M. Jean Desessard. On pourrait ainsi réfléchir à leurs droits en matière de salaires exorbitants,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pourquoi pas ?
M. Jean Desessard. ... à l’augmentation de leur salaire alors que le pouvoir d’achat de leurs salariés diminue,...
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Qu’a fait Jospin ?
M. Jean Desessard. ... aux stock-options...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On l’a déjà fait, on ne s’en est pas privé !
M. Jean Desessard. ... que certains vendent pour réaliser des bénéfices, alors que la société est en difficulté, à l’image de l’ancien président d’EADS, ...
Mme Isabelle Debré. C’est hors sujet !
M. Jean Desessard. ... aux parachutes dorés, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il ne faut pas vous priver !
M. Jean Desessard. ... aux résidences fiscales exotiques, et je pourrais continuer.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. De l’audace, encore de l’audace !
M. Jean Desessard. On pourrait également s’interroger sur leurs devoirs en matière de formation, de gestion des licenciements, et sur leurs responsabilités concernant, par exemple, les délocalisations, le respect de l’environnement, la santé au travail, l’harmonisation fiscale et sociale à l’échelon mondial. Le titre même de cette future loi pose donc question.
Dans la crise sociale et économique que nous traversons, n’aurait-il pas été plus indiqué de légiférer sur la solidarité à l’égard des demandeurs d’emploi ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est ce que nous faisons !
M. Jean Desessard. Pourquoi donc nous proposer aujourd’hui un tel texte ?
On nous dit que c’est nécessaire, car un certain nombre d’emplois ne sont pas pourvus. L’argument reste très vague, et je n’ai pas trouvé d’étude sérieuse qui vienne l’étayer.
Il semblerait que, actuellement, les emplois difficilement pourvus relèvent de deux catégories : d’une part, les métiers très qualifiés, très spécialisés – je pense à la médecine ou encore à l’informatique – et, d’autre part, les métiers que l’on peut qualifier de pénibles, par exemple les métiers du bâtiment ou les métiers de bouche, dont les horaires et les salaires sont très peu attractifs.
M. Guy Fischer. Les salaires, surtout !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Les horaires aussi !
M. Jean Desessard. Ce projet de loi ne s’adresse évidemment pas aux cadres et ingénieurs de haut niveau... Il concerne les personnes peu ou pas qualifiées, à qui l’on veut imposer une insertion professionnelle, quelle qu’elle soit, où qu’elle soit.
Monsieur le secrétaire d’État, cela pose la question du projet de société que l’on souhaite pour notre pays. Car ce texte répond évidemment à une logique politique qui veut aligner l’économie française et le monde du travail dans un système mondial néolibéral, un système qui est une immense régression en termes de salaires, de conditions de travail, de durée du temps de travail, notamment.
Cette logique est, bien sûr, le résultat d’une erreur d’analyse, erreur qui consiste à croire que le salut de l’économie française et la compétitivité avec les pays émergents nécessitent la remise en cause des droits sociaux en France et en Europe.
Une autre logique est possible, que je déclinerai en quatre points.
Premièrement, la remise en cause du productivisme comme dogme économique, à l’échelon mondial, avec son idéal archaïque d’une croissance toujours plus forte. Ce dogme est un non-sens écologique et une aberration économique si l’on considère que, dans un délai très court, la moitié de nos activités consistera en fait à réparer les dégâts du productivisme. Il serait temps de s’interroger sur les besoins réels et d’adapter ces besoins aux ressources. Sinon, nous courons à la catastrophe, à la fois économique, sociale et écologique.
Deuxièmement, la mise en œuvre d’une solidarité Nord-Sud et Est-Ouest s’impose. Cela signifie le développement d’une économie de proximité ; je pense particulièrement à l’agriculture et aux services.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il faut faire un texte sur ce sujet !
M. Jean Desessard. Chaque pays doit trouver son propre développement, sans domination de l’un sur les autres. C’est la condition d’un développement harmonieux. Cela créera les conditions de la liberté de circulation des personnes et limitera, de fait, l’immigration économique contrainte.
Troisièmement, il est nécessaire que chacun puisse vivre décemment de son travail. L’objectif ne doit pas être, comme cela est sous-entendu dans ce projet de loi, de travailler beaucoup pour pas grand-chose ; il doit être de créer un monde du travail moins pénible, moins stressant, moins culpabilisant. C’est aussi une question de santé publique. En lieu et place d’une société inégalitaire, il faut créer les conditions d’une société équitable et solidaire, dans laquelle, par exemple, le salaire d’un patron ne pourrait pas être cinq cents fois supérieur – cinq cents fois, mes chers collègues, cinq cents fois ! - à celui de l’ouvrier !
Quatrièmement, enfin, il faudrait, bien sûr, revenir sur la notion de temps de travail, sur la place du travail dans la vie, et parler de la question de l’autonomie de la personne, de son développement personnel, et de l’utilité sociale du travail.
Il convient donc de réfléchir sereinement aux politiques qui doivent être mises en œuvre pour permettre à tous l’accès à un emploi.
C’est évidemment bien différent de la réflexion que vous nous proposez ! Vous, vous stigmatisez le demandeur d’emploi, que vous considérez essentiellement comme une personne coupable de ne pas travailler, accréditant ainsi l’image du « chômeur fainéant » responsable de sa situation !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pas du tout, on veut les aider à trouver du travail !
M. Jean Desessard. Les « demandeurs d’emploi » décrits dans ce projet de loi sont des individus coupables, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non !
M. Jean Desessard. ... coupables de n’avoir pas été assez efficaces, pas assez productifs, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ne dites pas cela !
M. Jean Desessard. ... coupables de ne pas avoir été assez combatifs hier pour conserver leur emploi, coupables de rechigner aujourd'hui à en chercher un nouveau !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ne dites pas cela de ces gens-là !
M. Jean Desessard. À vous entendre, si le chômeur ne retrouve pas d’emploi, c’est parce que, au fond, il ne le veut pas !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas du tout cela !
M. Jean Desessard. Votre projet nie tout simplement les difficultés de la vie et la responsabilité de notre système économique.
Il faut cesser de diaboliser les chômeurs, de leur faire payer l’incapacité du marché du travail à leur fournir un emploi digne, correspondant à leurs attentes. Il faut arrêter d’en faire des boucs émissaires.
À défaut de réfléchir à la réforme du marché du travail, vous osez, avec ce projet de loi, demander aux demandeurs d’emploi de se justifier, de faire des efforts, de revoir à la baisse leurs ambitions de travailleurs, la décence de leurs salaires et la dignité de leurs conditions de vie.
Et en leur demandant de s’adapter toujours plus, d’accepter toujours moins, vous vous apprêtez à faire d’eux une sorte d’armée de réserve qui servira de main-d’œuvre d’ajustement à un marché de l’emploi toujours plus flexible et toujours moins sûr !
Telle n’est pas ma conception d’un accompagnement efficace vers l’emploi. Sanctionner, ce n’est pas aider. Sanctionner, c’est faire pression, précariser, exclure l’individu du système ; c’est se donner l’illusion de l’action. Sanctionner, c’est décharger l’État de sa responsabilité vis-à-vis des citoyens, dont il doit élever le niveau de formation et le niveau de vie. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé des amendements tendant notamment à la suppression du système de sanction.
Il serait plus juste et bien plus efficace – cela a été dit tant de fois ! – de former les chômeurs, de motiver la création et la répartition des richesses et des emplois, de dynamiser les bassins économiques délabrés.
M. Paul Blanc. Revoilà les fokon et les yaka !
M. Jean Desessard. Ainsi, l’élargissement géographique que vous préconisez pour la recherche d’emploi va aboutir à des situations ubuesques.
Prenons l’exemple d’un chômeur roubaisien qui s’est vu proposer une offre d’emploi dans le secteur du nettoyage à la gare de Lille, avec une journée de travail commençant à quatre heures du matin. Certes, la distance Lille-Roubaix est inférieure à trente kilomètres. Mais, à cette heure matinale, par quel mode de transport va-t-il s’y rendre ? Il n’a d’autre solution que la voiture. Que fera alors l’ANPE, ou la nouvelle agence X, si cette personne n’a pas les moyens de posséder une voiture, ou même simplement de l’alimenter en carburant ? La sanctionner ? La radier des listes pour refus d’une offre « raisonnable » ?
À quoi bon imposer au demandeur d’emploi un déplacement de trente kilomètres pour un salaire modique, alors que l’ANPE, ou la future entité encore innommée, ne pourra tout simplement pas constituer une liste d’offres raisonnables d’emploi ?
Prenons l’exemple de la métropole lilloise : 30 000 personnes sans emplois, dont 21 000 sont inscrites à l’ANPE, et des entreprises qui ferment chaque jour ! Comment l’ANPE va-t-elle pouvoir détecter un nombre suffisant d’« offres raisonnables d’emploi » dans un tel bassin ?
La question est posée !
Le système français de protection sociale contre la privation involontaire d’emploi a été créé à la fin de l’année 1958. Ce faisant, le général de Gaulle et les partenaires sociaux - ne les oublions pas - ont mis en place un régime fondé sur une logique assurantielle. Ce régime permet de prémunir chaque travailleur contre les incertitudes d’un marché du travail dont chacun est de plus en plus dépendant. Or c’est bien la philosophie assurantielle de tout notre système de protection en matière d’emploi qui est remise en cause par l’esprit de ce projet de loi !
Nous sommes décidés à combattre les sanctions ici prévues, qui visent à sortir un certain nombre de demandeurs d’emploi des statistiques. On se rendra très vite compte que le problème se reposera avec l’aide sociale, nécessaire à ceux qui seront en dehors du système. On aboutira donc à une paupérisation accrue, alors que la société française se doit, aujourd’hui, d’être solidaire.
Vous allez radier, radier et encore radier, et la pauvreté ne fera que s’accroître !
Monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, si ce projet de loi est adopté, il condamnera deux millions de nos concitoyens à la précarité. Nous qui luttons pour une société plus solidaire, nous sommes décidés à combattre ce texte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne reprendrai pas l’intégralité des points qui ont été évoqués par les différents intervenants, que je remercie de leur contribution au débat.
Je souhaite toutefois apporter quelques éléments de réponse.
Je voudrais d’abord vous remercier une nouvelle fois, monsieur le rapporteur, de la qualité de votre travail. Au-delà de votre soutien à ce texte et à sa philosophie, qui sont évidemment essentiels pour le Gouvernement, votre rapport a permis d’apporter des clarifications utiles. Je pense notamment à la nature juridique du projet personnalisé d’accès à l’emploi, ainsi qu’à la meilleure façon d’enclencher sa signature dès le début de la démarche, point sur lequel vous nous avez considérablement aidés. Plusieurs amendements, qui s’inscrivent parfaitement dans la logique du texte, ont d’ailleurs été déposés au nom de la commission sur votre initiative.
Je tiens également à vous remercier, madame Debré, de votre soutien dynamique ; vous avez en effet évoqué un texte « équilibré, positif et incitatif ».
Mme Isabelle Debré. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je reviendrai également sur les exigences que vous avez évoquées en matière de formation professionnelle, qui sont parfaitement justifiées.
Je souhaite également remercier M. Seillier, qui a eu tout à fait raison de rappeler les principes du préambule de la Constitution de 1946, que chacun d’entre nous devrait relire, tant ce texte fonde les vrais principes d’une politique sociale et de solidarité.
M. Guy Fischer. Ce texte est fondamental !
M. Jean Desessard. Des remerciements pour la droite et pour le centre, mais nous ? Vous nous radiez ? (Sourires.)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, si l’archaïsme de vos idées vous conduit à être contre ces principes, cela pourrait bien vous arriver, en effet ! (Nouveaux sourires.) Mais je n’ose même pas l’imaginer…
Madame Debré, vous avez notamment insisté sur la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC et sur les objectifs que nous nous sommes assignés dans ce domaine et que nous ne devons pas perdre de vue.
Derrière la mise en place du réseau de guichets uniques, il faut également voir la simplification des démarches, la rénovation de l’offre de services et l’accompagnement renforcé. Sur ce dernier point, et contrairement à ce que j’ai pu entendre ici, ce travail a commencé !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Nous n’attendrons par le 1er janvier 2009 pour entamer ce travail d’amélioration. Notre logique n’est pas abstraite, et nous ne nous contentons pas de sanctuariser les évolutions prévues dans des textes ! Le travail concret d’amélioration du service rendu aux usagers d’un service public se fait d’abord sur le terrain, et il suffit de pousser la porte des guichets de l’ANPE pour s’en rendre compte.
M. Seillier, qui connaît la réalité de la précarité, pour avoir œuvré sur ces sujets depuis de nombreuses années au travers de son engagement politique, a rappelé également, comme Mme David, les enjeux de la formation.
Ils sont effectivement essentiels. Or de tous les gouvernements qui se sont succédé depuis une vingtaine d’années, mesdames, messieurs les sénateurs, très peu ont eu le courage de s’attaquer à cette vache sacrée de la formation professionnelle.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. À vrai dire, ce gouvernement est le premier à ouvrir véritablement le dossier. (M. le président de la commission des affaires sociales applaudit.)
Mme Isabelle Debré. Il serait temps !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je ne doute pas que nous bénéficierons à cette occasion d’un soutien actif et constructif de votre part, mesdames, messieurs les sénateurs. En effet, le but est, d’une part, de diminuer les dépenses qui n’aboutissent pas réellement à améliorer la formation sur le terrain, d’autre part, de mieux orienter les financements vers ceux qui en ont besoin, à savoir les demandeurs d’emploi, les salariés peu qualifiés, les seniors, les employés des PME ou des TPE, et, enfin, tous ceux, sur nos territoires, qui peuvent être frappés par une situation de reconversion industrielle douloureuse.
M. Jean-Pierre Fourcade et Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Vous avez raison de le souligner, ce gouvernement a entrepris dans le même temps d’améliorer la formation professionnelle. Un groupe de travail piloté par Pierre Ferracci a tenu mardi sa dernière réunion. Avec Christine Lagarde, nous organisons le 10 juillet prochain une réunion quadripartite pour lancer les négociations sur ce thème.
Monsieur Seillier, vous avez également évoqué les maisons de l’emploi. Il faut assurer leur complémentarité et leur articulation avec la colonne vertébrale que constitue le service public de l’emploi.
Vous avez enfin évoqué les créations d’entreprises par des demandeurs d’emploi. En 2007, sur 321 000 entreprises créées, un tiers sont le fait de demandeurs d’emploi. Et le Gouvernement n’a pas attendu les textes pour rendre ces améliorations opérationnelles ! Dans le projet de loi de modernisation de l’économie, le dispositif d’accompagnement du créateur d’emploi est considérablement renforcé.
J’en viens maintenant à l’intervention de Mme Le Texier, qui, par un sens de la pondération et de la modération, dont, je le sais, elle est coutumière, a retenu mon attention. (Sourires.) Cherchant constamment à éviter la caricature, elle s’est placée dans une perspective très équilibrée, et j’y ai été sensible. (Rires sur les travées de l’UMP.)
Je ne sais pas si c’est Descartes ou les farces de Molière qui ont le plus inspiré son discours truffé d’allusions littéraires. En tout état de cause, j’y ai vu la patte d’un certain Karl Marx, avec un raisonnement de facture très xixe siècle en termes de rapports de force. (Rires sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.- Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean Desessard. C’est tout le problème, le XIXe siècle : vous nous y ramenez !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Plus sérieusement, permettez-moi de vous dire, madame la sénatrice, que j’ai été quelque peu choqué par votre présentation des emplois non pourvus ou des « métiers en tension ».
Je vous rappelle que 1,8 million de personnes travaillent dans le secteur du BTP, notamment des artisans, qui croient à la valeur de leur métier. Que vous présentiez ces emplois comme sans avenir ou de second ordre m’a heurté.
La banque, l’assurance, le secteur informatique, ou celui des services à la personne, qui englobent d’autres « métiers en tension », peuvent-ils être caricaturés de cette manière ? Les ingénieurs méritent-ils la diatribe dans laquelle vous vous êtes lancée ? S’agit-il de domaines sans avenir, de métiers et d’emplois de seconde zone ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Au contraire !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Des millions de nos concitoyens construisent jour après jour leur avenir dans ces secteurs d’activité, et je pense qu’ils méritent notre considération.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Vous avez cité des chercheurs, notamment Carole Tuchszirer, laquelle n’est pas réputée pour son sens de l’ouverture. Personnellement, plutôt que des travaux de recherche, je préfère partir des réalités concrètes, que je connais mieux.
Au titre de ces réalités concrètes, je citerai tout d’abord la modernisation du service public de l’emploi, que nous avons entamée, avec d’abord la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC, l’amélioration de l’offre de services pour les seniors, qui est opérationnelle depuis le 1er janvier et qui permet un meilleur accompagnement de ces demandeurs d’emploi, ou encore les progrès accomplis en termes de mobilité.
Je pourrais également citer la loi portant modernisation du marché du travail ou la loi relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi. Je regrette que vous n’ayez pas voté ces lois, qui permettent précisément des améliorations concrètes du service public de l’emploi.
Mme Raymonde Le Texier. Vous avez repoussé nos amendements !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Vous avez également fait allusion à l’équilibre du dispositif. Je le dis clairement, il s’agit de mieux accompagner chaque demandeur d’emploi par le biais du projet personnalisé qui sera défini avec lui.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons effectivement l’intention de mieux contrôler les fraudeurs.
M. Jean Desessard. De qui parle-t-on ? De ceux qui travaillent au noir ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je ne peux pas me contenter d’un discours qui consiste à dire : « Circulez, il n’y a rien à voir ! Laissons donc les abus se poursuivre. » Les fraudes, même si elles sont minoritaires, méritent notre attention ; c’est une exigence au regard de l’équité.
Enfin, vous avez écarté d’un revers de main toute comparaison européenne, considérant que ni la Suède, ni le Danemark, ni la Belgique, ni l’Espagne, ni l’Allemagne, ne méritaient la moindre attention de notre part. Pour vous suivre dans des métaphores littéraires qui vous sont chères – j’ai d’ailleurs pu apprécier à cette occasion votre sens de l’humour – il s’agit moins de L’Élégance du hérisson que du Syndrome de l’autruche ! (Sourires.)
Il vaut mieux, de ce point de vue, s’ouvrir quelque peu aux réalités et aux frontières européennes, car nous ne pouvons pas nous contenter du discours de ceux qui ne veulent rien faire, rien changer. Une telle vision est trop conservatrice, alors que nous avons besoin d’adapter notre représentation de l’accompagnement du demandeur d’emploi.
Monsieur Desessard, …
M. Jean Desessard. Vous pouvez évoquer, en ce qui me concerne, le xviie siècle ! (Rires.)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Si cela vous remet sur le chemin des Lumières, ce sera avec plaisir, monsieur Desessard ! (Nouveaux rires.)
Vous avez tout d’abord fait allusion au contrôle sur les entreprises.
C’est vrai, il faut un meilleur encadrement des stock-options. Cela tombe bien, la loi TEPA y a contribué ! C’est vrai, nous devons continuer de travailler sur la question des parachutes dorés, parce qu’ils peuvent être très choquants aux yeux de nos concitoyens. C’est pour cette raison que Xavier Bertrand œuvre à la mise en place d’un meilleur encadrement de ces « parachutes ». Là encore, si la situation évolue, tel n’avait pas été le cas au cours de ces dernières années, quel que soit d’ailleurs le gouvernement en place.
S’agissant des offres d’emploi non pourvues aujourd’hui dans notre pays, vous m’avez demandé comment nous arrivons au total de 500 000. Sachez que nous nous appuyons sur deux évaluations. La première est effectuée à partir de bureaux tests de l’ANPE et des ASSEDIC, qui permettent de vérifier qu’un certain nombre d’offres d’emploi ne trouvent pas preneur. La seconde est tirée des déclarations relatives au contrôle des offres d’emploi, qui permettent de suivre les offres dans le temps.
Ces deux évaluations sont concordantes et confortées par une évaluation à l’échelle nationale conduite voilà quelques années. Elles permettent d’affirmer que 400 000 à 600 000 offres d’emploi ne sont pas pourvues.
S’agissant des grands principes que vous avez posés, et que j’ai trouvés intéressants pour la réflexion intellectuelle, quand vous avez dénoncé la tendance au productivisme, affirmé la nécessité d’une meilleure solidarité Nord-Sud et Est-Ouest ou encore du développement d’une logique de travail pour tous, ils me semblent un peu éloignés des réalités de terrain, des réalités quotidiennes de chaque demandeur d’emploi.
Je me permets de vous le dire, nous avons effectivement besoin d’une vision politique, mais celle-ci ne peut pas se résumer uniquement à l’assistance pure, elle doit également reposer sur une conception de la solidarité fondée sur un meilleur équilibre entre les droits et les devoirs. Sinon, nous prenons collectivement le risque qu’un certain nombre de nos concitoyens, qui travaillent ou qui cherchent effectivement un emploi, perçoivent ce système, où l’on ne recherche jamais ceux qui abusent, comme profondément inéquitable.
Nous avons besoin de réintroduire cet équilibre, et de montrer à l’immense majorité des demandeurs d’emploi que nous reconnaissons leurs efforts, en refusant de cautionner les abus, fussent-ils le fait d’une minorité.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
Mme Isabelle Debré. Absolument !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Madame David, vous avez rappelé que l’objectif était de revenir au plein emploi en 2012, date qui correspondra à la fin du mandat du Président de la République, c'est-à-dire de la période sur laquelle nous pouvons prendre des engagements. Comme M. le président de la commission le rappelait tout à l’heure, nous ferons alors le bilan de l’exercice pour lequel les Français nous ont fait confiance, et nous présenterons des résultats.
S’agissant des créations d’emploi, permettez-moi de rectifier le chiffre que vous avez donné, ce qui me permet de montrer à quel point la situation de l’emploi est meilleure qu’elle n’a jamais été : ce ne sont pas 300 000 emplois nouveaux qui ont été créés, mais bien 380 000, madame David.
Ces chiffres sont ceux de l’INSEE, confortés à la fois par l’ANPE et par les statistiques du Bureau international du travail.
Nous ne sommes pas d’accord sur tout, madame David, mais vos interventions étaient constructives et intéressantes sur au moins trois points.
S’agissant des comparaisons internationales, vous avez raison de souligner que l’Allemagne a adopté un système beaucoup plus dur que celui que nous proposons. C’est précisément pour éviter un certain nombre de déviations du système allemand…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. …que nous avons choisi un dispositif beaucoup plus équilibré et plus proche de ce qui se pratique notamment dans des pays comme la Suède, la Norvège ou le Danemark.
Vous aviez déjà attiré mon attention au cours des auditions de la commission sur les offres d’emploi collectées, et je trouve que vous avez raison. Nous devons travailler conjointement sur ce point, dans le cadre du dialogue entre le service public de l’emploi et les entreprises, afin de veiller à ce que les offres d’emploi soient adaptées et ne soient pas fictives. À cet égard, il me semble que nous pouvons faire un bout de chemin ensemble.
Il faut, bien sûr, être attentif à la qualité des emplois qui sont proposés. Il est hors de question d’acheter une amélioration de l’emploi au prix de plus de précarité. Deux indicateurs, notamment, nous permettent d’en juger sur la base de résultats clairs, le nombre de CDD et le recours à l’intérim. Le nombre de CDD augmente-t-il ces dernières années ? Non ! Le recours à l’intérim s’est-il accru ces dernières années ? Non ! Donc, à ce stade, mais cela appelle toujours une grande vigilance de notre part, l’amélioration de l’emploi ne s’est pas traduite par plus de précarité.
Les propos de John Morley que vous avez cités sont intéressants, ils rappellent un principe de bon sens : il n’y a rien de pire pour quelqu’un que de ne pas avoir d’emploi. Nous devrions mûrir cette citation.
Enfin, je remercie Mme Dini de la précision et du caractère équilibré de son intervention, ainsi que du soutien qu’elle apporte au projet de loi. Le fait d’entamer courageusement la fusion entre l’ANPE et les ASSEDIC ouvre, vous avez raison, madame le sénateur, beaucoup de perspectives en termes d’amélioration du service public de l’emploi. Certaines sont déjà opérationnelles à l’heure où nous parlons.
Vous avez rappelé aussi à quel point l’effort budgétaire consenti par l’État et par la solidarité nationale, fût-ce par un dispositif d’assurance, est important. La dotation de l’État au budget pour l’ANPE est de 1,5 milliard d'euros. Il est donc normal de demander en contrepartie des recherches d’emploi actives.
Vous avez rappelé à juste titre le principe de bon sens qui est au cœur de notre projet de loi, celui de l’équilibre des droits et des devoirs. Permettez-moi, pour conclure, de le résumer en ces termes : mieux accompagner les demandeurs d’emploi, mieux contrôler ceux qui profitent du système ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)