation des précarités, nous, socialistes, nous proposons de refonder le lien au travail, de réconcilier progrès économique et progrès social en offrant aux salariés de nouvelles garanties compatibles avec la mutation des modes de production.
M. Alain Gournac. Nous ne sommes pas contre cela !
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous pourrez donc voter nos amendements, monsieur Gournac !
C'est pourquoi nous voulons mieux d'État, plus de dialogue social et de sécurité, ainsi que la construction avec les partenaires sociaux d'une nouvelle sécurité professionnelle.
C'est d'ailleurs assez rare pour être souligné, l'Assemblée nationale a supprimé un certain nombre de ces dangereux cavaliers. Comment pouvez-vous prétendre sécuriser les parcours professionnels en prévoyant que les salariés à temps partiel pourront « boucler leurs fins de mois » en ayant recours à l'intérim ? En aucun cas, il ne peut s'agir d'une sécurisation !
Il est finalement assez savoureux de voir le président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale reconnaître timidement dans son rapport que cela comporte des risques sur le plan humain. C'est le moins que l'on puisse dire !
Cette disposition a été retirée, et j'espère qu'elle ne sera pas « ressuscitée », certaines résurrections étant programmées ; je pense à la disposition relative aux prud'hommes, que l'Assemblée nationale avait été bien inspirée de supprimer et que la commission des affaires sociales du Sénat nous propose de réintroduire dans le texte.
M. Jean-Pierre Michel. Le MEDEF est passé par-là !
M. Jean-Pierre Godefroy. Nous y sommes opposés, bien sûr !
Parmi les dispositions sur lesquelles nous reviendrons au cours de l'examen des articles, je voudrais d'ores et déjà en aborder trois.
L'article 14 quater, qui supprime toutes les règles de transmission des informations et de discussion devant le comité d'entreprise dans les entreprises de plus de 300 salariés...
M. Jean-Pierre Michel. C'est incroyable !
M. Jean-Pierre Godefroy.... est un casus belli pour toutes les organisations syndicales.
C'est une revendication ancienne du MEDEF, qui permet au chef d'entreprise de véritablement restreindre l'information du comité d'entreprise. Cette disposition est paradoxale dans un texte sur la participation et l'intéressement, à l'occasion duquel le Gouvernement prétend vouloir engager une nouvelle approche des relations du travail dans l'entreprise et, je vous cite, monsieur Larcher, « associer les salariés plus intimement à la prise de la décision ». Il est surprenant que cela commence par la mise à l'écart du comité d'entreprise... (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Guy Fischer. Et voilà !
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 23, lui, instaure un congé de mobilité proposé par les entreprises aux salariés menacés de licenciement.
En réalité, ce congé est une nouvelle concession du Gouvernement à une autre revendication ancienne du MEDEF, qui exploite et détourne ainsi la gestion prévisionnelle des emplois afin de contourner la contrainte de l'obligation du congé de reclassement. Il est créé de la sorte une nouvelle forme de rupture du contrat de travail, de gré à gré, sans aucune garantie pour le salarié à l'issue de cette période de mobilité. Ce n'est pas la première fois que vous vous y essayez !
M. Roland Muzeau. Ce sont des récidivistes !
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est ainsi qu'il n'aura pas droit aux allocations chômage s'il ne retrouve pas d'emploi. Sans compter que, pendant la période de la mobilité, la personne ne figurera pas sur les chiffres du chômage, mais sur ceux de la formation professionnelle - encore un artifice comptable qui peut servir ! (M. Fischer applaudit.)
M. Jean-Pierre Michel. Et on dit que le chômage baisse !
M. Jean-Pierre Godefroy. Quant au chèque transport, ajouté par lettre rectificative fin septembre, c'est une mesurette destinée à faire oublier le refus par M. le Premier ministre de rétablir la TIPP flottante pour minimiser les effets de la hausse des prix du carburant.
M. Jean-Pierre Michel. Il faut bien plaire aux électeurs !
M. Jean-Pierre Godefroy. Je souligne d'ailleurs que, si la hausse du prix des carburants à la pompe a été très rapide, la baisse ne suit pas le même rythme !
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous me le démontrerez, monsieur le ministre !
Non seulement l'effet de cette mesurette sur le pouvoir d'achat sera limité, mais en plus tous les salariés n'y auront pas accès puisque le dispositif est facultatif.
Par ailleurs, il ne faudrait pas que la création du chèque transport serve de prétexte pour remettre en cause sous une forme ou sous une autre, comme le demandent déjà certains employeurs, le versement transport qui sert à financer les transports urbains collectifs.
M. Jean-Pierre Michel. Voilà !
M. Jean-Pierre Godefroy. À l'heure où M. le Président de la République développe de grands discours sur le dialogue social,...
M. Jean-Pierre Michel. On est habitué !
M. Jean-Pierre Godefroy.... j'ajouterai pour conclure un mot sur la méthode.
Un important travail de concertation entre les partenaires sociaux avait été fait au sein du conseil supérieur de la participation, travail qui avait permis d'arriver à un certain consensus et à un texte d'équilibre.
Le Gouvernement, madame, messieurs les ministres, a fait un premier accroc à ce dernier en le dénaturant par l'introduction des nombreux « cavaliers » que je viens d'évoquer.
À voir certains des amendements qui ont été déposés, on a d'ailleurs quelques raisons d'estimer que ce texte ressemble de plus en plus à un projet de loi portant diverses mesures d'ordre économique et social - un « DMOES », comme on dit - et il serait intéressant de savoir ce que penserait le Conseil constitutionnel du nombre de « cavaliers » qui y ont été introduits s'il en était saisi.
M. Jean-Pierre Sueur. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Michel. Ce sont les cavaliers de l'apocalypse ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Godefroy. L'Assemblée nationale a fait un deuxième accroc en rompant le consensus et en bouleversant l'équilibre du texte par le vote de plusieurs amendements directement inspirés par le patronat, et je crains que le Sénat ne continue dans cette voie !
Les syndicats sont donc largement fondés à se sentir floués par le double jeu permanent du patronat et du Gouvernement, dont la conception du dialogue social et de la concertation fluctue au gré des humeurs, des circonstances et des lieux d'expression.
M. François Marc. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Godefroy. Pour toutes ces raisons, vous l'aurez compris, nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Alain Gournac. Vous avez tort !
M. Jean-Pierre Michel. C'est une séance d'équarrissage ! (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.
M. Jean-Léonce Dupont. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, mieux associer les salariés aux résultats et à la gestion de leur entreprise est une idée ancienne dont le général de Gaulle a posé les premiers jalons, voilà près de quarante ans, avec les ordonnances de 1959 sur l'intéressement et de 1967 sur la participation.
Depuis, le cadre juridique en la matière s'est enrichi et amélioré, et si la France est en retard en ce domaine par rapport aux pays anglo-saxons, elle demeure en avance sur d'autres pays européens.
Pour autant, le bilan de cette politique est en demi-teinte, car, à l'heure actuelle, seul un actif sur trois a accès à l'épargne salariale dans notre pays.
En outre, les données statistiques fournies par le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement font apparaître d'importantes inégalités entre les salariés selon la taille de leur entreprise. Ainsi, en 2004, 92 % des salariés ayant accès à un dispositif d'épargne salariale travaillaient dans des entreprises d'au moins cinquante salariés.
S'ajoute à ce constat l'étude de l'INSEE sur les salaires en France en 2006, étude dont les conclusions vont dans le même sens, à savoir l'inégalité entre les salariés du fait des dispositifs de participation et d'épargne salariale selon la taille de l'entreprise et le secteur d'activité, et l'inégalité de la répartition des sommes liées à l'épargne salariale.
Ce grand projet de mieux associer les salariés aux résultats et à la gestion de leur entreprise reste donc inachevé. C'est par conséquent à bien juste titre que les députés François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain considèrent, dans leur rapport au Premier ministre consacré à la participation de septembre 2005, que la participation reste une idée neuve pour une économie moderne et réaffirment sa double dimension sociale et financière.
Nous savons tous que, plus la participation et l'actionnariat des salariés seront forts et bien organisés, plus les salariés soutiendront les intérêts de l'entreprise et formeront un contre-pouvoir face à des actionnaires étrangers.
Alors, monsieur le ministre, même si le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié que vous nous présentez est un peu un texte « fourre-tout » - que les députés ont d'ailleurs tenté de recentrer sur son objet initial -, qui comprend des mesures importantes dépassant de loin le seul cadre de l'épargne salariale et de la participation, je considère que c'est bien opportunément que le Parlement est saisi de ce sujet.
Je déplore en revanche qu'une fois encore le Parlement doive examiner un texte important selon la procédure d'urgence.
S'agissant du projet de loi en lui-même, le texte qui nous est soumis tente d'établir un équilibre, même si celui-ci n'est certainement pas abouti, entre le volet financier de la participation et de l'épargne salariale, d'une part, l'information et la formation des salariés ainsi que la sécurisation des dispositifs à leur égard tout en conservant une certaine souplesse et en restant incitatif pour les entreprises, d'autre part.
Dans cet ensemble, l'objectif est d'adapter notre modèle économique et social à la globalisation, de le rendre plus performant, plus compétitif tout en accompagnant les mutations et en cherchant à protéger les salariés.
Pour ce faire, il s'agit de décloisonner et de fluidifier : décloisonner et fluidifier les rapports entre travail et capital grâce à l'épargne salariale ; décloisonner et fluidifier le marché du travail en sécurisant les parcours professionnels.
C'est ainsi que nous pourrons gagner en flexibilité, en productivité, et combattre durablement le chômage par une plus grande adaptabilité des salariés.
Les raisons de développer l'épargne salariale en général et l'actionnariat salarié en particulier ne manquent pas.
Du point de vue du salarié, ces mécanismes permettent à celui-ci de se constituer une épargne à des conditions fiscales très privilégiées.
Du point de vue de l'entreprise, outre le vecteur de cohésion sociale qu'ils constituent, les dispositifs de participation, d'intéressement et les PEE motivent ses salariés en les associant à la richesse créée par l'entreprise, contribuent à la stabilité du capital dans un contexte de mondialisation, permettent de dégager des liquidités et de constituer des noyaux stables d'actionnaires. Sous cet angle, l'épargne salariale peut effectivement apparaître comme un moyen pour les entreprises cotées de se défendre contre des OPA hostiles.
Enfin, du point de vue de l'économie française dans sa globalité, l'épargne salariale approfondit et liquidifie nos marchés financiers. C'est un instrument de lutte contre la suprématie financière des fonds de pension, notamment américains.
Mais, d'un autre côté, le développement de la participation, de l'intéressement, des dons d'actions, des abondements de PEE ne doit pas se faire au détriment de la politique salariale ou du financement de la protection sociale.
Aussi, le développement de l'épargne salariale ne peut-il se faire que dans un cadre sécurisé. C'est ce que propose le projet de loi.
Pour ma part, je retiendrai que ce texte incite à étendre la participation à toutes les entreprises, et notamment les petites et moyennes entreprises, avec le double souci de ne pas entraver leur bon fonctionnement et de renforcer l'information des salariés. Il ouvre la possibilité de l'épargne salariale aux entreprises de moins de cinquante salariés, au conjoint collaborateur ou aux entreprises situées en zone franche urbaine.
Ainsi, le projet de loi devrait favoriser un développement horizontal, c'est-à-dire élargir le nombre de salariés couverts, et un développement vertical, c'est-à-dire accroître l'épargne des salariés déjà couverts.
Premièrement, inscrire à l'agenda des partenaires sociaux la négociation de régimes de participation au niveau de la branche dans un délai de trois ans devrait substantiellement améliorer la couverture des PME. Il en est de même de l'article élargissant la négociation aux groupements d'employeurs et aux GIE et de celui portant création de l'intéressement de projet.
Deuxièmement, permettre le versement d'un supplément de participation et d'intéressement développera l'épargne quantitativement là où elle existe déjà. Permettre le versement de sommes du compte épargne-temps vers le PEE ou le PERCO va dans le même sens.
La notion de participation englobe deux aspects distincts et complémentaires du fonctionnement de l'entreprise. Pour les salariés, participer c'est, d'une part, contribuer au financement de leur entreprise et de l'économie, et, d'autre part, agir sur la gestion même de l'entreprise.
Or, si le projet de loi qui nous est soumis traite bien l'aspect strictement financier de la participation, il n'aborde pas de façon assez approfondie les questions relatives à la gouvernance de l'entreprise, inévitablement posées par le concept même de participation.
Je dois toutefois saluer les articles facilitant la reprise de leur entreprise par les salariés et celui portant sur l'obligation de représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration de leur société dès lors qu'ils détiennent plus de 3 % de son capital. Il paraît en effet fondamental que les salariés soient consultés sur les décisions qui concernent l'entreprise.
En outre, je pense que c'est à tort que certains chefs d'entreprise expriment des craintes quant aux conséquences de la participation d'un représentant des salariés actionnaires au sein du conseil d'administration de leur société.
M. Jean-Léonce Dupont. Cela ne peut qu'enrichir les délibérations et donner un autre éclairage intéressant sur l'entreprise. D'ailleurs, des sociétés qui ont déjà emprunté cette voie l'ont fait, me semble-t-il, avec succès.
M. Jean-Léonce Dupont. À terme, nous ne ferons pas l'économie d'une réflexion approfondie sur la gouvernance d'entreprise. Améliorer l'information du comité d'entreprise comme le fait le projet de loi est une bonne chose, certes. Mais le comité d'entreprise ne gère pas ; il n'émet que des avis.
Si l'on veut réellement développer la participation, ce sont les conseils d'administration qu'il faut changer et qu'il faut ouvrir aux salariés. (M. Jean-Pierre Godefroy applaudit.)
Les sénateurs du groupe UC-UDF vous présenteront des amendements en ce sens.
J'en viens au volet « information et formation des salariés, sécurisation des dispositifs à leur égard ».
L'aspect sécurisation de l'épargne salariale est omniprésent dans ce projet de loi. Au départ, l'un des objectifs premiers de l'épargne salariale était de sécuriser le capitalisme. Avec le développement de l'épargne salariale, les salariés, eux aussi, ont besoin de plus de sécurité.
La première sécurité est de connaître ses droits. C'est pourquoi je salue la concrétisation par ce texte du livret d'épargne salariale dont bénéficieront tous les salariés couverts, ainsi que la mise en place de formation à l'épargne salariale dans le cadre de la formation tout au long de la vie, ou encore la mise en place obligatoire de comités de suivi des accords de participation ou d'intéressement. La sécurité est accrue avec les nouvelles procédures a priori de contrôle des accords.
Le fait d'orienter la participation prioritairement vers les PEE est aussi une mesure de sécurité très importante, ces plans étant les meilleurs outils de diversification des risques.
Cependant, en matière de sécurité, le texte nous semble pécher sur deux points essentiels.
D'abord, le supplément d'intéressement et de participation doit être plafonné pour éviter toute substitution entre salaire direct et indirect. La commission des affaires sociales nous proposera un amendement dans ce sens. C'est à nos yeux un amendement fondamental.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je vous remercie.
M. Jean-Léonce Dupont. Ensuite, une des mesures les plus importantes du projet est la réforme du mode de calcul de la réserve spéciale de participation. Pour l'heure, elle ne nous semble pas idéale.
Nous pensons que les déficits d'investissement des entreprises n'ayant pas conclu d'accord dérogatoire de participation doivent pouvoir rester indéfiniment déductibles de leur résultat fiscal, au contraire de leurs déficits courants. Sécuriser, c'est aussi faire en sorte que l'épargne salariale ne se substitue pas aux investissements de l'entreprise.
Pour finir, j'évoquerai les mesures proposées dans le domaine du droit du travail et en matière financière du projet de loi.
Le volet relatif au droit du travail comprend des avancées notables.
Ainsi, les mesures de sécurisation des parcours professionnels vont-elles dans le sens d'une fluidification du marché du travail tout en garantissant aux salariés un accompagnement réel lors des transitions. Il s'agit non plus de subir les mutations, mais de les anticiper. Nous ne pouvons que souscrire à ce changement dynamique de perspective.
Plus précisément, l'expérimentation du prêt de main-d'oeuvre nous paraît adaptée pour favoriser les synergies dans le cadre des pôles de compétitivité que l'UDF appelait de ses voeux depuis de nombreuses années.
Le congé de mobilité et le contrat de transition professionnelle pourront aussi être des outils efficaces et sécurisés de réorientation et de reclassement professionnel.
Il faut explorer ces voies, il faut les développer, de même qu'il faut parallèlement abandonner les voies de garage. À mon avis, la contribution Delalande en est une. Elle pénalise plus qu'elle ne protège l'emploi des seniors, comme le démontrent les conclusions d'une enquête menée par l'INSEE en 2004. Prévoir sa suppression d'ici à 2010 est une bonne chose. Ne nous leurrons pas cependant : sa simple suppression ne permettra pas d'élever le taux d'activité des seniors dans notre pays, qui est l'un des plus bas d'Europe.
M. Jean-Léonce Dupont. Pour mémoire, je vous rappelle que le sommet européen de Lisbonne, en 2000, avait fixé l'objectif d'un taux d'emploi de 50 % pour les 55-64 ans. En France, ce taux est aujourd'hui de 37 %, contre 69 % en Suède.
Aussi, je me réjouis que le Gouvernement ait décidé de prendre à bras-le-corps cette question et ait élaboré, dans la concertation, un plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors, tendant à augmenter le taux d'emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans de l'ordre de 2 % par an sur la période 2006-2010.
En ce qui concerne les dispositions relatives à l'épargne et au financement de l'économie tendant à sécuriser la commercialisation des produits financiers, le groupe UC-UDF défendra des amendements visant à compléter et améliorer les règles d'enregistrement des démarcheurs financiers.
L'une de ces mesures nous est très chère : il s'agit de celle qui figure à l'article 44, abrogeant l'interdiction pour les sociétés anonymes sportives de faire appel public à l'épargne. Michel Mercier avait déposé une proposition de loi pour l'obtenir : nous nous félicitons qu'il ait été finalement entendu.
Par ailleurs, nous sommes favorables à la création du chèque transport, mais à condition que sa nature juridique soit sans ambiguïté. L'émission de chèques transport ne doit en aucun cas être analysée comme une opération bancaire.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Tout à fait.
M. Jean-Léonce Dupont. Nous déposerons un amendement pour que cette précision importante soit apportée au texte.
Enfin, en ce qui concerne l'article additionnel tendant à mieux encadrer les conditions d'exercice des stock-options attribuées aux dirigeants d'entreprise ainsi que la détention d'actions gratuites, je salue le dispositif adopté par l'Assemblée nationale.
Compte tenu de certaines polémiques récentes, je craignais que le Parlement ne cède au lynchage facile et démagogique des chefs d'entreprise, tant il est difficile dans notre pays de parler d'argent, et notamment de l'argent gagné par des hommes qui assument de lourdes responsabilités.
M. Jean Desessard. Argent abusivement gagné !
M. Jean-Léonce Dupont. Le rôle majeur donné à l'Autorité des marchés financiers, qui sera informée des pratiques des entreprises en la matière, ne peut qu'assurer plus de transparence et limiter les abus. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, « il manque à la société mécanique moderne un ressort humain qui assure son équilibre ».
Ce qui était vrai du temps des Mémoires d'espoir du général de Gaulle, l'est encore davantage aujourd'hui.
La société mondiale n'est plus seulement mécanique par ses techniques et ses technologies, elle le devient aussi par certains de ses principes.
La financiarisation de la mondialisation bouscule évidemment partout les relations de travail.
Si nous préférons, en France, le mot de mondialisation à celui de globalisation, c'est que ce dernier porte en lui cette idée, dénoncée par le général de Gaulle, d'ordre mécanique du monde.
La globalisation signifie que les mêmes règles, les mêmes mécaniques, s'appliquent à tous, au-delà de toutes les frontières.
Poussées à leurs limites, l'idée de mondialisation implique la dialectique des continents - entre l'Europe et la Chine, l'Inde ou l'Amérique -, mais l'idée de globalisation, quant à elle, annonce la fin de la politique.
Dans ce dernier cas en effet, une seule règle mondiale, la compétitivité, s'applique à tous les territoires, par-dessus les États, qui, parce qu'ils deviennent globaux, se demandent aujourd'hui s'ils sont toujours nationaux.
Plus on abaisse les frontières et plus on affaiblit ou l'on transfère les souverainetés.
Cette perspective de l'ultra-compétitivité est au coeur du débat d'aujourd'hui, parce qu'elle porte en elle la dissolution du lien entre capital et travail.
Avec la mondialisation, le capital est de plus en plus nomade ; avec de nouvelles logiques financières, il est aussi de plus en plus anonyme ; avec la montée des égoïsmes, il est de plus en plus pressé.
Alors que les salariés en particulier, mais les citoyens en général, cultivent à l'inverse leur identité, valorisent leurs racines et cherchent à être maîtres de leur temps, la relation entre capital et travail est grignotée par l'indifférence.
De nombreuses forces mondiales accélèrent, hélas ! ce phénomène.
La croissance chinoise est en partie fondée sur la captation financière des bons du trésor américains, pour valoriser le travail dans l'« empire ».
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. La croissance des inégalités et des égoïsmes dans tous les pays conduit à l'écrasement des classes moyennes, pourtant capables d'être médiatrices entre le travail et le capital.
La perte de souveraineté frappe certains États qui confient trop largement leurs intérêts au libre-échange et perdent progressivement leur capacité à affirmer leur modèle et surtout leurs pratiques sociales.
Enfin, les importants écarts qui existent entre le degré de modernité des pays, s'ils nous invitent évidemment au refus de l'ethnocentrisme, ne légitiment pas que nous étouffions nos valeurs qui, comme le travail, font partie pour nous du progrès universel.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Si j'ai élargi quelque peu ma réflexion, ce n'est pas pour m'écarter du texte que nous discutons aujourd'hui, mais pour vous faire part de ma conviction : le projet gaulliste de participation est un projet politique du XXIe siècle.
Dans la société de la connaissance, l'espoir se loge dans l'intelligence humaine.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je partage cette conviction avec M. le ministre des finances.
C'est un pilier de cet « humanisme de la vie » qui doit être notre réponse à la globalisation humainement désertique que nous propose cette partie de l'Occident avec laquelle nous ne sommes souvent pas d'accord et avons quelques différences.
Ce projet, pour moi, repose sur deux conditions déterminantes : donner de la force à la participation grâce à l'Europe et montrer l'exemple en renforçant sa place dans le modèle français.
Parce que la mondialisation ne se résume pas au multilatéralisme, je crois que, plus que jamais, nous avons besoin de relations bilatérales, de continent à continent, pour maintenir l'équilibre des forces et ainsi l'équilibre de la planète. À ce propos, je me félicite de votre présence au banc du Gouvernement, madame la ministre déléguée au commerce extérieur.
Je suis convaincu, par exemple, que le multilatéralisme de l'OMC ne suffira pas pour que la Chine assume toutes les règles du commerce international. Pour cela, je plaide pour une stratégie européenne de partenariat avec la Chine de façon que, par la relation bilatérale, on dose les rapports de force, jusqu'à l'équilibre des échanges. Il en va de l'avenir du travail industriel sur notre continent.
Pour l'équilibre du monde et pour l'humanisation de la mondialisation, il faut développer une nouvelle souveraineté européenne, capable de protéger nos forces, nos intérêts et nos valeurs.
Au fond, depuis le traité de Rome, le peuple français n'a pas souhaité supprimer ses frontières : il a simplement voulu les repousser aux limites de l'Europe.
Le projet européen peut sans doute trouver dans ces réflexions des forces pour sa renaissance.
La participation ne peut être aujourd'hui un grand projet que si elle devient un projet européen.
Je propose au gouvernement français de placer ce sujet au coeur des réflexions sociales de l'Union, notamment au cours du sommet annuel prévu pour en débattre. Les Allemands et les pays d'Europe du Nord seront pour nous des alliés motivés, pour peu qu'on ne les tienne pas à l'écart de cette démarche.
Si nous ne voulons pas que notre pacte social soit progressivement détricoté par la globalisation, je suis convaincu que c'est au niveau européen qu'il faudra faire de la résistance, c'est-à-dire construire des alliances.
La deuxième condition du projet politique de la participation est aujourd'hui entre nos mains : il ne tient qu'à nous de renforcer sa place dans le modèle social français tel que nous le propose aujourd'hui le Gouvernement.
La participation est à ce jour une spécificité française.
En 2004, les bénéficiaires de la participation financière ont reçu, en moyenne, 1 830 euros, et ce sont plus de 8 millions de salariés qui y ont accès.
J'ai annoncé la relance de la participation le 23 mars 2005 devant le Conseil économique et social. Je remercie le gouvernement actuel et le Premier ministre d'avoir prolongé cette initiative. Avec le Président de la république, nous souhaitions qu'elle devienne un axe fort de la politique gouvernementale, et ce pour trois raisons au moins.
D'abord, grâce à l'actionnariat salarié, la participation facilite le recyclage des profits vers la consommation des Français. Les salariés doivent bénéficier d'un retour financier sur l'accroissement de la valeur de leur entreprise : c'est ce que l'on a appelé le « dividende du travail », concept cher à Patrick Ollier et Jean-Michel Dubernard.
Ensuite, la participation favorise l'implication des salariés dans la vie de l'entreprise. C'est indispensable, au moment ou nous entrons dans l'économie de la connaissance. Plusieurs pays d'Europe l'ont compris, c'est pourquoi nous pouvons faire de la participation une dimension du modèle social européen.
Enfin, la participation favorise l'ancrage des entreprises dans leurs territoires. C'est nécessaire à la fois pour recréer de la confiance vis-à-vis de l'entreprise et pour protéger nos entreprises des OPA hostiles.
J'ajouterai volontiers une quatrième raison, qui résume en quelque sorte les trois précédentes, celle qu'évoque brillamment notre collègue Isabelle Debré dans son rapport : la participation joue un rôle majeur dans l'amélioration du climat social des entreprises et contribue fortement au développement d'un important volet d'épargne à long terme, constitué notamment dans la perspective de la retraite.
Lorsque j'avais la responsabilité du Gouvernement, j'ai nommé deux parlementaires en mission, MM. Cornut-Gentille et Godfrain, afin de mener une large concertation et de dresser la liste des modifications possibles et souhaitables.
Le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, déposé le 21 juin 2006 sur le bureau du Parlement par MM. Borloo et Breton, s'inscrit pleinement dans le cadre des recommandations des parlementaires en mission, comme l'illustrent par exemple le maintien du principe de blocage de l'épargne pour cinq ans et la modernisation de la liste des déblocages anticipés.
Parmi les mesures importantes, je citerai l'instauration d'un dividende du travail qui pourra prendre la forme d'un supplément de participation ou d'intéressement.
On retrouve également la possibilité de placer des actions gratuites sur un plan d'épargne d'entreprise ou PEE.
Il y a enfin la très importante possibilité d'un intéressement de projet, qui permettra d'associer, autour d'un projet, tant les salariés des filiales différentes d'un même groupe que les salariés d'un groupe et les sous-traitants ou partenaires sur un même site.
C'est pourquoi il me semble, monsieur le ministre, que cette logique d'intéressement de projet devrait être renforcée pour les entreprises participant aux pôles de compétitivité, meilleure réponse nationale à ce jour aux défis de la mondialisation.
M. Jean-Pierre Raffarin. Parmi les autres nouveautés importantes, il y a notamment l'extension du champ des entreprises concernées par la participation aux entreprises des zones franches urbaines, ou ZFU, et la sécurisation des accords vis-à-vis de l'administration et des organismes de recouvrement.
Je n'oublierai pas non plus les dispositions concernant la reprise d'entreprise par les salariés et celles qui sont relatives au rachat et qui devraient aider aux transmissions.
Trop souvent, la participation a été mise en avant puis oubliée. Pendant trop longtemps, nous nous sommes satisfaits de ce qu'un salarié sur deux seulement bénéficiait d'un mécanisme de participation ou d'intéressement. La participation doit maintenant devenir un chantier permanent, notre projet social des années à venir.
Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui constitue donc avant tout une étape utile, un point de départ, qui doit inaugurer une nouvelle politique que nous aurons à poursuivre tout au long de la prochaine législature.
Je souhaite saluer le travail réalisé par le Sénat à l'occasion de l'examen de ce texte. Je salue tout particulièrement Mme le rapporteur au fond, Isabelle Debré, ainsi que M. le rapporteur de la commission des finances, Serge Dassault, et M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, Alain Dufaut.
La Haute Assemblée bénéficie d'une véritable expertise concernant la participation, acquise notamment - Mme Debré l'a souligné - grâce aux constants efforts de M. Jean Chérioux et aux quinze ans de travail de M. Alain Gournac.
Mes chers collègues, permettez-moi d'évoquer de nouveau certains des enrichissements que le Sénat propose d'apporter, à l'occasion de l'examen de ce projet de loi.
Ainsi, notre commission des affaires sociales propose de réaffirmer le caractère collectif du supplément d'intéressement, puis de rétablir le plafond global de l'intéressement et de limiter le montant total de la réserve spéciale de participation.
Ces modifications me semblent essentielles afin d'écarter tout risque de substitution au détriment des salaires. En outre, comme l'a souligné Isabelle Debré, elles constituent des mesures de bonne gouvernance au regard des règles de financement de la sécurité sociale.
La commission des affaires sociales suggère de préciser dans la loi que le supplément d'intéressement sera soumis au même régime fiscal et social que la participation ou l'intéressement de base, et cette précaution me paraît nécessaire.
Je mentionnerai ensuite les modifications apportées à l'intéressement de projet, qui doivent permettre de rendre les accords conclus à cette fin autonomes des accords d'intéressement de base. Ces améliorations me semblent indispensables.
Enfin, je tiens à faire part des réflexions que Serge Dassault m'avait communiquées naguère, à Matignon, en amont de l'élaboration de ce texte, car je les retrouve à la fois dans le projet de loi et dans le rapport de la commission des finances. Je pense, en particulier, au nouveau mode de calcul de la réserve spéciale de participation.
La nouvelle formule proposée, qui serait facultative, aurait pour objet de répartir en trois tiers les bénéfices après impôt des entreprises, au profit respectivement des actionnaires, des investissements et des salariés au titre de la participation.
Mes chers collègues, nous pourrions aller plus loin en intégrant à ce calcul l'impôt sur les sociétés, et imaginer alors un nouveau partage social des résultats qui, tel un quatre-quarts (sourires), accorderait un quart aux actionnaires, un quart aux investissements - soit au total 50 % pour l'économie -, un quart à la participation et un quart à la fiscalité - soit 50 % pour le social. Mon cher collègue, un tel partage serait encore plus juste !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. C'est une excellente idée !
M. Jean-Pierre Raffarin. Les propositions du Sénat sont nombreuses et pertinentes. Je ne les citerai pas toutes, bien évidemment, puisque notre débat permettra de les examiner. Toutefois, il en est une qui ne concerne pas la participation et qui mérite une mention spéciale, car elle vise à lutter contre le chômage des salariés de plus de cinquante ans.
Afin de réduire les préventions des chefs d'entreprise à embaucher des salariés âgés, la commission des affaires sociales suggère d'avancer de deux ans, au 1er janvier 2008, la date de la suppression de la contribution Delalande, ce qui me semble une proposition raisonnable.
Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui représente un progrès pour le pouvoir d'achat des salariés, mais aussi pour la démocratie sociale.
Je remercie M. Josselin de Rohan et les membres de mon groupe, qui me permettent, pour la première fois depuis ma réélection au Sénat, de vous assurer, madame, messieurs les ministres, à la fois du soutien et de la participation du groupe UMP !
Je souhaite que nos efforts pour développer la participation se poursuivent, car ce projet de loi constitue une étape décisive, mais non suffisante. En effet, nous le savons, il ne permettra pas à lui seul de généraliser la participation, notamment dans les PME.
Aussi faudra-t-il s'appuyer sur l'expérience apportée par cette loi afin d'imaginer l'étape suivante, qui devra marquer de son empreinte notre ambition sociale pour les années à venir.
La généralisation du livret d'épargne salariale à l'ensemble des salariés pourrait constituer une piste pour favoriser la participation dans les PME ; il en est de même, peut-être, de l'abaissement du seuil pour l'application de la participation.
Je garde également à l'esprit une des propositions formulées dans le rapport Cornut-Gentille - Godfrain qui n'a pas été reprise à ce jour et qui tend à obliger les entreprises du CAC 40 à atteindre le seuil de 5 % d'actionnaires salariés dans leur capital. En effet, une telle mesure me semble indispensable si l'on veut être sûr que les salariés actionnaires soient représentés de manière satisfaisante au sein du conseil d'administration.
L'éthique de participation doit être au coeur de la pensée française de la cohésion sociale.
Cher Gérard Larcher, nous comptons aussi sur vous pour que cette démarche soit coordonnée avec celle du renouveau du dialogue social, telle que l'a proposée récemment le Président de la République. Il en va de l'avenir du progrès social dans notre pays.
Nous avons réussi ensemble quelques expériences de réformes sans drame,...
M. Jean Desessard. On l'a vu avec le CPE !
M. Jean-Pierre Raffarin.... comme la création par mon prédécesseur à Matignon du comité d'orientation des retraites, la négociation sociale avec l'engagement de la CFDT ou la décision de la démocratie représentative après l'expression populaire.
Les trois étapes successives du diagnostic, du dialogue et de la décision m'ont permis de mener à bien la réforme des retraites.
Demandons à ceux qui ont commencé à travailler dès l'âge de quatorze ans si cette réforme ne constitue pas un progrès ! Je sais qu'elle n'a pas résolu tous les problèmes,...
Mme Nicole Bricq. C'est sûr !
M. Jean-Pierre Raffarin.... mais j'attends sereinement le moment où, ensemble, nous saluerons ceux qui feront mieux ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Certains s'interrogent aujourd'hui : la France est-elle réformable ? Je réponds par l'affirmative, à condition que...
M. Roland Muzeau. La droite s'en aille !
M. Jean-Pierre Raffarin.... la réforme soit respectueuse de la participation des acteurs.
Mes chers collègues, au-delà de nos débats, voire de nos querelles, prenons conscience, ensemble, face aux désordres du monde, que le message de l'échange entre les cultures, du respect des peuples, de la paix par le dialogue, mais aussi - c'est le sujet d'aujourd'hui - de l'exigence sociale, c'est le message de la France ! (Applaudissements prolongés sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean Desessard. Il fallait rester Premier ministre ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le général de Gaulle avait instauré la participation afin de réconcilier le travail et le capital en impliquant davantage les salariés.
La participation se trouve aujourd'hui revitalisée par la mondialisation, qui a conféré une très grande fluidité aux ressources humaines. Elle est devenue une composante de l'attractivité de notre territoire, élément essentiel pour que les meilleurs cadres, les meilleurs dirigeants, les meilleurs cerveaux restent ou s'établissent en France. Quelles que soient leurs qualifications, les populations frontalières sont, elles aussi, particulièrement sensibles aux conditions de travail proposées par nos voisins.
Réconcilier les Français avec l'entreprise, promouvoir la culture de résultat, inciter à l'actionnariat et, ainsi, stabiliser le capital des entreprises françaises, voilà les aspirations qui sous - tendent le principe de la participation.
Il faut se réjouir que les entreprises qui ont fait ce pari connaissent souvent une grande réussite économique, quelle que soit leur taille. Les plus grands groupes français en offrent la meilleure illustration.
Madame, monsieur le ministre, vous proposez de simplifier les mécanismes empilés depuis quarante ans pour faire de la participation une réalité. Force est de constater qu'aujourd'hui près de 90 % des entreprises françaises de moins de 250 salariés ne pratiquent pas encore la gestion participative.
Ce débat, qui est le fruit d'un long travail collectif et coopératif, doit déboucher sur une meilleure cohésion sociale et un plus grand dynamisme économique.
La mondialisation provoque aussi une grande mobilité des capitaux. L'expérience montre que l'implantation du siège de l'entreprise est déterminante pour la localisation des laboratoires, des bureaux de recherche et des sites industriels, ainsi que pour les sous-traitants - en un mot, pour l'emploi.
En ce qui concerne les PME, cette implantation est décisive pour empêcher que le savoir-faire de nos entreprises ne quitte le sol national. Le développement de l'actionnariat salarié peut donc contribuer largement à stabiliser le capital des entreprises françaises et leur éviter de subir des OPA hostiles ou d'être rachetées.
L'épargne salariale s'investit pour 51,6 %, soit près de 40 milliards d'euros, en titres d'entreprises. C'est encore trop peu, mais c'est une source de stabilité du capital des entreprises françaises que nous ne devons absolument pas négliger.
Favoriser la diffusion de la participation passe avant tout par l'extension du périmètre des bénéficiaires et l'intensification de la participation.
Force est de constater qu'à la fin de l'année 2003 la participation concernait 53 % des salariés. Cependant, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, elle représentait à peine plus de 8 % des 8 millions de personnes concernées. Quant aux entreprises de moins de dix salariés, à peine 7 % de leurs employés en bénéficient.
De fait, jusqu'à ce jour, la mise en place de la participation par un accord collectif était obligatoire pour les seules entreprises de moins de 50 salariés, alors que cette négociation était une simple faculté pour les entreprises ne franchissant pas ce seuil.
L'instauration d'accords de branche prévus à l'article 5 du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale permettra dès lors un accroissement indéniable du nombre de salariés bénéficiaires d'accords de participation, y compris, sans doute, dans les entreprises de moins de 50 salariés.
Néanmoins, nous ne pouvons imposer à toutes les petites entreprises de reprendre les accords négociés par la branche dont ils dépendent, car cette contrainte serait mal comprise, mal acceptée par leurs dirigeants et donc contre-productive.
Si les PME restent réticentes à la mise en place du dispositif de participation, c'est peut-être tout autant pour des raisons pratiques, liées à la complexité des négociations à mener, que pour des motifs financiers ou parce que leurs dirigeants n'imaginent pas déroger à un état de fait ou à des habitudes.
Même si elle se trouve différée, la participation est évidemment un élément de rémunération. L'augmentation des sommes versées aux salariés, comme le prévoit ce texte, constitue une avancée importante. L'augmentation de l'épargne constituée dans le cadre de l'entreprise devient un outil de relance du pouvoir d'achat et de la croissance.
De même, la modification des règles de calcul du bénéfice fiscal pris en compte afin de déterminer le montant de la réserve spéciale de participation accroît le total des sommes versées aux salariés.
Par ailleurs, le retour à un dispositif autorisant les entreprises à reporter de façon limitée les déficits des exercices antérieurs à l'année en cours - de trois ans ou de cinq ans, nous en débattrons, mes chers collègues - constitue une excellente mesure, qui rendra sans aucun doute le système plus équitable, sans pour autant pénaliser les entreprises qui ont atteint depuis peu de temps l'équilibre financier et qui sont encore trop fragiles pour faire profiter leurs salariés de l'amélioration de leur situation. Les abus consécutifs au report illimité seront circonscrits, et la participation améliorée.
En outre, ce texte tend à rénover le cadre juridique de la participation, en prévoyant, notamment, des mesures relatives à la représentation des salariés actionnaires.
Nous allons permettre aux salariés, pour peu qu'ils détiennent plus de 3 % du capital, de siéger dans les conseils d'administration.
En tant qu'actionnaires, les salariés deviennent des « décideurs » dans l'entreprise où ils travaillent ; il est donc naturel qu'ils siègent au sein des conseils d'administration et des conseils de surveillance des sociétés cotées. S'il n'en allait pas ainsi, ils se considéreraient comme des actionnaires de seconde catégorie, et à juste titre.
Le renforcement de la participation des salariés à la gestion de leur entreprise contribuera fortement à leur motivation.
Les chefs d'entreprise qui s'interrogent sur les conséquences de la participation d'un représentant des salariés au conseil d'administration doivent être convaincus que celles-ci seront positives pour leur société, même si les modalités d'organisation de l'élection de ce représentant suscitent encore des interrogations qu'il faut apaiser.
La participation est un principe qui a su rassembler la quasi-totalité des formations politiques et syndicales au fil des années. Afin de préserver cet état d'esprit, nous devons vaincre les réticences, en développant la participation, mais surtout en l'améliorant.
L'attribution d'un avantage fiscal important aux entreprises qui offrent des actions gratuites à leurs salariés devrait favoriser une diffusion plus rapide et plus large de l'actionnariat salarié.
Dans le même esprit, il est indispensable de mettre en place, au sein des entreprises, une plus grande concertation et une plus grande implication de tous pour l'avenir de l'entreprise.
L'organisation des entreprises ne saurait être immuable alors que des changements profonds affectent notre société.
La notion d'intérêt général doit prévaloir partout, et donc se voir mise en avant au sein de tous les groupes humains. L'entreprise ne saurait échapper à la règle : elle doit évoluer de manière que tous ceux qui y travaillent ressentent que, si l'organisation du travail est équitable, les fruits de celui-ci sont aussi répartis équitablement.
La participation est le moyen d'y parvenir : elle exprime toute l'importance que nous attachons aux valeurs de responsabilisation et de partage. Elle s'inscrit dans un projet européen où les femmes et les hommes ne seront plus les simples éléments d'une économie déshumanisée. La majorité de mon groupe en est convaincue et votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié arrive enfin en discussion au Sénat, après un long débat à l'Assemblée nationale, dans un contexte politique assez tendu.
J'ai écouté avec attention le diagnostic qu'a établi M. Raffarin : nous ne pouvons que souscrire à certaines des observations qu'il a formulées sur l'état du monde et les inquiétudes que celui-ci peut susciter.
Nous savons bien à quoi tiennent aujourd'hui les préoccupations des salariés de notre pays : à la stagnation du pouvoir d'achat, à la précarisation des statuts, lesquelles seraient, nous explique-t-on, inéluctables parce que liées aux pressions de la concurrence internationale et à la menace des délocalisations.
Mais, dans le même temps, on observe a contrario une véritable explosion de la rémunération des dirigeants des grandes entreprises - que nombre de concitoyens jugent d'ailleurs scandaleuse -, qu'il s'agisse de salaires fixes, de bonus, de stock-options, de primes de départ, de parachutes dorés...
Les exemples de traitements de faveur choquants abondent, ces derniers mois : 38 millions d'euros au P-DG de Carrefour pour son départ à la retraite ; plusieurs dizaines de millions d'euros de primes et de stock-options au P-DG de Vinci - « au-delà de toute raison » a dit le directeur général ! - ; des plus-values suspectes sur stock-options pour le P-DG d'EADS ; une augmentation de salaire de 81 % en 2005 pour le patron d'AGF, etc.
À la perte d'éthique de la gouvernance d'entreprise s'ajoute une dérive accélérée du capitalisme financier, avec, à la clé, des processus d'OPA dévastateurs.
Dans ce contexte perverti, l'action de régulation de l'État est, à bien des égards, insuffisante, car la doctrine libérale du laisser-faire inspire très largement les politiques mises en oeuvre ces dernières années.
C'est pourquoi, mes chers collègues, dès lors que ce projet de loi nous était présenté comme une « vraie réponse » au problème posé, nous étions en droit d'attendre un texte particulièrement ambitieux. Tel n'est malheureusement pas le cas !
L'actionnariat salarié est un sujet important à trois points de vue.
Tout d'abord, il soulève le problème de la participation des salariés aux résultats de leur entreprise, ce qui, implicitement, conduit à s'interroger sur l'augmentation du pouvoir d'achat.
Ensuite, il pose la question de la démocratie sociale et de la nécessité de faire participer davantage les salariés aux décisions prises par la direction de leur entreprise.
Enfin, il relance le débat sur la nécessaire réorientation des stratégies d'entreprise, conduites aujourd'hui en fonction d'un objectif essentiel, la rentabilité financière, quand il faudrait prendre en compte un autre impératif : l'intérêt social et l'emploi.
M. Jean Desessard. Bravo !
M. François Marc. Malheureusement, ce texte ne répond pas de façon satisfaisante à ces trois exigences.
L'un des points les plus critiquables est, à mes yeux, la mise en avant de la notion de « dividende du travail ». Cette disposition est très révélatrice d'une démarche dont l'intention est de substituer la distribution de revenus aléatoires à la revalorisation des salaires.
Selon nous, la rémunération du travail passe avant tout par le salaire, et non par l'allocation de dividendes. Pour les salariés, les dividendes ne peuvent constituer qu'un supplément de rémunération, la revalorisation des salaires devant, elle, passer par la négociation collective.
L'examen récent de certains textes nous a permis de nous pencher sur le problème de la sécurité financière et nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer le cas de salariés d'entreprises américaines, mais aussi européennes, qui ont tout perdu du fait des déconvenues financières et des banqueroutes : leurs économies, leur travail, leur retraite.
Il importe donc de considérer avec prudence et circonspection les dispositions qui incitent les salariés à mettre tous leurs oeufs dans le même panier. Or le texte tend à aller dans cette direction. Au contraire, il faut protéger l'épargne des salariés en en diversifiant le placement.
Par ailleurs, il convient de prendre en compte un impératif nouveau et essentiel : la réintroduction de la notion d'intérêt social dans les modes de gestion des entreprises cotées. Je tiens à insister sur ce point, après que mon collègue Jean-Pierre Godefroy a évoqué les aspects techniques liés à la participation.
Il est souhaitable de libérer les chefs d'entreprise de la gourmandise irraisonnée des actionnaires. Ces derniers exercent une forte pression sur le management pour obtenir une rentabilité financière de l'ordre de 15 % par an, sinon plus. Or cette politique de court terme, imposée souvent par les fonds de pension, conduit les chefs d'entreprise à une gestion stratégique périlleuse à long terme : au lieu de penser au développement et à la croissance de l'entreprise, au lieu d'augmenter les investissements en matière de recherche-développement pour conquérir de nouveaux marchés, au lieu d'embaucher, ils réduisent les coûts, voire délocalisent, au détriment des conditions de travail des salariés et de l'emploi.
Enfin, il faut souligner la faiblesse du dispositif d'encadrement des stock-options. Je m'attarderai un instant sur ce point puisque le projet de loi, après son examen à l'Assemblée nationale, se révèle particulièrement symptomatique de la démarche suivie.
Lorsqu'ils prennent des décisions stratégiques, les dirigeants détenant des stock-options sont surtout motivés par l'augmentation de la valeur de l'action de leur entreprise. Cela correspond-il à l'intérêt général, voire à celui de l'entreprise en tant que telle ? Non ! La valeur de l'action réagit de plus en plus, notamment sous l'influence des fonds de pension, au seul rendement à court terme, ce qui est loin d'être un gage de pérennité pour l'entreprise et ses emplois.
Par exemple, lorsqu'on sacrifie l'investissement dans la recherche-développement, qui ne produira ses effets que bien plus tard, on diminue les coûts, certes, mais surtout on augmente les profits immédiats, et c'est d'ailleurs l'objectif visé. Bien sûr, on satisfait ainsi les actionnaires friands de rendements, mais on compromet l'avenir de l'entreprise ! Les fonds de pension, eux, applaudissent : ils engrangent les rendements ; mais ils quitteront le capital de l'entreprise avant que celle-ci ne pâtisse du manque d'investissements et d'innovations. De la même façon, lorsqu'on réduit ses fonds propres en rachetant ses propres actions, la bourse applaudit, mais l'entreprise entame dramatiquement sa capacité de développement.
Comment peut-on inciter les dirigeants à détruire à terme les entreprises dont ils sont responsables ? Comment peut-on être assez aveugle pour ne pas discerner la perversité d'un tel système ?
La seule configuration où les stock-options pourraient être légitimes est celui des nouvelles pousses technologiques, qui nécessitent parfois des talents particuliers, très pointus, mais que ces entreprises débutantes ne sont pas en état de payer. Dans ce cas, les stock-options peuvent être utiles, à condition de ne s'étaler que sur cinq ans, voire un peu plus.
Cela étant, il est tout à fait concevable qu'une part importante de la rémunération des dirigeants soit constituée d'éléments variables liés à la réussite de l'entreprise. Mais il faut, à tout le moins, que tout le monde y trouve son compte, ce qui n'est absolument pas le cas avec les stock-options.
Pour améliorer notablement la situation, on peut imaginer, à la suite d'un certain nombre de responsables syndicaux et de responsables économiques, la mise en place d'un système de rémunération des dirigeants qui serait fondé sur quatre critères : le développement de l'entreprise, mesuré par la progression du chiffre d'affaires ; l'évolution positive de la masse salariale ; l'évolution de l'action, car on ne peut évidemment méconnaître l'intérêt de l'actionnaire ; le niveau et l'évolution des investissements.
M. Jean Desessard. On pourrait ajouter un cinquième critère : l'intérêt écologique des décisions prises !
M. François Marc. D'ailleurs, ces critères se renforcent les uns les autres et créent une spirale vertueuse, une alchimie efficace, qui justifierait un intéressement important des dirigeants. A contrario, il n'existe aucune légitimité à privilégier la gestion à court terme.
Combien de temps encouragerons-nous ces attitudes suicidaires ? Allons-nous enfin nous décider à favoriser ce qui est bénéfique au plus grand nombre, et ce, cher collègue Jean Desessard, de façon durable ? Pour y parvenir, nous préconisons un encadrement renforcé des stock-options qui aille bien au-delà du dispositif Balladur introduit à l'Assemblée nationale.
Enfin, je crois profondément à l'intérêt de mettre en place une règle dont la vertu sera de modifier durablement les comportements. Les actionnaires s'y retrouveront d'autant mieux que les entreprises seront plus pérennes, alors que la course au rendement ne tardera pas à provoquer l'éclatement de nouvelles bulles spéculatives.
Combien d'années faut-il pour rattraper un effondrement boursier provoqué par des dividendes « boostés » ? N'est-il pas préférable de respecter l'intérêt général et de développer notre économie de façon harmonieuse ?
Nous avons déjà eu l'occasion d'aborder ces problématiques lors de l'examen d'autres textes, auxquels j'ai précédemment fait allusion. Nous ne partageons pas la conception de l'entreprise qui inspire le présent projet de loi et nous nous faisons une autre idée du rôle d'un dirigeant social.
Ce projet de loi ne fait qu'illustrer, une fois de plus, nos divergences de fond. C'est la raison pour laquelle nous ne le voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi a pour ambition de s'inscrire dans la continuité gaulliste de la participation, de la réconciliation entre capital et travail. À l'époque, le général de Gaulle - M. Larcher est même remonté beaucoup plus loin dans le temps, faisant référence au socialisme utopique de Proudhon ! - espérait dépasser le capitalisme, trouver une voie entre le système marchand de l'Ouest et le communisme de l'Est.
Si l'on ne peut prétendre que la France gaulliste soit sortie du système capitaliste, on peut reconnaître que les Trente Glorieuses sont le fruit d'un compromis - à défaut d'une réconciliation - entre capital et travail.
Cette époque est révolue, notamment parce que les héritiers du général ont tout fait pour détruire les acquis sociaux de cette période.
Les inégalités sont reparties à la hausse, et il faut vraiment que le ministre de l'économie et des finances, M. Thierry Breton, soit aveugle et sourd aux préoccupations sociales de nos concitoyens pour affirmer qu'aujourd'hui le pouvoir d'achat a augmenté !
La situation sociale des salariés ne cesse de se dégrader, mais M. Breton affirme vouloir développer la pédagogie économique. Ce qu'il fait, en l'occurrence, ce n'est pas de la pédagogie, c'est tout simplement de l'idéologie ! Ce n'est d'ailleurs pas nouveau. Et la majorité a beau faire référence à Proudhon, elle s'inscrit dans la logique historique qui veut qu'un parti conservateur soit voué à la défense du capital, du patronat.
Le rapport de force entre le capital et le travail tourne à l'avantage du premier, comme l'a très bien expliqué M. Jean-Pierre Raffarin, parlant de « capital mobile », de « capital anonyme », de « capital pressé ». Permettez-moi, monsieur le Premier ministre, de prolonger votre pensée (M. Aymeri de Montesquiou s'esclaffe) en parlant de « capital glouton », de « capital asocial », de « capital cynique ».
Ce revirement est dû au libéralisme économique mondial, qui met en concurrence des salariés aux systèmes sociaux différents, et au chômage de masse, qui fragilise les salariés et leurs représentants.
La répartition des revenus attribués respectivement au capital et au travail a été bouleversée. La rémunération du capital a gagné dix points sur la rémunération du travail ; la répartition des risques a pris le chemin inverse, en faisant des salariés la variable d'ajustement des coûts : intérims, stages, contrats précaires...
Or, que propose ce projet de loi ? De continuer dans le même sens !
Les actionnaires salariés seront représentés au conseil d'administration. Pourquoi pas ? On comprend que les dirigeants des grandes entreprises poussent à cette introduction de salariés actionnaires, car ces derniers sont généralement sous le contrôle des dirigeants et votent comme eux. Mais aucune place n'est réservée aux salariés non actionnaires, qui constituent la majorité des salariés, au conseil d'administration. Sous couvert de démocratie sociale, la droite fait le choix idéologique de favoriser les catégories les plus aisées de la société.
En privilégiant les actionnaires salariés, vous désavantagez, en termes de rémunération et de visibilité, les salariés non actionnaires. Par ce biais, vous entérinez le principe capitaliste « une action, une voix », au détriment du principe démocratique « une personne, une voix ».
C'est pourquoi, lors de la discussion des articles, je proposerai que les salariés soient représentés en tant que tels dans les conseils d'administration des entreprises, avec voix délibérative, et non pas uniquement consultative comme aujourd'hui.
Les Verts demandent par ailleurs depuis longtemps que les représentants des consommateurs, des riverains et des défenseurs de l'environnement soient présents au sein des instances dirigeantes des entreprises.
En effet, au moment où, face à la crise de la démocratie représentative, on cherche des pistes pour revitaliser la démocratie, il est un lieu de pouvoir qui reste en dehors du questionnement démocratique : l'entreprise et, plus largement, l'économie.
Dans l'entreprise, le salarié est aux ordres d'une hiérarchie qui ne fonde sa légitimité sur rien d'autre que le pouvoir de l'argent. Le conseil d'administration d'une entreprise, souvent comparé à tort à un parlement, n'a rien de démocratique, même quand il accorde un strapontin aux représentants des salariés.
C'est sur le principe clé du capitalisme que nous devons nous interroger. Le cumul des pouvoirs, qui correspond à la concentration du capital - 75 % des PME sont des sous-traitantes des grands groupes -, est un obstacle à la démocratie, comme le montrent les dynasties Bouygues, Lagardère ou même Dassault, qui contrôlent des pans entiers de la politique, des médias et de l'industrie.
Il peut même arriver que l'un des membres de ces dynasties soit rapporteur pour avis d'un projet de loi le concernant en tant que chef d'entreprise ! Si l'on n'y prend pas garde, le modèle Berlusconi sera l'horizon de notre République.
Du point de vue social, la participation aurait pour but de redistribuer les bénéfices de l'entreprise à ses salariés. Là encore, c'est un leurre ! Qui en bénéficie ? Les plus riches, les cadres, bref, ceux qui n'ont pas besoin que le législateur passe de longues heures à se pencher sur leur sort.
Comme d'habitude, on tente de faire passer ce choix élitiste pour une préférence envers les classes moyennes. On a déjà connu ce procédé, appliqué au logement : des ménages touchant 7 000 euros par mois se trouvent avantagés au nom de la défense des « classes moyennes ».
Une étude de l'INSEE portant sur les salaires en France a montré que ce sont les salariés percevant les rémunérations les plus élevées qui bénéficient en priorité des dispositifs d'épargne salariale. Parmi les bénéficiaires de l'épargne salariale, les 10 % les mieux servis ont reçu 40 % des sommes distribuées. L'inégalité est, en l'espèce, plus forte qu'en matière de salaires puisque les 10 % des salariés les mieux rémunérés perçoivent seulement 26 % de la masse salariale.
Dans le cas de l'intéressement, qui nous préoccupe aujourd'hui, pourquoi y a-t-il un tel engouement de la part des dirigeants d'entreprise et des cadres, alors que nous ne constatons pas un tel enthousiasme pour augmenter les salaires, qui stagnent depuis vingt ans ? Parce que l'intéressement n'est pas considéré comme une rémunération, et n'est donc pas assujetti au paiement des cotisations sociales et patronales, dans la limite d'un certain plafond. Les sommes versées sont déductibles de l'impôt sur les sociétés, exonérées de taxe sur les salaires, de taxe d'apprentissage, de contribution à la formation continue, de participation à l'effort de construction. Les plans d'épargne d'entreprise, les obligations à bons de souscription et autres systèmes d'épargne salariale sont plébiscités par chacun parce qu'ils se font au détriment de tous, en raison des multiples exonérations dont ils font l'objet.
Mais que l'on ne vienne pas ensuite s'étonner du « trou » de la sécurité sociale, des déficits de l'UNEDIC et s'apitoyer sur leur sort !
Évidemment, si l'on s'échine à miner de l'intérieur les ressources des systèmes de répartition, on en viendra, tôt ou tard, à adopter, contraints et forcés, des systèmes par capitalisation. On pourra alors dire adieu à la redistribution et à la gestion démocratique des systèmes de protection sociale, car les deux vont de pair.
Ce projet de loi ne répond en rien à la crise du pouvoir d'achat, à la crise de la solidarité sociale que traverse notre pays. Sous couvert de démocratie sociale, il participe à la fracture sociale dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, tout à l'heure, Jean-Pierre Raffarin a opposé une vision strictement mécanique et financière au principe de l'association du capital et du travail. Au-delà même de cette association entre capital et travail, ce projet de loi fixe un certain nombre d'objectifs, notamment la participation des salariés aux fruits résultant à la fois de l'engagement du chef d'entreprise et de leur propre travail pour la satisfaction des clients - n'est-ce pas, monsieur Dassault ? - dans un monde de compétitivité.
Mais ce texte s'inscrit aussi dans d'autres démarches de cohésion sociale, qui sont la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la participation des institutions représentatives du personnel à la marche de l'entreprise et leur information sur ce sujet, ainsi, naturellement, que la participation des salariés, telle qu'elle est envisagée dans le projet de loi, aux organes de décision de l'entreprise.
Une question a été posée : la mondialisation offre-t-elle la possibilité à la France, à l'Europe de trouver leur voie ? Une synthèse entre participation des salariés et constitution de pôles de compétitivité me paraît en ouvrir une.
Quoi qu'il en soit, l'Union européenne doit apporter une réponse en termes de dimension sociale face au défi que nous impose la mondialisation. Ce thème sera d'ailleurs évoqué les 22 et 23 novembre à Berlin, lors de la réunion préparatoire à la mise en place de la présidence allemande de l'Union.
Le rapport que la présidente finlandaise et le président de la Tanzanie ont élaboré sur la nécessaire dimension sociale de la mondialisation tend à montrer que, au-delà de l'association des salariés à la marche de leur entreprise, cette idée doit en quelque sorte imbiber par capillarité les institutions issues des accords de Bretton-Woods, que ce soit la Banque mondiale, le Fonds monétaire international ou l'Organisation mondiale du commerce.
Il n'est que de regarder le rapport de l'OCDE présenté lors de la dernière réunion à Moscou du G8 traitant de l'emploi pour mesurer que cette dimension sociale de la mondialisation est très progressivement prise en compte au-delà du seul cercle de l'Organisation internationale du travail. Et je rappelle que le Président de la République, au mois de septembre dernier, s'est fait, devant l'Assemblée générale des Nations unies, le porte-voix de la dimension sociale de la mondialisation. C'est une conviction que, me semble-t-il, l'Europe peut demain faire partager à l'ensemble de la planète.
D'aucuns vont me rétorquer que je suis là bien loin du texte qui nous occupe. Mais le rapport d'information de François Guillaume sur la participation des salariés dans l'Union européenne montre bien qu'il s'agit d'un aspect essentiel.
En cet instant, je veux remercier une fois encore les trois rapporteurs, particulièrement Isabelle Debré, dont le travail passionné nous permettra d'améliorer ce projet de loi, de le renforcer sur plusieurs points, notamment la non-substitution de la participation au salaire et l'intéressement de projet.
Naturellement, nous examinerons avec attention un certain nombre de ses propositions, par exemple celle qui porte sur le report des déficits. Mais, si l'on peut comprendre la nécessité de se donner du temps pour traiter cette question, on ne peut pas faire de ce report une espèce d'échappatoire, pour les entreprises, à la nécessité de partager les fruits de leur activité. Or, depuis vingt ans, nous avons des exemples qui démontrent que les reports de déficit privent les salariés de très grandes entreprises, versant pourtant des dividendes importants, des bénéfices de la participation.
Pour ce qui est des seniors, la création de la contribution Delalande partait d'une excellente intention, mais elle s'est révélée contre-productive, cette contribution ayant un pouvoir d'éviction, qu'on le veuille ou non.
Un certain nombre de points méritent certainement que nous y travaillions encore ensemble, dans un esprit de dialogue constructif, afin d'apporter les améliorations qui peuvent être souhaitables. La discussion des articles nous le permettra, à n'en pas douter.
Monsieur Dufaut, mon collègue Jean-François Lamour vous fournira les réponses adéquates sur le sujet particulier que vous avez évoqué. En l'espèce, comme M. Godefroy l'a rappelé, ma compétence est plus hippique que footballistique ! (Sourires.)
J'ai retrouvé dans les propos de M. Serge Dassault ses grandes idées, notamment celles qui font la chair de son ouvrage consacré à la gestion participative, où il insiste sur la dimension humaine de l'entreprise.
Faut-il retenir une nouvelle formule ? Ce n'est pas l'esprit du projet de loi. Le Conseil supérieur de la participation a travaillé sur cette question et a conclu qu'il fallait simplement trouver une flexibilité à la hausse ; c'est déjà beaucoup ! Après tout, avec la formule dérogatoire, il est toujours possible d'envisager d'appliquer un système de « trois tiers » ou de « quatre quarts » !
Je remercie MM. Jean-Pierre Raffarin, Aymeri de Montesquiou et Jean-Léonce Dupont du soutien qu'ils ont apporté au texte ; leurs propositions vont l'enrichir. Mais les interventions des uns et des autres montrent qu'il existe bien des clivages entre participation et salaire.
J'ai, pour ma part, évoqué le clivage entre le modèle social français et le modèle mondial face à une réalité : le XXIe siècle ne sera pas soumis, comme l'étaient la fin du XIXe siècle et la première partie du XXe siècle, à la régulation des seuls pouvoirs législatif et exécutif à l'échelle de chaque nation parce que, les frontières ayant été repoussées au-delà de l'Hexagone, nous nous situons dans le cadre d'un village planétaire.
Je voudrais revenir sur un point particulier que j'ai déjà évoqué. La participation ne se substitue pas à la politique salariale et à la négociation salariale.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Absolument !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Dès lors que la participation reste bloquée, le risque de substitution n'est pas avéré. On voit d'ailleurs, sur dix ans, que cette substitution n'a pas eu lieu...
M. François Marc. Ce n'est pas vrai !
M. Gérard Larcher, ministre délégué.... et, madame le rapporteur, vous avez justement insisté sur ce point.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Certains ont évoqué, pour les critiquer, les dispositifs du PEE et du PERCO. Ces dispositifs sont bien dans le prolongement du modèle social voulu par le général de Gaulle. Les partenaires sociaux se sont fortement impliqués. Ce sont d'ailleurs eux, notamment les représentants des salariés, qui réclament la gestion du PERCO.
Rappelons que la Charte d'Amiens, dont a été fêté le centenaire, prévoit l'indépendance entre les organisations professionnelles et les partis politiques. Je constate que les syndicats de salariés français ne tiennent pas le même langage que les sénateurs des partis socialiste et communiste. (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Vous et le MEDEF, c'est quoi ? Vous êtes clonés !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je voudrais rappeler un chiffre concernant le pouvoir d'achat. La gestion participative s'est développée comme les salaires : elle représente aujourd'hui 6 % des salaires et ce chiffre est stable depuis plusieurs années.
Je répondrai à ceux qui appellent de leurs voeux un capitalisme régulé par le dialogue que c'est exactement ce que nous proposons et ce à quoi tendent les dispositifs d'épargne salariale. Prenons le PERCO : il s'agit bien de fonds de capitalisation, mais entièrement pilotés par la négociation collective.
Certains souhaitent des rémunérations moins individualisées. C'est exactement ce qu'encourage le dividende du travail qui est collectif et qui constitue l'essence d'un modèle français, prenant en compte la dimension collective plutôt que la relation individuelle, que ce soit dans l'application du contrat de travail ou dans les modes de régulation.
Je veux maintenant aborder quelques sujets essentiels qui ont été évoqués, même s'ils vont au-delà du texte que nous examinons.
Il est vrai, monsieur Jean-Léonce Dupont, que le Plan seniors doit répondre à un défi que le Gouvernement, en 2000, s'est engagé à relever : atteindre un taux d'activité des seniors de 50 % en 2010.
Sans la réforme des retraites, que M. Jean-Pierre Raffarin a voulue, puis courageusement conduite, sans la prise de conscience dont Mme Moreau, présidente du Comité d'orientation des retraites, s'est fait l'écho dans son rapport, sans la rencontre, à l'occasion du projet de loi réformant notre système de retraites, entre les partenaires sociaux, puis entre les partenaires sociaux et le Gouvernement, jamais le Plan seniors n'aurait pu être mis en place.
Ce plan est avant tout destiné à répondre à un objectif de cohésion sociale. Comment, en effet, admettre qu'une société puisse continuer à ne faire entrer réellement ses membres dans l'entreprise qu'à vingt-cinq ans - âge auquel le taux de chômage se situe tout de même aujourd'hui autour de 6 % - et à envisager leur éviction de cette même entreprise dès lors qu'ils atteignent l'âge de cinquante ? Peut-on imaginer une société où l'on ne resterait actif que pendant environ vingt-cinq ans, les jeunes commençant par « galérer » pour entrer dans l'entreprise et ceux qui s'y trouvent vivant, aussitôt qu'ils ont fêté leurs quarante-cinq ans, dans l'angoisse d'en être exclus parce qu'ils craignent d'être la variable d'ajustement des plans sociaux ?
Grâce à la volonté des partenaires sociaux, le contrat spécifique pour celles et ceux qui sont au chômage après cinquante-sept ans a vu le jour, et les fins de carrière ont pu être aménagées, ainsi que cela figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et dans le projet de loi de finances.
Cet aménagement passe, tout d'abord, par une révolution des mentalités : la mentalité qui a largement cours dans l'ensemble de la société, car on a longtemps cru au mythe de la relève - un aîné part, un jeune le remplace -, mais aussi la mentalité des directeurs des ressources humaines des grandes entreprises, sans oublier la mentalité des représentants des salariés.
C'est tout le sens du plan de communication que nous avons engagé et qui devra se poursuivre sur plusieurs années si nous voulons gagner cette bataille, laquelle, loin d'être simplement financière, est aussi une bataille pour la cohésion sociale et la solidarité intergénérationnelle.
Je dirai à présent un mot sur le congé de mobilité, qui contribue, lui aussi, à la sécurisation des parcours professionnels.
Paradoxalement, nos concitoyens croient qu'il faut attendre qu'intervienne un plan de sauvegarde de l'emploi ou un licenciement pour imaginer une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, et pour envisager une mobilité. Le Gouvernement a voulu que le congé de mobilité offre à ceux qui sont confrontés au licenciement les mêmes droits qu'aux autres salariés.
Monsieur Godefroy, mon message serait, selon vous, de surcroît, « brouillé par des cavaliers » : pardonnez-moi, mais vos propositions sur les trente-cinq heures relèvent bien de la cavalerie, sinon de l'artillerie ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
En conclusion, je puis affirmer que le Gouvernement sera très attentif aux propositions du Sénat sur ce texte, qui est le fruit d'un véritable dialogue social.
Lors de son examen par le Conseil supérieur de la participation, il s'est passé quelque chose. Jusqu'à présent, en effet, les travaux de cette instance reflétaient le fait qu'il existait souvent des clivages dans les entreprises ou chez les salariés : intéressement, participation opposaient les organisations les unes aux autres.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. C'est vrai !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Les petites et moyennes entreprises se méfiaient du dispositif de participation. Certaines organisations syndicales éprouvaient, quant à la notion d'association entre capital et travail, une hostilité à fondement idéologique que je peux respecter.
Lors des travaux préparatoires du présent texte, chacun a accepté de se mettre autour de la table pour essayer d'aboutir non pas à une espèce de « consensus mou », mais à une vraie convergence de vues. Chacun, en effet, avait bien le sentiment que ce texte sur la participation n'était pas un simple texte financier, relatif aux plans d'épargne, mais qu'il était autre chose, que ce qui était en cause, c'était bel et bien l'un des fondements d'un projet de société, une société dans laquelle la cohésion est au rendez-vous, dans laquelle on cesse enfin d'opposer l'entreprise à ceux qui y travaillent, l'entreprise à la société ; une société dans laquelle on comprend que, finalement, c'est l'entreprise qui crée les richesses, et les richesses qui créent les emplois.
Chacun a compris que c'est ainsi que peut être préservé un modèle social qui, au travers de la répartition, quelle qu'en soit la forme, donne à la société française, comme aux autres sociétés de l'Union européenne, cette dimension qui met l'homme au coeur de tous les projets. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Je tiens à mon tour à vous remercier, madame le rapporteur, messieurs les rapporteurs pour avis, d'avoir mis au service de ce texte votre courage, votre travail et votre conviction, d'avoir poursuivi la consultation engagée par le Gouvernement de manière utile et efficace, ainsi que le prouvera l'examen des amendements.
Je ferai trois observations pour compléter la présentation de ce texte qu'a faite M. Thierry Breton.
Tout d'abord, ce texte est la traduction d'une approche moderne de la gestion des entreprises, fondée sur un dialogue constructif entre toutes les parties prenantes et permettant tout à la fois la participation aux profits, le partage de l'information et l'accès au pouvoir.
Ensuite, il s'agit d'un effort pragmatique et stratégique de la part du Gouvernement en vue, d'une part, de remédier à cette situation que vous dénonciez tout à l'heure, madame le rapporteur, dans laquelle seulement la moitié des salariés bénéficie d'un accord de participation et un tiers de la sécurité du plan d'épargne d'entreprise - vous l'aviez noté, monsieur Jean-Léonce Dupont - et, d'autre part, de mettre en cohérence le dispositif d'épargne, notamment le PEE, le PERCO, le PERP, tout cela dans le cadre d'un objectif d'épargne à long terme indispensable à la consolidation du capital de nos entreprises, comme vous l'avez souligné, madame Debré.
Enfin, ce texte répond à trois demandes principales.
La première est celle des clients, que, monsieur Dassault, vous avez évoquée avec beaucoup de pertinence. Le présent texte s'inscrit en parallèle de celui que le Sénat sera amené à examiner avant la fin de cette législature, relatif à la consommation : nous espérons que ce dernier se révélera être un nouveau texte fondamental dont la portée sera équivalente à celle de la loi Scrivener, mais applicable à une société désormais fondée essentiellement sur les activités de services, une société de la connaissance.
La deuxième demande est évidemment celle des salariés : selon les sondages les plus récents, 74 % d'entre eux souhaitent que l'épargne salariale soit développée au sein des entreprises.
La troisième demande est celle des entreprises elles-mêmes, qui, comme vous l'avez souligné, monsieur Dupont, monsieur de Montesquiou, monsieur Raffarin, doivent non seulement impérativement consolider leur capital, mais aussi intégrer, dans ce mouvement de consolidation, la nécessité d'informer, de responsabiliser et de rémunérer les salariés par des mécanismes participatifs. Ceux desdits mécanismes qui existent déjà vont pouvoir, grâce à ce projet de loi, être développés et améliorés.
M. Raffarin a relevé tout à l'heure que la relation entre le capital et le travail risquait d'être grignotée par l'indifférence. Le présent projet de loi vise précisément à lutter contre ce risque d'indifférence.
Il a souhaité également - cela ne surprendra personne - que ces mécanismes participatifs soient mis en place à l'échelon international, à commencer par celui de l'Union européenne, afin que des ponts puissent être jetés entre différentes zones du monde.
Je suis convaincue que, lorsque ce texte aura été adopté, nous aurons à coeur de le porter au niveau européen, puisque la présidence allemande de l'Union européenne, qui débutera au 1er juillet prochain, envisage de faire de la mondialisation, plus précisément de l'appropriation de la mondialisation par les membres de la région Europe, l'un des points fondamentaux de son agenda.
Cette appropriation de la mondialisation par les pays européens est tout à fait propice à la réalisation d'un des objectifs que nous nous sommes fixés, à savoir renforcer le dialogue multilatéral, qui est encore parfois bien timide et un peu infructueux, pour répondre aux défis que le monde d'aujourd'hui nous lance.
Ce texte est donc une réponse à la demande de chacun. Il permet de développer la volonté collective au sein de l'entreprise, qui dispose ainsi de moyens renforcés, rénovés, pour consolider son capital, et ce dans une mondialisation où la détention des capitaux propres des entreprises est un outil déterminant pour permettre de lutter contre les tentatives d'OPA, en particulier d'OPA hostiles.
Madame le rapporteur, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion des amendements va illustrer la qualité et le sérieux du travail auquel vous vous êtes livrés et continuerez de vous livrer, je n'en doute pas. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, je souhaiterais une suspension de séance d'environ un quart d'heure, afin que la commission des affaires sociales puisse se réunir.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures trente.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE IER
DÉVELOPPER LA PARTICIPATION DES SALARIÉS
Article 1er A
Afin de favoriser le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, est créé un dividende du travail reposant :
- sur le supplément d'intéressement ou de participation, versé en application de l'article L. 442-14-1 du code du travail ;
- sur les transferts des droits inscrits à un compte épargne-temps vers un plan d'épargne pour la retraite collectif ou un plan d'épargne d'entreprise, dans les conditions et selon les modalités visées au second alinéa de l'article L. 443-2 du code du travail et à l'article 163 A du code général des impôts ;
- sur les attributions d'actions gratuites destinées à être versées sur un plan d'épargne d'entreprise, distribuées en application du troisième alinéa de l'article L. 443-6 du code du travail ;
- sur la disponibilité immédiate des dividendes attachés aux actions détenues dans le cadre d'un fonds commun de placement d'entreprise dont plus du tiers de l'actif est composé de titres émis par l'entreprise, dans les conditions prévues au onzième alinéa de l'article L. 214-40 du code monétaire et financier.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 77 est présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente - Baudrin, Schillinger, Jarraud - Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 169 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 77.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 1er A, introduit par l'Assemblée nationale, instaure le « dividende du travail ».
Or ces deux mots sont pour nous parfaitement antinomiques. Le nouveau dispositif vise délibérément à créer une confusion entre deux sources de revenus différentes, pour ne pas dire contradictoires. Il y a en effet trop souvent conflit d'intérêts entre l'actionnaire, qui voit son revenu augmenter, et le salarié, qui voit le sien stagner, voire diminuer en valeur absolue, ce qui permet de majorer encore plus les profits.
Le dividende est attaché au titre boursier. Le travail procure une rémunération, qui change d'ailleurs de dénomination selon les cas tant le vocabulaire est vaste dans ce domaine : pour les fonctionnaires, le traitement ; pour les militaires, la solde ; pour les professions libérales, les honoraires ; et, pour quelques millions de salariés, le salaire, tout simplement !
Pourquoi, alors, instaurer une telle confusion sémantique ? Est-ce à dire que l'actionnariat salarié est appelé à prendre tellement d'importance qu'il devrait progressivement devenir une part importante de la rémunération du salarié ? D'ores et déjà, le rapport entre les sommes consacrées à l'intéressement et à l'épargne salariale, d'une part, et la masse salariale, d'autre part, est de un à quatre ; et il est en augmentation constante.
Bien entendu, chacun connaît les nombreux avantages fiscaux et les diverses exonérations de cotisations sociales qui sont attachés au dispositif de l'épargne salariale. Toutefois, je tiens à le rappeler, ce sont surtout les employeurs qui en profitent !
Mieux vaut donc, diront certains, être rémunérés en épargne salariale plutôt qu'en salaire. Qu'on en juge : le salarié qui obtient une augmentation de salaire verra son gain amputé de 22 % par les cotisations sociales, mais seulement de 8 % s'il bénéficie d'un abondement. L'augmentation de salaire entre dans l'assiette de l'impôt sur le revenu, mais pas l'abondement, à condition qu'il reste immobilisé durant cinq ans sur un plan d'épargne d'entreprise.
Ce qui n'est pas dit, c'est que les sommes épargnées et abondées sont mises entre les mains de fonds de gestion et placées en bourse, ce qui implique un risque important. Ce qui n'est pas dit non plus, c'est que cet argent est littéralement « mis sous tutelle ». Le salarié n'en dispose pas à sa guise : il voit ce supplément de rémunération géré par d'autres et ne peut le mobiliser, s'il en a besoin, qu'en un nombre de circonstances limitativement énumérées. Toute une partie de sa rémunération est ainsi bloquée : c'est ce qui s'appelle un complément de rémunération différé, sachant que ce complément est variable et aléatoire.
Vous en conviendrez, mes chers collègues, il y a donc plusieurs différences fondamentales entre le dividende et le salaire.
Par ailleurs, le dividende, au sens habituel de celui qui est attribué à l'actionnaire, est perçu immédiatement et son usage est libre. L'actionnaire est considéré comme responsable et capable de décider à sa guise de la manière dont il utilisera son argent. Même dans le cadre d'un PEA, l'actionnaire se voit crédité de dividendes qu'il peut ensuite réinvestir ou garder en numéraire sur son compte ; et c'est lui seul qui décide ou non d'alimenter son compte-titres.
En est-il de même pour le « dividende du travail » ? Une lecture attentive non seulement de cet article, mais aussi de l'ensemble du texte, nous montre qu'il n'en est rien. En réalité, le dividende du travail repose sur l'utilisation de plusieurs instruments financiers : le supplément d'intéressement ou de participation ; les transferts des droits inscrits sur un compte épargne-temps, autrement dit du temps de repos « financiarisé » ; l'attribution de dividendes d'actions, voire d'actions gratuites, les sommes ainsi récupérées étant placées sous la forme d'épargne pour la retraite.
En définitive, derrière cette déclaration de principe, derrière les exonérations fiscales et sociales annoncées, se cachent le changement de structure du financement de la protection sociale et la destruction organisée de notre solidarité nationale au profit d'une illusoire protection individuelle.
Ce n'est pas l'intéressement ou la participation qui est ici en cause, mais ce qui en est fait. Les salariés entendent souvent aujourd'hui qu'il leur faut travailler plus pour gagner plus. Certes, mais pour gagner quoi et comment ?
Pour l'immense majorité des salariés, le fait que, dans la rémunération, la part variable, ou plutôt aléatoire, ne soit pas, par définition, un élément stable du revenu pose problème. Si l'on y ajoute le fait que cette part variable peut être composée de sommes non perçues - par exemple, des heures supplémentaires non majorées placées sur un compte épargne-temps lui-même financiarisé et placé en épargne salariale -, on se trouve devant une véritable « tuyauterie » permettant aux gestionnaires de fonds de pension de récupérer, pour le compte de leurs actionnaires, une partie de la rémunération des salariés et de l'utiliser dans le grand jeu spéculatif qui s'opère à l'échelle de la planète tout entière.
Or tout cela se fait au nom de la préparation de la retraite, mais de manière individuelle, bien entendu, sauf en ce qui concerne les risques, qui, eux, demeurent bien collectifs pour les salariés dépourvus de contrôle sur le devenir de leur rémunération virtuelle !
L'expression « dividende du travail » a une charge symbolique forte et démontre clairement le mécanisme d'altération de la relation salariale et de dévoiement de la participation qui est à l'oeuvre.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 169.
M. Roland Muzeau. Cet article 1er A, inséré au tout début du projet de loi, relève typiquement de ce que l'on a maintenant coutume d'appeler un « effet d'annonce ».
Il s'agit de créer une notion nouvelle, celle de « dividende du travail », mais qui ne renvoie à aucune réalité économique ou sociale.
La rétribution du travail est et doit rester le salaire. Quant à la notion de dividende, elle fait référence, chacun le sait, aux placements boursiers et aux actions, qui restent l'apanage des grands dirigeants d'entreprise ou de quelques cadres supérieurs. Je rappelle que la part des salaires dans le PIB a baissé de douze points ces dernières années, au bénéfice des revenus tirés de placements industriels et financiers.
S'il s'agissait vraiment de partager les dividendes, il faudrait que tous les salariés soient concernés par le dispositif présenté, ce qui n'est pas le cas. Il faudrait sans aucun doute relever le niveau des salaires minimaux et il faudrait aussi que les entreprises remplissent enfin leurs obligations en matière de négociations salariales.
Quand on sait que la quarantaine de personnes qui dirigent les cinq premières entreprises du CAC 40 se partagent plus de 13 millions d'euros, prévoir un supplément d'intéressement pour quelques salariés apparaît tout de même singulièrement dérisoire !
Par ailleurs, les quelque 3 millions de travailleurs pauvres, c'est-à-dire touchant une rémunération qui ne leur permet pas de vivre au-dessus du seuil de pauvreté, comprendront difficilement la notion de dividende du travail.
Cet article, que la majorité veut emblématique de ce projet de loi, témoigne effectivement de sa volonté de contourner le débat sur le pouvoir d'achat.
Cependant, je ne crois pas que les salariés seront dupes d'une manoeuvre visant à leur faire accroire qu'un supplément d'intéressement ou des transferts de droits inscrits à un compte épargne-temps vers un PERCO seront assimilables à des augmentations de salaires.
En tout état de cause, nous demandons la suppression de cet article.
Mme la présidente. L'amendement n° 233, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
- sur l'existence d'une formule dérogatoire de participation, conformément aux dispositions de l'article L. 442-6 du code du travail.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le concept de dividende du travail a été introduit à l'Assemblée nationale au tout début du présent projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
Tout à l'heure, M. Dassault a indiqué son souhait de présenter des dispositions renforçant la distribution des résultats des entreprises au profit des salariés. Cet objectif est évidemment partagé par le Gouvernement, convaincu qu'une meilleure association des salariés à la marche de l'entreprise repose sur trois piliers, que j'ai déjà évoqués : la participation aux décisions, la participation aux résultats et la participation au capital.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement propose de compléter le champ du dividende du travail en y incluant les formules dites « dérogatoires » de la participation, qui permettent de mieux assurer le lien entre les résultats obtenus par l'entreprise et les efforts des salariés.
Plusieurs dispositions du projet de loi et certains des amendements qui seront présentés vont dans ce sens. J'aurai probablement l'occasion d'y revenir tout à l'heure puisque Mme le rapporteur propose d'instituer un certain nombre de « verrous » complémentaires, afin d'éviter les phénomènes de substitution évoqués par les auteurs des deux amendements de suppression.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. En ce qui concerne les amendements identiques nos 77 et 169, même si, comme je l'ai souligné, on peut émettre des réserves à l'égard de la notion de dividende du travail, il me semble que celle-ci est entrée dans l'usage.
M. Guy Fischer. C'est la méthode Coué !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Qu'on le regrette ou non, le fait est là.
En tout état de cause, nous ne souhaitons pas la suppression de cet article 1er A.
En revanche, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 233 du Gouvernement, tendant à inclure la formule dérogatoire de participation dans le dispositif définissant le dividende du travail.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 77 et 169 ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'ai indiqué à l'instant que les dispositifs de participation ne devaient pas se substituer au salaire.
À cet égard, un certain nombre de « verrous » sont prévus. C'est un point important, et je remercie Mme le rapporteur d'avoir insisté tout à l'heure sur cet aspect.
Tout d'abord, le supplément de participation restera bloqué pendant cinq ans.
Ensuite, le supplément d'intéressement sera soumis aux mêmes règles de non-substituabilité au salaire que l'intéressement.
Enfin, la commission présentera des amendements - sur lesquels le Gouvernement émettra un avis favorable, je le dis dès à présent - visant à conforter, s'il en était besoin, le caractère non substituable au salaire des dispositifs, s'agissant notamment du supplément d'intéressement.
Je voudrais également rappeler que le supplément d'intéressement a été rendu libre, conformément aux souhaits convergents des membres du Conseil supérieur de la participation.
Sous le bénéfice de ces observations, j'émets un avis défavorable sur les amendements identiques nos 77 et 169.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Permettez-moi de vous dire, monsieur Muzeau, que vous n'avez rien compris... (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. À l'économie ?
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.... à la participation.
J'ai essayé tout à l'heure, en vain, de vous faire comprendre qu'une entreprise doit être compétitive et que, lorsqu'elle fait des bénéfices, elle peut les utiliser pour augmenter le pouvoir d'achat de son personnel par le biais de la participation, ce qui ne grève pas le coût du travail.
En revanche, réclamer sans cesse des augmentations des salaires compromet la santé de l'entreprise, qui devra supporter des charges supérieures à ses recettes et rencontrera, dès lors, de graves difficultés de gestion. C'est une question de bon sens ! Si vous augmentez sans fin les salaires, l'entreprise finira par ne plus être compétitive. Elle devra supporter trop de dépenses, et si ses recettes ne sont pas suffisantes, elle sera obligée de licencier. Ce n'est tout de même pas si difficile à comprendre !
Au contraire, lorsque l'entreprise bénéficie de recettes supplémentaires, elle peut faire profiter son personnel de cette augmentation de richesse par le biais du dividende du travail sans que cela vienne alourdir ses charges. C'est donc un dispositif qui ne compromet pas la vie de l'entreprise, tout en étant profitable aux salariés.
Il faut donc bien comprendre comment fonctionne une entreprise : ce n'est pas une machine à augmenter les salaires et à embaucher ; c'est une machine à vendre des produits compétitifs.
Voilà ce que j'ai essayé de vous expliquer, monsieur Muzeau. Je pourrai vous faire un cours plus complet, si vous le souhaitez, parce que cela n'a pas l'air de rentrer ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Il faut le prendre en stage !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce sont des cours particuliers qu'il leur faudrait, mais je crains qu'ils ne soient irrécupérables ! (Sourires.)
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Je voudrais que vous compreniez tout de même que l'entreprise doit vendre les produits qu'elle fabrique et que, si ces derniers sont trop chers parce que ses charges salariales sont excessives, elle n'y parviendra plus et se trouvera contrainte de licencier.
Je suis donc favorable, évidemment, au dividende du travail.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 77 et 169.
M. Jean Desessard. M. Dassault a repris à son compte, en quelque sorte, la formule de M. Thierry Breton selon laquelle seul le parti conservateur connaît quelque chose à l'économie... Nous aurions donc besoin de cours !
M. Dassault a affirmé que l'entreprise ne peut augmenter les salaires en cas de bénéfices parce qu'il est ensuite impossible de revenir en arrière si le besoin s'en fait sentir. Admettons ! Je lui ferai cependant remarquer qu'une entreprise peut toujours accorder des primes exceptionnelles à ses salariés parce que de nombreuses commandes ont été enregistrées, parce que le chiffre d'affaires est bon, parce que le personnel a connu une situation de travail difficile. À défaut d'augmenter les salaires, il est donc toujours possible de distribuer des primes.
Cela étant, quel est l'intérêt social d'une telle pratique ? Je vais vous l'expliquer, monsieur le chef d'entreprise ! (Sourires.)
Lorsqu'on accorde une prime à un salarié, cela compte pour la retraite, pour les ASSEDIC, pour toutes les prestations sociales. Mais il est vrai que vous n'accordez pas beaucoup d'importance aux prestations sociales... Eh bien, vous avez tort, car elles garantissent un certain pouvoir d'achat à ceux qui en bénéficient et contribuent de ce fait à la bonne santé économique du pays.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je confirme à M. Dassault que je suis là pour apprendre, bien évidemment ! Cependant, j'ai sans doute la tête trop dure, et je crains de ne jamais y arriver ! (Sourires.)
J'essaie néanmoins, en écoutant les stratèges de l'économie nationale et internationale présents dans cet hémicycle, en lisant, en prenant connaissance d'un certain nombre d'avis émis par des gens qui, eux, sont intelligents... (Nouveaux sourires.)
J'observe notamment ce qui se pratique chez Dassault, entreprise que je connais bien.
Je constate que, chez Dassault, on ne pratique pas la même politique salariale que dans les secteurs de l'hôtellerie-restauration ou du commerce.
Chez Dassault, on s'attache à conserver les salariés et à leur assurer une certaine progression de carrière.
Chez Dassault, le budget alloué à la recherche n'est pas négligeable, et celui qui est affecté à la formation professionnelle, même s'il peut toujours être contesté, est réellement important.
Je ne dis pas cela pour vous encenser, monsieur Dassault, car j'ai, par ailleurs, bien des choses négatives à vous dire : il s'agit simplement pour moi de prendre le contre-pied de votre argumentation.
La politique suivie dans votre entreprise fait que les salaires n'y ont rien à voir avec ceux que l'on pratique dans d'autres entreprises, appartenant à d'autres branches.
Bien sûr, vous pourriez me répondre que les profits de votre entreprise n'ont rien à voir non plus avec ceux que d'autres dégagent. Mais cela, évidemment, vous vous garderez bien de le dire ! (Nouveaux sourires.)
Au demeurant, je pourrais aussi vous donner l'exemple du secteur pétrolier. Ainsi, chez Total, la politique salariale n'a rien à voir avec celle qui est conduite dans d'autres secteurs.
Il y a tout de même là une question essentielle, sur laquelle vous ne pouvez vous en sortir simplement par la plaisanterie - je sais que vous cherchez à me taquiner ! - en faisant croire qu'il y aurait, en haut du panier, ceux qui comprennent et, en bas, une belle bande d'abrutis qui n'ont qu'à écouter.
J'ai lu avec attention dans la presse un entretien avec un économiste, M. Jean-Marie Harribey, qui enseigne à Bordeaux IV : ce ne doit donc pas être un abruti ; je suppose qu'il connaît un peu son métier !
Je ne vous infligerai pas toute sa démonstration, encore qu'elle soit fort intéressante, et je suis sûr que vous le penserez aussi si vous en prenez connaissance. J'en citerai simplement les prémisses.
La question qui lui était posée était la suivante : « À la lumière des résultats publiés par les groupes du CAC 40, peut-on faire un lien direct entre la hausse de la rentabilité des fonds propres - la rentabilité financière - des actionnaires et la hausse de la productivité du travail ? ».
Vous le voyez, il s'agit précisément du point sur lequel vous avez articulé votre démonstration.
Voici ce que répond ce professeur : « Les évolutions de la rentabilité financière et de la productivité du travail sont sans commune mesure. La première évolue à un rythme bien plus élevé que la seconde. La comparaison est donc éloquente : puisque les revenus financiers augmentent plus vite que la richesse produite, la part salariale ne peut que décroître. »
Vous vous satisfaites de cette situation, mais ce n'est pas notre cas !
Il poursuit ainsi son raisonnement : « C'est le mouvement de fond qui caractérise les vingt-cinq dernières années. L'absence de volonté de lutter véritablement contre le chômage et l'organisation de la précarité sont les deux leviers par lesquels le capital réussit à s'approprier une part accrue de la richesse. Quand la productivité progresse de 2 % par an et que, dans le même temps, les dividendes augmentent de 30 %, 40 %, 50 % ou plus, fatalement, la répartition de la richesse s'en trouve déformée. »
Nous pourrons continuer à débattre de tout cela dans la suite de la discussion. J'ai à ma disposition des piles de documents qui vont dans ce sens. En tout cas, il n'y a pas qu'une seule vision de l'économie, celle que vous défendez, assez bien, d'ailleurs, en fin de compte. Acceptez qu'il y ait aussi des positions différentes, que d'autres, dont je fais partie, défendent. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 77 et 169.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er A, modifié.
(L'article 1er A est adopté.)
CHAPITRE IER
Améliorer la participation des salariés aux résultats de l'entreprise
Article 1er
Après l'article L. 442-14 du code du travail, il est inséré un article L. 442-14-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 442-14-1. - Le conseil d'administration ou le directoire peut décider de verser :
« 1° Un supplément d'intéressement au titre de l'exercice clos, dans le respect du plafond mentionné au huitième alinéa de l'article L. 441-2 et selon les modalités de répartition prévues par l'accord d'intéressement ou, le cas échéant, par un accord spécifique conclu selon les modalités prévues à l'article L. 441-1. Ces sommes peuvent notamment être affectées à la réalisation d'un plan d'épargne d'entreprise, d'un plan d'épargne interentreprises ou d'un plan d'épargne pour la retraite collectif ;
« 2° Un supplément de réserve spéciale de participation, dans le respect des plafonds mentionnés au premier alinéa de l'article L. 442-4 et selon les modalités de répartition prévues par l'accord de participation ou, le cas échéant, par un accord spécifique conclu selon les modalités prévues à l'article L. 442-10.
« Dans une entreprise où il n'existe ni conseil d'administration, ni directoire, le chef d'entreprise peut décider le versement d'un supplément d'intéressement ou de réserve spéciale de participation, dans les conditions mentionnées aux 1° ou 2°. »
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. L'article 1er ouvre donc le chapitre du projet de loi intitulé « Améliorer la participation des salariés aux résultats de l'entreprise ».
Comme nous avons déjà eu l'occasion de le dire lors de la discussion générale, la question de la participation est un bon moyen pour cette majorité de contourner le débat sur la perte de pouvoir d'achat des salariés, en particulier au cours de ces dernières années.
Nous assistons à une explosion de la précarité, qui n'est pas sans écho dans les banlieues. Dans les quartiers populaires, la paupérisation et le chômage sont en effet bien plus importants qu'ailleurs.
Les organisations syndicales évaluent cette perte de pouvoir d'achat des salaires entre 5 % et 7,5 %. Même les cadres ne sont plus épargnés par ce phénomène. Avec des entreprises recherchant férocement des résultats toujours plus importants, les plus diplômés peuvent voir leur rémunération dévalorisée par rapport à celle des générations antérieures.
Cette perte de pouvoir d'achat s'accompagne malheureusement de fortes disparités et d'importantes discriminations. Cela s'explique largement par la tendance à l'individualisation des rémunérations, phénomène que ce projet de loi sur la participation va encore accentuer.
Nous n'allons pas cesser, au cours de ces trois jours de débats, de marteler que seules les augmentations salariales et le respect par les entreprises de leurs obligations en matière de négociations peuvent conduire à une véritable revalorisation du travail.
Les demandes et les revendications qui portent sur le pouvoir d'achat des salariés se font de plus en plus pressantes. Elles sont au coeur de l'actualité, même si vous ne voulez pas les entendre, et le Gouvernement, avec ce texte, offre une fois de plus au MEDEF une porte de sortie.
Les mécanismes salariaux s'organisent autour de négociations paritaires, de grilles de rémunérations, de droits sociaux accrochés aux salaires, de conventions collectives, tout cela dans un cadre légal qui émane de notre histoire collective.
Ce texte est un pas de plus vers la mise en pièces des solidarités et des protections collectives des travailleurs. Avec la participation, c'est une étape supplémentaire qui est franchie vers l'individualisation des rémunérations et la fragilisation des rapports salariaux.
Nous ne souhaitons pas participer à cette mascarade sur une prétendue augmentation du pouvoir d'achat des salariés, lequel est de plus en plus confisqué au profit de l'entreprise puisque, avec cette participation que vous faites miroiter, il s'agit en réalité d'augmenter les placements en actions.
Il ne s'agit de rien d'autre que de cautionner la politique de déresponsabilisation du MEDEF, qui réclame une déréglementation tous azimuts, comme en témoignent les récentes déclarations de sa présidente : elle a défié le ministre de l'économie de remettre en cause les 35 heures. Et je pourrais multiplier les exemples : je vous renvoie à l'audition par la commission de M. Gautier-Savagnac.
J'espère seulement que ces débats seront l'occasion pour le Gouvernement de commenter une récente enquête de la Banque de France. Ce document indique que les profits des entreprises sont à leur plus haut niveau depuis des décennies, dépassant 10 % du PIB. La situation est jugée « sans précédent, paradoxale et lourde de conséquences » parce que les entreprises, ne sachant que faire de leur argent, privilégient les placements financiers, au détriment des investissements matériels et de l'embauche. La panne d'électricité qui a touché l'Europe la semaine dernière est une parfaite illustration de cette situation de sous-investissement.
Il ne me semble pas que les articles que nous nous apprêtons à examiner traitent clairement et courageusement ce problème. Au contraire, en généralisant et en uniformisant les mécanismes de participation, il ouvre grand la porte au patronat pour gérer comme il l'entend sa masse salariale et contourner les accords et négociations collectives.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deux premiers alinéas de cet article :
Après l'article L. 444-9 du code du travail, il est inséré un article L. 444-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 444-12. - Le conseil d'administration ou le directoire peut décider de verser :
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement tend à insérer l'article relatif au supplément d'intéressement et de participation dans le chapitre du code du travail consacré aux dispositions communes à l'intéressement, à la participation et au plan d'épargne salariale, où il trouve plus naturellement sa place. Cet amendement porte en fait plus sur la forme que sur le fond.
Mme la présidente. L'amendement n° 78, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente - Baudrin, Schillinger, Jarraud - Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail, ajouter les mots :
Dans les entreprises où un accord salarial a été conclu depuis moins de deux ans,
La parole est à Mme Michèle San Vicente-Baudrin.
Mme Michèle San Vicente-Baudrin. Cet amendement vise à apporter à la rédaction de l'article 1er une précision qui, pour être modeste en apparence, n'en est pas moins importante par sa portée.
Comme l'atteste l'avant-projet de loi relatif à la modernisation du dialogue social, le Gouvernement semble accorder la plus grande valeur à la négociation entre les partenaires sociaux et à la possibilité de conclure des accords prenant en compte la réalité au plus près du terrain.
Cet avant-projet de loi a été remis aux partenaires sociaux et à la presse, mais pas aux parlementaires. Nous espérons qu'il ne faut pas y voir une anticipation de ce que pourraient devenir les droits du Parlement ! Quoi qu'il en soit, nous nous le sommes procuré.
Ainsi, le dialogue social concernera de nombreux sujets, à l'exception de trois : la protection sociale, la santé au travail et - surprise ! - l'épargne salariale. Est-ce là l'avancée sociale annoncée par le Président de la République ?
Est-ce à dire, aussi, que ces trois thèmes se rejoignent, que l'épargne salariale aurait, dans l'avenir, beaucoup à voir avec la protection sociale, surtout avec son financement ? Sans doute pourrez-vous répondre à ces interrogations, monsieur le ministre.
En revanche, les salaires relèvent du domaine de la négociation.
Or le présent projet de loi prévoit que les organes dirigeants de l'entreprise décideront seuls de l'octroi d'un supplément d'intéressement ou de participation, selon les critères de répartition préexistants, semble-t-il. Cette disposition s'inscrit dans le droit fil de l'avant-projet de loi relatif à la modernisation du dialogue social.
Afin de lever toute ambiguïté, nous proposons d'ajouter, au début de l'article 1er, que ce supplément d'intéressement ou de participation ne peut être décidé par les seuls dirigeants de l'entreprise que si un accord salarial a été conclu depuis moins de deux ans.
Il s'agit pour nous à la fois de renforcer le dialogue social dans les entreprises et de maintenir un rapport raisonnable entre la masse salariale et la part variable, éventuellement indisponible, de la rémunération. Nous éviterions ainsi, monsieur le ministre, que certains imaginent que ces suppléments défiscalisés et exonérés socialement, répartis de manière différente entre les cadres et les autres salariés de l'entreprise, soient octroyés en lieu et place d'augmentations de salaire négociées et pérennes.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 78 ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Chère collègue, s'il était adopté, votre amendement aurait pour effet de restreindre considérablement le champ de la mesure visée par l'article 1er ; je ne peux donc qu'y être défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 30, car il lui paraît en effet plus cohérent d'intégrer les dispositions relatives aux suppléments de participation et d'intéressement dans les articles du code du travail communs à la participation et à l'intéressement.
S'agissant de l'amendement n° 78, je rappelle que, aux termes de l'article L. 441-4 du code du travail, les sommes attribuées au salarié en application d'un accord d'intéressement n'ont pas le caractère de rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération en vigueur dans l'entreprise ou qui deviennent obligatoires en vertu des règles légales ou contractuelles. Des suppléments d'intéressement ou de participation suivent les mêmes règles de non-substitution. À défaut, l'URSSAF ne manquerait d'ailleurs pas d'effectuer un redressement ! Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je souhaite par ailleurs, madame la présidente, répondre à M. Fischer, qui est intervenu sur l'article 1er, d'abord pour lui indiquer que, de manière constante depuis la fin des années quatre-vingt-dix, la participation atteint un montant égal à 6 % de la masse salariale.
De même, monsieur Fischer, le partage de la valeur ajoutée a assez peu varié : on ne peut donc parler, comme vous l'avez fait, d'un déséquilibre croissant. Au contraire, on est revenu en 2005 aux taux de 2002.
En tout état de cause, ce n'est pas, ce soir, le sujet qui nous occupe. Ce dont nous traitons en cet instant, ce sont les suppléments d'intéressement ou de participation, qui ont pour objet de faire profiter les salariés de résultats exceptionnels. Tel est notre objectif ; nous pourrions, me semble-t-il, le partager.
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 78 n'a plus d'objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
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CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
Mme la présidente. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Jeudi 9 novembre 2006 :
À 9 heures 30 :
1° Désignation d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne en remplacement de M. Yannick Bodin ;
(Les candidatures devront être remises au secrétariat central des commissions au plus tard le mercredi 8 novembre, à 17 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
2° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié (n° 15, 2006 2007) ;
À 15 heures et le soir :
3° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
4° Suite de l'ordre du jour du matin.
Vendredi 10 novembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
- Suite du projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
Lundi 13 novembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (n° 51, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 13 novembre à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 10 novembre 2006 ;
Par ailleurs, la conférence des présidents a décidé d'organiser un débat au début de la troisième partie du projet de loi « Dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour 2006 » sur la prise en charge de la dépendance ;
Elle a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 13 novembre 2006).
Mardi 14 novembre 2006 :
À 10 heures :
1° Dix-huit questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1083 de M. Roland Courteau à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable ;
(Allongement des périodes de chasse) ;
- n° 1089 de M. Bernard Cazeau à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Situation des soins palliatifs en France) ;
- n° 1103 de M. Philippe Leroy à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Évaluation du nouveau dispositif de permanence des soins en médecine ambulatoire) ;
- n° 1105 de Mme Anne-Marie Payet à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Adaptation de méthodes scientifiques aux protocoles d'évaluation des médicaments) ;
- n° 1108 de M. Claude Biwer à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales ;
(Fonctionnement du FISAC) ;
- n° 1116 de M. Alain Gournac à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Permis à points) ;
- n° 1123 de M. Paul Girod à M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Conditions de livraison des passeports dans les petites communes) ;
- n° 1126 de Mme Marie-France Beaufils à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité ;
(Difficultés financières des associations à caractère social suite aux restrictions de crédit et retards de versement) ;
- n° 1127 de Mme Muguette Dini à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Conseils départementaux de l'éducation nationale et conditions de quorum) ;
- n° 1131 de M. Alain Lambert transmise à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ;
(Bail à réhabilitation) ;
- n° 1132 de M. Michel Billout à M. le ministre de la culture et de la communication ;
(Code des marchés publics et mission des scènes nationales) ;
- n° 1133 de M. Bernard Piras à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Prise en charge des préjudices agricoles causés par divers sinistres climatiques) ;
- n° 1134 de M. Richard Yung à M. le ministre des affaires étrangères ;
(Situation des personnels français de l'OSCE) ;
- n° 1135 de M. Dominique Braye à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Recrutement des professeurs des sections internationales des écoles, collèges et lycées) ;
- n° 1136 de Mme Alima Boumediene-Thiery transmise à M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Discriminations concernant les femmes portant le foulard islamique) ;
- n° 1144 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Revalorisation des petites retraites agricoles) ;
- n° 1154 de M. Bernard Murat à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Adaptation des réseaux d'eau à la défense incendie) ;
- n° 1164 de M. André Boyer à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Desserte ferroviaire de Gramat).
À 16 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
Mercredi 15 novembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
Jeudi 16 novembre 2006 :
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ;
À 15 heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Vendredi 17 novembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
- Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
Lundi 20 novembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur (n° 467, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au vendredi 17 novembre 2006, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 17 novembre 2006.)
Mardi 21 novembre 2006 :
À 10 heures :
1° Dix-huit questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1120 de M. Francis Grignon à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Appartements de coordination thérapeutique) ;
- n° 1124 de Mme Marie-Thérèse Hermange à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Situation de la greffe et du don de moelle osseuse) ;
- n° 1130 de M. Georges Mouly à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Aide publique à la forêt française) ;
- n° 1142 de Mme Christiane Kammermann à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Publicité et lutte contre l'obésité infantile) ;
- n° 1145 de M. Éric Doligé à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales ;
(Retraite des agents de l'État transférés aux collectivités locales) ;
- n° 1146 de M. Jean-Léonce Dupont à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire ;
(Nécessité de considérer le Bessin comme un bassin d'emploi autonome) ;
- n° 1148 de M. Louis Souvet à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Emploi des forces de l'ordre) ;
- n° 1149 de M. Bernard Dussaut à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable ;
(Conditions de résorption des sites de stockage des pneumatiques usagés) ;
- n° 1150 de M. Christian Cambon à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Implantation d'un centre de rétention administrative sur la commune de Villeneuve-Le-Roi) ;
- n° 1151 de M. Michel Billout à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Connexion réseau haut débit en milieu urbain) ;
- n° 1155 de M. Robert Tropéano à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement ;
(Taxe sur les jeux traditionnels dans les cafés et bars-tabacs) ;
- n° 1156 de M. Jean Boyer à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Impôts locaux : compensations en faveur des collectivités territoriales) ;
- n° 1157 de Mme Éliane Assassi à M. le Garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Réforme du financement des activités prud'homales) ;
- n° 1158 de M. Bertrand Auban à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Réorganisation de l'office national des forêts dans le Sud-Ouest) ;
- n° 1159 de M. Rémy Pointereau à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire ;
(Financement des équipements sportifs dans le cadre du programme FEDER 2007-2013) ;
- n° 1161 de M. Thierry Foucaud à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ;
(Prise en compte des besoins liés au vieillissement de la population française) ;
- n° 1163 de M. Aymeri de Montesquiou à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Déviation de Barcelonne-du-Gers) ;
- n° 1168 de M. Jacques Gillot à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Instauration d'une prime de vie chère au profit des salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux de la Guadeloupe).
À 16 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Suite du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.
Mercredi 22 novembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.
Du jeudi 23 novembre au mardi 12 décembre 2006 :
Ordre du jour prioritaire
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2007 (A.N., n° 3341) ;
(Le calendrier et les règles de la discussion budgétaire figurent en annexe.
Pour la discussion générale, la conférence des présidents a décidé de fixer à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Dans le cadre du temps global imparti à chaque groupe aucune intervention ne devra dépasser dix minutes ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 22 novembre 2006.)
En outre,
Jeudi 30 novembre 2006 :
À 15 heures :
1° Questions d'actualité au Gouvernement
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
2° À la suite, éventuellement, de la fin de l'examen des crédits de la mission « Transports », sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
Mercredi 13 décembre 2006 :
Ordre du jour réservé
À 15 heures et le soir :
1° Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes de la panne d'électricité du 4 novembre 2006 et sur l'état de la sécurité d'approvisionnement de l'électricité en France dans le cadre des politiques européennes d'ouverture à la concurrence du secteur énergétique, présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de ses collègues ;
2° Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur le groupe EADS et sur les raisons des retards de production et de livraison du groupe Airbus, présenté par les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés ;
3° Débat sur les énergies renouvelables, la transition énergétique et le Plan Climat :
Dans ce débat, interviendront MM. Claude Belot et Jean-Marc Juilhard, rapporteurs de la délégation pour l'aménagement du territoire et le développement durable (n° 436, 2005 2006) ainsi que M. Pierre Laffitte, auteur d'une question orale avec débat n° 19 à M. le ministre délégué à l'industrie sur la transition énergétique et le Plan Climat ;
4° Question orale avec débat n° 23 de M. Nicolas About sur l'état d'application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
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Participation et actionnariat salarié
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 1er, à l'amendement n° 31.
Article 1er (Suite)
Mme la présidente. L'amendement n° 31, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail, après les mots :
Un supplément d'intéressement
insérer le mot :
collectif
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à réaffirmer le caractère collectif du supplément d'intéressement. Ce caractère collectif ne fait pas de doute lorsque la répartition du supplément se fait en application de l'accord d'intéressement. Elle est moins évidente lorsque la répartition obéit aux modalités définies par un accord spécifique.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Cette précision rappelle le caractère collectif du supplément d'intéressement et interdit clairement l'individualisation du dispositif.
Le Gouvernement y est donc favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement montre que Mme le rapporteur partage le souci exprimé par les sénateurs socialistes au sujet de l'accord spécifique éventuel et de son contenu.
Nonobstant tout ce que nous avons pu dire préalablement, s'agissant d'une avancée qui nous tient à coeur, nous voterons cet amendement de la commission. (Très bien ! sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. L'amendement n° 32, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail, remplacer les mots :
dans le respect du plafond mentionné au huitième alinéa de l'article L. 441-2
par les mots :
dans le respect des plafonds mentionnés aux sixième et huitième alinéas de l'article L. 441-2
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir le plafond global de l'intéressement, supprimé par l'Assemblée nationale. Cette mesure doit atténuer les craintes relatives à un éventuel effet de substitution du supplément d'intéressement au salaire.
Elle vise aussi à assurer la conformité de cet article aux dispositions de la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cette précision met en cohérence les règles de plafonnement applicables au supplément d'intéressement et permet d'éliminer tout doute quant à la non-compensation de ce supplément vis-à-vis de la sécurité sociale.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. L'amendement n° 80 rectifié, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente - Baudrin, Schillinger, Jarraud - Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. Après les mots :
l'accord d'intéressement
supprimer la fin de la première phrase du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail.
II. Après les mots :
l'accord de participation
supprimer la fin du troisième alinéa (2°) du même texte.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. L'article 1er prévoit que le supplément d'intéressement ou de participation peut être versé selon les modalités prévues par l'accord global sur le sujet, ou en vertu des dispositions d'un accord spécifique conclu pour la circonstance.
Dans le même temps, le texte indique que les plafonds respectifs légaux devront être respectés pour que soit ouvert le droit au bénéfice des exonérations fiscales et sociales, soit 20 % de la masse salariale et un plafond individuel de la moitié de 31 068 euros pour l'intéressement et un plafond individuel de 124 272 euros pour la participation.
Compte tenu de cette rédaction un peu ambiguë, monsieur le ministre, nous souhaitons obtenir de votre part une précision : à quoi sert l'accord spécifique ? Permettra-t-il éventuellement de dépasser le plafond, s'il est déjà atteint, ou de modifier les critères de répartition ?
S'agissant d'un supplément octroyé discrétionnairement par le chef d'entreprise, le conseil d'administration ou le directoire, vous comprendrez que nous soyons attentifs à ce point.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer un élément de souplesse figurant dans le dispositif de l'article 1er. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Dans la mesure où l'élément d'intéressement reste dans les plafonds, le Gouvernement ne peut être que défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 79, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente - Baudrin, Schillinger, Jarraud - Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de la seconde phrase du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14 1 du code du travail :
Si le salarié en fait la demande écrite, ces sommes peuvent être affectées...
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Il s'agit ici de préserver le libre choix du salarié quant à l'affectation de l'intéressement qui lui serait éventuellement attribué. Il règne en effet une certaine confusion dans les déclarations que l'on peut entendre au sujet de l'utilité économique de ce supplément.
L'objectif est-il une augmentation de la consommation via une augmentation du pouvoir d'achat, ce qui implique que le salarié puisse disposer librement de ces sommes, ou bien ces sommes seront-elles destinées obligatoirement au placement en épargne salariale ?
On peut se demander également quelle sera la répartition de ces sommes entre les cadres disposant déjà d'un salaire confortable, les employés et les ouvriers. Vous connaissez, comme nous, les statistiques de répartition sur le plan national des dispositifs d'intéressement et de participation, et vous savez que les cadres supérieurs en sont les premiers bénéficiaires : 35 % des ouvriers et des employés en perçoivent, contre 50 % des cadres et des professions intermédiaires.
De fait, la répartition des sommes liées à l'épargne salariale est plus inégale encore que les salaires. Parmi les bénéficiaires, les 10 % les mieux servis ont reçu 40 % des sommes distribuées.
Il en résulte, à l'inverse des objectifs initiaux de la participation et de l'intéressement, que ces dispositifs accentuent les inégalités au lieu de les réduire. Que peut-il en être si des suppléments d'intéressement et de participation sont octroyés discrétionnairement par les cadres dirigeants ?
On constate que coexistent deux formes d'intéressement aux résultats : celle qui concerne les dirigeants, composée de primes importantes et de stock-options ou d'autres dispositifs plus sophistiqués, et celle qui concerne les salariés modestes, heureux de se voir attribuer une somme infiniment moindre, mais qui va leur permettre de financer une dépense nécessaire.
Toute dépense nécessaire pour un ménage modeste ne figure cependant pas dans la liste des cas limitativement énumérés par les fonctionnaires de Bercy. Il est donc nécessaire de préciser que le salarié n'est pas un mineur sous tutelle et qu'il doit toujours garder le libre choix d'affectation de son intéressement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Ma chère collègue, votre demande de précision nous paraît superflue ; c'est pourquoi la commission a donné un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame le sénateur, dans la rédaction actuelle du projet de loi, la liberté de choix du salarié de percevoir ou de placer son supplément d'intéressement est assurée. Nos intentions se rejoignent sur ce point.
Au bénéfice de ces explications, vous pourriez retirer cet amendement, qui nous paraît superfétatoire. À défaut, nous y serions défavorables.
Mme la présidente. Madame Jarraud-Vergnolle, l'amendement n° 79 est-il maintenu ?
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 33, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail, après les mots :
Un supplément de réserve spéciale de participation
insérer les mots :
au titre de l'exercice clos
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 34, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail, après les mots :
dans le respect des plafonds mentionnés au premier alinéa de l'article L. 442-4
insérer les mots :
, sans que la réserve spéciale de participation n'excède la moitié du bénéfice net comptable,
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Par cohérence avec le plafonnement prévu pour le montant total de l'intéressement, il semble raisonnable de prévoir un plafond global pour la réserve spéciale de participation. Le plafond retenu est celui qui est proposé pour les accords de participation dérogatoires.
Ce plafonnement permet d'écarter le risque d'une substitution de la participation au salaire. Il garantit aussi la conformité de cet article aux principes posés par la loi organique sur le financement de la sécurité sociale.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 234 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa de l'amendement n° 34 par les mots :
ou l'un des trois plafonds mentionnés à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 442-6.
La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 34.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir nous excuser pour la rectification un peu tardive qui a été apportée à ce sous-amendement.
M. Roland Muzeau. Comme d'habitude !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Non, monsieur Muzeau : comme le commande la nécessité de légiférer de manière aussi pertinente que possible !
M. Roland Muzeau. Mais dans l'urgence !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'amendement n° 34 rappelle que la somme de la participation versée et de l'éventuel supplément de participation ne saurait être supérieure à la moitié du bénéfice net comptable.
Nous y sommes favorables, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 234 rectifié, qui précise que le supplément ne saurait être supérieur à la moitié du bénéfice net comptable ou au plafond qui s'applique à une formule dérogatoire.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Ce sous-amendement complète notre amendement de manière très utile. La commission y est donc favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 234 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
A. - Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 442-14-1 du code du travail par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. Dans les entreprises ayant mis en place un accord dérogatoire de participation en application duquel les sommes affectées à la réserve spéciale de participation sont supérieures d'au moins 20 % au montant défini à l'article L. 442-2, le conseil d'administration ou le directoire peuvent décider de ne pas verser les suppléments de participation et d'intéressement visés au I. »
B. - En conséquence, faire précéder le début du même texte par la mention :
I.
La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Le Sénat ayant adopté l'amendement n° 233, présenté par le Gouvernement, à l'article 1er A, je retire l'amendement n° 1.
Mme la présidente. L'amendement n° 1 est retiré.
L'amendement n° 35, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 441-4 du code du travail, après les mots : « en application de l'accord d'intéressement », sont insérés les mots : « ou au titre du supplément d'intéressement visé à l'article L. 444-12 ».
III. - L'article L. 442-8 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« V. - Les dispositions du présent article sont applicables au supplément de réserve spéciale de participation visé à l'article L. 444-12. »
II - En conséquence, faire précéder le premier alinéa de cet article de la mention :
I.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à préciser le régime fiscal et social applicable au supplément d'intéressement ou de participation.
En effet, dans la mesure où le versement de ces suppléments ne présente pas un caractère aléatoire, il existe un risque que ces sommes soient requalifiées en salaires par les URSSAF.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement traduit le travail de clarification qui a été effectué par la commission des affaires sociales. Le Gouvernement y est donc favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 1er bis
L'article L. 444-5 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au début de cet article, il est inséré un I ainsi rédigé :
« I. - Tout salarié d'une entreprise proposant un des dispositifs prévus aux articles L. 441-1, L. 442-10, L. 443-1, L. 443-1-1 ou L. 443-1-2, reçoit, lors de la conclusion de son contrat de travail, un livret d'épargne salariale présentant l'ensemble de ces dispositifs. » ;
2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les références de l'ensemble des établissements habilités pour les activités de conservation ou d'administration d'instruments financiers, en application de l'article L. 542-1 du code monétaire et financier, gérant des sommes et valeurs mobilières épargnées ou transférées par le salarié dans le cadre des dispositifs prévus aux chapitres Ier à III du présent titre, figurent sur chaque relevé de compte individuel et chaque état récapitulatif. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 170, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. L'article 1er bis vise à créer un livret d'épargne salariale dont le but, selon ses auteurs, est de « favoriser l'extension du dispositif, mieux informer les salariés et rendre la participation salariale plus crédible ». Reconnaissez qu'il y a du travail !
Il s'agit, là encore, d'une mesure d'affichage : on crée une nouvelle fois des dispositifs de communication, mais sans aucun fonds ni aucune réflexion. Le salarié qui détiendra son nouveau livret ne sera pas pour autant mieux payé et ne constatera aucune amélioration de son pouvoir d'achat.
Pis encore, il n'est pas impossible qu'on en vienne à lui demander de payer les frais de tenue du compte de son livret. Après tout, c'est vrai, qui va financer cette disposition ? Le Gouvernement compte-t-il vraiment sur la bonne volonté des banquiers pour gérer ces livrets gratuitement ?
Cette disposition n'ira probablement pas plus loin que l'annonce faite dans cette assemblée et je vous demande donc, d'en voter la suppression, dans un souci de clarification.
Mme la présidente. L'amendement n° 81, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente - Baudrin, Schillinger, Jarraud - Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 1° de cet article pour le I de l'article L. 444-5 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
Les clauses relatives à la durée de présence dans l'entreprise contenues dans les accords d'intéressement et de participation, ainsi que dans les accords mettant en place des plans d'épargne entreprise, des plans d'épargne interentreprises, des plans d'épargne pour la retraite collectifs, et des distributions d'actions gratuites sont nulles de plein droit.
La parole est à Mme Michèle San Vicente-Baudrin.
Mme Michèle San Vicente-Baudrin. Les rapporteurs de ce projet de loi à l'Assemblée nationale ont proposé que chaque salarié reçoive désormais, lors de son embauche dans une entreprise, un livret d'épargne salariale. Ce livret présentera les différentes solutions mises à sa disposition pour placer l'intéressement qui lui sera octroyé ou les transferts de son compte épargne-temps, par exemple.
Or la plupart des accords d'intéressement et d'épargne salariale comportent une clause d'ancienneté de trois mois, délai avant lequel un salarié ne peut percevoir le bénéfice de son livret d'épargne salariale.
Nous sommes donc confrontés au problème des contrats à durée déterminée courts. Aujourd'hui, c'est un fait avéré, 78 % des embauches sont des CDD. Par ailleurs, la plupart de ces contrats sont limités dans le temps, particulièrement pour les jeunes et les personnes peu qualifiées. Les CDD de moins d'un mois, qui représentaient 35 % des intentions d'embauche en 2000, en représentent désormais plus de 50 %. La politique du Gouvernement a malheureusement accentué cette tendance. Il est en effet désormais prouvé que, dans les entreprises de moins de 20 salariés, les 400 000 contrats nouvelles embauches signés sur un an se sont substitués à 266 000 recrutements en CDI.
Il ne s'agit pas ici d'une appréciation au doigt mouillé. Les services de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, notent que la part des emplois précaires n'a cessé de progresser ces dernières années.
Il en résulte que l'intéressement et la participation, sous leur forme actuelle, accentuent les inégalités de salaire et créent une véritable discrimination entre les salariés permanents et les autres. Après l'inégalité sur la base du statut et du salaire, voici la discrimination par le contrat !
Nous ne devons pas oublier que ces « autres » sont le plus souvent des personnes en situation de précarité et aux revenus modestes.
À l'égard de ceux qui, une nouvelle fois, ne bénéficieront de rien, vous disposez donc, monsieur le ministre, de deux possibilités : soit inviter les partenaires sociaux à décider que toutes les clauses d'ancienneté sont nulles et que tous les salariés, même ceux qui n'ont été présents dans l'entreprise que pendant huit jours, doivent bénéficier d'un intéressement ; soit décider que les salariés en CDD court ne se verront pas remettre le petit livret d'épargne salariale, puisqu'ils ne percevront pas d'intéressement.
Il serait en effet de la plus grande maladresse, d'un point de vue patronal, de leur montrer d'entrée de jeu ce dont ils vont être privés, et dont ils demeuraient jusque-là dans une bienheureuse ignorance.
Monsieur le ministre, pouvez-vous m'indiquer si cette question a reçu un début de réponse ?
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Permettez-moi de rappeler que le livret d'épargne salariale a été institué en 2001, par un gouvernement de gauche, sur l'initiative d'un député socialiste, M. Jean-Pierre Balligand.
Vous voulez aujourd'hui le supprimer. Notre commission y est au contraire favorable et elle approuve les améliorations qui lui ont été apportées par l'Assemblée nationale, notamment sur l'initiative de M. François Cornut-Gentille.
Pour toutes ces raisons, la commission est hostile à la suppression de cet article et, par voie de conséquence, à l'amendement de suppression n° 170.
L'amendement n° 81 vise à supprimer toute condition d'ancienneté pour bénéficier de l'épargne salariale. Le bon fonctionnement de ces dispositifs suppose pourtant qu'un lien suffisamment durable s'établisse entre le salarié et l'entreprise.
La commission a donc également émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le livret d'épargne salariale est issu des rapports des deux parlementaires en mission, Jacques Godfrain et François Cornut-Gentille. C'est d'ailleurs par un amendement dont ils étaient les auteurs que ce dispositif a été introduit à l'Assemblée nationale.
Le livret d'épargne salariale constitue une innovation. Il permet en effet aux salariés d'être informés des mécanismes de la participation financière et de connaître, dès l'embauche, les dispositifs en place dans leur entreprise.
Les conditions d'ancienneté, je le rappelle, sont au maximum de trois mois et les partenaires sociaux peuvent, s'ils le souhaitent, le ramener à une durée inférieure. Cette décision fait l'objet d'une négociation.
La participation n'est pas exclusive : elle est ouverte à tous, y compris aux personnels intérimaires.
J'ajoute qu'aucune des propositions qui ont été faites jusqu'à ce jour ne modifie de manière significative la nature des contrats.
Madame le sénateur, vous avez évoqué les conditions d'embauche. Permettez-moi de vous rappeler qu'elles n'ont pas changé. Selon l'ANPE, les embauches en CDI sont passées de 42 % en 2002 à 45 % aujourd'hui, ce qui ne vient pas accréditer une augmentation de la précarité. D'ailleurs, c'est entre 1992 et 2002 que le nombre de CDI a diminué ; je vous renvoie aux rapports qui sont présentés devant la Commission nationale de la négociation collective.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er bis.
(L'article 1er bis est adopté.)
Article 2
L'article L. 441-1 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les accords intervenus en application du présent article peuvent également prévoir qu'un intéressement de projet est réservé à tout ou partie des salariés d'une entreprise concourant avec d'autres entreprises, juridiquement indépendantes ou non, à une activité caractérisée et coordonnée. Cet intéressement de projet doit définir un champ d'application et une période de calcul spécifiques, pouvant être différents de ceux visés au premier alinéa, sans pouvoir excéder la durée d'application de l'accord d'intéressement.
« Les accords d'intéressement de projet sont négociés dans les conditions prévues au présent article, s'ils n'impliquent que tout ou partie des salariés d'une même entreprise ou d'un même groupe. Ils sont négociés selon des modalités identiques à celles prévues au premier alinéa de l'article L. 443-1-1 s'ils concernent tout ou partie des salariés d'entreprises indépendantes juridiquement, qui ne constituent pas un groupe. Dans ces deux cas, la majorité des deux tiers requise pour la ratification s'entend sur les personnels entrant dans leur champ d'application du projet. »
Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 171, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. L'article 2 crée une nouvelle forme d'intéressement, appelée « intéressement de projet ». Or cet intéressement de projet recèle un certain nombre de dangers, ce qui nous incite à ne pas en encourager la mise en place.
En tout premier lieu, l'intéressement de projet ne peut concerner qu'une partie seulement des salariés d'une entreprise. Et cela ne va pas sans soulever certains problèmes. Il apporte en tout cas la preuve que l'intéressement n'offre pas les mêmes garanties que le salaire.
L'intéressement de projet est particulièrement discriminatoire. Dans la même entreprise, certains salariés, associés à un projet, pourront bénéficier d'une forme de revenu supplémentaire alors que d'autres ne le pourront pas. Cela va à l'encontre des garanties collectives des travailleurs et crée donc une inégalité de traitement.
Comme le souligne le rapport du député Jean-Michel Dubernard, l'intéressement avait jusqu'à présent un caractère collectif et la loi s'opposait à l'exclusion de certains salariés du bénéfice de l'intéressement. Cela a d'ailleurs été confirmé par une jurisprudence constante de la Cour de cassation.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Guy Fischer. Offrir le bénéficie de l'intéressement à seulement quelques salariés d'une entreprise augmente une fois encore le pouvoir des employeurs, qui vont pouvoir agiter sous le nez de leurs salariés cette nouvelle forme d'intéressement pour attiser les rivalités.
Cette gestion managériale, au plus mauvais sens du terme, participe du démantèlement des garanties collectives des travailleurs et fragilise une fois encore la situation des salariés.
L'entreprise ou la branche d'activité sont des entités juridiques sur lesquelles s'appuie le droit pour garantir le respect des droits des salariés. Pouvoir contourner de la sorte ces entités, en resserrant plus encore le lien individuel entre employeur et employé, fait courir un véritable danger aux salariés.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression de l'article 2.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Le projet de loi vise à développer la participation dans les PME. La commission des affaires sociales est très attachée à l'intéressement de projet, c'est pourquoi elle propose de le rendre encore plus opérationnel.
Ce dispositif a été expérimenté récemment sur un grand chantier de BTP et a rencontré un grand succès. Je ne peux donc qu'être défavorable à cet amendement.
M. Guy Fischer. Il s'agit du viaduc de Millau !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. En effet, monsieur Fischer.
M. Guy Fischer. Nous connaissons nos dossiers ! (Sourires.)
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Moi aussi, mes chers collègues ! Je ne l'ai pas désigné pour vérifier si vous étiez attentifs à mes propos. (Nouveaux sourires.)
M. Roland Muzeau. Toujours !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La mise en place de l'intéressement de projet suppose un accord d'intéressement préalable. Il répond à un objectif spécifique : associer autour d'un projet commun tant les salariés de filiales d'un même groupe que les salariés d'entreprises partenaires associées à la réalisation d'un projet. Il s'agit donc d'un dispositif qui va dans le sens de l'égalité des salariés.
Au sein du Conseil supérieur de la participation, les représentants et des salariés et des entreprises ont réservé un accueil très positif à l'intéressement de projet, qui a donné lieu à un débat avant de devenir une des propositions du Conseil. Je peux vous dire, pour illustrer la convergence des avis que j'ai évoquée dans mon propos liminaire, qu'aucun partenaire ne s'est prononcé contre.
M. Guy Fischer. Ils ont tous voté pour ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Entendons-nous bien, monsieur Fischer, je viens de dire qu'aucun partenaire ne s'était prononcé contre. (Sourires.) Cela figure d'ailleurs dans le rapport du Conseil supérieur de la participation.
M. Guy Fischer. Décidément, je vous connais trop ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Larcher, ministre délégué. C'est justement parce que vous me connaissez si bien que vous me faites confiance. (Rires.)
Si le Gouvernement est également favorable à cette disposition, c'est par respect pour le débat qui a eu lieu avec les partenaires sociaux. Il ne peut donc qu'émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 171.
Mme la présidente. L'amendement n° 36 rectifié, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 441-1 du code du travail :
« Dans les entreprises ou les groupes disposant d'un accord d'intéressement et concourant avec d'autres entreprises à une activité caractérisée et coordonnée, un accord peut être conclu pour prévoir que tout ou partie des salariés bénéficie d'un intéressement de projet.
« Cet accord d'intéressement de projet est négocié dans les conditions prévues au présent article s'il n'implique que tout ou partie des salariés d'une même entreprise ou d'un même groupe. Il est négocié selon des modalités identiques à celles prévues au premier alinéa de l'article L. 443-1-1 s'il concerne tout ou partie des salariés d'entreprises qui ne constituent pas un groupe. Dans les deux cas, la majorité des deux tiers requise pour la ratification s'entend sur les personnels entrant dans le champ d'application du projet. L'accord définit un champ d'application et une période de calcul spécifiques, qui peuvent différer de ceux visés au premier alinéa, sans pouvoir excéder trois ans. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'intéressement de projet, que le texte vise à mettre en oeuvre, permettra d'intéresser les salariés, participant à un projet commun à plusieurs entreprises, à sa bonne exécution.
La commission approuve cette mesure, mais elle propose de la rendre plus opérationnelle en renforçant l'autonomie de l'accord d'intéressement de projet par rapport à l'intéressement de base.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Là aussi, la commission apporte une clarification au texte en mettant en valeur la nécessité d'un accord d'intéressement préalable à l'intéressement de projet. Ainsi, l'intéressement ne pourra être mis en place au sein d'une équipe participant à un projet que si l'ensemble des salariés de l'entreprise est déjà couvert par un accord d'intéressement.
Je veux préciser un point qui satisfera M. Dufaut. Les clubs sportifs pourront par exemple, sous réserve de la conclusion préalable d'un accord d'intéressement s'appliquant à l'ensemble des salariés du club, mettre en place un intéressement de projet pour les joueurs et les entraîneurs.
M. Guy Fischer. Ils ne gagnent pas assez de fric ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Tout dépend où ! En promotion d'honneur à Rambouillet, ce n'est pas terrible. (Sourires.)
Ces sportifs pourront donc verser les primes d'intéressement de projet sur un plan d'épargne entreprise, notamment en vue de leur reconversion. Car on parle toujours des sportifs célèbres touchant des salaires élevés, mais il ne faut pas oublier tous ceux qui font vivre de nombreux clubs.
Comme vous pouvez le constater, les accords d'intéressement ne sont pas destinés aux vedettes qui auraient des préoccupations à caractère boursier. Cette mesure est très concrète.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l'amendement n° 36 rectifié.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2
Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre IV du livre IV du code du travail est ainsi modifié :
I. - L'article L. 441-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « pour une durée de trois ans et » sont supprimés ;
2° Après le cinquième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L'accord est valable pour une durée de trois ans dans toute entreprise employant habituellement au moins deux cent cinquante salariés. Cette durée est de deux ans dans les autres entreprises.
« Dans les entreprises employant habituellement moins de deux cent cinquante salariés, les accords conclus dans les conditions prévues aux cinq premiers alinéas dispensent de l'application des règles prévues à l'article L. 442-2 si, respectant les principes posés par le présent chapitre, ils comportent pour les salariés des avantages au moins équivalents. »
II. - Le premier alinéa de l'article L. 442-1 est complété par les mots : «, sous réserve de l'application des dispositions du septième alinéa de l'article L.441-1 ».
La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à insérer un article additionnel après l'article 2 du projet de loi. Il a pour objet de développer les accords d'intéressement dans les petites et moyennes entreprises, ce qui est d'ailleurs l'objectif poursuivi par le ministre chargé de l'économie et par le ministre chargé des affaires sociales.
Cet amendement a un double objet.
Premièrement, les accords d'intéressement sont aujourd'hui conclus pour une durée d'au moins trois ans. Or cette durée est trop longue pour les PME, qui ont une vision de leur activité à un an ou deux ans. Il serait donc utile d'abaisser à deux ans la durée minimale des accords d'intéressement dans les entreprises de moins de deux cent cinquante salariés.
Je ne vois pas ce qui pourrait pousser le Gouvernement à refuser cette mesure, qui ne coûterait rien à l'État. En outre, elle serait extrêmement positive pour les petites entreprises. J'espère donc, monsieur le ministre, que vous émettrez un avis favorable.
Deuxièmement, l'amendement prévoit que l'accord d'intéressement pourra se substituer, s'il est plus favorable, à l'accord de participation, qui est obligatoire dans les entreprises de moins de deux cent cinquante salariés.
Cette mesure, qui constitue une nouveauté, permettrait de développer l'épargne salariale sous forme d'accords d'intéressement. En effet, les accords d'intéressement sont plus souples que les accords de participation et plus faciles à réaliser par les petites entreprises, qu'il s'agisse des modalités de mise en place ou des règles de calcul des sommes versées. Dans le cadre de la législation actuelle, l'accord de participation n'engendre que peu de ressources supplémentaires pour les salariés. Cela pourrait donc être considéré comme une sorte d'accord dérogatoire.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission a examiné cet amendement avec attention. Or sa première partie pose un problème. Si vous décidiez de la maintenir, monsieur le rapporteur pour avis, elle serait obligée d'émettre un avis défavorable.
M. Guy Fischer. Ah !
M. Roland Muzeau. Pas d'exaltation, ça ne va pas durer !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cela étant, rien n'empêche que nous puissions discuter de ce sujet au sein du CSP.
Pour ce qui concerne la seconde partie de l'amendement, la commission se tourne vers le Gouvernement pour connaître son avis.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement comprend deux propositions bien distinctes, qui auraient d'ailleurs pu faire l'objet de deux amendements.
La première vise à raccourcir de trois à deux ans la durée des accords d'intéressement dans les PME. On peut comprendre cette préoccupation liée au peu de visibilité des PME, qui ont souvent un carnet de commandes pour une durée n'excédant pas une année ou une année et demie.
Pour autant, le projet de loi apporte déjà une réponse à ce type de situation grâce à l'intéressement de projet, dont la durée peut être inférieure à trois ans. Aussi, le Gouvernement ne peut pas être favorable à cette proposition.
La seconde proposition tend à améliorer l'articulation de la participation et de l'intéressement. Il s'agit d'une piste de travail ouverte par Jean-Pierre Raffarin le 23 mars 2005, lors de son discours devant le Conseil économique et social. Depuis le rapport de MM. de Foucault et Balligand, cette piste continue d'ailleurs à cheminer.
Cette piste importante cherche à faciliter le passage du seuil des cinquante salariés, lequel conduit trop souvent les PME à abandonner brutalement leur accord d'intéressement et à mettre en place la participation légale.
Le Gouvernement est favorable au fait de pouvoir progresser vers cette meilleure articulation des dispositifs, mais à la seule condition - que nous pouvons certainement partager, monsieur Dassault - que cela ne conduise en aucun cas à faire reculer la participation dans les PME.
Aussi, le Gouvernement serait favorable à votre amendement sous réserve que vous le rectifiez. En effet, pour éviter cette régression, l'intéressement ne devrait pouvoir tenir lieu de participation qu'à condition que la formule de calcul retenue dans l'accord puisse être validée comme une formule dérogatoire et que les sommes qui correspondraient à la formule légale soient bloquées.
Une PME qui aurait un intéressement égal au tiers du bénéfice après impôt - ce qui est une formule de calcul possible pour l'intéressement - pourrait, lorsqu'elle franchit le seuil des cinquante salariés, conserver cet accord au titre d'une formule dérogatoire de participation. Mais seule la partie excédentaire par rapport à la formule légale de la participation serait alors directement disponible pour les salariés.
Je reconnais que c'est un peu complexe.
M. Guy Fischer. Oh oui !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. C'est parce que le passage d'un seuil est toujours complexe dans notre droit social. Pour respecter à la fois ce seuil et prévoir le passage de l'un à l'autre, seule la partie excédentaire serait immédiatement disponible, le reste étant traité comme la participation.
Monsieur le rapporteur pour avis, le Gouvernement serait prêt à émettre un avis de sagesse favorable sur un amendement dont la rédaction serait la suivante : « À cette date, un accord de participation peut être conclu dans les conditions de l'article L. 442-6 sur une base de calcul et de répartition reprenant celle de l'accord d'intéressement ayant expiré. »
Ce libellé répondrait à votre préoccupation, tout en permettant le passage du seuil et en respectant les règles de la participation et de l'intéressement.
M. Guy Fischer. Nous assistons en direct à la rectification de l'amendement de M. Dassault par M. le ministre !
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur pour avis, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens demandé par le Gouvernement ?
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Si un accord de projet peut être considéré comme un accord d'intéressement sans être limité dans le temps, c'est une solution qui pourrait satisfaire les PME, dont la visibilité n'est pas très grande.
J'accepte donc de rectifier mon amendement dans le sens préconisé par le Gouvernement.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 442-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« À cette date, un accord de participation peut être conclu dans les conditions de l'article L. 442-6 sur une base de calcul et de répartition reprenant celle de l'accord d'intéressement ayant expiré. »
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Comme vous l'imaginez bien, la commission des affaires sociales n'a pas pu examiner cet amendement.
À titre personnel, j'émets un avis favorable. Mes collègues, je le pense, me feront confiance.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.
L'amendement n° 3, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 441-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas où un bénéficiaire visé au troisième alinéa de l'article L. 441-5 qui a adhéré à un plan d'épargne d'entreprise prévu au chapitre III du présent titre affecte à la réalisation de ce plan tout ou partie des sommes qui lui sont attribuées par l'entreprise au titre de l'intéressement, ces sommes sont exclues de l'assiette des bénéfices non commerciaux et de l'assiette des bénéfices industriels et commerciaux, dans la limite d'un plafond égal à la moitié du plafond annuel moyen retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Ce second amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 du projet de loi vise à permettre la déductibilité fiscale à l'impôt sur le revenu des sommes perçues par les travailleurs non salariés au titre de l'intéressement, pour éviter une double imposition.
Cet article additionnel est très important, car il étend la possibilité pour les travailleurs non salariés de prévoir un intéressement. Grâce à la déductibilité fiscale, ils auraient donc les mêmes avantages que les travailleurs salariés. Cela serait extrêmement utile pour un ensemble de professionnels comme les médecins, les pharmaciens, les notaires, etc.
Cette mesure prend en compte l'extension du champ d'application des accords d'intéressement aux travailleurs non salariés par la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie.
Il vous est donc proposé de combler une lacune afin d'introduire une égalité de traitement entre les salariés et les non-salariés.
En effet, les sommes perçues par les salariés au titre de l'intéressement sont fiscalement déductibles, mais rien n'est aujourd'hui prévu pour les non-salariés assujettis à l'impôt sur le revenu. Ce serait ainsi une mesure de justice.
Il vous est donc proposé que les travailleurs non salariés puissent également déduire de leur impôt sur le revenu les sommes perçues au titre de l'intéressement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à assurer une égalité de traitement sur le plan fiscal entre les chefs d'entreprise qui effectuent des versements sur un PEE selon qu'ils sont assujettis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés.
La commission émet un avis favorable, pour une question d'équité.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement comprend cette proposition.
Néanmoins, un certain nombre de mesures ont été prises en faveur des travailleurs indépendants - je pense notamment au texte que M. Thierry Breton a présenté l'année dernière.
Je comprends également que la commission soit favorable à cet amendement, la question étant « y a-t-il ou non rupture d'égalité ? »
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il y a !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En tout état de cause, cette mesure aura un certain coût et elle ne s'accompagnera pas totalement des avantages liés habituellement à l'intéressement, lequel est d'abord un outil pour les salariés. Il s'agit d'un point sur lequel la réflexion se poursuit.
Cependant, l'avis émis par la commission conduit le Gouvernement à s'en remettre à la sagesse du Sénat. Il nous restera à procéder ensemble à une petite évaluation, mais nous aurons le temps de nous retrouver.
En conséquence, le Gouvernement lève le gage.
M. Guy Fischer. Je croyais qu'il invoquerait l'article 40 !
M. Roland Muzeau. Scandaleux ! C'est le tabac qui paiera !
Mme la présidente. Il s'agit donc de l'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 441-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas où un bénéficiaire visé au troisième alinéa de l'article L. 441-5 qui a adhéré à un plan d'épargne d'entreprise prévu au chapitre III du présent titre affecte à la réalisation de ce plan tout ou partie des sommes qui lui sont attribuées par l'entreprise au titre de l'intéressement, ces sommes sont exclues de l'assiette des bénéfices non commerciaux et de l'assiette des bénéfices industriels et commerciaux, dans la limite d'un plafond égal à la moitié du plafond annuel moyen retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale ».
(M. Roland du Luart remplace Mme Michèle André au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement vise les exploitants individuels, les associés de sociétés, les conjoints collaborateurs et associés, et on trouve toujours de bonnes raisons pour justifier des dégrèvements de cotisations !
Or il s'agit là de prestations sociales et nous examinerons la semaine prochaine le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je souhaite poser une question puisqu'il s'agit d'une mesure de pure défiscalisation : a-t-on estimé les sommes en jeu ?
Comment pourrons-nous soutenir la semaine prochaine M. Vasselle, quand il dénoncera toutes les exonérations non compensées qui créent un trou colossal dans les comptes de la sécurité sociale, alors que nous adoptons des dégrèvements de cette nature à l'occasion de l'examen de textes qui ne sont pas relatifs à la sécurité sociale ?
Je souhaite donc connaître le montant de ces exonérations.
Je souhaite par ailleurs, monsieur le ministre, madame la ministre, vous inviter maintenant à être vigilants lorsqu'il s'agit d'amendements gagés par des taxes sur le tabac. En effet, le produit de ces taxes ne devrait-il pas plutôt financer des actions de santé publique ? En outre, cette recette ne va pas augmentant.
Il faudrait donc veiller à ne pas gager des dépenses ou des manques de recettes par des recettes qui ne se feront pas ou qui seront en diminution. Ou alors, le décret de M. le ministre de la santé doit être débattu au Parlement sous forme d'un texte de loi !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous comprenons bien les préoccupations exprimées. Si la commission a émis un avis favorable, c'est avec l'idée, comme l'a dit M. le ministre, qu'il était peut-être nécessaire d'approfondir la réflexion. La commission mixte paritaire nous permettra de sceller définitivement le sort que nous réserverons à cette proposition.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Exactement !
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Je partage les judicieuses remarques de M. Jean-Pierre Godefroy. Les propos de M. About ne nous rassurent pas. Nous sentons bien que M. le ministre veut, une nouvelle fois, faire plaisir à M. Dassault...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pas sûr !
M. Guy Fischer. Ah oui ?
M. Roland Muzeau. Il veut faire plaisir au capital !
M. Guy Fischer. ...au rapporteur pour avis, voulais-je dire. La réponse du Gouvernement n'est pas du tout satisfaisante. En effet, qu'il s'agisse des droits sur le tabac ou de la certitude que ces exonérations seront compensées pour le budget de la sécurité sociale, M. le ministre n'a rien dit. D'une part, nous ne disposons pas d'une évaluation des dépenses et, d'autre part, n'avons aucune certitude quant à la compensation intégrale. On ne sait véritablement pas combien cette mesure coûtera !
En tout état de cause, on prend une décision qui satisfera l'électorat de la majorité, une fois de plus. Le Sénat va accepter un amendement que seul M. Dassault comprend, car il s'agit d'une affaire de spécialistes !
Quoi qu'il en soit, de toute évidence, le Gouvernement ne nous apporte aucun élément de réponse au sujet de l'intérêt général et notamment en ce qui concerne le déficit de la sécurité sociale.
Nous voterons donc contre cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Lorsque nous cherchons à développer l'intéressement auprès des PME, nous ne regardons pas chaque fois quel est le manque à gagner pour la sécurité sociale, puisqu'elles bénéficient des accords.
Nous ne savons pas combien de notaires, de médecins, pourront bénéficier de ce dispositif, mais il s'agit tout de même d'une mesure d'équité entre les salariés et les non-salariés.
Si nous augmentons la participation et l'intéressement, comme nous le souhaitons, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, là encore nous ne savons pas combien cela coûtera. Le coût sera élevé, ou non. Mais nous prenons le risque puisque nous voulons développer cette notion d'intéressement pour l'ensemble des travailleurs salariés ou non salariés.
Je souhaiterais donc que tout le monde soit d'accord sur cette mesure.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.
Article 3
I. - Le cinquième alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La même obligation incombe aux groupements d'employeurs. »
II. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 441-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'intéressement aux résultats des salariés d'un groupement d'intérêt économique ou d'un groupement d'employeurs peut prendre en compte les résultats ou les performances des entreprises membres du groupement. »
III. - Le dernier alinéa de l'article L. 444-4 du même code est supprimé.
IV . - À la fin du premier alinéa de l'article L. 441-2 du même code, les mots : « ; un engagement de négocier, dans chacune des filiales qui ne sont pas couvertes par un tel accord, dans un délai maximum de quatre mois à compter de cette même date, doit être pris par l'entreprise » sont supprimés.
V . - Après le 4 de l'article L. 442-2 du même code, il est inséré un 5 ainsi rédigé :
« 5. Le calcul de la réserve spéciale de participation dans un groupement d'intérêt économique peut s'effectuer à partir de la moyenne des résultats comptables d'un ou plusieurs membres constituant ce groupement. »
M. le président. L'amendement n° 82, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le IV de cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Que l'amendement précédent soit soutenu par la commission des finances du Sénat me laisse rêveur !
Cet amendement n° 82 vise à revenir sur un amendement qui a été adopté à l'Assemblée nationale dans une certaine confusion.
Il ne semble pas, en effet, que l'obligation de négocier des accords d'intéressement et de participation dans les filiales de holdings ait jamais posé le moindre problème en France.
S'il s'agit de groupes internationaux, il convient de maintenir intacts les droits des salariés sur le sol français à l'intéressement.
Nous n'avons été convaincus ni par le début d'explication fourni par le ministre à l'Assemblée nationale ni par la suite de cette explication telle qu'elle apparaît dans le rapport de Mme Debré.
J'avoue que l'on voit mal en quoi le fait de signer des accords d'intéressement dans des filiales est de nature à dissuader une société mère de signer un accord global.
En revanche, et j'évoque dès à présent notre amendement n° 83, nous sommes d'accord avec Mme le rapporteur sur la suppression du paragraphe V de cet article 3.
Calculer la réserve de participation dans un groupement d'intérêt économique à partir de la moyenne des résultats comptables est incontestablement de nature à diminuer les sommes reçues par certains salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir la disposition aux termes de laquelle une entreprise qui se dote d'un accord d'intéressement doit dans les quatre mois s'engager à négocier un tel accord dans chacune de ses filiales.
La commission n'est pas favorable au rétablissement de cette obligation, qui, à l'usage, s'est révélée contre-productive.
Elle dissuade en effet les maisons mères des groupes de sociétés de se doter d'un accord de participation.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'objet de l'article L. 441-2 du code du travail est d'interdire qu'une entreprise puisse mettre en place un accord d'intéressement au niveau des seules holdings.
La condition selon laquelle deux tiers des salariés du groupe doivent être couverts par un accord d'intéressement paraît suffisante. Ajouter une obligation de négocier dans toutes les filiales non couvertes par un accord d'intéressement ne semble pas réaliste, car dans tout groupe d'une certaine importance il y a toujours des filiales en cours d'acquisition ou de cession. En fait, cette condition n'est qu'imparfaitement remplie.
De plus, il est difficile de contrôler en pratique cette obligation. Il faut peut-être rappeler que les holdings emploient des salariés de tous niveaux de rémunération et qu'il apparaît favorable également aux plus modestes d'y faciliter la mise en place de l'intéressement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 37 est présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 83 est présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le V de cet article.
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 37.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Le paragraphe V de l'article 3, inséré par l'Assemblée nationale, semble difficilement applicable en raison des règles comptables propres aux groupements d'intérêt économique. En effet, les GIE n'ont pas vocation à réaliser de bénéfice fiscal. Or la participation est assise sur le bénéfice fiscal. Aussi, nous demandons la suppression de ce paragraphe.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour défendre l'amendement n° 83.
M. Jean-Pierre Godefroy. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 37 et 83 ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ces deux amendements ont pour objet de revenir sur une disposition, introduite par amendement à l'Assemblée nationale, qui pourrait entraîner une certaine confusion juridique.
Nous approuvons cette suppression, car les groupements d'intérêt économique ont d'ores et déjà la possibilité de faire bénéficier leurs salariés d'un accord de participation, soit au travers d'un accord de participation de groupe, si les entreprises membres du GIE forment un groupe, soit au travers d'un accord pris en vertu de l'article L. 444-2 du code du travail, pour les entreprises qui constituent une union économique et sociale, à défaut de former un groupe, ou encore directement, si les salariés sont détachés des différentes entreprises membres.
La disposition adoptée par l'Assemblée nationale ne pourrait concerner qu'un GIE hypothétique et philanthrope.
Le Gouvernement est donc favorable à la proposition qui nous est faite à la fois par Mme le rapporteur et par le groupe socialiste.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 37 et 83.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
I. - Le 6 de l'article L. 441-3 du code du travail est abrogé.
II. - Après l'article L. 444-9 du même code, il est inséré un article L. 444-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 444-10. - L'accord de participation prévu au chapitre II du présent titre ou le règlement d'un plan d'épargne salariale prévu au chapitre III du même titre peuvent prévoir les conditions dans lesquelles le comité d'entreprise ou une commission spécialisée créée par lui ou, à défaut, les délégués du personnel disposent des moyens d'information nécessaires sur les conditions d'application de cet accord ou de ce règlement. »
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer le I de cet article.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s'agit d'un simple amendement de coordination avec une modification introduite par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 444-10 du code du travail, remplacer le mot :
peuvent
par le mot :
doivent
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Le Sénat ne sera pas surpris de notre position sur la consultation des représentants du personnel. Nous souhaitons en effet, afin de préserver l'intérêt des salariés, et dans un souci plus général de transparence, que l'accord de participation ou le règlement d'un plan d'épargne salariale prévoient de manière obligatoire les conditions d'information du comité d'entreprise ou d'une commission ad hoc en son sein ou, à défaut, des délégués du personnel.
Il est parfaitement possible d'envisager des clauses types afin de mettre en place les modalités de cette information.
Cette disposition nous semble de nature à éviter toute suspicion, dans la mesure où l'information ne serait pas explicitement prévue, et à prévenir des contentieux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Notre commission est, en général, opposée aux obligations. Là, entre autres choses, nous ne voulons pas multiplier les obligations pesant sur les entreprises...
M. Roland Muzeau. Les pauvres chéries !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. ... et souhaitons donc maintenir la disposition à caractère facultatif adoptée par l'Assemblée nationale.
Pour cette raison, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous, nous faisons confiance aux partenaires sociaux. En effet, quand ils négocieront les accords - et nous avons souligné l'importance de la possibilité d'un comité de suivi - ils décideront de la manière dont ils entendent suivre les accords. C'est la responsabilité des partenaires sociaux au moment de l'accord.
M. Roland Muzeau. Ils ont refusé le CNE !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En outre, l'information des salariés est assurée par d'autres dispositions de ce projet de loi, d'ailleurs renforcées par des propositions de votre commission, nous y reviendrons. Mais, là, les partenaires sociaux peuvent décider de la manière dont ils entendent suivre les accords.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
CHAPITRE II
Favoriser le développement de la participation
Article 5
I. - La section 2 du chapitre II du titre IV du livre IV du code du travail est complétée par un article L. 442-15-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 442-15-1. - Un régime de participation, établi selon les modalités prévues à l'article L. 442-2 ou à l'article L. 442-6, doit être négocié par branche, au plus tard trois ans après la publication de la loi n° du pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
« L'entreprise qui dispose d'un accord de participation conformément aux dispositions de l'article L. 442-2 peut opter pour la mise en application de l'accord de branche, par un avenant à l'accord initial.
« Si l'accord de branche prévoit, conformément aux dispositions de l'article L. 443-1-1, la mise en place d'un plan d'épargne interentreprises, l'entreprise est libre d'opter pour l'adhésion à celui-ci dans les conditions prévues à cet article.
« À défaut d'initiative de la partie patronale dans l'année suivant la promulgation de la loi n° du précitée, la négociation s'engage dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation représentative au sens de l'article L. 132-2 du présent code. »
II. - Après le sixième alinéa de l'article L. 444-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - de suivre la mise en oeuvre de la négociation de branche mentionnée à l'article L. 442-15-1. »
III . - L'article L. 442-15 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces entreprises peuvent aussi, à l'initiative de l'employeur, se soumettre volontairement aux dispositions de l'article L. 442-12. Dans ce cas, les sommes ainsi attribuées aux salariés sont versées à des comptes courants qui, sous réserve des cas prévus par décret en application de l'article L. 442-7, sont bloqués pour cinq ans. L'employeur peut établir un régime de participation comportant une base de calcul et des modalités différentes de celles définies à l'article L. 442-2 dans les conditions de l'article L. 442-6. »
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Les articles 5 et 6 que nous nous apprêtons à examiner ouvrent le chapitre intitulé « Favoriser le développement de la participation ».
Par rapport à ces articles, et à la suite des modifications apportées par l'Assemblée nationale, je souhaite faire, au nom de mon groupe, deux séries de remarques.
Tout d'abord, la participation telle qu'elle est organisée par l'actuelle majorité est non seulement inégalitaire mais aussi dangereuse. Il est clair qu'elle n'offre que peu de garanties aux travailleurs.
Ainsi, sous couvert d'extension du mécanisme aux entreprises de moins de cinquante salariés, ce que vous justifiez par des raisons d'égalité et de progrès social, vous donnez plus de pouvoir encore aux entreprises, au détriment des accords collectifs.
Vous souhaitez que des accords de branche sur le thème de la participation puissent être décidés puis appliqués aux entreprises qui le désirent. Mais pour les entreprises qui en bénéficient déjà, qu'est-ce qui va garantir aux salariés le maintien d'un régime peut-être plus favorable que celui qui est défini par l'accord de branche ?
Un autre problème, tout aussi central, se pose : le recours à la participation sera laissé à la discrétion des chefs d'entreprise. Mais au moment où les salariés réclament des augmentations de salaires, parce que le pouvoir d'achat baisse de façon éhontée, qu'est-ce qui garantit que ces accords de participation ne vont pas être utilisés par les chefs de petites entreprises pour calmer les réclamations des salariés, sans pour autant leur offrir de véritables augmentations de salaire ?
Ces questions m'amènent à ma seconde série de remarques.
Dans ce chapitre II sont énoncés des mécanismes qui ne seront probablement pas appliqués dans les faits.
Il serait étonnant que la bonne volonté des chefs d'entreprise aille aussi loin sans que ces dispositifs aient un caractère obligatoire. On est bien une fois encore au coeur de mesures d'affichage.
En revanche, s'agissant des mesures qui pourraient être immédiatement appliquées, la majorité devient vite frileuse et fait demi-tour, de peur de devoir effectivement verser une part des bénéfices aux salariés.
Et c'est bien de cela qu'il sera question dans l'article 6. En modifiant la formule de calcul de base pour la participation, les entreprises perdaient la possibilité de contourner leurs obligations en matière de versements, en se cachant derrière des déficits antérieurs. La prise en compte de déficits antérieurs avait été supprimée ; elle est revenue par amendement.
Voilà donc le type de dispositions que nous examinons. Ce sont des dispositions qui visent à fragiliser le lien en augmentant les mesures à la discrétion des chefs d'entreprise, ou encore des dispositions d'affichage, en vous gardant bien d'imposer aux entreprises la moindre obligation de partage réel des bénéfices. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 199, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement, qui s'inscrit dans la logique des positions que nous avons adoptées sur ce projet de loi, vise à supprimer l'article 5.
Cet article, au départ, s'annonçait peu réaliste, et contournait bien évidemment le débat de fond sur le niveau salarial dans les petites entreprises. Mais à l'issue du débat à l'Assemblée nationale, il s'avère en outre dangereux.
La majorité s'est quelque peu déchirée sur cette question de la participation dans les petites entreprises, au prétexte que les mécanismes proposés par les uns ne seraient pas assez incitatifs, et que les mécanismes prônés par les autres iraient beaucoup trop loin.
Pour ma part, j'estime qu'une étape supplémentaire est franchie dans la mise en pièces des structures collectives de négociation en matière salariale.
Par amendement, la majorité a finalement opté pour un système de « participation octroyée » dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Ainsi, « les entreprises peuvent aussi, à l'initiative de l'employeur, » mettre en place volontairement un plan de participation.
Il ne s'agit plus, alors, de mettre en place un accord issu de la négociation collective.
Plutôt que de répondre aux difficultés de représentativité du personnel dans les petites entreprises par la généralisation des procédures de mandatement, par exemple, vous utilisez cette difficulté pour contourner, une fois encore, les organisations collectives représentatives.
La participation est, pour cette majorité, un moyen bien pratique d'accroître encore les dérogations aux accords collectifs, pourtant déjà suffisamment nombreuses.
Au final, sous couvert d'extension de la participation et d'amélioration du pouvoir d'achat des salariés des petites entreprises, vous généralisez la financiarisation obligatoire de l'économie par les salariés des petites entreprises.
À l'évidence, il s'agit d'étendre encore la participation obligatoire de tous les travailleurs à l'économie ultra-libérale, que cette majorité chérit, en contraignant tous les salariés à l'épargne.
Nous sommes définitivement opposés à une telle dérive.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de cet article 5.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deux premiers alinéas de cet article :
I. - Après l'article L. 442-17 du code du travail, il est inséré un article L. 442-18 ainsi rédigé :
« Art. L. 442-18. - Un régime de participation, établi selon les modalités prévues à l'article L. 442-2 ou à l'article L. 442-6, doit être négocié par branche, au plus tard trois ans après la publication de la loi n° du pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à faire figurer cet article 5 dans la section du code du travail - une fois de plus, vous pouvez constater, monsieur le ministre, que nous travaillons de façon très sérieuse au Sénat - qui regroupe les dispositions relatives à la participation applicables tant aux entreprises de moins de cinquante salariés qu'aux entreprises de plus de cinquante salariés.
Il n'y a pas de raison, en effet, d'empêcher les entreprises de plus de cinquante salariés, qui doivent obligatoirement se doter d'un accord de participation, d'adopter l'accord négocié au niveau des branches.
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 442-15-1 du code du travail :
« Les entreprises de la branche peuvent opter pour l'application de l'accord ainsi négocié, selon les modalités prévues à l'article L. 442-10.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que la mise en place, dans les entreprises, d'un accord de participation négocié au niveau de la branche demeure facultative, monsieur le ministre.
Les entreprises doivent rester libres de négocier un accord différent, si elles le souhaitent. La participation doit demeurer facultative dans les entreprises de moins de cinquante salariés.
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 442-15-1 du code du travail par les mots :
, dès lors que l'accord de branche prévoit des conditions plus favorables au bénéfice des salariés.
La parole est à Mme Michèle San Vicente-Baudrin.
Mme Michèle San Vicente-Baudrin. Cet article 5 serait-il le reflet des hésitations du Gouvernement face aux intérêts divergents des représentants du patronat qui ne veulent pas d'une participation obligatoire dans les entreprises de moins de cinquante salariés ?
Il semblait pourtant que les salariés des PME et de l'artisanat pouvaient, eux aussi, participer au financement de leur retraite par l'épargne salariale.
Or, monsieur le ministre, vous optez pour un système plus simple et plus opératoire, avec des accords de branche aux clauses types, en y ajoutant une facilité pour l'adhésion à un plan interentreprises, si l'accord le prévoit.
Enfin, vous proposez que, à défaut d'initiative de la partie patronale dans l'année suivant la promulgation de la loi, la négociation puisse même s'engager sur l'initiative d'une organisation syndicale.
Donc, vous voulez introduire la participation dans les petites entreprises, mais vous en êtes empêché. Notre rapporteur souhaite d'ailleurs rappeler que l'accord de branche est facultatif. Vous nous présentez donc ce dispositif de forte incitation, mais sans aucune obligation ni sanction. C'est un premier cafouillage.
Par ailleurs, nous y reviendrons, le paragraphe III de cet article 5, adopté à l'Assemblée nationale et résultant d'un amendement de MM. Ollier et Dubernard, redonne tout pouvoir au chef d'entreprise en cas d'absence d'accord, non seulement sur l'existence ou non d'un dispositif de participation, mais également sur les modalités de celui-ci et sur l'affectation des sommes prélevées aux salariés.
Je dis bien « les sommes prélevées », puisque les salariés n'ont plus leur mot à dire. Nous sommes là dans le cadre de la participation discrétionnaire, avec affectation possible sur un compte courant, dont nous connaissons tous l'absence de garantie en cas de faillite.
Quand on mesure l'écart qui sépare les salariés des grandes entreprises de ceux des petites en termes de salaires et de garanties, on mesure aussi à quel point un tel dispositif peut se révéler préjudiciable et combien une négociation salariale préalable aurait été nécessaire.
Cet amendement vise à faire en sorte que l'entreprise ne puisse opter pour l'accord de branche que dans l'hypothèse où celui-ci prévoit des dispositions plus favorables aux salariés.
En effet, monsieur le ministre, alors que vous semblez prôner fortement la négociation dans cet article 5, celui-ci ne tend aucunement à mettre en place un accord au sein des entreprises. Tant mieux si un tel accord existe ! Cependant, même dans ce cas, l'entreprise pourra opter pour l'accord de branche sans qu'aucune garantie pour les salariés de voir préserver un système qui leur convient peut-être mieux ne soit prévue.
En un mot, vous voulez la négociation, mais sans les négociateurs.
C'est évidemment une option à laquelle nous ne pouvons pas souscrire.
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le III de cet article.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Contrairement à M. le rapporteur, qui souhaite accorder à l'employeur un pouvoir unilatéral pour instituer un régime de participation à sa convenance ou un blocage des sommes sur un compte courant, nous estimons que le III de l'article 5 doit être retiré du projet de loi.
En effet, aux termes de ce paragraphe, la participation apparaît comme un dispositif étranger, voire hostile, aux salariés, puisqu'elle serait mise en place dans l'hypothèse où une absence d'accord serait constatée par l'inspecteur du travail, conformément aux dispositions de l'article L. 442-12 du code du travail.
Nous nous interrogeons : comment une négociation destinée à aboutir à un accord de participation peut-elle échouer, que ce soit au niveau de la branche, de l'entreprise ou du site, avec cette disposition d'accrochage au plan d'épargne interentreprises, le PEI, que vous avez opportunément ajoutée, monsieur le ministre ?
Le III de l'article 5 est en contradiction avec les alinéas précédents. Il illustre la volonté des représentants du patronat, qui ont tout fait pour qu'un accord ne puisse se réaliser dans le délai d'un an, de décider eux-mêmes de mettre en place une participation à leur convenance s'ils ne peuvent pas l'éviter.
Du fait de la seule volonté de l'employeur, les sommes seront bloquées pendant cinq ans et placées sur un compte courant. Il n'y aura ainsi aucune garantie en cas de difficultés de l'entreprise.
Nous demandons donc le retrait de ce paragraphe.
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le III de cet article :
III. - Après le premier alinéa de l'article L. 442-15 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d'échec des négociations, l'employeur peut mettre en application unilatéralement un régime de participation conforme aux dispositions de la section I ; le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel sont consultés sur le projet d'assujettissement unilatéral à la participation au moins quinze jours avant son dépôt auprès du directeur du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a pour objet de remplacer la référence de l'article 5 au régime d'autorité applicable lorsque le chef d'entreprise ne respecte pas ses obligations en matière de participation par la reconnaissance de son droit à mettre en place unilatéralement la participation lorsque les négociations ont échoué.
Cela permet de répondre à la question qui vient d'être soulevée. Nous sommes pour les négociations, mais c'est dans l'hypothèse où celles-ci se révéleraient infructueuses qu'un tel dispositif pourrait s'appliquer.
Par conséquent, nous voudrions intégrer cette mesure dans le projet de loi. J'espère que cela pourra vous satisfaire un minimum, ma chère collègue.
M. le président. L'amendement n° 124 rectifié, présenté par MM. Houel et Hyest, Mmes Mélot et Gousseau, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
Un décret en Conseil d'État fixe la composition du Conseil supérieur de la participation pour tenir compte des accords susceptibles de s'appliquer aux petites et moyennes entreprises, et notamment aux entreprises artisanales.
La parole est à Mme Adeline Gousseau.
Mme Adeline Gousseau. Cet amendement vise à permettre à l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat de disposer de données quantitatives et qualitatives sur l'application volontaire des accords de participation dans les entreprises artisanales et de connaître les difficultés de mise en oeuvre de ceux-ci.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 199, 85, 86 et 124 rectifié ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'amendement n° 199 vise à supprimer l'article 5. Or la commission souhaite naturellement le maintien de celui-ci, qui est très utile pour favoriser la participation dans les PME en permettant la négociation d'accords « clés en main » par les branches, et ce, ainsi que je l'évoquais, de manière non pas obligatoire, mais volontaire.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 85 est incompatible avec l'amendement n° 40 de la commission. L'avis de la commission sera donc défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 86, la commission n'est pas favorable à la suppression du III de l'article 5, qui a été introduit par l'Assemblée nationale. Toutefois, nous avons déposé un amendement visant à rectifier ce dispositif qui devrait, me semble-t-il, répondre à certaines de vos préoccupations, ma chère collègue.
Quant à l'amendement n° 124 rectifié, dans la mesure où la composition du Conseil supérieur de la participation peut être modifiée par décret, il n'est pas nécessaire de prévoir un décret en Conseil d'État, comme cet amendement tend à l'instituer. Par conséquent, ma chère collègue, je vous prie de bien vouloir le retirer, faute de quoi la commission émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'article 5 a pour objet est de développer la participation dans les petites et moyennes entreprises.
La rédaction de cet article s'inspire du dispositif institué par la loi du 19 février 2001 sur l'épargne salariale pour l'extension des PEI, qui était lui-même issu des propositions du rapport Balligand-de Foucauld.
L'article 5 confère au Conseil supérieur de la participation une nouvelle mission, qui est de suivre de manière particulière pendant un délai de trois ans pour savoir si l'on passe du régime de la mise en place d'accords de branche à un régime à caractère obligatoire.
La question avait fait l'objet d'un débat et nous l'avons tranché en optant pour cette période de trois ans dans un dispositif d'extension par la mise à disposition des accords de branche.
À cet égard, permettez-moi de vous faire part des résultats de la mise en oeuvre de deux types des mesures instituées par la loi du 19 février 2001 sur l'épargne salariale et la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites dans les petites entreprises. En l'occurrence, je fais référence aux plans d'épargne interentreprises et aux plans d'épargne pour la retraite collectifs interentreprises. En effet, le bilan de ces dispositifs nous permettra d'évaluer si les mesures que nous adoptons peuvent être efficaces.
Or que constatons-nous ? Que le service de l'automobile, les professions libérales, le bâtiment et les travaux publics, les commerces de fruits et légumes, les épiceries, les marchands de produits laitiers, les commerces de détail et de gros à prédominance alimentaire, la charcuterie, l'industrie pharmaceutique, mais également la poissonnerie et le secteur de la coiffure en Île-de-France se sont déjà dotés de dispositifs d'épargne interentreprises !
Or les toutes petites entreprises de tels secteurs n'ont rien de comparable aux grandes entreprises qui mettent d'ordinaire en place des dispositifs spécifiques de participation ou de plans d'épargne entreprise. Pourtant, les exemples que je viens de mentionner montrent que ces petites entreprises ont su se saisir des possibilités offertes par la loi du 19 février 2001 sur l'épargne salariale et par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites.
De notre point de vue, il en sera de même pour les mesures que nous instituons dans le présent projet de loi. Bien entendu, s'il ne se passait rien pendant la période des trois ans, il appartiendrait alors au Conseil supérieur de la participation d'émettre un certain nombre de recommandations.
Je tenais à apporter ces précisions, car il s'agit véritablement de l'esprit du projet de loi.
Ces remarques étant faites, je peux désormais vous présenter l'avis du Gouvernement sur les différents amendements que nous sommes en train d'examiner.
Comme chacun le comprendra, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 199.
Mme Annie David. C'est bien dommage !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 39. En effet, il est logique de faire figurer les mesures que cet article tend à instituer au sein des dispositions applicables à la participation en général.
De même, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 40, qui est un amendement de clarification juridique.
L'amendement n° 85 vise à rappeler le principe de faveur. Logiquement, compte tenu de ce que j'ai dit précédemment, le Gouvernement devrait émettre un avis défavorable sur cet amendement. Toutefois, ce principe nous semble important, et nous sommes favorables à ce qu'il soit rappelé.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 86.
En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 41, et vous me permettrez d'insister sur ce point.
Cet amendement vise à améliorer la disposition qui permet une mise en place simplifiée. En effet, il tend à préciser que la mise en place unilatérale d'un régime de participation n'a lieu qu'en cas d'échec de la négociation. De ce point de vue, cette mesure est calée sur le dispositif applicable aux plans d'épargne entreprise, les PEE. Or, si l'on observe le développement de ces plans dans les entreprises, on constate que ce dispositif donne satisfaction et permet la mise en place de cette participation, non seulement sur les comptes courants bloqués, mais également sur les PEE. Ce n'est pas rien.
Enfin, madame Gousseau, je souhaiterais que vous puisiez retirer votre amendement.
En effet, la composition du Conseil supérieur de la participation doit comportée non pas d'organisations telles que la chambre de métiers, ainsi que vous le suggérez, mais plutôt d'autres organismes. Je pense notamment aux organisations professionnelles et syndicales les plus représentatives, au sens de la législation en vigueur. D'ailleurs, ce sujet fait aujourd'hui l'objet d'un débat au Conseil économique et social. C'est, me semble-t-il, plutôt pour de tels acteurs qu'il faut opter, en y adjoignant des personnes qualifiées, notamment des gestionnaires de fonds et des parlementaires.
Bien entendu, nous souhaitons que les préoccupations que votre amendement exprime soient prises en compte. Mais, croyez-le bien, elles le sont déjà par les organisations professionnelles, notamment celles qui représentent les petites et moyennes entreprises.
M. le président. Madame Gousseau, l'amendement n° 124 rectifié est-il maintenu ?
Mme Adeline Gousseau. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 124 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 199.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 85 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 86.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'amendement n° 41.
M. Jean-Pierre Godefroy. À nos yeux, cet amendement est plein d'ambiguïtés.
En effet, il comporte deux points positifs. D'abord, il n'est plus question de comptes courants bloqués et vous supprimez la mention relative à une base de calcul et des modalités spécifiques. Ensuite, il est également rappelé que le projet de l'employeur doit être déposé auprès de l'administration du travail.
Mais que se passe-t-il si les représentants du personnel, qui sont seulement consultés, expriment un désaccord ?
Précisément, il s'agit non pas d'un accord, mais bien d'une décision unilatérale de l'employeur.
Cela est exactement contraire à l'esprit fondateur de la participation, qui ne peut se limiter aux seuls aspects financiers.
Madame le rapporteur, vous accomplissez certes un bel effort,...
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Ah ! Merci !
M. Jean-Pierre Godefroy. ...mais, quoi que l'on fasse, on ne peut pas redresser ce qui est mal conçu au départ.
Aussi, nous ne pourrons voter en faveur de cet amendement, et nous le regrettons.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je le regrette également, mon cher collègue !
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
L'article L. 442-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° La première phrase du 1 est ainsi modifiée :
a) Les mots : « au taux de droit commun de » sont remplacés par le mot : « à » ;
a bis) Après les mots : « et au b », le signe : « , » est supprimé ;
a ter) Sont ajoutés les mots : « et majoré des bénéfices exonérés en application des dispositions des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 undecies, 208 C et 217 bis du code général des impôts » ;
b) Sont ajoutés les mots : « sans que, pour les entreprises qui n'ont pas conclu d'accord dérogatoire de participation, ce bénéfice puisse être diminué des déficits constatés au cours des exercices antérieurs de plus de trois ans à l'exercice en cours » ;
2° La dernière phrase du dernier alinéa est supprimée.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 42, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le b) du 1° de cet article :
b) Sont ajoutés les mots : « sans que, pour les entreprises qui n'ont pas conclu d'accord de participation conformément à l'article L. 442-6, ce bénéfice puisse être diminué des déficits constatés au cours des exercices antérieurs de plus de cinq ans à l'exercice en cours » ;
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Outre une correction rédactionnelle, cet amendement prévoit de porter la durée de report des déficits autorisés de trois ans à cinq ans, comme c'était le cas avant 2004.
Cette période de cinq ans semble plus réaliste qu'une période de trois ans pour permettre à des entreprises ayant connu une situation déficitaire de reconstituer leurs fonds propres avant d'être tenues de verser à nouveau de la participation.
D'ailleurs, les déficits n'ont actuellement pas de date limite. Je propose donc que l'on revienne à cinq ans.
Une telle mesure représente également un enjeu important en termes d'attractivité pour notre pays.
En 2004, le Parlement avait adopté une règle de report illimité des déficits, au nom de l'amélioration de la compétitivité de notre territoire. Je ne vois pas pourquoi nous nous restreindrions à trois ans aujourd'hui.
Madame le ministre, monsieur le ministre, je tiens beaucoup à cet amendement !
M. Roland Muzeau. Oh, l'appel du pied !
M. le président. L'amendement n° 137, présenté par M. J.L. Dupont et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Dans le b) du 1° de cet article, après le mot :
déficits
insérer le mot :
ordinaires
La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.
M. Jean-Léonce Dupont. L'objet de cet amendement est de permettre aux entreprises n'ayant pas conclu d'accord dérogatoire de participation de pouvoir déduire indéfiniment leur déficit d'investissement de leur bénéfice fiscal.
En effet, il est important de bien distinguer déficit de fonctionnement courant et déficit d'investissement. La réforme du calcul de la réserve spéciale de participation ne doit pas brider l'investissement parce que, sans investissement, il n'y a pas de croissance économique. C'est pourquoi les déficits d'investissement doivent toujours pouvoir être déduits du bénéfice fiscal.
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
À la fin du b) du 1° de cet article, supprimer les mots :
de plus de trois ans à l'exercice en cours
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Nous voici à nouveau en opposition avec notre rapporteur, qui propose d'aller au-delà des dispositions du texte qui nous est soumis, en autorisant le report des cinq déficits annuels antérieurs. Nous proposons, quant à nous, la suppression de cette possibilité comptable qui permet de priver les salariés de participation.
Sur ce sujet, la majorité est traversée de courants contraires. La participation compte d'ardents défenseurs en son sein, qui tiennent à ce que les salariés négocient la participation et qu'ils en perçoivent, aux deux sens du mot, les bénéfices. Cette conception de l'entreprise et des rapports sociaux est fort respectable et se situe dans la droite ligne des principes d'origine de la participation.
D'autres, que je me permettrai de qualifier de plus réservés, voient davantage dans la participation un moyen de compléter les exonérations fiscales et sociales dont ils bénéficient déjà et de faire passer une part de la rémunération des salariés en régime variable.
Cet article est une illustration parfaite de cette dernière conception. Il est en effet possible, grâce à ce système comptable, de faire passer à la trappe la participation sur laquelle comptent les salariés, alors même que l'entreprise a retrouvé une situation positive.
Comment les choses se passent-elles, concrètement ? Le scénario est malheureusement connu : on explique aux salariés que l'entreprise connaît des difficultés et que, s'ils ne veulent pas se retrouver au chômage, ils vont devoir renoncer à l'éventuelle réduction du temps de travail, à toute augmentation de salaire et, au contraire, faire des heures supplémentaires - qui, d'ailleurs, ne seront peut-être pas payées !
Au bout du tunnel, la situation sera redressée. Bien sûr, le salaire aura perdu en valeur absolue, mais la participation permettra de compenser cette baisse, sans charges fiscales ni sociales pour l'entreprise, tout en maintenant peut-être l'emploi.
Or, là est le noeud de l'affaire : il est souvent plus intéressant de reporter les déficits antérieurs dans les comptes, plutôt que de verser aux salariés une participation aux bénéfices. Tant que le seuil de 5 % n'est pas atteint, l'opération reste avantageuse. Et l'entreprise peut présenter des comptes qui restent déficitaires, alors qu'ils ne le sont plus en réalité depuis plusieurs années.
Notre rapporteur indique que la suppression de la faculté de report est préjudiciable à l'attractivité de notre territoire, puisque des pays étrangers autorisent le report illimité, ce qui m'amène à poser deux questions.
Ne serait-il pas préférable, alors que l'on constate les manipulations que permet ce système, de tout faire pour mettre un terme à cette forme de dumping social, plutôt que de s'y plier avec autant de docilité ? Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ?
Dans quelle mesure la participation peut-elle rester attractive dans de telles conditions ? Si l'on raisonne plus globalement, comment les salariés, dont vous voulez qu'ils capitalisent pour leur retraite, vont-ils pouvoir le faire si tous les artifices comptables sont utilisés pour réduire l'épargne salariale ? J'espère une réponse du Gouvernement et je souhaite qu'il ne suive pas les propositions du rapporteur de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 137 et 87 ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'amendement n° 137, présenté par nos amis centristes, vise à réserver un traitement particulier au déficit d'investissement afin qu'il puisse être reporté sans limitation de durée. La commission n'est pas sûre cependant que la rédaction retenue permette d'atteindre précisément cet objectif. Elle souhaiterait donc connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.
Quant à l'amendement n° 87, présenté par M. Godefroy, il va à l'encontre de l'objectif poursuivi par la commission. Elle ne peut donc qu'émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Avec l'amendement n° 42, madame le rapporteur, vous proposez d'autoriser les sociétés qui n'ont pas conclu d'accord dérogatoire de participation à reporter des déficits pour le calcul de la réserve spéciale de participation dans la limite des cinq exercices antérieurs au lieu de trois exercices, comme le prévoit la rédaction actuelle de l'article 6, issue des travaux de l'Assemblée nationale.
Votre proposition conduirait d'une certaine manière au rétablissement de la situation antérieure au 1er janvier 2004 puisque vous vous référez aux cinq exercices antérieurs et non plus à une durée illimitée - ce qui aurait pu éventuellement être le cas, compte tenu de la modification de la règle fiscale de l'imputation des reports déficitaires - ni aux trois exercices antérieurs, durée retenue après un compromis négocié lors des débats à l'Assemblée nationale.
L'objectif que vous poursuivez n'est pas sensiblement différent de la volonté du Gouvernement sur ce sujet, même si nous divergeons sur la durée du report. En effet, au cours de la discussion à l'Assemblée nationale, le Gouvernement avait présenté un amendement de compromis permettant de tenir compte des déficits constatés au titre des exercices antérieurs selon deux modes distincts de calcul.
Le premier s'applique aux entreprises qui n'ont pas conclu d'accord dérogatoire et pour lesquelles le déficit des trois exercices antérieurs à l'exercice en cours est retenu pour le calcul du montant de la réserve spéciale de participation.
Le deuxième mode de calcul concerne les entreprises qui ont conclu un accord dérogatoire et pour lesquelles tous les déficits peuvent être pris en compte, sans limitation de durée.
Cette solution, à laquelle nous étions parvenus au terme d'assez longs débats, nous semblait atteindre un équilibre satisfaisant, susceptible d'encourager les entreprises à conclure des accords dérogatoires - ce qui leur ouvre la faculté de reporter sans limitation leurs déficits -, tout en permettant néanmoins aux autres entreprises de faire face aux aléas de la vie économique dans une certaine limite. Dans ces conditions, et compte tenu du laborieux compromis qui avait été élaboré à l'Assemblée nationale, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 137, présenté par M. Jean-Léonce Dupont, tend à introduire une mesure relativement similaire, encore qu'elle s'applique au seul déficit d'investissement, qui supprime la limitation dans le temps du report déficitaire en faveur des entreprises qui n'ont pas conclu d'accord dérogatoire.
Pour les mêmes raisons, cet amendement nous paraît de nature à remettre en cause le compromis obtenu péniblement lors de la discussion de cet article devant l'Assemblée nationale, qui permet de prendre en compte la situation financière des entreprises mais également de garantir le droit des salariés.
En outre, une telle disposition serait très difficile à mettre en oeuvre puisqu'elle obligerait les entreprises, pour le seul calcul de la réserve spéciale de participation, à distinguer leurs déficits suivant qu'ils trouveraient leur origine dans l'investissement ou non, ce qui semble contraire à l'objectif de simplification poursuivi par cette réforme. Sous le bénéfice de ces observations, le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
L'amendement n° 87 vise à supprimer purement et simplement la faculté du report déficitaire sans même tenir compte d'une quelconque durée. Je vous rappelle, comme je l'ai déjà indiqué, que la rédaction actuelle de cet article résulte d'un compromis longuement négocié à l'Assemblée nationale, qui représente à nos yeux une transaction raisonnable.
Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis fermement défavorable sur cet amendement.
M. le président. Madame le rapporteur, l'amendement n° 42 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Oui, je le maintiens, monsieur le président. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 137 et 87 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 4, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Avant le 2° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le cinquième alinéa (4.) est complété par les mots : « , ou au tiers du bénéfice après impôt » ;
La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Cet amendement est particulièrement important car il introduit une nouvelle formule de calcul de la réserve spéciale de participation, pour que les salariés puissent bénéficier d'un supplément de participation que ne leur donne pas la formule actuelle. Les entreprises auraient le choix entre la formule actuelle et la formule nouvelle que vous propose la commission des finances.
Les modalités légales actuelles qui déterminent cette réserve spéciale de participation sont fixées depuis 1967 et n'ont pas été modifiées depuis. Elles sont complexes, peu lisibles et ne réservent, au mieux, qu'environ 10 % du bénéfice au personnel, ce qui est notoirement insuffisant et pas du tout motivant.
Pour que les salariés soient plus motivés par les règles de participation, la commission vous propose une nouvelle formule légale de calcul selon laquelle le bénéfice après impôt serait réparti en trois tiers : un tiers pour les actionnaires, un tiers pour les investissements et un tiers pour les salariés au titre de la participation. Ceux-ci se verraient donc attribuer 33 % du bénéfice au lieu de 10 % actuellement, ce qui représenterait une avancée.
Mme Annie David. Ce n'est pas équitable !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Dans la continuité des principes de la participation énoncés par le général de Gaulle, il s'agit de réconcilier le capital et le travail selon une formule que j'apprécie particulièrement : permettre que les sommes versées aux salariés au titre de la participation soient au moins équivalentes aux dividendes perçus par les actionnaires, le capital et le travail se retrouvant ainsi à égalité. Je pense que cette formule dérogatoire serait particulièrement motivante et je vous signale que je l'applique moi-même dans un certain nombre de mes entreprises que vous connaissez bien !
M. Roland Muzeau. Il vaut mieux travailler chez Dassault qu'à Carrefour !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Mon cher collègue, votre amendement tend à instituer une formule légale de calcul de la participation, en solution de rechange à la formule actuelle, prévoyant d'affecter un tiers du bénéfice de l'entreprise à la participation.
Cette proposition ne nous paraît pas opportune dans la mesure où les accords dérogatoires de participation permettent déjà d'aller au-delà de la formule légale. Je vous demanderai donc le retrait de votre amendement ; à défaut je serai obligée d'émettre un avis défavorable.
M. Roland Muzeau. Vous n'avez pas compris ce que voulait dire M. Dassault, madame Debré !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Il faut parfois se laisser aller !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Dassault, le Gouvernement est sensible aux préoccupations que vous exprimez, qui sont doubles...
M. Roland Muzeau. Ça démarre mal !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Vous souhaitez rappeler que la formule légale n'est pas l'unique formule de participation. Nous avons évoqué ce point lors de la discussion générale.
D'autres formules, qualifiées de dérogatoires, peuvent être mises en place à condition d'être plus favorables - monsieur Godefroy, nous évoquions le principe de faveur sur lequel j'ai émis un avis favorable tout à l'heure. Ces formules dérogatoires peuvent être mieux adaptées à un certain nombre de secteurs d'activité de l'entreprise où à une politique de rémunération voulue.
Vous souhaitez aussi mettre en valeur la bonne pratique de celles et ceux qui répartissent leurs bénéfices en trois tiers. Tout à l'heure, les quatre quarts ont même été évoqués, et pas seulement pour raisons culinaires. (Sourires.)
Monsieur le rapporteur pour avis, le Gouvernement ne peut accepter une application en l'état de la règle des trois tiers. Aussi, je vous suggère d'introduire cette règle des trois tiers dans l'article consacré aux formules dérogatoires. Cette modification permettrait également de répondre aux préoccupations exprimées par Mme le rapporteur.
Si vous acceptiez de rectifier ainsi cet amendement, le Gouvernement émettrait un avis de sagesse favorable.
M. Roland Muzeau. Non, monsieur Dassault, ne le rectifiez pas ! Il nous plaît tel quel ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Nous allons le voter en l'état !
M. François Marc. Il ne faut pas le modifier !
M. le président. Monsieur Dassault, que pensez-vous de la suggestion de M. le ministre ?
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Il est vrai que les entreprises peuvent aujourd'hui mettre en place un intéressement dérogatoire. C'est d'ailleurs le cas chez Dassault Aviation.
Mon intention était que la règle des trois tiers apparaisse clairement dans le code du travail, afin d'inciter les entreprises à choisir cette formule. Bien sûr, elles sont tout à fait libres d'en choisir une autre, mais il importe qu'elle sache que cette possibilité existe et qu'il s'agit d'une formule particulièrement favorable aux salariés, tout en étant très simple en termes d'application, de calcul et de conception.
J'accepte de rectifier mon amendement dans le sens souhaité par le Gouvernement, en l'inscrivant comme une formule dérogatoire de participation, en vertu de laquelle la participation est égale au tiers des bénéfices après impôt, dans l'article L. 442-6 du code du travail relatif aux accords dérogatoires de participation.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
1°) Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
B. La première phrase du premier alinéa de l'article L. 442-6 est complétée par les mots : « , tel que le tiers du bénéfice net fiscal ».
2°) En conséquence, remplacer le premier alinéa de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
Le chapitre II du livre IV du titre IV du code du travail est ainsi modifié :
A. L'article L. 442-2 est ainsi modifié :
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Même s'il n'est pas de coutume d'illustrer dans la loi ce qu'il est possible de faire par voie d'accord, la commission des affaires sociales émet un avis de sagesse positive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ainsi rectifié, cet amendement répond à l'attente du Gouvernement : avis favorable.
M. le président. Pourtant, il me semble curieux que cet amendement ne mentionne pas les régimes dérogatoires...
La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je félicite pour leur efficacité les services du Sénat, qui nous fournissent au fur et à mesure du débat les documents tenant compte des modifications résultant de nos travaux.
Pour ma part, je regrette la retraite « en rase campagne » de M. Dassault, car la gauche était prête à voter son amendement. Il y avait enfin de l'audace dans ce projet de loi, et les quelques miettes à distribuer aux salariés devenaient un peu plus substantielles.
Mais, finalement, la droite réactionnaire, dirigée par M. Larcher, a réussi à faire plier M. Dassault et à vider l'amendement de sa substance. Aussi, nous voterons contre cet amendement squelettique.
M. le président. L'amendement n° 122 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Gousseau, MM. Cambon, Cornu et Pointereau, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
...° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les entreprises constituant une unité économique et sociale, telles que visées au dernier alinéa de l'article L. 442-1, constituées en tout ou partie d'entreprises employant moins de cinquante salariés, la réserve spéciale de participation est constituée, pour l'ensemble de ces entreprises, par dérogation au 1 du présent article, par le résultat établi suivant les règles de consolidation ou de combinaison des comptes telles que définies à l'article L. 233-16 du code du commerce. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement concerne les entreprises constituées en UES, unité économique et sociale, et plus particulièrement celles qui comptent moins de cinquante salariés.
Il tend à préciser la loi de 2001, afin que les sociétés de moins de cinquante salariés qui font partie d'une UES soient reconnues comme une entreprise, ce qui n'est pas le cas actuellement, et puissent constituer un sous-groupe consolidé, les UES étant traitées comme des groupes.
Nous souhaitons mettre sur un pied d'égalité les salariés : quelle que soit la taille de l'entreprise, elle serait obligée de mettre en place un système de participation. La réserve spéciale de participation serait calculée sur les résultats consolidés de l'UES.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement tend à modifier les règles de calcul de la participation dans les entreprises qui font partie d'une même unité économique et sociale.
La commission comprend les remarques formulées par Mme Procaccia, mais elle craint que la mesure proposée n'aboutisse in fine à diminuer le montant de la participation. De plus, elle s'interroge sur la complexité induite, d'un point de vue comptable, par une telle mesure.
Aussi, je souhaite connaître l'avis du Gouvernement avant de me prononcer définitivement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Avec ce projet de loi, nous cherchons à supprimer un certain nombre d'inégalités qui existent entre les grandes et les petites entreprises.
Actuellement, 8 millions de personnes travaillant dans des entreprises de plus de cinquante salariés bénéficient de dispositifs de participation. En revanche, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, trop peu de personnes peuvent en profiter. Nous avons d'ailleurs abordé à l'article 5 la question des voies et des moyens permettant de développer la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés.
S'agissant des entreprises constituées en unité économique et sociale, notre objectif est de parvenir à établir un niveau égal de participation, quelle que soit la taille de l'entreprise.
Afin de répondre à votre attente, madame Procaccia, et d'éviter tout risque de déséquilibre, le Gouvernement a proposé un amendement n° 240, qui assujettit toutes les entreprises à la participation.
Le principe d'égalité est affirmé. Votre préoccupation est prise en compte. Aussi, je vous demande, madame le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement au profit de l'amendement n° 240. En effet, celui-ci satisfait votre demande et écarte tout risque juridique d'interprétation qui conduirait au versement d'une participation de niveau moindre dans les entreprises comptant moins de cinquante salariés.
Je souhaite évidemment connaître l'avis de Mme le rapporteur sur cet amendement du Gouvernement. En effet, nous devons répondre ensemble à une question soulevée par le Sénat.
M. le président. Madame Procaccia, l'amendement n° 122 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, monsieur le ministre.
Obliger toutes les entreprises à instaurer la participation crée une inégalité pour celles qui sont constituées en unité économique et sociale. En effet, le calcul ne se fera pas de la même façon selon que les entreprises ont plus ou moins de cinquante salariés. Cela crée aussi une inégalité avec les entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas constituées en UES. Il existe bien un déséquilibre.
Or, dans l'optique de ce projet loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, il est injuste de défavoriser les petites entreprises.
Aussi, je maintiens mon amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je souhaite apporter une précision qui a peut-être fait défaut.
La consolidation entraîne la constitution de sous-groupes homogènes. Or, dans une unité économique et sociale, il arrive que le traitement différencié en fonction des situations crée des régimes d'inégalité.
Il me semble que la rédaction de l'amendement n° 240 - je le dis dans un esprit positif et constructif - nous permet d'éviter ce type de déséquilibre. Je vous demande donc de nouveau, madame Procaccia, de bien vouloir retirer votre amendement au profit de celui du Gouvernement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est donc l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'amendement n° 240 tend à modifier le calcul de la participation au sein des UES. Aussi, je demande également à Mme Procaccia de bien vouloir retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement. À défaut, je serai contrainte d'émettre un avis défavorable, et j'en serais désolée.
M. le président. Madame Procaccia, qu'advient-il de votre amendement n° 122 rectifié ?
Mme Catherine Procaccia. Je le retire, monsieur le président. De toute façon, il n'aurait pas été adopté.
M. Guy Fischer. Quelle déception ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 122 rectifié est retiré
L'amendement n° 76 rectifié, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
A- Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - Les dispositions du b) du 1° du I sont applicables à compter du 1er janvier 2008.
B- Faire précéder cet article de la mention :
I. -
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à reporter au 1er janvier 2008 l'application des nouvelles règles de report des déficits, afin que les entreprises puissent s'y adapter dans les meilleures conditions.
C'est un amendement de bon sens : il faut laisser aux entreprises le temps de mettre en place leur accord de participation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 240, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Dans le dernier alinéa de l'article L. 442-4 du même code, après la référence : « L. 442-1 » sont insérés les mots : « pour les entreprises qui n'entrent pas dans un même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes au sens du second alinéa de l'article L. 444-3 », et les mots : « dans les entreprises constituant l'unité économique et sociale » sont supprimés.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'ai déjà défendu cet amendement en donnant l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 122 rectifié de Mme Procaccia. Il s'agit de maintenir l'équilibre entre les entreprises s'agissant de la participation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je confirme l'avis favorable de la commission.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je souhaite que M. le ministre m'éclaire sur un point précis.
Cet amendement, s'il est adopté, n'aura-t-il pas pour conséquence de dispenser certaines entreprises d'accomplir leur obligation de versement, dans la mesure où les déficits d'autres entreprises pourraient être pris en compte dans le calcul de la participation ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement tend à créer des groupes homogènes et à mettre en place une répartition permettant à tous les salariés appartenant à la même unité économique et sociale d'être traités de la manière la plus égale possible.
Cette mesure n'est donc pas un artifice, bien au contraire ! Mais je pourrais apporter à M. Muzeau, en dehors de la séance et au travers d'illustrations spécifiques, un éclairage complémentaire.
M. Roland Muzeau. Nous attendons les précisions complémentaires de M. le ministre, mais nous voterons tout de même contre cet amendement ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je souhaite faire un rappel au règlement. Comme mon collègue Muzeau, je n'ai pas entendu que l'amendement n° 165 était retiré : il figure toujours sur le dérouleur.
M. le président. Il a été retiré avant la séance, mon cher collègue.
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est bien dommage parce que nous l'aurions volontiers repris. Si vous le permettez, je voudrais le lire.
M. le président. Non, vous ne pouvez pas vous raccrocher à quelque chose qui n'existe pas, qui n'est même plus virtuel.
Article additionnel après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 166, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Après la section 1 du chapitre II du livre IV du titre IV du code du travail, il est inséré une section additionnelle ainsi rédigée :
« Section ...
Régime facultatif dans les entreprises de vingt à cinquante salariés
« Art. L. 442 - ... Toute entreprise employant habituellement de vingt à cinquante salariés, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, est incitée, pendant une durée de trois ans, à faire participer les salariés aux résultats de l'entreprise. À l'issue de cette période, le gouvernement déposera sur les bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur le développement de la participation et les perspectives d'élargissement de l'obligation de participation aux entreprises de vingt à cinquante salariés. »
II. - Le deuxième alinéa du 1 du II de l'article 237 bis A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le pourcentage : « 25 % » est remplacé par le pourcentage : « 50 % » ;
2° La dernière phrase est supprimée.
III. - La perte de recettes pour l'État résultant du I et du II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Cet amendement, que je défends à titre personnel, a pour objet de renforcer l'incitation à développer des accords de participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés. En effet, si ces accords sont obligatoires dans les entreprises de plus de cinquante salariés, ils sont facultatifs en dessous de ce seuil et, dans la pratique, on en conclut assez peu.
Pour que l'incitation soit un peu plus forte, je propose que le taux de la provision pour investissement, actuellement fixé à 25 %, soit porté à 50 % dans les entreprises de moins de cinquante salariés ayant mis en place un accord de participation.
Aujourd'hui, du fait du caractère facultatif des accords, trop nombreux sont les salariés qui ne perçoivent ni intéressement, ni participation dans ce type d'entreprises. Nous avions pensé les rendre obligatoires, mais cela pose quelques problèmes. Au bout d'un certain temps, trois ans, par exemple, peut-être ferons-nous le point pour mesurer l'effet de la mesure incitative que nous proposons.
M. le président. Le sous-amendement n° 242 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
A. Supprimer le I de l'amendement n° 166.
B. Rédiger comme suit le II de ce même amendement :
II. - Le deuxième alinéa du 1 du II de l'article 237 bis A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ce taux est porté à 50 %, pendant trois ans, pour les accords conclus dans les trois ans de la publication de la loi n° du pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié. »
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. M. Dassault propose de pérenniser un dispositif instauré en 2001 pour trois ans. Ce dispositif, qui majore le taux de la provision pour investissement de 25 % à 50 % pour les entreprises de moins de cinquante salariés ayant mis en place un accord de participation, est issu du rapport Balligand-de Foucault.
Je comprends la démarche qui vise à développer les accords de participation pour les entreprises de moins de cinquante salariés. Pour autant, fidèle à la logique qu'il a suivie tout à l'heure, le Gouvernement ne souhaite pas faire figurer dans le code une nouvelle définition de l'accord dérogatoire.
Je vous propose donc de retenir le dispositif présenté au II afin de reconduire la majoration du taux de provision de 25 % à 50% pour une durée déterminée. Nous respectons ainsi l'objectif d'incitation tout en revenant à la période de trois ans que nous évoquions tout à l'heure. Tout en maîtrisant les coûts de ce type d'accords, nous pourrons mesurer leur développement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 166 et sur le sous-amendement n° 242 rectifié ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'amendement n° 166 vise à renforcer l'incitation à développer des accords de participation dans les entreprises de vingt à cinquante salariés. Cet objectif est effectivement très louable, et nous y adhérons entièrement.
Cependant, le dispositif que nous propose notre collègue Serge Dassault apparaît quelque peu inabouti dans la mesure où l'incitation prévue bénéficierait à l'ensemble des entreprises qui se sont dotées à titre facultatif d'un régime de participation, et non aux seules entreprises comptant entre vingt et cinquante salariés. Or c'est celles-ci que l'amendement semble viser.
Nous y sommes donc défavorables en l'état et pensons qu'il pourrait être précisé.
Le sous-amendement n° 242 rectifié tend effectivement à clarifier les choses. Pour autant, monsieur le ministre, la commission n'a pas l'examiner. Je m'en remets donc à la grande sagesse de notre assemblée, même si j'y suis, à titre personnel, favorable.
M. le président. La parole est à M. Dassault, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 242 rectifié.
M. Serge Dassault. Je suis favorable à l'application du dispositif pendant une durée limitée.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 242 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage de l'amendement n° 166 ?
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 166 rectifié, présenté par M. Dassault, et ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Après la section 1 du chapitre II du livre IV du titre IV du code du travail, il est inséré une section additionnelle ainsi rédigée :
« Section ...
Régime facultatif dans les entreprises de vingt à cinquante salariés
« Art. L. 442- ... Toute entreprise employant habituellement de vingt à cinquante salariés, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, est incitée, pendant une durée de trois ans, à faire participer les salariés aux résultats de l'entreprise. À l'issue de cette période, le gouvernement déposera sur les bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur le développement de la participation et les perspectives d'élargissement de l'obligation de participation aux entreprises de vingt à cinquante salariés. »
II.- Le deuxième alinéa du 1 du II de l'article 237 bis A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le pourcentage : « 25 % » est remplacé par le pourcentage : « 50 % » ;
2° La dernière phrase est supprimée.
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 166 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
Article 6 bis
Le premier alinéa de l'article L. 442-6 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces accords peuvent prévoir qu'une fraction de la réserve spéciale de participation est égale à l'accroissement de la valeur d'un nombre préalablement fixé d'actions ou de parts sociales de l'entreprise ou du groupe au cours du dernier exercice clos. »
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter le premier alinéa de l'article L. 442-6 du code du travail :
« La réserve spéciale de participation peut être calculée en prenant en compte la valeur des actions ou parts sociales de l'entreprise ou du groupe au cours du dernier exercice clos. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 6 bis, modifié.
(L'article 6 bis est adopté.)
Article 7
I. - L'article L. 443-2 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour le conjoint du chef d'entreprise mentionné au même alinéa qui n'a perçu aucune rémunération au titre de l'année précédente, ils ne peuvent excéder le quart du montant annuel du plafond prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. »
II . - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier 2006.
M. le président. L'amendement n° 123 rectifié ter, présenté par Mmes Procaccia, Bout, Brisepierre, Gousseau, Lamure et Sittler, M. Cambon, Mmes Desmarescaux, Garriaud-Maylam, Henneron, Hermange et Keller, M. Demuynck, Mmes Papon, Rozier, B. Dupont et Michaux-Chevry, MM. Cornu et Pointereau, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 443-2 du code du travail, remplacer les mots :
qui n'a perçu
par les mots
et pour le salarié dont le contrat de travail est suspendu, qui n'ont perçu
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Nous sommes assez nombreux à soutenir cet amendement très simple. Il s'agit de permettre aux salariés dont le contrat de travail est suspendu, par exemple pour un congé parental, de continuer à verser des sommes sur leur plan d'épargne d'entreprise.
Il me semble important de préserver le lien avec l'entreprise, d'autant que celui-ci est maintenu pour les retraités, qui, eux, peuvent continuer leurs versements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cette mesure nous semble pouvoir résoudre les problèmes rencontrés par certains salariés dont le contrat de travail est suspendu, par exemple parce qu'ils ont pris un congé parental, et qui se voient parfois refuser la possibilité de faire des versements sur le PEE de leur entreprise.
Aussi, la commission est tout à fait favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement permet de combler un vide juridique : le salarié qui n'a perçu aucun salaire pendant l'année écoulée ne peut aujourd'hui effectuer de versement sur un plan d'épargne d'entreprise puisque le plafond est calculé en fonction d'une rémunération annuelle. À l'instar de ce qui est proposé pour le conjoint collaborateur qui ne perçoit pas de salaire, nous sommes favorables à la fixation d'un plafond annuel pour ces versements. Cet amendement enrichit le dispositif proposé pour le conjoint collaborateur pour des situations qui ne sont pas si particulières. Cela permet de maintenir le lien avec l'entreprise et met un terme à un facteur d'inégalité, notamment entre les hommes et les femmes.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je souhaiterais obtenir des précisions. Ce qui est proposé, c'est que les salariés puissent continuer à effectuer des versements sur leur PEE durant la suspension du contrat. Encore faudrait-il savoir si l'abondement sera versé par l'entreprise. S'il n'est pas maintenu, je ne vois pas l'intérêt de cette proposition.
M. le président. Madame Procaccia, pouvez-vous répondre à la demande de Mme Annie David ?
Mme Catherine Procaccia. Oui, l'entreprise versera l'abondement en fonction des accords en vigueur, dans les mêmes conditions que les autres versements prévus par les accords d'entreprise.
Mme Annie David. Je voudrais être sûre de comprendre : que se passe-t-il si le contrat est suspendu ?
Mme Catherine Procaccia. Il n'y avait pas de rémunération de référence et c'est précisément ce qui posait problème. Nous proposons de faire référence au dernier salaire, qui permet de faire un calcul. Ce qui n'était pas difficile près un an de suspension du contrat de travail pouvait le devenir au bout de trois ans. Dans les faits, certaines entreprises acceptaient le versement, d'autres pas. Notre amendement, comme l'a dit M. le ministre, vise à combler un vide juridique.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je voudrais simplement rappeler la règle : pendant la suspension d'un contrat, l'entreprise n'abonde pas, sauf si un accord le prévoit.
Mme Annie David. Voilà !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. C'est l'un des éléments lors de la négociation de l'accord qui peut exister entre les partenaires sociaux. Mais, de droit, sauf accord, il n'y a pas d'abondement automatique. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Donc, il n'y a pas d'abondement ! Cela ne change rien pour le salarié !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Vous oubliez les avantages fiscaux !
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article additionnel après l'article 7
M. le président. L'amendement n° 88, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 444-9 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les employeurs ayant conclu un accord d'intéressement, de participation ou de plan d'épargne salariale, présentent lors de la négociation annuelle sur les salaires effectifs mentionnée à l'article L. 132-27, un indicateur chiffré du rapport entre la masse salariale de l'entreprise et les sommes perçues par les salariés au titre de l'intéressement, de la participation et des abondements aux plans d'épargne salariale, et de l'évolution de ce rapport.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Le rapport 2006 sur les salaires publié par l'INSEE démontre que les salaires n'ont augmenté que de 0,6 % l'an en valeur réelle de 1998 à 2004.
Le Premier ministre a lancé le débat voilà deux mois en parlant de « malaise sur les salaires ». Il est vrai qu'en 2004 50 % des Français ont eu un revenu inférieur à 15 766 euros.
L'Institut national de la consommation constate une stagnation du pouvoir d'achat en 2005-2006 et, selon le BIPE, Bureau d'informations et de prévisions économiques, la situation sera la même en 2006.
Plus de la moitié des branches professionnelles, soit quatre-vingt-quatre branches, ont encore des minima sociaux inférieurs au SMIC malgré les négociations auxquelles vous les avez invitées au printemps dernier. Ces grilles obsolètes couvrent 5 700 000 salariés. Parmi elles figurent notamment les hôtels-cafés-restaurants, malgré toutes les attentions dont ils ont fait l'objet. La moitié des salariés à temps complet a un salaire inférieur à 1,6 SMIC.
Parallèlement, l'épargne salariale, selon les derniers chiffres recensés, augmente de 9 % par an, avec une tendance exponentielle. Ces quatre dernières années, la progression a été de 30 %. En 2004, 12,7 milliards d'euros ont été distribués. L'encours des FCPE, les fonds communs de placement d'entreprise, était de 65 milliards d'euros à la fin 2005.
Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas voir qu'il y a là un effet de substitution : l'épargne salariale constitue désormais une part non négligeable de la rémunération globale des salariés.
Non seulement cette part est variable, voire aléatoire, mais le fait qu'elle soit fiscalement et socialement attractive pour l'employeur occasionne des pertes de recettes pour la protection sociale, tant de base que complémentaire, de l'ordre de 40 % des montants versés. Si 12 milliards d'euros sont versés ou placés en épargne salariale, cela signifie une perte annuelle de près de 5 milliards d'euros pour la protection sociale.
Nous assistons ainsi à une modification importante de structure tant de la rémunération salariale que du financement de la protection sociale.
Dans le même temps, le Gouvernement propose que la participation soit progressivement généralisée à l'ensemble des entreprises de toute taille. Cette mutation devrait donc être amplifiée, alors que les négociations salariales de branche stagnent.
Cette situation doit amener à une connaissance précise par entreprise du rapport entre la masse salariale, qui donne lieu à financement de la protection sociale, et les sommes versées au titre de l'intéressement et de l'épargne salariale. Ce point est d'autant plus important que vous instituez une possibilité de supplément d'intéressement et de participation.
De même, vous entendez concéder au chef d'entreprise le pouvoir de mettre en place seul, dans les PME, un dispositif d'épargne salariale avec des modalités spécifiques.
On peut donc légitimement s'inquiéter de l'évolution des salaires dans les prochaines années si cette tendance se poursuit.
C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'un indicateur chiffré soit présenté par l'employeur lors de la négociation annuelle sur les salaires afin de mesurer l'évolution de la structure des rémunérations dans l'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à obliger les employeurs à fournir un indicateur chiffré du rapport entre, d'une part, les sommes versées au titre de l'intéressement, de la participation et de l'épargne salariale, d'autre part, la masse salariale de l'entreprise.
Outre que cet amendement jette une suspicion, à notre avis injustifiée, sur les employeurs,...
M. Roland Muzeau. Ah oui ?...
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Tous les employeurs ne sont pas de mauvais employeurs !
M. Roland Muzeau. C'est bien Jacques Chirac qui a parlé des « patrons voyous » !
Mme Catherine Procaccia. Il n'a pas dit que tous l'étaient !
M. Roland Muzeau. Écoutez parfois le Président de la République, et pas seulement Sarko !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Gardez votre calme, mon cher collègue !
...je rappelle que la plupart de ces dispositifs sont mis en place de manière négociée. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. François Marc. Oh !
Mme Catherine Procaccia. Elle n'a pas dit tous !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'indicateur demandé ne nous paraît pas très pertinent dans la mesure où les sommes perçues au titre de la participation et de l'intéressement sont par nature très variables d'une année sur l'autre.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Sur l'amendement lui-même et sur l'obligation qu'il vise à instituer alors qu'il y a des possibilités d'information et que le comité de suivi existe, j'émets un avis défavorable, mais je voudrais répondre aux préoccupations exprimées, même si je l'ai déjà largement fait lors de la discussion générale.
S'agissant de l'attention que porte le Gouvernement sur les salaires et le pouvoir d'achat, je rappelle que ce sont l'actuel gouvernement et le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin qui ont résolu l'éclatement du SMIC en sept SMIC différents par la politique de convergence des SMIC.
Jamais le SMIC n'avait autant augmenté en pouvoir d'achat - 11,5 % -, ce qui a eu un effet naturel de tassement des grilles et des classifications.
Voilà pourquoi, au printemps 2005, nous avons entrepris de revoir ces dernières et d'inciter à la négociation, laquelle relève de la responsabilité des partenaires sociaux. Cependant, si le Gouvernement a la responsabilité de la fixation annuelle du SMIC, il a naturellement aussi un rôle de suivi des négociations salariales dans chacune des branches.
Avant la révision du SMIC du mois de juin, nous avions ainsi singulièrement changé la donne dans les 274 branches de plus de 5 000 salariés puisque à l'issue de ces négociations seules dix-neuf d'entre elles n'étaient pas encore parvenues à se mettre d'accord sur des niveaux de salaires conformes aux différentes classifications.
La révision du niveau SMIC impose, bien sûr, à un certain nombre de branches de renégocier - il y a d'ailleurs une obligation annuelle de négociation - et, dès la fin du mois d'août, nous avons adressé à chacun des responsables de branche et à chacun des partenaires sociaux un courrier pour attirer leur attention sur cette nécessité.
De plus, le 17 octobre dernier, nous avons mis en place à l'intérieur de la délégation générale du travail un nouveau dispositif, le comité de suivi, qui est au côté des partenaires sociaux pour stimuler les négociations salariales de branche.
J'aurais d'ici à la fin de l'année l'occasion de faire le point sur l'état d'avancement de ces négociations.
À l'évidence, des grilles dynamiques sont un facteur d'attractivité dans un certain nombre de métiers. Vous citiez les hôtels-cafés-restaurants : ce n'est pas faute d'un engagement du Gouvernement en commission mixte et de celui du directeur général du travail - ainsi, je dois le dire, que des ministres eux-mêmes - si nous n'avons pas abouti, d'autant que l'accord hôtels-cafés-restaurants avait été obtenu dans le cadre d'une négociation avec les partenaires sociaux, ce qui lui conférait une validité certaine.
C'est aussi pourquoi le Premier ministre a décidé qu'une conférence portant à la fois sur l'emploi et les revenus se tiendrait à la fin de l'année pour que nous puissions analyser ces deux questions avec l'ensemble des partenaires sociaux.
Ce gouvernement conduit donc une politique dynamique en matière salariale, en laissant à chacun ses responsabilités, car il ne s'agit pas de se substituer aux partenaires sociaux en matière de négociation dans chacune des branches, mais il intervient quand une branche est dans l'incapacité - cela arrive - de négocier, notamment en désignant des présidents de commission mixte. Ainsi, les partenaires sociaux de la branche de la chimie qui n'avaient pas négocié pendant plus de six ans sont parvenus à se retrouver. Quant à d'autres secteurs qui négociaient a minima, ils ont mis en place des négociations dynamiques.
Je tenais à faire ce rappel, car il est trop facile de répéter inlassablement que nous sommes dans une situation de « panne » salariale. Nous avons au contraire remis en place une négociation dynamique.
Si la négociation s'était bloquée, c'est parce que la loi Aubry sur les 35 heures s'était construite sur une forme de duperie, à savoir le gel salarial ou la modération salariale, qui se sont en fait parfois traduits par la régression des salaires et par la naissance de sept SMIC. C'est à cette réalité que nous avons été confrontés en 2002, et c'est une loi inspirée d'un rapport du Conseil économique et social, à l'issue donc d'un débat entre les partenaires sociaux, qui a permis d'organiser la convergence des SMIC.
Cette convergence a imposé un effort particulier, notamment sur les plus bas salaires, et elle a eu un effet de tassement. Aujourd'hui, alors que nous sommes revenus dans une dynamique plus « classique », il nous faut d'ailleurs établir les voies et moyens qui permettront de mener une réflexion sur tout ce qui a trait aux grilles salariales et aux salaires minimaux. C'est un des objectifs de la conférence sur l'emploi et les revenus que nous aurons d'ici à la fin de l'année avec les partenaires sociaux.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. J'ai écouté M. le ministre avec la plus grande attention et je crois qu'il ne nous a pas tout dit.
M. Roland Muzeau. Je vais donc compléter votre propos, monsieur le ministre, et je suis sûr que vous serez d'accord avec moi !
Il est vrai que, dans le cadre de la commission nationale de la négociation collective, des discussions et des avancées ont eu lieu. Cela étant, d'après les informations dont je dispose, 60 % des 158 branches professionnelles du secteur général auraient maintenant un premier niveau de salaire conforme au montant du SMIC, ce qui signifie que 40 % d'entre elles ne seraient pas dans ce cas.
Elles étaient 53 % en 2004, mais le rapport dont vous avez fait état, monsieur le ministre, indique que 18 % de ces secteurs, le secteur des assurances par exemple, ont fourni des données sur la base de garanties minimales et non de minima sociaux. Vous savez combien la nuance est importante !
Un certain nombre d'éléments de rémunération en salaire de base sont pris en compte, comme les primes, de plus en plus nombreuses, qui n'interviennent pas dans le calcul de la retraite.
Résultat : moins de la moitié des professions sont en règle au regard du SMIC. Je rappelle les exemples que j'ai cités dans la discussion générale : la chimie et ses six coefficients inférieurs au SMIC, l'immobilier et l'habillement pour l'ensemble de leurs échelons ouvriers, l'ameublement pour la totalité de sa grille employés... Les branches de la métallurgie sont, elles, globalement en régression et le bilan dont vous avez parlé tout à l'heure fait état de 68 % de secteurs avec des minima équivalant au SMIC.
Il ne faut pas omettre d'ajouter à cela que de nombreux secteurs professionnels ont négocié leurs minima sur la base du montant de l'ancien SMIC.
Je prendrai deux dates de référence. Au lendemain de la hausse du SMIC du 1er juillet 2005, tout ce qui avait été négocié auparavant est devenu caduc : cela a été le cas pour le commerce alimentaire, l'équipement ménager ou les magasins de bricolage. Puis ce phénomène s'est reproduit à l'occasion de la hausse du 1er juillet 2206 : toutes les grilles professionnelles qui étaient « ric-rac » pour l'échelon le plus bas ont à nouveau comporté des salaires inférieurs au niveau du SMIC puisqu'il n'y a pas de mécanisme d'ajustement automatique.
En conséquence, non seulement 40 % des branches professionnelles sont très en retard, mais un certain nombre d'autres branches qui, elles, avaient pris la base minimale du SMIC comme seuil de leur grille sont à nouveau en dessous du SMIC ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. J'ai moi aussi bien écouté ce que M. le ministre vient de dire du dialogue social, mais je tiens à préciser qu'il s'agit ici d'une discussion interne à l'entreprise et, pour qu'une discussion se déroule dans de bonnes conditions à l'intérieur d'une entreprise, il est nécessaire que les salariés disposent de suffisamment d'informations. C'est précisément l'objet de cet amendement.
Notre préoccupation est que la distribution de revenus à caractère aléatoire ne s'accélère pas au détriment des revenus à caractère régulier. Il faut donc tenir compte des études qui établissent qu'aujourd'hui le taux de progression des salaires par rapport au taux de progression des indemnités et des différentes rémunérations accessoires est de un à quatre.
Faire en sorte que l'information puisse être objectivement présentée dans chaque entreprise, c'est, monsieur le ministre, aller dans le sens du développement du dialogue social dans la mesure où c'est à partir d'une information objective distribuée à tous au sein de l'entreprise que la discussion va pouvoir aboutir à des choix et des arbitrages intéressants.
Cet amendement est donc conforme à l'esprit que vous voulez donner à ce projet de loi. S'il est rejeté, c'est que l'on veut cacher certaines choses aux salariés, à savoir les évolutions constatées qui traduisent une substitution entre types de revenus, et c'est bien cela le problème ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Voilà !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
I. - Après le cinquième alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'accord d'intéressement, l'accord de participation et le règlement d'un plan d'épargne, lorsqu'ils sont conclus concomitamment, peuvent faire l'objet d'un dépôt commun dans les conditions prévues aux neuvième et dixième alinéas de l'article L. 441-2. »
II. - L'article L. 441-2 du même code est ainsi modifié :
1° Le huitième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour ouvrir droit aux exonérations prévues aux articles L. 441-4 et L. 441-6, l'accord doit avoir été conclu avant le premier jour de la deuxième moitié de la période de calcul suivant la date de sa prise d'effet.
« Cet accord doit être déposé, par la partie la plus diligente, auprès de l'autorité administrative compétente, dans un délai de quinze jours suivant cette date limite ; celle-ci est, le cas échéant, reportée à la fin du délai d'opposition mentionné à l'article L. 132-2-2. » ;
2° L'avant-dernier alinéa est supprimé ;
3° Dans le dernier alinéa, après les mots : « lorsqu'un accord », sont insérés les mots : « , valide au sens du I de l'article L. 132-2-2, ».
III. - Après l'article L. 444-10 du même code, il est inséré un article L. 444-11 ainsi rédigé :
« Art. L. 444-11. - L'autorité administrative compétente dispose d'un délai de quatre mois à compter du dépôt d'un accord d'intéressement, d'un accord de participation ou d'un règlement d'un plan d'épargne salariale, pour demander, après consultation de l'organisme en charge du recouvrement des cotisations de sécurité sociale dont relève l'entreprise, le retrait ou la modification des dispositions contraires aux lois et règlements.
« Sur le fondement de cette demande, l'accord ou le règlement peut être dénoncé à l'initiative d'une des parties en vue de la renégociation d'un accord conforme aux dispositions législatives et réglementaires.
« En l'absence de demande pendant le délai fixé au premier alinéa, aucune contestation ultérieure de la conformité des termes de l'accord ou du règlement aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur au moment de sa conclusion ne peut avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales attachées aux avantages accordés aux salariés au titre des exercices en cours ou antérieurs à la contestation.
« Le présent article est également applicable aux accords de participation et aux accords instituant des plans d'épargne interentreprises conclus au niveau d'une branche. »
IV . - Après le deuxième alinéa de l'article L. 442-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le plafond de répartition individuelle fixé par le décret prévu au premier alinéa ne peut faire l'objet d'aucun aménagement, à la hausse ou à la baisse, y compris par un des accords mentionnés à l'article L. 442-5. »
M. le président. L'amendement n° 44, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le cinquième alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail, après les mots :
plan d'épargne
insérer le mot :
salariale
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à préciser dans cet article que le plan d'épargne est, bien sûr, un plan d'épargne salariale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le troisième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 444-11 du code du travail.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Par cet amendement, nous proposons une simple mesure de justice.
En effet, selon la législation actuelle que reprend le projet de loi, l'autorité administrative dispose d'un délai de quatre mois à compter du dépôt d'un accord pour demander le retrait ou la modification des dispositions illégales.
Sur le fondement de cette demande, l'une des parties à l'accord peut le dénoncer en vu de la renégociation d'un accord conforme aux dispositions légales et réglementaires.
Le problème, c'est qu'en l'absence de demande de l'autorité administrative dans le délai de quatre mois, aucune contestation « ne peut avoir pour effet de remettre en cause des exonérations fiscales et sociales attachées aux avantages accordés aux salariés au titre des exercices en cours ou antérieurs à la contestation ».
Cela me conduit à poser deux questions, monsieur le ministre.
Les « avantages accordés aux salariés », ce sont l'intéressement, la participation et les abondements patronaux, mais, de ces avantages accordés aux salariés, l'employeur tire également parti en termes d'exonérations fiscales et sociales.
La rédaction de l'article signifie-t-elle qu'en cas de contestation tardive seuls les salariés ne peuvent être contraints de verser des impôts et cotisations dont ils ont pu être exonérés, ou bien cette disposition favorable s'étend-elle aussi aux employeurs ?
En toute hypothèse, autant admettre que les avantages fiscaux et sociaux consentis du fait d'un accord non conforme à la loi et à la réglementation puissent être accordés définitivement, alors même que l'accord sera reconnu comme illégal.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Si j'ai bien compris, monsieur Godefroy, vous interrogez le Gouvernement. Bien sûr, je ne répondrai pas à sa place.
Je vous ferai simplement part de l'avis de la commission : cet amendement va à l'encontre de l'objectif de sécurisation juridique des dispositifs d'épargne salariale poursuivi par le projet de loi.
Comme je l'ai dit cet après-midi, cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des chefs d'entreprise était justement un frein terrible. La sécurisation est absolument indispensable. J'avoue donc, personnellement, ne pas comprendre du tout l'objet de votre amendement.
Bien évidemment, l'avis sera défavorable. Il s'agit de l'un des amendements les plus importants concernant ce projet de loi : j'avoue, mon cher collègue, que je ne le comprends pas.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Lors du débat qui a eu lieu au sein du Conseil supérieur de la participation, toutes les parties ont été favorables à la sécurisation juridique des accords. J'avoue être un peu étonné de ce que, dans un pays où, pour une fois, nous progressons en termes de sécurisation juridique, vous combattiez cette mesure.
Je crois comprendre votre préoccupation : les règles de dénonciation par l'une des parties seront-elles préservées ? Notre réponse est évidemment « oui », monsieur Godefroy.
Je souhaiterais donc que vous retiriez cet amendement, qui me semble un paradoxe.
L'état d'insécurité est un facteur de non développement de la participation, notamment dans les petites et moyennes entreprises.
Je peux vous confirmer, puisque ce point fait l'objet du débat, que la dénonciation par l'une ou l'autre des parties demeure naturellement de droit, et n'est pas bouleversée par cette sécurisation.
Au contraire, l'insécurité juridique, outre qu'elle freine la conclusion d'accords, inhibe aussi parfois des accords innovants - cela a été évoqué tout à l'heure à l'égard des femmes - et des dispositions qui seraient plus en phase avec les réalités.
C'est pourquoi, conformément à une demande unanime, nous avons souhaité sécuriser les accords.
M. le président. Monsieur Godefroy, l'amendement n° 89 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 89 est retiré.
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
M. le président. L'article 9 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article additionnel avant l'article 9 bis
M. le président. L'amendement n° 167, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Avant l'article 9 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les fonctionnaires ont accès à l'intéressement aux résultats et performances de leur service ou de leur établissement.
Les sommes affectées à l'intéressement des fonctionnaires dépendent des économies de gestion réalisées.
Les organisations syndicales représentatives de fonctionnaires sont consultées sur la base de calcul et les modalités de répartition.
Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article.
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Je présenterai cet amendement à titre personnel : je propose une innovation importante, me semble-t-il. Peut-être devra-t-elle faire l'objet d'une étude plus approfondie.
Pourquoi y a-t-il cinq millions de salariés qui n'ont droit à rien en matière de participation ou d'intéressement ? Ces salariés sont fonctionnaires.
M. Guy Fischer. Voilà qui vaut son pesant de gratons !
M. Serge Dassault. Aujourd'hui, les fonctionnaires dont le travail ne porte pas sur des opérations marchandes, qu'ils produisent ou non des bénéfices, ne peuvent bénéficier de la participation.
Pourquoi empêcher des salariés qui travaillent bien et qui permettent d'effectuer des économies sur le budget qui leur est alloué, donc de faire gagner de l'argent à l'État, de profiter également de la participation ? C'est le cas des salariés qui travaillent dans une entreprise créant des bénéfices et qui, grâce à la participation, peuvent participer à ces bénéfices et savent ainsi que leur travail peut leur rapporter quelque chose en plus de leur salaire et que leur travail leur profite directement.
C'est la raison pour laquelle je propose cet amendement. Je suppose qu'il ne sera pas adopté en l'état : il s'agit d'un amendement de réflexion.
La question que je pose est celle-ci : pourquoi n'instituerait-on pas dans la fonction publique un intéressement aux économies budgétaires ?
D'une manière générale, les fonctionnaires dépensent entièrement les budgets prévus, voire davantage, et ne cherchent pas à faire d'économies.
S'ils savaient qu'économiser leur budget leur permettrait de bénéficier d'une part de l'économie réalisée, peut-être feraient-ils davantage d'efforts.
Finalement, ce serait la fonction publique qui profiterait de ces économies, et le personnel qui aurait fait cet effort en recevrait les bénéfices.
Cet amendement me semble susceptible d'intéresser les salariés fonctionnaires qui, aujourd'hui, n'ont droit à rien. Cela pourrait motiver leur action en vue d'économies budgétaires.
N'oublions pas, donc, cinq millions de salariés qui travaillent de leur mieux et qui n'ont aucune possibilité de profiter des fruits de leur travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Le développement de l'intéressement dans le secteur public fait effectivement partie des objectifs que soutient notre commission. Nous partageons donc vos préoccupations.
Toutefois, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous souhaiterions avant tout que ce sujet soit débattu au sein du Conseil supérieur de la participation.
M. Roland Muzeau. Cela équivaut à un rejet !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Par ailleurs, j'émettrai quelques réserves quant au dispositif proposé, qui nous semble rédigé en termes trop généraux pour être véritablement opérationnel.
Nous souhaiterions donc, mon cher collègue, que vous retiriez cet amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable. Puisque j'ai la chance et l'honneur de siéger au sein du CSP, je demanderai que votre proposition soit étudiée.
M. Roland Muzeau. Nous verrons cela l'année prochaine !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement partage les préoccupations exprimées par M. Dassault.
En effet, la rémunération à la performance a été mise en place pour les directeurs d'administrations centrales, pour certains agents du ministère de l'économie et des finances, mais aussi pour les policiers, en 2004.
Je rappelle qu'en ce qui concerne les directeurs d'administrations centrales, cette rémunération est calculée en fonction d'objectifs d'intérêt général, définis par le ministre. Des lettres spécifiques et relatives à ce sujet existent d'ailleurs.
Cette question a été abordée dans le cadre des conférences de gestion des ressources humaines conduites par le ministère de la fonction publique avec chacun des ministères. Le prochain cycle de conférences portera sur la question de l'harmonisation et de la refondation indemnitaire, en lien avec la notion d'intéressement. Ces sujets sont donc aujourd'hui au rendez-vous.
M. Christian Jacob vient de mettre en place un groupe de travail qui se consacre à la modernisation du dialogue social. Il a proposé aux partenaires sociaux de travailler sur les critères d'évaluation de la performance des services.
Le Gouvernement souhaite que la question de l'intéressement des fonctionnaires progresse. Il s'engage à informer le Parlement des démarches entreprises dans la fonction publique en faveur de la prise en compte des résultats et de la performance dans la gestion des parcours professionnels et des régimes indemnitaires des fonctionnaires.
C'est pourquoi, devant l'Assemblée nationale, nous avons accepté deux amendements qui permettaient d'engager le dialogue sur ces sujets. Le Gouvernement souhaite laisser au dialogue le temps de se développer.
Nous répondons donc à votre préoccupation, et nous vous demandons de retirer cet amendement : la mise en place des groupes de travail est aujourd'hui réalisée, et nous tiendrons informée la représentation nationale des avancées effectuées, notamment quant à la rémunération à la performance déjà mise en place pour certaines catégories.
M. le président. Monsieur Dassault, l'amendement n° 167 est-il maintenu ?
M. Serge Dassault. Je sais que cet amendement ne sera pas adopté. Il me semble qu'il serait préférable d'en préciser davantage les termes et de le mettre à l'étude, comme le disait Mme le rapporteur, afin de présenter un texte plus consistant, qui aurait déjà été négocié avec les organisations syndicales et des commissions spécialisées.
Je voulais tout de même poser l'idée d'une participation des salariés fonctionnaires.
Cela étant dit, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 167 est retiré.
Article 9 bis
Dans un délai d'un an suivant la date de promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport décrivant les modalités et l'état de la mise en oeuvre d'une politique d'intéressement dans la fonction publique ainsi que dans les entreprises publiques, établissements publics et sociétés nationales qui n'entrent pas dans le champ de l'article L. 441-1 du code du travail. - (Adopté.)
CHAPITRE III
Moderniser l'épargne salariale
Article additionnel avant l'article 10
M. le président. L'amendement n° 45, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'intitulé du chapitre III du titre IV du livre quatrième du code du travail est ainsi rédigé : « Plans d'épargne salariale »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement tend à modifier un intitulé dans le code du travail. Il s'agit de l'intitulé du chapitre regroupant les plans d'épargne d'entreprise, les plans d'épargne interentreprises et les plans d'épargne pour la retraite collectifs. Cet intitulé vise les seuls PEE et paraît donc trop restrictif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 10.
Article 10
I. - Les deuxième à neuvième alinéas de l'article L. 442-5 du code du travail sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Ces accords peuvent prévoir l'affectation des sommes constituant la réserve spéciale de participation :
« 1° À des comptes ouverts au nom des intéressés en application d'un plan d'épargne d'entreprise remplissant les conditions fixées au chapitre III du présent titre ;
« 2° À un compte que l'entreprise doit consacrer à des investissements. Les salariés ont sur l'entreprise un droit de créance égal au montant des sommes versées.
« Un accord ne peut prévoir l'affectation des sommes constituant la réserve spéciale de participation uniquement à un compte courant bloqué. »
II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 442-12 du même code, la référence : « du 3 de l'article L. 442-5 » est remplacée par la référence : « de l'article L. 442-5 ».
III . - 1. Dans le deuxième alinéa de l'article 35 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production, les références : « , troisième alinéa, 2°, » sont supprimées.
2. Dans le dernier alinéa du B du II de l'article 5 de la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement, les mots : « l'attribution d'actions de l'entreprise en application du 1 de l'article L. 442-5 du code du travail ou l'affectation des sommes à un fonds que l'entreprise consacre à des investissements en application du 3 du même article ou » sont remplacés par les mots : « l'affectation des sommes ».
3. Dans la première phrase du dernier alinéa du I de l'article 39 de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie, les mots : « l'attribution d'actions de l'entreprise en application du 1 de l'article L. 442-5 du même code ou l'affectation des sommes à un fonds que l'entreprise consacre à des investissements en application du 3 du même article ou » sont remplacés par les mots : « l'affectation des sommes ».
4. Dans le II de l'article 27 de la loi n° 87-416 du 17 juin 1987 sur l'épargne, les mots : « du 2 de l'article L. 442-5 et » sont supprimés.
5. Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 163 bis AA du code général des impôts, les mots : « au dixième alinéa de » sont remplacés par le mot : « à ».
6. Dans le troisième alinéa du II de l'article L. 442-8 du code du travail, les mots : « ceux-ci sont énumérés au 4° » sont remplacés par les mots : « ceux mentionnés au deuxième alinéa ».
7. Le neuvième alinéa de l'article L. 443-1-1 du même code est supprimé.
M. le président. L'amendement n° 46, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Au début du texte proposé par le I de cet article pour le deuxième alinéa de l'article L. 442-5 du code du travail, remplacer les mots :
Ces accords
par les mots :
Les accords conclus après la promulgation de la loi n° du pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement apporte une précision au début de l'article : il prévoit que l'obligation faite aux entreprises de se doter d'un PEE s'applique à compter de la mise en oeuvre des accords de participation conclus après la promulgation de la loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article additionnel après l'article 10
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Le plan d'épargne pour la retraite d'entreprise visé au b du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts peut recevoir, à l'initiative des participants, les versements des sommes issues de l'intéressement, de la participation ainsi que d'autres versements volontaires et des contributions des entreprises prévues à l'article L. 443-7 du code du travail.
II. La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Il s'agit d'une question technique : cet amendement est le premier d'une série de six qui tendent à reprendre la proposition du rapporteur général, M. Philippe Marini, figurant dans son rapport d'information relatif à l'épargne retraite.
Le présent amendement concerne un régime d'épargne retraite créé dans le cadre de l'entreprise : le plan d'épargne pour la retraite d'entreprise, ou PERE.
Il existe aujourd'hui un dispositif d'épargne retraite d'entreprise : le plan d'épargne pour la retraite collectif, ou PERCO.
Les sommes perçues par les salariés au titre de l'intéressement et de la participation peuvent être versées sur un PERCO, mais non sur un PERE, alors qu'il s'agit d'un régime d'épargne retraite d'entreprise.
La commission des finances vous propose donc de permettre que les sommes perçues au titre de la participation et de l'intéressement puissent également être versées sur un PERE.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Nous ne sommes pas hostiles à cette mesure, qui devrait favoriser le développement de l'épargne retraite, même s'il nous semble que le PERE risque de faire double emploi avec le PERCO, au développement duquel notre commission est, vous le savez, très favorable.
Si les régimes de ces deux dispositifs sont alignés, cela risque de poser un léger problème.
C'est pourquoi la commission des affaires sociales s'en est remise à la sagesse de notre assemblée. Je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Insérer le PERE, qui est une variante du PERP, dans le dispositif existant d'épargne salariale, tel est l'objet de cet amendement.
Le Gouvernement considère qu'il ne serait pas souhaitable, puisque la réforme des retraites a permis de trouver un équilibre qui devra être réexaminé en 2008, de complexifier le paysage de l'épargne salariale.
On trouve, d'un côté, un plan d'épargne à cinq ans, le PEE et ses variantes, le plan d'épargne groupe et le plan d'épargne interentreprises, et, de l'autre, le plan d'épargne retraite, PERCO.
Je rappelle que la possibilité d'abonder le PERCO avec la participation et l'intéressement n'est qu'une contrepartie de l'absence d'avantages fiscaux à l'entrée.
Dans ces conditions, le PERE peut très bien se développer sans un soutien supplémentaire.
En outre, je dois indiquer que les partenaires sociaux ne sont pas favorables, pour l'instant, à une telle complexification des dispositifs de l'épargne salariale - M. Marini reconnaissait lui-même dans son rapport d'information que cette proposition ne soulevait pas vraiment leur enthousiasme.
Nous ne souhaitons pas modifier le paysage juridique de ces régimes. Un équilibre a été trouvé après un long débat et des discussions approfondies, qui ont été menées, notamment, avec les partenaires sociaux, au sein du comité d'orientation des retraites, puis au Parlement ; il ne doit pas être modifié avant notre prochain rendez-vous sur les retraites et leurs compléments.
Le Gouvernement, bien qu'il comprenne les préoccupations exprimées par le rapporteur général et le rapporteur pour avis de la commission des finances, demande donc le retrait de cet amendement.
Il me semble que « déplacer les curseurs » sur un sujet aussi sensible, avant d'avoir eu le temps de dresser le bilan des dispositifs existants, ne répond pas à l'exigence d'un dialogue social permanent.
D'ailleurs, j'ai pu constater hier, à Bruxelles, qu'un certain nombre de pays européens n'avaient pas encore eu le courage de lancer un tel débat, qui est particulièrement difficile et suppose qu'un équilibre soit trouvé, notamment, grâce au dialogue avec les partenaires sociaux.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 5 est-il maintenu ?
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 5 est retiré.
Article 11
I. - L'article L. 443-1-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du I est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L'entreprise qui a mis en place un plan d'épargne d'entreprise depuis plus de cinq ans est tenue d'ouvrir une négociation en vue de la mise en place d'un plan d'épargne pour la retraite collectif. » ;
2° Le premier alinéa du II est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Un ancien salarié d'une entreprise peut continuer à effectuer des versements sur le plan d'épargne pour la retraite collectif lorsqu'il n'existe pas un tel plan dans la nouvelle entreprise qui l'emploie. Ces versements ne bénéficient pas des versements complémentaires de l'entreprise et les frais afférents à leur gestion sont à la charge exclusive de l'ancien salarié qui effectue ces versements. Peuvent aussi être versés sur le plan d'épargne pour la retraite collectif les droits inscrits au compte épargne-temps mentionné à l'article L. 227-1. »
II. - L'article L. 443-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant des droits inscrits à un compte épargne-temps mentionné à l'article L. 227-1 et qui sont utilisés pour alimenter un plan d'épargne pour la retraite collectif défini à l'article L. 443-1-2 n'est pas pris en compte pour l'appréciation du plafond mentionné au premier alinéa. Il en est de même des droits utilisés pour alimenter un plan d'épargne d'entreprise, à condition qu'ils servent à l'acquisition de titres de l'entreprise, ou d'une entreprise qui lui est liée au sens de l'article L. 444-3, ou de parts ou d'actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières mentionnés aux articles L. 214-40 et L. 214-40-1 du code monétaire et financier. »
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 172, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 11 du projet de loi, qui prévoit de généraliser les plans épargne retraite pour la retraite collectifs, ou PERCO, et de faire glisser vers ces plans les sommes placées sur les comptes épargne-temps.
En effet, à travers cet article, il s'agit tout bonnement de mettre fin à notre système de retraite fondé sur la solidarité intergénérationnelle.
Monsieur le ministre, nous connaissons votre intention de généraliser l'épargne individuelle en prévision de la retraite et d'obliger chaque salarié à financer les grandes entreprises - et leurs actionnaires ! -, par le biais des fonds de pension.
Vous le savez, ce système de retraite assurantiel individuel est parfaitement inégalitaire, puisque chacun cotise en fonction de ses moyens. Avec un tel dispositif, les salariés qui sont les plus précaires, ou simplement qui ont des revenus modestes, ne disposeront d'aucune couverture, ni d'aucun revenu en fin de vie. Ils dépendront donc de la charité, puisque la solidarité nationale est en voie de disparition avec vous au Gouvernement !
Nous avons déjà longuement protesté contre cette évolution au cours du débat sur la réforme des retraites, qui, d'ailleurs, a donné naissance au PERCO.
Pour supprimer le système de retraite par solidarité intergénérationnelle, vous le placez en concurrence avec des dispositifs comme le PERCO, en laissant à chacun la responsabilité d'assurer sa retraite.
Parallèlement, le niveau des pensions est anormalement bas, comme l'ont rappelé les retraités eux-mêmes lors de leur journée de mobilisation du jeudi 19 octobre dernier.
Sachons-le, mes chers collègues, le niveau des pensions a baissé de 10 % en dix ans et, par conséquent, la paupérisation des personnes âgées de plus de soixante ans n'est plus aujourd'hui un phénomène marginal.
Pour toutes ces raisons, nous rejetons catégoriquement le développement des PERCO, d'autant plus que là où ces plans existent, ils sont rendus obligatoires, et non facultatifs.
Je le répète, un tel développement des PERCO sert de prétexte à l'abandon de notre système par répartition et des principes de solidarité entre les générations qui le fondent.
Toutefois, monsieur le ministre, vous allez encore plus loin, puisque les sixième et septième alinéas de l'article 11 du projet de loi prévoient que les droits constitués sur le compte épargne-temps pourront être transférés sur un PERCO.
Ainsi, les salariés pourraient dépasser l'horaire légal de travail de 35 heures sans être rémunérés, puisque le salaire serait versé directement sur le compte épargne-temps, avant d'être placé sur un PERCO, grâce à des incitations fiscales.
Il s'agit d'une dénaturation supplémentaire du compte épargne-temps, et, une fois encore, d'une remise en cause insidieuse de la réforme des 35 heures !
Toutes les dispositions de cet article sont pour nous inacceptables. Voila pourquoi nous en demandons la suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le 1° du I de cet article.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Aux termes du texte proposé par l'article 11 pour compléter le premier alinéa du I de l'article L. 443-1-2 du code du travail, la société qui a créé un plan d'épargne d'entreprise depuis plus de cinq ans est tenue d'ouvrir une négociation en vue de mettre en place un plan d'épargne pour la retraite collectif. Je ferai plusieurs observations.
Tout d'abord, alors que le titre de ce projet de loi évoque la participation et l'actionnariat salarié, cet article introduit tout à coup une obligation qui, certes, porte sur les moyens à mettre en oeuvre et non sur le résultat à atteindre, mais qui contraint tout de même les salariés à passer sans bruit de l'épargne salariale à l'épargne retraite. Il est regrettable que cet objectif n'ait pas été affirmé plus clairement dès le départ.
Quant à la volonté de généraliser la mise en place des PERCO, elle appelle deux remarques.
La première, plutôt positive, c'est que le PERCO constitue un dispositif collectif et négocié, à la différence du PERE.
La seconde, qui est nettement moins positive, c'est que le PERCO est un système à cotisations définies et non à prestations définies, ce qui peut poser des problèmes, surtout dans le cas de sortie en rente. D'où notre inquiétude aujourd'hui.
Il est vrai que l'on peut difficilement garantir des prestations définies à partir de fonds investis en actions et en obligations ! C'est là l'essence du système de la capitalisation, bien plus risqué que celui de la répartition.
En l'occurrence, les fonds sont bloqués jusqu'à la retraite des salariés, sauf dans quelques cas limitatifs liés au décès, à l'invalidité, à la fin de droit de l'astreinte chômage, au surendettement ou à l'acquisition de la résidence principale.
Par parenthèse, monsieur le ministre, ce dispositif, si on l'étudie avec objectivité, et pourvu qu'il bénéficie d'un abondement patronal suffisant, pourra permettre aux salariés de constituer l'apport personnel nécessaire à l'acquisition d'une nouvelle résidence principale. Toutefois, ceux-ci seraient hautement imprudents de garder ces fonds bloqués jusqu'à l'âge de leur retraite. D'ailleurs, on peut même se demander si ce dispositif ne tient pas lieu de soutien au secteur du bâtiment !
Ce qui pose problème dans la disposition dont nous demandons la suppression, c'est le caractère obligatoire de l'ouverture d'une négociation du PEE vers le PERCO.
En effet, les partenaires sociaux doivent avoir toute liberté - c'est pourtant là une idée que vous défendez souvent, monsieur le ministre ! - de décider s'ils veulent, ou non, faire glisser les fonds du PEE vers le PERCO. Et c'est parce que vous savez que leur réponse n'est pas évidente que vous proposez d'instituer cette obligation de négociation, à moins que vous ne vouliez faire admettre, de manière certes détournée, mais néanmoins contraignante, que l'épargne retraite, comme les salaires et la durée du travail, doit être un thème obligatoire de négociation collective.
Mais l'épargne retraite est-elle un élément constitutif de la relation salariale ? Représente-t-elle une part déterminante de la protection des salariés ? Peut-on considérer que le placement risqué en bourse des fonds du salarié et de l'abondement de son employeur en vue de la retraite constitue un élément d'ordre public social ?
Les réponses à ces questions sont pour nous tout à fait négatives, et c'est pourquoi nous demandons la suppression de cette disposition.
M. le président. L'amendement n° 29 rectifié ter, présenté par Mmes Procaccia, Bout, Brisepierre, Gousseau, Lamure et Sittler, M. Cambon, Mmes Desmarescaux, Garriaud-Maylam, Henneron, Hermange et Keller, M. Demuynck, Mmes Papon, Rozier, B. Dupont et Michaux-Chevry, MM. Cornu et Pointereau, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du 1° du I de cet article par les mots :
ou d'un contrat mentionné au b) du A du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts ou d'un régime mentionné au 2° de l'article 83 du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise non pas à supprimer l'article 11 du projet de loi - qui prévoit que les entreprises ayant mis en place un PEE seront contraintes d'ouvrir une négociation en vue de la création d'un PERCO -, mais à le compléter, afin de favoriser le dialogue social.
En effet, compte tenu des dispositifs introduits par la loi Fillon, il me semble que cette obligation de négociation ne doit pas être limitée au PERCO, mais s'étendre également au PERE.
M. le ministre chargé de l'économie et des finances soulignait que le PERE était un placement à long terme, qui est constitué d'actions et d'obligations. En outre, et je m'adresse ici à M. le ministre délégué, il s'agit en l'occurrence d'ouvrir des négociations, ce qui est positif pour le dialogue social.
À travers cet amendement, mon objectif n'est donc pas forcément de créer de nouveaux PERE, mais de permettre qu'au sein de l'entreprise on négocie la mise en place d'un PERCO ou bien d'un PERE.
M. le président. L'amendement n° 47, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. - Dans la première phrase du texte proposé par le 2° du I de cet article pour compléter le premier alinéa du II de l'article L. 443-1-2 du code du travail, supprimer les mots :
lorsqu'il n'existe pas un tel plan dans la nouvelle entreprise qui l'emploie
II. - En conséquence, avant la dernière phrase du même texte insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette possibilité n'est pas ouverte au salarié qui a accès à un plan d'épargne pour la retraite collectif dans la nouvelle entreprise où il est employé.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de vous dire que je tiens beaucoup à cet amendement, qui, me semble-t-il, peut même être adopté à l'unanimité.
Cet amendement a pour objet d'accorder aux salariés la faculté de continuer à effectuer des versements sur le PERCO de leur ancienne entreprise lorsqu'ils n'ont pas rejoint les services d'une nouvelle société.
Aujourd'hui, un salarié peut verser de l'argent sur le PERCO de son ancienne entreprise si son nouvel employeur n'a pas créé un plan similaire.
Je souhaite étendre cette disposition aux personnes qui n'ont pas rejoint une nouvelle entreprise mais qui sont expatriées ou se trouvent, par exemple, en longue maladie, en recherche d'emploi ou en congé de formation de longue durée.
M. Roland Muzeau. Mais dans ce cas ils n'ont pas assez d'argent pour verser !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cette disposition s'appliquerait, bien sûr, sur la base du volontariat.
En effet, je ne vois pas pourquoi un salarié expatrié ou qui a pris un congé de formation de longue durée ne pourrait pas, s'il le souhaite, continuer à verser de l'argent sur son PERCO.
M. Roland Muzeau. Autant jouer au Millionnaire ! (Sourires sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. L'amendement n° 91, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase du texte proposé par le 2° du I de cet article pour compléter le premier alinéa du II de l'article L. 443-1-2 du code du travail.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps l'amendement no 92.
M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue.
M. Jean-Pierre Godefroy. Avec la disposition proposée, le Gouvernement et sa majorité poursuivent la dénaturation du compte épargne-temps. Ce dernier a été créé initialement pour accueillir les heures et les jours de repos que le salarié n'avait pu prendre, notamment les heures supplémentaires.
Dans le cadre de la réduction du temps de travail, il s'agissait donc d'une mesure visant à améliorer les conditions de travail, à faciliter la souplesse des horaires dans les entreprises quand la charge de travail y est irrégulière, et à inciter indirectement à la création d'emplois, par la limitation des heures supplémentaires.
Je rappelle aussi qu'initialement le salarié devait solder régulièrement son compte épargne-temps.
Grâce à M. Fillon, le compte épargne-temps a pu être pérennisé jusqu'au départ en retraite. Puis, les catégories d'heures et de jours pouvant être ainsi épargnés ont été multipliées, notamment pour les salariés au forfait.
Enfin, il est devenu possible de placer sur le CET les sommes non perçues immédiatement et de financiariser totalement ce compte.
Or les montants concernés proviennent non seulement de l'intéressement et de la participation à l'issue de la période d'indisponibilité, mais également des augmentations de salaire.
Ainsi, en peu d'années, vous avez radicalement changé la nature et la destination de ce dispositif.
Le compte épargne-temps est devenu pour l'employeur le moyen de faire réaliser des heures supplémentaires, éventuellement majorées seulement à 10 %, et de ne pas verser leur rémunération directement aux salariés, en les incitant à placer ces sommes sur un CET, géré par un organisme extérieur.
Faut-il rappeler, une nouvelle fois, que les heures supplémentaires, y compris les heures choisies hors quota inventées par M. Fillon, ne sont en réalité jamais décidées par le salarié, mais sont toujours ordonnées par l'employeur ?
La mécanique de l'intéressement est devenue la même et, aujourd'hui, avec ce texte, la boucle se ferme. D'ailleurs, pour s'assurer que le système fonctionne, le Gouvernement impose aux entreprises qui ont mis en place un PEE de négocier en vue de créer un PERCO.
Les sommes inscrites au compte épargne-temps pourront être versées sans limite sur un PERCO, c'est-à-dire se voir intégralement transformées en épargne retraite à risque.
Non seulement le temps que le salarié aura été contraint de placer sur le CET, mais aussi les augmentations de salaire, l'intéressement et la participation iront sur le PERCO !
Il existe donc une substitution directe entre, d'une part, les augmentations de salaire, les heures supplémentaires dont la rémunération n'aura pas été perçue et l'intéressement, d'autre part, l'épargne retraite.
L'employeur bénéficie d'exonérations sociales, non seulement sur les salaires inférieurs à 1,6 SMIC, mais sur l'intéressement et la participation. Dans le même temps, le salarié ne perçoit pas les sommes qui lui sont dues et qu'il est fermement invité à placer, sans être aucunement assuré de pouvoir en disposer quelques décennies plus tard, quand il partira à la retraite.
Il s'agit d'une mutation majeure du financement de la protection sociale en matière de retraite !
Le système par répartition se trouve privé d'une partie de ses financements et les salariés sont aimablement contraints de verser une partie de leur rémunération sur un placement à risque.
Mes chers collègues, peut-on encore parler de sécurité sociale, telle que nous la connaissons aujourd'hui ?
M. Roland Muzeau. Non !
M. le président. L'amendement n° 92, présenté par MM. Godefroy et Marc, Mmes Printz, San Vicente-Baudrin, Schillinger, Jarraud-Vergnolle et Bricq, MM. Michel, Desessard, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 172, 90, 29 rectifié ter, 91et 92 ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. S'agissant de l'amendement de suppression n° 172, la commission émet bien sûr un avis défavorable, car elle souhaite encourager le développement de l'épargne retraite, notamment par le biais du PERCO.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 90, qui vise à supprimer l'obligation d'ouvrir des négociations en vue de mettre en place un PERCO dans les entreprises.
En ce qui concerne l'amendement n° 29 rectifié ter, je rappelle que l'article 11 prévoit que les entreprises sont tenues d'ouvrir une négociation en vue de mettre en place un PERCO. Prévoir l'ouverture de négociations pour le PERE semble donc possible. Toutefois, compte tenu de la différence de modalités de cotisations sociales entre les deux dispositifs, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
L'amendement n° 91 tend à s'opposer à l'idée d'un lien entre le PERCO et le compte épargne-temps. La commission y étant favorable, elle ne peut que demander le rejet de cet amendement.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 92, qui tend aussi à refuser le lien entre le compte épargne-temps et le PERCO. Il s'agit pourtant d'un mécanisme d'assouplissement, notamment des 35 heures, qui paraît relativement bon.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappellerai d'abord quelques données concernant l'épargne salariale et le PERCO.
L'épargne salariale, c'est 10 millions de porteurs, 77 milliards d'euros. Le PERCO, qui n'a pris son essor qu'au cours de l'année 2005, concerne, au 1er juillet de cette année, 23 000 entreprises, 1 million de salariés, et représente 540 millions d'euros d'épargne gérée. C'est donc un dispositif qui connaît aujourd'hui une croissance forte et qui, à l'exception d'une organisation, ne fait plus réellement débat. La discussion sur ce sujet me semble donc dépassée. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Non !
M. Jean-Pierre Godefroy. Comme c'est obligatoire, cela fonctionnera !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'en viens à la position du Gouvernement sur l'ensemble des amendements.
Le Gouvernement est bien sûr défavorable à l'amendement n° 172.
En ce qui concerne l'amendement n° 90, l'article 11 prévoit de promouvoir le PERCO dans l'entreprise et d'ouvrir le champ des bénéficiaires. Il semble essentiel de renforcer les sources de financement de la retraite. C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 29 rectifié ter, le PERE est un produit assurantiel. À la différence des autres dispositifs, les partenaires sociaux ne sont pas des gestionnaires. Il est donc très peu probable que s'engagent des négociations autour de ce dispositif : il sera le fruit d'une décision unilatérale. Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
L'amendement n° 47 séduit le Gouvernement. Son objet est une illustration pratique de la sécurisation des parcours professionnels. Cela rejoint d'ailleurs une préoccupation exprimée tout à l'heure par Mme Procaccia : ne seront pas exclus du PERCO les salariés en longue maladie - cette notion répond à une définition spécifique - ou ceux qui ont une maladie longue. Le Gouvernement y est donc favorable.
Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 91 et 92.
M. le président. Madame Procaccia, l'amendement n° 29 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Je maintiens cet amendement, que nous sommes nombreux à avoir signé, monsieur le président.
Je rappelle que le PERE a été décidé par le Gouvernement et instauré par la loi Fillon.
Je ne comprends pas pourquoi les partenaires sociaux et les entreprises n'auraient pas le droit d'ouvrir des négociations en vue de mettre en place ce dispositif. Vous l'avez souligné, monsieur le ministre, un nombre très faible de PERCO a été conclu, peut-être même n'y aura-t-il pas de PERE. Pour autant, rien ne justifie qu'on l'élimine d'office.