Sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
3. Candidatures à une commission mixte paritaire
4. Loi de finances pour 2008. - Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Marc Massion, Josselin de Rohan, Thierry Foucaud, Jean-Michel Baylet, Aymeri de Montesquiou, Christian Gaudin.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Adoption, par scrutin public à la tribune, du projet de loi de finances.
5. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
6. Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue et ami Charles de Cuttoli, sénateur honoraire et membre honoraire du Parlement, qui fut sénateur représentant les Français établis hors de France de 1974 à 2001.
3
candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi de finances pour 2008 actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
4
Loi de finances pour 2008
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (nos 90, 91).
Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous voici parvenus au dernier jour de la discussion budgétaire.
Quelle comparaison choisir : celle du « marathon » ou celle de la « course de fond » ? Je laisse à chacun le soin de juger.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pourquoi pas le jumping ?
M. le président. Quoi qu'il en soit, ces trois semaines ont requis de nous tous des qualités d'athlètes complets.
En notre nom à tous, je souhaite remercier très vivement une nouvelle fois Mme Lagarde, qui, retenue ailleurs, n'a pu être parmi nous aujourd'hui, ainsi que M. Woerth ici présent pour la qualité de leur écoute et la précision de leurs réponses. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.) Mes remerciements s'adressent aussi aux membres de leurs équipes, dont nous avons tous pu apprécier la compétence et la disponibilité.
Je soulignerai également l'assiduité sans faille du président et du rapporteur général de notre commission des finances (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées), dont la présence constante, la rigueur et - oserai-je le dire, la passion ! - ont une fois de plus fait l'admiration de toutes et de tous. Félicitons les « hommes-orchestres » de la discussion budgétaire ! Mes compliments, messieurs !
Pendant plus de 130 heures, chacun, qu'il soit de la majorité ou de l'opposition, a pu s'exprimer et apporter sa pierre à l'édifice de nos propositions budgétaires.
Sur les 226 orateurs des groupes qui sont intervenus pendant cette discussion, 134 appartiennent à la majorité et 92 à l'opposition.
Je voudrais aussi relever que, sur les 113 rapporteurs spéciaux et pour avis qui ont animé nos débats, 81 appartiennent à la majorité et 32 à l'opposition : c'est donc une vraie diversité des points de vue qui, cette année encore, a pu librement, comme cela doit être la règle, s'exprimer.
Je souhaite remercier vivement toutes celles et tous ceux, sénatrices, sénateurs ou ministres, qui ont veillé à respecter scrupuleusement les temps de parole définis par la conférence des présidents, conformément à l'appel que j'avais lancé au début de cette discussion. Vous avez ainsi toutes et tous prouvé que la meilleure discipline reste décidément l'autodiscipline !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. le président. Grâce à vous tous, nos débats ont été à la fois sereins et riches. Le large écho médiatique qu'ils ont reçu en est le signe certain.
Comme chaque année, la discussion du projet de loi de finances, dépassant tout naturellement les aspects strictement budgétaires, a reflété dans leur diversité tous les aspects de l'actualité des politiques publiques.
Si l'on en juge par les amendements d'origine sénatoriale, les thèmes abordés pendant cette discussion tiennent de « l'inventaire à la Prévert », allant de la TVA sur les activités de déneigement aux aumôniers dans les prisons, de la fiscalité sur les biocarburants au monopole de l'État sur les ventes de tabac dans les collectivités d'outre-mer, de la redevance télévision aux cessions d'ordinateurs par les entreprises, sans oublier - dans un registre qui, s'il est plus technique n'en est pas moins important - les plus-values à long terme des sociétés immobilières cotées ou l'exonération de charges pour les employeurs de services à la personne.
Cette année encore, a pu se faire entendre la spécificité de notre assemblée, représentant constitutionnel des collectivités territoriales et des Français établis hors de France.
En première comme en deuxième partie, les débats centrés sur les collectivités territoriales, sans oublier celles d'outre-mer, ont été particulièrement éclairants et complets.
Quant à nos collègues représentant nos compatriotes établis à l'étranger, ils ont montré une fois de plus leur implication forte dans les questions concernant, entre autres, les affaires étrangères et la culture.
Le travail que nous venons d'accomplir, mes chers collègues, ne s'arrêtera pas avec la promulgation de la loi que nous allons voter dans un instant.
En effet, dès le 1er janvier prochain, il appartiendra au Gouvernement d'assurer l'exécution de ce budget, conformément aux orientations que nous avons fixées. J'espère, monsieur le ministre du budget, que, dans le souci de donner l'exemple, vous ferez en sorte que le taux d'exécution des lois dépasse 35 %, qui constitue, en la matière, le taux moyen - et insuffisant -, comme l'a souligné un récent rapport du Sénat. Vous pouvez encore faire mieux, et je ne doute pas un seul instant que vous agirez en ce sens.
Pour l'heure, si vous le voulez bien, profitons pleinement de ce moment solennel, convivial, amical et, ajouterai-je, républicain du vote sur l'ensemble du projet de loi de finances, d'autant que nous nous retrouverons très bientôt, pour l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2007 ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi de finances, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui l'ont demandée pour expliquer leur vote.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation des débats décidée le 7 novembre dernier par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de dix minutes.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous venons de vivre des débats toujours riches, intéressants, sereins - vous l'avez souligné, monsieur le président -, des débats souvent exaltants.
Mais, convenons-en, c'est au moment de l'examen des amendements que l'intensité et, oserai-je dire, le suspense atteignent leur meilleur niveau, tout spécialement lorsque leurs auteurs sont inspirés par de fortes convictions, notamment celles qu'ils ont acquises lors de contrôles sur place et sur pièce. Nous avons pu le vérifier, cette année, de façon peut-être plus nette encore que les années précédentes. M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'État », peut en témoigner.
Ainsi, je voudrais à nouveau lancer un appel aux rapporteurs pour avis. Mes chers collègues, puisque le contrôle est l'une de nos grandes prérogatives, unissons nos initiatives, coordonnons nos efforts, organisons des missions conjointes des rapporteurs spéciaux de la commission des finances et des rapporteurs pour avis des autres commissions !
Les constats, les données factuelles sont des arguments déterminants pour convaincre non seulement le Sénat, mais aussi le Gouvernement. Les sénateurs qui ont fait des constatations ou observé des dysfonctionnements sont en situation de faire partager leurs convictions et de faire voter des amendements.
L'amendement déclenche l'interactivité, donne au débat son relief, son originalité, sa valeur ajoutée. Cessons de nous interroger à propos des pouvoirs du Parlement. Osons, mes chers collègues, assumer la plénitude de nos prérogatives ! J'en suis convaincu, c'est le meilleur service que nous puissions rendre au Gouvernement et à la sphère publique.
Dans ce cadre, le temps est venu de nous interroger à propos de la durée et de la forme des discussions générales des trente-quatre missions du budget.
Réduire la durée des séances dans l'hémicycle, libérer du temps pour les auditions publiques et les réunions de commissions dans ce que nous appelons désormais le « petit hémicycle » et, surtout, revaloriser le projet de loi de règlement, telles sont quelques-unes des pistes de réflexion issues des débats qui ont eu lieu ces dix derniers jours sur les crédits des missions. Elles devront nous guider pour nous permettre d'oeuvrer à la rénovation du rôle et de la place du Sénat, à laquelle chacun ici est si légitimement attaché.
À l'évidence, nous avons examiné un budget de transition, dont la sincérité a été servie par un bel effort du Gouvernement. Il nous faut le reconnaître, monsieur le ministre. Cette sincérité révèle toute l'âpreté de la situation de nos finances publiques. Au seuil de la nouvelle législature et donc du quinquennat nouveau, ce budget porte la marque des gestions antérieures et transcrit l'impact des mesures votées cet été dans la loi TEPA, la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. Il serait donc vain d'y chercher la trace des réformes à venir.
Au cours de nos débats, toujours courtois et surtout constructifs, nous nous sommes efforcés d'atténuer les conséquences de certains arbitrages. C'est ainsi qu'à propos des relations entre l'État et les collectivités territoriales, fidèles au « bonus constitutionnel » du Sénat, nous sommes parvenus - non sans difficulté, il est vrai - à améliorer le système en gommant la brutalité des ajustements ciblés sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP, et sur la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties. Grâce au rapporteur général, Philippe Marini, avec l'aide du rapporteur spécial Michel Mercier et du Gouvernement, un correctif a pu être mis au point. Ce faisant, nous avons surtout mis en évidence la fin annoncée d'un mode de financement de l'État vers les collectivités territoriales.
Aussi sommes-nous convenus d'ouvrir, dès le début de l'année 2008, le chantier des modalités de répartition de quelque 54 milliards d'euros de dotations. Arrivé au bout du rouleau, le système croule sous les contraintes et la complexité. Toute péréquation est devenue aujourd'hui impossible, pérennisant des injustices flagrantes.
M. Gérard Delfau. C'est vrai !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il est donc urgent d'y porter durablement remède. Nous serons invités à faire preuve de beaucoup de lucidité et de courage.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sur le fond, et sans anticiper sur le bilan que le rapporteur général dressera dans un instant, ce budget nous invite à une triple réflexion.
Première réflexion : comment retrouver l'équilibre des finances publiques d'ici à 2010-2012 ? Mes chers collègues, 65 milliards d'euros d'économie sont à trouver avant cette échéance. Sans préjuger des résultats de la révision générale des politiques publiques, que j'espère audacieux et réformistes, j'ai conscience que ceux-ci dépendront pour une large part du taux de croissance de notre économie, que les récents événements ont, à tout le moins, mis à mal...
À l'évidence, l'augmentation durable du prix du pétrole, qui s'est approché du seuil symbolique des 100 dollars, ne va pas simplifier les choses, et cela d'autant moins que la hausse du prix des matières premières offre de nouveaux champs d'action aux fonds souverains, qui, à l'avenir, risquent de ne plus investir seulement dans notre dette souveraine.
Deuxième réflexion : comment redonner de la compétitivité au travail, aux entreprises, aux territoires afin de contribuer au tonus et au dynamisme de notre économie ? C'est certainement le grand débat de l'année à venir, au moment où le tabou des délocalisations vient de sauter, comme en attestent les récentes déclarations des responsables de nos fleurons industriels, tout spécialement dans le domaine aéronautique. Nous ne pouvons en aucune façon considérer que la désindustrialisation est une fatalité pour la France.
Ayons à l'esprit les statistiques relatives à notre commerce extérieur : déficit record au mois d'octobre et sans doute pour l'année 2007. S'il est vrai que l'État dépense plus qu'il ne reçoit, les Français, collectivement, consomment plus qu'ils ne produisent. La récente baisse du taux de chômage accrédite le retour à une croissance plus robuste. Tant mieux !
Il reste que d'importantes réformes structurelles, notamment sur les prélèvements obligatoires, sont attendues, en particulier - puis-je le rappeler, mes chers collègues ? - le financement des branches santé et famille de la sécurité sociale. Pour l'immédiat, nous attendons avec confiance les premières décisions de la révision générale des politiques publiques. Dès demain, je crois, une première série d'arbitrages sera prononcée.
Troisième réflexion : au-delà des efforts accomplis par la France, le redressement économique appelle l'Europe à un sursaut. Que l'Europe politique existe enfin ! Que la Banque centrale européenne ait, à ses côtés, un pouvoir politique européen ! À la veille de la présidence française, comment faire entendre notre voix ? Nous pouvons le faire par des réformes structurelles courageuses, trop longtemps ajournées. N'hésitons plus à perdre cette spécificité pour redevenir moteur. L'année qui vient est cruciale, déterminante. Elle porte toutes nos espérances.
Avant de conclure, mes chers collègues, je me fais votre porte-parole en adressant mes très chaleureux et cordiaux remerciements à Philippe Marini, notre rapporteur général. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et du RDSE.) Comme à son habitude, il a mis sa maestria, la force de ses convictions et son sens de la pédagogie au service du Sénat. Qu'il en soit chaleureusement remercié (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées), ainsi que les quarante-trois rapporteurs spéciaux de la commission des finances et les soixante-quatre rapporteurs pour avis des cinq autres commissions permanentes, qui, sous l'autorité de leurs présidents, ont su donner de l'interactivité, parfois même de l'imprévu à nos débats.
Je remercie également tous nos collègues qui ont participé à nos discussions avec autant de conviction que de courtoisie républicaine, le tout dans le respect de nos légitimes différences, à l'image de ce que notre assemblée sait si bien faire ! Nous avons ainsi connu plusieurs moments - très appréciés - d'unanimité.
Je veux aussi saluer les ministres, qui, pour la plupart, se sont prêtés avec bonheur à notre dialogue, en vous distinguant tout naturellement, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique pour vous remercier de votre disponibilité et de votre écoute.
Mes remerciements s'adressent également, bien évidemment, à l'ensemble de vos collaborateurs, ceux de votre cabinet et des services de Bercy, qui ont à nouveau prouvé leur efficacité et leur réactivité.
Vous me permettrez d'y associer nos propres collaborateurs de la commission des finances et de chacune des commissions permanentes du Sénat.
Je remercie enfin la présidence, vous-même, monsieur le président du Sénat, et les six vice-présidents, ainsi que les services de la séance et des comptes rendus, grâce auxquels cette discussion a su rester d'un bout à l'autre dans l'épure que nous avions tracée. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion du premier projet de loi de finances de la nouvelle mandature. Dans quelques jours seulement, nous aborderons, dans cette course d'obstacles, le dernier obstacle de l'année pour la commission des finances - et ce n'est pas le moindre ! -, c'est-à-dire le collectif budgétaire.
À chaque jour suffit sa peine. Rappelons simplement cet après-midi que nous avons ajouté cinquante-huit articles aux soixante que comportait le texte initial ! (Ah ! sur plusieurs travées de l'UMP.)
Bien entendu, ces initiatives se répartissent harmonieusement et équitablement entre le Gouvernement et le Sénat, entre la majorité et, pour une part non négligeable, l'opposition de notre assemblée. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Plusieurs sénateurs socialistes. Lesquelles ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'y reviendrai et vous donnerai quelques exemples, mes chers collègues !
En ce qui concerne les aspects budgétaires, nous avons tenu nos engagements, en faisant en sorte que, malgré toutes les sollicitations, le solde du projet de loi de finances ne soit pas aggravé à l'issue de son examen par le Sénat.
Nous y sommes parvenus, malgré le surcoût consécutif à l'ajustement nécessaire du droit à compensation des collectivités locales, au titre du transfert de différents personnels, d'un montant de 110 millions d'euros. Nous avons pu le faire aussi en améliorant à la marge, mais cependant de façon significative, au sujet des dotations d'ajustement, les financements des collectivités territoriales.
En ce qui concerne les mouvements de crédits, nos délibérations ont porté sur 600 millions d'euros relatifs à treize missions. En illustration des propos de Jean Arthuis, je rappelle que les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis ont été particulièrement actifs au cours des débats relatifs à la deuxième partie du projet de loi de finances. Ils ont fait preuve de vigilance ; ils ont apporté leur contribution ; ils ont pris appui sur les missions qu'ils effectuent tout au long de l'année.
Par ailleurs, à la demande du Gouvernement, il a été procédé à des réductions de crédits, d'un montant de 675 millions d'euros, et à l'ouverture de 170 millions d'euros de crédits supplémentaires.
Mes chers collègues, cela montre bien que l'examen budgétaire des différentes missions et des différents programmes se fait de manière itérative, interactive et que, mission par mission, programme par programme, les sénateurs ont été parties prenantes de l'élaboration de ce budget. Nous ne sommes pas spectateurs, loin de là !
J'en viens aux apports législatifs. En cet instant, je veux remercier nos différents collègues qui, par leurs propositions, par leurs amendements, ont permis de faire progresser le projet de loi.
Je veux remercier, par exemple, au sein de la majorité, Alain Lambert, Yves Fréville, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Michel Houel, Jean Bizet, Roland du Luart,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous en oubliez !
M. Philippe Marini, rapporteur général.... ainsi que nos collègues Georges Mouly, Christian Gaudin, Philippe Adnot.
En ce qui concerne maintenant l'opposition, je veux remercier particulièrement Michel Charasse (Exclamations sur diverses travées), qui a été très présent au cours des débats ! Il a fait avancer de nombreuses idées, souvent dans une démarche transpartisane, qu'il faut saluer.
Je ne saurais non plus oublier les auteurs, j'allais dire plus orthodoxes, d'amendements adoptés par le Sénat que sont nos collègues Claude Domeizel, François Marc, Pierre Mauroy, Jean-Marc Pastor, Marc Massion.
Quelle a été la contribution du Sénat à ces articles législatifs ? Nous nous sommes intéressés en particulier, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, à quatre rubriques, cette liste n'étant pas exhaustive.
En ce qui concerne, tout d'abord, la fiscalité de l'épargne et des marchés financiers, nous n'avons pas pu satisfaire aux préconisations des membres du groupe CRC.
Mme Odette Terrade. C'est bien dommage !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons supprimé, dès 2008, l'impôt de bourse. Nous avons modifié la fiscalité des valeurs mobilières...
Mme Nicole Bricq. Ça oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général.... et fixé un prélèvement libératoire à 18 %,...
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général.... ce qui est vertueux, mon cher collègue. Nous avons relevé à 25 000 euros le seuil d'exonération des plus-values en matière de cessions de valeurs mobilières.
Mme Nicole Bricq. Il n'y a pas de quoi être fier !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est une mesure pour le grand capital !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons donné accès au bénéfice du prélèvement libératoire aux dirigeants d'entreprise non salariés. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Tout cela montre bien qu'au sein de notre assemblée existent une majorité et une opposition, ce qui est nécessaire.
En ce qui concerne les biocarburants - deuxième rubrique -, sur l'initiative du Gouvernement et de la commission des finances, nous avons mis en place un dispositif qui proroge le remboursement partiel de taxe intérieure sur les produits pétroliers et de taxe intérieure à la consommation du gaz naturel dont bénéficient les exploitants agricoles. Nous avons par ailleurs révisé, en fonction de l'évolution du contexte économique général, le barème de l'exonération fiscale dont profitent les différentes filières de biocarburants. Cela nous a permis de rappeler la priorité qui s'attache à cette diversification agricole, génératrice de nouvelles richesses pour nos territoires ruraux.
S'agissant des dotations des collectivités territoriales - troisième rubrique -, la commission des finances, qui a beaucoup peiné sur ce sujet cette année, est parvenue à aménager les nouvelles règles d'indexation des dotations de l'enveloppe normée. Nous avons maintenu les règles de base, à savoir une indexation de l'enveloppe normée égale à l'inflation prévisionnelle et une indexation de la DGF selon les règles antérieures prenant en compte une part de la croissance prévisionnelle.
Nous nous sommes également intéressés, vous le savez, mes chers collègues, aux conséquences, parfois préoccupantes, de la baisse des variables d'ajustement sur les différents échelons de collectivités. Nous avons adopté un mécanisme correctif qui porte, globalement, sur 113 millions d'euros et qui atténue les difficultés que l'on peut attendre en matière de compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties et d'allocation au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
J'en viens maintenant à la quatrième rubrique. Le Sénat a de nouveau adopté plusieurs dispositions relatives au régime des sociétés immobilières cotées.
Mme Nicole Bricq. Oh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Jusqu'ici, nous nous en sommes bien portés. C'est notamment le cas des innovations apportées depuis les années 2002, 2003...
Mme Nicole Bricq. Il n'y a pas de quoi être fier !
M. Philippe Marini, rapporteur général.... en termes d'activité, de développement, d'investissement, d'emploi mais aussi, monsieur le ministre, de recettes budgétaires.
J'achèverai ce propos récapitulatif en évoquant la deuxième partie du projet de loi de finances, encore toute fraîche dans ma mémoire, puisque nos délibérations, sous la présidence d'Adrien Gouteyron, se sont terminées tôt ce matin.
Nous avons opéré quelques modifications allant dans le sens du dispositif préconisé par le Gouvernement en matière de crédit d'impôt recherche et à l'égard des jeunes entreprises universitaires. Ces compléments sont utiles.
Nous avons réglé certains problèmes de gestion locale et ajusté de nouveau certains dispositifs complexes en matière de fiscalité locale. Nous avons surtout consacré beaucoup de temps, au cours de ces dernières heures, à des débats de principe. Le Sénat a voulu affirmer sa place, prendre date et préparer les échéances des prochains mois.
Ce fut le cas en matière de fiscalité écologique. Nous avons adopté un amendement tendant à développer le système de récupération des imprimés qui élargit le dispositif Éco- Folio existant. Il va permettre, dans le respect d'une plus grande neutralité, de mieux financer la valorisation des déchets et de favoriser des intercommunalités plus efficaces.
Nous avons également abordé la question de l'autonomie des personnes âgées et de leur dépendance. Ce sujet n'est pas facile, c'est l'un des problèmes cruciaux de la société d'aujourd'hui. Nous avons suivi les réflexions et les orientations du Président de la République, qui souhaite l'émergence d'un cinquième risque social en matière de dépendance des personnes handicapées et des personnes âgées.
Au moment où la Haute Assemblée s'apprête à mettre en place une mission commune d'information sur ce sujet au sein de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, nous ne nous sommes pas dérobés vis-à-vis du difficile débat qu'est celui de la solidarité entre les générations.
M. Henri de Raincourt. Oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette nuit, nous avons traité le délicat problème de la récupération sur succession, que l'on ne peut éluder.
M. Guy Fischer. Scandaleux !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement qui a été adopté est un signal, un appel au débat et à la réflexion.
M. Guy Fischer. C'est un appel à faire payer les pauvres, les familles ; c'est scandaleux !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mon cher collègue, il n'est pas scandaleux que chaque génération se préoccupe du sort des anciens et n'attende pas tout de la collectivité ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Vives protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et la solidarité nationale !
Mme Nicole Bricq. Les chômeurs paieront pour leur famille ! C'est scandaleux !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Enfin, j'achèverai mon propos en évoquant la politique fiscale.
Au cours de nos débats et encore dans les dernières heures, s'agissant des articles non rattachés de la deuxième partie, nous avons traité des fameuses niches fiscales, de cette mauvaise herbe fiscale qui a eu tendance à beaucoup proliférer ces dernières années. En débattant de ce sujet, ce matin, avec mon collègue rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Gilles Carrez, j'observais que, même si les deux assemblées n'abordent pas ce sujet de la même façon, nos préoccupations sont assez identiques.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. À quel niveau ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'Assemblée nationale raisonne en termes de plafonnement des avantages et des exonérations. Le Sénat, quant à lui, préfère raisonner en termes de contrainte de durée et de réévaluation périodique, voire de suppression de nombreux régimes de dérogations, exonérations et déductions de toutes natures.
Mais, finalement, les préoccupations que nous exprimons sont bien les mêmes, à savoir la recherche d'une fiscalité plus lisible et plus attractive, c'est-à-dire plus propice à l'attractivité de notre pays, de nos sites en matière d'emploi et d'investissement.
Comme Jean Arthuis, je termine mon propos en faisant référence à un événement qui aura lieu demain, c'est-à-dire la première séance du Conseil de la modernisation des politiques publiques, sous l'autorité du Président de la République (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.),...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Alors, c'est une garantie ! (Rires sur les travées du groupe CRC.)
M. Philippe Marini, rapporteur général.... qui va annoncer des décisions structurelles importantes relatives au système d'État, des simplifications, des améliorations, des économies, pour un meilleur service rendu aux usagers, à nos concitoyens et aux collectivités.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On trouve déjà tout dans la presse !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, nous ne pouvons pas, au Sénat, être des adeptes de l'État immobile. L'État évolue et doit continuer à le faire, au sein d'un monde compétitif et difficile. Les parlementaires, notamment nous, sénateurs, devons bien prendre conscience des problèmes qui se posent, les expliquer, faire preuve de pédagogie et assumer l'avenir en disant la vérité à nos concitoyennes et à nos concitoyens. C'est ce que nous nous sommes efforcés de faire tout au long de la discussion de ce projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous en avons confirmation cette année : pour gouverner, il n'y a pire situation pour la droite que de succéder à la droite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. Et ce n'est pas fini !
M. Marc Massion. Déjà en 1995, M. Juppé disait calamiteuse la situation laissée par MM. Balladur et Sarkozy et, en 2007, avec d'autres mots, MM. Sarkozy et Fillon assument de manière très critique l'héritage de deux gouvernements dont ils ont été pourtant deux acteurs essentiels.
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. Marc Massion. En effet, les chiffres sont là : les prélèvements obligatoires sont passés de 42,90 % du PIB en 2003 à 44,2 % en 2006,...
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Marc Massion.... et la dette a augmenté de huit points en cinq ans,...
Un sénateur socialiste. Et ce n'est pas fini !
M. Marc Massion.... d'où l'appel à la rupture.
Mais il y a deux façons de réaliser cette rupture : pour le mieux ou pour le pire.
Le Gouvernement a choisi la seconde solution et la loi TEPA, dans la continuité de l'idéologie au pouvoir, n'a fait qu'aggraver les choses.
Résultat : le chef du Gouvernement annonce que le pays est en faillite et le Président de la République annonce que les caisses sont vides. C'est sûrement de la franchise, mais c'est aussi un sérieux constat d'échec, et je doute que ce soit excellent pour le moral des Français. Dans les réunions internationales, notamment européennes, que doivent penser nos partenaires ? Au moins, que vous n'avez pas de leçon à donner, monsieur le ministre !
Ce projet de budget que nous venons d'examiner est dans la même ligne d'aggravation des inégalités.
Vous avez complètement oublié, ou plutôt fait semblant d'oublier, que dans « TEPA », « P » et « A » voulaient dire « pouvoir d'achat », sous-entendu « pouvoir d'achat pour tous les Français », ce qui a ainsi créé une forte attente dans le pays.
Force est bien de constater que le candidat de l'augmentation du pouvoir d'achat n'est devenu que le président du paquet fiscal, parfaitement ciblé l'été dernier, pour être maintenant le président des heures supplémentaires et des RTT, mais sans moyen financier pour assumer son rôle.
En effet, les mesures annoncées dans l'urgence et dans le flou sont des injonctions aux entreprises. C'est quand même facile d'annoncer des mesures gouvernementales et de les faire appliquer par d'autres !
Des millions de Français ne sont pas concernés par la loi TEPA, des millions de Français ne sont pas concernés par les dernières décisions du Président de la République, non plus que par les mesures prévues dans ce projet de budget : les retraités, notamment les plus modestes ; le Gouvernement leur a promis 25 % d'augmentation en cinq ans...
M. Guy Fischer. Ils n'auront que 1,1 % !
M. Marc Massion.... mais, pour l'instant, ils n'en sont qu'à 1,1 %, et 800 000 d'entre eux paieront la moitié de la redevance audiovisuelle...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelle honte ! Où va l'argent ?
M. Marc Massion.... alors que, jusqu'à présent, ils étaient exonérés de la totalité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Le Gouvernement ne donne pas du pouvoir d'achat, il le diminue.
Un sénateur socialiste. Exactement !
M. Marc Massion. Il va effectuer des prélèvements sur les remboursements de frais médicaux : nouvelle diminution du pouvoir d'achat !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pas pour tout le monde ! Certains, en revanche, gagnent du pouvoir d'achat dans l'affaire !
M. Marc Massion. Ne sont pas concernés non plus par la loi TEPA, les chômeurs, bien évidemment, qui ne font pas d'heures supplémentaires, même pas d'heures du tout, pas plus, d'ailleurs, que les RMIstes, de plus en plus nombreux.
M. Dominique Braye. C'est faux !
M. Marc Massion. Ne sont pas concernés les salariés à temps partiel. Ainsi, aux caissières de grandes surfaces, qui ont des contrats de vingt-deux heures par semaine, quelle augmentation du pouvoir d'achat leur est offerte ?
Ne sont pas concernés les salariés qui n'auront pas la possibilité de faire ces fameuses heures supplémentaires, parce que, évidemment, la décision d'en faire ou non ne dépend pas d'eux.
Avez-vous imaginé, monsieur le ministre, le climat qui va se créer au sein de certaines entreprises ? Il y a déjà les CDI, les CDD, les intérimaires, maintenant, il y aura deux autres catégories de salariés en fonction de la possibilité de faire ou non des heures supplémentaires !
Ce n'est pas de la cohésion sociale, c'est de la dislocation sociale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Beaucoup vont se sentir exclu !
Lors d'un conflit social toujours en cours, vous n'avez cessé de parler d'équité entre les Français. (Mme Nicole Borvo s'esclaffe.)
Expliquez-nous ce que veut dire « équité » avec une telle politique de discrimination, qui va dresser les Français les uns contre les autres du fait de l'inégalité de leurs situations !
Allez sur les marchés, sans caméra, et écoutez les gens ! Ils vous diront qu'au fil des mois ils ont de plus en plus de mal à acheter les denrées alimentaires courantes. Ils voudraient pouvoir acheter ce qu'ils ne peuvent plus acheter, pour vivre au quotidien. Ce n'est quand même pas indécent ! Ce sont les plus modestes qui le disent et ce sont eux que vous ignorez. C'est d'autant moins indécent si l'on compare cela à une certaine auto-augmentation personnelle décidée au plus haut niveau de l'État !
Pour être vraiment concret, je prendrai un exemple tout simple et de bon sens : si le Gouvernement veut vraiment aider les pêcheurs, il faut qu'il encourage les consommateurs à acheter du poisson, ce que ces derniers peuvent de moins en moins faire et qu'ils pourront encore de moins en moins faire avec la nouvelle taxe.
Le Gouvernement est prisonnier de son idéologie : il oppose le pouvoir d'achat, c'est-à-dire la consommation, à la compétitivité des entreprises. Nous sommes, nous aussi, soucieux de la compétitivité des entreprises et ce n'est pas la remettre en cause que vouloir une autre répartition du pouvoir d'achat. Cela s'appelle la justice sociale, mais cela ne semble pas faire partie de votre vocabulaire, monsieur le ministre.
Puisque je parle de consommation, j'indique que les prévisions de recettes de la TVA pour 2007 sont inférieures aux prévisions de 2,4 milliards d'euros. C'est un signe, et ce n'est pas un bon signe.
Par le biais de ce projet de budget, vous portez un mauvais coup aux collectivités locales. (Oh oui ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Vous pouvez triturer les chiffres dans tous les sens et répartir la pénurie autrement, la seule réalité, c'est qu'il manque plus de 400 millions d'euros, ce que M. le rapporteur général appelle pudiquement « un certain pincement des ressources consacrées aux collectivités locales ». (Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Gérard Delfau. Poète ! (Sourires.)
M. Marc Massion. Vous avez remis en cause le contrat de croissance et de solidarité, alors même que les collectivités concourent puissamment à la croissance : plus de 72 % des investissements civils publics ont été réalisés par les collectivités territoriales en 2006.
Si elles ne sont plus en mesure de continuer leur politique de développement, c'est la récession assurée dans certaines branches professionnelles ! II n'est pas juste que nos collectivités ne bénéficient pas de la croissance alors qu'elles contribuent à son dynamisme.
Même si cette croissance est faible, trop faible, la réalité de la croissance en 2007 et les prévisions pour 2008 ne sont pas au rendez-vous du prétendu « choc confiance » annoncé cet été et dont les effets devaient se faire sentir rapidement.
Dans ce projet de budget, la rupture est là, dans votre politique à l'égard des collectivités territoriales, qui, elles, assument leurs engagements et même bien davantage. Ainsi, les régions se substituent à l'État défaillant pour boucler le financement des contrats de plan État-régions.
Le congrès de l'Association des maires de France a lancé plusieurs messages au Gouvernement, dénonçant ce « contrat de stabilité sans aucun lien avec la réalité des obligations financières des collectivités locales ».
Ce désengagement de l'État est d'autant plus injuste que, selon les déclarations de Mme le ministre devant le comité des finances locales, la dette des collectivités locales pèse 0,1 % du produit intérieur brut.
Par ailleurs, vous faites une impasse totale sur une péréquation juste et dynamique pour les collectivités les plus pauvres.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Marc Massion. Durant l'examen de ce projet de budget, mission après mission, nous avons exprimé notre opposition aux choix politiques du Gouvernement, et je n'en referai pas ici l'inventaire. Je rappellerai simplement, pour mémoire, que ce dernier ne répond pas aux urgences essentielles que sont le logement, l'éducation, la politique de la ville.
L'Association des maires ville et banlieue a ainsi lancé un véritable cri d'alarme au vu de la baisse de 12,7 % de l'ensemble du budget « Ville et logement ».
L'évolution du livret A qui est envisagée n'est pas pour nous rassurer s'agissant du logement, en particulier du logement social. (Marques d'approbation sur les travées du groupe CRC.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Son taux va augmenter !
M. Marc Massion. Le Gouvernement remet en cause le principe républicain de la progressivité de l'impôt et confirme son choix idéologique d'entamer un peu plus l'ISF, dont il souhaite chaque année, sans jamais mettre ce souhait à exécution, la suppression, sans jamais nous dire quelle autre recette pourrait s'y substituer. Il se félicite même de l'augmentation de son produit...
En décidant des mesures ciblées toujours pour les mêmes, les plus favorisés, il n'a plus aucune marge de manoeuvre.
Bien sûr, au cours du débat, nous nous sommes entendu dire que nous n'étions pas une gauche moderne...
M. Philippe Leroy. C'est clair !
M. Marc Massion.... mais pour vous, mesdames, messieurs de la majorité, une gauche moderne, c'est une gauche qui adhère à votre politique, comme le font quelques individualités qui sont membres du Gouvernement. Ne comptez pas sur nous pour souscrire à une telle démarche ! (Marques d'approbation sur les travées du groupe socialiste.)
D'ailleurs, « moderne », ça veut dire quoi ? Nous avons tous en mémoire un instituteur ou un professeur qui avait une formule fétiche. Moi, je me souviens d'un professeur de français qui nous interdisait l'emploi de deux mots : « formidable », parce que cela ne voulait rien dire, et « moderne », parce que ce qui est moderne aujourd'hui ne l'est plus demain.
M. Gérard Longuet. Vous lui avez été fidèles : vous n'êtes ni formidables, ni modernes !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Excellent professeur !
M. Marc Massion. Bien sûr, il faut adapter les solutions à l'évolution d'un monde qui bouge, mais, en ce qui nous concerne, c'est en restant bien campés sur nos valeurs de solidarité, d'égalité des chances, de laïcité et de justice sociale que nous avançons nos propositions.
M. Dominique Braye. Propositions que les Français refusent !
M. Marc Massion. Il y a peut-être plus grave que ce mauvais budget, que nous ne voterons évidemment pas,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle déception ! (Sourires.)
M. Marc Massion.... c'est que le pire est sans doute à venir. (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan.
M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de budget pour 2008, sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer, se situe dans un contexte marqué par des incertitudes qui pourraient retentir sur son exécution.
La première est due à la hausse très sensible des matières premières et énergétiques qui s'est manifestée depuis 2007. Les prix à la production des céréales ont quasiment doublé en un an. Selon M. le rapporteur général, un écart de 10 dollars du prix du baril de brent aurait un impact sur le PIB de la France et de la zone euro de 0,5 point de croissance environ.
La deuxième trouve sa source dans l'évolution de l'euro par rapport aux autres monnaies. Un écart de 10 % du taux de change de l'euro coûterait un peu moins d'un point de PIB mais accentuerait le déficit de notre commerce extérieur, qui atteint déjà 29 milliards d'euros, ainsi que les risques de délocalisation de nos entreprises.
Le troisième facteur d'incertitude résulte de la crise des prix hypothécaires aux États-Unis, qui peut entraîner un abaissement du taux de croissance d'un point pour ce pays, ce qui entraînerait un fléchissement corrélatif de la croissance en Europe, donc en France, mais aussi une hausse des taux d'intérêt à court et long terme qui freinerait notre développement.
Nous nous heurtons également à trois réalités aussi indiscutables que pénalisantes.
Nous consacrons, dans notre budget, des sommes aussi importantes pour compenser l'effet des 35 heures que pour encourager le travail. Quand on appuie à la fois sur l'accélérateur et le frein, on risque le tête-à-queue. Il faut donc mettre un terme définitif au carcan des 35 heures. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Charles Gautier. Pourquoi ne le faites-vous pas ?
M. Josselin de Rohan. La deuxième réalité est que le service de la dette, deuxième budget civil de l'État, absorbe la totalité du montant de l'impôt sur le revenu. Une très large partie de cette dette sert à financer les dépenses de fonctionnement de l'État. C'est pourquoi réduire la dépense publique est un impératif absolu.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Réduire les recettes publiques payées par les riches, c'est absurde !
M. Josselin de Rohan. La dernière réalité est une conséquence des deux premières : depuis sept ans, la production industrielle a crû de 9 %, les importations de 66 %, la consommation de biens manufacturés de 23 %, et notre compétitivité a régressé, puisque la France se situe au dix-huitième rang des nations occidentales. Il faut travailler davantage et mieux. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
La ligne tracée par le Président de la République et par le Gouvernement est claire : privilégier le travail et l'effort, et tourner le dos à l'extension sans fin de la dépense publique. Si nous voulons, d'ici à 2012, ramener la dette publique à moins de 60 % du PIB et le solde public à l'équilibre, il nous faut, selon M. le rapporteur général, trouver 85 milliards d'euros d'économies. Le chemin de la vertu imposera de durs sacrifices.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La vertu pour qui ? Pour les pauvres ?
M. Josselin de Rohan. Le projet de budget pour 2008 est à la fois responsable et porteur d'avenir. Il repose sur des hypothèses de croissance et de recettes prudentes.
Le Gouvernement limite l'évolution globale des dépenses de l'État au niveau de l'inflation et stabilise le déficit budgétaire à 41,7 milliards d'euros, légèrement au-dessous de la prévision initiale pour 2007, soit 42 milliards d'euros. La réserve de précaution de plus de 7 milliards d'euros qu'il a décidé de constituer au début de l'année 2008 doit lui permettre de tenir ses engagements.
Le budget 2008 traduit un effort de réduction des effectifs de l'État très supérieur aux exercices précédents : 22 900 départs ne seront pas remplacés, soit un sur trois. Une telle baisse ne permet toutefois pas d'obtenir une diminution de la masse salariale, car les économies sont plus que compensées par l'augmentation des pensions. Comme le démontre M. le rapporteur général, sur 5,5 milliards d'euros d'augmentation naturelle des crédits à périmètre constant, 2 milliards d'euros sont déjà préemptés par le service des pensions.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Josselin de Rohan. Avec ce budget, le Gouvernement fait un choix clair et porteur d'avenir, en donnant la priorité aux mesures valorisant le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat, l'innovation et la recherche.
Les baisses d'impôt inscrites dans le budget, qui atteignent 7,5 milliards d'euros, permettent la mise en oeuvre des dispositions de la loi TEPA : 57 % des crédits engagés par l'État en 2008 au titre de cette loi ont trait à l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires. Il s'agit donc bien de mesures favorisant l'emploi, donc les salariés ; aussi est-il abusif et faux de les qualifier de cadeaux aux riches ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Dominique Braye. Absolument !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On verra le résultat ! Vous pouvez toujours applaudir ! Qui fait des heures supplémentaires ?
M. Josselin de Rohan. Il en est de même pour les mesures relatives aux intérêts d'emprunt et aux droits de mutation, qui favorisent l'accession à la propriété des classes moyennes, lesquelles sont pénalisées par l'envolée des prix de l'immobilier et la remontée des taux d'intérêt ou par des droits de succession qui découragent la transmission à leurs ayants droit de patrimoines peu considérables.
À terme, ce dispositif doit permettre une élévation du pouvoir d'achat des bénéficiaires. Il sera d'ailleurs sans doute complété et étendu par les nouvelles mesures, annoncées par le Président de la République, visant à indexer les loyers sur l'inflation,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'inflation est plus importante que la hausse de la construction !
M. Josselin de Rohan.... à supprimer les cautions et à ramener à un mois le dépôt de garantie, ainsi que par les mesures donnant la possibilité de racheter des jours de RTT et de « monétariser » le compte épargne-temps.
Mes chers collègues, nous sommes loin des propositions démagogiques prônées par M. Hollande et ses amis ! Ces derniers ont puisé dans leur brocante les vieux rossignols qui ont depuis longtemps fait la preuve de leur inefficacité ou de leur impuissance ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Rossignols de la lutte des classes !
M. Josselin de Rohan. Voici ce qu'ils proposent : le blocage des loyers, qui provoque des crises durables dans le secteur de l'immobilier ; le doublement de la prime pour l'emploi, qui, comme le souligne justement le président de la commission des finances, Jean Arthuis, crée surtout des emplois en Chine ; la TIPP flottante, qui coûte des sommes très élevées au Trésor public, sans véritable impact sur les prix à la pompe.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sont les accords que votre gouvernement signe avec la Chine qui créent de l'emploi en Chine !
M. Josselin de Rohan. Madame Borvo Cohen-Seat, calmez-vous un peu, je vous prie ! Votre problème, c'est de gérer vos 1 % de suffrages à l'élection présidentielle !
M. Ivan Renar. 1,93 % !
M. Josselin de Rohan. En tout état de cause, le parti communiste souffre d'avoir un peu trop de « Buffet » et pas assez de coffre ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Manque total d'humour !
M. Josselin de Rohan. Mesdames, messieurs de l'opposition, sur tous ces points, il faudrait trouver des solutions plus originales. Mais il en est de la rénovation du parti socialiste comme du monstre du loch Ness, on en parle beaucoup, certains croient l'avoir entrevu, mais personne ne l'a approché ! (Nouveaux applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela manque de relief !
M. Dominique Braye. Mais souriez donc !
M. Guy Fischer. On n'a pas envie de sourire !
M. Josselin de Rohan. Autre mesure d'avenir, l'effort sans précédent consenti pour l'enseignement supérieur et la recherche, dont les moyens augmenteront de 1,8 milliard d'euros afin d'accompagner la réforme des universités adoptée cet été.
Trois dispositions favoriseront l'innovation : la simplification et le renforcement du crédit d'impôt recherche, pour soutenir les efforts de recherche et développement engagés par les entreprises ; l'allégement de la fiscalité des brevets ; la création du statut de la jeune entreprise universitaire, qui accorde aux étudiants ou aux chercheurs créant leurs entreprises les mêmes avantages fiscaux et sociaux que ceux qui sont applicables aux jeunes entreprises innovantes.
L'investissement sera globalement encouragé, l'épargne sera davantage orientée vers les entreprises, grâce à la réforme de la fiscalité des dividendes, et les investissements risqués ne seront plus pénalisés.
Cette priorité donnée à la recherche, à l'innovation et à l'investissement traduit notre volonté de renforcer la compétitivité de nos entreprises et s'inscrit dans une démarche favorisant une croissance forte et durable au service de tous. L'innovation est source de productivité et de croissance potentielle ; dans l'économie de la connaissance, progrès technique est synonyme de progrès économique et social.
Le budget 2008 doit ouvrir la voie à des réformes indispensables à une meilleure administration de l'État et des collectivités locales.
Les débats au sein de la Haute Assemblée ont souligné la nécessité d'engager une réflexion globale sur les dépenses publiques et l'architecture des prélèvements. Grâce à l'excellent travail de nos rapporteurs spéciaux ou pour avis, l'existence d'importants gisements de productivité a été mise en lumière, comme la persistance de certains conservatismes au sein de nos administrations.
L'esprit de la LOLF n'est pas accepté par tous ; la culture de la performance et du résultat a parfois du mal à s'imposer.
Notre système de prélèvements obligatoires est caractérisé par l'existence de 650 niches fiscales, dont la pertinence comme l'utilité sont contestables et méritent d'être réexaminées.
Des réformes structurelles profondes sont aujourd'hui indispensables pour réduire les déficits publics et permettre à notre pays de faire face au double défi de la mondialisation et du vieillissement.
La révision générale des politiques publiques, lancée par le Gouvernement, s'inscrit dans cette perspective. Nous soutenons cette démarche globale et novatrice, qui consiste à dépasser la logique des moyens pour s'interroger sur la finalité des politiques publiques.
Nous apportons également notre soutien à la revue générale des prélèvements obligatoires. Conduite par Mme le ministre de l'économie, des finances et de l'emploi et par M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, elle doit permettre d'identifier les faiblesses du système actuel et de moderniser son architecture, en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés.
Nos débats ont enfin mis en évidence les limites d'un système de financement des collectivités locales arrivé à bout de souffle. Ce système est le reflet du degré extrême de confusion atteint par notre administration territoriale. Jamais, depuis l'Ancien Régime, on n'a connu un tel empilement de structures, un tel enchevêtrement de compétences, une telle complexité des financements et une telle multiplication des normes. L'opinion en est tout à fait consciente et son apparente résignation laissera certainement, un jour, place au mécontentement.
Malgré le cadre contraint du nouveau contrat de stabilité, le Parlement a préservé la dotation globale de fonctionnement, qui continuera d'évoluer au rythme de l'inflation augmenté de la moitié du taux de croissance prévisionnel, soit 2,08 % en 2008.
Grâce à l'ingéniosité et aux capacités de persuasion du rapporteur général et du président de la commission des finances,...
M. Alain Gournac. Ils sont excellents !
M. Josselin de Rohan.... le Sénat est parvenu à limiter la baisse des dotations de compensation, en particulier pour les départements les plus défavorisés.
La complexité du dispositif révèle toutefois les limites d'un système qui fonctionne en circuit fermé. Les collectivités territoriales sont aujourd'hui soumises à des contraintes croissantes en matière de recettes, sans pouvoir disposer d'une réelle maîtrise de leurs dépenses. Il est temps que l'État cesse de leur dire : je commande et vous payez ; je serai généreux et vous en ferez les frais.
L'exercice « acrobatique » de cette année se reproduira l'an prochain si nous n'entreprenons pas une réforme en profondeur de notre système de financement des collectivités locales et si nous ne clarifions pas leurs relations avec l'État.
À cet égard, nous attendons beaucoup des suites qui seront données aux recommandations de notre collègue Alain Lambert, qui a souligné la nécessité de clarifier les compétences respectives de l'État et des différents échelons des collectivités territoriales, de refonder leurs relations financières et d'alléger les contraintes normatives. En appelant de nos voeux cette refondation et la simplification de notre administration territoriale, nous serons très attentifs aux travaux de la Conférence nationale des exécutifs, mise en place par le Gouvernement.
Le chemin de la croissance passe par les réformes.
Ces réformes, de très grande envergure et de très grande portée, que le Président de la République a voulues, sont la condition du redressement de nos finances publiques, du développement de notre économie et du progrès social.
Nous nous devons de les mener à bien sans hésitation ni faiblesse, non seulement pour moderniser notre pays, mais aussi pour renforcer notre crédibilité en Europe et dans le monde.
Le Gouvernement peut compter sur notre soutien total pour réaliser cette grande entreprise et atteindre cet objectif. C'est aussi pour cette raison que nous voterons ce budget sans réticence et avec confiance ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici au terme de la discussion du projet de loi de finances pour 2008 ou, plutôt, au terme des travaux dont nous allons confier le résultat à la commission mixte paritaire, même si, à l'évidence, l'essentiel des dispositions initiales n'ont pas été mises en question par les discussions parlementaires.
Oui, le Gouvernement sait encore en partie obtenir l'appui de sa majorité ; en cela, les choses n'ont guère varié...
Pour autant, ce texte marque un certain nombre d'évolutions sensibles quant à la situation des comptes publics et des engagements de l'État. Il incarne, d'ores et déjà, sous bien des aspects, la rupture, cette rupture promise par le nouveau Président de la République dans ce qu'elle a de plus injuste et de plus insupportable.
Écrit dans le droit-fil de la loi prétendument en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, ce texte consacre, de nouveau, l'inscription de pertes de recettes fiscales significatives. Et cela ne concerne pas n'importe quels impôts !
Encore une fois, la baisse des impôts touche l'impôt de solidarité sur la fortune, touche les plus-values de cession d'actifs financiers, affecte la taxation des dividendes, tandis que l'« imagination » de la majorité est venue supprimer l'impôt de bourse et alléger la fiscalité des sociétés spécialisées dans la spéculation immobilière.
En revanche, la baisse de la TVA, comme nous l'avons proposé pour redonner du pouvoir d'achat, ne fait pas partie de vos objectifs, mes chers collègues !
Ces pertes de recettes publiques, estimées à 20 milliards d'euros avec les cadeaux fiscaux éhontés de la loi TEPA, sont autant de ressources en moins pour financer les priorités de l'action publique, qu'il s'agisse de l'éducation, de la formation, de l'insertion sociale, du logement ou encore de la santé.
D'ailleurs, la lecture des crédits budgétaires est instructive : on taille dans les dépenses de personnel, on s'attaque à la politique de la ville, on rationne les crédits destinés au droit au logement, on compresse sans arrêt les dépenses sociales, on accroît la participation des citoyens !
M. Bruno Sido. Assez, monsieur 1 % !
M. Thierry Foucaud. En outre, on offre sur un plateau d'argent le budget de l'État au bénéfice exclusif non seulement des grands groupes - il n'est qu'à voir, par exemple, le débat sur le crédit d'impôt recherche -, mais aussi des familles les plus aisées, c'est-à-dire tous ceux qui n'ont pas besoin de l'argent public pour faire face aux exigences du quotidien.
Ce projet de loi de finances est donc quasi exclusivement, de manière presque caricaturale, au service du pouvoir d'achat des grandes entreprises et des ménages les plus riches.
Ce projet de loi de finances divise, il ajoute « de la droite à la droite » !
J'en veux pour seule preuve la révision du barème de l'impôt sur le revenu. Prévue à l'article 2, elle produit 5 milliards d'euros de recettes fiscales supplémentaires pour le compte de l'État, qui seront essentiellement payées par les salariés - pour 3 milliards d'euros - et par les retraités - pour 1 milliard d'euros -, ce qui réduit à néant le peu de bénéfice que les premiers pourraient tirer des heures supplémentaires défiscalisées, cette usine à gaz que votre gouvernement, monsieur le ministre, a fabriquée par le biais de la loi TEPA !
Pour faire bonne mesure, dans ce budget 2008, le Gouvernement esquisse, comme nous avons pu le dire tout au long de l'examen tant de la première partie que des crédits des missions budgétaires, les grandes lignes des réformes profondément réactionnaires qu'il entend mettre en oeuvre, et ce en usant et en abusant du mandat arraché au peuple français au printemps dernier ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. Cela vous va bien, monsieur 1 % !
M. Thierry Foucaud. Oui, mes chers collègues, je persiste et signe, ce mandat a, au printemps dernier, été arraché au peuple français grâce à une série de mensonges, qui s'est d'ailleurs poursuivie au cours de la discussion de ce projet de loi de finances pour 2008 !
M. Dominique Braye. Un peu de tenue, monsieur 1 % !
M. Guy Fischer. Braye, silence !
M. Thierry Foucaud. Nous n'avons peut-être recueilli que 1,93 % des suffrages à l'élection présidentielle, mais vous, vous feriez mieux de vous intéresser à l'état dans lequel se trouve le capitalisme au niveau mondial : il est en crise et en déclin ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Dominique Braye. Et le communisme au niveau mondial ?
M. Thierry Foucaud. Voyez la misère, les maladies, la faim, les guerres...
Revenons à l'action du Gouvernement : le premier étage des réformes mises en oeuvre se caractérise par une politique qui porte atteinte à l'intervention des collectivités locales.
Le pacte de stabilité, imposé en « vente forcée » par l'adoption de l'article 12, corsète un peu plus l'action des élus locaux, plaçant les concours de l'État dans les limites imposées par le pacte de stabilité européen. Par ce dispositif, l'État fait payer une partie de son déficit aux élus locaux et, naturellement, par voie de conséquence, aux populations.
Mme Nicole Bricq et M. Guy Fischer. Voilà la vérité !
M. Thierry Foucaud. Au bout du compte, c'est de près d'un milliard d'euros de ressources que les collectivités locales seront privées.
Cela, il faudra le dire, « en bas » ! Parce que, quand vous discutez avec les gens, vous leur dites que vous êtes d'accord avec eux. Mais, ici, vous votez le contraire de ce qu'ils vous demandent ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas du tout ! Nous leur disons la vérité !
M. Dominique Braye. Et les communistes ? Ils défendent les grévistes, défilent dans les rues et votent le budget de l'armement !
M. Thierry Foucaud. Ce que je dis est vrai ! On l'a encore vu hier soir, à propos de l'école privée : des présidents d'associations départementales de maires ont dit chez eux que, si les dispositions prévoyant le financement de l'école privée par les collectivités territoriales étaient votées, ils refuseraient de payer, mais, ici, vous votez ces dispositions ! (M. Dominique Braye s'exclame.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est formidable, ce Braye !
M. Thierry Foucaud. À quelques mois des municipales, une telle orientation est scandaleuse. Dès la promulgation de ce budget, les élus locaux se trouveront plus démunis encore pour faire face aux besoins sociaux et aux problèmes croissants de leur population. Je pense notamment aux élus des villes de banlieue, privés du quart de la hausse de la dotation de solidarité urbaine prévue, ou encore de plus de 150 millions d'euros au titre de la politique de la ville !
M. Jacques Mahéas. Tout à fait !
M. Thierry Foucaud. À quand la définition d'une véritable politique de la ville, peut-on se demander, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les gesticulations de M. Borloo !
M. Thierry Foucaud. ... lorsque l'on entend les discours que vous tenez sur le terrain, mais qu'on vous voit, en réalité, vous éloigner toujours plus du peuple des villes de banlieue et des villes laborieuses ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Il est mal engagé, le plan Marshall pour les banlieues de Mmes Boutin et Amara ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.)
Avec ce projet de budget, vous faites totalement fi des attentes mêmes des populations. Il suffit de regarder la longue série des économies décrites dans la seconde partie du texte pour s'en rendre compte : entre les missions « Ville et logement », « Immigration, asile et intégration », « Travail et emploi » et « Santé », 2 milliards d'euros de crédits, a priori destinés à répondre aux besoins collectifs les plus urgents, sont annulés !
On rogne sur l'aide personnalisée au logement. On s'attaque à l'aide médicale de l'État. On « tape » dans les crédits de l'insertion par l'emploi. On taille à coups de sabre les crédits de la culture. Tout fait ventre, tout est bon pour réduire encore et toujours la dépense publique !
M. Bernard Vera. Très bien !
M. Thierry Foucaud. Or, affaiblir la dépense publique, c'est affaiblir l'État ! Ce n'est pas ainsi que l'on redressera la situation de la France ! (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Plus on aura de déficit et plus on sera fort, bien sûr !
M. Dominique Braye. Ne l'embêtez pas, il y croit !
M. Thierry Foucaud. Oui, je crois à ce que je dis, contrairement à vous ! Et nous, nous faisons ce que nous disons !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Alors que vous, à droite, entre ce que vous dites et ce que vous faites, il y a un boulevard, un fossé !
M. Thierry Foucaud. Ne nous y trompons pas ! Pour faire bonne mesure, il est des budgets et des ressources mobilisés bien plus que d'autres. Nous en avons identifié au moins trois : le budget de la dette, qui progresse de 1,6 milliard d'euros, pour le grand bonheur des spéculateurs financiers, ...
Un sénateur de l'UMP. N'importe quoi !
M. Thierry Foucaud. ... celui des dégrèvements et remboursements, qui progresse de plus de 6,5 milliards d'euros, consacrés surtout à réduire l'impôt sur les sociétés et la taxe professionnelle, sans aucune garantie de création d'emplois au final.
M. de Rohan a tenu son discours habituel, celui qu'il tient depuis cinq ans, sur la nécessité de libérer l'initiative.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Résultat assuré !
M. Thierry Foucaud. Or, depuis cinq ans, le CAC 40 a progressé de près de 90 %, tandis que les salaires, et donc le pouvoir d'achat, n'augmentaient que de 6,6 %. Cherchez l'erreur !
M. Bruno Sido. Nous, on ne s'occupe pas du CAC 40 !
M. Josselin de Rohan. Vous, vous n'avez même pas augmenté le SMIC !
M. Thierry Foucaud. À l'époque, monsieur de Rohan, la croissance était de 2,2 %. Cette année, elle n'est même pas de 2 % !
M. Dominique Braye. Le SMIC, c'est nous qui l'avons augmenté ! Vous, vous n'avez rien fait !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Arrêtez de brailler ! Vous n'avez rien augmenté !
M. le président. Je vous en prie, monsieur Braye ! Poursuivez, monsieur Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Quant aux allégements de cotisations sociales des entreprises, ils sont en hausse de 3 milliards d'euros, pour le plus grand plaisir des fanatiques de la précarité et des bas salaires !
Et le plus terrible, c'est que, malgré tout cela, le Premier ministre vient de nous faire part de son pessimisme, dans un entretien accordé hier à un quotidien économique. On est loin du discours de M. de Rohan !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les différences sont légitimes !
M. Thierry Foucaud. Malgré les cadeaux dispendieux accordés aux grands groupes, aux grandes fortunes et aux ménages aisés, la croissance ne serait donc pas au rendez vous, car elle se limiterait, pour 2007, à 1,9 %.
Je me souviens pourtant des discours tenus ici à la fin de 2006 : on envisageait alors une croissance de plus de 2 %...
Les perspectives pour 2008 ne sont pas des plus encourageantes. Où est donc passé le choc de croissance annoncé pour cette année, et qui devait faire suite à l'adoption de la loi TEPA ?
Le faible niveau de consommation - 100 millions d'euros - du dispositif « heures supplémentaires » montre que l'activité n'est pas vraiment relancée.
J'en veux également pour preuve le faible nombre d'emplois créés - et dans quels secteurs d'activité ! - depuis le début de l'année. Cela signifie que les gains de productivité ne se retrouvent pas, pour le moment, traduits en emplois nouveaux.
Vous annoncez au monde du travail de nouvelles réformes réactionnaires (Rires sur les travées de l'UMP) : flexibilité accrue, allongement des durées de cotisation aux régimes de retraite, travail du dimanche,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et la messe ? (Sourires sur les travées du groupe CRC.)
M. Thierry Foucaud. ... remise en cause de l'avancée sociale des 35 heures, précarisation renforcée des contrats de travail... Autant de mesures qui vont concourir à creuser encore plus les inégalités sociales et à augmenter le nombre de besoins non satisfaits par l'action publique !
Il n'y a rien de pire, pour un pays comme le nôtre, qu'un État incapable de répondre aux attentes de la population !
Nous sommes la cinquième puissance économique mondiale. Nous avons largement les moyens de satisfaire les besoins sociaux sans brader le patrimoine de la nation, comme vous le faites en cédant les parts de l'État dans EDF, prétendument pour financer les universités !
Plus que jamais, d'autres choix sont possibles, qui allient efficacité économique, équité et justice fiscales, réponse aux attentes collectives. Nous les avons formulés au cours de ce débat, au travers de nos interventions. Nous avons, ainsi, proposé la taxation des « super-profits » des compagnies pétrolières, la mise en question des avantages fiscaux de la spéculation immobilière et financière, la baisse de la taxe sur la valeur ajoutée ou encore le renforcement de l'impôt sur le revenu.
Cela ne fait aucun doute : ce budget, contraint par les choix libéraux que vous impose Bruxelles et que vous demande, pour une part, d'adopter le MEDEF, n'aura que la durée de vie limitée d'un budget d'affichage.
On sait déjà qu'une bonne part des mesures votées par la représentation nationale ne sera pas appliquée puisque, le 1er janvier 2008, vous commencerez par mettre de côté la « réserve de précaution », que vous ferez disparaître en fin d'année.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est fait pour ça !
M. Thierry Foucaud. Comme le disait Marc Massion, et comme l'attestent vos discours et vos actes, le pire est devant nous. Déjà se profile l'ombre portée de l'austérité pour le plus grand nombre !
Nous ne voterons donc pas ce projet de loi de finances pour 2008. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.
M. Jean-Michel Baylet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, premier budget de la nouvelle législature, le projet de loi de finances pour 2008 est sans réelle surprise quant à ses objectifs et son contenu.
Tout d'abord, il contient peu de mesures fiscales nouvelles puisque la plupart des engagements du Gouvernement ont été pris dans le cadre de la loi dite TEPA, votée l'été dernier.
Ensuite, comme ce fut déjà le cas à deux reprises, en 2003 et 2005, ce projet de budget perpétue des pratiques budgétaires qui en entament sérieusement la crédibilité. En effet, il est fondé sur des prévisions de croissance trop optimistes. Vous misez sur un taux de 2,25 %, tandis que la plupart des conjoncturistes s'accordent plutôt sur le chiffre de 2% en 2008. D'ailleurs, pour 2007, le Premier ministre a annoncé, le week-end dernier, seulement 1,9 % de croissance pour la France, c'est-à-dire moins que les prévisions initiales pour l'année en cours.
Vous appuyez votre politique budgétaire sur le haut de la fourchette prévisionnelle, alors que la flambée des cours du pétrole et les suites de la crise américaine des subprimes laissent entrevoir une décélération de la croissance au sein de la zone euro. Vous prenez donc le risque de moins-values fiscales et d'un dérapage du déficit en exécution.
Comment, dans ces conditions, allez-vous tenir l'objectif de maîtrise des dépenses publiques ?
On sait déjà que le déficit de 2007 pourrait être supérieur à celui de 2006. Il s'est creusé jusqu'à atteindre 43,35 milliards d'euros au 31 octobre dernier, contre 41,62 milliards, en 2006, à la même époque. Va-t-on recourir, une fois encore, à des recettes exceptionnelles pour donner l'illusion d'un contrôle du déficit budgétaire ?
Certes, je vous l'accorde, le budget est fortement contraint. Nos engagements communautaires nous obligent. Le pacte de stabilité et de croissance, en particulier, nous impose une gestion saine des comptes de la nation.
Au regard de cette nécessité, était-il bien utile de priver l'État de 15 milliards d'euros ? Je remarque, là encore, que les choix de la majorité sont constants : ils consistent toujours, depuis cinq ans, à soulager les impôts des plus favorisés. Du bouclier fiscal aux petits arrangements de l'ISF, en passant par la suppression de l'impôt de bourse, on voit bien à quelle catégorie de Français s'adresse la politique gouvernementale.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Jean-Michel Baylet. Pendant ce temps, l'autre France, si je puis dire, souffre. La crise du pouvoir d'achat inquiète la plupart de nos concitoyens. Plusieurs millions de Français vivent avec 800 euros, ou moins, par mois.
Pour ces familles, les 15 milliards d'euros de cadeaux fiscaux que j'évoquais à l'instant auraient trouvé matière à s'investir plus utilement. Le logement par exemple, qui est devenu un poste très inflationniste, méritait une attention plus soutenue dans ce projet de budget pour 2008. Vous auriez pu, d'une part, dégager des crédits destinés à encourager plus fortement les propriétaires privés à créer des logements sociaux et, d'autre part, instituer des dispositifs favorisant la construction de logements coopératifs sur des terrains d'État ou municipaux. Nous savons que les collectivités territoriales sont toujours prêtes, quand on les encourage, à aller dans ce sens.
Comment peut-on, d'un côté, prétendre se préoccuper du pouvoir d'achat et, en même temps, d'un autre côté, prendre toujours un peu plus dans le porte-monnaie des Français ? En tout cas, nous attendons avec impatience la concrétisation des annonces du Président de la République -elle serait, paraît-il, pour demain -, car la baisse du pouvoir d'achat, c'est aussi le résultat de votre politique et de celle de vos prédécesseurs.
En effet, la situation des ménages ne fait que se détériorer. Je citerai, notamment, la multiplication des franchises médicales, qui alourdissent encore les dépenses de santé de nos concitoyens. Comme si cela ne suffisait pas, des parlementaires de la majorité se sont employés - en vain, heureusement ! - à tenter d'augmenter la redevance audiovisuelle. Dans le contexte actuel, il serait plus opportun de revenir sur la suppression, décidée en 2004, de l'exonération de cette redevance. Celle-ci devra être partiellement acquittée en 2008 par 780 000 foyers âgés modestes.
Nous le voyons bien, mes chers collègues, le présent projet de loi finances instaure le statu quo, ce qui revient, dans les faits, à poursuivre une politique dont les Français les plus fragiles mesurent aujourd'hui gravement les effets.
C'est pourquoi, jugeant que ce texte ne crée pas les conditions d'une véritable reprise économique et considérant aussi qu'il est l'illustration d'une politique à l'opposé d'un cap social pourtant nécessaire, les radicaux de gauche ne voteront pas le projet de budget pour 2008. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle déception ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, le Président de la République et votre gouvernement ont fait de l'attractivité de notre économie la condition du retour de la croissance et du plein-emploi en France.
M. Charles Gautier. C'est mal barré !
M. Aymeri de Montesquiou. Au-delà de cet objectif partagé par tous, quelle est, aujourd'hui, la réalité ?
Jacques Attali, qui a inspiré des gouvernements de gauche comme de droite, a récemment osé stigmatiser l'excès de pouvoir d'achat dont notre économie pâtirait. Derrière cette provocation inutile, se cache néanmoins une vérité : la compétitivité de la France est en déclin depuis maintenant plus de vingt-cinq ans.
Notre pays consomme plus qu'il ne produit et donc s'appauvrit. Là où nos concurrents ont redoublé d'effort pour s'adapter et se développer, nous avons constamment reporté une réforme vitale.
Toute politique budgétaire doit mobiliser l'ensemble des ressources, pour stimuler l'activité et redistribuer équitablement les richesses. Or, que constate-t-on ? La politique budgétaire de la France conforte toujours et encore une pesanteur administrative et fiscale qui étouffe depuis trop longtemps l'esprit d'entreprise et freine l'initiative économique. Les ressources publiques, étirées à l'extrême, n'assument plus leur rôle de correction des inégalités de revenus.
Monsieur le ministre, je vais maintenant vous adresser une salve de questions auxquelles je souhaite des réponses.
Comment attirer les investisseurs étrangers lorsque nous maintenons un taux de base d'imposition sur les sociétés parmi les plus élevés de l'Union européenne, à l'encontre de la tentative d'harmonisation fiscale défendue par la Commission ?
Comment garder sur notre sol les capitaux nécessaires à l'investissement alors que nous sommes le dernier État de l'Union européenne, avec la Finlande, à conserver une imposition sur le patrimoine, mais avec des taux bien supérieurs ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Même la Finlande l'a supprimé voilà plus d'un an !
M. Aymeri de Montesquiou. En d'autres termes, l'ISF contribue-t-il vraiment à l'intérêt général ?
Comment développer l'esprit d'initiative lorsque la puissance publique absorbe près de la moitié des richesses créées dans ce pays ?
Allez-vous mettre en oeuvre la TVA pour l'emploi, afin de gommer des distorsions de concurrence ?
Qu'est-il advenu des audits lancés par votre prédécesseur au ministère du budget ?
Monsieur le ministre, je choisirai, pour ma part, le seul thème du poids de notre fonction publique.
Celle-ci représente en France près de 25 % des effectifs salariés, contre 16 % en moyenne dans l'OCDE. Elle a connu, de 1990 à 2001, une hausse des effectifs de 23 %, soit neuf points de plus que celle des salariés du privé.
La charge administrative et financière de la fonction publique constitue une perte colossale d'énergie pour faire tourner le moteur de notre économie. Notre produit intérieur brut se dissout toujours plus, année après année, dans les labyrinthes d'une administration boursoufflée.
Cette ponction a une incidence directe sur le pouvoir d'achat de nos compatriotes : le financement des administrations constitue autant de revenus non redistribués à ceux qui en ont besoin, autant de bénéfices non réinvestis dans les entreprises, autant de disponibilités dont sont privés les ménages pour leur consommation.
L'État n'a pas vocation - et il n'en a d'ailleurs pas non plus les moyens - de combattre le chômage par des créations de postes massives. Nous ne sommes plus au temps des Ateliers nationaux ! Au contraire, nous gaspillons des talents en multipliant les redondances au sein des services, en sclérosant les énergies. Les fonctionnaires en surplus pourraient participer, grâce à leurs compétences, au développement des entreprises et des services.
De même, la multiplication des emplois aidés ne peut constituer l'horizon toujours repoussé de la lutte contre le chômage.
Toutefois, je salue les mesures consistant, notamment dans votre ministère, à ne pas remplacer 60 % des fonctionnaires partant à la retraite.
Je salue aussi la loi TEPA, qui permet aux assujettis à l'ISF d'investir dans les entreprises innovantes. Je salue l'accord du Gouvernement permettant d'expérimenter, dans une zone certes limitée, l'extension de ce dispositif à l'investissement dans des incubateurs publics et privés qui permettront le passage d'une idée à un projet innovant, puis à la création de sociétés à forte capacité de croissance.
Je salue l'action de Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, qui, au travers du mécanisme du RSA, le revenu de solidarité active, cherche avec détermination, intelligence et générosité à mettre fin aux trappes à pauvreté par la valorisation des revenus d'activité.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. Je salue enfin l'accord du Gouvernement sur l'amendement de mon collègue Georges Mouly relatif à la neutralisation des conséquences dommageables, en termes de recettes fiscales, des transferts d'établissements à l'intérieur d'un même établissement public de coopération intercommunale.
La France dispose de beaucoup d'atouts. Notre pays jouit d'une situation géographique privilégiée, au carrefour de l'Europe du Nord et du Sud, avec trois larges fronts littoraux.
Nombre des entreprises du CAC 40 sont parmi les premières au monde dans leur domaine. La qualité de nos infrastructures n'est plus à démontrer et notre système éducatif parvient, en tout cas, à produire des élites très bien formées et armées sur le plan international.
L'indispensable réforme des universités se met en place ; cependant, il nous reste encore à effacer notre incapacité à accepter que notre compétitivité traduise dans tous les domaines une sélection. Ainsi, chaque élève de l'enseignement général ou professionnel, chaque étudiant doit être formé pour devenir un compétiteur en mesure d'exprimer son potentiel, sous peine de tomber dans la passivité et de se retrouver en difficulté professionnelle dans une économie ouverte et très ardue.
Monsieur le ministre, six mois se sont déjà écoulés depuis l'élection du Président de la République et votre prise de fonctions. Or un quinquennat, c'est court !
Le budget que vous nous avez proposé ne répond que très partiellement aux fortes attentes de nos compatriotes. On ne doit jamais hésiter entre réformer la France ou gagner les élections : les électeurs préféreront toujours sanctionner l'immobilisme plutôt que l'action.
C'est pourquoi il est urgent de ne plus attendre et de sortir de l'inertie qui fut trop souvent érigée en mode de gouvernement. L'enthousiasme ne peut être généré que par l'initiative, et non par le conservatisme. Je souhaite que votre gouvernement trouve pour notre pays la même capacité d'initiative que s'est donnée le chef de l'État sur le plan international.
M. Jacques Mahéas. Surtout pas !
M. Aymeri de Montesquiou. La majorité du groupe du RDSE votera le projet de loi de finances pour 2008, même si elle attendait de votre budget plus d'audace, plus de courage, plus d'esprit d'entreprise. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, au terme de ce premier marathon budgétaire de la législature, et avant l'examen du projet de loi de finances rectificative au début de la semaine prochaine, j'aimerais vous faire part au nom du groupe Union centriste-UDF de notre sentiment sur le déroulement des débats et de nos intentions de vote sur ce texte.
L'explication de vote sur l'ensemble du projet de loi de finances constitue toujours un moment où l'on distribue les bons et les mauvais points, en conservant, comme dans le reste de la discussion, un esprit constructif et surtout responsable, pour le bien de nos finances publiques.
Comme l'ont répété les collègues de mon groupe, nous sommes animés par une volonté de réduire nos déficits publics, qui sont non seulement un fléau, mais aussi un défi pour notre pays et pour les générations futures.
Le redressement des finances publiques sans aggravation de la pression fiscale et sociale, la justice sociale en matière d'impôt et de dépenses publiques, ainsi que l'efficacité économique des mesures proposées sont des points auxquels nous sommes très attachés.
La situation de nos finances publiques et nos mauvaises habitudes budgétaires appelleraient un changement d'attitude pour nous-mêmes, pour l'avenir et pour tous nos partenaires à travers le monde, principalement nos amis européens. Cette évolution de nos mentalités n'est pas encore tout à fait présente.
S'il faut noter un certain effort en matière de gestion de la dépense publique, notamment par la clarification des relations financières entre l'État et la sécurité sociale, et une certaine aubaine concernant l'augmentation des recettes fiscales, nous ne pouvons que constater, comme le rapporteur général l'a fait dans son analyse du budget, que ce projet de loi de finances est un budget de continuité et d'attente : de continuité dans les méthodes et dans les grandes masses, en comparaison du budget pour 2007 ; d'attente en matière de redressement des finances publiques.
Le déficit public prévisionnel stagne à plus de 41,7 milliards d'euros et la dette des administrations publiques représente 64,2 % du produit intérieur brut pour 2006. Autant dire que, sur toutes les travées de cet hémicycle, nous attendons beaucoup de la désormais fameuse révision générale des politiques publiques.
Cette dernière apparaît comme un ajustement nécessaire de notre gestion des finances publiques à la lumière de nos premières années d'expérience de gestion en « mode LOLF ».
J'espère que nos attentes ne seront pas vaines, car la mise en place de la LOLF a été un moment important, mais son évolution et son adaptation à la réalité économique et financière sont maintenant également très importantes.
Au-delà de ces remarques relatives à la gestion pure, je souhaite soulever un point sur la forme et le déroulement de nos débats.
Le travail parlementaire a naturellement été de qualité ; néanmoins, dans un souci d'efficacité, et pour répondre encore mieux aux objectifs fixés par la LOLF, il me semble utile d'évoquer une proposition que le président de la commission des finances aime à rappeler.
Nous passons beaucoup de temps dans l'hémicycle pour l'étude des crédits des différentes missions. Cette durée pourrait sans doute être réduite au profit des débats qui se dérouleront lors de la discussion du projet de loi de règlement, lequel représente désormais le véritable moment décisif de l'examen de nos finances publiques.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Christian Gaudin. En loi de finances initiale, nous travaillons sur des prévisions économiques et sur des objectifs de performance. En loi de règlement, le Parlement peut véritablement exercer son pouvoir de contrôle et tirer les conclusions de l'utilisation, bonne ou non, qui a été faite de l'argent public.
L'enchaînement entre les différents types de lois de finances ne peut être vertueux que si l'on tire totalement des enseignements de chaque exercice. Notre travail de contrôle réclame du temps ; ce temps, nous devons le prendre au moment de l'examen du projet de loi de règlement.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Christian Gaudin. En revanche, nos capacités d'action en loi de finances initiale me semblent plutôt limitées : même si nous sommes pleins de bonnes intentions, ce type de texte nécessite sans doute moins de temps que celui que nous y consacrons.
Concernant le présent projet de loi de finances, mon groupe souhaite soutenir les tendances amorcées dans deux secteurs majeurs que vous-même et le Gouvernement avez placés au rang de grandes priorités : tout d'abord la justice, avec un budget en hausse de 4,6 %, puis l'enseignement supérieur et la recherche, avec des budgets en hausse de 8,4 %.
Nous approuvons les orientations qui favorisent les dépenses d'avenir, qui s'inscrivent dans une stratégie de relance de la compétitivité et qui comportent plusieurs mesures propres à encourager l'innovation, de l'allégement de la fiscalité des brevets à l'augmentation du crédit d'impôt recherche.
Nous nous satisfaisons également de l'adoption par notre Haute Assemblée de certains des amendements que mes collègues et moi-même lui avons soumis.
Je pense tout d'abord aux deux amendements de Mme Anne-Marie Payet concernant des mesures de santé publique relative au tabagisme. L'un d'eux permet notamment d'étendre le monopole de l'État sur la vente des produits du tabac à l'ensemble des départements d'outre-mer.
Je me félicite ensuite de l'ouverture d'un dispositif de réduction de l'ISF pour investissement dans les PME aux entreprises solidaires qui exercent une activité de gestion immobilière à vocation sociale ; ce dispositif, proposé par Jean Arthuis, répond aussi à une demande de justice sociale.
Je me réjouis également de l'exonération de taxe professionnelle pour les industries techniques du cinéma et de l'audiovisuel de la part des collectivités territoriales, proposition qu'a soutenue Mme Catherine Morin-Desailly.
Enfin, je suis heureux de l'adoption d'un amendement que j'ai moi-même déposé et qui permet d'organiser une certaine solidarité entre les établissements d'enseignement supérieur privés, en particulier envers les établissements d'enseignement supérieur agricoles, répondant ainsi à une préoccupation que partage également Françoise Férat.
Nous serons naturellement très attentifs au fait que ces avancées ne soient pas supprimées pendant le passage en commission mixte paritaire, comme cela arrive parfois.
Toutefois, notre groupe regrette que certaines de ses propositions, notamment celles qui visaient à réduire les déficits, n'aient pas été mieux entendues.
Je veux bien sûr parler de l'article 7 sur le crédit d'impôt des intérêts d'emprunt pour l'achat de la résidence principale et du rejet de notre amendement de suppression. Nous ne comprenons toujours pas l'intérêt majeur du doublement d'une mesure déjà existante, dont le coût pourrait atteindre 220 millions d'euros en 2008 et environ 840 millions d'euros en régime de croisière, et dont l'impact économique ne nous semble pas évident.
Nous regrettons, enfin, la diminution du remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation concernant les biocarburants. Cette mesure nous semble « désincitative » pour les entreprises qui investissent dans ces énergies d'avenir et qui effectuent des recherches en matière de biocarburants de deuxième génération. Mes collègues Marcel Deneux et Yves Détraigne avaient proposé un compromis à nos yeux plus acceptable.
En outre, ce signal ne nous apparaît pas très opportun, alors que les gouvernements successifs se sont engagés à soutenir cette filière, et après que le Grenelle de l'environnement a mis en lumière le nécessaire développement de sources d'énergie plus propres.
En conclusion, mes chers collègues, à la lumière des débats qui nous ont occupés, une très grande majorité de mes collègues du groupe Union centriste-UDF et moi-même voterons en faveur du projet de loi de finances pour 2008, tandis qu'une minorité s'abstiendra, compte tenu de la stagnation du déficit public.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, notre marathon budgétaire s'est achevé tard dans la nuit. Ce fut à la fois une course de plat, si l'on fait référence à la norme « zéro volume », et une course d'obstacles, si l'on pense à la montagne d'amendements que nous avons examinés. (Sourires.)
Quoi qu'il en soit, je voudrais souligner la remarquable qualité de nos débats, au cours de deux semaines particulièrement intenses.
Qualité technique, tout d'abord : nous avons en effet traité - en toute clarté, je l'espère - de sujets souvent très complexes, et je pense notamment au débat sur les collectivités territoriales, au cours duquel le Sénat a montré la vigueur avec laquelle il assumait son rôle constitutionnel de représentant de ces collectivités.
Qualité humaine, ensuite : nous avons débattu dans un climat d'écoute et de respect mutuels, ce fair-play permettant, sur des sujets où les positions étaient parfois très différentes, de trouver des solutions de compromis conformes à l'intérêt général de notre pays.
Aussi, je souhaite remercier, en mon nom, en celui de Christine Lagarde et au nom de l'ensemble du Gouvernement, M. le président de la commission des finances, Jean Arthuis, pour la qualité de ses interventions et la précision de ses propositions, certaines d'entre elles ayant été d'utiles aiguillons pour le Gouvernement.
Je remercie également l'ensemble des rapporteurs et, au premier chef, M. le rapporteur général, Philippe Marini, pour sa contribution très intense au débat, la pertinence de ses analyses et la créativité dont il a su faire preuve une nouvelle fois, allant d'une certaine façon jusqu'au bout de ce qu'il était possible de faire.
Mes remerciements vont également à tous les sénateurs qui se sont exprimés, sénateurs de la majorité mais aussi sénateurs de l'opposition, qui ont défendu avec talent leurs convictions.
Je n'oublie pas les collaborateurs du Sénat et du Gouvernement, qui ont constamment fait preuve d'efficacité et de réactivité.
Enfin, monsieur le président, je veux remercier tout particulièrement la présidence, qui a su gérer avec beaucoup de tact les discussions dans le temps imparti par la Constitution qui, s'il est souvent jugé trop long, est peut-être aussi parfois trop court, compte tenu de la matière.
M. le président. La présidence vous remercie, monsieur le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. C'est grâce à ces conditions optimales de discussion que nous avons réussi, tous ensemble, à enrichir ce projet de loi, sans aggraver le déficit - ce n'était pas gagné d'avance ! -, et je sais que le président de la commission des finances et le rapporteur général y sont tout aussi sensibles que le ministre du budget.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Éric Woerth, ministre. Tous les amendements adoptés par le Sénat qui affectent les dépenses ont en effet été financés sans dégrader le solde. Je pense particulièrement à la nouvelle rédaction de l'article 12, par laquelle vous avez su trouver les ressources nécessaires pour financer les modifications apportées aux dotations d'ajustement du contrat de stabilité.
Avec ce budget pour 2008, nous allons procéder à une triple réduction : réduction du déficit, réduction des prélèvements obligatoires et réduction du rythme d'évolution de nos dépenses publiques, grâce à l'élargissement de la norme du « zéro volume ».
Cet effort de maîtrise des dépenses de l'État est d'autant plus notable qu'il s'inscrit, je le rappelle, dans un contexte de renchérissement de la charge de la dette, d'augmentation des dépenses de pensions et de remise à niveau de la dotation des dispositifs sociaux financés par l'État, dispositifs qui étaient, chacun le sait, régulièrement sous-évalués jusqu'ici.
J'ajoute que cette maîtrise des dépenses n'est en rien aveugle, d'abord parce qu'elle repose sur des redéploiements actifs qui tiennent compte au plus près de l'évolution du contexte économique et social, ensuite, et surtout, parce qu'elle repose sur un effort de rationalisation conduit par chacun des ministères. Les différents ministres qui se sont succédé devant vous lors de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances ont d'ailleurs apporté des précisions sur cet effort, qui lui-même anticipe les réformes que nous allons mener dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, et dont une première salve sera annoncée dès demain à l'occasion de la première réunion du Conseil de modernisation, sous la présidence du chef de l'État.
Cette maîtrise de la dépense publique s'accompagne en outre d'une politique qui vise à muscler la croissance en remédiant aux déficits de travail et de compétitivité de l'économie française. J'ai entendu, me semble-t-il, quelques critiques à ce sujet, de la part des sénateurs qui m'ont précédé à cette tribune. Je n'entends certes pas rouvrir une fois de plus ce débat, mais je veux redire notre confiance dans la politique que nous menons. Cette priorité apparaît plus que jamais justifiée au moment où la conjoncture internationale s'avère moins porteuse que prévue.
Le cadre budgétaire serré que nous nous sommes imposé n'a pas empêché d'apporter des avancées notables au texte issu de l'Assemblée nationale. Vous avez ainsi amélioré très substantiellement certains articles du projet de loi.
Je pense à nouveau aux transferts de l'État vers les collectivités territoriales. Les ajustements aux dotations de l'enveloppe normée proposés par la commission des finances du Sénat respectent le principe d'une évolution globale calée sur l'inflation, tout en répartissant mieux l'effort afin de trouver le point d'équilibre le plus juste entre les différentes dotations. Vous auriez pu être tentés de remettre en cause ce principe ; vous ne l'avez pas fait, et je voulais vous rendre hommage pour cette attitude responsable.
Vous avez aussi amendé plusieurs autres dispositions. Je pense notamment au crédit d'impôt pour les intérêts d'emprunt immobilier, élément clef du projet de loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat ; au prélèvement libératoire, dont vous avez étendu le bénéfice aux dirigeants d'entreprises non salariés, quelle que soit l'importance de leur participation au capital ; à la suppression de l'impôt sur les opérations de bourse, que vous avez avancée au 1er janvier 2008 ; au seuil de cession des valeurs mobilières pour l'imposition des plus-values, que vous avez relevé de 20 000 à 25 000 euros.
Plusieurs initiatives sénatoriales ont par ailleurs été retenues. Parmi elles : la mensualisation de la prime pour l'emploi à partir de 2009 ; la réforme du régime des sociétés immobilières ; l'évolution de la fiscalité des valeurs mobilières. Je n'oublie pas les amendements défendus par Alain Lambert sur les régimes des partages et des successions ainsi que sur la création de commissions intercommunales des impôts directs.
Je mentionnerai également le très intéressant débat qui s'est déroulé ici sur les biocarburants. Je tiens, à ce propos, à souligner le courage dont le Sénat a fait preuve dans ce difficile débat : votre assemblée l'a abordé avec un très grand esprit de responsabilité.
Enfin, concernant la deuxième partie du projet de loi de finances, je voudrais rappeler que, conformément à l'engagement que j'avais pris devant le président de la commission des finances et le rapporteur spécial, Adrien Gouteyron, les budgets relatifs aux opérations extérieures et aux opérations de maintien de la paix ont été abondés respectivement de 100 millions d'euros et de 85 millions d'euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Éric Woerth, ministre. Je retiens aussi notre débat sur les niches fiscales, monsieur le rapporteur général. Il est certes inachevé mais nous aurons, bien évidemment, l'occasion de le rouvrir très vite au cours de l'année 2008.
C'est donc, mesdames, messieurs les sénateurs, un projet de loi de finances particulièrement enrichi par votre assemblée que vous vous apprêtez à voter.
C'est un projet de budget qui respecte la parole donnée puisque nous tenons les engagements pris par le Président de la République devant les Français.
C'est un projet de budget réaliste parce que les hypothèses de croissance sont raisonnables, les prévisions de recettes, prudentes et les dépenses, évaluées au plus juste.
C'est un projet de budget fondé sur une belle valeur que notre majorité partage, la responsabilité, puisqu'il poursuit le redressement des finances publiques tout en mettant l'accent sur les dépenses d'investissement et d'encouragement à la croissance.
C'est ce projet de loi de finances au service de l'avenir de tous les Français que je vous demande maintenant de bien vouloir approuver. Je vous en remercie par avance. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Le Sénat va procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2008.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Conformément à l'article 60 bis du règlement, il va être procédé à un scrutin public à la tribune, dans les conditions fixées par l'article 56 bis du règlement.
J'invite Mme Yolande Boyer et M. Jean-Léonce Dupont à superviser les opérations de vote.
Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l'appel nominal.
(Le sort désigne la lettre K.)
M. le président. Le scrutin sera clos après la fin de l'appel nominal.
Le scrutin est ouvert.
Huissiers, veuillez commencer l'appel nominal.
(L'appel nominal a lieu.)
M. le président. Le premier appel nominal est terminé. Il va être procédé à un nouvel appel nominal.
(Le nouvel appel nominal a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
Mme et M. le secrétaire vont procéder au dépouillement.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 52 :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l'adoption | 194 |
Contre | 124 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
5
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter.
La liste des candidats établie par la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Arthuis, Philippe Marini, Yann Gaillard, Roland du Luart, Aymeri de Montesquiou, Marc Massion, Thierry Foucaud.
Suppléants : MM. Philippe Adnot, Denis Badré, Michel Charasse, Philippe Dallier, Yves Fréville, Paul Girod, Michel Sergent.
6
Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Projet d'action commune du Conseil modifiant l'action commune 2007/405/PESC du Conseil relative à la mission de police de l'Union européenne menée dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité (RSS) et son interface avec la justice en République démocratique du Congo (EUPOL RD Congo).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3727 et distribué.
7
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 12 décembre 2007 :
À dix heures :
1. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, préalable au Conseil européen du 14 décembre 2007 ;
À quinze heures et, éventuellement, le soir :
2. Discussion de la proposition de loi (n° 70, 2007-2008) relative aux personnels enseignants de médecine générale, présentée par M. Francis Giraud et plusieurs de ses collègues.
Rapport (n° 114, 2007-2008) de M. Jean-Léonce Dupont, fait au nom de la commission des affaires culturelles.
3. Discussion de la question orale avec débat n° 7 de M. Daniel Reiner à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables sur l'avenir du fret ferroviaire.
M. Daniel Reiner attire l'attention M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables sur l'avenir du fret ferroviaire.
Alors que la SNCF a annoncé la fermeture de 262 gares au wagon isolé, le fret ferroviaire semble cet automne amorcer une légère reprise et les conclusions du Grenelle de l'environnement ont mis en évidence la nécessité de développer le fret ferroviaire.
Pourtant, malgré les ambitions affichées, aucun budget supplémentaire n'est dégagé en faveur des infrastructures ferroviaires cette année encore, le Gouvernement n'étant pas même au rendez-vous s'agissant de la seule régénération du réseau, qui, nécessitant 500 millions d'euros, ne se voit créditer que de 400 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008.
Dans le même temps, les collectivités s'investissent, en suscitant la mise en place d'opérateurs de proximité et en soutenant la réalisation d'embranchements ferrés pour les sites industriels.
La promotion du transport combiné, la création des nouvelles autoroutes ferroviaires et une politique massive d'investissements en faveur de l'embranchement ferré des zones d'activité nécessiteront des efforts considérables de la part de l'État et des collectivités territoriales et la création de nouvelles ressources.
C'est dans cet esprit qu'une mission d'information sur les infrastructures de transports terrestres, leur financement et leur fonctionnement s'est constituée au Sénat en septembre 2007.
En outre, on sait qu'en la matière, les incantations ne suffisent pas. L'autoroute ferroviaire existante ne trouve pas son rythme de croisière ; quant à l'autoroute de la mer sur la Méditerranée, elle peine à s'imposer face à la route, malgré la qualité du service. Il faut donc, en plus de construire un véritable réseau national de fret, grande vitesse et secondaire, imaginer des incitations à l'usage de telles infrastructures. Ces chantiers législatifs et règlementaires ne sont pas même esquissés dans les conclusions du Grenelle de l'environnement. L'amélioration des prestations, l'incitation en direction des donneurs d'ordre ou des prestataires de services (entreprises et entreprises de transport), sont pourtant le pendant indispensable pour augmenter le report modal et ainsi optimiser les investissements de l'État et des collectivités locales.
En conséquence, il demande au Gouvernement quelles sont ses intentions véritables en la matière. Entend-t-il développer ce secteur ou a-t-il décidé de donner à l'entreprise SNCF des ordres purement comptables et financiers ? Envisage-t-il des mesures pour augmenter l'offre de service de fret, et ainsi permettre aux entreprises de se tourner enfin plus fortement vers ce type d'approvisionnement ? Le Grenelle de l'environnement et le prochain CIADT transport seront-ils enfin l'occasion de présenter de réelles ruptures en la matière ?
4. Discussion de la question orale européenne avec débat n° 1 de M. Hubert Haenel à Mme Rachida Dati, garde des Sceaux, ministre de la justice, sur le rôle d'Eurojust et du réseau judiciaire européen.
À la suite de la communication adoptée par la Commission européenne, le 23 octobre 2007, sur le rôle d'Eurojust et du réseau judiciaire européen dans le cadre de la lutte contre le crime organisé et le terrorisme dans l'Union européenne, M. Hubert Haenel interroge Mme le garde des Sceaux, ministre de la justice sur le jugement que porte le Gouvernement sur le bilan de l'activité d'Eurojust depuis sa création par une décision du Conseil en date du 28 février 2002, sur les missions assumées par le réseau judiciaire européen et sur les perspectives de cette coopération judiciaire au niveau européen.
Il lui demande, en particulier, si les propositions formulées par la Commission européenne, en vue d'accorder des pouvoirs plus étendus aux membres nationaux d'Eurojust, de renforcer les pouvoirs du collège d'Eurojust et d'encourager une coopération accrue avec le réseau judiciaire européen, lui paraissent satisfaisantes.
Il lui demande également si le renforcement d'Eurojust ne doit pas être d'ores et déjà envisagé dans la perspective, ouverte par le « traité modificatif », de l'institution d'un véritable parquet européen, et si la mise en place d'une coopération renforcée entre les États membres adhérant à cet objectif ne serait pas la voie la plus efficace pour avancer dans ce domaine.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures cinquante-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD