Mme Lucette Michaux-Chevry. Merci !
M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. Croyez bien que c'est très modestement que je vais m'exprimer maintenant en réponse aux orateurs.
En effet, je n'ai pas la prétention de dire à cette tribune que mon budget est un bon budget parce que, à périmètre constant, il sera en augmentation de 2 % pour les autorisations d'engagement et de 3 % pour les crédits de paiement. Vous avez souvent entendu de tels propos avant moi et vous en entendrez bien d'autres après moi, puisque la démocratie est ainsi faite que chacun est appelé à n'exercer ses fonctions que pour un temps donné.
Je veux vous dire simplement que, durant le temps qui m'est donné, j'essaie, avec mon enthousiasme, ma passion, et grâce à la feuille de route que m'a confiée le Président de la République - beaucoup d'entre vous y ont fait référence - de servir au mieux nos territoires.
Comme certains l'ont souligné, notamment M. Simon Loueckhote, ce qui compte, ce n'est pas que le budget soit « bon » parce que les dépenses augmentent ou « mauvais » parce qu'elles baissent : chacun a son analyse. Ce qui importe, ainsi que l'a très bien exprimé Lucette Michaux-Chevry, c'est la nature de la politique que l'on veut mettre au service de l'outre-mer et l'intensité de cette volonté.
Imaginez, même si vous savez tous que c'est impossible, que j'obtienne pour l'outre-mer une augmentation de 15 %, de 20 %, voire de 30 %. Quand bien même je l'obtiendrais, cela ne changerait rien si, parallèlement, l'État, le Gouvernement et la représentation nationale - Assemblée nationale et Sénat - n'étaient pas déterminés à changer profondément le regard qu'ils portent sur l'outre-mer. En effet, ce qui est pour moi essentiel, comme pour beaucoup d'entre vous, c'est ce changement de regard et de volonté.
Doit-on continuer à s'enfermer dans des politiques dites « d'assistanat »? Au demeurant, je n'aime pas ce mot ni la stigmatisation qu'il recouvre, car il fut sans doute un temps où il n'y avait pas d'autre solution : il fallait apporter des réponses à des hommes et des femmes qui étaient totalement démunis, laissés sur le bord du chemin ; le devoir de l'État était alors - et il est toujours, dans certains cas - de les aider, de les soutenir, de les accompagner. Mais il est aujourd'hui plus que jamais indispensable de leur apporter une perspective d'avenir, de leur donner l'espoir que leurs enfants, pourront, un jour, bénéficier de l'ascenseur social pour se hisser au plus haut.
Voilà pourquoi je ne veux plus seulement parler de « rattrapage ». Oui au rattrapage, mais oui aussi à un nouvel élan économique, au dynamisme, à la prise de responsabilités ! Il importe d'assurer la solidarité pour les plus faibles et l'égalité des chances. Cela ne signifie pas le nivellement par le bas : assurer l'égalité des chances, c'est donner à chacun l'espoir de pouvoir, demain, parvenir au plus haut de l'échelle sociale.
Le devoir de la République est de donner à chaque enfant né sur son sol, et qui est de nationalité française, que ce soit à Wallis-et-Futuna, à Mayotte, dans le Pacifique Sud, dans la Caraïbe, dans l'océan Indien ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, la possibilité et le droit d'exercer les plus hautes responsabilités au sein de notre pays. Telles sont les valeurs de la République !
Je vais maintenant m'efforcer de répondre sur quelques points techniques, financiers et administratifs que certains d'entre vous ont évoqués.
Monsieur Lise, vous avez affirmé qu'il n'y avait pas d'évolution des crédits en faveur du logement. Je souligne que ces crédits bénéficient d'une augmentation de 25 millions d'euros, que 10 millions d'euros supplémentaires sont consacrés aux engagements contractuels et 50 millions d'euros aux exonérations de charges sociales, ce qui représente une majoration de 3 % des crédits de paiement.
S'agissant des emplois aidés, nous veillerons à un juste traitement de l'outre-mer. L'effort au profit du secteur marchand, via la loi de programme, devra être pris en compte.
Je reviendrai tout à l'heure sur la question de la zone franche globale, mais je veux d'ores et déjà vous rappeler, monsieur Lise, que la concertation locale que nous avons engagée ensemble se déroule depuis la mi-septembre. Je répète que je tiendrai le plus grand compte de la contribution du conseil régional. Son président, M. Alfred Marie-Jeanne, m'a dit qu'un schéma régional était en cours d'élaboration, et vous-même, au niveau du conseil général de la Martinique, avez lancé votre Agenda 21. Vous me reprochez de ne pas avoir pris en compte cette contribution dans le projet de zone franche globale, mais j'attends toujours vos conclusions ! Si vous me les rendez avant la fin de l'année, je vous promets que j'en tiendrai totalement compte.
En ce qui concerne le cyclone Dean, je ne reviens pas sur l'effort de l'État. Le relogement des sinistrés a justifié l'élaboration d'un plan d'ensemble dans lequel cet effort est évalué à 40 millions d'euros.
Monsieur Lise, puisque vous présidez le conseil de l'habitat, vous savez bien que la Martinique a fait le choix de réhabiliter les logements anciens plutôt que d'en construire de nouveaux. Vous me dites que 32 logements seulement ont été construits l'année dernière : c'était le choix du conseil de l'habitat ! (M. Claude Lise fait un signe de dénégation.) Vous avez préféré orienter l'essentiel des moyens que l'État vous a accordés sur la réhabilitation plutôt que sur la construction. C'est un choix local !
Je note aussi que la pénurie de terrains et l'absence d'établissement public foncier, faute de consensus local, n'aident pas l'ensemble des communes de la Martinique à avoir une maîtrise du foncier qui nous permette de mener une politique de construction de logements plus dynamique. Je veillerai à ce que la loi de programme vous apporte des outils vous donnant la possibilité, dans la perspective de la construction de logements, de mieux maîtriser vos politiques foncières. Voilà comment j'entends vous accompagner dans ce domaine.
D'ailleurs, la situation que vous avez décrite en matière de logement ne me paraît pas résulter d'une baisse des crédits puisque, en 2007 la Martinique avait disposé de 35,4 millions d'euros, contre 26,7 millions d'euros en 2006. La situation de 2007 ne résulte donc pas d'une diminution des moyens budgétaires.
M. Claude Lise. Il y avait 16 millions d'euros de dettes !
M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. La situation constatée au 31 décembre 2006 a été réglée. La situation actuelle me paraît s'expliquer par les choix opérés localement.
Permettez-moi de citer quelques chiffres permettant d'établir des comparaisons en ce qui concerne la production de logements sociaux.
Entre 2003 et 2006, on a construit en moyenne chaque année 1 453 logements sociaux en Guadeloupe, contre 399 en Martinique. Pour l'amélioration de l'habitat, les chiffres étaient de 692 en Guadeloupe, contre 1 035 en Martinique. On voit bien que des choix différents ont été faits par les acteurs locaux à partir des moyens qui ont été mis à leur disposition par l'État. Je précise que, en application de la loi sur le droit au logement opposable, ce sont 700 logements locatifs sociaux qui devraient être construits chaque année !
Vous estimez que l'État n'a pas rempli sa mission non plus en ce qui concerne les conséquences du cyclone Dean. Je n'ai pas envie de polémiquer sur ce sujet. Nous avons pris des engagements. Je suis arrivé sur l'île dans les heures qui ont suivi la catastrophe. Je suis revenu quarante-huit heures après avec le Premier ministre, et nous reviendrons avant la fin du mois de janvier pour veiller à ce que tous nos engagements soient respectés, monsieur Lise.
Il a été rappelé que le conseil général de la Martinique avait apporté 10 millions d'euros, le conseil régional, 12 millions d'euros, ce qui est tout à leur honneur. Plusieurs collectivités de métropole sont également intervenues. Malheureusement, leur effort a été modeste et j'aurais souhaité que certaines d'entre elles fassent preuve de plus de solidarité. Leur aide s'est élevée au total à 236 184 euros. Je m'honore que le département dont je préside le conseil général ait apporté une contribution de 100 000 euros, soit presque 50 % du montant global. C'était notre manière à nous, Méditerranéens, de témoigner notre solidarité à nos amis des Antilles. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'Union centriste.)
Mais la vérité des chiffres, telle qu'elle résulte de l'évaluation des inspections, c'est un coût de 500 millions d'euros, à répartir entre les assurances et l'État. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la reconnaissance très rapide de l'état de catastrophe naturelle a permis de débloquer la situation et d'accélérer le remboursement par les assurances. En ce qui concerne la participation de l'État, 60 millions d'euros proviennent du fonds de secours, auxquels s'ajoutent 5 millions d'euros du FISAC, le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales, et 4,5 millions d'euros du ministère de l'agriculture.
Une demande est en cours auprès de l'Union européenne, qui, je l'espère, va répondre aussi favorablement qu'elle l'avait fait pour le cyclone Gamède. En tout cas, très rapidement, je devrais obtenir des assurances de la part du commissaire en charge de ce dossier.
Il reste à finaliser un plan « logement » pour rénover ou reconstruire les 200 logements touchés. Nous travaillons avec les services locaux de l'État et les collectivités afin de boucler le plan d'action dans les prochaines semaines.
MM. Daniel Marsin et Serge Larcher ont évidemment évoqué le récent séisme. Ce séisme, dont l'épicentre se trouvait à seize kilomètres au nord de Fort-de-France et qui s'est produit à cent quarante-deux kilomètres de profondeur, a, pour cette raison, été plus fortement ressenti dans des pays voisins qu'à la Martinique. Mais il aurait pu avoir des conséquences extrêmement dramatiques.
C'est bien pourquoi il est urgent de mettre en oeuvre aux Antilles le plan « séisme », qui a été arrêté en conseil des ministres au début de 2007. Une première tranche de 350 millions d'euros sera mobilisée en priorité pour le logement social et les constructions scolaires. Vous pouvez, messieurs les sénateurs, compter sur ma très ferme détermination à cet égard.
Madame Hoarau, en ce qui concerne les contrats aidés, nous sommes très vigilants quant aux moyens attribués à l'outre-mer. Mais je demande aux élus de ces régions de noter les efforts consentis sur les exonérations de charges sociales ainsi que ceux qui seront faits pour les zones franches globales.
Le logement fait l'objet d'un volet important, j'en ai déjà parlé et j'y reviendrai en répondant à Mme Michaux-Chevry.
Sur la continuité territoriale, vous avez évoqué, de même que M. Marsin, une réforme du régime du passeport-mobilité doit intervenir afin de lui donner plus d'efficacité.
Dans le même temps, nous essayons d'agir sur les tarifs aériens, et les réunions que j'ai organisées avec les compagnies aériennes devraient faciliter la concurrence. L'allégement des obligations de service public et l'arrivée de nouveaux appareils sont prévus. Je soutiens votre démarche, madame Hoarau, afin que nous puissions accueillir à la Réunion des gros-porteurs tels que l'A 380, qui favoriseront la concurrence sur la desserte.
Je précise qu'il n'est pas question de remettre en cause les congés bonifiés, mais il faut les répartir sur l'ensemble de l'année, de manière à lisser le plus possible les périodes d'hyper-pointe. Ce thème fait également l'objet de la négociation en cours avec l'ensemble des compagnies aériennes.
Monsieur Marsin, vous avez souhaité avoir des garanties de l'État concernant l'opération de rénovation urbaine de votre commune des Abymes. C'est sans doute l'un des projets les plus ambitieux qui sont actuellement mis en oeuvre sur le territoire national, tant par l'importance des montants financiers en jeu - 416 millions d'euros - que par son caractère résolument innovant, à travers un appel significatif à la défiscalisation. Je m'engage à ce que l'État vous accompagne tout au long de l'opération par des moyens aussi bien budgétaires que fiscaux ; vous pourrez compter sur mon appui le plus total.
MM. Adrien Giraud et Soibahadine Ibrahim Ramadani ont tous deux évoqué le thème de l'évolution statutaire de Mayotte. Je l'ai dit ce matin, si le conseil général de Mayotte souhaite cette évolution, le Gouvernement consultera les Mahorais au lendemain des élections cantonales du mois de mars prochain. C'est la Constitution et c'est l'engagement du Président de la République pris le 13 juillet dernier, rue Oudinot.
Nous devrons ensuite élaborer ensemble l'évolution vers une départementalisation progressive et adaptée.
En ce qui concerne le statut européen, aujourd'hui, Mayotte est classée pays et territoire d'outre-mer. Avec le traité simplifié, Mayotte pourra devenir plus facilement une région ultrapériphérique et s'inscrire dans la politique de cohésion de l'Union européenne.
Monsieur Giraud, je partage votre souhait de voir évoluer ce statut européen. C'est la raison pour laquelle j'ai veillé à ce qu'une clause passerelle soit prévue dans le futur traité européen pour permettre cette évolution. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
Sur les crédits européens, je vous indique que le dixième FED, Fonds européen de développement, prévoit une enveloppe pour Mayotte de 22 830 000 euros, alors que 15 210 000 euros étaient initialement prévus dans le neuvième FED ; c'est donc une augmentation non négligeable, qui mérite d'être soulignée.
Concernant le contrat de projets, les travaux de concertation sont achevés et le Gouvernement - je me rendrai moi-même à Mayotte à cette fin - entend le signer au début de l'année 2008.
La conjugaison des deux instruments contractuels que sont le FED et le contrat de projets permettront de combler les retards que vous avez relevés et de financer les infrastructures lourdes dont l'archipel a besoin pour son développement. Nous avons la volonté de faire retenir, dans ce contrat de projets, tout ce qui touche aux infrastructures, notamment portuaires et aéroportuaires, mais aussi les volets traitant de la formation et du logement, qui sont les plus importants.
Monsieur Ibrahim Ramadani, je vous rappelle l'engagement du Président de la République de créer une antenne universitaire à Mayotte : je travaille sur cette question avec Valérie Pécresse.
S'agissant des conclusions de l'Observatoire des prix et des revenus, elles seront naturellement prises en compte dans les réflexions sur le développement économique et social de Mayotte.
J'en viens maintenant, madame Michaux-Chevry, aux accords de partenariat économique que vous avez évoqués, ainsi que Mme Hoarau.
Les accords entre l'Union européenne et les pays de l'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, vous le savez, sont négociés par la Commission au nom des États membres et sur la base du mandat que ceux-ci lui ont donné. Ce mandat autorise des mesures spécifiques en faveur des départements d'outre-mer.
Dès 2004, l'État a fait valoir ses positions auprès de la Commission, associant à sa démarche les assemblées locales et les acteurs socioprofessionnels. Au cours des six derniers mois, le Gouvernement a obtenu des résultats : l'octroi de mer a été exclu de la négociation, la clause de sauvegarde régionalisée sur les produits des départements d'outre-mer est maintenue et les mesures transitoires sur la banane et le sucre ont été acceptées. Mais tout n'a pas été possible ! Nous sommes, je vous le rappelle, vingt-sept États membres, et nos intérêts ne convergent pas toujours, malheureusement.
Vous pouvez compter sur notre vigilance et notre détermination pour que, à l'issue de ces négociations, l'outre-mer ne soit pas fragilisé mais puisse, au contraire, développer ses atouts. Puisque nous sommes six pays sur vingt-sept à être concernés, je vais réunir mes cinq autres homologues pour préparer la prochaine présidence française de l'Union européenne : en présentant des propositions communes nous devrions obtenir des avancées significatives sur ces sujets.
Monsieur Othily, vous avez également parlé du logement. Vous avez souligné l'effort exceptionnel entrepris en 2007 pour régler les dettes ; je peux vous confirmer que la loi de finances pour 2008 prévoit un abondement de 25 millions d'euros, complété par les mesures qui sont envisagées pour figurer dans la loi de programme à venir.
Vous m'avez surtout interrogé, presque solennellement, sur l'avenir du FEDOM. Je vous dois une vraie réponse. Les emplois aidés sont transférés au ministère de l'emploi où ils seront adossés aux masses déjà gérées par ce ministère. Comme je l'ai dit avec Mme Alliot-Marie ce matin, 153 millions d'euros exactement sont passés du ministère de l'outre-mer au ministère de l'emploi. Nous veillerons à obtenir un droit de regard direct sur cette enveloppe afin de nous assurer que ces crédits ne seront pas détournés de la destination qui était la leur dans le passé et qui doit demeurer. Une nouvelle architecture budgétaire et institutionnelle nous a conduits à ces modifications, mais rien ne sera changé dans la manière dont nous administrerons et déléguerons les moyens accordés dans le cadre de cette enveloppe. J'y serai particulièrement attentif.
Monsieur Gillot, vous m'avez fait observer qu'il serait souhaitable que les documents budgétaires comportent des données par territoire. Je vous invite à consulter les pages 116 et suivantes du document de politique transversale : elles démontrent que nous avons veillé à ce que les efforts contenus dans cette loi de finances puissent être identifiés territoire par territoire.
Par ailleurs, je sais combien la question du plan d'élimination des déchets ménagers est sensible en Guadeloupe. Soyez assuré que l'État, par l'intermédiaire de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, et les crédits du contrat de projets, mais également l'Union européenne, avec les crédits du FEDER, se mobiliseront autour des investissements majeurs prévus par ce plan. Un effort important, des collectivités comme de l'État, sera nécessaire pour mettre en oeuvre ces actions aujourd'hui indispensables.
Sur l'utilisation du chlordécone, je ne peux que réaffirmer mon souci d'une complète transparence dans la mise en place d'un plan d'action. Son volet agricole prévoit l'indemnisation des agriculteurs qui vont devoir se reconvertir, l'encouragement à des pratiques plus respectueuses de l'environnement sanitaire, avec l'aboutissement de l'ensemble des études engagées, ainsi que des mesures de protection des consommateurs. Le volet environnemental s'attachera à la protection des milieux aquatiques.
Enfin, je vous prends à témoin, monsieur le sénateur, ainsi que Mme Lucette Michaux-Chevry et tous les sénateurs qui représentent la Martinique ou la Guadeloupe : sincèrement, quand on connaît le sujet, peut-on penser qu'il est normal d'avoir cloué les Antilles au pilori médiatique, et cela sur la base d'un simple rapport d'une personnalité de la recherche médicale, dont je ne remets nullement en cause les compétences, mais qui est revenue quelques semaines plus tard sur ses propres déclarations !
Les pesticides ont effectivement empoisonné une partie nos sols jusqu'en 1993 avec l'utilisation du chlordécone, mais il faut tout de même bien insister sur le fait qu'il ne s'agit que d'une partie des sols. Dès lors, on n'a pas le droit de jeter l'opprobre sur l'ensemble des territoires de production, et je sais, monsieur Lise, que vous souscrirez à cette position. (M. Claude Lise fait un signe d'approbation.)
À Marie-Galante, par exemple, le chlordécone n'a jamais été utilisé ! Alors, pourquoi jeter le discrédit sur la Guadeloupe et toutes ses productions, alors qu'il y a aux Antilles françaises tant de productions à la qualité irréprochable ? Il est singulièrement injuste de donner ainsi en pâture à l'opinion toutes les productions de nos terres antillaises !
C'est pourquoi, en même temps que nous prenons toutes les mesures propres à garantir la santé de nos compatriotes, je préconise la délivrance de labels de qualité aux productions de territoires qui n'ont jamais été pollués, afin que justice soit enfin rendue aux Antilles, Martinique et Guadeloupe réunies ! Je souhaitais saisir cette occasion pour le dire ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF et du RDSE, ainsi que sur certaines travées socialistes.)
Vous m'avez également parlé de la lutte contre la délinquance. Vous avez raison ! J'ai pris la décision de créer un groupement d'intervention régional par département d'outre-mer.
Je sais que la loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs de Rachida Dati sur les peines plancher produit ses premiers effets, notamment sur la délinquance des mineurs. Je comprends qu'un certain nombre de nos concitoyens soient exaspérés de voir un multirécidiviste, interpellé quinze, seize, vingt fois, être renvoyé dans son quartier avec une simple admonestation ! Désormais, à la première récidive, une peine plancher s'applique, ce qui en surprend quelques-uns, qui commencent à potasser le code de procédure pénale en rentrant dans leur quartier une fois leur peine purgée. Tant mieux ! Ils seront amenés à y réfléchir à deux fois avant de continuer à troubler la vie des honnêtes citoyens sur l'ensemble de nos territoires.
Monsieur Detcheverry, je suis conscient de l'importance des filières pêche et aquaculture pour Saint-Pierre-et-Miquelon, tant en termes d'emplois que de savoir-faire. J'ai entendu vos préoccupations et je réunirai, ainsi que vous le demandez, tout comme le président du conseil territorial et Mme le député Annick Girardin, une table ronde sur l'avenir de ces filières, le 14 décembre prochain.
Une étape importante pour le développement économique de votre territoire, monsieur le sénateur, a été la signature de l'accord franco-canadien sur l'exploitation et l'exploration des champs d'hydrocarbures transfrontaliers, mais je sais que cela ne règle pas la question du plateau continental et de ses ressources. Le Gouvernement continue d'étudier les conditions dans lesquelles un dossier pourrait être déposé par la France, toujours dans un contexte marqué par la nécessité de développer la coopération régionale avec le Canada. Je compte m'inspirer de l'ensemble des propositions que vous avez présentées ici même et que vous m'avez communiquées par ailleurs de manière plus complète.
Je connais la fragilité des finances des collectivités de votre territoire et vous avez eu raison d'intervenir sur ce sujet. Je viens de mettre en place un million d'euros pour le conseil territorial ainsi que des crédits pour les communes de Saint-Pierre et de Miquelon-Langlade. Je suis d'accord pour examiner avec vous, dans un délai de trois mois, les conditions d'une rénovation de vos dotations.
Bien évidemment, quand on sait que ce territoire se trouve près de quatre mois de l'année sous la neige, on comprend que le coût de déneigement d'un kilomètre de voirie ou d'entretien des équipements publics n'est pas le même qu'en métropole ou dans d'autres territoires d'outre-mer qui ne connaissent pas les mêmes phénomènes climatiques ! Si l'on considère que la dotation par habitant doit être la même à Saint-Pierre-et-Miquelon qu'en métropole, les collectivités de votre territoire, monsieur Detcheverry, ne peuvent que se trouver en difficulté. Le Gouvernement doit mieux tenir compte de ces spécificités que par le passé.
Monsieur Laufoaulu, il est vrai que les noms de Wallis et de Futuna évoquent de manière quasiment extrême l'isolement qui peut être ressenti par beaucoup de nos compatriotes d'outre-mer. Je pense que tout l'hémicycle a été très sensible à ce que vous avez dit à ce sujet, et je n'oublie pas l'émotion que vous nous aviez déjà fait partager il y a un mois et demi.
Il faut savoir qu'il n'y a qu'un seul Twin Otter pour effectuer les allers-retours entre Wallis et Futuna et que, s'il tombe en panne, les déplacements entre les îles sont pratiquement impossibles, les évacuations sanitaires l'étant, quant à elles, totalement. Comment ne pas voir là une injustice ?
Monsieur le sénateur, je sais que vous vous êtes beaucoup démené pour cette cause. Je veux donc vous confirmer la location d'un deuxième Twin Otter par contrat d'une durée de trois ans, signé entre Aircalin et la société australienne propriétaire, avec l'aide de crédits d'État pris sur la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.) L'avion devrait être opérationnel en avril prochain, une fois les formalités d'agrément de l'appareil effectuées. La desserte permanente sera ainsi garantie entre les îles de Wallis et de Futuna.
Je vous confirme également que les travaux de la piste de Vele sont désormais en cours. Ils seront évidemment menés à leur terme dans les meilleurs délais
Je me réjouis, comme vous, que votre territoire organise les jeux du Pacifique Sud en 2013. C'est un magnifique événement, qui doit permettre de récupérer, de manière transversale, des fonds importants de tous les ministères et d'accélérer ainsi la politique de rattrapage en matière d'infrastructures au bénéfice de Wallis et de Futuna.
La convention collective de l'agence de santé de Wallis-et-Futuna sera prochainement signée sur place, ce qui permettra de pérenniser l'action de cette agence ; des moyens budgétaires, à hauteur de 170 000 euros, ont été affectés en ce sens pour l'année 2007.
Vous m'avez parlé du programme « quarante cadres » en matière de formation professionnelle. C'est un enjeu fondamental pour la jeunesse ultramarine en général et pour celle de Wallis-et-Futuna en particulier. Les moyens de ce programme sont préservés en 2008, comme ils l'étaient en 2007, pour assurer cette mission essentielle au développement de votre territoire.
Je soutiendrai également une démarche tendant à acquérir ou à construire des logements spécifiques à Nouméa pour les étudiants wallisiens et futuniens, qui en manquent cruellement, afin qu'ils puissent suivre leurs études à l'université de la Nouvelle-Calédonie.
S'agissant de la réduction de la fracture numérique, un des cinq cybercafés prévus est déjà réalisé, les quatre autres le seront dans le courant de l'année 2008. L'introduction de la concurrence est prévue avec l'arrivée d'un deuxième opérateur, pour assurer une meilleure qualité de service à un meilleur tarif.
Chacun doit également savoir que Wallis-et-Futuna est le dernier territoire de la République totalement dépourvu à ce jour de desserte en téléphonie mobile. Je m'engage à ce que, d'ici à juin 2008, le programme de téléphonie mobile ait démarré : c'est notre devoir.
Vous aurez en outre l'appui de l'État pour que le câble sous-marin qui va de Sidney à Nouméa et que je souhaite prolonger jusqu'à Papeete dans le cadre du contrat de projets avec la Polynésie française, desserve également Wallis-et-Futuna et l'ensemble des autres archipels de la Polynésie française.
J'en viens maintenant à la question importante posée Jean-Paul Virapoullé sur les prix.
Je souscris à tout ce que vous avez dit, monsieur le sénateur : les prix outre-mer sont parfois très élevés par rapport à ceux qui sont pratiqués en métropole. C'est pourquoi le Gouvernement s'efforce, lorsque cela est possible, d'agir sur leur structure pour qu'ils baissent.
Par exemple, en matière de médicaments, le Gouvernement a décidé - à la suite de votre initiative, monsieur Virapoullé, que je veux saluer ici -, d'abaisser leur prix de manière significative. Cette mesure profitera notamment aux populations les plus fragiles. Mes services étudient, avec ceux du ministère de la santé, une baisse d'au moins 5 % du prix des médicaments, et ce avant la fin de l'année 2007.
Vous avez cité beaucoup d'autres exemples de cet ordre, monsieur le sénateur, en invoquant des « surcoûts coloniaux ». C'est là une façon d'exprimer les choses qui vous est propre. (M. Jean-Paul Virapoullé sourit.) En tout cas, sur le fond, c'est un combat que nous devons livrer ensemble, au service de tous nos compatriotes, pour instaurer plus de justice, plus d'équité.
M. Loueckhote, vous avez évoqué l'engagement de l'État en Nouvelle-Calédonie et la nécessité d'aboutir à un équilibre entre les différents territoires.
Cet engagement, vous le savez, monsieur le sénateur, est plein et entier. Je me réjouis que, grâce à l'usine du Sud, la Nouvelle-Calédonie connaisse aujourd'hui un essor économique sur une partie de son territoire qui a longtemps été en difficulté.
De plus, nous venons enfin d'obtenir un accord des actionnaires au sujet de l'usine du Nord. Vous étiez d'ailleurs à mes côtés que lorsque j'ai rencontré le président de la province du Nord, M. Paul Néaoutyine. Je rappelle que ce sont les 230 millions de dollars accordés par l'État au titre de la défiscalisation qui ont permis de parvenir à cet accord qui ouvre la voie à la réalisation de l'usine du Nord. Le président Paul Néaoutyine a en outre demandé que nous accompagnions ce chantier, en matière de logement des actifs et de mise en place des infrastructures routières nécessaires à la desserte de ce territoire et de ce site ; nous y travaillons aujourd'hui, et j'apporterai des réponses positives à la province du Nord.
En tout état de cause, si l'on a pu enregistrer, en Nouvelle-Calédonie, une croissance de près de 6,3 % en 2005, de quelque 7,3 % en 2006, ainsi qu'une baisse du nombre des demandeurs d'emploi de 35 % sur les quatre dernières années, c'est parce que les choix que nous avons faits ensemble sont sans doute en train de porter leurs fruits.
Cela me permet de réaffirmer à cette tribune ce que j'ai dit avec beaucoup de conviction en Nouvelle-Calédonie : nous devons respecter les accords de Nouméa, veiller à ce que les demandes réitérées du comité des signataires soient observées. Nous en parlerons le 20 décembre prochain à Matignon.
Pourquoi suis-je attaché au respect des accords de Nouméa ? Parce que mon voeu politique personnel est de voir l'avenir de la Nouvelle-Calédonie s'inscrire au sein de la République française. Or, si nous veillons au respect des accords de Nouméa, si nous accompagnons la Nouvelle-Calédonie dans son développement économique, si nous respectons un calendrier de transfert de compétences au profit de l'ensemble des institutions de la Nouvelle-Calédonie, je ne doute pas que, lors du référendum sur l'autodétermination, qui se tiendra entre 2014 et 2018, les Néo-Calédoniens, dans leur grande majorité, ne se tromperont pas.
Bien entendu, je veux que tout se fasse dans le respect de chacun, dans le respect des différentes convictions, dans la tolérance, mais je veux en même temps que l'État soit présent en Nouvelle-Calédonie et ferme dans l'exercice de ses responsabilités régaliennes. Quand, ici ou là, certains organisent le blocage d'usines, placent des rubans bleus sur les vitrines des commerçants pour les empêcher de travailler et essaient de paralyser le développement économique, je dis que l'État doit assumer ses responsabilités et faire régner l'ordre public. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Par conséquent, oui au respect des accords de Nouméa, oui à la prise en compte des demandes du comité des signataires, oui aux transferts de compétences, mais dans le cadre d'un exercice plein et entier par l'État de ses compétences régaliennes en Nouvelle-Calédonie. Je voulais le rappeler à cette occasion.
Par ailleurs, je vous remercie, monsieur Loueckhote, d'avoir abordé le problème de l'indemnité temporaire de retraite, qui a fait l'objet d'un amendement présenté samedi dernier par le président de la commission des finances, M. Jean Arthuis.
Nous devons effectivement prendre le temps de la concertation et de la réflexion. Il faut étudier l'incidence économique du dispositif et voir comment le réformer éventuellement. Je vous donne mon accord pour la constitution du groupe de travail dont vous avez proposé la création. Ses travaux seront pris en compte dans le bilan d'étape de la réforme des retraites engagée depuis 2003.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. Cela me paraît fondamental.
Je sais bien que personne, parmi nos concitoyens, ne pourrait comprendre que nous en restions de manière durable à la situation actuelle, mais lorsque je considère, par exemple, le cas de la Polynésie française - je profite de cette occasion pour l'évoquer puisqu'elle n'était pas représentée aujourd'hui dans l'hémicycle -, je constate que quelque 6 000 retraités bénéficient actuellement du dispositif, dont 3 000 sont des Polynésiens, et que près de 11 000 autres personnes sont sur le point de partir à la retraite et resteront en Polynésie française. L'enjeu, ce sont quelque 230 millions d'euros injectés chaque année dans l'économie locale. On imagine donc aisément les conséquences qu'entraînerait une brutale remise en cause de la situation actuelle, là-bas comme dans les autres collectivités d'outre-mer.
Par conséquent, si nous avons le devoir, comme pour la réforme des régimes spéciaux de retraite, de réfléchir aux moyens d'instaurer davantage de justice et d'équité, au travers notamment du groupe de travail dont vous proposez la création, nous devons en même temps veiller à ce que, par exemple, figurent dans la future loi de programme des dispositions permettant d'accompagner une mutation progressive, de telle sorte qu'aucune de nos collectivités d'outre-mer ne soit lésée.
Voilà comment je vous propose de travailler sur ce dossier, monsieur le sénateur, afin d'apporter des réponses à la question que vous avez soulevée.
Enfin, vous m'avez fait part de votre souhait qu'une réflexion soit menée sur le statut européen de nos collectivités d'outre-mer. Je partage totalement votre voeu, et je vous précise que la Commission européenne s'est résolument engagée dans la rédaction d'un Livre vert sur l'évolution du statut des pays et territoires d'outre-mer et la refondation de la décision d'association. Le forum des PTOM, qui a réuni la semaine dernière à Bruxelles des représentants de l'ensemble des PTOM français, britanniques, danois et néerlandais, avait pour thème central cette évolution. Je suis heureux de constater quel rôle moteur joue la France dans le traitement de cette question.
Comme je vous l'ai dit, je réunirai l'ensemble de mes homologues très prochainement pour que nous puissions tous nous impliquer dans ce dossier, car nul ne doit oublier que nos compatriotes d'outre-mer, qu'ils vivent dans l'océan Atlantique, dans l'océan Indien ou dans l'océan Pacifique, sont aussi des citoyens européens à part entière. Je ne doute pas que la présidence française de l'Union européenne ne soit l'occasion de faire progresser la dimension européenne du statut des PTOM.
J'évoquerai maintenant les pistes de réflexion que nombre d'entre vous ont tracées, mesdames, messieurs les sénateurs, notamment Mme Michaux-Chevry, M. Loueckhote et M. Virapoullé.
Une phrase de Lucette Michaux-Chevry m'a beaucoup séduit. Vous avez dit, madame le sénateur : « Passons à des politiques de responsabilité. » Vous avez ajouté que telle était la volonté du Président de la République, m'invitant à la respecter. Imaginez-vous un seul instant, madame le sénateur, que je puisse ne pas respecter la volonté du Président de la République ? (Sourires.)