M. le président. La parole est à Mme Michèle André, auteur de la question n° 138, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Mme Michèle André. Madame la secrétaire d'État, ma question s'adressait à votre collègue chargé des transports, mais votre engagement lors du Grenelle de l'environnement, qui a permis de mettre en avant le rail en tant que mode de transport économe en carbone, et proche des préoccupations de développement durable, me laisse espérer une réponse attentive de votre part, à défaut, peut-être, d'une réponse positive.
Ce matin, vous venez de l'évoquer, les médias bruissent du lancement de l'AGV, l'automotrice grande vitesse, alors que, en Auvergne, on espère encore une ligne à grande vitesse qui mettrait Paris et Clermont-Ferrand, séparés de quatre cents kilomètres, à moins de trois heures. Oui, nous en sommes encore là ! Mais peut-être ce projet se réalisera-t-il en 2018 ou en 2020 !
En Auvergne, nous nous soucions des réseaux secondaires, qui subissent de multiples ralentissements et dont certains ont été fermés.
C'est le cas de la ligne Clermont-Ferrand-Montluçon.
Le résultat est le suivant : des centaines de camions sur les routes départementales, des salariés de grandes entreprises des Combrailles sans transports collectifs pour se rendre à leur travail, des familles de lycéens et de collégiens qui doivent se débrouiller autrement.
Au-delà, c'est toute une région qui se trouve délaissée, qui regarde à la télévision le progrès destiné aux autres.
Nos concitoyens, nos collectivités, nos villes - Montluçon, Clermont-Ferrand, mais aussi, sur le parcours, les Ancizes, avec le très beau viaduc des Fades -, nos départements - l'Allier, le Puy-de-Dôme -, nos régions sont révoltés.
Madame la secrétaire d'État, quel est votre point de vue sur les nécessaires investissements à faire pour maintenir ces lignes secondaires qui sont absolument nécessaires ? À un moment où la région Auvergne a beaucoup investi pour les trains express régionaux, les TER, voulez-vous soutenir cette région dans ce sens ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Madame la sénatrice, comme vous l'avez souligné, le sujet que vous soulevez s'inscrit pleinement dans les suites du Grenelle de l'environnement.
Conformément aux conclusions de ce dernier, le Gouvernement a engagé la réflexion sur l'extension du réseau à grande vitesse, - c'est en effet d'actualité -, afin d'accroître une offre performante de transports plus respectueux de l'environnement.
Dans ce même objectif, le Grenelle de l'environnement a souligné l'enjeu que représente la mise à niveau du réseau existant, en prévoyant d'augmenter de 400 millions d'euros par an les moyens qui y seront consacrés.
Vous savez que, face au constat, à la fin de 2005, de l'état dégradé du réseau, après vingt années de sous-investissement, le Gouvernement a adopté, en 2006, un plan de rénovation 2006-2010, doté sur la période de 1 800 millions d'euros supplémentaires, pour régénérer les lignes du réseau ferré national, en priorité les plus circulées. Les régions accompagnent cet effort, dans le cadre des contrats de projets 2007-2013.
En Auvergne, comme dans les autres régions, c'est grâce aux moyens dégagés par ce plan de rénovation et par le biais des contrats de projets que les ralentissements seront supprimés et les lignes de desserte régionale modernisées. À titre d'exemple, plus de 100 millions d'euros sont inscrits au contrat de projet sur les lignes Clermont-Aurillac, Clermont-Le Puy et Montluçon-Vierzon.
Toutefois, il est évident que, dans le cas des lignes à très faible trafic, comme les lignes Lapeyrouse-Volvic, ou Montluçon-Eygurande, sur lesquelles on observe un aller-retour de train express régional par jour, une réflexion doit être engagée afin de trouver un meilleur équilibre économique.
La maintenance relativement standardisée du réseau ferré national est bien adaptée à des trafics plus importants, qui nécessitent un haut niveau de prestation. Mais elle constitue un handicap pour les lignes moins sollicitées. Par conséquent, il faut réfléchir à l'organisation des dessertes de voyageurs, par exemple en s'appuyant soit sur d'autres itinéraires, comme Montluçon-Clermont-Ferrand par Gannat, pour réduire les conséquences de ce handicap, soit sur des solutions alternatives.
M. le président. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. Madame la secrétaire d'État, les précisions que vous avez apportées sur la liaison Montluçon-Clermont-Ferrand par Gannat ne sont pas très optimistes. Je rappelle que l'autre ligne présentait le double avantage d'être plus rapide, mais aussi plus touristique, ce qui était un atout pour notre région.
Je vous remercie néanmoins de votre réponse, même si elle est désespérante sur les perspectives de rétablissement de cette ligne.
desserte de la gare des Arcs-Draguignan
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 143, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
M. Pierre-Yves Collombat. Madame la secrétaire d'État, la gare des Arcs-Draguignan, qui dessert cinquante-deux communes varoises, dont celles de la communauté d'agglomération dracénoise, comptant 85 000 habitants, et celles du golfe de Saint-Tropez, est habituée à voir passer les TGV. Les élus et les usagers de ces communes sont aussi habitués à être tenus pour quantité négligeable par la direction de la SNCF.
Par exemple, les courriers que j'ai pu adresser à cette dernière à propos de l'état et de l'accessibilité de la gare n'ont même pas fait l'objet d'un accusé de réception. Les dossiers de réaménagement du bâtiment de la gare de voyageurs et de rehaussement des quais sont toujours sur la voie de garage.
Cela n'a pas empêché la communauté d'agglomération dracénoise de procéder à l'aménagement coûteux - et sans participation financière de la SNCF - des abords de la gare, créant des voies d'accès, des parkings, et montrant ainsi l'importance qu'elle accorde au transport ferroviaire.
Les nouveaux horaires entrés en application le 9 décembre 2007, concoctés sans aucune concertation par la direction de la SNCF, sont la goutte d'eau qui fait déborder le vase !
Je citerai deux exemples. Premièrement, sur la liaison avec Lyon par TGV direct, un seul TGV sur les cinq aller et retour passe aux Arcs et encore selon un horaire ne pouvant convenir qu'aux Lyonnais, qui disposent d'un train à 9 h 07, alors que les Varois doivent attendre 16 h 38 pour bénéficier de ce privilège. Il ne leur est donc pas possible d'utiliser le train pour leurs activités professionnelles. Ils empruntent dans ce cas l'avion au départ de Nice. Le Grenelle de l'environnement propose, la SNCF dispose !
Deuxièmement, sur la liaison avec Paris, toujours par TGV direct, deux TGV circulent pour Paris, en fin de matinée et à une heure d'intervalle : 10 h 42 et 11 h 17, mais aucun l'après midi. Dans l'autre sens, on observe toujours deux TGV le matin, arrivant en gare des Arcs à 1 h 42 d'intervalle en début d'après midi. Nouveauté des nouveautés, le TGV de Paris de 13 h 50 arrivant en gare des Arcs à 18 h 09, très utilisé - quoi qu'en dise la SNCF, qui ment de façon éhontée ! - a été remplacé par un autre TGV qui, lui, ne s'arrête plus aux Arcs.
Jusque-là ce n'était pas brillant, maintenant c'est le « pot au noir » !
Je vous poserai donc trois questions simples, madame la secrétaire d'État.
Les cinquante-deux communes de l'est du Var, que j'ai évoquées, existent-elles pour le Gouvernement ?
La SNCF est-elle toujours chargée d'une mission de service public et, à ce titre, a-t-elle des comptes à rendre aux représentants de la nation et au Gouvernement ?
Les modifications horaires sont-elles le signe que le choix du tracé de la nouvelle ligne à grande vitesse en projet est déjà fait ? Si le tracé dit des « grandes métropoles » est adopté, cela signifie que Les Arcs devront se contenter de regarder passer les TGV. Autant les y préparer !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur le sénateur, la SNCF, Réseau ferré de France et les conseils régionaux des régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur travaillent, depuis plusieurs années, à la refonte du cadencement des dessertes TGV, train express régional, ou TER, et fret, afin d'accompagner la croissance du trafic.
Compte tenu notamment des trafics, cette réorganisation a nécessité de faire des choix. C'est ainsi que, sur la ligne classique, un TGV entre Marseille et Saint-Raphaël ne peut s'arrêter qu'une fois, soit à Toulon, soit aux Arcs-Draguignan.
Sachant que 100 000 voyageurs ont utilisé la ligne Les Arcs-Draguignan-Paris et 900 000 voyageurs, la ligne Toulon- Paris en 2007, le choix a été fait de privilégier l'arrêt à Toulon.
Le trafic entre Les Arcs-Draguignan et Paris est saisonnier, principalement d'avril à septembre. La SNCF a donc prévu d'améliorer la desserte TGV des Arcs-Draguignan en mettant en place, d'avril à septembre 2008, un troisième aller et retour Les Arcs-Draguignan-Paris selon les horaires suivants : départ des Arcs-Draguignan à 14 h 54, arrivée à Paris à 19h19 ; départ de Paris à 15 h 42, arrivée aux Arcs-Draguignan à 20 h 07
Les services de la SNCF suivent de très près l'évolution du trafic sur cette destination et ils étudient actuellement les éventuelles possibilités de proposer un TGV supplémentaire dans le sens Paris-Les Arcs-Draguignan pour la période d'octobre à mars.
En ce qui concerne la relation entre Les Arcs-Draguignan et Lyon, la SNCF a constaté que, sur cette ligne, le trafic était très faible et en baisse en 2007, malgré une offre qui est, quant à elle, constante.
À partir du 9 décembre 2007, les arrêts aux Arcs-Draguignan ont donc été repositionnés sur un TGV aller et retour Nice-Lyon-Lille. Cette mesure vise à mieux répondre aux flux de clientèle les plus importants en offrant une relation entre Lyon et Les Arcs le matin, avec un départ de Lyon à 9 h 07 et une arrivée aux Arcs à 12 h 22, et un retour vers Lyon l'après-midi, avec un départ des Arcs à 16 h 38 et une arrivée à Lyon à 19 h 50.
Bien entendu, la SNCF va suivre l'évolution des trafics entre Les Arcs-Draguignan et Lyon et fera un bilan en milieu d'année 2008.
En outre, les modifications horaires auxquelles je fais fait référence ne peuvent être mises en relation avec les études qui se déroulent actuellement concernant la ligne à grande vitesse Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Comme vous le savez, ces études complémentaires visent à vérifier les performances et la faisabilité des différentes solutions possibles. Elles font l'objet d'une large concertation avec l'ensemble des acteurs locaux et des collectivités concernés, associés dans le cadre d'un comité d'orientation. Ce n'est qu'une fois que seront connus les résultats de ces études, qui devraient être disponibles pour la mi-2008, et au vu des avis des collectivités concernées, que le Gouvernement sera amené à prendre une décision concernant le fuseau sur lequel seront poursuivies les études.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne voudrais pas manquer de courtoisie avec Mme la secrétaire d'État, qui nous a fait le plaisir de venir dans cet hémicycle, alors que nous attendions M. Bussereau.
M. le président. Il accompagne le Président de la République. Il ne peut pas être partout !
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, ne voyez aucun reproche dans mon propos à cet égard !
« Tout va très bien, madame la Marquise ! », m'avez-vous assuré en substance, madame la secrétaire d'État.
Vous avez précisé que la SNCF avait fait ses choix, qu'il y avait plus de monde à Toulon qu'à Draguignan. Il n'est pas besoin de faire des études très poussées pour s'en apercevoir ! Vous n'avez pas parlé des problèmes d'aménagement du territoire et vous n'avez pas répondu à la question de savoir qui exerce la tutelle dans ce domaine : est-ce la SNCF sur le Gouvernement, ou le Gouvernement sur la SNCF ?
Les horaires existants, s'ils peuvent convenir, par exemple, aux inactifs, aux retraités - c'est d'ailleurs un peu moins vrai maintenant pour ces derniers -, ne permettent pas d'utiliser le TGV des Arcs-Draguignan pour des déplacements professionnels nécessitant de partir le matin et de rentrer le soir.
Par conséquent, je suis désolé de vous le dire, madame la secrétaire d'État, la SNCF continue à se moquer de nous. J'espère que vous lui ferez savoir que nous apprécions modérément cette attitude !
réalisation et financement des travaux de mise à deux fois deux voies de la rn 124 entre Auch et Toulouse
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, auteur de la question n° 126, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur la réalisation des travaux de mise à deux fois deux voies de la route nationale 124 entre Auch et Toulouse. Je citerai deux faits.
Premièrement, Auch n'est pas relié à Toulouse par une deux fois deux voies, contrairement aux autres préfectures de Midi- Pyrénées, Cahors, Albi, Montauban, Foix et Tarbes, voisines de la Haute-Garonne
Deuxièmement, le Gers ne compte que vingt kilomètres de deux fois deux voies, sans doute le réseau le plus court de France pour cette catégorie de routes. Ces vingt kilomètres de bonheur fractionné se situent entre L'Isle-Jourdain et Pujaudran, pour douze kilomètres, depuis 2000, et la déviation d'Aubiet de huit kilomètres, mise en service en 2003.
Depuis lors, nous attendons avec impatience la mise à deux fois deux voies des trente et un kilomètres restant entre Toulouse et Auch. Nous attendons avec d'autant plus d'impatience que cette route est vitale pour l'économie du Gers.
Or les retards s'ajoutent aux retards et les engagements de l'État pour la réalisation de la deux fois deux voies dans le contrat de plan État-région 2000-2006 prévoyaient une livraison en 2006. Ces engagements de l'État se trouvaient renforcés, car ils s'inscrivaient dans l'itinéraire à très grand gabarit au titre de la compensation des nuisances en découlant.
Une fois de plus, l'État n'a pas tenu ses engagements. Bien au contraire, les travaux ont pris un retard considérable faute de financements, estimés à plus de 175 millions d'euros.
Trois tronçons restent à réaliser : la liaison Auch-Aubiet, la déviation de Gimont et l'aménagement du tronçon Gimont-l'Isle-Jourdain. Ces opérations, qui sont chacune à un stade d'avancement différent, ne doivent pas seulement faire l'objet d'une inscription par l'État dans le plan de développement et de modernisation des itinéraires, le PDMI. L'État, responsable de tous les retards accumulés, doit s'engager de façon irrévocable.
Madame la secrétaire d'État, cette situation inacceptable en termes d'aménagement du territoire et d'égalité des chances ne peut se prolonger.
Je vous demande donc de me confirmer le calendrier de la réalisation des travaux, que je souhaite prochains et intensifs, ainsi que leur financement, afin que la RN 124 réponde enfin pleinement à son statut de route express, conformément aux engagements pris par l'État.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur le sénateur, sur les 76 kilomètres de la RN 124 entre Auch et Toulouse, seulement 20 kilomètres, effectivement, ont été aménagés en deux fois deux voies dans le cadre du contrat de plan État-région, et 35 kilomètres supplémentaires doivent être mis en service avant la fin de 2009.
Les travaux en cours concernent, d'une part, la section entre Toulouse et l'Isle-Jourdain, afin de disposer d'un aménagement continu à deux fois deux voies, avec en particulier la déviation de Léguevin, et, d'autre part, l'aménagement de la section Aubiet-Auch.
S'agissant des autres aménagements de la RN 124, à savoir la déviation de Gimont et les réalisations à mener entre Gimont et l'Isle-Jourdain, leur financement n'a pu trouver sa place dans le contrat de plan État-région. Il devra donc être recherché dans le cadre de la nouvelle programmation des investissements sur le réseau routier national.
Une consultation des élus et des principales collectivités concernées a été conduite par le préfet de région pour préparer cette nouvelle programmation.
Le 26 février 2007, Dominique Perben, alors ministre des transports, avait adressé un mandat aux préfets de région pour la consultation des programmes de développement et de modernisation d'itinéraires, les PDMI.
Le préfet de la région Midi-Pyrénées a consulté officiellement les élus et les parlementaires le 17 mars2007, et leurs réponses sont parvenues tout au long de l'année.
Le processus sera poursuivi et finalisé après que le Gouvernement aura entièrement tiré les conclusions, en matière de politique routière, du Grenelle de l'environnement.
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la secrétaire d'État, comprenez bien que la réponse que vous me communiquez ne me satisfait aucunement !
Le réseau autoroutier de la région dont vous êtes originaire est tellement dense qu'il n'est pas rare de se tromper pour passer d'un tronçon à un autre. Je rappelle que le Gers ne compte que 20 kilomètres de réseau à deux fois deux voies.
Cette situation est inacceptable en termes d'aménagement du territoire et d'égalité des chances ! Comment voulez-vous qu'un département se développe avec un réseau routier aussi peu dense ?
Je ne puis donc accepter votre réponse et je reposerai ma question, en espérant que M. Bussereau, dont je comprends parfaitement l'absence aujourd'hui, me donnera une réponse précise et prendra des engagements, engagements que l'État n'a jamais tenus.
Vous m'avez indiqué que les élus avaient été consultés par le préfet de région. Mais toutes les réponses allaient dans le même sens !
Madame la secrétaire d'État, dans votre région, on construit des murs antibruit pour préserver les riverains des nuisances sonores des autoroutes. À certains égards, je vous envie beaucoup.
mise en oeuvre du cv anonyme
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, auteur de la question n° 141, transmise à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
Mme Bariza Khiari. Madame la secrétaire d'État, le 17 décembre dernier, lors de la cérémonie de clôture de l'année européenne de l'égalité des chances pour tous, Louis Schweitzer, le président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, a remis au Gouvernement un rapport comportant dix-sept propositions d'action pour engager une lutte plus efficace contre les discriminations.
Parmi ces propositions, la HALDE a insisté sur la nécessité de mettre en oeuvre le CV anonyme.
Cette proposition me paraît tout à fait opportune, mais je souligne qu'elle ne devrait pas avoir lieu d'être, puisque le principe du CV anonyme pour les entreprises de plus de cinquante salariés a été adopté par le Parlement dans la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances.
Mais cette disposition n'a pas été suivie d'effet depuis lors, faute de décret d'application, le gouvernement précédent et celui auquel vous appartenez n'ayant pas jugé utile d'appliquer la norme votée par la représentation nationale.
La lutte contre les discriminations dans l'emploi est difficile, en particulier dans le cas des discriminations indirectes. Elle doit passer par la création d'outils innovants, et le CV anonyme en est un. Il permet, au moins à l'étape du recrutement, de gommer les différences tant raciales que sociales, ne laissant la place qu'à des données objectives d'expérience et de formation.
Notre tradition de méritocratie républicaine impose l'anonymat aux concours et aux examens écrits. Il serait logique d'étendre ce principe au CV.
Le CV anonyme est un outil républicain, qui a une portée pédagogique évidente et qui permet de lutter contre le conformisme des recruteurs. Les études ont en effet démontré que le taux de discrimination était le plus fort au moment de la sélection des CV.
Plusieurs entreprises, grandes ou petites, ont déjà mis en oeuvre des procédures de recrutement anonymes sans rencontrer de difficultés particulières. Tel est notamment le cas des assurances AXA pour les emplois de commerciaux, et ce depuis 2005, avant même le vote du texte.
Les résultats sont probants puisque, avec le CV anonyme, le recrutement se trouve diversifié et correspond davantage à la diversité de notre société. Cette mesure est certainement bien plus efficace que toutes les politiques de quotas ou de discrimination positive, qui contribuent, elles, à stigmatiser encore davantage les populations déjà discriminées.
Madame la secrétaire d'État, quand le Gouvernement prendra-t-il les décrets d'application nécessaires à la mise en oeuvre et à la généralisation du CV anonyme ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Xavier Bertrand, qui est retenu à l'Assemblée nationale pour l'examen d'une proposition de loi.
L'article 24 de la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, inséré à la suite de l'adoption d'un amendement déposé par le président Nicolas About, fait obligation aux employeurs de plus de cinquante salariés d'examiner les informations communiquées par écrit par les candidats à un emploi dans des conditions préservant leur anonymat.
C'est ce que l'on appelle communément le CV anonyme, qui permet aux candidats à un emploi de ne pas subir de discrimination dès le premier contact, discrimination qui serait attestée par certaines enquêtes réalisées sous la forme de testing.
Comme vous l'avez indiqué, madame la sénatrice, la loi renvoie les modalités d'application à un décret en Conseil d'État. Le législateur a souhaité laisser le temps à la négociation sociale d'aboutir sur cette question.
En effet, les partenaires sociaux négociaient parallèlement l'accord national interprofessionnel relatif à la diversité dans l'entreprise, qui comportait une expérimentation des dispositifs visant à préserver l'anonymat des candidatures.
Cet accord a finalement été signé le 12 octobre 2006 par quatre organisations syndicales - la CFTC, la CGT, la CGT-FO et la CFDT - et trois organisations patronales - le MEDEF, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises et l'Union professionnelle artisanale - et il a été déposé auprès de la direction générale du travail le 23 mars 2007.
L'accord prévoit que chaque entreprise relevant de son champ d'application mettra en place, après information des représentants élus du personnel des entreprises qui en sont dotées, les procédures adaptées pour que les recrutements de toute nature, réalisés en interne ou en externe, soient exempts de toute forme de discrimination et visent à une diversification des sources de recrutement.
L'accord rappelle d'ailleurs que participent de cette démarche les expérimentations des dispositifs visant à préserver l'anonymat des candidatures, expérimentations dont les signataires doivent dresser un bilan à l'échéance du 31 décembre 2007.
À ce jour, les partenaires sociaux ne l'ont pas encore fait. Les organisations représentatives du personnel signataires ont toutefois demandé l'extension de l'accord national interprofessionnel, ce qui le rendrait obligatoire pour toutes les entreprises relevant des secteurs d'activité dont les organisations professionnelles signataires sont représentatives.
L'examen de l'extension de l'accord doit avoir lieu en sous-commission des conventions et des accords de la commission nationale de la négociation collective le 12 février prochain, pour une publication rapide de l'arrêté d'extension.
Xavier Bertrand rappellera à cette occasion aux partenaires sociaux que le Gouvernement attend beaucoup de l'évaluation qu'ils feront des dispositifs visant à préserver l'anonymat des candidatures.
Vous citiez les dix-sept propositions d'action formulées le 17 décembre dernier par la HALDE, qui invoque également la négociation entre les partenaires sociaux pour favoriser la mise en place de dispositifs de recrutement transparents et objectifs.
C'est la méthode que le Gouvernement continuera de privilégier.
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de ces précisions. Je vous interrogerai de nouveau dans quelques mois sur l'état d'avancement de cette question.
La démarche contractuelle me convient ; pour autant, je ne suis pas certaine qu'elle aboutisse dans les temps.
Je profite de la présence de Mme Boutin pour souligner l'importance de la lutte contre les discriminations, notamment à l'emploi. Il faudrait que ce sujet soit l'un des axes principaux du « plan banlieues », qui sera présenté prochainement par le Gouvernement.
Le temps perdu dans l'engagement effectif de ce combat fait planer un doute sérieux sur votre volonté réelle de lutter efficacement contre les discriminations.
J'espère que le Gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que la lutte contre les discriminations soit non seulement un slogan, mais également une réalité.
mise en oeuvre du droit au logement opposable pour les personnes handicapées
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Dupont, auteur de la question n° 150, adressée à Mme la ministre du logement et de la ville.
Mme Bernadette Dupont. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés de mise en oeuvre du droit au logement opposable pour les personnes handicapées dans le parc des logements sociaux.
L'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation, inséré par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, impose de rendre accessibles les locaux à usage d'habitation aux personnes handicapées, quelle que soit l'origine de leur handicap.
La mise en accessibilité entraîne un surenchérissement des coûts de construction de ces logements, déjà rendus chers par la rareté du foncier disponible.
Parallèlement, l'institution par la loi du 5 mars 2007 d'un droit au logement opposable permet aux personnes handicapées de saisir les commissions de médiation pour obtenir l'attribution d'un logement social.
Or la faiblesse des ressources d'un grand nombre de ces personnes et de leurs familles, en termes d'allocations comme de compléments, lorsqu'elles ne travaillent pas, leur interdit l'accès au logement conventionnel.
Je souhaiterais donc connaître vos intentions, madame la ministre, pour mettre en cohérence les revenus des personnes handicapées et le coût du logement afin de rendre applicable le droit à un logement adapté.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Au préalable, je voudrais dire à Mme Khiari de ne pas s'inquiéter : le Gouvernement est déterminé à lutter contre la discrimination, qui est inacceptable dans une République vivante.
Madame Dupont, comme vous, je pense qu'il est indispensable que nous proposions à nos compatriotes affectés d'un handicap une offre de logements abordables dans le parc social public ou privé.
C'est une action conjointe de l'ensemble des acteurs publics qui permet de donner un toit aux plus fragiles d'entre nous.
Concernant la prise en charge par l'État du coût des travaux d'adaptation des logements aux besoins des personnes handicapées dans le parc social existant, la loi du 11 février 2005 prévoit que la mise aux normes en matière d'accessibilité doit s'appliquer dès lors que des travaux sont entrepris dans ces immeubles.
Le coût de ces travaux est partiellement pris en charge par l'État. Les organismes HLM peuvent en effet déduire du montant de la taxe foncière sur les propriétés bâties les dépenses qu'ils ont engagées pour l'accessibilité et l'adaptation de leurs logements.
Cette mesure permet donc de ne pas laisser à la seule charge des opérateurs le coût de ces travaux.
En ce qui concerne les constructions neuves, la réglementation impose désormais que les logements soient entièrement accessibles. Ainsi, l'intégration en amont de ces nouvelles normes dans les projets ne représente pas un coût d'opération supplémentaire substantiel par rapport à ce qui avait été prévu. Je ne nie pas qu'elle entraîne une augmentation du coût, mais c'est la loi et il est légitime de lutter contre les discriminations liées au handicap.
J'en viens à la question de l'adéquation entre les ressources des personnes handicapées et le coût du logement HLM.
Une personne bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, perçoit, au 1er janvier 2008, une aide d'un montant maximal de 628,10 euros par mois. Celle-ci peut être complétée par une majoration pour la vie autonome de 104,77 euros par mois lorsque cette personne occupe un logement indépendant sans exercer une activité professionnelle.
Au 31 décembre 2006, plus de 770 000 personnes étaient concernées, dont plus de 110 000 disposaient également de la majoration pour la vie autonome.
En moyenne, la dépense de logement, c'est-à-dire le loyer et les charges, s'élève à 375 euros par mois pour un logement social de deux pièces. Elle est partiellement prise en charge par une aide au logement s'élevant, pour une personne seule sans ressource imposable, à 252 euros par mois.
Ainsi, le reste à charge pour une personne handicapée occupant un logement social de deux pièces se situe entre 50 euros et 100 euros par mois, soit un taux d'effort compris entre 10 % et 12 %.
Comme vous l'avez rappelé, madame le sénateur, la loi reconnaît les personnes handicapées comme prioritaires dans les attributions des logements sociaux. Cette priorité a été renforcée par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable.
Ce sont aussi les partenaires locaux qui nous permettront d'apporter les réponses adaptées et de développer une offre diversifiée de logement pour les personnes handicapées. À ce titre, les maisons départementales des personnes handicapées constituent le lieu « ressources » le plus approprié pour coordonner les acteurs de l'habitat sur ce thème.
Vous le savez, les personnes en situation de handicap font partie d'une des six catégories prioritaires en ce qui concerne la mise en place du droit au logement opposable.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, je tiens à avoir une relation de confiance avec tout le monde, en particulier avec les parlementaires. Je soutiens totalement la loi DALO - j'en suis une militante convaincue, et j'assume cette position -, mais, madame la sénatrice, à la fin de cette année, nous aurons un delta entre les demandes de ces six catégories prioritaires et les capacités de logement dont nous disposons.
C'est la raison pour laquelle je mets tout en oeuvre pour être créative. Je vous soumettrai un certain nombre de propositions dans les semaines et les mois qui viennent pour que nous puissions accueillir le maximum de ces personnes et diminuer ce delta.
Naturellement, les personnes en situation de handicap sont prioritaires et je suis convaincue qu'avec le temps, madame la sénatrice, nous mettrons un terme à ce scandale qui fait que la France ne loge pas tous ses enfants.
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Dupont.
Mme Bernadette Dupont. J'ai bien noté la volonté de Mme la ministre que les choses évoluent. Il n'en reste pas moins que, dans la pratique quotidienne, les immeubles anciens que l'on essaie de réhabiliter sont, pour la plupart, incompatibles avec les exigences d'accessibilité. Donc, le manque de logements anciens est manifeste.
Quant aux logements modernes, dans une ville comme la mienne où le foncier est très cher, les constructions réalisées sont inaccessibles aux personnes handicapées, en dépit de toutes les aides prévues en leur faveur.
Par ailleurs, si le Gouvernement aide certains organismes à mettre leurs locaux en conformité avec les normes d'accessibilité, ceux-ci ne risquent-ils pas de répercuter le coût des travaux sur le montant des loyers ?