M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-2 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-151 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° I-2.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s’agit là encore d’un amendement de suppression.
L’article concerné introduit deux nouveaux régimes fiscaux dérogatoires à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés au profit des contribuables et des entreprises souscrivant au capital de sociétés qui ont pour activité exclusive le financement de projets économiques dans les pays en développement.
Madame la ministre, que l’on ne se méprenne pas sur notre démarche ! Aussi respectable et intéressante que soit l’initiative de l’Assemblée nationale, deux dispositifs récents, le compte d’épargne pour le codéveloppement et le livret d’épargne pour le codéveloppement, nous semblent déjà s’inscrire dans la même logique.
Nous ne voyons pas d’inconvénient à ce que des mesures non encore appliquées soient remplacées par d’autres, mais pourquoi empiler en moins d’un an trois dispositifs de même finalité, dont chacun engendre une petite dépense fiscale ? Faut-il recourir à un compte d’épargne ou à un livret d’épargne ? Faut-il mettre en place un dispositif qui semble dupliquer ce qui existe, dans d’autres domaines, avec par exemple les Sofica ou les Sofipêche ? Après tout, je n’en sais rien, et la plupart des membres de la commission des finances – à l’exception de Michel Charasse – ne sont guère spécialistes en matière d’aide au développement.
Cependant, madame la ministre, ce qui nous interpelle, c’est cette accélération de l’imagination en matière de dispositifs fiscaux, alors que l’on a déjà prévu des mesures qui ne sont pas encore appliquées.
Tel est le débat que nous avons voulu ouvrir en présentant cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° I-151.
M. Bernard Vera. Il faut que nous évitions, dans un paysage fiscal déjà miné par la dépense, d’en rajouter encore !
C’est pourtant ce que prévoit cet article 2 ter, qui tend à créer une réduction d’impôt pour les investissements des contribuables français dans les pays en voie de développement.
Le présent article vise, lui aussi, une forme de cas d’espèce. Quand on connaît le faible nombre de contribuables qui recourent au dispositif intéressant l’outre-mer, on peut craindre que ces dispositions ne concernent que très peu de monde.
Tout donne à penser qu’il s’agit là d’un amendement de commande. Ce n’est pas admissible.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne comprends pas l’allusion !
M. Bernard Vera. Enfin, comme le souligne le rapporteur général, il existe déjà, avec le livret d’épargne pour le codéveloppement, des outils pour aider au financement des projets de développement dans les pays les moins avancés.
Franchement, créer une niche fiscale de plus, sous prétexte d’aider au développement des pays du Sud, au moment où la France s’apprête précisément à réduire l’aide publique au développement, est-ce bien sérieux ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur général, je vais essayer de vous amener à retirer votre amendement et de convaincre la Haute Assemblée de l’efficacité du mécanisme que nous voudrions mettre en place.
Je vous le concède, monsieur le rapporteur général, il s’agit d’un dispositif complémentaire, qui vient s’ajouter au compte d’épargne pour le codéveloppement et au livret d’épargne pour le codéveloppement, récemment institués et dont nous ne sommes pas assurés du succès. Outre que ces deux instruments ne rencontrent pour l’instant qu’un intérêt tout à fait mitigé, ils s’adressent à une population différente.
Le Sofidev est un avantage fiscal qu’il est proposé d’instaurer en faveur de sociétés qui financent des projets de développement. C’est en fait une incitation à destination de tous les contribuables, au-delà des nationaux de tel ou tel pays d’Afrique, qui ont la possibilité d’utiliser le compte d’épargne ou le livret d’épargne pour le codéveloppement.
Ce mécanisme s’adresse donc à tous ceux qui souhaitent investir, dans le cadre d’une solidarité Nord-Sud, dans des produits d’épargne intermédiés comportant un risque en capital et une perspective de profit. En d’autres termes, il s’agit d’encourager des contribuables français, quels qu’ils soient, à investir dans des parts en capital de sociétés qui vont exercer leurs activités dans des pays du Sud, pour l’essentiel des pays africains.
C’est un bon outil, d’abord parce que son champ d’application est large, ensuite parce qu’il correspond très précisément à la politique de codéveloppement promue par le Président de la République dans le discours qu’il a prononcé au Cap, en Afrique du Sud. À cette occasion, il a vivement incité les sociétés privées à participer au développement des pays en question, plutôt que de préconiser le recours aux modalités traditionnelles de l’aide au développement, qui excluent les partenaires privés.
Ce dispositif fait l’objet d’un encadrement : subordonné à un agrément, son application sera évidemment limitée dans le temps. Ses effets seront mesurés grâce à la remise d’un rapport dressant le bilan d’activité des sociétés financées. Il ne s’agit donc pas d’ouvrir un guichet pour une durée indéfinie sans rien contrôler.
Cet instrument financier constitue une tentative pour mettre en œuvre la politique française de codéveloppement, en associant des capitaux privés et des initiatives locales, dans des territoires qui ont besoin de se développer économiquement, à une période où les moyens financiers disponibles pour le soutien aux pays en développement par le biais de l’aide traditionnelle au développement ne sont pas absolument pléthoriques. Je vous rejoins sur ce point, monsieur Vera.
Il me paraîtrait donc utile d’associer financement public et capitaux privés. C’est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur général, je vous invite à retirer l’amendement n° I-2, au bénéfice de la tentative que nous présentons. Pourquoi ne pas essayer ? Si seulement cela pouvait marcher !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame le ministre, la commission des finances est naturellement très attentive à tout ce qui peut contribuer au développement de pays qui ont tant besoin d’améliorer les conditions de vie de leurs habitants.
Cela étant, le procès que nous faisons à nos pratiques budgétaires est d’être celles d’un État impécunieux qui, après avoir proclamé sa vertu en indiquant comme objectif, pour la progression des crédits budgétaires, le zéro volume, n’hésite pas, pour donner corps à ses ambitions, à créer de nouvelles niches fiscales. En voici un bel exemple !
Par ailleurs, quels sont les pays d’investissement en l’occurrence ? On ne peut pas, d’un côté, déplorer les délocalisations d’activités, par exemple vers les pays du Maghreb, et, de l’autre, y apporter un encouragement supplémentaire en incitant, au travers d’une disposition de la loi de finances, à produire hors du territoire national !
On nous propose même ici que notre budget national contribue à la création d’entreprises en dehors de nos frontières. Êtes-vous sûre, madame le ministre, que nous en ayons vraiment les moyens ? Êtes-vous sûre que nous pourrons vraiment canaliser ce mouvement, le contrôler ? Ne sommes-nous pas, une fois de plus, devant une contradiction difficilement surmontable ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je crois qu’il faut poursuivre la réflexion sur ce sujet, encore très imparfaitement étudié, et résoudre certaines contradictions. M. Arthuis vient d’ailleurs d’en relever une, tout à fait fondamentale. Quels sont les objectifs ? De quels territoires s’agit-il ? De quelles branches d’activité ? De quelle nature d’activité ?
Je dispose d’une première réponse, sans doute incomplète, sous la forme d’une brève liste de quelques investissements éventuels transmise par l’un des promoteurs de cette idée.
Cela mérite intérêt, mais l’idée est-elle de nature à justifier une incitation fiscale au moment où, précisément, notre dépense fiscale devrait être gérée aussi rigoureusement que notre dépense budgétaire ? Je n’en ai pas été convaincu à la lecture de ces projets. Il me semble plus raisonnable de différer notre vote sur le dispositif préconisé et de prendre le temps d’y réfléchir.
Au demeurant, l’Agence française de développement, l’AFD, a une filiale, Proparco – pour « promotion et participation pour la coopération » –, qui peut intervenir en fonds propres, faire appel à d’autres capitaux et co-investir.
Le grand maître en la matière, notre collègue Michel Charasse, a quitté l’hémicycle, mais l’on peut se demander s’il ne faudrait pas lier les démarches, car des crédits publics sont affectés à l’AFD.
Pourquoi créer des « électrons libres » dans un domaine où nous avons une tradition de l’aide au développement et disposons déjà d’un réseau et d’instruments ?
Peut-être l’idée d’une société financière faisant appel, d’une certaine manière, à l’épargne mérite-t-elle d’être creusée, mais, de la façon dont elle est apparue et s’exprime aujourd'hui, cette idée ne me semble pas pouvoir emporter une conviction totale.
Enfin, les comptes et livrets d’épargne pour le codéveloppement sont, nous a dit Mme la ministre, des produits trop récents, pour lesquels le succès n’est pas encore suffisamment au rendez-vous.
Nous pourrions donc sans doute prendre un peu de temps, dans un esprit positif, pour nous réunir et examiner tous ces sujets en vue de parvenir à une solution « professionnelle » qui s’inscrive non seulement dans la démarche du codéveloppement – à laquelle, personnellement, je crois beaucoup –, mais aussi dans une certaine rationalité de notre politique économique et fiscale.
Par conséquent, il ne faut pas considérer, madame la ministre, l’amendement de suppression de la commission des finances comme une condamnation du dispositif, mais comme la constatation de son manque de maturité, raison pour laquelle nous ne pouvons le retirer.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur général, je ne désespère pas de vous convaincre et je veux également, monsieur le président de la commission des finances, vous apporter une réponse.
Le texte précise que les pays à destination desquels ces investissements en codéveloppement pourraient intervenir sont ceux « figurant sur une liste de pays fixée par arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé du codéveloppement, du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé du budget, et ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale », ce qui restreint déjà passablement le champ d’application.
S’agissant toujours des destinataires, le mécanisme que nous entendons instituer s’adresse évidemment aux pays d’Afrique, en particulier d’Afrique subsaharienne, car, comme l’a dit le Président de la République dans son discours du Cap sur le rôle de la France en matière de développement, c’est sur ce continent que nous souhaitons susciter et encourager l’activité, en participant au financement des entreprises créées par les nationaux de pays voulant prendre leur développement en main.
S’agissant ensuite des champs d’activité concernés, le texte est également clair : l’objectif est d’encourager non pas des placements spéculatifs, mais des sociétés exerçant « une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce qui signifie tout !
Mme Christine Lagarde, ministre. … à l’exception de la gestion de leur propre patrimoine mobilier ou immobilier ».
Il s’agit donc non pas de favoriser des mécanismes d’optimisation fiscale individuelle, mais bien de développer l’activité économique et de participer au codéveloppement des pays concernés.
Avec mes services, nous nous sommes ainsi efforcés de définir de la manière la plus professionnelle et la plus précise possible le champ d’application du texte, qu’il s’agisse des territoires ou des activités, et j’espère que nous n’avons pas complètement démérité…
Vous appelez en outre mon attention, monsieur Arthuis, sur la nécessaire rigueur en matière de dépense, tant budgétaire que fiscale.
La France a pris des engagements internationaux relatifs au financement de l’aide au développement ; que cette aide soit financée sous la forme d’une dépense budgétaire ou sous celle d’une dépense fiscale – même si, je vous l’accorde, ce n’est pas la même chose –, elle est bien mise au service de la cause en faveur de laquelle nous nous sommes engagés. Qu’elle se traduise par une diminution d’impôt ou par un engagement budgétaire, il s’agit de toute façon d’une dépense qui est prise en charge par l’État au titre de ses engagements internationaux.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, vous évoquiez l’AFD. Il est vrai qu’il serait bon que des entreprises ou des fonds puissent travailler avec sa filiale Proparco, mais il n’y a pas aujourd'hui d’incitation fiscale particulière en ce sens et, soyons très clairs, ce sont des responsables économiques des pays éventuellement destinataires du soutien au codéveloppement, c'est-à-dire des entrepreneurs des pays d’Afrique, qui nous ont contactés pour nous signaler que le système du compte et du livret d’épargne pour le codéveloppement ne fonctionnait pas et qui nous ont demandé de trouver un autre mécanisme.
C'est précisément la raison pour laquelle je me prononcerais, si d’aventure vous ne le retiriez pas, contre l’amendement de suppression de la commission des finances. J’invite le Sénat à voter en faveur de l’article 2 ter.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Monsieur le rapporteur général, autant j’ai été convaincu tout à l’heure par vos propos sur l’article 2 bis, autant je regrette que vous prôniez la suppression d’un tel dispositif, il est vrai peu classique, assez novateur et audacieux, et dont la compréhension n’est pas immédiate dans le cadre de la discussion budgétaire.
Pour ma part, au-delà du fait que, d’une manière générale, je suis favorable à tout ce qui permet d’aider les entrepreneurs et d’alléger la pression fiscale, je considère que le mécanisme qui nous est ici proposé est, pour une fois, d’une nature différente de ceux qui nous sont habituellement présentés, dans la mesure où il est beaucoup plus social qu’économique. En effet, il vise, d’une part, à aider les pays en développement, et, d’autre part, éventuellement, à aider des entrepreneurs à retourner dans leur pays pour y créer des activités économiques.
Dans ces conditions, pourquoi vouloir différer l’adoption d’un dispositif qui, tout à la fois, est de nature sociale et participe de la politique étrangère de la France ? En effet, soit le mécanisme est trop complexe pour fonctionner valablement et il n’aura alors pas une forte incidence budgétaire, soit il est novateur, original et opérationnel, auquel cas nous pourrons nous féliciter de l’avoir adopté, quitte à l’améliorer encore.
Telles sont les raisons pour lesquelles je suis a priori favorable à l’article 2 ter.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame la ministre, j’ai beaucoup d’admiration pour votre force de conviction et pour votre talent de pédagogue, mais il faudrait que, de votre côté, vous compreniez l’inquiétude de votre majorité.
Le Gouvernement nous a présenté et nous avons voté, voilà quelques semaines, dans le cadre de l’élaboration de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, un article qui prévoit que toute création d’une niche fiscale supplémentaire sera gagée par la disparition d’une autre niche. En effet, il faut tenter de mettre un terme à cette espèce de démagogie fiscale qui a cours depuis des années.
Cependant, après une première niche fiscale relative à l’intéressement, dont on nous a expliqué qu’elle était essentielle pour les PME, voilà qu’il nous est proposé d’en créer une deuxième en faveur du codéveloppement !
Le contrôle parlementaire exercé sur l’Agence française de développement laisse apparaître qu’elle n’est pas exempte de tout reproche tant dans ses décisions d’investissement que dans ses rapports avec les États. Pourquoi ne pas consacrer quelques-uns de ses crédits à l’expérimentation et au lancement de la nouvelle formule ? Si, dans un an, il apparaît que cette formule fonctionne, nous accepterons de créer un avantage fiscal supplémentaire, puisque vous nous proposerez d’en supprimer un autre…
Il serait en effet regrettable que le Gouvernement nous ait fait voter, en urgence, un texte vertueux interdisant la création de niches fiscales non financées par la disparition de niches existantes pour nous proposer, quinze jours plus tard, de déroger déjà à cette règle !
Votre majorité s’interroge : la vertu ne serait-elle qu’à usage externe et les dérapages ne se poursuivraient-ils pas en matière de niches fiscales ?
Pour sortir notre pays des difficultés qu’il connaît, nous avons besoin d’un impôt sur le revenu à faible taux et à faible progressivité,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade. … qui rapporte beaucoup plus que les 50 milliards d’euros actuels. Or on s’évertue à dynamiter toutes nos chances d’y parvenir par une série de niches et d’avantages divers ! Cela me rappelle ce que l’on faisait voilà trente ans : ce n’est pas ainsi que l’on peut gérer, au xxie siècle, un grand pays industriel, une des économies les plus importantes du monde !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je ne pourrai pas voter l’amendement de la commission des finances, cela pour plusieurs raisons.
Si les membres de la commission des affaires étrangères n’ignorent pas que le budget de l’État n’est pas dans une situation très reluisante, ils n’en regrettent pas moins les difficultés de notre pays à assurer ses engagements en matière de codéveloppement et d’aide au développement.
En rappelant à cette occasion le travail remarquable accompli par Jacques Pelletier sur ces questions, je tiens à dire que cette modeste niche revêt un intérêt majeur pour le maintien de la présence de la France et de son influence dans des territoires où, pour des raisons variées, celles-ci ne sont parfois plus perceptibles. Il est en outre extrêmement important que des entreprises françaises puissent participer aux opérations de codéveloppement.
Certes, nous n’en sommes qu’à l’article 2 ter et, comme M. Fourcade l’a souligné, il nous a déjà été proposé de créer deux nouvelles niches fiscales, mais il reste suffisamment d’articles à examiner pour nous donner l’occasion d’en supprimer à due concurrence. Je ne voterai donc pas la suppression de l’article, car toutes les opérations de codéveloppement, même si elles sont modestes, sont importantes. Il faut essayer de permettre leur réalisation.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame le ministre, ne vous méprenez pas sur nos intentions.
Je comprends bien que nous prenions des engagements en matière de politique étrangère, mais il est très important d’avoir les moyens de ses ambitions. Par conséquent, si nous faisons le choix de venir en aide à un certain nombre de pays, nous devons être capables de faire des arbitrages, de lever suffisamment d’impôt auprès des contribuables français et de leur expliquer que si nous le faisons, c’est parce que c’est l’intérêt de la France.
Or, madame le ministre, la disposition que nous examinons a été introduite par le biais d’un amendement ; si elle est à ce point importante, elle aurait pu apparaître d’emblée dans le projet de loi de finances tel qu’arrêté par le conseil des ministres !
Acceptez que nous consacrions un peu de temps à l’étude de ce dispositif. Quelle est l’ampleur des moyens nécessaires à sa mise en œuvre ? Quel « trou » sommes-nous prêts à creuser dans les prochaines recettes budgétaires pour le financer ? Quels sont les projets ? N’y a-t-il pas de risques de dérive ? Toutes ces questions justifient, convenez-en, madame le ministre, que nous prenions un peu de temps et prolongions le débat au cours de la navette, grâce à un vote différent de celui de l’Assemblée nationale.
C’est la raison pour laquelle la commission des finances maintient son amendement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-2 et I-151.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 ter est supprimé.
Articles additionnels après l'article 2 ter
M. le président. L'amendement n° I-111, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Avant le dernier alinéa de l'article 193 du code général des impôts, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les réductions d'impôt, autres que celle résultant du quotient familial mentionné à l'article 194, et les crédits d'impôt ne peuvent avoir pour effet de réduire l'impôt sur le revenu d'un montant total de plus de 7 500 €, ni de porter au-delà de ce montant la somme de l'impôt réduit et de l'impôt restitué.
« Ces dispositions s'appliquent aux avantages procurés par les réductions et crédits d'impôt sur le revenu au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1er janvier 2007. »
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Si chaque dispositif fiscal dérogatoire introduit par le législateur peut se justifier, il est choquant que des contribuables fortunés puissent, par le cumul de ces avantages, réduire considérablement leur contribution au titre de l’impôt sur le revenu.
Nous proposons donc un plafonnement global de la réduction d’impôt procurée par l’ensemble de ces dispositifs. La réduction maximale de l’impôt obtenue grâce à la combinaison de plusieurs dispositifs atteindrait 7 500 euros. Seraient exclus du calcul de ce total les effets de l’application du quotient familial. Les divers plafonds relatifs à chaque réduction ou crédit d’impôt resteraient bien sûr applicables.
Une telle mesure permettrait de limiter fortement les effets d’aubaine liés à la multiplicité des niches fiscales existantes. Il reviendrait à chaque contribuable d’arbitrer entre différents dispositifs d’incitation fiscale, en fonction de ses objectifs propres d’allocation de ses revenus.
Cette solution permettrait de parvenir rapidement à une réduction sensible du coût des dispositifs fiscaux dérogatoires, lequel s’élève, je le rappelle, à 50 milliards d’euros, si l’on additionne les dispositifs destinés aux ménages et ceux qui sont réservés aux entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour la clarté de notre discussion, il serait préférable que M. Bernard Angels accepte de retirer cet amendement et le soumette à nouveau à la discussion lors de l’examen des articles non rattachés de la seconde partie. Toute une série de propositions de cette nature seront alors débattues. La contribution de M. Angels sera, à mon sens, plus utile à ce moment-là.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Angels, maintenez-vous l'amendement n° I-111 ?
M. Bernard Angels. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-111 est retiré.
Monsieur le rapporteur général, me permettez-vous de formuler une suggestion ? Lorsqu’elle sait qu’elle sera appelée à demander le retrait de certains amendements, la commission des finances ne pourrait-elle le faire avant la séance ?
Quel que le soit le plaisir – naturellement indicible (Sourires) – que nous prenons à écouter la présentation des amendements et les avis de la commission et du Gouvernement, procéder ainsi nous ferait gagner du temps.
Cela étant, je n’ignore pas que cette observation est quelque peu impertinente, émanant d’un président de séance qui avoue son ignorance totale des questions financières, malgré un doctorat en sciences économiques ! (Nouveaux sourires.)
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, votre initiative est au contraire particulièrement bienvenue.
Lors de sa réunion, la commission des finances a effectivement décidé de demander le retrait d’un certain nombre d’amendements, mais, ayant dû interrompre ses travaux quelques minutes avant l’ouverture de la séance, elle n’a pu procéder à toutes les coordinations nécessaires.
Nous ne manquerons pas de mettre à profit votre judicieux conseil, monsieur le président, ce qui facilitera sans doute nos débats.
M. le président. Je vous remercie, monsieur le rapporteur général. Nous avons tous conscience des contraintes et des difficultés auxquelles nos débats sont soumis.
L'amendement n° I-92, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase de l'article 199 quindecies du code général des impôts, les mots : « d'une réduction d'impôt égale » sont remplacés par les mots : « d'un crédit d'impôt égal ».
II. - Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Ne s’adressant qu’aux seules personnes imposables, le mécanisme de la réduction d’impôt au titre des dépenses engagées pour l’hébergement de personnes dépendantes exclut de son bénéfice la moitié des foyers fiscaux – les plus modestes d’entre eux –, non redevables de l’impôt sur le revenu. Cela conduit à ce que le coût de l’hébergement après réduction d’impôt soit plus avantageux pour les personnes dont les revenus sont les plus importants.
Cette mesure est donc fiscalement injuste. C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à transformer en crédit d’impôt l’actuelle réduction d’impôt accordée à ce titre.