Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport (ensemble deux annexes), adoptée à Paris le 19 octobre 2005, dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

M. le président. J'observe que ce texte a également été adopté à l'unanimité des présents.

Belle matinée où tous les textes ont été adoptés à l'unanimité. Monsieur le ministre, vous devriez venir plus souvent. (Sourires.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport
 

7

candidatures à des COMMISSIONs MIXTEs PARITAIREs

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des lois m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique et du projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

Cette liste a été affichée conformément à l'article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.

8

nomination d'un membre d'un ORGANISME extraPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame Mme Christiane Kammermann membre de la commission permanente pour l'emploi et la formation professionnelle des Français de l'étranger.

9

Communication relative à des questions orales

M. le président. J'informe le Sénat que pourraient être inscrites à l'ordre du jour de la séance du mardi 6 février 2007 les questions orales suivantes :

- n° 1227 de Mme Alima Boumediene-Thiery,

- n° 1234 de Mme Jacqueline Alquier,

- n° 1239 de Mme Claire-Lise Campion,

- et n° 1240 de Mme Adeline Gousseau.

Il n'y a pas d'opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

10

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente. Je serais heureux que les uns et les autres respectent le temps de parole imparti.

situation du liban

M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Robert Del Picchia. Madame la ministre déléguée, cette question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères, mais je suis très heureux de vous la poser.

La conférence des donateurs pour le Liban, qui se tient en ce moment même à Paris, semble être la dernière chance offerte à ce pays pour surmonter la crise financière qui le frappe.

Le Liban est confronté à une crise non seulement politique - nous allons y revenir -, mais aussi économique et financière.

La dette publique était de 2,3 milliards d'euros en 1992. Elle n'a cessé de croître et elle s'élève aujourd'hui à plus de 40 milliards de dollars.

Beyrouth doit rembourser plus de 5 milliards d'euros cette année et 7 milliards d'euros l'année prochaine.

La reprise de l'économie est retombée à cause des conflits. Celui de l'été dernier a coûté 2 milliards d'euros en pertes directes. Le pays court à la banqueroute.

Cette conférence de Paris, organisée sur l'initiative du Président de la République, est donc une bouée de sauvetage. Pourtant, à la veille de cette conférence, l'opposition libanaise a lancé un appel à la grève, bloqué les principaux axes routiers, et des affrontements violents ont fait trois morts et plus de 140 blessés ! À l'instant, des bagarres ont éclaté à l'université arabe de Beyrouth et la police est intervenue.

Les compagnies d'aviation ont interrompu leurs vols, des centaines de personnes ont été bloquées, les magasins, les écoles et les entreprises sont restés fermés.

Bref, on a retrouvé le Liban des mauvais jours !

Les mouvements chiites Hezbollah et Amal, mais aussi une partie de la communauté chrétienne divisée, exigent la démission du gouvernement de Fouad Siniora. Ce dernier réaffirme ne pas se laisser intimider. L'opposition veut des élections anticipées.

Se gardant d'intervenir dans la politique du Liban, le Président de la République craignait que ces manifestations ne découragent les donateurs qui veulent aider le Liban à survivre. Il a lancé un appel, et il a été entendu.

Mes chers collègues, le Président de la République vient d'annoncer que l'aide récoltée s'élève à 7,6 milliards de dollars, soit 5,8 milliards d'euros.

Madame la ministre déléguée, cette conférence, qui est placée sous le signe de la solidarité et de l'espoir, est donc très perturbée par le contexte politique et par la situation sur le terrain.

Malgré tout ce qui se passe, l'aide est au rendez-vous : la France et l'Union européenne sont intervenues.

Madame la ministre déléguée, comment la diplomatie française considère-t-elle cette situation et comment la France envisage-t-elle son action en faveur d'un pays qui, je le rappelle, mes chers collègues, est très proche de nous et dans lequel résident un grand nombre de nos compatriotes ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, le Liban, pays très cher à la France, traverse en effet une période de grande instabilité et de crise profonde.

Le conflit de l'été dernier a causé des dégâts massifs sur la plupart des infrastructures et a aggravé la situation économique et financière du pays.

De plus, depuis le mois de novembre dernier, le gouvernement de Fouad Siniora doit faire face à une crise politique.

Dans ce contexte, le gouvernement libanais a élaboré un programme de réformes économiques sur cinq ans, programme ambitieux et crédible qui exige le soutien de la communauté internationale.

Pour apporter un soutien concret à la reconstruction du Liban, le Président de la République a invité à Paris les représentants d'une quarantaine d'États et d'institutions financières, régionales et internationales.

Nous ne ménageons évidemment aucun effort, puisque, dans ce cadre, la France, comme l'a annoncé le Président de la République, mobilisera 500 millions d'euros sous forme de prêts à des conditions très avantageuses.

Au-delà, nous souhaitons voir se consolider les avancées de ces derniers mois, que je rappelle : retrait des troupes syriennes, organisation d'élections libres, constitution d'un gouvernement démocratique, adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies de la résolution 1701 sur l'initiative de la France, qui a permis la cessation des hostilités.

Sur l'initiative du Président de la République et sous son impulsion - nous connaissons tous son attachement profond pour le Liban et son implication personnelle auprès de tous les Libanais -, les amis du Liban se réunissent aujourd'hui et tentent d'apporter au gouvernement libanais un soutien pour le retour de la confiance et de la croissance économique.

Nous espérons tous que les contributions seront à la hauteur des enjeux de la reconstruction économique et politique du Liban. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, à la mi-journée, plus de 5 milliards d'euros étaient déjà mobilisés. Au-delà, bien sûr, de la reconstruction du Liban, c'est toute la stabilité de la région qui est en jeu.

Nous voulons croire que l'esprit de dialogue l'emportera, car, au Liban comme ailleurs, rien ne peut se régler dans la violence. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

logement social

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Le 22 janvier dernier disparaissait l'abbé Pierre.

Sa première construction, la maison du Pont, a été réalisée en 1950 dans ma commune, Neuilly-sur-Marne, en Seine-Saint-Denis.

Pour loger les sans-abri, l'abbé Pierre défiait alors souvent la loi en se passant de permis de construire.

Aujourd'hui, certains maires défient la loi en ne l'appliquant pas, mais cette fois pour ne pas construire de logements sociaux ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Plusieurs sénateurs de l'UMP. Récupération !

M. Jacques Mahéas. Vous nous proposez d'instituer le droit au logement opposable. C'est un point positif.

M. Alain Gournac. Ah ! Tout de même !

M. Jacques Mahéas. Mais, d'après l'idée que vous en avez, le préfet n'aura pas le choix : il devra puiser dans son contingent de logements sociaux, c'est-à-dire ajouter de la pauvreté dans des villes où l'équilibre est souvent fragile.

On touche donc là du doigt les limites de votre conception de la mixité sociale. Cette loi risque de n'être qu'une occasion de jeter de la poudre aux yeux !

Le vrai problème, c'est le manque criant de logements sociaux. Or il suffit d'appliquer la loi, et non de tâcher de l'abroger ou de la détourner.

L'abbé Pierre lui-même, en janvier 2006, dénonçait la volonté de certains élus de droite (Vives protestations sur les travées de l'UMP.) de remettre en cause l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, article qui prévoit 20 % de logements sociaux dans les communes.

M. Charles Gautier. C'est vrai !

M. Jacques Mahéas. Il est vrai que le sujet gêne plus à droite qu'à gauche !

M. Jacques Mahéas. Ainsi, Neuilly-sur-Seine, ville de Nicolas Sarkozy, détient un triste record avec 2,6 % seulement de logements sociaux. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) À titre de comparaison, Neuilly-sur-Marne en compte 46 % !

M. Jacques Mahéas. Comment croire le ministre de l'intérieur quand il affirme qu'en deux ans il résoudra le problème des personnes sans domicile fixe ? Il les mettra chez les autres, sans doute !

M. Charles Revet. Scandaleux !

M. Jacques Mahéas. Et ne m'opposez pas l'argument de l'absence de terrains constructibles. L'Indicateur Bertrand, que j'ai ici (M. Jacques Mahéas brandit la revue.), en trouve à foison ! Les maires de droite, principalement, seraient-ils moins doués pour dénicher ces terrains que les promoteurs privés ?

M. Jacques Mahéas. Quant aux constructions réalisées, ne brandissez pas non plus des chiffres prétendument inégalés. Dans bien des cas, il s'agit d'opérations de démolition-reconstruction qui déplacent les populations en difficulté d'une zone urbaine sensible à une autre.

M. Alain Gournac. La question !

Mme Christiane Hummel. Oui, la question !

M. Jacques Mahéas. Nous l'avons démontré : en 2006, vous avez construit moins de logements très sociaux qu'en 2000 !

Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, il est tout à fait scandaleux que certaines communes n'aient strictement rien entrepris pour rattraper leur retard en matière de logements sociaux, ...

M. Alain Gournac. C'est long, monsieur le président !

M. Jacques Mahéas. ...et qu'elles préfèrent l'amende à la solidarité. Arrêtons de verser des larmes de crocodile !

M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Jacques Mahéas. Je constate que les élus de droite sont vraiment gênés !

M. le président. Non, vous avez simplement épuisé votre temps de parole, monsieur Mahéas !

M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour assurer une véritable mixité sociale, condition nécessaire à l'instauration d'un droit au logement opposable ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur de la Seine-Saint-Denis, je pensais très sincèrement que vous alliez vous féliciter de la signature ce matin du contrat territorial de rénovation urbaine entre Plaine Commune, le département de Seine-Saint-Denis et l'État. (M. Jacques Mahéas proteste.)

M. Jean-Louis Borloo, ministre. C'est un programme de 4,2 milliards d'euros, sur les 35 milliards d'euros qui sont destinés, au titre du programme de rénovation urbaine, à transformer l'habitat, malheureusement assez indigne, dans un certain nombre de nos quartiers !

M. David Assouline. Pas à Neuilly-sur-Seine !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dites-nous surtout ce que vous allez faire !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Quoi qu'il en soit, monsieur le sénateur, vous n'avez pas l'air d'être informé de la signature de ce contrat.

M. Alain Gournac. Ils ont oublié ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Charles Revet. Ils n'étaient pas au courant !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. En matière de logement, monsieur Mahéas, permettez-moi de vous dire franchement ce que je pense.

Monsieur le sénateur, de 1981, année où François Mitterrand a été élu Président de la République, à 2002, année du départ de M. Jospin, ...

M. David Assouline. Remontez plus loin encore !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...soit sur plus de vingt ans, la gauche a en moyenne construit deux fois moins de logements sociaux que nous n'en construisons cette année ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les logements sociaux ? Vous en avez à vous seul supprimé plus que vous n'en avez construit !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Vous n'avez d'ailleurs pas plus construit de logements en général, puisque la France a enregistré en moyenne 270 000 permis de construire quand, dans la même période, nos amis Espagnols en comptaient 650 000 !

M. Guy Fischer. En Espagne, c'est de la spéculation !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parlons-en, du modèle espagnol ! Ce sont des fonds de retraite : voulez-vous ruiner les petits retraités ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Avec la gauche au pouvoir, nous avons connu vingt ans de crise du logement !

M. Jacques Mahéas. Avec les municipalités de droite !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Monsieur Mahéas, j'en suis navré, mais je dois vous le dire, quand on a soutenu un gouvernement qui a à son palmarès l'année la plus noire depuis la guerre en matière de logements sociaux et qui, en plus, a raclé les fonds de tiroir du « 1 % logement » géré par les partenaires sociaux pour le logement social, on ne donne pas de leçons !

J'espère très franchement, alors que nous avons triplé le nombre des logements sociaux, que, dans les semaines à venir, sur le projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, vous essaierez, comme nous, d'avoir un débat républicain et de penser à l'avenir ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

les aides aux entreprises

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.

Monsieur le ministre délégué, les aides publiques aux entreprises ont fait, au cours de ces derniers mois, l'objet d'une littérature aussi abondante qu'inspirée.

Ainsi, l'an passé, le rapport du Conseil d'orientation pour l'emploi constatait déjà l'absence de gouvernance d'ensemble et confirmait par ses chiffres et ses analyses ce que les destinataires des dispositifs pouvaient déjà constater par eux-mêmes : faiblesse des évaluations, opacité, technicité, poids de la procédure...

À titre d'exemple, je mentionnerai toute la difficulté pour une entreprise, aujourd'hui, de prouver qu'elle remplit bien les critères d'éligibilité à un statut comme celui de « jeune entreprise innovante ».

La presse d'hier a rendu compte de l'étude réalisée à la demande du Premier ministre. Les diagnostics chiffrés sont à l'avenant : les aides publiques aux entreprises, toutes origines cumulées - État, collectivités locales, Union européenne - ont représenté, en 2005, 65 milliards d'euros.

M. Roland Muzeau. Ils n'ont en jamais assez !

M. Philippe Nogrix. L'État y consacre, entre dépenses budgétaires, coups de pouce fiscaux et allégements de charges, pas moins de 57 milliards d'euros.

Ce n'est pas le montant qui nous pose problème. Les aides aux entreprises constituent autant de leviers qui relaient les priorités publiques en matière d'emploi, d'innovation, d'exportation, d'aménagement du territoire. Ce qui pose problème et suscite nos interrogations, c'est la cohérence, la lisibilité, l'efficacité et l'effectivité de ces aides.

L'étude en question ne recense pas moins de 6 000 dispositifs, sans gouvernance globale ni concertation, éparpillés, éclatés, selon les ministères ou les territoires.

Les « redondances » ou même les « contradictions » pointées par le rapport, de ce point de vue, n'étonneront personne. Sont, par exemple, recensés 120 dispositifs d'aide à la création d'entreprise.

Dans les faits, les auteurs soulignent que 10 % seulement de celles qui se créent en bénéficient. Il ne faut pas s'étonner, alors, que 80 % du montant total des aides soient de fait affectés aux grandes entreprises. Or, s'il est bien un objet à assigner à l'aide publique en ce domaine, c'est d'encourager et de promouvoir l'essor des PME, qui donnent au capitalisme son meilleur visage : création d'emplois, irrigation du territoire, responsabilité sociale...

Après les structures, les rapports, les études, il faut à présent agir. L'occasion vous en sera donnée, dès la prochaine conférence nationale des finances publiques, en créant, au sein du conseil d'orientation des finances publiques, un comité permanent pour la régulation et l'évaluation des aides aux entreprises, comme le préconise cette étude.

Au-delà, bien au-delà, comment comptez-vous faire, monsieur le ministre délégué, pour rationaliser le système actuel et le rendre plus lisible pour ses destinataires ? Quelle doit être l'articulation des rôles et des tâches entre une politique nationale et l'ensemble des niveaux de décision existants ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Nogrix, le Premier ministre a souhaité, il y a quelques mois, savoir quel était le montant exact de l'aide publique apportée à l'emploi, à la recherche et à l'innovation ainsi qu'aux actions visant à renforcer l'attractivité du territoire.

M. Roland Muzeau. Et surtout la spéculation !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Sa préoccupation était notamment de connaître l'effet de ces aides publiques sur l'emploi mais également sur les petites et moyennes entreprises. Le Gouvernement a en effet le sentiment que, aujourd'hui, les petites et moyennes entreprises, qui créent l'essentiel de l'emploi dans notre pays, ne sont pas toujours les bénéficiaires de la dynamique suscitée par l'aide publique.

S'agissant de l'emploi, le Conseil d'orientation pour l'emploi a souligné, dans son rapport, que beaucoup d'exonérations sur les bas salaires sont les conséquences de la loi sur les 35 heures et qu'elles ont pour objet de préserver la compétitivité de nos entreprises, qu'elles résultent également de la convergence des SMIC, qui eux-mêmes sont la conséquence des 35 heures. Le Conseil d'orientation pour l'emploi conclut que, si ces aides venaient à disparaître, 800 000 emplois seraient alors menacés.

S'agissant du deuxième sujet majeur, celui de la compétitivité, de l'investissement dans la recherche et dans l'innovation, afin de relever le défi de la globalisation, ont été mis en place des pôles de compétitivité, l'Agence de l'innovation industrielle, le crédit d'impôt recherche, autant de dispositifs qui répondent à des nécessités et qui sont à la croisée de financements publics et de financements privés.

Le troisième sujet est l'attractivité du territoire, rural mais aussi urbain, dont tient compte la politique des zones franches urbaines, qui a notamment été évaluée dans le rapport de votre collègue sénateur Pierre André.

Telles sont les orientations qui guident notre politique.

Nous avons la volonté d'y voir clair, afin que, lors de la conférence des finances publiques qui se tiendra à la mi-février et qui sera ciblée naturellement sur l'emploi et sur l'innovation, l'accent puisse être mis sur l'aide aux petites et moyennes entreprises de ce pays. Voilà les objectifs du Gouvernement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

les suppressions d'emploi

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.

Monsieur le ministre délégué, lors du comité central d'entreprise du 18 janvier dernier, ...

M. Rémy Pointereau. Ça commence bien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Attendez la suite, vous allez moins rire !

M. Ivan Renar. ... les 157 ouvrières du site d'ECCE, de Poix-du-Nord, ont brutalement appris la fermeture prochaine de leur usine. LVMH, qui est le principal client de cette entreprise, vient en effet de prendre une décision qui signe la fin de ces emplois.

Bien qu'ayant renouvelé son contrat de licence de fabrication avec ECCE pour la période 2008-2012, LVMH a exigé de pouvoir librement choisir les sites de production. Les costumes de la marque Kenzo, jusqu'alors fabriqués à Poix-du-Nord, seront désormais produits en Europe de l'Est.

Cette délocalisation entraînera la perte de 95 % des commandes de l'usine de Poix-du-Nord. L'activité d'un site déjà touché par de nombreuses restructurations devrait ainsi cesser dans quelques mois. La mort annoncée de cette usine risque également d'entraîner la disparition du site logistique d'ECCE à Prouvy, qui emploie 100 salariés.

Mme Christiane Hummel. À qui la faute ?

M. Ivan Renar. Au-delà du drame humain - un de plus ! - la fermeture du site de Poix-du-Nord marquerait la disparition d'un savoir-faire unique en France. Ces femmes, ces « petites mains », comme on les appelle dans le métier, faisaient en effet vivre la dernière usine française de prêt-à-porter masculin haut de gamme.

Avec une moyenne d'âge de quarante-cinq ans environ, elles désespèrent de leur avenir et de celui de leur famille, d'autant que l'Avesnois atteint déjà des taux de chômage records.

Les élus locaux se sont fortement mobilisés aux côtés de ces ouvrières et ont alerté le Gouvernement de la menace qui pesait sur le site. À la fin du mois de décembre, MM. Breton et Loos ont annoncé la reconduction du contrat entre LVMH et ECCE, laissant entendre que la fabrication serait poursuivie à Poix-du-Nord, alors que le groupe LVMH ne vise qu'à externaliser la production des costumes Kenzo.

Monsieur le ministre délégué, il n'y a pas de fatalité. On peut faire autrement, ces ouvrières ne sont pas prédestinées à subir la loi d'airain d'un marché sans conscience ni miséricorde.

Face à la logique arrogante et glacée des actionnaires, quelles mesures énergiques le Gouvernement entend-il prendre pour défendre ces emplois ?

M. Ivan Renar. Il faudra bien, un jour, messieurs les ministres, interdire tout licenciement pour les entreprises réalisant ainsi des bénéfices.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. S'il suffisait d'interdire...

M. Ivan Renar. Il faudra bien un jour, messieurs les ministres, instaurer un prélèvement sur les importations afin de contrarier les tentations de dumping social et fiscal et d'aller vers une harmonisation progressive des législations européennes et mondiales.

M. Rémy Pointereau. C'est de l'idéologie !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous nous faites honte !

M. Ivan Renar. En attendant, et dans l'immédiat, face à ce gâchis économique, social et humain, quelles mesures comptez-vous prendre pour préserver l'emploi des 157 ouvrières de Poix-du-Nord ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Renar, vous nous annoncez la fermeture de l'usine de Poix-du-Nord ; cette information ne correspond pas à celle qui a été transmise par la secrétaire du comité d'établissement de l'usine au directeur départemental du travail et de l'emploi.

Comme vous l'avez dit, le 26 décembre dernier, Thierry Breton et François Loos informaient les élus du Nord que le groupe LVMH avait reconduit le contrat passé avec le groupe Kenzo et que, par conséquent, l'activité devait se poursuivre selon un plan de charge jusqu'en 2012.

Afin de faire suite à votre question, je vais moi-même demander confirmation au groupe LVMH de ce qui a été dit à Thierry Breton et à François Loos au mois de décembre dernier et je tiendrai informés à la fois les élus du département mais aussi les salariés de cette entreprise.

Je comprends naturellement leur angoisse comme je comprends celle que peuvent également éprouver les salariés d'entreprises textiles situées dans d'autres régions de notre pays et pour lesquels, jour après jour, nous essayons de négocier des conditions de poursuite d'activité, des plans de sauvegarde de l'emploi. À chaque fois, nous sommes confrontés à des cas humains, souvent de femmes qui n'ont pas d'autre formation. Je pense ici à ce que nous avons connu l'an dernier dans les Vosges, ...

M. Jean-Pierre Bel. Pas seulement dans les Vosges !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...ainsi que le président Poncelet le sait.

Face à cela, quelles sont les mesures engagées par le Gouvernement ?

Au début de 2006, nous avons signé, avec l'ensemble des partenaires sociaux et les huit fédérations professionnelles de l'Union des industries textiles, un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences portant sur la formation de 6 500 salariés.

Dans le département du Nord, portés par le FORTHAC, l'organe paritaire collecteur agréé pour la formation dans le textile, l'habillement, le cuir et les secteurs connexes, ont été mis en place des plans de formation permettant la préparation à des métiers nouveaux. Cette année, 500 salariés du textile vont en bénéficier - Jean-Louis Borloo y a veillé personnellement -, c'est-à-dire que la moitié des capacités seront concentrées sur cette région.

Nous agissons concrètement : les pôles de compétitivité sur les nouveaux textiles, l'Agence de l'innovation industrielle, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la formation des hommes, la mise en compétitivité des territoires en sont la preuve, ainsi que le crédit collection, dispositif fort important pour Kenzo, notamment, et qui n'existe pas dans un certain nombre d'autres pays de l'Union européenne.

En conclusion, m'adressant à l'ensemble de cette assemblée, je soulignerai que, quelle que soit notre appartenance politique, nous allons devoir relever un défi majeur dans les mois qui viennent : l'Union européenne va en effet avoir à renégocier la majorité de ses accords commerciaux dans les dix-huit mois à venir.

Nous en avons déjà débattu à Berlin et nous sommes un certain nombre à estimer que l'exigence d'un travail décent et la dimension sociale du travail doivent bien être intégrées dans les accords commerciaux que nous concluons avec des pays tiers. Cet aspect me paraît essentiel et il sera, dans tous les cas, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, porté par la France dans le débat qui aura lieu, le 22 février prochain, lors du conseil des ministres de l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments d'information que je suis en mesure de vous transmettre. Une attention particulière sera portée par le pôle de cohésion sociale aux salariés de Poix-du-Nord mais aussi à ceux d'Aubade, de Well et d'Arena, car, pour nous, il s'agit de se battre pour des hommes et des femmes et pour la préservation de l'activité économique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On croit rêver !