Article 45
I. - Le I de l'article 30-1 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase du premier alinéa, les mots : « avant le 1er juillet 2007 » sont supprimés ;
2° Dans la dernière phrase du premier alinéa, les mots : « pour une durée de deux ans » sont remplacés par les mots : « jusqu'au 30 juin 2010 » ;
3° La dernière phrase du dernier alinéa est ainsi rédigée :
« Dans tous les cas, un site ne pourra plus être alimenté au tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché à compter du 1er juillet 2010. »
II. - Dans le II de l'article 15 de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie, l'année : « 2008 » est remplacée par l'année : « 2009 ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. L’Assemblée nationale a proposé de proroger le tarif dit TaRTAM jusqu’au 30 juin 2010 et d’en ouvrir le bénéfice à toutes les entreprises qui le souhaitent, sans aucune discrimination.
Si nous approuvons les attendus de cette proposition, comment ne pas y voir un aveu d’échec de la libéralisation dans ce secteur si particulier ?
Après avoir fait voter des lois de déréglementation et d’ouverture à la concurrence du secteur de l’énergie, le Gouvernement est obligé de constater que, loin de créer une saine émulation entre les entreprises, comme il l’annonçait, ces politiques ne profitent pas aux usagers, particuliers ou entreprises.
Comment ne pas constater, en effet, la hausse vertigineuse et continue des tarifs sur le marché dit « libre » ?
Le facteur qui avait conduit, en 2006, à la création de ce tarif spécial, c’est-à-dire la hausse de 170 % du tarif libre, n’a fait qu’empirer. En 2006, le coût du mégawattheure était de 60 euros. Il atteint désormais 80 euros, soit une augmentation de 260 % depuis 2003.
Pourquoi un tel bond ? La création d’un marché boursier énergétique oblige les entreprises à faire des profits : c’est l’exigence des actionnaires !
De plus, le prix de marché de l’électricité est fixé à partir du coût de production de l’installation la plus obsolète et souvent la plus polluante, très éloigné des coûts réels moyens de production.
La mission d’information sur la sécurité d’approvisionnement considérait que « ce fonctionnement apparaît relativement aberrant puisqu’il conduit aussi bien à nier les lois de la physique que l’existence de moyens de production plus rentables que d’autres. En effet, ce modèle de marché conduit les prix à suivre des évolutions sans rapport avec les techniques utilisées par les producteurs d’électricité. »
Dans un courrier récent, l’Union des industries utilisatrices d’énergie, l’UNIDEN, revient sur cette question en soulignant la nécessité de reconnaître la particularité de la production énergétique, notamment la place de la production nucléaire dans la construction des prix de l’électricité.
Le choix de confier le nucléaire civil à une entreprise publique et la péréquation ont été particulièrement efficaces pour répondre aux besoins de notre pays.
La concurrence libre et non faussée dans le secteur énergétique est un échec cuisant, qui ne permet pas l’accès de tous à un bien essentiel et met gravement en cause la sécurité d’approvisionnement.
À ce titre, je citerai une nouvelle fois les travaux de la mission d’information, qui considère que « la libéralisation totale n’est ni le moyen adéquat, ni l’objectif souhaitable dans un domaine aussi essentiel et complexe que celui de l’électricité, compte tenu des singularités de ce bien. Ainsi, la mission estime que jusqu’à présent, le fonctionnement du marché électrique a eu des effets préjudiciables aux intérêts des consommateurs et pénalisants pour des industries soumises à une pression concurrentielle internationale.
« Elle estime donc, pour qu’une politique communautaire en la matière soit efficace et garantisse la sécurité d’approvisionnement, que cette notion de maîtrise publique doit s’imposer sans passer par l’étape funeste de la crise électrique. »
La mission considère que cette maîtrise publique passe notamment par le maintien des tarifs réglementés sans limite dans le temps. Le TaRTAM, simple mécanisme correctif, ne change donc rien sur le fond. C’est l’essence même de la libéralisation du secteur qui est néfaste pour les usagers.
En outre, le contexte international d’épuisement des ressources fossiles, l’exigence nouvelle de limiter l’émission de gaz à effet de serre sont autant de prétextes à une augmentation des tarifs. Cela explique également que très peu d’entreprises et de particuliers aient choisi d’abandonner les tarifs réglementés.
Il est clair que, en 2010, date d’expiration des dispositifs spécifiques et de la disparition programmée des tarifs réglementés, les questions resteront posées.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen appellent donc de leurs vœux la mise en œuvre d’une autre politique énergétique, notamment sur le plan européen.
La première urgence réside dans l’exigence du maintien des tarifs réglementés ainsi que des contrats d’approvisionnement dits de long terme.
Il est temps de fonder la politique énergétique européenne sur des coopérations entre services publics nationaux et non sur la concurrence libre et non faussée.
Nous attendons donc un engagement fort du Gouvernement et du Président de la République – puisque la France assure la présidence de l’Union – en vue de garantir la pérennité des tarifs réglementés pour ceux qui souhaitent en bénéficier non seulement jusqu’en 2010, mais également après cette date.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 172, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le 3° du I de cet article :
3° La dernière phrase du second alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Le consommateur final d'électricité qui, pour la consommation d'un site, renonce au bénéfice de ce tarif ne peut plus demander à en bénéficier à nouveau pour la consommation dudit site. Dans tous les cas, un site ne peut plus être alimenté au tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché à compter du 1er juillet 2010. »
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Lors de l’examen du projet de loi relatif au secteur de l’énergie, en 2006, le législateur, conscient des préoccupations des entreprises fortement consommatrices d’électricité confrontées à l’envolée des prix de marché, a créé un tarif de retour, le TaRTAM. Ce tarif était offert pour deux ans aux entreprises ayant renoncé au bénéfice du tarif réglementé d’EDF et qui n’avaient plus le droit d’y revenir.
L’échéance approchant, le législateur aurait dû être saisi, à l’automne prochain, d’un rapport du Gouvernement faisant le bilan de ce dispositif et envisageant éventuellement sa prorogation.
Il est apparu aux députés que les raisons qui avaient justifié la création de ce tarif en 2006 subsistaient en 2008. Le Sénat avait au demeurant été plutôt visionnaire en la matière puisqu’il avait été très proche d’adopter, en janvier dernier, un amendement de notre collègue Philippe Marini tendant à proroger le TaRTAM.
Les prix de l’électricité sur le marché sont encore aujourd’hui au plus haut, et même supérieurs à ceux de 2006. Si la durée d’application du dispositif n’avait pas été prolongée, les entreprises se seraient heurtées aux mêmes difficultés qu’auparavant. C’est pourquoi les députés ont prévu l’application du TaRTAM jusqu’au 1er juillet 2010 et repoussé d’un an le débat parlementaire.
Il s’agit bien entendu d’une excellente initiative, et la commission spéciale ne vous propose d’y apporter qu’un correctif.
En l’état actuel du droit, rien n’empêche un consommateur de faire des aller et retour entre le TaRTAM et les offres du marché, en fonction des écarts de prix entre les deux formules. Il s’agit là d’un véritable détournement de la finalité du dispositif, et la commission propose de prohiber une telle pratique.
Par ailleurs, madame la ministre, je souhaite profiter de la discussion de cet amendement pour vous demander des précisions sur l’application du TaRTAM aux sites ferroviaires.
En effet, notre collègue Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, a été saisi des difficultés qui pourraient résulter, pour la SNCF, de la non-application de ce tarif aux sites ferroviaires. Nous vous serions donc reconnaissants de bien vouloir nous confirmer que le TaRTAM est bien applicable à tous les sites de consommation d’électricité, quelles qu’en soient la nature et les spécificités, y compris aux sites ferroviaires.
Enfin, madame la présidente, je souhaite procéder à une rectification rédactionnelle de l’amendement n° 172 en remplaçant, en deux occurrences, les mots « la consommation » par les mots « l’alimentation ». Le terme « alimentation » paraît en effet plus approprié.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 172 rectifié, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit le 3° du I de cet article :
3° La dernière phrase du second alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Le consommateur final d'électricité qui, pour l'alimentation d'un site, renonce au bénéfice de ce tarif ne peut plus demander à en bénéficier à nouveau pour l'alimentation dudit site. Dans tous les cas, un site ne peut plus être alimenté au tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché à compter du 1er juillet 2010. »
Le sous-amendement n° 860 rectifié, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
A - À la fin du dernier alinéa de l'amendement n° 172 rectifié, remplacer la date :
1er juillet 2010
par la date :
1er janvier 2011
B - En conséquence, au début de cet amendement, insérer un I ainsi rédigé :
I - Dans le 2° du I de cet article, remplacer la date :
30 juin 2010
par la date :
31 décembre 2010
C - En conséquence, faire précéder le premier alinéa de cet amendement de la mention :
II
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Ce sous-amendement est la manifestation d’une certaine mauvaise humeur ! (Sourires.)
En effet, au mois de janvier dernier, j’avais proposé, avec M. Jean Arthuis et plusieurs autres collègues, dont M. Gérard Longuet me semble-t-il, de prolonger l’existence du TaRTAM. Le Gouvernement s’était alors opposé à notre amendement et avait supplié le Sénat de ne point voter cette prolongation.
Quelques mois s’écoulent, et qu’advient-il ? Nos collègues députés prennent la même initiative, mais eux obtiennent un avis favorable !
M. Jean Desessard. Ils ont fait de la cavalerie !
M. Philippe Marini. Cela me paraît mériter, même à cette heure tardive,…
M. Serge Lagauche. Des excuses !
M. Philippe Marini. … que je manifeste un peu de mauvaise humeur !
Néanmoins, là n’est pas l’essentiel, et si le sous-amendement prévoit une prolongation de six mois supplémentaires du tarif, c’est surtout, madame le ministre, pour que puisse être abordée une nouvelle fois la question de fond.
Les directives européennes sur le marché de l’énergie conduisent de plus en plus à une aggravation des écarts entre les tarifs réglementés et les tarifs définis par le marché. Or la France, dont le mix énergétique repose essentiellement sur le nucléaire, se trouve plus pénalisée que les autres pays.
M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Bien sûr !
M. Philippe Marini. Le raisonnement est bien connu : si le tarif de marché issu du système des directives est appelé à s’appliquer à tous les utilisateurs, aussi bien domestiques que professionnels, cela aboutira à créer une rente absolument considérable et, probablement, pour une large part injustifiée, au profit d’une seule entreprise.
Par ailleurs, alors que notre pays a consacré des efforts publics extrêmement importants à la création de son industrie électronucléaire, les usagers, tant domestiques que professionnels, ne bénéficieront pas des avantages, pour les uns en termes de pouvoir d’achat, pour les autres en termes de compétitivité, qui devraient être liés aux résultats extrêmement positifs de la politique d’indépendance énergétique suivie par la France sous la Ve République.
Aussi, madame le ministre, je m’étonne beaucoup qu’en ce début de présidence française de l’Union européenne cette question ne soit pas clairement posée dans toute son ampleur et que l’on procède par « rustines », comme nos collègues députés ont pu le faire : de six mois en six mois, nous risquons de devoir reprendre le même débat.
Néanmoins, Mme Beaufils n’a pas tort – je dois l’avouer, moi qui suis souvent en opposition tout à fait frontale avec elle ! – de souligner que la compréhension de ce que sont, de ce que peuvent être, de ce que vont devenir les tarifs réglementés est un vrai sujet de débat et que dire la vérité, en ce domaine, n’est pas simple.
Madame le ministre, pourriez-vous nous indiquer quelles sont, en ce début de présidence française de l’Union européenne, les intentions du ministre chargé de l’industrie quant au devenir du système tarifaire de l’énergie ?
Mme la présidente. L'amendement n° 339, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
I. – Dans le 2° du I de cet article, remplacer les mots :
jusqu'au 30 juin 2010
par les mots :
jusqu'au 31 décembre 2010
II. – Dans le second alinéa du 3° du même I, remplacer les mots :
1er juillet 2010
par les mots :
1er janvier 2011
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur Marini, il n’est pas rare, dans cette maison, que l’on ait le tort d’avoir raison trop tôt !
Mon amendement et votre sous-amendement se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Je serais absolument incapable, à une heure normale, de le défendre aussi bien que vous ; à cette heure tardive, j’y renonce complètement et je me rallie à votre sous-amendement. (Sourires.)
Mme la présidente. L'amendement n° 339 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 860 rectifié ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Pour calmer la mauvaise humeur de notre collègue Philippe Marini (Sourires.), mais surtout pour lui indiquer qu’elle partage son point de vue, la commission a émis un avis favorable sur le sous-amendement n° 860 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. L’avis du Gouvernement est favorable sur l’amendement n° 172 rectifié. Je remercie Mme Lamure de l’avoir présenté, car il vise à rectifier une conséquence de l’amendement adopté à l’Assemblée nationale qui ne correspondait pas à l’esprit de la loi du 7 décembre 2006.
En revanche, je voudrais engager M. Marini à retirer son sous-amendement. Ses questions sont évidemment légitimes, mais je ne suis pas sûre qu’elles puissent trouver une réponse à court terme.
Vous avez raison, monsieur Marini, de mettre en exergue l’écart croissant entre le prix de marché et le prix réglementé. L’une des raisons qui ont pu nous amener à nous montrer plus accueillants à l’égard de l’amendement présenté à l’Assemblée nationale est la persistance de cet écart et l’augmentation durable et très significative du prix de l’énergie depuis l’époque où, sur votre initiative et celle de M. le président de la commission des finances, le sujet avait été évoqué devant le Sénat.
Sur le long terme, il est clair que les investissements complémentaires qui sont actuellement en cours de réalisation, notamment avec un deuxième réacteur EPR, conduiront à la convergence – nous pouvons en tout cas l’espérer – des tarifs réglementés et des tarifs de marché.
M. Jean Desessard. Dès 2010 ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Néanmoins, à court terme, nous n’avons effectivement pas de réponse. Pour autant, devons-nous, de rustine en rustine, prolonger tous les six mois ce tarif TaRTAM qui, manifestement, n’a pas les faveurs de la Commission européenne ? Je ne suis pas sûre que ce soit une très bonne idée.
Quoi qu’il en soit, j’espère que le rapport qui doit nous être remis à une date que l’Assemblée nationale a repoussée d’un an nous permettra de disposer, avant la fin de l’année 2009, d’éléments d’appréciation suffisants pour que, dans les six mois – et non dans les douze mois – qui suivront, nous puissions jeter les bases d’une mécanique un peu plus solide et qui ne soit pas fondée simplement sur des prolongations semestrielles.
Mme la présidente. Monsieur Marini, le sous-amendement n° 860 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Je crains que nous ne soyons rattrapés assez rapidement par nos contradictions, mais je ne saurais, pas plus que Mme Goulet, les résoudre à cette heure tardive. Le sous-amendement est donc retiré. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. On remet ça dans six mois, alors ?
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 860 rectifié est retiré.
La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote sur l'amendement n° 172 rectifié.
M. Pierre Laffitte. Je voudrais revenir sur la question du très long terme, c’est-à-dire des investissements majeurs.
Que les tarifs soient régulés ou soumis à la concurrence, le problème n’est pas là : il est que, compte tenu de l’ampleur du changement de mix énergétique que nous sommes aujourd’hui contraints de préparer, la durée selon laquelle doivent être pensés l’investissement et l’amortissement est de l’ordre de la vingtaine, voire de la cinquantaine d’années.
Si l’on ajoute à cela que les membres du G 8, réunis au Japon, viennent de se donner pour horizon l’année 2050 en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il apparaît plus clairement encore que nous sommes confrontés à des phénomènes majeurs. Il en ira de même en matière de gestion de l’eau ou de lutte contre le changement climatique : les financements nécessaires seront absolument gigantesques. Il s’agit donc d’un problème de fond.
On ne peut pas conduire une politique en ne considérant que les fluctuations rapides des marchés, en particulier financiers. Il est évident, comme l’a suggéré Philippe Marini, qu’il faut profiter de la présidence française de l’Union européenne pour essayer de rompre avec certaines tendances qui sont non pas libérales, mais ultralibérales.
Aucun pays au monde, pas même les États-Unis, ne peut se permettre d’envisager des domaines aussi cruciaux que l’énergie, l’eau, la gestion de l’espace, comme le lieu d’une compétition ordinaire, à l’instar de celle qui prévaut par exemple dans le commerce des matériaux ou de biens de consommation moins vitaux, où les changements industriels s’opèrent beaucoup plus rapidement, en quelques années au maximum.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J’ai déjà eu l’occasion de dire que la réalisation d’un deuxième réacteur EPR était une mauvaise idée. De toute façon, comment peut-on croire que le réacteur EPR représentera une solution en 2010 ! Ce n’est pas possible ! Comme l’a rappelé M. Laffitte, il faut, en la matière, prévoir dix, vingt, trente ans à l’avance !
Le journal Le Monde a reproduit des propos intéressants tenus par M. Marini à propos du déficit public et de la baisse des taux de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés, notre collègue reprenant ainsi à son compte ce que nous constations l’an dernier. Aujourd’hui, il s’aperçoit que l’on pose des rustines, que l’on travaille à courte vue, que l’on ne sait pas exactement où l’on en est, que l’on n’a pas de solution… et il retire son sous-amendement.
C’est de la navigation à vue ! Des textes nous sont présentés, avec de grands effets d’annonce : vous allez voir ce que vous allez voir ! Quelques mois plus tard, on voit surtout que l’on est dans la difficulté…
Mes collègues et moi-même avons toujours été contre la privatisation du service public de l’électricité. Nous pourrions, aujourd’hui, nous réjouir d’avoir eu raison. Mais puisque ce sont nos concitoyens qui vont en faire les frais, comme toujours lorsqu’un service public est démantelé, nous ne nous réjouissons pas du tout d’avoir eu raison !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 45, modifié.
(L'article 45 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 45
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 184 est présenté par Mme Lamure, au nom de la commission.
L'amendement n° 318 est présenté par M. Revet.
L'amendement n° 731 rectifié est présenté par M. Deneux et les membres du groupe Union centriste-UDF.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 45, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le b de l'article 18 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité est rédigé comme suit :
« b) Lorsque la part relative à l'extension de la contribution est due :
« – au titre de l'aménagement d'une zone d'aménagement concerté, la part correspondant aux équipements nécessaires à la zone est versée au maître d'ouvrage des travaux par l'aménageur ;
« – au titre d'une opération ayant fait l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable, située en dehors d'une zone d'aménagement concerté, la part correspondant aux équipements mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme est versée au maître d'ouvrage des travaux par le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition. La part correspondant à l'extension située hors du terrain d'assiette de l'opération reste due par les personnes mentionnées au quatrième alinéa du présent article. »
II. – Le premier alinéa de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, en ce qui concerne le réseau électrique, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition est redevable de la part de la contribution prévue au troisième alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, correspondant au branchement et à la fraction de l'extension du réseau située sur le terrain d'assiette de l'opération, au sens de cette même loi et des textes pris pour son application. »
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, rapporteur, pour présenter l’amendement n° 184.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Le droit électrique, modifié en 2006 et en 2007, a défini avec précision ce qu’était un branchement sur les réseaux électriques existants et ce qu’était une extension des réseaux rendue nécessaire par de nouvelles constructions.
Bien qu’elles aient apporté une clarification indispensable, ces nouvelles dispositions ne sont pas entièrement en concordance avec les textes, antérieurs, du code de l’urbanisme.
Il en résulte pour les lotisseurs et les promoteurs d’immeubles importants une réelle difficulté : compte tenu de cette nouvelle définition, certains des réseaux situés à l’intérieur de leur lotissement ou de leur construction seront désormais qualifiés d’extensions, et donc mis à la charge des communes. Celles-ci, qui ne peuvent répercuter légalement cette charge sur le constructeur ou sur l’aménageur, seront donc dans l’obligation de refuser les permis de construire ou les permis d’aménager.
L’amendement n° 184 a pour objet de lever ces difficultés en unifiant les dispositions de l’article 18 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité et celles de l’article L. 332-15 du code de l’urbanisme.
Mme la présidente. L’amendement n° 318 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour présenter l'amendement n° 731 rectifié.
M. Yves Pozzo di Borgo. Il vient d’être défendu par Mme le rapporteur !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 184 et 731 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 45.
L'amendement n° 540, présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 45, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Toute coupure de fourniture en énergie est interdite. Le fournisseur ou distributeur est tenu de saisir, à compter de deux échéances impayées, la commission départementale de solidarité, qui statue sur les demandes d'aide. Les personnes qui n'ont pas accès au réseau et rencontrent des difficultés pour accéder ou maintenir leur distribution d'énergie, peuvent également saisir la commission départementale d'une demande d'aide. Le fournisseur qui procède de sa propre initiative à une coupure engage sa responsabilité pénale.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. À l’occasion de la discussion de ce projet de loi, nous souhaitons alerter le Gouvernement sur le problème des coupures d’énergie infligées aux familles les plus démunies.
La libéralisation du secteur de l’énergie, cumulée avec la privatisation en cours des entreprises historiques, le contexte international d’épuisement des ressources fossiles et son corollaire, l’augmentation des tarifs, est lourde de conséquences pour les familles les plus démunies.
Dans un récent article du Monde, le secrétaire d'État Luc Chatel nous a prévenus : dans un contexte de pénurie, il faut s’y faire, l’énergie restera un produit cher. Ce qu’il ne précise pas, c’est que cette augmentation des tarifs correspond également à une augmentation des dividendes des actionnaires des entreprises énergétiques, dont le budget de l’État a également bénéficié.
Dans ces conditions, comment ne pas évoquer le fonctionnement des fonds solidarité énergie ?
Au xxie siècle, l’existence d’un service public de l’énergie moderne passe par la garantie pour tous de l’accès à l’énergie, et pas seulement pendant la période de la trêve hivernale. Pourtant, les dispositifs actuellement prévus à l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles restent limitatifs, et l’ensemble des décrets d’application de la loi portant engagement national pour le logement n’ont pas été pris.
Par ailleurs, l’entreprise historique communique actuellement par listings les noms des mauvais payeurs aux centres communaux d’action sociale en leur demandant d’intervenir dans le règlement de la situation. Il nous semble que ce n’est pas ainsi que l’on peut régler les problèmes.
La fourniture d’électricité est pourtant un facteur essentiel de la cohésion nationale, en ce qu’elle garantit l’accès à la santé, à l’hygiène, à un confort décent. Il s’agit là d’une mission d’intérêt général justifiant l’existence d’un service public national.
De plus, la fourniture d’électricité à un tarif acceptable participe du droit au logement posé à l’article 10 du Préambule de la Constitution de 1946 et à l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.
Or les coupures d’électricité contraignent à l’utilisation de moyens de remplacement, comme la bougie, bien souvent, conduisant à une augmentation des risques d’incendie.
EDF continue de couper l’électricité à 600 000 foyers par an, à refuser un contrat à ceux qui ne peuvent plus payer ou aux occupants sans droits ni titre…
Des millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté dans notre pays et plus du quart des ménages en difficulté sont endettés à l’égard d’EDF et de GDF. Pour en avoir discuté aujourd’hui avec une personne très au fait de ces questions, je puis vous dire que, malheureusement, la situation ne fait que s’aggraver.
Il est plus que jamais indispensable que l’État prenne ses responsabilités en inscrivant dans la loi le principe d’interdiction des coupures d’énergie, sous des conditions mentionnées dans cet amendement, et le principe de la responsabilité des fournisseurs qui engagent sans consultation la procédure de coupure d’énergie.
Pour finir, je mentionnerai également l’évolution de la jurisprudence sur les arrêtés anti-coupure. En effet, celui qui a été pris par la ville de Champigny-sur-Marne en 2005 a été jugé légal par le tribunal administratif de Melun le 16 mai 2007. Il serait donc opportun que le législateur s’inspire de cette décision courageuse et progressiste.