M. Christian Cointat, rapporteur. Cet amendement concerne le régime juridique applicable au constat d'empêchement du président de la Polynésie française.
Afin de tenir compte de la position exprimée par les élus, nous proposons de scinder ce régime en deux.
Ainsi, le constat d'empêchement provisoire du président resterait de la compétence du conseil des ministres, qui est le mieux placé pour remplir une telle mission.
En revanche, nous souhaitons que le constat d'empêchement définitif relève de la compétence d'une autorité indépendante, en l'occurrence le Conseil d'État. Plus précisément, nous avons suggéré de confier cette responsabilité au président de la section du contentieux du Conseil d'État, mais - et nous le verrons à l'occasion de la présentation du sous-amendement n° 61 - cette proposition peut être modifiée.
Celui-ci pourrait être saisi par le conseil des ministres, par le président de l'assemblée ou par le haut-commissaire.
M. le président. Le sous-amendement n° 61, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 3 pour remplacer le second alinéa de l'article 80 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie française, remplacer les mots :
le président de la section du contentieux du Conseil d'État, saisi
par les mots :
une commission indépendante composée de trois personnalités désignées par le vice-président du Conseil d'État, saisie
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. La précision que l'amendement n° 3 vise à apporter complète le texte du Gouvernement de manière très pertinente et lève, me semble-t-il, toute ambiguïté sur l'objet d'un tel dispositif, qui a parfois été mal interprété localement.
En effet, l'empêchement définitif du président de la Polynésie française doit être constaté par une autorité impartiale saisie par les autorités locales ou par le haut-commissaire de la République.
Le sous-amendement n° 61 vise seulement à lever toute équivoque sur la question de la nature juridique du constat, en confiant à une commission indépendante, sous le contrôle juridictionnel du Conseil d'État, le soin de constater l'empêchement définitif du président de la Polynésie française.
En l'occurrence, nous prenons comme modèle le dispositif prévu pour le Médiateur de la République par le décret du 9 mars 1973, qui confie ce pouvoir à un collège de trois hauts magistrats.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Christian Cointat, rapporteur. La commission est favorable à ce sous-amendement, dont l'adoption permettrait en outre d'améliorer la rédaction de l'amendement n° 3.
M. le président. La parole est à M. Gaston Flosse, pour explication de vote.
M. Gaston Flosse. Je voterai contre le sous-amendement n° 61 et l'amendement n° 3, tout comme j'avais voté contre l'amendement n° 2, qui avait pour objet la limitation du nombre de ministres au sein du gouvernement de la Polynésie française.
En effet, de mon point de vue, les Polynésiens sont suffisamment grands pour déterminer eux-mêmes si leur gouvernement doit comprendre six, douze, quinze ou seize ministres.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ou quarante, cinquante... (Sourires.)
M. Gaston Flosse. Pourquoi avoir imposé une telle limitation, qui n'existait d'ailleurs pas dans la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ? Les Polynésiens sont-ils plus sots aujourd'hui qu'ils ne l'étaient alors ?
Le sous-amendement n° 61 et l'amendement n° 3 constituent une véritable agression contre l'autonomie de la Polynésie française.
Jusqu'à présent, c'est le conseil des ministres qui était chargé de constater l'empêchement définitif du président. On propose désormais de lui retirer cette responsabilité au profit du Conseil d'État. Cela revient à réduire l'autonomie de la Polynésie française.
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Le sous-amendement n° 61 apparaît un peu baroque.
D'une certaine façon, le dispositif que ce sous-amendement vise à instituer apporte une solution. En effet, dans la rédaction présentée par M. le rapporteur, l'amendement n° 3 tendait à confier la responsabilité de constater l'empêchement définitif du président au président de la section du contentieux du Conseil d'État.
S'agit-il véritablement là de la fonction du Conseil d'État, alors que le juge administratif est juge des recours ?
On a un peu trop tendance à faire du Conseil d'État l'organe de régulation des institutions de la Polynésie française. Or une telle propension me semble assez peu conforme au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs. Il y a donc là un élément de confusion.
Tout cela relève un peu du « bricolage », même si c'est normal s'agissant d'un texte qui n'est pas achevé.
Par conséquent, nous ne participerons pas au vote.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
À l'article 78 de la loi organique du 27 février 2004 susmentionnée :
1° Après les mots : « il retrouve », sont insérés les mots : «, à compter du premier jour du troisième mois qui suit la fin desdites fonctions, » ;
2° Il est ajouté un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque la fin des fonctions du gouvernement intervient dans les cas prévus aux articles 80, 156 et 156-1, le représentant reprend l'exercice de son mandat dès la fin de ses fonctions gouvernementales. »
M. le président. L'amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Au second alinéa de l'article 87 de la même loi organique, les mots : « six mois » sont remplacés par les mots : « trois mois ».
II. En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :
I. -
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Aujourd'hui, lorsqu'ils cessent d'exercer leurs fonctions, le président de la Polynésie française et les ministres continuent de percevoir leurs indemnités pendant six mois.
L'assemblée de la Polynésie française propose de ramener cette durée de six mois à trois mois. La commission a retenu cette suggestion.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Je salue le fait que l'on prenne en compte, une fois n'est pas coutume, l'avis de l'assemblée de la Polynésie française et que l'on réduise à trois mois la période pendant laquelle les anciens présidents et ministres perçoivent des indemnités. C'est un élément de diminution des charges publiques.
Monsieur le rapporteur, avez-vous le sentiment, convaincu par cette mesure, qu'il faudrait l'étendre et l'appliquer sur le territoire de la métropole ? (Sourires.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce n'est pas pareil !
M. le président. L'amendement n° 45, présenté par M. Flosse, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article 117 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, il est inséré un article 117-1 ainsi rédigé :
« Art. 117-1. - I. - Les électeurs d'une circonscription peuvent décider de mettre fin, par scrutin, au mandat d'un représentant qui y a été élu, dans les conditions prévues au présent article, lorsque ce représentant a cessé d'appartenir au groupe politique au sein duquel il a décidé de siéger après son élection ou a fait l'objet d'une procédure d'exclusion de ce groupe décidée à la majorité absolue de ses membres.
« II. - Le scrutin en vue de la révocation d'un représentant est organisé à la demande de la majorité des membres du groupe politique auquel il a cessé d'appartenir, soutenue par 12,5 % des électeurs inscrits dans la circonscription.
« La demande devient caduque en cas de démission, de démission d'office ou d'annulation de l'élection du représentant qu'elle vise ou en cas de dissolution de l'assemblée de la Polynésie française.
« Le haut-commissaire de la République se prononce sur la recevabilité de la demande par une décision motivée, qui peut faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'État, qui statue dans un délai d'un mois, en premier et dernier ressort.
« III. - Les électeurs sont convoqués par décret.
« Les maires organisent le scrutin. Si un maire refuse de procéder à cette organisation, le haut-commissaire de la République, après l'en avoir requis, y procède d'office.
« Les dépenses liées à l'organisation du scrutin constituent une dépense obligatoire de la Polynésie française.
« Les dépenses résultant des assemblées électorales tenues dans les communes pour l'organisation du scrutin leur sont remboursées par la Polynésie française de manière forfaitaire, au moyen d'une dotation calculée en fonction du nombre des électeurs inscrits dans la commune et du nombre des bureaux de vote qui y sont installés. Les tarifs de cette dotation sont fixés par décret.
« IV - Le scrutin en vue de la révocation d'un représentant ne peut être organisé :
« 1° dans les douze mois qui suivent l'élection de l'assemblée de la Polynésie française ou dans les douze mois qui précèdent la fin de son mandat ;
« 2° Pendant la campagne ou les jours du scrutin prévus pour :
« a) l'élection du Président de la République ;
« b) un référendum décidé par le Président de la République ;
« c) une consultation organisée en Polynésie française en application de l'article 72-4 de la Constitution ;
« d) le renouvellement général des députés ;
« e) le renouvellement des sénateurs élus en Polynésie française ;
« f) l'élection des membres du Parlement européen ;
« g) le renouvellement général des conseils municipaux.
« V. - La campagne en vue du scrutin est ouverte le deuxième lundi précédant le scrutin à zéro heure. Elle est close la veille du scrutin à minuit.
« Elle est organisée par la Polynésie française dans les conditions définies au chapitre V du titre 1er du livre 1er du code électoral, à l'exception de l'article L. 52-3. Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de lire : « groupe, parti ou groupement habilité à participer à la campagne » au lieu de : « candidat » et de « liste de candidats ».
« Sont habilités à participer à la campagne en vue du scrutin :
« - le groupe politique auteur de la demande de révocation ;
« - le représentant dont la révocation est demandée.
« Les interdictions prévues par l'article L. 50-1, le troisième alinéa de l'article L. 51 et l'article L. 52-1 du code électoral sont applicables à toute propagande relative au scrutin.
« Les dispositions de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion sont applicables au scrutin.
« VI. - En Polynésie française, une durée d'émission de trois heures à la télévision et de trois heures à la radio est mise à la disposition du groupe politique et du représentant admis à participer à la campagne pour le scrutin, les antennes de la société nationale chargée du service public de la communication audiovisuelle outre-mer.
« VII. - Seuls peuvent participer au scrutin les électeurs de nationalité française inscrits sur les listes électorales en Polynésie française dans les conditions prévues par les articles L. 1er à 14 et L. 16 à L. 40 du code électoral.
« VIII. - Les opérations préparatoires au scrutin, les opérations de vote, le recensement des votes et la proclamation des résultats sont effectués dans les conditions prévues par le chapitre VI du tire 1er du livre 1er du code électoral, à l'exception des articles L. 56, L. 57, L. 58, L. 66, L. 68 (deuxième alinéa) et L. 85-1.
« IX. - Pour l'application du troisième alinéa de l'article L. 65 du même code, il y a lieu de lire : « les réponses portées sur les bulletins sont relevées » au lieu de : « les noms portés sur les bulletins sont relevés » ; « des feuilles de pointage » au lieu de : « des listes » ; « des réponses contradictoires » au lieu de : « des listes et des noms différents » ; « la même réponse » au lieu de : « la même liste ou le même candidat ».
« Les bulletins de vote autres que ceux fournis par la Polynésie française, les bulletins trouvés dans l'urne sans enveloppe ou dans une enveloppe non réglementaire, les bulletins ou enveloppes portant des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions quelconques n'entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement. Ils sont annexés au procès-verbal ainsi que les enveloppes non réglementaires et contresignés par les membres du bureau de vote. Chacun des bulletins ou enveloppes annexés porte mention des causes de l'annexion.
« X. - Sont applicables au scrutin les dispositions du chapitre VII du titre 1er du livre 1er du code électoral, à l'exception des articles L. 88-1, L. 95 et des 1° à 5° des I, II et III de l'article L. 113-1.
« Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de lire : « groupe, parti ou groupement politique habilité à participer à la campagne » au lieu de : « candidat » et de « liste de candidats ».
« XI. - Les dispositions du code électoral mentionnées au présent article sont applicables dans les conditions fixées aux articles L. 386, L. 390, L. 391 et L. 392 dudit code.
« XII. - La révocation n'est acquise que si la majorité des suffrages exprimés, représentant au moins un quart des électeurs inscrits, s'est prononcée en sa faveur.
« Toutefois, la vacance du siège est proclamée à l'expiration du délai de recours contentieux contre le résultat du scrutin. En cas de recours, le représentant à l'assemblée de la Polynésie française reste en fonction jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur la réclamation. Il est pourvu à la vacance du siège dans les conditions prévues à l'article 107.
« XIII. - La régularité du scrutin peut être contestée dans les conditions, formes et délais prescrits à l'article 116 pour les réclamations contre l'élection des membres de l'assemblée de la Polynésie française.
« XIV. - Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. »
La parole est à M. Gaston Flosse.
M. Gaston Flosse. Cet amendement, qui est assez long, vise à introduire des dispositions permettant de mettre fin au mandat d'un représentant à l'assemblée de la Polynésie française qui, ayant été élu dans un groupe politique, démissionne de ce groupe pour s'inscrire dans un autre, voire effectue des allers-retours entre les différents groupes.
Je me suis déjà exprimé sur le sujet pendant la discussion générale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Cet amendement est extrêmement intéressant d'un point de vue intellectuel, mais il est plus contestable sur le plan politique.
Un tel dispositif existe dans d'autres États - il figure notamment dans le droit anglo-saxon -, mais il n'est pas encore entré dans nos moeurs ; notre pays n'est pas tout à fait prêt.
Certes, ce n'est pas une raison pour ne pas y réfléchir, mais il serait prématuré, me semble-t-il, de permettre à l'électeur de démettre son élu.
C'est la raison pour laquelle je ne pourrai malheureusement pas suivre M. Flosse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Nous voterons contre cet amendement, que nous considérons comme un amendement d'humour. (Sourires.)
Sans doute son auteur parle-t-il d'expérience. Plus que tout autre dans cette assemblée, il sait que ce sont non pas les institutions ni les modes de scrutin qui créent l'instabilité, mais bien les comportements de certains élus.
En effet, le fait qu'un certain nombre de personnes fassent fi de la manière dont elles ont été élues et s'affranchissent ensuite de toute logique et de toute honnêteté à l'égard de leurs mandants est un vrai problème pour la vie politique en Polynésie. Pour autant, je ne pense pas que c'est en adoptant des procédés de ce type que nous pourrons le régler.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
I. - L'article 105 de la loi organique du 27 février 2004 susmentionnée est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 105. - I. - L'élection des représentants à l'assemblée de la Polynésie française a lieu, dans chacune des circonscriptions définies à l'article 104, au scrutin de liste à un ou deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation.
« II. - Si une liste a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour de scrutin, les sièges sont répartis à la représentation proportionnelle, suivant la règle de la plus forte moyenne, entre les listes qui ont obtenu au moins 3 % des suffrages exprimés.
« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages dans l'ensemble de la circonscription. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus.
« Les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation.
« III. - Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour, le deuxième dimanche qui suit le premier tour.
« Seules peuvent se présenter au second tour les listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 10 % du total des suffrages exprimés ; si une seule liste obtient ce nombre de suffrages, la liste arrivée en deuxième au premier tour peut se présenter au second tour ; si aucune liste n'obtient un tel nombre de suffrages, peuvent se présenter au second tour les deux listes arrivées en tête au premier tour.
« Ces listes peuvent être modifiées dans leur composition pour comprendre des candidats ayant figuré au premier tour sur d'autres listes, sous réserve que celles-ci ne se présentent pas au second tour et qu'elles aient obtenu au premier tour au moins 3 % des suffrages exprimés. En cas de modification de la composition d'une liste, l'ordre de présentation des candidats peut également être modifié.
« Les candidats ayant figuré sur une même liste au premier tour ne peuvent figurer au second tour que sur une même liste. Le choix de la liste sur laquelle ils sont candidats au second tour est notifié aux services du haut-commissaire par le candidat placé en tête de la liste sur laquelle ils figuraient au premier tour.
« Les sièges sont répartis à la représentation proportionnelle, suivant la règle de la plus forte moyenne, entre les listes qui ont obtenu au moins 3 % des suffrages exprimés au second tour.
« Sont applicables à cette répartition les deuxième et troisième alinéas du II du présent article. »
II. - Le I de l'article 107 de la même loi organique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'annulation des opérations électorales dans une circonscription entraîne l'organisation d'une nouvelle élection dans cette circonscription dans les trois mois suivant la lecture de l'arrêt du Conseil d'État. Les électeurs sont convoqués selon les modalités fixées au précédent alinéa. Le mandat des membres élus à l'issue de cette élection expire en même temps que celui des autres membres de l'assemblée de la Polynésie française. »
III. - L'article 116 de la même loi organique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Saisi dans les conditions fixées par les dispositions du code électoral relatives au financement des campagnes électorales, le Conseil d'État peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. Dans les autres cas, le Conseil d'État peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie. Si le Conseil d'État a déclaré inéligible un candidat proclamé élu, il annule son élection ou, si l'élection n'a pas été contestée, le déclare démissionnaire d'office. »
IV. - L'article L.O. 406-1 du code électoral est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L.O. 406-1. - La composition et la formation de l'assemblée de la Polynésie française sont régies par les dispositions de la section 1 du chapitre II du titre IV de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française. »
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, sur l'article.
M. Bernard Frimat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous l'aurez constaté, compte tenu des circonstances dans lesquelles nous débattons, nous avons déposé peu d'amendements. Je ferai en outre remarquer que le groupe communiste républicain et citoyen, le groupe de l'Union centriste-UDF et le groupe du RDSE, dont je salue la présence (Sourires),...
M. Michel Houel. Humour !
M. Bernard Frimat. ...n'ont, quant à eux, déposé aucun amendement.
L'amendement n° 57 que nous vous soumettons à cet article vise à supprimer le mode de scrutin électoral qui nous est proposé.
Monsieur le secrétaire d'État, dans la mesure où c'est la troisième fois qu'un tel débat s'instaure, peut-être aurait-il fallu changer le titre de votre projet de loi organique et lui préférer celui-ci : « projet de loi organique tendant à lutter contre l'instabilité des modes de scrutin en Polynésie française ».
Mes chers collègues, je ne reviendrai pas en détail sur le scrutin qui s'est déroulé en 2004, chacun d'entre vous le connaît. Je rappelle simplement qu'il s'agissait d'un scrutin avec prime majoritaire. Depuis, la loi organique du 27 février 2007 a introduit un nouveau mode de scrutin, qui est donc « mort-né ». Si le Sénat a voté le texte, le débat sur le scrutin lui-même n'est intervenu qu'en commission mixte paritaire, puisque ce scrutin résulte d'un amendement « propulsé » par M. Tong Sang et déposé directement à l'Assemblée nationale, à l'issue donc de nos délibérations.
À l'évidence, ce scrutin, voulu par la majorité qui avait voté le scrutin de 2004, voulu par la majorité qui s'apprête aujourd'hui à voter autre chose, a vécu.
Monsieur le secrétaire d'État, vous nous proposez aujourd'hui un autre mode de scrutin, dont vous êtes le premier à savoir qu'en aucune façon il n'assurera la stabilité des institutions polynésiennes. Il est construit - s'agit-il d'un ralliement du Gouvernement aux bienfaits de la proportionnelle ? - sur une proportionnelle à deux tours, mais sans prime. C'est un dispositif complètement nouveau, qui n'existe nulle part, et qui provoquera à n'en pas douter une instabilité récurrente.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Non !
M. Bernard Frimat. Peut-être vous-êtes vous dit que le maintien de la prime majoritaire risquerait de profiter à quelqu'un dont vous ne souhaitiez pas l'élection et que sa suppression permettrait, au contraire, d'éviter tout danger à cet égard...
Indiscutablement, ce mode de scrutin n'apporte aucune solution susceptible d'assurer la stabilité politique en Polynésie. C'est, d'ailleurs, ce que souligne l'assemblée de la Polynésie française au tout début de son avis, publié en annexe du rapport de la commission : elle considère, en effet, que ce système « constitue une prime à l'instabilité ».
À ce titre, nous ne pouvons donc souscrire à votre proposition. Au demeurant, quel objectif recherchez-vous réellement en présentant un mode de scrutin dont tout le monde s'accorde à dire qu'il ne permettra en aucune façon de garantir la stabilité politique ?
S'agissant des modes de scrutin adoptés en 2004 et en 2007, on sait qui les avait construits et pourquoi. Cette fois-ci, qui est le constructeur et quel but cherche-t-il à atteindre ?
Les conditions dans lesquelles nous travaillons sont placées sous le signe de la rapidité. Pour notre part, nous n'avons pas souhaité proposer en séance, à brûle-pourpoint, un mode de scrutin supplémentaire et différent, qui n'aurait pas pu être discuté d'abord par les Polynésiens eux-mêmes.
Cela étant, monsieur le secrétaire d'État, ne pensez-vous pas qu'un effort pourrait être fait en la matière ? Ne convient-il pas tout de même de s'interroger sur l'existence d'une circonscription unique, avec l'attribution d'une prime à la liste ayant emporté l'élection sur l'ensemble de la Polynésie ? Ainsi, le vote des Polynésiens serait réellement conforté.
À mon sens, il existe certainement d'autres systèmes qui permettraient d'assurer une plus grande stabilité. Néanmoins, puisque votre but n'est pas de chercher ni de créer la stabilité des institutions en Polynésie, vous êtes dans votre logique : le scrutin que vous mettez en place permettra, au premier tour, à chacun de se compter ; au second tour, vous espérez sans doute rassembler vos nouveaux, vos anciens et vos futurs amis, pour vous construire une majorité à votre convenance, avec laquelle vous pourrez alors librement travailler. En effet, monsieur le secrétaire d'État, vous êtes complètement étranger à tout ce qui se passe là-bas, ce que tout le monde avait bien compris !
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 57, présenté par M. Frimat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Monsieur Frimat, puis-je considérer que vous venez de le présenter ?
M. Bernard Frimat. Comment avez-vous deviné, monsieur le président ? (Sourires.)
M. le président. Je tenais à m'en assurer !
M. Bernard Frimat. Je salue votre talent !
M. le président. Cet amendement vient donc d'être défendu.
L'amendement n° 5, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article 105 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 :
« Art. 105 - I.- L'élection des représentants à l'assemblée de la Polynésie française a lieu, dans chacune des circonscriptions définies à l'article 104, au scrutin de liste à un ou deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation.
« II.- Si une liste a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour de scrutin, les sièges sont répartis à la représentation proportionnelle, suivant la règle de la plus forte moyenne, entre les listes qui ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés.
« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages dans l'ensemble de la circonscription. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus.
« Les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation.
« III.- Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour, le deuxième dimanche qui suit le premier tour.
« Seules peuvent se présenter au second tour les listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % des suffrages exprimés ; si une seule liste obtient ce nombre de suffrages, la liste arrivée en deuxième au premier tour peut se présenter au second tour ; si aucune liste n'obtient un tel nombre de suffrages, peuvent se présenter au second tour les deux listes arrivées en tête au premier tour.
« Ces listes peuvent être modifiées dans leur composition pour comprendre des candidats ayant figuré au premier tour sur d'autres listes, sous réserve que celles-ci ne se présentent pas au second tour et qu'elles aient obtenu au premier tour au moins 5 % des suffrages exprimés. En cas de modification de la composition d'une liste, l'ordre de présentation des candidats peut également être modifié.
« Les candidats ayant figuré sur une même liste au premier tour ne peuvent figurer au second tour que sur une même liste. Le choix de la liste sur laquelle ils sont candidats au second tour est notifié aux services du haut-commissaire par le candidat placé en tête de la liste sur laquelle ils figuraient au premier tour.
« Les sièges sont répartis à la représentation proportionnelle, suivant la règle de la plus forte moyenne, entre les listes qui ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés au second tour.
« Sont applicables à cette répartition les deuxième et troisième alinéas du II du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, tous les sujets sont importants et sensibles, mais celui que nous abordons maintenant l'est tout particulièrement et mérite donc que lui soit consacré un minimum de temps.
Je le rappelle pour nos collègues qui l'ignoreraient, la Polynésie compte six circonscriptions : quatre circonscriptions représentent un certain nombre d'archipels et disposent de trois sièges chacune ; une circonscription, représentant les îles Sous-le-Vent, soit un archipel relativement plus peuplé que les précédents, dispose de huit sièges ; une circonscription dispose de trente-sept sièges. Au total, cinquante-sept sièges sont attribués, dont vingt à cinq circonscriptions et trente-sept à une seule.
Il n'est donc pas facile d'organiser un système électoral sur un tel ensemble. Si ce dernier est relativement déséquilibré sur le plan de la répartition des sièges, il conduit pourtant à une sous-représentation de Tahiti, malgré ses trente-sept sièges, compte tenu de l'importance de sa population par rapport à celle de l'ensemble de la Polynésie. Autrement dit, la situation est, certes, déséquilibrée, mais il est impossible de faire autrement, car, si l'on veut appliquer la proportionnelle, il faut au moins prévoir trois sièges pour chaque archipel.
Pour ma part, avant de critiquer un système, je préfère essayer d'en trouver un autre qui soit meilleur et, à défaut, de voir si celui qui est proposé est susceptible d'être amélioré.
La commission des lois a donc entamé une réflexion sur le sujet et a étudié les possibilités envisageables, à partir du moment où il importait de conserver les circonscriptions en l'état. En effet, j'ai pu m'en rendre compte sur place, les Polynésiens tiennent particulièrement à leur maintien, y compris, cher ami Bernard Frimat, le président Temaru lui-même, tout au moins pour les circonscriptions représentant les archipels.
Dans ces conditions, un constat s'est imposé : l'instauration d'une prime majoritaire, comme nous l'avions prévue à tort en 2004 - mais tout le monde peut se tromper ! -, ne favorise pas l'émergence de la liste ayant remporté le plus grand nombre de voix sur l'ensemble de la Polynésie, dans la mesure où cette prime sera attribuée à Tahiti et, partant, à ses électeurs, au détriment des autres archipels. C'est là que se situe le biais du dispositif.
Je tiens à le dire, je n'ai pas l'intention dans ce débat de faire de la politique politicienne, car une telle attitude n'a pas sa place ici. (M. Bernard Frimat s'esclaffe.) Je regrette votre réaction, monsieur Frimat. Le sujet qui nous intéresse est avant tout technique et politique. Si vous-même aimez la politique politicienne, sachez que ce n'est pas mon cas !
M. Bernard Frimat. Vous ne faites que cela !
M. Christian Cointat, rapporteur. Mais non ! Ce que j'aime, c'est faire de la politique tout court, en m'efforçant de servir au mieux nos concitoyens !
Je le répète, si la prime majoritaire est maintenue, elle sera accordée à Tahiti, au détriment des autres, et ce ne sera pas juste. C'est la raison pour laquelle nous proposons de revenir sur cette disposition.
J'ai alors étudié l'opportunité de réserver un certain nombre de sièges à ceux qui seraient arrivés en tête. Cependant, puisqu'il n'est pas question d'augmenter le nombre d'élus à l'assemblée de la Polynésie française, ce système aboutirait à retirer des sièges à Tahiti, qui serait alors encore plus sous-représentée.
Il est inconcevable de baisser de trois à deux sièges la représentation des autres archipels. Reconnaissez-le, mes chers collègues, le fait de prévoir une élection à la proportionnelle pour deux sièges est pour le moins inconvenant sur le plan démocratique, c'est même quasiment une forfaiture ! Dans la mesure où il importe de conserver un minimum de trois sièges pour les circonscriptions, il n'est plus possible d'accorder une prime.
Une autre solution a aussi été étudiée, celle d'une circonscription unique divisée en sections représentant les anciennes circonscriptions. Cela semblait parfait en apparence. Toutefois, compte tenu du système proportionnel régional avec une prime majoritaire, les archipels qui sont sous-représentés par rapport aux autres risqueraient de ne se retrouver qu'avec un seul siège, au lieu des trois qui leur sont garantis aujourd'hui. Cette solution n'est donc pas non plus acceptable.
Un autre cas de figure était envisageable, en reprenant pour la Polynésie le système que nous avons mis en place dans cet hémicycle même pour Saint-Pierre-et-Miquelon, après avoir néanmoins recueilli l'accord des Saint-Pierrais et des Miquelonais eux-mêmes.
Dans ces conditions, trois sièges seraient garantis à chacun des archipels du Nord, mais ne refléteraient pas forcément la coloration politique de leurs électeurs. Cette solution posant, à l'évidence, de sérieux problèmes, nous n'avons pas pu la retenir.
Finalement, mes chers collègues, nous avons fait le tour de toutes les possibilités, déjà existantes ou pouvant être envisagées, tant et si bien que nous en sommes revenus au système proposé par le Gouvernement. Notre décision n'a donc en aucune façon été motivée par une quelconque volonté de faire de la politique politicienne, ce qui serait véritablement néfaste. Simplement, il n'existe, pour l'instant, aucune autre solution qui paraisse plus raisonnable et plus efficace.
Il était, certes, concevable de proposer la formule appliquée à Saint-Barthélemy et Saint-Martin, à savoir une élection à la proportionnelle à deux tours, mais dans laquelle seules les deux listes arrivées en tête au premier tour pouvaient passer au second.
Or, lors de la discussion dans cet hémicycle du projet de loi organique et du projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, nous avons mis le gouvernement de l'époque devant une alternative : soit instaurer une prime majoritaire et faire passer au second tour tous ceux qui ont obtenu plus de 10 % ; soit ne faire passer que les deux seules listes arrivées en tête et supprimer la prime majoritaire. En tout état de cause, il fallait trancher, car ces solutions étaient incompatibles, et c'est la première qui a été choisie.
Par conséquent, en appliquant cette logique à la Polynésie, seules les deux listes arrivées en tête au premier tour devraient être autorisées à passer au second. Or, justement, cela ne correspond pas aux souhaits exprimés par l'ensemble des forces politiques locales, qui souhaitent une représentation aussi large que possible. Pour le dire autrement, un tel système n'est pas encore en phase avec le rythme de la respiration démocratique de la Polynésie française, et voilà pourquoi je ne l'ai pas retenu.
En l'espèce, mes chers collègues, je vous propose tout simplement, au nom de la commission, de vous rallier, pour l'essentiel, à l'avis de l'assemblée de la Polynésie française et d'augmenter ainsi de 3 % à 5 % des suffrages exprimés le seuil retenu pour la fusion des listes. Ce faisant, nous nous mettons en cohérence avec le dispositif que nous avons retenu pour les autres collectivités d'outre-mer.
De plus, pour l'accès des listes au second tour, en lieu et place du seuil de 10 % des suffrages exprimés, proposé par le Gouvernement, et du seuil de 12,5 % des inscrits, souhaité par l'assemblée de la Polynésie française, ce dernier nous paraissant tout de même très élevé, nous préférons un seuil de 12,5 % des suffrages exprimés, qui nous paraît constituer un point d'équilibre entre les deux.
Mes chers collègues, je tiens à le préciser, pour ce type d'élections, on enregistre une très forte participation. (M. Gaston Flosse acquiesce.) Ainsi, pour les élections partielles de 2005, elle s'est élevée à 80 %. Or, avec un tel taux, le seuil de 10 % des inscrits équivaut justement au seuil de 12,5 % des suffrages exprimés que nous proposons.
Finalement, nous sommes parvenus à trouver ce que je viens d'appeler un point d'équilibre entre les différentes tendances, tout en respectant les traditions politiques locales auxquelles les Polynésiens sont attachés. Ces derniers souhaitent en effet avoir la possibilité de se retrouver ensemble, mais sans y être forcés, comme ce serait le cas avec un système ne réservant l'accès au second tour qu'à deux listes.
Mes chers collègues, la solution de la commission n'est pas la panacée, mais c'est certainement la moins mauvaise possible. C'est même une bonne solution, et je vous recommande donc de l'adopter.