compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
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PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
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Mise au point au sujet d'un vote
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, mardi dernier, lors du scrutin n° 91 portant sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle modifiant l'article 77 de la Constitution, j'ai été comptabilisée comme ayant voté pour, alors que je souhaitais m'abstenir.
M. le président. Madame Payet, je vous donne acte de votre mise au point.
3
Démission de membres de commissions et candidatures
M. le président. J'informe le Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission des affaires économiques en remplacement de M. Yves Coquelle, démissionnaire de son mandat de sénateur.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.
J'ai reçu avis de la démission :
- de M. Simon Loueckhote comme membre de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale ;
- et de M. Gaston Flosse comme membre de la commission des affaires culturelles.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.
4
Accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé
Adoption définitive d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé (nos 108, 151).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vive le ministre de l'année !
M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que je vous présente tend à donner force de loi à un dispositif conventionnel qui vise à lutter contre une discrimination peut-être parmi les plus méconnues dans notre pays pendant longtemps, mais l'une des plus intolérables.
Notre objectif est que la maladie n'empêche plus le crédit. Nous voulons que les malades, les anciens malades, les personnes qui souffrent d'un handicap puissent acquérir, par le crédit, un bien immobilier, un bien professionnel ou un bien de consommation, autant d'actes qui font partie de la vie quotidienne.
Il était inacceptable que des millions de personnes soient potentiellement frappées par cette double peine. Après avoir combattu la maladie, elles devaient subir un véritable parcours du combattant pour obtenir un crédit.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. Ce problème qui, au-delà de la santé, est un problème de société, concerne les acteurs économiques et sociaux. Il fallait donc réunir les banques, les assureurs et les malades. Le Gouvernement - et je tiens à souligner l'action déterminante de Thierry Breton - a choisi de procéder, d'abord, par la négociation, puis de consacrer les résultats de celle-ci par la loi.
Le Président de la République avait clairement fixé l'objectif à la fin du mois d'avril dans le discours qu'il avait prononcé sur la lutte contre le cancer. C'est ainsi que la convention « S'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé », AERAS, a été conclue le 6 juillet 2006 entre l'État, les représentants des établissements bancaires, des organismes d'assurance et les associations de malades. Toutes les associations de patients qui s'étaient engagées sur la convention Bélorgey ont signé également cette nouvelle convention. Je sais que le nom d'AERAS peut prêter à discussion. Je crois que le président de la commission a une idée à proposer ; je le laisserai éventuellement en parler.
Cette convention, entrée en vigueur le 6 janvier 2007, prend la suite de la convention Belorgey. Avant celle-ci, rien n'existait .Je tiens à saluer ici le rôle de M. Belorgey.
Je souhaite revenir sur les avancées de cette nouvelle convention signée le 6 juillet 2006. Même si la convention Belorgey représentait un progrès, elle souffrait de nombreuses carences dans son application.
Tout d'abord, les assureurs nous ont indiqué que, sur 35 000 dossiers soumis au deuxième niveau d'examen de la convention, 9 000 étaient refusés au troisième et dernier niveau d'examen.
Au-delà de ces données, il est certain, et vous avez vous-même eu des témoignages dans vos permanences, que de nombreux malades n'ont pas eu la possibilité de recourir à ce dispositif, parce qu'ils n'en connaissaient pas l'existence ou qu'ils n'y ont pas eu recours parce qu'ils pensaient que les procédures seraient trop compliquées, trop longues et aboutiraient en fin de compte à un refus. Donc, ils ne s'engageaient pas dans cette voie. Certains se demandaient même s'il ne fallait pas éviter de tout dire, de pécher par omission avec un risque terrible à la clé, le risque de déchéance du contrat. Voilà les raisons pour lesquelles il était indispensable de faire évoluer les textes.
De plus, la convention ne touchait qu'un nombre restreint de personnes. Une enquête menée en 2005 par la Ligue contre le cancer montre que seules 18 % des personnes concernées entraient dans les critères de montant d'emprunt, d'âge et de durée de prêt.
Les garanties, en termes de confidentialité, ne s'étaient pas suffisamment traduites dans les faits puisque 44 % des personnes interrogées ne s'étaient pas vu offrir la possibilité d'envoi du premier questionnaire de santé sous pli fermé.
Seule l'assurance décès entrait dans le champ de la convention alors que l'assurance invalidité est aussi requise pour souscrire un crédit.
Certaines surprimes liées à l'état de santé pouvaient constituer un facteur de refus d'emprunt ou de non-accès à l'emprunt, la charge de remboursement pouvant, dans certains cas, dépasser le seuil de 33 % généralement retenu par les banques pour prêter.
Enfin, il était nécessaire de revoir les délais car l'allongement des durées de traitement des dossiers était incompatible avec la réalisation effective des transactions immobilières envisagées.
La nouvelle convention AERAS comporte des avancées sur l'ensemble de ces points.
Il s'agit, tout d'abord, d'informer pleinement sur l'existence du dispositif. Chacun devra y contribuer. Notre rôle - ne nous voilons pas la face - est non seulement de voter ce texte, mais de s'assurer que les agents de banque et d'assurance sont formés pour apporter cette information indispensable aux patients. Les banques se sont engagées à mentionner systématiquement sur les simulations de prêt l'existence du dispositif et à nommer des référents dans leurs réseaux. Jusqu'à présent, les agents des banques, notamment, n'étaient pas suffisamment conscients de l'importance du dispositif. Cette généralisation systématique est, à mon avis, un enjeu essentiel.
L'État s'engage durablement à leurs côtés notamment grâce à un site Internet aeras-infos.fr destiné à porter l'information claire et précise à tout Français qui s'interroge. Ce site a été créé le 6 janvier dernier. Depuis cette date, il a enregistré 10 000 connexions en douze jours, ce qui montre bien qu'il y avait une réelle demande.
Il s'agit aussi de remédier au problème de l'assurance invalidité, désormais pleinement intégrée au dispositif de la convention. L'examen des dossiers s'effectue à trois niveaux : l'éligibilité au mécanisme de médiation, la priorité des programmes de recherche que pilotera la commission des études et des recherches de la convention, ainsi que l'éligibilité au mécanisme de mutualisation au même titre que l'assurance décès.
Des progrès médicaux ont été faits. Il faut en tirer toutes les conclusions pour éviter les surprimes qui ne se justifient plus.
Une enquête de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, réalisée en 2006 a montré que, les cas de rémission étant aujourd'hui une réalité, il fallait en tenir compte s'agissant des simulations de prêt et de la disparition de surprimes inacceptables. (M. Guy Fischer fait un signe d'approbation.)
La couverture assurantielle de ce risque est étendue au-delà de la perte totale et irréversible d'autonomie.
Dans la perspective de l'évaluation, une concertation organisée par l'État entre les représentants des assureurs et les associations de malades a permis de déboucher sur un accord quant au suivi statistique des engagements pris par les assureurs sur la garantie invalidité.
Un indicateur établi sur cette question sera alimenté par deux sources : les assureurs et les enquêtes sur échantillons commanditées par la commission de suivi et de proposition, qui sera vigilante quant à la montée en charge de la couverture assurantielle du risque invalidité.
Il s'agit également d'assurer une plus grande transparence pour l'octroi des polices d'assurance.
Les refus d'emprunt liés à des raisons de santé ou les restrictions de couverture devront être motivés ; l'assureur devra obligatoirement mentionner, lors des refus, la possibilité de demander par écrit au médecin de l'assureur de lui communiquer directement, ou par l'intermédiaire d'un médecin de son choix, les raisons médicales du refus.
Le programme de recherche couvrira les pathologies les plus problématiques pour l'accès à l'emprunt et à l'assurance. Trop souvent, les critères appliqués par les assurances étaient trop restrictifs ou en réel décalage par rapport au progrès médical.
Il s'agit, en outre, de mettre en place une commission de médiation en cas de litige. La possibilité de saisine de cette commission de médiation sera systématiquement indiquée aux personnes recevant un refus ou même une restriction d'assurance.
Par ailleurs, le montant des surprimes liées à l'état de santé sera rendu plus supportable.
La prime d'assurance sera plafonnée à 1,5 point de taux effectif global pour les emprunteurs dont les revenus ne dépassent pas le plafond de la sécurité sociale, soit 30 000 euros par an, ce qui couvre la part la plus importante des emprunteurs potentiels. Par exemple, dans le cas d'une personne de quarante ans qui souscrit un prêt immobilier pour un montant de 100 000 euros sur une durée de quinze ans au taux de 3,5 % et dont l'assureur a évalué le risque de surmortalité à 400 %, le mécanisme de mutualisation prendra en charge 370 euros par an de la prime d'assurance, soit 5 550 euros sur la durée du prêt, qui est de quinze ans.
De plus, les critères d'éligibilité à la convention ont été élargis.
Pour les emprunts immobiliers et professionnels, la durée est déplafonnée dès lors que l'âge de l'emprunteur ne dépasse pas soixante-dix ans au terme du prêt, le montant du prêt passant d'un en-cours de 250 000 euros à 300 000 euros, ce qui couvre aussi plus largement les besoins.
L'âge en deçà duquel les demandeurs de crédits à la consommation sont exonérés de questionnaire de santé est relevé de quarante-cinq à cinquante ans, et l'en-cours est porté de 10 000 euros à 15 000 euros. Pour prendre l'exemple d'un achat aussi fréquent que celui d'un véhicule automobile, s'il n'était pas envisageable auparavant de financer autre chose qu'une petite voiture, avec 15 000 euros, on ouvre des possibilités supplémentaires, notamment s'il y a revente de l'ancien véhicule. La durée du prêt reste fixée à quatre ans.
Les banques s'engagent à accepter les garanties alternatives - caution ou assurance individuelle - dès lors qu'elles offrent la même sécurité.
Enfin, en invitant les personnes concernées à anticiper au mieux leur demande et en leur ouvrant le droit de faire réaliser par les assureurs des simulations à blanc, nous répondons à une demande récurrente.
Le projet de loi institutionnalise, dans son article 1er, l'obligation, pour les banques et les assureurs, de négocier une convention triennale avec l'État et, bien sûr, les associations de patients et d'usagers du système de santé, que je remercie très sincèrement de leur apport, car elles ont permis de faire évoluer la situation.
L'article 2 crée un article dans le code de la santé publique qui fixe les rubriques que doit impérativement comprendre la convention.
L'article 3 permet l'intervention du pouvoir réglementaire en cas de carence des parties conventionnelles. Il prévoit la possibilité d'extension par décret à un secteur si une des trois « familles » d'assurance ne conclut pas la convention. Il prévoit également, en cas de rupture ou d'absence de renouvellement de la convention, la possibilité pour le Gouvernement de se substituer aux parties conventionnelles pour édicter les garanties offertes aux personnes malades.
L'article 4 confie à l'instance de suivi le soin d'effectuer une évaluation du dispositif qu'elle transmet au Parlement et au Gouvernement dans les six mois qui précèdent l'échéance de la convention.
L'article 5 prévoit la transmission de ce rapport, à titre dérogatoire, dans les dix-huit mois suivant l'entrée en vigueur de la convention du 6 juillet 2006, soit à la mi-2008. Compte tenu de son importance et de l'urgence de sa mise en place, nous avons souhaité que l'entrée dans le champ du dispositif de l'assurance invalidité soit évaluée dès cette date.
Par ces deux articles, le Parlement est placé, aux côtés du Gouvernement, en situation de garant de la bonne application des nouvelles mesures, rôle qui, je le sais, madame le rapporteur, vous tient particulièrement en coeur et je suis moi-même très attaché à ce que l'on peut appeler le SAV, ou « service après vote », des dispositions qui sont soumises au Parlement. (Sourires.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On compte sur vous dans les années à venir !
M. Xavier Bertrand, ministre. Ce projet de loi est donc un texte d'équilibre mais aussi d'ambition qui permet de consacrer le principe de non-discrimination au coeur de notre pacte républicain.
Il ne faut pas décevoir les espoirs de ceux qui se sont engagés par leur signature, de ceux qui, confrontés au problème depuis bien longtemps, attendent ce texte.
Je sais que des voix s'élèvent pour demander que des dispositions soient « remontées » du niveau de la convention à celui de la loi. Ce n'est pas ce que nous avons souhaité parce que nous sommes persuadés d'avoir trouvé un équilibre qui nous permet d'avancer résolument.
Nous souhaitons donner toutes ses chances au contrat passé avec les assureurs et les banques, qui nous ont dit vouloir loyalement l'appliquer. Je suis certain que ce sera le cas...
M. Guy Fischer. Y compris pour les assureurs ?...
M. Xavier Bertrand, ministre. ...parce que ce sujet est maintenant sous le feu des projecteurs et que personne ne pourra s'exonérer de son engagement.
Je sais aussi qu'au sein du monde bancaire nombreux sont ceux qui veulent aller au-delà même du dispositif conventionnel. J'ai ainsi eu l'occasion de constater dans mon département qu'un réseau bancaire avait décidé non seulement d'appliquer la convention dès le 6 janvier, mais aussi d'offrir des garanties et des facultés supplémentaires à ses clients concernés.
C'est donc un dispositif minimum qui est mis en place mais le jeu de la concurrence entre les établissements conduira certains d'entre eux à aller au-delà de ce que prévoit la nouvelle convention AERAS.
Nous souhaitons en tout état de cause assumer nos responsabilités et, si ce dispositif n'était pas appliqué, nous prendrions les dispositions unilatérales nécessaires. Je suis certain que nous n'aurons pas besoin de le faire, mais ces dispositions sont prévues. C'est pourquoi le Gouvernement a accepté l'amendement adopté par l'Assemblée nationale qui impose un délai de six mois pour prendre un décret en cas de carence des parties conventionnelles alors que le texte initial ne prévoyait aucun délai.
Le comité de suivi et de propositions de la convention jouera un rôle majeur. Thierry Breton et moi-même en avons désigné les membres dès cette semaine et je tiens pour ma part à ce que M. Belorgey, qui dispose déjà de toute l'expérience de la première convention et à qui nous devons beaucoup dans le domaine de l'assurance des malades et des anciens malades, puisse le présider et continuer à s'investir dans ce dossier.
Au-delà des assemblées, qui seront destinataires des rapports de ce comité, vous pouvez continuer, mesdames, messieurs les sénateurs, à jouer un rôle majeur en matière de suivi, car les élus locaux, dont je fais partie, sont régulièrement confrontés à des problèmes concrets d'accès à l'emprunt et à l'assurance.
C'est la raison pour laquelle je ne peux qu'approuver et même encourager les propositions de votre rapporteur tendant à vérifier très régulièrement la montée en charge des nouvelles dispositions, sans même attendre les échéances de rendu des rapports du comité de suivi.
Grâce au présent projet de loi, 10 millions à 12 millions de nos compatriotes pourront voir leur vie changer grâce à la disparition d'une discrimination. C'est dans cet esprit que nous avons travaillé et que je sollicite maintenant la confiance du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ils ont vingt, trente, quarante, cinquante ans et, l'air ambiant appelant à la consommation, ils peuvent souscrire prêt sur prêt ; mais, à vingt et un, trente et un, quarante et un ou cinquante et un ans, à la suite d'une hépatite C, d'une sclérose en plaques, d'un cancer ou d'une autre maladie, ils se voient refuser l'accès au crédit.
Il est paradoxal que ces mêmes établissements qui encouragent les prêts à la consommation et, de façon scandaleuse, contribuent parfois à aggraver des situations de surendettement,...
M. Charles Revet. Tout à fait !
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. ... rendent impossible le recours à l'emprunt à des personnes qui, certes, présentent un risque de santé, mais dont la situation financière peut être bien plus saine et stable que celle de personnes dites en bonne santé.
C'est pour faire face à cette discrimination, monsieur le ministre, que vous vous êtes engagé, avec cette résolution qui explique sans doute en partie que vous ayez été promu ministre de la santé et que le titre de « ministre de l'année 2006 » vous ait été décerné hier lors des prix du Trombinoscope (M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, applaudit), à ce que le projet de loi que nous examinons aujourd'hui comporte une dimension avant tout humaine.
Ce texte s'adresse donc aux personnes qui présentent un risque aggravé de santé. Vous estimez que leur nombre se situe entre 10 millions et 12 millions, au terme d'un calcul qui consiste simplement à rapprocher les 7 millions ou 8 millions de patients atteints d'une ALD et les 5 millions de personnes handicapées, même si, la notion de « risque aggravé de santé » étant quelque peu floue et ample, il est difficile d'établir des statistiques en la matière.
Le projet de loi a deux objectifs.
Le premier est d'améliorer la convention Belorgey, qui présentait un certain nombre d'inconvénients : la méconnaissance de la convention, le retard dans la prise en compte des progrès scientifiques et du succès des traitements des différentes pathologies, la couverture du risque invalidité qui restait problématique - plus difficile à garantir et plus complexe à évaluer que le risque décès, elle est actuellement très inégalement traitée par les assureurs - et, enfin, l'insuffisante évaluation du dispositif.
Ce sont vraisemblablement ces raisons qui ont conduit le Président de la République à déclarer le 27 avril dernier : « La vie, avec ou après le cancer, c'est aussi pouvoir faire des projets et les mener à bien. Cela renvoie évidemment à la question de l'accès à l'assurance et à l'emprunt. La convention Belorgey a marqué un très réel progrès. Mais nous devons remédier au problème de l'assurance invalidité [...]. Je souhaite que les négociations sur une nouvelle convention aboutissent avant le 30 juin. Un projet de loi sera ensuite déposé, soit pour consacrer les avancées de la négociation, soit, le cas échéant, pour s'y substituer. »
Monsieur le ministre, vous vous êtes emparé du dossier et, grâce à votre détermination, vous avez permis que les négociations entre banquiers, assureurs, associations de malades et de personnes handicapées soient rapidement menées à bien, associations dont je veux aussi saluer le travail.
Le deuxième objectif du projet de loi est de nous permettre de passer de la convention Belorgey, qui avait fait le pari de la confiance, à la convention AERAS, qui est le pari de la réussite.
Les améliorations de la convention se font dans six directions.
Première direction : assurer une meilleure information.
Je me suis rendue la semaine dernière, à l'improviste, dans plusieurs organismes bancaires à Paris et j'ai pu constater que les guichetiers n'avaient pas connaissance de la convention AERAS, mais les responsables de certaines banques m'ont rappelée ; l'un d'eux m'a ainsi annoncé que, dès cette semaine, les 500 ou 600 personnes chargées des prêts immobiliers seraient réunies afin que l'ensemble du réseau soit informé de cette nouvelle convention.
Nous connaissons votre engagement en la matière, monsieur le ministre, et je crois que les uns et les autres ont à coeur de faire connaître ce dispositif et de développer l'information en amont.
Deuxième direction : un plus grand respect de la confidentialité des données médicales, notamment par les établissements bancaires.
M. Christian Cambon. Très bien !
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Troisième direction : la réduction des délais de traitement des demandes d'emprunt et la possibilité d'instruire en amont des demandes d'assurance.
Quatrième direction : le développement de garanties alternatives, en particulier la délégation d'assurance en lieu et place de l'assurance de groupe.
Cinquième direction : la mise en place d'un mécanisme pérenne d'évaluation de la convention.
Sixième direction : un renforcement de la connaissance des pathologies.
À cet effet, une commission des études et des recherches disposant de moyens propres doit être capable d'obtenir l'appui d'équipes de recherche ainsi que l'accès à l'ensemble des données scientifiques pertinentes.
Je sais, monsieur le ministre, que vous avez progressé dans la voie de l'installation du comité de suivi et de propositions, qui, je l'espère, ne sera pas présidé par un médecin lié aux assurances, comme c'était le cas du précédent comité.
M. Jean-Pierre Michel. Très bien !
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Les innovations de la convention AERAS interviennent dans quatre domaines : l'intégration du risque invalidité dans le champ de la convention ; le relèvement des seuils ; la création d'un mécanisme de mutualisation ; enfin, la fixation à quatre mois de la durée de validité d'une proposition d'assurance afin de permettre le règlement par anticipation de cette question et la motivation par les établissements de crédit des refus de prêt ayant pour origine un problème d'assurabilité.
Notre responsabilité en tant que législateur est de faire en sorte que ce pari de la confiance devienne celui de la réussite. Vous avez, monsieur le ministre, choisi la voie conventionnelle et notre commission des affaires sociales ne proposera pas de modifications au texte. Je voudrais d'ailleurs saluer le consensus qui s'est dégagé au sein de la commission, à l'exception du groupe CRC, qui présentera quelques amendements, tant nous estimons donc que ce projet de loi constitue un progrès en la matière.
Nous pensons également, compte tenu de la voie conventionnelle qui a été retenue, que notre rôle de législateur consiste à créer les conditions pour que notre mission de contrôle puisse s'effectuer.
C'est la raison pour laquelle j'ai proposé à la commission des affaires sociales de déterminer trois échéances.
D'une part, avant la fin du mois de mars 2007, elle vérifiera la mise en place de l'ensemble des structures prévues par la convention : commission de suivi, commission des études et de la recherche, commission de médiation, ainsi que l'aboutissement des négociations sur la prise en compte du risque invalidité.
D'autre part, avant la fin de l'année 2007, notre commission fera le point avec les associations, les banques et les assurances sur la mise en place et le fonctionnement des nouvelles procédures. En outre, comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre, chaque élu local pourra lui-même se livrer à cet exercice dans son propre département.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est indispensable, en effet !
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Enfin, avant le 1er juillet 2008, date à laquelle une première évaluation doit être transmise au Parlement, notre commission effectuera un tour d'horizon avec l'ensemble des acteurs concernés afin de déterminer, notamment, si des mesures législatives plus contraignantes apparaissent nécessaires.
Notre rôle en tant que parlementaires est de faire pression sur les divers partenaires pour que la nouvelle convention soit réellement effective et atteigne pleinement ses objectifs. Le Parlement ne saurait décevoir les associations ainsi que le large public qui attend avec impatience une amélioration de l'accès au crédit.
Je tiens à vous remercier de votre mobilisation, monsieur le ministre. J'ajouterai que nous avons travaillé en toute confiance non seulement avec l'ensemble des associations, mais aussi avec votre cabinet, qui a bien compris l'importance de notre mission de contrôle afin que ce projet de loi devienne une réalité pour toutes les personnes concernées par ce dispositif. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui représente une avancée majeure pour les Français qui sont, ou ont été, atteints d'une maladie grave.
Le Président de la République a placé au coeur de son mandat le chantier de la lutte contre le cancer. Vous avez ainsi rappelé, monsieur le ministre, qu'il s'est engagé, dans un discours prononcé le 27 avril dernier, à consacrer un dispositif conventionnel en vue de lutter contre une discrimination dont on parlait peu, à savoir l'impossibilité pour des malades ou anciens malades d'acquérir par le crédit un bien immobilier, un bien professionnel ou un bien de consommation.
Comme l'a souligné le Président de la République, « la vie, avec ou après le cancer, c'est aussi pouvoir faire des projets et les mener à bien ».
Trop souvent, les personnes présentant ce que l'on appelle un « risque aggravé de santé » ont eu la surprise, après avoir subi l'épreuve déjà traumatisante de la maladie, de se voir refuser tout accès au crédit. On imagine combien ce refus peut être douloureusement ressenti : outre le blocage que cela représente pour réaliser bon nombre de projets, les conséquences psychologiques sont désastreuses !
S'il est, certes, difficile de déterminer le nombre exact de personnes concernées, nous savons qu'il est considérable, de l'ordre de 10 à 12 millions de personnes, selon les services du ministère.
Un premier texte, voté en 1991, a tenté d'apporter des solutions en faveur des personnes séropositives, mais, il faut le dire, il fut un échec, son application n'ayant concerné qu'une cinquantaine de personnes.
Un dispositif plus ambitieux lui a succédé en 2001, avec la convention Belorgey, conclue entre des associations de malades, les représentants d'entreprises d'assurance et de crédit et les pouvoirs publics. Cette convention a marqué un réel progrès.
Comme l'a souligné notre rapporteur, elle a incontestablement eu le mérite d'ouvrir l'assurance emprunteurs à des publics jusque-là très largement ignorés des banquiers et des assureurs, avec des aménagements spécifiques : deuxième et troisième niveaux d'assurance, financement des risques les plus élevés par un pool d'assureurs et de réassureurs.
Toutefois, le bilan réalisé après cinq années d'application de cette convention a montré que le dispositif était perfectible.
Nombreux sont les anciens malades qui ont témoigné au sein d'associations du « parcours du combattant » auquel ils étaient confrontés - délais trop longs, surprimes élevées, déficit d'information.
La convention AERAS, qui vient d'entrer en vigueur et dont les grands principes auront force de loi grâce au présent projet de loi, apporte plusieurs améliorations significatives.
Le point primordial à mes yeux réside dans l'information sur l'existence même de la convention et son contenu. En effet, la convention Belorgey est restée trop peu connue pour être réellement invoquée par les millions de personnes susceptibles d'en bénéficier.
Les signataires de la convention AERAS ont tous souligné la nécessité de diffuser cette information en amont et le plus largement possible auprès du public concerné.
Ainsi, le projet de loi prévoit que les banques mentionneront systématiquement, sur les simulations de prêts, l'existence du dispositif et nommeront des référents dans les agences ; pour ce faire, une formation appropriée de ces personnels me paraît nécessaire.
Il est prévu que l'État permette l'information des malades. Il a déjà ouvert un site Internet. Je souhaiterais savoir si vous envisagez d'autres mesures que la création de ce site afin d'assurer une diffusion de l'information auprès de tous les Français.
Le champ d'application de la convention a été sensiblement élargi. C'est ainsi que les différents seuils d'âge, de durée et de montant, qu'il s'agisse du prêt immobilier ou du prêt à la consommation, sont beaucoup moins restrictifs.
Lorsque la convention Belorgey s'appliquait, une enquête menée en 2005 par la Ligue contre le cancer a montré que seulement 18 % des personnes concernées répondaient aux critères de montant, d'âge et de durée de prêt. Or l'élargissement du champ d'application de la convention est effectivement réalisable et permettra un réel essor du dispositif.
Par ailleurs, le risque invalidité est désormais partiellement couvert. En effet, l'une des limites de la précédente convention était que son champ soit restreint à l'assurance décès, alors que les banques exigent de façon quasi systématique une garantie complémentaire en invalidité.
Un mécanisme de mutualisation des surprimes d'assurance doit permettre, pour les emprunteurs à revenus modestes, de limiter le coût additionnel résultant du risque aggravé pour l'assurance décès et invalidité des crédits professionnels et des crédits destinés à l'acquisition de la résidence principale.
Ce mécanisme présente l'avantage d'éviter la création d'un nouveau fonds de solidarité alimenté par des contributions publiques.
J'ajoute que, même si de plus en plus de personnes présentant un risque aggravé de santé pourront obtenir un crédit, les assureurs continueront de refuser de couvrir certains risques qu'ils jugeront trop élevés, ce qui est normal, à condition qu'il n'y ait pas d'abus et que les raisons du refus soient clairement mentionnées.
Le projet de loi marque un progrès, car les refus d'emprunt liés à des raisons de santé ou les restrictions de couverture d'assurance devront être motivés.
En outre, le demandeur ne sera plus seul, puisque le projet de loi prévoit la mise en place d'une véritable instance de médiation dont l'objet sera de trouver des solutions aux dossiers litigieux. La possibilité de saisir cette commission sera systématiquement indiquée aux personnes faisant l'objet d'un refus ou d'une restriction de couverture d'assurance, ce qui va dans le sens d'une plus grande transparence.
Il est une autre avancée que je souhaite souligner, je veux parler du meilleur respect de la confidentialité des dossiers.
Un code de bonne conduite, annexé à la convention, définit les principes de confidentialité du questionnaire médical à remplir par le candidat au crédit.
On le voit, au-delà de son contenu même, la convention AERAS traduit la volonté réciproque de faire avancer les choses et l'implication d'un certain nombre de professionnels des secteurs de la banque et de l'assurance en vue de proposer des solutions.
Cette forme d'engagement contractuel permettra d'adapter le mécanisme aux réalités du terrain et d'assurer ainsi le succès du projet.
L'approche législative qui vient aujourd'hui compléter ce dispositif permettra, en outre, de pallier l'éventuelle défaillance des acteurs. La convention pourra être étendue aux organismes non signataires. Cela permettra de s'assurer que le dispositif conventionnel ne sera pas mis en échec par le refus de signature de l'une ou l'autre des organisations professionnelles intéressées. Et si, par malheur, la convention venait à être dénoncée ou à ne pas être appliquée, le Gouvernement pourra agir par voie réglementaire, ce qui n'était pas possible auparavant.
Il a été reproché à la convention Belorgey un suivi insuffisant de son application. La convention AERAS, je me permets d'insister sur ce point, en tire les leçons.
C'est ainsi que la commission de suivi, structure essentielle pour faire vivre et améliorer le dispositif, verra ses pouvoirs renforcés et sa composition élargie. Elle interviendra tant pour veiller à la bonne application des dispositions de la convention que pour recueillir l'avis des associations de consommateurs et faire ainsi évoluer son contenu, notamment par la publication de rapports.
Le suivi implique également de tenir compte de l'évolution des avancées scientifiques. Une commission des études et recherches regroupera des représentants de l'INSERM, de l'Institut de veille sanitaire et d'autres organismes de recherche, ainsi que des représentants des banquiers et des assureurs.
Elle sera chargée de collecter des données sur la mortalité et la morbidité, données susceptibles d'intervenir dans le calcul des surprimes. L'espérance de vie d'une personne atteinte d'un cancer ou du sida, n'est pas la même qu'il y a quelques années, et cette espérance de vie est appelée à augmenter au fur et à mesure des progrès de la science.
Il convient donc que banquiers et assureurs en tirent les conséquences et actualisent en permanence leurs chiffres.
Je tiens à saluer l'initiative de notre rapporteur qui a proposé à notre commission d'assurer un suivi très régulier et détaillé de la convention, le fameux service après vote qui vous est cher, monsieur le ministre. Je me réjouis que nous soyons ainsi, aux côtés du Gouvernement, les garants de la bonne application des nouvelles mesures, tant il est vrai que la question essentielle est bien celle de l'application rapide de la convention.
Très bientôt, je n'en doute pas, ce sera pour dresser un bilan positif de la mise en oeuvre de la convention AERAS que nous serons à nouveau réunis.
Bien entendu, monsieur le ministre, vous aurez compris que le groupe UMP votera ce texte qui, je l'espère, sera adopté à l'unanimité par la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, parmi les discriminations, celles qui se fondent sur l'état de santé de la personne sont particulièrement intolérables quand elles empêchent d'accéder à un droit fondamental, celui de se loger ou d'acquérir certains biens et services.
C'est dans ce contexte qui faut aborder la question de l'accès au crédit des quelque dix à douze millions de personnes considérées comme présentant un risque de santé aggravé.
Dans notre société de consommation, l'acquisition d'une maison ou d'une voiture, qui peut conditionner l'obtention ou la préservation d'un emploi, oblige bien souvent à emprunter.
Or certaines personnes se trouvent durablement exclues de la possibilité de concevoir des projets et, finalement, de vivre avec - ou après - leur maladie ou leur handicap, parce qu'elles sont considérées comme présentant, pour les banques et assurances, un risque trop élevé.
Mes chers collègues, je me permets d'insister sur l'adverbe « durablement » : trop souvent encore, une personne atteinte de cancer, que les médecins ont déclaré guérie, se voit opposer, vingt ans plus tard, son état de santé. C'est également vrai de personnes dont le handicap est stabilisé et qui ne souffrent pas de pathologies mais qui sont considérées par l'établissement de crédit comme présentant un risque non assurable ou imposant des surprimes telles qu'elles rendent irréalisable le projet d'achat envisagé.
Ainsi, neuf mille personnes se sont vu dénier un crédit immobilier, l'assureur refusant, souvent sans motiver sa décision, de garantir le prêt. On estime que près de 25 % des dossiers d'emprunt sont rejetés pour risque aggravé de santé.
On s'en souvient, la question s'est d'abord posée pour les personnes séropositives, systématiquement empêchées de contracter un emprunt. Il faut rendre hommage à Jean-Michel Belorgey, qui a oeuvré pour que les banques et les assurances acceptent d'entendre les associations de consommateurs et de patients afin de les prémunir contre des refus de prêt ou des surprimes abusives.
Toutefois, le bilan de l'application de la convention Belorgey de 2001 reste mitigé : non-prise en charge de l'invalidité, défaut d'information et manque d'opposabilité, grille d'analyse des pathologies désuète. Tels sont les principaux reproches qui ont été adressés à la convention.
De nombreuses personnes ont été incitées à dissimuler la réalité de leur état de santé, à leurs risques et périls puisque en cas de fraude avérée - quand bien même l'invalidité ou le décès n'est pas liée à la pathologie dissimulée -, le contrat est déclaré nul et les primes déjà versées ne sont pas remboursées.
La convention AERAS, signée en juillet 2006 et entrée en vigueur le 6 janvier dernier, permet sans nul doute d'importantes avancées, parmi lesquelles la prise en charge de l'invalidité, alors que la convention Belorgey ne concernait que l'assurance décès, le relèvement des seuils d'âge et de montant, un meilleur respect de l'obligation d'information et de confidentialité, des délais de traitement réduits, la motivation des refus d'assurance et une limitation des surprimes mises à la charge des personnes disposant de revenus modestes.
Néanmoins, monsieur le ministre, ces progrès n'auraient certainement pas été aussi importants si vous n'aviez voulu afficher votre volonté de donner une force contraignante à la convention AERAS. Le Gouvernement s'est ainsi engagé à déposer le présent projet de loi afin d'inscrire dans le code de la santé publique les principes directeurs de la convention.
Toutefois, je dois nuancer cette appréciation : le Gouvernement n'est pas allé au bout de sa logique, et c'est pourquoi j'ai déposé certains amendements.
Faute d'une inscription de l'obligation d'information dans le code de la consommation, l'engagement pris demeure pour le moins théorique, particulièrement à l'aune des pratiques antérieures. Le groupe communiste, républicain et citoyen ne peut donc se satisfaire de ce texte en l'état.
Nous avons choisi de déposer de nouveau certains amendements qui visent non pas, comme on a pu le lire, à limiter le champ de la liberté conventionnelle, mais à contraindre les partenaires à respecter leurs engagements.
De la même façon, il convient de mettre fin au système qui aboutit à intéresser directement les assureurs à la fraude. Mes chers collègues, nous vous proposons donc que les primes conservées en cas de déclaration de nullité du contrat d'assurance soient affectées à la prise en charge des surprimes des personnes disposant des revenus les plus modestes.
Alors que les progrès de la médecine prédictive vont conduire - et conduisent déjà ! - les assureurs à invoquer des risques hypothétiques, il convient d'être particulièrement vigilant : quand une soeur se voit opposer le cancer de son frère ou un enfant la maladie génétique de sa mère, l'eugénisme pointe dangereusement !
S'agissant des progrès de la médecine prédictive, je précise que les refus fondés sur des prédispositions génétiques, que j'ai évoqués, sont des pratiques abusives, qui sont contraires à la loi et constituent des discriminations sanctionnées par l'article 225-3 du code pénal. Or la rédaction que j'avais utilisée dans un premier temps pouvait laisser penser qu'il s'agissait de pratiques légales.
Enfin, alors que les risques de dérive doivent nous conduire à la plus grande vigilance, les outils du Gouvernement ne sont pas suffisants. Comme Mme le rapporteur l'a précisé, le projet de loi institue un dispositif de suivi et prévoit qu'un rapport sera transmis au Parlement et au Gouvernement le 1er juillet 2008, soit trois mois avant l'expiration de la convention.
C'est bien, mais c'est évidemment insuffisant ! Il vaut mieux nous prémunir contre un échec en amont, en rendant la convention immédiatement obligatoire, plutôt qu'en constater les carences dix-huit mois plus tard, d'autant qu'il a fallu l'engagement du Président de la République en personne pour que les partenaires se décident à renégocier la convention Belorgey !
Monsieur le ministre, vous avez exprimé votre optimisme s'agissant des pratiques des établissements bancaires et assurantiels. Je voudrais partager cette confiance...
M. Guy Fischer. ... mais il reste beaucoup à faire en la matière, vous êtes bien placé pour le savoir.
M. Charles Revet. Soyez un peu optimiste !
M. Guy Fischer. C'est pourquoi nous conditionnerons notre vote au sort qui sera réservé à nos amendements.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je sens pointer une abstention positive ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un projet de loi qui traite un sujet de grande importance : l'accès au crédit des personnes malades.
Il était temps !
Dans leur vie privée comme dans leur activité professionnelle, les personnes qui présentent un risque aggravé de santé rencontrent des difficultés particulièrement importantes sur notre territoire. Il est pratiquement impossible en France de contracter un prêt, surtout immobilier, sans signer un contrat d'assurance au profit de l'établissement de crédit prêteur.
Cette situation est imputable en grande partie à la « société assurancielle » dans laquelle nous vivons, qui rend l'emprunt quasiment indissociable de la souscription d'assurance, alors même qu'il n'existe en principe aucune obligation légale.
En 2004, neuf mille personnes malades ont vu leur demande d'emprunt rejetée. Il ne faut pas oublier de mentionner tous les malades qui n'ont pas osé faire leur demande, car ils ont estimé qu'ils n'y avaient pas droit, et qui sont animés d'un sentiment de culpabilité du fait de leur maladie.
Comment une personne peut-elle subvenir à ses besoins en termes de logement et de projet de vie si on ne lui donne pas la possibilité d'accéder à l'emprunt, qui constitue un passage obligé dans notre société ?
Dix à onze millions de personnes, soit entre 15 et 16 %, de nos concitoyens, se trouvent concernées par cette discrimination. Alors que leur quotidien est déjà altéré par la maladie et le handicap, elles ont légitimement droit à une vie normale et, pour commencer, à un traitement équitable.
Il est nécessaire de modifier les octrois pour ces personnes malades, et notre société doit s'adapter, car, selon notre collègue député Bernard Pousset, rapporteur de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, « le nombre de personnes concernées devrait s'accroître dans les années à venir » en raison du vieillissement de la population et des progrès de la science, « qui permettent de transformer des maladies autrefois mortelles en maladies chroniques, qu'il s'agisse du diabète, de l'hémophilie, de la mucoviscidose ou du sida ».
La nouvelle convention AERAS, signée en juillet 2006, pallie certains des défauts de la convention Belorgey. Nous ne pouvons donc que nous réjouir de cette avancée supplémentaire, qui permettra aux personnes malades ou en situation de handicap de mieux se réinsérer et d'envisager l'avenir sous un angle plus favorable.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré : « On n'imagine guère que des gens qui ont signé une convention n'aient pas la volonté de la respecter. »
Mme Patricia Schillinger. Pourtant, cela s'est vu par le passé, notamment à propos de la convention Belorgey, d'où l'existence de cette nouvelle convention, d'ailleurs.
Pour ma part, je reste sceptique. Je ne suis pas certaine que les banques et les assureurs appliqueront systématiquement ce texte. Aujourd'hui, monsieur le ministre, je crains que ce projet de loi ne se contente d'officialiser l'existence de la convention en l'intégrant dans le code de la santé publique.
Quelles sanctions seront prévues en cas de non-respect des engagements pris par l'un des signataires ? En l'absence de pénalités, la loi n'aura aucun impact réel !
En d'autres termes, comment pouvons-nous être certains que les dispositions prévues par la convention seront effectivement appliquées, compte tenu des obstacles rencontrés au cours des cinq dernières années ?
Monsieur le ministre, il n'y a plus de temps à perdre, il faut passer à l'application pratique !
Par ailleurs, il est également légitime, me semble-t-il, que tous nos concitoyens aient droit à l'information. Beaucoup d'entre eux restent dans l'ignorance et se voient dénier un prêt par une banque sans que ce refus soit motivé de quelque façon que ce soit. Ils sont tout simplement exclus sans avoir connaissance de leur droit !
Le droit à l'information est essentiel. Il faut qu'il soit mentionné dans les documents publicitaires et d'information.
Outre la communication, la formation joue également un rôle important. Il est nécessaire que la dimension humaine fasse partie de la formation du personnel des banques, des assurances et des mutuelles. Ces professionnels, qui sont chargés de fournir des renseignements et d'accorder des prêts ou des assurances, doivent être informés des droits des malades et des discriminations en matière de santé.
Il ne faudrait pas que des personnes non averties, pour des raisons simplistes, refusent purement et simplement des dossiers, sans connaître les droits des usagers. Au-delà de l'aspect purement financier, ces techniciens doivent porter un regard humaniste sur leurs clients ; la formation doit leur apporter cet enseignement. Il n'est pas normal, aujourd'hui, que des gens se voient refuser un prêt sous prétexte qu'ils souffrent de diabète ou qu'ils ont - ou ont eu dans le passé - un cancer.
Par ailleurs, nous pouvons nous demander ce qu'est un « risque aggravé de santé ». L'article 1er du projet de loi évoque cette notion mais il n'en donne pas de définition, et le reste du texte reste flou à cet égard. Or l'absence de définition légale ou réglementaire laisse aux assureurs et banquiers une entière liberté pour interpréter cette notion et donc pour prendre la décision d'accorder, ou non, un prêt ou une assurance.
Si le Gouvernement décide de prendre des mesures afin de faire véritablement appliquer la convention, il s'agira d'une avancée extrêmement importante pour les personnes malades, sur un plan pratique mais aussi psychologique. Mes chers collègues, imaginez l'état d'esprit d'une personne qui est considérée comme guérie par le milieu médical mais à qui l'on refuse un prêt du fait de son état de santé antérieur !
Si l'encadrement législatif de cette dernière convention paraît à la fois indispensable et capital, il peut sembler trop timide à certains égards, et l'information reste encore limitée. Or cela contribuerait à nuire à l'application d'une telle convention.
Cependant, ce texte permet de lutter contre les discriminations, et l'action menée par son biais est fondamentale.
Je me réjouis que la commission des affaires sociales se soit engagée à effectuer un contrôle régulier et étroit de l'application de la convention. Aussi le groupe socialiste accueille-t-il favorablement ce texte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi est très important et constitue une avancée réelle. La question de l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé est cruciale pour des millions de nos concitoyens.
Pour les malades et anciens malades rencontrant des difficultés à accéder au crédit, vous avez parlé, monsieur le ministre, de « double peine ». Hélas ! c'est bien de cela qu'il s'agit. Non seulement ces personnes souffrent dans leur chair de maux terribles, tels que le cancer, le sida ou le diabète, contre lesquels elles mènent une lutte de tous les jours, non seulement elles doivent se battre sur le terrain biologique, mais la société leur refuse en plus les moyens de construire une vie normale.
En effet, ne pas avoir accès à l'emprunt peut équivaloir à une mort sociale. Dans certains cas, l'aporie est la suivante : comment subvenir à ses besoins si l'on ne peut emprunter ? Alors qu'il n'est question que de droit au logement opposable, le problème de l'emprunt immobilier reste primordial pour ce public.
Par elle-même, la situation de ces personnes est inadmissible. Elle est d'autant plus intolérable que celles-ci ne sont pas isolées et ne forment pas un public marginal. Au contraire, les chiffres avancés sont effrayants : 10 millions à 11 millions de personnes seraient concernées par ces discriminations, parmi lesquelles 7 millions souffriraient d'une affection de longue durée.
Une telle situation heurte le principe essentiel d'égalité sur lequel est fondée notre République. Pour cette raison, le législateur devait agir. Mais, bien entendu, l'intervention de la puissance publique dans ce domaine est délicate.
Dans une économie libérale régie par la loi de l'offre et de la demande, nous savons bien que banques et assureurs sélectionnent leur clientèle. C'est la raison pour laquelle la loi du 12 juillet 1990 relative à la protection des personnes contre les discriminations en raison de leur état de santé ou de leur handicap ne s'applique pas aux sociétés d'assurance.
Mais, en tenant compte de cette exclusion législative, il fallait bien mettre en place des mécanismes d'encadrement de la sélection assurantielle et accorder aux publics discriminés des garanties d'accès au crédit. Face aux insuffisances de la loi, c'est d'abord naturellement vers la convention que se sont tournés professionnels et usagers.
Un premier pas a donc été franchi en 1991 : cela constituait une avancée, même si des carences subsistaient. Cette première convention ne concernait, en effet, que les personnes atteintes du VIH, le virus de l'immunodéficience humaine. Bien entendu, l'insuffisance de ce dispositif était criante. C'est pourquoi a été signée, le 19 septembre 2001, la convention dite « convention Belorgey », qui a représenté, il ne faut pas l'oublier, un progrès remarquable.
Ce n'est qu'après la conclusion de cette convention que le législateur est intervenu. Par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, il a d'abord introduit la convention dans le code de la santé publique. Par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, il a ensuite inclus dans le champ de la convention les personnes exposées à un risque aggravé de santé du fait de leur handicap.
Cependant, la convention Belorgey est à son tour apparue largement insuffisante. Un consensus s'est fait sur ce constat. Les chiffres parlent d'eux-mêmes, même s'ils sont incertains. Ce ne seraient pas moins de 24 % des personnes présentant un risque aggravé de santé qui se seraient heurtées à un refus de prêt immobilier depuis 2001.
Un tel résultat s'explique. La convention Belorgey présentait la première insuffisance grave de couvrir seulement le risque décès, et non le risque invalidité. Par ailleurs, les garanties de confidentialité qu'elle mettait en place se sont révélées défectueuses et les délais d'instruction des dossiers restaient trop longs pour les vendeurs de biens immobiliers. Enfin, l'importance des surprimes - autour de 300 % - empêchait nombre de personnes de mener l'opération envisagée à son terme, même lorsque leur dossier était retenu.
Dans ces conditions, la convention Belorgey devait être rénovée et élargie. Aujourd'hui, nous ne pouvons que nous féliciter de son remplacement par la convention du 6 juillet 2006 « S'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé », dite « convention AERAS ». Entrée en vigueur le 6 janvier dernier, non seulement celle-ci perfectionne les dispositifs de la convention Belorgey en termes d'accès à l'information, de respect de la confidentialité ou de réduction des délais, mais elle va également beaucoup plus loin que la précédente convention.
La convention AERAS améliore très substantiellement le mécanisme de l'accès à l'emprunt pour les personnes présentant un risque aggravé de santé.
Premièrement, elle intègre le risque invalidité dans le champ de la convention, qui, jusque-là, ne couvrait que le risque décès. En outre, la couverture assurantielle de ce risque est étendue au-delà de la perte totale et irréversible d'autonomie. Comme vous le rappeliez, monsieur le ministre, les personnes relevant de la troisième catégorie d'invalidité au sens de la sécurité sociale - impossibilité d'effectuer les actes de la vie quotidienne sans assistance d'une tierce personne - ainsi qu'environ un tiers des personnes relevant de la deuxième catégorie - impossibilité d'exercer une profession - sont désormais couverts. C'est fondamental.
Deuxièmement, les modalités de prêts couverts par la convention sont fortement assouplies. Les seuils en termes d'âge et de montant des prêts contractés sont substantiellement relevés.
Troisièmement, la convention AERAS crée un mécanisme de mutualisation. À nos yeux, c'est sans doute le point le plus important.
La mutualisation des primes d'assurance pour permettre un écrêtement des primes en faveur des personnes disposant de revenus modestes permet de corriger l'un des principaux dysfonctionnements du premier mécanisme conventionnel. Les publics qui en profiteront éviteront l'écueil de la surprime rendant financièrement non viable l'opération visée.
De plus, la nouvelle convention rend obligatoire le refus d'assurance et ouvre droit à une médiation.
Enfin, le présent projet de loi renforce encore le nouveau dispositif et lui confère une valeur législative : les nouvelles dispositions conventionnelles auront donc valeur de loi vis-à-vis de tous, et pas seulement vis-à-vis des parties à la convention.
Ce texte garantit également la couverture réglementaire de la question en cas de carence conventionnelle. Il élargit au pouvoir réglementaire le dispositif de sauvegarde de la convention. En cas d'enlisement du dispositif conventionnel, une solution réglementaire sera donc possible. Un décret pourra prendre les dispositions nécessaires en cas de dénonciation, de défaut de prorogation ou de non-renouvellement de la convention.
Pourtant, si la convention et le projet de loi sont satisfaisants, de sérieux doutes subsistent, hélas ! quant à l'effectivité de leur application, ce qui suscite notre inquiétude.
Premièrement, la notion de « risque aggravé de santé » n'est pas définie. Son appréciation sera le fait des assureurs, sous la houlette d'une instance publique ad hoc. Mais le risque n'existe-t-il pas de voir se créer de nouvelles inégalités, tant dans la sélection des risques jugés « aggravés » que dans leur tarification ?
Deuxièmement, le nouveau dispositif de mutualisation laisse naturellement subsister un effet de seuil. Pour les personnes dont les revenus ne dépassent pas le plafond de la sécurité sociale, soit 30 000 euros par an, la prime d'assurance sera plafonnée à 1,5 point du taux effectif global. Mais les surprimes ne resteront-elles pas dissuasives pour les emprunteurs dont les revenus seront au-dessus de ce plafond ?
Ne serait-il pas opportun, pour éviter un tel écueil, de créer un fonds de garantie, ce qui permettrait aux personnes présentant un risque aggravé de santé de ne pas avoir à supporter les surprimes, lesquelles peuvent atteindre un niveau exorbitant ? Ce fonds pourrait être alimenté à la fois par les emprunteurs et par les établissements financiers, en particulier par les banques les moins vertueuses, à savoir celles qui pratiquent des taux démesurés.
Enfin, troisièmement, la convention et la loi demeurent muettes sur la question de la sanction du dispositif mis en place. Quelles sanctions se verront appliquer ceux qui ne respectent pas la convention ?
C'est parce que ces incertitudes demeurent et qu'elles sont susceptibles de vider le texte de sa substance que le dispositif de contrôle parlementaire créé par la loi est particulièrement bienvenu. Pour rendre effectif et efficace un dispositif digne de ce nom d'aide à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé, nous ne pouvons faire l'économie d'un suivi réel ainsi que d'évaluations rigoureuses et régulières.
Monsieur le ministre, compte tenu des importants doutes qui subsistent, nous serons très attentifs à l'application de ce texte.
Ce projet de loi représente une avancée notable, et nous le voterons donc avec enthousiasme. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, de l'UMP et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous évoluons, même si nous pouvons le regretter, dans une société qui vit grâce au crédit et à l'assurance. C'est ainsi. Pour les personnes qui sont atteintes de maladie, notamment de maladie grave, et qui sont handicapées, ce recours est plus difficile que pour les autres. Une discrimination s'ajoute donc à une discrimination.
Le texte que nous examinons aujourd'hui est donc particulièrement bienvenu puisqu'il tend sinon à faire cesser, du moins à faire diminuer cette discrimination intolérable qui pesait sur des personnes lourdement handicapées du fait de leur maladie ou de leur état physique.
Ce projet de loi constitue une étape importante dans un processus qui évolue depuis une quinzaine d'années. En effet, cela a été rappelé à l'instant, une première convention, signée en 1991, concernait uniquement les personnes séropositives et ne s'appliquait qu'aux prêts immobiliers ou professionnels. En 2001, la convention Belorgey en a élargi le champ d'application et y a apporté des améliorations, bien qu'elle ne fût pas dépourvue d'insuffisances qui ont déjà été relevées.
Je me limiterai ici à souligner l'esprit qui nous anime aujourd'hui et à expliquer pourquoi le groupe socialiste votera ce texte. Tout d'abord, celui-ci constitue, je le répète, une étape importante. Nous considérons donc qu'il doit être adopté le plus rapidement possible pour être promulgué avant la fin de cette législature. Certes, les deux assemblées auraient pu encore procéder à une lecture, afin d'améliorer le dispositif. Mais les personnes concernées attendent, et il faut donc que ce texte entre en vigueur le plus vite possible.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Jean-Pierre Michel. En outre, nous avons remarqué avec plaisir que l'Assemblée nationale a adopté un certain nombre d'amendements importants du groupe socialiste, lesquels figurent donc aujourd'hui dans le projet de loi qui nous est soumis.
Ensuite, nous voulons faire confiance aux acteurs, notamment aux entreprises bancaires et aux établissements de crédit. La notion d'entreprise citoyenne est très largement utilisée, de façon dévoyée il est vrai. Souhaitons que ces entreprises-là se comportent comme des citoyens à part entière et qu'elles fassent montre d'une sollicitude plus importante que par le passé à l'égard de nos concitoyens frappés par la vie.
Certes, il serait possible d'assortir cette convention de sanctions. Certains le proposeront tout à l'heure, mais nous nous y opposerons.
Personnellement, bien qu'ayant été magistrat, et uniquement pénaliste, dans une vie antérieure, je ne suis pas favorable à la multiplication des sanctions dans les textes pénaux, c'est-à-dire ce que l'on appelle le droit pénal spécial.
D'abord, une telle attitude banalise totalement la sanction pénale. Ensuite, il faut réserver celle-ci pour une étape ultérieure, lorsqu'ont échoué tous les processus de conciliation et de rencontre. Si nous nous apercevons que la convention que nous votons aujourd'hui n'est pas appliquée, il sera toujours temps pour le Parlement d'assortir d'un certain nombre de sanctions les dispositions que nous votons aujourd'hui. En l'état, cela ne me semble pas nécessaire.
En revanche, nous serons très vigilants et très attentifs à l'application de cette convention, notamment à la mise en place de la commission des études et des recherches. C'était l'une des carences de l'application de la convention Belorgey.
Pour que cette nouvelle convention entre rapidement en vigueur, elle doit être dotée de moyens efficaces. Ainsi, elle permettra aux malades de bénéficier des progrès de la médecine, donc de bénéficier de facilités élargies d'accès à l'assurance et au crédit, dans tous les domaines de la vie sociale.
Nous avons été particulièrement heureux que notre excellent rapporteur, Mme Marie-Thérèse Hermange, qui s'est beaucoup impliquée dans ce dossier, comme dans d'autres d'ailleurs, et avec laquelle j'ai certaines affinités, contrairement à ce que d'aucuns pourraient penser (Sourires.), ait proposé à la commission des affaires sociales d'opérer un suivi de l'application de la convention. De telles pratiques justifient à mon avis l'existence du Sénat.
En des périodes un peu incertaines pour notre institution,...
M. Charles Revet. Pour certaines personnes...
M. Jean-Pierre Michel. ... il faut insister sur les points qui constituent l'originalité de la Haute Assemblée par rapport à l'Assemblée nationale : la durée plus longue du mandat des sénateurs, une stabilité plus grande parmi les membres de la Haute Assemblée, des débats sans doute moins politiciens, secondaires ou superflus qu'à l'Assemblée nationale, qui se situe en première ligne pour de telles discussions, nous permettent de procéder - je le vérifie en commission des affaires sociales - à un suivi des textes que nous votons. Ce point me paraît particulièrement intéressant et important. En la matière, nous sommes prêts à participer à ce suivi aux côtés de Mme Hermange.
Telles sont les raisons pour lesquelles les membres du groupe socialiste voteront en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous aurons l'occasion de revenir un peu plus en détail sur certains points lors de l'examen des articles et des quelques amendements qui ont été déposés sur ce projet de loi.
Quoi qu'il en soit, j'ai bien noté la convergence de vues quasi unanime qui se dégage sur ce texte.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai bien compris que cette position de départ crée une exigence supplémentaire. J'ai quelque peu l'habitude des débats parlementaires, et j'apprécie ces derniers, mais je sais qu'une telle configuration n'est pas forcément courante, ce que l'on peut d'ailleurs regretter.
Il ressort des remarques formulées par les uns et les autres que ces derniers ont, en quelque sorte, fait le pari de la confiance, qui implique une exigence renforcée, dont j'ai bien conscience.
Les points qui ont été évoqués par les différents intervenants font ressortir un certain enjeu, qui dépasse de beaucoup les clivages traditionnels politiques, parfois un peu décalés. Aujourd'hui, nous examinons un sujet qui dépasse normalement le rôle traditionnel d'une assemblée, tel qu'il est conçu dans un hémicycle, à savoir le suivi de l'application et de l'évaluation du dispositif.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Exactement !
M. Xavier Bertrand, ministre. Il ressort, en effet, de notre responsabilité non seulement de présenter et d'adopter un texte, mais aussi de voir concrètement comment il s'applique sur l'ensemble du territoire.
Il s'agit d'un vaste enjeu, d'une exigence peut-être nouvelle pour certains acteurs politiques, mais extrêmement importante pour nos concitoyens, qui la formulent très fréquemment.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tenais, alors que nous allons maintenant procéder à l'examen des articles, à vous remercier de votre prise de position. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon tour, je souhaite m'associer aux félicitations et remerciements exprimés par M. le ministre, en particulier, à l'égard de Mme le rapporteur. Les propositions qui nous sont présentées sont sages.
Je m'associe également aux propos tenus par Jean-Pierre Michel. Le temps n'est pas venu d'assortir toutes les dispositions que nous allons examiner de sanctions inutiles pour l'instant. Mieux vaut essayer de convaincre.
Je tiens également à rendre hommage à M. le ministre, nommé ministre de l'année, qui est très attaché aux questions d'assurance et de protection.
Tout à l'heure, à la tribune, par défi en quelque sorte, il a fait appel à l'imagination de la commission des affaires sociales pour essayer de trouver un autre nom à la convention AERAS. Cette dernière existant, il n'est pas possible de la dénommer autrement. Cependant, monsieur le ministre, je vous propose d'appeler le texte qui résultera de nos travaux « loi BERTRAND » : Bien Emprunter avec un Risque Très Réel et s'Assurer Normalement Désormais ! (Sourires. - Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, de l'UMP et du groupe socialiste.)
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.