Sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
2. Travail, emploi et pouvoir d'achat. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Articles additionnels après l'article 4
Amendement n° 37 de la commission. - M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 36 de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Michel Charasse.
Amendement n° 56 rectifié de M. Gérard César. - MM. Joël Bourdin, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 57 rectifié de M. Gérard César. - MM. Joël Bourdin, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 122 rectifié de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, le rapporteur général, Mme la ministre, MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, Jean-Jacques Jégou, Philippe Adnot, Mme Catherine Procaccia, M. le président de la commission des finances ; Mme Nicole Bricq. - Rejet.
Amendement n° 78 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements identiques nos 204 de M. Jean-Jacques Jégou et 229 de M. Aymeri de Montesquiou. - Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Jacques Jégou, Georges Othily, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait des amendements nos 204 et 229 ; rejet de l'amendement no 78.
Adoption de l'article.
Articles additionnels avant l'article 5
Amendements nos 124 de Mme Nicole Bricq et 125 de M. Michel Charasse. - MM. François Marc, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait de l'amendement no 125 ; rejet de l'amendement no 124.
Mme Marie-France Beaufils, Bariza Khiari, M. François Marc.
Amendements identiques nos 79 de Mme Marie-France Beaufils et 126 de Mme Nicole Bricq ; amendement n° 80 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements identiques nos 81 rectifié de Mme Marie-France Beaufils, 128 de Mme Raymonde Le Texier et 205 de M. Michel Mercier ; amendements nos 38, 39 de la commission, 127 de M. François Marc, 206 de M. Michel Mercier et 239 de Mme Nicole Bricq. - Mmes Marie-France Beaufils, Nicole Bricq, Christiane Demontès, MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, François Marc, Denis Badré, Mmes la ministre, Bariza Khiari, M. Jacques Muller. - Retrait des amendements nos 127, 206 et 38 ; rejet des amendements nos 79, 126, 80 et, par scrutin public, des amendements nos 81 rectifié, 128 et 205 ; rejet de l'amendement no 239 ; adoption de l'amendement no 39.
M. Alain Vasselle.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 5
Amendement n° 145 rectifié bis de M. Charles Guené. - MM. Alain Vasselle, le rapporteur général, Mme la ministre, M. le président de la commission. - Retrait.
3. Candidature à une commission
Suspension et reprise de la séance
4. Dépôt d'un rapport du Gouvernement
5. Nomination d'un membre d'une commission
6. Travail, emploi et pouvoir d'achat. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Articles additionnels après l'article 5 (suite)
Amendements identiques nos 40 de la commission et 225 de M. Alain Lambert. - MM. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi ; MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Denis Badré, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Vera, Mme Nicole Bricq. - Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Amendements nos 265 et 266 de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait des deux amendements.
Amendement no 41 rectifié bis de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos 83 et 82 de Mme Marie-France Beaufils. - MM. Bernard Vera, le rapporteur général, Mme la ministre. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 240 rectifié de Mme Nicole Bricq. - Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le président de la commission, Mme la ministre, MM. Charles Josselin, Robert del Picchia. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 84 de Mme Marie-France Beaufils et 129 de Mme Nicole Bricq ; amendements nos 223 de M. Alain Lambert et 207 de M. Michel Mercier. - Mmes Marie-France Beaufils, Bariza Khiari, MM. Alain Lambert, Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre, M. Denis Badré. - Retrait de l'amendement no 223 ; rejet des amendements nos 84, 129 et, par scrutin public, de l'amendement no 207.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 5 bis
Amendements nos 109 et 113 de M. Thierry Repentin. - MM. Thierry Repentin, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait de l'amendement no 113 ; rejet de l'amendement no 109.
Article additionnel après l'article 5 ter
Amendement n° 42 rectifié de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
M. le président de la commission.
Suspension et reprise de la séance
Mmes Nicole Bricq, Marie-France Beaufils.
Amendement n° 85 de Mme Marie-France Beaufils. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 86 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Marie-France Beaufils, M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Rejet.
Amendement n° 215 de M. Denis Badré. - MM. Denis Badré, le rapporteur général. - Retrait.
Amendement n° 235 rectifié ter de M. Philippe Adnot et sous-amendement no 278 rectifié du Gouvernement. - M. Philippe Adnot, Mme la ministre, MM. le rapporteur général, le président de la commission, Mme Nicole Bricq, MM. Alain Vasselle, Yves Fréville, Yann Gaillard, Jean-Pierre Fourcade. - Adoption, par scrutin public, du sous-amendement no 278 rectifié ; adoption de l'amendement no 235 rectifié ter modifié.
Amendements nos 43 rectifié de la commission et 132 de Mme Nicole Bricq. - M. le rapporteur général, Mmes Nicole Bricq, la ministre, MM. le président de la commission, Denis Badré. - Adoption de l'amendement no 43 rectifié, l'amendement no 132 devenant sans objet.
Amendement n° 44 rectifié de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre, MM. le président de la commission, Alain Vasselle. - Adoption
Amendements nos 1 de M. Michel Mercier et 213 de M. Denis Badré. - MM. Denis Badré, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° 234 rectifié de M. Philippe Adnot. - MM. Philippe Adnot, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendements nos 264 rectifié et 263 de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Adoption des deux amendements.
Amendements nos 45 de la commission, 252 de M. Thierry Repentin et 99 de M. Georges Othily. - M. le rapporteur général, Mme Nicole Bricq, M. Georges Othily, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement no 45, les autres amendements devenant sans objet.
Amendements nos 25 rectifié bis de M. Michel Houel et 216 de Mme Jacqueline Gourault. - MM. Jacques Gautier, Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° 209 de M. Jean-Jacques Jégou. - MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 210 de M. Michel Mercier. - M. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 208 de M. Jean-Jacques Jégou. - M. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 46 rectifié de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Adoption.
Amendement n° 47 rectifié de la commission. - M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Adoption.
Amendements nos 211 de M. Michel Mercier et 257 de M. Thierry Repentin. - MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mmes la ministre, Nicole Bricq. - Retrait de l'amendement no 211 ; rejet de l'amendement no 257.
Amendement n° 48 de la commission. - M. le rapporteur général. - Retrait.
Amendements identiques nos 49 rectifié de la commission, 214 rectifié de M. Denis Badré et 247 rectifié ter de M. Paul Blanc. - MM. le rapporteur général, Jean-Jacques Jégou, Mme la ministre. - Adoption des trois amendements.
Amendement n° 260 de M. Denis Badré. - MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général. - Retrait.
Amendement n° 2 de M. Michel Mercier. - M. Jean-Jacques Jégou. - Retrait.
Amendements nos 3 de M. Michel Mercier, 196 rectifié bis de M. François-Noël Buffet et 130 de M. Gérard Collomb. - M. Jean-Jacques Jégou, Mmes Adeline Gousseau, Bariza Khiari, M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait des amendements nos 3 et 196 rectifié bis ; rejet de l'amendement no 130.
Amendements identiques nos 131 de M. Gérard Collomb et 212 de M. Michel Mercier. - Mme Bariza Khiari, MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait de l'amendement no 212 ; rejet de l'amendement no 131.
Amendement n° 251 de M. Thierry Repentin. - Rejet.
Amendement n° 230 rectifié de M. Georges Mouly. - MM. Georges Othily, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 249 de M. Thierry Repentin. - Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 100 rectifié de M. Georges Othily. - MM. Georges Othily, le rapporteur général, Mme la ministre, M. Yves Fréville. - Adoption.
Amendement n° 217 de M. Denis Badré. - MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Mme Marie-France Beaufils.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 6
Amendement n° 191 rectifié de M. Laurent Béteille. - Mme Adeline Gousseau, M. le rapporteur général, Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 50 de la commission. - M. le rapporteur général, Mmes la ministre, Marie-France Beaufils, M. Jean Desessard. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
MM. Bernard Vera, François Marc, Jean Desessard.
Amendements nos 87, 88 de Mme Marie-France Beaufils, 232 de M. Michel Charasse, 174 à 185, 187 à 189 de M. François Marc, 157 de M. Jean Desessard, 219, 218 de M. Michel Mercier, 262, 261 de la commission, 241 et 242 de M. Joël Bourdin. - MM. Bernard Vera, François Marc, Jean Desessard, Jean-Jacques Jégou, le rapporteur général, Joël Bourdin, Mme la ministre, M. le président de la commission. - Retrait des amendements nos 241 et 242 ; rejet des amendements nos 87, 88, 232, 185, 181, 157, 180, 179, 178, 219, 176, 177, 182, 175, 218, 188, 174, 189, 187, 183 et 184 ; adoption des amendements nos 262 et 261 rectifié.
MM. le rapporteur général, Bernard Vera, Jean Desessard, François Marc.
Adoption de l'article modifié.
M. le président, Mme la ministre, M. le rapporteur général.
Suspension et reprise de la séance
7. Candidatures à une commission mixte paritaire
8. Travail, emploi et pouvoir d'achat. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
Articles additionnels avant l'article 8
Amendement n° 95 rectifié de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. - Rejet.
Amendement n° 133 de M. Michel Charasse. - Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le haut commissaire. - Rejet.
Amendement n° 158 rectifié de M. Jean Desessard. - MM. Jean Desessard, le rapporteur général, le haut commissaire, Guy Fischer. - Rejet.
MM. Guy Fischer, Jean Desessard.
Amendements nos 93 de M. Guy Fischer, 17 de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis, et sous-amendement no 269 du Gouvernement ; amendement n° 194 rectifié ter de M. Bernard Seillier. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; le haut commissaire, Mme Marie-Thérèse Hermange, M. le rapporteur général, Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean Desessard, Jean-Pierre Fourcade. - Rejet de l'amendement n° 93 ; adoption du sous-amendement n° 269, de l'amendement n° 17 modifié et de l'amendement n° 194 rectifié ter.
Mme Bariza Khiari, MM. Jean Desessard, Guy Fischer.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 271 du Gouvernement. - MM. le haut commissaire, le rapporteur général. - Adoption.
Amendements nos 172 de M. Bernard Cazeau et 18 de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. - Mme Bariza Khiari, MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur général, le haut commissaire, Guy Fischer. - Rejet de l'amendement n° 172 ; adoption de l'amendement n° 18.
Amendement n° 19 rectifié de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. - Adoption.
Amendement no 270 du Gouvernement. - MM. le haut commissaire, le rapporteur général, Guy Fischer. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 90 de M. Guy Fischer, 272, 267, 273 du Gouvernement, 259 de M. Serge Dassault, 20, 21 de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis et 51 de la commission. - MM. Guy Fischer, le haut commissaire, le rapporteur pour avis, le rapporteur général. - Retrait de l'amendement n° 21 ; rejet de l'amendement n° 90 ; adoption des amendements nos 272, 20, 267, 51 et 273.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 52 de la commission et sous-amendement no 268 du Gouvernement ; amendement n° 22 (identique à l'amendement no 52) de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur général, le haut commissaire, le rapporteur pour avis. - Adoption du sous-amendement n° 268 et des amendements nos 52 et 22 modifiés
Amendement no 275 du Gouvernement. - MM. le haut commissaire, le rapporteur général. - Adoption.
Amendements nos 274 du Gouvernement et 173 de M. Bernard Cazeau. - M. le haut commissaire, Mme Bariza Khiari, MM. le rapporteur général, le rapporteur pour avis. - Adoption de l'amendement n° 274, l'amendement n° 173 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 134 rectifié de M. Michel Charasse et 23 rectifié de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. - Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur général, le haut commissaire, Guy Fischer. - Rejet de l'amendement n° 134 rectifié ; adoption de l'amendement n° 23 rectifié rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 12
Amendement n° 190 de M. Jean-Pierre Vial. - MM. Jean-Pierre Vial, le rapporteur général, le haut commissaire. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 110 rectifié de M. Thierry Repentin. - Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le haut commissaire. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 13
Amendement n° 142 rectifié de Mme Bernadette Dupont. - Mme Marie-Thérèse Hermange, MM. le rapporteur général, le haut commissaire. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos 91 de Mme Marie-France Beaufils et 101 de Mme Nicole Bricq. - M. Bernard Vera, Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le haut commissaire. - Rejet des deux amendements.
MM. le rapporteur général, Yves Pozzo di Borgo, Mme Marie-France Beaufils, M. Christian Cambon, Mme Nicole Bricq, M. Jean Desessard.
Adoption du projet de loi.
9. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
10. Transmission d'un projet de loi
11. Dépôt de propositions de loi
12. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Travail, emploi et pouvoir d'achat
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (n°s 390, 404, 406).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 37, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4.
Articles additionnels après l'article 4
M. le président. L'amendement n° 37, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- L'article 777 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les limites des tranches des tarifs prévus aux tableaux ci-dessus sont actualisées chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi à l'euro le plus proche. »
II. - L'article 779 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant des abattements du présent article est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi à l'euro le plus proche. »
III.- La perte de recettes résultant pour l'Etat des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet amendement a pour objet de prévoir l'actualisation automatique, en fonction de l'inflation, des tranches de barème et des abattements des droits de mutation à titre gratuit.
Je rappelle qu'une telle actualisation existe pour l'impôt sur le revenu et, depuis notre vote l'année dernière, pour l'impôt de solidarité sur la fortune.
Si nous n'adoptions pas cet amendement, seuls ces impôts ne feraient pas l'objet d'un barème indexé chaque année sur l'inflation.
Mme Nicole Bricq. Oh les pauvres !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement n'est pas spécialement favorable à cette mesure, ...
Mme Marie-France Beaufils. Heureusement !
Mme Christine Lagarde, ministre. ... considérant qu'un examen attentif des droits de succession a été réalisé et qu'un abattement raisonnable - étendu à l'ensemble des bénéficiaires en ligne directe - a été consenti.
Par ailleurs, nous aurons l'occasion d'évoquer le principe de l'indexation de manière générale lors de l'examen du texte que nous envisageons sur l'ensemble des prélèvements.
Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis de sagesse défavorable.
Mme Nicole Bricq. C'est raisonnable !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 37 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si vous vous en remettez à la sagesse du Sénat, madame le ministre, elle ne manquera pas de s'exprimer !
Je rappellerai simplement que, entre 1959 et aujourd'hui, le seuil applicable à l'imposition des droits en ligne directe entre époux, qui était de l'équivalent de 7 600 euros, est passé à 73 102 euros. Je ne donnerai que cet exemple. Ces chiffres n'ont jamais été ajustés en fonction de la dérive des prix. Le Parlement ne s'est jamais prononcé de nouveau sur cet abattement.
Il s'agit donc là de ce que j'appelle un prélèvement rampant. Or, pour des raisons de principe, la commission des finances est hostile aux prélèvements rampants.
Je maintiens donc mon amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4.
L'amendement n° 36, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Après l'article 778 bis du code général des impôts, il est inséré un article 778 ter ainsi rédigé :
« Art. 778 ter.- Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit par décès, en l'absence d'ascendants ou de descendants en ligne directe, et de conjoint survivant, la part nette taxable revenant aux héritiers parents ou non parents est soumise aux tarifs et abattements applicables aux frères et soeurs, sauf disposition plus favorable. »
II.- La perte de recettes résultant pour l'Etat du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à procéder à un ajustement que je qualifierai de mineur.
Nous voudrions qu'un geste soit fait pour les héritiers en ligne collatérale des défunts sans famille proche, sans ascendants, sans descendants, sans conjoint survivant.
Mme Nicole Bricq. Et pour les chiens et les chats, vous ne faites rien ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Soyez plus charitable, madame !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. M. le rapporteur général a très bien exposé les cas auxquels s'appliquerait cet amendement qu'il a qualifié de mineur.
Je me permettrai de faire appel à son sens de la rigueur, à laquelle il ne manquera pas à son tour de m'inviter lorsque nous examinerons le projet de loi de finances, car mes services - et je ne doute pas qu'ils aient fait un travail consciencieux -, ont évalué le coût de cette mesure à 736 millions d'euros.
Estimant important le coût de cette disposition, qui n'est pas fondamentale, je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le rapporteur général.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 36 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'avoue que cet argument me touche profondément ! (Sourires.)
Cet amendement vise à porter l'abattement en question de 1 500 euros à 15 000 euros. C'est beaucoup, c'est vrai, mais peu à la fois.
Que diriez-vous, madame le ministre, si nous faisions un geste et si nous portions le montant de cet abattement à 3 000 euros ? Ce serait peu de chose !
M. le président. J'ai l'impression d'assister au marchandage d'une vache dans la Sarthe ! (Rires.)
M. Guy Fischer. Nous, nous appelons cela du maquignonnage ! (Sourires.)
M. le président. Madame la ministre, êtes-vous dans ces conditions favorable à cet amendement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Non, monsieur le président, car je n'ai pas le chiffrage de cette mesure.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, maintenez-vous votre amendement ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le coût de cette mesure pourrait être évalué en appliquant la règle de trois.
Je dois dire - peut-être reviendrons-nous sur ce sujet tout à l'heure - que nous sommes en général frustrés par les chiffrages de l'administration. En effet, le chiffrage est toujours très élevé quand il s'agit d'une initiative du Parlement et, en revanche, toujours très modéré quand il s'agit d'une mesure émanant du Gouvernement !
La bonne solution - j'ai déjà eu l'occasion de le dire - serait peut-être que le chiffrage soit effectué sous le contrôle du Parlement. Cela pourrait être une façon de revaloriser son rôle.
Ayant marqué sa sollicitude pour ces familles, la commission espère qu'elle sera entendue - nous reviendrons à la charge ! -, mais, pour le moment, elle retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 36 est retiré.
Monsieur le rapporteur général, mes vingt ans d'expérience au sein de la commission des finances me font partager votre analyse sur les estimations de la direction de la législation fiscale. Il est vrai que, suivant l'origine de l'amendement, les chiffrages varient souvent !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci d'en témoigner !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. L'indexation du barème que nous avons votée est un début de réponse à cette question.
J'ajoute qu'il est de la responsabilité du Sénat de se donner ses propres moyens d'expertise et d'évaluation. Il nous appartiendra donc d'en tirer les conséquences.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà ! Il appartiendra aux questeurs de nous donner des crédits à cette fin !
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Je tiens à apporter une précision sur ce sujet.
En matière d'évaluation, les choses sont souvent très variables. Je me souviens que, lorsque j'étais à Bercy, il nous est souvent arrivé, comme à mes prédécesseurs, dont Jean Arthuis, et comme à mes successeurs, de faire des évaluations « à la louche », parce qu'il y a des domaines qui ne peuvent pratiquement pas être évalués.
Il faudrait donc que l'on arrive à se mettre d'accord sur des normes d'évaluation communes, même si ce n'est pas facile, parce que la matière humaine est souvent insaisissable.
M. le président. Vaste chantier !
L'amendement n° 56 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Bizet, Bourdin, Huré, Cornu et Pointereau et Mme Gousseau est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le deuxième alinéa de l'article 793 bis du code général des impôts, la somme : « 76 000 euros » est remplacée par la somme : « 150 000 euros ».
II. Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Joël Bourdin.
M. Joël Bourdin. L'abattement sur la valeur des biens ruraux transmis à titre gratuit et loués par bail à long terme est plafonné à 76 000 euros.
Dans un souci de cohérence avec le texte en discussion, nous proposons que cet abattement soit porté à 150 000 euros.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission estime que cette initiative est un peu éloignée du texte. Elle souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement sur cet amendement et ne doute pas qu'il le donnera avec toute la considération que méritent ses auteurs et l'idée qu'ils ont exprimée.
Toutefois, à mon sens, cet amendement a vocation à être retiré.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Les mesures dont nous discutons actuellement s'appliquent évidemment à l'ensemble du patrimoine et donc aux parts de groupements fonciers agricoles, les GFA, au même titre que tous les éléments du patrimoine en succession.
Les parts de GFA bénéficient elles-mêmes déjà d'un régime dérogatoire particulièrement favorable, avec une exonération jusqu'à un certain plafond, puis une réduction de 50 %. Il nous semble que, en l'état, les dispositions particulières au bénéfice des groupements fonciers agricoles sont déjà suffisantes.
C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Bourdin, l'amendement n° 56 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin. Après avoir consulté mes collègues, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 56 rectifié est retiré.
L'amendement n° 57 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Bizet, Bourdin, Huré, Cornu et Pointereau et Mme Gousseau, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 796 du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art.... - Les contribuables domiciliés fiscalement en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction des droits de mutation à titre gratuit qu'ils doivent acquitter en cas de souscription ou d'acquisition en numéraire de parts d'un groupement foncier agricole louant leurs biens par bail dans les conditions prévues par les articles L. 418-1 et suivants du code rural. L'acquisition ne peut concerner les parts de groupements détenues par un parent ou allié jusqu'au troisième degré inclus.
« En cas de souscription, le groupement foncier agricole doit, dans un délai de douze mois suivant celle-ci, procéder à l'acquisition d'immeubles pour un montant au moins égal à 90 % de la valeur de la souscription. Les biens acquis doivent être loués par bail, dans les conditions visées à l'alinéa précédent, dans un délai maximum de deux mois suivants leur acquisition. Lorsque plusieurs souscriptions sont réalisées dans une période de trois mois, la période de douze mois s'apprécie à compter de la dernière souscription et le coût minimum d'acquisition doit représenter au moins 90 % du total des souscriptions de la période considérée.
« La réduction des droits de mutation à titre gratuit est égale au prix d'acquisition ou de souscription. Ce prix est retenu dans la limite annuelle de 50 % du prix d'acquisition dans la limite de 15 000 € par contribuable.
« Lorsque tout ou partie des parts ayant donné lieu à réduction de droits de mutation à titre gratuit est cédé avant le 31 décembre de la neuvième année suivant celle de la souscription, il est pratiqué au titre de l'année de cession une reprise des réductions de droits de mutation obtenues, dans la limite du prix de cession. Ces dispositions ne s'appliquent pas en cas de licenciement, d'invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale ou du décès du contribuable.
« Un décret fixe les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant au contribuable et aux groupements fonciers agricoles. »
II. - La réduction prévue au I concerne les souscriptions ou acquisitions réalisées entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2009.
III. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Joël Bourdin.
M. Joël Bourdin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement intéressant sera largement satisfait par l'amendement n° 44 de la commission, dont je préconiserai le vote à l'article 6. Il peut donc être retiré.
M. le président. Monsieur Bourdin, l'amendement n° 57 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 57 rectifié est retiré.
L'amendement n° 122, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « lorsque la valeur de l'actif successoral est inférieure à 50 000 euros. Cette somme varie chaque année comme l'inflation. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Cette nuit, nous avons revu complètement le barème des droits de succession et les travaux du Sénat, conformément aux souhaits et aux propositions du Gouvernement, ont conduit, comme l'a souligné M. le rapporteur général hier, à dispenser désormais 95 % des successions de tout droit à payer, à l'exception...
M. Philippe Marini, rapporteur général. À l'exception de M. Dassault !
M. Michel Charasse. ... des frais de notaire. Il faudra bien expliquer aux intéressés que ce n'est pas parce qu'il n'y pas plus de droits de succession qu'il n'y a pas de frais de notaire. Or, souvent nos compatriotes mélangent tout, je dis cela en passant à Mme la ministre.
Donc, puisque nous avons refondu l'ensemble des barèmes, il m'a paru que le moment était venu de réexaminer une question qui a été très mal réglée dans le passé, qui n'a d'ailleurs même pas été réglée du tout, concernant la situation de l'allocation personnalisée d'autonomie à l'égard de l'obligation alimentaire.
En matière d'aide sociale, il y a dans pratiquement tous les cas obligation alimentaire et donc récupération sur succession, que ce soit l'aide sociale départementale « banale », comme l'aide médicale, ou d'autres formes d'aide sociale comme le revenu minimum d'insertion.
Mes chers collègues, lorsque le gouvernement de M. Rocard dont j'étais a fait voter le RMI, le législateur a inclus dans la texte la possibilité de récupération sur succession. Personne ne le sait ; pourtant cela existe et cela joue quelquefois. Or, en ce qui concerne l'APA - qui a succédé à la PSD, d'initiative sénatoriale, laquelle était récupérable - à la suite d'une mauvaise manoeuvre à l'Assemblée nationale qui n'a malheureusement pas pu être rattrapée ici, la récupération sur succession a sauté !
Avec la situation très favorable qui est faite désormais aux héritiers grâce aux dispositions votées hier soir, la nation peut tout de même demander aux familles de contribuer à l'entretien des personnes âgées en grande dépendance.
En tant que maire d'une commune de 2 700 habitants, je signe des demandes d'APA et je vois à qui cela profite. Il y a beaucoup d'enfants qui attendent la mort du futur défunt, si je puis dire, grand-père ou autre, pour passer à la caisse. En attendant, nous faisons payer des impôts locaux à des personnes qui n'auront jamais les moyens d'être propriétaires d'un logement et qui devront jusqu'à la fin de leur vie entretenir le voisin dont les futurs héritiers se désintéressent totalement, mais ne perdent plus une minute après le décès pour exiger leur dû !
Je pense que l'on peut mettre un terme à ce processus en profitant de cette occasion pour rétablir la récupération sur succession.
J'ai prévu, madame le ministre, un seuil de 50 000 euros.
M. Guy Fischer. Je ne suis pas d'accord !
M. Michel Charasse. On peut penser que la somme est trop basse, mais, cher Guy Fischer, c'est celle qui est appliquée aujourd'hui à peu de choses près en matière de récupération sur succession au titre des autres aides sociales départementales.
Mme Marie-France Beaufils. Ce n'est pas pour cela que c'est bien !
M. Michel Charasse. On peut très bien prévoir un seuil de 100 000 euros, qui correspond à la moyenne des transmissions de patrimoine ; cela ne me gêne pas.
Mais je pense que, vraiment, à un moment où nous avons, les uns et les autres, à faire des efforts pour la solidarité nationale et pour financer correctement et équitablement la protection sociale, alors que nous allons faire sauter l'ensemble du dispositif ou presque de taxation des successions, nous devons faire ce geste qui bénéficiera, je le précise, aux départements et donc à leurs contribuables.
Les départements supportent aujourd'hui le coût de l'APA et, compte tenu de leur situation actuelle encore aggravée par d'autres transferts comme la loi sur les handicapés et quelques autres, il est temps de sortir de cette anomalie et de cette injustice selon lesquelles les détenteurs de patrimoine font payer l'entretien de leurs aïeux par le voisin qui n'a pas d'argent ou qui en a moins qu'eux.
M. Jean-Jacques Jégou. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mon propos sera bref : démarche vertueuse, avis favorable !
M. Alain Lambert. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très beau commentaire !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Charasse, j'ai beaucoup de sympathie pour votre amendement et vous posez un vrai problème, qui sera probablement d'une bien plus vaste ampleur au fur et à mesure que, l'âge aidant pour un plus grand nombre d'entre nous, ces questions de dépendance et de handicap se poseront avec beaucoup plus d'acuité.
De ce point de vue, nous allons avoir un débat sur la cinquième branche, liée à la dépendance, dans le cadre duquel il faudra que nous réexaminions la question de principe de la répartition de ce risque entre la solidarité nationale et la solidarité familiale.
En ayant bien mis en exergue, d'une part, le débat sur la cinquième branche et, d'autre part, celui que nous devrons mener sur l'équilibre de nos finances publiques, compte tenu des engagements de modération des uns et des autres, tant sur le plan national qu'au niveau des collectivités locales, qui seront également tenues à la rigueur, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. M. Charasse nous renvoie à un vieux débat lors de la création de l'APA sur la question de son financement, dont il était ressorti que cette allocation n'était pas récupérable sur succession.
M. Michel Charasse. Défense du patrimoine !
M. Guy Fischer. Nous avions évoqué la vieille PSD, qui avait été expérimentée dans douze départements, notamment dans celui de M. de Raincourt, et nous avions débattu longuement sur le fait que l'APA n'était pas financée en totalité. Nous en mesurons aujourd'hui les conséquences !
Mme la ministre vient de faire allusion à la création d'une cinquième branche. Le débat est loin d'être tranché.
M. Michel Charasse. Avec une cotisation !
M. Guy Fischer. Sera-t-elle traitée dans le cadre de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, comme la majorité semble le souhaiter ? Viendra-t-elle s'ajouter à la protection sociale, comme nous y porte notre sensibilité ? La question a été écartée des débats que nous avons eus récemment avec MM. Alain Vasselle et Paul Blanc au sein de la commission des affaires sociales.
Aujourd'hui, le problème du financement de l'APA a été tranché en le faisant porter, pour une large part, sur les familles. Il faut savoir que l'hébergement est assuré presque intégralement par les familles et que l'aide sociale accordée par les départements est absolument nécessaire...
M. Michel Charasse. Pour les riches !
M. Guy Fischer. ... pour nombre de familles.
Il existe peut-être quelques cas marginaux, mais je sais, pour fréquenter régulièrement les établissements pour personnes âgées dépendantes, les EPAD - anciennement MAPAD -, que ce problème de fond mérite toute notre attention.
Nous aurons, semble-t-il, un débat sur le financement de la dépendance. En l'état actuel, le problème reste entier, nous sommes donc en total désaccord avec l'amendement qui a été présenté par M. Michel Charasse.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous n'êtes pas en accord avec vos principes !
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je suis assez surpris de la position du Gouvernement, qui s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Il serait effectivement raisonnable, madame la ministre, mes chers collègues, de faire preuve de sagesse à l'égard d'une telle initiative. Notre collègue Michel Charasse a une position constante sur le sujet.
Nous avons eu un très long débat sur le sujet, comme l'a rappelé M. Fischer, qui a fait apparaître des positions très diversifiées selon les sensibilités politiques.
Je rappelle que l'initiative de la suppression du recours sur succession...
M. Michel Charasse. C'est l'obligation alimentaire.
M. Alain Vasselle. ...est venue de l'Assemblée nationale. J'étais rapporteur du texte à l'époque et la commission des affaires sociales avait proposé que nous suivions la position de l'Assemblée nationale. En créant l'APA, nous avions créé une sorte de droit universel puisque nos concitoyens pouvaient bénéficier de l'APA quel que soit leur niveau de revenus.
M. Michel Charasse. Et voilà !
M. Alain Vasselle. À partir du moment où l'allocation changeait de nature comparée à celle qui existait antérieurement, il était tout à fait judicieux que nous nous interrogions sur la pertinence du maintien ou non de cette récupération.
Il me semblerait opportun que notre collègue M. Charasse accepte de retirer son amendement pour que nous puissions en débattre à nouveau lorsque le Gouvernement saisira le Parlement, comme le Président de la République s'y est engagé, sur l'opportunité de créer un cinquième risque et éventuellement une cinquième branche. Le Gouvernement a confirmé qu'il prendrait des initiatives en ce sens, mais nous ne savons pas encore quelles modalités seront retenues le moment venu.
Si nous adoptons cet amendement, nous allons créer de nouvelles disparités que nous avions gommées ; car lorsque nous avions abrogé cette disposition, nous en avions profité pour supprimer le recours sur succession en ce qui concerne les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé, l'AAH.
Nous allons donc rouvrir un débat sur lequel la commission des affaires sociales doit donner son avis. Je trouverais particulièrement regrettable qu'au détour d'un texte, un vendredi, nous prenions une telle initiative.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Alain Vasselle. C'est la raison pour laquelle je ne pourrai pas approuver la proposition de M. Charasse. Les problèmes qu'il pose méritent effectivement qu'une réflexion soit à nouveau conduite sur le sujet. Pour autant, je ne pense pas que les quelques cas dont il fait état se retrouvent à une grande échelle sur l'ensemble du territoire national. Le phénomène est relativement marginal par rapport au nombre de cas que nous connaissons aujourd'hui.
Je rappelle également que le recours n'était pas appliqué d'une manière équivalente d'un département à l'autre.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Alain Vasselle. Certains conseils généraux appliquaient effectivement le recours...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est très bien !
M. Alain Vasselle. ...et d'autres pas, ce qui créait une situation d'iniquité sur le territoire national...
M. Michel Charasse. Il y en a d'autres !
M. Alain Vasselle. ...entre les personnes handicapées et les personnes âgées.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, il serait beaucoup plus sage que notre collègue Michel Charasse retire son amendement afin que nous en débattions d'une manière beaucoup plus sereine avec la commission des affaires sociales et la commission des finances.
M. Michel Charasse. J'en ai marre d'arroser les milliardaires !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je respecte beaucoup la commission des affaires sociales, je pense l'avoir montré au début de nos débats,...
M. François Marc. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...mais nous sommes dans le sujet.
De quoi s'agit-il ? Il s'agit de la solidarité intergénérationnelle. On ne peut pas prendre le positif et refuser le négatif, ce n'est ni raisonnable ni responsable.
Nous faisons une réforme pour abaisser les droits de succession, c'est bien ! Je l'ai appelée de mes voeux, j'en suis partisan. Mais, à l'inverse, lorsque des dépenses sont engagées par la collectivité et peuvent faire l'objet d'une démarche de solidarité de la part des descendants, il me paraît raisonnable de le leur demander.
Au demeurant, Alain Vasselle le sait mieux que tout autre, c'est ce qui existait dans l'ancien droit de l'aide sociale.
M. Alain Lambert. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En l'occurrence, il s'agit simplement de replacer l'allocation personnalisée d'autonomie au même rang que les prestations classiques d'aides sociales. C'est ce qui aurait dû être fait lorsque l'APA a été créée.
M. Michel Charasse. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. La démarche de Michel Charasse est particulièrement opportune. Je dirais même qu'elle est vertueuse.
M. Guy Fischer. Non !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Une démarche vertueuse qui émane de temps en temps de ce côté-ci de l'hémicycle est un bon signe d'ouverture, et je m'en réjouis.
MM. Robert del Picchia et Alain Lambert. Très bien !
M. Guy Fischer. C'est scandaleux !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. Je voterai cet amendement, car il est effectivement vertueux.
Je suis désolé que M. Vasselle pense que ce vote a lieu à la sauvette, au détour d'un vendredi. En outre, nous ne sommes pas du tout hors sujet. Nous venons tout de même d'accorder aux droits de succession tout ce qu'il est possible de donner, y compris d'ailleurs ce que le budget de la nation ne peut pas donner.
Madame la ministre, vous avez distingué la solidarité qui vient de l'État et celle qui vient des familles. Il y a un temps pour tout ! Il est souhaitable que les familles puissent également ...
M. Guy Fischer. Payer !
M. Jean-Jacques Jégou. ... se montrer solidaires envers leurs aïeux.
Par ailleurs, je n'ai pas compris votre intervention, monsieur Fischer. Pour ma part, j'estime que c'est le minimum que nous puissions demander aux familles.
Les maires se rendent bien compte des difficultés que peut quelquefois engendrer l'obligation alimentaire, mais on constate aussi les effets d'aubaine du dispositif actuel et, dans ce cas, il est à la charge de l'État !
M. Guy Fischer. Là, c'est le département !
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Je voudrais à mon tour soutenir l'amendement de Michel Charasse.
Comme l'a très bien dit M. Vasselle, le problème vient du fait que l'allocation personnalisée d'autonomie est versée quel que soit le niveau de revenu. Je ne comprends donc pas votre attitude, monsieur Fischer. En l'occurrence, il s'agit de demander à ceux qui ont beaucoup d'argent de participer à la solidarité, alors que ceux qui n'ont pas beaucoup de moyens y contribuent déjà notamment par les impôts locaux.
Aujourd'hui, lorsqu'un conseil général veut accroître ses ressources fiscales, il ne peut le faire qu'en augmentant les impôts supportés par les ménages, puisque la taxe professionnelle est plafonnée à la moitié des bases.
Cela étant, je pense que, si Michel Charasse pouvait porter le seuil un peu faible de 50 000 euros à 100 000 euros, ce serait mieux. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Thierry Repentin. Il faudrait dix fois plus !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Pour ma part, je ne voterai pas cet amendement, car il manque de nuance.
M. Jégou a parlé de l'obligation alimentaire et cet amendement ne tient pas compte des familles qui l'auront versée pendant cinq ans, dix ans, quinze ans, voire vingt ans.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sans doute y a-t-il encore quelques nuances à apporter à la formulation de ce dispositif pour tenir compte de la suite pratique qui lui sera donnée s'il était adopté.
En attendant, je partage la suggestion de porter le seuil de 50 000 euros à 100 000 euros.
M. Guy Fischer. Et même plus !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce montant plus raisonnable lèverait les craintes de M. Fischer, qui ne veut pas taxer les pauvres.
Il faudra que, dans les textes d'application, on fasse la distinction, au sein de l'APA, entre les mesures qui relèvent de l'hébergement et celles qui relèvent du domaine sanitaire, à savoir la prise en charge du handicap ou de la maladie. Si l'on peut dire que l'hébergement est l'équivalent de l'aide sociale, le domaine sanitaire ressortit à une autre logique, celle qui est liée à la création d'une cinquième branche.
Si Michel Charasse acceptait de relever le seuil de 50 000 euros à 100 000 euros, je voterai son amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je veux faire plusieurs observations.
Tout d'abord, je souhaite compléter le rapide historique tracé par M. Vasselle.
Souvenez-vous, mes chers collègues, le Sénat avait décidé que la PSD donnerait lieu à récupération sur succession dans le cadre de l'obligation alimentaire.
Le projet de loi relatif à l'APA, déposé à l'Assemblée nationale par M. Jospin, prévoyait initialement, lui aussi, la récupération sur succession.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Michel Charasse. C'est au cours du débat à l'Assemblée nationale que, à la demande pressante du groupe communiste, dans le cadre de la bonne entente de l'Union de la gauche de l'époque (M. Vasselle s'esclaffe), M. Jospin a accepté de supprimer la récupération sur succession. Nous avons été un certain nombre ici à trouver immoral.
Je remercie Philippe Adnot de l'intervention qu'il vient de faire. Je me rappelle que, lorsque le projet de loi du gouvernement de M. Jospin a été examiné ici, la commission des affaires sociales avait proposé de se rallier au texte de l'Assemblée nationale. Nous avons été trois sénateurs - Philippe Adnot, Henri de Raincourt et moi-même - à déposer des amendements visant à revenir à la rédaction initiale. Nos trois amendements ont été mis au vote à main levée, et ils ont été rejetés trois fois à deux voix près.
M. Jean-Jacques Jégou. À l'époque, j'étais député et je n'ai pas non plus eu gain de cause !
M. Michel Charasse. Ensuite, puisqu'on supprime les droits de succession pour le plus grand nombre, c'est l'occasion d'éviter de faire payer le voisin pour les soins donnés au grand-père de ceux qui ont les moyens de payer et qui recevront les biens du défunt le jour où le malheur arrivera. Il ne faut tout de même pas exagérer !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Guy Fischer. Ce sont des biens modestes !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est tout de même une belle somme !
M. Guy Fischer. Quand on voit le prix des maisons, qu'est-ce que 100 000 euros aujourd'hui ?
M. Michel Charasse. Mes chers collègues, je suis maire et président d'une association de maires. Nous sommes d'ailleurs un certain nombre ici dans la même situation.
Lorsque l'APA a remplacé la PSD, nous avons tous vu arriver des demandeurs avec un patrimoine plus que convenable qui avaient hésité à réclamer la prestation en raison de la récupération sur succession. Dans mon propre département, alors qu'il n'y a pas eu de Tchernobyl ou d'autres catastrophes, nous sommes passés d'un seul coup en un ou deux ans de 2 000 PSD à 8 000 APA : cherchez l'erreur !
À partir du moment où, à la suite de la réforme des droits de succession, la plupart des héritiers n'auront pratiquement plus rien à payer, il serait normal et juste de dispenser la collectivité de payer pour ceux qui ont un patrimoine d'une certaine valeur.
J'ai entendu ce qu'a dit M. Fischer. Mais, je le répète, et M. Vasselle peut le confirmer, il n'y a pas de plafond pour bénéficier de l'APA. Même les milliardaires y ont droit !
Si j'ai proposé le chiffre de 50 000 euros, c'est parce que c'est le seuil actuellement applicable aux récupérations sur succession en matière d'aide sociale départementale. Or, jamais personne, ni les communistes, ni mes amis socialistes, ni qui que ce soit d'autre, n'a proposé de relever cette somme qui s'applique tous les jours dans tous les départements.
Mais, comme nous sommes dans un processus de réflexion sur le financement de la dépendance, je suis prêt à accepter de relever le seuil à 100 000 euros. Bien entendu, le jour où nous arriverons à financer la dépendance par une cotisation, il n'y aura plus de récupération, puisqu'il ne s'agira plus d'aide sociale. L'essentiel est d'entrer dans un processus de normalisation de cette prestation.
Je vous le rappelle, mes chers collègues du groupe communiste, même le RMI est récupérable sur succession, et dans les mêmes conditions avec un seuil de 50 000 euros. Quand on a créé cette prestation, vous l'avez votée, et vous n'avez rien dit à ce sujet !
Monsieur le président, j'accepte donc de rectifier mon amendement en portant le seuil de 50 000 euros à 100 000 euros. Je souhaite que cette mesure soit la plus provisoire possible, qu'on arrive très vite à des règles de financement de l'APA sous forme d'un cinquième risque avec cotisation et qu'on dispense enfin les départements d'intervenir en cette matière.
M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° 122 rectifié, présenté par M. Charasse et ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « lorsque la valeur de l'actif successoral est inférieure à 100 000 euros. Cette somme varie chaque année comme l'inflation. »
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste comprend le souci de notre collègue Michel Charasse, qui est toujours très vigilant sur l'utilisation des deniers publics, que ce soit ceux de l'État ou ceux des collectivités territoriales.
Mais, cette nuit, nous avons voulu, par un amendement, supprimer l'article 4, qui a reçu le soutien de la majorité et tendait à légiférer en matière de droits de succession pour 4 % des assujettis. Là, cette disposition vise tout le monde !
M. Guy Fischer. Ce sont les 96 % restants qui les intéressent !
Mme Nicole Bricq. Nous ne pouvons donc pas nous déjuger en quelques heures.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur général, si vous avez été attentif à nos interventions, auxquelles vous n'avez pas répondu sur le fond, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au contraire !
Mme Nicole Bricq. ...vous vous êtes aperçu qu'il y là un vrai débat politique entre la gauche et la droite. Vous le savez, cette question est un marqueur politique et identitaire.
Hier soir, Charles Josselin a essayé de vous faire comprendre avec le coeur qui est le sien que, pour nous, ce point est fondamental. Nous ne pouvons donc nous renier.
Je fais appel à votre raisonnement, monsieur le rapporteur général, et pas uniquement sur le plan politique. Vous le savez, de votre côté, comme du nôtre, ce type de mesure a un fort effet psychologique.
Nous avons eu ce type de débat il y a quelques années quand nous avons mis en place l'APA. Quand je dis nous, je veux parler des socialistes et de nos collègues du groupe communiste, puisque nous étions dans la même majorité. Nous avons essayé de le régler du mieux possible en sachant que tout ce qui tourne autour des droits de succession a des effets psychologiques pour les catégories qui sont visées.
Pour rester cohérent avec la position que nous avons défendue cette nuit, le groupe socialiste votera contre l'amendement de M. Charasse.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame Bricq, je ne peux pas vous laisser dire que cette mesure s'appliquerait soudainement à l'ensemble des successions. La moyenne des successions, c'est 100 00 euros, et la médiane est à 80 000 euros. Par conséquent, je ne peux pas vous laisser dire que tout le monde est visé.
Par ailleurs, M. le rapporteur général l'a souligné, on ne peut pas libérer de droits de succession la transmission du patrimoine ...
M. François Marc. Pour les 4 % les plus riches !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ... et, dans le même temps, exonérer les familles de leurs obligations alimentaires.
Il y a donc deux logiques. Pour notre part, nous devons aller au bout de celle que nous avons choisie cette nuit en votant l'allégement des droits de succession.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Michel Charasse. Courage fuyons !
Article 4 bis
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa du IV de l'article 779, les mots : « du II de l'article 788 » sont remplacés par les mots : « de l'article 796-0 ter ».
2° Le II de l'article 788 est abrogé.
3° Après l'article 796-0 bis, il est inséré un article 796-0 ter ainsi rédigé :
« Art. 796-0 ter. - Est exonérée de droits de mutation par décès la part de chaque frère ou soeur, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, à la double condition :
« 1° Qu'il soit, au moment de l'ouverture de la succession, âgé de plus de cinquante ans ou atteint d'une infirmité le mettant dans l'impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l'existence ;
« 2° Qu'il ait été constamment domicilié avec le défunt pendant les cinq années ayant précédé le décès. »
II. - Le I s'applique aux successions ouvertes à compter de la publication de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 78, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Je suis également saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 204 est présenté par M. Jégou et les membres du groupe Union centriste - UDF.
L'amendement n° 222 rectifié est présenté par MM. Girod, Grignon, de Richemont, Portelli et Gaillard et Mme Mélot.
L'amendement n° 229 est présenté par MM. de Montesquiou et Othily.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après le I de cet article, insérer deux paragraphes ainsi rédigés :
... - Les sommes versées en cas de décès aux personnes visées à l'article 796-0 ter du code général des impôts sont exonérées du prélèvement mentionné à l'article 990 I du même code.
... - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mes chers collègues, il me semble que les amendements nos 204, 222 rectifié et 229 sont satisfaits par l'amendement n° 248.
M. Jean-Jacques Jégou. Vous avez parfaitement raison, monsieur le président. Je retire l'amendement n°204.
M. Georges Othily. Je retire aussi l'amendement n° 229, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 204 et 229 sont retirés.
L'amendement n° 222 rectifié n'est pas défendu.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 78.
Mme Marie-France Beaufils. Nous connaissons le coût de la mesure prévue à l'article 4 bis, qui serait, d'après le rapport de la commission des finances, de 54 millions d'euros.
En revanche, nous ne connaissons pas le nombre de bénéficiaires, qui serait, selon toute vraisemblance, d'environ 3 000. La moins-value fiscale se situerait entre 15 000 euros et 18 000 euros.
Ce qui nous gêne, ce n'est pas tellement que l'on prenne en compte les difficultés personnelles de quelques centaines de personnes, mais c'est plutôt que l'on ne traite pas de manière aussi attentive la situation de l'ensemble des personnes en situation de handicap dans notre pays.
Que faut-il faire ? Ouvrir un droit nouveau pour trois mille cas individuels, pour lesquels des solutions d'une autre nature peuvent être définies, ou poser la question de la réalité des droits ouverts, par exemple, pour les 820 000 bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, dont le montant n'a pas connu, ce 1er juillet, le même coup de pouce en termes de pouvoir d'achat ?
Que dire de la mise en oeuvre de la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ?
Deux ans et demi après sa promulgation, cette loi est encore loin d'être entrée en application puisque plus de trente dispositions réglementaires prévues par le texte ne sont pas encore prises !
À la vérité, il conviendrait, plutôt que d'adopter cet article 4 bis, de s'interroger sur la réalité de l'effort de la collectivité en direction des personnes concernées.
Ce serait là, plus sûrement que ne le pose cet article, l'occasion de mettre en pratique les principes de justice sociale qui devraient animer l'action publique depuis quelques dizaines d'années dans notre pays.
C'est donc sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4 bis.
(L'article 4 bis est adopté.)
Articles additionnels avant l'article 5
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 124, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Avant l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1er du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. L'article 1er du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 74 de la loi de finances pour 2006, pose le principe du « bouclier fiscal ».
Mais alors que les prélèvements obligatoires augmentent pour le plus grand nombre, le Gouvernement propose, au travers du dispositif prévu par l'article 5, d'aggraver une mesure dont le seul objectif réel était, dès l'origine, la remise en cause de l'ISF.
Alors que 90 % des foyers paient plus de prélèvements sociaux que d'impôts sur le revenu, le Gouvernement avait décidé de baisser l'impôt sur le revenu et l'ISF, tout en augmentant les prélèvements sociaux !
Quant aux plus riches, ils devaient bénéficier non seulement de la baisse de l'impôt sur le revenu, mais également du plafonnement du total des impôts dus en fonction des revenus.
À un moment où vous nous proposez, madame la ministre, de revaloriser encore ce bouclier fiscal, nous avons le sentiment qu'il faut tirer les enseignements des premiers résultats.
M. Philippe Marini, rapporteur général. On va y remédier !
M. François Marc. Monsieur le rapporteur général, depuis cinq ans, si l'on examine l'évolution des revenus et de la fiscalité pour l'ensemble des Français, on s'aperçoit que la politique qui a été mise en oeuvre et qui se trouve aujourd'hui accentuée a fait beaucoup de perdants et peu de gagnants !
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. François Marc. Mes chers collègues, les calculs le montrent : ceux qui gagnent moins de quinze fois le SMIC ont tous été les perdants des réformes fiscales et des réformes des prélèvements sociaux menées au cours des années passées.
Les gagnants sont ceux qui perçoivent plus de quinze fois le SMIC. J'ai ici la courbe représentative de cette évolution et on voit très bien une progression considérable pour les personnes dont les revenus représentent vingt à trente fois le SMIC, voire bien au-delà.
Véritablement, ce bouclier fiscal se révèle être un dispositif néfaste. Il ne protège guère les classes moyennes, comme le prétend le Gouvernement.
En réalité, la mesure ne bénéficie qu'à un nombre limité de contribuables. Si elle s'applique à d'autres contribuables, ce n'est que par accident, quand ils subissent une perte brutale de revenu.
En dehors des cas exceptionnels, seuls quelques milliers de contribuables fortunés assujettis à l'ISF sont concernés : ce bouclier fiscal n'est qu'un moyen détourné de toucher à l'ISF !
L'amendement que nous vous proposons vise donc à supprimer une mesure fiscale qui parachève l'oeuvre de remise en cause du principe de progressivité de l'impôt - je vous en ai parlé hier - et de démantèlement de l'ISF, que ne cessent de poursuivre les gouvernements de droite depuis 2002 et qui fleurent bon non seulement l'injustice, mais aussi, ce qui n'est vraiment pas convenable, l'hypocrisie !
M. le président. L'amendement n° 125, présenté par M. Charasse, Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Avant l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Les contribuables bénéficiaires des dispositions de l'article 1er du code général des impôts qui ne demandent pas le remboursement de leur droit à restitution dans un délai de deux ans perdent le bénéfice de la restitution des sommes en cause. Ils perdent, en outre, définitivement tout droit à remboursement pour l'avenir.
II - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables en cas de décès du contribuable, lorsque la succession fait l'objet de contestation et n'est pas réglée dans le délai de deux ans. De même, ces dispositions ne sont pas applicables aux contribuables incapables majeurs placés sous tutelle ou curatelle.
III - Les dispositions du premier alinéa du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts ne sont pas applicables lorsque le contribuable a fait l'objet d'une vérification fiscale conclue par des sanctions fiscales ou pénales définitives.
IV. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 2008.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Depuis l'institution du bouclier fiscal, il est apparu que le remboursement des sommes en cause n'avait été réclamé que par un très petit nombre de bénéficiaires, qui semblent avoir renoncé, pour des raisons diverses, à la restitution des sommes qui leur sont dues par le Trésor public.
Les chiffres ont été récemment communiqués dans les journaux : quelques centaines de personnes seulement on fait valoir ce droit.
Or cette abstention de leur part a pour conséquence d'obliger l'État à provisionner dans ses comptes des dépenses plus ou moins fictives, qui pèsent abusivement sur l'équilibre budgétaire.
Dans ces conditions, il est suggéré de supprimer tout remboursement au-delà de l'année qui suit la constatation de la créance sur le Trésor public.
En outre, pour les mêmes motifs, les intéressés perdraient tout droit à remboursement pour l'avenir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est évidemment défavorable à l'amendement n° 124.
Au-delà des désaccords de fond qui, légitimement, nous séparent, je ne peux laisser passer le terme d'hypocrisie.
La réforme que nous allons adopter, je l'espère, a été annoncée publiquement. Elle a fait l'objet d'un engagement devant les Françaises et les Français. On ne trompe donc personne !
Dans ce texte, sur ce sujet comme sur d'autres, sont mis en oeuvre les engagements pris devant l'ensemble du corps électoral. Mes chers collègues, si c'est de l'hypocrisie, les mots de la langue française n'ont plus aucun sens !
Je me permets d'indiquer, par ailleurs, à celles et à ceux qui auraient encore des pudeurs sur le sujet que si un candidat s'est avancé dans cette affaire, qui a dit clairement sa pensée, c'est bien Nicolas Sarkozy ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Vous avez vu le résultat : cela ne lui a pas nui ! D'autres que lui, lorsqu'on touchait avec prudence à tel ou tel élément du dispositif, pensaient que la terre allait s'effondrer. Eh bien, elle ne s'est pas effondrée !
Tout au contraire, un beau succès électoral, qui nous créé des devoirs, a été au rendez-vous. Le principal de ces devoirs, dans un premier temps, sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, est de faire ce que l'on a dit et de tenir les promesses !
M. Robert del Picchia. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ensuite, l'amendement n° 125 me paraît justifié et satisfait par l'article 1649-O A du code général des impôts, qui dispose déjà que les demandes de restitution - nous reviendrons tout à l'heure sur cette procédure - doivent être déposées avant le 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des impositions, à défaut de quoi la démarche deviendrait caduque.
En conséquence, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je récuse le terme d'hypocrisie pour les mêmes raisons que celles qu'a avancées M. le rapporteur général et je reprends son argument technique au sujet de l'amendement n° 125.
La faculté de demander le remboursement du trop payé est prévue dans le délai d'un an, selon les termes évoqués par M. le rapporteur général.
M. le président. Monsieur Marc, les amendements nos 124 et 125 sont-ils maintenus ?
M. François Marc. Je retire l'amendement n° 125, monsieur le président.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. François Marc. En revanche, je maintiens l'amendement n° 124.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Normal !
M. François Marc. Selon moi, il y a effectivement hypocrisie quand on explique, comme on l'a fait toute la nuit, que des mesures profiteront au plus grand nombre alors qu'on sait parfaitement qu'elles ne toucheront, par exemple, pour la mesure visant les successions que 4 % des patrimoines, et encore parmi les plus importants !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais il fallait voter la récupération sur succession tout à l'heure ! Vous auriez été plus cohérent !
M. François Marc. Soit je ne connais effectivement pas le sens du mot hypocrisie dans la langue française, monsieur le rapporteur général, soit, au contraire, mon propos vous gêne, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas du tout !
M. François Marc. ... car il montre que seule 4 % de la population sera concernée quand on nous dit que la disposition profitera à tous !
Je demande donc à comprendre. S'agissant en particulier de ce bouclier fiscal, monsieur le rapporteur général, profitera-t-il à tous ? J'attire votre attention sur le fait que, à ce jour, seules 1 780 personnes ont demandé à bénéficier de cette mesure.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Donc cela ne coûte pas cher !
M. François Marc. Or je me souviens du débat que nous avons eu ici lorsque nous avons voté ce dispositif. On nous disait exactement la même chose qu'aujourd'hui, à savoir que des centaines de milliers de personnes bénéficieraient de cet avantage.
Or, aujourd'hui, mes chers collègues, 1 780 personnes ont bénéficié de ce dispositif ! Où est le bon sens sur ces questions ?
En tout état de cause, je maintiens mes arguments : le dispositif du bouclier fiscal est véritablement injuste dans ses fondements et, incontestablement, dans son application, il ne répond en rien à ce qui serait aujourd'hui souhaitable sur le plan de la fiscalité.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 124.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5
I. - Dans le premier alinéa de l'article 1er du code général des impôts, le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».
II. - L'article 1649-0 A du même code est ainsi modifié :
1° Le 1 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « suivant l'année du paiement des impositions dont il est redevable » sont remplacés par les mots : « de la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;
b) Le second alinéa est complété par les mots : «, au 1er janvier de l'année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;
2° Le 2 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Sous réserve qu'elles aient été payées en France et, d'une part, pour les impositions autres que celles mentionnées aux e et f, qu'elles ne soient pas déductibles d'un revenu catégoriel de l'impôt sur le revenu, d'autre part, pour les impositions mentionnées aux a, b et e, qu'elles aient été régulièrement déclarées, les impositions à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution sont : » ;
b) Le a est complété par les mots : « dû au titre des revenus mentionnés au 4 » ;
c) Le b est complété par les mots : « établi au titre de l'année qui suit celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;
d) Dans le c, après les mots : « non bâties », sont insérés les mots : «, établies au titre de l'année qui suit celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4, » ;
e) Dans le d, après les mots : « d'habitation », sont insérés les mots : «, établie au titre de l'année qui suit celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4, » ;
f) Il est ajouté un e et un f ainsi rédigés :
« e) Les contributions et prélèvements, prévus aux articles L. 136-6 et L. 245-14 du code de la sécurité sociale et à l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, ainsi que la contribution additionnelle à ces prélèvements, prévue au 2° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, sur les revenus du patrimoine compris dans les revenus mentionnés au 4 ;
« f) Les contributions et prélèvements, prévus aux articles L. 136-1 à L. 136-5, L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale et aux articles 14 et 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précitée, ainsi que la contribution additionnelle à ces prélèvements, prévue au 2° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, sur les revenus d'activité et de remplacement et les produits de placement compris dans les revenus mentionnés au 4. » ;
3° Dans le premier alinéa du 3, les mots : « du paiement de ces impositions » sont remplacés par les mots : « suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;
4° Le 4 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « au titre de l'année qui précède celle du paiement des impositions » sont supprimés ;
b) Le a est ainsi rédigé :
« a) Des revenus nets soumis à l'impôt sur le revenu majorés, le cas échéant, du montant de l'abattement mentionné à l'article 150-0 D bis. Les plus-values mentionnées aux articles 150 U à 150 UC sont retenues dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VE. Par dérogation au premier alinéa du présent 4, les revenus soumis à l'impôt sur le revenu, sur option du contribuable, selon une base moyenne, notamment en application des articles 75-0 B, 84 A ou 100 bis, ou fractionnée, notamment en application des articles 75-0 A, 163 A ou 163 bis, sont pris en compte, pendant la période d'application de ces dispositions, pour le montant ayant effectivement supporté l'impôt au titre de chaque année ; »
c) Dans le c, le mot et la référence : « et 9° » sont remplacés par les références : «, 9°, 9° ter et 33° bis » ;
5° Le 8 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « l'année suivant celle du paiement des impositions mentionnées au 2 » sont remplacés par les mots : « la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « rectifiés ayant servi de base à ces impositions » sont remplacés par les mots : « pris en compte pour la détermination du droit à restitution ».
II bis. - Dans le b du 2 du IV de l'article 74 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, les références : « a et b » sont remplacées par les références : « a, b, e et f ».
III. - Les I et II s'appliquent pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2006. Toutefois, les impositions, mentionnées au a du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, tel qu'il résulte du présent article, ne peuvent être prises en compte pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés en 2006 lorsqu'elles ont été prises en compte pour l'exercice du droit à restitution acquis au 1er janvier 2007.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Le coût du bouclier fiscal est de 810 millions d'euros - et de 3 milliards d'euros, si l'on compte toutes les mesures de défiscalisation - du patrimoine.
À qui profiteront-ils ? Essentiellement aux familles dont la fortune se situe entre 7,4 millions et plus de 15 millions d'euros.
Vous avez beau dire, madame la ministre, que le bouclier concerne aussi des personnes modestes, vous aurez quelques difficultés à convaincre les millions de Français qui ont été bernés ces derniers mois en pensant très sincèrement que les promesses électorales les concernaient !
Vous aurez la condescendance et la bonté de rembourser, de façon occasionnelle, 660 euros à ces quelque 77 000 foyers aux revenus modestes qui, possédant une maison dont la valeur, avec la spéculation immobilière, a atteint 770 000 euros, se voient assujettis à l'ISF. C'est là votre seul geste envers cette catégorie de population.
Vous le mettez en avant pour mieux cacher ce que vous faites en réalité, à savoir servir les plus grosses fortunes de notre pays. Les cabinets de conseillers juridiques pourront fourbir leurs armes pour utiliser toutes les possibilités que vous leur offrez !
Vous ferez payer ensuite les millions de pauvres avec la TVA sociale, car les 13 milliards d'euros de ces cadeaux fiscaux devront bien être pris quelque part.
Pour ceux qui penseraient qu'il n'y a pas de rapport entre ces deux textes, je rappelle que la CSG est intégrée dans le bouclier fiscal que vous présentez, madame la ministre. Par conséquent, le financement de la protection sociale est également touché par ce texte.
Vous favorisez ainsi une société de rentiers, qui pourront en toute légalité et de façon durable se constituer de génération en génération des patrimoines faramineux au lieu d'investir dans l'économie.
En réalité, vous supprimez, de fait, l'impôt de solidarité sur la fortune ; des membres de la majorité de cette assemblée l'ont clairement affirmé. Vous voudriez faire oublier que cet impôt a une haute valeur symbolique. Symbole, en effet, des valeurs de la République, il a été créé sous le nom d' « impôt sur les grandes fortunes » en 1982, et avait pour objectif de traduire la solidarité financière des contribuables les plus riches à l'égard des plus pauvres.
Pendant la première cohabitation, en 1986, Jacques Chirac supprimait cet impôt, le qualifiant, comme vous le faites aujourd'hui, d' « impôt injuste ». Chacun pourra apprécier le sens de ce que vous appelez votre « politique de rupture » !
Créé en 1989, l'ISF devait financer le RMI. Or nous voyons, dans le projet de loi que vous présentez aujourd'hui, madame la ministre, s'opérer de façon symbolique et totalement inverse, en même temps que la disparition de l'ISF, l'extinction accélérée du RMI.
M. Guy Fischer. Les inégalités vont s'aggraver !
Mme Marie-France Beaufils. Certains députés de la majorité eux-mêmes ne comprennent pas cet excès de zèle pour les plus riches, dans le traitement de ce bouclier fiscal. Ils estiment qu'un « plafond fixé à 50 % des revenus, appliqué à une base élargie à la CSG et la CRDS, reviendrait à faire jouer, à périmètre constant, le bouclier à hauteur de 39 % des revenus et non de 60 %.
« Une telle diminution du taux maximal est manifestement excessive », et ils expliquent qu'en d'autres termes « cela revient à supprimer l'ISF pour les plus riches ».
Vous voulez portez ce bouclier fiscal de 60 % à 50 %, alors que la première formule n'a guère incité les redevables à se bousculer aux guichets fiscaux pour demander leur chèque. Seuls 1 780 foyers sur les 93 000 concernés avaient fait leur demande à la fin du mois d'avril.
Dans Le Figaro du 6 juillet, journal qui n'a pas pour habitude de contredire votre politique, il est écrit : « rien ne prouve que le nouveau dispositif, bien plus attractif que le précédent, conduira davantage de foyers à réclamer leur chèque au fisc. Beaucoup parmi les dizaines de milliers de contribuables modestes sont convaincus qu'ils n'y ont pas droit. Ou pire, la majorité ne s'est même pas posé la question. Quant aux contribuables plus aisés, ils sont bien sûr informés de l'existence de ce dispositif, mais ils redoutent d'écoper d'un contrôle fiscal s'ils demandent leur chèque. »
Comment alors interpréter le communiqué de M. Woerth qui voudrait rassurer ceux qui éprouvent de telles craintes aujourd'hui et qui prodigue quelques conseils pour ces contribuables « qui hésiteraient » - selon lui - « à demander le bouclier parce qu'ils ne sont pas certains d'avoir une situation irréprochable à l'égard du fisc ». Ils « peuvent toujours [...] - leur suggère-t-il -, avant toute mesure de relance ou de contrôle de l'administration, faire une déclaration rectificative. Les impôts correspondants, aussi bien que les revenus, sont alors pris en compte pour calculer le bouclier fiscal ».
Cela fait dire à un syndicaliste des impôts que « de riches foyers fraudeurs auraient là un moyen de régulariser leur situation pour ensuite bénéficier de tous les avantages du bouclier fiscal ». C'est très « choquant », ajoute-t-il, et je partage ce sentiment, madame la ministre.
Votre volonté est bien de réduire à néant l'ISF ; l'amendement voté par le seul groupe UMP, avec votre soutien, madame la ministre, qui vise à porter de 20 % à 30 % l'abattement d'ISF sur la résidence principale, le confirme, s'il en était besoin.
Vous faites le choix de ceux que vous défendez de façon on ne peut plus claire. Vous ne servez en aucune façon l'intérêt général. Or, c'est lui qui, pourtant, devrait animer les parlementaires que nous sommes. L'article 5 est contraire à l'intérêt de notre économie et de la nation. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. François Marc, sur l'article.
M. François Marc. Alors que nous abordons l'examen de l'article 5 sur le renforcement du bouclier fiscal, je voudrais intervenir sur deux points.
Premier point, sur lequel je serai très bref puisque je l'ai déjà développé : ce dispositif profite à très peu de gens. Permettez-moi pour étayer ce propos, de citer un extrait d'un article paru récemment dans le journal Le Monde : « Selon les estimations du ministère, un peu plus de 1 000 contribuables disposant d'un patrimoine supérieur à 15,5 millions d'euros devraient bénéficier, grâce à ce dispositif, d'une restitution globale de 272 millions d'euros, soit une moyenne de 250 000 euros de restitution par foyer ».
Voilà, mes chers collègues, qui illustre, s'il en était besoin, combien ce dispositif, loin de profiter au plus grand nombre, contrairement aux annonces répétées du Gouvernement, ne profitera qu'à un très petit nombre de nos concitoyens.
J'en viens au second point, qui est relatif à la création d'emplois, à l'économie, à la relance et à la croissance, afin de montrer que, là aussi, il y a tromperie sur les effets attendus.
En effet, on nous promet une fabuleuse relance économique par la baisse de l'impôt. Madame la ministre, nous avons déjà entendu ce discours. Après l'annonce du président Chirac en 2002, Francis Mer, Nicolas Sarkozy, Hervé Gaymard, Thierry Breton ont, tous, vanté les vertus de la baisse de l'impôt et prôné un programme fiscal offensif visant à encourager le travail et l'emploi.
Je retiens en particulier les propos tenus par Francis Mer, ici même, qui avait insisté sur le fait que la relance entraînée par ces baisses d'impôt allait préparer efficacement l'avenir, notamment en portant un coup d'arrêt à la dégradation du déficit public et à l'accroissement de la dette. Francis Mer nous annonçait, comme vous le faites aujourd'hui, madame la ministre, que le retour à un quasi-équilibre du budget serait obtenu assez rapidement et que la dette serait stabilisée. « La dette ne dépassera pas 1 000 milliards d'euros en 2006 », avait-il déclaré. Voilà l'engagement qui avait été pris par le Gouvernement lors de l'annonce de ces baisses d'impôt censées procurer de la croissance et de la stabilité économique.
Or, aujourd'hui, mes chers collègues, la dette s'établit non pas à 1 000 milliards d'euros mais, comme nous l'avons vu en commission des finances, il y a trois jours, à 1 142 milliards d'euros, soit 14 % de plus que ce qui était considéré à l'époque comme un maximum par le ministre de l'économie.
Mes chers collègues, cet incroyable cadeau fiscal, outre qu'il aura certainement des effets désastreux sur l'opinion publique, ne constitue en rien une solution permettant, en termes économiques ou budgétaires, d'assainir durablement les finances publiques.
Là aussi, nous estimons qu'il y a tromperie vis-à-vis de l'opinion publique et qu'il ne faut pas donner suite à la proposition contenue dans l'article 5 de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 79 est présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 126 est présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 79.
Mme Marie-France Beaufils. Mon intervention va compléter celle que j'ai déjà faite tout à l'heure.
L'article 5 comporte deux aspects : réduire à 50 % du revenu de référence le bouclier fiscal qui avait été adopté dans la loi de finances pour 2006 et élargir l'assiette sur laquelle porte ce bouclier.
Le premier aspect me conduit à poser une question : le Gouvernement considère-t-il qu'il existe, dans notre pays, des assurés sociaux dont le niveau de revenu serait si élevé qu'il conviendrait de les dispenser, éventuellement, d'un certain volume de leur participation au financement de la protection sociale ? C'est le sens que je donne, en tout cas, à l'intégration de la CSG et de la CRDS dans l'assiette sur laquelle s'applique le bouclier fiscal. Au moment où l'on s'apprête à demander aux mêmes assurés sociaux un effort supplémentaire pour venir éponger les déficits créés par les réformes Fillon sur les retraites et Douste-Blazy sur l'assurance maladie, cela montre les inégalités de traitement qui existent !
L'autre aspect, c'est, comme je l'ai dit tout à l'heure, votre volonté de faire disparaître l'impôt de solidarité sur la fortune. Dans ces conditions, on peut se demander où est l'égalité de traitement des citoyens devant l'impôt. Vous préparez ainsi, avec ce texte, votre réforme de financement de la sécurité sociale.
J'ai précisé tout à l'heure combien de demandes de restitution avaient été retenues, mais le rapport de M. Marini nous apporte à ce sujet des précisions intéressantes. Au lieu de 4 000 euros de restitution par dossier comme cela avait été annoncé, nous sommes au-delà des 60 000 euros. Un cas exceptionnel de remboursement de 7,7 millions d'euros s'est produit, concernant l'héritière d'une famille de la grande distribution, qui a tenu à expliquer dans la presse les raisons de cette restitution. Ses explications ne m'ont pas convaincue du bien-fondé de votre proposition !
Le fait est que, pour une bonne part, en effet, ces impôts résultaient de la plus-value que cette personne avait réalisée en revendant des titres de l'enseigne de grande distribution qu'elle détenait, ce qui veut dire que sa fortune n'était rien d'autre que le produit du travail des salariés de cette enseigne.
De fait, les modestes retraités de l'Île de Ré, devenus riches du fait de la spéculation immobilière effrénée qui sévit dans leur petit paradis terrestre, ne semblent pas avoir sollicité les services fiscaux.
Cette poignée de bénéficiaires du bouclier fiscal - un peu plus de 1 700 - ne constitue qu'environ 0,3 % des contribuables de l'ISF ! Quelles sont les raisons qui expliquent cette situation ?
Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, vous savez bien que, pour bénéficier du bouclier fiscal, il faut jouer « cartes sur table », jouer « la transparence », oublier que les conseils avisés d'un notaire ou d'un fiscaliste ont incité à sous-évaluer le patrimoine immobilier ou la valeur des actions des sociétés non cotées que l'on détient pour tenter d'échapper à l'ISF, par exemple !
Votre proposition est indécente. C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à supprimer cet article 5.
Vous voulez réduire de façon drastique la contribution des plus riches à la solidarité nationale que se doit d'assumer l'État. CSG, CRDS, impôts locaux sont également concernés, et vous ne trouvez rien de mieux que de présenter la TVA sociale payée par tous comme étant plus efficace pour la protection sociale ou le zéro volume d'évolution du budget des collectivités territoriales ! Ainsi, votre bouclier fiscal vous donne le prétexte de diminuer encore plus durement l'intervention publique, d'engager la casse des services publics, dont, pourtant, nombre de vos amis réclament le maintien dans leur propre commune.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l'amendement n° 126.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement de suppression de l'article 5 se justifie par le fait que 32 millions de contribuables ne sont pas concernés par le bouclier fiscal, qu'il est difficile à ce stade de dissocier de l'impôt sur la fortune.
Monsieur le rapporteur général, puisque vous êtes très attentif à satisfaire aux engagements de campagne du candidat que vous avez soutenu - ce que je peux comprendre - ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est la moindre des choses !
Mme Nicole Bricq. ... je vous rappelle que Nicolas Sarkozy avait déclaré, lorsqu'il était candidat, ne pas vouloir supprimer l'ISF.
M. Philippe Marini, rapporteur général. On ne le supprime pas !
Mme Nicole Bricq. Or force est de constater que l'abaissement du plafond du bouclier fiscal à 50 % revient à vider d'une grande partie de sa substance l'ISF. Pour cette raison, il est très difficile de dissocier les deux sujets, mais je reviendrai tout à l'heure sur le fond de ce débat parce qu'il est toujours intéressant de discuter de l'impôt sur la fortune.
En optimisant - je me réfère aux calculs effectués par les experts et les conseillers fiscaux pour leurs clients - les possibilités offertes par le bouclier fiscal, il est en réalité possible d'en abaisser le plafond jusqu'à 39 %, voire en deçà.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas exact, je vous le montrerai tout à l'heure !
Mme Nicole Bricq. Nous sommes donc toujours -peut-être le mot vous paraît-il fort - dans une certaine tromperie vis-à-vis de l'opinion publique. En effet, quand on prend en compte la réalité, que l'on fait les calculs, on se rend compte que, pour les redevables de l'ISF, l'économie d'impôt est décuplée par rapport à ceux qui n'y sont pas assujettis. Elle peut atteindre 22 000 euros en moyenne pour ceux qui sont assujettis à l'ISF nouvelle formule, tandis que pour les contribuables que vous considérez comme « moyens », « modestes », « moyens supérieurs », « moyens inférieurs », elle pourrait n'être que de 650 euros. Les inégalités vont, une fois encore, considérablement s'accroître.
En outre, et M. le rapporteur général le sait très bien, une telle réforme pèsera lourdement sur le budget de l'État.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle rapportera également ! (Mme Marie-France Beaufils manifeste son scepticisme.)
Mme Nicole Bricq. Nous aurons l'occasion d'en reparler, monsieur le rapporteur général !
Quoi qu'il en soit, la réforme qui nous est présentée coûtera probablement 1,5 milliard d'euros à nos finances publiques, ce qui n'est tout de même pas rien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais elle sera créatrice de richesses !
Mme Nicole Bricq. Cela, nous aurons l'occasion d'en débattre ultérieurement.
Cet amendement vise donc à supprimer un dispositif qui, en abaissant à 50 % le seuil d'application du déjà très injuste bouclier fiscal, ne ferait qu'aggraver une telle injustice et reviendrait de fait à vider l'ISF de sa substance.
Monsieur le rapporteur général, je reviendrai tout à l'heure sur le problème de l'attractivité et de la compétitivité de notre territoire,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui ! Nous y reviendrons !
Mme Nicole Bricq. ... ainsi que des vertus supposées de la suppression de l'ISF sur l'économie de notre beau pays.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons déjà travaillé ensemble sur cette question, et en bonne harmonie !
M. le président. L'amendement n° 80, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les articles premier et 1649 0A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. C'est désormais un fait acquis, le bouclier fiscal a été pensé et conçu essentiellement pour réduire l'impôt de solidarité sur la fortune. C'est en tout cas ma perception et elle est partagée par nombre d'observateurs, du moins si j'en crois tout ce qui a été écrit sur le sujet ces derniers temps.
En outre, il est également acquis que l'ISF est l'impôt compris dans le « paquet fiscal » dont la fixation de la base d'imposition souffre de la plus grande approximation.
En effet, alors qu'il est évidemment très difficile pour un contribuable de masquer la réalité des sommes perçues quand il s'agit de déclarer un revenu à caractère salarial, la situation des assujettis à l'ISF, dont la déclaration de patrimoine vaut établissement de l'assiette de l'impôt concurremment à sa liquidation, est fort différente.
Bien souvent, nombre de biens sont manifestement sous-évalués.
D'une part, la valeur de certains biens immobiliers est souvent notoirement sous-estimée par les déclarants, ce qui occasionne d'ailleurs des redressements parfois sensibles de la base imposable, comme de l'impôt dû.
D'autre part, et dans le même ordre d'idée, certains contribuables semblent éprouver quelques difficultés à estimer les biens meubles dont ils disposent et qui participent également de la fixation de l'assiette imposable. Les valeurs mobilières constituent donc le deuxième facteur essentiel de sous-évaluation des patrimoines, s'agissant notamment de la détention de titres de sociétés non cotées.
Pour les sociétés cotées, la situation est simple, car la valeur des biens peut être estimée par référence expresse au cours de bourse, qui est une donnée publique, incontestable et vérifiable.
Il en va différemment pour les sociétés non cotées, puisque la valorisation de telles entreprises dépend largement de l'accumulation des résultats, de leur affectation ou encore de la plus-value latente que le détenteur pourrait escompter de la cession de ses titres.
Dans les faits, compte tenu des deux types de sous-évaluation manifeste du patrimoine que je viens d'évoquer, le produit de I'ISF est souvent au moins tronqué par l'absence de prise en compte de certains biens concernés dans l'assiette de l'impôt.
En d'autres termes, un contribuable assujetti à l'ISF préférera toujours sous-évaluer son patrimoine de plusieurs centaines d'euros ou de plusieurs milliers d'euros et réduire d'autant son imposition plutôt que de courir après la restitution d'un trop-payé d'impôts dont le montant sera probablement inférieur à l'allégement réalisé grâce à une déclaration imparfaite.
Par conséquent, je vous propose d'adopter cet amendement pour nous permettre de réaliser une économie dans le budget de l'État.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 81 rectifié est présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 128 est présenté par Mme Le Texier et Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 205 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le f du 2° du II de cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 81 rectifié.
Mme Marie-France Beaufils. Pendant la campagne électorale, la question des valeurs de notre République a été souvent abordée, ce qui, d'ailleurs, a parfois occasionné des échanges à mes yeux fort intéressants.
Malheureusement, ce qui nous est proposé aujourd'hui - je fais référence à l'inclusion de la CSG et de la CRDS dans le bouclier fiscal - touche véritablement, me semble-t-il, à des valeurs hautement symboliques de notre République.
Pourquoi la participation à la solidarité nationale, qui est une valeur fondamentale, des personnes disposant des ressources les plus importantes devrait-elle être atténuée ?
Parallèlement, le Gouvernement souhaite renforcer la contribution des RMIstes, des retraités et des travailleurs pauvres, via la TVA sociale, qui est pourtant bien l'impôt le plus injuste. Madame la ministre, l'habillage que vous y mettez ne change rien à la réalité.
Par ailleurs, les partisans de la mise en oeuvre du bouclier fiscal insistent souvent sur le caractère prétendument excessif des prélèvements obligatoires en France, en émettant des comparaisons avec le niveau de fiscalité des États-Unis.
Mes chers collègues, je vous suggère de considérer dans quelles proportions chaque citoyen des États-Unis participe personnellement à la prise en charge de sa protection sociale et de sa retraite. Vous le constaterez alors, le niveau de prélèvements sur les ressources de l'ensemble des foyers y est au moins aussi élevé, si ce n'est plus, qu'en France.
Par conséquent, cet amendement, qui est naturellement un amendement de repli, vise à exclure la CSG et la CRDS du bouclier fiscal.
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour présenter l'amendement n° 128.
Mme Christiane Demontès. Il s'agit également d'un amendement de repli.
Lors de la création du système du bouclier fiscal, le Gouvernement n'a pas indiqué quelle serait la part de ce système dont les organismes de sécurité sociale pourraient avoir à supporter la charge, compte tenu de l'inclusion de la CSG, de la CRDS et des prélèvements sociaux dans la nouvelle formule.
Aussi, l'ensemble des assurés sociaux, qui sont par ailleurs soumis à des franchises nouvelles, se voient contraints de financer le cadeau fiscal offert à certains contribuables très aisés, redevables de l'ISF.
Nous proposons donc d'exclure explicitement la participation financière des organismes de sécurité sociale au mécanisme du bouclier fiscal, car l'inclusion de la CSG, de la CRDS et des prélèvements sociaux dans la base de calcul de celui-ci en accentue encore le caractère injuste et contribue à multiplier le nombre de contribuables assujettis à l'ISF qui verront leur imposition réduite, et ce au détriment de l'ensemble des ménages.
Ces derniers ne doivent pas continuer à financer le coût du bouclier fiscal sur le budget de l'État, via des hausses de prélèvements, notamment sociaux, pour combler les déficits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° 205.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement a pour objet d'exclure les impôts sociaux du périmètre du bouclier fiscal.
À cet égard, je voudrais me livrer à un petit calcul, qui n'a d'ailleurs pas toujours été bien explicité.
Lors de la création du bouclier fiscal, dont le taux était alors fixé à 60 %, nous avions déjà débattu de l'éventuelle inclusion des impôts sociaux dans son champ d'application. Finalement, cette option n'avait pas été retenue.
Ainsi, dans la mesure où les prélèvements sociaux peuvent atteindre jusqu'à 11 % des revenus d'un contribuable, le bouclier fiscal s'élevait en réalité à 60 % plus 11 %, soit 71 %.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Jean-Jacques Jégou. À présent, cumulée à la baisse de dix points du bouclier fiscal, l'inclusion des prélèvements sociaux peut entraîner une baisse de vingt et un points de ce dernier.
Or, lorsqu'il était ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, M. Copé insistait fréquemment sur la nécessité de réduire la dette de l'État et affirmait qu'il n'était pas question de modifier le socle de 60 % du bouclier fiscal, encore moins d'y inclure les prélèvements sociaux.
Mme Nicole Bricq. Exact !
M. Jean-Jacques Jégou. Certes, depuis, est intervenue la « rupture ». (Sourires.)
J'ignore si la rupture implique de creuser les déficits publics, mais, selon nous, si l'abaissement du bouclier fiscal à 50 % peut être accepté, il n'est, en revanche, pas sérieux d'y inclure les prélèvements sociaux, car cela risquerait de poser des problèmes de compensation à l'« euro près », pour reprendre l'expression de votre prédécesseur, madame la ministre. Nous le savons bien, à l'« euro près », l'État est redevable de plus de 6,7 milliards d'euros à la sécurité sociale.
M. Guy Fischer. Voilà !
M. Jean-Jacques Jégou. Il nous paraît donc vertueux, et même nécessaire, de ne pas inclure les prélèvements sociaux dans le bouclier fiscal, afin que le déficit budgétaire de l'État soit un peu moins élevé.
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Compléter le texte proposé par le b du 4° du II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque, au cours d'une année, un contribuable a réalisé un revenu dont le montant dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l'intéressé peut, sur demande expresse et irrévocable, répartir l'écart constaté par parts égales, sur l'année au cours de laquelle il a disposé de ce revenu exceptionnel et les trois années suivantes. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du lissage des revenus exceptionnels pris en compte dans le bouclier fiscal est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, qui est avant tout un amendement de questionnement, vise à lisser les revenus exceptionnels, notamment les plus-values, pour leur prise en compte dans le bouclier fiscal.
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Rédiger comme suit le II bis de cet article :
II bis.- 1. Le IV de l'article 74 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi rédigé :
« IV. - La restitution prévue à l'article 1649-0 A du code général des impôts est prise en charge par l'État. »
2. Le 1 est applicable aux impositions payées à compter du 1er janvier 2006.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'absence de prise en charge par les collectivités territoriales du coût du bouclier fiscal est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, auquel la commission des finances est très attachée, vise à introduire une véritable simplification dans la mise en oeuvre du dispositif : il s'agit d'indemniser les collectivités territoriales des conséquences du calcul du bouclier fiscal.
En d'autres termes, la complexité de la liquidation du bouclier fiscal peut théoriquement conduire à réclamer aux collectivités locales des trop-perçus d'impôts locaux.
Si l'enjeu global ne sera pas très important, la machine pour faire fonctionner la procédure sera une véritable usine à gaz.
M. Denis Badré. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Madame la ministre, la commission des finances souhaite l'éviter !
Par conséquent, la mesure que cet amendement tend à mettre en oeuvre permettra de faciliter et de simplifier le jeu du bouclier fiscal par une imputation sur la dotation globale de fonctionnement.
Je le rappelle, une telle question avait été assez longuement abordée à l'occasion du débat sur le projet de loi de finances pour 2006, qui a créé le dispositif du bouclier fiscal. Nous avions alors été nombreux à intervenir sur le sujet pour réclamer une telle simplification, à laquelle la commission des finances tient beaucoup.
M. le président. L'amendement n° 127, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. Avant le II bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le IV de l'article 74 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi rédigé :
« IV. - La restitution prévue à l'article 1649-0 A du code général des impôts est prise en charge intégralement par l'État. »
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes due à la prise en charge par l'État de la restitution prévue à l'article 1649-0 A du code général des impôts est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Cet amendement se rapproche de celui qui vient de nous être présenté par M. le rapporteur général.
Lors de l'adoption du bouclier fiscal dans le projet de loi de finances pour 2006, la question de la participation financière des collectivités locales avait déjà suscité de vives discussions, car les impôts locaux acquittés en raison de l'habitation principale avaient été inclus dans le dispositif.
Pour notre part, nous avions combattu cette mesure. Outre que nous sommes opposés au bouclier fiscal, nous contestons l'inclusion en son sein des impôts locaux, car cela contrevient au principe d'autonomie financière des collectivités locales, dont le levier fiscal est un des éléments essentiels. Malgré cela, la majorité avait alors décidé d'inclure une telle participation financière dans le bouclier fiscal.
Nous revenons donc à la charge avec cet amendement pour défendre la même idée.
L'abaissement du bouclier fiscal à 50 % tendra à accroître la part des impôts locaux soumis à plafonnement et à grever d'autant plus les dotations à l'ensemble des collectivités locales. Celles-ci devront alors, dans leur ensemble, financer une réforme qui bénéficie seulement à une poignée de contribuables aisés, et ce à un moment où la pression sur les finances locales est déjà très forte.
L'annonce de la suppression du contrat de croissance et de solidarité va conduire à un manque à gagner de plus de 520 millions d'euros en 2008 ; si l'on y ajoute la régularisation négative de DGF pour 2006, ce manque à gagner atteindra 600 millions d'euros.
Dans ces conditions, il nous semble totalement anormal de vouloir mettre une nouvelle fois à contribution les collectivités locales pour une réforme sur laquelle elles n'ont pas eu leur mot à dire ! Par ailleurs, je note que rien de similaire n'est prévu vis-à-vis de la sécurité sociale au titre de la CSG.
Dans ces conditions, nous nous réjouissons que la commission des finances, comme vient de l'indiquer M. le rapporteur général, soit arrivée à la même conclusion que nous, et présente un amendement inspiré par une philosophie similaire. Nous nous rallierons donc à cet amendement, puisqu'il satisfait la préoccupation que nous avions déjà exprimée lors du vote de la loi de finances pour 2006.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci !
M. le président. L'amendement n° 206, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après le II bis de cet article, insérer deux paragraphes ainsi rédigés :
... - Dans la première phrase du premier alinéa du 8 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, les mots : « Les demandes de restitution doivent être déposées » sont remplacés par les mots : « Les restitutions sont effectuées »
... - Les pertes de recettes résultant pour l'État du paragraphe ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Cet amendement tend simplement à rendre automatique la restitution du trop-perçu lorsque le bouclier fiscal a joué en faveur du contribuable.
M. le président. L'amendement n° 239, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mmes Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV. - Après l'article 1649-0 A du code général des impôts, il est inséré un article 1649-0 B ainsi rédigé :
« Art. 1649-0 B - L'application du droit à restitution défini à l'article 1649-0 A ne peut conduire à rendre la cotisation d'impôt de solidarité sur la fortune calculée en application de l'article 885 U du code général des impôts inférieure à :
« - 1 230 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 732 000 euros et inférieur ou égal à 1 180 000 euros ;
« - 4 346 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 1 180 000 euros et inférieur ou égal à 2 339 000 euros ;
« - 6 610 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 2 339 000 euros et inférieur ou égal à 3 661 000 euros ;
« - 21 814 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 3 661 000 euros et inférieur ou égal à 7 017 000 euros ;
« - 67 963 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 7 017 000 euros et inférieur ou égal à 15 255 000 euros ;
« - 100 000 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 15 255 000 euros ».
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Madame la ministre, vous vous êtes engagée devant nos collègues députés à déposer, d'ici à l'automne, un rapport pour répondre à la revendication de l'instauration d'une cotisation minimale à l'impôt, émanant des rangs de la majorité, mais également de nos collègues socialistes.
Le groupe socialiste vous propose une solution répondant, au moins en partie, à cette revendication. En effet, le bouclier fiscal doit être relié à l'ISF. Or il nous apparaît comme étant une remise en cause, un contournement de l'ISF, redoutablement efficace au détriment des finances publiques comme en faveur de ceux qui en profiteront.
Notre amendement vise à empêcher que l'application du bouclier fiscal ne réduise la cotisation due par le contribuable au titre de l'ISF en dessous d'une cotisation minimale calculée pour chaque tranche d'imposition du patrimoine et des revenus.
Cet amendement ne conduit en aucun cas à un relèvement de la cotisation d'ISF due par rapport à celle qui serait payée hors application du bouclier fiscal. Il permet simplement d'assurer que les contribuables redevables de l'ISF ne pourront pas, purement et simplement, annuler leur cotisation grâce à l'application du bouclier fiscal, mais resteront redevables d'une cotisation minimale à ce titre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, si vous le permettez, je ferai une brève introduction commune aux différents amendements avant d'en venir aux commentaires particuliers.
Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la question de l'ISF a été souvent abordée au sein de cette assemblée. Par comparaison avec l'Assemblée nationale, nous avons d'ailleurs eu la sagesse de le faire, en général, en termes réalistes. Je me souviens, en particulier, des propos de notre collègue Nicole Bricq, qui était, me semble-t-il, un peu plus ouverte ou interrogative en ce temps-là qu'elle ne l'est aujourd'hui. La majorité sénatoriale avait, d'ailleurs, souligné le sens des responsabilités dont elle faisait preuve à l'époque.
La question principale est celle de l'attractivité du territoire, car c'est bien de cela qu'il s'agit ! Nous savons que les impôts sur le patrimoine sont devenus l'exception en Europe.
Au début de cette année, avec Élisabeth Lamure et Nicole Bricq notamment, nous avons fait un déplacement en Europe du Nord, dans le cadre de la mission d'information sur les centres de décision économique constituée par le Sénat. Parmi beaucoup d'autres éléments, nous en avons retiré un double constat : la Finlande, à la suite d'un accord national entre les partenaires sociaux, a définitivement supprimé l'impôt sur la fortune ; la Suède, avec l'arrivée d'une nouvelle majorité, se dirige vers la diminution, clairement assumée devant l'opinion publique, de cet impôt sur la fortune et sa suppression en fin de législature.
Tous les pays européens doivent affronter la problématique de l'attractivité. La commission des finances s'est efforcée de démontrer, à plusieurs reprises et avec les chiffres fournis par l'administration des finances, que le mouvement d'expatriation des capitaux s'est poursuivi et amplifié ces dernières années. En effet, là où nous disions qu'un patrimoine par jour se délocalisait - c'était une formule du président Arthuis -, au vu des estimations les plus récentes, il s'agit désormais de deux patrimoines par jour. Qu'on le veuille ou non, c'est une réalité ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)
Pour se développer, un pays a besoin de tous ses acteurs économiques ! Il a besoin de la force laborieuse de ses travailleurs, bien entendu, mais il a aussi besoin de fortunes, de patrimoines qui s'investissent, qui permettent de créer du travail et de soutenir le dynamisme de l'économie !
M. Guy Fischer. Il faut une juste répartition des richesses !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Un pays ne se réduit pas à une seule catégorie sociale, c'est une communauté vivante, qui comprend et comprendra toujours des riches et des pauvres ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Le problème, c'est la répartition !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans la France du début du xxie siècle, nous voulons bien entendu que la richesse collective s'accroisse mais, pour y parvenir, il ne faut pas faire fuir la richesse privée ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Celles et ceux qui, depuis des années, dans cette assemblée, sont attachés à un traitement réaliste et modéré de cette question ne prétendent pas dire autre chose. Et ils ne sont pas les seuls !
Pour achever mon introduction, permettez-moi de citer une tribune parue, si je ne me trompe, dans le journal Libération...
M. Guy Fischer. Excellente lecture !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... du vendredi 22 juillet 2005, et signée de Gaëtan Gorce, notre collègue député de la Nièvre, secrétaire national du parti socialiste, proche de l'ancien Premier ministre Lionel Jospin.
Je vous cite les passages les plus importants : « Reste donc la question de rendre cet impôt compatible avec notre environnement économique, c'est-à-dire trouver la façon d'avoir une fiscalité française qui soit juste dans un monde qui ne l'est pas. En effet, la plupart des pays, en Europe et dans le monde, n'ont pas notre conception de la justice fiscale et de l'égalité devant la fiscalité de toutes les formes de richesse. Il suffit donc de délocaliser sa fortune à l'étranger ou de quitter la France pour échapper à cet impôt. »
« Rendre l'ISF compatible avec notre environnement économique, c'est ensuite régler le cas des redevables de l'ISF qui ne disposent objectivement pas des revenus permettant d'acquitter l'impôt - c'est-à-dire le ?syndrome de l'île de Ré?. En effet, le fait de forcer un contribuable à vendre son bien ne pose pas de problème d'un point de vue économique. Il pose en revanche un problème politique : accepter un impôt qui force un paysan de l'île de Ré qui n'a rien changé à son mode de vie à vendre un terrain parce que le prix du terrain a augmenté autour de lui, c'est accepter un système qui soumet la liberté de certains à la loi et éventuellement aux errements du marché. »
Je vous renvoie à cette tribune...
M. François Marc. Toujours le même exemple !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec cette citation, je veux simplement dire, cher collègue, que tous les gens de bonne foi, quelles que soient leurs opinions politiques, savent que le problème auquel s'attaque le bouclier fiscal ne peut pas être évacué par quelques propos simplistes ! Le seul qui a eu la franchise, ces derniers mois, de s'exprimer face à l'opinion publique à ce sujet, c'est Nicolas Sarkozy ! (Murmures sur les travées du groupe CRC.)
Mme Marie-France Beaufils. Il a dit qu'il ne supprimerait pas l'impôt sur la fortune !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il l'a dit et nous l'assumons, chère collègue !
Mme Marie-France Beaufils. Vous le videz de sa substance !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'est pas question de supprimer l'impôt de solidarité sur la fortune ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. On verra ça !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Qu'il vous suffise de vous référer, mes chers collègues, à l'entretien accordé par Nicolas Sarkozy au journal Les Échos, au mois de janvier 2007. Ce que nous mettons en oeuvre aujourd'hui correspond strictement aux termes de cet entretien !
Pourquoi la commission des finances ne peut-elle pas accepter, je le dis par avance, les amendements qui viseraient à exclure la résidence principale des bases de l'ISF ? Parce que l'ISF n'est pas supprimé ! Si elle acceptait ces amendements, elle se placerait en contradiction par rapport au principe de l'égalité devant l'impôt.
Or, croyez-le, une grande partie de notre électorat réclame cette mesure ! Nous ne pouvons pas y souscrire précisément parce que nous assumons le choix de ne pas supprimer l'ISF. À l'inverse, notre volonté est d'éviter de rendre l'ISF répulsif au point d'encourager la poursuite et l'amplification du mouvement d'expatriation des capitaux.
Après ce rappel liminaire - je ne reviendrai pas sur ces considérations générales, rassurez-vous, monsieur le secrétaire d'État - ...
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Je suis très rassuré ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce texte est politique : il faut bien faire un peu de politique !
M. François Marc. On a déjà entendu ça !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'en viens donc aux amendements...
M. Thierry Repentin. À cette allure, nous ne sommes pas arrivés !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous qui avez exprimé vos convictions, permettez que la majorité exprime les siennes !
Mme Nicole Bricq. On vous écoute et on va vous répondre !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sinon, à quoi servirait cet hémicycle ?
Mme Nicole Bricq. Je suis heureuse de vous l'entendre dire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'en viens donc aux amendements de suppression nos 79 et 126 qui, bien entendu, recueillent l'avis défavorable de la commission.
S'agissant de la prise en compte de la CSG, permettez-moi de rappeler, chers collègues du groupe socialiste, que vous considérez en principe, comme moi-même, que la CSG est une partie de l'impôt sur le revenu ! Vous êtes donc en contradiction avec vos propres analyses économiques.
Nous pouvons diverger sur la question de savoir où s'arrête la proportionnalité et où doit commencer la progressivité. Mais, sur le fond des choses, M. Strauss-Kahn a raison quand il dit que la CSG est une partie de l'impôt sur le revenu payée par les mêmes personnes sur les mêmes revenus ! À qui fera-t-on croire, sous prétexte que ces sommes n'aboutissent pas dans les mêmes caisses, qu'elles ne constituent pas un élément d'un seul et même impôt ? Tirons-en les conséquences : intégrons la CSG au bouclier fiscal !
La commission des finances a, d'ailleurs, déjà adopté un amendement analogue l'année dernière. Nous sommes donc constants sur nos positions et il convient, par conséquent, d'émette un avis défavorable sur tout amendement qui irait en sens inverse.
S'agissant de l'amendement n° 205, je voudrais rappeler en particulier à notre collègue Jean-Jacques Jégou - et, par son intermédiaire, à notre collègue député Charles-Amédée de Courson - qu'il s'est trompé dans un calcul arithmétique simple !
M. Thierry Repentin. Petit règlement de comptes entre amis !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le bouclier fiscal, tel qu'il existe depuis M. de Villepin, c'est 60 % sans la CSG ni la CRDS, ce qui équivaudrait à 71 %, si on incluait ces deux contributions, comme le souhaite la commission des finances.
Il s'agit donc d'intégrer la CSG et la CRDS dans le calcul, et d'affirmer en outre un principe de caractère général, voire quasiment constitutionnel - puisque la Constitution est appelée à être souvent modifiée, pourquoi ne pas, ma foi, l'y inscrire ? -, selon lequel le total des impôts directs payés par un contribuable ne pourra être supérieur à 50 % de ses revenus.
En tout état de cause, comment M. de Courson a-t-il obtenu ce taux de 39 % ? Je me le demande ! J'ai entendu citer ce pourcentage, qui a été repris en diverses occasions par la presse, mais je réaffirme qu'il n'est nullement envisagé de plafonner le montant des impôts directs à 39 % du revenu ! L'arithmétique le montre ! Il s'agit simplement de ramener ce plafond de 71 % à 50 %. Telle est la réalité du calcul !
M. Jean-Jacques Jégou. C'est ce que j'ai dit !
M. Philippe Marini, rapporteur général. M. Jégou en est parfaitement conscient, et c'est là toute la différence entre l'Assemblée nationale et le Sénat qui apparaît. Grâces vous en soient rendues, mon cher collègue ! (Sourires.)
J'achèverai mon propos en priant les auteurs de l'amendement n° 127 de bien vouloir se rallier à l'amendement n° 39 de la commission, qui les satisfait. Je crois d'ailleurs que M. François Marc l'a déjà dit.
M. François Marc. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En ce qui concerne l'amendement n° 206, qui a trait à l'automaticité de la restitution aux contribuables concernés du trop-perçu par l'administration fiscale, je suggère à ses auteurs de se rallier à l'amendement n° 40 de la commission, qui sera ultérieurement présenté et dont l'objet est analogue.
Enfin, pour ce qui est de l'amendement n° 239, exposé par Mme Bricq, je crois qu'il convient d'attendre le rapport que nous annonce Mme la ministre sur l'impôt minimal. C'est une grande idée, et ce sera un grand rapport, qui nous permettra de réfléchir à cette question. Votre suggestion y sera sans doute reprise, madame Bricq, et je pense que la vérité nous apparaîtra alors. Dans ces conditions, votre amendement me paraît quelque peu prématuré, et je serais heureux que vous puissiez le retirer.
Mme Nicole Bricq. Je croyais que vous étiez pressé, monsieur le rapporteur général !
M. le président. Monsieur Marc, confirmez-vous le retrait de l'amendement n° 127 ?
M. François Marc. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 127 est retiré.
Monsieur Badré, acceptez-vous de retirer l'amendement n° 206 ?
M. Denis Badré. Sous réserve que l'amendement n° 40 le satisfasse effectivement, ce qui n'est pas tout à fait sûr, je le retire, monsieur le président. Le cas échéant, j'interviendrai lors de la discussion sur l'amendement n° 40.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 206 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements restant en discussion ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je reprendrai à mon compte une série d'arguments avancés par M. le rapporteur général dans son propos liminaire, auquel je souscris pleinement.
Tout d'abord, je souhaite recadrer le débat sur ce que l'on appelle vulgairement le bouclier fiscal, dispositif visant à ce que le total des impositions directes n'excède pas 50 % du revenu du contribuable.
En effet, je veux insister sur le fait que le bouclier fiscal ne concerne pas exclusivement les redevables de l'ISF, mais qu'il s'applique aussi à de nombreux autres contribuables. J'ai déjà cité quelques exemples à cet égard.
Par ailleurs, j'approuve bien évidemment les propos de M. le rapporteur général sur l'attractivité de notre territoire.
Nous ne disposons pas encore d'éléments précis sur les intentions d'un certain nombre de sportifs, d'artistes ou autres personnages célèbres, même si certains semblent plutôt disposés à revenir en France. Ce que je peux vous dire en tout cas, en ma qualité de ministre de tutelle de l'Agence française pour les investissements internationaux, c'est que, depuis le début du mois de mai, entame d'une période heureuse qui voit la mise en oeuvre des promesses ayant été faites pendant la campagne électorale, les personnels de cette agence font état de réactions extrêmement positives de la part des investisseurs qui souhaitent venir développer des activités en France, participer à notre économie et créer des emplois.
En effet, tous disent que les deux mesures fondamentales à leurs yeux qui les inciteront à venir investir chez nous ou, pour un certain nombre d'entre eux, à revenir en France sont, d'une part, l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, objet de l'article 1er que, dans sa grande sagesse, la Haute Assemblée a adopté, et, d'autre part, la révision du dispositif du bouclier fiscal.
Eu égard à ces deux dispositions, dont la richesse des débats que nous avons montre l'importance, un certain nombre d'étrangers sont prêts à considérer différemment la France. Or croyez-moi, ce n'est pas forcément chose facile que d'inciter des investisseurs étrangers à venir s'implanter dans notre pays !
En ce qui concerne maintenant le passage de 60 % à 50 % du taux de prélèvement maximal au titre des impôts directs, je reviendrai sur l'inclusion ou non de la CSG et de la CRDS dans le calcul lorsque je donnerai l'avis du Gouvernement sur les amendements.
Fixer à 50 % le taux maximal de prélèvement me paraît avoir valeur de symbole. Cela signifie que l'on établit un partenariat entre le contribuable et l'État, qui assume un certain nombre d'obligations pour l'ensemble de la collectivité. Ce sera donc moitié-moitié : on ne prendra à aucun contribuable plus de 50 % de son revenu pour financer l'exécution de tâches d'intérêt général qui profite à tous.
Cela étant, le dispositif est-il efficace ? Je lis ici ou là que ce ne serait pas forcément le cas. J'observerai que nous n'en sommes qu'aux premiers mois d'application du bouclier fiscal, qui n'est entré en vigueur que le 1er janvier de cette année. De surcroît, un certain nombre de contribuables assujettis à l'ISF n'ont commencé à se préoccuper sérieusement de cette question qu'au mois de juin. Je crois donc qu'il n'est pas temps de condamner un principe dont la mise en oeuvre est toute récente, puisqu'elle ne remonte qu'à six mois.
Revenant quelque peu sur mon intention initiale de ne pas beaucoup évoquer l'ISF à ce stade du débat, je voudrais aborder la question du coût financier de la mesure présentée à l'article 5. Celui-ci est estimé à 625 millions d'euros pour 2008 et à un montant un peu moins élevé pour l'année 2009 puisque, en l'état actuel du texte, une refacturation partielle est prévue. La charge financière liée à la modification du bouclier fiscal représente donc seulement 4 % du coût total des dispositifs présentés dans le texte dont nous débattons.
Je proposerai ensuite à ceux d'entre vous qui affirment que l'on est en train de vider l'ISF de sa substance de se pencher un instant sur les chiffres, car ils traduisent une réalité incontournable.
On me dit que la modification du bouclier fiscal va priver l'ISF de sa portée et qu'il constitue une espèce de détournement. Or le coût de cette mesure est de 625 millions d'euros, soit quelque 15 % des 4,2 milliards d'euros que devrait rapporter l'ISF en 2007. Voilà comment nous vidons l'ISF de sa substance !
Mme Nicole Bricq. C'est pourtant bien ce que vous faites !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette mesure créera des bases supplémentaires !
Mme Christine Lagarde, ministre. Si l'on met en balance, même si cela est certes difficile, la perspective d'un « retour sur investissement » grâce à la création de bases supplémentaires, comme l'a dit M. le rapporteur général, et à une stimulation de l'activité économique, d'une part, et une diminution du produit de l'ISF de 15 %, d'autre part, on s'aperçoit qu'il ne s'agit pas de vider les caisses !
J'en viens aux divers amendements techniques qui ont été présentés, le Gouvernement étant bien entendu défavorable aux amendements de suppression de l'article.
En ce qui concerne les amendements nos 128 et 205 visant à exclure la CSG et la CRDS de l'assiette de calcul, je ferai deux observations.
Premièrement, il n'y a aucune raison de ne pas prendre en compte la CSG et la CRDS pour l'application d'un bouclier fiscal à l'ensemble des impôts directs.
Deuxièmement, je souscris à la formule de calcul proposée par M. le rapporteur général. La mise en oeuvre d'un bouclier fiscal l'année dernière était une excellente initiative, mais la présentation du dispositif, selon laquelle le taux maximal d'imposition directe serait de 60 %, n'était pas tout à fait correcte, car c'est bien d'un maximum de 71 % qu'il s'agit, puisque la CSG et la CRDS n'étaient pas incluses dans le calcul. Notre objectif est donc aujourd'hui de ramener le taux maximal d'imposition directe de 71 % à 50 %.
Pour ces raisons et pour celles que j'ai évoquées tout à l'heure s'agissant d'une répartition équitable de l'effort entre l'État et le contribuable, il ne nous paraît pas souhaitable d'exclure du calcul la CSG et la CRDS. Par conséquent, le Gouvernement est évidemment défavorable aux amendements identiques nos 128 et 205.
En ce qui concerne l'amendement n° 38, vous nous avez indiqué, monsieur le rapporteur général, qu'il s'agit d'un amendement d'appel. Je vous en sais infiniment gré, car cela me permet de vous demander de le retirer, pour la raison suivante.
Votre proposition vise en fait à étaler un revenu certes exceptionnel, mais effectivement disponible, sur une période de trois ans, sans modifier pour autant l'autre membre de l'équation, c'est-à-dire l'imposition.
Dans ces conditions, cela me paraît constituer une augmentation quelque peu artificielle et injustifiée du droit à restitution des personnes titulaires de revenus exceptionnels. C'est la raison pour laquelle je vous prie de bien vouloir retirer cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il est retiré, pour le moment !
Mme Christine Lagarde, ministre. En ce qui concerne l'amendement n° 39, j'indiquerai pour faire simple que, en l'état actuel des choses, lorsque le bouclier fiscal s'applique, le trop-perçu est restitué aux contribuables concernés, et que, parallèlement, cela entraîne une diminution des recettes ayant été encaissées par l'État, d'une part, et par les collectivités territoriales, d'autre part.
Aujourd'hui, l'État refacture aux collectivités territoriales, par le biais du fonds mutualisé, 40 millions d'euros. Si nous abaissons le taux maximal de prélèvement au titre des impôts directs, les restitutions aux contribuables, et donc les refacturations aux collectivités territoriales, vont bien entendu quelque peu augmenter.
Nous estimons, à cet égard, que les restitutions aux contribuables atteindront au maximum, c'est-à-dire dans l'hypothèse où ils demanderaient tous la restitution du trop-payé au titre de l'ISF, 75 millions d'euros, sur la base d'un certain nombre d'assouplissements qui ont déjà été introduits, monsieur le rapporteur général, et auxquels vous avez fait référence. Ils conduisent l'État à prendre en charge toutes les refacturations d'un montant inférieur à 25 euros, la restitution du trop-payé pour les impôts correspondant aux contributions et prélèvements perçus au profit des organismes sociaux et, enfin, la totalité de la restitution - je souligne ce point, car c'est important -, lorsque les impôts perçus au profit de l'État, ajoutés aux prélèvements sociaux, suffisent à eux seuls à dépasser le seuil de 50 % des revenus.
C'est, là encore, le principe du partage du produit de l'imposition entre l'État et les collectivités territoriales qui s'applique. On ne peut pas partager les recettes d'un côté et, de l'autre, laisser l'État assumer en totalité la charge de la refacturation. Il faut bien que l'on établisse une forme de péréquation, et tel est l'objet de cette mesure.
À la suite de l'examen du dispositif à l'Assemblée nationale, le montant de la refacturation aux collectivités territoriales a d'ailleurs été ramené de 75 millions d'euros à 58 millions d'euros.
Cela nous paraît constituer une juste péréquation entre les autorités collectrices de l'impôt. M. le rapporteur général ne sera sans doute pas d'accord avec nous sur ce point, mais c'est néanmoins un avis défavorable que le Gouvernement émet sur l'amendement n° 39.
En ce qui concerne enfin l'amendement n° 239, vous suggérez, madame Bricq, l'instauration d'une cotisation minimale au titre de l'ISF. Comme l'a indiqué M. le rapporteur général, nous allons bientôt examiner le principe de l'impôt minimal, appliqué à l'impôt sur le revenu. Nous reviendrons sur cette question à la mi-octobre, et je pense que nous serons alors mieux éclairés sur les vertus d'un seuil minimal d'imposition.
Pour l'heure, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 239.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 79 et 126.
Mme Marie-France Beaufils. Je m'exprimerai brièvement, comme Mme la ministre et M. le rapporteur général viennent d'ailleurs de le faire, sur l'ensemble du dispositif de l'article 5, qui me paraît former un tout.
Madame la ministre, votre présentation des chiffres pourrait laisser supposer que le bouclier fiscal ne représente pas grand-chose, que peu de contribuables - tout du moins peu de ceux qui sont assujettis à l'ISF - sont concernés.
Puisqu'on évoque le chiffrage, j'estime qu'il serait bon d'examiner quel est le poids des différentes impositions, directes et indirectes, selon les foyers.
Dans le cadre de la mission « Remboursements et dégrèvements », dont je suis le rapporteur spécial pour la commission des finances au Sénat, nous avions analysé le poids de la fiscalité locale sur les foyers. Nous avions examiné, en particulier, comment chaque strate d'imposition sur le revenu -taxe d'habitation, taxe sur le foncier bâti, taxe d'enlèvement des ordures ménagères - pesait sur les foyers proportionnellement à leurs capacités.
Je trouverais très intéressant que l'on fasse les mêmes calculs en y ajoutant l'impôt sur le revenu, l'ISF, la CSG et le CRDS. Cela nous permettrait de disposer d'une véritable analyse en pourcentages des moyens dont chaque foyer dispose pour vivre.
En effet, la situation n'est plus du tout dans la même lorsque les résultats sont donnés en pourcentages. Ainsi, on constate que la TVA, qui nous est présentée comme une mesure formidable, pèsera beaucoup plus lourdement sur un foyer modeste que sur un assujetti à l'ISF. Ces éléments doivent être analysés pour pouvoir être appréciés.
Par ailleurs, je regrette que, lorsque l'État prend une décision, il considère une fois de plus que les collectivités territoriales se doivent de supporter une partie de la charge qui en découle, même si elles n'ont pas été associées à la prise de cette décision.
Pour cette raison, je ne peux admettre que, puisqu'il a été décidé d'intégrer les impôts locaux dans le bouclier fiscal, on continue à demander aux collectivités territoriales de prendre en charge une partie du coût qui en résultera. Le terme de « péréquation » me semble donc très mal choisi pour qualifier la participation obligatoire des collectivités territoriales au bouclier fiscal. (M. Guy Fischer applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je n'avais pas prévu de prendre la parole, mais je veux répondre au rapporteur général qui m'a citée à deux reprises dans son propos liminaire à son avis sur les amendements. Par principe, je ne refuse jamais un combat, surtout lorsqu'il porte sur un important débat de fond !
Madame la ministre, vous avez illustré les propos tenus précédemment par le président de la commission des finances et par notre président de séance.
Quand le Gouvernement fait un chiffrage de ses propositions, le coût est toujours faible pour les finances publique ; lorsque nous, parlementaires, proposons des amendements, c'est toujours très onéreux pour le budget de l'État !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très juste !
Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur général, j'étais membre de la mission d'information, dont vous étiez le président, qui s'est intéressée à la question de l'attractivité et de la compétitivité du territoire national. À ce titre, nous avons auditionné la fine fleur du capitalisme français ; nous sommes allés voir aussi ce qui se passait hors de nos frontières.
Même s'il est l'un des critères, à aucun moment le problème de la fiscalité n'a été cité comme étant un facteur primordial empêchant l'activité économique.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une interprétation sélective !
Mme Nicole Bricq. Non ! Regardez le tableau de l'Agence française des investissements qui figure dans votre rapport. On y constate que les premiers critères en termes d'attractivité sont la qualité des infrastructures, la qualité de la main-d'oeuvre, et la formation. Le critère de l'imposition des revenus personnels ou de ceux des entreprises n'arrive qu'en sixième position. Dans les auditions que nous avons menées, il n'a jamais été cité spontanément par nos interlocuteurs.
À partir du moment où les biens professionnels ne sont pas inclus dans l'assiette de l'ISF, il est très difficile de lui trouver des vices ou des vertus économiques.
Vous pouvez difficilement contester cet argument, dans la mesure aussi où vous souhaitez que ce capital devienne actif, qu'il ne reste pas dormant. Du reste, vous y êtes sensible, puisque vous allez soutenir un amendement pour un fléchage de l'ISF vers les PME, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
Mme Nicole Bricq. ... fléchage que je contesterai par ailleurs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous devriez y être favorable !
Mme Nicole Bricq. Vous avez cité un journal du matin. Permettez-moi de citer deux journaux économiques, et ce que je vais vous dire vaudra aussi pour la présentation de mon amendement sur le retour des expatriés.
M. Denis Payre, administrateur délégué de Kiala et fondateur de CroissancePlus, déclarait dans une interview au journal Les Échos le 21 octobre 2005 : « Si le bouclier fiscal était voté, je réfléchirais à la possibilité de revenir en France ».
Dans La Tribune, en janvier 2006 - je ne vais pas détailler l'article -...
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Heureusement !
Mme Catherine Procaccia. Vous n'avez pas d'article plus récent ?
Mme Nicole Bricq. ... le même M. Payre annonçait : « pourquoi je ne reviens pas en France. »
Au passage, il donnait un coup de canif au « syndrome de l'île de Ré ». Je le cite : « On a beaucoup parlé [...] du caractère injuste de l'ISF subi par les agriculteurs [...]. Ce que subissent les entrepreneurs est encore plus injuste. Un terrain à l'île de Ré, même après la période de spéculation immobilière que nous traversons, vaudra toujours quelque chose. » Il soulignait également qu'«à ce bouclier fiscal [...] doit s'ajouter l'extension à l'ISF du régime des impatriés ». On voit donc bien que les deux problèmes sont liés.
Évidemment, j'espère que, l'année prochaine, vous pourrez nous annoncer que M. Payre fait partie de ceux qui sont revenus grâce à votre mesure...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il y en a à qui il en faut toujours plus...
M. le président. Vous avez largement dépassé votre temps de parole. Veuillez conclure, chère collègue.
Mme Nicole Bricq. Le rapporteur général s'est longuement exprimé. C'est un débat important !
M. Guy Fischer. Le rapporteur général a été très long !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai été très bref sur les amendements !
M. le président. Le règlement précise que le temps de parole est de cinq minutes. Veuillez donc conclure maintenant, ma chère collègue !
Mme Nicole Bricq. Je reviendrai sur ce sujet au moment de la discussion sur l'article 6. Notre proposition de suppression de ce bouclier fiscal, que vous allez encore aggraver, est parfaitement justifiée.
M. le président. Chers collègues, je vous demande de respecter les temps de parole.
La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.
Mme Bariza Khiari. Les articles 4 et 5 fonctionnent en tandem : leurs dispositions se renforcent mutuellement.
Contrairement à vos affirmations, l'article 5 n'a pas vocation à empêcher que plus de la moitié de ce que l'on a gagné serve à payer les impôts et les taxes. Ce sont non pas les revenus du travail qui sont en jeu, mais bien les revenus complémentaires, c'est-à-dire le patrimoine : en effet, tout le monde sait que la tranche maximale de l'impôt sur le revenu est bien inférieure à 50 %.
Avec l'article 4, vous facilitez la transmission du patrimoine et, avec l'article 5, vous faites en sorte que celui dont on a hérité ne soit pas imposable ou le soit nettement moins. Cette mesure, évaluée à plusieurs centaines de millions d'euros, bénéficie largement aux plus riches.
Madame la ministre, votre politique c'est vraiment : « Pour gagner plus, soyez riches. » !
Quant à l'efficacité économique de la disposition, permettez-nous d'émettre des doutes. Les précédentes mesures de défiscalisation - je pense, notamment, à la loi dite Dutreil du 1er août 2003, permettant une exonération partielle d'ISF des parts des sociétés en contrepartie d'un engagement collectif conservatoire - n'ont pas dissuadé les candidats à l'exil fiscal. Cet argument ne vient pas de moi, il figure à la page 114 du rapport de M. Marini...
Ce dispositif nous semble particulièrement injuste et ne présente aucune résonance sérieuse avec le titre de votre projet de loi. Pour nous, la capacité contributive est au coeur de la justice sociale : c'est pourquoi nous voterons contre cet article inouï, qui renforce le bouclier fiscal.
M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.
M. Jacques Muller. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sous prétexte de vouloir rétablir l'attractivité du territoire - alors que cette question est liée au dumping fiscal qui fait rage en Europe et qu'elle devrait être traitée à ce niveau-là -, ce bouclier fiscal n'est qu'un cadeau offert aux plus riches de notre société.
Les écarts de revenus et de patrimoine ont déjà atteint des proportions tout à fait démesurées, et votre Gouvernement, madame la ministre, a apparemment comme première urgence de les augmenter encore. La droite est devenue tellement décomplexée qu'elle se permet tous les excès !
Ainsi, monsieur Marini, vous osez introduire votre rapport par cette curieuse affirmation selon laquelle « le caractère confiscatoire de l'impôt, s'il touche les ?riches?, concerne, sur le plan quantitatif, davantage encore les ?pauvres? ».
Autrement dit, le bouclier fiscal à 50 % serait pour les pauvres : de tels propos laissent pantois...
Bien entendu, vous êtes parvenu à mettre en exergue quelques exemples de ménages modestes à qui quelques dizaines d'euros seraient restitués, c'est le fameux « syndrome de l'île de Ré ». Comme d'habitude, on cherche à mettre en avant des cas d'exception, pour quelques centaines d'euros, pour justifier à l'autre bout de l'échelle les millions d'euros de cadeaux pour les plus riches.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon le rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale, le coût annuel du bouclier fiscal serait de 810 millions d'euros. Les patrimoines supérieurs à 7,14 millions d'euros, soit 12 784 foyers, se verraient restituer à eux seuls 583 millions d'euros, soit une moyenne de 45 600 euros par foyer. En clair, plus on est riche, plus on y gagne. Chacun des 1 081 plus gros contribuables qui bénéficieront du bouclier fiscal ramené à 50 % des revenus touchera un chèque de 250 000 euros.
Un tout petit dixième de ces chèques octroyés aux plus riches correspond exactement à l'argent mis sur la table par l'État pour financer l'expérimentation du revenu de solidarité active. Madame la ministre, ce texte est tout ce que vous voudrez, sauf un projet de loi équilibré:
Si le Gouvernement n'ose pas abolir purement et simplement l'impôt de solidarité sur la fortune, chacun aura pu mesurer combien ce bouclier fiscal à 50 % contribue à le vider progressivement de sa substance.
Au moins, les propos du député UMP des Yvelines, Jacques Myard, dans le journal Marianne, ont le mérite de la clarté: « 30 % [de réduction sur l'ISF], c'est une sucette pour les députés. Moi j'ai déposé un amendement de suppression totale. Mais cela va dans le bon sens. La porte est enfin ouverte grâce à deux disparitions, celle de Chirac de l'Élysée et celle de l'abbé Pierre de ce monde. » (Mouvements divers.)
Au fond, madame la ministre, vous avez raison : la politique que vous menez n'est ni une politique de l'offre ni une politique de la demande ; c'est une politique faite par les riches, pour les riches. C'est indécent, et l'abbé Pierre doit se retourner dans sa tombe !
Je voterai contre l'article 5. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 79 et 126.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 81 rectifié, 128 et 205.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 123 :
Nombre de votants | 306 |
Nombre de suffrages exprimés | 304 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 153 |
Pour l'adoption | 129 |
Contre | 175 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 39 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le maintiens, monsieur le président, mais permettez-moi une brève remarque.
Le coût de la refacturation au fonds mutualisé pour 2007 était bien prévu à 40 millions d'euros, mais, dans la réalité probable, il ne devrait être que de 12 millions d'euros. Le dispositif est donc bien une « usine à gaz » et, par rapport à l'immensité relative de la DGF, son rendement est très faible !
M. le président. Madame la ministre, acceptez-vous de lever le gage sur l'amendement n° 39 ?
Mme Nicole Bricq. Ha, ha !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est normal !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est vraiment un amendement sénatorial ! (Sourires.)
M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 239 est-il retiré ?
Mme Nicole Bricq. Non, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'article 5.
M. Alain Vasselle. Nous avons intégré la CSG et la CRDS dans le bouclier fiscal, et je m'en félicite. Toutefois, je veux attirer l'attention de nos collègues et du Gouvernement sur la nécessité de poursuivre la réflexion sur le poids des prélèvements obligatoires.
L'objectif du bouclier fiscal est de limiter les prélèvements obligatoires à 50 % des revenus. Nous avons intégré la CSG et la CRDS parce que nous avons estimé que, par nature, ces prélèvements s'apparentaient à des impôts.
Au passage, je rappelle qu'il y a là une différence d'appréciation entre la France et l'Europe, puisque celle-ci ne considère ni la CSG ni la CRDS comme des impôts.
En tout état de cause, chacun sait que la CSG et la CRDS sont destinées à financer les dépenses de la sécurité sociale. Lorsque nous poursuivrons la réflexion, il me semblerait donc pertinent d'intégrer également les cotisations sociales dans le bouclier fiscal, car elles sont aussi des prélèvements obligatoires.
On ne peut pas, d'un côté, considérer que la nature fiscale d'un prélèvement autorise son intégration dans le bouclier fiscal alors même que la recette correspondante finance des dépenses sociales et, de l'autre côté, refuser la prise en compte dans le bouclier fiscal des autres prélèvements finançant la sécurité sociale au motif qu'ils sont d'une nature différente.
À en juger par les quelques réflexions conduites par la commission des finances sur une substitution de l'impôt à certaines cotisations sociales compte tenu de la nature des dépenses et de leur caractère universel, notamment dans la branche maladie, il est fort probable que nous devrons débattre dans les mois ou les années qui viennent de l'intégration dans le bouclier fiscal de l'impôt qui aura été substitué aux cotisations sociales.
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
M. le président. L'amendement n° 145 rectifié bis, présenté par MM. Guené et Vasselle est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans l'intitulé du chapitre I bis du titre IV du livre Ier du code général des impôts, les mots : « Impôt de solidarité sur la fortune » sont remplacés par les mots : « Impôt sur le patrimoine et l'épargne ».
II. Il est procédé à la même substitution dans l'ensemble du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Le droit fiscal est un droit réel qui ne doit pas comporter, selon M. Guené, de connotations partisanes, subjectives et faisant appel à des critères d'un autre âge, mais qui doit s'attacher uniquement à l'objet précis de son assiette.
Or, progressivement, l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune est devenue telle qu'elle appréhende des situations qui ne correspondent plus à ce que le sens commun appelle « fortune », et se rapporte plus globalement au patrimoine et aux biens des contribuables.
De fait, cette appellation contribue à véhiculer un caractère dogmatique. On a d'ailleurs bien vu, au cours du débat qu'il y avait, d'un côté, la commission des finances, qui défend une approche économique du bouclier fiscal et de l'ISF, et, de l'autre côté, nos collègues de l'opposition, qui ont déplacé le débat sur un terrain purement idéologique.
Mme Marie-France Beaufils. Ça, c'est pas mal !
Mme Nicole Bricq. Nous, nous faisons de l'idéologie, eux, ils n'en font pas !
M. Guy Fischer. Ils font de l'économie...
M. Alain Vasselle. Cette appellation est ainsi contraire à la neutralité de formulation qu'on est en droit d'exiger d'un outil fiscal, ce qui exclut corrélativement toute possibilité de l'adapter aux exigences de l'époque et à la situation économique avec la sérénité nécessaire.
C'est pourquoi notre collègue Charles Guené propose d'appeler désormais cet impôt : « Impôt sur le patrimoine et l'épargne ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement part d'une bonne intention, est tout à fait justifié et ne coûte rien : avis favorable. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de demander le retrait de cet amendement, pour les deux raisons suivantes.
D'abord, monsieur Vasselle, la proposition que vous faites relève du domaine de la sémantique et ne changera rien à l'imposition des contribuables.
Puis, après tout, en quoi le mot « fortune » est-il choquant ?
Son étymologie, fortuna, c'est la chance. À lire sous la plume de certains experts que les Français font, certes, confiance au travail, ce à quoi le présent projet de loi les incite, mais aussi confiance à la chance, il ne paraît pas si désuet qu'un impôt s'appelle impôt « sur la fortune », car, dans toute fortune, il y a un élément de chance, cette chance que l'on souhaite à nos compatriotes, un peu comme Napoléon la souhaitait à ces généraux... (Sourires et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Marie-France Beaufils. Chance à la naissance ou pas ?...
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mes chers collègues, je tiens à vous rendre attentifs au fait que la mesure proposée aurait forcément un coût, puisque, si elle était adoptée, un grand nombre d'imprimés devraient être modifiés.
Je crois que nous « traînons le boulet » de l'ISF et, à titre personnel, je ne souhaite pas qu'on se laisse aller à des changements d'ordre sémantique. Nous l'avons institué ; eh bien, il va falloir que nous en gérions toutes les conséquences, que nous en limitions la portée et la nocivité !
Il m'arrive de penser qu'il aurait été préférable, par souci de clarté, de supprimer purement et simplement l'ISF plutôt que de monter une usine à gaz pour en atténuer les effets. Car je suis sûr que, au fond de sa conscience, chacun ou, en tout cas, le plus grande nombre d'entre nous est persuadé que l'ISF a été une très mauvaise imposition pour la France qui se trouve, de ce fait, dans une situation singulière par rapport au reste du monde.
J'ai bien écouté tous les débats : sommes-nous prêts à parler ensemble de la mondialisation et de ses conséquences ? Dans nos propos, nous nous cantonnons à de vieux schémas, comme si la France était restée un espace isolé du monde entier. Mais enfin, quelle hypocrisie, cher François Marc, que de gommer à ce point les conséquences de la mondialisation !
Il faut bien que les contribuables les plus fortunés aient au moins quelques scrupules tant il est vrai qu'ils ont, la plupart du temps, accès aux cabinets supranationaux les plus efficaces pour choisir leur stratégie en la matière ainsi que leur domicile fiscal.
M. Guy Fischer. C'est sûr !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Par conséquent, de grâce, cessons de raisonner selon nos conceptions d'hier !
À titre personnel, je ne suis pas favorable à une modification de l'appellation de cet impôt. Après l'avoir institué, je le répète, il nous revient de le gérer, et je ne voudrais pas que, à l'occasion d'un vote au Sénat, nous donnions l'impression que l'on supprime l'ISF en en changeant le nom.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je vais retirer cet amendement.
Toutefois, permettez-moi de faire remarquer que cet impôt étant rattaché au mot fortune - du latin fortuna - on pourrait en déduire qu'il s'agit d'un impôt sur la chance.
Personnellement, j'avais l'illusion de penser - et il m'avait semblé que Mme la ministre avait également souligné ce point au cours de la discussion générale - que l'impôt sur la fortune était, pour ceux qui y étaient soumis, au moins dans 95 % des cas, le résultat de leur travail.
Il s'agit donc bien, à mes yeux, d'un impôt sur la réussite de ceux qui ont travaillé et je trouve vraiment désolant que nous persistions dans l'idée contraire !
Cela étant dit, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 145 rectifié bis est retiré.
3
Candidature à une commission
M. le président. J'informe le Sénat que le groupe Union pour un mouvement populaire a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission des affaires culturelles, à la place laissée vacante par Mme Valérie Létard, dont le mandat de sénateur a cessé.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Dépôt d'un rapport du Gouvernement
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application du paragraphe III de l'article 120 de la loi n° 91-1322 de finances pour 1992, le rapport sur les conditions de mise en oeuvre de l'agrément prévu en faveur des investissements réalisés outre-mer dans certains secteurs économiques en 2006.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des finances et sera disponible au bureau de la distribution.
5
Nomination d'un membre d'une commission
M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe Union pour un Mouvement Populaire a présenté une candidature pour la commission des affaires culturelles.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame Mme Béatrice Descamps membre de la commission des affaires culturelles à la place laissée vacante par Mme Valérie Létard, dont le mandat de sénateur a cessé.
6
Travail, emploi et pouvoir d'achat
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.
Mes chers collègues, je vous signale qu'il nous reste encore près de cent vingt amendements à examiner.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Nous aurons fini à vingt heures ! (Sourires.)
M. le président. Tout dépend de la concision des uns et des autres ...
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 5.
Articles additionnels après l'article 5 (suite)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 40 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 225 est présenté par M. Lambert.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 885 V bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 885 V bis. - L'impôt de solidarité sur la fortune du redevable ayant son domicile fiscal en France est réduit de la différence entre, d'une part, le total des impôts dont la liste figure au 2 de l'article 1649-0 A et, d'autre part, 50 % du total des revenus définis au 4 du même article.
« Les revenus mentionnés au 4 de l'article 1649-0 A sont diminués des revenus définis au 5 du même article et augmentés des revenus définis au 6 du même article. Les revenus définis au 7 du même article ne sont pas pris en compte.
« Pour l'application du premier alinéa du présent article, les impositions à prendre en compte sont établies dans les conditions prévues par le 3 de l'article 1649-0 A.
« Le reversement des sommes indûment déduites de la cotisation d'impôt de solidarité sur la fortune est demandé selon les mêmes règles de procédure et sous les mêmes sanctions que le droit à restitution prévu à l'article 1649-0 A. »
II. - Le I s'applique à compter du paiement de l'impôt de solidarité sur la fortune pour 2008.
III.- La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 40.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il s'agit d'un amendement de procédure administrative. S'il était adopté, rien ne serait changé sur le fond aux droits des contribuables, tels qu'ils découlent du principe du bouclier fiscal.
L'impôt de solidarité sur la fortune est un impôt déclaratif. Lorsque s'appliquait le plafonnement dans ses anciennes modalités, le contribuable en déterminait lui-même les conditions d'application et en tirait les conséquences en calculant le montant de son chèque.
Au nom de la commission des finances, nous formons le voeu qu'il en aille de même pour les bénéficiaires du bouclier fiscal, qui serait ainsi régi par le principe de l'autoliquidation.
J'ajoute que ce principe est totalement neutre en termes de contrôle fiscal. Il appartient aux personnes qui ont la chance d'être redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune de déclarer les valeurs justes de leur imposition, que l'administration est parfaitement en droit de contrôler, car, bien entendu, l'adoption de cet amendement ne saurait rien changer aux droits légitimes de l'administration fiscale, tant que l'ISF existe.
M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour présenter l'amendement n° 225.
M. Alain Lambert. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de procédure.
Monsieur le rapporteur général, je vais tenter de vous convaincre, ainsi que M. Lambert, de la justesse de mon raisonnement. Le vôtre est excellent, puisque vous soulignez que l'ISF constitue un impôt déclaratif, qui laisse à ce titre une certaine faculté d'appréciation au contribuable. Ce dernier estime la valeur de son bien, et il devrait être mis à même de s'auto-infliger - ou de s'auto-appliquer, selon la manière dont on conçoit le bouclier fiscal ! - la remise d'impôt.
Toutefois, il me semble que l'ISF est aussi un impôt de responsabilité, et à ce titre, il appartient au contribuable qui se serait acquitté d'une série d'impositions d'en réclamer le trop payé en se manifestant auprès de l'administration fiscale.
D'aucuns rétorquent que ce mécanisme ne fonctionne pas bien, puisque, sur les 93 000 bénéficiaires éventuels de l'application du bouclier fiscal, seuls 1 780, si j'ai bonne mémoire, ont demandé à profiter de cette mesure.
J'observe que ce mécanisme ne s'applique que depuis six mois. Comme je le soulignais ce matin, on ne peut pas demander à un enfant de six mois de se mettre à marcher ! Il faut sans doute attendre que ce dispositif soit appliqué depuis une année entière, ce qui sera le cas au 31 décembre prochain, pour évaluer les demandes de remboursement adressées dans le cadre des déclarations d'ISF.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si cet argument ne vous convainquait pas, il en est un deuxième, qui porte, lui, sur la justesse des évaluations réalisées par le contribuable. En effet, nous nous sommes aperçus que, sur les 1 780 demandes de remboursement adressées par des contribuables qui estimaient avoir trop payé, 20 % n'étaient pas recevables : ces contribuables s'étaient crus autorisés à réclamer le remboursement de l'impôt qu'ils avaient versé, mais leur appréciation était erronée, et on n'a pas pu faire droit à leurs demandes, de façon tout à fait légitime, d'ailleurs. Et encore ce taux de 20 % est-il provisoire : il reste 500 dossiers à examiner, et j'ignore si la proportion des dossiers irrecevables sera finalement de 20 % ou de 25 %.
Par définition, il y a toujours une partie des contribuables qui se trompent, en toute bonne foi, d'ailleurs. Ne serait-ce qu'à cause de ce phénomène, pourquoi imposer à l'État de faire des avances de trésorerie, compte tenu de l'état de nos finances publiques ?
Mme Nicole Bricq. C'est un excellent argument !
Mme Christine Lagarde, ministre. C'est pourquoi, entre autres raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à ce mécanisme d'autoliquidation du bouclier fiscal.
J'ajoute que, si d'aventure ces amendements étaient accueillis favorablement, cette mesure serait très lourde pour l'État l'année où elle serait mise en place, car elle s'appliquerait sur deux exercices fiscaux, ce qui doublerait son coût.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'espère que ces trois raisons vous auront convaincus. Certes, le mécanisme de l'autoliquidation semble sympathique et adapté au système déclaratif de l'ISF. Toutefois, je crois qu'il ne convient pas à un système où le contribuable, après calcul du total de ses impositions, prend la responsabilité de considérer qu'il peut bénéficier d'un remboursement au titre du bouclier fiscal.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la ministre, je voudrais vous interroger sur ce qu'il est convenu désormais d'appeler la gestion patrimoniale de l'État.
Le grand événement de ces derniers mois a été la présentation du premier bilan de l'État. S'y trouvent retracés la situation des actifs immobiliers, les stocks et les créances, la trésorerie de l'État. Ses dettes, qui correspondent aux emprunts, aux émissions de bons du Trésor et d'obligations, ainsi qu'aux dépenses engagées, facturées mais non réglées, sont également évaluées.
La LOLF nous a fait abandonner ces conventions aux termes desquelles l'élément générateur des mouvements financiers de l'État était le flux de trésorerie, ce qui permettait à certains ministres du budget de réguler le déficit en fonction des paiements : on gardait sous le coude un certain nombre de factures et on les réglait l'année suivante !
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Le pilotage du solde ! (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La grande novation de la LOLF, c'est la constatation des droits acquis et des dettes encourues. Nous n'avons pas privatisé la comptabilité publique en la soumettant à des principes comptables reconnus au plan international. Simplement, désormais, ce qui compte, c'est la réalité d'une créance et d'une dette.
Or, madame la ministre, quand vous avez défendu votre position sur ces amendements il y a un instant, vous vous êtes placée, me semble-t-il, sur un terrain historiquement daté. Je m'explique.
Le bouclier fiscal suscite, en quelque sorte, la créance d'un contribuable sur l'État. Le contribuable acquitte ses impôts, mais le constat est fait que les sommes qu'il a versées sont supérieures au seuil retenu pour le bouclier fiscal ! Je n'imagine donc pas un seul instant que la Cour des comptes puisse certifier la sincérité des comptes de l'État si le montant du trop-perçu au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune, de l'impôt sur le revenu et des impôts locaux ne figurait pas au passif de l'État au 31 décembre.
Par conséquent, je comprends mal votre argumentation, madame la ministre, car elle s'appuie sur des principes qui ne sont plus d'actualité.
Le dispositif que propose la commission des finances et qu'a présenté M. le rapporteur général ne constitue pas une novation. Il ne modifie en rien la situation nette de l'État, car la dette liée au trop-perçu est réelle.
Je ne sais pas si la Cour des comptes a provisionné au 31 décembre 2006 les sommes dues au titre du bouclier fiscal - à vrai dire, je n'ai pas vérifié - mais, en tout cas, ce sera le cas en 2007.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la ministre, je vous suggère donc de reconsidérer des principes qui étaient certainement très justes avant la présentation du bilan de l'État, mais qui perdent une grande partie de leur pertinence depuis que l'État se trouve obligé de présenter des comptes sincères, et notamment une situation patrimoniale.
Je ne vois pas ce que l'État gagnerait à décaler d'un an le remboursement du trop-perçu, sauf un avantage de trésorerie, car ni ses droits ni ceux du contribuable ne seraient modifiés significativement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je souhaite rappeler à Mme la ministre que le Sénat est en quelque sorte une assemblée d'expérimentation. Il émet des idées qui, si elles ne sont pas toujours susceptibles d'être mises en oeuvre dans l'immédiat, trouvent quelque temps après l'occasion de s'affirmer et d'être intégrées dans notre droit positif. L'expérience l'a montré, notamment sur la matière qui nous occupe.
Sur ces amendements identiques, la commission des finances demande un vote de principe. Nous savons fort bien qu'à l'issue de ce débat la commission mixte paritaire se réunira : nous envisagerons alors, avec l'aide de nos collègues députés, comment les différents arguments pourront être pondérés.
Vous le savez, madame la ministre, la majorité sénatoriale, et plus encore la majorité de la commission des finances, est soucieuse de soutenir le Gouvernement. Nous sommes en harmonie avec toutes vos positions sur le fond et restons particulièrement attachés à ce que les engagements présidentiels deviennent rapidement réalité.
L'adoption de ces amendements identiques serait un signal fort, quelle que soit l'issue qui leur sera réservée ultérieurement.
Sur le fond, d'ailleurs, j'entends me référer à un vieil adage juridique : donner et retenir ne vaut.
S'agissant de l'évaluation de ce mécanisme, je rappelle que votre administration estimait pour 2007 le coût des restitutions à 400 millions d'euros. Il est plus vraisemblable qu'il se situera entre 120 millions d'euros et 150 millions d'euros. Cela relativise l'impact financier sur la trésorerie que vous avez mentionné, madame la ministre.
Tels sont les éléments supplémentaires que je souhaitais verser au débat.
M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.
M. Denis Badré. J'ai annoncé ce matin, en acceptant de retirer l'amendement n° 206, que je me réservais la possibilité d'intervenir dans le cadre de la discussion de l'amendement n° 40 de la commission des finances. On m'a assuré qu'il satisfaisait le mien : il le fait partiellement, dans la mesure où il tente de résoudre le même problème.
Madame la ministre, vous l'avez vous-même reconnu : le système actuel ne fonctionne pas bien.
Je souhaite participer à la réflexion que le Sénat peut mener sur cette question, pour préparer l'avenir.
À cet égard, l'ordre de discussion dans lequel ont été placés les amendements est particulièrement intéressant.
L'amendement n° 206 a été discuté lors de l'examen de l'article 5, puisque son objet portait sur le bouclier fiscal et sur les conditions de sa mise en oeuvre. En revanche, les amendements identiques nos 40 et 225 ont été examinés après le vote de l'article 5, car ils visent à modifier la procédure administrative de l'ISF.
En d'autres termes, l'adoption du bouclier fiscal a des conséquences immédiates sur l'ISF, ce qui nous conduit à tenter d'améliorer le système actuel de l'ISF. Comment ? Je reprends à mon compte l'excellente argumentation du rapporteur général : l'ISF étant un impôt déclaratif, c'est à l'occasion de sa déclaration que se pose le problème du bouclier fiscal. Il faut donc faire en sorte que le système de récupération devienne déclaratif lui aussi.
L'amendement n° 206 a donc été discuté dans le cadre de l'examen de l'article 5. Cela veut dire que nous posons le problème du bouclier fiscal à l'occasion du débat sur l'ISF ou en périphérie de ce débat. Or ce lien n'est plus aussi évident. En effet, tant que le seuil de déclenchement du bouclier fiscal était fixé à 60 % des revenus, l'ISF était le seul élément susceptible de faire déborder le vase, en quelque sorte. Mais maintenant que ce seuil a été abaissé à 50 %, peut-être sera-t-il atteint même alors que le contribuable n'est pas assujetti à l'ISF.
C'est pourquoi la déclaration de l'ISF ne suffira à permettre aux contribuables de faire valoir leurs droits au bouclier fiscal : certains d'entre eux pourraient être concernés par la mesure sans être pour autant assujettis à l'ISF. Il faut y prendre garde : ce n'est peut-être pas qu'une hypothèse d'école, à partir du moment où le seuil est abaissé.
C'est pourquoi le mécanisme que nous proposions ne reposait pas sur une déclaration du contribuable, mais confiait cette mission à l'administration. Pour l'instant, en effet, c'est l'administration qui se charge de ces calculs.
Aujourd'hui, il est prévu que l'administration procède à ces calculs quand le contribuable réclame et prétend pouvoir bénéficier du bouclier fiscal, ce qui, madame la ministre, vous protège contre le risque que vous évoquiez, celui que représentent ces 20 % de demandes irrecevables. Si ce sont les services fiscaux qui font le calcul, les demandes seront forcément toutes recevables !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il y a un décalage d'un an !
M. Denis Badré. Je tiens à apporter ma contribution au débat : je ne suis pas certain que notre formule soit la meilleure. Je voterai néanmoins les amendements identiques nos 40 et 225, car ils représentent un progrès. L'amendement n° 206 a été retiré, mais il ne faut pas écarter l'idée que le bouclier fiscal pourra jouer hors cas d'imposition à l'ISF. C'est pourquoi, même si un système déclaratif est prévu quand il y a cotisation d'ISF, il faudra trouver une forme de responsabilisation plus directe de l'administration fiscale en cette matière.
J'ajoute que, au point où nous en sommes, la mesure présente déjà un coût tel que l'éventuel surcoût qui serait entraîné par l'octroi à l'administration fiscale des moyens nécessaires pour effectuer ce calcul est tout à fait marginal. Cet argument ne vaut pas.
J'essaie, moi aussi, de trouver la solution la plus simple possible, non seulement afin que certains contribuables ne renoncent pas à faire valoir leurs droits pour éviter tout contact avec l'administration fiscale, mais aussi afin que ceux qui ne savent pas faire les calculs eux-mêmes - et ils seront de plus en plus nombreux - puissent tout de même voir leurs droits pris en compte et leur impôt calculé avec équité.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame la ministre, je suis confus de ne pas être de votre avis sur ce sujet. C'est la première fois dans ce débat.
Le bouclier fiscal est un signal lancé à tous ceux qui n'ont pas ou peu de revenus, comme les petits commerçants, et qui supportent des contributions locales assez fortes, ainsi qu'aux investisseurs et à tous ceux qui ont de gros revenus et sont tentés de quitter la France - les sportifs, les vedettes, les chanteurs, et j'en passe. C'est pourquoi je pense, contrairement à vous, madame la ministre, que les amendements identiques que nous examinons méritent d'être adoptés, et ce pour deux raisons.
D'une part, il faut conserver le système actuellement appliqué dans le calcul du plafonnement de l'ISF. Il n'est pas raisonnable de prétendre améliorer le mécanisme en supprimant la possibilité accordée au contribuable de calculer ce plafonnement. Ce serait un retour à un mécanisme administratif, alors que nous tendons vers un système de plus grande responsabilité et de plus grande liberté.
D'autre part, nous parviendrons bientôt à l'important débat sur l'utilisation d'une partie du montant de l'ISF pour financer des PME ou procéder à des investissements de proximité. Il paraît difficile d'accorder à un contribuable qui paie, par exemple, 10 000 euros d'ISF - c'est mon cas - le droit de consacrer cet argent au financement de PME, et dans le même temps de lui interdire de procéder lui-même aux calculs et à l'autoliquidation, en laissant cette tâche à l'administration.
Plusieurs arguments peuvent être invoqués : celui de la trésorerie, celui de l'erreur, celui des deux années d'exercice. Sur ce dernier point, le rapporteur général a raison : sans doute la commission mixte paritaire trouvera-t-elle une rédaction qui évite cet écueil. Le mécanisme ne doit porter que sur un an, à partir des revenus de 2007 taxés en 2008. Le tout est de l'écrire de la manière la plus claire.
Madame la ministre, ce dispositif du bouclier fiscal est un signal qui doit permettre de faire revenir en France un certain nombre de contribuables importants. Si le calcul est fait par l'administration fiscale, ce signal perd 95 % de son efficacité. Il faut donc aller au bout de la logique et adopter ces amendements identiques. Pour ma part, je les voterai.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.
M. Bernard Vera. Ces amendements identiques visent à instaurer un nouveau et intéressant concept : celui de l'autoliquidation du bouclier fiscal.
L'exposé des motifs de l'amendement n° 225 montre à lui seul de quoi il retourne : « L'objet du présent amendement est de simplifier la procédure du recours au bouclier fiscal.
« À ce jour, le redevable doit d'abord acquitter l'intégralité de l'ISF, puis faire l'année suivante une demande de restitution du trop versé auprès de l'administration fiscale. »
Cette présentation a au moins le mérite de reconnaître que le bouclier fiscal est bel et bien et, par essence, destiné à réduire, sinon à faire disparaître l'impôt de solidarité sur la fortune.
Ces amendements identiques visent à anticiper sur le remboursement du trop-perçu par l'État au titre du panier d'impositions retenu pour le bouclier fiscal, en décidant de ne pas verser, d'entrée, les sommes susceptibles d'être par la suite restituées.
À considérer les effets de l'article 5, ce nouveau bouclier fiscal concernera 84 % des contribuables assujettis à l'ISF. Il constitue donc une perte sèche de 680 millions d'euros pour l'État sur le montant de l'ISF actuellement perçu.
L'article 6, dont nous discuterons sous peu, offre, pour sa part, l'opportunité aux petits contribuables assujettis à l'ISF de s'exonérer, eux aussi, de l'essentiel de leur imposition.
Dans l'absolu, si tous les contribuables assujettis à l'ISF appliquaient la règle fixée par l'article 6, plus de la moitié des droits exigibles disparaîtraient ! Surtout, la totalité des redevables disposant d'un patrimoine inférieur à 5,7 millions d'euros seraient exonérés de cet impôt !
M. le rapporteur général comme M. Lambert semblent soucieux d'alléger la tâche de l'administration, car l'autoliquidation du bouclier fiscal qu'ils nous proposent vise à dispenser l'État, donc ses services, de rembourser aux contribuables des trop-perçus, une fois les impôts encaissés. Ils nous suggèrent de laisser l'État aux prises avec son déficit de trésorerie pour épargner à quelques milliers de contribuables assujettis à l'ISF l'obligation de s'acquitter de leur dû.
En conséquence, nous ne voterons pas ces amendements, pas plus que nous ne voterons l'amendement sur le délai de reprise.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je m'adresserai à Philippe Marini et à Alain Lambert. Mes chers collègues, sauf le respect que je vous dois, j'ai envie de vous dire...
Mme Marie-France Beaufils. Que trop, c'est trop !
Mme Nicole Bricq. ... ce que l'on dit à des garnements pris en faute : « Vous n'avez pas honte ? »
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas du tout !
M. Alain Lambert. Non ! Pas de leçon de morale de votre part !
Mme Nicole Bricq. Je le dis gentiment !
M. Alain Lambert. Certes !
Mme Nicole Bricq. Vous demandez le beurre, l'argent du beurre, et je n'ose pas dire la suite !
M. Alain Lambert. Le sourire de la crémière ne m'intéresse pas !
Mme Nicole Bricq. Je comprends bien les contraintes techniques du service de la séance, mais il est vrai que l'organisation de nos débats a eu pour effet de scinder les deux questions du bouclier fiscal et de l'ISF. Pourtant, M. Denis Badré a raison : notre discussion porte sur les deux.
Le groupe socialiste ne peut que voter contre ces amendements identiques, d'autant que, et mon intervention vaudra explication de vote sur l'amendement suivant, la commission des finances demande que le délai de recours de l'administration concernant l'ISF, qui est aujourd'hui de dix ans, soit ramené à six ans.
M. Guy Fischer. Oui !
Mme Nicole Bricq. Depuis tout à l'heure - depuis plusieurs années, d'ailleurs -, vous ne vous épargnez aucune gesticulation pour tuer un impôt qui ne vous convient pas.
M. François Marc. Eh oui !
M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour explication de vote.
M. Alain Lambert. Je ne répondrai pas aux mises en cause de Mme Bricq, qui sont désobligeantes et ne l'honorent pas.
Madame la ministre, c'est aider le Gouvernement que d'adopter la mesure que nous proposons, le rapporteur général et moi-même. En effet, le Gouvernement ne peut trouver légitime de faire de la trésorerie sur les contribuables.
Si vous avez indiqué, madame la ministre, qu'il n'était pas bon que l'État subisse les coûts de la trésorerie des contribuables, vous n'avez pas semblé vous soucier du fait que l'État pouvait, lui, faire de la trésorerie sur les contribuables. Si nous considérons que les contribuables sont des agents économiques qui participent à la prospérité du pays, la logique de la commission des finances est, économiquement, la meilleure et elle doit convaincre la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.
Madame la ministre, il n'est pas bon, dans une démocratie, d'assister les contribuables au point de les croire incapables de calculer l'impôt dont ils sont redevables. C'est apparu plusieurs fois, mes chers collègues, au cours de nos débats d'hier et d'aujourd'hui, et je les ai écoutés avec attention, j'en ai eu le loisir, car je ne crois pas être de ceux qui ont abusé de leur droit de prendre la parole.
À plusieurs reprises, donc j'ai entendu dire que ce système d'autoliquidation serait difficilement applicable, que les contribuables devraient avoir recours à des professionnels, bref, qu'il devenait de plus en plus difficile pour le citoyen français d'exercer sa simple citoyenneté.
Madame la ministre, le seul moyen pour les citoyens d'être reconnus comme tels par l'État, c'est que cet État reste à leur service et non l'inverse. C'est en cela que ces amendements témoignent d'une logique absolue.
Ils permettent en effet à chaque redevable d'effectuer son calcul, de prendre ses responsabilités. Je suis convaincu que l'on peut très bien donner les moyens matériels à l'administration de comprendre pour quelles raisons le redevable a effectué son calcul ainsi et de rechercher, le cas échéant, la responsabilité dudit redevable si celui-ci venait à s'être trompé.
C'est pourquoi, monsieur le président, je ne retirerai pas mon amendement et je souhaite qu'il soit adopté par le Sénat.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je rejette l'argument relatif à la trésorerie parce qu'il correspond à une vision très archaïque de la comptabilité publique. Aujourd'hui, on raisonne en droits acquis et en obligations, fait incontestable.
J'ai bien écouté Mme Bricq. Mais M. Rocard nous avait proposé le plafonnement, qui avait été institué par la loi.
M. Alain Lambert. Eh oui !
M. Yves Fréville. Bien sûr !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Or, avec le plafonnement, on était déjà dans l'autoliquidation. Par conséquent, ce n'est pas une novation.
En l'occurrence, c'est naturellement un peu plus compliqué. La déclaration relative à l'ISF doit être envoyée par le contribuable avant le 15 juin. La CSG et la CRDS font partie de l'impôt sur le revenu...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ... à vocation sociale, nous dirait M. Vasselle, mais elles sont calculées en temps réel, alors que l'impôt progressif est estimé sur la base du revenu de l'année précédente.
Maintenant, avec la télédéclaration, qui est une fantastique performance à mettre au crédit de la Direction générale des impôts, le contribuable connaît instantanément le montant de l'impôt dont il est redevable. De même, le contribuable sait le montant de sa contribution d'ISF, puisque la déclaration à ce titre vient chronologiquement en premier. Pour la CSG et la CRDS, en application du principe constitutionnel de précaution, le redevable doit pouvoir faire une estimation qui le mette à l'abri d'une erreur d'évaluation.
Ces différents éléments militent pour l'adoption des amendements identiques nos 40 et 225.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40 et 225.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Je suis maintenant saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune et qui sont présentés par M. Marini au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 265 est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa de l'article 885 V bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase, le pourcentage : « 85 % » est remplacé par le pourcentage : « 70 % » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
II. - Le I s'applique à compter du paiement de l'impôt de solidarité sur la fortune pour 2008.
III.- La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 266 est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article 885 V bis du code général des impôts est supprimée.
II. - Le I s'applique à compter du paiement de l'impôt de solidarité sur la fortune pour 2008.
III.- La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter ces deux amendements.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par coordination, il s'agit de constater la caducité du plafonnement du plafonnement, dès lors que le seuil de déclenchement du bouclier fiscal est fixé à 50 %. Telle est la philosophie de ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur général, j'ai le sentiment que l'adoption des amendements précédents vous donne satisfaction.
M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, madame la ministre. Par conséquent, je retire les amendements nos 265 et 266.
M. le président. Les amendements nos 265 et 266 sont retirés.
L'amendement n° 41, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 186 du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
« Art. L. 186. - Dans tous les cas où il n'est pas prévu un délai de prescription plus court, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l'impôt. »
II. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 181 du même livre est ainsi rédigée :
« En aucun cas il ne peut en résulter une prolongation du délai fixé par l'article L. 186. »
III. - Les I et II s'appliquent aux procédures de contrôle engagées à compter de la date de publication de la présente loi.
IV.- La perte de recettes résultant pour l'État des I, II et III est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit de la reprise d'un vote antérieur du Sénat visant à réduire le délai de reprise de droit commun en le faisant passer de dix ans à six ans.
Autrefois, le délai de dix ans avait été retenu par référence aux droits d'enregistrement. Il correspond à la période pendant laquelle le défaut de déclaration peut conduire l'administration fiscale à mener des investigations et décider des redressements.
Le délai de six ans est celui qui prévaut pour les autres impôts.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement vous suggère de bien vouloir modifier votre amendement, car il souhaite que les dispositions dont il s'agit s'appliquent aux procédures de contrôle engagées à compter du 1er juin 2008, et non pas « à compter de la date de publication de la présente loi », comme indiqué dans la rédaction actuelle.
Je constate que cet amendement consacre votre détermination et votre persistance à faire adopter une mesure qui viserait à fixer un délai de reprise plus adapté à l'accélération actuelle du temps.
Ramener à six ans le délai décennal - habituel, mais plus coutumier en droit de la construction qu'en matière d'imposition -, paraît légitime. Je constate tout de même que cette mesure soumettra les services chargés des contrôles fiscaux à une pression plus forte, compte tenu du principe d'autoliquidation que vous avez adopté, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà quelques instants.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 41, sous réserve qu'il soit rectifié.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, accédez-vous à la demande de Mme la ministre ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui, monsieur le président, et j'accepte de rectifier cet amendement dans le sens indiqué.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 186 du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
« Art. L. 186. - Dans tous les cas où il n'est pas prévu un délai de prescription plus court, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l'impôt. »
II. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 181 du même livre est ainsi rédigée :
« En aucun cas il ne peut en résulter une prolongation du délai fixé par l'article L. 186. »
III. - Les I et II s'appliquent aux procédures de contrôle engagées à compter du 1er juin 2008.
IV.- La perte de recettes résultant pour l'État des I, II et III est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme la ministre.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 41 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
L'amendement n° 83, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le c du 2 de l'article 1649-0A du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Monsieur le président, je souhaite défendre en même temps l'amendement n° 82.
M. le président. Je suis en effet saisi d'un amendement n° 82, également présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Après l'article 5, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
Le d du 2 de l'article 1649-0A du code général des impôts est abrogé.
Veuillez poursuivre, monsieur Vera.
M. Bernard Vera. Ces deux amendements visent à exclure du panier d'imposition retenu pour le calcul du bouclier fiscal la taxe d'habitation et la taxe foncière.
Si l'on s'attache au montant moyen de chacun des impôts concernés par l'application du bouclier fiscal, que constate-t-on ? La taxe d'habitation acquittée en France s'élève à 476 euros ; la taxe foncière sur les propriétés bâties atteint 1 123 euros ; l'impôt sur le revenu s'établit à 1 422 euros et l'impôt de solidarité sur la fortune s'élève à environ 8 060 euros.
De fait, le bouclier fiscal est clairement conçu comme un moyen de réduire la part de l'ISF qu'acquittent les contribuables au titre de leur participation au financement de la charge publique. Un redevable idéal, payant chacun des impôts concernés à hauteur des moyennes observées, s'acquitterait finalement de 11 081 euros. Près de 73 % de cette somme seraient versés au seul titre de l'ISF.
Il est donc clair et évident que le bouclier fiscal est bel et bien conçu comme un instrument d'optimisation fiscale mis à disposition des détenteurs de gros patrimoines. De fait, on peut encore se demander à quel titre les impositions locales directes sont introduites dans le cadre du dispositif et pour quelles raisons les collectivités territoriales seraient contraintes de participer au financement d'un mécanisme dont elles sont loin de constituer l'élément principal de motivation.
Quoi qu'il en soit, je me réjouis évidemment de l'adoption par notre assemblée, à l'unanimité, de la restitution des montants concernés aux collectivités territoriales.
Il est donc pour nous parfaitement cohérent que les dispositions de l'article 1649-OA du code général des impôts excluent ces impositions locales, somme toute marginales, du périmètre du bouclier fiscal. Les dispositions propres à la taxe d'habitation comme à la taxe foncière sur les propriétés bâties sont suffisamment pertinentes pour dispenser leurs contribuables de solliciter le dispositif de restitution.
Mme Marie-France Beaufils. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission émet un avis défavorable sur les deux amendements, ce qui ne devrait pas vous surprendre, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 240 rectifié, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement, au 30 septembre 2008, un rapport visant à évaluer la réalité, l'ampleur et les conditions du retour en France des contribuables redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune qui ont établi leur résidence fiscale à l'étranger.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, j'ai défendu cet amendement ce matin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Aux termes de cet amendement, le Gouvernement devra présenter au Parlement, au 30 septembre 2008, un rapport visant à évaluer la réalité, l'ampleur et les conditions du retour en France des contribuables redevables de l'ISF. Je trouve cette disposition intéressante. Nous avons tous à gagner à la transparence. Évidemment, il sera peut-être un peu difficile de définir l'échantillon.
M. Jean-Jacques Jégou. L'important, c'est le nombre !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'important, c'est la démarche !
En l'espèce, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame Bricq, je vous suggère de modifier votre amendement et de substituer aux termes « contribuables redevables de l'impôt sur la fortune qui ont établi leur résidence fiscale à l'étranger » l'expression « réfugiés fiscaux ». (Sourires.) C'est ainsi que la Belgique et quelques autres pays dénomment les personnes concernées.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas juridique !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. On se plaint parfois de l'abondance de rapports, d'études, de dossiers et de documents qui s'accumulent sur les étagères sans que l'on y accorde la moindre vertu ou la moindre valeur. Le rapport visé en l'espèce ne figurerait peut-être pas parmi ces documents, mais il serait excessivement difficile de l'élaborer avec clarté et sur la base d'une bonne information.
La Direction générale des impôts peut recenser les contribuables qui arrivent en France en provenance de l'étranger et qui sont redevables de l'ISF. En revanche, il lui est impossible de distinguer ceux qui n'ont jamais été domiciliés fiscalement en France auparavant, ceux qui l'ont été mais qui n'étaient pas redevables de l'ISF avant leur départ et, enfin, ceux qui étaient domiciliés fiscalement en France et étaient redevables de l'ISF au moment de leur départ.
Des équipes entières peuvent être constituées pour réaliser un échantillonnage, un filtrage et une étude statistique de différents documents.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Cela va créer des emplois !
Mme Christine Lagarde, ministre. Toutefois, les fonds publics qui seront consacrés à cette tâche ne seront pas, selon moi, utilisés à bon escient.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis de sagesse très défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Madame la ministre, l'avis très défavorable que vous venez d'émettre me paraît excessif.
Le Gouvernement espère que les mesures qu'il soumet au Parlement auront un impact extrêmement positif sur le retour des personnes qui ont choisi de s'expatrier fiscalement. Par conséquent, il doit pouvoir évaluer l'action qu'il engage, d'autant que cela fait partie du « choc de confiance ».
Précédemment, lors de l'examen de l'amendement défendu par M. le rapporteur général relatif à l'autoliquidation, vous avez indiqué qu'il fallait attendre un an pour que soit évaluée l'efficacité de l'actuel bouclier fiscal, c'est-à-dire avec le seuil de déclenchement fixé à 60 %.
À l'instant, vous venez de demander à M. le rapporteur général que le délai de reprise de six ans qu'il propose ne soit applicable qu'à partir du 1er juin 2008.
À l'origine, l'amendement que j'ai présenté à la commission des finances visait la date du 30 juin 2008. Or, il m'a été demandé de le rectifier et de retenir le mois de septembre pour permettre justement à l'administration fiscale, seule compétente en la matière, de disposer de toutes les données pour effectuer ce travail d'évaluation.
Madame la ministre, votre argument selon lequel cette évaluation entraînerait une mauvaise utilisation des deniers publics est très excessif. Vous auriez pu vous en remettre à une sagesse neutre, à défaut d'être bienveillante.
Monsieur le président de la commission des finances, l'expression « réfugiés fiscaux » me paraît elle aussi franchement excessive : on voit bien quelles sont les personnes visées par cet amendement ! J'ai choisi délibérément une rédaction neutre, pour aider le Parlement à savoir de quoi l'on parle, car, au sujet de cet impôt, on a entendu tout et son contraire.
M. le président. La parole est à M. Charles Josselin, pour explication de vote.
M. Charles Josselin. Nous ne sous-estimons pas la difficulté de l'exercice qui vous est demandé, madame la ministre, mais, étant convaincus que la culture de l'évaluation a fait des progrès formidables dans l'administration en général, la vôtre en particulier, et que vous aurez à coeur de connaître le résultat des mesures que vous engagez, nous pensons donc que ce rapport sera déjà établi. Nous demandons simplement que le Parlement puisse en être informé.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Guy Fischer. Voilà ! Il faut rendre ce rapport public !
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. En tant que représentant des Français de l'étranger et résidant depuis longtemps hors de l'Hexagone, je sais comment les choses se passent et je puis affirmer que les contribuables concernés ne rentreront pas dans les six mois ; il leur faudra bien au moins un an et demi, ne serait que pour des raisons pratiques : en effet, ils ne vont pas déménager du jour au lendemain, et il faut penser que leur déclaration d'impôt est faite dans l'autre pays.
Bref, la date du 30 septembre 2008 est un peu prématurée et je serais très étonné que l'on voie revenir les personnes concernées dans les six mois !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mes chers collègues, je retire bien volontiers ma proposition de modification de cet amendement, reconnaissant qu'elle était juridiquement perfectible et n'était pas à l'abri de toute critique. (Sourires.)
J'observe que ce dispositif pourrait éroder, à la marge, l'électorat de nos collègues représentant les Français établis hors de France. (Nouveaux sourires.)
Madame la ministre, dans ce rapport, il faudra tenir compte non seulement des retours, si du moins on en constate, mais également du ralentissement du rythme des départs.
Dans un premier temps, il a été constaté que, chaque jour, une fortune quittait le territoire national. Le rythme s'est accéléré, puisque, désormais, ce sont deux fortunes qui s'évadent quotidiennement. Il serait intéressant de voir si, à partir de la promulgation de cette loi, ce flux tend à se tarir, voire à s'inverser.
Je souhaite donc que le Sénat adopte l'amendement de Mme Bricq.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Nous sommes en train de gagner du temps !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le texte de l'amendement est perfectible. La date pourrait, le cas échéant, être, en effet, un peu repoussée. Il faudrait trouver une rédaction qui permette à l'administration de faire efficacement ce travail.
Cependant, madame la ministre, permettez-moi de tenir un propos « lolfique ».
Nous sommes dans une culture de la performance. L'État s'assigne des objectifs : il doit se donner des indicateurs et évaluer sa performance par rapport à ces indicateurs.
Or, il me semble que faire revenir en France des capitaux qui ont malencontreusement été s'investir à l'étranger est l'un des objectifs de la politique publique en ce début de législature.
Il convient donc de mesurer de manière réaliste comment nous sommes susceptibles d'atteindre cet objectif.
Je vous propose, mes chers collègues, d'adopter cet amendement, bien que le sachant imparfait, en ne le prenant pas au pied de la lettre, mais en considérant l'esprit dans lequel il a été élaboré, et de veiller à en améliorer la rédaction en commission mixte paritaire.
M. Jean-Jacques Jégou. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'espère que Mme Bricq voudra bien accepter cette démarche, qui, loin de dénaturer son amendement, est dictée par un souci de transparence, souci que tous doivent partager. (Très bien ! sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Article 5 bis
Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune ; les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 84 est présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 129 est présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 84.
Mme Marie-France Beaufils. Il était précisé, dans l'exposé des motifs de l'amendement qui, adopté par l'Assemblée nationale, a donné cet article 5 bis : « Il s'agit de neutraliser la hausse sensible des prix de l'immobilier pour les redevables qui voient augmenter leur impôt sans avoir vendu leur résidence principale. »
Sur qui pèse la « hausse sensible » de l'immobilier ? On peut se poser la question. Vous l'abordez, madame la ministre, en ne tenant compte que d'une seule partie de ceux qui sont concernés par le phénomène.
Hier, nous avons eu un débat sur l'accession à la propriété. Vous nous avez démontré que vous n'aviez pas l'intention d'engager une politique du logement permettant de répondre aux besoins de nos concitoyens : les loyers, à cause de cette augmentation du prix de l'immobilier, deviennent de plus en plus onéreux, si bien que la plupart des Français à ressources modestes doivent y consacrer plus de 30 % de leurs ressources ; les acquisitions sont également trop chères, les prêts augmentent et, les taux étant de plus en plus élevés - ils doivent passer à 4,7 % en fin d'année - les familles sont obligées d'allonger la durée de leurs remboursements.
Vous n'avez apparemment rien entendu de nos propositions, présentées hier, concernant l'amélioration du prêt à taux zéro pour les foyers, puisque vous n'en avez retenu aucune.
L'article 5 bis concerne l'abattement relatif à l'habitation principale et il est normalement destiné à solder l'impôt des petits contribuables assujettis à l'ISF, ceux qui sont compris dans la première tranche d'imposition.
Je rappelle qu'un assujetti à l'ISF qui dispose d'un patrimoine de 1 million d'euros acquitte aujourd'hui 1 320 euros de contribution et que, lorsqu'il a un patrimoine de 850 000 euros, le montant de sa contribution s'élève à la somme, considérable, de 495 euros !
Quant au poids de l'habitation principale dans le patrimoine imposable, là encore, il faut dire et redire l'essentiel. Si la valeur de l'habitation principale compte pour un peu plus du quart de l'assiette imposable pour les contribuables de la première tranche, elle se réduit au fur et à mesure que l'on s'élève dans le barème.
Au demeurant, pour un contribuable disposant d'un patrimoine de 16 millions d'euros, cette valeur imposable est, en moyenne, de 430 000 euros pour une moyenne de 250 000 euros dans le cas d'un contribuable disposant d'un patrimoine de 1 million d'euros.
Enfin, comment ne pas remarquer que la somme engagée dans l'allégement de l'assiette imposable, 120 millions d'euros, peut être utilement comparée avec une partie de la dépense publique pour le logement ? Ainsi, la moins-value fiscale causée par cette disposition est quatre à cinq fois plus importante que les sommes que l'État consacre à la résorption de l'habitat insalubre.
Pour toutes ces raisons, je ne peux évidemment que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression de l'article 5 bis.
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amendement n° 129.
Mme Bariza Khiari. Le relèvement de 20 % à 30 % de l'abattement applicable à la résidence principale en matière d'ISF pourrait faire sortir 10 000 à 15 000 contribuables de plus du barème.
Le montant de l'ISF acquitté au titre de la seule résidence principale est, de fait, beaucoup plus faible qu'on ne le croit. À titre d'exemple, pour un patrimoine de 940 000 euros à Paris, constitué essentiellement par une résidence principale, l'impôt à payer, après abattement de 20 %, est de 11 euros.
Vous soulevez, madame la ministre, le problème des contribuables qui sont propriétaires de leur seule résidence principale et qui, subissant la revalorisation de leur patrimoine, se trouvent du jour au lendemain confrontés à une taxation au titre de l'ISF.
Cette inquiétude pourrait être légitime et la préoccupation louable si le dispositif de l'article 5 bis n'était pas, comme tout le texte que nous examinons ces jours-ci, un écran de fumée.
Votre tactique est d'invoquer l'imposition au titre de l'ISF des personnes qui n'ont que leur résidence principale pour servir celles qui ont des patrimoines importants. On prend prétexte d'un problème qui pourrait être légitimement compréhensible pour atténuer le coût de l'impôt de ces derniers : le débat est faussé et, comme je viens de le dire, vous vous cachez derrière un écran de fumée.
L'amendement que nous proposons vise donc à supprimer l'augmentation de 20 % à 30 % de l'abattement applicable à la résidence principale en matière d'ISF.
M. le président. L'amendement n° 223, présenté par M. Lambert est ainsi libellé :
I. - Rédiger ainsi l'article 5 bis :
Le deuxième alinéa de l'article 885 S du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 761, un abattement de 100 % est effectué sur la valeur vénale réelle de l'immeuble lorsque celui-ci est occupé à titre de résidence principale par son propriétaire. En cas d'imposition commune, un seul immeuble est susceptible de bénéficier de l'abattement précité. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du retrait de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune de la résidence principale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Lambert.
M. Alain Lambert. Bien que discutant au sein de la Haute Assemblée depuis de très nombreuses années de ces questions d'ISF, c'est la première fois que je dépose un amendement relatif à la résidence principale, n'étant pas partisan de faire des discriminations entre les différentes catégories d'éléments de patrimoine.
Il reste que cet impôt idéologique finit toujours par être traité par contournement et jamais de manière claire et précise.
Or, la question de la résidence principale continue à se poser de manière de plus en plus insistante, compte tenu de l'augmentation du prix de l'immobilier.
Si nous prenons des cas pratiques, nous nous apercevons que certaines personnes voient la valeur de leur résidence principale, qui constitue parfois le seul élément de leur patrimoine, augmenter de manière considérable - cela a été dit tout à l'heure - ainsi, par conséquent, que le montant de l'ISF dont elles sont redevables, alors que leurs revenus sont loin de s'accroître dans la même proportion, notamment lorsqu'elles sont retraitées.
C'est la raison pour laquelle la disposition proposée par cet amendement est selon moi nécessaire.
L'on m'objectera sans doute - peut-être M. le rapporteur général le fera-t-il ? - que le bouclier fiscal sert à résoudre ce problème. N'étant pas totalement convaincu qu'il le résolve, je présente cet amendement.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Alain Lambert. Enfin, le risque d'inconstitutionnalité relatif à l'habitation principale a souvent été opposé.
Du coup, les arguments sont de plus en plus nombreux qui tendent à démontrer la constitutionnalité absolue d'une disposition précise relative à la résidence principale.
En matière fiscale, nous avons instauré la déductibilité des intérêts d'emprunt, la réduction d'impôt pour les gros travaux, les ravalements de façade, les travaux d'isolation, et pour les économies d'énergie, toujours au titre de la résidence principale.
S'agissant du droit civil, certaines dispositions tendent à faire du logement un élément à part au sein du patrimoine et à l'ériger en protection de la famille ; je pense notamment au droit au maintien dans le logement pour le conjoint survivant, voire à l'incessibilité du domicile familial pour l'entrepreneur.
On voit donc bien que, juridiquement, la résidence principale fait d'ores et déjà l'objet d'un traitement distinct en droit civil et en droit fiscal. C'est ce qui me fait penser que cet amendement n'est pas entaché d'un risque d'inconstitutionnalité.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 207, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Dans la première phrase du second alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, après le taux : « 20 % », sont insérés les mots : « qui ne saurait être inférieur à 300 000 euros ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement est la conséquence de la décision de l'Assemblée nationale de porter de 20 % à 30 % l'abattement sur la résidence principale.
Historiquement, ces 20 % sont dus à l'initiative d'un contribuable qui avait considéré que, sa résidence principale étant occupée, il était nécessaire d'instaurer un abattement. Cela a été d'ailleurs accepté par l'administration fiscale dans un premier temps.
L'Assemblée nationale a été mal inspirée de passer à 30 % : il ne s'agit pas là d'une mesure d'équité. En effet, elle favorise les patrimoines les plus importants et, donc, les contribuables susceptibles, puisqu'ils ont une résidence principale très chère, d'avoir également une très belle situation, à moins que ce patrimoine ne leur vienne de leurs parents.
Par conséquent, plutôt que de passer de 20 % à 30 %, il nous est apparu plus juste de conserver le taux initial tout en précisant que l'abattement sur la résidence principale ne saurait être inférieur à 300 000 euros.
Pour les résidences les plus chères, à l'instar de certains hôtels particuliers situés à Paris intra-muros ou dans la banlieue ouest,...
M. Denis Badré. À l'est aussi !
M. Jean-Jacques Jégou. Certes, mais dans une moindre mesure, tout de même ! Donc, pour ces résidences-là, l'instauration d'un seuil de 30 % risque de susciter des effets d'aubaine, comme c'est d'ailleurs déjà le cas actuellement, et à accentuer encore davantage la différence entre les petits propriétaires de leur résidence principale et les propriétaires fonciers plus riches.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements en discussion commune ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission ne peut qu'être hostile aux amendements identiques de suppression nos 84 et 129 dans la mesure où elle a elle-même voté le passage de 20 % à 30 % d'une telle décote.
Nous restons donc constants dans nos positions.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes d'ailleurs heureux d'avoir été un tant soit peu précurseurs en la matière.
Par ailleurs, dans un même souci de constance, nous ne pouvons être favorables à l'exonération de la résidence principale proposée à l'amendement n° 223, même si, nous le savons bien, elle est très fortement demandée par une grande partie de l'électorat urbain. Néanmoins, tant que l'ISF existera, cette mesure nous semble impossible à envisager pour des raisons constitutionnelles d'égalité devant l'impôt.
Au demeurant, dans un entretien accordé au journal Les Échos au mois de janvier dernier, Nicolas Sarkozy avait écarté l'exonération de la résidence principale.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Un entretien aux Échos n'est tout de même pas un programme électoral ! La presse est indépendante !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président de la commission des finances, nous nous efforçons tout simplement de suivre une ligne cohérente sur l'ISF : nous ne voulons pas nous écarter de la position fixée par le futur Président de la République lors de cet entretien.
Malgré tout, le fait de poser la question est parfaitement légitime.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sans doute reviendra-t-elle de nouveau en débat. En l'espèce, nous serons attentifs à l'avis qu'émettra le Gouvernement, et je suppose d'ailleurs, du moins je l'espère, que notre collègue Alain Lambert sera sensible à une éventuelle demande de retrait du Gouvernement.
Cela étant, chers collègues de l'Union centriste-UDF, l'adoption dans cette rédaction de l'amendement n° 207 pourrait conduire à un certain nombre d'effets pervers, puisqu'une résidence principale d'une valeur de 300 000 euros serait alors complètement exonérée. Or je ne pense pas que votre intention soit réellement de faire varier la quote-part d'exonération par rapport à la valeur de la résidence principale.
Une telle mesure devrait d'ailleurs faire l'objet d'une expertise pour vérifier sa validité du point de vue constitutionnel. En effet, deux contribuables disposant d'un patrimoine ayant une valeur totale identique ne seront pas traités de manière équitable : celui qui se trouve être propriétaire de sa résidence principale en sera totalement exonéré ; celui qui ne l'est pas, comme c'est après tout sa liberté, ne bénéficiera, à due concurrence, d'aucune exonération sur les autres biens composant son patrimoine.
Songez, ainsi, à l'injustice qui serait faite aux gendarmes, lesquels ne peuvent pas être propriétaires de leur résidence principale. (Sourires.) Cela peut paraître anecdotique, mais la question des logements de fonction ayant été évoquée lors du débat, notamment sur vos travées, je me permets de faire un rapprochement avec les propos que nous tenions à cette occasion.
En tous les cas, le sujet mérite réflexion.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le rapporteur général, y a-t-il beaucoup de gendarmes soumis à l'ISF ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Un gendarme peut très bien avoir hérité et disposer d'un patrimoine taxable !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Certes !
M. Thierry Repentin. Si c'est un général de gendarmerie !
M. Jean-Pierre Fourcade. Mais il y en a beaucoup !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, en la matière, nous pouvons être confrontés aux situations les plus étranges ! Depuis que je m'occupe d'ISF, c'est-à-dire depuis fort longtemps, j'ai reçu des lettres absolument étonnantes, à l'image de ce mineur de fond retraité du Pas-de-Calais et scandalisé d'être assujetti à l'ISF !
L'ISF est un système véritablement étonnant. Cela étant, nous n'allons pas y consacrer tout le reste de notre discussion. Mais, je le répète, nous ne pouvons exclure qu'un gendarme soit redevable de cet impôt. (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Vous parliez d'un mineur : c'est sûrement un X-Mines ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, monsieur Arthuis, je vous assure qu'il s'agit d'un ancien mineur de fond du Pas-de-Calais !
M. Guy Fischer. Donnez-nous des explications complémentaires, monsieur le rapporteur général, car tout cela est assez incompréhensible !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je peux vous montrer la lettre ! J'ai même entretenu une correspondance fournie avec cette personne ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Jacques Jégou. Il faut le montrer dans les foires !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cher collègue, je vous en prie, soyons respectueux de tous nos correspondants.
M. Jean-Jacques Jégou. Je ne voulais pas être inconvenant, monsieur le rapporteur général. Mais le cas que vous évoquez est tout de même rarissime !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En la matière, la vraie question est à mon sens celle de la fixation du seuil d'entrée dans l'ISF. Elle n'est pas traitée aujourd'hui, mais peut-être le sera-t-elle un jour. Quoi qu'il en soit, c'est en agissant à ce niveau-là que nous serons éventuellement en mesure de résoudre les difficultés que vous évoquez à juste titre.
Cela étant, chers collègues de l'Union centriste-UDF, pour toutes les raisons que je viens d'exposer, je serais très sensible, au nom de la commission des finances, après que le Gouvernement se sera exprimé, que vous acceptiez de retirer l'amendement n° 207.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est bien entendu défavorable aux amendements identiques de suppression nos 84 et 129, puisqu'il a lui-même émis un avis favorable sur l'amendement présenté à l'Assemblée nationale et visant à relever de 20 % à 30 % l'abattement sur la résidence principale.
Nous avons tout simplement considéré qu'il était légitime de tenir compte de la très forte augmentation des prix de l'immobilier intervenue, comme chacun le sait, entre 1997 et 2006. L'enrichissement de nombreux contribuables est donc en grande partie dû à l'augmentation significative de leur patrimoine au titre de la résidence principale. Le nombre des redevables à l'ISF est ainsi passé de 179 000 en 1997 à 457 000 en 2006.
Monsieur Lambert, sur l'amendement n° 223 et votre proposition de faire sortir la résidence principale du patrimoine soumis à l'ISF, je réitère la demande de retrait formulée par M. le rapporteur général.
Lui-même l'a rappelé, nous allons prochainement réexaminer l'ensemble des prélèvements obligatoires. À ce titre, l'ISF méritera un examen attentif, évidemment, les éléments de son assiette aussi, le bouclier fiscal, peut-être, son taux, pourquoi pas ?
Vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, il s'agit d'un sujet fondamental, car la résidence principale constitue l'un des éléments prépondérants du patrimoine des contribuables. En ce sens, la mesure que vous préconisez aurait des conséquences telles qu'elle ne peut, à mon sens, être acceptée dans le cadre du présent texte.
Au demeurant, selon nos calculs, le coût s'élèverait à 760 millions d'euros.
M. le rapporteur général ne manquera pas de me répondre qu'une telle évaluation est sans doute exagérée, voire irréaliste, s'agissant d'une mesure prévue dans un amendement du Sénat. Pour ma part, j'ai tendance à faire confiance à la qualité des données produites par mes services. Par conséquent, en l'état actuel, nous devons bien réfléchir à l'opportunité d'une disposition si coûteuse.
Pour ce qui est de l'amendement n° 207, monsieur Jégou, il constitue en quelque sorte la réplique de l'amendement qui, défendu à l'Assemblée nationale par M. de Courson, n'a pas été adopté. Il s'agit de proposer un dispositif alternatif, dans lequel l'abattement reste de 20 % mais est couplé à un plancher de 300 000 euros.
Or une telle mesure ne profiterait finalement qu'à un nombre limité des contribuables assujettis à l'ISF qui possèdent leur résidence principale, alors que la hausse de l'immobilier a bien entendu touché tous les patrimoines.
Par conséquent, le fait de revenir sur les 30 % au bénéfice de l'instauration d'un plancher n'est, à nos yeux, pas justifié. En outre, cette mesure aurait, elle, un coût de 440 millions d'euros.
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le sénateur, le Gouvernement vous demande également de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Lambert, l'amendement n° 223 est-il maintenu ?
M. Alain Lambert. Madame la ministre, je dois le dire, j'ai le plus grand respect pour vous. Vous faites montre, chaque jour davantage, de vos grandes qualités, et les éclaircissements que vous nous apportez nous permettent de prendre les bonnes décisions.
Permettez-moi cependant d'avoir encore un doute sur la réalité du rendez-vous que vous vous êtes engagée à nous fixer pour aborder la réforme de l'ISF. Je l'avoue, j'ai plus confiance quand vous nous promettez une rencontre pour évoquer les autres sujets de l'actualité économique !
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Alain Lambert. Cela étant, puisque le texte dont nous débattons traite effectivement d'un sujet particulier, je trouve assez légitime de retirer cet amendement.
Mais, dans la mesure où l'examen du projet de budget se rapproche, il est tout aussi légitime, me semble-t-il, d'envisager de déposer de nouveau un tel amendement à cette occasion. En d'autres termes, ce fameux rendez-vous, madame la ministre, pourrait venir très vite, puisque nous nous retrouverons à partir du mois d'octobre sur ces sujets.
Madame la ministre, mes chers collègues, notre incapacité à régler le problème devient réellement agaçante. Si rien ne change, un de ces jours, je finirai par déposer purement et simplement un amendement de suppression de l'ISF ! (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)
Les Français sont tout de même majeurs et responsables, et donc parfaitement capables d'assumer la suppression d'un impôt qui produit des effets totalement néfastes pour l'économie française.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Courage, fuyons !
M. Alain Lambert. Cette abrogation a d'ailleurs été décidée dans quasiment tous les pays de l'Union européenne. La France ne peut pas rester à l'écart, car cela équivaudrait à nous tirer une balle dans le pied.
Cela étant dit, monsieur le rapporteur général, puisque vous m'avez demandé de retirer cet amendement, j'accepte !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci, mon cher collègue !
M. le président. L'amendement n° 223 est retiré.
La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote sur l'amendement n° 207.
M. Denis Badré. L'article 5 bis, introduit par l'Assemblée nationale, tend donc à relever de 20 % à 30 % l'abattement sur la résidence principale pour la détermination de la cotisation d'ISF. Que je sache, cette mesure a forcément un coût.
M. Denis Badré. J'en prends acte, madame la ministre.
Si j'ai bien compris M. le rapporteur général, notre dispositif équivaut à instaurer une discrimination entre les patrimoines de même valeur, selon les éléments qui y figurent, et encourt éventuellement un risque d'inconstitutionnalité.
À mon sens, le Conseil constitutionnel n'a pas de raisons de censurer plus cette mesure que celle qui a été adoptée par l'Assemblée nationale. À cet égard, sa remarque ne me paraît donc pas fondée.
En définitive, madame la ministre, que proposons-nous ?
Au lieu de passer à 30 % pour tout le monde, ce qui représente un cadeau, une aide considérable pour les propriétaires d'immeubles très importants, nous préférons conserver le seuil antérieur, soit 20 %, et affecter l'économie ainsi obtenue à la mise en place d'une franchise ou, si vous préférez, d'un plancher, pour que les propriétaires immobiliers plus modestes puissent bénéficier à plein de la mesure.
D'après vous, cela coûte très cher. Mais nous pouvons très bien adopter notre amendement aujourd'hui et profiter du temps qu'il nous reste avant la réunion de la commission mixte paritaire pour réfléchir à un recalibrage de la mesure, afin qu'elle soit bien mise en oeuvre, mais à coût nul.
Madame la ministre, vous avez tout de même consenti un effort important en acceptant ce relèvement à 30 % pour tout le monde. L'objectif que nous visons est simplement de répartir différemment l'argent correspondant à un tel surcoût.
La mesure que nous proposons me semble beaucoup plus juste, sans qu'elle soit plus coûteuse ni moins valable sur le plan constitutionnel que celle qui figure à l'article 5 bis.
Je maintiens donc notre amendement. Je le répète, je suis prêt, d'ici à la commission mixte paritaire, à réfléchir à un système à surcoût nul par rapport au texte voté à l'Assemblée nationale, mais qui serait plus équitable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 84 et 129.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 207.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 124 :
Nombre de votants | 229 |
Nombre de suffrages exprimés | 226 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 114 |
Pour l'adoption | 37 |
Contre | 189 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 5 bis.
(L'article 5 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5 bis
M. le président. L'amendement n° 109, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le h du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du premier alinéa, après les mots : « à compter du 3 avril 2003 » sont insérés les mots : « et jusqu'au 31 décembre 2007 » ;
2° Dans la première phrase du deuxième alinéa, après les mots : « à compter du 3 avril 2003 » sont insérés les mots : « et jusqu'au 31 décembre 2007 » ;
3° Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa, après les mots : « locaux affectés à un usage autre que l'habitation acquis à compter du 3 avril 2003 » sont insérés les mots : « et jusqu'au 31 décembre 2007 » et, après les mots : « ainsi que des logements acquis à compter du 3 avril 2003 » sont insérés les mots : « et jusqu'au 31 décembre 2007 ».
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement n° 113.
M. le président. Je suis en effet saisi d'un amendement n° 113, également présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre III du livre VI du code de la construction et de l'habitation est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Permis de mise en copropriété
« Art. L. 634-1. Toute division par lots d'un immeuble comprenant au moins cinq locaux à usage d'habitation doit faire l'objet d'un permis de mise en copropriété.
« Art. L. 634-2. Le permis de mise en copropriété est instruit et délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par un décret en Conseil d'État. Il est délivré par le maire au nom de la commune. Lorsqu'une commune fait partie d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'habitat, elle peut, en accord avec cet établissement, lui déléguer cette compétence qui est alors exercée par le président de l'établissement public au nom de l'établissement. Cette délégation de pouvoir doit être confirmée dans les mêmes formes après chaque renouvellement du conseil municipal ou après l'élection d'un nouveau président de l'établissement public.
« Pour l'instruction des documents visés au présent chapitre, le maire ou, s'il est compétent, le président de l'établissement public de coopération intercommunale peut déléguer sa signature aux agents chargés de l'instruction des demandes.
« Art. L. 634-3. Toute demande de permis de mise en copropriété est déposée à la mairie. Dans les cas où la commune a délégué ses compétences à un établissement public de coopération intercommunale, le maire conserve un exemplaire de la demande et transmet les autres exemplaires au président de l'établissement public compétent dans la semaine qui suit le dépôt.
« Art. L. 634-4. Toute personne souhaitant obtenir un permis de mise en copropriété doit assortir sa demande d'un dossier présentant l'état de l'immeuble au regard de normes techniques et environnementales définies par décret ainsi que les contrats de location des logements loués.
« Art. L. 634-5. Préalablement à la délivrance du permis de mise en copropriété, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale recueille l'avis des organisations représentatives des locataires et des organisations représentatives des bailleurs concernés.
« Art. L. 634-6. L'autorité compétente peut refuser de délivrer le permis de mise en copropriété si l'immeuble ne répond pas à des normes techniques et environnementales définies par décret en Conseil d'État, si la mise en copropriété de l'immeuble va à l'encontre des objectifs définis dans le programme local de l'habitat, en particulier au titre de la mixité sociale, ou si les locataires ou occupants de bonne foi des locaux d'habitation ne disposent pas d'un contrat de location d'au moins six ans à compter de la date de demande du permis.
« Art. L. 634-7. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent chapitre. »
Veuillez poursuivre, monsieur Repentin.
M. Thierry Repentin. Le Sénat vient de confirmer le relèvement de l'abattement sur la résidence principale de 20 % à 30 %, ce qui est une forme déguisée de suppression de l'ISF.
L'amendement n° 109 tend à supprimer l'une des causes de la flambée des prix de l'immobilier, qui se traduit par une augmentation du nombre de nos concitoyens assujettis à l'ISF : le dispositif dit de l'amortissement « Robien », dont chacun connaît les conséquences néfastes pour l'économie française.
L'amendement n° 113 vise, quant à lui, la seconde cause de cette envolée des prix du logement : le développement des ventes à la découpe d'immeubles appartenant à des fonds de pension, procédé qui jette à la rue de nombreux ménages et affecte lourdement leur pouvoir d'achat.
Je vous propose de supprimer ces deux dispositifs inflationnistes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission n'est pas convaincue de l'existence d'un lien entre la suppression du dispositif Robien et le sujet du présent projet de loi.
M. Thierry Repentin. C'est l'ISF !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 109.
En revanche, en tant que maire d'une ville moyenne, je trouve l'amendement n° 113 très intéressant, car il est utile et opérationnel. Je souhaite donc vivement que cette proposition soit présentée de nouveau ultérieurement, à l'occasion de l'examen d'un autre texte, et qu'elle soit adoptée.
J'estime que nous avons eu tort de supprimer, pour les villes de moins de 100 000 habitants, l'autorisation municipale en cas de changement de destination des locaux. Cette autorisation est, en effet, absolument nécessaire lorsque l'on tient à maintenir la sociologie d'un centre-ville.
Cependant, cet amendement étant assez éloigné du sujet du jour, je demande à M. Repentin de bien vouloir le retirer. Je trouverais en effet regrettable qu'il soit battu, alors même que je l'approuve sur le fond.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement n'est pas favorable à ces deux amendements, pour les raisons invoquées par M. le rapporteur général, et j'en demande le retrait.
M. le président. Monsieur Repentin, les amendements nos 109 et 113 sont-ils maintenus ?
M. Thierry Repentin. Je maintiens l'amendement n° 109, car je suis persuadé que le dispositif Robien contribue à l'envolée des prix de l'immobilier, et donc à l'augmentation du nombre de nos concitoyens assujettis à l'ISF.
Je retire, néanmoins, l'amendement n° 113 concernant les ventes à la découpe.
M. le président. L'amendement n° 113 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 109.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5 ter
Le Gouvernement présentera au Parlement, le 15 octobre 2007, un rapport sur les modalités de mise en place d'une imposition minimale sur le revenu des personnes physiques en vue d'un examen à l'occasion du projet de loi de finances pour 2008. - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 5 ter
M. le président. L'amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 5 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après l'article 4 B, il est inséré un article 4 C ainsi rédigé :
« Art. 4 C. - Les personnes ayant à titre temporaire leur domicile fiscal en France peuvent être passibles de l'impôt sur le revenu à raison de leurs seuls revenus de source française.
« Le bénéfice du premier alinéa est accordé pour une durée maximale de cinq ans, sur agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, aux personnes remplissant les conditions suivantes :
« 1° Ne pas avoir été fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B au cours des cinq années précédant la demande ;
« 2° Avoir satisfait à l'ensemble de leurs obligations fiscales et sociales ;
« 3° a. Exercer à titre principal une activité donnant lieu au versement d'un traitement ou salaire soumis au taux maximal de la taxe prévue à l'article 231,
« b. Ou exercer à titre principal une activité figurant sur une liste fixée par décret en raison du caractère spécifique des compétences requises ou de difficultés de recrutement,
« c. Ou souscrire, à compter du 1er août 2007, dans les conditions définies à l'article 885 I ter, au capital de sociétés répondant aux conditions définies audit article, pour un montant excédant la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune. » ;
2° Dans le troisième alinéa de l'article 885 A, après les mots : « n'ayant pas leur domicile fiscal en France », sont insérés les mots : « ou bénéficiant du régime défini à l'article 4 C ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à renforcer l'attractivité de notre territoire pour les personnes détenant des compétences de haut niveau.
Je ne détaillerai pas ce dispositif, techniquement assez complexe, qui résulte des travaux menés durant près d'un an par la mission commune d'information du Sénat sur la notion de centre de décision économique et les conséquences qui s'attachent, dans ce domaine, à l'attractivité du territoire national.
Il s'agit d'imposer les personnes n'ayant pas été fiscalement domiciliées en France au cours des cinq années précédentes sur la base de leurs seuls revenus de source française et de leur seul patrimoine existant sur le sol français, après agrément.
Nous voulons bien être attractifs, mais sans perdre un seul centime d'euro d'impôt actuellement prélevé, ce qui est le cas, puisque ces nouveaux contribuables, par définition, viennent s'installer dans notre pays.
Afin que ce régime soit concevable et conforme aux principes de notre droit fiscal, il est proposé de procéder par agrément, dans le respect de conditions précises, fixées par la loi.
Je n'en dis pas plus, car j'ai le sentiment que cet amendement s'écarte quelque peu des principaux thèmes traités dans ce projet de loi. Mais j'ai voulu semer pour l'avenir, le Gouvernement ayant ouvert, si j'ai bien compris, la boîte à idées afin de renforcer la compétitivité de nos entreprises et l'attractivité de notre territoire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je note, monsieur le rapporteur général, que vous faites une application un peu distributive des vertus de la réglementation anglo-saxonne. Vous avez, en effet, évoqué le système de la remittance base taxation, dont l'efficacité est attestée par l'attractivité de la place financière de Londres. Vous ne sembliez pas, hier, aussi séduit par la réglementation anglo-saxonne ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut faire son marché !
Mme Christine Lagarde, ministre. Vous avez raison ! La mise en application des meilleures pratiques étrangères peut nous faire le plus grand bien, surtout s'il s'agit de permettre à la France de rivaliser avec l'Angleterre en tant que place financière. C'est d'ailleurs pour cette raison que le Gouvernement a souhaité labelliser un « pôle de compétitivité mondial » centré sur les services financiers, Finance Innovation, situé en région d'Île-de-France.
Nous avons également mis en oeuvre d'autres mesures : le bouclier fiscal, bien sûr, le régime des impatriés, dont nous avons réduit l'exigence d'extranéité préalable au retour au France, et un dispositif quelque peu similaire à celui que vous proposez, monsieur le rapporteur général, et qui tend à limiter la base de l'imposition des résidents temporaires à leurs seuls revenus de source française.
Sont essentiellement concernés le secteur financier et les services à haute valeur ajoutée. Je vous propose donc que nous réfléchissions ensemble, à l'occasion de la constitution du Haut comité de place que j'ai souhaité créer, et qui rassemblera des professionnels et les autorités de régulation des marchés financiers, aux moyens d'améliorer l'attractivité de la France et de la place financière de Paris.
Une fois recueilli l'accord de tous ceux qui se pencheront sur le berceau de l'attractivité française, ces éléments de réflexion pourront être intégrés dans le projet de loi relatif à la modernisation de l'économie que le Gouvernement présentera au printemps 2008.
Dans cette perspective, je vous demande, monsieur le rapporteur général, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 42 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 42 rectifié est retiré.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, je souhaite réunir la commission des finances afin que celle-ci examine un sous-amendement déposé par Gouvernement. Je demande donc une suspension de séance de dix minutes.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons bien sûr accéder à la demande de M. le président de la commission des finances et interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
Article 6
I. - Le I de l'article 885 I ter du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les trois alinéas sont regroupés sous un 1 ;
2° Dans le premier alinéa, après les mots : « sa souscription au capital », sont insérés les mots : « initial ou aux augmentations de capital » et, après les mots : « aux aides de l'État en faveur des petites et moyennes entreprises », sont insérés les mots : «, modifié par le règlement (CE) n° 364/2004 du 25 février 2004, » ;
3° Le b est ainsi rédigé :
« b) La société a son siège de direction effective dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. » ;
4° Il est ajouté un 2 ainsi rédigé :
« 2. L'exonération s'applique également aux titres reçus par le redevable en contrepartie de sa souscription en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
« a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celle tenant à son activité ;
« b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au a du 1.
« L'exonération s'applique alors à la valeur des titres de la société détenus directement par le redevable, dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l'actif brut de celle-ci représentative de la valeur des titres reçus en contrepartie de sa souscription au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1. »
II. - Après l'article 885 V du même code, il est inséré un article 885-0 V bis ainsi rédigé :
« Art. 885-0 V bis. - I. - 1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50 000 €.
« La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit satisfaire aux conditions suivantes :
« a) Répondre à la définition des petites et moyennes entreprises figurant à l'annexe I au règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de l'État en faveur des petites et moyennes entreprises, modifié par le règlement (CE) n° 364/2004 du 25 février 2004 ;
« b) Exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater, et notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités de gestion ou de location d'immeubles ;
« c) Avoir son siège de direction effective dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;
« d) Ses titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger.
« 2. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
« a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celle tenant à son activité ;
« b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1.
« Le montant des versements effectués au titre de la souscription par le redevable est pris en compte pour l'assiette de l'avantage fiscal dans la limite de la fraction déterminée en retenant :
« - au numérateur, le montant des versements effectués au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1 par la société mentionnée au premier alinéa du présent 2, avant le 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle le redevable a procédé au versement. Ces versements sont ceux effectués avec les capitaux reçus au cours de l'année civile lors de la constitution du capital initial ou au titre de l'augmentation de capital auquel le contribuable a souscrit ;
« - au dénominateur, le montant des capitaux reçus au cours de l'année civile lors de la constitution du capital initial ou au titre de l'augmentation de capital auquel le contribuable a souscrit.
« 3. L'avantage fiscal prévu au présent I s'applique également aux parts de fonds communs de placement à risques, de fonds communs de placement dans l'innovation et de fonds d'investissement de proximité lorsque l'actif du fonds est constitué exclusivement de titres de sociétés dont les capitaux propres sont inférieurs à 2 millions d'euros, versement inclus.
« Le montant des versements effectués au titre de l'acquisition de parts de fonds est pris en compte, pour l'assiette de l'avantage fiscal, dans la limite de la fraction déterminée en retenant :
« - au numérateur, le montant des versements effectués au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1 par le fonds mentionné au premier alinéa du présent 3, avant le 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle le redevable a procédé au versement ;
« - au dénominateur, le montant des sommes reçues du contribuable au cours de l'année civile.
« II. - 1. Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au I est subordonné à la conservation par le redevable des titres reçus en contrepartie de sa souscription au capital de la société jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription.
« La condition relative à la conservation des titres reçus en contrepartie de la souscription au capital s'applique également à la société mentionnée au premier alinéa du 2 du I ;
« 2. En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au premier alinéa du 1 du présent II par suite d'une fusion ou d'une scission au sens de l'article 817 A, l'avantage fiscal mentionné au I accordé au titre de l'année en cours et de celles précédant ces opérations n'est pas remis en cause si les titres reçus en contrepartie sont conservés jusqu'au même terme. Cet avantage fiscal n'est pas non plus remis en cause lorsque la condition de conservation prévue au premier alinéa du 1 du présent II n'est pas respectée par suite d'une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire.
« III. - Les versements ouvrant droit à l'avantage fiscal mentionné au I sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.
« IV. - La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au I ne peut donner lieu à un autre avantage fiscal au titre d'un autre impôt.
« Le redevable peut bénéficier de l'avantage fiscal prévu au présent article et de celui prévu à l'article 885-0 V bis A au titre de la même année, sous réserve que le montant imputé sur l'impôt de solidarité sur la fortune résultant des deux avantages n'excède pas 50 000 €.
« Par dérogation à l'alinéa précédent, la fraction des versements pour laquelle le redevable demande le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au présent article ne peut donner lieu à l'application de l'article 885-0 V bis A.
« L'avantage fiscal prévu au présent article ne s'applique pas aux souscriptions au capital d'une société dans laquelle le redevable, son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin notoire bénéficie des dispositions des articles 885 O et 885 O bis.
« V. - Le bénéfice de ces dispositions est subordonné au respect de celles du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis.
« VI. - Un décret fixe les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux sociétés visés au I. »
III. - Après l'article 885 V du même code, il est inséré un article 885-0 V bis A ainsi rédigé :
« Art. 885-0 V bis A. - I. - Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune, dans la limite de 50 000 €, 75 % du montant des dons en numéraire effectués au profit :
« 1° Des établissements de recherche et d'enseignement supérieur, publics ou privés, à but non lucratif, agréés par le ministre chargé du budget ainsi que par le ministre chargé de la recherche ou par le ministre chargé de l'enseignement supérieur ;
« 2° Des fondations reconnues d'utilité publique répondant aux conditions fixées au a du 1 de l'article 200 ;
« 3° Des entreprises d'insertion et des entreprises de travail temporaire d'insertion mentionnées aux articles L. 322-4-16-1 et L. 322-4-16-2 du code du travail ;
« 4° Des associations intermédiaires mentionnées à l'article L. 322-4-16-3 du même code ;
« 5° Des ateliers et chantiers d'insertion mentionnés à l'article L. 322-4-16-8 du même code.
« II. - Les dons ouvrant droit à l'avantage fiscal mentionné au I sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.
« III. - La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au I ne peut donner lieu à un autre avantage fiscal au titre d'un autre impôt.
« Le redevable peut bénéficier de l'avantage fiscal prévu au présent article et de celui prévu à l'article 885-0 V bis au titre de la même année, sous réserve que le montant imputé sur l'impôt de solidarité sur la fortune résultant des deux avantages n'excède pas 50 000 €.
« Par dérogation à l'alinéa précédent, la fraction des versements pour laquelle le redevable demande le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au présent article ne peut donner lieu à l'application de l'article 885-0 V bis.
« IV. - Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au I est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis et à la condition que soient jointes à la déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune des pièces justificatives attestant le total du montant et la date des versements ainsi que l'identité des bénéficiaires.
« V. - Un décret fixe les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux personnes mentionnées au I. »
IV. - Le I s'applique aux souscriptions réalisées à compter du 20 juin 2007. Les II et III s'appliquent aux versements et aux dons réalisés à compter de cette même date.
V. - La perte de recettes pour l'État résultant du 3 du I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du même code.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Mme Nicole Bricq. Avec l'article 6, nous en arrivons à l'impôt de solidarité sur la fortune proprement dit, mais il en a déjà beaucoup été question à l'occasion de l'examen des articles précédents.
En prenant la parole sur cet, je souhaite, à la suite de mon intervention de ce matin sur l'attractivité et la compétitivité économique de notre territoire, évoquer le problème de concurrence fiscale que poserait à la France l'impôt de solidarité sur la fortune.
Certes, l'ISF est une singularité française, mais ce n'est pas la seule ! J'y reviendrai. Par ailleurs, il est vrai que l'entrée de nouveaux pays dans l'Union européenne est source de dumping fiscal et que l'intégration du marché européen favorise la mobilité des assiettes.
Monsieur le rapporteur général, avec la majorité, vous vous évertuez, à force de contorsions - je vous plains d'ailleurs, car cela doit être très dur ! -...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une bonne gymnastique !
Mme Nicole Bricq. L'exercice doit tout de même être difficile !
Vous vous évertuez donc à vider de sa substance l'impôt de solidarité sur la fortune, petit à petit, avec acharnement, en espérant, comme l'a dit tout à l'heure M. Lambert, qu'il sera supprimé un jour.
Mais on ne peut pas réfléchir sereinement à l'impôt de solidarité sur la fortune sans s'interroger sur ce qui fait la singularité de notre fiscalité directe par rapport à celle des autres pays de l'Union européenne.
Nous connaissons ses défauts : notre fiscalité directe est très concentrée sur un petit nombre de contribuables et son assiette est faible. La proposition que vous nous faites budget après budget, et encore aujourd'hui avec ce « paquet fiscal », est donc la solution la plus dangereuse.
Outre cette singularité par rapport à nos partenaires européens, notre fiscalité directe présente la particularité de comporter de nombreuses niches fiscales. Ce texte en créera d'ailleurs de nouvelles.
Il faut donc repenser notre fiscalité.
En procédant à des allégements d'impôts, vous privez la puissance publique de ses possibilités d'intervenir. C'est la pire des solutions !
Évidemment, nous souhaitons tous une harmonisation fiscale dans l'Union européenne afin d'éviter cette concurrence, qui peut nous être préjudiciable, mais la meilleure manière de régler globalement le problème, c'est de réfléchir à des impôts progressifs.
La raison pour laquelle nous défendons l'impôt sur le revenu - même s'il est très faible -, c'est que c'est le seul qui soit véritablement progressif. Des impôts directs, raisonnablement progressifs et à base large, permettraient de corriger les défauts de notre système fiscal.
Vous allez nous proposer de flécher une partie de l'ISF vers les PME, mais vous savez très bien que ce n'est que de l'optimisation fiscale !
M. François Marc. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Vous n'allez pas encourager les PME, notamment celles qui sont sur notre territoire, pas plus que vous n'allez lutter contre les délocalisations et la concurrence des autres pays de l'Union européenne.
La solution n'est pas là. Arrêtez donc de vous contorsionner ! Vous avez bien tort.
Réfléchissez plutôt sereinement à une refonte de notre système d'impositions, notamment directes. Nous pourrons alors avoir un véritable débat sur tous ces sujets, y compris sur l'ISF.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 6 porte essentiellement sur la possibilité de bénéficier d'un dégrèvement fiscal pour un investissement dans les petites et moyennes entreprises.
Selon le quotidien Les Échos, « un montant d'ISF de 50 000 euros correspond à un patrimoine taxable d'environ 6 millions d'euros, au-delà duquel il ne reste qu'environ 3 % des assujettis à l'ISF. Le barème étant toutefois très progressif, ceux-ci acquittent plus d'un tiers du produit de l'ISF. Couplé au plafonnement des impôts à 50 % des revenus également proposé par Nicolas Sarkozy, l'ISF pourrait alors disparaître complètement ». Je vous le disais également à propos d'autres articles.
Si l'on ajoute à cela l'abattement porté à 30 % pour la résidence principale, nous pouvons être certains que la promesse de Nicolas Sarkozy - « il n'y aura pas de suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune si je suis président de la République » - tombe complètement à l'eau. Contrairement à ce qu'affirme le rapporteur général depuis le début de la session, il est évident que le Président de la République ne tiendra pas sa promesse.
Reconnaître qu'« il est normal que ceux qui ont les plus gros patrimoines paient davantage » devient une formule oratoire reprise abondamment pour mieux camoufler la réalité de la mesure.
Vous supprimez de fait l'ISF et vous affirmez avec audace que vous êtes pour son maintien. Le candidat nous a habitués pendant la campagne à jouer de cette duplicité de langage, par des formules lapidaires et chocs, matraquées à longueur d'antenne, pour nous convaincre que tout le monde était concerné par ces avantages. C'est également ce que vous essayez de faire, madame la ministre.
Certes, vous avancez des chiffres pour prouver qu'un gros pourcentage de Français sont concernés par vos mesures, mais sans dire une seule fois à quel niveau ils le sont. Les avantages ont cette particularité qu'ils sont concentrés, pour les sommes les plus importantes, entre les mains de quelques privilégiés et, pour une faible partie, destinés à la grande majorité d'entre eux.
En fait, vous n'évoquez jamais l'effet de cumul des différentes dispositions qui nous sont présentées dans ce projet de loi. C'est ce que je vous ai demandé de nous indiquer lors de votre audition devant la commission des finances.
J'en reviens à l'article 6, dont l'objectif est toujours le même. Comme vous le savez, 450 000 foyers redevables de l'ISF seront intéressés. Cet article permet, comme il est précisé dans l'exposé des motifs, « aux contribuables qui le souhaitent d'affecter tout ou partie de leur impôt de solidarité sur la fortune, ISF, au financement de PME ou d'organismes d'intérêt général. Il prévoit une réduction d'ISF égale à 75 % des versements effectués [...] au titre de souscriptions directes ou indirectes au capital des PME ».
Si cet article est adopté, ce sera la première fois que notre législation fiscale permettra d'obtenir un crédit d'impôt si important comparativement à la somme investie. Pour retrouver un tel système, il faut remonter à la décision prise par Édouard Balladur, ministre des finances entre 1986 et 1988, d'autoriser la déduction de la totalité des salaires des employés à domicile de l'impôt sur le revenu, mais pour des sommes moins conséquentes. Cette mesure a depuis disparu.
Si nous comparons votre proposition au CODEVI, que beaucoup de Français connaissent, sur le même créneau des PME, la rémunération n'est pas à la même hauteur, puisqu'elle rapporte seulement 2,75 % nets d'impôt. Ce que vous proposez dans ce texte n'aura pas le même impact et ne touchera pas les mêmes familles. Cela permettra de réduire directement l'impôt à acquitter au fisc, voire de l'annuler, pour un montant pouvant aller jusqu'à 50 000 euros.
Le rapporteur général à l'Assemblée nationale, Gilles Carrez, imagine le cas d'un contribuable qui effectue un versement fractionné de 100 000 euros en 2007 et en 2008, et il s'enthousiasme en constatant que ce même contribuable bénéficiera d'une ristourne totale d'ISF de 75 000 euros au titre de 2008 et de 2009.
Mieux, en cas de dépassement des plafonds de dégrèvement, la fraction des versements n'ouvrant pas droit à la réduction d'ISF pourra bénéficier d'un autre régime de faveur au titre d'un autre impôt ! Et M. Carrez cite l'exemple d'un contribuable qui souscrit 200 000 euros au capital d'une PME - 50 % en 2008 et 50 % en 2010 - qui se verra rembourser l'intégralité de cette somme en cumulant les réductions d'ISF et d'impôt sur le revenu... Une opération donc doublement gagnante, puisque ces « investisseurs » pourront récupérer leur mise au bout de cinq ans, les avantages fiscaux perçus restant définitivement acquis.
On peut de plus imaginer que ce ne sera pas seulement une opération « blanche », puisque le placement pourra se faire sous forme de participation au capital de l'entreprise et bénéficier ainsi des dividendes sur les actions acquises, qui pourra, et c'est un comble, bénéficier d'un crédit d'impôt sur action.
L'opération devient ainsi très juteuse, car une grande partie des personnes assujetties à l'ISF pourraient ainsi se dispenser de payer cet impôt. D'après les calculs du Syndicat national unifié des impôts, près de 95 % des contributeurs au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune pourraient échapper à cet impôt grâce à un tel investissement. En effet, ces contribuables déclarent un patrimoine moyen de 3,8 millions d'euros et s'acquittent, en moyenne, d'un ISF de 17 000 euros par an. Pour eux, investir 50 000 euros tous les ans dans une PME, c'est loin d'être infaisable.
Cet impôt aurait rapporté 4 milliards d'euros à l'État, ce qui aurait été utile pour développer les services publics.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-France Beaufils. Votre mesure va donc aggraver encore plus la situation de nos services publics. Nous pouvons aussi douter de l'efficacité économique d'une telle mesure qui représenterait à peine 2 000 euros pour chaque entreprise.
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est défavorable à la suppression de l'article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les articles 885 I bis à 885 I quater du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Par cet amendement, nous proposons la suppression des pactes d'actionnaires visant à diminuer la contribution de l'ISF.
Cette exonération des intérêts minoritaires, qui avait été instaurée par la loi Dutreil, n'a semble-t-il pas rencontré un grand succès, malgré les assurances contraires qui figuraient à l'époque dans le rapport sur le fondement duquel elle avait été créée. Les bases exonérées s'élèvent à 6,4 milliards d'euros, ce qui représente environ 2 % de la valeur des biens immobiliers taxables.
Le pacte d'actionnaires concerne au premier chef les actionnaires minoritaires et non impliqués dans la gestion courante de l'entreprise : c'est d'abord une solution de technique fiscale pour ceux qui n'ont de leur entreprise que des dividendes.
Il serait intéressant de procéder à l'évaluation économique et sociale des pactes d'actionnaires. On a parlé tout à l'heure de la nécessité de veiller à la performance des décisions prises, et une telle analyse d'impact s'inscrirait pleinement dans cette perspective. Nous serions également curieux de connaître les résultats d'une étude qui reste à diligenter sur les politiques salariales, les politiques d'emploi et d'investissement menées dans les entreprises où ont été validés de tels pactes d'actionnaires.
Nous aimerions comparer, par exemple, l'augmentation toute relative du nombre de contribuables faisant jouer le dispositif avec le nombre d'emplois réellement créés dans les entreprises concernées, avec leurs performances économiques, avec ce que ces entreprises ont fait, entre autres, en termes de diversité de recrutement, de préservation du cadre de vie et d'environnement.
Au nom de l'efficacité fiscale et économique, mes chers collègues, nous vous proposons d'adopter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avions pris une part tout à fait active, vous vous en souvenez certainement, mes chers collègues, à la discussion de la loi pour l'initiative économique du 1er août 2003, dite « loi Dutreil », qui a fait naître ces engagements collectifs de conservation.
Avant même l'adoption de cette loi, pendant plusieurs années, nous avions indiqué à de nombreuses reprises qu'une situation très dangereuse pouvait se présenter dans certaines entreprises à capitaux familiaux : il s'agit des cas où des actionnaires minoritaires auraient été exposés au risque de ne pouvoir payer leur cotisation d'ISF qu'en cédant leurs parts, mettant ainsi en question le contrôle de l'entreprise, la pérennité de sa stratégie et, parfois, la pérennité des emplois.
Lorsque le gouvernement Raffarin a été mis en place en 2002, je le rappelle, la question de l'ISF avait bien entendu été posée par la majorité. Le Premier ministre et les ministres de l'époque avaient répondu favorablement sous réserve qu'il s'agisse de défendre l'emploi.
C'est donc en 2003 que le problème a été résolu dans le cadre de la loi Dutreil, qui prévoit les engagements collectifs de conservation. Leur nombre figure dans le rapport écrit et s'élève, si ma mémoire est bonne, à 7 400...
Mme Marie-France Beaufils. Oui, 7 400 !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous remercie, chère collègue, d'avoir lu très attentivement le rapport. Le montant en capitaux auquel correspondent ces 7 400 engagements collectifs de conservation y figure également.
Mme Marie-France Beaufils. Soit 6,4 milliards d'euros !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous remercie encore de ces précisions. Elles sont extrêmement importantes parce qu'elles montrent que la méthode Dutreil a été un succès et a permis de stabiliser le contrôle de ces entreprises.
Mme Marie-France Beaufils. Mais non !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle a évité l'hémorragie qui se produisait et qui conduisait à des rachats, à des changements de stratégie, à des ruptures de continuité, notamment.
Je rappelle que les titres liés par le pacte doivent être conservés pendant au moins six ans. C'est une lourde contrainte de durée dans la vie économique d'aujourd'hui.
Par conséquent, il ne faut surtout pas toucher à ce dispositif, qui est un succès. Si vous le faisiez, chers collègues, cela se retournerait dans bien des cas contre les intérêts des parties prenantes de l'entreprise, notamment des salariés.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Pour les raisons qui ont été invoquées par M. le rapporteur général, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 215, présenté par MM. Badré, Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
I. Dans le deuxième alinéa (2) du 4° du I de cet article, après les mots :
en numéraire au capital
insérer les mots :
, ou à sa souscription de titres participatifs,
II. Compléter la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par les mots :
, ou au titre de souscription de titres participatifs
III. Dans le troisième alinéa du b du 2 du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, après les mots :
montant des versements effectués au titre de la souscription au capital
insérer les mots :
ou de la souscription de titres participatifs
IV. Dans le premier alinéa du 1 du II du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, après les mots:
souscription au capital
insérer les mots :
ou de titres participatifs
V. Pour compenser les pertes de recettes dues aux I, II, III et IV, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
...- Les pertes de recettes résultant de l'octroi de l'avantage du bénéfice fiscal de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune au titre de la souscription de titres participatifs sont compensés à due concurrence par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Parce que leurs apports en fonds propres se font au moyen de souscription de titres participatifs et non par l'émission d'actions, les coopératives se retrouvent exclues du dispositif envisagé de réduction de l'ISF, alors qu'elles sont explicitement des sociétés au sens du droit français. Les titres participatifs sont pourtant des créances de dernier rang, donc largement assimilables à des actions.
Je ne souhaite pas que le texte contienne une mesure qui pourrait être perçue comme discriminatoire envers les coopératives et que ces dernières soient intégrées dans le dispositif à cet article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande à M. Badré de bien vouloir retirer son amendement au profit de l'amendement n° 43 de la commission, qui tend aux mêmes fins.
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° 215 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Comme tout à l'heure, je réponds à l'invitation de la commission, et je retire mon amendement.
Toutefois, je me réserve la possibilité d'intervenir lors de l'examen de l'amendement n° 43 pour valider le fait que les coopératives sont bien prises en compte par cet article.
M. le président. L'amendement n° 215 est retiré.
L'amendement n° 235 rectifié bis, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux, MM. P. Dominati, Masson, Türk, Belot, J.L. Dupont, de Richemont et Retailleau, est ainsi libellé :
I. - Compléter le I de cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
5° Il est ajouté un 3 ainsi rédigé :
« 3. L'exonération s'applique dans les mêmes conditions aux parts de fonds d'investissement de proximité définis par l'article L. 214-41-1 du code monétaire et financier dont la valeur des parts est constituée au moins à 50 % de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans vérifiant les conditions prévues au 1 du I de l'article 885-0 V bis.
« Les versements servant de base au calcul de l'avantage fiscal sont retenus après imputation de l'ensemble des frais et commissions dans la limite du pourcentage initialement fixé de l'actif du fonds investi en titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans. »
II. - Le 3 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts est supprimé.
III. - Compléter le 1 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, par un alinéa ainsi rédigé :
« e. Être soumise à l'impôt sur les bénéfices dans les conditions de droit commun ou y être soumise dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France.
IV. - Après le dernier alinéa du II du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - 1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % du montant des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire aux parts de fonds d'investissement de proximité définis par l'article L. 214-41-1 du code monétaire et financier dont la valeur des parts est constituée au moins à 50 % de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans vérifiant les conditions prévues au 1 du I, lorsque les conditions suivantes sont satisfaites :
« a. les personnes physiques prennent l'engagement de conserver les parts de fonds jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription ;
« b. le porteur de parts ou l'actionnaire, son conjoint ou son concubin notoire et leurs ascendants et descendants ne doivent pas détenir ensemble plus de 10 % des parts du fonds et, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices des sociétés dont les titres figurent à l'actif du fonds ou avoir détenu ce montant à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la souscription des parts du fonds ;
« c. le fonds doit respecter le pourcentage initialement fixé de son actif investi en titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au premier alinéa.
« Les versements servant de base au calcul de l'avantage fiscal sont retenus dans la limite du pourcentage initialement fixé de l'actif du fonds investi en titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans.
« 2. L'avantage fiscal prévu au 1 ne peut être supérieur à 50 000 euros par an. Le redevable peut bénéficier de l'avantage fiscal prévu au 1 et de ceux prévus aux 1 et 2 du I au titre de la même année, sous réserve que le montant imputé sur l'impôt de solidarité sur la fortune résultant de ces avantages n'excède pas 50 000 euros.
« 3. L'avantage fiscal obtenu fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle le fonds ou le redevable cesse de respecter les conditions prévues au 1.
« 4. Sont exclues du bénéfice des avantages fiscaux prévus au 1, les parts de fonds donnant lieu à des droits différents sur l'actif net ou sur les produits du fonds ou de la société, attribuées en fonction de la qualité de la personne. »
V. - Dans le III du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885- 0 V bis du code général des impôts, après les mots :
au I
sont insérés les mots :
et au II bis
VI. - Rédiger ainsi le premier alinéa du IV du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885- 0 V bis du code général des impôts :
« La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au I ou au II bis ne peut donner lieu à l'une des réductions d'impôt sur le revenu prévues à l'article 199 terdecies-0 A.
VII. - Compléter le VI du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, par les mots :
ainsi qu'aux gérants et dépositaires des fonds visés au II bis
VIII. - Après le dernier alinéa du III de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
...- L'article 1763 C du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'administration établit qu'un fonds commun d'investissement de proximité n'a pas respecté son quota d'investissement susceptible de faire bénéficier à ses porteurs de l'avantage fiscal prévu à l'article 885 0 V bis, la société de gestion du fonds est redevable d'une amende égale à 20 % de la différence entre le pourcentage initialement fixé de son actif en titres de sociétés éligibles et le pourcentage effectif de tels investissements. Le montant de cette amende est toutefois limité à la moitié du montant des sommes qui lui sont dues par le fonds au titre des frais de gestion pour l'exercice au titre duquel le manquement est constaté. »
IX. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État des paragraphes I à VIII ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de la création d'une réduction d'impôt pour investissement dans les fonds d'investissement de proximité est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Que personne ne s'y trompe, cet article est extraordinairement important.
On l'a dit tout à l'heure, le produit de l'impôt sur la fortune représente 4 milliards d'euros. La part qui pourra être investie dans les entreprises s'élève donc à peu près à 2 milliards d'euros.
Grâce à ce renforcement des fonds propres des entreprises, l'effet de levier sera colossal. Cela pourrait représenter 10 milliards d'euros de plus tous les ans, ce qui permettrait aux entreprises d'investir, de se moderniser et d'innover, sous réserve que la mise en oeuvre de cette disposition soit effective.
Pour le moment, le modèle qui nous est proposé ne prévoit qu'un investissement direct et plafonné à 50 000 euros. Or les entreprises ont des profils très différents, et des demandes diverses. Une petite PME, par exemple, aura besoin de 10 000 euros pour renforcer ses fonds propres. En revanche, une start-up pourra avoir besoin de lever de 500 000 euros à 1 million d'euros. Comment un contribuable payant 500 euros ou 1 000 euros d'impôt sur la fortune pourrait-il contribuer à leur essor ? Cette action ne pourra se réaliser que collectivement.
Même celui qui paie 50 000 euros d'impôt sur la fortune ne sera pas à même de répondre à la demande d'une start-up qui évolue dans les biotechnologies, ou dans un secteur plus ordinaire. Ces entreprises ont en effet souvent besoin de lever des sommes très importantes. Or il n'est pas possible que des milliers de personnes viennent individuellement apporter les fonds nécessaires à l'entreprise pour la rendre opérante.
Face à la diversité des entreprises et de leurs besoins en fonds propres, il est essentiel de pouvoir disposer d'outils de nature différente.
Pour l'instant, seul l'investissement direct est autorisé.
La commission des finances proposera tout à l'heure que les business angels puissent bénéficier collectivement de la mesure. C'est une bonne chose, et je soutiendrai ce dispositif. Mais je ne peux pas imaginer que chaque personne physique payant 1 000 euros, 2 000 euros, 5 000 euros ou 10 000 euros d'impôt sur la fortune aille chercher l'entreprise qu'elle entend financer. C'est pourquoi il faut une démarche collective.
Pour ma part, je propose de passer par un fonds d'investissement de proximité, un FIP : on peut y participer à partir de 500 euros et il permet une épargne de proximité sur un territoire donné. C'est donc un bon outil d'aménagement du territoire dont chacun d'entre vous, mes chers collègues, pourra aisément vérifier l'efficacité. Je ne doute pas d'ailleurs que ce FIP sera efficace puisqu'il sera géré avec une approche professionnelle, ce qui est important.
Il y a ceux qui pensent à la mutualisation du risque. Pour ma part, je pense à la possibilité de mutualisation de l'investissement. Le dispositif que je propose permettra véritablement de conforter les entreprises, car même 50 000 euros ne sont pas suffisants pour satisfaire la demande d'une entreprise qui par hypothèse a fortement besoin de se moderniser.
Madame la ministre, mon amendement ne va pas à l'encontre de votre dispositif, bien au contraire. De tout le « paquet fiscal », c'est même la mesure qui aura l'impact le plus important, sous réserve qu'elle puisse être mise en oeuvre correctement.
Mes chers collègues, je vous demande de faire comme les membres de la commission des finances, que je remercie, et d'adopter cet amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 278, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Modifier comme suit l'amendement n° 235 rectifié bis :
I. - Modifier comme suit le I :
1° Dans le troisième alinéa, remplacer le pourcentage :
50 %
par le pourcentage :
20 %
2° Rédiger comme suit le dernier alinéa :
« L'exonération est limitée à la fraction de la valeur des parts de ces fonds représentative de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1° du I de l'article 885-0 V bis. »
II. - Modifier comme suit le IV :
1° Dans le deuxième alinéa, remplacer respectivement les pourcentages :
75 %
et
50 %
par les pourcentages :
50 %
et
20 %
2° Dans le cinquième alinéa, remplacer les mots :
premier alinéa
par les mots :
1 du I
3° Dans le sixième alinéa, remplacer les mots :
sont retenus
par les mots :
sont ceux retenus après imputation de l'ensemble des frais et commissions et
et les mots :
exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans
par les mots :
vérifiant les conditions prévues au 1 du I
4° Dans le septième alinéa, remplacer le montant :
50 000 euros
par le montant :
5 000 euros
III. - Après le pourcentage :
20 %
rédiger comme suit la fin de la première phrase du troisième alinéa du VIII :
du montant des investissements qui permettraient d'atteindre le pourcentage initialement fixé de son actif en titres de sociétés éligibles.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement saisi l'esprit dans lequel a été décidée cette mesure. Vous avez raison de souligner qu'elle est importante, puisqu'elle permet à des redevables de l'ISF de s'exonérer de la dette qu'ils ont au titre cet impôt, à concurrence de 75 % de l'investissement dans le capital d'une petite ou moyenne entreprise, et, pour les 25 % restants, de prendre leurs risques, ce qui renforcera ce lien de proximité que nous souhaitons développer entre le contribuable et l'entreprise.
Votre amendement vise à étendre le bénéfice de la réduction de l'ISF pour l'investissement direct dans le capital de PME aux souscriptions non pas d'actions ou de parts dans le capital des PME elles-mêmes, mais de parts de fonds d'investissement de proximité, dont l'actif est constitué pour 50 % au moins en titres de société reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés créées depuis moins de cinq ans et éligibles à l'avantage fiscal en cas d'investissement direct.
Vous avez raison, il s'agit d'une forme de mutualisation, qui est en quelque sorte un facteur de garantie du risque que nous mettons en oeuvre au bénéfice du contribuable et du souscripteur.
Le Gouvernement partage votre souci d'orienter les investissements des contribuables qui se concentrent en direction des PME établies présentant un profil de risque relativement faible vers la zone très sensible des entreprises en création et à fort potentiel.
Nous savons aussi que les FIP prennent d'ores et déjà une part importante dans le financement des jeunes entreprises. Nous conviendrons sans doute ensemble qu'il est très possible d'accroître cette part, puisque, si les FIP fonctionnent aujourd'hui, ils pourraient sans doute avoir de bien meilleurs résultats encore.
Le Gouvernement émettra donc un avis favorable sur votre amendement, sous réserve cependant de l'adoption du sous-amendement n° 278, qui permet non seulement d'assouplir le dispositif, mais surtout de lui conférer une véritable constitutionnalité. C'est donc pour consolider cet amendement que le Gouvernement présente ce sous-amendement.
S'agissant de l'affectation de tout ou partie de l'ISF au financement des PME, vous prévoyez d'accorder aux souscripteurs de parts de FIP le même avantage que celui qui est accordé au titre de la souscription directe au capital d'une PME.
Cet alignement ne paraît pas justifié et fait courir un risque d'inconstitutionnalité, car les redevables ne supportent pas le même risque.
En effet, les investissements via des fonds d'investissement de proximité permettent une mutualisation et une forme de dilution du risque. D'une part, compte tenu du grand nombre d'entreprises qui composent l'actif des fonds, on répartit le risque sur davantage d'acteurs. D'autre part, on ouvre la possibilité aux FIP d'investir jusqu'à 40 % de leur actif dans des titres non risqués ou dans des actifs monétaires. Cette disposition, vous en conviendrez, diminue le degré de risque : un investissement en SICAV ou en obligations est moins risqué qu'une souscription au capital d'une PME, dont, par hypothèse, les titres ne seraient pas liquides.
Afin de répondre à cette objection, qui constitue un risque sérieux, et de sécuriser juridiquement le dispositif, le Gouvernement souhaite limiter le taux de l'imputation possible, donc de l'avantage fiscal en question. Je rappelle que celui-ci est de 75 % pour l'investissement direct dans les actions ou dans les parts d'une PME par hypothèse très peu liquide, donc avec un risque certain.
Le Gouvernement propose de limiter ce taux à 50 %, donc une décote de 25 % sur l'abattement autorisé au titre de l'investissement dans un FIP plutôt que directement dans le capital d'une petite et moyenne entreprise, et de plafonner le montant à 5 000 euros.
Cela étant, je suis prête à rectifier le sous-amendement afin de porter la part potentielle de l'investissement à 10 000 euros. Je vous ai en effet bien écouté, monsieur le sénateur, et j'ai parfaitement compris que votre objectif était de faire bénéficier les petites et moyennes entreprises de ces investissements. Toutefois, le taux plafond sera maintenu à 50 %, au lieu de 75 %. Cette mesure vise encore une fois à éviter le risque d'inconstitutionnalité.
Enfin, s'agissant de l'exonération d'ISF des parts du FIP, le Gouvernement propose de substituer à l'approche en termes de versement que vous avez retenue une photographie de l'actif du FIP au 1er janvier de chaque année. Ainsi, le principe de transparence trouvera à s'appliquer dans les mêmes conditions à l'ensemble des investissements intermédiés, qu'ils soient réalisés via une société holding, ce qui est prévu en l'état actuel du projet, ou via un FIP, ce qui permet à nouveau de maintenir l'égalité de traitement.
Votre dispositif ainsi assoupli, afin de lui permettre d'emporter l'adhésion tant des professionnels du capital que des épargnants, pourrait être à nouveau modifié, et ce sur deux points.
Tout d'abord, le quota d'investissement de 50 % de l'actif du FIP au capital de sociétés créées depuis moins de cinq ans paraît trop élevé. Votre amendement ferait en effet passer le quota d'investissement dans de jeunes entreprises de 10 % à 50 %, tout en ajoutant une contrainte supplémentaire sur la nature des titres éligibles à ce nouveau quota.
En effet, seuls seraient éligibles au nouveau quota de 50 % les titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital des sociétés et non plus les titres déjà existants acquis sur un marché secondaire. Afin d'élargir le dispositif, le Gouvernement propose de ramener le quota de 50 % à 20 %. Nous éliminerons ainsi une contrainte qui pèse actuellement sur le FIP.
Ensuite, votre amendement restreint le champ d'application de la mesure en limitant l'assiette de l'avantage fiscal. Les versements servant de base au calcul de l'avantage sont en effet retenus dans la limite des souscriptions réalisées par le FIP au capital des sociétés de moins de cinq ans.
Afin de renforcer le caractère incitatif de cette mesure, le Gouvernement souhaite élargir l'assiette de l'avantage fiscal en retenant les versements effectués par le redevable à hauteur des souscriptions réalisées par le FIP au capital non pas des sociétés créées depuis moins de cinq ans, mais des PME européennes au sens de la législation européenne, ces sociétés correspondant à l'objectif de l'article 6 du présent projet de loi. Ces sociétés n'ont donc pas besoin d'être seulement jeunes, il suffit qu'elles soient PME au sens de la réglementation européenne.
Nous élargissons donc l'assiette permettant de bénéficier de l'application de votre amendement dûment assorti du sous-amendement n° 278 rectifié.
Sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 278 que je rectifie, monsieur le président, le Gouvernement émettra un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 278 rectifié qui, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit l'amendement n° 235 rectifié bis :
I. - Modifier comme suit le I :
1° Dans le troisième alinéa, remplacer le pourcentage :
50 %
par le pourcentage :
20 %
2° Rédiger comme suit le dernier alinéa :
« L'exonération est limitée à la fraction de la valeur des parts de ces fonds représentative de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1° du I de l'article 885-0 V bis. »
II. - Modifier comme suit le IV :
1° Dans le deuxième alinéa, remplacer respectivement les pourcentages :
75 %
et
50 %
par les pourcentages :
50 %
et
20 %
2° Dans le cinquième alinéa, remplacer les mots :
premier alinéa
par les mots :
1 du I
3° Dans le sixième alinéa, remplacer les mots :
sont retenus
par les mots :
sont ceux retenus après imputation de l'ensemble des frais et commissions et
et les mots :
exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans
par les mots :
vérifiant les conditions prévues au 1 du I
4° Dans le septième alinéa, remplacer le montant :
50 000 euros
par le montant :
10 000 euros
III. - Après le pourcentage :
20 %
rédiger comme suit la fin de la première phrase du troisième alinéa du VIII :
du montant des investissements qui permettraient d'atteindre le pourcentage initialement fixé de son actif en titres de sociétés éligibles.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 235 rectifié bis ainsi que sur le sous-amendement n° 278 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission croit beaucoup au caractère incitatif et vertueux du dispositif « 50 000 euros ». C'est un levier puissant qui permettra aux petites et très petites entreprises d'être considérées comme des vecteurs d'investissement.
Dans notre pays, le monde de l'entreprise est trop fragmenté : ceux qui ont réussi dans les grandes entreprises ne s'intéressent pas suffisamment à la naissance, à l'accompagnement et au développement des moyennes, des petites, voire des très petites entreprises. Ces dernières peuvent en effet être plus ou moins récentes, avoir une activité plus ou moins technologique. Les priorités qualitatives peuvent donc varier.
Dans sa conception même, cette mesure porte une vision nouvelle du risque entrepreneurial. Pour vous en convaincre, mes chers collègues, je voudrais vous citer des extraits de notes que je viens de recevoir de deux associations qui semblent oeuvrer très utilement pour l'intérêt général dans ces domaines : le mouvement ETHIC - les Entreprises de taille humaine indépendantes et de croissance - et l'association Entreprise et progrès, qui incarne un patronat parfois quelque peu non conformiste.
Voici donc ce que le mouvement ETHIC écrit : « Les petites et moyennes entreprises manquent de fonds propres et sont incapables de financer leur développement. Elles ne trouvent pas de financement auprès des banques, et moins la somme demandée est importante, moins on leur prête !
« Il convient en outre de s'appuyer sur cette mesure intelligente pour insuffler aux Français le sens du partage du risque entrepreneurial. Rien de tel pour cela que l'épargne de proximité au sens concret du terme.
« Le principe d'instituer des fonds communs de placement sur mesure, nous fait retomber dans un système d'intermédiaires financiers qui s'éloigne justement du principe d'investissement personnalisé dans lequel l'investisseur s'implique. »
Entreprise et Progrès, de son côté, écrit : « Entreprise et Progrès a toujours été favorable à la possibilité pour les contribuables de déduire une partie de leur ISF en faveur d'un investissement dans les PME. ». De même, on lit plus loin : « Pour que l'investisseur privé apporte non seulement son argent mais aussi ses conseils et son réseau, il faut obligatoirement qu'il s'agisse d'un investissement ? direct ? c'est-à-dire librement choisi pour qu'existe un véritable ? affectio societatis ?.
« Cet objectif n'est pas atteint si ce dispositif étend le bénéfice de cette mesure aux parts de FCPR, de FCPI ou de FIP. On incite à nouveau les capitaux en recherche de défiscalisation à aller vers des produits financiers qui ont montré leur limite. Entreprise et Progrès, qui représente les intérêts des entrepreneurs et non ceux des intermédiaires financiers, appuie donc le Sénat en la personne de son rapporteur Philippe Marini » - merci ! - « pour que l'on garde ce lien direct indispensable entre l'investisseur privé et le responsable de la TPE-PME. »
Au regard de ces considérations que j'ai tenu à citer, car elles me paraissent tout à fait spontanées et authentiques, la commission a préparé un amendement que je me permets de présenter par avance, monsieur le président, et qui vise à encourager les cercles d'investisseurs.
Par ailleurs, notamment pour les souscriptions les plus faibles en valeur unitaire, nous avons réfléchi à l'utilisation d'un outil existant qui n'a pas eu jusqu'ici un très grand succès, mais qui, après tout, pourrait être dynamisé par ce nouveau dispositif, à savoir les fonds d'investissement de proximité - là aussi, nous pouvons remercier M. Dutreil de la loi pour l'initiative économique !
L'amendement de M. Adnot, sous-amendé par le Gouvernement, me semble tout à fait raisonnable.
Après Mme la ministre, je me permets d'insister : il est nécessaire du point de vue constitutionnel que l'avantage fiscal soit bien dimensionné, c'est-à-dire proportionné à la situation, dès lors qu'il s'agit de produits de gestion professionnelle, de risques mutualisés et non plus d'une prise directe de risques dans une entreprise déterminée.
En d'autres termes, la jurisprudence constitutionnelle sera nécessairement guidée par le principe de proportionnalité.
Tant que l'ISF existe, et nous avons vu tout à l'heure que cet impôt continuera d'exister -, toute exonération sera jugée en référence à une proportionnalité par rapport à l'intérêt général poursuivi. Ici, l'intérêt général poursuivi est précisément d'apporter des fonds à des entreprises qui n'en auraient pas, et également d'assumer un risque qui est direct et total.
Par conséquent, tout véhicule intermédiaire qui, par nature, est un véhicule de mutualisation du risque vient limiter en quelque sorte la légitimité de l'avantage accordé.
C'est pourquoi il me semble tout à fait indispensable de suivre le Gouvernement et de substituer dans l'amendement de M. Adnot le taux de 50 % au taux de 75 % en termes de calcul de l'avantage fiscal.
Pour le reste, Mme la ministre a fait un geste d'ouverture en direction de Philippe Adnot en se déclarant prête à accepter que le montant maximal de souscription dans un FIP soit porté à 10 000 euros, au lieu de 5 000 euros.
Puisque le souci de Philippe Adnot est de permettre aux petits cotisants de se grouper au sein de « véhicules de proximité », il me semble qu'on lui donne pleinement satisfaction en fixant ce plafond à 10 000 euros.
Je demande donc à notre collègue de bien vouloir accepter cette analyse et de se rallier au sous-amendement du Gouvernement. Cela nous permettrait de voter tous ensemble un dispositif qui marque un réel progrès dans le sens d'une valorisation du tissu des petites et moyennes entreprises.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cet article 6 est celui qui est, à mon avis, le plus convaincant par rapport à l'objectif que le Gouvernement s'est fixé de susciter dans le pays un choc de confiance et de croissance.
La société française éprouve encore quelques difficultés à adhérer à l'économie de marché et à la culture d'entreprise. Je ne suis pas sûr que la financiarisation de notre économie ait pu contribuer à convaincre nos compatriotes des vertus de l'économie de marché et de l'esprit d'entreprise.
La financiarisation, l'hyperfinanciarisation, c'est le CAC 40, des profits extraordinaires, quelquefois des actes déviants commis par certains dirigeants qui défrayent la chronique et suscitent des scandales, ce qui ne facilite pas le rétablissement de cette confiance dont nous parlons.
Les organismes financiers ont développé de multiples véhicules qui font que les petits actionnaires n'ont plus aucun lien direct avec l'entreprise au capital de laquelle ils ont souscrit.
On nous vend à l'envi de la sécurité, des produits d'épargne. Il faut des performances. Des performances, cela signifie bien souvent des fonds d'investissement qui « font la culbute », au risque de provoquer des restructurations, voire la délocalisation des activités et des emplois.
Cette hyperfinanciarisation nous met en difficulté par rapport à l'économie d'entreprise.
Vous l'avez vous-même dit, madame la ministre, et le rapporteur général l'a souligné : on ne peut tout de même pas faire de cet impôt choisi un instrument d'épargne, avec ce qu'il convient de rentabilité et de sécurité !
Il faut qu'il y ait une prise de risque. Il faut rétablir l'affectio societatis entre l'actionnaire et l'entreprise.
Et l'on ne doit pas écarter l'initiative individuelle qui se manifeste dans chaque territoire, grâce à la volonté de celles et de ceux qui participent au paiement de l'ISF. Il faut cesser de considérer que payer l'ISF vous met en marge de la société !
Au contraire, réjouissons-nous qu'il y ait des contribuables à l'ISF, puisque l'ISF existe, et servons-nous de ce levier extraordinaire pour développer l'esprit d'entreprise !
Pour ma part, j'attache beaucoup de prix à ce qu'on ne privilégie pas l'intermédiation par rapport à l'investissement direct.
C'est la raison pour laquelle la commission a déposé un amendement qui vise à reconnaître l'indivision dans l'investissement. Il pourra s'agir, par exemple, d'un club d'investisseurs.
Je ne doute pas que les chambres consulaires, le mouvement ETHIC, Entreprise et Progrès, le Centre des jeunes dirigeants d'entreprise, le CJD, le MEDEF, peut-être, les jeunes chambres économiques, les clubs-service seront intéressés !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Et France initiative réseau !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sur l'ensemble du territoire national, nous susciterons un mouvement d'intérêt pour les entreprises, chacun voyant à quel point le règlement de l'ISF peut être un merveilleux levier pour faciliter le développement des petites entreprises, voire quelquefois des très petites entreprises.
C'est donc là une vertu que nous reconnaissons bien volontiers à cet article 6, madame la ministre.
Cela étant, je ne voudrais pas non plus que, une fois ces véhicules collectifs créés, on vienne nous dire demain, à une échéance incertaine, qu'il ne faut surtout pas supprimer l'ISF au motif que cet impôt serait devenu l'élément indispensable permettant de faire vivre certaines entreprises.
Il n'y a pas si longtemps, l'un de vos prédécesseurs, madame la ministre, nous a suggéré de mettre un terme à l'abattement forfaitaire de 20 % auquel avaient droit les entrepreneurs individuels, les membres de professions libérales, les artisans, les commerçants qui passaient par des centres de gestion agréés.
Le jour où cet avantage fiscal a été supprimé, ces centres ont mis en avant le fait que la suppression de l'abattement les mettait en péril.
Pour redonner confiance aux centres de gestion agréés et maintenir leur avantage, il a fallu inscrire dans la loi que celles et ceux qui ne passaient pas par un centre de gestion verraient leurs revenus estimés à 125 euros lorsqu'ils en déclaraient 100 euros. L'objectif était de maintenir un avantage au profit des centres de gestion agréés.
Je ne voudrais pas que, demain, ayant privilégié l'intermédiation par des fonds de proximité ou tout autre fonds, on vienne nous dire qu'il ne faut surtout pas supprimer l'ISF, au risque de mettre en question la survie même de ces institutions.
Je pense que Philippe Adnot l'a bien compris : nous avons de la sympathie pour son amendement. Le sous-amendement du Gouvernement mettra le dispositif qu'il propose à l'abri de la sanction constitutionnelle.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Madame la ministre, je suis capable d'apprécier le chemin parcouru, car je connaissais votre position de départ. Quoi qu'il en soit, j'aurais préféré que vous me disiez non !
M. Philippe Adnot. En effet, en portant l'abattement à 50 %, vous décidez simplement que personne ne souscrira à ce type d'investissement. Ensuite il sera facile de dire que, si personne n'a souscrit, c'est parce que le dispositif n'était pas intéressant !
Mes chers collègues, quand vous serez de retour dans vos circonscriptions, vous rencontrerez un certain nombre de contribuables, et ils ne manqueront pas de vous interroger sur les conséquences de l'adoption de ce sous-amendement.
Une personne dont la contribution est importante, 50 000 euros, bénéficiera de 75 % d'abattement. En revanche, un contribuable dont la cotisation ne dépasse pas 500 euros ou 1 000 euros n'aura droit qu'à 50 % d'abattement !
En d'autres termes, plus on est important, plus on peut déduire de son impôt, et moins on est important, moins on peut déduire de son impôt.
Certes, vous me répondez que c'est en raison du risque. Mais cela ne fait absolument aucune différence ! Le contribuable qui investira 50 000 euros dans une entreprise n'est pas obligé de choisir une entreprise à risque. Je puis même vous garantir que celui qui acquitte 50 000 euros au titre de l'ISF est tout à fait capable d'investir dans une entreprise qu'il connaîtra bien, voire qu'il organisera avec deux ou trois copains de manière à ne prendre aucun risque !
Cette disposition ne procurera donc aucun financement supplémentaire aux entreprises qui en ont besoin, car 50 000 euros, individuellement, ce n'est pas suffisant pour « booster » une entreprise.
Quant au risque d'inconstitutionnalité, madame la ministre, je savais qu'on allait m'opposer cet argument et je puis vous dire, pour avoir un peu potassé la question, qu'il n'y en a pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il va falloir nommer Philippe Adnot au Conseil constitutionnel !
M. Philippe Adnot. Il y en a d'autant moins qu'à l'heure actuelle on peut déjà déduire de son impôt 25 % à condition d'investir directement dans une entreprise. Vous pouvez également déduire 25 % de votre impôt sur le revenu si vous passez par un fonds d'investissement de proximité.
En conséquence, madame la ministre, soit le système actuel est inconstitutionnel - puisque dans les deux cas auxquels j'ai fait allusion, on peut déduire rigoureusement le même pourcentage que celui que je propose -, soit mon amendement n'est pas inconstitutionnel !
Pourquoi ce qui ne pose pas de problème dans un cas en poserait-il un dans un autre ?
Mes chers collègues, j'avais proposé, pour être vertueux, que l'investissement via un FIP ne soit éligible que s'il concernait des jeunes entreprises au moins à hauteur de 50 %.
Madame la ministre, vous aviez bien compris que ces 50 % sont 50 % de 60 %, soit 30 %. Vous savez en effet que la règle, aujourd'hui, veut que les fonds d'investissement de proximité investissent au moins 60 % des fonds récoltés dans les PME.
Vous, vous proposez de ramener ce taux à 20 % : 20 % de 60 %, cela fait 12 %.
Je peux souscrire à votre proposition, même si elle est moins vertueuse que la mienne. Je ne serai pas plus royaliste que le roi, et j'accepte donc que la déductibilité soit limitée à 10 000 euros, car, ainsi, la masse des contribuables se trouvera concernée. Mais il faut, madame la ministre, que vous acceptiez à votre tour de rectifier votre sous-amendement en inscrivant « 75 % ».
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas possible !
M. Philippe Adnot. Sinon, personne ne choisira ce véhicule, et le semblant d'avantage que vous voulez lui donner ne sera nullement incitatif, puisque les gens choisiront la formule qui permet de déduire 50 %, sans obligation de risque.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors, retirez votre amendement !
M. Philippe Adnot. Une personne qui va investir 50 000 euros n'ira jamais choisir une entreprise à risques. Elle va s'organiser !
Le système par le fonds d'investissement est professionnel. Vous, vous le voyez sur la mutualisation du risque. Moi, je le vois sur la mutualisation qui permet d'atteindre les objectifs : pour se moderniser, les entreprises ont besoin non de 50 000 euros, mais de 100 000, 500 000 ou un million d'euros ! Par conséquent, pour obtenir 500 000 euros d'investissement, il faudra regrouper dans un département cinquante personnes payant l'impôt sur la fortune. Ces personnes, qui ne se connaissent pas, doivent décider de se grouper et d'investir dans le même « véhicule ».
En revanche, pour le véhicule que vous proposez, qui concerne en général des gens qui ont fait fortune, qui sont des business angels, qui vont se regrouper à une dizaine pour constituer un syndic, vous proposez non pas 50 % mais 75 %.
Vraiment, celui qui paie le ticket le plus modéré est le plus mal traité ! Mes chers collègues, si vous adoptez ce sous-amendement sans modification, vous n'aurez pas que des compliments quand vous rentrerez chez vous !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Les différents allégements d'ISF qui sont intervenus depuis 2003 ont des justifications à géométrie variable.
On nous a dit à l'époque qu'il s'agissait de lutter contre les délocalisations. Monsieur le rapporteur général, à la page 114 de votre rapport écrit, vous reconnaissez que le dispositif contenu dans la loi Dutreil n'a pas été convaincant à cet égard.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais si, il a très bien fonctionné !
Mme Nicole Bricq. On nous a dit aussi que ces allégements visaient à encourager l'investissement, à éviter la perte de dynamisme de notre économie, et, aujourd'hui, on débat du fléchage de l'ISF pour renforcer les fonds propres, sous la forme de fonds d'investissement de proximité... Je ne reprendrai pas le débat qui a déjà eu lieu.
À ce stade, j'aimerais comprendre - et sans doute la discussion en sera-t-elle éclairée pour la compréhension de tous -- la portée que vous attribuez à cet effet de levier.
Nous pensons, pour notre part, que c'est une mesure d'optimisation fiscale, que vous gesticulez beaucoup pour vous persuader que, à partir de l'ISF, vous allez dynamiser l'économie française, lui permettre d'accroître sa compétitivité.
Madame la ministre, il m'a semblé lire - mais je n'en suis plus très sûre à ce stade du débat, et peut-être pourrez-vous nous apporter des précisions à ce sujet lors de votre réponse aux différents orateurs - qu'on espérait dériver de l'ISF 400 millions d'euros au maximum. J'aimerais que vous confirmiez ou infirmiez ce chiffre, car, à ce moment-là, si votre proposition apparaissait comme un mécanisme vertueux, il serait plus facile d'en mesurer les effets.
Il me semble que, dans le débat qui s'est instauré au sein de la majorité, les appréciations divergent sur la prise de risque. Je rappelle que nous sommes en France. Monsieur Adnot, comme vous l'expliquez dans l'exposé des motifs, votre amendement vise les particuliers qui règlent un faible montant d'ISF. Si j'en juge par le plaidoyer que vous avez fait en leur faveur tout à l'heure, pensez-vous vraiment les transformer en business angels ? On peut toujours y croire, mais si de telles mesures fonctionnaient de cette manière, cela se saurait ! Donc, je suis sceptique.
Je suis également sceptique sur un autre point. Vous insistez beaucoup, monsieur Adnot, à l'instar du président de la commission des finances et du rapporteur général, sur le fait qu'il s'agit d'encourager, au travers des fonds d'amorçage et autres, les très petites entreprises. Êtes-vous bien sûr que le problème de la compétitivité de notre économie est à ce niveau ? Nous savons bien que le problème se situe au niveau de ce que l'on appelle les « grosses PME ». Là est le vrai goulet d'étranglement. Notre problème tient non pas à la création d'entreprises - nous sommes les champions à cet égard - mais au fait que, au bout de trois ou de cinq ans, la plupart des entreprises nouvellement créées ont disparu ou se sont fait absorber.
Si j'entre dans votre raisonnement, il me semble que le dispositif que vous proposez ne permettra pas de pallier ce problème. Vous n'y trouverez pas le remède à notre défaut de compétitivité, et les discussions qui viennent d'avoir lieu montrent que vous n'arrivez pas à vous mettre d'accord pour justifier un fléchage de l'ISF, qui, compte tenu de tout ce que l'on a dit auparavant, aboutit quand même à une mesure d'optimisation fiscale.
D'ailleurs, monsieur Adnot, vous êtes conscient de ce problème puisque vous écrivez, dans le premier alinéa de l'exposé des motifs de votre amendement : « ...plutôt qu'un énième instrument de défiscalisation, tout en moralisant la déduction fiscale qui nous serait applicable... ». Vous avez donc bien conscience que, jusqu'à présent, toutes les mesures de fléchage de l'ISF ont été, ni plus ni moins, des instruments de défiscalisation !
M. le président. Mes chers collègues, j'attire votre attention sur le fait que, au rythme où avancent nos travaux, nous risquons d'être encore là à six heures du matin ! Nous n'avons voté que dix-huit amendements en deux heures trente-cinq, ce qui signifie qu'il reste encore au moins douze heures de débat.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut accélérer, mes chers collègues !
M. le président. J'appelle donc chaque orateur à faire preuve de concision.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, je tiens justement à réagir sur la situation dans laquelle nous nous trouvons à dix-sept heures trente-cinq. Vous nous avez appelés à plusieurs reprises à la concision, et le président de la commission des finances a relayé vos propos.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors, accélérez !
M. Alain Vasselle. Le rapporteur général s'impatiente également à juste titre quand les débats traînent en longueur.
Mais n'est-il pas vain d'espérer, monsieur le président, que nous puissions discuter rapidement de sujets financiers et fiscaux ? Le président de la commission des finances comme le rapporteur général viennent de démontrer qu'il est difficile, sur des sujets d'une telle complexité, d'être aussi concis qu'ils le souhaiteraient. (Sourires.) J'ajoute que, sur des questions de ce type, les amendements présentés justifient des explications relativement longues, ainsi que des explications de vote argumentées.
Le président de la commission des finances a fait état de la complexité de notre dispositif fiscal. Étant parlementaire depuis 1992, j'ai pu constater que, chaque fois que l'on s'interroge sur le droit fiscal, l'imbroglio est tel qu'il faut l'assistance d'une kyrielle d'administrateurs pour y comprendre quelque chose !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au fait !
M. Alain Vasselle. À cet égard, je me félicite de la qualité des rapporteurs du Sénat, et de nos collaborateurs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors, traitons le sujet !
M. Alain Vasselle. Cela étant dit, je pense que le meilleur service que nous aurions pu rendre à notre pays, plutôt que de complexifier encore davantage notre législation fiscale, aurait été de supprimer purement et simplement l'ISF.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais ce n'est pas le cas !
M. Alain Vasselle. La redynamisation de notre économie aurait été certainement au rendez-vous, alors que tous ces contournements font traîner nos débats en longueur sans que nous soyons certains d'obtenir, au bout du compte, les résultats escomptés.
J'en reviens à l'amendement de M. Adnot et au risque d'inconstitutionnalité qu'il présente, d'où découle le sous-amendement du Gouvernement.
Je me demande si la limitation à 5 000 euros, voire à 10 000 euros puisque le Gouvernement a fait un pas dans la direction de M. Adnot, n'est pas déjà un élément permettant de marquer une différence, parmi ceux qui peuvent payer plus de 5 000 euros, entre ceux qui iront jusqu'à 50 000 euros et ceux qui ne pourront placer que 5 000 euros. Est-il vraiment nécessaire de ramener le pourcentage de 75 % à 50 % ?
Nous voulons servir l'intérêt général et diversifier au maximum les possibilités qui s'offrent à nous de réinvestissement de la fiscalité acquittée par les redevables de l'ISF. C'est pourquoi la proposition de notre collègue M. Adnot me semble particulièrement pertinente.
M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville. Je partage assez la position finale de notre collègue M. Vasselle.
Nous avons deux décisions à prendre.
L'Assemblée nationale avait retenu le montant de 50 000 euros pour les placements en fonds de mutualisation. Nous le ramenons à 10 000 euros, de manière à prévenir tout risque d'inconstitutionnalité. C'est la première décision.
En revanche, sur la seconde décision - devons-nous permettre que 75 %, ou 50 %, du montant de l'ISF soient placés dans ces fonds ? -, je ne vois pas très bien pourquoi le taux de 75 % s'appliquant à tous les autres placements, une capitis diminutio à 50 % devrait s'appliquer pour ce type de placements.
Par conséquent, je suis personnellement favorable à 10 000 euros et au taux de 75 %.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Ne serait-ce que pour gagner du temps, je suis prêt à déclarer que je voterai le sous-amendement du Gouvernement et l'amendement de M. Adnot. (Sourires.)
J'ai quand même quelques inquiétudes. En effet, à partir du moment où l'on utilise l'impôt pour acquérir des parts dans des fonds ou dans des sociétés, dans l'idée finalement de s'enrichir, on ne paie pas un impôt mais on acquiert un bien. Il y a vraiment là un risque de dérapage.
Cela dit, je suis prêt à courir ce risque, ne serait-ce que pour gagner du temps (Nouveaux sourires.), car j'ai conscience qu'il me sera difficile d'exposer en quelques mots les scrupules que j'éprouve.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Aujourd'hui, une réduction de 25 % est accordée au titre de la souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation ou de fonds d'investissement de proximité.
Même sous-amendé par le Gouvernement, l'amendement de M. Adnot permet d'utiliser 50 % de ces fonds. (Mme la ministre acquiesce.) Pour ma part, je suis d'avis de ne conserver le pourcentage de 75 % que pour les dons aux oeuvres ou pour les dons à la recherche, scientifique, médicale ou autre.
Ainsi, nous aurions un double mécanisme à partir de l'ISF : pour la recherche, les instruments scientifiques dont nous avons tellement besoin, le redevable pourrait imputer 75 % du montant des versements effectués ; pour les versements en faveur du développement économique, ce pourcentage serait de 50 %. Ce dispositif, qui me paraît très simple, favoriserait la reprise de notre économie dont nous avons fait une priorité.
M. Christian Cambon. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Adnot, je répondrai d'abord sur le risque d'inconstitutionnalité que présente votre amendement.
Je n'ai pas la prétention d'être une grande constitutionnaliste. Après avoir consulté des spécialistes dont le métier consiste à examiner en permanence les arrêts, l'interprétation a contrario d'une décision du Conseil constitutionnel du 31 juillet 2003 sur les dispositions de la loi Dutreil qui permettait l'investissement dans le capital de PME m'amène à penser qu'il faut varier le pourcentage en fonction du risque. Le risque n'est pas le même selon que l'on investit dans des parts ou des titres de sociétés non cotées, non liquides - là, le risque est important -, ou dans des parts de FIP qui, par hypothèse, sont beaucoup plus liquides, parce qu'elles peuvent faire l'objet de cessions.
C'est donc pour cette raison, et non pour diminuer l'attractivité des perspectives d'investissement en FIP, que je vous recommande très vivement d'accepter le sous-amendement n° 278 rectifié.
Je précise au passage que la position initiale du Gouvernement était de ne pas accepter votre amendement, monsieur Adnot. Par conséquent, si vous souhaitez que j'exprime un avis défavorable, je peux tout à fait l'émettre !
Toutefois, je reconnais que votre proposition présente certaines vertus. Je souhaite simplement qu'elle soit mieux calibrée, ce qui la rendrait plus solide et pérenne.
C'est également la raison pour laquelle j'ai accepté de rectifier en séance le sous-amendement du Gouvernement en portant de 5 000 euros à 10 000 euros le plafond de l'avantage fiscal que vous suggérez, car cela correspond, me semble-t-il, au montant moyen d'ISF acquitté par les contribuables qui y sont assujettis.
Par conséquent, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous encourage vivement à adopter ce sous-amendement. En effet, le dispositif qu'il tend à instituer me semble plus solide que toute autre disposition.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
Mme Christine Lagarde, ministre. Madame Bricq, je vous confirme que nous évaluons bien à 410 millions d'euros le montant des investissements susceptibles d'être réalisés grâce à l'article 6.
Pour parvenir à un tel chiffre, nous nous sommes inspirés d'un précédent, l'instrument Madelin, créé en 1995. Selon l'hypothèse que nous avons formulée, les contribuables aujourd'hui assujettis à l'ISF auront probablement un comportement similaire à celui des redevables qui avaient tiré parti du mécanisme Madelin lors de son entrée en vigueur.
À mon sens, cette estimation est plutôt basse (M. le président de la commission des finances acquiesce), car l'attitude des contribuables français à l'égard du risque entrepreneurial s'est - je l'espère et je le crois - quelque peu améliorée depuis 1995.
Vous le voyez, ce chiffre de 410 millions d'euros - l'estimation est, me semble-t-il, basse - représente près de 10 % du produit total de l'ISF.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 278 rectifié.
Je vous indique que j'ai été saisi d'une demande de scrutin public.
M. Philippe Adnot. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Pour ma part, je ne vois pas bien l'utilité de soumettre le sous-amendement n° 278 rectifié aux voix par scrutin public.
En effet, madame la ministre, même si je regrette votre position - le dispositif que vous défendez n'incitera pas les redevables de l'ISF à opter pour un fonds d'investissement de proximité, car ils préféreront bénéficier d'une exonération maximale -, je ne puis faire autrement qu'accepter votre sous-amendement.
Dans ces conditions, j'estime que le recours au scrutin public ne se justifie pas.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 278 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 125 :
Nombre de votants | 200 |
Nombre de suffrages exprimés | 200 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 101 |
Pour l'adoption | 169 |
Contre | 31 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le président, je lève le gage sur l'amendement n° 235 rectifié bis.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 235 rectifié ter.
Je mets aux voix l'amendement n°235 rectifié ter, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 43 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 132 est présenté par Mmes Bricq et Demontès, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mmes Le Texier, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I.- Compléter la première phrase du premier alinéa (1) du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par les mots :
, ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'octroi de l'avantage du bénéfice fiscal de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune au titre de la souscription au capital des petites et moyennes entreprises aux titres participatifs est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 43.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, qui rejoint un amendement précédemment présenté par le groupe de l'UC-UDF,...
M. Denis Badré. L'amendement n° 215 !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...vise à rendre éligible au nouveau régime institué par l'article 6 une catégorie particulière de titres constituant des fonds propres dans des sociétés coopératives.
Je le précise, nous ne visons que les sociétés coopératives ouvrières de production, ou SCOP. En outre, selon nous, les valeurs mobilières dont il s'agit - nous les qualifions de « titres participatifs » - doivent être rémunérées en fonction du chiffre d'affaires de la production ou du résultat de ces sociétés, mais elles ne doivent comporter aucune part d'intérêts fixes.
En d'autres termes, dans notre esprit, il s'agit bien d'associer le souscripteur au risque d'entreprise, et non de lui permettre de réaliser un investissement à caractère financier.
Madame la ministre, j'en suis bien conscient, afin de mieux refléter ce que je viens d'évoquer, la rédaction de cet amendement pourrait sans doute être perfectionnée ou, du moins, affinée.
Pour autant, afin que le sujet demeure ouvert, la commission souhaiterait que cet amendement soit adopté, même si sa rédaction est encore imparfaite. Le dispositif qu'il tend à instituer pourra toujours être finalisé dans le cadre de la commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l'amendement n° 132.
Mme Nicole Bricq. Comme M. le rapporteur général a bien pris soin de le préciser, cet amendement concerne les sociétés coopératives ouvrières de production, qui ne sont pas prévues par le dispositif que l'article 6 tend à instituer.
En effet, les acteurs économiques et sociaux qui se lancent dans ces entreprises d'un type particulier le font pour deux raisons : d'une part, ils ont envie d'entreprendre différemment ; d'autre part, les SCOP ont pour caractéristique de rémunérer équitablement le travail, le capital et l'outil de production, c'est-à-dire l'investissement.
En outre, les sociétés coopératives se développent également dans le capital-risque et elles créent des fonds de garantie dans nos régions.
C'est pourquoi, madame la ministre, les SCOP méritent, me semble-t-il, de bénéficier du mécanisme complexe que vous avez créé en faveur de l'investissement, pour autant qu'il fonctionne convenablement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. S'agissant de ces deux amendements identiques, ainsi que d'éventuels autres amendements ayant le même objet, notre idée n'est pas d'étendre la liste des sociétés bénéficiaires du dispositif créé par l'article 6.
En effet, les SCOP sont déjà spécifiquement mentionnées, en tout cas dans l'exposé des motifs. Elles sont donc éligibles à une telle mesure. En d'autres termes, en cas d'augmentation du capital d'une SCOP, un contribuable assujetti à l'ISF peut parfaitement y souscrire sur la base de l'article 6 du présent projet de loi.
La véritable question serait plutôt de savoir si le spectre des instruments financiers susceptibles d'être destinataires de tels investissements doit ou non être élargi.
En l'état actuel, comme nous avons souhaité que le dispositif soit le plus clair possible, le projet de loi est destiné à la souscription au capital de petites et moyennes entreprises. On peut difficilement faire plus simple.
Par conséquent, les notions auxquelles nous nous référons sont bien celles de « société de capitaux » et de « souscription » aux fonds propres. À ce propos, nous souhaitons également que ceux-ci puissent être augmentés, car les petites et moyennes entreprises, dont nous nous faisons tous les champions, en ont également souvent un grand besoin.
En l'occurrence, et M. le rapporteur général en conviendra, les « titres participatifs » dont il est fait mention dans ces deux amendements identiques sont des « quasi-capitaux propres », et non de véritables capitaux propres. (M. le rapporteur général acquiesce.)
Néanmoins, compte tenu des caractéristiques des SCOP, il nous paraît envisageable d'étendre la mesure aux titres participatifs dans ces sociétés coopératives, et uniquement dans celles-ci.
Par conséquent, sous les réserves que je viens d'évoquer, et compte tenu de l'engagement pris par M. le rapporteur général d'affiner en commission mixte paritaire la rédaction du dispositif proposé, le Gouvernement émet un avis de sagesse et lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement no 43 rectifié.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la ministre, je me réjouis de votre appréciation très positive sur l'amendement présenté par M. le rapporteur général, au nom de la commission des finances.
Aujourd'hui, dans la France entière, nombre de salariés sont inquiets. Lorsqu'on les interroge, ils affirment que leur patron est un « fonds d'investissement » et craignent d'être « vendus » du jour au lendemain par un gestionnaire de fonds désireux de « faire la culbute ».
Nous devons réagir contre une telle « hyperfinanciarisation », qui déshumanise notre capitalisme.
Peut-être faut-il revisiter les statuts de la coopération et du mutualisme pour essayer de favoriser un actionnariat populaire permettant bien souvent aux salariés eux-mêmes de devenir actionnaires et coopérateurs de l'entreprise au sein de laquelle ils collaborent.
Par conséquent, si l'amendement no 43 rectifié est adopté, nous veillerons à préciser dans les rédactions à venir qu'il doit bien s'agir de souscription de capital et de prise de risques. Cela permettra d'éviter que des obligations ou des titres de quasi-capital, qui sont en fait des titres de créances, ne soient assimilés à de la souscription de capital.
M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.
M. Denis Badré. Je souhaite simplement le confirmer, l'amendement présenté par M. le rapporteur général répond très précisément à la préoccupation qui était la nôtre lorsque nous avons déposé l'amendement n° 215. Pour des raisons qui m'échappent un peu, celui-ci avait été appelé un peu plus tôt dans la discussion. Je l'avais donc retiré en faisant par avance confiance à M. le rapporteur général. Je constate que cette confiance était bien placée.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous remercie, mon cher collègue.
M. Denis Badré. En conséquence, nous voterons l'amendement no 43 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 43 rectifié.
(L'amendement est adopté à l'unanimité.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 132 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 44, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Après la première phrase du premier alinéa (1) du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les apports en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, aux groupements fonciers agricoles sont considérés comme des souscriptions au capital d'une société pour l'application du présent article.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'octroi de l'avantage du bénéfice fiscal de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune aux apports en numéraire ou en nature aux groupements fonciers agricoles est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, que la commission des finances a déjà adopté dans le passé, du moins sous une forme voisine, vise à rendre les apports en numéraire ou en nature aux groupements fonciers agricoles, ou GFA, éligibles au dispositif créé par l'article 6.
Toutefois, madame la ministre, si la référence aux « apports en nature » vous posait problème, j'accepterais de rectifier mon amendement pour ne mentionner que les seuls « apports en numéraire » aux groupements fonciers agricoles. En effet, même si elle est relativement rare, cette catégorie existe bel et bien.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement pourrait émettre un avis favorable sur cet amendement si M. le rapporteur général acceptait de le rectifier pour préciser qu'il s'agit des groupements fonciers agricoles exploitants.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, acceptez-vous la rectification proposée par Mme la ministre ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bien volontiers, et je rectifie donc, au nom de la commission des finances, l'amendement en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 44 rectifié, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
I.- Après la première phrase du premier alinéa (1) du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885 0 V bis du code général des impôts, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les apports en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, aux groupements fonciers agricoles exploitants sont considérés comme des souscriptions au capital d'une société pour l'application du présent article.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. S'il ne s'agissait que d'un groupement foncier agricole propriétaire des biens fonciers, on pourrait vraiment se demander où serait la prise de risque. Nous serions alors en contradiction par rapport à l'objectif recherché, sans parler des difficultés constitutionnelles qui pourraient en résulter.
MM. Alain Vasselle et Philippe Adnot. Mais le GFA exploitant, ça n'existe pas !
M. le président. Il me semble effectivement ne jamais avoir entendu parler de GFA exploitant...
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. M. Vasselle est beaucoup plus expert que moi en matière d'exploitations agricoles !
D'ici à la réunion de la commission mixte paritaire, nous pourrons vérifier cet aspect, en liaison avec le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Le renvoi à la commission mixte paritaire me paraît une excellente idée.
Néanmoins, pour la clarté des débats, je souhaiterais préciser qu'en vertu des articles 793 1 4° et 787 B du code général des impôts, il existe bien deux types de GFA du point de vue fiscal, le GFA non exploitant et le GFA exploitant.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Nous souhaitons encourager l'installation des jeunes agriculteurs et nous savons que le poids financier de l'investissement foncier est un facteur limitatif. Restreindre le bénéfice de cette disposition au seul GFA exploitant risque de nous empêcher d'atteindre l'objectif recherché.
Je suggère donc à la commission des finances de procéder à une expertise approfondie sur ce point, afin de nous éviter de donner un coup d'épée dans l'eau !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF est ainsi libellé:
I. - Compléter le quatrième alinéa (b) du 1 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par les mots :
à moins que celles-ci concernent des logements sociaux conventionnés produits par des entreprises solidaires
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'extension de l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux souscriptions au capital de sociétés exerçant des activités de gestion de logements sociaux conventionnés produits par des entreprises solidaires sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Cet amendement vise à rendre éligible à la nouvelle réduction d'ISF les investissements réalisés dans les entreprises solidaires dédiées à la production de logements sociaux.
M. le président. L'amendement n° 213, présenté par MM. Badré, Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
I. - Compléter le quatrième alinéa (b) du 1 du I du texte proposé par cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par les mots :
, ou être une entreprise solidaire et assimilée au sens de l'article L. 443-3-2 du code du travail
II. - Pour compenser les pertes de recettes dues au I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant de l'application du mécanisme prévu à l'article 885-0 V bis du code général des impôts aux entreprises solidaires et assimilées sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Cet amendement tend à faire bénéficier les entreprises solidaires du régime prévu par l'article 6 du projet de loi et à les rendre destinataires d'investissements et de dons, au même titre que les entreprises d'insertion et les sociétés intermédiaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements.
Toutefois, s'agissant de l'amendement n° 213, nous avons le sentiment qu'il est déjà satisfait par le texte actuel. Les entreprises dites solidaires, si elles sont bien constituées sous forme de société, sont naturellement visées par le régime incitatif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je reprends à mon compte l'argument que vient d'invoquer M. le rapporteur général : les entreprises solidaires, dès lors qu'elles sont en forme sociétale et répondent aux conditions posées par l'article 6, sont bien couvertes par ces dispositions.
L'adoption de cet amendement n° 213 nous amènerait à faire entrer dans le champ de l'article 6 toute une série d'entreprises, entités ou associations qui seraient très difficiles à démêler les unes des autres. Il nous est donc apparu moins ambigu de retenir le seul statut de société : dès lors que l'entreprise solidaire est constituée en société, elle est incluse dans le champ d'application du projet de loi. Je vous invite donc à retirer cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 1, je comprends la préoccupation de ses auteurs. Mais, compte tenu de l'avantage important consenti dans le cadre de cet article 6, nous avons souhaité restreindre ce dispositif aux seules sociétés opérationnelles, c'est-à-dire à celles qui sont vraiment engagées dans une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale, y compris dans le cadre solidaire que j'évoquais tout à l'heure. Nous excluons donc les sociétés d'investissement, fût-ce dans la construction de logements sociaux conventionnés ou autres.
D'autres amendements du même type appelleront de ma part une demande de retrait ou un avis défavorable, selon le cas.
M. le président. Monsieur Badré, les amendements nos 1 et 213 sont-ils maintenus ?
M. Denis Badré. S'agissant de l'amendement n° 213, madame la ministre, nous avions eu un doute en lisant l'article. Puisque vous me dites que notre préoccupation est déjà prise en compte, je retire l'amendement.
Quant à l'amendement n° 1, je le retire aussi, mais à regret. Dans notre esprit, l'adjonction des entreprises solidaires, dans cet article, visait un peu le même objet que l'adjonction du revenu de solidarité active dans l'ensemble du projet de loi. Il n'est pas mauvais, de temps en temps, d'ouvrir le débat sur des préoccupations différentes de celles qui sont directement liées à l'activité économique classique et capitalistique.
M. le président. Les amendements nos 1 et 213 sont retirés.
L'amendement n° 234 rectifié, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, Masson, Türk, Belot, J.-L. Dupont et de Richemont est ainsi libellé :
I. - Compléter le 1 du II du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Si les titres sont cédés pendant le délai de conservation, pour cause de cession stipulée obligatoire par un pacte d'associés ou d'actionnaires ou pour cause de toute opération sur le capital entraînant une prise de contrôle majoritaire de celui-ci, cette condition de conservation sera considérée comme remplie, dès lors que le prix de souscription des titres cédés sera intégralement réinvesti en souscription de nouveaux titres de sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1° du I. Les titres ainsi souscrits devront être conservés jusqu'à expiration du délai de conservation qui s'appliquait aux titres cédés.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes pour l'État résultant de la création d'une réduction d'impôt pour investissement dans les fonds d'investissement de proximité est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Cet amendement tend à assouplir l'une des obligations contenues dans le texte.
Pour pouvoir bénéficier de l'exonération, l'investisseur doit conserver pendant cinq ans les parts de l'entreprise dans laquelle il a investi. C'est une excellente mesure ! Mais lorsqu'une personne investit, par exemple, dans une start-up, que ce soit à titre individuel, à titre de business angel ou à travers le fonds d'investissement de proximité, disposition que nous venons d'adopter, la conclusion d'un pacte d'actionnaires peut l'obliger à vendre ses parts avant l'expiration du délai de cinq ans. Sous réserve que l'argent libéré soit réinvesti dans le capital d'une entreprise qui corresponde aux obligations prévues par ce texte, cet amendement tend à permettre à l'investisseur de conserver le bénéfice de l'exonération fiscale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, compte tenu des conditions très précises et extrêmement strictes qu'il pose, c'est-à-dire la mise en oeuvre d'un pacte d'associés ou d'actionnaires contraignant ou une prise de contrôle majoritaire de l'entreprise, me paraît raisonnable, sachant que les titres qui seraient cédés devraient être intégralement réinvestis en nouveaux titres également éligibles.
Cet assouplissement me paraît pouvoir être accepté, et la commission émet par conséquent un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Par souci de rigueur, peut-être excessive dans ce cas, le Gouvernement a souhaité maintenir l'exigence de la conservation des titres pendant cinq ans, sans y apporter d'assouplissement particulier.
L'amendement n° 234 rectifié tend à assouplir l'engagement de conservation de cinq ans prévu à l'article 6 afin de permettre le développement des PME. Or il nous semble que cette obligation de conservation doit être strictement respectée afin que l'avantage accordé par cette disposition ne devienne pas démesuré au regard des obligations incombant aux bénéficiaires.
Le projet de loi, dans l'état actuel de sa rédaction et avant votre amendement, prévoit que l'avantage n'est pas remis en cause en cas de fusion ou de scission de la société, ou lorsque les titres sont annulés pour cause de perte ou de liquidation judiciaire, c'est-à-dire pour des opérations indépendantes de la volonté des investisseurs et correspondant aux grands cas de figure de l'évolution de la vie d'une société : fusion, scission, perte ou liquidation judiciaire.
Pour ces raisons, le Gouvernement souhaiterait maintenir l'exigence du délai de cinq ans telle qu'elle est encadrée. Tout assouplissement serait soumis à des appréciations divergentes et constituerait une source de contentieux.
Monsieur Adnot, je vous invite donc à retirer l'amendement n° 234 rectifié. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Adnot, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Adnot. Je ne suis pas en mesure d'imposer quoi que ce soit. Je souhaite simplement attirer l'attention de Mme la ministre sur le fait que le cas que j'avais évoqué est le plus important lors de la création d'une start-up : un pacte d'actionnaires est conclu et un premier tour de table est réalisé ; lors du deuxième tour de table, sans qu'il y ait fusion de société, de nouveaux actionnaires entrent dans le capital, ce qui suppose nécessairement une nouvelle répartition avec, parfois, des obligations de sortie.
En étant trop rigide sur ce point, vous excluez quasiment toutes les start-up du bénéfice de ces dispositions. Il revient au Gouvernement d'apprécier.
Puisque vous le souhaitez, je retire mon amendement, mais je le regrette pour les start-up !
M. le président. L'amendement n° 234 rectifié est retiré.
L'amendement n° 264, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
I.- Après le 1 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, insérer un 1 bis ainsi rédigé :
« 1 bis. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions effectuées par des personnes physiques en indivision. L'exonération est limitée à la fraction de la valeur des parts acquises en indivision représentative de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1.
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de la création d'une réduction d'impôt pour l'acquisition de parts dans les fonds d'investissement de proximité est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai déjà défendu cet amendement, qui vise à favoriser la création de cercles d'investisseurs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 264 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 263, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les cinquième et sixième alinéas du 2 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts :
« - au numérateur, le montant des versements effectués, par la société mentionnée au premier alinéa du présent 2 au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1, entre la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année d'imposition. Ces versements sont ceux effectués avec les capitaux reçus au cours de cette période lors de la constitution du capital initial ou au titre de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit ;
« - et au dénominateur, le montant des capitaux reçus par la société mentionnée au premier alinéa du présent 2 au titre de la constitution du capital initial ou de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit au cours de la période mentionnée au numérateur.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement de coordination rédactionnelle avec un amendement voté à l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 45, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer le 3 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a déjà été amplement présenté.
M. le président. L'amendement n° 252, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I - Dans le premier alinéa du 3 du I du texte proposé par cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, après les mots :
fonds communs de placement dans l'innovation
insérer les mots :
et de partage solidaire
II - Pour compenser la perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'extension aux fonds communs de partage solidaire du dispositif prévu par l'article 885-0 V bis du code général des impôts est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 99, présenté par MM. Othily et Laffitte est ainsi libellé :
I. - Compléter le premier alinéa du 3 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée :
L'avantage fiscal prévu au I s'applique également aux souscriptions réalisées à travers des fonds communs de placement à risque du programme France Investissement.
II. - Pour compenser la perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'extension d'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux souscriptions au capital de sociétés réalisées à travers des fonds communs de placement à risque du programme France investissement est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 252 et 99 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission préfère son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 45 et défavorable aux amendements nos 252 et 99.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 252 et 99 n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 25 rectifié bis, présenté par MM. Houel, J. Gautier et Darniche, Mme Mélot et Sittler et MM. Trucy, Gaillard, Cornu, Pointereau, Vasselle et J. Blanc est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« 4. - L'avantage fiscal s'applique également aux capitaux faisant l'objet, par l'intermédiaire de fonds communs majoritairement dédiés à cet objet, de crédits non assortis d'un quelconque privilège, affectés à une acquisition et consentis aux entreprises de moins de vingt salariés exerçant personnellement exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater, notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières et des activités de gestion ou de location d'immeubles fiscalement domicilié dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. Cette exonération s'applique au prorata de la proportion des crédits affectés consentis, par le fonds commun, à celles des entreprises qui répondent aux critères ci-dessus mentionnés.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant pour l'État du 4 du I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Gautier, dont je salue la première intervention dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Gautier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à étendre les dispositions de l'article 6 aux entreprises individuelles, dont je vous rappelle qu'elles représentent plus de 50 % du tissu des entreprises françaises. Or les banques sont souvent très frileuses à leur égard.
Nous sommes conscients de la confusion des patrimoines inhérente aux entreprises individuelles ; voilà pourquoi cet amendement promeut le recours à l'intermédiation, avec des obligations précises. Il est bien évident que cette mesure concernerait surtout les petits contributeurs à l'ISF. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 216 est présenté par Mme Gourault et les membres du groupe Union centriste-UDF.
L'amendement n° 231 est présenté par M. Mouly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Compléter le I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par trois alinéas ainsi rédigés :
« 4. L'avantage fiscal prévu au présent paragraphe s'applique également aux capitaux faisant l'objet, par l'intermédiaire de fonds communs majoritairement dédiés à cet objet, de crédits non assortis d'un quelconque privilège, affectés à une acquisition et consentis aux entreprises de moins de vingt salariés exerçant personnellement exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.
« Cet avantage ne s'applique pas aux activités de gestion de patrimoine mobilier définies à l'article 885 O quater, notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières et des activités de gestion ou de location d'immeubles fiscalement domiciliés dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale.
« Cet avantage s'applique au prorata de la proportion des crédits affectés consentis, par le fonds commun, à celles des entreprises qui répondent aux critères ci-dessus mentionnés.
II. Pour compenser les pertes de recettes dues au I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant pour l'État du 4 du I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° 216.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement étant très proche du précédent, je n'ai rien à ajouter à ce qui vient d'être dit !
M. le président. L'amendement n° 231 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 25 rectifié bis et 216 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission ne peut malheureusement suivre les auteurs de ces amendements.
En effet, la réduction d'ISF se conçoit pour des souscriptions au capital de PME et de TPE. Par conséquent, des exploitations n'ayant pas de capital ne peuvent être éligibles, et encore moins des fonds qui seraient constitués pour consentir des prêts, car il s'agirait alors de purs placements financiers. Nous avons vu tout à l'heure qu'il faut exclure une telle logique.
Cela étant, quelle est la bonne réponse pour le secteur des TPE ou l'artisanat ? C'est de constituer des sociétés anonymes à responsabilité limitée, voire des sociétés par actions simplifiées, ce qui est tout à fait possible. Les statuts sont sur étagères, et il n'est pas nécessaire aujourd'hui de disposer d'un capital important. On peut même créer des sociétés avec un euro, du moins en a-t-on l'illusion...
En tout cas, il existe des véhicules adéquats, qui permettent d'ailleurs aux exploitants individuels de mieux protéger leur patrimoine privé en isolant leur patrimoine professionnel. À mon sens, ce n'est pas un bon conseil à leur donner que de les inciter à rester ad æternum sous le statut d'entreprise personnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Pour exactement les mêmes raisons que celles que vient de donner M. le rapporteur général, le Gouvernement n'est pas favorable à cette extension du champ de la réduction d'ISF.
Il souhaite toutefois profiter de cette occasion pour saluer la contribution très importante des TPE et des entreprises individuelles au développement de l'économie française. Notre voeu est évidemment de les accompagner dans leur développement, de permettre en particulier aux TPE de devenir un peu plus grosses et de pouvoir entrer un jour en concurrence avec leurs homologues allemandes, qui sont de taille supérieure à l'heure actuelle, et de devenir aussi exportatrices qu'elles.
Je signale au passage que l'un des thèmes de réflexion qu'abordera la commission qui statuera sur tous les prélèvements obligatoires portera sur les petites entreprises et les entreprises individuelles. En effet, à l'aune notamment de leur remarquable contribution à l'économie, leur statut particulier, du point de vue tant fiscal que social, mérite une attention spéciale. Des propositions répondant à leurs spécificités doivent être élaborées.
M. le président. Monsieur Jacques Gautier, l'amendement n° 25 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Gautier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 25 rectifié bis est retiré.
Monsieur Jégou, l'amendement n° 216 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 216 est retiré.
L'amendement n° 209, présenté par M. Jégou et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
Compléter le I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ... - L'avantage fiscal prévu au I s'applique également aux souscriptions de parts de Fonds communs lorsque par statut ces Fonds sont investis en titres de sociétés répondant aux conditions prévues au 1°, et que les sommes issues de ces souscriptions ou provenant des participations du Fonds sont employées conformément à l'objet du Fonds dans un délai de douze mois à compter de leur versement. »
II. - Dans le premier alinéa du II du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, après les mots :
au capital de la société
insérer les mots :
ou de ses versements aux fonds visés au 3° du I
III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension de l'éligibilité à l'avantage fiscal prévu par l'article 885-0 V bis du code général des impôts aux souscriptions de parts de fonds communs est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. M. Jégou a défendu cet amendement assez modérément, car il sait que ce dernier n'est pas compatible avec les choix qui ont déjà été opérés, s'agissant notamment des fonds d'investissements de proximité, dont nous avons longuement délibéré tout à l'heure à propos du sous-amendement du Gouvernement. Je crois que ce dispositif peut se substituer à celui qui est ici envisagé.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Dans ces conditions, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 209 est retiré.
L'amendement n° 210, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
I. - Compléter le III du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée :
Si ces versements excèdent le montant de l'impôt de solidarité sur la fortune, ils sont imputables sur l'impôt des trois années suivantes.
II. - Compléter le II du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée :
Si ces dons excèdent le montant de l'impôt de solidarité sur la fortune, ils sont imputables sur l'impôt des trois années suivantes.
III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de la possibilité de reporter sur les trois années suivantes l'excédent du montant des investissements dans une PME ou des dons à des organismes d'intérêt général par rapport à la cotisation due d'impôt de solidarité sur la fortune est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement a pour objet de permettre, en cas d'investissement dans une PME ou de don à des organismes d'intérêt général d'un montant supérieur à la cotisation au titre de l'ISF, de reporter l'excédent sur les trois années suivantes.
Cette mesure inciterait à effectuer des versements plus importants, ce qui serait bien entendu favorable au financement des petites et moyennes entreprises.
Elle permettrait également d'éviter de fractionner artificiellement les versements sur plusieurs années.
Enfin, ce dispositif serait cohérent avec le dispositif dit « réduction Madelin » en matière d'impôt sur le revenu, qui comporte une disposition similaire, d'ailleurs portée de trois à quatre ans par la loi de finances de 2007.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission a été séduite par cet amendement. Elle trouve que c'est un bon dispositif.
Cela étant, elle ne dispose pas d'estimation du coût de la mesure. Comme je sais que M. Jégou est très attentif à l'équilibre des finances publiques, peut-être verra-t-il quelle orientation il convient de prendre...
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement, extrêmement intelligent, mais quelque peu pernicieux en ce que le dispositif permettrait véritablement aux bénéficiaires de tirer un gros avantage, et probablement un avantage excessif, au regard des contraintes imposées.
En effet, il permettrait de quadrupler l'avantage fiscal tiré de l'investissement considéré. Pour cette raison, le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Mme la ministre m'a laissé entendre que mon amendement était exorbitant, même si la « jurisprudence » élaborée depuis ce matin ne conduit pas à ce que les comptes soient toujours aussi équilibrés qu'on le souhaiterait.
Je vais cependant retirer mon amendement, M. le rapporteur général m'ayant pris par mon point faible. Je suis en effet sensible à l'équilibre des finances publiques !
M. le président. L'amendement n° 210 est retiré.
L'amendement n° 195, présenté par MM. Laffitte, Othily, Mouly, Seillier, de Montesquiou, Pelletier et Thiollière est ainsi libellé :
I. Après le deuxième alinéa du IV du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les investissements sont réalisés dans des sociétés innovantes développant des produits nouveaux en vue d'économie d'énergie et de créer de nouveaux procédés ou produits liés aux écoénergies renouvelables en vue de projets labellisés par l'une des agences nationales compétentes en matière d'innovation, la somme de 50 000 euros est portée à 100 000 euros. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension du IV de l'article 885-0 V bis du code général des impôts aux investissements dans des sociétés innovantes est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 208, présenté par M. Jégou et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
I. Supprimer le dernier alinéa du IV du texte proposé par le II de cet article pour l'article 885-0 V bis du code général des impôts.
II. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
...- La perte de recettes résultant pour l'État de l'inclusion dans le dispositif de réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune des investissements réalisés dans une société dans laquelle le redevable ou son conjoint bénéficie de l'exonération au titre de l'outil de travail est compensée à due concurrence par une amputation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. L'objet de cet amendement est de faire entrer dans le champ du dispositif de réduction de l'ISF les investissements réalisés dans une société dans laquelle le redevable, ou son conjoint, a lui-même des parts.
Je sais que cela peut paraître politiquement incorrect, néanmoins nos PME ont grand besoin de se développer. On constate d'ailleurs souvent que les patrons de PME eux-mêmes ont des réticences à investir dans leur propre entreprise, en raison des risques encourus.
Le projet de loi que nous examinons ne prévoit pas de permettre au redevable de bénéficier d'un abattement de l'ISF lorsqu'il souscrit au capital d'une PME pour laquelle lui-même ou son conjoint bénéficie d'une exonération au titre de l'outil de travail.
L'Assemblée nationale a inséré l'alinéa visé, craignant que des redevables de l'ISF ne souscrivent au capital de leur propre société ou de celle d'un membre de leur foyer fiscal pour bénéficier de l'abattement prévu à l'article 6 du texte.
Pour notre part, nous sommes favorables à la suppression de cet alinéa, susceptible d'entraver l'investissement dans des entreprises qui ont besoin de fonds propres.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'Assemblée nationale a considéré, à mon sens à juste titre, que la réduction d'ISF ne pouvait pas être utilisée par le contribuable au sein de son propre foyer fiscal.
M. Yann Gaillard. Ah oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement vise à revenir sur cette disposition, qui me semble être de bon sens. Elle constitue une clause « anti-abus », même si je ne sais pas s'il faut parler d'abus.
M. Guy Fischer. C'est une clause morale !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est vous qui le dites, monsieur Fischer !
M. Guy Fischer. Parfois, c'est toujours plus !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au demeurant, il n'est peut-être pas difficile, si l'on a un enfant qui, ayant lui-même son propre foyer fiscal, se trouve à la tête d'une entreprise, de contribuer au développement de cette dernière. L'investissement s'effectue alors en dehors du foyer fiscal du redevable ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Voilà la solution ! Il est plus retors que vous, monsieur Jégou !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne donne de conseil à personne !
En tout état de cause, la contrainte instituée par l'Assemblée nationale est loin d'être excessive. Si le Gouvernement partage ce point de vue, il me semble que l'amendement pourrait être retiré.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je partage l'appréciation de la commission et souhaite le retrait de l'amendement.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° 208 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 208 est retiré.
L'amendement n° 233 rectifié, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, Masson, Türk, Belot, de Richemont et J.L. Dupont est ainsi libellé :
I. - Dans le premier alinéa du I du texte proposé par le III de cet article pour de l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, remplacer le montant :
50 000 €
par le montant :
70 000 €
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes pour l'État résultant de la majoration à 70 000 euros du plafond des dons en numéraire imputables sur l'impôt de solidarité sur la fortune est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 46, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Dans le premier alinéa du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, après les mots :
dons en numéraire
insérer les mots :
et dons en pleine propriété de titres de sociétés admis aux négociations sur un marché règlementé français ou étranger
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'octroi de l'avantage du bénéfice fiscal de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune au titre des dons aux oeuvres d'intérêt général aux dons en pleine propriété de titres de sociétés cotées est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement présente une simple modalité. Il s'agit d'ouvrir le bénéfice de la réduction d'impôt au titre des dons aux oeuvres aux dons en pleine propriété de titres de sociétés cotées. En effet, donner de tels titres ou donner de l'argent, c'est la même chose, puisque c'est une valeur liquide et qu'il ne peut y avoir de contestation sur cette valeur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. La proposition de M. le rapporteur général est acceptable. Le Gouvernement donne un avis favorable à l'amendement, en précisant, bien sûr, que ces dons seront soumis aux droits de donation et ne seront pas taxés au titre des plus-values.
En outre, je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 46 rectifié
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 47, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts :
« 1° Des établissements de recherche ou d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique publics, ou des établissements privés de même nature d'intérêt général ; »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'aménagement du dispositif prévu à l'article 885-0 V bis A du code général des impôts en vue d'inciter les redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune à réaliser des dons pour des établissements de recherche ou d'enseignement supérieur publics ou privés est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit en fait d'un amendement de coordination avec le dispositif inscrit dans le projet de loi relatif aux libertés des universités, sur l'initiative d'ailleurs de notre excellent collègue Philippe Adnot. Il faut que les dons ouvrant droit à réduction d'ISF puissent être consentis à des établissements de recherche ou d'enseignement supérieur publics ou privés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 47 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 211 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF.
L'amendement n° 221 rectifié est présenté par MM. du Luart et J. Blanc.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Dans le 2° du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, après le mot :
fondations
insérer les mots :
et des associations
II. Compléter ce même I par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des associations de bienfaisance ou de recherche médicale visées à l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901. »
III. Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes pour l'État résultant de l'extension de l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux dons en numéraire effectués au profit des associations reconnues d'utilité publique, des associations de bienfaisance et des associations de recherche médicale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° 211.
M. Jean-Jacques Jégou. L'objet de cet amendement est de faire entrer dans le champ des dons ouvrant droit à la nouvelle réduction d'ISF ceux qui sont faits au profit des associations reconnues d'utilité publique, ainsi que des associations de bienfaisance ou de recherche médicale.
Le projet de loi ne vise aujourd'hui que les fondations, et non l'ensemble des organismes privés reconnus d'utilité publique. En effet, il n'étend pas la possibilité de réduction de l'ISF aux dons faits à des associations relevant de la loi de 1901 reconnues d'utilité publique ou à d'autres associations de bienfaisance.
Cette distinction est tout à fait inéquitable.
D'une part, elle remet en cause le principe cohérent d'un statut fiscal unique pour les associations et fondations d'utilité publique.
D'autre part, elle ne prend pas en compte le fait que les associations reconnues d'utilité publique oeuvrent également pour l'intérêt général, en menant des actions et en développant des projets dans des domaines majeurs, tels que celui de la santé. Elles sont ainsi des acteurs indispensables de la lutte contre l'exclusion et la pauvreté, elles oeuvrent pour la prévention et le traitement des maladies.
Le texte, dans sa rédaction actuelle, pose également un problème important : dès lors que ces associations sont financées en majorité par des donateurs, ceux-ci risquent de modifier leur démarche en matière de don à leur détriment. En effet, ils investiront logiquement dans des fondations reconnues d'utilité publique, dans la mesure où celles-ci jouiront d'un régime fiscal plus favorable.
Il nous faut, dès lors, maintenir une égalité de traitement entre les fondations et les associations reconnues d'utilité publique ou assimilées. C'est pourquoi nous souhaitons que ces dernières soient incluses dans le champ du dispositif de réduction d'ISF.
M. le président. L'amendement n° 221 rectifié n'est pas soutenu.
L'amendement n° 257, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. - Dans le troisième alinéa (2°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, après les mots :
Des fondations
insérer les mots :
et associations
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de la prise en compte des dons aux associations reconnues d'utilité publique dans le champ d'application de l'avantage fiscal prévu par l'article 885-0 V bis A du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du même code.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Il est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ferai une réponse commune à tous les amendements concernant différentes catégories d'organismes d'intérêt général.
Comme vous l'avez constaté, mes chers collègues, la liste des organismes éligibles au titre de la réduction d'impôt sur le revenu selon l'article 200 du code général des impôts et la liste des organismes éligibles à une diminution de l'ISF au titre du présent régime ne sont pas les mêmes.
La seconde liste, beaucoup plus précise, est particulièrement focalisée sur la recherche, l'enseignement supérieur et quelques autres catégories.
Si l'on allait dans le sens des auteurs des amendements, le texte serait modifié de façon tout à fait considérable, et pourrait peut-être conduire à des risques de dilution des efforts qui sont menés.
Dans l'avenir, il est probable que nous reviendrons sur ces débats, peut-être au moment de la discussion du projet de loi de finances. À ce stade, compte tenu du vote des députés, des intentions initiales du Gouvernement, et des heures qui passent, mieux vaut, me semble-t-il, conserver au texte sa pureté : les avantages consentis doivent être concentrés sur les organismes mentionnés dans le texte du Gouvernement.
Il n'y a pas lieu de s'inquiéter ; il sera toujours temps de réexaminer ce sujet, car les représentants de telle ou telle catégorie seront certainement ardents à se manifester, et, un jour ou l'autre, de nouveaux amendements fleuriront.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. La position du Gouvernement est très proche de celle du rapporteur général.
Dans le cadre de l'article 6, les investissements sont effectivement principalement à destination de la recherche, de l'enseignement supérieur - qu'il soit public ou privé -, des fondations reconnues d'utilité publique, et d'un certain nombre d'organismes d'insertion qui favorisent les activités économiques des personnes les plus fragiles : entreprises d'insertion, travail temporaire d'insertion, associations intermédiaires, ateliers et chantiers d'insertion.
Si, d'aventure, le contribuable cherchait à diversifier son investissement en dehors de ces instituts de recherche ou d'insertion, il existe de très nombreuses fondations reconnues d'utilité publique.
Par ailleurs, le dispositif du mécénat permet de toute façon au contribuable de bénéficier d'un régime d'exonération même si, effectivement, le taux d'exonération est plus bas, de 66 % au lieu de 75 %.
Ces amendements, dont nous reconnaissons le bien-fondé, sont parfaitement louables, mais le dispositif du mécénat nous paraît suffisant et satisfaisant pour couvrir l'ensemble des mesures qu'ils envisageaient.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° 211 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 211 est retiré.
Madame Bricq, l'amendement n° 257 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. J'ai présenté mon amendement trop rapidement, car il est très semblable aux amendements nos 251 et 249 que nous examinerons dans quelques instants.
Les explications de M. le rapporteur général et de Mme la ministre ne me convainquent pas. J'ai vraiment l'impression que, en ne voulant pas aller suffisamment dans le détail, des inégalités seront créées entre des organismes dont la vocation est pourtant quasi identique.
Si ces amendements ne sont pas adoptés, les donateurs vont modifier leur démarche et privilégier les fondations, qui bénéficieront de ressources importantes, au détriment des associations.
Je suis quelque peu inquiète des propos tenus par Mme la ministre et par le rapporteur général. Je maintiens donc cet amendement. Mon raisonnement est également valable pour les amendements nos 251 et 249.
M. le président. L'amendement n° 48, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
I.- Après le troisième alinéa (2°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 2° bis D'une fondation ou d'une association répondant aux conditions prévues au 2 bis de l'article 200 ; »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'aménagement du dispositif prévu à l'article 885-0 V bis A du code général des impôts en vue d'inciter les redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune à réaliser des dons au profit de la réhabilitation des monuments historiques est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La réhabilitation de monuments historiques me paraissait pouvoir être prise en considération pour des versements de ce type. Mais je ne sais pas si, à ce stade, le Gouvernement y est prêt. J'ai cru comprendre que tel n'était pas le cas.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vais donc m'appliquer la jurisprudence que je conseillais tout à l'heure à d'autres auteurs d'amendements ! Je retire par conséquent mon amendement. Mais j'y reviendrai, madame la ministre ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 48 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 49 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 214 est présenté par M. Badré et les membres du groupe Union centriste - UDF.
L'amendement n° 247 rectifié bis est présenté par M. P. Blanc, Mme B. Dupont, Debré et Hermange, MM. Vasselle, J. Blanc et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, M. Mouly, Mme Desmarescaux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. - Après le sixième alinéa (5°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des entreprises adaptées mentionnées à l'article L. 323-31 du code du travail.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'élargissement du dispositif de réduction d'impôt de solidarité sur la fortune aux dons aux entreprises adaptées est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 49.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit de préciser, en restant vraiment dans le champ défini, que le dispositif s'applique bien aux dons aux entreprises adaptées visant à l'insertion économique des personnes handicapées en milieu ordinaire, comme les ateliers protégés ou les entreprises d'insertion destinées à faire travailler des personnes handicapées.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° 214.
M. Jean-Jacques Jégou. Tout à l'heure, j'ai retiré mon amendement. Mais, comme l'a souligné Mme Bricq, certaines associations s'occupant d'hôpitaux ne sont pas d'intérêt public et n'entrent donc pas dans le champ d'application du dispositif. Cela peut poser des problèmes regrettables, compte tenu des difficultés que ces associations peuvent connaître pour trouver des fonds.
En fonction de la réponse que vous avez faite tout à l'heure, madame la ministre, je me demandais si mon amendement, comme celui du rapporteur général d'ailleurs, ne se trouvait pas satisfait par la liste des entreprises adaptées aux personnes handicapées.
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour défendre l'amendement n° 247 rectifié bis.
M. Robert del Picchia. Il est défendu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements, qui tendent à clarifier le champ d'application du texte. Les entreprises adaptées répondent exactement à l'un des trois cas de figure que j'évoquais tout à l'heure, c'est-à-dire la recherche, les fondations d'utilité publique ou l'insertion par l'activité économique.
Les anciens ateliers protégés, qui s'appellent dorénavant les « entreprises adaptées », contribuent à l'insertion économique par le travail des bénéficiaires.
Je lève par conséquent le gage.
M. le président. Il s'agit donc des amendements identiques nos 49 rectifié, 214 rectifié et 247 rectifié ter.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 260, présenté par MM. Badré, Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
I. - Après le sixième alinéa (5°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des entreprises solidaires et assimilées, mentionnées à l'article L. 443-3-2 du code du travail.
II. - Pour compenser les pertes de recettes dues au I ci dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant de l'application du mécanisme prévu à l'article 885-0 V bis A du code général des impôts aux entreprises solidaires et assimilées sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Il est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° 260 me semble satisfait dès lors que ces entités sont constituées en forme de sociétés. Nous retrouvons ici une question déjà évoquée précédemment.
M. Jégou devrait donc pouvoir retirer cet amendement.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, monsieur le président, car il est satisfait.
M. le président. L'amendement n° 260 est retiré.
L'amendement n° 2, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des fédérations d'associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion par le logement.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'extension de l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux dons en numéraire effectués au profit des fédérations d'associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion par le logement sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. L'objet de cet amendement est de faire entrer dans le champ des dons ouvrant droit à la nouvelle réduction d'ISF ceux faits au profit des associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion par le logement.
L'augmentation de la production de logements est nécessaire, voire indispensable, pour répondre aux forts besoins recensés sur le territoire national.
Le nouveau dispositif de réduction d'ISF pourrait servir à répondre à ces besoins en favorisant l'apport de fonds propres aux fédérations d'associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion par le logement.
Cet amendement faciliterait le financement de programmes sociaux, ce qui est une nécessité tant l'explosion des prix de l'immobilier est consommatrice de fonds propres.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je reviens à l'idée générale que j'ai exposée tout à l'heure et que j'ai même appliquée à un amendement de la commission.
Laissons vivre ce dispositif très focalisé. Nous y reviendrons plus tard afin de voir s'il y a lieu d'aligner, selon les demandes des uns et des autres, le régime de l'ISF sur le régime de l'article 200 qui s'appuie sur l'impôt sur le revenu.
J'invite donc M. Jégou à retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, monsieur le président, je le retire ; mais, pour utiliser l'expression du rapporteur général, nous y reviendrons !
M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 3, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'extension de l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux dons en numéraire effectués au profit des associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Cet amendement vise à faire entrer dans le champ des dons ouvrant droit à la nouvelle réduction d'ISF ceux qui sont faits au profit des associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion.
Les dons faits au profit des entreprises d'insertion, des entreprises de travail temporaire d'insertion ou des associations intermédiaires sont éligibles au dispositif de réduction d'ISF.
Cependant, certaines associations reconnues d'utilité publique, sans être des associations exclusivement dédiées à l'insertion ni des fondations, sont très actives en matière d'insertion. Il paraîtrait normal que les dons faits à des associations de cette nature soient éligibles à la réduction d'ISF.
M. le président. L'amendement n° 196 rectifié bis, présenté par M. Buffet, Mme Lamure, Gousseau, Kammermann, Procaccia et Hermange et MM. Grignon, Béteille, Vasselle, Lecerf, P. André et Portelli est ainsi libellé :
I. - Après le sixième alinéa (5°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des associations reconnues d'utilité publique agissant dans le domaine de l'insertion ;
II. Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'extension de l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux dons en numéraire effectués au profit des associations reconnues d'utilité publique travaillant à l'insertion sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Adeline Gousseau.
Mme Adeline Gousseau. Je souhaite obtenir la confirmation que cet amendement est bien satisfait. Il concerne les associations d'utilité publique travaillant à l'insertion.
M. le président. L'amendement n° 130, présenté par M. Collomb, Mme Demontès, M. Repentin, Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des associations reconnues d'utilité publique qui procèdent à l'insertion économique des personnes en difficulté.
II Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes résultant pour l'État de l'élargissement du dispositif prévu à l'article 885-0 V bis A du code général des impôts aux associations d'insertion économique est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Cet amendement tend à ouvrir le dispositif à des associations visant à l'insertion économique des personnes en difficulté.
Ces dernières jouent, pour les personnes qui sont le plus éloignées de l'emploi, le rôle de sas, d'instrument facilitant la transition vers des emplois dans l'économie marchande. À ce titre, elles sont l'une des composantes d'une économie qui doit être reconnue dans sa pluralité.
Reste que si ce dispositif n'a pas pour vocation de se substituer aux carences de l'État, nous vous proposons que ces associations puissent, elles aussi, en bénéficier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les amendements identiques nos 3, 196 rectifié bis et 130 se situent bien dans le domaine couvert par la loi.
Les entités du type fondations d'utilité publique ou entreprises d'insertion constituées en forme de société sont directement visées par le texte. Il est donc légitime d'interroger le Gouvernement sur l'éligibilité au dispositif des associations reconnues d'utilité publique qui agissent dans le domaine de l'insertion.
À mon avis, une association reconnue d'utilité publique, certes après quelques démarches à effectuer et quelques obstacles à franchir, doit pouvoir rattacher son activité à une fondation existante : des pistes existent certainement pour qu'une telle association puisse répondre formellement aux conditions posées par la loi.
La question est de savoir si l'on veut élargir ces conditions posées par la loi, et c'est à cette interrogation que les auteurs des amendements vous demandent de répondre, madame la ministre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Au risque de me répéter, je rappelle que nous avons délibérément limité la faculté d'imputer sur l'ISF les dons en faveur d'organisations diverses au regard tant de l'objet - d'une part, enseignement supérieur et recherche, d'autre part, insertion par l'activité économique - que de la nature juridique des récipiendaires, les fondations reconnues d'utilité publique étant l'un des « véhicules » retenus.
Si je ne souhaite pas étendre le champ d'application du texte, ni quant à l'objet ni quant à l'identité juridique des récipiendaires, c'est tout simplement parce ce que le taux de 75 % de la déduction accordée en contrepartie de l'affectation de l'ISF aux activités visées est véritablement très élevé, mais aussi parce que les moyens seront assez limités puisque les contribuables qui choisiront ces « véhicules » seront assez peu nombreux.
Il y a en effet bien plus de contribuables redevables de l'impôt sur le revenu que de contribuables redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune, ce qui devrait d'ailleurs rassurer les auteurs des amendements sur le financement des associations demeurant alimentées par l'impôt sur le revenu dans le cadre du mécénat.
Pour toutes ces raisons, je demande le retrait de ces différents amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Il en ira de même, et pour les mêmes raisons, s'agissant des amendements identiques nos 131 et 212.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
Madame Gousseau, l'amendement n° 196 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Adeline Gousseau. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 196 rectifié bis est retiré.
Madame Khiari, l'amendement n° 130 est-il maintenu ?
Mme Bariza Khiari. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 131 est présenté par M. Collomb, Mme Demontès, M. Repentin, Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 212 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des organismes sans but lucratif qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent, à titre principal, à la fourniture gratuite des soins mentionnés au 1° du 4 de l'article 261 à des personnes en difficulté.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes résultant pour l'État de l'élargissement du dispositif prévu à l'article 885-0 V bis A du code général des impôts aux associations qui oeuvrent en faveur des personnes en difficulté, est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Bariza Khiari, pour défendre l'amendement n°131.
Mme Bariza Khiari. Cet amendement porte sur le même sujet que l'amendement n° 130, mais cette fois-ci pour des associations oeuvrant en faveur des personnes en difficulté.
Plus de 3,6 millions de personnes sont potentiellement en situation de précarité et d'exclusion. Il s'agirait de faire bénéficier du dispositif des associations telles qu'Emmaüs, la Croix-Rouge française, la Fédération française des banques alimentaires et tant d'autres.
Dans la même logique qui a présidé au dépôt de l'amendement n° 130, il s'agit d'élargir le champ d'application de cette disposition afin d'y inclure les organismes qui luttent contre cette précarité grandissante.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° 212.
M. Jean-Jacques Jégou. Je n'ai rien à ajouter au propos tenu par Mme Khiari.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec les amendements identiques nos 131 et 212, qui concernent les associations oeuvrant en faveur des personnes en difficulté, nous nous éloignons un peu plus du but du projet de loi, vise, nous l'avons rappelé, le travail adapté, les entreprises d'insertion, etc.
Les activités en faveur des personnes en difficulté peuvent s'exercer dans le cadre d'une fondation, mais, s'il le fallait absolument, la question pourrait être réexaminée en loi de finances.
Toutes ces considérations devraient conduire, sauf avis contraire du Gouvernement, au retrait des amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Comme je l'ai indiqué précédemment, je souhaite le retrait de ces deux amendements identiques ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Khiari, l'amendement n° 131 est-il maintenu ?
Mme Bariza Khiari. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° 212 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 212 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 131.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 251, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885 0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des associations agréées de défense des personnes en situation d'exclusion par le logement mentionnées à l'article 3 de la loi n° 90 449 du 31 mai 1990 ou dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'intégration des dons aux associations agréées de défense des personnes en situation d'exclusion par le logement dans le dispositif de réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune prévu à l'article 885 0 V bis A du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du même code.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement a le même objet que l'amendement n° 130, défendu par Mme Khiari.
M. le président. L'amendement n° 230 rectifié, présenté par MM. Mouly, Othily et Bernard-Reymond est ainsi libellé :
I. Après le dernier alinéa (5°) du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885 0 V bis A du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Des réseaux associatifs de financement de création d'entreprise.
II. Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les pertes de recettes pour l'État résultant de l'extension aux réseaux associatifs de financement de création d'entreprise de l'avantage fiscal prévu à l'article 885 0 V bis A du code général des impôts sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Chaque année, les réseaux associatifs de financement de la création d'entreprise permettent à près de 20 000 entreprises de se créer ou d'être reprises grâce à des prêts d'honneur, des microcrédits ou des garanties attribuées aux créateurs ou repreneurs d'entreprise.
Les financements ainsi apportés permettent à un public démuni d'avoir accès à une forme de crédit que le réseau bancaire classique n'est pas en mesure de leur fournir. Ce sont ainsi près de 40 000 emplois qui sont créés ou sauvegardés chaque année.
L'extension de l'exonération de l'ISF aux dons qui seraient faits à ces réseaux, dons destinés à devenir des investissements directs ou indirects dans les TPE et les PME, contribuerait à accroître la création ou la reprise d'entreprises et aurait un effet stimulant sur l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je remercie Georges Othily d'avoir déposé cet amendement, qui m'amène à utiliser un exemple concret.
Les plates-formes fédérées et coordonnées par France Initiative Réseau - réseaux parmi d'autres du même type - sont des « outils » de proximité qui accordent des prêts d'honneur à des créateurs d'entreprise, ce qui a pour effet de démultiplier le crédit bancaire dont ces derniers vont bénéficier. Les créateurs d'entreprise sont de surcroît accompagnés dans leur démarche par un comité formé de cadres ou d'anciens cadres d'entreprise, qui jouent en quelque sorte un rôle de coach.
Si l'amendement était adopté, ce n'est pas France Initiative Réseau en tant que tel qui bénéficierait des versements d'impôt choisis au titre de l'ISF, mais les entreprises créées grâce à un de ces prêts d'honneur. Certains se sont demandés au cours des derniers jours par quel biais trouver de bons projets d'entreprise. Il suffit de passer par ces réseaux !
Ainsi, ces dispositifs abondés financièrement par les collectivités locales, souvent sous forme de fonds de garantie, vont être parmi les tout premiers bénéficiaires de la mesure. Telle est, me semble-t-il, la réponse qu'il faut apporter aux animateurs de ces réseaux et des associations locales que sont les plateformes initiative emploi : les versements exonératoires de l'ISF sont destinés à financer non pas les frais de structure de ces organisations mais directement les projets d'entreprise menés par les bénéficiaires des prêts d'honneur et de l'accompagnement qu'elles dispensent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Votre amendement, monsieur Othily, va contribuer à l'octroi de crédit à l'entreprise, c'est-à-dire concourir non pas à ses fonds propres mais à sa structure d'endettement, ce qui est contraire à l'objectif souhaité.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à cet amendement et vous suggère son retrait. En revanche, votre amendement n° 100 présente un tout autre intérêt...
M. le président. Monsieur Othily, l'amendement n° 230 rectifié est-il maintenu ?
M. Georges Othily. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 230 rectifié est retiré.
L'amendement n° 249, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885 0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
...° Des régies de quartier titulaire du label délivré par le Comité national de liaison des régies de quartier
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'intégration des dons aux régies de quartier dans le dispositif de réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune prévu à l'article 885 0 V bis A du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du même code.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement a déjà été défendu, mais je souhaite obtenir de Mme la ministre une précision.
Le champ de la mesure couvre les entreprises d'insertion, les associations intermédiaires, les chantiers d'insertion... Couvre-t-il aussi les régies de quartier dès lors qu'elles ont le statut d'association intermédiaire ou d'entreprise intermédiaire ? Il semble qu'elles aient été oubliées dans l'énumération, raison pour laquelle cet amendement a été déposé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une question d'intitulé. Je n'ai plus exactement en tête le régime juridique des régies de quartier, mais il suffirait de considérer, me semble-t-il, qu'il s'agit d'associations d'insertion par l'économique, c'est-à-dire par le travail.
Telle est bien, en effet, leur finalité : ces organismes locaux assurent en quelque sorte une transition entre la précarité, l'assistanat et le travail, par exemple en faisant réaliser des travaux dans les parties communes des immeubles sociaux, des prestations de déménagement pour des personnes qui n'ont pas la capacité de payer un déménageur, de l'entretien d'espaces verts, etc.
Il s'agit donc bien d'insertion par l'économique et, sous réserve du statut juridique, nous sommes vraiment dans le coeur de cible de la loi. Sans doute la notion de régie de quartier est-elle un peu datée, et peut-être vaut-il mieux fermer la régie de quartier et ouvrir l'association d'insertion ; mais il s'agit là de critères formels et, sur le fond des choses, il me semble, madame Bricq, que votre amendement est satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je confirme l'analyse du rapporteur général. Dès lors que ces régies de quartier sont bien destinées à l'insertion par l'économique, c'est-à-dire par le travail, elles tombent directement dans le champ d'application de la loi. Cela pourra d'ailleurs être précisé dans le cadre de l'instruction fiscale, afin qu'il n'y ait aucun doute à cet égard.
Mme Nicole Bricq. Ce serait bien !
M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 249 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 249 est retiré.
L'amendement n° 100, présenté par MM. Othily et Laffitte est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885 0 V bis A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° De l'Agence nationale de la recherche.
II. - Pour compenser la perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension de l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune aux dons en numéraire effectués au profit de l'Agence nationale de la recherche est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Le III de l'article 6 du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dans sa version adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, prévoit l'insertion d'un article 885 0 V bis A après l'article 885 V du code général des impôts.
Le I de ce nouvel article 885 0 bis A liste les diverses entités au profit desquelles le redevable de l'impôt de solidarité sur la fortune peut imputer, sur son impôt, 75 % du montant de ses dons en numéraire, dans la limite de 50 000 euros : établissements de recherche et d'enseignement supérieur, fondations reconnues d'utilité publique, entreprises d'insertion et entreprises de travail temporaire, associations intermédiaires, ateliers et chantiers d'insertion.
Il est proposé d'ajouter l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, à cette liste.
L'ANR est en effet un établissement public à caractère administratif qui a pour mission de financer et de promouvoir le développement des recherches fondamentales, appliquées et finalisées, l'innovation, le transfert technologique et le partenariat public-privé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est assez réticente. Certes, nous sommes dans le secteur de la recherche, et donc dans l'un des domaines couverts par la loi, mais tout versement qui serait fait à l'ANR, établissement public de l'État qui couvre de multiples activités, serait complètement dilué.
Il ne nous appartient pas de nous mettre à la place des gens et, après tout, chacun est libre ; mais le redevable de l'ISF trouvera sans doute plus motivant que son impôt « choisi » serve à quelque chose de visible dont on lui sera reconnaissant, au lieu d'être versé dans une caisse commune où il ne représentera que quelques millièmes des sommes collectées.
Cela étant dit, la commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Cet amendement a suscité un vif intérêt pour deux raisons, dont la première est qu'il se situe bien au coeur de la cible, à savoir la recherche.
À cet égard, il convient de rappeler que l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, reçoit, certes, des fonds publics, mais qu'elle agit parallèlement comme un intermédiaire à destination de sociétés du secteur privé qui investissent dans la recherche elle-même et pour des besoins de recherche.
Par ailleurs, il est demandé à l'ANR, comme à l'ADESI, l'aide à la décision pour l'évolution socio-technique des systèmes industriels, d'élargir leurs activités en direction des PME agissant en tant qu'auxiliaires d'autres entreprises.
En outre, cette mesure consacrerait utilement, je crois, un partenariat intelligent entre de l'argent public et de l'argent privé sous forme d'abondement par le privé à des programmes de recherche publique.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement ; bien entendu, je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 100 rectifié.
Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, presque convaincue par les propos de Mme la ministre, s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville. Je me réjouis que de l'argent soit alloué à l'ANR.
Cela dit, les exemples cités par Mme la ministre concernaient uniquement l'affectation de fonds à des sociétés. Or l'ANR distribue de l'argent à toutes les équipes de recherche du secteur universitaire et, pour ma part, je ne voudrais pas qu'il y ait une limitation à cette affectation.
M. le président. L'amendement n° 217, présenté par M. Badré et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
I. Compléter cet article par un VI ainsi rédigé :
VI. - Les quatrième et cinquième alinéas de l'article 885 A du code général des impôts sont supprimés.
II. Pour compenser les pertes de recettes dues au I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
- Les pertes de recettes résultant du VI sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. L'objet de cet amendement est de supprimer l'imposition commune à l'ISF des personnes mariées ou liées par un pacte civil de solidarité.
En effet, l'ISF désavantage les couples et les familles, puisque la loi oblige à additionner le patrimoine des époux, ce qui les prive du double abattement de 760 000 euros et du bénéfice des tranches inférieures, étant donné la progressivité de l'impôt.
De telles règles fiscales ne sont pas vraiment équitables. Elles favorisent les personnes célibataires, et peuvent dissuader certains de se marier. De plus, elles induisent une discrimination mal vécue, notamment par les épouses qui travaillent et ont la capacité de se constituer un patrimoine indépendant de celui de leur conjoint.
Comme en matière d'impôt sur le revenu, les couples devraient pouvoir disposer de deux parts pour leur ISF. En outre, une telle mesure permettrait aux personnes mariées ou pacsées de pouvoir déduire de leur ISF le double de ce qu'elles pourraient déduire si le régime actuel était conservé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis très gêné d'avoir à émettre un avis sur cet amendement, car, sur un plan personnel - je dirai presque d'un point de vue moral -, je suis en parfait accord avec son objet.
En effet, l'ISF est un impôt qui devrait être « familialisé ».
M. Yves Fréville. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Or, si tel était le cas, son rendement serait très vite vidé de son contenu, et nous serions alors en contradiction, compte tenu des choix qui ont été faits par ailleurs - et qu'il faut bien assumer, les choses étant ce qu'elles sont -, avec nos principes de saine discipline en matière de finances publiques.
C'est le seul argument que je vois à opposer à l'idée défendue par notre collègue Jean-Jacques Jégou et à laquelle beaucoup d'entre nous sont extrêmement sensibles.
Il est vrai que les abattements pour charges de famille en matière d'ISF n'ont jamais évolué et qu'ils sont ridicules : ils s'élèvent, si je ne me trompe, à 150 euros par personne à charge. Cela n'a aucun sens !
Toutefois, à chaque jour suffit sa peine : nous en avons déjà fait pas mal, nous sommes en fin de session extraordinaire, et cela ne figure pas dans l'entretien au journal Les Echos du mois de janvier ! Dès lors, il conviendra de revenir sur ce sujet ultérieurement.
Dans l'immédiat, je serais très reconnaissant à notre collègue Jean-Jacques Jégou de bien vouloir retirer cet amendement, après que nous aurons entendu les explications du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je vous demande également de retirer cet amendement, monsieur le sénateur, tout en prenant l'engagement que nous examinerons cette question dans le cadre de la revue générale des prélèvements obligatoires, et ce pour les raisons mentionnées par M. le rapporteur général.
M. Guy Fischer. Vous allez en faire, des choses !
Mme Christine Lagarde, ministre. L'abattement pour charges de famille, notamment, est notoirement insuffisant.
J'ajoute, me référant ici aux calculs effectués par mes excellents services, que la mesure proposée dans cet amendement, si elle était adoptée, conduirait à avantager les concubins par rapport aux couples mariés.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° 217 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Je voulais attirer l'attention - et je crois que Mme la ministre l'a bien compris - sur un dysfonctionnement. Il existe en effet des régimes fiscaux totalement différents et assez iniques.
Toutefois, compte tenu de l'affirmation de Mme la ministre selon laquelle nous reviendrons sur cette question - peut-être au moment du vote de la prochaine loi de finances ? -, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 217 est retiré.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Chacun aura pu constater que nous n'avons pas déposé d'amendements sur l'article 6, puisque nous étions en total désaccord avec ce dernier.
Bon nombre d'interventions m'ont confirmée dans l'appréciation que nous portons sur cet article depuis le départ, à savoir que cet article a surtout pour objet une optimisation fiscale.
Lors de la discussion de telle ou telle loi de finances, nous entendons régulièrement parler de niches fiscales. Cette fois, nous venons d'en ajouter un certain nombre, au lieu d'éclaircir la situation !
Madame la ministre, vous avez essayé de nous vendre l'idée selon laquelle ces dispositions auraient pour but de participer au financement de l'activité économique. Il est vrai que le Président de la République avait déclaré, voilà quelque temps, que les PME, lorsqu'elles avaient des projets, éprouvaient des difficultés à trouver une banque qui leur prête de l'argent, au motif que les risques étaient trop grands.
Par ailleurs, certains sénateurs siégeant sur les travées de la majorité n'ont pas hésité à dire qu'ils ne concevaient pas que les particuliers concernés par la possibilité de financer des PME aillent vers des secteurs à risque.
Dès lors, il est permis de se demander si, aujourd'hui, on n'est pas en train de mettre en place un dispositif qui n'aura absolument aucun effet, alors que la question aurait mérité d'être posée de façon plus efficace. Ainsi aurait-t-on pu s'interroger sur le fait de savoir s'il ne convenait pas de faire évoluer un peu plus largement l'ensemble du secteur bancaire quant à sa conception de contribuer au développement de la vie économique.
En conclusion, permettez-moi un trait d'humour : les fruits de l'impôt de solidarité sur la fortune devaient être consacrés, au départ, à la solidarité pour les plus pauvres, et, par la suite, au financement du RMI. Dans cette optique, on aurait pu penser que toutes les autres niches mises en place seraient réduites à un seul objet, à savoir participer à la réinsertion grâce à l'emploi. Cela aurait peut-être été plus efficace ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Bravo !
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
M. Guy Fischer. Le groupe CRC vote contre.
(L'article 6 est adopté.)
Article additionnel après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 191 rectifié, présenté par M. Béteille et Mme Gousseau est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 2 de la loi n° 78-654 du 22 juin 1978 concernant les comités professionnels de développement économique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il n'existe pas de centre technique industriel dans la filière concernée, l'objet des comités professionnels de développement économique peut également comprendre la promotion du progrès des techniques et la participation à l'amélioration du rendement et à la garantie de la qualité dans l'industrie ».
La parole est à Mme Adeline Gousseau.
Mme Adeline Gousseau. La disposition contenue dans cet amendement, dont l'impact budgétaire sera nul, permettra aux PME de la filière du cuir et de l'horlogerie bijoutière de disposer d'un guichet unique de prestation afin de soutenir la compétitivité.
Le statut rénové de comité professionnel de développement économique devrait également permettre à ces organismes d'accomplir plus efficacement leur mission de service public relative à la préservation de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La proposition présentée par Mme Gousseau est importante et nous renvoie aux nombreux débats concernant ce type d'organismes que nous avons eus en lois de finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avions ainsi, à un moment donné, été amenés à traiter des conséquences de la loi organique relative aux lois de finances qui était censée faire disparaître les ressources parafiscales et les systèmes d'affectation.
En réalité, ceux-ci se sont bien entendu reconstitués à travers d'autres processus et d'autres itinéraires.
Mais les professions dont il s'agit ici méritent toute notre estime en ce qu'elles détiennent dans leur domaine un savoir-faire français qui nécessite des activités communes de recherche et d'évolution des techniques.
Par conséquent, ma chère collègue, considérant, d'une part, que le sujet traité n'est pas très proche des thèmes abordés dans ce projet de loi et, d'autre part, que vos préoccupations feront certainement l'objet de discussions en loi de finances, il serait à mon avis opportun que vous acceptiez de retirer cet amendement, une fois que Mme la ministre aura exprimé son avis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement partage totalement le point de vue de M. le rapporteur général.
Je considère en effet que cet amendement, quoique tout à fait louable dans son intention, trouverait plus utilement et plus efficacement sa place dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008.
Je vous demande donc également, madame la sénatrice, de bien vouloir le retirer.
M. le président. Madame Gousseau, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Adeline Gousseau. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 191 rectifié est retiré.
Article 6 bis
Après le 5 de l'article 39 du code général des impôts, il est inséré un 5 bis ainsi rédigé :
« 5 bis. Les indemnités de départ et de licenciement sont exclues des charges déductibles dès lors que leur montant dépasse, pour une personne, un million d'euros. »
M. le président. L'amendement n° 50, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si nous avons proposé la suppression de cet article, c'est parce que ce dernier n'est pas nécessaire.
Il concerne certaines indemnités de départ et de licenciement.
À cet égard, je soulignerai, en premier lieu, que le texte voté par l'Assemblée nationale ne me paraît pas cohérent avec l'article 7 que nous allons examiner dans un instant.
En deuxième lieu, il convient de rappeler que l'administration fiscale dispose déjà d'un pouvoir d'appréciation et de redressement en ce qui concerne le caractère excessif ou non conforme à l'intérêt de l'entreprise d'une rémunération directe ou indirecte. Par ailleurs, le juge peut considérer qu'une telle indemnité excessive est constitutive d'un acte anormal de gestion, et il existe toute une jurisprudence en la matière.
En troisième lieu, je ferai remarquer que le régime des indemnités de licenciement doit prendre en compte leur caractère indemnitaire, car il s'agit bien, à la base, de réparer un préjudice. Or un encadrement avait été prévu par une loi de 2000 qui, si ma mémoire est bonne, avait été votée pour tenir compte des conditions de départ d'Elf Aquitaine de M. Philippe Jaffré. Cette loi me paraît donc amplement suffisante. Elle entraîne des conséquences sur la fiscalité personnelle du bénéficiaire, et il n'y a pas lieu d'y ajouter des conséquences supplémentaires pour l'entreprise qui l'employait.
En quatrième lieu, certaines de ces indemnités sont versées en tenant compte de clauses de non-concurrence qui peuvent exister entre l'ancien employeur et le cadre dirigeant dont il s'est séparé ; il convient également de prendre cet élément en considération.
Enfin et surtout, le régime de non-déductibilité issu de l'amendement déposé par notre collègue député Michel Bouvard jouerait en défaveur de la compétitivité des sociétés françaises.
Il convient de le rappeler, les indemnités de départ et de licenciement, que cela vous plaise ou non, mes chers collègues, sont intégralement déductibles en Allemagne, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas et, bien entendu, au Royaume-Uni.
Sur le marché hautement concurrentiel du recrutement des cadres dirigeants, si nous nous infligions des contraintes que les autres pays ne supportent pas, nous jouerions contre l'emploi national et l'attractivité de notre territoire. Ce serait entrer dans une logique auto-pénalisante à laquelle nous ne pouvons souscrire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
En effet, il ne semble pas souhaitable de renchérir le coût des indemnités de départ pour l'entreprise, que tous les actionnaires subissent déjà.
Par ailleurs, certaines dispositions de l'article 7 du projet de loi, que nous examinerons très bientôt, je l'espère, concernent les indemnités et les clauses consenties aux mandataires et aux dirigeants des entreprises. Elles permettront certainement à l'administration fiscale de réexaminer l'opportunité de la dépense, de limiter son caractère excessif et de vérifier de façon plus précise qu'elle est bien engagée dans l'intérêt de l'entreprise, dès lors que des critères auront été fixés.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J'ai lu pour ma part avec attention l'argumentaire qu'a développé, pour présenter l'objet de son amendement, M. Michel Bouvard, dont je rappelle tout de même qu'il est député UMP et guère suspect d'avoir la même approche des problèmes que nous !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais même au parti communiste il y a de la diversité ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. C'est bien de le reconnaître !
Mme Marie-France Beaufils. Michel Bouvard écrivait ceci : « L'objet de cet amendement, déjà déposé et adopté par la commission des finances [...] est de compléter le dispositif prévu par l'article 7 du projet de loi » - cet article, je le rappelle, mes chers collègues, vise à moraliser certaines des conditions du départ des dirigeants d'entreprise.
Il ajoutait ceci : « [cet article] renforce le contrôle des conseils d'administration ou de surveillance sur les éléments de rémunération différée et les soumet à des conditions de performance connues à l'avance, moralisant ainsi les " parachutes dorés ".
« Cependant, ces primes ou indemnités constituent aujourd'hui et constitueront encore demain des charges déductibles dans le cadre du calcul du bénéfice net de l'entreprise, et réduisent donc d'autant l'impôt sur les sociétés payé par les entreprises concernées. Cela revient à faire prendre en charge par la nation une partie du coût de ces rémunérations. Or, si les entreprises peuvent librement décider de récompenser tel ou tel de leurs responsables sur la base de leurs mérites, ce n'est pas à la collectivité d'en prendre, même partiellement, le coût en charge.
« Cet amendement propose donc de sortir ces primes, dès lors qu'elles dépassent le montant déjà important d'un million d'euros, des charges déductibles. »
Mes chers collègues, que dire de plus ? Cet argumentaire me semble tout à fait excellent, et je ne vois donc pas pourquoi on supprimerait une disposition qui a été adoptée par l'Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Tout est dit ! On veut faire payer par la collectivité des indemnités de départ d'un million d'euros ! J'insiste sur ce point, car les gens n'en croient pas leurs oreilles quand ils entendent cela : des indemnités de départ d'un million d'euros !
Je ne tenterai pas de vous convaincre : il est clair depuis le début que nous discutons d'une loi pour les riches, et il n'y a aucune raison qu'il y ait une rupture dans ce débat ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Vous allez continuer à donner aux plus riches et à accroître le déficit de l'État : il s'agit d'une loi pour les riches, et ce sont les contribuables qui paient !
Si vous croyez que la majorité des salariés qui sont licenciés ou qui font les frais des délocalisations partent avec un million d'euros, c'est que vous ne vivez pas dans le même monde que moi !
M. le président. En conséquence, l'article 6 bis est supprimé.
Article 7
I. - L'article L. 225-42-1 du code de commerce est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Sont interdits les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire, appréciées au regard de celles de la société dont il préside le conseil d'administration ou exerce la direction générale ou la direction générale déléguée.
« L'autorisation donnée par le conseil d'administration en application de l'article L. 225-38 est rendue publique selon des modalités et dans des délais fixés par décret en Conseil d'État.
« La soumission à l'approbation de l'assemblée générale en application de l'article L. 225-40 fait l'objet d'une résolution spécifique pour chaque bénéficiaire. Cette approbation est requise à chaque renouvellement du mandat exercé par les personnes mentionnées au premier alinéa.
« Aucun versement, de quelque nature que ce soit, ne peut intervenir avant que le conseil d'administration ne constate, lors ou après la cessation ou le changement effectif des fonctions, le respect des conditions prévues. Cette décision est rendue publique selon des modalités et dans des délais fixés par décret en Conseil d'État. Tout versement effectué en méconnaissance des dispositions du présent alinéa est nul de plein droit.
« Les engagements correspondant à des indemnités en contrepartie d'une clause interdisant au bénéficiaire, après la cessation de ses fonctions dans la société, l'exercice d'une activité professionnelle concurrente portant atteinte aux intérêts de la société, ne sont soumis qu'aux dispositions du premier alinéa. Il en va de même des engagements de retraite à prestations définies répondant aux caractéristiques des régimes mentionnés à l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale. »
II. - Dans l'article L. 225-22-1 du même code, les mots : « aux dispositions des articles L. 225-38 et L. 225-40 à L. 225-42 » sont remplacés par les mots : « au régime prévu par l'article L. 225-42-1 ».
III. - L'article L. 225-90-1 du même code est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Sont interdits les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire, appréciées au regard de celles de la société dont il est membre du directoire.
« L'autorisation donnée par le conseil de surveillance en application de l'article L. 225-86 est rendue publique selon des modalités et dans des délais fixés par décret en Conseil d'État.
« La soumission à l'approbation de l'assemblée générale en application de l'article L. 225-88 fait l'objet d'une résolution spécifique pour chaque bénéficiaire. Cette approbation est requise à chaque renouvellement du mandat exercé par les personnes mentionnées au premier alinéa.
« Aucun versement, de quelque nature que ce soit, ne peut intervenir avant que le conseil de surveillance ne constate, lors ou après la cessation ou le changement effectif des fonctions, le respect des conditions prévues. Cette décision est rendue publique selon des modalités et dans des délais fixés par décret en Conseil d'État. Tout versement effectué en méconnaissance des dispositions du présent alinéa est nul de plein droit.
« Les engagements correspondant à des indemnités en contrepartie d'une clause interdisant au bénéficiaire, après la cessation de ses fonctions dans la société, l'exercice d'une activité professionnelle concurrente portant atteinte aux intérêts de la société ne sont soumis qu'aux dispositions du premier alinéa. Il en va de même des engagements de retraite à prestations définies répondant aux caractéristiques des régimes mentionnés à l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale. »
IV. - Dans l'article L. 225-79-1 du même code, les mots : « aux dispositions des articles L. 225-86 et L. 225-88 à L. 225-90 » sont remplacés par les mots : « au régime prévu par l'article L. 225-90-1 ».
IV bis. - Le deuxième alinéa de l'article L. 823-10 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils attestent spécialement l'exactitude et la sincérité des informations relatives aux rémunérations et aux avantages de toute nature versés à chaque mandataire social. »
V. - Les I à IV sont applicables aux engagements mentionnés aux articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du code de commerce pris à compter de la publication de la présente loi.
Les engagements en cours à cette date sont mis en conformité avec les dispositions des articles L. 225-42-1 ou L. 225-90-1 du même code au plus tard dix-huit mois après la publication de la présente loi. À défaut de mise en conformité au terme de ce délai, l'engagement peut être annulé dans les conditions prévues aux articles L. 225-42 ou L. 225-90 du même code. Le délai de prescription de trois ans mentionné au deuxième alinéa de ces articles court en ce cas à compter de l'expiration du délai de dix-huit mois. Le rapport des commissaires aux comptes mentionné au dernier alinéa des mêmes articles expose les circonstances en raison desquelles la mise en conformité n'a pas été faite.
VI. - Indépendamment de leur application de plein droit à Mayotte, sont applicables en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna les adjonctions et modifications apportées au code de commerce en ses articles L. 225-22-1, L. 225-42-1, L. 225-79-1, L. 225-90-1 et L. 225-102-1 par les articles 8 et 9 de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie et par les I à IV du présent article. Sont également applicables dans ces collectivités les IV bis et V du présent article.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. Monsieur le président, cette intervention vaudra défenses de l'amendement n° 87.
La question des indemnités de départ a fait irruption dans la campagne présidentielle après que plus de 12 millions de dollars eurent été octroyés au directeur général d'EADS, Noël Forgeard. Cette décision était d'autant plus choquante qu'elle survenait quelques semaines après l'annonce du licenciement de 10 000 employés d'Airbus. Tous les candidats ont alors dénoncé les conditions du départ de l'administrateur, Nicolas Sarkozy promettant d'interdire les « parachutes dorés ».
On se souviendra que, pendant ce temps, les employés de l'avionneur européen étaient autorisés à percevoir un produit de participation de deux euros pour l'année 2006 et que le plan Power 8 prévoit un certain nombre de suppressions d'emplois.
Au demeurant, les modifications récentes qu'a connues l'équipe dirigeante d'EADS ont montré clairement qu'il convenait d'être pour le moins circonspect avec la notion de performance.
Vous avez déclaré, madame la ministre, qu'un « petit peu de moralisation » ne ferait pas de mal.
De fait, votre réforme se contente de moraliser les indemnités de départ en les liant directement à la performance de l'entreprise sous la gouverne du dirigeant concerné. Les critères d'évaluation pourront porter sur le cours boursier, qui flambe toujours à l'annonce d'un plan social, les emplois créés ou les bénéfices réalisés, la décision étant approuvée par l'assemblée des actionnaires.
La présidente du MEDEF, qui estime que le projet de loi rendra les indemnités plus transparentes tout en permettant à la France de conserver sa compétitivité dans le recrutement d'administrateurs de haut niveau, peut exprimer ouvertement sa satisfaction, car votre réforme est vide de tout contenu, madame la ministre.
Pour moraliser les pratiques, il faudrait prendre des mesures d'une tout autre ampleur, c'est-à-dire non seulement interdire les parachutes dorés, mais aussi plafonner les revenus des dirigeants, accorder un droit de regard au comité d'entreprise et intégrer la détermination des revenus des dirigeants dans la négociation salariale globale.
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais oui, on va faire ça tout seuls, sur notre petite île bien tranquille ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Bernard Vera. Selon une publication de l'institut Montaigne - une structure que l'on ne peut guère suspecter d'être proche des idées les plus réformatrices -, 80 % des visiteurs du site « boursorama.com » considéraient, en mai 2007, que la polémique sur les parachutes dorés était fondée.
Toujours selon cet article, la rémunération moyenne des dirigeants s'est très fortement accrue depuis dix ans et a progressé de 15 % par an ces cinq dernières années, tandis que les salaires augmentaient à un rythme annuel de 3 %, très loin donc de la modération recommandée par les organismes patronaux eux-mêmes. On a même assisté à une évolution inverse, les augmentations des uns justifiant celles des autres.
Dans ce contexte, l'article 7 du présent projet de loi est tout simplement scandaleux. Il enferme d'ailleurs la question de l'excessive rémunération des dirigeants d'entreprise dans le confort des décisions de l'assemblée générale des actionnaires et du conseil d'administration, selon des critères d'évaluation qui pourront d'ailleurs varier d'une entreprise à l'autre.
Cet article est donc à la fois verbeux et complexe, inopérant et inefficace au regard de ce qu'attendent réellement les Françaises et les Français en termes de reconnaissance du travail bien fait.
M. le président. La parole est à M. François Marc, sur l'article.
M. François Marc. Au cours de précédents débats, notre groupe s'est exprimé à plusieurs reprises au sujet des rémunérations des dirigeants et de la gouvernance d'entreprise. Il a souhaité en la matière une régulation plus stricte et mieux contrôlée, et en tout cas une transparence accrue.
Nous nous réjouissons de voir que le Gouvernement prend acte des scandales liés aux parachutes dorés, qui émaillent l'actualité à longueur d'année, et souhaite mieux contrôler les conditions du départ des dirigeants, ou en tout cas les rendre plus transparentes.
Tel est l'objet de l'article 7 du présent projet de loi, destiné à compléter la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie, qui a été jugée insuffisante, particulièrement quand l'ampleur de la rémunération versée de façon différée à un dirigeant semble sans commune mesure avec la performance de celui-ci. Et je ne reviendrai pas sur le cas, cité à l'instant par M. Vera, où un parachute doré a été accordé à un responsable qui quittait son entreprise et dont les performances avaient été calamiteuses !
Il s'agit donc d'essayer de moraliser la situation. Mais, hélas ! madame la ministre, cet article ne crée pas un dispositif véritablement crédible à nos yeux, et c'est pourquoi il nous semble devoir être largement complété.
En effet, qu'est-ce que la performance en matière de gouvernance d'entreprise aujourd'hui ? Comment définira-t-on juridiquement la performance dans le contrat de travail du dirigeant d'entreprise ? Je n'ai obtenu ni réponse à ces questions ni précision supplémentaire sur ces dispositions.
Cette performance sera-t-elle liée à des résultats financiers ? Se mesurera-t-elle en fonction du taux de rentabilité financière du capital investi dans l'entreprise, ou d'autres critères justifieront-ils la performance d'un chef d'entreprise ? Nous ne disposons d'aucune indication sur ce point. Et si cette rentabilité financière est inversement proportionnelle à la masse salariale de l'entreprise, nous voyons tout de suite les conséquences qui découleront de ce dispositif : la performance du dirigeant d'entreprise sera mesurée à l'aune de l'efficacité des licenciements de personnels sur la valorisation des titres de propriété du capital ! En effet, je le répète, il est évident que des licenciements boursiers entraînent une revalorisation du titre.
S'agira-t-il d'évaluer la performance au regard de cette montée en puissance du capital et de la valeur de l'action ? Si c'est le cas, une telle orientation n'est en aucun cas satisfaisante.
Les dispositions de l'article 7 du projet de loi nous semblent insuffisantes, et nous souhaitons donc en améliorer sensiblement la formulation. C'est dans cet esprit, mes chers collègues, que je soumettrai tout à l'heure à votre approbation quelques amendements utiles, et même indispensables, pour donner une véritable portée à cet article et en faire un authentique instrument de régulation.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, sur l'article.
M. Jean Desessard. De toute façon, nous examinons une loi pour les riches, et il est donc inutile que je me démène ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Christian Cambon. Changez de refrain !
M. Jean Desessard. Les Français ont été dupés lors des dernières élections, car je ne crois pas qu'ils soient d'accord avec de telles mesures !
M. Philippe Marini, rapporteur général. On leur a pourtant tout dit, et à temps !
M. Jean Desessard. En somme, monsieur le rapporteur général, vous avez prévenu les Français, ils ont voté, vous êtes en place, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà !
M. Jean Desessard. ... vous menez une politique que vous pensez bonne, et elle favorise les riches !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas seulement ! Elle favorise tout le monde !
M. Jean Desessard. Les Français attendent de nous, les parlementaires, que nous remettions un peu de bon sens dans les rémunérations folles des dirigeants d'entreprises.
M. Robert del Picchia. C'est vous qui le dites !
M. Jean Desessard. La rémunération annuelle des patrons du CAC 40 représentait en moyenne l'équivalent de 366 SMIC en 2004, selon la dernière étude annuelle sur les salaires des dirigeants d'entreprises de Proxinvest, publiée en novembre 2005, soit 12 SMIC mensuels par jour ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Une telle rémunération permet d'acheter environ 15 000 baguettes de pain chaque jour, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela fait travailler les boulangers ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. ... ou encore 2 800 abonnements de carte orange par mois - et puisque l'on prétend vouloir augmenter le pouvoir d'achat des salariés, ne vaudrait-il pas mieux leur distribuer ces cartes orange potentielles ? -, et même, chaque jour, 413 abonnements Velib' à l'année. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Honnêtement, est-ce que les êtres humains ont besoin de 413 abonnements annuels Velib' chaque jour ? Leur estomac peut-il avaler 15 000 baguettes ? Non, et la planète non plus ne peut plus supporter ces « riches qui détruisent la planète », pour reprendre le titre du livre du journaliste du Monde Hervé Kempf. En effet, ces douzaines de SMIC par jour et par patron se gaspillent en kérosène, en voitures de luxe, en montres superflues, ou en résidences secondaires vacantes la plupart du temps.
Il n'est plus possible qu'autant de gaspillage côtoie tant de misères. Mes chers collègues, un peu de bon sens !
D'exorbitantes inégalités de salaires ne sont pas une condition d'efficacité. Ainsi, dans les sociétés coopératives ouvrières de production, les SCOP, les salaires sont très encadrés, ce qui n'empêche pas la réussite économique. L'entreprise Chèque Déjeuner, avec plus de 1 000 salariés et de nombreuses filiales à l'étranger, est un vrai succès.
Mme Bariza Khiari. Eh oui !
M. Jean Desessard. Elle est pourtant connue pour ses salaires tout à fait raisonnables, compris dans une fourchette de un à cinq. Il est donc tout à fait possible de réduire les inégalités et d'être performant économiquement.
M. le président. Sur l'article 7, je suis saisi de vingt-cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 87, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 88, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Cette négociation porte également sur les éléments de rémunération versés aux dirigeants salariés de l'entreprise, sous quelque forme que ce soit, notamment dans le cadre des dispositions visées aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement vise à intégrer la fixation des revenus des dirigeants dans la négociation salariale globale avec les organisations syndicales.
Pourquoi débattrait-on publiquement de la rémunération des secrétaires et pas de celle du P-DG ? Ces deux acteurs de l'entreprise auraient-ils une dignité différente ?
La question de la rémunération des dirigeants d'entreprise se pose dans des termes sans cesse renouvelés par la diversité des pratiques comme des éléments de rémunération.
En effet, le salaire ne constitue bien souvent qu'une partie des éléments de rémunération des P-DG, notamment dans les plus grands groupes, entre autres ceux qui sont cotés au CAC 40.
Avantages en nature, stock-options, prise en charge future d'une prestation à versement défini, notes de frais diverses ou encore jetons de présence : il existe une multitude de moyens de majorer sensiblement la rémunération globale des P-DG.
Tous ceux qui veulent sincèrement introduire de la transparence dans la gestion de nos plus grandes entreprises se doivent donc de soutenir cet amendement. Il sera certainement plus efficace que le dispositif que vous nous avez présenté et qui n'aura sans doute qu'une portée extrêmement limitée, madame la ministre.
M. le président. L'amendement n° 232, présenté par MM. Charasse, Marc, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Remplacer le deuxième alinéa du I de cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Sont seuls autorisés les éléments de rémunération, indemnités et avantages de toute nature dont le bénéfice est subordonné au respect des conditions de bonne gestion des bénéficiaires. Ces conditions sont prévues dans la convention qui lie le Président, Directeur général ou le Directeur délégué, à la société, telle qu'elle est approuvée par le Conseil d'administration.
« Le Conseil d'administration fixe la durée des dispositions de la convention visées à l'alinéa précédent. Ces dispositions font l'objet d'un examen annuel par le Conseil d'administration qui peut les modifier pour les améliorer ou restreindre leur portée.
« Le Conseil d'administration fixe les objectifs de la bonne gestion exigés, notamment, en matière de produits, de rémunérations, d'emploi, de rendement du capital, de chiffres d'affaire et de bénéfices.
« Le Comité d'entreprise est consulté avant la signature de la convention.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Je présenterai simultanément les amendements nos 232 et 185, dont l'objet est similaire.
Les éléments de rémunérations, avantages et indemnités qui sont alloués au président du conseil d'administration ne sont pas, ni de fait ni de droit, interdits.
Il importe donc de mettre la loi en cohérence avec ce principe. En revanche, il faut que la rédaction de cet article insiste bien sur la condition de validité de ces éléments de rémunérations, avantages et indemnités. Ces derniers doivent faire l'objet d'une convention autorisée par le conseil d'administration, laquelle indique à quelles conditions les indemnités de départ peuvent être allouées.
Je présenterai d'autres amendements qui tendent à définir à la fois les critères permettant d'autoriser ces indemnités de départ et les modalités.
Si l'amendement n° 185 semble de nature rédactionnelle, son objet porte pourtant bien sur le fond. Il s'appuie sur des considérations juridiques pour corriger la formulation de l'article.
L'amendement n° 232 précise les conditions dans lesquelles est prévue la convention qui lie le président-directeur général ou le directeur délégué à la société. Le conseil d'administration doit approuver cette convention et fixer la durée de ses dispositions.
Tels sont les éléments de précision qu'il nous semble important de voir porter à l'article 7 par l'adoption de ces deux amendements.
M. le président. L'amendement n° 185, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. - Dans le deuxième alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
Sont interdits
par les mots :
Seuls sont autorisés
II. - En conséquence, dans le même alinéa, remplacer les mots :
le bénéfice n'est pas subordonné
par les mots :
le bénéfice est subordonné
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 181, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du I de cet article, après le mot :
avantages
insérer les mots :
de toute nature
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. L'établissement, par la loi, d'un rapport entre les performances du P-DG et le montant des rémunérations qu'il reçoit ne doit pas, pour être effectif, être limité dans son vocabulaire.
L'imagination des « ingénieurs » du droit en la matière est telle qu'il faut que la loi soit en mesure de concerner toutes sortes de rémunération, de toute nature et sans exception.
Cet amendement se justifie donc par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 157, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Muller est ainsi libellé :
Dans les deuxième et neuvième alinéas de cet article, après les mots :
indemnités et avantages
insérer les mots :
supérieurs à ceux accordés aux cadres dirigeants de l'entreprise ou de la branche, et
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. J'ai bien conscience de me répéter, mes chers collègues, mais c'est bien parce que les articles de ce projet de loi eux-mêmes se répètent, et que ce sont toujours les mêmes qui en profitent. Ma répétition est une réaction à la répétition !
Pendant sa campagne, Nicolas Sarkozy s'est vanté et glorifié de pouvoir encadrer les parachutes dorés : il s'y est engagé. Si l'article 7 est la traduction de cette promesse, il y a quelque peu tromperie sur la marchandise...
L'article 7 prévoit que les parachutes dorés doivent correspondre à la « performance » du manager. Mais personne n'est capable de convertir celle-ci en indemnités de départ. Si l'entreprise est en bonne santé, ce n'est pas forcément grâce à son leader ; inversement, si elle traverse une crise, celui-ci n'en est pas nécessairement le seul responsable.
La seule réponse aux abus consiste à revenir sur terre, c'est-à-dire à considérer le dirigeant de l'entreprise ou de la branche comme n'importe quel autre cadre dirigeant, en matière de rupture de contrat.
Personne ne peut soutenir que les dirigeants d'entreprise ont besoin d'une protection particulière par rapport aux autres salariés, au contraire. Ils doivent bénéficier des indemnités de départ en vigueur pour les cadres de leur entreprise ou de leur branche, s'il n'existe pas de règle dans leur entreprise.
Les parachutes dorés sont habituellement justifiés par les risques que prennent ces dirigeants, lesquels sont révocables à tout instant sans justificatif ni préavis. Ils ne sont pas les seuls !
D'ailleurs, ces risques ne sont rien si on les compare à ceux que prennent des manoeuvres précaires sur un chantier, des ouvriers à la chaîne qui sont menacés par des maladies du travail comme les troubles musculosquelettiques, des forces de l'ordre ou des salariés d'entreprises de sécurité qui sont en permanence sous le coup d'une agression, ou tout simplement des travailleurs pauvres pour qui le licenciement est synonyme de dégringolade sociale. J'aurais plutôt tendance à demander que les indemnités de départ de tous ces salariés soient alignées sur les parachutes dorés des dirigeants, mais je crains que les finances de nos entreprises n'y survivent pas !
Il ne faut pas tout confondre. Les petits entrepreneurs qui ont hypothéqué leur maison pour garantir un crédit, eux, prennent des risques. En revanche, les dirigeants des grandes entreprises ressemblent davantage à des salariés, certes flexibles - et encore ! -, mais de luxe.
Honnêtement, qui peut prétendre que Philippe Jaffré, quand il a demandé 38 millions d'euros lors de son départ de la société Elf, avait réellement besoin de cette somme pour ne pas sombrer dans la misère ?
Cet amendement vise donc à aligner les indemnités de départ des cadres dirigeants sur celles de l'ensemble des salariés de l'entreprise.
M. le président. L'amendement n° 180, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du I de cet article, après les mots :
subordonné au respect
remplacer le mot :
de
par les mots :
des
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Il s'agit d'un amendement rédactionnel dont l'adoption rendra plus efficace l'application de l'article 7.
La rédaction de cet article est hautement significative de la démarche du Gouvernement. Madame la ministre, vous souhaitez encadrer les modalités d'octroi des indemnités de départ des dirigeants d'entreprise, mais, dans le même temps, votre projet de loi ne s'en donne pas les moyens.
En effet, l'article 7 indique que les éléments de rémunération, indemnités et avantages seront subordonnés au respect « de » conditions liées aux performances de bénéficiaires. Une liste exhaustive de ces conditions n'est donc pas précisée ou prévue par le texte. La formulation de cet article, volontairement floue, rend ce dernier inutile en l'état et totalement inopérant.
Il faudrait préférer la rédaction : « au respect des conditions », afin que la convention qui lie le dirigeant à la société contienne très précisément ces conditions et qu'il soit possible de vérifier qu'elles sont remplies.
On ne peut demander à un arbitre de régler les conditions de déroulement d'un match si on ne lui fournit pas d'abord les règles du jeu. En l'occurrence, il s'agit bien de prévoir un contrôle, mais les critères et les conditions ne sont pas prévus.
C'est cette lacune que cet amendement tend à combler.
M. le président. L'amendement n° 179, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
conditions liées aux performances
par les mots :
critères de bonne gestion de l'entreprise
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Cet amendement concerne les conditions liées aux performances. En effet, ce sont elles qui servent de critères pour encadrer les rémunérations des dirigeants.
Vous en conviendrez, mes chers collègues, avec un texte de loi aussi vague, il est possible de faire dire tout et son contraire à la convention de rémunération du P-DG. S'agit-il des performances elles-mêmes ou des critères de performances ? Si oui, quels sont ces critères ? Qui les définit ? Comment se fait-il que le projet de loi ne donne même pas une indication du critère principal de la performance ?
Pourtant, ce n'est pas la jurisprudence qui manque : les notions d'intérêt social, de bonne gestion, de gestion en bon père de famille sont connues du droit des sociétés. Sans faire preuve de beaucoup d'imagination, vous auriez pu vous en inspirer, madame la ministre. Vous ne l'avez pas fait, car, sur le fond, vous pensez que moins la loi en dit, mieux c'est !
Votre objectif réel étant que ce texte ne change rien au scandale des parachutes dorés, avec une formule attrape-tout comme celle qui se trouve à l'article 7, vous ne prenez pas de risque !
Cet amendement vise donc à modifier ce texte pour lui donner un contenu et un sens, et faire en sorte qu'il atteigne les objectifs qu'il s'est fixés et que nous partageons.
La réussite d'un chef d'entreprise ne se mesure pas à la performance, au sens boursier du terme. En effet, la performance financière, celle qui se mesure à la rentabilité actionnariale de 15 %, le return on equity, est une référence qui non seulement ne sert pas l'intérêt social, mais, souvent, dessert les salariés. Dans ce capitalisme financiarisé, les plans de licenciement ont souvent pour origine les exigences astronomiques des actionnaires, qui veulent du rendement à court terme. Certes, une entreprise doit être rentable, mais elle doit aussi produire et créer des emplois.
Laisser accroire qu'il suffit de dégager de la rentabilité financière pour être un bon chef d'entreprise est contraire à ce que nous croyons être bon pour l'économie. Il faut donc introduire dans le projet de loi l'idée qu'une bonne gestion associe les perspectives à long terme aux exigences actionnariales, et ne laisse pas seulement la place à la rentabilité financière.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 178, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le mot :
performances
supprimer la fin du deuxième alinéa du I de cet article.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. L'argumentation que j'ai développée à l'amendement précédent vaut également pour cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 219, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
appréciées au regard de celles
par les mots :
appréciées au regard des résultats économiques ou de la croissance
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. J'ai conscience que nos propos se répètent. C'est bien que la rédaction de l'article 7 mérite quelque peu d'être remaniée par la Haute Assemblée.
S'agissant des parachutes dorés, la définition des conditions précises permettant l'attribution de la rémunération, des indemnités et des avantages d'un dirigeant, lorsqu'il quitte sa fonction, est nécessaire pour moraliser et assainir les pratiques de la vie des entreprises.
On l'a dit et redit, trop de dirigeants ont pu bénéficier à leur départ de parachutes dorés alors même qu'ils avaient fait courir des risques souvent inconsidérés à l'entreprise ou avaient contribué à dégrader la situation financière de celle-ci.
Les députés ont légitimement subordonné l'attribution de parachutes dorés à la notion de « performance ». La modification majeure qui a été apportée porte sur le fait que sont jugées à la fois la performance du dirigeant lors de son mandat et celle de l'entreprise pendant la même période.
Pourtant, la notion de performance reste trop floue dans le projet de loi que nous examinons et ne repose sur aucun critère prédéfini. Dans les journaux financiers, le terme « performance » peut être employé pour qualifier le manque de performance d'une entreprise. L'adjonction d'un adjectif qualificatif est systématique : on parle de performance « suffisante », « insuffisante », « piteuse », pour ne citer que ces occurrences. La performance reste donc le mot clef ; mais que recouvre cette notion ?
Le présent amendement a donc pour objet de rattacher la performance de l'entreprise à des objectifs quantifiables, comme ses résultats économiques. Les rémunérations et les indemnités des dirigeants seraient donc attribuées au regard de la performance économique réelle de l'entreprise et de la croissance obtenue pendant le mandat de son dirigeant.
M. le président. L'amendement n° 176, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le respect de la convention fait l'objet d'un examen annuel par le conseil d'administration qui peut en modifier la portée. Aucune modification de cette convention ne peut avoir lieu sans avis du comité d'entreprise et d'un comité d'audit indépendant.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Monsieur le président, l'argumentaire que je vais développer concernera également l'amendement n° 177.
Si l'on veut réellement encadrer les conditions d'octroi des parachutes dorés ou retraites-chapeaux au président du conseil d'administration, il faut s'en donner les moyens.
Cette rémunération fait déjà l'objet d'un encadrement, puisqu'elle est prévue par les conventions réglementées, mais cet encadrement est faible.
En l'espèce, il importe, selon nous, de préciser quels sont les critères d'évaluation de la gestion du chef d'entreprise.
Par ailleurs, il ne nous semble pas pertinent de réserver cette évaluation au seul conseil d'administration. Il faut faire intervenir tous les stakeholders, c'est-à-dire tous les acteurs de l'entreprise, tous ceux qui sont concernés par cette convention, à savoir les salariés et les actionnaires.
Les salariés, représentés au comité d'entreprise, doivent donner leur avis sur la gestion de la société dont ils sont les acteurs principaux.
Enfin, les actionnaires, à travers l'avis d'un comité d'auditeurs indépendants, doivent, eux aussi, être tenus informés.
Il s'agit bien d'instaurer une totale transparence et de faire en sorte que non seulement le conseil d'administration, mais aussi l'ensemble des actionnaires, à travers un comité d'audit, et surtout les salariés, à travers le comité d'entreprise, puissent donner leur avis sur cette appréciation de la performance.
Ces deux amendements ont donc pour objet de combler un vide du texte actuel en ce qui concerne la performance et son appréciation.
M. le président. L'amendement n° 177, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La convention portant sur la rémunération du président du conseil d'administration fixe les critères de bonne gestion de l'entreprise. Le président du conseil d'administration s'engage à faire ses meilleurs efforts pour atteindre l'objectif fixé par la dite convention. Cette convention ne peut être signée sans avis du comité d'entreprise et d'un comité d'auditeurs indépendants.
Cet amendement vient d'être défendu.
L'amendement n° 182, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le troisième alinéa du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La convention sur la rémunération du président du directoire fait l'objet, chaque année, et, ou après toute modification, d'une publication adressée à tous les actionnaires et à l'Autorité des marchés financiers.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Mon explication vaudra également pour l'amendement n° 175.
Il importe de faire en sorte que tout élément portant sur la rémunération du président du conseil d'administration ou de surveillance fasse l'objet, chaque année, et/ou après toute modification, d'une publication adressée à tous les actionnaires et à l'AMF.
Les amendements nos 182 et175 visent bien à apporter de la transparence et à faire en sorte qu'une information soit donnée à l'ensemble de la sphère financière sur la rémunération du président du conseil d'administration ou de surveillance, donnée éminemment importante, dès lors que ladite rémunération peut s'élever parfois à des millions et des millions d'euros.
M. le président. L'amendement n° 175, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le quatrième alinéa du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La convention sur la rémunération du président du conseil d'administration fait l'objet, chaque année et après toute modification, d'une publication adressée à tous les actionnaires et à l'Autorité des marchés financiers.
Cet amendement vient d'être défendu.
L'amendement n° 262 rectifié, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
I. Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour compléter l'article L. 225-42-1 du code de commerce par les mots :
, ainsi que des engagements répondant aux caractéristiques des régimes collectifs et obligatoires de retraite et de prévoyance visés à l'article L. 242-1 du même code
II. Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour compléter l'article L. 225-90-1 du code de commerce par les mots :
, ainsi que des engagements répondant aux caractéristiques des régimes collectifs et obligatoires de retraite et de prévoyance visés à l'article L. 242-1 du même code
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale vise les régimes de retraite complémentaire collectifs et obligatoires.
Étant collectifs, par définition, ces régimes ne peuvent pas être individualisés et doivent viser soit l'ensemble du personnel salarié d'une entreprise, soit une catégorie objective de ce personnel, aux termes de la circulaire du ministre de la santé du 25 août 2005. Or, selon cette circulaire, « les mandataires sociaux ne constituent pas en tant que tels une catégorie objective de personnel », à l'inverse des « cadres dirigeants » de l'entreprise, définis par l'article L. 212-15-1 du code du travail. Seuls ces derniers peuvent donc faire l'objet d'un accord collectif en ce domaine. Dans un tel cas, les mandataires sociaux sont bénéficiaires du régime prévu et ne peuvent en être exclus.
Dans sa rédaction actuelle, le dispositif de « conditionnalité de performance », prévu par l'article 7, pourrait s'appliquer aux régimes de retraite collectifs de ce type dont bénéficient les mandataires sociaux. Mais ces régimes ne pouvant être individualisés, les conditions de performance que fixerait le conseil d'administration devraient être imposées à l'ensemble des cadres dirigeants. La clause de mise en conformité dans le délai de dix-huit mois, prévue par le projet de loi, imposerait également de renégocier l'ensemble des régimes concernés, qui ont un caractère contractuel.
Or, imposer des conditions de performance aux rémunérations différées de l'ensemble des cadres dirigeants ne paraît pas être l'objectif visé par le Gouvernement lors de la rédaction de l'article 7. En outre, compte tenu des conditions de leur élaboration, notamment en termes d'égalité de traitement des bénéficiaires dans leur catégorie, les régimes de retraite collectifs de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ne me semblent pas s'apparenter à des parachutes dorés.
C'est pourquoi le présent amendement vise, dans un souci de bonne compréhension, à exclure lesdits régimes du champ d'application de l'article 7.
M. le président. L'amendement n° 241, présenté par M. Bourdin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du dernier alinéa du I de cet article par les mots :
, ainsi que des engagements de retraite répondant aux caractéristiques des régimes collectifs et obligatoires relevant de l'article L. 242-1 du même code
La parole est à M. Joël Bourdin.
M. Joël Bourdin. L'amendement que vient de défendre M. le rapporteur général répond tout à fait à mes préoccupations. Par conséquent, je retire l'amendement n° 241 et j'annonce d'ores et déjà que je retire également l'amendement n° 242.
M. le président. Les amendements n°s 241 et 242 sont retirés.
L'amendement n° 218, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Dans l'article L. 225-90-1 du même code, après les mots : « postérieurement à celles-ci, » sont insérés les mots : « le sont lors de l'élection ou de la nomination de celui-ci et ».
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Il s'agit de faire en sorte que les conditions de rémunération différée des dirigeants d'entreprise soient définies dès leur élection ou leur nomination et mises en oeuvre au moment où ils quitteront leurs fonctions.
La définition ex ante des conditions de rémunération différée des dirigeants est nécessaire pour moraliser et assainir les pratiques de la vie des entreprises.
Dans le régime qui prévaut aujourd'hui, les parachutes dorés peuvent être négociés par les dirigeants dès le début de leur mandat, mais aussi en cours de mandat, voire au moment où ils quittent leurs fonctions.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale fixe - et c'est légitime - des conditions de performance à l'attribution desdits parachutes afin de dissuader toute rémunération qui pourrait être attribuée alors que le dirigeant aurait dégradé la situation de l'entreprise.
Pourtant, cette notion de performance reste floue et, surtout, est à l'unique discrétion de l'entreprise. La rédaction actuelle pourrait donc laisser au conseil d'administration ou de surveillance ou à l'assemblée générale toute latitude pour définir et valider des critères de performance très peu de temps avant une cessation anticipée de fonctions : la réalisation d'objectifs indispensables à la rémunération du dirigeant serait donc mesurée à partir de critères trop récents et l'article serait ainsi vidé de toute portée.
M. le président. L'amendement n° 188, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. - Dans le deuxième alinéa du III de cet article, remplacer les mots :
Sont interdits
par les mots :
Seuls sont autorisés
II. - En conséquence, dans le même alinéa, remplacer les mots :
le bénéfice n'est pas subordonné
par les mots :
le bénéfice est subordonné
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. La présentation de cet amendement vaudra également pour les amendements nos 174, 189, 187, 183 et 184.
Le projet de loi définit les modalités de rémunération des dirigeants tant dans le cas du conseil d'administration traditionnel que dans celui du directoire.
Dans notre esprit, il faut que la performance soit définie de façon beaucoup plus claire qu'elle ne l'est dans la formulation actuelle. Une convention doit également préciser les modalités de fonctionnement à l'égard du dirigeant ou des membres du directoire. Comment vont-ils devoir rendre les comptes ?
Il convient de mieux préciser le rôle des uns et des autres dans la définition de la performance, en particulier des salariés et des actionnaires. Comment interviennent-ils ? Ont-ils leur mot à dire ? Selon moi, la réponse est oui.
La transparence doit être la plus totale quant à la fixation de ces modes de fonctionnement et de rémunération. L'ensemble de la sphère financière et l'AMF doivent donc être informées.
Tel est l'objet des six derniers amendements que mon groupe a déposés sur l'article 7.
M. le président. L'amendement n° 174, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du III de cet article, après le mot :
avantages
insérer les mots :
de toute nature
L'amendement n° 189, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du III de cet article, après les mots :
subordonné au respect
remplacer le mot :
de
par le mot :
des
L'amendement n° 187, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du III de cet article, remplacer les mots :
conditions liées aux performances
par les mots :
critères de bonne gestion de l'entreprise
L'amendement n° 183, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le respect de la convention fait l'objet d'un examen annuel par le conseil de surveillance qui peut en modifier la portée. Aucune modification de cette convention ne peut avoir lieu sans avis du comité d'entreprise et d'un comité d'audit indépendant.
L'amendement n° 184, présenté par MM. Marc, Charasse, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La convention portant sur la rémunération du président du directoire fixe les critères de bonne gestion de l'entreprise. Le Président du directoire s'engage à faire ses meilleurs efforts pour atteindre l'objectif fixé par la dite convention. Cette convention ne peut être signée sans avis du comité d'entreprise et d'un comité d'auditeurs indépendants.
Ces amendements viennent d'être défendus.
L'amendement n° 242, présenté par M. Bourdin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du dernier alinéa du III de cet article par les mots :
, ainsi que des engagements de retraite répondant aux caractéristiques des régimes collectifs et obligatoires relevant de l'article L. 242-1 du même code
Je rappelle que cet amendement a été précédemment retiré par son auteur.
L'amendement n° 261, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :
Au début du VI de cet article, remplacer les mots :
Indépendamment de leur application de plein droit à Mayotte, sont
par le mot :
Sont
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° 261 est rédactionnel.
La commission est défavorable à l'amendement n° 87 de suppression.
L'amendement n° 88 tend à intégrer la rémunération des dirigeants à la négociation salariale. Il ne paraît pas conforme aux principes du droit du travail, que ce projet de loi ne doit pas tendre à modifier. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 232 vise à redéfinir le régime des parachutes dorés. Or il est déjà largement satisfait par le droit en vigueur, notamment par l'article L 225-42-1 du code de commerce.
Par ailleurs, l'esprit de l'article 7 est de s'en tenir à un dispositif-cadre qui respecte la liberté d'organisation des entreprises, notamment pour ménager les impératifs de recrutement et pour que les entreprises françaises demeurent attractives en vue d'attirer des talents et des cadres de haut niveau.
Enfin, cet amendement ne couvre pas le cas des sociétés dualistes.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 185 vise à apporter une modification rédactionnelle qui semble inutile et même contraire à l'esprit de l'article V de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 aux termes duquel « tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché ». La commission y est donc défavorable.
L'amendement n° 181 tend à introduire une précision qui paraît superflue : avis défavorable.
L'amendement n° 157, qui a pour objet de plafonner la rémunération des dirigeants, est proprement révolutionnaire. (Rires.) Dès lors, il ne correspond pas à la philosophie du projet de loi. La commission émet donc un avis défavorable.
M. Guy Fischer. C'est la lutte finale !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° 180 vise à introduire une modification rédactionnelle qui n'a pas convaincu la commission. Par conséquent, elle émet un avis défavorable.
L'amendement n° 179 tend à préciser les conditions de performance du dirigeant subordonnant l'attribution des parachutes dorés. Cette précision nous semble superflue, compte tenu du texte adopté par l'Assemblée nationale, qui se réfère bien à des performances appréciées au regard de celles de la société.
M. Guy Fischer. C'est détestable !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il doit bien y avoir une correspondance entre les performances du dirigeant et celles de l'entreprise. En outre, cet amendement comporte des défauts techniques. La commission y est défavorable.
L'amendement n° 178 a pour objet d'étendre la conditionnalité de performance aux rémunérations différées. Mais l'article L. 225-42-1 du code de commerce, que tend à compléter l'article 7, ne concerne que les mandataires sociaux. Or le champ d'application de l'amendement susvisé semble différent. Sa rédaction pose donc un problème. Cet amendement, de surcroît, ne vise pas les sociétés dualistes. Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 219 tend à préciser la nature des conditions de performance subordonnant les parachutes dorés.
Sur le fond, il reflète une préoccupation légitime. Parler des résultats économiques ou de la croissance d'une entreprise est plus précis que de parler des performances de cette entreprise.
Cette terminologie est peut-être mieux adaptée, sous réserve d'entendre lato sensu la notion de « résultats économiques », afin de ne pas en exclure la dimension financière.
Pour autant, la rédaction proposée par cet amendement ne remettrait pas en cause la définition très ouverte qui est nécessaire en la matière, le législateur n'étant sans doute pas le mieux placé pour fixer a priori les critères de performance en fonction desquels le bilan des bénéficiaires de parachutes dorés devra être établi, et les conseils d'administration ou de surveillance, contrôlés par l'assemblée générale, devant pouvoir s'acquitter de cette responsabilité.
Telle est l'articulation retenue par le texte de loi ; la commission des finances la trouve excellente.
Sur la forme, l'amendement se rapporte au seul cas des sociétés à conseil d'administration et na pas été assorti d'un amendement de coordination pour le cas des sociétés dualistes.
Sur cet amendement n° 219, la commission des finances souhaite donc entendre l'avis du Gouvernement.
L'amendement n° 176, qui vise à modifier le régime des conventions de parachutes dorés, paraît à la commission largement superflu.
En effet, en application de l'article L. 225-42-1 du code de commerce et du régime des conventions réglementées, issu, notamment, de la loi sur les nouvelles régulations économiques de 2001, le conseil d'administration doit donner son autorisation préalable aux parachutes dorés.
La commission, estimant que cet amendement ne changerait pas grand-chose au droit existant, y est défavorable.
Il en va de même concernant l'amendement n° 177, relatif au régime des parachutes dorés du président du conseil d'administration : il ne nous semble pas que cet amendement modifie de façon significative le droit existant.
Le conseil d'administration, qui aura fixé en amont les conditions de performance requises, devra, selon l'article 7, vérifier que le bénéficiaire y a satisfait préalablement à l'ouverture du parachute, de telle sorte que ce parachute puisse ensuite remplir son office et l'intéressé... atterrir avec la douceur souhaitée. (Sourires.)
L'amendement n° 182, relatif à la publicité de la rémunération du président du directoire, appelle les mêmes observations.
J'ajoute que les dispositions visées sont, en réalité, déjà régies par l'article L. 225-102-1 du code de commerce et qu'il existe d'ores et déjà une obligation de publicité visant les éléments de rémunération et avantages de toute nature versés aux mandataires sociaux de sociétés cotées, à travers une mention obligatoire au rapport annuel de la société.
Les auteurs de cet amendement ayant satisfaction, ils devraient le retirer. En tout état de cause la commission y est défavorable.
L'amendement n° 175, qui vise, lui, le président du conseil d'administration est tout aussi satisfait par le droit existant : la commission émet le même avis.
L'amendement n° 218 est relatif à la fixation ex ante des conditions de performance subordonnant les parachutes dorés.
La question soulevée est légitime : la rédaction actuelle de l'article 7 pourrait laisser au conseil d'administration ou de surveillance, sous le contrôle, toutefois, de l'assemblée générale, toute latitude pour définir et valider des critères de performance très peu de temps avant la cessation de fonctions d'un dirigeant.
Dans cette hypothèse, le constat de la réalisation de ces objectifs, par le conseil d'administration, revêtirait un caractère purement formel.
Lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale, notre collègue député Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques - et par ailleurs fils de notre regretté collègue Martial Taugourdeau, dont nous gardons un souvenir très précis et très amical -, a soulevé cette question et a présenté un amendement similaire. Celui-ci amendement a fait l'objet d'un avis défavorable de la commission des finances et du Gouvernement en considération du caractère « extrêmement limité » du risque encouru.
Madame la ministre, il serait bon que vous nous apportiez des précisions complémentaires à cet égard, afin d'apporter les éclaircissements nécessaires quant à la volonté du législateur.
Au demeurant, je note que le présent amendement se rapporte au seul cas des sociétés dualistes et n'a pas été assorti d'un amendement de coordination pour le cas des sociétés à conseil d'administration.
Les amendements nos 188, 174, 189, 187, 183 et 184 se rapportent au cas des sociétés dualistes et sont coordonnés respectivement avec les amendements nos 185, 181, 180, 179, 176 et 177, relatifs, eux, aux sociétés ayant un conseil d'administration. Ils visent à apporter une modification rédactionnelle qui ne semble pas utile à la commission. L'avis de cette dernière est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Avant de donner l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements, j'apporterai quelques précisions sur l'article 7.
Je tiens à attirer l'attention de la Haute Assemblée sur le premier alinéa et le quatrième alinéa.
Le Gouvernement a tenu à préciser que les éléments de rémunération, les indemnités, les avantages qui sont consentis à des mandataires sociaux doivent l'être en rapport avec leurs performances, appréciées à l'aune des réalisations de la société.
Une telle disposition n'existait nulle part auparavant, ni dans le droit des sociétés, ni dans le droit du commerce.
Le Gouvernement innove donc et ajoute, par le biais de cet article 7, une contrainte particulière, qui lui paraît doublement justifiée : d'une part, par le nombre d'abus constatés, dont, mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous êtes fait l'écho, et qui ne réjouissent personne, ni à droite, ni à gauche ; d'autre part, parce que les stakeholders ont, comme vous l'avez indiqué, monsieur Marc, une exigence de responsabilité sociale, d'éthique, de moralité de plus en plus grande.
Certains prétendent que cet article 7 est vide, qu'il ne s'agit que d'un écran de fumée. Je leur objecterai que le paragraphe I débute par les mots « Sont interdits » et que, dans le quatrième alinéa du même paragraphe, est prévue une nullité de plein droit : « Tout versement effectué en méconnaissance des dispositions du présent alinéa est nul de plein droit.. » Ce sont là deux dispositions juridiquement très contraignantes, qui donnent un signal fort aux conseils d'administration ou aux conseils de surveillance.
Les chefs d'entreprise établis à l'étranger auxquels est adressée, à longueur de discours et de délibérations, l'invitation de venir en France investir, entreprendre et développer de l'activité, répondent tous la même chose : ils veulent de la liberté, de l'espace, et moins d'« impôt-papiers ».
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement va donner un avis défavorable sur tous ceux des amendements qui visent à restreindre la liberté de l'entreprise. C'est au conseil d'administration ou au conseil de surveillance, non au comité d'entreprise, de fixer les règles du jeu au détail près, selon les résultats d'exploitation, les performances réalisées en matière de recherche et de développement.
Ces amendements, bien que présentant un intérêt, ne se justifient pas aux yeux du Gouvernement, qui souhaite introduire un principe de moralité, d'éthique, de bonne gouvernance, mais n'entend certainement pas substituer le législateur à l'organe qui règle la vie d'une société et, en particulier, apprécie les performances de ses dirigeants.
Le Gouvernement n'est, bien sûr, pas favorable à l'amendement n° 87, qui vise à supprimer l'article.
L'amendement n° 88 vise à intégrer les revenus dans la négociation salariale. Comme je l'ai dit tout à l'heure, l'appréciation de la rémunération est de la compétence du conseil d'administration, non du comité d'entreprise ou des organisations syndicales représentatives des salariés. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
Les amendements nos 232, 185, 180, 179 et 178 ont tous pour objet de définir de manière très précise dans le projet de loi les conditions de performance et les critères de bonne gestion, qu'il s'agisse d'amendements rédactionnels ou d'amendements de fond.
Pour les raisons que j'ai invoquées dans mon introduction, ils sont excessifs au regard du principe de liberté que nous souhaitons voir respecter, en laissant au conseil d'administration ou au conseil de surveillance le soin de se prononcer sur la définition de ces conditions et critères.
L'amendement n° 181 appréhende la notion d'avantages au sens large. Il ne paraît pas particulièrement justifié au regard de la jurisprudence et, toujours au nom de la liberté de l'appréciation, par le conseil d'administration, de la performance des dirigeants de la société, le Gouvernement y est défavorable.
L'amendement n° 157 vise à aligner les rémunérations des mandataires sur celles des cadres dirigeants : le Gouvernement y est défavorable pour la même raison. De surcroît, il souhaite, contrairement aux auteurs de cet amendement, tirer les indemnités vers le haut, et non pas vers le bas.
Sur l'amendement n° 219, qui vise à préciser la notion de performance, vous attendez, monsieur le rapporteur général, l'avis du Gouvernement : toujours en vertu du principe consistant à privilégier la liberté d'appréciation et de détermination des critères de performance par le conseil d'administration, le Gouvernement ne souhaite pas que la clarification de la performance intervienne ainsi dans le texte de loi.
Le Gouvernement est également défavorable aux amendements nos 176 et 177, qui tendent à faire intervenir toutes les parties prenantes et, au premier chef, le comité d'entreprise et les représentants des salariés.
L'intervention du comité d'entreprise est inutile puisque des représentants des salariés participant déjà aux réunions du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, ils sont informés des décisions qui sont prises au sein de ces organes, et que, par ailleurs, en vertu de l'article L. 432-4 du code du travail, un bilan annuel des activités de l'entreprise est soumis au comité d'entreprise.
Les amendements nos 182 et 175 visent à ce que la convention sur la rémunération du président du directoire fasse l'objet, chaque année, et après toute modification, d'une publication adressée à tous les actionnaires et à l'Autorité des marchés financiers.
Ainsi que l'a souligné M. le rapporteur général, en vertu de l'article L. 225-102-1 du code de commerce, ces dispositions doivent déjà obligatoirement figurer dans le rapport annuel. Il est donc inutile d'adresser un document supplémentaire aux actionnaires ou d'en soumettre un autre à l'AMF.
Votre amendement n° 262 rectifié, monsieur le rapporteur général, paraît tout à fait justifié au Gouvernement, qui émet un avis favorable.
Vous visez, en vertu de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, les régimes de retraite applicables à des catégories de salariés. Il serait parfaitement illégitime, vous avez raison, d'exiger d'une catégorie entière de salariés qu'elle se conforme aux obligations ou aux critères de performance qui sont mis en oeuvre pour un ou deux mandataires sociaux.
Sur l'amendement n° 218, qui reprend l'amendement déposé par M. Jean-Charles Taugourdeau à l'Assemblée nationale, le Gouvernement émet un avis défavorable.
S'il est effectivement souhaitable que les critères déterminant la performance du mandataire social soient établis le plus tôt possible après qu'il a pris la direction de la société, il peut arriver que, au cours de son mandat, le mandataire social devienne éligible à des rémunérations particulières, à des clauses exceptionnelles, liées soit à des facteurs conjoncturels, soit à l'amélioration de la situation de la société.
Encore une fois au nom de la liberté du conseil d'administration et du conseil de surveillance, et tout simplement parce que la situation de la société peut évoluer, le Gouvernement n'estime pas souhaitable de fixer impérativement le moment auquel doivent être établis les critères de performance. Nous pensons, au contraire, qu'il convient de laisser jouer une certaine flexibilité à cet égard.
Je tiens cependant à préciser que, pour le Gouvernement, il convient que de tels engagements soient pris bien en amont de la décision de cessation de fonctions, laquelle peut donner lieu, on y a fait allusion tout à l'heure, à des négociations un peu difficiles.
Les amendements nos 188, 174, 189, 187, 183 et 184 visent à transposer les mêmes dispositions aux sociétés dotées d'un conseil de surveillance. Par conséquent, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés à propos des sociétés dotées d'un conseil d'administration, le Gouvernement y est défavorable.
Enfin, monsieur le rapporteur général, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement rédactionnel n° 261, relatif à Mayotte.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote sur l'amendement n° 87.
M. François Marc. Madame la ministre, les réponses que vous nous avez données ne nous ont évidemment pas convaincus.
Lorsque vous nous dites vouloir introduire un principe d'éthique, nous ne pouvons que souscrire à une idée en apparence si généreuse et sympathique. Encore faudrait-il que sa concrétisation dans la rédaction même du texte nous donne à penser que l'introduction de ce principe aura une réelle portée. Or nous avons très clairement le sentiment inverse.
Puisque rien ne change, puisque aucun de nos amendements n'a véritablement de chances d'être adopté, ce texte n'est, à nos yeux, qu'un simple habillage ou, plutôt, qu'un simple window dressing, comme vous dites.
M. François Marc. Pour ne citer qu'un exemple, lorsqu'il est indiqué que les rémunérations doivent être subordonnées « au respect de conditions liées aux performances », cela veut tout dire et ne rien dire !
Le projet de loi a avant tout été critiqué pour ses aspects inégalitaires. Le Gouvernement s'est donc efforcé de lui donner non seulement une dimension prétendument plus sociale, avec l'article 8 sur le revenu de solidarité active, ainsi qu'une dimension prétendument plus éthique, avec cet article 7 sur les parachutes dorés.
Incontestablement, madame la ministre, avec ce genre de formulations, vous n'atteindrez absolument pas le but que vous vous êtes fixé.
Je regrette vivement qu'aucune de nos propositions n'ait trouvé grâce à vos yeux, car, sans leur prise en compte, le texte reste totalement flou et dépourvu de toute portée. C'est la raison pour laquelle nous ne pourrons évidemment pas voter cet article.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Je souhaite expliquer dès à présent mon vote sur l'ensemble des amendements, mais je m'exprimerai également lorsque nous en viendrons au vote sur l'article 7.
Monsieur le rapporteur général, vous avez qualifié, non sans humour, mon amendement de révolutionnaire.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Eh oui !
M. Jean Desessard. Finalement, je ne vois pas en quoi le fait de demander l'alignement de la rémunération des dirigeants sur celle de l'ensemble des salariés de l'entreprise serait révolutionnaire et irraisonnable. Si une telle idée est révolutionnaire, mes chers collègues, c'est que la révolution est vraiment nécessaire ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela n'a été fait qu'en Union soviétique !
M. Guy Fischer. Pas de provocation, monsieur le rapporteur général !
M. Jean Desessard. Par ailleurs, madame la ministre, à vous entendre, plutôt que de baisser les salaires des dirigeants, mieux vaudrait, à la limite, augmenter salaires les plus bas.
Personnellement, je n'ai pas trouvé que les entreprises dans lesquelles les dirigeants gagnaient le plus d'argent offraient également des revenus élevés aux salariés les moins qualifiés. Bien au contraire, la priorité est donnée à l'enrichissement des actionnaires et des dirigeants. À votre avis, qui en fait généralement les frais ? Les petits salaires, bien évidemment !
Il n'y a guère que dans les SCOP que les rémunérations sont liées les unes aux autres, du bas au haut de l'échelle. Le rapport peut ainsi être de 1 à 5 : quand le salarié le moins bien payé gagne 1 000 ou 2 000 euros, le dirigeant le mieux payé touche 5 000 ou 10 000 euros.
En l'espèce, madame la ministre, mes chers collègues, le rapport est de 1 à 366 ! En d'autres termes, le dirigeant gagne le salaire de 366 personnes. Puisque la volonté du Gouvernement est de permettre à tout le monde de devenir propriétaire, ce dirigeant pourra donc acheter 366 appartements !
M. Christian Cambon. Quelle puissante démonstration !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si je salue la volonté du Gouvernement, lequel, à n'en pas douter, est bien inspiré en la matière, je tiens également à rendre hommage à tous ceux qui ont essayé d'améliorer la rédaction de l'article 7.
En définitive, ce qui est ici visé, c'est la rémunération des dirigeants de sociétés cotées qui participent totalement à la mondialisation. Par conséquent, mes chers collègues, malgré toute votre bonne volonté, gardez bien à l'esprit que les dirigeants de ces « sociétés globales », s'ils font partie de ceux qui entendent se soustraire aux principes que nous voulons voir respecter, risquent fort de régler leurs petits problèmes en dehors du cadre juridique national que nous essayons de définir afin d'éviter ces abus de rémunérations.
Madame la ministre, je voterai naturellement l'article 7, mais sans me faire trop d'illusions.
Je souhaite vivement que l'on passe de l'encadrement législatif à une démarche imprégnée d'éthique, de déontologie et de règles de bonne conduite. C'est à mes yeux la seule façon de mettre un terme à de tels abus, et toute forme de transparence y contribuera.
À l'évidence, le texte que nous nous apprêtons à voter n'aura pas d'effet sur les diverses filiales d'un groupe qui se trouvent à l'étranger.
De ce constat, il convient de tirer une autre conséquence : tout excès dans notre législation nationale risque d'entraîner la délocalisation d'un certain nombre de sièges sociaux.
Puisque le nom de M. Forgeard a été cité tout à l'heure, je finirai par cette interrogation : à votre avis, mes chers collègues, où est domiciliée la société qui l'employait ?
M. Guy Fischer. À Amsterdam !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous n'avons pas reconquis la République batave et ses habitants n'ont pas gardé un très bon souvenir du roi Louis ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° 219 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les dispositions de l'article 7 me semblent très raisonnables et de nature à responsabiliser les organes sociaux des entreprises. À mon sens, il n'est pas possible d'aller plus loin.
M. le président de la commission des finances l'a rappelé, cet article est d'application territoriale. Or, qu'on le veuille ou non, nous vivons dans un monde où les systèmes juridiques sont en compétition.
Dans ces conditions, si nous décidions d'infliger aux entreprises ayant leur siège social en France des charges, des procédures et des méthodes dont le caractère s'avérait par trop dissuasif, la réponse serait immédiate, car il est si simple, dans le monde d'aujourd'hui, de changer le lieu du siège social, et donc le droit applicable.
M. Robert del Picchia. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. À cet égard, madame le ministre, le Gouvernement a élaboré un dispositif qui évite à la fois le Charybde du « n'y a qu'à », des bonnes intentions, des mesures purement virtuelles, et le Scylla des contraintes trop défavorables à la compétitivité de notre pays.
Du reste, pour les dirigeants qui se montreraient indélicats dans leur comportement, pour ceux qui ne comprendraient pas que le fait de parvenir en haut de l'échelle sociale donne des devoirs à l'égard des autres et pas seulement des droits, bref, pour tous ceux qui dépasseraient la mesure, il y a, à mon sens, d'autres sanctions beaucoup plus simples et plus efficaces que la loi, à savoir celle de la transparence et, par voie de conséquence, celle de l'opinion.
Certains dirigeants, à l'instar de celui qui a été cité tout à l'heure, parce qu'ils ont manqué de bon sens et sont allés au-delà de la limite acceptable, en arrivent ainsi, après une longue carrière jalonnée pourtant de brillantes étapes, à être désignés à la vindicte publique. Croyez-moi, mes chers collègues, voilà la vraie sanction, et elle sera ressentie jusqu'au bout !
Je terminerai mon propos en faisant allusion à un événement tout récent. Nombre d'entre nous ont en effet eu la chance d'assister à l'inauguration de la galerie des Glaces, brillamment restaurée grâce à l'apport financier de l'entreprise Vinci.
M. Yann Gaillard. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Eh bien, mes chers collègues, qui a cité à cette occasion le nom de l'ancien président de cette entreprise qui était à l'origine de l'opération de mécénat ? Personne !
La sanction, la vraie sanction, elle est là !
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote sur l'article 7.
M. Bernard Vera. Madame la ministre, pour étayer notre explication de vote, je me permettrai de vous citer une nouvelle fois. À la question de savoir comment doit s'appréhender la notion de performance contenue dans cet article, voici ce que vous avez répondu : « La relation entre le dirigeant et les instances de l'entreprise est régie par un contrat, et c'est dans ce cadre que peut être défini un panier de critères de performances. (...) Le conseil d'administration doit rester souverain en la matière, pour décider au cas par cas, avec l'approbation des actionnaires dont il est l'émanation. Il n'appartient pas au régulateur qu'est l'État ou au législateur de gouverner la relation individuelle entre un dirigeant et sa société. L'objet de cet article 7 est d'introduire de la performance en fixant un cadre général. »
Tout est dit ! C'est le conseil d'administration qui décide, « au cas par cas », de la grille d'évaluation de l'action et de la gestion du dirigeant concerné : on fixe simplement un cadre, à l'intérieur duquel chacun pourra appréhender les choses à sa manière. Nous craignons fort, dans ces conditions, que cet article ne soit totalement inopérant.
Dès lors que l'assemblée générale des actionnaires aura voté le rapport financier et le rapport de gestion présentés par le cadre dirigeant, qu'est-ce qui pourra bien empêcher ce dernier de faire valoir telle ou telle demande ?
À qui fera-t-on croire que les administrateurs de nos grands groupes, qui constituent bien souvent une équipe de dirigeants occupant des postes interchangeables au sein de divers conseils d'administration, vont se sanctionner les uns les autres, alors même qu'ils sont liés par une solidarité professionnelle tacite ?
M. Jean Desessard. C'est une caste !
M. Bernard Vera. Faites le tour des patrons du CAC 40, et vous verrez ! Quand l'un est PD-G d'une entreprise, l'autre en est administrateur, et vice versa.
Foin d'hypocrisie ! Nous ne voterons pas cet inutile article 7, car il n'est qu'une trompeuse réponse au scandale des rémunérations de PD-G incompétents.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, moi non plus, je ne voterai pas cet article, car il est tout à fait insuffisant et ne résout pas le problème en cause.
Comme l'a dit mon collègue du groupe CRC, les dirigeants des grands groupes forment une caste dont les membres se rencontrent régulièrement dans les divers conseils d'administration, se tenant les uns les autres par la barbichette : je t'augmente tes jetons de présence, tu m'augmenteras mon parachute, etc. Et tout cela sans rendre le moindre compte à quiconque, qu'il s'agisse de la société ou de leurs salariés. En quoi le fait que le conseil d'administration fasse preuve d'un peu plus de transparence changera-t-il cet état de fait ?
M. Marini a fait une intervention politique et expliqué que cette situation, qui n'est pas morale, était liée à la mondialisation. Je veux bien l'entendre. Il n'est pas moral, en effet, qu'une personne soit payée 366 fois plus qu'une autre ! Ou alors nous ne partageons pas la même conception de la moralité et de l'éthique.
M. Marini, qui ne s'est pas placé sur le terrain de la morale, a argué du fait que la mondialisation imposait d'être performant et d'attirer les entreprises sur notre territoire afin de créer des emplois. Mais je ne suis pas certain que cela réussisse et que le fait de payer un dirigeant 400 fois plus que ses salariés profite à ces derniers et à la société. Au contraire, cela appauvrit tout le monde et n'enrichit personne en dehors de lui.
Comment espérer acheter un appartement quand un autre acquéreur dispose de 400 fois plus de moyens que vous ? Même si vos revenus augmentent un peu, ce sera très difficile !
Le salaire d'un dirigeant n'a pas d'effet d'entraînement sur celui de ses salariés. L'enrichissement de quelques-uns favorise, au contraire, l'appauvrissement de nombreux autres. (Brouhaha.)
M. Christian Cambon. Alors, quelle est la solution ?
M. Jean Desessard. La réduction de la hiérarchie des salaires !
M. le président. La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Je retire de la discussion de l'article 7 la conviction renforcée qu'il ne sert à rien, ...
Mme Marie-France Beaufils. C'est de l'affichage !
M. François Marc. ... si ce n'est à répondre à l'opinion, en affichant une volonté de moralisation de la vie des affaires, et à se donner bonne conscience. Cet article n'a aucune portée réelle, et les propos du président de la commission des finances et du rapporteur général sur la mondialisation le confirment encore.
Nous voterons donc contre cet article qui, en outre, n'a pas sa place dans ce projet de loi.
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous remercie de votre patience et tiens à m'excuser de vous avoir pressés, mais nous devions en finir avec l'examen de l'article 7 avant la suspension de séance. M. Martin Hirsch doit en effet nous rejoindre vers vingt-deux heures pour la suite de l'examen du projet de loi.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Puisque le débat sur ce projet de loi va désormais se poursuivre sans moi, je tiens, en cet instant, à remercier les présidents de séance, le rapporteur général et le rapporteur de la commission des affaires sociales, le président de la commission des finances et tous les sénateurs, de la majorité et de l'opposition, qui ont eu le courage de rester en séance, de jour comme de nuit, pour accomplir ce travail long et laborieux.
M. François Marc. C'était un plaisir !
Mme Christine Lagarde, ministre. Je remercie également tous les collaborateurs du Sénat et du Gouvernement.
Grâce à vous tous, nous avons pu terminer l'examen de cette partie du projet de loi à une heure raisonnable. (Exclamations amusées.) J'ai bien conscience que ce propos est un peu égoïste, car, pour vous, la discussion est encore loin de sa fin ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Merci à vous, madame le ministre !
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Conformément à l'usage et avant que Mme le ministre nous quitte, car bien des dossiers l'attendent, je veux lui exprimer toute la reconnaissance de la commission des finances pour le partenariat qui s'est noué entre nous et pour les échanges précis, fructueux et amicaux que nous avons eus.
Je la remercie de toutes les réponses qu'elle a bien voulu apporter au Sénat, de sa bienveillance et surtout du soin qu'elle a apporté, sur chaque sujet, à aller au fond des choses. Aucune de ses interventions n'était de pure forme et elle s'est toujours efforcée d'aller au-devant de nos préoccupations.
Madame le ministre, nous avions déjà eu le plaisir de débattre avec vous lorsque vous étiez ministre délégué au commerce extérieur. Vous avez été appelée, depuis, à de plus hautes responsabilités et c'était, pour vous, le premier texte de cette législature. Cela a été pour nous un grand privilège de passer ces journées et ces soirées avec vous.
J'adresse également mes remerciements à l'ensemble de votre équipe, avec laquelle nous avons bien travaillé, pendant la séance publique et en dehors de celle-ci.
Nous avons réussi à trouver des ajustements tout à fait satisfaisants, et ce projet de loi, premier texte financier de la législature, sera un excellent texte ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures quarante, est reprise à vingt-deux heures quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
7
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des finances m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
8
TRAVAIL, emploi et pouvoir d'achat
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.
Dans la suite de la discussion, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer un article additionnel avant l'article 8.
Articles additionnels avant l'article 8
M. le président. L'amendement n° 95 rectifié, présenté par M. Fischer, Mme David et Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Avant l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 59 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003 1311 du 30 décembre 2003) est abrogé.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus, le montant de la dotation globale de fonctionnement défini à l'article L. 1613 1 du code général des collectivités territoriales est relevé à due concurrence.
III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du II ci-dessus, les taux prévus à l'article 200 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, la loi du 18 décembre 2003 a entériné le transfert de la gestion du RMI de l'État au département.
Nous nous étions à l'époque opposés à une telle mesure.
En effet, nous estimions et estimons toujours que la décentralisation du RMI est une profonde injustice, non seulement parce qu'elle rompt le lien qui, par la Constitution, garantit à nos concitoyens l'attention et la solidarité nationale auxquelles ils ont droit, mais aussi parce qu'elle permettra demain une prestation à géométrie variable, selon la richesse des départements ou la politique qu'ils mènent.
Ainsi, un président de conseil général peut décider quasiment seul - il désigne en effet, lui ou son exécutif, les membres des conseils départementaux d'insertion et des commissions locales d'insertion - de la suspension de l'allocation. Le risque est alors d'assister au glissement progressif d'un dispositif universel vers une aide sociale départementale, donc facultative, susceptible, à terme, d'être remise en cause. La création du RSA qui nous réunit ce soir s'inscrit dans cette logique.
Rappelons également que cette première application de la décentralisation impliquait aussi des transferts de personnels de l'État vers les départements.
Or le transfert du RMI ne s'est pas accompagné des moyens adaptés permettant aux départements d'exercer leurs responsabilités dans toute leur plénitude. La loi du 18 décembre 2003 prévoyait pourtant qu'une fraction de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, leur serait octroyée pour assurer le financement du dispositif.
Dès le premier exercice, les recettes ont été inférieures aux charges liées au versement de l'allocation. Il en est résulté un déficit proche de 430 millions d'euros. Aujourd'hui, ce déficit approche le milliard d'euros.
Ce phénomène s'explique par la forte croissance du nombre de RMIstes. Ainsi, depuis le 1er janvier 2004, le nombre d'allocataires a augmenté de 30 % en Seine-Saint-Denis, ce qui représente 10 000 allocataires de plus entre décembre 2003 et novembre 2005.
Cette hausse est en partie imputable à la dégradation du marché du travail, dégradation que vous n'avez cessé de poursuivre. Nous aurons l'occasion d'en discuter.
Cette hausse résulte également de la réforme de l'UNEDIC, qui a entraîné une augmentation du nombre de chômeurs non indemnisés et le basculement plus fréquent et plus précoce de demandeurs d'emploi vers le dispositif du RMI.
L'enquête de l'UNEDIC que vient de révéler Les Échos sur la lutte contre la fraude et les abus des chômeurs laisse penser, monsieur le haut-commissaire, que la réforme du contrôle des chômeurs entraînera inévitablement, elle aussi, un basculement presque mécanique vers les minima sociaux.
Aujourd'hui, l'État doit plus de 1 milliard d'euros aux départements pour la gestion du RMI. Ce dispositif coûte 6 milliards d'euros.
Pour toutes ces raisons, nous estimons que l'expérience n'a pas été concluante et que la gestion du RMI doit revenir à l'État.
C'est la raison d'être de l'amendement n° 95 rectifié, qui reprend une proposition de loi que le groupe communiste républicain et citoyen avait déjà faite en ce sens. Elle avait été discutée à l'occasion d'une question orale avec débat. Nous en avions alors longuement débattu avec M. Mercier.
Nous pensons que seule l'abrogation de la loi de 2003 permettrait de redonner pleine compétence à l'État pour mener l'action en faveur de l'insertion des ménages les plus vulnérables, au moment même où certains prônent l'unification des minima sociaux et leur transfert intégral aux collectivités départementales, comme en témoigne ce projet de loi.
Sur le fond, la solution réside dans l'éradication du chômage, ce qui passe par la mise en oeuvre d'une autre politique économique nationale et européenne, fondée sur une sécurité en matière d'emploi et de formation.
Avec quel financement, me demanderez-vous ? Il suffit simplement d'augmenter les ressources publiques, grâce à une fiscalité plus juste et plus efficace. Hélas, les dispositions du projet de loi dont nous discutons depuis mardi vont dans la direction opposée !
Je rappellerai simplement au Sénat que la diminution de l'ISF se chiffrera à 50 milliards d'euros en cinq ans, soit cinq fois le déficit de la sécurité sociale !
Les mesures prévues dans le présent texte, qui sont autant de cadeaux aux plus nantis, coûteront 13 milliards d'euros au budget national. Ces mesures sont-elles vraiment des priorités ?
Bien sûr, ces sommes sont à rapporter aux 25 millions d'euros dont vous bénéficierez, monsieur le haut-commissaire, pour expérimenter le revenu de solidarité active. Vous me répondrez que vous avez bien souvent entendu ce type d'argument ! En tout cas, cela montre combien le fait de traiter ce dossier dans le cadre du présent projet de loi pose problème. Je le dis franchement : j'aurais souhaité que l'on parlât d'une manière plus naturelle de l'ensemble des minima sociaux, qui sont au nombre de dix. Nous aurions alors pu avoir un débat de fond.
Le coût de la diminution de l'impôt sur les sociétés s'élèvera, quant à lui, à 450 millions d'euros. C'est justement ce que devait l'État aux conseils généraux en 2004 pour le RMI !
Vous me direz que je mène encore une bataille d'arrière-garde, mais le problème aujourd'hui, c'est l'émergence, depuis cinq à dix ans, de ceux que l'on appelle les travailleurs pauvres. En France, aujourd'hui, on peut avoir un emploi et ne pas pouvoir faire face aux besoins essentiels dans la vie.
Nous souhaitons donc profiter de ce débat pour poser, avec cet amendement, les problèmes de façon plus générale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je comprends que Guy Fischer exprime un désaccord de fond et une opposition politique s'agissant du transfert du RMI aux départements tel qu'il a été adopté en 2003.
Cela étant dit, son amendement ne peut techniquement être adopté puisqu'il vise à supprimer purement et simplement 5 milliards d'euros de ressources des départements.
Je pense, monsieur le haut-commissaire, que vous aurez à coeur de répondre à notre collègue. Pour sa part, la commission des finances émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Monsieur le sénateur, vous avez posé plusieurs questions de fond et exprimé la crainte qu'elles ne soient occultées. Soyez assuré que nous y reviendrons tout au long de l'année.
Vous avez posé la question de la compétence des conseils généraux en matière de RMI. Vous avez posé la question de savoir comment conjuguer leur action avec la solidarité nationale. Enfin, vous avez posé la question de savoir s'il était possible d'infléchir la tendance et de diminuer le nombre de nos compatriotes qui vivent des minima sociaux.
Vous avez également évoqué les inégalités qui pourraient exister entre les départements. Or, même à l'époque où le RMI dépendait de l'État, des aides extralégales étaient à l'origine de différences qui pouvaient être importantes, et pas toujours bien vues, entre les départements.
Je voudrais revenir sur ce que nous faisons. Aujourd'hui, nous essayons de disposer d'instruments objectifs nous permettant de voir comment la solidarité s'exerce d'un département à l'autre, afin de pouvoir revenir à une politique d'ensemble, sans pour autant nier la compétence des conseils généraux pour conduire des politiques actives en matière d'insertion.
Un argument plaide en faveur de la maîtrise par les conseils généraux d'un certain nombre d'instruments, c'est leur réussite. En effet, on a pu voir des conseils généraux, de quelque couleur politique qu'ils soient, réussir à remonter la pente en matière d'insertion, d'activation des dépenses, de création d'emplois. Ce sont sur ces prémisses que nous voulons nous appuyer pour aller plus loin et diminuer le nombre d'allocataires du RMI. Il n'est toutefois pas question de diminuer le montant du RMI ni de s'attaquer aux prestations sociales, bien au contraire. Ce que nous souhaitons, c'est une articulation beaucoup plus saine entre les prestations sociales et les revenus du travail.
Il s'agit donc non pas de revenir sur la décentralisation ou sur son financement, mais de laisser vivre ces expérimentations. Nous reverrons ensuite pendant l'année l'ensemble de ces sujets, comme je m'y suis engagé.
Puis, lorsque nous élaborerons le revenu de solidarité active, dont le but est de nous permettre de ne plus détenir le record d'Europe de l'émiettement des minima sociaux et, par conséquent, du nombre de leurs bénéficiaires, nous déterminerons avec les conseils généraux et les partenaires sociaux qui devra en assumer la responsabilité et les conditions dans lesquelles la solidarité nationale pourra jouer.
Le débat sera donc ouvert, monsieur le sénateur, à partir d'éléments objectifs. Pour ces raisons, en espérant que ma réponse vous aura donné satisfaction, je souhaite que vous retiriez votre amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Fischer, l'amendement n° 95 rectifié est-il maintenu ?
M. Guy Fischer. Oui, monsieur le président, car notre débat concerne bien trop de personnes.
Vous savez que les dix minima sociaux - on en dénombre souvent neuf, mais il faut également compter le revenu de solidarité pour nos compatriotes d'outre-mer - concernent aujourd'hui 3,5 millions d'allocataires, qui vivent dans l'angoisse.
Certes, il y a toujours des fraudes, des abus, contre lesquels un certain nombre de dispositions ont d'ailleurs été prises. Mais, pendant la campagne électorale, on a laissé entendre - cela a confiné pour moi à une chasse aux pauvres - que toute personne bénéficiaire d'un minimum social et ne travaillant pas ne cherchait en fait qu'à profiter du système.
Non, il ne faut pas parler de génération de « fainéants », comme l'extrême droite l'a laissé entendre, expression reprise quelquefois par d'autres. Il y a une réalité qui mérite d'être posée et approfondie.
Une étude concernant les chômeurs a été rendue publique par le quotidien Les Échos dans laquelle on sent également une certaine volonté de stigmatisation de la fraude.
Si M. Mercier était présent, j'aurais dénoncé les mesures de contrôle qui ont été mises en place dans le département du Rhône vendredi dernier et qui laissent supposer que tout bénéficiaire de minimum social est un fraudeur en puissance.
L'étude du contrôle des chômeurs fait apparaître une multiplication à la fois des exclusions définitives, des réductions des allocations de 20 % à 50 % et des exclusions temporaires. En 2006, sur un contrôle de près de 45 000 personnes, il y a eu 29,2 % d'exclusions temporaires, 2,7 % d'exclusions définitives et 25, 3 % de réductions d'allocations, c'est-à-dire 57,2 % de sanctions par rapport à l'ensemble de la population contrôlée.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce ne sont pas des sanctions !
M. Guy Fischer. Cela peut paraître légitime, correspondre à la réparation d'une situation...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il y avait peut-être de véritables abus !
M. Guy Fischer. Mais on peut aussi se demander comment l'UNEDIC a pu laisser perdurer des situations qui n'étaient pas régulières ! En tout cas, nous devons faire très attention à ce que l'on ne stigmatise pas une partie de notre population, notamment celle des quartiers les plus populaires.
M. le président. L'amendement n° 133, présenté par M. Charasse, Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 8, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
I. À compter du 1er janvier 2008, afin de contribuer au financement du revenu minimum d'insertion par les départements, les plus values de recettes constatées annuellement au titre de l'impôt de solidarité fortune sont prélevées sur les recettes de l'État.
Ces sommes viennent abonder les prélèvements sur recettes opérés sur le budget de l'État au profit des départements.
II. Les pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement est dû à l'inventivité de notre collègue Michel Charasse.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Inventivité sans limites !
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président Arthuis, vous avez qualifié le projet de loi dont nous débattons « d'admirable », car il met en rapport les minima sociaux et l'impôt sur la fortune. Par cet amendement, notre groupe vous invite à traduire encore plus concrètement cette mise en rapport entre minima sociaux et ISF.
Je vous rappelle que l'ISF, qui s'appelait alors l'IGF, impôt sur les grandes fortunes, autant que je m'en souvienne,...
Mme Marie-France Beaufils. C'est exact !
Mme Nicole Bricq.... a été créé à l'origine pour financer le revenu minimum d'insertion. Depuis, le système a évolué et, en vertu de la loi du 18 décembre 2003, la gestion du RMI a été transférée aux départements.
Nous savons, comme l'a rappelé notre collègue Guy Fischer, que le transfert n'a pas été opéré dans de bonnes conditions. Alors que les départements n'ont pas la maîtrise de ces dépenses, le déficit cumulé par les conseils généraux au titre du RMI atteint 2,350 milliards d'euros en 2007.
L'État en a pris conscience et a trouvé un certain nombre d'artifices pour résoudre le problème, comme la création du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, dont l'abondement est toujours insuffisant et les modalités d'attribution insatisfaisantes. Ce fonds ne constitue en outre qu'une réponse provisoire puisque, créé pour trois ans, il arrive à terme cette année.
Finalement, l'État n'a jamais prévu de solution structurelle ; c'est la raison pour laquelle nous vous en proposons une.
Quand on considère l'ISF, pour lequel vous nous avez proposé cet après-midi un fléchage en direction des PME, on s'aperçoit que cet impôt a un rendement assez dynamique, contrairement à ce que vous prétendez.
Cette année, ses recettes ont augmenté de 17 % par rapport à 2006, soit une hausse de 800 millions d'euros. Convenez que ces 800 millions d'euros permettraient de couvrir une large part de la dette annuelle de l'État à l'égard des départements au titre du RMI !
Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d'affecter les plus-values de recettes annuelles de l'ISF au financement du RMI. Ainsi, on renouera avec l'esprit d'origine qui rapprochait l'impôt sur les grandes fortunes et les minima sociaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Michel Charasse et Nicole Bricq sont de trop fins connaisseurs du droit budgétaire pour ignorer le principe de l'universalité budgétaire, selon lequel toutes les ressources couvrent toutes les dépenses.
La commission des finances, par définition, est opposée aux affectations, notamment à celle-là. Elle émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Je tiens à dire qu'un fléchage d'une partie de l'ISF est prévu par la disposition à laquelle vous avez fait allusion, madame Bricq, puisqu'elle permettra de faire bénéficier les entreprises d'insertion d'une partie des 50 000 euros de l'ISF - ce qui est une petite révolution.
Pour le reste, je m'en remets à l'expertise de la commission des finances. J'émets donc un avis défavorable.
Mme Nicole Bricq. Les affectations budgétaires sont à géométrie variable !
M. le président. L'amendement n° 158 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Muller, est ainsi libellé :
Avant l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, après les mots : « revenu minimum d'insertion », sont insérés les mots : « est un droit individuel dont le montant ».
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Par cet amendement, nous proposons de faire du RMI un droit « individuel », sans lien avec les revenus du conjoint.
En effet, personne n'a envie de dépendre financièrement de son conjoint, ce qui est pourtant souvent le cas des personnes au chômage. Le droit au RMI doit être le même pour toutes et tous. Pour cela, seule l'individualisation des droits permet une véritable autonomie.
Cependant, l'affirmation que le dispositif du RMI est un droit individuel n'exclut pas la prise en compte de la situation familiale, selon des modalités fixées par décret, afin d'empêcher qu'un bénéficiaire puisse être déclaré simultanément comme personne à charge par son conjoint.
Le 23 janvier dernier, lors de l'examen de la proposition de loi de Valérie Létard portant réforme des minima sociaux, Catherine Vautrin, alors ministre déléguée à la cohésion sociale, avait refusé cette idée au motif que « le RMI ne doit pas se substituer à la solidarité familiale, qui reste l'une des valeurs fondamentales de notre République. »
Nous pourrions discuter de la solidarité familiale ! Je vous signale que les divorces sont nombreux lorsque l'un des conjoints est au chômage. Nous pouvons dire qu'alors la situation familiale des deux personnes est aggravée.
Pour ma part, je ne peux pas accepter que la solidarité familiale soit une excuse permettant à la collectivité de se désengager de son rôle élémentaire de subvenir aux besoins des citoyens. Pour paraphraser l'ex-ministre, je dirai que « la solidarité familiale ne doit pas se substituer aux valeurs fondamentales de notre République », parmi lesquelles figure le devoir de fournir un revenu d'existence à toutes et à tous.
Monsieur le haut-commissaire, êtes-vous d'accord pour que le RMI soit individuel et ne soit pas lié à la situation du conjoint ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Selon l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, toute personne a droit au RMI dès lors qu'elle remplit les conditions suivantes : premièrement, elle réside en France ; deuxièmement, ses ressources n'atteignent pas le montant du RMI ; troisièmement, elle est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d'un ou plusieurs enfants ; quatrièmement, elle s'engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle.
L'amendement qui nous est présenté ne change en aucune manière le mode de calcul de la prestation, qui continuera à varier selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge. Actuellement, selon l'analyse que je viens de rappeler, le RMI est bien un droit individuel, mais le montant de la prestation dépend de la composition du foyer et du nombre de personnes à charge.
Si vous vouliez modifier ce second aspect, il fallait le préciser dans votre amendement. À mon sens, l'amendement ne change rien au droit existant.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par conséquent, dans la logique de votre raisonnement, je ne peux que vous opposer un avis défavorable.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. C'est très juste, et fort bien dit !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Monsieur le sénateur, je serais choqué si le conjoint d'une personne ayant des revenus confortables pouvait bénéficier du RMI,...
M. Christian Cambon. Bien sûr !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire.... au moment où nous cherchons à faire non pas la chasse aux pauvres mais la chasse à la pauvreté.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. Christian Cambon. Ce serait un vrai effet d'aubaine !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J'aurais pu être tenté de croire que M. Marini souscrivait sur le fond à mon amendement. Il suffisait alors de l'adopter, quitte à y apporter les améliorations de forme nécessaires en commission mixte paritaire. (Rires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oh là là ! Vous êtes un sénateur très expérimenté !
M. Jean Desessard. Toutefois, comme une réponse a été donnée sur le fond, je vois déjà se dessiner la position générale du Sénat.
Il me paraît tout de même choquant, dans une société où la solidarité familiale n'est plus la même qu'il y a vingt ou trente ans, que l'on puisse considérer qu'il est facile pour une personne au chômage de demander à son conjoint de l'argent pour s'habiller, pour sortir un minimum, etc.
Vous avez été en contact avec nombre de personnes pauvres...
M. Jean Desessard.... - moi aussi, vous le savez bien, puisque j'ai milité longtemps avec les mouvements de chômeurs - et vous devriez savoir comme moi combien ces personnes trouvent humiliant de demander dix ou vingt euros à leur conjoint, quelles que soient les ressources de ce dernier.
Si vous trouvez que les conjoints qui gagnent plus doivent participer à la solidarité nationale, je suis d'accord, monsieur le haut-commissaire ! Nous avons justement combattu pendant trois jours pour que les personnes qui ont de hauts revenus paient davantage d'impôts. Il suffit donc d'imposer les conjoints qui ont de bonnes situations, et les personnes qui n'ont pas d'argent n'auront pas à souffrir dans leur dignité d'avoir à quémander auprès de leur mari ou de leur femme.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas défendable, n'en rajoutez pas !
M. Guy Fischer. Je voudrais apporter quelques éléments complémentaires pour alimenter la réflexion générale.
La semaine dernière, j'évoquais les décrets parus au mois de mai aux termes desquels, pour obtenir le RMI ou l'API, il fallait pratiquement prouver que l'on ne pouvait prétendre à aucune obligation alimentaire.
Or nous constatons aujourd'hui que certains départements, sous prétexte de lutter contre les fraudes et les abus, font valoir des règles qui rendent l'accès au RMI ou à l'API plus difficile.
Je sais bien que l'obligation alimentaire existe depuis toujours dans nos lois. Mais, prenons l'exemple du conseil général du Rhône, où je siège. Nous avons eu à délibérer la semaine dernière, le 20 juillet, sur la décision du président Michel Mercier visant à faire valoir l'obligation alimentaire pour les demandeurs du RMI ou de l'API, jusqu'à trente-cinq ans.
Il en résulte qu'un jeune qui vit chez ses parents est soupçonné d'être un fraudeur ou de n'avoir besoin du RMI que pour son argent de poche. En outre, cela signifie qu'il pourrait entamer des poursuites judiciaires contre ses parents afin de faire valoir l'obligation alimentaire.
Je ne vous ai pas apporté les délibérations du conseil général, mes chers collègues, afin de ne pas vous importuner.
M. Charles Pasqua. Merci !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous ne sommes pas au conseil général du Rhône !
M. Guy Fischer. Mais ces débats nous poussent vraiment à réfléchir, notamment sur le devenir de la société française et sur les réactions que font naître un certain nombre de situations.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 158 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
Le revenu de solidarité active a pour objectif d'assurer l'augmentation des ressources d'une personne bénéficiaire d'un minimum social qui prend ou reprend un travail, exerce ou accroît son activité afin d'atteindre un revenu garanti qui tient compte des revenus d'activité professionnelle et des charges de famille.
À titre expérimental, le revenu de solidarité active est mis en oeuvre simultanément dans les conditions définies aux articles 9 et 10 de la présente loi pour les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et de l'allocation de parent isolé.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Cet article 8 met en place le revenu de solidarité active, ce dispositif de revenu minimum, promu par l'Agence nouvelle des solidarités actives.
L'objectif clair de ce mécanisme est de réduire d'au moins un tiers en cinq ans le nombre de travailleurs pauvres en France afin d'éradiquer totalement la pauvreté d'ici à 2020.
En 2005, le rapport de la commission présidée par M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté proposait déjà un tel dispositif. Cependant, à l'époque, M. Hirsch était plus ambitieux et prônait un champ d'application beaucoup plus large.
En effet, ce qui nous est proposé aujourd'hui, c'est de limiter le bénéfice de cette mesure aux seuls allocataires du RMI et de l'API sous forme d'une expérimentation. Globalement, ce dispositif concerne 1,4 million de personnes, mais, comme il n'est mis en oeuvre que dans quelques départements, il n'y aura que 90 000 allocataires : 50 000 RMIstes et 40 000 APIstes.
Pourtant, la catégorie des travailleurs pauvres est beaucoup plus vaste. On dénombre en effet 7 millions de travailleurs pauvres. Pour ma part, je considère que 15 millions de personnes se trouvent dans de réelles difficultés, mais je ne vais pas développer ce point pour le moment.
Qu'en sera-t-il de ces femmes à qui l'on impose un temps partiel, les plongeant directement dans la précarité ? Qu'en sera-t-il des moins de vingt-cinq ans ?
En outre, en France, les pauvres ne sont pas tous en capacité de travailler. Parfois, ils sont retraités, soit ex-travailleurs pauvres, ou simplement inaptes au travail pour des raisons physiques. Et je pourrais citer des exemples précis ! Qu'en sera-t-il d'eux ?
Je crains que votre dispositif, monsieur le haut-commissaire, n'ait pas l'effet escompté, même si je souhaite me tromper. Pis, il stigmatisera un peu plus encore les plus démunis en créant plusieurs catégories de pauvres et en opposant encore un peu plus « ceux qui se lèvent tôt » et les prétendus « assistés », qui, bien évidemment, profiteraient du système. Cette vision populiste et profondément injuste pour tous ceux qui connaissent la précarité a largement alimenté la campagne du candidat Sarkozy.
L'objectif du Gouvernement correspond à terme à une réforme générale du système des allocations sociales. Nous espérons donc que ce nouveau dispositif n'est pas le prélude à la suppression pure et simple du RMI. Nous le savons, le problème de l'existence des minima sociaux est posé. Plusieurs textes en témoignent. Valérie Létard a beaucoup travaillé sur cette question et deux de nos plus honorables collègues, Michel Mercier et Henri de Raincourt, ont rédigé des rapports lumineux en la matière.
De plus, selon le rapport de M. Vasselle, seuls 50 000 personnes pourraient expérimenter un tel dispositif. Nous sommes donc loin des objectifs du Gouvernement !
Si le coût du dispositif ne nous donne pas d'indication sur l'efficacité d'une telle mesure, le chiffre annoncé de 25 millions d'euros semble assez dérisoire en comparaison des 3,7 milliards d'euros consacrés au nouveau régime des heures supplémentaires - pour cette année seulement ! -, au 1,9 milliard d'euros de crédit d'impôt, aux 950 millions d'euros pour la suppression des droits de succession et aux 810 millions d'euros du bouclier fiscal, dont 583 millions d'euros seront directement remboursés aux 12 784 foyers dont le patrimoine est supérieur à 7,14 millions d'euros.
Telles sont les priorités du gouvernement Fillon, sous les ordres du Président Sarkozy.
La démagogie de ce gouvernement est sans borne : d'un côté, toutes les politiques mises en oeuvre conduisent à une précarisation accrue des individus ; de l'autre, on accorde quelques miettes aux plus démunis sans leur proposer pour autant des solutions pérennes d'insertion.
Il s'agit là d'une spirale du déclin. Vous accompagnez simplement les méfaits du libéralisme sans essayer, loin s'en faut, de créer une autre conception du développement partagé.
Ce dispositif aura l'effet pervers de favoriser les emplois faiblement rémunérés alors même que, dans votre rapport de 2005, monsieur le haut-commissaire, vous indiquiez que « la mise en oeuvre du RSA devait s'inscrire dans une politique de l'emploi dynamisée et sécurisée contre le temps partiel contraint, le travail précaire ou discontinu ».
Nous sommes d'accord avec vos propos, mais nous constatons que les choses évoluent. À l'époque, vous n'étiez pas partie prenante de ce gouvernement.
Nous estimons que seule une politique ambitieuse du travail pourra répondre à l'objectif d'éradication du nombre de travailleurs pauvres, voire de la pauvreté. Pour cela, la première mesure est la recherche du plein-emploi.
M. le président. Monsieur Fischer, vous avez dépassé vos cinq minutes de temps de parole. Vous le savez, cette règle s'applique à tous.
M. Guy Fischer. Dans ces conditions, je m'arrête là. Mais j'interviendrai tout à l'heure en explication de vote.
M. le président. J'ai été tolérant la première fois, mais je dois me montrer plus ferme, sinon le débat risque de déraper.
M. Guy Fischer. On dérape toujours avec les pauvres !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Après ces dizaines d'heures de débat consacrées aux petits problèmes fiscaux des plus riches de nos concitoyens, je salue à cette heure tardive, en fin de débat, cette discussion qui porte sur les 7 millions de bénéficiaires de minima sociaux. Je salue également la volonté d'expérimentation de M. le haut-commissaire et sa ténacité à vouloir mettre en oeuvre le revenu de solidarité active, quitte à s'associer à un projet de loi qui vise à offrir 15 milliards d'euros aux riches et 25 millions aux pauvres. Quel décalage !
Sur le fond, monsieur le haut-commissaire, j'approuve votre volonté de permettre le cumul des minima sociaux et des revenus de l'activité afin d'éviter de pénaliser les chômeurs qui retrouvent un travail peu rémunéré et qui, du coup, perdent de nombreuses aides sociales. Cela évitera les effets de seuil et rendra toute reprise de travail financièrement intéressante.
Malgré tout, j'ai un doute sur la réussite du revenu de solidarité active, et ce pour plusieurs raisons.
La première, c'est qu'il est difficile de mettre en place une politique de solidarité nationale lorsque l'on a pour projet principal de favoriser l'enrichissement des plus riches.
Je comprends votre position. Vous vous dites que la politique nationale qui est menée n'est peut-être pas celle que vous souhaitez, mais qu'il faut s'adapter à la mondialisation qui rend les riches de plus en plus riches. Vous n'allez peut-être pas jusqu'à dire que les pauvres deviendront de plus en pauvres, mais les deux aspects sont liés. Vous pensez sans doute que, si vous pouvez faire quelque chose pour ceux qui souffrent, vous allez essayer d'agir, même dans un gouvernement dont vous ne partagez pas les principales orientations.
Même si vous réussissez à régler quelques situations, le mécanisme enclenché par la politique du Gouvernement et du Président de la République aboutira à ce qu'il y ait de plus en plus de pauvres. Cela risque donc d'être un travail sans fin, qu'il faudra à chaque fois recommencer.
La deuxième raison pour laquelle je doute de la réussite du revenu de solidarité active, ce sont les difficultés techniques liées à sa mise en oeuvre. Coincé entre les minima sociaux et le SMIC, ce RSA est condamné à n'être considéré que comme un revenu d'assistance. Il sera perçu par beaucoup comme un « petit boulot » et malheureusement pas comme un vrai travail.
Je vous souhaite bien du plaisir pour régler toutes ces difficultés : il y aura ceux qui seront aux minima sociaux, ceux qui retrouveront du travail, ceux qui seront à temps partiel, ceux qui sont au SMIC... D'autant que, comme l'a très bien dit M. Fischer, dès qu'il s'agit de contrôler les chômeurs et les RMIstes, l'administration se montre tatillonne. Elle ne veut surtout pas verser 3 ou 4 euros de plus ! En revanche, elle n'est pas à 10 000 ou à 100 000 euros près dans les affaires d'abus de biens sociaux. Il y a même moins de contrôles dans ces cas-là, car il ne faut surtout pas brider la liberté du travail. Mais qu'un chômeur cumule les prestations et touche 10 euros ou 100 euros de trop, là, c'est inacceptable !
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Caricature !
M. Jean Desessard. Puisque vous vous en remettez aux départements, vous pourrez toujours vous tourner vers eux. Ils sont pragmatiques et ils ont l'habitude de régler ce genre de difficulté. Quoi qu'il en soit, je le répète, vous condamnez cette expérience à n'être que de l'assistance en plus.
Même si je reste persuadé que l'objectif est bon, je suis sceptique sur la mise en oeuvre de cette expérimentation.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne jugez pas par avance !
M. Jean Desessard. Que faire ? Je vois deux solutions.
La première consisterait à augmenter fortement les minima sociaux en les portant à 80 % du SMIC. Cela permettrait au moins aux gens de vivre. Mais se poserait alors un problème avec les smicards, qui seraient mécontents que quelqu'un qui ne travaille pas gagne presque la même chose qu'eux. D'ailleurs, je pense que cet aspect explique en partie la réussite du vote populaire en faveur du candidat Sarkozy.
Il est évident que la « politique sociale » a ses limites et qu'il est difficile d'augmenter les minima sociaux, parce que c'est mal perçu par les travailleurs.
La deuxième solution, ce serait le revenu d'existence. Les minima sociaux seraient versés à tous, aussi bien aux travailleurs pauvres qu'aux travailleurs plus aisés, mais on récupérerait l'argent sur leurs impôts.
Comme j'ai épuisé mon temps de parole, je développerai cette question ultérieurement dans le débat. En attendant, je veux quand même vous dire que la vraie solution est là. De plus, ce n'est pas simplement une idée de gauche, puisque certains centristes l'ont déjà défendue.
Lorsque j'ai déposé un amendement visant à créer ce revenu d'existence, M. Arthuis m'a opposé l'article 40.
M. le président. Veuillez conclure, s'il vous plaît !
M. Jean Desessard. Je suis souvent défavorable au recours à l'article 40, mais je dois reconnaître que cette mesure aurait vraiment coûté cher à la collectivité et qu'elle aurait représenté un important transfert de charges. (Sourires.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 93, présenté par M. Fischer, Mmes David et Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - La loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques est abrogée.
II. - Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 321-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 321-1. - Constitue un licenciement pour motif économique, tout licenciement réalisé par un employeur pour un ou plusieurs motifs sans rapport avec la personne du ou des salariés licenciés, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification du contrat de travail, consécutives soit à des difficultés économiques sérieuses n'ayant pu être surmontées par tout autre moyen, soit à des mutations technologiques mettant en cause la pérennité de l'entreprise, soit à des nécessités de réorganisation indispensables à la sauvegarde de l'activité de l'entreprise. » ;
2° L'article L. 321-13 est rétabli dans sa version antérieure à la modification effectuée par la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social.
III. - Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 224-3, il est inséré un article L. 224-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 224-4. - La société, dont le chiffre d'affaires hors taxes est supérieur à 50 millions d'euros, ne peut, pendant trois années consécutives, être à l'initiative d'une offre publique d'achat ou d'échange lorsqu'elle a procédé à des licenciements dans le cadre d'un plan social et que l'arrêté des comptes a constaté l'existence d'un résultat net d'exploitation bénéficiaire.
« La même société ne peut faire l'objet d'une offre publique d'achat ou d'échange pendant ce même délai, qu'après avis conforme du ministre de l'économie et des finances et du ministre de chargé de l'emploi. » ;
2° Après l'article L. 225-186, il est inséré un article L. 225-186-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-186-1. - Lorsque l'arrêté des comptes a constaté un résultat net d'exploitation bénéficiaire, aucune option donnant droit à la souscription d'achat d'action ne peut être consentie aux mandataires sociaux et aux cadres dirigeants pendant les trois années qui suivent la mise en oeuvre de licenciements dans le cadre d'un plan social. » ;
3° Après l'article L. 232-12, il est inséré un article L. 232-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 232-12-1. - Aucune distribution de dividendes ne peut-être faite aux actionnaires pendant trois années consécutives lorsque la société dont le chiffre d'affaires hors taxes est supérieur à 50 millions d'euros, a procédé à des licenciements dans le cadre d'un plan social et que l'arrêté des comptes a constaté l'existence d'un résultat net d'exploitation bénéficiaire. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a déjà été défendu !
M. Guy Fischer. Monsieur le président, je proteste énergiquement contre la pression que fait peser M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle est amicale, mon cher collègue !
M. Guy Fischer. On m'interrompt, et ensuite on viendra me dire que j'ai dépassé mon temps de parole !
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. C'est bien parti pour !
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à donner un autre sens à l'article 8.
Dans un rapport publié en 2005 et réalisé sous votre présidence, monsieur le haut-commissaire, rapport au titre prometteur, Au possible, nous sommes tenus. La nouvelle équation sociale, on pouvait lire entre autres que « la lutte contre la pauvreté ne peut être couronnée de succès que si elle se traduit par une mobilisation générale et si elle repose sur des principes de justice ».
Effectivement, seule une action politique d'une autre ampleur que l'instauration du revenu de solidarité active pourrait être efficace pour lutter sur le long terme contre la pauvreté.
Pour vous en convaincre, je commencerai par un bel exemple de justice sociale engendré par l'économie ultralibérale que vous encouragez...
En 2005, un leader mondial de la bagagerie souhaite recentrer ses activités vers l'Asie et décide de se séparer de son unique site de fabrication français.
L'affaire est conclue en septembre ; deux repreneurs sont choisis ; le site sera progressivement reconverti en usine de fabrication de panneaux solaires. Sauf que, depuis, aucun panneau n'est sorti du site, aucun investissement n'a été réalisé ! En réalité, l'entreprise en cause a voulu éviter une fermeture pure et simple, très coûteuse, et a organisé une reprise fictive permettant le licenciement de l'ensemble des salariés à moindre coût.
Le directeur du site a confié à la presse que le contrat sur le solaire n'était qu'un contrat de commercialisation et ne pouvait donc engendrer d'emplois.
Alors que des centaines de salariés se trouvaient sans emploi, le groupe annonçait qu'il distribuerait à ses actionnaires 175 millions de dollars de dividendes.
Je vous prie de croire que toutes ces personnes, souvent des familles entières, qui basculent ainsi dans des situations d'extrême fragilité ne demandent pas à être assistées ; elles souhaitent simplement qu'on leur garantisse un travail leur permettant de vivre dans des conditions décentes.
Or votre politique comme celles de vos prédécesseurs ont montré leur incapacité à faire reculer les taux d'emplois précaires et de pauvreté.
Vos actions nient la valeur travail et engendrent des inégalités de plus en plus profondes dans la société.
C'est pourquoi nous ne pouvons nous satisfaire du dispositif proposé par l'article 8.
La société que nous voulons pour nos concitoyens est une société dans laquelle le travail est rémunérateur, une société dans laquelle on est capable de protéger les salariés contre le dumping social et économique, les licenciements boursiers et les OPA.
Or le présent dispositif transforme les aides sociales en subventions à l'emploi, pour le plus grand profit des employeurs ! Tel est l'analyse brute que nous faisons de ce texte.
Nous ne pouvons pas nous contenter du RSA alors que tout est mis en oeuvre pour précariser l'emploi, fragiliser les travailleurs, museler les syndicats.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas la présentation de l'amendement !
M. Guy Fischer. Les textes de ces derniers mois constituent une série assassine du droit du travail : contrat nouvelles embauches, contrat première embauche, service minimum, recodification par ordonnance du code du travail, qui s'est éloignée dangereusement de l'impératif de codification à droit constant !
Le revenu de solidarité active constitue dans ce contexte une mesure qui nous semble inefficace et imparfaite. Il oublie un certain nombre de salariés pauvres, notamment nombre de femmes qui travaillent à temps partiel et se retrouvent en dessous du seuil de pauvreté.
De plus, si le chômage s'accompagne d'un risque accru de pauvreté, l'inactivité reste encore associée à la pauvreté pour plus de 2 millions de personnes. Ainsi, hors du travail, il n'y aurait point de salut !
Ce n'est pas sans rappeler la philosophie qui avait conduit à envisager un accès prioritaire aux foyers d'hébergement de nuit pour les salariés sans domicile fixe !
En bref, le revenu de solidarité active se contenterait d'enregistrer comme une fatalité la tendance à la faible rémunération des emplois et à la multiplication des contrats précaires.
Nous restons persuadés que l'objectif d'augmenter le pouvoir d'achat des Français ne peut se passer d'une forte revalorisation des minima sociaux et de la fixation du SMIC à 1 500 euros.
Notre amendement vise à s'attaquer aux racines du problème de la pauvreté dans notre pays et tend à agir, pour cela, en faveur de l'augmentation du pouvoir d'achat des salariés, contre la précarité, les licenciements, en particuliers contre les licenciements boursiers.
Parce qu'il est nécessaire de prendre des mesures fortes, en rupture avec un modèle économique qui n'assure ni le développement de l'emploi ni le dynamisme de l'activité économique, cet article 8 nous pose problème.
En conséquence, mes chers collègues, nous vous demandons de voter en faveur de notre amendement.
M. le président. Le groupe CRC, jusqu'à présent, respectait très scrupuleusement son temps de parole. C'est la première fois que j'assiste à des dérapages !
M. Guy Fischer. Pas du tout, j'ai respecté mon temps de parole à la minute près ! (M. Guy Fischer brandit sa montre.)
M. le président. Nous n'avons pas le même chronomètre !
L'amendement n° 17, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le revenu de solidarité active tient compte des prestations et aides locales ou extralégales à caractère individuel recensées par chaque département et, dans la mesure du possible, de l'ensemble des droits et aides qui sont accordés aux bénéficiaires du revenu de solidarité active.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Cet amendement est important car il porte sur l'article 8, qui définit le revenu de solidarité active.
Il vise à inciter les départements participant à l'expérimentation à recenser les aides et les prestations locales et extralégales qui existent sur leur territoire. Nous souhaitons que les départements les prennent en compte dans le calcul du RSA.
M. Jean Desessard. Et voilà !
M. Guy Fischer. Deux poids, deux mesures !
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Il vise également à ouvrir la possibilité d'une prise en compte des prestations et droits connexes légaux, tels que la prime pour l'emploi, les exonérations de taxe d'habitation ou de redevance audiovisuelle, pendant la durée de l'expérimentation.
En effet, dans sa rédaction actuelle, ce projet de loi n'indique pas précisément quelles sont les modalités de calcul du RSA et laisse ainsi une grande marge d'appréciation aux départements.
Bien entendu, la commission des affaires sociales approuve le principe de cette liberté d'action. Elle est sans doute une des clefs du succès de l'expérimentation, car elle permettra aux départements de proposer des solutions adaptées à la réalité de leurs territoires et de tester l'efficacité des solutions diverses qu'ils retiendront.
Toutefois, il peut être opportun de tester certaines des pistes avancées pour réformer le système de solidarité nationale ; je veux parler des droits connexes.
Ces droits peuvent prendre deux formes.
Il y a, d'une part, les prestations ou droits légaux, ouverts à des personnes du fait de leur statut - exonération de taxe d'habitation ou de redevance audiovisuelle - ou du niveau de leurs revenus - prime pour l'emploi, accès à la couverture maladie universelle complémentaire, la CMUC, ou à l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire.
Il y a, d'autre part, les prestations d'aides locales ou extralégales - tarif réduit de cantine scolaire ou de transports, aide à la garde d'enfant, bourse scolaire.
Je considère que ces droits, aides ou prestations participent à l'amélioration du pouvoir d'achat des ménages. Pour cette raison, il me paraît logique que les départements puissent en tenir compte dans l'appréciation des ressources des bénéficiaires potentiels du RSA.
Vous l'avez compris, mes chers collègues, le RSA est un revenu différentiel : son montant sera calculé en fonction d'un revenu cible garanti, variable selon la composition familiale, d'où seront déduits les revenus de l'activité.
L'objectif du Gouvernement est de garantir un certain niveau de ressources - le seuil de pauvreté européen - et de rendre financièrement attractive toute nouvelle heure travaillée.
Pourquoi les droits et aides connexes n'entreraient-ils pas dans le revenu garanti ?
Sans qu'ils soient forcément intégrés à ce stade dans le RSA pour leur versement - ce qui, à terme, serait préférable -, je propose via cet amendement qu'ils soient au minimum pris en compte par les départements dans la composition du revenu garanti et, par conséquent, pour le calcul du revenu différentiel.
J'y tiens tout particulièrement pour une autre raison : cela permettra de réduire l'iniquité de traitement entre les travailleurs pauvres et les bénéficiaires de minima sociaux.
M. Jean Desessard. Et voilà !
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. C'est une des dimensions majeures du problème : le renforcement de l'attractivité de l'emploi et la réduction de la pauvreté passent par la disparition de cette situation inéquitable et donc intolérable pour les plus courageux de nos concitoyens qui ont choisi le travail plutôt que l'assistance, même si le travail ne rémunère pas plus !
En effet, dans le cadre de cette expérimentation, les travailleurs pauvres ne seront pas éligibles au RSA.
De surcroît, la situation actuelle favorise les bénéficiaires de minima sociaux par rapport aux travailleurs pauvres en leur accordant certaines aides liées à leur statut. Les personnes qui travaillent au SMIC ou à mi-temps n'en bénéficient pas.
À la fin du mois, le revenu mensuel d'une personne qui travaille au SMIC sans avoir jamais touché de minimum social sera inférieur à celui d'un RMIste reprenant une activité au même niveau de qualification. Considérez-vous que cela soit juste ?
La prise en compte des prestations connexes dans le calcul du RSA permettra au moins de lisser ces inégalités et de préparer la réforme inéluctable qui prévoit que, au nom de l'équité, à ressources égales, les droits soient égaux.
Alors comment procéder ? Cela suppose, d'une part, de recenser, dans chaque département, l'ensemble des prestations et aides locales ou extralégales, d'autre part, de permettre aux départements de calculer au plus juste le montant du RSA et d'être pionniers dans la mise en place progressive d'une allocation unique qui intégrera prestations et minimum social.
Une expérimentation est conduite actuellement dans l'Eure et c'est ainsi que ce département procède. Pas moins de cinquante et une prestations extralégales ou connexes ont été recensées. Ce département les a prises en compte et calcule le RSA de cette manière.
Le recensement de ces aides pour chaque individu se fait sur un mode déclaratoire. À terme, il faudrait qu'un système centralise ces informations.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des affaires sociales a déposé cet amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 269, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 17, remplacer les mots :
tient compte
par les mots :
peut tenir compte
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. M. le rapporteur pour avis a posé une question compliquée : comment prenons-nous en compte des différents droits connexes qui peuvent être eux-mêmes facteurs d'effets de seuil ?
On l'a vu, certaines personnes ont des revenus supérieurs de quelques euros au revenu maximum permettant de bénéficier de la CMUC et n'y ont plus droit. D'autres personnes peuvent perdre la totalité de certains droits quand elles reprennent un peu d'activité, car certains droits ne sont réservés qu'à ceux qui sont allocataires du RMI.
Il faudra donc obligatoirement remettre de l'ordre dans les droits connexes si l'on ne veut pas déplacer les effets de seuil.
Il faudra également veiller à diminuer ou à réduire la disparité des prestations.
M. le rapporteur pour avis a fait référence à un tableau que j'ai contribué à élaborer et qui dénombrait le nombre d'aides auxquelles pouvaient être éligibles les allocataires du RMI. Il y en a effectivement cinquante et une. Mais le pire est que personnes ne les connaissait toutes ; pas un seul travailleur social n'était capable de les dénombrer !
Il y avait donc à la fois de la déperdition en ligne et de la neutralisation entre les différentes aides.
Il sera nécessaire de remettre de l'ordre, non pas, je le répète, pour pénaliser les différents publics, mais pour éviter de se trouver enfermés dans des dispositifs dont on n'arrive plus à sortir.
Cependant, si on commence par imposer la prise en compte automatique des droits connexes, on risque de desservir les principes que vous avez défendus tout à l'heure, monsieur Vasselle ; c'est pourquoi, tout modestement, le Gouvernement propose d'indiquer que le département « peut tenir compte » des prestations et aides.
C'est d'ailleurs exactement ce qui se fait dans le département de l'Eure, sous la houlette du président du conseil général, M. Jean-Louis Destans. Il faut arriver par des expérimentations très concrètes et très ajustées à harmoniser les dépenses engendrées par les allocataires du RMI qui reprennent du travail avec le jeu des différentes prestations. De telle sorte qu'on ne défasse pas d'un côté ce que l'on fait de l'autre.
Les conseils généraux pourront faire du « cousu-main », sous l'oeil d'un comité d'évaluation au sein duquel siégeront un certain nombre de présidents de conseils généraux. Les expériences pourront ainsi être mutualisées et nous serons assurés de ne pas nous enfermer dans une démarche qui nous conduirait, finalement, à perdre le bénéfice de la souplesse des expérimentations.
M. le président. L'amendement n° 194 rectifié ter, présenté par M. Seillier, Mme Bout, Desmarescaux et B. Dupont, M. Esneu, Mme Hermange et Procaccia, MM. Laffitte et Mouly et Mme Payet est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
En conformité avec l'objectif fixé par la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, tel qu'en dispose l'article L. 115-4 du code de l'action sociale et des familles, les bénéficiaires du revenu de solidarité active sont associés à sa mise en oeuvre, dans les départements volontaires à l'expérimentation ainsi qu'à son évaluation.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. En conformité avec l'objectif fixé par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998, cet amendement prévoit que les bénéficiaires du revenu de solidarité active sont associés à sa mise en oeuvre dans les départements volontaires à l'expérimentation, ainsi qu'à son évaluation. Il part du principe que les mesures comprises par ceux qui en bénéficient et évaluées avec eux peuvent réussir.
Il s'agit donc d'un amendement de cohérence par rapport à la loi de 1998.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est défavorable à l'amendement n° 93. Il me paraît inutile de revenir sur les questions d'ordre général qui nous opposent à M. Fischer ; nous n'avons pas la même logique !
Par ailleurs, la commission est favorable au sous-amendement n° 269 du Gouvernement. S'il est adopté, elle émettra un avis favorable sur l'amendement n° 17, présenté par Alain Vasselle.
Enfin, en ce qui concerne l'amendement n° 194 rectifié ter, la commission se rangera à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. S'agissant de l'amendement n° 93, je souhaite apporter quelques explications ; un débat de fond s'impose, car un certain nombre d'observations que je ne peux pas laisser sans réponse ont été formulées.
Monsieur Fischer, vous avez soulevé trois questions.
Premièrement, le RSA peut-il contribuer à réduire la pauvreté ou va-t-il aggraver la situation ?
Deuxièmement, l'article 8 va-t-il dans le bon sens ou nous éloigne-t-il de l'objectif fixé ?
Troisièmement, les dispositions contenues dans cet article sont-elles suffisantes ou faut-il prévoir d'autres mesures ?
Sur le premier point, je rappellerai que le revenu de solidarité active est né d'une réflexion collective à laquelle ont été associés l'ensemble des partenaires sociaux, des associations, ainsi que toutes celles et tous ceux qui, dans les collectivités locales, concourent à la lutte contre la pauvreté.
Il est faux de dire que le revenu de solidarité active stigmatiserait certaines catégories de la population ou irait à l'encontre de la lutte contre la pauvreté et l'extrême pauvreté. Toutes les réflexions de la commission ont été guidées par l'objectif strictement inverse. Il serait donc paradoxal aujourd'hui de défendre une position différente !
Après ma nomination au Gouvernement, j'ai réuni de nouveau l'ensemble des partenaires et je leur ai demandé s'ils se considéraient toujours solidaires des conclusions que nous avions tirées en 2005, des propositions que nous avions faites et du souhait que nous avions déjà émis, alors, de pouvoir procéder par expérimentations. La réponse a été affirmative, si bien que, quand ces dispositions ont été soumises à l'avis de la CNAF, dans laquelle tous les partenaires sociaux sont représentés, elles ont été adoptées avec dix-sept voix pour et quelques abstentions.
On ne peut lutter contre la pauvreté que sur la base d'un certain consensus entre les partenaires afin, justement, de ne pas dresser les uns contre les autres.
Donc, pour cette raison, le RSA peut contribuer à réduire la pauvreté.
Deuxième point, l'article 8 nous éloigne-t-il de cet objectif ?
Était-il concevable que, tout d'un coup, nous « jetions à la poubelle » les quatre cinquièmes du rapport pour n'en conserver qu'un fragment en ne nous intéressant qu'à une catégorie ? À l'évidence, la réponse est non.
D'abord, il est faux de dire que l'article 8 ne concernerait pas les travailleurs pauvres. Vous dites qu'il ne faut pas stigmatiser les RMIstes ; je rappellerai que, parmi ces derniers, au moins 15 % ou 20 % de personnes travaillent, qu'elles sont donc des travailleurs pauvres et qu'elles seront concernées par ces dispositions. Par conséquent, ne simplifiez pas à outrance, en escamotant un certain nombre de gens qui sont travailleurs pauvres et allocataires du RMI. Cet article s'inscrit bien dans l'objectif de réduction de la pauvreté.
Vous avez exprimé le regret qu'un certain nombre de personnes ne bénéficient pas de cette expérimentation, me laissant ainsi penser que vous lui prêtez quelque vertu, ce qui nous rapproche. Nous avançons avec prudence, afin de ne pas créer d'effets pervers par rapport à ce que nous croyons être une bonne mesure.
C'est la raison pour laquelle nous commençons par des échantillons réduits, des catégories limitées, en nous réservant la possibilité d'étendre le dispositif si les effets pervers peuvent être restreints, ce dont je suis persuadé, et s'ils sont beaucoup moins importants que ce que certains laissent entendre. Mais, effectivement, il faut se donner le temps d'étudier la situation et, lorsque nous aurons la preuve que l'expérimentation fonctionne bien, nous viendrons vous en rendre compte.
Enfin, dernière question, ces dispositions sont-elles cohérentes avec les mesures déjà existantes ?
Je souligne que, pour la première fois, le Président de la République et le Premier ministre ont cosigné une lettre de mission dans laquelle a été fixé un objectif de réduction de 30 % de la pauvreté pendant le quinquennat. Nous sommes là pour mettre en oeuvre les indicateurs et définir les moyens d'atteindre cet objectif. Nous pourrons désormais, devant la représentation nationale, indiquer où nous en sommes de sa réalisation. Par le passé, cela n'a jamais été possible, car les chiffres dont nous disposions ne prenaient pas en compte les mesures arrêtées pendant les trois dernières années. Ces nouvelles dispositions constituent donc un gage extraordinaire de changement dans les politiques.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est, bien entendu, défavorable à l'amendement n° 93, qui tend à la suppression de l'article 8.
Il est en revanche, comme vous l'avez compris tout à l'heure, favorable à l'amendement n° 17 de M. Vasselle, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 269.
Enfin, il est très favorable à l'amendement n° 194 rectifié ter, soutenu par Mme Hermange et par le président du comité interministériel de lutte contre l'exclusion, M. Seillier.
Cet amendement, qui vise à associer les personnes pour lesquelles on travaille au dispositif que l'on construit, est extrêmement important. Je peux vous assurer - - le Premier ministre en a, d'ailleurs, été récemment témoin, lorsque nous avons travaillé avec un groupe d'allocataires du RMI - que cela change tout. Cela garantit qu'on ne fait pas des usines à gaz. C'est un garde-fou qui empêche que puissent être supprimés par erreur des droits connexes. C'est également l'assurance que l'on oriente ces activités vers le retour au travail.
Lorsque, dans les départements, nous discutons avec des groupes d'allocataires du RMI, ils nous parlent, non pas du maintien dans l'assistance, mais de l'accès au travail, des conditions dans lesquelles ils peuvent retourner vers l'emploi et sortir de la pauvreté par le travail. Il est donc extrêmement important de développer ce type de démarche.
D'ailleurs, au comité d'évaluation, outre des présidents de conseils généraux, des économistes, des représentants des administrations, siège également une personnalité qualifiée parce qu'en tant qu'allocataire du RMI elle a créé à Angers un comité des usagers. Son aide nous sera utile, car nous voulons développer cette démarche dans chaque département le plus largement possible.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Je souhaite lever tout malentendu avec le Gouvernement et, éventuellement, avec la commission des finances, puisque le rapporteur général a approuvé le sous-amendement n° 269 : mon amendement ne crée aucune obligation pour les départements.
Il y est écrit : « Le revenu de solidarité active tient compte » - j'insiste sur ce verbe - « des prestations et aides locales ou extralégales à caractère individuel recensées par chaque département... ». Si le département ne les recense pas, ces prestations ne sont pas prises en considération. Donc, il n'y a aucun caractère contraignant.
Pour ce qui concerne les autres prestations, mon amendement dispose : «... et, dans la mesure du possible, de l'ensemble des droits et aides qui sont accordés aux bénéficiaires du revenu de solidarité active ». Les départements gardent donc leur entière liberté dans leur choix. Simplement, j'indique une direction, celle d'une prise en considération.
J'ai fait cette proposition parce qu'on ne peut pas accuser le conseil général de l'Eure, dont le président est socialiste, de vouloir réserver un sort moins enviable aux RMIstes que ne le ferait un département présidé par un élu de droite, ce qui serait source de tous les maux et de toutes les difficultés ! Le département de l'Eure les a pris en considération et cela ne pose aucun problème, cela fonctionne remarquablement bien. Par conséquent, pourquoi être plus royaliste que le roi dans ce domaine ?
Monsieur le haut-commissaire, j'espère avoir réussi à vous convaincre de retenir notre amendement sans le sous-amender puisque, en fait, il satisfait votre demande. (Mme Marie-Thérèse Hermange s'exclame.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'aimerais tenter une conciliation.
Il s'agit d'une expérimentation.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En ajoutant l'auxiliaire « peut », le but est atteint. On va comparer ce que fait l'Eure, ce que fait le Rhône, etc., et, ensuite, on dressera le bilan de toutes ces expériences. Il ne faut pas être aussi catégorique.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Il n'y a aucune obligation !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une expérimentation, il existe des voies différentes. Je comprends très bien le sous-amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. On nous dit que, comme il s'agit d'une expérimentation, les mécanismes peuvent être beaucoup souples. S'ils sont plus souples, pourquoi M. Vasselle se croit-il obligé de présenter un tel amendement ? L'ayant bien écouté, je suis atterrée par ses propos sur les allocataires de minima sociaux par rapport aux travailleurs pauvres !
Dans la ville dont je suis maire, le revenu moyen par habitant est le plus bas de mon département. La part de logements sociaux y est de 42 % ; tous les jours, je traite les situations difficiles, les menaces d'expulsion, etc. Je suis donc amenée, de façon régulière, à connaître de la situation des habitants. J'ai mis en place des quotients familiaux pour la restauration scolaire, pour l'ensemble des services de la petite enfance...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme tout le monde !
M. Christian Cambon. Même dans une municipalité de droite, cela existe !
Mme Marie-France Beaufils. Laissez-moi terminer mon propos !
Aujourd'hui, on prétend renforcer l'accompagnement des foyers. Moi, je ne fais aucune distinction de principe entre un allocataire du RMI, un travailleur pauvre, celui qui perçoit un salaire ; seule compte la prise en considération des situations particulières.
M. Vasselle estime qu'il faut faire la chasse aux aides spécifiques que percevraient les attributaires de minima sociaux, qui seraient, selon lui, mieux traités que d'autres qui sont des salariés, parce leur situation ne serait pas prise en compte de la même façon. Ce n'est pas acceptable !
Dans une expérimentation, il faut faire confiance aux gestionnaires de terrain qui travaillent sur ces questions. La démarche que vous proposez, monsieur Vasselle, revient à opposer - comme on l'a entendu durant toute la campagne électorale - les gens qui perçoivent des minima sociaux, parce qu'ils ne voudraient prétendument pas travailler, et les salariés pauvres. C'est inadmissible !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je voterai le sous-amendement présenté par le Gouvernement. Nous verrons si cela marche, même si je n'y crois pas beaucoup...
L'amendement de M. Vasselle est significatif, comme je l'ai dit lors de mon intervention sur l'article, des difficultés de gestion qui vont se poser aux départements et des longues discussions qu'il va y avoir autour de ce dispositif.
M. Jean Desessard. Je leur souhaite bon courage !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Il nous faut tenir compte de la réalité. Pourquoi les allocataires du RMI ont-ils tant de difficultés à retrouver un emploi ? Parce que l'ensemble des éléments connexes, qu'ils soient d'ordre national, départemental ou communal - par exemple, les systèmes de quotients familiaux - les dissuadent de reprendre une activité.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Tout à fait !
Mme Marie-France Beaufils. Mais non, ce n'est pas vrai !
M. Jean-Pierre Fourcade. Par conséquent, si l'on veut vraiment expérimenter le revenu de solidarité active que M. Hirsch nous propose, il faut additionner l'ensemble des aides pour déterminer le seuil compatible avec la reprise d'une activité, de manière qu'au moins 20 % ou 25 % des allocataires de l'API ou du RMI retournent vers l'emploi.
Par conséquent, l'amendement de M. Vasselle est frappé au coin du bon sens.
Cela dit, j'approuve le sous-amendement du Gouvernement.
En effet, à ce stade de l'expérimentation, il me paraît préférable de ne pas figer le dispositif. Aussi, le sous-amendement n° 269, qui vise à remplacer les mots « tient compte » par les mots « peut tenir compte » au sein de l'amendement n° 17, tend à modifier utilement, me semble-t-il, le dispositif proposé par M. le rapporteur pour avis.
Puisque notre objectif est bien d'inciter les allocataires de minima sociaux à retrouver une activité professionnelle, et ce dans des conditions raisonnables en termes de revenu, nous sommes favorables à l'expérimentation, et l'ensemble formé par l'amendement n° 17 et le sous-amendement n° 269 nous semble aller dans la bonne direction.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 17.
M. Guy Fischer. Mes chers collègues, jusqu'à présent, je comptais m'abstenir sur l'article 8, en assortissant ce vote d'une connotation très négative. Mais, après les propos qui viennent d'être tenus par M. le rapporteur pour avis, par M. le président de la commission des finances et par M. Fourcade, ce n'est plus possible.
Depuis quatre jours, nous débattons d'exonérations fiscales comprises entre 14 milliards d'euros et 16 milliards d'euros pour les contribuables les plus fortunés.
M. Philippe Marini, rapporteur général. N'en rajoutez pas ! Vous ferez une conférence de presse demain, ce sera plus efficace !
M. Guy Fischer. Monsieur le rapporteur général, lorsque je peux prendre la parole, je le fais ! C'est mon rôle de parlementaire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bien sûr !
M. Guy Fischer. Et ce n'est sûrement pas vous, tout rapporteur général que vous êtes, qui me ferez taire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ça, je le sais bien !
M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de garder votre calme.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, cela fait seulement une heure et quart que nous débattons d'un problème pourtant grave, puisqu'il concerne près de 3,5 millions de nos concitoyens issus des populations les plus pauvres.
Personnellement, j'ai beaucoup d'estime pour M. Hirsch, qui était présent lorsque nous avons réinstallé le centre régional d'Emmaüs à Vénissieux en compagnie de l'abbé Pierre, dont ce fut d'ailleurs l'une des dernières apparitions publiques. Pour autant, je voterai contre l'article 8, car je n'accepte pas la stigmatisation dont les plus pauvres font l'objet. Ainsi, M. le rapporteur pour avis faisait référence aux cinquante et une prestations extralégales ou connexes recensées dans le département de l'Eure. Croyez-moi, une fois que son amendement aura été voté, une telle pratique deviendra la règle préconisée par l'ensemble des départements.
Mme Marie-France Beaufils. Tout à fait !
M. Guy Fischer. Certes, l'existence de droits connexes, légaux et extralégaux est une réalité. Mais l'approche qui a été retenue pour les évoquer illustre une volonté de remettre en cause les minima sociaux et, peut-être, d'en préparer in fine l'extinction. (M. le rapporteur général fait un signe de dénégation.)
Dans la mesure où la création du revenu de solidarité active s'effectue dans de mauvaises conditions et où elle s'accompagne d'une stigmatisation des plus pauvres, nous voterons à la fois contre l'amendement n° 17 et contre l'article 8.
Monsieur le haut-commissaire, vous aviez vous-même indiqué que le RSA devait « s'inscrire dans une politique de l'emploi dynamisée et sécurisée contre le temps partiel contraint, le travail précaire ou discontinu » et que « les modalités de pénalisation du temps à petite durée devaient être étudiées ». Or, comme l'a souligné Roland Muzeau, lors de l'examen du projet de loi à l'Assemblée nationale, le Gouvernement ne s'engage pas sur cette voie et il est à craindre que vos bonnes intentions ne conduisent à renforcer les mécanismes qui construisent la pauvreté.
Mme Marie-France Beaufils. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous irez expliquer cela aux travailleurs pauvres !
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote sur l'article 8.
Mme Bariza Khiari. Je n'insisterai pas sur la dissymétrie grossière qui préside à l'économie générale du présent projet de loi.
D'un côté, il y a entre 13 milliards et 15 milliards d'euros d'allégements fiscaux qui sont, pour l'essentiel, destinés aux plus riches. De l'autre, seuls 25 petits millions d'euros sont consacrés aux plus précaires !
Néanmoins, j'atténuerai mon propos. S'agissant du RSA, la solution peut également se trouver dans les partenariats pertinents et dans le volontarisme, ce dont vous n'êtes pas dépourvu, monsieur le haut-commissaire.
La France compte 7 millions de pauvres, soit plus de 10 % de la population totale. Cette réalité n'est pas digne de notre pays.
Depuis plusieurs années, nous sommes convaincus de la nécessité de mesures permettant d'accompagner et de consolider le retour à l'emploi. Monsieur le haut-commissaire, le dispositif que vous nous proposez ne répond que partiellement à cet objectif, car il comporte un important effet pervers.
Le RSA ne bénéficiera qu'à ceux qui sont les plus proches de l'emploi. Plus spécifiquement, il contribuera à créer une catégorie quasi institutionnelle de travailleurs pauvres, car les employeurs seront incités à multiplier les contrats à temps partiel. Or, vous le savez bien, le contrat précaire est fortement corrélé à la pauvreté.
Par ailleurs, je note qu'à contrat identique les salariés ayant autrefois été allocataires du RMI percevront un peu plus que les autres.
D'ailleurs, monsieur le haut-commissaire, vous ne contestez pas l'existence de tels effets pervers, puisque vous proposez que votre dispositif soit expérimental.
Nous approuvons la philosophie générale du RSA, mais son application et son financement sont l'objet de trop de zones d'ombre, notamment s'agissant de la clé de répartition avec les conseils généraux.
C'est la raison pour laquelle nous émettrons une « abstention positive » sur l'article 8. (Murmures ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Lorsque je militais au sein du mouvement national des chômeurs et précaires, la possibilité de cumuler une activité salariée, par exemple un travail à temps partiel, avec les minima sociaux, comme le RMI, était une revendication constante des organisations de chômeurs.
À cet égard, votre objectif est louable, monsieur le haut-commissaire. Il est courageux de vouloir expérimenter un tel dispositif, d'autant que sa mise en oeuvre sera particulièrement compliquée.
M. Jean Desessard. Comme vous l'avez vous-même souligné, un tel dispositif suscitera d'interminables débats dans les départements, puisque les acteurs concernés voudront sans cesse se livrer à des contrôles et établir des comparaisons entre les niveaux de prestations reçus par les différents allocataires.
J'évoquais tout à l'heure le revenu universel d'existence. Voilà une mesure qui, sans bouleverser le système économique, présente l'avantage d'être à la fois simple, importante et même révolutionnaire.
En réalité, je m'abstiendrai sur ce dispositif pour une raison simple. L'article 8 fait partie d'un projet de loi dont les dispositions fiscales ne sont favorables qu'à une certaine catégorie de la population. Dans ce contexte, je crains qu'un éventuel échec dans la mise en place du cumul entre activité salariée et minima sociaux n'offre à certains un nouveau prétexte pour stigmatiser les chômeurs. C'est bien connu, quand on n'arrive pas à faire disparaître la pauvreté, on essaie de faire disparaître les pauvres ! De fait, en cas d'insuccès du RSA, certains seront tentés d'en imputer la faute à ces derniers. Le dispositif, qui est en apparence généreux, finira alors par se retourner contre les plus pauvres.
Par conséquent, je m'abstiendrai et je laisserai à la majorité la responsabilité de mettre en oeuvre le RSA. Au bout d'un an, il faudra dresser le bilan des expérimentations qui auront été réalisées. Si le dispositif se révèle un succès, je serai le premier à reconnaître m'être trompé et à vous féliciter. Mais, si c'est un échec, j'espère que vous aurez le courage de l'admettre et que vous accepterez alors de reconsidérer ma proposition d'instaurer un revenu universel d'existence.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Alors que nous sommes dans la plus totale obscurité, je m'étonne du silence de certains grands spécialistes ; je pense notamment à M. Fourcade ou à M. le président de la commission des finances.
Aujourd'hui, nous sommes en présence de droits universels, conséquence d'un empilement progressif, chaque minimum social ayant son histoire. Et personne n'est capable de dire avec précision combien un allocataire du RSA percevra, tant ce revenu sera personnalisé !
Par ailleurs, je partage l'opinion de Mme Khiari. Les bénéficiaires du revenu de solidarité active seront effectivement ceux qui étaient déjà les plus proches d'une activité professionnelle.
M. Guy Fischer. Nous en rediscuterons, monsieur le haut-commissaire.
M. Guy Fischer. Actuellement, le problème central est bien celui de la formation. À ce sujet, je crains que l'on n'institutionnalise les emplois précaires.
Monsieur le haut-commissaire, permettez-moi d'aborder de nouveau le sujet dont je me suis entretenu avec vous avant le début de la séance.
Le taux de chômage du Royaume-Uni, qui est de l'ordre de 5 % pour une population comparable à celle de la France, est souvent montré en exemple. Pourtant, la première conséquence des politiques menées par M. Tony Blair a été l'explosion de la précarité. Au Royaume-Uni, il y a deux fois plus de travailleurs pauvres qu'en France !
Je crains qu'avec la « smicardisation » des salaires, qui est une tendance lourde observée en France depuis plusieurs années, la politique économique actuellement menée - je fais notamment référence aux exonérations fiscales de l'ordre de 23 milliards d'euros ou de 24 milliards d'euros - ne fasse que le dispositif du RSA contribue à l'aggravation de la flexibilité de l'emploi.
J'aimerais vous en fournir une illustration. On a évoqué l'ouverture des commerces le week-end, certains allocataires du RSA pourront ne travailler que le dimanche ! J'ai peut-être beaucoup d'imagination, mais je me fonde simplement sur les informations qui nous ont été fournies dans le cadre de l'examen du projet de loi.
Pour ma part, j'estime qu'il y a là un véritable problème. Par conséquent, même si j'abuse du temps de notre assemblée, ce qui n'est pas dans mes habitudes, je suis surpris d'être ainsi montré du doigt simplement parce que j'évoque un problème aussi important. Il est vrai que cela risque peut-être de faire durer nos travaux jusqu'à une heure ou deux heures du matin. Mais je vous rappelle que nous pensions initialement siéger toute la nuit !
Quoi qu'il en soit, je trouve profondément regrettable qu'après avoir discuté pendant quatre jours d'exonérations fiscales comprises entre 14 milliards et 16 milliards d'euros pour les contribuables les plus fortunés, nous réglions le sort de millions de travailleurs pauvres en quelques minutes !
M. Jean-Pierre Fourcade. Il s'agit juste d'une expérimentation !
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
I. - Le revenu de solidarité active peut être mis en oeuvre, à titre expérimental, pour les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion en vue d'atteindre le revenu garanti mentionné à l'article 8. Cette mise en oeuvre est effectuée par les départements volontaires pour une durée de trois ans à compter de la publication du décret pris en application du II de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 et dans les conditions définies par cet article, à l'exception du III, sous les réserves suivantes :
1° Les départements mentionnés au II de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée sont autorisés à déroger à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles à l'exception de ses quatrième, cinquième et septième alinéas ainsi qu'à l'article L. 262-12-1 du même code. Dans le cas où ces départements prennent en charge le financement de la prime de retour à l'emploi en application du I de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée, ils sont autorisés à déroger à l'article L. 322-12 du code du travail à l'exception de ses deuxième à cinquième alinéas ;
2° Le conseil général a la faculté de réserver le bénéfice de l'expérimentation aux personnes résidant ou ayant élu domicile dans les conditions définies par l'article L. 264-1 du code de l'action sociale et des familles, dans le département ou dans la partie du territoire mentionnée au deuxième alinéa du VIII de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée, depuis une durée qu'il détermine. Cette durée ne peut excéder six mois ;
3° Les engagements réciproques au regard de l'emploi, du bénéficiaire et du département sont précisés dans le contrat d'insertion mentionné à l'article L. 262-37 du code de l'action sociale et des familles ;
4° La convention mentionnée au IX de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée détermine les conditions de la prise en charge par l'État d'une partie du coût de l'expérimentation mentionnée au présent article ;
5° Le rapport que doivent transmettre les départements participant à l'expérimentation avant l'expiration de la durée fixée pour celle-ci ainsi que le rapport du Gouvernement au Parlement mentionnés au X de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée ont notamment pour objet d'analyser les motifs pour lesquels des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion éligibles à l'expérimentation n'ont pas accédé au revenu de solidarité active ou l'ont refusé et d'évaluer le nombre de personnes concernées.
II. - Les règles prévues pour la prime forfaitaire mentionnée à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles en matière d'attribution de la prestation, d'organisme débiteur, de financement de la prestation, de prescription, d'indus, d'incessibilité et d'insaisissabilité, de fraude et de sanctions ainsi que de contentieux sont applicables aux prestations servies dans le cadre du 1° du I.
III. - Lorsque la personne bénéficie du revenu minimum d'insertion et de l'allocation de parent isolé, les dispositions du présent article ne sont pas applicables.
M. le président. L'amendement n° 271, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Compléter le 2° du I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Lorsque le bénéficiaire des prestations mentionnées au 1° du I réside ou élit domicile hors de la partie du territoire mentionnée au deuxième alinéa du VIII de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006, tout en demeurant dans le même département, lesdites prestations peuvent lui être maintenues dans les conditions définies au présent article.
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. L'objet de cet amendement est d'éviter de pénaliser les personnes qui déménageraient pendant la période prévue par l'expérimentation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette précision est très utile. La commission a donc rendu un avis favorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 172, présenté par M. Cazeau, Mmes Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne, Bricq et Khiari, MM. Massion, Godefroy, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent, Repentin, Frimat, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit le cinquième alinéa (4°) du I de cet article :
4° La convention mentionnée au IX de l'article 142 de la loi de finances pour 2007 prévoit une prise en charge minimale par l'État égale à 50 % du coût global de l'expérimentation mentionnée au présent article, sous forme d'une majoration de la dotation globale de fonctionnement attribuée aux départements.
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
...- La perte de recettes résultant pour l'État de l'instauration d'une prise en charge minimale du coût de l'expérimentation du revenu de solidarité active est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Mon collègue Bernard Cazeau, président d'un conseil général, éprouve quelques inquiétudes quant à la compensation financière de l'expérimentation du revenu de solidarité active.
En l'état actuel du texte, l'expérimentation du revenu de solidarité active va essentiellement reposer sur les finances départementales. L'article 9 du projet de loi précise simplement que les conventions d'expérimentation peuvent prévoir la prise en charge par l'État « d'une partie du coût de l'expérimentation ».
Au vu de vos déclarations, monsieur le haut-commissaire, il semblerait que l'État prenne en charge 50 % de ce coût. Mais rien n'est précisé dans le texte à ce sujet, ce qui laisse mon collègue Bernard Cazeau perplexe.
Vous comprendrez que les difficultés rencontrées par les départements pour financer le RMI ou les contrats d'avenir les incitent à la prudence. Je vous rappelle, en effet, que le déficit cumulé de l'État vis-à-vis des départements au titre du RMI s'élève aujourd'hui à plus de 2 milliards d'euros.
C'est pourquoi les départements souhaitent que les modalités exactes de la participation de l'État au financement de l'expérimentation soient définies clairement et demandent qu'il soit bien précisé dans le projet de loi que le surcoût, pour le département, n'excédera pas 50 % du coût total de l'expérimentation.
Afin de rassurer les départements, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Compléter le cinquième alinéa (4°) du I de cet article par les mots :
selon une programmation qui couvre l'ensemble de sa durée
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est favorable à l'amendement n° 18.
L'amendement n° 172 vise à faire prendre en charge par l'État, à hauteur de 50 %, le coût de l'expérimentation du RSA, sous la forme d'une majoration de la DGF.
Chère collègue, vous avez entendu, comme nous tous, que le Gouvernement s'est engagé à consacrer 25 millions d'euros à l'expérimentation, ce qui doit couvrir effectivement environ 50 % de son coût. Votre amendement est donc satisfait sans qu'il soit besoin de recourir à une méthode un peu complexe, comme une majoration de la DGF, qu'il serait bien difficile de « flécher » vers les seuls départements concernés par l'expérimentation.
Sur le principe même, il faut rappeler que ce sont les départements qui choisiront de mettre en oeuvre ou non le RSA et détermineront le montant des dépenses en fonction des situations locales. Il ne serait pas sain, selon la commission des finances, que l'État soit contraint de couvrir à 50 % des dépenses qu'il ne contrôlerait pas. Il me semble donc que la méthode suivie par le Gouvernement, c'est-à-dire l'affectation d'une enveloppe globale de 25 millions d'euros, est la plus appropriée pour le processus d'expérimentation.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 172, mais je souhaite répondre aux inquiétudes de M. Cazeau et de Mme Khiari.
Rappelons d'abord qu'un certain nombre de conseils généraux se sont engagés dans cette démarche expérimentale à une époque où l'État ne la finançait pas. Ils ont en effet considéré qu'ils avaient intérêt à utiliser les possibilités accordées pour aider les allocataires du RMI à reprendre un travail et que l'investissement qu'ils consentaient ainsi en valait la peine et sur le plan social et sur le plan financier.
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Mais ce qui motive l'avis du Gouvernement, c'est que les départements auront la liberté de déterminer le barème et pourront être plus ou moins généreux selon le programme qu'ils souhaiteront expérimenter.
Le Gouvernement formulera seulement une recommandation : que l'allocataire dont les revenus augmenteront de 100 euros en conserve effectivement 60. Au-delà, chaque département pourra moduler le taux à sa convenance. Dès lors, le Gouvernement ne peut s'engager à garantir automatiquement un financement à concurrence de 50 % à tous les départements, ce qui irait à l'encontre de la liberté que la Constitution et la loi leur accordent.
Cela dit, vous avez parlé de zones d'ombre, mais nous n'avançons pas en aveugle : nous travaillons au quotidien avec les conseils généraux, nous partageons nos données avec eux et nous observons le fonctionnement des dispositifs mis en place. Nous savons qu'avec les 25 millions d'euros qui seront « fléchés » sur ces expérimentations l'État financera au moins 50 % du surcoût. Les conseils généraux qui auront eu l'audace, le courage, l'envie ou le sens social de se lancer dans ces expérimentations tireront profit des bénéfices qui pourront en résulter !
Par ailleurs, le Gouvernement est favorable à l'amendement à n° 18.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 172.
M. Guy Fischer. Je voterai l'amendement présenté par Mme Bariza Khiari.
Là aussi, nous sommes en plein flou ! M. le haut-commissaire vient de dire qu'il y aura autant de barèmes que de départements qui choisiront de participer à l'expérimentation. S'agissant de l'exercice de droits fondamentaux, il est extraordinaire que l'on puisse ainsi remettre en cause en une soirée les principes constitutionnels d'universalité, d'équité et d'égalité, au terme de longs débats sur des dossiers extrêmement importants. Rien que pour cette raison, nous ne pourrons pas voter cet article 9 !
On nous dit que le Gouvernement consacre 25 millions d'euros à l'expérimentation, ce qui fait 15 millions d'euros pour les départements. Soit ! Si, sur le plan social, je partage les préoccupations de M. le haut-commissaire et je souscris à sa recherche sur l'exclusion - nous avons d'ailleurs travaillé ensemble -, sur le plan financier, je trouve que l'État et les départements font preuve d'une prudence excessive. Cette prudence est compréhensible de la part des départements, à qui, au fil des années, on a imposé de financer le RMI, l'APA, l'APCH, et aujourd'hui le RSA, au point que leurs finances sont dans une situation de plus en plus difficile.
Un rapporteur aussi avisé que M. Alain Vasselle devrait avoir d'innombrables questions à poser à ce propos. Je m'étonne de son silence. Il ne m'a pas habitué à cela en douze ans !
M. le président. L'amendement n° 19 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
A la fin du II de cet article, remplacer les mots :
aux prestations servies dans le cadre du 1° du I
par les mots :
aux prestations versées, dans les conditions définies au I, par les départements participant à l'expérimentation
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 270, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le cinquième alinéa de l'article 52 de la loi de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité ne s'applique pas aux prestations mentionnées au 1° du I.
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Il s'agit d'un amendement extrêmement technique portant sur les règles applicables dans le cas où des bénéficiaires déménageraient et changeraient de département. Il convient de faire en sorte que la règle de répartition des compétences entre les deux conseils généraux soit claire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'une précision très utile. La commission y est favorable.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Cet amendement ne me surprend pas, car un des principaux problèmes qui se posent dans ce domaine est celui des indus...
M. Guy Fischer. Tous les départements s'élèvent contre l'impossibilité de pouvoir effectuer des recoupements dans la gestion du RMI.
M. Jean-Pierre Fourcade. Absolument !
M. Guy Fischer. Jusqu'à présent, il n'existe même pas de liste nationale des allocataires du RMI. Cela peut paraître surprenant dans une société comme la nôtre !
M. Christian Cambon. Eh bien, votez cet amendement !
M. Guy Fischer. On se sert aujourd'hui des recoupements entre un certain nombre de fichiers, comme ceux de l'UNEDIC ou des services fiscaux, pour remettre en cause le versement d'allocations et stigmatiser certains de nos concitoyens !
M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
I. - Le revenu de solidarité active est expérimenté dans les conditions prévues au présent article en faveur des personnes bénéficiaires de l'allocation de parent isolé et de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 524-5 du code de la sécurité sociale et résidant ou ayant élu domicile dans les départements ou territoires dans lesquels sont conduites les expérimentations prévues à l'article 9. La liste de ces départements ou territoires est arrêtée par le ministre chargé de la famille au plus tard le 30 novembre 2007.
II. - Le revenu de solidarité active garantit aux bénéficiaires mentionnés au I un niveau de ressources qui varie en fonction du nombre d'enfants à la charge du bénéficiaire, du montant des rémunérations tirées de l'exercice d'une activité professionnelle ou d'actions de formation et de la durée de reprise d'activité. Le bénéficiaire perçoit une allocation égale à la différence entre ce montant garanti et ses ressources appréciées dans les mêmes conditions que celles qui sont définies à l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale et comprenant l'allocation de parent isolé.
III. - L'allocation mentionnée au II est financée par l'État et servie selon les mêmes règles que l'allocation de parent isolé en matière d'attribution des prestations, d'organisme débiteur, de financement de la prestation, de prescription, d'indus, d'incessibilité et d'insaisissabilité, de fraude et de sanctions ainsi que de contentieux. Son régime fiscal est celui de l'allocation de parent isolé.
IV. - Les articles L. 524-5 du code de la sécurité sociale et L. 322-12 du code du travail ne sont pas applicables aux bénéficiaires du revenu de solidarité active.
Lorsque les montants versés au titre du revenu de solidarité active, appréciés au moment où les bénéficiaires cessent de participer à l'expérimentation, sont inférieurs à ceux qu'ils auraient perçus s'ils n'avaient pas participé à l'expérimentation, la différence leur est restituée.
V. - Les engagements réciproques au regard de l'emploi, du bénéficiaire et de l'État sont précisés par décret.
VI. - Lorsque les personnes visées au I cessent de remplir les conditions d'isolement et de charge d'enfant prévues au premier alinéa de l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale, le droit au revenu de solidarité active est maintenu pendant une durée d'un an, sans pouvoir excéder la limite de la durée de l'expérimentation. Le nombre d'enfants à charge retenu pour le calcul du montant de ressources garanti mentionné au II est celui applicable le mois civil précédant celui au cours duquel la condition de charge d'enfant cesse d'être remplie. Le montant garanti susvisé peut être modulé pour tenir compte de la fin de la situation d'isolement. Il est fait masse, le cas échéant, pour le calcul de l'allocation mentionnée au II, des ressources du bénéficiaire et de celles de son conjoint.
VII. - La durée de l'expérimentation instituée au présent article est de trois ans à compter de la date de publication de l'arrêté prévu au I.
VIII. - Cette expérimentation est évaluée dans les conditions mentionnées au X de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée.
IX. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article, notamment les conditions de résidence du bénéficiaire dans les départements et territoires où est mis en oeuvre le revenu de solidarité active. Toutefois, le montant du revenu garanti mentionné au II est fixé par décret.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 90, présenté par M. Fischer, Mmes David et Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le quatrième alinéa de l'article L. 323-8-2 du code du travail est ainsi modifié :
1°. - Dans la première phrase, les mots : « 600 fois » sont remplacés par les mots : « 900 fois » ;
2°. - Dans la dernière phrase, les mots : « 1500 fois » sont remplacés par les mots : « 1607 fois ».
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. « Il est urgent de sortir de la situation de faiblesse souvent constatée qui consiste à laisser au bord du chemin les personnes les plus éloignées de l'emploi au profit de celles qui sont plus immédiatement employables. » Cette inquiétude que nous exprimions en 2004 lors des débats sur le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est - hélas ! - toujours d'actualité !
Pour satisfaire à cet objectif, l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, l'AGEFIPH, avait été chargée de collecter les contributions des entreprises qui n'atteignaient pas le taux d'emploi de 6 % fixé par la loi et de les affecter à des actions en faveur de l'insertion professionnelle en milieu ordinaire des travailleurs handicapés.
Force est de constater aujourd'hui que cet objectif n'est pas pleinement atteint. L'augmentation du montant des contributions collectées est révélatrice de l'échec de la politique de promotion de l'emploi des personnes en situation de handicap.
Ce constat est partagé par la commission des affaires sociales. Dans son avis rendu sur la mission « Solidarité et intégration » du projet de loi de finances pour 2006, elle établit que près d'un tiers des entreprises méconnaissent l'esprit de l'obligation d'emploi, au moment où le taux de chômage des personnes handicapées s'élève à 12 %, taux largement supérieur à celui, déjà élevé, de la population générale.
C'est pourquoi, notre amendement tend à relever significativement les plafonds des contributions au Fonds de développement pour l'insertion professionnelle des handicapés dans la limite, respectivement, de 900 et de 1607 fois le salaire horaire minimum de croissance.
Cette proposition est certes caricaturale, mais il s'agit de vous sensibiliser, mes chers collègues.
M. Jean-Pierre Fourcade. Vous stigmatisez les entreprises !
M. Guy Fischer. Là, je suis d'accord avec vous, mon cher collègue ! (Sourires.)
Cette actualisation du plafond aurait pour double effet d'inciter les entreprises concernées à considérer plus sérieusement leur politique d'embauche de personnes en situation de handicap et d'accroître temporairement les fonds susmentionnés.
Je signale d'ailleurs que le bureau du Sénat a dernièrement traité de ce problème, en vue de favoriser l'emploi des handicapés.
Nous demandons donc au Sénat d'adopter cet amendement, afin de lever les obstacles persistants que rencontrent les personnes handicapées en matière d'accès à l'emploi et de lutter ainsi contre la précarité que connaissent nombre d'entre elles.
M. le président. L'amendement n° 272, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Lorsque le bénéficiaire de l'allocation mentionnée au II réside ou élit domicile hors de la partie du territoire mentionnée au premier alinéa, tout en demeurant dans le même département, ladite allocation lui est maintenue dans les conditions définies au présent article.
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. C'est le même dispositif, appliqué à l'API, que celui que j'ai exposé tout à l'heure à propos du RMI.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
À la fin du V de cet article, remplacer les mots :
sont précisés par décret
par les mots :
font l'objet d'un décret, qui prévoit notamment les modalités d'accompagnement et de soutien des bénéficiaires de l'allocation de parent isolé dans leur démarche d'insertion et les actions de formation vers lesquelles ils peuvent être orientés
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet d'aider les départements à mettre en place une action en faveur de l'insertion et de la formation des bénéficiaires de l'API.
Aujourd'hui, les bénéficiaires de l'API sont des allocataires de l'État. Ils ne relèvent donc pas, comme les RMIstes, des conseils généraux. Or l'expérience montre que, lorsque les bénéficiaires de l'API sortent du dispositif, au minimum la moitié d'entre eux basculent dans le RMI.
Afin d'éviter cela, mener une action d'insertion et de formation, comme cela se pratique au profit de RMIstes, nous paraît absolument indispensable et pertinent pour aider les allocataires à retrouver le chemin de l'activité. Cela correspond bien à l'esprit qui sous-tend le RSA. Les présidents de conseil général le savent bien, la réussite passe par un minimum de formation.
Cet amendement prévoit donc que l'État assume ses responsabilités en matière d'insertion par l'emploi des allocataires. Ainsi, il ne se défaussera pas sur les départements. Vous noterez, monsieur le haut-commissaire, que je laisse à l'État le soin de s'organiser pour assumer cette responsabilité, en renvoyant à un décret. L'État devrait y trouver son compte en favorisant l'insertion professionnelle des personnes concernées. Ce dispositif devrait être « gagnant-gagnant ».
M. le président. L'amendement n° 267, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Au début du VI de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
Lorsque les ressources des personnes visées au I excèdent le montant du revenu familial mentionné au premier alinéa de l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale, le droit au revenu de solidarité active est, sous réserve du respect des autres conditions d'ouverture du droit, maintenu jusqu'au terme de l'expérimentation.
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Il convient de faire en sorte que les allocataires de l'API participant à l'expérimentation, dont les ressources augmentent de ce fait même, ne perdent pas le bénéfice de l'API, du fait d'une rédaction déficiente du texte.
Il s'agit donc de corriger ce point, afin de s'assurer que l'accroissement de ressources dont bénéficieront les allocataires grâce au RSA ne les prive pas de leurs droits à l'API.
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le VIII de cet article :
Le comité d'évaluation, créé au X de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006, établit, pour chaque département concerné, un rapport annuel d'évaluation de l'expérimentation visée au présent article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Après avoir examiné l'amendement n° 51 de la commission des finances, dont l'objet est analogue, mais la rédaction plus pertinente, nous retirons cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci, mon cher collègue !
M. le président. L'amendement n° 21 est retiré.
L'amendement n° 51, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter le VIII de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Toutefois, les rapports annuels sur la mise en oeuvre de l'expérimentation prévue par le présent article sont élaborés par le représentant de l'État dans les départements concernés.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 10 prévoit que l'expérimentation sera évaluée dans les conditions mentionnées à l'article 142 de la loi de finances de 2007.
En application de ces dispositions, les départements participant à l'expérimentation doivent adresser chaque année un rapport sur la mise en oeuvre de ces expérimentations au représentant de l'État dans le département.
Le Gouvernement doit par ailleurs remettre au Parlement, avant la fin de la période d'expérimentation, un rapport d'évaluation.
Nous suggérons une modification du dispositif : il devrait revenir aux services de l'État dans le département de préparer le rapport annuel sur la mise en oeuvre des expérimentations au titre de l'API. En fait, la responsabilité est conjointe, et l'API relève bien de l'État.
M. le président. L'amendement n° 273, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Après les mots :
solidarité active
rédiger comme suit la fin du IX de cet article :
et le montant du revenu garanti mentionné au II.
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 90, 272, 20, 267 et 273 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° 90, présenté par M. Fischer, reflète une nouvelle fois des conceptions et une philosophie sensiblement éloignées de celles qui sous-tendent le dispositif du RSA. Nous y sommes donc défavorables, par souci de cohérence.
En ce qui concerne l'amendement n° 272 du Gouvernement, nous émettons un avis favorable.
S'agissant de l'amendement n° 20 de la commission des affaires sociales, nous nous conformerons à l'avis du Gouvernement.
Enfin, la commission des finances est favorable aux amendements nos 267 et 273.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 90, 20 et 51 ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 90.
En revanche, il émet un avis favorable sur les amendements nos 20 et 51.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 90.
M. Guy Fischer. Mon intervention vaudra également explication de vote sur l'article 10.
L'article 10 prévoit l'extension des possibilités d'expérimentation aux allocataires de l'API.
Je vais vous lire un passage du compte rendu de l'une de mes interventions, en date du 23 janvier 2007, qui vous rappellera que j'ai des idées fixes ! (Sourires.) Nous avions alors notamment discuté des minima sociaux, Mme Vautrin représentant le Gouvernement ce jour-là :
« Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que peut-il se passer lorsque l'inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, et l'inspection générale des finances, l'IGF, se mettent d'accord, à la demande de Bercy, pour « moderniser » un minimum social aussi vital que l'allocation parent isolé, l'API, qui bénéficie actuellement à 200 000 femmes élevant seules un ou plusieurs enfants ?
« D'abord, on la prétend « obsolète ». En effet, selon les inspections, « la logique de salaire maternel qui sous-tend l'API apparaît obsolète ».
« Ensuite, on s'étonne qu'elle soit attribuée sans obligation d'insertion. C'est une rente de situation, puisque près de la moitié des allocataires passent au RMI ! De plus, elle n'est pas morale, car « du fait de sa durée et de son montant [...] elle suscite un risque d'éloignement durable de l'emploi et d'installation dans l'inactivité ». »
Il y a donc là un souci de répondre au problème posé par ces deux trappes à inactivité que seraient l'API et le RMI. Cependant, je poursuis ma citation :
« Que proposent donc les inspections à partir de ce constat ? Une « responsabilisation des bénéficiaires », ces fraudeuses en puissance qui vont déjà voir renforcer le contrôle de leur situation d'isolement. »
Là aussi, il s'agit de réprimer la fraude et les abus. Je termine ma lecture :
« Que se passera-t-il si ce rapport obtient l'aval de Bercy, ce qui est probable, puisque 125 millions d'euros d'économies sont à la clé ? »
Je pourrais reprendre le rapport qu'avaient élaboré MM. Mercier et de Raincourt, qui ont beaucoup réfléchi à ce problème. Ils proposaient notamment, très concrètement, l'unification de l'API et du RMI. Il était suggéré de transférer la gestion de l'API aux départements, compte tenu de l'expérience que ceux-ci ont acquise en gérant le RMI.
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
M. Guy Fischer. Le groupe CRC s'abstient.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
I. - Les départements ayant remis, dans les conditions fixées par le VIII de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée, un dossier de candidature pour l'expérimentation destinée à améliorer les conditions d'incitation financière au retour à l'emploi transmettent, avant le 30 septembre 2007, au représentant de l'État dans le département les compléments qu'ils souhaitent, le cas échéant, apporter à leur dossier pour tenir compte des modifications introduites par la présente loi.
II. - Jusqu'au 31 octobre 2007, à l'exception de ceux mentionnés au I, les départements peuvent, par une délibération motivée, présenter leur candidature à l'expérimentation prévue par l'article 9 de la présente loi. Ils joignent à cette délibération un dossier décrivant les expérimentations envisagées, les objectifs poursuivis, les résultats attendus, les dispositions législatives et réglementaires auxquelles ils entendent déroger ainsi qu'un protocole d'évaluation.
Dans le cas où le nombre des candidatures reçues en application du précédent alinéa excède dix, les dix départements remplissant les conditions légales autorisés à participer à l'expérimentation sont à la fois, ceux dont le dernier potentiel fiscal connu tel que mentionné à l'article L. 3334-6 du code général des collectivités territoriales est le plus faible, et ceux dont le rapport entre le nombre d'allocataires du revenu minimum d'insertion et la population totale de ces départements est le plus élevé.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 52 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 22 est présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le I de cet article, remplacer les mots :
dans les conditions fixées par le VIII de l'article 142 de la loi n°2006-1666 du 21 décembre 2006 précitée
par les mots :
avant le 30 juin 2007
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 52.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à ouvrir un peu plus le champ de l'expérimentation. Cette rectification technique permettrait aux départements de l'Ille-et-Vilaine, de la Charente et du Gers de s'y joindre.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. le président. Le sous-amendement n° 268, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa de l'amendement n° 52 par les mots :
une délibération motivée et
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Pour être sûr que l'amendement produise bien l'effet souhaité, il faut préciser que le conseil général devra avoir pris une délibération motivée dans les délais prévus.
Ainsi sous-amendé, l'amendement permettra de récupérer, si j'ose dire, trois conseils généraux qui avaient entamé la procédure d'expérimentation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 22.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Cet amendement, identique à celui de la commission des finances, est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 268 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 52 et 22, modifiés.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 275, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Dans le I de cet article, remplacer les mots :
l'expérimentation destinée à améliorer les conditions d'incitation financière au retour à l'emploi
par les mots :
l'une des deux expérimentations prévues à l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Cet amendement a un objet très simple.
Un certain nombre de départements s'étaient lancés dans l'expérimentation du contrat unique d'insertion. Deux d'entre eux souhaiteraient maintenant pouvoir bénéficier des dérogations concernant le revenu de solidarité active. Or le texte du Gouvernement ne prévoyait la réouverture du délai que pour les départements qui n'avaient rien entrepris.
Cet amendement vise donc à permettre à deux départements de mener les expérimentations relatives au contrat unique d'insertion qu'ils ont commencées et de les étendre au RSA.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Favorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 274, présenté par le Gouvernement est ainsi libellé :
Remplacer le second alinéa du II de cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
Dans le cas où le nombre des candidatures reçues en application du présent alinéa excède dix, les dix départements remplissant les conditions légales autorisés à participer à l'expérimentation sont retenus par rang décroissant de la moyenne de :
1° leur rang de classement, parmi l'ensemble des départements, selon le montant du dernier potentiel fiscal connu mentionné à l'article L. 3334-6 du code général des collectivités territoriales, établi par ordre croissant ;
2° leur rang de classement, parmi l'ensemble des départements, selon le nombre de bénéficiaires du revenu minimum d'insertion rapporté au nombre d'habitants du département considéré, établi par ordre décroissant.
La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Nous sommes obligés de limiter le nombre de départements qui pourront être retenus pour l'expérimentation du RSA et fixer à cet effet des critères objectifs, de manière à respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Après discussion avec l'Assemblée des départements de France, deux critères ont été définis : le premier nous conduit à choisir les départements dont le potentiel fiscal est le plus faible, et le second, ceux dont la proportion d'allocataires du RMI est la plus forte.
Il nous restait à trouvait le « chaînon manquant » pour combiner ces deux critères. Notre amendement consiste simplement à prévoir de calculer la moyenne des deux critères, ce qui nous a paru constituer le système le plus objectif.
M. le président. L'amendement n° 173, présenté par M. Cazeau, Mme Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne, Bricq et Khiari, MM. Massion, Godefroy, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent, Repentin, Frimat, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
à la fois
par le mot :
notamment
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Il s'agit d'une modification rédactionnelle qui va dans le sens de celle qui vient d'être présentée par M. le haut-commissaire. Elle permettra d'assouplir les critères de sélection des départements supplémentaires candidats à l'expérimentation du RSA.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est quelque peu gênée, car elle a disposé de peu de temps pour examiner cet amendement du Gouvernement, même si ce n'était pas le seul à avoir été déposé tardivement...
À ce stade, la commission n'a pas été très convaincue, mais vous allez peut-être réussir, par des explications complémentaires, monsieur le haut-commissaire, à emporter notre adhésion.
L'amendement tend à préciser les modalités de calcul permettant de sélectionner les dix départements éligibles à l'expérimentation du RSA.
Dans le texte de l'Assemblée nationale, il est indiqué que, si plus de dix candidatures sont enregistrées, le potentiel fiscal et la proportion d'allocataires du RMI seront pris en compte.
L'amendement du Gouvernement ne modifie pas ces critères, mais indique que les départements sont classés selon le résultat obtenu en faisant la moyenne des deux critères, potentiel fiscal et proportion d'allocataires au RMI.
Concrètement, les départements sont classés en fonction croissante de leur potentiel fiscal et en fonction décroissante de la proportion de RMIstes. Une moyenne de leurs rangs de classement est alors effectuée, ce qui permet de les départager.
La réaction de la commission, je m'en souviens, a été de se demander pour quelle raison il serait nécessaire d'appliquer une règle automatique. Ne serait-il pas préférable de disposer d'une marge de manoeuvre ?
En outre, si je ne me trompe, compte tenu des modifications techniques auxquelles nous venons de procéder, nous avons ajouté cinq départements. Je parle sous votre contrôle, monsieur le haut-commissaire, car je ne suis vraiment pas orfèvre en la matière : on a d'abord ajouté la Charente, le Gers, l'Ille-et-Vilaine, puis les Bouches-du-Rhône et la Côte-d'Or.
M. Guy Fischer. Et le Rhône ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur Fischer, nous connaissons votre intérêt particulier pour le département du Rhône, et nous savons que vous êtes particulièrement sensible à cette question de l'application du RSA !
Monsieur le haut-commissaire, pouvez-vous nous convaincre que cette approche est la bonne ? Me suis-je trompé dans ma liste ? Les départements que j'ai cités sont-ils inclus dans les dix ? Faut-il garder une marge de manoeuvre ou préférer une application automatique des critères ?
Pardonnez-moi, mais à cette heure tardive, je n'y vois plus très clair...
M. le président. La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Je vais essayer de répondre à vos deux interrogations.
Effectivement, il y a deux groupes de départements. Un premier groupe comprend ceux qui, sous l'empire de la législation précédente, qui était insatisfaisante, avaient déjà mis un pied dans l'expérimentation. Ces départements ont lancé des programmes qui s'apparentent soit au revenu de solidarité active, soit au contrat unique d'insertion. Ils pourront bénéficier des nouvelles dispositions législatives s'ils confirment leur volonté d'ici à l'automne.
Parmi ceux-là, qui étaient environ au nombre de dix-huit, il y en a cinq dont les situations étaient quelque peu particulières. Ils avaient glissé un orteil dans le dispositif sans mettre tout le pied. (Sourires.)
Les amendements que nous avons examinés jusqu'à présent avaient pour but de les mettre tous sur un même plan, afin que l'ensemble des départements qui ont manifesté, d'une manière ou d'une autre, leur intention par une délibération puissent être retenus sans être tributaires du nombre de départements que seront maintenant intéressés par le dispositif.
Leur situation des cinq départements que vous avez mentionnés est désormais réglée.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Donc on arrive à vingt-trois ?
M. Guy Fischer. Vous ne savez pas compter, monsieur Marini !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Le deuxième groupe comprend les départements qui seront les nouveaux bénéficiaires du dispositif. Pour les choisir, il fallait fixer des critères limitatifs.
Ces critères sont forcément automatiques : en effet, dès lors qu'un département se porte candidat et qu'il établit un dossier qui satisfait aux conditions posées par la loi, le Gouvernement n'a ni les moyens juridiques ni la légitimité pour en choisir un autre plutôt que celui-là.
Nous sommes donc obligés - pour tenir compte de la jurisprudence sévère, mais juste, du Conseil constitutionnel qui garantit la liberté des collectivités territoriales - de disposer d'une règle automatique.
Avec l'ensemble des composantes de l'Assemblée des départements de France, nous avons donc essayé de fixer les critères les plus fins possibles. C'est la raison pour laquelle cette règle automatique se fonde sur deux critères dont la combinaison ne peut être à la discrétion du Gouvernement, mais doit au contraire - je parle sous l'oeil avisé du président Fourcade - être déterminée de manière tout à fait stricte.
Cela dit, rien n'empêche l'ensemble des départements et l'Assemblée des départements de France de se mettre d'accord pour que le chiffre des dix départements ne soit pas dépassé, afin que nous ne soyons pas obligés de faire jouer cette clause de sauvegarde juridique.
C'est bien pour sécuriser ce texte sur le plan juridique que vous nous proposons cet amendement. Nous l'avons déposé tardivement parce l'Assemblée des départements de France avait d'abord retenu un seul critère, puis un second, et enfin, a conclu à la combinaison des deux. Je vous demande de nous en excuser.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Comme je l'ai souligné dans la discussion générale, le souci de la commission des affaires sociales, lorsqu'elle a examiné ce dispositif, était de veiller à ce que l'échantillon des départements soit représentatif, d'une part, des différents niveaux de richesse - qui est mesurée par le critère du potentiel fiscal - et, d'autre part, de la répartition de la population des RMIstes sur le territoire.
Nous l'avons vu avec le département de l'Eure : en choisissant le bassin d'emploi où il y a le plus d'entreprises et donc où le potentiel est le plus important pour permettre à ses RMIstes de bénéficier du RSA, et en faisant la sélection de ces RMIstes pour leur donner un maximum de chances en termes d'employabilité, le département mettait toutes les chances de son côté pour la réussite de l'opération.
C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas jugé opportun de proposer une modification de l'amendement du Gouvernement, mais nous souhaitons tout de même attirer l'attention du haut-commissaire sur la nécessité de veiller à ce que l'échantillon soit aussi représentatif que possible à la fois en termes de richesse et de nombre de RMIstes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Compte tenu des explications que le haut-commissaire a apportées sur les règles appliquées par le Conseil constitutionnel, je comprends mieux pourquoi il est nécessaire de disposer d'une règle automatique.
De ce fait, sous le contrôle du président Arthuis, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 173 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
Avant toute généralisation du dispositif visé aux articles 8 à 11, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation sur l'expérimentation des départements participant à la création du revenu de solidarité active.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 134 rectifié, présenté par M. Charasse, Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mmes Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation sur l'expérimentation des départements participant à la création du revenu de solidarité active.
Si ce rapport conclut à une évaluation positive du dispositif visé aux articles 8 à 11, il pourra être étendu à l'ensemble des départements, après réexamen s'il y a lieu des modalités de compensation financière au regard du quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement s'inscrit dans la continuité de celui que nous avons présenté tout à l'heure sur la répartition des charges de l'expérimentation. Vous allez comprendre pourquoi nous avons maintenu notre amendement malgré les explications de M. le haut-commissaire et les recommandations du rapporteur général de le retirer.
Au moment où le rapport d'évaluation sur l'expérimentation des départements sera établi, il faudra discuter de nouveau des modalités de compensation financière de l'État, dans le cas où, les enseignements du dispositif s'avérant positifs, nous déciderions de l'étendre.
Avec cet amendement, nous sommes relativement ambitieux puisque nous faisons référence au quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution. Ce dernier précise : « Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. »
Une prise en charge par l'État de l'ordre de 50 % du coût de l'expérimentation a été évoquée, sans que nous ayons obtenu de garanties pour la suite. Dans le système provisoire de l'expérimentation, qui repose sur le volontariat - comme vous l'avez rappelé, monsieur le haut-commissaire -, il est logique qu'il n'y ait pas de compensation intégrale. Mais, si le système est généralisé et devient obligatoire pour tous les départements, il en va tout autrement. Il faudra donc absolument que, au moment où sera tiré le bilan de l'expérimentation, les modalités de compensation soient envisagées.
En début de soirée, nous avons évoqué le RMI. Chat échaudé craint l'eau froide ! La dette de l'État à l'égard des départements au titre du RMI s'élève à plus de 2 milliards d'euros. Aussi, vous nous permettrez d'être vigilants au moment de l'évaluation de cette expérimentation. Nous souhaitons dès ce soir fixer, non pas les règles définitives, mais au moins le principe de la compensation financière.
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Vasselle au nom de la commission des affaires sociales est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Avant toute généralisation du dispositif visé aux articles 8 à 10, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation de son expérimentation dans les départements mentionnés à l'article 11. Le comité mentionné au X de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 rend un avis portant sur cette expérimentation annexé à ce rapport.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Cet amendement a deux objectifs : le premier est de corriger une erreur de référence et le second, de prévoir que le comité d'évaluation qui était prévu dans la loi de finances pour 2007 rende un avis sur l'expérimentation du RSA, avis qui sera annexé au rapport transmis par le Gouvernement au Parlement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais rappeler à Nicole Bricq que, lorsque la question de l'extension se posera, il sera tout naturellement fait application des dispositions de l'article 72-2 de la Constitution qu'elle a citées.
Si le RSA est étendu - et je souhaite vivement le succès de ces expérimentations afin que ce soit le cas -, le niveau des ressources nécessaires sera déterminé par la loi.
La question qui va se poser est celle de la maîtrise de la dépense : s'il y a des variations d'un département à l'autre résultant de la politique conduite en toute liberté par les assemblées départementales dans le cadre de leur autonomie, on peut concevoir que l'État ne compense pas intégralement une dépense qu'il ne maîtrise pas totalement.
Il faut éviter de rester dans l'ambiguïté sur ce sujet.
Quant à l'amendement que vous avez déposé, dont le premier signataire est Michel Charasse, il a été qualifié en commission des finances de bon amendement d'appel. Je suppose donc qu'il sera retiré après que le haut-commissaire nous aura fait part de son sentiment sur la question.
S'agissant de l'amendement de la commission des affaires sociales, la commission des finances y est tout à fait favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. M. le rapporteur général a utilisé des arguments extrêmement forts et de nature à rassurer les auteurs de l'amendement n° 134 rectifié sur les garanties constitutionnelles.
Lorsque nous reviendrons, et ce sera le plus vite possible, devant le Parlement pour étendre le revenu de solidarité active à d'autres catégories, nous le ferons évidemment dans des conditions respectueuses de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Mme Nicole Bricq. Évidemment...
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Absolument, et vous pourrez alors citer ce que je viens de dire !
Au bénéfice de ces observations, je vous demande donc, madame Bricq, de bien vouloir retirer cet amendement, sachant que, sinon, il fera l'objet bien entendu d'un avis défavorable du Gouvernement.
Le Gouvernement est en revanche favorable à l'amendement n° 23, mais sous une toute petite réserve rédactionnelle. Le Gouvernement ne se sent pas « propriétaire » de l'expérimentation et préférerait donc qu'il soit prévu que « le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation », et non pas « un rapport d'évaluation de son expérimentation ».
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, acceptez-vous la modification proposée par M. le haut-commissaire ?
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis. Bien sûr !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Vasselle au nom de la commission des affaires sociales, qui est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Avant toute généralisation du dispositif visé aux articles 8 à 10, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation dans les départements mentionnés à l'article 11. Le comité mentionné au X de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 rend un avis portant sur cette expérimentation annexé à ce rapport.
Madame Bricq, l'amendement n° 134 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Je partage le souci légitime exprimé par Nicole Bricq et par le groupe socialiste, souci qui est renforcé par celui de la maîtrise de la dépense.
On sait quels problèmes pose la compensation des très nombreuses prestations sociales qu'il est demandé aux départements de mettre en oeuvre et, comme disait Mme Bricq, chat échaudé craint l'eau froide.
Pour l'allocation personnalisée d'autonomie, par exemple, le problème a été « résolu » par une enveloppe fermée : la participation de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a été bloquée à 2 milliards d'euros.
Cette situation suscite bon nombre de difficultés et ne va pas sans conséquences, à commencer, hélas ! par une réduction du nombre des personnes qui peuvent accéder aux prestations sociales.
C'est bien pour cela que je disais tout à l'heure que le débat était obscur, ce qui devrait à mon sens soulever bien des interrogations parmi ceux qui y assistent. Je ne suis sénateur que depuis douze ans, mais je suis certain que l'on n'a jamais discuté ici dans un tel brouillard !
Mme Nicole Bricq. On expérimente ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. Exactement !
Je veux bien croire M. le haut-commissaire, mais, comme le faisait remarquer M. le rapporteur, en posant le principe de la liberté de barème, c'est le principe de l'universalité que l'on fait passer par-dessus bord ! On remet donc en cause des droits fondamentaux sans en discuter précisément.
La liberté de barème signifie-t-elle qu'il y aura autant de barèmes que de départements ? Certainement, et l'on sait par expérience à quels écarts cela peut conduire !
Si l'objectif est de faire accéder à l'emploi le plus grand nombre de nos concitoyens, il est légitime, mais nous sommes en droit de nous demander dans quelles conditions. Or ne sommes-nous pas en train d'institutionnaliser le travail précaire et de nous engager dans une ligne anglo-saxonne ? C'est un problème !
M. le président. En conséquence, l'article 12 est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 12
M. le président. L'amendement n° 190, présenté par MM. Vial, de Broissia, Bailly, Fouché, Leroy, du Luart, Hérisson, Doligé et Richert est ainsi libellé :
Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les départements volontaires pour mettre en oeuvre l'expérimentation mentionnée au IV de l'article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 se portent candidats auprès du représentant de l'État dans le département avant le 31 octobre 2007, par une délibération motivée de leur assemblée délibérante. Ils lui adressent, avant cette même date, un dossier décrivant les expérimentations envisagées, les objectifs poursuivis, les résultats attendus, les dispositions législatives et réglementaires auxquelles ils entendent déroger ainsi qu'un protocole d'évaluation.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Voici peut-être un rayon de lumière qui fera pièce à l'obscurité et au brouillard que dénonçait notre collègue Guy Fischer ! (Sourires.)
Nous avons longuement parlé de RSA et d'expérimentations. Les derniers amendements nous ont permis de constater qu'il y avait de nombreuses demandes puisque la liste s'ouvre. Ont aussi été évoquées les conditions d'encadrement des expérimentations.
Nous avons beaucoup moins parlé des contrats uniques, qui sont également des outils très attendus par les départements. Ces derniers sont maintenant complètement impliqués dans la gestion du RMI-RMA ; ils ont fait la preuve de leur capacité à assurer la mise en oeuvre de ces politiques au plus près du terrain et nombre d'entre eux souhaitent aller plus loin.
L'expérimentation de ces nouveaux outils est d'ores et déjà prévue par la loi de finances du 21 décembre 2006, mais celle-ci encadrait les candidatures dans des délais qui se sont avérés trop brefs pour beaucoup de départements.
Cet amendement tend donc à reporter la date limite, initialement fixée au 31 mars 2007, au 31 octobre 2007 pour permettre aux départements volontaires de mettre en oeuvre le contrat unique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme nos collègues l'auront observé, il ne s'agit plus du RSA mais de l'expérimentation des contrats aidés issus de l'article 142 de la loi de finances pour 2007.
La commission des finances ne peut qu'être tout à fait favorable à la suggestion de notre collègue Jean-Pierre Vial visant à laisser la porte ouverte aux départements volontaires jusqu'au 31 octobre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Dans la lettre de mission que, comme tous mes collègues du Gouvernement, j'ai reçue, le Président de la République et le Premier ministre me chargent précisément de réformer les contrats aidés.
Nous n'entendons pas imposer cette réforme « d'en haut », mais au contraire nous appuyer sur les expériences menées dans les départements.
En Savoie, M. Vial a déjà commencé à travailler avec la direction départementale du travail et l'ANPE, comme l'a fait M. de Broissia en Côte-d'Or, l'objectif étant de mettre en place un dispositif qui ne stigmatise pas certains publics, qui soit plus ouvert et plus souple, notamment en ce qui concerne le nombre d'heures.
Le Gouvernement souhaite encourager, accompagner et tirer les enseignements de ces démarches, et il est donc bien évidemment favorable à cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
Article 13
Le Gouvernement présentera devant les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, avant le 1er janvier 2008, un rapport relatif aux modalités de rapprochement du versement de la prime pour l'emploi et de la période d'activité, et aux modalités d'inscription du montant de la prime pour l'emploi sur le bulletin de salaire.
M. le président. L'amendement n° 110, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le gouvernement présente au Parlement avant le 1er janvier 2008 un rapport visant à analyser l'opportunité et les modalités d'un rapprochement du versement de la prime pour l'emploi et de la période d'activité qui y ouvre droit.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme nous l'avions annoncé en commission, l'avis sur cet amendement, qui vise à clarifier l'objet du rapport sur la prime pour l'emploi, sera favorable sous réserve de l'ajout du membre de phrase suivant : « ainsi que les modalités d'inscription de la prime pour l'emploi sur le bulletin de salaire ».
M. le président. Cet ajout est-il accepté ?
Mme Nicole Bricq. Oui !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 110 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, qui est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le gouvernement présente au Parlement avant le 1er janvier 2008 un rapport visant à analyser l'opportunité et les modalités d'un rapprochement du versement de la prime pour l'emploi et de la période d'activité qui y ouvre droit, ainsi que les modalités d'inscription du montant de la prime pour l'emploi sur le bulletin de salaire.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 13 du projet de loi est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 13
M. le président. L'amendement n° 142 rectifié, présenté par Mme B. Dupont, Bout, Debré, G. Gautier, Gousseau, Henneron, Hermange, Kammermann, Procaccia, Rozier et Sittler est ainsi libellé :
Après l'article 13, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 900-5 du code du travail, après les mots : « actions de formation », sont insérés les mots : « et à favoriser l'accès à la formation des femmes désireuses de reprendre une activité professionnelle interrompue pour des motifs familiaux ».
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Cet amendement vise à mettre en place des actions de formation en faveur des femmes qui interrompent leur activité professionnelle pour se consacrer à l'éducation de leurs enfants, car elles ont souvent du mal à se réinsérer ensuite dans l'emploi.
La loi envisage d'ores et déjà le cas des femmes reprenant leur activité après un congé de maternité et des parents rentrant de congé parental, mais rien n'est prévu en revanche en faveur des femmes ayant cessé leur activité professionnelle en dehors de ces deux régimes protecteurs et dont la réinsertion sur le marché du travail peut être rendue très difficile par l'évolution rapide des emplois et des qualifications.
Il semble que ces femmes se heurtent trop souvent à l'inertie du service public de l'emploi, auquel il appartient d'accompagner leur réinsertion. C'est avec le souci de remédier à cette situation que la plupart des femmes du groupe UMP ont cosigné cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est la première fois que ce « club » présente collectivement un amendement et cette innovation mérite d'être saluée ! (Sourires.)
Le sujet est d'importance, mais le lien de cet amendement éminemment sympathique avec le coeur du texte que nous examinons est assez incertain. Sommes-nous vraiment en mesure de l'analyser comme il conviendrait et de trouver le dispositif adéquat ?... Je demande l'avis du Gouvernement. (Rires.)
M. le président. Nous allons voir si M. le haut-commissaire est féministe...
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée. (Nouveaux rires.)
M. le président. La sagesse est toute féminine !
Je mets aux voix l'amendement n° 142 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Intitulé du projet de loi
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 91, présenté par Mme Beaufils, MM. Vera, Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l'intitulé du projet de loi :
Projet de loi en faveur de la rentabilité financière, de la spéculation immobilière
et de la restauration des privilèges
(Sourires.)
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Au terme de ces trois jours de débat, nous proposons un ultime amendement visant à intituler ce texte « projet de loi en faveur de la rentabilité financière, de la spéculation immobilière et de la restauration des privilèges » au lieu de « projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ».
Quoi de plus noble a priori que de voter des lois qui permettent d'offrir du travail, de créer des emplois et d'améliorer le pouvoir d'achat ? Cela ferait d'ailleurs un beau sous-titre pour le projet de loi de finances pour 2008. Je crains cependant que le véritable sous-titre de la prochaine loi de finances ne soit « révision générale des politiques publiques et déclin de la dépense publique » !
En effet, la liberté que le Gouvernement prend de réduire ses recettes fiscales va se payer lourdement, dès l'an prochain, dans le cadre de la réduction des dépenses publiques !
Mais, à la vérité, le texte que vous nous avez présenté ne porte pas sur les sujets évoqués. Cela nous a été suffisamment dit et répété tout au long de ces trois jours : il s'agit non pas d'un texte social, mais d'un texte fiscal. Et, comme il est fiscal, il faut donc clairement le caractériser.
Si vous êtes PD-G d'une grande entreprise assujettie à l'ISF, que votre épouse et vos enfants sont détenteurs d'une part minoritaire du capital de votre entreprise, que vous disposez d'un patrimoine immobilier varié, alors cette loi est faite pour vous !
Vos salariés vont travailler plus et donc produire plus, pour le plus grand bien de la rentabilité de votre entreprise et des dividendes que vous tirez de vos actions.
Si l'un de vos enfants est étudiant, il pourra, dans le cadre du rattachement au foyer fiscal, vous permettre de bénéficier de 1 500 euros de remise d'impôts - une toute petite douceur dans votre cas ! -, mais il perdra peut-être la prime pour l'emploi qui va avec ses jobs d'été.
Si vos enfants sont majeurs et que vous souhaitez les aider à s'installer, vous pouvez, avec votre épouse, offrir à chacun de vos enfants un magnifique appartement d'une valeur de 300 000 euros sans avoir à payer le moindre droit.
Vous pouvez aussi doter vos enfants d'une partie du capital de votre entreprise.
Tout cela vous permettra de payer moins d'ISF, tout en maintenant le capital dans la famille.
Et puis, comme vous avez l'intention de mettre en oeuvre un plan de restructuration de votre entreprise, vous utiliserez votre ISF pour doter en capital une PME qui a été créée par un membre de votre famille et qui deviendra peut-être aussi sous-traitante de votre entreprise.
Tout cela est rendu possible grâce à ce projet de loi.
Je n'ai pas calculé le total des moins-values fiscales qui iront de pair avec les différents choix de gestion de patrimoine ici décrits, mais cela n'a rien à voir avec ce qui attend les salariés de cette entreprise !!
Ils travailleront plus, étant donné qu'ils sont payés sur une grille de rémunération qui commence sous le SMIC, ce qui n'est pas suffisant pour faire face aux dépenses de leur famille.
Certains perdront peut-être une grande partie de la prime pour l'emploi qui va avec la faible rémunération que vous lui versez.
Ils perdront peut-être aussi quelques-uns des allégements de taxe d'habitation qui compensent la modicité de leurs revenus. Mais que l'on se rassure, ils pourront peut-être décider d'accéder à la propriété et donc de s'endetter pour le faire !
Voilà ce à quoi va conduire, dans la vie quotidienne, le texte que vous nous avez présenté comme étant destiné à revaloriser le travail.
Le titre que nous proposons de lui donner nous semble, à la lumière de ce que nous venons de dire, bien plus adapté, car tout dans ce texte est fait pour favoriser la rentabilité financière, la spéculation immobilière et la restauration des privilèges ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Masseret, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Cazeau, Mmes Le Texier, Demontès, Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Bergé-Lavigne et Khiari, MM. Repentin, Frimat, Godefroy, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi :
Projet de loi portant sur diverses mesures à contenu fiscal et social.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Tout au long du débat qui nous a réunis pendant toutes ces journées et toutes ces nuits, chaque fois que nous nous égarions, notamment à propos des heures supplémentaires, sur le chemin du droit du travail, M. le rapporteur général n'a eu de cesse de nous ramener à ce qu'il appelait des dispositions fiscales.
Le Gouvernement n'a pas voulu faire un collectif budgétaire, espérant ainsi repousser la facture à plus tard et gagner quelques mois, il n'a pas voulu non plus faire ce que l'on appelle communément un DDOF, autrement dit un projet de loi portant diverses dispositions financières. Il a choisi d'intituler ce texte « emploi, travail et pouvoir d'achat ».
D'un point de vue politique, nous considérons que ce projet de loi ne répond à aucun de ces objectifs. C'est pourquoi nous pensons qu'il vaut mieux l'intituler : « Projet de loi portant sur diverses mesures à contenu fiscal et social. »
Bien que Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi nous ait dit que toutes les exonérations sociales seraient compensées intégralement par le budget de l'État, nous en revenons toujours au débat fiscal, mais, pour plus de clarté, nous avons tenu à ajouter le mot « social ».
En conclusion, je dirai qu'il sera sans doute difficile de contrer cette argumentation si l'on se reporte à ce qu'ont déclaré tout au long du débat tant M. le rapporteur général que le Gouvernement, à savoir qu'il s'agissait bien de mesures à caractère fiscal.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais d'abord saluer l'humour du groupe CRC et, ensuite, répondre à Nicole Bricq que les titres des lois, on les oublie tout de suite ! Par conséquent, cela n'a aucune importance au moment où nous en discutons, au-delà, bien sûr, de la communication.
Ce qui est important, ce sont les dispositions que les lois contiennent et, surtout, leur efficacité.
Ainsi, les mesures que nous avons prises en matière de détaxation et de réduction de charges sociales sur les heures supplémentaires seront, j'en suis personnellement convaincu, un puissant levier de dynamisme, de nature à desserrer le carcan.
Le revenu de solidarité active procède d'un esprit nouveau destiné à mieux gérer la transition de l'assistance au travail.
L'évolution des droits de succession, notamment leur suppression pour le conjoint survivant, constitue une mesure majeure qui concernera très largement notre société.
Voilà quelques exemples qui ne sont pas exhaustifs. C'est de ces mesures dont on se souviendra et non de l'intitulé de la loi qui tombera dans l'oubli.
Souhaitons ensemble que ces dispositions servent, pour la nouvelle législature, de bonne introduction à une politique économique faisant de l'initiative et de la responsabilité des valeurs majeures et mieux respectées. C'est cela qui est essentiel.
La commission est donc bien entendu défavorable à ces deux amendements, qui visent à modifier l'intitulé de ce projet de loi au moment même où nous en achevons l'examen.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Je voudrais, à cette heure tardive, remercier les uns et les autres des arguments qui ont été soutenus et qui devraient nous permettre d'avancer sur la question du revenu de solidarité active. Nous espérons qu'il contribuera à faire mentir le pessimisme qui transparaissait dans vos invitations à modifier l'intitulé de ce projet de loi ; un débat similaire a d'ailleurs déjà eu lieu à l'Assemblée nationale sur ce sujet.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 101.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très brièvement, comme il est d'usage en pareille circonstance, je voudrais en quelque sorte dresser le bilan de nos travaux sur ce texte.
Le Sénat a retenu beaucoup d'amendements.
En ce qui concerne la défiscalisation des heures supplémentaires, nous avons adopté un amendement important du Gouvernement mettant fin à des pratiques d'optimisation qui coûtaient, en termes d'allégement de charges, entre 400 millions et 500 millions d'euros.
Pour ce qui est de l'avantage fiscal accordé aux intérêts d'emprunt pour la résidence principale, nous avons, monsieur le haut-commissaire, voté, avec l'accord du Gouvernement, un amendement portant le montant du crédit d'impôt à 7 500 euros pour une personne handicapée célibataire et à 15 000 euros pour un couple lorsqu'un de ses membres est handicapé.
À l'article 4, nous avons relevé l'abattement au profit des neveux et nièces en matière de droits de succession à 7 500 euros.
Nous avons adapté le régime des réversions d'usufruit entre époux pour rendre totalement réel le principe de l'exonération complète du conjoint survivant.
Nous avons introduit un article 4 bis A prévoyant l'indexation des tranches du barème des droits de succession.
Nous avons voté, à l'article 5, la prise en charge par l'État de la restitution, au titre du bouclier fiscal, actuellement refacturée aux collectivités locales.
Nous avons introduit un article qui prévoit l'autoliquidation de l'ISF.
Nous avons réduit de dix à six ans le droit de reprise de l'administration en matière d'ISF.
Nous avons repris une initiative émanant du groupe socialiste et qui tendait à demander au Gouvernement la rédaction d'un rapport sur le rapatriement des contribuables qui avaient cru bon de s'en aller à l'étranger.
À l'article 6, nous avons modifié sensiblement le régime des investissements dans les PME ainsi que le régime des dons à des fondations dans la limite de 50 000 euros de dette d'impôt de solidarité sur la fortune.
Je ne reviendrai pas sur les modifications que nous avons apportées dans ce domaine, mais nous avons trouvé un compromis entre les partisans de l'investissement direct et ceux qui souhaitaient une certaine forme de mutualisation, dans le cadre des fonds d'investissement de proximité.
Tels sont, pour l'essentiel, les acquis de nos votes. J'espère bien entendu qu'ils seront validés par la commission mixte paritaire, mais les conditions dans lesquelles s'ouvre cette nouvelle législature laissent augurer des relations tout à fait constructives entre les commissions des finances des deux assemblées.
M. Jean Desessard. Vous êtes direct !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur Desessard, je pense qu'à cette heure-ci mieux vaut aller droit au but ! Je dresse simplement un bilan de façon notariale, comme pourrait le faire Alain Lambert, en rappelant simplement ce que nous avons voté.
Enfin, je tiens à souligner que le dialogue avec le Gouvernement a été très fructueux, tant avec Mme Christine Lagarde qu'avec M. Hervé Novelli et M. Martin Hirsch, puisque nous avons eu le plaisir de clore l'examen de ce projet de loi avec le haut-commissaire.
Je l'indique en présence du secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement : le Sénat a obtenu des réponses particulièrement intéressantes de la part de Mme la ministre de l'économie sur le problème des tarifs régulés ou réglementés du gaz et de l'électricité, ainsi que sur la question de la politique à mettre en oeuvre à l'égard de nos partenaires en Europe sur ce sujet si difficile de l'application ou de la renégociation des directives « énergie ». À ce propos, le débat qui a eu lieu au Sénat constitue, je crois, une étape importante de l'évolution des esprits dans ce domaine.
Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi a également été réceptive, accueillante, à l'égard de l'idée que la commission des finances lui a soumise visant à mettre en oeuvre un statut des résidents fiscaux temporaires pour favoriser l'attractivité du site France.
Cet amendement a, certes, été retiré, mais il a été dit que ce serait l'un des premiers sujets examiné par le Haut comité de Place chargé de concevoir et de promouvoir des mesures destinées à valoriser et à rendre plus attractive la place financière de Paris.
J'ajoute, monsieur le haut-commissaire, que nous avons beaucoup apprécié vos prestations tant en homme de passion que vous êtes qu'en homme précis et pragmatique. Vous avez ainsi jalonné le chemin de cette expérimentation que vous proposez.
Je suis personnellement convaincu qu'il s'agira vraiment d'une grande réforme. J'ajoute que, contrairement à ce qui se passe parfois pour d'autres réformes, vous prenez le temps de l'adaptation au terrain en posant clairement, méthodiquement les règles du jeu et en faisant appel à l'initiative des acteurs locaux.
On perçoit bien l'intérêt que, dans ces conditions, votre contribution présente pour le Gouvernement : vous apportez toute l'expérience de l'ancien président d'un grand mouvement associatif, qui sait parfaitement que les réformes ne peuvent seulement venir seulement d'en haut, qu'il faut les faire admettre, témoigner de beaucoup de conviction et faire changer les mentalités, ce qui exige un travail en profondeur.
Que tous ces travaux aient été techniquement utiles, c'est pour moi une certitude. Qu'ils nous permettent de commencer la nouvelle législature dans de bonnes conditions, c'est ce que la majorité et même le Sénat dans son ensemble doivent penser, me semble-t-il.
Enfin, je remercie tous nos collègues, de la majorité comme de l'opposition, qui ont participé très activement à nos débats.
Finalement, nous avons pu tenir dans les délais qui avaient été impartis par la conférence des présidents : certes, nous terminons nos travaux un peu tard, mais l'Assemblée nationale a siégé une journée de plus qu'il n'était envisagé par sa conférence des présidents. Au Sénat, cette même instance avait prévu une séance éventuelle le samedi matin, ...
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Et même toute la journée du samedi !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous avez raison, monsieur le secrétaire d'État, mais le samedi matin, au moins, était sérieusement envisagé.
Nous, nous donc travaillé une demi-journée de moins que prévu, ce qui signifie que nous sommes meilleurs que l'Assemblée nationale ! (Sourires.)
Nous avons travaillé comme il le fallait, à la fois qualitativement et quantitativement, grâce à la présidence, à l'ensemble des personnels de la Haute Assemblée, au secrétariat des deux commissions, à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, Alain Vasselle, et, bien entendu, à M. le président de la commission des finances, Jean Arthuis.
Permettez-moi enfin d'associer les collaborateurs des ministres qui se sont succédé au banc du Gouvernement, avec lesquels nous avons pu nouer et développer d'excellentes relations. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, le texte dont nous achevons l'examen est important parce qu'il concrétise nombre des engagements de campagne du Président de la République.
Ce projet de loi prouve que le chef de l'État et le Gouvernement manifestent une véritable volonté de changement.
De même qu'il a relancé l'Europe et qu'il s'est attelé sérieusement à la réforme des institutions, le Président de la République a soumis à la représentation nationale ce projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, afin de créer l'électrochoc dont notre économie a besoin.
Si la volonté est claire, les résultats seront-ils au rendez-vous ? Autrement dit, le paquet de mesures fiscales et les 13,6 milliards d'euros de non-rentrées fiscales qu'il implique seront-ils de nature à relancer l'investissement et la croissance et, partant, à lutter efficacement contre le chômage?
À cette question fondamentale, une partie des membres du groupe UC-UDF ne croit pas devoir répondre par l'affirmative, et choisit donc de s'abstenir.
Monsieur le secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire, je ne suis pas de leur nombre et, avec la majorité des membres de mon groupe, je veux croire à la réussite de votre projet. Nous voulons être optimistes face aux mesures que vous nous demandez de voter.
Les membres du groupe UC-UDF les plus critiques vis-à-vis de ce projet de loi font valoir que celui-ci ne comprend que des cadeaux fiscaux ou des mesures de pure relance par la consommation.
Leurs remarques ne sont pas totalement infondées dans la mesure où, effectivement, l'inspiration principale du TEPA, faute d'être purement keynésienne, mise sur une relance par la demande. C'est bien cette philosophie qui inspire la défiscalisation des heures supplémentaires et complémentaires.
Pourquoi pas ? Mais encore faut-il que, parallèlement, l'on prenne les mesures structurelles nécessaires pour libérer l'offre et accompagner le regain de croissance. Il s'agit là d'un point fondamental : la faiblesse de la croissance française viendrait principalement de la structure même de notre appareil de production.
En particulier, comme ne cesse de le souligner Jean Arthuis, il est nécessaire de revoir très rapidement le financement de la protection sociale, sans quoi les mesures du TEPA pourraient ne pas avoir l'impact escompté, surtout si, comme on peut le craindre, les heures supplémentaires se mettent insidieusement à remplacer les augmentations de salaires, et sur ce point aussi il conviendra d'être vigilant.
Notre optimisme est donc conditionné à la confiance que nous plaçons dans la volonté du Gouvernement : celui-ci doit prendre les mesures structurelles qui s'imposent, aussi douloureuses soient-elles.
L'optimisme que je partage avec mes collègues s'arrête là où commence le déficit de la France. Je le répète, le paquet fiscal, ce sera au minimum 14 milliards d'euros de non-rentrées fiscales. Pour financer les autres mesures du programme présidentiel, le Gouvernement devra trouver quelque 15 milliards d'euros supplémentaires, le tout en maintenant l'objectif d'un retour à l'équilibre budgétaire en 2012. Ce sont donc 80 milliards d'euros qu'il faudra trouver d'ici cette date, sans compter les 45 milliards d'euros de la programmation militaire qui ne sont pas budgétés.
Notre collègue député Charles-Amédée de Courson a dégagé des pistes d'économies extrêmement prometteuses, et je crois savoir que le Président de la République lui-même a engagé une réflexion pour les suivre.
À mon sens, le déficit et l'endettement de l'État et des organismes de sécurité sociale constituent les problèmes les plus sérieux auxquels se trouve confronté notre pays. Or les solutions pour enrayer la dynamique vicieuse de l'endettement existent. C'est au Gouvernement d'agir, faute de quoi les mesures du TEPA n'auront, à coup sûr, aucun effet positif et les efforts du Président de la République pour faire revenir la France sur le devant de la scène européenne seront voués à l'échec.
En effet, de notre capacité à nous conformer aux critères de Maastricht dépendra notre crédibilité européenne. Mes chers collègues, l'autorité de notre pays dans l'Union est en jeu !
Pour accompagner le volontarisme du chef de l'État et de son gouvernement, la majorité des membres du groupe UC-UDF et moi-même voterons ce texte, sans oublier pour autant que le principal problème, celui de la dette, reste à régler.
Monsieur le haut-commissaire, la quasi-unanimité des membres de notre groupe vous font entièrement confiance pour mener l'action que vous avez engagée.
Nous vous souhaitons la plus grande réussite, car elle sera également la réussite de la France. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, à mon avis, ce projet de loi passera à la postérité sous le titre, que lui a accordé la presse, de « paquet fiscal ».
Au fil nos discussions, c'est finalement à plus de 15 milliards d'euros que devrait s'élever la facture en année pleine. Les chiffres se sont bien sûr affinés, mais des cadeaux supplémentaires ont aussi été accordés. C'est très net s'agissant des successions et de l'ISF, mais je ne reviendrai pas sur les dispositions adoptées, car M. le rapporteur général les a citées tout à l'heure.
Le coût de ce projet de loi est de plus en plus lourd pour nos finances publiques. Nous devons donc nous demander - c'est en tout cas l'interrogation qui ressort de la plupart des rapports qui ont été présentés sur ce projet de loi - si ces dépenses serviront l'intérêt général. À notre avis, la réponse est non.
Aux 120 000 successions imposables recensées chaque année, on va accorder encore un peu plus ! Pour les 533 000 contribuables assujettis à l'ISF, rien n'est trop beau, et les mesures proposées supprimeront un sixième du produit de cet impôt.
Comme nous l'avons tous remarqué pendant nos débats, ce sont souvent les mêmes foyers qui seront concernés par ces mesures. Il y aura donc un cumul d'avantages entre l'allégement des droits de mutation et celui de l'ISF, que l'on aborde la question par le biais du bouclier fiscal, de l'investissement dans les PME ou de la transmission de patrimoine, entre autres mesures plus ou moins importantes.
En revanche, vous avez été très attentifs à ce que les pauvres ne cumulent surtout pas les avantages du RSA et de la PPE ! Vous n'avez pas voulu entendre que les salariés endettés pour l'achat de leur logement avaient besoin de plus de prêts à taux zéro qui, je le rappelle, ne sont souvent que des prêts complémentaires. Enfin, la déductibilité des intérêts des prêts immobiliers que vous avez présentée ne répondra pas, pour l'essentiel, à leurs besoins.
La majorité du Sénat nous propose d'adopter un texte modifié qui est encore plus favorable aux plus hauts revenus et aux plus gros patrimoines et encore plus sourcilleux et pointilleux pour les salariés, ceux-là mêmes qui n'ont que leur travail pour vivre.
Compte tenu de son coût, étant donné les pertes de recettes fiscales qu'il implique, ce projet de loi annonce, nous le savons tous, une réduction drastique de la dépense publique, dont les premières victimes seront ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu, n'ont pas d'enfants poursuivant des études à un haut niveau, ne disposent pas d'un patrimoine immobilier à transmettre et ne s'acquittent pas de l'impôt de solidarité sur la fortune. Pourtant, c'est là la situation de la plus grande partie des habitants de notre pays !
Ce projet de loi est totalement déséquilibré. Les plus riches seront largement servis par les 15 milliards d'euros qu'il coûte et la grande majorité de la population n'y trouvera rien pour elle-même, sinon quelques miettes.
C'est pourquoi nous voterons contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, afin de ne pas allonger inutilement nos débats, je souhaite faire deux observations seulement, au nom du groupe UMP, qui porteront successivement sur la cohérence de ce projet de loi et sur la qualité de nos délibérations.
En effet, les divers sujets connexes que nous avons évoqués ne doivent pas nous faire perdre de vue l'objectif central de ce projet de loi : réhabiliter le travail comme valeur, outil d'amélioration du pouvoir d'achat et instrument de lutte contre le chômage.
Le Président de la République a pris l'engagement de placer le travail au coeur de sa politique et d'en faire le critère de toutes les politiques publiques, ainsi que l'objectif de toutes les réformes en matière sociale, économique, fiscale, budgétaire, éducative.
Les exonérations sur les heures supplémentaires, sur 95 % des successions en ligne directe et sur les rémunérations des étudiants qui travaillent pour financer leurs études traduisent concrètement cet engagement.
Il en est de même du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt pour l'acquisition de la résidence principale et des mesures qui visent à renforcer l'attractivité de la France et à soutenir l'innovation, comme l'abaissement du seuil du bouclier fiscal et la déduction de l'ISF des sommes investies dans le capital des PME.
Enfin, grâce à vous, monsieur le haut-commissaire, nous avons pu mesurer les enjeux de l'expérimentation du revenu de solidarité active : faire en sorte que toute personne retrouvant un emploi bénéficie d'une augmentation substantielle de ses revenus.
C'est dans cette perspective économique et sociale que doit être replacé ce projet de loi, comme a su le faire, avec talent et conviction, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.
Ma seconde observation portera sur nos débats des trois derniers jours, qui se sont révélés riches et constructifs.
Les commissions des finances et des affaires sociales, et au-delà le Sénat tout entier, ont pleinement joué leur rôle, en s'attachant non seulement à l'examen du contenu des mesures proposées dans le cadre de ce projet de loi, mais aussi à leurs modalités de mise en oeuvre et à leur efficience.
C'est le sens des débats de fond que nous avons menés sur le dispositif d'exonération des heures supplémentaires, le mécanisme du bouclier fiscal et la réduction de l'ISF en faveur des investissements dans les PME.
À cet égard, nous tenons à saluer la contribution de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, et du rapporteur général, M. Philippe Marini, singulièrement pour la clarté et la précision des réponses que ce dernier a fourni dans des domaines parfois complexes pour nombre d'entre nous. Je souhaite associer à cet hommage notre collègue Alain Vasselle, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Leur souci de légiférer efficacement et dans l'intérêt général honore la Haute Assemblée tout entière.
Nous tenons également à saluer l'esprit d'ouverture et la volonté d'équilibre manifestés par Mme le ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, par MM. les secrétaires d'État qui l'ont accompagnée, par vous-même, monsieur le haut-commissaire, mais aussi par M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, qui, nous le savons, connaît bien le Sénat et a voulu l'accompagner dans sa réflexion, sur le fond et jusqu'au bout, ce à quoi nous sommes particulièrement sensibles.
C'est dans cette perspective, dans cet esprit d'ouverture et de responsabilité que le groupe UMP votera ce texte tel qu'il résulte des travaux de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Avec ce texte, le Gouvernement et sa majorité engagent lourdement les finances de l'État dans la voie de l'exonération des charges fiscales et sociales relatives aux heures supplémentaires, ce qui coûtera très cher sans garantir l'augmentation globale du pouvoir d'achat et de l'emploi. Le but non avoué de ces mesures est de contourner l'horaire légal du temps de travail.
L'ensemble des dispositions allégeant les impositions des plus aisés laissera des traces profondes dans notre pays, nous en sommes convaincus. Je ne rappellerai que quelques-unes d'entre elles : renforcement du bouclier fiscal, quasi-suppression des droits de succession, défiscalisation de l'ISF, relèvement à 30 % de l'abattement de l'ISF sur la résidence principale. Vous avez creusé votre sillon dans la continuité des deux gouvernements précédents.
Toutes ces mesures visent les catégories les plus pourvues en patrimoine et celles qui perçoivent les revenus les plus hauts. D'ailleurs, le plus souvent, ce sont les mêmes.
Dans ce contexte, monsieur le haut-commissaire, la présence du revenu de solidarité active, même si l'intention qui le sous-tend est louable - nous connaissons votre énergie et votre volontarisme -, paraît décalée, voire incongrue.
Je veux remercier Mme la ministre de l'économie - M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement voudra bien lui transmettre le message - d'avoir pris la peine de réponde sur un plan technique et de manière détaillée à tous les arguments que nous lui avons opposés.
Mais cela ne change rien sur le fond.
M. le rapporteur général nous a souvent répété qu'il était là pour défendre la politique de Nicolas Sarkozy et Mme la ministre avait pour mission de traduire, dans la loi, les engagements pris par le candidat qu'elle avait soutenu. Nous l'avons compris, il s'est agi pour vous, tout au long de ces jours et de ces nuits de débat, de donner des signes forts à votre coeur de cible électorale. Vous soldez, en quelque sorte, la campagne électorale.
En tant que membres du groupe socialiste, bien que nous ayons été amenés à défendre nos convictions sur un terrain qui ne nous était pas favorable, puisque c'est la majorité qui en a fixé le périmètre, nous avons mené le combat en acceptant, sur chaque article, le débat. Nous n'avons pu et nous ne pouvons encore que vous mettre en garde contre les conséquences des choix que vous voulez inscrire dans ce projet de loi.
Au rebours du pacte républicain, vous consacrez en effet les inégalités, désormais considérées comme naturelles, comme étant dans l'ordre des choses. Vous privez le budget de l'État de toute marge de manoeuvre pour développer l'intervention publique, seule susceptible de fournir capital humain et capital financier et, ainsi, d'encourager les parcours individuels réussis comme les solidarités collectives.
Avec la juxtaposition de ces mesures hétéroclites, dont la seule finalité commune est de satisfaire une minorité de Français, vous tentez un pari économique hasardeux. Nous doutons qu'il satisfasse à l'exigence de développement de l'investissement et de la compétitivité, de l'emploi et du pouvoir d'achat, tous éléments constitutifs d'une croissance vigoureuse et durable.
Il y a malheureusement fort à parier que la masse considérable d'allégements fiscaux ira se réfugier dans l'épargne. Rien n'aura été résolu, au bout du compte. Bien au contraire, vous aurez plongé la France et les Français dans de grandes difficultés.
Vous l'aurez compris, nous voterons contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, que remercie d'avance de sa concision.
M. Jean Desessard. J'espère pouvoir vous donner satisfaction à cet égard, monsieur le président !
Ce projet de loi méritait débat. De nombreux amendements ont été longuement discutés par les divers intervenants, qu'ils soient de gauche ou de droite, selon les intérêts de chacun. Si nous sommes présents et examinons avec scrupule les derniers articles, qu'on nous laisse au moins le temps de nous exprimer ! Peut-on imaginer qu'un jour un ministre se retrouve seul à défendre son amendement, sans personne sur les travées ?
Il est tout de même un peu désagréable de s'entendre dire, alors qu'on participe au débat jusqu'à une heure aussi avancée, qu'il faut se dépêcher, quand de nombreux sénateurs n'ont pas participé à la discussion. Il y en a d'ailleurs qu'on ne voit que très rarement.
Quelle piètre récompense pour les parlementaires qui travaillent ! Je le dis sans demander à gagner plus : c'est notre travail ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Augmentons les indemnités ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean Desessard. Il faut se garder de vouloir absolument finir vite. Cela peut amener à empêcher de s'exprimer ceux qui prennent le temps de travailler les dossiers et de débattre d'idées différentes avec le Gouvernement.
Mais j'ai cru comprendre que vous me demandiez d'être concis, monsieur le président : je vais donc enfin expliquer mon vote !
J'apprécie la constance de la majorité, la cohérence de ce projet de loi. Tout au long de ce débat, il s'est agi de donner beaucoup aux riches, tout de suite, même rétroactivement avec le dispositif de déduction fiscale des emprunts immobiliers, et très peu aux pauvres. Pour ces derniers, on verra plus tard ! Pour le moment, on se contente d'« expérimenter » !
Ce projet de loi remet en cause la loi sur les 35 heures, accroît le déficit public, augmente les inégalités sociales et renvoie la lutte contre la pauvreté aux départements, sans octroyer à ces derniers beaucoup de moyens.
Je ne m'attarderai pas sur le creusement des inégalités que ce texte engendrera. C'est quasiment son but affiché.
S'agissant du bouclier fiscal, la communication de la droite a été excellente : avec cette expression, les Français ont l'impression que ce sont eux qui sont défendus, alors qu'il aurait fallu parler de « cadeau fiscal » : c'eût été plus net.
Le rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale, Gilles Carrez, annonce que les 12 784 foyers disposant d'un patrimoine supérieur à 7 millions d'euros se verraient restituer à eux seuls 583 millions d'euros, soit une moyenne de 45 600 euros par foyer. Plus on est riche, plus on y gagne ! Chacun des 1 081 plus gros contribuables qui bénéficieront du bouclier fiscal - ou plutôt du cadeau fiscal ! - à 50 % touchera, chaque année, un chèque de 250 000 euros.
La réforme des successions et donations cristallise l'inégalité puisque ce sont non plus seulement les riches qui en profitent, mais leurs enfants, leurs conjoints, leurs proches, sans aucune justification de mérite ou de talent. Ce n'est pas la France qui se lève tôt qui profite de cette mesure, c'est la France qui a la chance de naître au bon moment et au bon endroit.
Toutefois, il n'y a pas que ce gigantesque transfert de richesses vers les plus riches qui pose problème : la discipline budgétaire, qui est pourtant habituellement le mot d'ordre de la droite, est ici totalement abandonnée.
Permettez-moi sur ce sujet de citer les propos qu'a tenus notre collègue Jean Arthuis, président de la commission des finances, dans un entretien accordé à la Tribune : ce projet de loi « est incontestablement coûteux puisqu'il entraînera des pertes de ressources fiscales évaluées à [...] 15 milliards en 2010. Or, pour les finances publiques, nous devons veiller à la soutenabilité des objectifs que nous fixons, notamment celui de faire refluer la dette publique. » On peut se féliciter de ce que la législature commence bien, comme l'a dit le rapporteur général. De ce point de vue, le Gouvernement n'a pas « mégoté » !
S'agissant du « choc de confiance » que le Gouvernement veut créer avec l'adoption de ces mesures, Jean Arthuis a estimé : « Je mets en doute le principe qui voudrait qu'activer la consommation, c'est doper la croissance. Cela permet sûrement de créer des emplois, mais bien souvent des emplois hors de France. » C'est sans appel ! Si vous voulez être sûrs de relancer la consommation, il suffit d'augmenter les minima sociaux et les bas salaires : tout cet argent sera alors automatiquement et entièrement consommé.
La véritable question est celle que pose l'écologie sociale : quels sont les besoins qui peuvent sauver la planète et permettre à chacun de s'épanouir ? L'extrême richesse de quelques-uns n'est pas compatible avec la cohésion sociale, le minimum vital pour chacun et la préservation de nos ressources naturelles.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Je conclus, monsieur le président !
Pour cela, il faut repenser ce que l'on appelle le « pouvoir d'achat », c'est-à-dire revoir la richesse d'une société.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, les sénatrices et le sénateur Verts ne voteront pas ce projet de loi, qu'ils jugent inégalitaire et inquiétant pour les finances publiques.
Quant à la mise en place du revenu de solidarité active, elle est encore très incertaine. Il est dommage que ce dispositif soit inclus dans ce projet de loi : il n'est pas de même nature que les autres dispositions, à moins que, comme cela a été évoqué, il ne cache la volonté de faire disparaître les minima sociaux.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
9
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
M. le président. M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter
La liste des candidats établie par la commission des finances a été affichée conformément à l'article 12 du Règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Arthuis, Philippe Marini, Alain Vasselle, Yann Gaillard, Paul Girod, Michel Charasse, Thierry Foucaud.
Suppléants : MM. Denis Badré, Joël Bourdin, Yves Fréville, Marc Massion, Aymeri de Montesquiou, Michel Moreigne, François Trucy.
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Transmission d'un projet de loi
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant création d'une délégation parlementaire au renseignement.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 422, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
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Dépôt de propositions de loi
M. le président. J'ai reçu de M. Christian Cointat une proposition de loi tendant à modifier la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative à l'Assemblée des Français de l'étranger en matière d'inéligibilité, de déclaration de candidature et de vote par correspondance.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 423, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. Christian Cointat une proposition de loi relative à la propagande pour les élections à l'Assemblée des Français de l'étranger.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 424, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
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ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 31 juillet 2007 :
À dix heures :
1. Discussion du projet de loi (n° 371, 2006- 2007) instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Rapport (n° 414, 2006-2007) de M. Jean-Jacques Hyest, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
À seize heures :
2. Allocution du président du Sénat.
3. Scrutin pour l'élection de deux membres suppléants de la Délégation française aux Assemblées parlementaires du Conseil de l'Europe et de l'Union de l'Europe occidentale en remplacement de Daniel Goulet et M. Jean-Marie Bockel.
4. Suite de l'ordre du jour du matin.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 28 juillet 2007, à une heure cinquante-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD