Sommaire
Présidence de M. jean-Léonce dupont
MM. Thierry Foucaud, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
3. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d'un projet de loi.
Articles additionnels après l'article 9 sexies (suite)
Amendement n° I-216 rectifié de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Pierre Fourcade, Thierry Foucaud. – Retrait.
Amendement n° I-167 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° I-45 rectifié quater de M. Gérard César, repris par la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-102 rectifié de Mme Nicole Bricq. – MM. François Marc, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos I-99 rectifié de Mme Nicole Bricq et I-168 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. François Marc, Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° I-4 rectifié bis de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos I-217 rectifié et I-218 rectifié de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur général, Jean Arthuis, président de la commission des finances ; le ministre, Michel Charasse. – Retrait des deux amendements.
Amendement n° I-169 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° I-219 rectifié de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendements nos I-35 rectifié à I-37 rectifié de M. Michel Houel. – MM. Michel Houel, le rapporteur général, le ministre. – Retrait des trois amendements.
Amendement n° I-44 rectifié quater de M. Gérard César, repris par la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-236 de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre, Philippe Adnot, Michel Mercier, Michel Charasse. – Retrait.
Amendement n° I-180 rectifié bis de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Articles 10 à 19 (examinés à la suite du débat sur les collectivités territoriales)
Article additionnel après l’article 20
Amendement n° I-105 de M. François Marc. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre, François Marc. – Rejet.
Amendement n° I-18 rectifié de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre, le président de la commission. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l’article 21
Amendement n° I-114 de M. Serge Lagauche. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Article additionnel après l’article 22
Amendement n° I-19 de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
M. Jack Ralite.
Amendements nos I-196 de M. Jack Ralite et I-221 de M. Michel Thiollière. – M. Jack Ralite, Mme Catherine Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles ; MM. le rapporteur général, le ministre, Mmes Nathalie Goulet, Nicole Bricq, M. Serge Lagauche. – Rejet, par scrutins publics, des amendements nos I-196 et I-221.
Adoption de l'article.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
4. Communication relative à une commission mixte paritaire
5. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d'un projet de loi.
Débat sur les recettes des collectivités territoriales
MM. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Pierre Jarlier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
M. Michel Mercier, Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Fourcade, Jean-Michel Baylet, Edmond Hervé, le rapporteur général, Daniel Dubois, Éric Doligé, Gérard Miquel, Philippe Dallier, François Patriat.
MM. Elie Brun, Jacques Gillot, Louis Nègre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Suspension et reprise de la séance
Mme Marie-France Beaufils.
Article additionnel après l'article 9
Amendement no I-75 de M. Gérard Miquel. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° I-130 de Mme Jacqueline Gourault. – Mme Jacqueline Gourault, MM. le rapporteur général, le ministre, Mme Nathalie Goulet. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l'article 9 bis
Amendement no I-129 de Mme Jacqueline Gourault. – Mme Jacqueline Gourault, MM. le rapporteur général, le ministre, Michel Mercier. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Articles additionnels avant l’article 10
Amendement n° I-184 de Mme Marie-France Beaufils. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° I-185 de Mme Marie-France Beaufils. – Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur général, le ministre, François Marc. – Rejet.
Amendements nos I-57 à I-59 de Mme Nicole Bricq, I-186 de Mme Marie-France Beaufils, I-126 de M. Daniel Dubois, I-249 (priorité) du Gouvernement et I-245 de la commission. – Mmes Nicole Bricq, Marie-France Beaufils, MM. Daniel Dubois, le ministre, François Marc, le rapporteur général, le président de la commission, Thierry Foucaud, Edmond Hervé, Gérard Miquel. – Retrait des amendements nos I-126 et I-245 ; adoption, après une demande de priorité, de l’amendement n° I-249 ; les amendements nos I-57, I-186 et I-58 devenant sans objet ; rejet de l’amendement n° I-59.
Adoption de l’article modifié.
Amendements identiques nos I-60 de Mme Nicole Bricq et I-187 de Mme Marie-France Beaufils. – MM. Claude Jeannerot, Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l’article.
Amendements identiques nos I-61 de Mme Nicole Bricq et I-188 de Mme Marie-France Beaufils ; amendements nos I-123, I-124 de M. Daniel Dubois et I-220 de Mme Nathalie Goulet. – MM. Claude Jeannerot, Bernard Vera, Daniel Dubois, Mme Nathalie Goulet, MM. le rapporteur général, le ministre, Mme Marie-France Beaufils. – Retrait des amendements nos I-123 et I-124 ; rejet des amendements nos I-61 et I-188 ; adoption de l’amendement n° I-220.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° I-15 de la commission et sous-amendement n° I-229 de M. Albéric de Montgolfier ; amendement n° I-189 de Mme Marie-France Beaufils. – MM. le rapporteur général, Albéric de Montgolfier, Mme Marie-France Beaufils, MM. le ministre. – Retrait du sous-amendement no I-229.
Reprise de l’amendement no I-229 rectifié par M. Jean Arthuis. – MM. le président de la commission, Jean-Jacques Jégou, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Luc Fichet, Gérard Miquel, le ministre, Jean-Pierre Vial, Mme Marie-France Beaufils. – Adoption du sous-amendement n° I-229 rectifié et de l’amendement n° I-15 modifié rétablissant l’article, l’amendement n° I-189 devenant sans objet.
Articles additionnels après l'article 13
Amendement n° I-68 de Mme Nicole Bricq. – M. Jean-Luc Fichet. – Retrait.
Amendement n° I-27 de M. Michel Doublet. – MM. Gérard Bailly, le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
M. Yves Daudigny.
Amendement n° I-190 de Mme Marie-France Beaufils. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels avant l'article 15 ou après l'article 15
Amendements nos I-191 de Mme Marie-France Beaufils et I-63 de Mme Nicole Bricq. – Mmes Marie-France Beaufils, Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet des deux amendements.
M. le président de la commission.
Renvoi de la suite de la discussion
6. Dépôt d'une proposition de loi
compte rendu intégral
Présidence de M. jean-Léonce dupont
vice-président
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour un rappel au règlement.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon rappel au règlement se fonde sur les termes de l’article 36 de notre règlement, relatif à l’organisation de nos travaux.
La nuit dernière, le Sénat, sur la proposition de M. le rapporteur général et avec une touchante connivence de la part du Gouvernement, a adopté un amendement permettant l’autoliquidation du bouclier fiscal par les contribuables bénéficiant de cette niche fiscale.
Passons rapidement sur le fait que ladite mesure n’a pas rencontré le succès escompté et qu’elle profite d’abord à quelques centaines de contribuables, qui ont perçu par ce biais une moyenne de 220 000 euros de restitution !
Ce qui est problématique avec l’amendement qui a été adopté, c’est qu’il semble parfaitement irrecevable.
Jusqu’à plus ample informé, sauf si nous ne savons pas lire le code général des impôts, le bouclier fiscal peut s’imputer tant sur les impôts d’État – impôt sur le revenu, mais surtout impôt de solidarité sur la fortune, comme cela a été prouvé dans le débat hier – que sur les recettes de la sécurité sociale et sur celles des collectivités locales, en l’occurrence la taxe foncière et la taxe professionnelle.
Or, sauf si nous n’avons pas été attentifs, rien dans l’amendement qui a été adopté ne prévoit de prise en compte des moins-values de recettes tant pour la sécurité sociale que pour les collectivités locales.
Si Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi avait été en accord avec le texte du code général des impôts, elle aurait dû demander à M. le rapporteur général de retirer son amendement pour cause d’irrecevabilité financière du dispositif prévu.
En tout état de cause, les parlementaires du groupe CRC solliciteront, sur cet article en particulier, une seconde délibération, car il ne nous appartient pas, en adoptant ce genre d’amendements, de mettre en cause les ressources de la protection sociale et celles des collectivités locales.
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Foucaud.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais rappeler à notre collègue Thierry Foucaud que l’amendement voté hier soir ne change absolument rien sur le fond par rapport au statu quo. Il ne s’agit que de dispositions relatives au paiement de l’impôt, qui ne modifient pas les droits de l’État et des collectivités territoriales bénéficiaires d’un impôt entrant dans le calcul du bouclier fiscal.
Nous n’avons donc pas innové à cet égard et les reproches formulés par M. Foucaud visent, me semble-t-il, la législation sur le bouclier fiscal dans son ensemble et non l’amendement voté hier par le Sénat.
3
Loi de finances pour 2009
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (nos 98 et 99).
Au sein de la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus à l’amendement n° I-216 rectifié, tendant à insérer un article additionnel après l’article 9 sexies.
Articles additionnels après l'article 9 sexies (suite)
M. le président. L'amendement n° I-216 rectifié, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Les articles 885 A à 885 Z du code général des impôts sont abrogés.
II - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 402 bis, 438, 520 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, plusieurs arguments ont été présentés hier lorsque nous avons abordé l’examen des amendements relatifs au bouclier fiscal.
Certains orateurs, y compris des membres de la commission, ont expliqué la nécessité du bouclier fiscal par le particularisme que représente l’ISF dans notre pays et par le fait que cet impôt, anachronique et archaïque, est spécifique à la France. Il a été rappelé que la France est la seule, parmi tous les pays développés, à conserver l’ISF.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très utile rappel !
M. Philippe Dominati. La Suède, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne l’ont supprimé. En Espagne, le processus est en route et c’est sur l’initiative d’un gouvernement socialiste.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s’agit d’un engagement bipartisan !
M. Philippe Dominati. Il n’y a qu’en France où il est absolument nécessaire, pense-t-on, de garder cette bonne idée qu’est l’ISF !
Ensuite, il a été dit que cet impôt coûtait plus à l’État qu’il ne rapportait. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) On n’arrive pas connaître exactement les chiffres, mais on pense que, pour une recette d’environ 4 milliards d'euros, le manque à gagner pour l’État est de l’ordre de 7 milliards d'euros.
Mme Nicole Bricq. Cela n’a pas été dit ici !
M. Philippe Dominati. Cela a été dit clairement ici ou là depuis des années.
Il a été décidé de créer un groupe de travail sur le bouclier fiscal et je souhaite, pour ma part, avoir des précisions sur le manque à gagner au sujet de l’ISF puisque notre pays est le seul à maintenir cet impôt.
Autre idée répandue, l’ISF est un impôt populaire : plus de 75 % des assujettis sont des foyers fiscaux modestes. La plage de l’ISF s’étend : il suffit de posséder un appartement de 70 m² dans Paris pour être considéré comme « fortuné ».
M. François Marc. Des pauvres qui paient l’ISF ! Arrêtez !
M. Philippe Dominati. Partant de là, c’est un impôt qui a tendance à s’étendre.
Enfin, dernier argument partagé au sien de cette assemblée, compte tenu des recettes fiscales rapportées par cet impôt, il est difficile, dans la situation de crise que nous vivons, de procéder à un ajustement et de se passer de cette ressource cette année ou pour le futur.
Pourtant, plusieurs membres du Gouvernement ont évoqué au cours de ces derniers mois la possibilité d’un aménagement, voire d’une remise en cause, notamment lorsque vous avez augmenté la fiscalité sur les revenus au moment de la création du RSA. Vous vous étiez appuyé sur les statistiques d’Eurostat, selon lesquelles, en France, les revenus du patrimoine sont anormalement taxés, ce qui n’est pas le cas des revenus du capital.
Partant de là, Mme Lagarde avait déclaré le 1er septembre dernier dans le quotidien La Tribune qu’une révision ferait peut-être l’objet d’un débat au Parlement. Or le débat a lieu.
Je voudrais savoir quelles mesures le Gouvernement compte prendre à long terme pour éviter une addiction à l’ISF et pour que l’on n’entende plus dire que les finances de l’État nécessitent de maintenir à tout prix cet impôt qui coûte si cher au pays.
Je ne vois rien pour l’instant hormis des déclarations d’intention, qui pourtant sont nombreuses : M. le président de la commission des finances il y a quelques jours, liant l’ISF au bouclier fiscal, M. le rapporteur général hier, plusieurs membres du Gouvernement.
Je ne pense pas avoir à dire un jour au sujet de cet impôt, qui devient un impôt populaire en frappant près de 90 % de foyers fiscaux modestes, qu’il faudrait leur donner les mêmes avantages que ceux que vous octroyez aux banques !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Les arguments de notre collègue Philippe Dominati méritent d’être entendus et versés au débat.
Nous avons eu hier plusieurs amendements visant à supprimer le bouclier fiscal en maintenant l’ISF et, ce matin, nous avons un amendement visant à supprimer l’ISF en maintenant le bouclier fiscal.
Je vous rappelle la trilogie exposée par M. le président de la commission des finances et à laquelle je souscris.
Si l’on avait une vision claire de l’avenir, il faudrait sans doute supprimer l’un et l’autre, tout en veillant à maintenir le solde des finances publiques, en tout cas à ne pas le détériorer et, par conséquent, transférer le rendement de l’ISF sur un autre impôt. Cela pourrait être la création d’une tranche supplémentaire de l’impôt sur le revenu. Ce que j’appelle la trilogie, c’est cette démarche en trois points qui nous semble pertinente sur le plan économique.
Toutefois, nous ne sommes pas en mesure de procéder pour l’instant à une telle réforme. Monsieur le ministre, nous aimerions connaître l’avis du Gouvernement et sans doute reprendrons-nous ce débat en d’autres occasions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur Dominati, il s’agit d’un débat qui revient chaque année sur tous les textes financiers. Le Gouvernement s’est déjà exprimé à multiples reprises sur le sujet. Nous avons à la fois créé et amplifié l’impact du bouclier fiscal, cela a été évoqué hier. Il y a donc bien un lien direct entre le total des impôts payés et les revenus.
Par ailleurs, l’année dernière, nous avons également permis d’affecter une quote-part très importante de l’ISF en investissement dans le capital des PME, quote-part plafonnée.
La volonté existe donc bien de convertir cet impôt en investissement, ce qui est efficace et constitue une démarche originale. C’est là un atout considérable pour notre économie et c’est en même temps pour les contribuables assujettis à l’ISF un moyen de ne pas payer l’impôt en investissant dans des placements risqués visant à aider les PME en fonds propres. Telle est la logique du Gouvernement.
L’ISF rapporte aujourd'hui près de 4 milliards d'euros. Cette ressource est indispensable à la bonne tenue de nos finances publiques. J’imagine que le débat va se poursuivre sur plusieurs sujets sur lesquels nous reviendrons. Par exemple doit-on aller plus loin dans une réforme de la fiscalité de l’épargne ? Compte tenu de l’évolution qui s’est produite dans notre pays jusqu’à présent, je vous demande de ne pas voter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. La nuit dernière, au cours de notre débat habituel sur l’impôt de solidarité sur la fortune, M. le rapporteur général a dit que le bouclier fiscal était l’enfant de l’ISF.
M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général ont défendu, à l’extérieur de cette enceinte, l’idée selon laquelle on pourrait supprimer le bouclier fiscal dès lors que l’on supprimerait l’impôt de solidarité sur la fortune et que l’on créerait une tranche supplémentaire de l’impôt sur le revenu. Mais nous n’en avons pas débattu, puisque le projet de loi de finances qui nous est présenté est muet sur ce sujet.
M. le président de la commission des finances nous a annoncé la mise en place d’un groupe de travail sur le revenu fiscal de référence, arguant du fait que certains bénéficiaires du bouclier fiscal peuvent ne pas payer l’impôt sur le revenu grâce aux niches fiscales.
Au vu de ces observations, il est évident que nous voterons contre l’amendement n° I-216 rectifié.
Toutefois, je tiens à réitérer une demande que j’ai déjà faite hier soir, et qui est restée sans réponse. Notre collègue Philippe Dominati vient également d’indiquer que l’on ne dispose pas de données chiffrées sur cette question. En tant que membres de la représentation nationale, nous ne les avons effectivement jamais eus.
Notre débat est, comme toujours, tronqué dans la mesure où nous ne disposons pas de chiffres précis. On nous avance l’argument selon lequel 70 % des personnes assujetties à l’impôt de solidarité sur la fortune appartiennent aux couches modestes de la société ! De même, selon vous, les propriétaires d’un 70 mètres carrés à Paris paieraient l’impôt de solidarité sur la fortune ! C’est se moquer du monde ! Ces personnes doivent avoir d’autres biens immobiliers ou patrimoniaux.
Monsieur le ministre, je répète ma demande, qui est de droit, puisque l’amendement relatif au dépôt d’un rapport a été adopté par le Sénat. Tant que nous ne disposerons pas de données chiffrées précises, nous pourrons débattre sans fin, puisque cette question oppose fermement l’opposition et la majorité.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. L’amendement n° I-216 rectifié pose un vrai problème. La France est le seul pays à avoir un impôt de solidarité sur la fortune et un impôt sur le revenu à faible rendement. Or ces deux caractéristiques sont plus celles d’une République bananière que celles d’un grand pays occidental affrontant avec succès la mondialisation.
Cela étant, l’amendement de M. Dominati présente l’inconvénient majeur de ne pas prévoir un gage solide : on ne peut remplacer l’impôt de solidarité sur la fortune par une augmentation des taxes sur les tabacs ou sur les alcools.
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Jean-Pierre Fourcade. Je me rallie entièrement à la position évoquée tout à l'heure par M. le rapporteur général. On peut envisager la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune à la condition de supprimer, en même temps, le bouclier fiscal et d’augmenter à due concurrence le produit de l’impôt sur le revenu soit en créant une tranche supplémentaire, soit en réduisant fortement l’ensemble des niches fiscales, ce qui, à mon avis, ne suffira pas.
Dans la mesure où l’on aura un impôt sur le revenu à grand rendement, non pas de 50 milliards d’euros, mais de 60 milliards ou 70 milliards d’euros, qui permette d’assurer la progressivité de l’impôt et de corriger un certain nombre d’inégalités actuelles, on pourra supprimer l’ISF.
M. François Marc. Faites-le !
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est la raison pour laquelle je ne voterai pas, à regret, l’amendement n° I-216 rectifié M. Dominati, qui a raison sur le plan intellectuel, mais tort sur le plan économique et financier.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Je ne reviendrai pas sur l’argumentation que j’ai développée hier soir sur cette question, mais je veux demander à nos collègues Jean-Pierre Fourcade et Philippe Dominati de cesser de citer en exemple les pays étrangers, quand cela les arrange, comme celui de l’école maternelle en Finlande pris dernièrement. Le week-end dernier, pour relancer l’économie, la Grande-Bretagne a pris la décision de baisser son taux de TVA de deux points, pour le porter aux alentours de 15 %, comme le groupe CRC vous proposait de le faire, vendredi dernier, monsieur le ministre.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Gordon Brown et Marie-George Buffet, même combat !
M. Philippe Dominati. Moi aussi, j’y suis favorable !
M. Thierry Foucaud. Voilà l’économie d’une démonstration. Si vous désirez citer des exemples, citez-les tous, et suivez-nous lorsque, dans le cadre de la relance économique, nous proposons des mesures similaires.
Mes chers collègues, faites attention ! À ce stade de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, rien n’a été fait pour la majorité des Français ! Nous avons voté – ou plutôt vous avez voté ! – de nombreuses réductions fiscales en faveur de celles et de ceux qui sont les plus nantis. Face à la situation que connaît notre pays, je serais tenté de vous suggérer d’écouter nos propositions, qui sont empreintes de bon sens pour la France et les Français.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Madame Bricq, je peux répondre sans problème aux questions que vous avez posées.
Nous avons envoyé aux deux commissions des finances du Parlement des données très précises sur la répartition du bouclier fiscal, qui ont d’ailleurs fait l’objet d’articles de presse. Mais, si vous le souhaitez, nous vous les communiquerons de nouveau.
Concernant le rapport sur les expatriés fiscaux, qui devait être remis au 30 septembre 2008, nous avons du retard, car il est actuellement en cours d’élaboration. Vous en disposerez vraisemblablement d’ici à la fin de l’année.
Mme Nicole Bricq. D’accord !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci de ces précisions, monsieur le ministre !
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement n° I-216 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président, car je présenterai ultérieurement d’autres amendements, peut-être plus raisonnables sur le plan fiscal, notamment concernant les PME. Je note que je partage le souci exprimé par M. le ministre.
M. le président. L'amendement n° I-216 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-167 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le dernier alinéa de l'article 885 A du code général des impôts est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les biens professionnels définis aux articles 885 N à 885 Q du code général des impôts sont pris en compte pour l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune.
« Lorsque le patrimoine comprend des biens professionnels, le plancher à partir duquel le tarif de l'impôt est applicable est porté à 914 694,10 euros. »
II. - Après l'article 885 U du même code, il est inséré un article 885 U bis ainsi rédigé :
« Art. 885 U bis. - Les biens professionnels sont inclus dans les bases de l'impôt pour 50 % de leur valeur. Le taux d'intégration varie pour chaque contribuable en fonction de l'évolution du ratio masse salariale/valeur ajoutée des sociétés et entreprises où sont situés les biens professionnels qu'il possède sur la base suivante :
«
Evolution du ratio Masse salariale/valeur ajoutée |
Pourcentage Taux d'intégration |
Egale ou supérieure à une évolution de 2 points |
15 |
Egale ou supérieure à une évolution de 1 point |
35 |
Egale à 1 |
50 |
Entre 1 et -1 |
65 |
Entre -1 et -2 |
85 |
Entre -2 et -3 |
100 |
Entre -3 et -4 et au-delà |
125 |
« Un décret d'application définit les modalités d'application de cette modulation. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement vise à intégrer les biens professionnels dans l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune. Le taux d’intégration de ces biens serait modulé en fonction des choix faits par l’entreprise en matière d’emploi et de salaires. Il s’agit de concevoir l’ISF comme un levier d’action pour l’emploi et contre la précarité.
En proposant cette intégration, tout en modulant les taux du barème, nous entendons atteindre un double objectif de justice et d’efficacité. Rien ne justifie que les biens professionnels ne soient pas considérés comme une richesse, au même titre que les autres types de biens.
En outre, nous souhaitons que la fiscalité contribue à la dynamique de l’emploi, à la cohésion sociale et à la réparation sociale. Nous voulons pénaliser ceux qui pratiquent une économie de rente, en laissant dormir des biens professionnels, et qui ne participent pas à l’activité économique et au développement de l’emploi.
Plutôt que de réduire la portée de l’ISF, il faut, au contraire, étendre à toutes les formes de biens l’application du principe de justice sociale et de solidarité, qui sous-tend cet impôt. Il importe d’ailleurs, à notre sens, de faire en sorte qu’il soit justement équilibré pour que cessent les inégalités dont souffrent, pour le moment, les personnes qui en sont redevables.
Qu’on le veuille ou non, l’un des principaux défauts de l’ISF est qu’il n’est pas suffisamment représentatif des inégalités réelles de fortune et de patrimoine et qu’il épargne par trop d’importants patrimoines professionnels.
De plus, depuis la loi TEPA, l’impôt est profondément perverti par des dispositifs prétendument incitatifs qui renforcent encore les inégalités entre contribuables. Ce ne sont, pour l’essentiel, que les plus gros patrimoines imposables qui tirent parti de ces niches fiscales particulières, ce qui rompt l’égalité devant l’impôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. M. Vera et ses collègues connaissent par avance l’avis de la commission des finances, puisque nous l’avons développé à différentes reprises au cours des débats antérieurs sur le même sujet.
La majorité de la commission a émis un avis tout à fait défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I-45 rectifié bis, présenté par MM. César, Pointereau, Cornu et Carle, Mmes Procaccia, Malovry et Mélot et MM. B. Fournier, J. Gautier et Bailly, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 885 H du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans les troisième et dernier alinéas, le montant : « 76 000 euros » est remplacé par le montant : « 100 000 euros » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les montants mentionnés aux troisième et quatrième alinéas sont révisés chaque année selon les mêmes modalités que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. »
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° I-45 rectifié ter, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J’aimerais interroger le Gouvernement sur la question opportunément posée par nos collègues sur la revalorisation du montant de la fraction des parts GFA, groupement foncier agricole, éligible à une réduction de 75 % de l’impôt sur le patrimoine.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Par coordination avec ce qui se fait pour d’autres produits, le Gouvernement est favorable à cet amendement raisonnable et lève le gage.
M. le président. Il s’agit donc de l'amendement n° I-45 rectifié quater, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 9 sexies.
L'amendement n° I-102 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 885 I bis du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Il s’agit, par cet amendement, de revenir de nouveau sur l’ISF, une question dont nous avons longuement débattu cette nuit et qui a déjà été évoquée ce matin avec, pour corollaire, la question du bouclier fiscal.
Je tiens à remercier M. le ministre d’avoir précisé que sera prochainement porté à notre connaissance le rapport visant à évaluer la réalité du bouclier fiscal, que nous attendons depuis un an.
Pour autant, Mme Lagarde a, une fois de plus, indiqué hier soir que le bouclier fiscal avait surtout vocation à servir les pauvres.
Mme Nicole Bricq. Les modestes !
M. François Marc. Ce seraient les gens modestes qui, très majoritairement, bénéficieraient de ce dispositif.
Or, on le sait, les 600 premières restitutions fiscales atteignent en moyenne plus de 220 000 euros ! Si, comme vous le dites, il s’agit de personnes modestes, j’ai du mal à comprendre !
Les parlementaires doivent être éclairés au plus vite sur cette réalité, car l’expression utilisée pour en rendre compte traduit une forme de subterfuge.
Il s’agit, par cet amendement, de remettre en cause les cadeaux fiscaux accordés par le Gouvernement, notamment à l’occasion du vote de la loi pour l’initiative économique et de la loi de finances de 2005, pour échapper à l’impôt de solidarité sur la fortune.
La mise en place par la loi de finances de 2006 du bouclier fiscal et son élargissement récent dans le cadre du paquet fiscal n’ont été qu’un pas supplémentaire vers le démantèlement progressif de toute imposition du patrimoine des plus aisés et vers la remise en cause de la progressivité des prélèvements obligatoires en France.
Le présent amendement vise plus précisément la possibilité d’échapper à l’impôt de solidarité sur la fortune par le biais d’un pacte d’actionnaires représentant 20 % seulement des droits d’une société et dont est membre une personne exerçant dans la société sa fonction principale.
S’appuyant sur un discours visant à « exonérer l’outil de travail », alors que tel a toujours été le cas, ce dispositif permet en fait d’échapper à l’impôt de solidarité sur la fortune dans des conditions particulièrement souples. En effet, un simple actionnaire d’une société, qui n’exerce aucune fonction dans celle-ci, peut voir ses participations exonérées, dès lors qu’il s’engage dans un pacte avec un dirigeant de la société.
Ce dispositif a été rendu encore plus avantageux dans la loi de finances pour 2006, dont l’article 26 a augmenté le taux d’exonération de la moitié aux trois quarts de la valeur des parts détenues dans le cadre du pacte d’actionnaire : ce taux de déduction est identique à celui qui était jusque-là accordé aux participations assimilées à un « outil de travail ».
Nous proposons donc de supprimer ce dispositif, qui, par sa généralisation, crée une niche supplémentaire permettant de s’exonérer de l’ISF à travers un mécanisme qui n’a absolument aucun sens sur le plan économique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il serait vraiment très regrettable, cher collègue, de suivre votre proposition, car cela contribuerait à déstabiliser le contrôle d’un certain nombre d’entreprises, notamment en cette période de crise, ce qui ne serait pas sans conséquence sur l’emploi et la poursuite de l’activité.
Selon moi, une telle voie n’est pas envisageable. Au demeurant, les engagements collectifs de conservation de la première loi Dutreil ont été un grand succès et représentent un stock de capitaux très important, donc un gage de stabilité pour les fonds propres et le contrôle des fonds propres des entreprises concernées.
Mes chers collègues, nous n’avons pas à rougir, loin de là, de ce dispositif introduit dans la première loi Dutreil. Il faut absolument le valider et repousser cet amendement avec conviction.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Mon avis est bien évidemment identique à celui de M. le rapporteur général. Le « pacte Dutreil » a assuré la stabilité de l’actionnariat, ce qui constitue un point très important : on ne peut pas y revenir, car nos entreprises ont besoin d’un actionnariat stable.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-99 rectifié est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-168 rectifié est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 885 I quater du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. François Marc, pour présenter l’amendement n° I-99 rectifié.
M. François Marc. Il s’agit par cet amendement de remettre en cause les transferts fiscaux organisés par le Gouvernement entre l’ensemble des ménages et une petite fraction de contribuables redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune, qui représente moins de 2 % des contribuables français.
L’article du code général des impôts que cet amendement vise à abroger permet à un contribuable de bénéficier d’un abattement des trois quarts de la valeur réelle de ses placements dans une ou plusieurs entreprises, à la condition qu’il y exerce ou y ait exercé des fonctions de salarié ou de mandataire social.
Plus grave à nos yeux, cette exonération est accordée pour les titres détenus depuis plus de trois ans par un mandataire ou un salarié qui quitte une entreprise pour partir en retraite.
Ce dispositif vise directement les salariés et, surtout, les mandataires ayant acquis des titres par le biais de mécanismes tels que les stock-options.
Non seulement le Gouvernement a refusé, malgré la multiplication, depuis 2002, des scandales connus du grand public de moraliser réellement ces dispositifs, mais il offre à leurs bénéficiaires de nouveaux cadeaux fiscaux.
Par cet amendement, nous proposons de supprimer cette disposition, afin de mettre fin à des situations inadmissibles.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-168 rectifié.
M. Thierry Foucaud. L’impôt de solidarité sur la fortune souffre depuis plusieurs années non seulement de sérieuses imperfections, mais aussi d’avoir été, pour des raisons purement idéologiques, progressivement dénaturé, sous prétexte de tenir compte de la spécificité de ses contribuables.
Nous avons déjà souligné le problème posé par l’absence de taxation des biens professionnels, la définition de ces termes souffrant d’ailleurs de nombreuses imprécisions. Le seul fait précis en la matière est que de très importants patrimoines professionnels échappent à toute imposition, toute la subtilité consistant parfois à assimiler comme de tels biens ce qui relève du patrimoine privé et, surtout, tout ce qui n’est que le produit d’un héritage.
D’autres mesures viennent corriger les effets du tarif de l’impôt, notamment par la grâce des dispositions de la loi TEPA, qui – on ne le redira jamais assez ! – a consisté à dépenser à perte l’argent public, denrée pourtant si précieuse !
Aujourd’hui, le produit de l’impôt est ainsi finalement corrigé de plus d’un milliard d’euros, nonobstant l’exonération des biens professionnels, qui engendre, à n’en pas douter, la principale perte de rendement de l’utile et indispensable impôt de solidarité sur la fortune.
L’application de l’article 885 I quater du code général des impôts visé par cet amendement entraîne un coût non négligeable, puisqu’il représente une dépense fiscale de 126 millions d’euros, partagée entre 9 669 ménages, ce qui situe à 13 130 euros en moyenne la remise de droits correspondante. La lecture du tarif de l’ISF nous indique que cette « moyenne » de droits à payer n’est atteinte qu’à compter d’un patrimoine de près de 2,6 millions d’euros.
Le patrimoine moyen des contribuables de l’ISF se situant autour de 1,3 à 1,5 million d’euros, on est obligé de considérer que seuls les contribuables très aisés de l’ISF sont directement concernés par l’application de cette disposition.
Ce sont donc des salariés tout à fait particuliers qui sont directement visés par l’article 885 I quater et le faible nombre de bénéficiaires du dispositif montre que, en réalité, cet article ne fait qu’offrir un avantage fiscal, une sorte d’émolument complémentaire, à des cadres dirigeants d’entreprise, à la nuance près qu’il s’agit là d’une forme de prime, payée par le Trésor public, à la détention du capital de l’entreprise.
Concrètement, cet amendement vise donc à mettre un terme à cette situation, en supprimant purement et simplement cette disposition dérogatoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L’avis de la commission ne peut qu’être défavorable.
Mes chers collègues, vous évoquez les stock-options et les grandes sociétés cotées, mais sans doute faut-il aussi se souvenir que de nombreux cadres et dirigeants de petites et moyennes entreprises sont actionnaires de leurs entreprises. Si l’on suivait votre proposition, on les pénaliserait et on réduirait leur capacité à participer, le cas échéant, à des augmentations de fonds propres. On les inciterait à céder leurs parts et on mettrait ces entreprises en état d’insécurité économique, ce qui est certainement la dernière chose à faire dans le contexte que nous connaissons tous.
Par conséquent, mes chers collègues, mieux vaut ne pas toucher à ce régime et rejeter ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. L’avis du Gouvernement est encore une fois conforme à celui de la commission. Ce dispositif a montré son efficacité. Il est très important que l’on puisse, en tant que salarié ou mandataire social, participer au capital d’une entreprise.
M. François Marc. Et pour ceux qui sont en retraite ?
M. Éric Woerth, ministre. Les dispositions en question permettent également de ne pas rompre le lien entre l’entreprise et le salarié, au moment où ce dernier part en retraite. Selon moi, il faut maintenir en l’état ce dispositif, qui a atteint son point d’équilibre.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-99 rectifié et I-168 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° I-4 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Dans le second alinéa de l'article 885 J du code général des impôts, le millésime : « 2008 » est remplacé par le millésime : « 2010 ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à tirer la conséquence de nos votes des années précédentes. Il paraît d’autant plus nécessaire que, dans la situation actuelle des marchés, la constitution de droits à retraite, par le biais, notamment, d’un PERP ou d’un PERCO, mérite d’être encouragée. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons qu’une nouvelle disposition de report puisse être prise en la matière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement note que cela a déjà été fait l’année dernière. Il émet donc un avis favorable sur cet amendement et lève le gage.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n°I-4 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 9 sexies.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune. Ils sont tous deux présentés par M. P. Dominati.
L'amendement n° I-217 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au deuxième alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 100 % ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts.
L'amendement n° I-218 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au deuxième alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 40 % ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter ces deux amendements.
M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, ces amendements, qui visent à traiter le cas particulier de la résidence principale, répondent ainsi à l’objection soulevée tout à l’heure par Mme Bricq, suivant laquelle les propriétaires d’un appartement de 70 mètres carrés à Paris disposaient d’autres biens.
En milieu urbain, mais pas uniquement, puisque l’exemple de l’île de Ré a été cité voilà quelques années déjà, les valeurs immobilières ont subi une plus-value importante, sans que les revenus des possesseurs de ces biens suivent cette même progressivité.
Ces deux amendements répondent également au souhait de la plupart des parlementaires de la majorité qui, lors des dernières élections législatives, ont pris l’engagement d’exonérer partiellement ou totalement la résidence principale du paiement de l’ISF.
Ces deux amendements sont, toutefois, différents. Le premier, conformément à l’objectif politique fixé par la majorité parlementaire, vise à soustraire totalement la résidence principale à l’ISF. Le second, en revanche, prévoit de porter l’abattement sur la résidence principale de 30 % à 40 %. Ce faisant, il entend simplement suivre le chemin emprunté par la majorité parlementaire l’an dernier, lorsque celle-ci a augmenté de 20 % à 30 % cet abattement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Malheureusement, mon cher collègue, pour les mêmes raisons que celles qui ont été avancées les années précédentes, la commission ne peut pas vous suivre.
Car, de deux choses l’une : soit l’ISF existe, soit il n’existe plus !
S’il existe, le principe d’égalité devant l’impôt, à l’égard duquel le Conseil constitutionnel est, à juste titre, particulièrement vigilant, s’applique. Ce principe signifie que, pour un même montant de patrimoine, un contribuable est libre de concentrer une grande partie de sa valeur sur sa résidence principale ou de ne pas le faire, par exemple en choisissant une résidence principale à Paris ou en s’établissant dans un département rural, où les valeurs foncières se sont nettement dépréciées.
Mme Nathalie Goulet. À tort !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il me semble qu’en l’état actuel du droit on ne peut pas aller au-delà de la décote de 30 %.
À cet égard, permettez-moi de rappeler que la seule bonne solution serait la trilogie, à savoir la suppression de l’ISF, la suppression du bouclier fiscal et le transfert du produit de l’ISF sur un grand impôt sur le revenu à large assiette, qui bénéficierait d’une vraie dynamique économique.
En conséquence, la commission souhaite le retrait de vos amendements, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Mes chers collègues, je vous prends à témoin : l’ISF est vraiment devenu d’une pratique impossible. Quelle que soit la voie que nous empruntions, nous sommes confrontés à des contradictions !
Vous entendrez certainement évoquer, de nouveau, la trilogie, qui consiste à supprimer l’ISF, à introduire une tranche supplémentaire - sans doute à 45 % - sur les revenus les plus élevés, afin de compenser la perte de recettes due à la disparition de l’ISF et, enfin, à supprimer ce bouclier fiscal dont, nous le voyons bien, la mise en œuvre constitue une injustice scandaleuse.
Au surplus, cher collègue Philippe Dominati, si vous portez à 40 % le pourcentage de réfaction de la valeur de la résidence principale, je vous laisse le soin d’imaginer la situation d’un contribuable qui aurait emprunté à hauteur de 80 % pour devenir propriétaire de sa résidence principale. Ce dernier aura alors une dette nette qui viendra en déduction de la valeur de son patrimoine soumis à l’ISF. Si, au surplus, vous l’exonérez complètement, il aura les dettes, mais il n’aura pas l’actif !
Tout cela ne tient pas. La seule issue, c’est la suppression de l’ISF, assortie de la trilogie, naturellement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Sans me prononcer sur la désormais célèbre trilogie, je rappelle que, dans le domaine de la résidence principale et de l’ISF, nous avons fait l’an dernier un progrès en portant de 20 % à 30 % le taux de l’abattement applicable sur la résidence principale.
Ensuite, je partage l’avis de M. le rapporteur général : il existe une liberté de constitution de son patrimoine. Pourquoi privilégier la résidence principale au détriment d’autres choix patrimoniaux ?
Contrairement à une idée reçue, la résidence principale ne représente que 25 % des bases imposables dans la première tranche du barème de l’ISF, et 16 % dans l’ensemble des bases. Les patrimoines ne sont donc pas majoritairement constitués par la résidence principale.
Le seuil de déclenchement de l’ISF est fixé à 770 000 euros, ce qui permet d’exonérer une grande partie des résidences principales, dont la valeur moyenne était, en 2006, de 376 000 euros – elle doit se situer aujourd’hui aux alentours de 400 000 ou 450 000 euros, ce qui reste très inférieur au seuil de déclenchement de l’ISF. Je rappelle également que le barème de l’ISF est régulièrement actualisé.
Pour l’ensemble de ces raisons, je souhaite le retrait de ces amendements, monsieur Dominati. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur les amendements nos 217 rectifié et 218 rectifié.
M. Michel Charasse. Le débat sur l’ISF, comme celui sur la TGAP, c’est tous les ans un morceau rituel du débat budgétaire ! Nous voici sur l’ISF après avoir été sur la TGAP hier soir.
On peut s’interroger éternellement sur l’ISF et nous n’avons d’ailleurs pas manqué de le faire régulièrement au Sénat depuis l’origine. Faut-il le garder ? Faut-il le supprimer ? Faut-il le remplacer par autre chose ? Est-il intelligent ? Est-il astucieux ?...
Tout d’abord, rapporté à l’ensemble des ressources de l’État, cet épouvantail devient, tous les ans un peu plus, une peau de chagrin. C’est donc toujours, et de plus en plus, beaucoup de bruit pour pas grand-chose…
Mais, surtout, mes chers collègues, actuellement, les temps sont durs pour nombre de nos concitoyens. Il est donc difficile, sur le plan tant psychologique que politique, de faire accepter aux plus modestes les mesures, pourtant nécessaires, prises pour soutenir ceux qui passent pour responsables de la situation actuelle. Dans une période aussi cruciale, l’unité nationale est plus que jamais nécessaire, notamment pour celles et ceux qui sont chargés de conduire les affaires publiques et les négociations internationales. Or l’unité nationale risque de ne pas résister longtemps à une crise profonde qui fabrique des milliers d’exclus et des nouveaux pauvres.
Je pense vraiment, cher collègue Philippe Dominati, que c’est le pire moment pour en rajouter dans ce domaine et pour faire une sorte de « provocation » involontaire. Même si l’on connaît les uns et les autres les problèmes que cet impôt peut poser, aujourd’hui personne n’a vraiment envie de pleurer sur ceux qui payent l’impôt de solidarité sur la fortune !
Par conséquent, je me permets de dire amicalement à notre collègue Philippe Dominati que, dans la période que nous traversons, nous devrions faire preuve d’un peu de psychologie et, surtout, d’une grande prudence.
Bien entendu, je ne voterai pas en faveur de ces amendements. Même si chacun ici reste libre d’agir à sa guise, je regrette cependant qu’ils aient été présentés.
M. le président. Monsieur Dominati, les amendements nos 217 rectifié et 218 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Philippe Dominati. Je les retire, monsieur le président.
Toutefois, en ce qui concerne le second amendement, je ne suis absolument pas convaincu de la pertinence du seuil juridique des 30 %. J’espère avoir l’occasion de le démontrer dans des débats ultérieurs.
Je partage le souci de M. Charasse quant au moment choisi pour discuter de ce sujet. Je crois que ce souci est partagé par M. le rapporteur général, par M. le président de la commission des finances ainsi que par le Gouvernement.
Mais, comme je l’ai déjà indiqué tout à l’heure, la conjoncture actuelle n’a pas empêché le Gouvernement socialiste espagnol de supprimer l’ISF, un impôt que nous sommes le dernier pays développé à conserver.
M. Thierry Foucaud. C’est faux !
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Michel Charasse. Les caisses de l’État espagnol sont un peu plus pleines que les nôtres, cher collègue !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais elles se vident rapidement !
M. le président. Les amendements nos 217 rectifié et 218 rectifié sont retirés.
L'amendement n° I-169 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 885 U du code général des impôts, il est inséré un article 885 U bis ainsi rédigé :
« Art. 885 U bis. - Le tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune, calculé dans les conditions prévues à l'article 885 U, est majoré de 15 % pour les trois premières tranches du barème et de 30 % pour les tranches supérieures. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Des mesures visant à soutenir l’économie viennent d’être annoncées. Naturellement, elles ont un coût !
Ainsi, alors que nous avions à peine commencé la discussion du projet de loi de finances, le Président de la République annonçait son intention de présenter au mois de janvier prochain un plan de relance de l’activité économique.
L’une des mesures-phares de ce plan serait de constituer un fonds souverain à la française, alimenté par la Caisse des dépôts et consignations via la collecte du livret A, ainsi que par l’État au travers de l’émission de nouveaux titres de dette publique.
En clair, le Gouvernement s’apprête à relancer l’activité économique en s’endettant un peu plus, d’autant qu’il s’agirait, dans la stratégie du fonds souverain, de procéder à l’acquisition de titres subordonnés à durée indéterminée, des instruments financiers qui ne donnent pas de droit de vote, mais seulement celui de recevoir des dividendes.
Une autre voie permettrait pourtant à l’État d’intervenir efficacement dans la vie économique de la nation, celle de l’accroissement des recettes fiscales.
C’est pourquoi nous proposons une recette nouvelle assise sur l’ISF. Le financement d’un plan de relance de l’emploi et de l’activité ne saurait être supporté uniquement par celles et ceux qui subissent déjà de plein fouet votre politique de régression sociale tandis que, dans le même temps, le nombre d’assujettis à l’ISF ne cesse d’augmenter. Alors qu’ils étaient 457 000 en 2006 et 528 000 en 2007, le ministre du budget a annoncé que le nombre de déclarants soumis à l’impôt de solidarité sur la fortune était désormais supérieur à 548 000, le montant total de l’impôt s’élevant, pour sa part, à 3,75 milliards d’euros.
La contribution sera donc plus facile à étaler et pourra être supportée par un nombre grandissant de redevables, grâce au caractère très dynamique de l’ISF.
Faire payer plus à ceux qui gagnent plus : ce principe nous semble juste, efficace et conforme à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Il doit s’imposer alors que, dans un contexte de récession menaçante, la pauvreté et la précarité risquent de s’étendre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission a été très intéressée de vous entendre, cher collègue, défendre l’idée d’un fonds souverain alimenté par la Caisse des dépôts et consignations à l’aide des ressources du livret A. Si je ne m’abuse, il s’agit là d’une avancée majeure de votre doctrine !
Mme Marie-France Beaufils. Voilà longtemps qu’on le propose !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il ne faut donc désespérer de rien ; les lignes peuvent bouger !
Pour en revenir au fond de votre proposition, elle ne peut être acceptée par la majorité de la commission, a fortiori dans la phase de dépréciation des valeurs des actifs immobiliers et financiers que nous traversons. Augmenter le taux au moment où l’assiette se contracte reviendrait à créer toutes sortes de problèmes et d’effets pervers sur lesquels il n’est pas nécessaire d’insister.
L’avis de la commission est donc, je vous le confirme, tout à fait défavorable, monsieur le sénateur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I-219 rectifié, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa de l'article 885-0 V bis du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il est porté à 100 000 euros pour les versements effectués entre le 1er janvier et le 31 décembre 2009 ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Cet amendement tend à soutenir l’activité économique.
Comme cela a été évoqué à plusieurs reprises, il faut choisir le bon moment pour essayer d’aborder le sujet délicat de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Un plafonnement est institué lorsque les contribuables investissent dans le capital d’une PME. Or nous avons constaté, lors de nos débats, que notre pays souffrait d’un nombre insuffisant de PME.
Le plafond actuel est quand même relativement faible. Il est fixé à 50 000 euros, ce qui, dans le capital de certaines PME, ne représente pas grand-chose.
Je propose donc par cet amendement de porter le plafond à 100 000 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement sera-t-il l’occasion pour le Gouvernement de nous rappeler le bilan, à mon sens tout à fait significatif et substantiel, de l’application de cette mesure issue de la loi TEPA du 22 août 2007 ?
En matière de financement des fonds propres des PME, c’est un levier puissant. Je pense que les chiffres le démontrent. Ils prouvent aussi que nous avons eu raison, dans cette assemblée, de privilégier l’investissement direct sur l’investissement intermédié, et de ne pas trop céder aux sirènes des professionnels de la gestion de capitaux.
Maintenant, faut-il relever ce plafond ? Un peu à la manière de Michel Charasse tout à l’heure, je pense que ni la conjoncture, ni l’état des esprits ne s’y prêtent actuellement.
Les informations que M. le ministre communiquera en réponse à Philippe Dominati pourront toutefois nourrir notre débat et, sans doute, permettre à l’auteur de cet amendement de le retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
La mesure est d’ores et déjà très efficace puisque, pour un coût fiscal d’environ 618 millions d’euros – tout n’est pas défiscalisé –, elle a permis de drainer un milliard d’euros vers les PME, dont 480 millions d’euros directement et 452 millions d’euros via des holdings ou des fonds tels que les fonds d’investissement de proximité, les FIP.
Cette mesure, efficace, je le répète, a aujourd’hui atteint son équilibre. Il ne me semble donc pas opportun de relever les seuils. Si l’on modifie sans cesse les dispositifs que nous mettons en place, il devient difficile d’en assurer le suivi.
M. le président. Monsieur Dominati, l’amendement no I-219 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Je suis surpris par l’argumentation qui m’est opposée. Monsieur le ministre, dans la mesure où il s’agit d’un dispositif efficace, pourquoi ne pas aller plus loin ?
Nous avons besoin de soutenir l’économie et notamment les PME. Nous disposons d’une mesure peu importante, mais significative et efficace. Et c’est précisément parce qu’elle est efficace que vous ne voulez pas qu’on lui donne plus d’ampleur. Ce n’est pas vraiment la réponse que j’attendais !
J’espère que lors de la prochaine présentation des mesures de soutien à l’économie en direction des PME, secteur dans lequel un effort spécifique doit être fait, le Gouvernement reverra sa position.
Cela dit, pour l’heure, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement no I-219 rectifié est retiré.
Je suis maintenant saisi de trois amendements présentés par MM. Houel et Fouché et Mme Mélot.
L'amendement n° I-37 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le b) du 3 du I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« c) La société respecte son engagement d'investir au moins 60 % de sa situation nette dans des titres de capital reçus en contrepartie de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés répondant à la définition européenne de « petite entreprise communautaire » et qui sont en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices concernant les aides d'État visant à promouvoir les investissements en capital investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006/C 194/02), et dont l'activité a démarré depuis moins de 10 ans ;
« d) La société a été reconnue par OSEO ou tout autre organisme prévu par décret comme répondant aux critères fixés par ce décret et définissant les « sociétés d'investissement d'amorçage et de premier développement. »
II. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er janvier 2010.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Houel.
M. Michel Houel. Afin d'améliorer le financement en fonds propres des sociétés en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, le présent amendement vise à élargir le bénéfice de l’avantage fiscal au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune, en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, à des sociétés d’investissement habilitées, constituées sous la forme de sociétés de capital-risque, SCR, prenant l’engagement d'investir au minimum 60 % de leurs actifs dans des entreprises cibles répondant à la définition européenne de « petite entreprise communautaire », sous réserve de la conservation des titres pendant au moins cinq ans.
Cette mesure vise à combler les lacunes que connaît la France en matière de financement des entreprises en phase d’amorçage. En effet, les acteurs institutionnels du capital investissement, qui utilisent les fonds communs de placement, les FCP, auxquels est ouvert l’avantage fiscal au titre de l’ISF, n’interviennent que sur des montants supérieurs à un million d’euros. En deçà, les seuls financeurs restent les business angels, dont le nombre est estimé entre 4 000 et 6 000 en France, soit dix fois moins qu’en Grande-Bretagne et cent fois moins qu’aux États-Unis. Ces chiffres donnent à réfléchir.
Cet amendement permet également d'aligner les avantages qui sont accordés aux souscripteurs investissant à travers des holdings SCR et les avantages qui sont octroyés aux souscripteurs investissant à travers les fonds communs. Cette « mise à niveau » est d'autant plus justifiée que les fonds communs disposent d’un autre type de contraintes : seulement 20 % à 40 % des investissements doivent être réalisés dans des PME communautaires et ces fonds disposent de vingt-quatre mois pour investir, et douze mois pour les holdings.
Afin d’inciter ces acteurs à investir dans le segment de l’amorçage, le présent amendement ouvre l’avantage fiscal au titre de l’ISF aux business angels regroupés au sein de sociétés d’investissement spécifiquement reconnues et habilitées par OSEO ou par tout autre organisme professionnel compétent prévu par décret.
M. le président. L'amendement n° I-35 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts est complété par un 4 ainsi rédigé :
« 4. Par dérogation aux dispositions du 3, la société satisfaisant aux dites conditions prévues au 3 et dont le capital est détenu par au moins cent actionnaires, peut choisir, sur option définitive et irrévocable, de fixer librement le pourcentage des sommes investies en titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1.
« Dans ce cas, les versements effectués par le contribuable qui servent de base au calcul de l'avantage fiscal sont ceux retenus dans la limite du pourcentage librement fixé tel que choisi à l'alinéa précédent.
« Le respect du pourcentage mentionné au premier alinéa est acquis, s'il est au moins égal à la fraction suivante déterminée en retenant :
« - au numérateur, le montant des versements effectués, par la société mentionnée au premier alinéa au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1, au cours d'une première période d'imposition comprise entre la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par un redevable l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par un redevable l'année d'imposition et au cours de la période d'imposition suivante. Ces versements sont ceux effectués avec les capitaux versés au cours de la première période d'imposition par les redevables bénéficiaires de l'avantage fiscal ont souscrits ;
« - au dénominateur, le montant des capitaux reçus par la société mentionnée au premier alinéa au titre de la constitution du capital initial ou de l'augmentation de capital à laquelle les redevables ont souscrit au cours de la première période d'imposition. »
II. - Après le troisième alinéa de l'article 1763 C du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'administration établit qu'une société visée au 4 du 1 de l'article 885-0 V bis n'a pas respecté le pourcentage d'investissement qu'elle a librement fixé, elle est redevable d'une amende égale à 75 % des sommes non investies au capital de sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1 de l'article 885-0 V bis, majorée de 10 %. »
III. - Les dispositions du I et du II s'appliquent à compter du 1er janvier 2010.
IV. - Les pertes de recettes résultant pour l'État des I à III ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Houel.
M. Michel Houel. La loi de finances rectificative pour 2007, dans le 2° de son article 39, a permis aux sociétés holdings de disposer d'un délai de deux années pour réinvestir les sommes reçues du redevable dans une PME.
Toutefois, le contribuable qui investit dans une société holding ne réinvestissant les sommes reçues dans des PME qu’au cours de la seconde année ne peut bénéficier de la réduction d’ISF que lors de la période d’imposition suivante.
C’est pourquoi il est proposé que les sociétés holdings dont le nombre d'actionnaires est au moins égal à cent puissent toujours disposer d'un délai de deux années pour réinvestir tout en permettant au contribuable qui souscrit à son capital de bénéficier de la réduction d’ISF au titre de la période d’imposition correspondant à son versement.
Ainsi, ces holdings professionnels disposeront d’une année supplémentaire afin de procéder à des investissements dans des PME alors qu’aujourd’hui elles ne disposent que de quelques mois, voire quelques jours pour procéder à un audit, à la négociation des conditions d’entrée dans le capital et des modalités de protection de leur investissement, et pour souscrire à l’augmentation de capital de la PME.
Cette proposition est encore plus pertinente aujourd’hui eu égard au contexte économique et financier difficile qui touche de plein fouet nos TPE et PME.
Dans ce contexte de tension économique et financière et dans le cadre du plan d’urgence d'aide aux PME engagé par le Gouvernement, le capital démarrage apparaît de plus en plus comme l’outil idoine de relance du développement économique.
Historiquement emprunté par les business angels, le capital démarrage se retrouve aujourd'hui submergé par les demandes de nombreux investisseurs désireux, il faut bien le dire, de réduire de façon substantielle leurs impositions au titre de l’ISF relatives aux nouvelles dispositions fiscales.
Or on constate aujourd'hui que, d’une part, les structures professionnelles répondant à ces critères sont rares et, d’autre part, que celles qui disposent d'un historique antérieur à la mise en œuvre de la loi TEPA sont quasiment inexistantes.
Ces holdings professionnels constituent le trait d’union entre les business angels et les acteurs institutionnels du capital investissement qui utilisent les fonds communs de placement auxquels est ouvert l’avantage fiscal au titre de l’ISF, qui n’interviennent que sur des montants supérieurs à un million d’euros dans des PME au stade du développement.
Monsieur le ministre, cette disposition ne devrait pas entraîner un surcoût pour le Trésor dans la mesure où elle n’accorde aucun avantage fiscal nouveau. Elle se limite en effet à donner une année supplémentaire aux holdings professionnels pour procéder à un investissement de capital dans les PME.
Pour toutes ces raisons, je demande au Sénat de bien vouloir adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-36 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 1 du III de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, il est inséré un 1 bis ainsi rédigé :
« 1 bis. L'avantage fiscal prévu au présent III s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
« a) La société relève du régime des sociétés de capital risque prévu à l'article 1er de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier et vérifie les conditions prévues au 1, à l'exception de celles prévues aux b), e), f) et h) ;
« b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b) du 1 ;
« c) La situation nette comptable de la société doit être représentée de façon constante à concurrence de 60 % au moins de titres de capital reçus en contrepartie de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés répondant à la définition européenne de « petite et moyenne entreprise communautaire » et qui sont en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices concernant les aides d'État visant à promouvoir les investissements en capital investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006/C 194/02), et dont l'activité a démarré depuis moins de 7 ans ;
« d) La société a été reconnue par OSEO ou tout autre organisme prévu par décret comme répondant aux critères fixés par ce décret et définissant les « sociétés d'investissement d'amorçage et de premier développement. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter du 1er janvier 2010.
III. - Les pertes de recettes résultant pour l'État des I et II sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Houel.
M. Michel Houel. Afin d’améliorer le financement en fonds propres des sociétés en phase d’amorçage, de démarrage ou d'expansion, le présent amendement vise à élargir le bénéfice de l’avantage fiscal au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Cette mesure vise à combler les lacunes que connaît la France en matière de financement des entreprises en phase d’amorçage. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, en dessous d’un montant d’un million d’euros, les seuls financeurs restent les business angels.
Cet amendement permet également d’aligner les avantages qui sont accordés aux souscripteurs investissant à travers ces holdings et les avantages qui sont octroyés aux souscripteurs investissant à travers les fonds communs. Cette « mise à niveau » est d’autant plus justifiée que les fonds communs disposent d'un autre type de contraintes : seulement 20 % à 40 % des investissements doivent être réalisés dans des PME communautaires et ces fonds disposent de vingt-quatre mois pour investir.
Afin d’inciter ces acteurs à investir dans le segment de l’amorçage, le présent amendement ouvre l’avantage fiscal au titre de l'ISF aux business angels regroupés au sein de sociétés d’investissement.
Monsieur le ministre, lors de l’examen des articles non rattachés du projet de loi de finances pour 2009 par l’Assemblée nationale, le Gouvernement a déclaré qu’il souhaitait déposer, lors de la discussion du collectif budgétaire, un amendement visant à permettre de faciliter le recours au développement des fonds propres des petites et moyennes entreprises.
Mes chers collègues, les présents amendements, dont je vous prie de bien vouloir excuser le caractère technique, sont donc l’occasion de permettre aujourd’hui au Sénat d’adopter un dispositif concret et efficace pour le développement des PME de notre pays.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission comprend l’inspiration des auteurs de ces trois amendements, mais n’est pas très favorable à leur démarche.
Elle considère en effet que la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat permet d’atteindre un équilibre satisfaisant entre l’investissement direct et l’investissement « intermédié », c’est-à-dire celui qui est géré par des structures professionnelles et qui engendre des frais de gestion.
Elle considère que ce qui a été fait est correct, que l’effet de levier sur le financement des fonds propres des entreprises est significatif, comme l’ont montré les chiffres que M. le ministre a rappelés tout à l’heure.
Dès lors, pourquoi essayer de déplacer le fléau de la balance vers des produits professionnels : holdings investissant dans l’amorçage et le démarrage, holdings professionnels, sociétés de capital-risque, d’autant que ces dernières bénéficient déjà, je le rappelle, d’un régime fiscal spécifique très favorable ; avec le dispositif proposé, elles cumuleraient les avantages.
La commission comprend et souscrit au souhait de nos collègues de valoriser le savoir-faire, les technologies, les entreprises émergeantes. Elle considère néanmoins que le droit existant satisfait déjà très largement leur préoccupation.
Pour toutes ces raisons, la commission souhaite le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Ces amendements créatifs visent en fait à transformer une mesure qui fonctionne bien. Or, lorsqu’une mesure fonctionne bien et qu’elle a atteint un point d’équilibre, il n’est pas nécessaire de la développer, surtout si elle est coûteuse.
En fait, monsieur le sénateur, tout cela relève d’états d’esprits différents.
Votre premier amendement, no I-37 rectifié, limite le champ de l’investissement. Or ce n’est pas dans l’état d’esprit du texte, qui privilégie une vision assez large.
Votre deuxième amendement, no I-35 rectifié, vise à permettre aux sociétés holdings qui ne se consacrent pas exclusivement à l’investissement dans les PME de bénéficier du dispositif au prorata de leur investissement. Cela revient aussi à transformer l’état d’esprit du texte. La mesure est claire. Il faut qu’en face la réponse le soit aussi. Or il me semble que cet amendement introduit une certaine confusion.
Le véhicule « holdings » peut être une source d’abus, et ce n’est pas M. Philippe Adnot qui me contredira. D’ailleurs, lors de la seconde partie du présent projet de loi de finances, nous introduirons, avec M. Philippe Adnot, un dispositif anti-abus qui, je le souhaite, aura des effets importants.
Votre troisième amendement, no I-36 rectifié, vise à inclure les sociétés de capital-risque dans le champ du dispositif alors qu’elles profitent déjà de nombreux avantages fiscaux.
Je ne souhaite pas que l’on modifie les dispositions qui sont actuellement en vigueur. Elles sont claires et ont été clairement comprises. Plus nous les modifierons, moins elles seront intelligibles. À terme, nous risquons de ne pas atteindre notre but, qui est d’augmenter, de faciliter, de stabiliser, de renforcer le capital des PME.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements.
M. le président. Monsieur Houel, les amendements nos I-37 rectifié, I-35 rectifié et I-36 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Michel Houel. Ces trois amendements ont pour seul et unique but de faciliter le financement en fonds propres des sociétés d’amorçage, d’expansion, notamment les business angels.
Tous les départements, du moins je l’espère, accueillent des business angels ou des structures spécialisées telles que les plateformes initiative-emploi. Lorsque l’on voit ce qu’elles parviennent à faire avec le peu de moyens dont elles disposent, on ne peut, et c’est dans cet esprit que nous avons déposé ces amendements, qu’essayer de les aider à se constituer un capital plus important pour faire encore plus et mieux.
Certes, monsieur le ministre, je conçois qu’il ne faille pas compliquer le système. Notre dispositif est peut-être un peu complexe, et c’est sans doute ce que l’on peut lui reprocher. Mais permettez-moi de rappeler les chiffres que j’ai cités tout à l’heure. La France compte entre 4 000 à 6 000 business angels, soit dix fois moins qu’en Grande-Bretagne et cent fois moins qu’aux États-Unis. Ces chiffres doivent nous amener à nous interroger sur les aides à la création d’entreprises. Les business angels sont les plus proches du terrain. Ils soutiennent la création des PME et surtout des TPE. Or, nous le savons, ce sont les TPE et PME qui créent le plus grand nombre d’emplois.
Cela dit, monsieur le ministre, je retire les trois amendements.
M. le président. Les amendements nos I-37 rectifié, I-35 rectifié et I-36 rectifié sont retirés.
L'amendement n° I-44 rectifié bis, présenté par MM. César, Pointereau, Cornu et Carle, Mmes Procaccia, Malovry et Mélot et MM. B. Fournier, J. Gautier et Bailly, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le VI de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, après les mots : « 15 décembre 2006 » sont insérés les mots : « ou du règlement (CE) n° 1535/2007 de la Commission du 20 décembre 2007 ».
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° I-44 rectifié ter, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, qui est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le VI de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, après les mots : « 15 décembre 2006 » sont insérés les mots : « ou du règlement (CE) n° 1535/2007 de la Commission du 20 décembre 2007 ».
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, très intéressant, concerne les versements effectués au titre d’une souscription de capital ou d’une augmentation de capital réalisée par une PME. Il vise plus particulièrement le secteur de la production de produits agricoles, ses auteurs, Gérard César, Rémy Pointereau et Gérard Bailly, étant d’excellents connaisseurs et spécialistes de ce domaine.
L’amendement étend une dérogation existante, en vue de faire bénéficier ce secteur du régime fiscal dont il est question. Il serait utile que le Gouvernement puisse nous faire part de son avis à ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n°I-44 rectifié quater.
Je mets aux voix l'amendement n° I-44 rectifié quater.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 9 sexies.
L'amendement n° I-236, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Dans le 2° du I de l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, après les mots : « des fondations reconnues d'utilité publique », sont insérés les mots : « et des associations reconnues d'utilité publique ou de bienfaisance ».
II. - La perte des recettes résultant pour l'État du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet d’aligner, du point de vue qui nous occupe ici, le régime des dons aux associations reconnues d’utilité publique ou aux associations de bienfaisance sur celui dont bénéficient déjà les fondations reconnues d’utilité publique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Pour plusieurs raisons, le Gouvernement n’est pas du tout favorable à cet amendement.
Premièrement, le dispositif a été prévu pour les PME et tout ce qui vise à l’ouvrir l’affaiblit. Notre cible initiale, l’ensemble du tissu des PME, n’est déjà pas négligeable. En étendant ces dispositions à d’autres cibles,…
M. Michel Charasse. Les unijambistes, par exemple !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Allons, ne faites pas d’ironie sur ces sujets ! (Sourires.)
M. Éric Woerth, ministre. … nous créerons un faisceau qui perdra toute puissance.
Il est important de ne pas disperser nos forces, d’autant que le dispositif englobe déjà les fondations reconnues d’utilité publique. Je ne pense pas qu’il soit judicieux d’aller plus loin, comme vous le souhaitez, monsieur le rapporteur général, en intégrant le vaste domaine des associations reconnues d’utilité publique.
Par ailleurs, celles d’entre elles qui souhaitent être éligibles au dispositif de par leur activité ou leur action peuvent très bien se transformer en fondations reconnues d’utilité publique. Il n’est pas si compliqué de passer d’un statut à l’autre.
Enfin, les associations reconnues d’utilité publique font également l’objet d’une mesure fiscale : tout don qui leur est versé selon le régime du mécénat donne lieu à une réduction fiscale de 66 %, ce qui est tout à fait considérable.
Pour toutes ces raisons, je pense qu’il ne faut pas élargir le dispositif. Si vous le faites, vous renforcerez les associations, mais vous affaiblirez les PME. Ce n’est pas l’objectif poursuivi !
Certes, il est sympathique d’opter pour un élargissement, souvent souhaité par les nombreuses associations que nous connaissons. Mais le dispositif que nous évoquons ici vise à drainer de l’argent de l’ISF vers les fonds propres des entreprises. Ne perdons pas ce but de vue !
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Nous devons faire en sorte que le manque à gagner pour l’État soit utilisé de la manière la plus efficace possible. Aujourd’hui, outre le renforcement des fonds propres des entreprises, sont également visées les fondations et associations de recherche, ce qui signifie le développement de la recherche.
J’aurai l’occasion, au cours de l’examen de la seconde partie de ce projet de loi de finances, de proposer des amendements sur le sujet. Mais je suis réellement convaincu que nous devons rester centrés sur l’idée selon laquelle cet argent, qui ne va pas entrer dans les caisses de l’État, doit servir au développement de l’économie.
Par conséquent, j’approuve la position de M. le ministre.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Avant la disparition probable de cet amendement, je voudrais dire à M. le rapporteur général combien je trouve ce texte excellent et l’encourager, quand il est ainsi entraîné vers le bien, à ne pas s’arrêter en cours de route. (Sourires.)
Pourquoi est-ce un bon amendement ? Parce qu’un certain nombre d’associations reconnues d’utilité publique investissent et ont besoin d’argent, notamment dans le domaine du logement.
L’État ne peut pas tout faire, comme l’examen du budget nous le démontrera dans quelques jours, et son intervention diminue dans le secteur du logement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Attendons l’intervention que le Président de la République fera sur le sujet vendredi prochain !
M. Michel Mercier. J’ai bon espoir quant à l’intervention de M. le Président de la République. C’est bien pour cela que je vous aide depuis plusieurs minutes à aller vers la relance, monsieur le rapporteur général. Si vous freinez trop, vous devrez accélérer d’un coup, et vous risquez alors d’avoir un choc. Je vous suggère plutôt de vous préparer à ce qui va nous arriver à tous.
Revenons-en à l’amendement. Je comprends ce qu’a voulu dire M. le ministre. Toutefois, certaines associations, qui interviennent dans des domaines spécifiques, ont besoin d’argent et nous avons besoin de leur action.
Dans notre pays, les logements pour les plus démunis sont essentiellement réalisés par des associations reconnues d’utilité publique. Ces structures n’ont plus les moyens d’investir et ces dispositions pourraient peut-être les aider. J’ai bien compris que le moment n’était pas le bon pour les soutenir. Mais je voulais dire tout le bien que je pensais de cet amendement.
Je souhaite que le Gouvernement, qui devra peut-être trouver une formulation plus étroite que celle qui est proposée aujourd’hui, ne prive pas ce secteur de nouveaux moyens d’intervention alors qu’il en a grand besoin.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. En même temps que je comprends la démarche du rapporteur général, qu’il nous a exposée en commission des finances sans, d’ailleurs, susciter de critiques particulières, je m’interroge sur le fond de cette affaire.
En effet, en introduisant les fondations reconnues d’utilité publique dans le dispositif, nous avons, à mon avis, commis une erreur parce qu’elles recouvrent des domaines extrêmement variés. Certaines sont intéressantes, d’autres le sont moins. Au demeurant, peu d’organisations sont concernées car le statut de fondation ne s’acquiert pas facilement, encore même si, avec la nouvelle loi sur les universités, la création de fondations va exploser quelque peu, tout en restant cependant dans un domaine limité sans doute digne d’attention.
En revanche, les associations d’utilité publique sont beaucoup plus nombreuses qu’on ne le pense et elles interviennent dans des domaines extrêmement variés, qui ne répondent généralement pas à des préoccupations économiques.
Philippe Marini aurait donc pu mieux circonscrire la portée de son amendement en spécifiant les catégories d’associations reconnues d’utilité publique auxquelles il fait référence. Au vu du texte de l’amendement, nous savons que les associations de bienfaisance en font partie, mais les associations d’utilité publique ne sont pas toutes de bienfaisance !
Prenons un exemple, mes chers collègues. L’Association des maires de France est reconnue d’utilité publique. Cet après-midi, je vais présenter ses comptes financiers, avant de me retirer de la trésorerie. Il y a plus de 18 millions d’euros dans la caisse. En dix ans, nous sommes passés de 5 millions à 18 millions d’euros. Beaucoup de petites communes voudraient en avoir autant !
Entre nous, pensez-vous vraiment que l’Association des maires de France, reconnue d’utilité publique, a besoin de l’amendement Marini ? Je n’en suis pas certain.
Compte tenu de cette absence de définitions suffisamment serrées – c’est un peu ce que Michel Mercier disait à l’instant – pour une fois, je ne vais pas suivre le rapporteur général.
J’ajouterai que lorsqu’on renforce les fonds propres, on peut toujours retirer ses fonds et, à ce moment-là, on fragilise l’association. Si, subitement, on décide de reprendre les sommes que l’on a injectées, l’association est tenue de rembourser si elle en a encore la possibilité. Elle est donc fragilisée par ce système.
J’estime que cet amendement mériterait d’être beaucoup plus encadré et circonscrit et je ne suivrai donc pas le rapporteur général sur cette voie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce débat est tout à fait utile et nécessaire. Je suis heureux de l’avoir suscité par cet amendement.
Je souhaiterais formuler deux observations.
Nous devons considérer les questions de principe et les questions d’opportunité face à la conjoncture. Sur le plan des principes, je crois que mon amendement est pleinement justifié. Sur le plan de la conjoncture, l’urgence est effectivement de sauver des emplois et de renforcer les fonds propres des entreprises. À cet égard, le fléchage de la mesure de la loi TEPA vers ce secteur est tout à fait salutaire.
Au vu de ce qui se passe sur nos territoires, je crois donc que M. le ministre a raison quand il nous incite à pondérer les avantages délivrés et à donner la priorité au renforcement des fonds propres des PME. Cela m’inciterait à retirer l’amendement.
Par ailleurs, j’ai entendu notre collègue Philippe Adnot évoquer le cas particulier des fondations de recherche. Je voudrais lui rappeler que, ensemble, nous avons préconisé et fait voter par le Sénat une mesure très importante à cet égard, lors de l’examen de la loi de modernisation de l’économie au début de l’été dernier. Il s’agit de la création des fonds de dotation.
Cette innovation juridique, que nos concitoyens n’ont pas appréciée à sa juste mesure, est d’une grande portée. Les fonds de dotation permettent de créer, sous un régime juridique beaucoup plus souple, l’équivalent des fondations reconnues d’utilité publique, aussi bien pour gérer des œuvres récurrentes que pour financer des investissements. En effet, nous avons admis qu’un fonds de dotation puisse avoir un capital consomptible et que l’on puisse, par un dispositif de cette nature, doter la création d’outils de recherche dans une université ou dans un CHU.
Nous avions été à l’origine, dans la loi de modernisation de l’économie, d’un amendement qui assimilait les fonds de dotation aux fondations reconnues d’utilité publique s’agissant de l’affectation d’une fraction, certainement trop faible dirait Philippe Dominati, de l’impôt sur le patrimoine. Je crois que nous avons bien fait de voter cet amendement, qui, malheureusement, n’a pas subsisté après les travaux de la commission mixte paritaire.
Je serais heureux que M. le ministre nous indique quel est son sentiment sur cette question car nous pourrions rétablir cet amendement dans la seconde partie du projet de loi de finances ou dans le collectif budgétaire. Si nous estimions qu’une percée était possible, nous devrions la réaliser dans le sens que visait Philippe Adnot.
Les membres de la commission des finances, notamment les deux rapporteurs spéciaux Philippe Adnot et Christian Gaudin sont très attachés à l’essor de ces outils d’amorçage, de développement, de facilitation et d’accompagnement de la recherche tant publique que privée. Nous avons là, certainement, un effet de levier important.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Les fonds de dotation obéissent effectivement à une logique d’investissement et ont un objet bien plus large que la seule recherche. C’est pourquoi les propos du rapporteur me semblent plus cohérents avec l’esprit du législateur et du Gouvernement que la proposition précédente.
Quoi qu’il en soit, nous serons amenés, dans la suite de l’examen du projet de loi de finances, à débattre de cette question dans un état d’esprit positif.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans ces conditions, je retire l’amendement !
M. le président. L’amendement no I-236 est retiré.
L’amendement no I-180 rectifié bis, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 9 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les cotisations d’impôt de solidarité sur la fortune dues au titre de 2009 et des années suivantes font l’objet d’une majoration de 10 %.
Les dispositions des articles premier, 885 I bis, 885 I quater, 885 0-V bis et 1649-0-A du code général des impôts ne sont pas applicables à la majoration.
Cette majoration est constatée, contrôlée et recouvrée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que l’impôt de solidarité sur la fortune.
II. – Pour l’année 2009, les redevables doivent acquitter la majoration au plus tard le 16 octobre 2009 auprès de la recette des impôts de leur domicile au 1er janvier 2009.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Devant la dégradation des comptes publics intervenue entre 1993 et 1995, le gouvernement Juppé avait décidé, dans une loi de finances rectificative, de relever de dix points le taux de l’impôt sur les sociétés et d’augmenter dans les mêmes proportions le produit de l’impôt de solidarité sur la fortune. Il est vrai que la situation des comptes publics était, à l’époque, préoccupante et que le déficit constaté dérivait vers les 330 milliards de francs malgré l’action d’un ministre du budget qui s’appelait Nicolas Sarkozy.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Excellent ministre ! (Sourires.)
M. Thierry Foucaud. Aujourd’hui, la situation des comptes publics n’est pas meilleure puisqu’ils devraient enregistrer en 2008 un déficit de plus de 50 milliards d’euros.
En clair, cela va mal pour l’économie, cela va mal pour les comptes publics, et l’espérance du retour à l’équilibre s’estompe sérieusement. Il convient donc de trouver les ressources nécessaires pour réduire le déficit des comptes publics, mais aussi de dégager les moyens d’une relance de l’action publique au service de l’intérêt général.
La majoration de l’impôt de solidarité sur la fortune que nous proposons n’est pas, en soi, une mesure confiscatoire, comme, évidemment, certains voudraient le penser.
Bien qu’il ait été profondément remis en cause par la loi TEPA et les nombreuses mesures qui tendent à rompre l’égalité des contribuables devant l’impôt, l’ISF rapporte 3 900 millions d’euros. Il faut souligner que son rendement est en hausse constante, et il semble bien que cela ne s’explique pas seulement par l’accroissement du nombre des assujettis.
Vous me permettrez d’indiquer quelques chiffres pour étayer mon propos. À Paris, nous sommes passés entre 2005 et 2007 de 67 000 à plus de 81 000 contributeurs à l’ISF. Je vous rassure tout de suite, ces données sont publiques et accessibles sur le site du ministère lui-même.
Les contribuables sont-ils plus ou moins riches qu’auparavant ? Je prendrai un exemple proche de nous, celui du VIe arrondissement de Paris. En 2005, cet arrondissement comptait 3 881 assujettis à l’ISF déclarant un patrimoine moyen de 2 363 842 euros, soit une base d’imposition de 9 174 millions d’euros ; l’application du tarif de l’impôt conduisait à la perception de 5,6 millions d’euros environ, soit 0,6 % de la valeur des biens imposables, ce qui montre le caractère confiscatoire de l’impôt ! En 2007, toujours selon les données de la direction générale des impôts, le nombre de redevables de l’ISF, toujours dans le VIe arrondissement, était de 4 678, leur patrimoine moyen de 2 699 333 euros, le patrimoine total de 12 627 millions d’euros.
Mme Nicole Bricq. On est loin de l’appartement de 70 mètres carrés !
M. Thierry Foucaud. Tout à fait, madame Bricq !
En deux ans, le nombre de contributeurs a augmenté de 20 %, le patrimoine moyen de 14 % et le patrimoine imposable de près de 38 %. C’est bien la preuve que la crise n’est pas vécue de la même manière par tout le monde ! Quant à la contribution, elle reste limitée, malgré sa progression à 0,66 % du montant de la base imposable.
En clair, mes chers collègues, ces chiffres montrent que les redevables de l’ISF habitant les quartiers qui enchâssent le Sénat – comme ceux des autres régions et villes de France, au demeurant – ont largement les moyens de supporter sans trop de difficulté la majoration de la cotisation que nous proposons et qui serait le meilleur symbole de la participation de tous au nécessaire redressement des comptes publics.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour toutes sortes de raisons qui ont été amplement développées au cours du débat de ce matin, la commission ne peut pas être favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement no I-180 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je rappelle que les articles 10 à 19 seront examinés à la suite du débat sur les recettes des collectivités territoriales qui aura lieu cet après-midi.
B. – Autres dispositions
Article 20
Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes créés et de comptes spéciaux ouverts antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi sont confirmées pour l’année 2009. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 20
M. le président. L’amendement no I-105, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aucun établissement distribuant des produits visés aux articles L. 313-14, L. 313-14-1 et L. 313-14-2 du code de la consommation ne peut bénéficier des dispositions visées à l’article 6 de la loi no 2008-1061 du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l’économie.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à interdire aux établissements financiers qui distribueraient des crédits reposant sur le mécanisme de l’hypothèque rechargeable de prétendre au bénéfice des mesures de soutien aux banques votées dans le cadre du collectif budgétaire pour 2008.
Sans revenir trop loin en arrière, je rappellerai qu’en 2006 le crédit hypothécaire rechargeable faisait l’objet de louanges de la part de celui qui allait devenir Président de la République. Il n’hésitait pas à affirmer que cette forme de crédit, qui permettait à 70 % des Britanniques et des Américains d’être propriétaires de leur logement alors que seulement 56 % des Français l’étaient, serait bienvenue dans le droit français : « Il suffit de changer les règles prudentielles imposées aux banques, de simplifier le recours à l’hypothèque et d’en réduire le coût », indiquait-il à l’époque.
M. François Marc. Heureusement que nous ne l’avons pas écouté !
Mme Nicole Bricq. Je crois que nous pouvons être soulagés, car nous l’avons échappé belle ! La crise, qui a commencé aux États-Unis avec l’affaire des subprimes, l’a clairement montré : le fait que la consommation ne soit pas directement liée à la valeur du patrimoine immobilier est un élément plutôt positif pour la France, et nous souhaitons le mettre en avant. Aussi, comme nous l’avions du reste souligné au cours du débat, en contrepartie, nous considérons que le crédit hypothécaire rechargeable doit être très explicitement interdit aux établissements qui demanderaient l’aide de l’État par le biais soit de la garantie, soit de la recapitalisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission n’est pas convaincue, et cela en vertu d’une analyse technique de notre régime des hypothèques rechargeables : les différences sont tout à fait substantielles par rapport au système américain, que Mme Nicole Bricq a critiqué à juste titre.
En France, l’hypothèque rechargeable a pour objet principal de permettre de garantir d’autres crédits que le crédit immobilier initial, et ce au fur et à mesure des remboursements sur le prêt initial. Elle rend donc possible une utilisation continue de ce que l’on appelle la « surface de garantie », et elle est par nature adossée aux remboursements effectifs de l’emprunteur, alors que les subprimes ne tenaient guère compte, pour ne pas dire qu’elles ne tenaient pas compte, de la solvabilité réelle des emprunteurs.
Par ailleurs, les excès des subprimes furent liés au fait que l’on escomptait, avec un optimisme débridé, une hausse de la valeur des biens. L’hypothèque rechargeable, pour sa part, repose sur une valeur actuelle et réelle : en cas de retournement du marché immobilier, la surface de garantie diminue et, par là même, la capacité de rechargement. Je tiens à souligner cet aspect, car c’est exactement l’inverse du mécanisme fatal qui a entraîné le marché hypothécaire américain.
L’amalgame que vous faites, ma chère collègue, ne paraît donc vraiment pas fondé techniquement. De plus, l’interdiction que vous souhaitez, qui ne prendrait pas en considération la part des crédits dont il s’agit dans l’encours global des prêts octroyés par l’établissement, créerait une inégalité préjudiciable : après tout, pourquoi ne pas soumettre à la même mesure les banques qui, dans des conditions tout à fait excessives, allouent du crédit à la consommation sans veiller à la solvabilité des emprunteurs ? Le même raisonnement pourrait tout à fait s’appliquer !
L’adoption de votre amendement conduirait à empêcher de facto la plupart des grandes banques d’accéder au nouveau mécanisme de soutien. Or ce n’est pas le but que vous recherchez, madame !
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je comprends bien votre appel ; je pense néanmoins que l’hypothèque rechargeable, même si son principe a été défendu par un ancien ministre de l’économie particulièrement pugnace et efficace, ne mérite pas l’opprobre que vous lui jetez.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Les modalités de crédit ne sont pas les mêmes en France et aux États-Unis. On voit bien, d’ailleurs, qu’en France il n’est pas facile d’accéder au crédit immobilier, que les revenus des emprunteurs sont pris en compte exactement. C’est bien pour cette raison que les Français n’ont pas été exposés aux mêmes risques que les ménages américains. Les situations ne sont donc absolument pas comparables.
Dans ces conditions, madame la sénatrice, la solution que vous proposez ne saurait s’appliquer.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Les explications du rapporteur général font l’impasse sur le problème des filiales des établissements bancaires français – je ne les citerai pas – qui, présentes sur le marché américain, ont été très touchées par le phénomène des subprimes et ont fait appel à leur société mère soit pour qu’elle les recapitalise, soit pour qu’elle les sorte de ce mauvais pas – quand elles n’ont pas, dans les cas les plus dramatiques, tout simplement disparu.
Notre amendement vise aussi ces situations, que n’ont évoquées ni le ministre ni le rapporteur général en donnant leur avis. Lors de la discussion du collectif budgétaire, nous n’avons pas examiné l’impact que les filiales présentes sur d’autres marchés, notamment sur le marché américain, peuvent avoir sur les sociétés mères qui, elles, pourraient être amenées à solliciter les fonds de l’État.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Je voudrais, à l’appui des arguments que vient de développer Nicole Bricq, rappeler l’étonnement des Français lorsque, voilà quelques jours à peine, ils ont appris que des établissements bancaires français réputés, connus, avaient des filiales aux États-Unis et que celles-ci avaient subi des pertes considérables.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela n’a rien à voir avec l’amendement.
M. François Marc. Le contexte français est certes différent ; pour autant, il faut bien prendre conscience que notre réglementation, qui est effectivement stricte, ne s’applique à nos établissements bancaires que sur le territoire national ! Or leur développement international les conduit à s’établir ailleurs, en particulier sur le marché américain, où les réglementations sont beaucoup plus risquées.
La réponse que nous fournit le ministre n’est pas suffisante : comment le contingentement du risque pourra-t-il être assuré si nous ne mettons pas en place des garde-fous supplémentaires ?
Tel est bien l’objet de notre amendement, et c’est pour cette raison que le Sénat serait bien inspiré de le voter.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-105.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 21
Est ouvert dans les écritures du Trésor un compte d’affectation spéciale intitulé : « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien » dont l’ordonnateur est le ministre chargé du budget.
Ce compte retrace :
1° En recettes :
a) Le produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l’utilisation des bandes de fréquences libérées par les ministères affectataires, à compter du 1er janvier 2009 ;
b) Les versements du budget général ;
c) Les fonds de concours ;
2° En dépenses :
a) Les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées aux services de télécommunications et visant à améliorer l’utilisation du spectre hertzien, y compris le transfert de services vers des supports non hertziens ;
b) Les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées à l’interception et au traitement des émissions électro-magnétiques à des fins de renseignement ;
c) Les versements au profit du budget général.
M. le président. L'amendement n° I-18, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa (c) du 2° de cet article par les mots :
, ou du désendettement de l'État pour un montant qui ne peut être inférieur à 15 % du produit visé au a du 1°
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à garantir l’affectation d’au moins 15 % de ce qu’il est convenu d’appeler le « dividende numérique », c'est-à-dire le produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l'utilisation des bandes de fréquences libérées par les ministères, au désendettement de l'État.
Notre proposition s'inscrit dans une démarche identique à celle de Mme la rapporteure spéciale du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », qui présentera un amendement sur les produits de cession des biens immeubles de l’État lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances. En l’occurrence, Mme la rapporteure spéciale n’est autre que notre collègue Nicole Bricq. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement vise à modifier l’article 21, qui concerne le dividende numérique et l’ouverture d’un compte d’affectation spéciale pour récupérer le produit de la vente à venir des fréquences. Sur un tel sujet, il est, me semble-t-il, nécessaire de considérer la pratique.
Monsieur le rapporteur général, je ne suis pas défavorable à votre amendement dans son principe, mais l’application du dispositif que vous préconisez soulèverait des difficultés pratiques.
En effet, certaines des cessions de fréquences qui seront effectuées immédiatement émanent du ministère de la défense. Or nous souhaitons réaffecter la totalité du produit aux réformes à venir dans ce secteur.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas normal !
M. Éric Woerth, ministre. Nous voulons assurer le financement à la fois de la réforme de la carte militaire, qui impliquera la fermeture d’un certain nombre de bases, et des investissements du ministère de la défense, dont la progression sera d’ailleurs considérable : elle est évaluée à 327 milliards d’euros sur les prochaines années.
Le plan de financement est très précis : réduction des crédits de fonctionnement, augmentation des crédits d’équipement et financement par la mobilisation de moyens budgétaires, mais aussi par la vente d’une partie du patrimoine immobilier et la vente de fréquences.
Si nous adoptions le principe que vous proposez, monsieur le rapporteur général, c'est-à-dire l’affectation de 15 % du produit des cessions au désendettement de l’État, nous n’arriverions plus à boucler notre budget de programmation militaire. En d’autres termes, je suis favorable au dispositif que vous préconisez pour les autres ministères, mais j’y suis défavorable pour la défense.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous l’avons bien compris, il existe une spécificité pour le secteur de la défense.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Une sanctuarisation.
Mme Nicole Bricq. Qui n’est pas nouvelle !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Aussi, nous pourrions peut-être décider de faire une exception. Le principe d’affecter 15 % du produit des cessions au désendettement de l’État serait maintenu, sauf pour les cessions de fréquences du ministère de la défense. (M. le ministre acquiesce.)
Nous aurons sans doute l’occasion d’en débattre de nouveau vendredi prochain. En attendant, il me paraît souhaitable d’inscrire un tel principe dans le projet de loi de finances.
Je suggère donc à M. le rapporteur général de rectifier l’amendement de la commission.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, acceptez-vous de rectifier votre amendement en ce sens ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui, monsieur le président.
Afin de prendre en compte les observations de M. le ministre et de M. le président de la commission des finances, je propose de rectifier l’amendement I-18, en ajoutant les mots : «, sauf pour les cessions de fréquences effectuées par le ministère de la défense ».
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° I-18 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa (c) du 2° de cet article par les mots :
, ou du désendettement de l'État pour un montant qui ne peut être inférieur à 15 % du produit visé au a du 1°, sauf pour les cessions de fréquences effectuées par le ministère de la défense
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Comme je souhaite que le secteur de la défense soit effectivement exclu du principe proposé par M. le rapporteur général, j’approuve cette nouvelle rédaction et j’émets un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Article additionnel après l’article 21
M. le président. L'amendement n° I-114, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les montants de la taxe fixée pour la publicité radiodiffusée et télédiffusée prévus à l'article 302 bis KD du code général des impôts sont majorés de 20 % à compter du 1er janvier 2009.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement, qui a été rédigé par notre collègue du groupe socialiste Serge Lagauche, vice-président de la commission des affaires culturelles, vise à permettre une majoration des crédits affectés au soutien à l’expression radiophonique locale.
Nous proposons de procéder à une majoration de 20 % de la taxe sur la publicité, qui constitue l’unique recette du programme du compte d’affectation spéciale alimentant le Fonds de soutien à l’expression radiophonique.
En effet, les différents taux de cette taxe n’ont pas été relevés depuis 2002, ce qui entraîne une réduction de l’ordre de 21 % des crédits disponibles pour soutenir la pérennité des radios associatives, alors même que celles-ci remplissent un rôle majeur de communication sociale, de pluralisme et de diversité de l’expression radiophonique dans nos territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L’an dernier, nous avions déjà rejeté un amendement comparable, quoique moins ambitieux.
Comme chacun le comprendra, nous souhaitons assurer la continuité de nos positions. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-114.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 22
I. - Avant le chapitre Ier du titre IV du code de l’industrie cinématographique, sont insérés deux articles 44-1 et 44-2 ainsi rédigés :
« Art. 44-1. - I. - Sont affectés au Centre national de la cinématographie :
« 1° Le produit de la taxe instituée à l’article 45 ;
« 2° Le produit de la taxe instituée au 2 du II de l’article 11 de la loi de finances pour 1976 (n° 75-1278 du 30 décembre 1975), des prélèvements prévus aux articles 235 ter L, 235 ter MA du code général des impôts ainsi que du prélèvement prévu à l’article 235 ter MC du même code, au titre des opérations de vente et de location portant sur des œuvres pornographiques ou d’incitation à la violence diffusées sur support vidéographique ;
« 3° Le produit de la taxe instituée à l’article 302 bis KB du code général des impôts et de la taxe prévue à l’article 302 bis KE du même code.
« II. - Sont également affectés au Centre national de la cinématographie :
« 1° Le produit du concours complémentaire des éditeurs de services de télévision déterminé par la convention prévue aux articles 28 et 33-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;
« 2° Le produit des sanctions pécuniaires prononcées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel à l’encontre des éditeurs de services de télévision relevant des titres II et III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée ;
« 3° Le produit du remboursement des avances sur recettes accordées avant le 1er janvier 1996 pour la réalisation d’œuvres cinématographiques ainsi que, le cas échéant, le produit de la redevance due par les bénéficiaires de ces avances.
« Art. 44-2. – Le Centre national de la cinématographie établit chaque année un rapport au Parlement qui rend compte du rendement et de l’emploi prévisionnels des taxes, prélèvements et autres produits mentionnés à l’article 44-1 qui lui sont affectés. Ce rapport est adressé au Parlement en même temps que le projet de loi de finances de l’année. »
II. - A. - Le compte d’affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » est clos à la date du 31 décembre 2008.
À cette date, les soldes des opérations antérieurement enregistrées sur la première et la deuxième section de ce compte sont affectés au Centre national de la cinématographie ; le solde des opérations antérieurement enregistrées sur la troisième section de ce même compte est versé au budget général de l’État.
Les produits énumérés aux I et II de l’article 44-1 du code de l’industrie cinématographique, dus au titre des années antérieures à 2009 et restant à percevoir, sont affectés au Centre national de la cinématographie.
B. - L’article 50 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est abrogé.
III. - L’article 302 bis KB du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, les mots : « compte d’affectation spéciale ouvert dans les écritures du Trésor et intitulé “ Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ” » sont remplacés par les mots : « Centre national de la cinématographie » ;
2° Le b du 1° du II est complété par les mots : « et des autres ressources publiques » ;
3° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils adressent au Centre national de la cinématographie, dans les mêmes délais que ceux applicables à la déclaration mentionnée au premier alinéa, une déclaration conforme au modèle agréé par le centre. Cette déclaration précise, au titre de l’année civile précédente, l’assiette de la taxe due ainsi que chacun de ses éléments constitutifs, mentionnés aux 1° et 2° du II, et le montant des acomptes versés. Elle précise également le montant des acomptes calculés au titre de l’année en cours. » ;
4° Il est ajouté un VI ainsi rédigé :
« VI. – Le produit de la taxe est affecté au Centre national de la cinématographie. »
IV. – L’article 302 bis KE du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le produit de la taxe est affecté au Centre national de la cinématographie. Ce dernier peut recevoir communication de l’administration des impôts, pour chaque redevable, de tous renseignements relatifs au montant de la taxe. »
V. – L’article 11 de la loi de finances pour 1976 (n° 75-1278 du 30 décembre 1975) est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa du 2 du II est supprimé ;
2° Le III est ainsi rédigé :
« III. – Le produit du prélèvement et de la taxe prévus respectivement aux 1 et 2 du II est affecté au Centre national de la cinématographie. »
VI. – Au premier alinéa de l’article 238 bis HF du code général des impôts, les mots : « et pouvant bénéficier du soutien de l’industrie cinématographique et de l’industrie des programmes audiovisuels prévu à l’article 76 de la loi de finances pour 1960 n° 59-1454 du 26 décembre 1959 et à l’article 61 de la loi de finances pour 1984 (n° 83-1179 du 29 décembre 1983) » sont remplacés par les mots : « et éligibles aux aides du Centre national de la cinématographie ».
VII. – À compter du 1er janvier 2010, la taxe prévue à l’article 302 bis KB du code général des impôts est recouvrée par le Centre national de la cinématographie.
VIII. – Au 4° de l’article 2 du code de l’industrie cinématographique, les mots : « à la production cinématographique » sont remplacés par les mots : « aux industries cinématographique, audiovisuelle, vidéographique et multimédia ». – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 22
M. le président. L'amendement n° I-19, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 220 octies du code général des impôts, tel qu'il résulte de l'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2007 (n° 2007-1824 du 25 décembre 2007) est ainsi modifié :
1° Le b) du II est complété par les mots : « et aux albums de nouveaux talents, composés d'une ou de plusieurs œuvres libres de droit d'auteur au sens des articles L. 123-1 à L. 123-12 du code de la propriété intellectuelle ».
2° Le b) du II est complété par une phrase ainsi rédigée : « S'agissant des albums de nouveaux talents, le bénéfice du crédit d'impôt s'apprécie au niveau de l'entreprise redevable de l'impôt sur les sociétés pour l'ensemble des albums qu'elle produit chaque année. ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le dispositif que cet amendement vise à instituer s’inscrit dans la continuité d’une mesure que nous avions adoptée l’an dernier et il est fondé sur une véritable conviction.
S’il est parfaitement légitime d’accompagner l’adaptation de l’industrie musicale à son nouvel environnement, il l’est tout autant de veiller à ce que des avantages consentis sur les fonds publics contribuent à préserver et à valoriser l’expression française.
Il serait véritablement inacceptable de supprimer toute condition de francophonie sous couvert des instructions adressées par les services de Bruxelles, qui sont aujourd'hui de moins en moins favorables à la francophonie. À cet égard, le crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres phonographiques pose un problème d’ensemble.
Afin de poursuivre dans le sens de notre vote de l’an dernier, nous proposons, de manière tout à fait réaliste, que soit examiné le travail des entreprises de production phonographique annuellement pour déterminer quelle est la part d’œuvres francophones.
Par ailleurs, nous suggérons de considérer comme francophone l’interprétation dans leur langue originale d’œuvres libres de droit. Ainsi, un opéra de Verdi ou un oratorio de Vivaldi en italien, de même que des Lieder de Schubert en allemand doivent être regardés comme l’expression sincère et originale de l’œuvre libre de droits. Il n’y a aucune raison d’exprimer une méfiance par rapport à ces interprétations en langue étrangère.
Il n’en va pas de même pour l’anglophonie, voire l’anglomanie, qui envahit tout, et plus spécialement les produits destinés aux jeunes générations. Le véritable conditionnement anglo-saxon auquel celles-ci sont soumises ne cesse de s’accroître. De ce point de vue, monsieur le ministre, nous estimons nécessaire de poser quelques bornes, surtout lorsque des fonds publics sont en cause et qu’il s’agit d’un avantage fiscal.
Je sais bien que le ministère de la culture ne partage pas du tout cette position. Il a d’ailleurs avancé un certain nombre d’arguments – vous allez sans doute y faire allusion, monsieur le ministre –, auxquels on peut opposer des objections tout à fait sérieuses.
À ma connaissance, malgré des demandes réitérées, le Gouvernement n’a pas fourni le document sollicité par la Commission européenne. Pour ma part, voici comment j’interprète une telle attitude : les services du ministère de la culture sont mécontents du dispositif que nous avons adopté l’an dernier et refusent de jouer le jeu.
Le silence de la Commission européenne sur la clause de francophonie est normal, et ce pour deux raisons.
D’une part, cette clause est admise pour des crédits d’impôts d’une ampleur bien supérieure à celle du crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres phonographiques, dont le montant s’élève à 10 millions d’euros, contre 50 millions d’euros pour les dépenses de production d’œuvres cinématographiques et autant pour les productions audiovisuelles, ces crédits d’impôt visant la relocalisation des productions en France, conformément à l’article 220 sexies du code général des impôts. Par conséquent, dans ce domaine, la clause de francophonie n’a pas de raison de choquer la Commission européenne, qui l’accepte bien dans des domaines plus importants.
D’autre part, et je le répète, à ma connaissance, la Commission n’a pas été saisie de la clause de francophonie ! Le Gouvernement a notifié à la Commission le texte qu’il souhaitait présenter au Parlement en loi de finances rectificatives pour 2007, sans tenir aucunement compte – je reconnais bien là le ministère de la culture – du vote du Parlement, donc de l’adoption de la clause de francophonie !
En ce qui concerne le calendrier d’entrée en vigueur de la disposition, le retard serait de la seule responsabilité du Gouvernement, notamment de votre collègue en charge de la culture, monsieur le ministre. Cela pose de graves questions sur le respect du vote du Parlement.
Que la modification proposée par la commission des finances soit adoptée ou non, le crédit d’impôt devra être de nouveau notifié à la Commission européenne, afin que celle-ci ait connaissance des dispositions votées par le Parlement.
Dans le cas contraire, je me demanderais sincèrement pourquoi le Gouvernement nous saisit encore de dispositions relatives aux crédits d’impôt dans le domaine des industries culturelles.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le débat sur le sujet est un peu confus.
À la suite de l’introduction de la clause de francophonie dans le texte du Gouvernement l’année dernière, la Commission européenne a décidé que, sur la base du nouveau projet, le bénéfice du crédit d’impôt serait étendu à l’ensemble des nouveaux talents et ne serait, en particulier, plus réservé aux seuls enregistrements en langue française. Il y a donc certainement une confusion d’interprétation.
En réalité, nous ignorons ce que souhaite véritablement la Commission et nous nous interrogeons sur les conditions dans lesquelles elle a pris cette décision.
Je souhaite donc que la situation soit clarifiée. Si le crédit d’impôt ne fonctionne pas aujourd'hui, c’est parce que ses conditions d’application ne sont pas suffisamment claires. En effet, si je comprends bien la position de la Commission, il faudrait supprimer la clause de francophonie pour que le dispositif s’applique !
Par conséquent, je vous propose que nous demandions des éclaircissements à la Commission, en liaison avec le ministère de la culture, qui a suivi les négociations.
Ensuite, en fonction de ce que sera la position des instances communautaires, nous pourrons savoir si l’entrée en vigueur du dispositif est soumise ou non à la suppression de la clause de francophonie. Nous pourrons alors reprendre vos propositions, monsieur le rapporteur général.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous remercie vivement, monsieur le ministre, de ce commentaire qui me semble très ouvert.
D’une part, j’ai la conviction que notre vote de l’année dernière n’a pas été pris au sérieux et que le ministère de la culture ne l’a pas véhiculé comme il aurait convenu auprès de la Commission européenne. Cela est contraire aux principes qui doivent régir les rapports entre le Parlement et le Gouvernement, plus particulièrement dans ce domaine.
D’autre part, est-il admissible, mes chers collègues, de souscrire à un régime d’encouragement fiscal pour une production culturelle qui ne comporte pas de clause de francophonie ? Ce n’est pas une question de procédure ou de pure législation fiscale, c’est une question de principes : à quoi le Parlement français peut-il souscrire ? Cela fait partie des principes fondateurs de notre identité et de notre pacte national.
Cette clause votée l’année dernière prévoit que la moitié des programmes soit d’expression francophone. Notre amendement tend à précises l’évaluation de cette proportion : il s’agit de vérifier, dans une production d’une année, que les programmes d’expression non-francophone n’excèdent pas la moitié, en temps de diffusion, à l’exclusion de l’exécution en langue originale des œuvres libres de droit.
De la même manière, aujourd’hui, sur les flacons des produits de grande distribution, la moitié des informations est écrite en français et l’autre en anglais, à la demande de la Commission européenne.
Je me permets d’apporter ces précisions afin que les membres de notre assemblée disposent d’informations précises avant de se prononcer.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Ce problème est confus et l’indécision de la Commission ajoute à la confusion.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est le ministère de la culture qui l’a provoquée !
M. Éric Woerth, ministre. Au départ, au travers d’un texte amendé par le Sénat et validé en commission mixte paritaire, le Gouvernement avait la volonté d’aider, d’une manière générale, les entreprises de production d’œuvres phonographiques qui sont en difficulté en raison de la propagation par internet de la distribution des œuvres. Ce crédit d’impôt avait donc pour vocation d’aider les entreprises produisant de nouvelles œuvres.
Le Parlement a décidé que la moitié des œuvres devait répondre au critère de francophonie, à l’exclusion des œuvres qui sont libres de droit. Telle est donc la réalité juridique. Par la suite, le dispositif a été soumis à la Commission – puisqu’il s’agit d’une aide aux entreprises –, et celle-ci a indiqué que la clause de francophonie ne devait pas être retenue.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n’y a pas eu transmission à la Commission !
M. Éric Woerth, ministre. Si, puisqu’il y a une décision de la Commission sur la base de la notification que nous avons faite. Au demeurant, le souhait de la Commission doit être éclairci sur ce point. Plusieurs interprétations sont possibles ; vous en avez vous-même proposé une. En attendant, nous ne pouvons pas prendre de décision.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes en accord avec M. le ministre sur cette présentation. Ce n’est pas vous, monsieur le ministre, ni les services de Bercy qui êtes en cause dans ce débat.
J’ajouterai une dernière précision. Le Gouvernement a notifié à la Commission européenne son texte initial et non pas le texte voté par le Parlement. Ainsi, les services du ministère de la culture se sont assis sur le vote du Parlement ! Il ne s’agissait pas seulement d’un texte du Sénat mais bien du Parlement, puisqu’il a été retenu par la commission mixte paritaire !
Mais ce vote était politiquement non-conforme… Il ne méritait donc pas d’être transmis à la Commission ! D’où ma réaction. Indépendamment du sort qui va être réservé à cette disposition, il en va du respect du Parlement. Je regrette d’avoir à faire ce constat, mais, je le répète, vous n’êtes pas en cause, monsieur le ministre ; vous veillez à maintenir un dialogue de qualité.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-19 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 22.
Article 23
I. – Le I de l’article 1605 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. – À compter du 1er janvier 2005, il est institué au profit des sociétés et de l’établissement public visés par les articles 44, 45 et 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication d’une part et, d’autre part, jusqu’au 31 décembre 2011, au profit du groupement d’intérêt public visé à l’article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, une taxe dénommée redevance audiovisuelle. »
II. – Le VI de l’article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du 1, le mot : « public » est supprimé ;
2° Le 1° du 1 est ainsi rédigé :
« 1° En dépenses : d’une part, le montant des avances accordées aux sociétés et à l’établissement public visés par les articles 44, 45 et 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et, d’autre part, jusqu’au 31 décembre 2011, le montant des avances accordées au groupement d’intérêt public visé à l’article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée ; »
3° Au premier alinéa du 2° du 1, les mots : « 545,7 millions d’euros en 2008 » sont remplacés par les mots : « 546 millions d’euros en 2009 » ;
4° Après la première phrase du premier alinéa du 2, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, lorsque l’organisme bénéficiaire est celui institué à l’article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, le rythme de versement des avances est déterminé par l’ordonnateur du compte. » ;
5° Au 3, les mots : « 2008 sont inférieurs à 2 345 millions d’euros » sont remplacés par les mots : « 2009 sont inférieurs à 2 451,7 millions d’euros ».
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, sur l'article.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce matin, la presse évoque d’abondance le projet de réforme de la télévision de M. Sarkozy, que j’ai qualifié, dès janvier dernier, de projet mêlant l’étatisme et l’affairisme.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oh !
M. Jack Ralite. La commission Copé, que j’ai quittée le 6 juin parce qu’il n’y avait, certes, pas de sujet tabou mais des idées interdites, comme la redevance, a confirmé cette analyse, notamment sur le plan financier, chaque jour remis en cause par des cadeaux au privé et des soustractions au public.
Aux marques d’inquiétude ou de réprobation à ce propos, on nous répond : « L’État compensera ! ». M. Copé le disait encore ce matin sur France 2, Mme Albanel le répète sans cesse – elle me l’a dit plusieurs fois – et samedi soir sur France 3, Dominique Paillet me l’a aussi servi.
« L’État compensera ! L’État compensera ! » Cela me fait penser au Malade imaginaire de Molière : « Le poumon, le poumon, vous dis-je. » (Mme Nicole Bricq sourit.)
Mais là, la maladie est bien réelle et j’en veux faire la démonstration à travers quatre dates récentes.
La première est le 24 octobre 2008, à l’Assemblée Nationale : notre collègue Patrice Martin-Lalande intervient contre l’affectation de 15 millions d’euros de la redevance au GIP pour développer le numérique. Vous-même, monsieur le ministre, faites grise mine et proposez que cet emprunt ne soit possible que pendant trois ans ! Finalement, l’amendement a été retiré !
Sauf que trois ans, c’est le plan de numérisation et que le prélèvement de 2009 de 15 millions sera de 72 millions en 2010 et de 131 millions en 2014, soit 218 millions d’euros ! Il ne faut surtout pas toucher à la redevance quand elle importe au service public mais il faut lui mettre la main dessus quand elle ne lui importe pas !
La deuxième date est le 19 novembre 2008, la semaine dernière. La commission des finances et la commission des affaires culturelles ont reçu M. de Carolis. Je ne reviendrai pas sur sa démonstration, vous pouvez la consulter. Il a conclu en indiquant qu’il manquait 100 millions d’euros pour 2009. M. de Carolis a déclaré également que le plan d’affaires n’était pas réglé ; il ne l’est toujours pas à cette heure-ci, alors qu’à 18 heures commence le débat à l’Assemblée Nationale ! Depuis, d’ailleurs, M. de Carolis a affirmé qu’avec les événements actuels on atteindrait sans doute un déficit de 200 millions à 270 millions d’euros.
Je laisse imaginer ce qu’on en dira quand, l’année prochaine, on ne s’expliquera pas le déficit de France Télévisions ! Cette société nationale qui n’a jamais été en déficit le devient, alors qu’on prétend en faire la réforme historique.
Troisième date, le 21 novembre 2008 : je reçois des syndicalistes de France Télévisions et, parmi eux, un responsable de la CGT chargé par le comité du groupe de réaliser une étude sur ses finances. Il aboutit, lui aussi, aux 100 millions, avec, depuis, un correctif qui va dans le sens des 200 millions à 270 millions d’euros.
Je reprends son raisonnement. Le budget de 2008 prévoyait 800 millions d’euros de ressources publicitaires ; les ressources de compensation prévues par le projet de loi de finances s’élèvent à 450 millions d’euros, il s’agit de la taxe sur les télécommunications, sur les fournisseurs d’accès à internet et sur la publicité : 850 millions moins 450 millions égalent 350 millions d’euros, qu’il reste à trouver pour la période de transition.
France Télévisions évalue la recette possible sur la publicité restante, en journée, et sur le parrainage à 250 millions : 350 millions moins 250 millions égalent 100 millions d’euros. Il manque 100 millions d’euros pour atteindre l’équilibre financier !
L’auteur de cette étude ajoute que, bien évidemment, avec la diminution des taxes, la somme sera plus élevée et que – vous devez y songer – le calcul ne tient pas compte de la compensation de la partie publicité supprimée en programme. Or celle-ci est évaluée, selon ce qu’on y fera, entre 70 millions et 200 millions.
Il n’existe pas de crédit pour le développement ; les compensations des exonérations sont plafonnées ; rien n’est prévu pour le mobile, pour la haute définition ; rien n’est prévu non plus pour l’harmonisation salariale, alors que, certaines chaînes étant plus payées que d’autres, dans le cas d’une entreprise unique, il y aura forcément une demande d’harmonisation. Et puis il y a l’attitude de Bruxelles, qu’on ne connaît pas mais qui n’est pas favorable aux taxes actuellement votées.
La quatrième date est le 25 novembre 2008. Vous le savez sans doute par le journal d’hier, sept membres de la commission Copé sur dix-sept – je devrais dire sur douze, parce que le groupe des professionnels compte deux obligations de réserve, deux étrangers et deux personnes qui ne sont jamais venues ! –, soit 66 % des professionnels membres de la commission nommée par M. Sarkozy écrivent : « Moins de moyens, moins de modernité, moins d’indépendance. [...] on s’achemine vers un audiovisuel public fragilisé, avec une structure bancale, un financement aléatoire. Ce groupe de télévisions, indispensable à la bonne marche de la cité, va être amputé. Il va devoir vivre avec des béquilles. »
Ce matin – je dois le dire, si vous n’avez pas encore lu tous les journaux ! –, l’éditorialiste de la Tribune écrit : « Le projet de réforme tourne à la pantalonnade [...] On ne veut pas la payer. [...] L’État a transformé la mise en place de la réforme et son financement en un invraisemblable concours Lépine. »
J’ai voulu dire cela, parce que nous allons discuter des contenus, et je prendrai ma part aux débats.
En tout état de cause, nous discutons aujourd'hui des questions financières, et cet article 23 ne doit pas être examiné à la va-vite, sans avoir de bases de réflexion approfondie. On ne peut pas discuter de la réforme de l’audiovisuel sans savoir ce qu’il en est vraiment.
D’autant que, au même moment, la commission spéciale de l’Assemblée nationale sur la réforme de l’audiovisuel public a voté une diminution des taxes, faisant passer la taxe sur la publicité applicable à TF 1 de 3 % à 1,5 % et modulant celle qui est applicable aux opérateurs Télécom et fournisseur d’accès internet de 0,9 % à 0,3 %.
Et comment taire l’application maximum par la France – seule à le faire en Europe – de la directive relative aux services de médias audiovisuels, ou directive SMA, qui multiplie les cadeaux, pour TF 1 notamment ? C’est effectivement le secteur privé qui est entièrement bénéficiaire de cette mesure.
Comment ne pas noter que le produit des taxes envisagées n’est pas affecté, de telle sorte qu’il restera disponible pour le Gouvernement qui en fera ce qu’il voudra ?
La commission des finances doit le savoir, comme la commission des affaires culturelles, et comme nous tous.
Vers quoi allons-nous ?
Un député, un peu ultra, M. Frédéric Lefebvre, qui dit tout haut ce que les autres pensent tout bas,…
M. le président. Pourriez-vous conclure, mon cher collègue ?
M. Jack Ralite. Non, monsieur le président, c’est trop important !
M. le président. Certes, néanmoins je vous demande de conclure.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, mes chers collègues, vous avez beaucoup discuté au sujet des déchets ; moi, je veux discuter fortement sur l’esprit.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il y a des règles pour tout le monde !
M. Jack Ralite. Le député Frédéric Lefebvre, disais-je, a évoqué deux mille licenciements alors même que Mme la ministre Albanel a affirmé qu’il n’y en aurait aucun. Qui croire ? M. Lefebvre ou Mme Albanel ? En outre, on a entendu parler de neuf cents départs en retraite. Le personnel constituerait-il donc une variable d’ajustement ?
Nous assistons là à une sorte de RGPP mammouth ! Elle traduit l’échec de la définition annoncée d’un nouveau modèle économique, c’est-à-dire l’organisation d’un déficit structurel.
Comment ne pas penser à une privatisation maquillée et programmée, voire à une suppression de France 3, par exemple ?
Pour ma part, je le pense intimement, parce que je sais que, si l’on annonce un déficit entre 200 millions et 270 millions d’euros en 2009, il atteindra 600 millions d’euros en 2012 !
C’est pourquoi j’accompagnerai tout à l’heure les salariés – des cadres aux employés – de la maison de France Télévisions qui manifestent et font grève, parce qu’ils suivent le conseil de Pierre Boulez : « L’histoire n’est jamais ce qu’on subit, mais ce qu’on agit ».
Ayant organisé, voilà dix jours, au théâtre du Vieux Colombier, une journée d’études sur l’audiovisuel public, comme je ne souhaite pas que les échanges qui ont eu lieu restent limités aux deux cent trente-huit participants, je me permets de remettre à M. le président Arthuis le présent rapport, qui sera distribué plus amplement par la suite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-196, présenté par MM. Ralite et Renar, Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Le III de l'article 1605 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« III. - Le montant de la redevance audiovisuelle est de 120 euros pour la France métropolitaine et de 75 euros pour les départements d'outre-mer. »
II. - Au 3 de l'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, les mots : « 2008 sont inférieurs à 2 345 millions d'euros » sont remplacés par les mots : « 2009 sont inférieurs à 3 245 millions d'euros ».
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Cet amendement, en modifiant la rédaction de l’article 23 du projet de loi de finances pour 2009, prévoit des mesures avec un seul et unique objectif : contribuer à assurer un minimum de ressources financières pérennes au service public de l’audiovisuel.
Ce dernier est aujourd’hui profondément ébranlé depuis la décision de suppression de la publicité sur l’audiovisuel public. Je me limiterai à cet aspect financier, puisque j’aurai l’occasion de revenir sur le fond lors du débat du 17 décembre.
Mais je souhaite évoquer, d’abord, la redevance, ressource la plus légitime pour la télévision publique, qui s’est construite avec elle et qui, dès l’origine, était comme un actionnariat populaire et citoyen. Je sais bien que le Gouvernement l’a transformée en impôt, en demandant au contribuable de l’acquitter en même temps que la taxe d’habitation.
Dans cet esprit, la majoration proposée ici sera comprise par le citoyen qui, toutes les études le montrent, tient à la qualité de cet outil de lien social et culturel qu’est la télévision.
Majorer la redevance dans le contexte actuel est une question de cohérence ; on ne peut pas, à la fois, prétendre vouloir un service public fort, l’amputer d’un tiers de ses recettes en supprimant la publicité et refuser toute majoration de la redevance !
Les « plus 4 euros » que nous proposons sont, de ce point de vue, la majoration minimale ; elle ne compense pas les pertes générées par la disparition de la publicité, mais elle permet d’assurer 130 millions d’euros de recettes. La redevance française reste infiniment plus basse que celle de la Grande-Bretagne – 195 euros – ou de l’Allemagne – 204 euros – et elle n’atteindrait même pas la moyenne européenne s’élevant à 161 euros.
Ensuite, je souhaite m’élever contre le transfert d’une part des ressources de la déjà trop faible redevance vers le groupement d’intérêt public France Télé numérique créé à la suite de la loi du 5 mars 2007 et qui a en charge le processus d’accompagnement de l’extinction de l’analogique au profit de la couverture numérique du territoire.
Devant la fragilisation financière, économique et structurelle de l’audiovisuel public, il est impensable de le priver d’une part de ses ressources.
Cela traduit le double discours gouvernemental sur la question : derrière l’argument incantatoire de la culture, il y a un véritable affaiblissement du service public, auquel on retire toujours plus au profit du secteur privé, auquel le Gouvernement ne cesse de faire des cadeaux : les canaux bonus de la loi de 2007, l’accès automatique aux réseaux de télévision mobile personnelle, ou TMP, aux termes de la même loi, la mise aux enchères des fréquences hertziennes, qui profite aux plus puissants, l’échelonnement de paiement proposé l’an dernier pour la quatrième licence UMTS.
Et nous assistons aujourd’hui au transfert des revenus publicitaires du secteur public vers le secteur privé et, indirectement, d’une part de la redevance !
En effet, dans l’opération de transfert d’une part de la redevance au groupement d’intérêt public France Télé numérique, l’audiovisuel public ne sera plus le seul bénéficiaire de cette taxe, il y aura d’autres bénéficiaires : les télévisions privées et le secteur des Télécoms, un des grands gagnants du dividende numérique.
C’est un détournement des crédits de la redevance pour assumer des dépenses que l’État ne veut pas prendre en charge.
Nous estimons qu’une télévision de qualité doit avoir des moyens à la hauteur de la qualité visée.
C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-221, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
A. - Supprimer le I de cet article.
B. - Supprimer les 1°, 2° et 4° du II de cet article.
La parole est à Mme Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly, vice-présidente de la commission des affaires culturelles. L’article 23 étend le champ des bénéficiaires de la redevance audiovisuelle au groupement d’intérêt public France Télé numérique.
Sans nier l’intérêt de ce GIP, dont la mission est fondamentale, l’extension du champ de la redevance à un groupement composé de chaînes publiques et de chaînes privées nous paraît éminemment contestable.
En outre, si le financement annoncé n’est que de 15 millions d’euros en 2009, il devrait être porté à hauteur de 72 millions d’euros en 2010 et de 131 millions d’euros en 2011.
Dans le cadre de la réforme de France Télévisions, la redevance audiovisuelle est un facteur majeur, on le sait, de sécurisation et de pérennisation du financement de l’audiovisuel public.
La commission pour la nouvelle télévision publique, dite commission « Copé », avait évoqué, à cet égard, l’importance de revenir à la logique même de la redevance, à savoir le financement des chaînes de télévision et radio publiques.
Ainsi, en dépit des deux amendements gouvernementaux adoptés par l’Assemblée nationale, qui ont limité l’imputation des dépenses du GIP sur la redevance à trois ans, la commission des affaires culturelles a adopté cet amendement qui supprime l’extension du champ des bénéficiaires de la redevance.
Le présent amendement, que j’ai cosigné et que je défends au nom de Michel Thiollière, a été adopté par l’ensemble des membres de la commission des affaires culturelles. Il n’évoque que cet aspect du financement du GIP, visant à revenir à ce qui était à l’origine le souhait de la commission pour l’audiovisuel public, à savoir que l’indexation de la redevance devait revenir complètement au financement de l’ensemble France Télévisions.
Nous n’avons pas abordé dans cet amendement la question de la hausse ou non de la redevance, car nous pensons qu’elle mérite d’être plus largement évoquée dans le cadre global de la discussion que nous allons avoir dans quelques semaines ici même, et au regard de l’ensemble des autres financements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. S’agissant des taux de la redevance de l’audiovisuel, je rappelle que le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision prévoit déjà une indexation sur l’inflation, qui est estimée aujourd'hui à 1,5 %. Je ne crois pas me tromper, monsieur le ministre…
En outre, le présent projet de loi de finances, modifié par l’Assemblée nationale, prévoit une hausse des ressources des organismes de l’audiovisuel, une augmentation de plus de 100 millions d’euros des encaissements de redevances audiovisuelles garanties aux organismes de l’audiovisuel public, dans une enveloppe totale de 2451,7 millions d’euros. S’y ajoutent 546 millions d’euros pris en charge par l’État, au titre des exonérations de la redevance de l’audiovisuel.
Mon cher collègue Jack Ralite, depuis que je participe à l’élaboration des budgets, c’est-à-dire depuis le tout début de ma vie professionnelle, j’ai toujours vu des budgets où il manquait de l’argent.
On ne peut trouver nulle part, ni à l’échelon local ni sur le plan national, dans quelque domaine que ce soit, un budget où il ne manque pas de l’argent, même en période de prospérité. Le propre d’un budget, c’est de manquer toujours d’argent, alors que son gestionnaire voudrait toujours faire plus. Donc, je ne crois pas que la situation qui a été décrite par M. de Carolis soit originale à cet égard.
Par ailleurs, dans une période marquée par les difficultés que rencontrent nombre de nos concitoyens, je crois qu’il faut éviter de prélever plus par le biais de la redevance l’audiovisuelle.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° I-196.
En ce qui concerne l’amendement n° I-221, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement. La question posée est opportune, s’agissant de l’inclusion du GIP France Télé numérique dans le champ des bénéficiaires de la redevance audiovisuelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. S’agissant de l’amendement n° I-196, je répète, après M. le rapporteur général, que le montant de la redevance sera indexé sur l’inflation, comme le prévoit le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, le taux d’inflation étant contenu dans le projet de loi de finances pour 2009 – ce qui est déjà une bonne chose !
Le financement de l’audiovisuel public ne doit pas susciter d’inquiétude, monsieur le sénateur. Au contraire, dans un monde quelque peu chahuté et incertain, ce secteur aura désormais des bases plus stables de financement.
Certains estiment que c’est une situation anormale. Il faut pourtant savoir ce que l’on veut. Nous avons mis sur pied un nouveau mode de financement très stable, assurant un montant donné de ressources, qui pourrait faire beaucoup d’envieux parmi les gestionnaires.
Ceux qui craignent un affaiblissement du secteur public de l’audiovisuel n’ont pas dû bien lire le texte et n’ont pas effectué les comparaisons nécessaires. En tout cas, ces sujets seront largement débattus tant par l’Assemblée nationale qu’ensuite par le Sénat.
Pour toutes ces raisons, je ne peux pas être favorable à cet amendement.
À propos de l’amendement n° I-221, j’indique que la redevance a toujours servi à financer non seulement le fonctionnement de l’audiovisuel, mais aussi les passages d’une technologie à une autre, sachant que la transition vers le numérique a été précédée d’autres passages technologiques, toujours financés par la redevance.
En l’occurrence, l’introduction de la télévision numérique, offrant un accès gratuit à un plus grand nombre de chaînes et une image meilleure, représente bien un vrai changement technologique.
Il est traditionnel de faire appel à la redevance pour cela. À notre époque, nous assistons bien à l’extension de la réception d’images et de chaînes, et non à celle de la population. Il est bien naturel que ce phénomène soit financé en partie par la redevance. C’est ce que nous proposons pour faciliter ce passage en limitant la mesure dans la durée, puisqu’elle est prévue jusqu’en 2011.
Nous la restreignons également en termes de montants. Les versements interviennent de manière graduée, année après année, en 2009, 2010 et 2011.
Cette logique d’utilisation de la redevance est limitée dans le temps, car il s’agit de passer un seuil technologique important. Par la suite, je vous rassure, nous reprendrons un rythme normal.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° I-196.
Mme Nathalie Goulet. Sans avoir le talent de M. Ralite, je souhaite souligner la très grande inquiétude des personnels, et je ne parle pas seulement de ceux qui sont dans la rue aujourd'hui, mais aussi de ceux qui y étaient déjà il y a quelques semaines et qui nous ont interpellés.
Je pense aux salariés de France 3, qui, dans nos régions, sentent passer très près le vent du boulet d’une réforme qu’ils n’acceptent pas et qui risque de nuire de façon extrêmement dommageable à l’image des régions et à leur statut. Je pense aussi aux salariés de RFI. À ce propos, je signale que, en ce qui concerne le rayonnement extérieur de la France, nous sommes sur une pente savonneuse extrêmement dangereuse puisque nous licencions les journalistes qui émettent dans des langues étrangères – russe, chinois et farsi. (Mme Nicole Bricq opine.)
Si nous voulons continuer à communiquer sur la politique française et assurer son rayonnement en langue française en Chine, cela va devenir très compliqué ! Nous assistons à une paupérisation absolument lamentable de notre audiovisuel extérieur.
De plus, je trouve anormal que ce texte sur le financement arrive avant la réforme comme arrive le transfert des financements de la gendarmerie au ministère de l’intérieur avant le vote du changement de statut des gendarmes.
Bref, je souhaite dire ma très grande opposition à cette réforme et au financement prévu, qui augurent d’une très grande paupérisation de notre audiovisuel public.
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur l'amendement n° I-196.
M. Jack Ralite. Je veux répondre à quelques-uns des arguments qui ont été développés.
La redevance a servi à moderniser la télévision française : c’est vrai, c’est son histoire ! Sauf que vos prédécesseurs y ajoutaient la publicité quand vous la supprimez totalement et que vous avez l’indécence de lui ajouter un élément abandonné depuis un certain temps. Votre argument n’est donc pas valable.
Par ailleurs, l’audiovisuel dans sa totalité concerne 98,5 % des Français. On ne devrait même pas discuter d’une loi sur l’audiovisuel public, on devrait discuter d’une charte de la télévision, qui établirait une responsabilité publique nationale et sociale valable pour le public et pour le privé.
La BBC, dont on ne dit que merveilles, ce qui n’est pas toujours vrai – nul n’est parfait ! –, a su trouver ce chemin. Pourquoi ne le trouverions-nous pas ? Je le répète : 98,5% des Français sont concernés !
On nous reproche l’augmentation du montant de la redevance de 4 euros ! Le rapporteur général ne m’avait pas habitué à tant de sollicitude à l’égard des revendications ouvrières…
Pourquoi est-on si dur à l’égard du public et si souple en direction du privé ? Nous assistons presque à une déferlante en faveur de ce dernier !
En vérité, c’est de l’argent sélectif : on aide ceux qui en ont et qui pleurent, …
Mme Nicole Bricq. C’est vrai !
M. Jack Ralite. … et on refuse d’aider ceux qui en ont de moins en moins, mais qui heureusement ne pleurent pas et se battent !
Il faut absolument tenir compte de ces aspects. J’abonde dans votre sens : qui dit audiovisuel extérieur dit culture.
Mme Nathalie Goulet. Oui !
M. Jack Ralite. Au vu de l’état actuel des initiatives culturelles du ministère des affaires étrangères, ce sera bientôt upsilon !
Il est tout à fait intéressant de rencontrer Mme Merkel. Mais combien de centres culturels sont supprimés en Allemagne ? Si les Allemands les suppriment, c’est pour en ouvrir en Chine, alors que, nous, nous n’en ouvrons nulle part !
Nous avons une vue courte, quantitative et comptable de la situation. De quelle obligation de résultats est-il question ? Il ne s’agit pas des résultats du pays, mais de ceux d’une caste financière !
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne parlons pas des castes syndicales !
M. Jack Ralite. Les castes financières profitent et les « castes syndicales » se battent !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans une imagerie d’Épinal !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l'amendement n° I-196.
Mme Catherine Morin-Desailly. La commission pour l’audiovisuel public, qui a travaillé de façon assez approfondie pendant quatre mois, même si le temps a semblé trop court, a réalisé un travail très sérieux, sans tabou, comme l’a dit M. Ralite, et a surtout fait une évaluation précise, économies comprises, je tiens à le préciser.
Il y a deux éléments à considérer : d’une part, la compensation de la suppression de la publicité et, d’autre part, le financement de la réforme puisque France télévisions devient une entreprise unique dont le modèle de développement repose sur le global média, sur l’apparition de la haute définition et sur celle de la diffusion sur de multiples supports.
La totalité de la redevance était incluse dans les propositions financières. C’est ainsi que l’équilibre se dessinait. Revenir sur ce point aujourd'hui est assez périlleux, d’autant que, au moment de l’examen de la loi relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, Jacques Valade, ancien président de la commission des affaires culturelles, et Louis de Broissia, ancien rapporteur, avaient bien souligné que le GIP, pour l’instant, n’était pas financé.
Je sais, monsieur le ministre, que la redevance, comme vous l’avez dit, a servi à financer des passages technologiques. Au demeurant, je rappelle que le faible montant de la redevance, à savoir 116 euros, au regard de ce qui se pratique dans les autres pays européens, et compte tenu des préconisations de la commission pour l’audiovisuel public, ne permettra pas de financer pour partie, même temporairement, ce GIP. Je souhaitais attirer l’attention sur ce point.
Nous pouvons craindre, au vu des amendements adoptés par la commission spéciale de l’Assemblée nationale, que les financements soient loin d’être assurés ; les taxes sont divisées par deux. Et si le Sénat ne respecte pas les préconisations de la commission pour la télévision publique, au moins en termes d’affectation, cela augure mal du débat.
Il sera nécessaire, au cours des discussions que nous aurons dans les semaines à venir, d’évoquer de nouveau cette question de la redevance. Cette dernière est trop souvent diabolisée et présentée comme un impôt inique alors qu’elle est, en définitive, si on sait l’expliquer à nos concitoyens, une forme d’abonnement servant à financer non seulement la télévision, mais aussi la radio et d’autres services dont les Français bénéficient.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° I-196.
Mme Nicole Bricq. Après le brillant plaidoyer de notre collègue Jack Ralite, je veux dire que le groupe socialiste votera en faveur de l’amendement n° I-196, car nous considérons que la télévision publique est un bien public national.
Nous voterons également en faveur de l’amendement n° I-221 adopté à l’unanimité par les membres de la commission des affaires culturelles.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je souhaite revenir un instant sur l’amendement n° I-221 de la commission des affaires culturelles.
Je suis vraiment défavorable à cette proposition, comme j’ai été opposé à l’Assemblée nationale à un amendement similaire. Il est nécessaire que la redevance finance cette modernisation, d’autant qu’on ne retirera rien aux ressources. Il faut arrêter d’affirmer que les ressources de l’audiovisuel public seront fragilisées. Au contraire, on va renforcer ces ressources.
Regardez d’ailleurs les commentaires de ceux qui y sont opposés. Ils sont encore plus violents ! Cela signifie que le dispositif est finalement assez équilibré.
L’audiovisuel public sortira formidablement grandi du texte présenté par le Gouvernement et sur lequel je ne veux pas lancer le débat aujourd'hui.
Les ressources de l’audiovisuel public sont tout à fait garanties. Pour France télévisions, la hausse est de 2,7 %, pour Arte, elle est de 4 % en 2009, pour Radio France, elle est de 3,8 %, pour l’INA, elle est de 3,4 %. Ce n’est pas parce qu’on extraira une petite portion de la redevance pour financer le passage au numérique, qui favorise le développement de la télévision dans son ensemble, que le secteur de l’audiovisuel public en sera affaibli !
Pour assurer ce passage dans des conditions correctes, nous verserons 15 millions d’euros en 2009, 72 millions d’euros en 2010 et 131 millions d’euros en 2011, soit à peu près 220 millions d’euros pour un montant de redevance sur trois ans supérieur à 6 milliards d’euros.
Il n’y a donc vraiment aucune raison de craindre que l’audiovisuel public soit affaibli par le financement du GIP numérique, et il est normal de procéder de la sorte.
Voilà pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote sur l'amendement n° I-196.
M. Serge Lagauche. Lors des débats en commission, le Gouvernement a pris l’engagement que les GIP seraient financés à part et en supplément.
À l’époque, nous n’avions pas su évaluer le montant exact nécessaire à ce financement, en particulier pour la dernière année. Mais, si l’on veut respecter l’échéance de 2011, ce qui est très important pour l’ensemble du système, il faut faire un effort plus particulier dans ce domaine.
Le Gouvernement a pris un engagement et il serait très préjudiciable qu’il revienne sur la parole donnée.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je tiens à redire à Jack Ralite que la question de la redevance mérite d’être évoquée plus largement dans le cadre de nos débats futurs sur la télévision publique, notamment au regard des financements complémentaires qui seront apportés à France Télévisions. Je ne voterai donc pas son amendement.
En revanche, je maintiens l’amendement n° I-221, déposé au nom de la commission des affaires culturelles par notre collègue Michel Thiollière, qui ne pouvait malheureusement pas être présent aujourd’hui pour le défendre lui-même. En effet, le Gouvernement s’était engagé, comme vient de le rappeler Serge Lagauche, à trouver d’autres financements pour permettre le passage au numérique. Je ne voudrais pas mettre en péril l’équilibre souhaité par la commission des affaires culturelles pour notre audiovisuel public.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-196.
Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 48 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l’adoption | 140 |
Contre | 183 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° I-221.
Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 49 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 305 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 153 |
Pour l’adoption | 147 |
Contre | 158 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 23.
(L’article 23 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
5
Loi de finances pour 2009
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Débat sur les recettes des collectivités territoriales
M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur les recettes des collectivités territoriales.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat sur les recettes des collectivités territoriales et sur les articles qui s’y rapportent dans le projet de loi de finances est déjà une habitude assez ancienne.
Ce qui est ainsi devenu une coutume sénatoriale permet de formuler un certain nombre de remarques, venant se placer en facteur commun des différents articles relatifs à ces recettes.
À la vérité, madame le ministre, nous avons un peu anticipé, au cours de nos dernières séances, sur les finances des collectivités territoriales en traitant de l’article 9, qui, sans faire formellement partie de ce bloc, en relève fiscalement et économiquement. Il s’agissait en effet de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, dans son volet concernant les déchets, élément qui conditionne lui-même la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ou la redevance d’enlèvement des ordures ménagères. Nous avons pu parvenir, dans ce domaine, en présence d’Éric Woerth, puis de Christine Lagarde, à un dispositif consensuel auquel l’ensemble des groupes de notre Haute Assemblée a été en mesure de participer.
Je rappellerai tout d’abord que les collectivités territoriales, dans une période de difficultés, de rareté de l’argent public, de crise financière, doivent prendre leur juste part de l’effort consenti par tous, notamment par l’État. Il ne serait pas concevable que, dans cette situation difficile, les gestionnaires des différents budgets publics, aux différents niveaux, ne soient pas associés au respect de normes, de disciplines qui doivent s’appliquer à tous.
Cela conduit notre commission à souscrire à la définition de l’enveloppe globale des concours de l’État, qui sont compris dans la norme d’évolution de 2 %. Cela nous conduit également, fût-ce sans plaisir, à accepter l’inclusion du fonds de compensation de la TVA dans ladite enveloppe, étant entendu que ce fonds est totalement préservé, c'est-à-dire que chaque collectivité ayant réalisé des investissements obtiendra le juste retour arithmétique de ses investissements sous forme de remboursements de la TVA, avec le décalage habituel.
Contrairement à ce que l’on entend trop souvent, ici ou là, le fait d’inclure le FCTVA dans l’enveloppe dite « normée » ne change rien au calcul des droits de chaque collectivité ayant réalisé un investissement à de tels remboursements.
Il n’en reste pas moins que cette contrainte pèse sensiblement sur les variables d’ajustement. Ce poids est, d’année en année, de plus en plus lourd parce que les variables d’ajustement forment une enveloppe décroissante et que le même taux de diminution s’appliquant à une enveloppe qui, en valeur absolue, décroît d’année en année, l’exercice est de plus en plus cruel.
Cette situation est aggravée, pour 2009, par l’inclusion du fonds de compensation de la TVA dans l’enveloppe normée. Puisque le fonds de compensation continue à évoluer à son rythme, c’est-à-dire beaucoup plus vite que la norme de 2 %, il est clair que la répercussion s’opère sur nos fameuses variables d’ajustement.
Par conséquent, de la même manière que l’an dernier, la commission des finances a souhaité rendre cet effort plus supportable. En effet, il ne faut pas oublier, mes chers collègues, que cet effort s’impose à tous, notamment aux différents niveaux de collectivités territoriales. Qu’il s’agisse de collectivités rurales ou urbaines, de communes, d’intercommunalités, de départements ou de régions, la baisse des variables d’ajustement se fait sentir sur tous les budgets locaux.
Nous avons formulé des propositions sous forme d’un amendement global, dont nous sommes prêts à débattre avec le Gouvernement. Nous savons que certains éléments sont susceptibles de retenir son intérêt, d’autres un peu moins ; mais l’essentiel, pour nous, c’est le volume global.
Nous voudrions que, d’une manière ou d’une autre, à partir de gages qu’il va nous falloir trouver ensemble, une petite centaine de millions d’euros soit ajoutée au total des variables d’ajustement entre la loi de finances initiale et le prochain collectif budgétaire.
Ainsi, vous le voyez, madame le ministre, monsieur le ministre, la commission des finances du Sénat est tout à fait ouverte au dialogue sur ce sujet.
Nous souhaitons aussi qu’une attention particulière soit portée aux transferts de charges au détriment des budgets locaux. Je ne parle pas là spécifiquement des transferts de charges résultant d’une décision explicite, voire d’une norme affichée comme telle. Je parle aussi des transferts insidieux, qui chargent la barque à un point que les élus locaux considèrent comme insupportable.
Permettez-moi de vous donner un exemple, parmi beaucoup d’autres, de cette situation qui est vécue par de nombreuses communes dans bien des départements.
Il s’agit de l’ordonnance du 8 septembre 2005 relative aux monuments historiques et aux espaces protégés, dont vous n’êtes responsables ni l’un ni l’autre, puisque vous n’étiez pas membre du Gouvernement à ce moment-là, monsieur le ministre, et qu’en ce qui vous concerne, madame la ministre, le département ministériel dont vous aviez la charge n’avait pas directement trait aux budgets locaux.
Cette ordonnance a créé, au sein du code du patrimoine, une série d’articles tirant les conséquences du principe selon lequel le propriétaire a la responsabilité de la conservation du monument historique classé ou inscrit qui lui appartient.
Jusqu’à présent, une petite commune, par exemple de moins de 1 000 habitants, qui a un ou plusieurs monuments historiques, se contentait d’inscrire dans son modeste budget sa seule participation de 25 %. Aujourd'hui, sans qu’on en ait eu vraiment conscience lorsque la décision a été prise, les dispositions de l’ordonnance l’obligent à y inscrire la totalité de l’enveloppe.
Au final, cette commune, dont la surface financière est forcément très réduite, doit monter l’opération, attendre la subvention de l’État, c'est-à-dire du ministère de la culture, le cas échéant, celle du département, et assumer le risque complet de l’opération, alors qu’elle n’y contribuera en fin de compte que pour 25 % au maximum.
Je pourrais vous donner de nombreux exemples de telles situations.
Si je parle de transfert insidieux, c’est que, à la vérité, le Parlement n’a jamais voté sur ce point. Il y a bien eu une loi d’habilitation, mais ce fut donc à peine une loi !
J’ajoute que l’entrée en vigueur de cette ordonnance a été fixée à une date très tardive : le 1er janvier 2008.
Peut-être le président Hyest a-t-il l’exemple d’une situation de cette nature dans son département… (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, opine.)
M. François Marc. Il y en a partout !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quoi qu'il en soit, cette situation est l’exemple même de ce qu’il ne faudrait pas faire, aussi bien quant à la procédure législative retenue que quant au résultat, c'est-à-dire un transfert insidieux de charge, qui induit en outre une impossibilité de réaliser des opérations pourtant nécessaires.
D’où, très logiquement, un réel mécontentement chez les élus locaux. Dès lors, il ne faut pas s’étonner que, dans les assemblées générales des associations départementales de maires, de tels sujets finissent par ressortir et viennent assombrir le climat général.
Il conviendra de trouver une solution adéquate à ce problème. Le temps qui m’est imparti ne m’a permis que de citer ce cas-là de transfert insidieux, mais il en est d’autres.
Pour revenir à des considérations économiques, je voudrais rappeler que plus des trois quarts de l’investissement public national sont le fait des collectivités territoriales, lesquelles jouent par ailleurs, dans une période où la cohésion sociale peut être mise à mal ou menacée, un rôle important d’amortisseur social.
De ce point de vue, nous ne pouvons que nous féliciter de plusieurs initiatives que le Gouvernement a prises.
D’une part, il faut se réjouir des dispositions qui ont été adoptées très promptement, sous l’empire de la nécessité, mais, à mon sens, dans les meilleures conditions possibles, pour assurer le sauvetage de Dexia.
Vous le savez, mes chers collègues, l’État est entré au capital du groupe, à hauteur de 1 milliard d’euros, prélevés sur des recettes de privatisations. L’apport du pôle public français s’élève à 3 milliards d’euros, soit 26,3 % du capital de Dexia. Le principal dirigeant exécutif du groupe est une personnalité française, ayant la confiance des autorités de notre pays.
D’autre part, la loi de finances rectificative pour le financement de l’économie du 16 octobre 2008 a autorisé Mme la ministre de l’économie à accorder, à titre onéreux, la garantie de l’État aux financements levés jusqu’au 31 octobre 2009 par les sociétés du groupe Dexia. Il s’agit donc d’une garantie spécifique, destinée à couvrir les opérations interbancaires de l’entité de tête du groupe Dexia et de ses principales filiales. Conformément à l’accord international passé avec la Belgique et le Luxembourg, l’État s’est engagé à garantir les besoins de financement du groupe Dexia à hauteur de 55 milliards d’euros.
Je me permets d’évoquer ce sauvetage de Dexia, qui était une nécessité économique et financière, car il a permis d’adresser un signal fort aux collectivités territoriales. La Caisse des dépôts et consignations a été alertée : elle doit veiller à toutes les situations où une collectivité aurait de la peine à accéder aux marchés financiers ou tout simplement à obtenir la souscription d’un emprunt. Un recensement est en cours pour connaître les conditions contractuelles du passif existant dans les comptes des différentes collectivités territoriales et, en particulier, les risques issus de produits parfois trop complexes.
Mes chers collègues, la discussion des articles concernant les collectivités territoriales va nous permettre de revenir sur l’ensemble de ces questions, mais je voudrais conclure en évoquant les deux chantiers les plus importants.
Le premier est relatif à l’architecture de nos structures territoriales. Tous les élus locaux y sont évidemment très attentifs, en particulier ceux qui siègent dans cet hémicycle. Il convient de préserver ce qu’il y a de bon et de souple dans les structures actuelles, ainsi que la pluralité des approches et des financements, tout en simplifiant l’architecture et en augmentant la légitimité démocratique des organes élus de nos collectivités.
Ces enjeux sont tout à fait fondamentaux, mais recèlent de nombreuses contradictions. Nous devrons travailler avec une grande ouverture d’esprit sur ce sujet. Beaucoup d’entre nous, habitués aux intercommunalités, sont lassés des structures intermédiaires et de leurs complexités excessives, même si nous savons bien qu’il n’est pas possible de mener à bien une opération digne de ce nom sans mobiliser des concours financiers croisés de tous les budgets susceptibles de participer à une œuvre commune.
Pour ces raisons, et pour bien d’autres encore, nous allons débattre avec ouverture d’esprit, mais non sans quelques inquiétudes.
Qu’il s’agisse de la démocratisation des conseils intercommunaux, du lien à établir entre élection au niveau départemental et élection au niveau régional, ces enjeux stratégiques devront absolument être abordés dans les prochains mois.
À ce premier chantier s’ajoute celui qui est relatif aux financements. Parmi ces derniers, la taxe professionnelle est un souci majeur, présent dans l’esprit de tous les gestionnaires locaux, qui sont attachés à leurs moyens d’action que sont l’autonomie fiscale, la capacité de maîtriser le développement de leur collectivité et le vote des taux des impôts.
Comment concilier tout cela avec la modernisation des assiettes et la préoccupation, voire l’obsession de la préservation de la compétitivité des entreprises, qui doivent demeurer pour nous deux impératifs ? Là encore, nous sommes pris dans un lacis de contradictions dont il faudra bien sortir.
Les travaux qui seront conduits auront le mérite de nous permettre d’y voir plus clair et, je l’espère, de trouver des solutions, qui, lorsque viendra la sortie de crise, placeront nos collectivités territoriales dans une dynamique de développement ou, au moins, dans des conditions propices à la satisfaction des besoins de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat sur les collectivités territoriales est toujours, pour le Sénat, un moment particulièrement fort de l’examen du projet de loi de finances. C’est aussi une particularité de notre assemblée, traduisant l’une de ses missions constitutionnelles.
Ce débat nous donne l’occasion d’avoir une vision plus globale des moyens de l’État en faveur des collectivités territoriales, alors que, il faut bien le reconnaître, leur dispersion en première et en seconde partie de la loi de finances ne nous permet pas toujours de les apprécier à leur juste valeur.
L’effort financier total de l’État en direction des collectivités territoriales représente, je le rappelle, 96 milliards d’euros en 2009, et il inclut les dotations et prélèvements sur recettes, les dégrèvements, la fiscalité transférée et les subventions en provenance de divers ministères.
Or ces diverses contributions sont éclatées entre plusieurs missions budgétaires, parmi lesquelles figure la mission que j’ai l’honneur de rapporter au nom de la commission des finances, « Relations avec les collectivités territoriales », laquelle ne représente que 2,4 milliards d’euros.
La majeure partie de l’effort financier de l’État aux collectivités territoriales – soit plus de 56 milliards d’euros –, où la DGF occupe la première place, est en réalité constituée de prélèvements sur recettes, qui ne sont pas des crédits et ne font donc pas l’objet de débat au titre des missions budgétaires.
On constate le même éclatement au niveau des articles du projet de loi de finances entre la première partie, dans laquelle nous traitons de l’évolution de la DGF, des variables d’ajustement et des compensations d’exonérations, et la seconde partie où sont abordés des thèmes essentiels comme la péréquation, les compensations de transferts de charges et surtout la répartition de la dotation forfaitaire de la DGF des communes à l’intérieur d’une enveloppe fermée.
Dans la perspective d’une plus grande clarté dans le débat, on pourrait aussi s’interroger sur le choix de rattachement à l’une ou l’autre de certaines missions budgétaires.
Je prendrai simplement l’exemple de la nouvelle dotation « titres sécurisés », pour laquelle les crédits figurent dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales » alors que l’article qui la crée est rattaché à la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Vous conviendrez, madame le ministre, qu’il est parfois difficile de s’y retrouver !
Fort heureusement, la coordination entre les rapporteurs spéciaux a permis de parvenir à une position commune : la nécessité de réévaluer le remboursement de l’État aux communes qui délivreront les passeports biométriques. En effet, comme l’a indiqué M. le rapporteur général, il faut éviter de nouveaux transferts de charges trop partiellement compensés. Un amendement en ce sens a été déposé au nom de la commission des finances.
Ce débat sur les collectivités territoriales est aussi indispensable en ce qu’il complète utilement le document budgétaire relatif à l’effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales, dont le contenu a été nettement amélioré par rapport aux années antérieures. Ce « jaune » budgétaire constitue en réalité le socle de notre débat.
Qu’est-ce qui caractérise pour 2009 les relations entre l’État et les collectivités territoriales déterminées par le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques 2009-2012 ?
En premier lieu, les collectivités territoriales doivent s’inscrire dans l’effort de redressement des finances publiques. L’évolution de l’ensemble des concours de l’État aux collectivités territoriales doit désormais suivre le même rythme que celui des dépenses de l’État, c’est-à-dire l’inflation.
Or cette nouvelle règle représente une contrainte extrêmement forte pour les collectivités territoriales dans la mesure où le fonds de compensation de la TVA est désormais intégré dans l’enveloppe normée de leurs dotations budgétaires accordées par l’État.
En effet, sur un montant supplémentaire de concours de l’État aux collectivités territoriales de 1,1 milliard d’euros par rapport à 2008, le FCTVA à lui seul en « absorbe » 663 millions.
En second lieu, au sein de cette enveloppe, la dotation globale de fonctionnement bénéficie d’un traitement particulier dans la mesure où elle est assurée d’un taux de progression égal à celui de l’enveloppe normée, défini en référence à l’inflation prévisionnelle.
Pour 2009, la DGF se verra appliquer de manière exceptionnelle un taux de progression dérogatoire de 2 %. Cette progression, qui représente une hausse de crédits de 800 millions d’euros, est de nature à préserver la péréquation.
Toutefois, les augmentations cumulées de la DGF et du FCTVA étant supérieures à celle de l’enveloppe normée, la différence devra être compensée par une diminution à due concurrence de l’ensemble des variables d’ajustement, comme l’a souligné le rapporteur général. Cette diminution, qui était initialement de 22,81 % dans le projet de loi de finances pour 2009, a été ramenée à 17,7 % après le vote de l’Assemblée nationale.
Pour apprécier l’évolution réelle de la DGF, il faut aussi tenir compte des effets des résultats du recensement, qui devraient atteindre 300 millions d’euros, dont 140 millions d’euros au titre de la DGF communale. Les conséquences financières du recensement auront des répercussions sur chacune des composantes de la DGF, sans qu’il soit possible dès à présent d’en mesurer précisément l’ampleur.
Rares sont donc les collectivités qui bénéficieront d’une progression réelle de 2 % de leur dotation ! Nous allons plutôt vers une stabilisation, une compression, voire un léger repli, selon les cas, des montants de DGF.
Dans le contexte de tension budgétaire que nous connaissons, je voudrais profiter de ce débat pour évoquer l’évolution de la péréquation.
La révision constitutionnelle de 2003 a consacré la péréquation au rang d’objectif constitutionnel : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales. » Qu’en est-il aujourd’hui ? Comment les dispositifs en vigueur répondent-ils à cette volonté inscrite dans notre Constitution ?
La réforme de la DGF, en 2004, a permis d’augmenter les masses financières consacrées à la péréquation, et je tiens à souligner cet effort important. Concrètement, alors que la masse de la DGF à répartir augmentait de 9 % entre 2004 et 2008, l’ensemble des dotations de péréquation progressait dans le même temps de 39 %. Mais, a contrario, sur la même période, la dotation forfaitaire des communes, par exemple, n’a enregistré qu’une hausse de 2,6 %. Quant au poids de la solidarité au sein de la DGF, il a faiblement progressé, passant de 12 % à 16 %.
Nous constatons donc une contradiction : la progression des dotations de péréquation se fait au détriment des dotations forfaitaires, qui sont pourtant essentielles pour beaucoup de collectivités, notamment pour les plus petites d’entre elles. En conséquence, malgré les efforts importants consacrés par l’État à l’évolution des dotations de péréquation, l’écart de richesse se creuse entre les collectivités, à l’exception des régions. Cette affirmation est confortée par le rapport des professeurs Guy Gilbert et Alain Guengant, qui a été présenté le mois dernier au Comité des finances locales.
Si la performance péréquatrice des dotations aux régions a progressé de 7 % entre 2001 et 2006, celle des départements a chuté de 2,9 % et celle des communes de 2,3 % sur la même période.
Pour ce qui concerne les communes, l’exemple de la dotation de solidarité urbaine, la DSU, est assez symptomatique de la difficulté de mettre en place une véritable péréquation. Celle-ci profite en effet aux trois quarts des communes de plus de 10 000 habitants. Cette année, elle progressera de 70 millions d’euros.
Le Gouvernement propose un dispositif de transition à la suite des concertations qui ont été menées avec les associations d’élus. Ce dispositif permet d’assurer le maintien de cette dotation à toutes les communes éligibles et de concentrer les efforts sur les 150 communes les plus défavorisées. Néanmoins, une réforme s’avère bien nécessaire, avec l’application de nouveaux critères pour identifier les communes les plus fragiles et concentrer le soutien de l’État sur celles-ci.
Cette remarque vaut aussi pour la dotation de solidarité rurale, la DSR, dont la fraction « péréquation » profite aujourd’hui à 34 400 communes.
Quant aux règles de répartition de la dotation nationale de péréquation, les effets de seuil des critères d’attribution ont conduit le législateur à faire bénéficier de cette dotation 1 800 communes supplémentaires en 2008.
S’agissant des départements, la loi de finances de 2005 les a classés en deux catégories afin de permettre la répartition de la dotation de péréquation entre les départements urbains et les départements ruraux. Ainsi, en 2007, trente-trois départements de métropole ont bénéficié de la DPU. Mais force est de constater que sa répartition est peu discriminante et qu’elle ne profite pas suffisamment aux départements les plus en difficulté, même si, sur ce point, une étape vers plus de sélectivité est prévue dans l’article 67 du projet de loi de finances.
Pour ce qui est de la dotation de fonctionnement minimum des départements ruraux, trente-neuf nouveaux départements en bénéficient depuis 2005. Ils s’ajoutent ainsi aux vingt-quatre départements « historiques » éligibles à la DFM. Cet élargissement a permis de supprimer de nombreux effets de seuil, qui pénalisaient plusieurs départements. Mais il a également eu pour effet de geler la dotation des départements éligibles initialement, alors que certains d’entre eux, comme le Cantal, par exemple, sont particulièrement fragilisés.
Les régions, quant à elles, voient leurs dotations de péréquation progresser plus vite que leur DGF, de 14,7 % entre 2007 et 2008. Cependant, là encore, les effets de seuil et certains critères de sélection peuvent être très discriminants. En effet, la référence aux plafonds de potentiel fiscal moyen par habitant peut être fatale à certaines régions, notamment à celles dont les bases plafonnées de taxe professionnelle sont importantes, surtout lorsqu’elles se situent au-dessus de la moyenne nationale. C’est le cas de l’Auvergne, qui a perdu l’éligibilité à la dotation de péréquation alors que son PIB est l’un des plus faibles de France.
Le calcul de la richesse de certaines régions s’effectue donc sur des bases qui peuvent se révéler virtuelles. C’est la raison pour laquelle plusieurs sénateurs auvergnats, de toutes sensibilités, ont déposé un amendement identique visant à rétablir cette dotation aux régions les plus fragiles.
J’en viens maintenant au rôle péréquateur de l’intercommunalité.
Dans un contexte budgétaire tendu et en raison de la prise en compte des effets du recensement dans la DGF de 2008, la dotation d’intercommunalité progressera faiblement pour assurer le maintien des dotations de péréquation communales.
Cette évolution, qui sera au plus égale à l’inflation selon l’article 67 de la loi de finances, se traduira par « un manque à gagner » certain pour la DGF des intercommunalités. Or, il faut le souligner, les dotations d’intercommunalité exercent elles-mêmes un rôle puissamment péréquateur en faveur des communes, rôle renforcé non seulement par une mutualisation des ressources fiscales et des charges de services, mais aussi par des politiques de solidarité communautaires.
Enfin, je veux souligner que le pouvoir fiscal des intercommunalités sera également affaibli par le nouveau mécanisme de plafonnement à la valeur ajoutée de la taxe professionnelle, qui représente plus de 90 % de leurs recettes fiscales. Aussi, même si cette année personne ne peut échapper à l’effort collectif de redressement des finances de notre pays, nous devrons être attentifs à l’avenir au maintien des ressources de nos intercommunalités.
Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’État a réalisé ces dernières années un effort remarquable en faveur de la péréquation dans toutes les réformes successives des dotations aux collectivités. Ce n’est donc pas uniquement un manque de moyens qui empêche de réduire l’écart de richesse entre elles ; c’est plutôt la règle du jeu qui mérite d’être revisitée.
En cette période où les moyens de l’État se font plus rares, la recherche d’une meilleure efficacité des dotations de péréquation s’avère nécessaire. Car, nous le savons bien, l’incidence des restrictions budgétaires actuelles est plus forte pour les collectivités les plus fragiles.
Aussi l’État adresserait-il un signe positif en faveur de la solidarité territoriale en rouvrant le chantier de la péréquation. Je forme en tout cas le vœu que cet ouvrage soit remis sur le métier. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la première année, le budget de l’État s’inscrit dans un cadre pluriannuel qui prévoit le retour à l’équilibre des comptes pour 2012. Les collectivités territoriales sont pleinement associées à la réalisation de cet objectif. Désormais, la progression de l’ensemble des concours financiers de l’État aux collectivités locales sera strictement limitée à l’inflation prévisionnelle hors tabac.
Notre pays subit à l’heure actuelle les conséquences d’une crise économique globale. La réduction des dépenses publiques apparaît donc plus que jamais comme une priorité nationale.
Les évolutions en cours suscitent des inquiétudes chez les élus locaux. En effet, les collectivités territoriales, auxquelles de nombreuses compétences ont été transférées au cours des quatre dernières années et qui réalisent près des trois quarts de l’investissement public de notre pays, sont directement touchées par la crise, financière d’abord, économique ensuite.
Les nombreuses réformes annoncées par le Gouvernement pour 2009 – réorganisation territoriale, intercommunalité, fiscalité locale – devront donc plus que jamais être engagées dans une totale transparence, et dans le respect des prérogatives de chacun.
Pour ma part, je me félicite des progrès réalisés au cours des derniers mois en vue de mieux prendre en compte les intérêts et les préoccupations des collectivités. Mais avant d’aborder ce point plus en détail, je tiens à revenir rapidement sur les contraintes nouvelles qui pèsent sur les concours financiers de l’État aux collectivités.
Le principe d’un encadrement de la progression de ces concours financiers n’est pas nouveau : depuis 1996, en effet, les principaux concours alloués aux collectivités et à leurs groupements sont rassemblés au sein d’une « enveloppe normée », dont la progression est contrainte par une indexation fixée à l’avance.
Je rappelle que, entre 2001 et 2007, cette enveloppe a évolué en fonction d’un indice qui prenait en compte l’inflation prévisionnelle augmentée d’un tiers du taux de croissance de notre économie. Cette règle d’évolution, très favorable aux collectivités, avait permis de renforcer les moyens affectés à la péréquation.
Ce mécanisme est toutefois apparu incompatible avec l’objectif de stabilisation des dépenses en volume que s’impose l’État depuis 2003. Le rapport Pébereau de décembre 2005 a d’ailleurs souligné la nécessité d’associer les collectivités territoriales à l’objectif de réduction des déficits publics.
C’est pourquoi la loi de finances de 2008 a instauré un contrat de stabilité visant à faire progresser l’enveloppe normée au rythme de la seule inflation. Toutefois, au sein de cette enveloppe, la DGF continuait à progresser selon un indice composé de l’inflation augmentée de la moitié du taux de croissance du PIB et un certain nombre de concours financiers restaient en dehors de l’enveloppe, notamment le FCTVA. J’y reviendrai.
Le projet de loi de finances pour 2009 prolonge et systématise cette évolution : premièrement, à l’exception des subventions accordées par les ministères, la totalité des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, y compris le FCTVA, sont intégrés à l’enveloppe normée ; deuxièmement, cette dernière continue de progresser au seul rythme de l’inflation prévisionnelle ; enfin, au sein de l’enveloppe normée, la progression de la DGF est, elle aussi, limitée à la seule inflation prévisionnelle.
Il s’agit là d’une évolution essentielle pour les finances des collectivités locales. Toutefois, je relève que le projet de loi de finances prévoit un certain nombre d’aménagements techniques destinés à dégager des marges de manœuvre en faveur de la péréquation.
En outre, le projet de réforme de la DSU initialement conçu a suscité beaucoup d’inquiétudes parmi les élus locaux. À cet égard, je me félicite que le ministère de l’intérieur ait finalement accepté d’étaler cette réforme sur plusieurs années. Une réforme de la DSU est probablement souhaitable, mais elle ne doit pas se faire dans la précipitation.
Par ailleurs, je salue la création de deux dotations, l’une, la dotation de développement urbain, la DDU, consacrée à cent villes particulièrement défavorisées et l’autre affectée aux communes touchées par les restructurations du ministère de la défense. En ces temps de crise, il s’agit d’un effort appréciable pour soutenir les collectivités qui rencontrent le plus de difficultés.
En revanche, l’inclusion du FCTVA au sein de l’enveloppe normée me pose problème et je suis sensible aux arguments des élus locaux qui soutiennent que le FCTVA constitue un remboursement et non une dotation de l’État aux collectivités.
Comme je l’ai déjà rappelé, les collectivités territoriales réalisent près des trois quarts de l’investissement public. Dans le contexte économique actuel, cette capacité mérite d’être préservée. J’espère donc que cette question pourra être débattue à l’occasion des réformes annoncées par le Gouvernement pour l’année 2009.
La progression des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales est désormais fortement contrainte, mais, en contrepartie, des progrès ont été réalisés afin de mieux prendre en compte les intérêts et les positions des collectivités.
Je veux tout d’abord parler de la conférence nationale des exécutifs, qui constitue depuis l’année dernière une enceinte de dialogue au plus haut niveau entre l’État et les exécutifs des collectivités territoriales. Son rôle doit être affirmé.
Je veux ensuite et surtout parler de la mise en place de la commission consultative d’évaluation des normes. La création de cette nouvelle instance reflète l’évolution, ces dernières années, du débat sur les relations financières entre l’État et les collectivités locales.
Ce débat s’est d’abord concentré sur la question de la compensation des charges résultant des transferts de compétences aux collectivités. Les dépenses des collectivités ont en effet fortement progressé dans la période récente : de 36 % entre 2002 et 2007. Toutefois, les travaux de la commission consultative d’évaluation des charges ont montré que l’État avait scrupuleusement respecté ses engagements en matière de compensation des transferts de compétences. En outre, le rapport de la Cour des comptes de juin 2008 a montré que ces transferts n’étaient qu’en partie responsables de l’augmentation dynamique des dépenses locales.
L’attention s’est alors portée sur la question de l’impact des normes – sanitaires, sécuritaires ou environnementales, par exemple – sur les finances des collectivités. L’étude de cette question au sein du groupe de travail présidé par notre collègue Alain Lambert, en particulier, a conduit à la création récente de la commission consultative d’évaluation des normes, qui sera notamment appelée à se prononcer sur les projets de normes imposés, à l’échelon national ou communautaire, aux collectivités.
Le rôle de cette commission ne pourra être que renforcé par l’entrée en vigueur, le 1er mars prochain, des dispositions de la Constitution prévoyant une meilleure évaluation de l’impact des textes législatifs.
Pour ma part, je salue la création de cette commission, qui permettra de mieux prendre en compte les contraintes et les besoins des collectivités. Il s’agit d’une étape importante dans le renforcement de l’autonomie des collectivités territoriales.
En tout état de cause, cette autonomie passe nécessairement par une réforme d’ensemble de la fiscalité locale. Je le dis chaque année ! (Sourires.)
Chacun s’accorde à reconnaître la complexité excessive de notre fiscalité locale, dont les bases ne sont pas adaptées aux enjeux de notre économie, si bien qu’au gré des réformes ponctuelles successives, l’État est devenu le premier contribuable local. Ce constat, nous le faisons depuis des années, sans qu’un accord ait encore pu être trouvé sur les modalités d’une réforme globale.
À l’heure où l’État est contraint de limiter la progression de ses dépenses, et notamment celle des concours financiers qu’il attribue aux collectivités, la question d’une réforme d’ensemble de la fiscalité locale revêt plus que jamais un caractère d’urgence.
Il me semble donc essentiel que cette question figure en tête des projets de réforme relatifs à l’organisation territoriale de notre pays et à la démocratie locale, cette sorte de monstre du loch Ness dont on parle toujours, mais qu’on ne voit jamais. Peut-être celui-là va-t-il enfin se montrer ! (Sourires.)
Acceptons-en l’augure ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le pilotage de nos finances publiques sera, en 2009, contraignant et périlleux. Et ce constat, vous en conviendrez, s’applique tout autant aux finances de l’État qu’à celles de nos collectivités territoriales.
C’est pourquoi je soutiens le choix courageux du Gouvernement d’appliquer à l’ensemble des concours de l’État aux collectivités territoriales la norme de progression « zéro volume » qu’il s’impose à lui-même.
J’ai en effet la conviction que nous ne devons plus parler désormais de finances publiques en opposant les intérêts des collectivités territoriales à ceux de l’État. Au contraire, c’est la solidarité entre celui-ci et celles-là qui permettra seule le retour à l’équilibre budgétaire à l’horizon de l’année 2012. Espérons en tout cas que cette échéance sera maintenue et que cet horizon-là n’aura pas tendance à se déplacer à mesure que l’on avancera !
Ayons également présent à l’esprit le fait que les flux financiers passant des caisses de l’État à celles des collectivités territoriales s’élèvent à plus de 95 milliards d’euros.
Pour autant, je ne mésestime pas les conséquences de l’intégration du FCTVA à l’enveloppe normée. La progression des dépenses de ce fonds est liée aux décisions d’investissement prises par les collectivités territoriales les années précédentes. Elle atteindra 12,7 % en 2009 par rapport à 2008, ce qui correspond à un montant de 663 millions d’euros, soit plus de 60 % de la marge d’augmentation de l’enveloppe élargie.
Faut-il en déduire que, dans son principe actuel, le FCTVA est condamné du fait de son intégration à l’enveloppe normée et qu’il doit inévitablement se transformer en dotation de subventions ? Très franchement, je ne le crois ni ne le souhaite. En tout cas, cela ne doit pas être fait pas de manière subreptice et ce point doit aussi être examiné dans la réflexion d’ensemble qu’appellent les ressources et le rôle des collectivités territoriales.
Je salue également le geste qu’a fait le Gouvernement en direction des collectivités territoriales en renonçant à appliquer immédiatement la règle de l’indexation sur l’inflation. Le maintien en 2009 d’une progression de 2 % de l’ensemble des dotations et prélèvements sur recettes, alors qu’on a été conduit à réviser raisonnablement le taux de l’inflation à 1,5 %, représente un surplus de 275 millions d’euros en faveur des collectivités territoriales, dont 200 millions au seul titre de la dotation globale de fonctionnement.
La commission des finances, à travers les amendements qu’a préparés notre rapporteur général, vous proposera, enfin, d’atténuer la baisse des variables d’ajustement en procédant, au sein de l’enveloppe normée, à des réaménagements qui devraient redonner un peu de fluidité à ces opérations.
Au total, les modifications que vous soumettra notre commission permettront de passer d’un taux de diminution des variables d’ajustement de 17,7 % dans la rédaction actuelle de l’article 15 à un taux légèrement supérieur à 10 %, en ajoutant 142 millions d’euros au montant global des variables d’ajustement.
Au-delà des flux financiers entre l’État et les collectivités territoriales, je voudrais à nouveau lancer un appel en faveur d’un moratoire sur les normes. (M. Alain Lambert applaudit.)
Je n’ignore pas qu’une commission consultative d’évaluation a vu le jour. Mais ne nous payons pas de mots : trop souvent, la mise en place de telles commissions accrédite l’idée selon laquelle nous avons réglé les problèmes, alors qu’en fait, mes chers collègues, il n’y a absolument rien de changé ! (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
M. François Marc. Et voilà !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Soyons pragmatiques : nous sommes confrontés à une crise dont nous avons encore quelque peine à mesurer l’ampleur réelle et les conséquences sur les finances de notre pays comme de nos territoires. De toute évidence, cette crise financière va se transformer en crise sociale.
Je vous en conjure donc, madame le ministre, monsieur le ministre, entendez mon appel : halte à l’inflation de normes !
M. Alain Lambert. Y compris celles résultant de la loi !
M. Adrien Gouteyron. Eh oui !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J’y viens, chers collègues !
Je pense aux normes qui s’appliquent aux établissements recevant du public.
Je pense aux normes environnementales qui font notre fierté et qui font suite au Grenelle de l’environnement. Comme s’il y avait, d’un côté, les avancées du Grenelle et, de l’autre, les contraintes financières !
Je pense également aux normes qui concernent les installations sportives.
MM. Adrien Gouteyron et Jean-Pierre Fourcade. Absolument !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je pense encore à certain projet visant à changer les chaussures des pompiers ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Vial. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Tout cela est coûteux et a un impact sur les finances publiques. Je souhaite donc que nous puissions modérer notre ardeur à édicter des normes, car celles-ci mettent en péril nos finances locales.
Récemment, nous avions ici même un débat sur la question de savoir si tous les petits enfants devaient être placés en crèche. Mais quand on sait qu’une place en crèche coûte 16 000 euros par an à la collectivité, il est vain d’imaginer que l’on puisse tous les accueillir !
Soyons donc un peu plus pragmatiques dans nos approches. Et, disant cela, je m’adresse tout autant au Gouvernement qu’à nos collègues députés et à nous-mêmes, mes chers collègues ! Car, bien souvent, par nos votes, nous sommes à l’origine de nouvelles normes, sans pour autant que nous ayons mesuré précisément les conséquences de ces normes sur les différents budgets.
M. Alain Lambert. Exactement !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. À ce propos, je vous remercie infiniment, madame le ministre, d’avoir renoncé à publier un projet de décret portant aménagement des indemnités versées aux sapeurs-pompiers volontaires.
Lors de la discussion générale, j’ai rappelé que, dans un contexte de crise, nous devions tout à la fois poursuivre les réformes – voire, sans doute, les amplifier – et préserver la cohésion sociale.
En ce qui concerne les collectivités territoriales, quels sont les débats et les chantiers qui nous attendent en 2009 ?
Je pense tout d’abord au chantier de la réforme de la taxe professionnelle, qui ne pourra pas se limiter à la mesure d’urgence figurant dans le projet de collectif budgétaire pour 2008 et qui prévoit que l’on exonère les investissements en 2009. En effet, cette mesure posera deux problèmes. Le premier tient à une question de concurrence entre les entreprises ayant investi en 2008 ou avant et celles qui vont investir en 2009 : bien qu’engagées sur les mêmes marchés, les unes et les autres ne connaîtront pas les mêmes contraintes. Le second réside dans le fait que nous ne pourrons pas nous en tenir à cette seule mesure. Comment l’État parviendra-t-il à compenser le manque de ressources des collectivités territoriales ?
Je pense ensuite au chantier, si complexe et si rude, de la réforme des collectivités territoriales. Il nous faudra, mes chers collègues, beaucoup de lucidité, et sans doute aussi beaucoup de courage, pour avancer de façon à résoudre le problème que constitue l’empilement actuel des structures : communes, communautés de communes, sans oublier certains syndicats à vocation spécifique, mais aussi les pays, regroupant parfois plusieurs communautés de communes, et, enfin, les départements et les régions.
Toutes ces instances, outre qu’elles sont terriblement chronophages pour les élus, n’aident pas à démêler les responsabilités des uns et des autres. Il faut savoir exactement qui fait quoi au sein de l’ensemble des collectivités territoriales. Les citoyens s’y perdent et, bien souvent, les élus eux-mêmes ont du mal à s’y retrouver !
Il nous faudra donc tenir compte, sur ce sujet, du verdict ou de l’appréciation que porteront les groupes d’experts.
N’oublions toutefois jamais que les collectivités constituent un formidable amortisseur de crise. Cela est vrai en ce qui concerne les investissements, mais cela l’est tout autant en matière de cohésion sociale. M. le rapporteur général nous le rappelait tout à l’heure : les collectivités territoriales participent à l’investissement public à hauteur de 75 %.
Nous devons également prendre en considération des dispositions qui, tout en n’intéressant à première vue que les finances de l’État, ont en réalité un impact direct sur la fiscalité et les ressources des collectivités territoriales.
Nous en avons eu un exemple hier, lorsque le Sénat a débattu de la réforme de la taxe générale sur les activités polluantes concernant les déchets. Le dispositif que nous proposait le Gouvernement consistait à augmenter très substantiellement la TGAP. Or nous devons avoir à l’esprit que de telles hausses conduisent immanquablement à une augmentation significative du prélèvement fiscal sur les contribuables locaux.
Notre commission des finances, en concertation avec les représentants des diverses sensibilités politiques qui s’expriment dans cet hémicycle, a profondément remanié le dispositif, et je pense que nous avons fait là du bon travail.
Mais, sur ce point particulier, me reviennent à l’esprit certains commentaires qu’on a pu entendre. L’idée était en substance la suivante : puisque les citoyens font beaucoup d’efforts pour réduire le volume de déchets, ce n’est pas grave si la TGAP augmente, car, de toute façon, ils ne paieront qu’à peine plus…
Il faut tout de même être sacrément pédagogue pour réussir à convaincre des gens qui font déjà des efforts pour trier leurs déchets et réduire le volume de ce qu’ils destinent à la collecte par le service public d’enlèvement du bien-fondé du raisonnement selon lequel, puisqu’ils font beaucoup d’efforts, ils paieront un peu plus cher !
Débarrassons-nous de ce genre d’idées qu’on a peut-être tendance à cultiver trop facilement au sein de l’ADEME – Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ou d’autres organismes experts, et veillons à ce que les efforts accomplis par les citoyens soient reconnus et récompensés.
Je crois que, face à la crise, il faut d’abord beaucoup de confiance. Et le premier domaine dans lequel il faut garantir cette confiance, c’est celui des relations entre l’État et les collectivités territoriales. Il s’agit en effet de préserver la cohésion sociale en même temps qu’un immense potentiel d’investissement public.
Nous comptons sur vous, madame le ministre, monsieur le ministre, pour nous aider à entretenir cette confiance. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, la période de crise que nous traversons a conduit le Gouvernement, cela a d’ailleurs été rappelé, à vous proposer de réviser les hypothèses sur lesquelles le projet de loi de finances pour 2009 avait été bâti.
Dans cette révision, que nous avons annoncée d’abord au Sénat, je tiens à le souligner, nous avons été à la fois réactifs et constants.
Nous avons été réactifs en ce que, avec Christine Lagarde, nous avons proposé de revoir les prévisions de croissance aussi rapidement que possible, c’est-à-dire aussitôt qu’a été entamé le débat sur la loi de programmation des finances publiques. Nous avons ainsi pu débattre de la révision pour toutes les finances publiques et pour l’ensemble de la législature.
Nous avons été constants en ce que nous n’avons pas modifié notre ligne quant à l’évolution des dépenses au-delà de l’incidence mécanique de ces hypothèses révisées sur la charge d’intérêt et sur les dépenses indexées. Notre choix a été de ne pas modifier la progression réelle des dépenses ni de chercher à compenser par des augmentations de recettes la faiblesse de la conjoncture.
Cette révision a conduit le Gouvernement à faire des choix au sein des dépenses, et ceux-ci, vous le savez, ont été favorables aux collectivités locales.
Pour prendre l’exemple le plus emblématique, nous en sommes restés, concernant la progression des dotations de l’État aux collectivités, au taux d’augmentation de 2 %, c'est-à-dire le taux d’inflation prévisionnelle précédemment envisagé, alors que le taux retenu pour celle-ci après révision est de 1,5 %.
Les choix que nous avons arrêtés à l’égard des collectivités territoriales sont assumés ; ils avaient fait l’objet de nombreuses discussions avec les uns et les autres, qu’il s’agisse de la Conférence nationale des exécutifs locaux, du Comité des finances locales, sans parler des débats qui se sont déroulés au sein de votre assemblée.
Le Gouvernement a choisi, tout d’abord, de faire un effort exceptionnel en faveur des collectivités locales en 2009, dans le contexte de crise économique qu’ont rappelé le rapporteur général et le président de la commission des finances.
Le Gouvernement a choisi, ensuite, de préserver l’investissement des collectivités, qui représente les trois quarts de l’investissement public. Cela étant, le budget de l’État comporte aussi de nombreux chapitres qui assurent l’avenir et qui correspondent en fait à de l’investissement, même si, d’un point de vue comptable, ils sont considérés comme des charges de fonctionnement.
Le Gouvernement a, en outre, choisi de soutenir le pouvoir d’achat des collectivités territoriales.
Enfin, le Gouvernement a fait le choix d’assurer l’équilibre entre les différentes collectivités territoriales.
Je sais que la Haute Assemblée est, par nature, extrêmement sensible à de telles priorités.
Le fait d’avoir maintenu une augmentation de 2 % des concours de l’État aux collectivités territoriales, alors qu’elle devrait être révisée à hauteur de 1,5 %, n’est nullement négligeable. Ce sont 275 millions d'euros supplémentaires par rapport à la norme du « zéro volume » qui permettront de soutenir l’investissement des collectivités dans cette période de crise. D’une certaine façon, cette somme constitue un bonus par rapport à la révision des hypothèses. L’État a ainsi privilégié les concours aux collectivités locales plutôt que le remboursement de la dette ou ses propres dépenses. Nous avons agi dans la plus grande transparence sur ce sujet.
Au total, les concours aux collectivités territoriales progresseront en 2009 de 1,1 milliard d'euros. Compte tenu de cet effort déjà considérable, le niveau des concours aux collectivités ne pourra pas être modifié au-delà de cette somme, nous devons en avoir tous clairement conscience, même si ce discours ne fait pas toujours plaisir. En ces temps difficiles, vous en êtes certainement persuadés, nous avons essayé d’équilibrer l’effort auquel nous sommes astreints.
M. Jean-Pierre Raffarin. Quelle grandeur d’âme ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. Éric Woerth, ministre. Entre la présente discussion du projet de loi de finances et celle du prochain collectif budgétaire, notamment, nous aurons évidemment l’occasion de débattre des grands équilibres au sein de cette enveloppe.
Les députés ont d'ailleurs apporté plusieurs modifications lors du débat à l’Assemblée nationale, et nous accueillerons naturellement avec intérêt les propositions du Sénat.
J’en viens maintenant à un sujet qui suscite bien des débats. Certains d’entre vous estiment que l’État a changé la règle du jeu en introduisant le FCTVA dans le périmètre des concours, donc dans l’évolution globale.
MM. Jarlier et Saugey ont évoqué les « enveloppes normées ». L’expression commence à dater, car elle ne correspond plus vraiment à la réalité ; il convient aujourd'hui de raisonner sur l’ensemble des dotations de l’État aux collectivités territoriales.
Le FCTVA a bien vocation à être pris en compte dans l’ensemble des concours aux collectivités territoriales, car c’est un transfert à leur bénéfice, même s’il s’agit d’un remboursement, et non d’une dotation.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Éric Woerth, ministre. Je le dis parce que notre position est parfois caricaturée. Après le Premier ministre et la ministre chargée des collectivités territoriales, le ministre du budget vous le dit à son tour : le FCTVA n’est pas une dotation, mais un remboursement. Ce point est très important pour l’avenir, si nous devons travailler sur l’évolution du FCTVA.
Nous ne touchons pas au FCTVA. La progression naturelle du fonds, qui s’élève à 663 millions d'euros, n’est pas modifiée et sera intégralement versée aux collectivités territoriales. Toutefois, cette progression entrant dans l’enveloppe de la progression de 2 %, il faudra évidemment procéder à quelques ajustements sur le reste, d’autant que la dotation globale de fonctionnement progresse également de 2 %.
Au total, nous demandons aux collectivités locales un effort se traduisant, tout en tenant compte du niveau de l’inflation, par une appréciation nouvelle du volume et de la nature des dotations concernées par ce principe d’évolution.
Chacun doit prendre sa part de l’effort national face à cette crise : le Gouvernement, le Parlement, les pouvoirs publics dans leur ensemble, tous les Français. Malheureusement, les collectivités locales ne sont pas « en lévitation » au-dessus d’une crise qui toucherait le monde entier en les épargnant ! Je suis moi-même le maire d’une commune qui est affectée par cette crise. Nous devons simplement essayer de répartir la charge le plus justement possible sur l’ensemble des structures publiques.
Le troisième choix du Gouvernement consiste à soutenir le pouvoir d’achat de toutes les collectivités.
La dotation globale de fonctionnement progressera donc de 2 %, soit un demi-point de plus que l’inflation révisée. Nous avons également accueilli favorablement la proposition de l’Assemblée nationale de revaloriser de 2,5 % la taxe d’habitation et de 1,5 % la taxe sur le foncier non bâti. L’État prend ainsi, d’une certaine manière, la responsabilité de dégager de nouvelles marges de manœuvre pour les collectivités territoriales.
En outre, le Gouvernement a su entendre les élus locaux sur la dotation de solidarité urbaine. Mme Alliot-Marie a, en particulier, conduit des négociations avec l’ensemble des élus locaux. Il en est résulté à la fois une réflexion sur l’évolution de cette dotation et la prise en compte de la situation que nous connaissons cette année.
Certaines catégories de collectivités bénéficient de compensations d’exonérations fiscales dont le montant, ajusté année après année, peut représenter une part importante de leurs recettes. Nous l’avons pris en compte.
Il fallait trouver un compromis entre l’intérêt de tous et la préservation de l’équilibre du budget de certaines collectivités. Nous avons donc pris deux mesures.
D’une part, nous avons gelé la progression des dotations autres que la DGF, afin de préserver les compensations fiscales d’un écrasement trop important. Ainsi, les dotations de fonctionnement autres que la DGF et les dotations d’investissement autres que le FCTVA verront leur montant de 2008 reconduit en 2009.
D’autre part, nous avons réparti la charge de l’ajustement sur de nouvelles compensations d’exonérations fiscales de manière que toutes les collectivités participent à cet effort, qui sera d’autant moins difficile. Près de 560 millions d'euros de compensations sont ainsi intégrés, notamment des compensations de taxe foncière sur les propriétés bâties et diverses compensations de taxe professionnelle.
L’Assemblée nationale a amélioré cet équilibre en limitant la progression des amendes de police au profit de la préservation des compensations d’exonérations fiscales. Nous sommes ouverts aux propositions qui améliorent l’équilibre du projet du Gouvernement, dès lors que le cadre global n’est pas modifié, c'est-à-dire, je le rappelle – au risque de devenir franchement impopulaire ! –, que la progression de l’ensemble reste limitée à 2 %.
Je ne développerai pas la question des transferts de compétences, qui relève de la compétence de Michèle Alliot-Marie. Je précise cependant que le Gouvernement vous présentera deux amendements permettant d’assurer au plus près la compensation financière des compétences transférées : 135 millions d'euros supplémentaires seront versés aux départements et aux régions, au-delà de ce qui était prévu lors de l’adoption de la première partie du projet de loi de finances pour 2009 à l’Assemblée nationale. Ces recalages correspondent principalement au fait que, au moment de l’élaboration du projet de loi de finances, les personnels concernés par ces transferts ne s’étaient pas encore tous prononcés.
Surtout, nous reconduirons un dispositif essentiel en termes sociaux : le fonds de mobilisation départementale pour l’insertion, qui revêt une grande importance pour ces collectivités.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, l’effort financier de l’État en faveur des collectivités locales pour cette année 2009 est réel, clair et sincère ; il s’inscrit dans le contexte de crise que chacun connaît. Le projet de budget prouve que le Gouvernement sait se montrer très attentif aux attentes des collectivités et à leurs besoins en ces temps particulièrement difficiles sur le plan économique. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le temps programmé pour le Gouvernement est prévu au maximum pour trente-cinq minutes.
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, les recettes des collectivités territoriales donnent traditionnellement lieu à de grandes discussions au Sénat.
Dans la situation actuelle, il me paraît fondamental que les relations entre l’État et les collectivités locales, en particulier sur le plan financier, soient fondées sur la confiance.
En vérité, je suis un peu surpris que le Gouvernement ne semble pas véritablement en mesure de montrer l’effort, tout à fait réel, qu’il accomplit en faveur des collectivités territoriales. Nous nous trouvons en effet devant un fatras passablement incompréhensible, ce qui tend à prouver que nous sommes probablement arrivés au bout d’un système de relations entre l’État et les collectivités locales.
Permettez-moi de prendre quelques exemples.
Le premier a trait au fonds de compensation pour la TVA, sujet sensible entre tous. Lorsque ce fonds a été mis en place, il ne s’agissait pas pour l’État de rembourser la TVA acquittée par les collectivités locales : ce n’était pas possible dans la mesure où c’est un impôt européen. On a donc trouvé un système permettant de compenser partiellement l’effort d’investissement réalisé par les collectivités locales.
Ces dernières sont attachées charnellement au fonds de compensation de TVA.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Charnellement ?
M. Michel Mercier. Tout à fait ! Et c’est normal !
Je ne comprends pas pourquoi on a mêlé cette question à la notion d’enveloppe normée. (M. Daniel Dubois applaudit.)
MM. Jean-Paul Amoudry, et Christian Gaudin. Très bien !
M. Michel Mercier. Je relisais tout à l’heure le rapport écrit de M. Marini. L’article 15 y fait l’objet d’une trentaine de pages. Voilà qui est fort instructif : c’est d’une opacité totale ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n’est pas ma faute : c’est la matière qui veut ça ! (Nouveaux sourires.)
M. Michel Mercier. En effet, ce n’est pas votre faute.
À relire attentivement ce rapport, on s’aperçoit qu’il n’y a plus d’enveloppe normée. M. Woerth l’a dit, mais au bout de dix minutes, alors qu’il suffisait de le dire d’emblée.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est l’enveloppe mort-née ! (Nouveaux sourires.)
M. Michel Mercier. Il n’y a plus que des concours de l’État aux collectivités locales. Le fonds de compensation de la TVA continue à vivre sa vie et il est normal de le réaffirmer, notamment au moment de la réunion du congrès des maires. Ensuite, selon l’évolution pluriannuelle des finances publiques, les concours de l’État aux collectivités locales se limiteront à l’inflation.
Vous prenez en compte l’inflation en écartant certaines données et, au total, c’est très complexe et très opaque. Or les collectivités ont besoin de clarté pour éprouver de la confiance.
Pourtant, vous consentez de vrais efforts, mais ils ne ressortent pas. Ainsi, au moment du recalage de l’inflation, le fait d’avoir maintenu une augmentation de 2 % représente un effort authentique. Le rebasage de 2,5 % pour le foncier bâti en est un autre. Mais le Gouvernement n’en parle même pas ! Je ne comprends pas que vous ne cherchiez pas à « nourrir » cette confiance en mettant en avant ces efforts réels. Car 2,5 %, ce n’est pas négligeable. Et je pense que, du fait de ce rebasage, certaines collectivités n’auront pas à augmenter leurs taux d’imposition.
Il y a donc bien, dans les décisions du Gouvernement, de quoi alimenter la confiance des collectivités territoriales. Mais il ne faut pas toucher au FCTVA ! Vous n’y touchez pas, mais vous avez évoqué la question. Pour les maires, cela revient au même !
Madame le ministre, redites clairement, lors du congrès des maires, que vous ne touchez pas au FCTVA !
Demain, il faudra nécessairement relancer l’économie. L’État ne le fera pas tout seul : il le fera avec les collectivités locales. Ne ruinez pas cette confiance !
Dans ce projet de budget, il est des éléments positifs qui méritent d’être soulignés. D’autres appellent des critiques. M. le président de la commission des finances a évoqué la question des chaussures des sapeurs-pompiers, mais ce n’est pas la seule. Nous-mêmes, au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, nous traitons actuellement des tentatives de fusion des sapeurs-pompiers de la catégorie C dans la catégorie B. C’est très technique, mais ce sont des dizaines de millions d’euros qui sont en jeu.
Nous participons donc tous à cette opacité des relations financières entre l’État et les collectivités locales.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Michel Mercier. Pour conclure, je dirai que nous sommes arrivés au bout d’un système. Nous avons besoin d’une vraie réforme de l’architecture des collectivités locales, une réforme profonde et hardie, et non d’un replâtrage. C’est la condition même du retour de la confiance si nécessaire entre l’État et les collectivités locales. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – M. Didier Guillaume applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons aborder la question des collectivités territoriales en ignorant la dégradation brutale des conditions de vie et de travail de nos concitoyens.
Les finances locales ne sont pas seulement affaire de chiffres, de comptabilité : elles ont une incidence directe sur la vie tant économique que sociale de nos territoires. Elles concernent des hommes, des femmes et des enfants qui verront leur vie quotidienne s’améliorer ou se détériorer en fonction des orientations qui seront prises.
Or les orientations qui nous sont proposées dans ce projet de loi de finances ne donneront pas aux collectivités les moyens de faire face aux conséquences de la crise.
Beaucoup de travailleurs qui se levaient tôt, « cette France qui ne demande qu’à vivre des fruits de son travail », comme le disait le Président de la République, constatent amèrement que leurs efforts ne sont pas payés de retour. Les intérimaires, les premiers touchés, par dizaines de milliers, se voient du jour au lendemain interdire l’accès aux entreprises.
Beaucoup de travailleurs, aussi, ont pu croire un moment qu’en travaillant plus ils allaient gagner plus. La seule chose qu’ils constatent aujourd'hui, c’est le blocage de leurs salaires. Les retraités ont eu droit à une aumône et le seul espoir que vous laissez aujourd’hui aux futurs retraités, c’est de se tuer au travail jusqu’à soixante-dix ans.
Mais nous ne pouvons pas plus ignorer les conditions détestables dans lesquelles votre politique abandonne nombre d’entreprises. Elles sont étouffées par les donneurs d’ordres et par les banques qui leur refusent des prêts ou leur en accordent au compte-gouttes, et à des taux prohibitifs. Ce n’est pas la taxe professionnelle qui pèse lourd dans leurs comptes, ce sont les frais financiers, qui constituent bien souvent la charge la plus importante.
Cette crise n’est pas le fait du hasard ou de quelques dérapages du système capitaliste. Elle est la conséquence directe d’une politique qui favorise la spéculation. Et les choix que le Gouvernement a opérés depuis qu’il est en place n’ont fait que libérer de nouveaux moyens dans ce sens, au détriment de la production utile au progrès humain.
Les communes, les départements, les régions vont avoir à gérer une grande partie des conséquences sociales de votre politique et cela ne sera pas sans incidences financières.
Vous avez abandonné le contrat de croissance et de solidarité, puis le pacte de stabilité. Vous opposez maintenant à cette logique contractuelle celle de la maîtrise du budget de l’État, avec pour objectif la mise à contribution des collectivités afin de réduire les déficits publics engendrés par votre politique.
En mettant en place la révision générale des politiques publiques, la RGPP, vous favorisez la diminution de la dépense publique du budget de l’État et vous mettez en difficulté nombre de communes, de départements et de régions, qui se trouvent dépouillés de services assurés par l’État, comme ceux des perceptions ou encore des sous-préfectures, autant d’éléments qui contribuent à l’égalité entre nos territoires.
En fait, vous parlez de l’effort financier de l’État envers les collectivités, mais ce sera bien, pour cette année 2009, un effort sans précédent que vous allez leur imposer, au moment même où les populations fragilisées par la crise auront encore plus besoin de leurs services.
En agissant directement et négativement sur les ressources de nos collectivités, vous les contraignez à réduire leurs dépenses, donc les services rendus à la population. Or, depuis août 2004 et les nouveaux transferts effectués par la loi, vous n’avez cessé de solliciter les collectivités pour qu’elles prennent en charge certaines interventions que vos services assumaient jusqu’alors : la suppression de l’instruction des permis de construire pour les communes de moins de 10 000 habitants est assez emblématique à cet égard.
Vous demandez de plus en plus aux collectivités de financer conjointement avec vous des projets nationaux, voire européens, comme les nouvelles lignes de TGV. Mais cela ne vous empêche pas, ensuite, de considérer que le « millefeuille institutionnel » coûte cher !
Vous semblez vouloir ignorer que nous avons l’obligation de présenter des budgets en équilibre et que nous participons également au développement de la vie économique locale, par nos investissements et nos achats, ce qui pèse lourd dans la richesse produite dans notre pays.
Votre méthode est d’une efficacité terrifiante. Alors que vous développez un discours récurrent contre les déficits publics, en soutenant qu’ils sont insupportables, vous êtes capables de susciter au fil des années des déficits colossaux. Vous ne cessez de les amplifier par votre seule politique d’assèchement de la fiscalité, qui vide les caisses de l’État et remplit parallèlement, par un principe de vases communicants, celles des actionnaires et des ménages les plus riches ; d’une certaine façon, vous transférez sur les collectivités la prise en charge de ce déficit.
Le « zéro volume », c’est-à-dire l’alignement strict sur l’inflation prévisionnelle, deviendrait la règle pour nos collectivités. On a tous vu l’écart entre cette inflation prévisionnelle et la réalité : 1,6 % prévu en 2008 ; en réalité, 2 %. C’est cela que nous constatons et subissons.
Cette politique sert à faire partager par les collectivités locales les orientations néfastes d’une politique nationale et d’une politique européenne fondées sur des critères de convergence toujours plus inaccessibles et inacceptables.
Les réformes intégrées dans le projet de loi de finances pour 2009 sont substantielles et touchent en particulier la DGF, mais aussi les compensations des dégrèvements fiscaux. Celles-ci sont retenues comme variables d’ajustement.
Réduire la compensation, c’est tout simplement demander à certaines collectivités d’être solidaires, mais vous le proposez par exemple à celles qui possèdent un patrimoine de logements sociaux. L’allégement du foncier bâti sur leur patrimoine aide pourtant leurs gestionnaires à améliorer la qualité de vie de leurs habitants
De plus, les dotations d’investissement aux différentes collectivités sont gelées. Comment les collectivités locales vont-elles pouvoir continuer ce travail indispensable qui atténue les conséquences désastreuses de votre politique ?
Les départements, qui perçoivent 65 % des droits de mutation, vont voir leurs ressources s’étioler avec la crise immobilière qui s’annonce, alors que vous exigez une prise en charge toujours plus grande des dépenses sociales.
La crise économique est entrée dans une spirale active. Il ne se passe pas une journée sans qu’on annonce des fermetures d’entreprises, des jours chômés, des vacances forcées, sans qu’on parle d’intérimaires jetés comme des kleenex.
Les syndicalistes de Mecachrome viennent de m’interpeller. Ils sont très inquiets pour l’emploi des 1 600 salariés du groupe, mais aussi pour ceux qui, dans notre région, vont se retrouver de fait au chômage : à Aubigny-sur-Nère, 560 personnes ; à Amboise, 450 ; à Tours, 70.
Combien d’entre eux risquent-ils de se retrouver rapidement à l’allocation de solidarité spécifique, puis au RMI ou au RSA ?
Avec l’aggravation de la situation économique et sociale, nous allons avoir besoin de plus de services publics et de plus d’actions publiques.
Votre orientation est à l’opposé des besoins des populations ; elle vise à détruire, au nom de la réduction de la dépense publique, tout ce qui fonde la solidarité dans notre pays.
Nos collectivités participent pourtant activement à la vie économique locale. Ce qui est une richesse pour notre pays est considéré par ce gouvernement seulement comme une dépense.
Pourtant, investir dans l’amélioration des services et de nos infrastructures n’est pas une dépense stérile, et 75 % des investissements publics sont réalisés par nos collectivités. Ils permettent souvent aux artisans et aux PME de maintenir et de faire prospérer l’emploi. Avec leurs investissements et leurs achats, les collectivités ont permis de préserver l’emploi de centaines de milliers de salariés dans le secteur privé.
Vous décidez d’ajouter de la difficulté aux difficultés existantes en mettant les collectivités au régime sec.
Dans cette société capitaliste que vous tentez de défendre, qui n’a d’yeux que pour les profits des grandes entreprises et où seuls les actionnaires sont fondés à manifester de l’appétit – pour les dividendes –, les communes, les départements et les régions représentent et portent encore les valeurs de solidarité de notre République. Au fond, ce sont ces maillons qui vous gênent !
Vous voulez aussi voir disparaître l’ensemble des services publics et entreprises publiques qui permettent à chacun, quel que soit le lieu où il vit, de trouver des services indispensables à la vie quotidienne de sa famille.
En incluant le FCTVA dans l’« enveloppe normée », vous faites croire avec une grossière habileté que vous augmentez la participation de l’État. Monsieur le ministre, puisque, lors de la discussion de la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012, vous nous avez déclaré que le FCTVA était bien un remboursement aux collectivités – et vous l’avez répété tout à l'heure –, dites-nous pourquoi vous continuez à le présenter comme une dotation intégrée dans l’enveloppe des contributions de l’État aux collectivités territoriales.
La logique voudrait que vous fassiez preuve de cohérence et que vous sortiez le FCTVA de l’enveloppe, à laquelle il n’avait jamais été intégré jusqu’à présent. En enlevant ces 663 millions d’euros, il va de soi que le 1,1 milliard d’euros annoncé se verrait sérieusement amputé, mais cela serait plus conforme à la réalité.
Les élus locaux et leurs associations, dans leur grande majorité, n’acceptent pas que vous envisagiez la remise en cause de ce remboursement, ils vous l’ont fait savoir, au sein du Comité des finances locales, en refusant de constituer un groupe de travail pour le supprimer.
Madame la ministre, monsieur le ministre, les élus et leurs associations ont bien compris que vous souhaitiez réduire les moyens financiers affectés aux communes et, aujourd’hui, ils n’acceptent plus de telles remises en cause. Ce sont eux qui sont sollicités chaque fois qu’une intervention de l’État se réduit.
Vous savez bien qu’en diminuant votre action dans le domaine de la vie associative, notamment avec la suppression des « mis à disposition », en vous intéressant prioritairement dans ce projet de loi de finances aux droits à l’image de sportifs professionnels plutôt qu’au développement de la pratique sportive de tous, vous transférez de nouvelles charges vers les collectivités.
Non seulement l’augmentation de 2 % que vous nous présentez relève de l’artifice, mais elle est très insuffisante, et les élus ne sont pas dupes. C’est pourquoi ils se sont très clairement élevés contre votre projet de réforme de la DSU. À cet égard, je me réjouis que vous ayez, cette année, reculé sur cette question. La suppression de la DSU pour 238 communes était inacceptable. Nous savons que vous n’abandonnez pas pour autant cette réforme, mais soyez certains que nous veillerons à ce que la motivation originelle qui avait présidé à la création de cette dotation de solidarité soit respectée.
Pour refuser de répondre favorablement à nos propositions, vous invoquez très souvent la question des moyens. Cependant, en 2008, l’État recevra 2,5 milliards d’euros au titre de la taxe professionnelle minimale versée par les entreprises. À notre avis, cette somme devrait revenir aux collectivités pour contribuer à assurer la péréquation.
À travers nos amendements, nous proposerons de nouvelles ressources, telle celle qui résulterait d’une modernisation du calcul de la taxe professionnelle, afin de faire en sorte que toutes les entreprises participent équitablement u développement de nos collectivités. Nous préférons un système de péréquation axé sur le principe d’égalité à un système en vertu duquel les collectivités les moins pauvres doivent donner aux plus pauvres.
Nos choix sont à l’opposé de cette politique de recul étriquée et comptable que vous mettez en avant pour les collectivités locales. En outre, le fait de répondre en priorité aux besoins des habitants nous semble procéder d’un véritable souci d’efficacité pour notre économie et, partant, pour l’emploi. Seule cette conception est susceptible de redonner une dynamique indispensable dans la lutte contre la crise. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reprendrai pas les réflexions développées excellemment par le président de la commission des finances et les rapporteurs sur l’ensemble des problèmes que pose le projet de loi de finances pour 2009 s’agissant de nos collectivités.
Je commencerai mon intervention en dressant un double constat.
Tout d’abord, de nombreuses collectivités territoriales vont connaître, en 2009 et en 2010, des pertes de recettes à cause non seulement du plafonnement des dotations, mais également de la conjoncture immobilière et des difficultés rencontrées par beaucoup d’entreprises. Or ce n’est ni le recours à l’emprunt ni la hausse des tarifs publics qui permettront de pallier ces pertes de recettes.
Ensuite, comme M. Mercier l’a indiqué, tout le monde parle de réforme. Toutefois, cette réforme, il faut aujourd'hui l’envisager non pas dans le cadre classique des relations entre l’État et les collectivités territoriales, mais dans celui de la mondialisation.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui !
M. Hubert Haenel. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Fourcade. Ne pouvons-nous avoir aujourd'hui une conception des finances locales qui ne soit pas attentatoire à la compétitivité des entreprises, ne favorise pas la délocalisation, le départ d’un certain nombre de prestataires de services vers la Chine, l’Inde ou ailleurs ?
Nous ne devons donc pas perdre de vue ce contexte de mondialisation pendant les deux ou trois années où nos collectivités vont avoir à subir une perte de recettes.
En vertu de ce double constat, je formulerai deux propositions.
Tout d’abord, il faut redonner un peu d’élasticité aux finances locales. Monsieur le ministre, vous avez parfaitement engagé cette politique en créant des marges nouvelles. Certes, vous avez fait augmenter, par voie législative, le coefficient de revalorisation des valeurs locatives, mais ce n’est pas suffisant.
Comme nous réclamons une certaine autonomie pour les collectivités et voulons prendre nos responsabilités en la matière, je propose, madame le ministre, monsieur le ministre, en cette période de crise, que ce coefficient soit fixé par chaque collectivité – évidemment, il sera plus simple de le faire au niveau de chacun des 2 000 groupements de communes que compte notre pays, et non à celui de chaque commune – et que chacune soit pleinement responsable des allégements et des exonérations qu’elle consent.
Je suis consterné de constater que le poste le plus important du budget de l’État, avec plus de 90 milliards d’euros, celui qui a trait aux remboursements et dégrèvements, et dont Mme Beaufils est le rapporteur spécial, sera voté un samedi à trois heures du matin par quelques personnes sympathiques…
M. Henri de Raincourt. Et courageuses !
M. Jean-Pierre Fourcade. … qui accepteront de rester en séance.
La première réforme à engager, qui me paraît correspondre à la volonté de responsabilisation des élus, et qui aurait dû être mise en place dès 1990, concerne donc la réévaluation des valeurs locatives. Dix-huit années ont été perdues, sauf pour le Trésor public, qui a continué de collecter la taxe sur la révision des valeurs locatives, …
M. Joël Bourdin. Grâce à la taxe Charasse !
M. Jean-Pierre Fourcade. … laquelle rapporte un milliard d’euros par an, soit au total – excusez du peu – 18 milliards d’euros !
Comme je l’ai dit, il faut, à mon avis, associer à cette réforme les groupements de communes, car chaque situation est différente. À chacun de prendre ses responsabilités.
Ma seconde proposition, beaucoup plus difficile à mettre en œuvre, concerne la taxe professionnelle.
Il n’est pas un chef d’État de ce pays qui n’ait qualifié cet impôt, qui de « stupide », qui de « dangereux pour l’économie », qui de « particulièrement singulier en Europe ».
Voilà quelques années a été supprimée la part salaire ; aujourd'hui, on parle de supprimer partiellement ou totalement la part investissements ; demain, on parlera de supprimer la part valeur locative. Qu’en restera-t-il alors ? Rien !
Comme nous traversons l’une des plus violentes crises que nous ayons connues depuis longtemps et que nous allons en supporter les effets pendant plusieurs années, quels que soient les discours optimistes que nous puissions entendre, le moment est venu de s’engager dans une réforme beaucoup plus importante, à l’instar de ce que font la Suède, le Danemark, la Finlande ou encore, plus récemment, l’Allemagne, en partageant les grands impôts entre l’État et les collectivités territoriales, à partir des bases actuelles de la taxe professionnelle, corrigées par une péréquation tenant compte des difficultés et des perspectives de chaque partie concernée.
Ainsi serait maintenu le lien, essentiel, entre l’activité économique et l’alimentation financière des collectivités territoriales. En effet, si le calcul repose sur des bases fictives ou dépassées, nous n’arriverons pas à réaliser les investissements nécessaires.
Par ailleurs, cette réforme permettrait aux collectivités de bénéficier enfin d’une élasticité plus importante de ses impôts, l’État ayant conservé pour lui-même les impôts à forte élasticité, tels que l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés, une partie de la TIPP et la TVA. Un système qui pourrait être triennal leur garantirait un bon financement et assurerait un lien permanent entre l’activité économique et la collectivité concernée.
Bien entendu, mes deux propositions ne peuvent être mises en œuvre que si l’on démêle l’imbrication extrêmement complexe des compétences et des financements des uns et des autres. Mais je fais confiance aux commissions créées à cet effet par les deux assemblées et j’attends avec intérêt les conclusions des travaux de la commission Balladur.
Pendant des années, alors que la conjoncture économique était favorable, nous avons différé les réformes et renvoyé à plus tard l’ensemble des ajustements nécessaires.
M. Jean-Jacques Jégou. Eh oui !
M. Jean-Pierre Fourcade. Aujourd'hui, profitons de cette crise pour engager nos réformes, car nos concitoyens les attendent. Je vous en prie, madame le ministre, monsieur le ministre, ne les décevons pas ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean Bizet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.
M. Jean-Michel Baylet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, les relations entre les collectivités territoriales et l’État doivent être régies selon les principes de responsabilité et de confiance. Nous prenons acte de cette double exigence exprimée par le Gouvernement.
Pour autant, les dispositions du projet de loi de finances pour 2009 relatives à nos communes, nos départements et nos régions ne me semblent pas traduire ces intentions louables.
Certes, dans un contexte économique plus qu’incertain, il peut paraître bien naturel de faire partager l’effort de maîtrise des dépenses publiques et de l’endettement public. Pour y parvenir, vous avez fait le choix, à l’article 10, d’appliquer aux concours financiers aux collectivités les contraintes que l’État s’applique prétendument à lui-même et ne respecte d’ailleurs jamais. Vous avez ainsi fixé le taux de progression de la DGF pour 2009 à 2 %, conformément au taux d’inflation prévisionnelle initialement fixé, et vous annoncez, eu égard à l’annonce d’une inflation prévisionnelle ramenée à 1,5 %, une progression de 800 millions d’euros supplémentaires. En réalité, cette option est beaucoup moins favorable que ne l’était le dispositif dicté par le « contrat de croissance et de solidarité ».
En effet, comme certains de mes collègues l’ont déjà souligné, vous intégrez le FCTVA au sein de l’enveloppe normée, conformément à l’article 6 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Ce changement de périmètre modifie les règles du jeu et fausse naturellement les comparaisons.
Sans doute les modalités de calcul et de versement du FCTVA ne changent-elles pas, mais, comme ce dernier devrait continuer de progresser d’environ 10 %, cela pénalisera les dotations de fonctionnement qui seront ajustées en conséquence. Cette modification risque de décourager – nous le redoutons en tout cas –, les investissements publics locaux, qui représentent pratiquement 75 % des investissements de la nation, ainsi que l’ont également souligné, à juste titre, les orateurs qui m’ont précédé.
Le FCTVA est une créance de l’État à l’égard des collectivités locales qui ne doit pas servir de prétexte à la raréfaction de leurs ressources. Une nouvelle fois, les collectivités sont étranglées, alors qu’elles supportent, sans mot dire, les nouvelles compétences qui leur sont déléguées par l’État dans le cadre des réformes successives de la décentralisation. Non seulement elles les supportent, mais elles les mettent en application de la meilleure des manières possible.
Les élus ne cherchent pas à dépenser pour dépenser. Ils souhaitent avant tout pouvoir faire face à leurs charges, qui augmentent alors que leurs moyens sont régulièrement rabotés. Or les transferts liés à la décentralisation, nous le savons tous – notamment ceux d’entre nous qui exercent des responsabilités locales –, ne sont pas neutres, contrairement à ce qui avait été promis et même garanti par l’article 72-2 de la Constitution ainsi que par la loi organique du 29 juillet 2004.
Ainsi, les dépenses réalisées par les départements au titre de la gestion du RMI-RMA sont passées de 6,3 milliards d’euros à 7,3 milliards d’euros entre 2004 et 2007, soit une hausse de 15 %. Je rappelle d’ailleurs à ce sujet que nous sommes bien loin de la compensation « à l’euro près » garantie par le ministre de l’époque, M. Copé.
De la même manière, les dépenses liées à l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie, progressent, sous l’effet du vieillissement de la population, de 8 % par an, ce qui pose le problème de la récupération sur succession, dont il faudra bien se saisir un jour.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Jean-Michel Baylet. Que n’a-t-on entendu, en 2002, lorsque le Gouvernement a annoncé, au moment de la création de l’APA, un partage de sa prise en charge financière à hauteur de 50 % pour l’État et de 50 % pour les collectivités ? Aujourd'hui, les départements financent cette aide à 70 %, contre 30 % pour l’État !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n’est pas normal !
M. Jean-Michel Baylet. Non, ce n’est pas normal, et il faut le rappeler de temps en temps parce que l’on montre du doigt les collectivités alors qu’elles essaient de faire pour le mieux. Globalement, dans leur diversité, elles ne font pas si mal que cela, et heureusement qu’elles sont là !
À ces postes incompressibles, voire extensibles, s’ajoute l’impact financier des lois et règlements.
En effet, même s’il ne s’agit parfois que de quelques centaines de milliers d’euros, les conséquences du cumul de normes qui ont des incidences financières sur les collectivités méritent d’être mieux évaluées. Notre collègue Jean-Pierre Fourcade a donné tout à l'heure quelques exemples en la matière.
Grâce notre collègue Alain Lambert, la commission consultative d’évaluation des normes vient enfin de voir le jour. Il serait, à mes yeux, souhaitable qu’elle étende systématiquement sa compétence à l’évaluation préalable des textes législatifs. En effet, si la commission a la possibilité de mener une telle évaluation, elle n’en a pas l’obligation, et c’est bien dommage.
Nous sommes bien placés, en tant que législateur, pour savoir que de nombreuses lois adoptées ont un impact sur les finances locales. Pour ne prendre que des exemples récents, je citerai la loi de modernisation de l’économie ou la loi relative aux archives.
J’ajouterai que, même lorsque l’État prévoit la compensation financière, comme c’est le cas pour le RSA, qui va être très prochainement institué, une évaluation du supplément de charges qui en résulte pour les collectivités locales serait la bienvenue.
Madame le ministre, monsieur le ministre, les collectivités locales ont besoin de visibilité, surtout quand vous les mettez sous pression avec l’indexation de la dotation globale de fonctionnement sur l’inflation prévisionnelle.
Dans cette logique d’accroissement des charges parallèle à une restriction des ressources, vous allez une fois de plus encourager une augmentation de la pression fiscale locale que certains de vos collègues ou de vos amis politiques ne manqueront pas de dénoncer ensuite. Pourtant, pour beaucoup d’entre nous, quel autre choix que celui d’augmenter les impôts locaux quand l’État demande toujours plus sans contrepartie ? C’est sur les ménages que pèsera in fine votre politique fiscale.
Le plafonnement de la taxe professionnelle, qui restreint déjà les budgets, conduira à se tourner vers la taxe d’habitation ou l’impôt sur le foncier non bâti. Que se passera-t-il d’ailleurs si le projet de suppression totale de la taxe professionnelle voit finalement le jour ? Ce n’est pas le débat du moment, mais je me demande tout de même comment nous pourrons faire, et comment le Gouvernement, quelle que soit son inventivité, expliquera aux collectivités territoriales ce qu’elles doivent faire pour financer leurs dépenses, particulièrement dans la conjoncture actuelle, en se passant des recettes de taxe professionnelle !
Une fois encore, les plus modestes seront mis à contribution. Les collectivités locales participent ainsi, malgré elles, j’y insiste, à la politique d’injustice fiscale de l’État.
En outre, le principe de libre administration des collectivités est menacé parce que ces choix fiscaux nous sont imposés.
Dans ces conditions, madame le ministre, monsieur le ministre, les radicaux de gauche n’approuveront pas les dispositions du projet de loi de finances pour 2009. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Edmond Hervé.
M. Edmond Hervé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est précisément parce que, tout comme le M. le président de la commission des finances, nous sommes attachés à la solidarité nationale et institutionnelle que nous estimons que le projet de loi de finances pour 2009 présente un défaut majeur en ce qui concerne les ressources des collectivités territoriales : il restreint leur capacité financière et limite l’investissement local, alors même que celui-ci est le principal vecteur de la croissance.
Une telle orientation ne peut donc qu’aggraver la crise économique et sociale qui frappe notre pays.
Ajoutez-y une politique d’annonces telle que les élus territoriaux ne savent pas aujourd’hui de quoi demain sera fait et vous avez un ensemble de facteurs particulièrement néfastes à notre économie en particulier et à notre société en général.
Madame la ministre, les principales mesures de restriction budgétaire que vous imposez aux collectivités territoriales sont bien connues. Je pense à la baisse de la dotation globale de fonctionnement, à l’intention que vous avez eue de réformer la dotation de solidarité urbaine, au nouveau régime de la taxe professionnelle, au défaut de péréquation, à l’insuffisance des modulations en matière d’environnement et de développement durable, aux transferts non compensés. Sans entrer dans le détail des chiffres, je crois me rappeler que, selon les calculs du Comité des finances locales, ce sont quelque 25 milliards d’euros qui, globalement, manqueraient depuis 2004.
Il y a aussi le fameux débat relatif au FCTVA. J’ai à l’instant entendu M. le ministre déclarer qu’il ne fallait plus parler d’enveloppe normée mais d’un « ensemble » progressant de 2 %. Je prends acte de ce changement de vocabulaire.
Monsieur le rapporteur général, quel que soit le respect que j’ai pour votre personne et pour vos fonctions, je ne puis accepter l’explication que vous avez donnée – et je vous ai écouté très attentivement. Le régime qui nous est proposé pénalise les collectivités territoriales et les établissements publics qui investissent. Par voie de conséquence, il allège également les contributions de l’État. Bien sûr, je peux me tromper, mais je souhaite que nous ayons, sur ce point, un débat de fond, un débat qui ne soit pas académique mais chiffré, preuves à l’appui. Je vous en remercie à l’avance.
Les différentes mesures que je viens d’évoquer viennent restreindre notre capacité budgétaire dans un contexte difficile : le ralentissement de l’activité économique va peser sur les rentrées fiscales, avec un décalage de deux ans s’agissant de la taxe professionnelle. Parallèlement, la demande de solidarité sociale sera beaucoup plus pressante du fait, malheureusement, de la croissance du chômage et des conséquences, de plus en plus lourdes financièrement, du transfert des compétences sociales, en particulier vers les départements.
Le dernier rapport d’information de la délégation du Sénat pour la planification, daté de ce mois de novembre, pose, dans le langage fort courtois qui est le sien, la question : la baisse programmée des moyens n’est-elle pas incompatible, dans toute son ampleur, avec le maintien des missions des collectivités locales ? Vos choix privent celles-ci des mesures nécessaires pour satisfaire les besoins de la population, relancer notre économie et favoriser l’emploi.
Voici ce qu’on peut lire à la page 27 du dernier numéro paru de la sage revue Sénat et Territoires : « Au regard de la crise financière et économique, l’accent pourrait être mis sur l’investissement public local qui représente 73 % de l’investissement public civil en 2007, son rôle moteur dans l’économie locale est indéniable. » Au lieu d’« économie locale », l’auteur aurait pu, sans se tromper, parler de l’économie en général.
Vous n’avez pas choisi la voie de la relance économique et vous avez donc ignoré le rôle possible de nos collectivités territoriales. Or, si l’on sait leur en donner la possibilité, elles jouent un rôle déterminant par leur capacité de commande directe et indirecte.
Vous connaissez tout aussi bien que moi la diversité des marchés conclus par les collectivités territoriales : marchés de fournitures, de prestations de services, de travaux. Ces commandes correspondent à d’authentiques besoins, à une diversité d’activités et donc d’entreprises. Beaucoup d’entre elles ont un effet immédiat et présentent une importante capacité d’entraînement de l’activité dans le temps et dans l’espace.
Cet appel au soutien du dynamisme économique de nos collectivités territoriales vaut tout aussi bien pour les actions relatives à l’aménagement, à l’équipement, à l’environnement, au logement, au transport, aux nouvelles technologies, à l’enseignement, à la formation, à la maîtrise du foncier, que pour ces solidarités sociales et culturelles que plusieurs orateurs ont évoquées avant moi.
Si nous plaidons pour une relation entre l’État et les collectivités territoriales qui soit active, créatrice, solidaire, durable et aussi, madame la ministre, confiante – car, aujourd’hui, de fait, nous constatons un divorce –, c’est parce que nos collectivités territoriales apportent chaque jour la preuve de leur responsabilité et de leur engagement.
Elles accomplissent quotidiennement de grands efforts de modernisation, parfois à rebours de l’opinion. C’est l’honneur des responsables locaux que de le faire.
Elles sont également très peu endettées et très généralement fort bien gérées.
Les uns et les autres, nous devrions continuer de nous inspirer d’une conduite locale aussi exemplaire !
Elles disposent en outre d’un personnel politique respecté et d’une administration de qualité qui n’a rien à envier aux anciens élèves des grandes écoles, que j’admire et que je respecte. Vous le savez d’autant mieux, madame la ministre, qu’il n’existe pas un seul secteur dans lequel l’État ne cherche leur concours, y compris dans ces domaines régaliens par excellence que sont la défense, la sécurité ou les relations internationales.
Madame la ministre, mes chers collègues, nous avons besoin d’une clarté qui fait aujourd’hui défaut. Je me contenterai d’évoquer trois exemples.
La révision générale des politiques publiques, fondée sur un objectif essentiellement financier, prive brutalement, sans concertation, nos collectivités de services essentiels de conseil, d’expertise, de sécurité juridique, économique et comptable. Pourtant, il faudra bien, mes chers collègues, que ces fonctions soient exercées. Ne partez donc pas en guerre, madame la ministre, contre la dépense locale de fonctionnement.
S’agissant de la fiscalité locale, je reconnais que vos prédécesseurs n’ont pas de leçons à vous donner, mais ce n’est pas une raison pour marcher dans leurs pas. N’ayant jamais varié sur ce sujet et ayant toujours regretté un manque de courage en la matière, je suis de ceux qui estiment qu’il est temps qu’une volonté politique réfléchie et, si possible, partagée se prononce très clairement en faveur d’un système fiscal local moderne, juste, efficace, s’appuyant sur une péréquation appropriée, verticale et horizontale.
Je vous ai écouté sur ce point, monsieur le rapporteur général. Je suis d’accord avec vous lorsque vous affirmez et définissez l’autonomie fiscale. Celle-ci ne doit être confondue ni avec l’autonomie financière, ni avec l’autonomie budgétaire, ni, surtout, avec l’autonomie de gestion. (M. le rapporteur général acquiesce.)
Ces différents concepts vont de pair et cela doit être formulé dans un cadre national, au nom, précisément, de la cohérence et de la solidarité.
Encore faut-il, mes chers collègues, que l’on ne dénigre pas systématiquement l’impôt, que l’on arrête de dire un jour que l’on supprime la taxe professionnelle pour annoncer le lendemain qu’on va la réformer. Nous avons bien souvent constaté de tels revirements.
Il n’y aura pas dans ce pays de politique d’équipement territorial digne de ce nom sans un impôt économique moderne. Il n’y aura pas non plus de services locaux actifs et justes sans un impôt juste, fondé sur la réelle capacité contributive des ménages. C’est parce que nous avons bien souvent oublié ce principe essentiel que nous subissons la crise que chacun sait.
Madame la ministre, mes chers collègues, le magasin des instruments de la réforme fiscale locale déborde de lois. Souvenez-vous : en 1978, le Parlement avait adopté une loi qui fondait la taxe professionnelle sur la valeur ajoutée. Ce n’est donc pas la première fois, monsieur le rapporteur général, qu’une loi votée par le Parlement est mise entre parenthèses.
J’ai souvenance, monsieur Fourcade, d’une loi relative à la taxe départementale sur le revenu. Elle fut tout aussi inappliquée, même si le Parlement fut respecté puisqu’un amendement avait été adopté. (M. Jean-Pierre Fourcade acquiesce.) Cela n’avait pas été le cas lors de l’examen de la loi de 1978.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mon cher collègue, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Edmond Hervé. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, avec l’autorisation de l’orateur.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous vous livrez, monsieur Hervé, à un historique extrêmement intéressant, mais je crois qu’il serait bon de se souvenir aussi de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, en 1998.
Je me rappelle avoir alors entendu M. Fourcade déclarer qu’on commençait à « détricoter » la taxe professionnelle. Je crois qu’il anticipait ainsi de manière tout à fait judicieuse.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Hervé.
M. Edmond Hervé. Acceptez, monsieur le rapporteur général, que je vous réponde en invoquant le principe de coresponsabilité. En effet, tous les gouvernements successifs, quelle que soit leur sensibilité, ont « détricoté » la taxe professionnelle.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
M. Edmond Hervé. Si le Parlement ne réagit pas, vous n’aurez plus besoin de débattre d’un système fiscal local, car nous aurons un système de dotations,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est le risque !
M. Edmond Hervé. …qui n’est d’ailleurs pas anti-démocratique – la Grande-Bretagne le pratique –, mais…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais ce n’est pas l’autonomie fiscale.
M. Edmond Hervé. …ce n’est effectivement pas l’autonomie fiscale.
Aussi, sans transformer notre assemblée en académie, il importe de nous mettre d’accord sur les concepts.
Enfin, la réforme de l’organisation des collectivités territoriales constitue un troisième élément d’incertitude.
Je saisis cette occasion pour saluer l’excellent esprit qui règne au sein de la mission temporaire consacrée à ce thème et présidée par notre collègue Claude Belot.
Les incertitudes d’existence, les interrogations sur le devenir ne favorisent pas l’allant.
Pour la loyauté du dialogue, commençons par reconnaître la spécificité française : elle réside dans l’existence de nos 36 568 communes et non dans la trilogie région-département-commune, trilogie que nous partageons notamment avec l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et la Pologne.
Aucune grande politique ne peut réussir sans le ciment de la confiance et de la solidarité entre l’État et les collectivités territoriales.
Lorsqu’on aborde la réforme des collectivités territoriales, qui est aussi la réforme de l’État, ne pensons pas qu’un systématisme théorique réglera tout.
Comment voulez-vous conjuguer le système des blocs de compétences homogènes avec, d’une part, le système des relations contractuelles et, d’autre part, le principe selon lequel aucune collectivité ne peut imposer une tutelle sur une autre ?
Nous avons entre nous des points de vue différents sur la notion de décentralisation.
Ne croyez pas au succès d’une politique qui ferait l’impasse sur la décentralisation. Madame la ministre, mes chers collègues, nous ne sommes plus au temps de la « décentralisation transfert », cousine de la déconcentration. Nous sommes au temps de la « décentralisation projet », de la « décentralisation développement », mobilisatrice des compétences, des intelligences et des ressources, partenariale, contractuelle et territorialisée, comme toutes les grandes politiques publiques. Il n’y a pas une seule politique de l’État qui ne fasse appel aux collectivités territoriales.
Je pourrais trouver un début de preuve de ce que j’affirme dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, qui précise in fine qu’il faut réduire la croissance des dépenses publiques et que les deux tiers de cette réduction doivent reposer sur la sécurité sociale et les collectivités territoriales. Or même le rapporteur général, M. Philippe Marini, juge « irréaliste » cet objectif pour ce qui concerne les collectivités territoriales.
Une politique de relance générale est une exigence économique, sociale et territoriale. Si elle doit emprunter différentes voies, celle de l’implication volontaire, confiante, contractuelle et soutenue des collectivités territoriales demeure impérative. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Jean-Jacques Jégou applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, oui, le pays doit engager des réformes en profondeur ! Oui, le pays doit assainir ses finances publiques ! Oui, cette tâche est difficile, surtout quand ces politiques se télescopent avec une crise financière mondiale, dont les répercussions sur l’économie réelle seront, je le crains, très dures !
Un plan de relance nous sera d’ailleurs proposé dans quelques semaines, probablement en janvier prochain, par le Président de la République.
Bien sûr, les collectivités locales, qui représentent 75 % des investissements publics en France, doivent être des partenaires de ce plan de relance. Mais elles ne peuvent l’être que si l’État a la volonté de les associer en toute confiance.
Vous le savez bien, madame le ministre, l’autonomie financière des collectivités locales se réduit aujourd’hui comme peau de chagrin. L’État leur verse à l’heure actuelle 64 % de leurs recettes de fonctionnement, contre 50 % il y a quinze ans.
Alors que les dotations et les compensations sont de plus en plus importantes, leur indexation sera limitée cette année à 2 %, ce qui représente, il est vrai, 0,5 % de plus que l’inflation. Cependant, face à l’augmentation des dépenses de fonctionnement, il ne s’agit pas d’un geste exceptionnel en faveur des collectivités locales. Celles-ci sont en effet confrontées à une crise immobilière qui va limiter les droits de mutation, à des taux d’intérêt plus élevés et à des dépenses sociales en hausse.
L’équation budgétaire devient donc de plus en plus difficile pour les collectivités locales.
Madame le ministre, alors que l’environnement économique vient d’évoluer avec la crise financière mondiale et qu’un plan de relance s’avère nécessaire, fallait-il créer ce climat d’incompréhension avec les collectivités locales, en intégrant le remboursement de la TVA dans l’enveloppe normée ?
Je souhaite insister ici sur la nécessaire sortie du FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, du périmètre de l’enveloppe normée.
Son dynamisme est tel – il augmentera de 13 % en 2009 – que la progression du remboursement de cette fiscalité représentera plus de la moitié de l’évolution des transferts financiers vers les collectivités et, donc, pénalisera les autres dotations à hauteur d’environ 660 millions d’euros.
Cette moindre capacité d’investissement sera évidemment très dommageable à nos collectivités, tout comme aux entreprises qui réalisent ces investissements, donc à l’économie tout entière et à l’emploi.
Par ailleurs, il nous semble que ce remboursement devrait faire l’objet d’un traitement particulier : plus les collectivités investissent, plus elles versent de TVA à l’État. Il ne s’agit donc ni d’une subvention, ni d’une dotation globale, ni d’une dotation particulière, il s’agit du remboursement d’une taxe, comme c’est le cas pour les entreprises.
D’autres questions viennent aussi interférer avec le ralentissement de la progression des crédits. Par exemple, au moment où nous allons voter des budgets pour l’année 2009, comment concilier cette situation avec les mesures destinées à atténuer l’effet de la prise en compte du recensement de 2006 ?
Indépendamment de l’évolution de la dotation globale de fonctionnement, la baisse ou la stabilisation de nombreuses dotations est également très dommageable. Je pense notamment à la dotation globale d’équipement des communes – 485 millions d’euros –, à la dotation de développement rural – 131 millions d’euros –, à la compensation de la part « salaires » de la taxe professionnelle et à la compensation des pertes de base d’imposition à la taxe professionnelle – 264 millions d’euros au total – qui resteraient également stables.
L’avenir est donc incertain, et il est important de le sécuriser.
J’évoquais au début de mon propos les relations que l’État doit entretenir avec les collectivités, ce qui sous-entend que celui-ci doit leur laisser une réelle liberté pour réaliser leurs missions.
Le partenariat entre l’État et les collectivités doit alors être fondé sur la clarté et la confiance réciproque. Outre une transparence améliorée lors des transferts de compétence, il est nécessaire d’établir des relations financières justes, s’inscrivant dans des perspectives pluriannuelles juridiquement et économiquement plus sûres.
Madame le ministre, plutôt que de transférer la TVA dans l’enveloppe normée, j’aurais proposé que les collectivités soient associées, en toute confiance, au plan de relance et que, pendant trois ans, la TVA soit remboursée dans l’année même de réalisation des travaux.
Dans le cadre de ce nécessaire plan de relance, je serais même allé plus loin, parce que je suis convaincu que les réformes de structure nécessaires pour assainir les finances de l’État ne sont plus aujourd’hui les uniques remèdes : il nous faut organiser et activer la relance, en lui apportant un peu d’oxygène. C’est pourquoi j’aurais également proposé un prêt bonifié de la Caisse des dépôts et consignations aux collectivités qui s’engagent dans des investissements porteurs de développement durable, d’éducation et d’innovation. Je pense, entre autres éléments, aux équipements informatiques des écoles et des collèges.
On évoque par ailleurs le « millefeuille » français et, surtout, sa simplification. Les différentes commissions mises en place, notamment sur ce sujet, sont les bienvenues. Au-delà du nécessaire travail de clarification de l’organisation, c’est une question de finances publiques et, surtout, d’efficacité de la dépense qui est en jeu. Une telle simplification s’inscrit naturellement dans la révision générale des politiques publiques. Il faut mener cette réflexion à son terme.
En outre, le Président de la République a récemment annoncé que tout nouvel investissement réalisé à partir du 23 octobre dernier serait exonéré à 100 % de la taxe professionnelle jusqu’au 1er janvier 2010. Là encore, il est nécessaire non seulement de compenser cette exonération, mais également de prévoir une réforme en profondeur de la taxe professionnelle. Naturellement, elle doit être menée de concert avec l’ensemble des acteurs.
Madame le ministre, j’ai volontairement tenu des propos réalistes et empreints d’une certaine inquiétude. Les citoyens font confiance à leurs élus locaux, parce ceux-ci sont proches d’eux et à leur écoute. Les collectivités jouent ainsi un rôle de pivot relationnel entre l’État et les citoyens, d’interface entre ces deux mondes. Elles nouent avec eux des liens parfois tendus, souvent efficaces, mais toujours indispensables. Alors, respectez-les et faites attention à elles ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste. – MM. Jean-Pierre Fourcade et Adrien Gouteyron applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nul ne saurait ignorer la situation économique et financière mondiale et, par contrecoup, celle des particuliers, des entreprises et des collectivités.
Notre devoir est de ne pas ajouter des difficultés aux difficultés et de participer au redressement en limitant nos dépenses, sans pour autant réduire nos investissements.
Est-il besoin de rappeler que 73 % des investissements publics sont réalisés par les collectivités ? Leurs marges de manœuvre sont de plus en plus réduites, les recettes diminuant tandis que les dépenses augmentent et leur capacité d’autofinancement se réduisant vertigineusement.
Les recettes sont dépendantes de l’État et nous payons aujourd’hui, près de vingt ans plus tard, le choix de la facilité, c'est-à-dire la suppression de différentes recettes, qu’il s’agisse de la vignette, de la part « salaires » de la taxe professionnelle, qui ont été remplacées par des dotations, ou, bientôt, de la part investissements de l’assiette de cette taxe.
La tendance naturelle de l’État est de présenter aux collectivités ces dotations comme des largesses. Ce ne sont en réalité que des compensations de plus en plus réduites de sommes dues.
Madame la ministre, au cours des réflexions actuelles relatives au financement des collectivités, il faudra penser à bannir cette tutelle financière de l’État, qui ne doit faire ni de la captation de recettes ni de la fausse compensation. Nous n’avons même plus droit à un juste retour ! En disant cela, je ne fais pas de l’opposition, je traduis une réalité que je vis quotidiennement, principalement en cette période où nous bâtissons à grand peine nos budgets.
Les départements sont probablement parmi les collectivités qui dépendent le plus des décisions de l’État. Le nombre de leurs salariés a plus que doublé en deux ans, à la suite de la décentralisation. Dans mon département, les effectifs sont passés de moins de mille personnes à plus de deux mille cinq cents personnes.
J’ai rédigé, voilà deux ans, un rapport sur les transferts de personnels, dans lequel je pointais les risques d’une compensation incomplète et les dérives inévitables que nous allions connaître. Nous y sommes.
Cette année, si nous ajoutons les hausses du point d’indice – 0,8 % plus 0,5 % plus 0,3 % – à l’accroissement automatique des traitements indiciaires les plus bas – c’est-à-dire ceux qui sont majoritairement associés aux compétences transférées –, à la mise en œuvre de la garantie individuelle du pouvoir d’achat, au futur relèvement de la grille indiciaire des agents de catégorie C, à la refonte des grilles des catégories A et B, à la progression considérable de la part patronale de la pension civile de l’État sur les fonctionnaires détachés – qui est passée en deux ans de 27 % à 39 %, et atteindra bientôt 50 % –, sans compter l’effet du glissement vieillesse technicité, le GVT, évalué à 2,49 %, la hausse des dépenses des collectivités dépasse alors largement l’augmentation de 2 % de la dotation qui nous est annoncée.
Un autre élément que je livre à votre expertise, mes chers collègues, réside dans l’explosion des demandes déposées auprès des maisons du handicap, qui, en une année, a conduit, dans mon département, à une augmentation de 33 % de la masse salariale. Cet écart est non compensé.
Par ailleurs, lors du transfert des routes, l’État a conservé le personnel d’encadrement. En conséquence, il nous a fallu embaucher trente-deux cadres pour gérer les quatre cents kilomètres de routes transférées.
Les collectivités seraient laxistes ; les collectivités seraient les grandes bénéficiaires des largesses financières de l’État… Pensez donc : la dotation augmentera de 2 % en 2009 alors que l’inflation ne sera, selon les prévisions, que de 1,5 % !
Mais nous savons tous compter et le tour de passe-passe du fonds de compensation pour la TVA ne trompe pas les élus, même s’il peut abuser l’opinion publique. Ce fonds n’aurait pas dû être intégré à l’enveloppe normée.
Je ne vais pas pleurer sur la perte de recettes de 20 % à 30 % sur les droits de mutation mais je ne peux m’empêcher de rappeler que, lorsque nous annoncions que le compte n’y était pas sur le RMI et l’APA, la manne « droits de mutation » nous avait alors été opposée. C’était l’arbre qui cachait la forêt. L’arbre a disparu et la forêt est toujours là…
Il n’est pas nécessaire d’essayer de nous convaincre que les collectivités sont choyées ou favorisées. Mon vécu quotidien me rend lucide et me permet aussi de redire pour la énième fois qu’il faut changer de système ! Il faut rompre avec notre complexité administrative. L’État doit s’occuper de l’État. Il doit fournir son appui aux collectivités et non représenter pour elle une entrave qui prend l’allure d’un mur de normes, de règlements, de circulaires ou de décrets. De leur côté, les collectivités doivent rester à leur place et ne plus ajouter à la complexité.
Quatre niveaux clairs, deux couples, des financements indiscutables, des compétences explicables et reconnaissables : madame le ministre, si nous allons vite dans ce travail que nous a fixé le Président de la République, nous devrions avoir plus de facilités à maîtriser les dépenses et à présenter des recettes indiscutables.
Nous sommes bien placés pour savoir que les querelles de chiffres n’apportent rien. L’actualité nous montre en direct depuis quelques jours que chaque partie peut discuter les chiffres présentés par l’autre partie…
En ce jour d’ouverture du Congrès des maires, je souhaite insister sur la nécessité pour les élus locaux de disposer d’outils fiscaux performants et simples leur permettant de développer leurs collectivités sans entrave. Il n’est pas acceptable qu’il faille, je le redis de nouveau dans cet hémicycle, sept partenaires financiers pour qu’un projet voit le jour. Sept partenaires, cela fait sept décisions, sept demandes de subvention, sans parler des sept années nécessaires pour atteindre le jour de l’inauguration… Que d’argent public mal dépensé en fonctionnement !
La réforme de l’organisation territoriale, si elle doit bousculer les faits établis, doit également bousculer la fiscalité locale. Je compte sur vous, madame le ministre, pour tout remettre à l’endroit ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Jean-Jacques Jégou et Christian Gaudin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les dispositions du projet de loi de finances pour 2009 s’inscrivent dans un contexte particulièrement difficile pour les recettes des collectivités territoriales en général, et pour celles des départements en particulier.
La progression réelle de l’enveloppe des dotations de l’État sera bien éloignée des 2 % annoncés, ce en raison de l’intégration du FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, qui en était jusqu’à présent exclu.
Il s’agit en effet d’un remboursement de fiscalité et non d’une dotation ou d’une subvention. Or son dynamisme, qui s’explique par les investissements réalisés par les collectivités il y a deux ans, représente à lui seul plus de 663 millions d’euros, sur une progression de la nouvelle enveloppe de 1,1 milliard d’euros.
En réalité, si l’on exclut, comme il devrait l’être, le FCTVA du calcul, la progression de l’enveloppe des dotations de l’État est inférieure à 0,9 %.
Au sein même de l’enveloppe normée, les départements sont particulièrement pénalisés : d’une part, par d’un nombre plus important de variables d’ajustement soumises à une diminution de 17 % ; d’autre part, par le gel pur et simple de toutes les autres dotations – dotation départementale d’équipement des collèges, dotation globale de décentralisation et dotation globale d’équipement.
Au total, sur un manque à gagner, toutes collectivités confondues, de plus de 732 millions d’euros par rapport au maintien des conditions du contrat de stabilité de 2008, les départements en supporteront environ 250 millions d’euros.
Par ailleurs, les départements s’interrogent sur le financement de la part du RSA relative au coût de l’allocation de parent isolé, l’API.
En effet, la compensation sous forme de fraction de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, posera immanquablement à terme de très fortes difficultés dans la mesure où, après 2010, une fois l’ajustement définitif de la compensation déterminé, l’assiette nationale de la TIPP continuera mécaniquement de baisser alors que le coût du RSA versé aux parents isolés ne suivra pas nécessairement le même chemin.
Il aurait donc été préférable de faire reposer cette compensation sur une fraction de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance, dont l’assiette paraît moins exposée aux risques de baisse.
Ces nouvelles mesures, madame la ministre, sont accueillies avec une profonde amertume par les élus des conseils généraux car elles s’ajoutent aux difficultés financières déjà bien présentes qui sont, elles-mêmes, la conséquence des décisions prises dans le passé.
Sans m’étendre longuement sur ce point, il me paraît toutefois essentiel de rappeler, au travers de quelques exemples choisis, l’ampleur des dégâts.
Pour le seul RMI-RMA – je ne reviendrai pas sur les autres transferts de compétence –, le manque à percevoir pour mon département du Lot, qui compte 170 000 habitants, s’élève à plus de 5 millions d’euros, soit, sur la période 2004-2007, l’équivalent de dix points d’impôts.
S’agissant de la récente réforme de la taxe professionnelle, qui produira véritablement ses pleins effets à partir de 2009, elle représentera alors pour mon département une charge d’environ 1,5 million d’euros.
Enfin, toujours pour ce même département, l’écrêtement de la dotation de la compensation de la taxe foncière sur les propriétés non bâties aura un effet de l’ordre de 650 000 euros sur le prochain budget.
Je ne parlerai pas de la compensation à 30 % de l’APA ni des sommes que nous devons ajouter pour payer les primes des personnels transférés, afin de les mettre sur un pied d’égalité avec les autres personnels employés dans nos conseils généraux.
Madame la ministre, l’accumulation de toutes ces mesures finira par porter un coup d’arrêt définitif à la politique d’investissement des collectivités territoriales, qui, je le rappelle, représente plus de 75 % de l’investissement public.
En 2009, l’État ne fournira pas, aux collectivités en général et aux départements en particulier, les moyens d’assurer convenablement les missions qu’il leur a transférées dans le cadre de la décentralisation.
Sans compter que la crise économique et financière que nous traversons aura de lourdes conséquences pour les départements.
Elle en aura, tout d’abord, sur le plan des recettes : les droits de mutation devraient connaître en 2009 une baisse comprise entre 15 % et 30 %, la taxe professionnelle reste elle aussi sensible aux effets de la conjoncture et un ralentissement de la consommation confirmera la baisse de l’assiette de la TIPP.
La crise aura également des incidences sur le plan des dépenses : les charges sociales des départements risquent de subir les lourdes conséquences de l’aggravation du nombre de demandeurs d’emploi et des bénéficiaires du RMI.
Aussi, madame la ministre, plus qu’à un effet de ciseaux, c’est à une véritable asphyxie financière que les départements seront confrontés l’année prochaine.
Et pour desserrer l’étau, nous pouvons user des remèdes classiques.
Celui du levier fiscal, tout d’abord, est profondément injuste dans la mesure où nous n’avons pas eu le courage politique de réformer la fiscalité locale. Mes prédécesseurs à cette tribune en ont parlé, notamment Jean-Pierre Fourcade.
Celui du gel des investissements, ensuite, signifierait, en cette période, l’abandon de l’un des principaux moteurs de l’économie locale et, en conséquence, l’accélération garantie des effets récessifs.
Enfin, celui de l’endettement et du recours au crédit, dont le récent renchérissement générera déjà des charges nouvelles, aggraverait une situation financière déjà bien fragile.
Nous le voyons clairement : les départements ne disposent d’aucune solution réellement adaptée pour conjurer les dangers qui pèsent sur leurs budgets.
Certains, aujourd’hui, sans doute par effet de mode, contestent la légitimité même des départements, alors qu’il y a peu le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin en a fait, par la voie de la décentralisation, un échelon territorial indispensable d’expression de la démocratie, de développement et de bonne gestion de nos services publics. Où est donc la logique ? Nous la cherchons mais, malheureusement, nous peinons à la trouver.
Restons donc cohérents, madame la ministre, et donnons aux départements la lisibilité et les financements dont ils ont besoin pour mener à bien leurs politiques au service de nos concitoyens.
Au fil des ans, nous avons transféré de très nombreuses compétences aux départements. Fort heureusement, le montant des diverses allocations et prestations est défini au niveau national. Nous ne pouvons donc que constater l’augmentation croissante des dépenses liées au nombre de bénéficiaires. Nous ne maîtrisons en aucun cas les dépenses.
M. le ministre du budget a dit tout à l’heure vouloir préserver l’investissement. Mais nous sommes nombreux ici à ne pas avoir été convaincus par ses propos, en particulier les présidents de conseil général. Car, au-delà des mots, il y a des faits, et les faits sont têtus.
On peut même se demander, madame la ministre, si certains ne souhaitent pas asphyxier les départements afin de leur faire rendre gorge et de faciliter ainsi le dessein des grands esprits qui veulent les faire disparaître.
Madame la ministre, j’appelle donc le Gouvernement à la raison : il doit remettre en question les dispositions que j’ai évoquées à l’instant, qui font de ce budget un mauvais budget pour les collectivités territoriales ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – M. François Fortassin applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je n’ai malheureusement que dix minutes pour plaider la cause des villes les plus en difficultés de nos territoires.
Ces villes, quelles sont-elles ? Ce sont celles qui accueillent les populations les plus pauvres et qui, par ailleurs, ne disposent pas des ressources fiscales suffisantes pour faire face à la charge budgétaire induite par la mise en œuvre des politiques liées notamment à la rénovation urbaine, à l’accompagnement éducatif et social, à la santé ou encore à la prévention de la délinquance, qu’elles doivent pourtant développer pour maintenir ou ramener ces territoires, souvent partis à la dérive, dans le giron de la République.
En 2003, au nom de l’égalité, l’État et le Parlement se sont fortement engagés et ont engagé leurs partenaires – collectivités locales, 1 % logement, associations –, en adoptant le programme national de rénovation urbaine – près de 40 milliards d’euros mobilisés –, en décidant du doublement, en cinq ans, de la dotation de solidarité urbaine, la DSU, pour la porter de 600 millions à 1,2 milliard d’euros, en renforçant les moyens financiers de la politique contractuelle, en rendant plus efficaces ces dispositifs par la création de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’Acsé, en doublant au total le nombre des zones franches urbaines qui visent à maintenir ou à installer dans ces quartiers les commerces et les entreprises.
Toutes ces décisions avaient pour but, permettez-moi l’expression, de « mettre le paquet », afin de rendre possible et perceptible par les habitants de ces quartiers dits sensibles un véritable changement, afin de leur redonner espoir en la République, afin aussi de sortir du saupoudrage des crédits qui coûtait cher sans donner les résultats attendus.
Nous nous sommes alors fixé collectivement pour objectif de tirer ces quartiers vers le haut en donnant aux collectivités locales les moyens nécessaires, bien au-delà du droit commun, pour réussir ce pari de l’intégration et de la cohésion sociale.
Avons-nous réussi ? II est bien trop tôt pour le dire ! Une chose est certaine néanmoins : si nous relâchons notre effort, tout le bénéfice de ce que nous avons déjà entrepris peut être perdu.
Bien que cinq années soient déjà passées, il est effectivement encore trop tôt pour dire si oui ou non nous réussirons ce formidable pari lancé sous l’égide de Jean-Louis Borloo.
Cependant, dans beaucoup de villes, les choses commencent à bouger. Les quartiers se transforment avec la démolition des immeubles les plus dégradés, les nouveaux logements, comme les équipements publics, sortent de terre, donnant enfin le sentiment aux habitants que les choses peuvent changer. J’aurais envie de vous dire : « Yes we can ! » (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous pouvez parler français.
M. Philippe Dallier. Malheureusement, la crise internationale ayant pris l’ampleur que nous savons, nous devons faire des choix budgétaires difficiles pour limiter le déficit public et passer ce mauvais cap. J’y souscris pleinement.
Parmi ces décisions, il y a celle qui concerne les dotations aux collectivités locales.
La question posée est donc simple : dans l’enveloppe à répartir, pouvons-nous demander aux villes les plus pauvres de participer à l’effort que l’on attend de l’ensemble des collectivités locales ?
À cette question, je réponds clairement non. Pourquoi ?
D’abord, parce que si nous avons effectivement fortement augmenté leurs dotations dans les années passées, ce n’était que pour rattraper des disparités criantes.
Au-delà de ce rattrapage, nous avons voulu donner à ces villes les moyens nécessaires pour financer les lourds projets de rénovation urbaine dans lesquels elles se sont résolument engagées, qui pèsent et pèseront longtemps sur leurs budgets.
C’est bien pourquoi nous avions prévu, en cinq ans, le doublement de la DSU, laissant aux maires le soin d’en fixer l’emploi.
Malgré cela, mes chers collègues, aujourd’hui, pas plus qu’hier, ces villes ne disposent pas en général des marges de manœuvre budgétaires qui leur permettraient, d’un côté, de poursuivre leurs longs, coûteux et nécessaires efforts en faveur de la rénovation urbaine et de la cohésion sociale et, de l’autre, de réduire leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement.
Voilà pourquoi je considère qu’il n’est pas souhaitable de leur demander, alors qu’elles subiront déjà, comme les autres collectivités, la baisse de certaines de leurs recettes propres, de participer à l’effort général de limitation des dépenses de l’État.
En effet, dans ces villes et dans leurs quartiers sensibles, toute réduction de la voilure des dispositifs humains, en particulier les associations, des dispositifs fiscaux, notamment en zone franche urbaine, et des projets lancés ces dernières années risquerait non seulement de brouiller le message de l’État, ce qui serait déjà regrettable – surtout pour nous, élus de la majorité, car c’est bien nous qui avons adopté toutes ces mesures –, mais, plus grave encore, de remettre en cause l’objectif principal qui est bien de sortir durablement ces quartiers de leurs difficultés.
Après des années d’annonces de projets, de concertation avec la population, d’élaboration des dossiers, d’appels d’offres et, enfin, de travaux, c’est en effet seulement maintenant, à l’heure de l’aboutissement, certes encore partiel, mais néanmoins substantiel, des réalisations promises, que les habitants retrouvent l’espoir et qu’ils se réapproprient leur quartier, les espaces publics rénovés, les immeubles réhabilités et « résidentialisés », leurs nouveaux logements.
Cette bataille de tous les instants, celle de la République contre ceux qui ne veulent pas de la République dans ces quartiers, nous devons la poursuivre et l’accentuer pour la gagner, sous peine de perdre tout le bénéfice des efforts déjà consentis.
C’est pourquoi, madame le ministre, j’étais favorable à l’esprit de la réforme de la DSU, qui visait à concentrer sur les villes les plus pauvres l’enveloppe de cette dotation, augmentée, cette année, de 70 millions d’euros. Oui, j’y étais favorable, même si ma commune aurait certainement perdu le bénéfice de la DSU.
Seulement voilà, une mauvaise préparation du terrain a fait capoter cette réforme, parce que l’on aura voulu toucher à tous les critères de la DSU en même temps, la rendant illisible et même contestable puisqu’elle sortait du dispositif nombre de villes qui auraient dû y rester.
Madame le ministre, vous avez donc pris en l’occurrence la seule décision raisonnable : repousser d’un an cette réforme et lancer une grande concertation avec les associations d’élus et le Comité des finances locales.
Mais pour réussir, il faudra se souvenir que la DSU, telle qu’elle a été pensée à l’origine, souffre d’un handicap majeur, car elle vise un double objectif quasi inatteignable : d’un côté, aider les villes à faible potentiel fiscal qui font face à une problématique sociale lourde et, de l’autre, soutenir les villes à faible potentiel fiscal qui n’accueillent pas des populations particulièrement pauvres.
Aussi, je considère qu’il faudra tout à la fois recentrer la DSU au seul bénéfice des villes les plus pauvres fiscalement et socialement et trouver en parallèle, comme en Île-de-France avec le Fonds de solidarité de la région d’Île-de-France, à la condition qu’on lui redonne un peu de vigueur (Mme Nicole Bricq opine), un autre outil de péréquation de la richesse fiscale.
Nous avons donc besoin, mes chers collègues, d’une réforme plus large. Elle doit trouver sa place dans le débat ouvert par le Président de la République sur l’organisation administrative et politique de nos territoires, qui ne peut se concevoir sans intégrer la problématique des moyens de ces collectivités.
Une autre décision et innovation intéressante dans ce projet de budget pour 2009 est la création de la dotation de développement urbain, la DDU, réservée aux cent communes les plus concernées par la politique de la ville, dont l’enveloppe a été fixée à 50 millions d’euros.
Si je me réjouis de cette décision qui va dans le sens de ce que je viens de défendre, à savoir une augmentation et une concentration des moyens, je dois tout de même vous faire part, madame le ministre, de l’inquiétude de nombre d’élus sur la manière dont les sommes concernées seront réparties.
Si mes informations sont exactes, les critères d’éligibilité au dispositif seront fixés d’un commun accord avec les associations d’élus, puis validés par le comité interministériel des villes, le CIV, en décembre prochain.
Ensuite, des enveloppes départementales seront calculées puis distribuées par les préfets, sur appel à projet, en fonction d’objectifs fixés à l’échelon national.
Si je peux comprendre – encore que ! – la volonté de l’État de flécher ces crédits, je crains que la mécanique imaginée ne soit lourde et peut-être, au bout du compte, inéquitable.
En effet, les cent villes retenues, même si nous n’en connaissons pas la liste, seront certainement toutes déjà engagées dans de lourds projets de rénovation urbaine dont le contenu a d’ailleurs été négocié avec l’État.
Comment imaginer, alors, qu’elles auront la capacité de se lancer dans de nouveaux projets d’investissement dont la nature collerait avec le ou les objectifs ministériels retenus pour l’octroi de la DDU ? C’est très peu probable.
Il pourrait donc y avoir des villes a priori éligibles à la DDU mais qui ne pourront peut-être pas présenter de projets répondant aux critères fixés par l’État, au niveau ministériel.
Voilà pourquoi, madame le ministre, je souhaite que vous nous apportiez des précisions et peut-être que vous nous rassuriez sur les instructions que vous donnerez aux préfets quant aux projets qui pourront être retenus.
Enfin, madame le ministre, je terminerai en formulant le souhait que nous puissions, dans le débat qui s’engage, trouver le moyen de revenir sur la liste des variables d’ajustement de l’enveloppe élargie, et particulièrement sur celles qui pénaliseraient les villes les plus pauvres, ce qui, vous en conviendrez, ne serait pas équitable puisque ce que nous avons donné d’un côté nous le reprendrions de l’autre.
En effet, cette année, les exonérations de taxes foncières sur les propriétés bâties concernant les personnes de condition modeste, pour 66,3 millions d’euros, les logements en zone urbaine sensible, pour 21,86 millions d’euros, et les zones franches urbaines, pour 2,29 millions d’euros, feront partie des variables d’ajustement.
Au total, nous connaîtrons une baisse de 90 millions d’euros par rapport en 2008, qui pèsera en très grande partie sur les villes les plus pauvres puisqu’elles concentrent, par définition, les personnes de condition modeste, les logements en zone urbaine sensible et les zones franches urbaines.
Madame le ministre, j’ai bien conscience qu’il est impossible de trouver ces 90 millions d’euros, mais il faudrait, pour les villes éligibles à la DSU, à tout le moins pour le premier tiers d’entre elles, faire en sorte que ces variables d’ajustement n’aient pas des conséquences aussi négatives que pour les autres villes. C’est une question de cohérence et d’équité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, c’est au titre des régions que je m’exprimerai, dans le contexte difficile que vous connaissez.
Ce débat est certes technique, mais la technicité ne doit pas dissimuler la réalité. Et la réalité est que ce budget asphyxie les collectivités territoriales. Il ne s’agit pas pour moi de demander toujours plus, de céder à la démagogie, il s’agit d’analyser la réalité.
Les collectivités locales, les régions en particulier, sont aujourd’hui asphyxiées, étranglées. On leur fait les poches. On les met au pilori.
Madame la ministre, hier, le groupe Unilever annonçait la fermeture, en Bourgogne, de deux des trois sites de la société Amora. Beaucoup de membres de la majorité, et non des moindres, notamment un ancien ministre membre du conseil régional, déclarent que si le groupe supprime des emplois en Bourgogne, c’est à cause de la fiscalité régionale.
Permettez-moi de vous citer les chiffres. L’année dernière, sur territoire français, le groupe Unilever a réalisé un chiffre d’affaires de 220 millions d’euros et a dégagé un bénéfice de 22 millions d’euros. Il paye, pour ces trois sites, 250 000 euros de taxe professionnelle, chiffre qui n’a d’ailleurs pas augmenté depuis trois ans puisque, grâce aux décrets qui ont été pris, il a bénéficié d’un écrêtement de 185 000 euros.
Mettre les régions au pilori alors qu’on leur demande plus et qu’on leur donne moins appelle de ma part quelques observations.
On nous présente un projet d’asphyxie. Asphyxie des collectivités en général, car il supprime la référence à la croissance du PIB pour le calcul de la DGF. Asphyxie des régions en particulier, car il gèle l’évolution de la dotation décentralisée régionale pour la formation professionnelle et l’apprentissage, ou DDRFPA, et surtout, il gèle l’évolution de la dotation générale de décentralisation, ou DGD, réceptacle d’une partie des dotations pour les TER et de certains transferts de l’acte II de la décentralisation. Permettez-moi, madame la ministre, de vous en donner l’illustration par quelques exemples chiffrés.
D’abord, la suppression du mécanisme de régularisation de la DGF se traduit par une perte pour les collectivités locales. Je ne peux qu’y être défavorable.
Le Gouvernement présente la suppression de ce mécanisme comme un geste positif en faveur des collectivités locales puisque la régularisation négative de la DGF prévue au titre de 2007, de 66 millions d’euros, ne sera pas imputée sur le montant de la DGF ouvert en 2009.
Cette présentation est trompeuse puisque la suppression de ce mécanisme conduit en réalité à priver les collectivités des fortes régularisations positives attendues sur les exercices à venir.
Une forte régularisation aurait ainsi dû être versée en 2009 au titre de la DGF 2008, les indices macroéconomiques utilisés pour le calcul de la DGF versée aux collectivités en 2008 ayant été très nettement sous-estimés.
L’inflation prévisionnelle pour 2008 avait été évaluée à 1,6 %, alors qu’elle est désormais attendue aux alentours de 3 %. La régularisation correspondante qui aurait dû être versée aux collectivités est estimée à plus de 500 millions d’euros.
La suppression des régularisations de la DGF, c’est donc, pour les collectivités, un gain de 67 millions d’euros pour 2009, mais une perte de 500 millions d’euros pour 2010.
C’est pourquoi nous avons déposé, à l’article 10, un amendement par lequel nous demandons que la régularisation au titre des années 2007 et 2008 ait bien lieu.
Nous souhaitons ainsi que la suppression du mécanisme de régulation n’intervienne pas au moment le plus désavantageux pour les collectivités territoriales et que les indices sur lesquels est fondée l’évolution de la DGF, à savoir l’inflation, soient reconnus et admis par tous.
Ensuite, comme de nombreux orateurs l’ont précisé, le maintien du FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, est artificiel.
On nous dit que le FCTVA est préservé, mais ce que l’on ne dit pas clairement, c’est à quel prix.
Désormais, le FCTVA est bel et bien considéré comme une dotation parmi d’autres et il est intégré à ce titre au sein de l’enveloppe normée des concours de l’État.
Certes, madame la ministre, les mécanismes de calcul et d’attribution du FCTVA ne sont pas modifiés pour 2009, mais c’est au prix d’une baisse considérable des autres concours de l’État.
L’intégration du FCTVA à l’enveloppe normée limite la marge de progression des autres concours à 447 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2008, soit une revalorisation de 0,89%.
En outre, la dotation générale de décentralisation, la DGD, n’évolue pas au niveau annoncé pour les régions.
Le projet de loi de finances prévoit un simple « gel » de la DGD, mais en réalité cette dotation va baisser pour les régions en 2009.
L’article 68 du projet de loi de finances révise le montant du droit à compensation des régions au titre de la compétence exercée sur les TER, pour tenir compte d’une modification du régime fiscal applicable aux subventions d’exploitation.
Le projet de loi de finances intègre désormais les subventions d’exploitation versées par les régions à la SNCF dans la catégorie de subventions non assujetties à la TVA et la compensation correspondante versée par l’État doit être minorée en conséquence. Ce mécanisme est compliqué, mais vous en aurez sans doute perçu le côté pernicieux.
Cette modification réduit le montant du droit à compensation de 82 millions d’euros, lesquels seront pris sur la DGD des régions en 2009. La DGD n’évoluera donc pas de 0 %, elle baissera de 6 %.
Du côté des dépenses, aucun accord global n’a été passé entre l’État et la SNCF pour compenser cette mesure. On laisse aux régions le soin de se débrouiller pour négocier avec la SNCF la perte qu’elles auront subie.
Comme l’a souligné Gilles Carrez dans son rapport sur le projet de loi de finances, on peut se demander pourquoi cette minoration n’est pas retranscrite au sein du périmètre des concours de l’État dont la DGD fait partie.
Peut-être est-ce du fait de la précipitation dans laquelle a été prise cette mesure, peut-être est-ce aussi pour majorer l’« effort » de l’État en faveur des collectivités locales ?
Enfin, madame la ministre, l’évolution des concours de l’État aux collectivités locales est trompeuse.
Vous l’avez dit et répété, le projet de loi de finances affiche une évolution globale des concours de l’État de 2 %. M. Soisson a fait de même, hier, lors du débat d'orientation budgétaire en Bourgogne.
Comme nous l’avons vu, cette évolution n’est obtenue que par le biais de plusieurs éléments. Le FCTVA est intégré dans l’enveloppe alors qu’il ne l’abondait pas auparavant puisqu’il n’était pas considéré, à juste titre, comme une dotation. La minoration de 82 millions d’euros de la DGD n’est pas prise en compte. Enfin, une série de concours, qui jouent le rôle de variables d’ajustement, est artificiellement réintégrée. C’est en particulier le cas des compensations fiscales qui diminueront, initialement de 22%, finalement de 17,7% après discussion du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale.
En sortant le FCTVA de l’enveloppe et en réintégrant la DGD à hauteur du montant qui sera effectivement versé aux collectivités, les concours progressent en réalité de 0,73%.
Pour conclure mon intervention, je tiens à souligner que, pour la première fois dans l’histoire de la décentralisation, le volume global de la dotation de compensation est en baisse d’un exercice sur l’autre. À preuve, les notifications qui ont été faites à la région Bourgogne font apparaître une baisse de 3 millions d’euros.
La norme d’évolution des concours de l’État affichée par le projet de loi de finances pour 2009 est donc un trompe-l’œil pour les collectivités. La plupart des régions verront en fait leurs dotations baisser, une première depuis 1982 et l’acte I de la décentralisation !
En 2009, l’État ne fournira pas aux régions les moyens d’assurer convenablement les missions qui leur ont été transférées dans le cadre de l’acte II de la décentralisation.
J’ajoute que les régions sont fortement sollicitées du fait de la crise actuelle. Mille emplois ont été supprimés en une semaine en région Bourgogne ! Les entreprises se tournent immédiatement vers nous et nous rencontrons tous les jours des salariés. Comment les accompagner avec des ressources qui baissent ou stagnent ? Vous imaginez la difficulté de notre tâche.
C’est pourquoi je ne souhaite aucun triomphalisme de la part du Gouvernement sur son soutien aux collectivités. Je ne sais pas ce que vous direz aux maires demain, madame la ministre. Vous leur expliquerez sans doute que l’État ne se désengage pas. Quant à moi, en me fondant sur la situation des régions, je vous prouve l’existence d’un réel désengagement.
J’ai écouté les propositions qui ont été avancées tout à l’heure par certains d’entre nous, et non des moindres, et je suis prêt à y souscrire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – M. Jean Milhau applaudit également.)
(M. Roger Romani remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani
vice-président
M. le président. La parole est à M. Elie Brun.
M. Elie Brun. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il me paraît symbolique que ma première intervention dans cet hémicycle porte sur les ressources des collectivités locales. Je tiens à en remercier le groupe UMP.
Je voudrais rappeler que j’ai eu la chance et le mérite de diriger, pendant vingt-cinq ans, un cabinet d’expertise comptable et d’avocats fiscalistes. Pendant toutes ces années, la loi de finances était mon livre de chevet des premiers jours du mois de janvier. J’essayais de l’appréhender, l’apprécier, la comprendre et l’interpréter le mieux possible.
La vie publique m’a rattrapé. Maire de Fréjus depuis 1997, le sujet des ressources des collectivités locales me tient particulièrement à cœur. Il nécessite qu’on s’y attelle de près au niveau national, et je me réjouis que ce soit le cas.
Le projet de loi de finances pour 2009 s’inscrit dans un contexte budgétaire aléatoire. Cette situation n’est pas sans incidence sur les cadrages économiques qui ont prévalu à son élaboration. Mais, au-delà, le vrai débat porte sur une meilleure maîtrise des dépenses publiques à laquelle les collectivités locales doivent participer.
Je crois devoir rappeler que, pour la première fois, le projet de loi de finances a été précédé d’une loi de programmation qui fixe les objectifs et les conditions de réalisation de la programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.
Il est bien évidemment tentant, comme cela était naturel par le passé, d’attendre le maximum de l’État pour satisfaire les demandes légitimes de nos concitoyens qui souhaitent vivre dans des villes, des départements ou des régions agréables et avoir accès à des services publics de qualité.
Il peut être tout aussi facile d’engager des financements publics pour répondre à des problématiques locales en faisant abstraction de l’environnement national et international, ainsi que des équilibres de l’économie publique.
Je crois qu’aujourd’hui la prise de conscience est réelle quant à la nécessaire maîtrise des dépenses publiques. Chacun, à son niveau, doit s’engager avec détermination dans l’effort collectif de réduction des déficits.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Elie Brun. En dépit d’un contexte budgétaire tendu, les collectivités locales doivent faire face à leurs engagements, qu’ils soient liés à la réalisation d’équipements ou au remboursement des financements des investissements passés.
À cet égard, nous ne pouvons que nous réjouir de la décision du Gouvernement de maintenir l’indexation de l’enveloppe des concours de l’État à 2 %, malgré une baisse de la prévision de l’inflation pour 2009, ramenée à 1,5 %. Il peut être utile de rappeler qu’une différence de 0,5 point correspond à un peu plus de 200 millions d’euros.
Le Gouvernement appelle à une politique marquée de maîtrise des dépenses de fonctionnement des collectivités locales. Je partage pleinement ce souhait de fournir un effort tout particulier sur ces dépenses, afin de reconstituer les marges de financement de notre investissement tout en limitant le recours à l’emprunt. Une inflexion dans la dynamique des dépenses publiques locales est nécessaire pour aboutir à une amélioration de la capacité d’autofinancement des collectivités publiques, élément indispensable à la réduction des déficits publics.
L’intégration du FCTVA dans l’enveloppe normée participe à cette démarche. Cette ressource, qui constitue un remboursement, et non une dotation, reste garantie, comme M. le ministre du budget l’a rappelé. À terme, une réforme du FCTVA pourrait être envisagée pour adapter le dispositif aux besoins des politiques locales d’investissement. Je rappellerai à ce sujet que les communes doivent assurer le portage financier de la TVA durant deux ans, du fait du décalage de remboursement opéré au titre du fonds de compensation.
Eu égard à ce qu’il est raisonnable d’attendre de l’État et ce que le présent projet de loi de finances prévoit en matière de mesures relatives aux ressources des collectivités locales, nous ne pouvons, en tant que gestionnaires responsables, que nous réjouir du dispositif proposé.
Sans aucun esprit polémique, il n’est pas complètement exact de prétendre que l’État se désengage des collectivités locales puisque ce secteur a été le mieux préservé au cours des dernières années. Sa contribution financière ne se limite pas aux dotations. Elle s’étend aussi aux allégements d’impôts, notamment la taxe d’habitation en faveur des contribuables les plus modestes, et aux exonérations en matière de taxe professionnelle.
L’avenir des financements des collectivités locales devra reposer largement plus sur la fiscalité locale que sur les concours financiers de l’État.
Dans ce contexte, nous attendons beaucoup de la réflexion en cours sur la réforme des structures des collectivités territoriales, la répartition de leurs compétences et de leur financement. Après avoir été initiée par le Président de la République, elle est conduite par la commission dite Balladur et par les groupes de travail mis en place à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Seule une véritable refonte de la fiscalité locale, adossée à une plus grande autonomie et à une redéfinition des compétences des collectivités territoriales, permettra d’apporter une réponse à la problématique du financement de l’action publique locale.
Il est aussi vital que les collectivités locales soient étroitement associées aux projets de réforme. Je pense notamment à la réforme de la dotation de solidarité urbaine dont les futurs critères d’attribution doivent absolument faire l’objet d’un dialogue. À cet égard, je salue Mme la ministre pour avoir reporté d’une année l’application des mesures nouvelles et avoir maintenu, en 2009, les critères actuels d’éligibilité à la dotation de solidarité urbaine. Le Gouvernement est parvenu à cette solution équilibrée en prenant en compte les inquiétudes de certains maires dont je fais partie.
Concernant l’exonération de la taxe professionnelle pour les investissements réalisés entre le 23 octobre 2008 et le 31 décembre 2009, qui a été annoncée par le Président de la République et qui s’avère indispensable pour soutenir l’investissement des entreprises, les collectivités locales ont besoin d’être rassurées sur la compensation intégrale des pertes qu’elles subiront.
En conclusion, il apparaît indispensable d’avoir un discours de vérité, chiffré, à l’égard des ressources allouées à l’ensemble des collectivités locales et d’engager la réforme tant attendue sur le financement de ces dernières.
Les collectivités locales ont besoin de clarté quant aux perspectives financières des prochaines années pour envisager l’avenir de la façon la plus sereine et la plus responsable possible. Elles pourront ainsi être acteur de la politique de réduction des dépenses publiques.
Grâce à une parfaite appréciation de leurs investissements futurs et une meilleure maîtrise des charges de fonctionnement, elles contribueront à un développement local en cohérence avec les aménagements majeurs de l’État qui sont indispensables à notre pays. Seule une réforme au sens large du terme, qui comprendra toutes les fiscalités, nous permettra d’atteindre ensemble ce but. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, chacun dans cet hémicycle sait combien les principes de libre administration et d’autonomie financière des collectivités locales sont indissociables.
Or, avec l’introduction cette année d’un périmètre normé comprenant l’ensemble des concours de l’État aux collectivités, un pas de plus est franchi vers l’atténuation de ces principes et donc du sens même de la démocratie locale.
En effet, sous les effets conjugués du recul de la DGF, indexée sur une inflation virtuelle de 2 % alors que l’inflation réelle avoisinerait 3 %, et du plafonnement du FCTVA, désormais intégré à l’enveloppe normée, les marges de manœuvre des collectivités d’outre-mer seront encore plus réduites.
Cette diminution de ressources intervient de surcroît dans un contexte fiscal structurellement contraint puisque le produit des quatre taxes directes locales ne représente que 27 % des produits de fonctionnement en Guadeloupe, contre 57 % dans l’Hexagone.
S’y ajoutent les principaux contrecoups des atteintes portées à la défiscalisation sur l’activité économique, notamment à travers des reports d’investissements qui accentueront nécessairement la diminution du produit fiscal.
À cela vient s’additionner l’exonération de la taxe professionnelle annoncée par le Président de la République jusqu’au 1er janvier 2010 pour les nouveaux investissements.
Au surplus, la réduction des dotations ne pourra même pas être compensée par l’emprunt, la crise financière ayant renchéri le coût du crédit.
Dans un contexte aussi alarmant, pourriez-vous, madame la ministre, nous rassurer sur la capacité du Gouvernement à dégager l’horizon budgétaire des collectivités locales en n’introduisant pas de «variable d’ajustement » dans le calcul de la DGF, en maintenant le FCTVA en tant que recette distincte et en garantissant l’indexation globale des dotations sur l’inflation réelle ?
Au-delà, les conséquences de ce projet de loi de finances affecteront tout particulièrement la collectivité départementale.
S’agissant tout d’abord des dépenses sociales, je n’ai eu de cesse, depuis 2004, d’alerter le Gouvernement sur la nécessité de réviser les paramètres de compensation du RMI, 60 millions d’euros restant à la charge du budget du conseil général de la Guadeloupe.
À cet égard, je dois vous dire la forte inquiétude que je partage avec les exécutifs départementaux ultramarins : nous craignons que l’entrée en vigueur du RSA ne vienne creuser ce différentiel.
Dans ce contexte plutôt préoccupant, pourriez-vous nous apporter, madame la ministre, des garanties relatives à la pérennité de cette « petite soupape » que constitue le fonds de mobilisation départementale pour l’insertion ? Nous éviterions ainsi l’affaiblissement budgétaire de nos départements.
Madame la ministre, chers collègues, je conclurai en évoquant un autre point d’inquiétude soulevé par ce projet de loi de finances. Celui-ci impose au budget du conseil général de la Guadeloupe de supporter outre mesure les conséquences de la création des collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
En effet, pour abonder la dotation globale de compensation prévue par la loi, l’État envisage de ponctionner la DGF et la DGD du département de façon disproportionnée et abusive : pour certaines dépenses, au-delà du niveau jusqu’à présent compensé par l’État ; pour d’autres, en « récupérant » les fonds propres du département affectés à des dépenses qu’il conduisait de manière volontariste sur ces territoires.
Pour cette raison, madame la ministre, je vous demande d’appliquer strictement la loi en limitant les contributions de la Guadeloupe aux budgets de Saint-Martin et Saint-Barthélemy aux seules recettes fiscales qui leur reviennent et à la fraction des compensations versées par l’État au département qui correspond aux compétences transférées à ces collectivités.
En définitive, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rompt manifestement avec le contrat de croissance et de stabilité qui prévalait jusqu’alors.
Si nous comprenons la nécessité d’un effort de redressement des comptes de l’État, nous souhaiterions toutefois que ce dernier n’accroisse pas davantage les difficultés de nos collectivités. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.
M. Louis Nègre. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, c’est avec une certaine émotion, mais aussi avec un réel plaisir, que j’interviens aujourd’hui, pour la première fois dans l’hémicycle (Applaudissements sur les travées de l’UMP),…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bravo !
M. le président. Nous vous complimentons et nous vous encourageons !
M. Louis Nègre. …devant vous, madame le ministre, sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur, comme d’ailleurs à nous tous : les finances des collectivités locales, plus particulièrement leurs recettes.
Nous sommes confrontés à une crise extérieure et aux difficultés de fonctionnement de certaines institutions, qui n’assument plus correctement leur rôle de régulation. La maîtrise des dépenses publiques s’impose à nous tous, et il est de notre devoir et de notre responsabilité d’envisager cette question de la manière la plus objective possible.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Louis Nègre. Le déséquilibre du budget de l’État est permanent depuis les années quatre-vingt. Si nous voulons atteindre l’équilibre en 2012 – objectif ambitieux que nous nous sommes fixé au regard de nos engagements européens, mais aussi afin de préparer l’avenir de nos enfants –, nous devons accepter un principe de réalité.
Il semble évident que l’État ne pourra redresser les finances publiques, qui sont également les nôtres, s’il n’agit pas aussi sur une part qui représente 21,5 % de son propre budget.
Je note que les concours de l’État progressent de 1,1 milliard d’euros, soit 200 millions d’euros de plus que l’an dernier. Au total, les collectivités percevront donc 56,3 milliards d’euros en 2009, contre 55,2 milliards en 2008.
Je note encore que, entre 2003 et 2009, les dépenses de l’État auront progressé comme l’inflation, soit une hausse moyenne annuelle de 1,7 % en valeur, alors que, dans le même temps, les concours aux collectivités locales, hors dégrèvements et fiscalité transférée, auront augmenté de 2,7 % en valeur.
Dans ces conditions, il paraît logique que l’effort que nous devons faire soit collectif et que l’évolution des concours de l’État aux collectivités suive le rythme de l’inflation.
Cependant, madame le ministre, mes chers collègues, dans ce domaine, nous sommes au milieu du gué. Si nous voulons préparer l’avenir, je pense – comme le Président Sarkozy et comme vous-même, madame le ministre – qu’il nous faut aussi simplifier le fonctionnement des collectivités territoriales. Clarifier les niveaux de compétence est une exigence tant les redondances et la confusion rendent le système complexe et coûteux. C’est aussi, et surtout, une véritable et légitime attente de nos concitoyens et de bon nombre d’élus locaux, dont je fais partie.
Je pense que ce mouvement de simplification institutionnelle doit s’accompagner d’une grande réforme de la fiscalité locale. Le monde bouge, la mondialisation nous concerne tous. Nous ne sommes pas isolés dans une bulle. Notre système fiscal doit s’adapter, gagner lui aussi en simplicité, en lisibilité,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Louis Nègre. …et, surtout, permettre aux collectivités locales de faire face à leurs nouvelles responsabilités. C’est un enjeu majeur.
Nous attendons cette réforme depuis des décennies – et j’ai conscience de m’adresser à ceux qui y travaillent depuis longtemps –, et je me félicite qu’elle devienne une véritable préoccupation non seulement de notre assemblée, mais aussi du Gouvernement.
Nous devons engager une réflexion globale et sur le long terme. Pour cela, nous devons construire un partenariat de confiance fondé sur l’association de toutes les instances de décision. C’est d’ailleurs, me semble-t-il, l’objet de la Conférence nationale des exécutifs ainsi que de la mission de la Commission consultative d’évaluation des normes, qui sont deux outils efficaces pour aller dans ce sens.
Néanmoins, travailler ensemble suppose également que le Gouvernement entende les préoccupations des élus. Pour ma part, madame le ministre, en tant qu’élu local et sénateur-maire de Cagnes-sur-Mer, je souhaiterais vous interroger sur trois points.
J’évoquerai tout d’abord le problème des emprunts structurés.
Avec Mme le ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, Christine Lagarde, vous avez réuni récemment au ministère de l’intérieur les représentants des collectivités territoriales et des banques afin de dresser un bilan de la situation. Cet état des lieux a fait apparaître deux constats rassurants : d’une part, globalement, les collectivités territoriales ne sont pas considérablement endettées ; d’autre part, la très grande majorité de leurs emprunts sont à taux fixe et, à l’intérieur de la catégorie des emprunts dits « à risque », la part des emprunts structurés serait faible, de l’avis même des banques et de l’Association des maires de France.
Cela étant, madame le ministre, je souhaiterais savoir si l’on connaît plus précisément aujourd’hui l’ampleur de ces emprunts exotiques, voire toxiques. Pouvez-vous également m’indiquer quelles mesures vous envisagez pour l’avenir dans ce domaine ? Quelles dispositions comptez-vous prendre aujourd’hui afin de diminuer d’ores et déjà les conséquences de ces emprunts structurés sur les collectivités locales qui les auraient souscrits – sur la proposition orientée de leur banquier ?
J’aborderai ensuite la question de la dotation de développement urbain que le projet de loi de finances, entre autres mesures, vise à créer afin de renforcer l’effort de solidarité au bénéfice des collectivités les plus pauvres ; car « moderniser » doit aussi rimer avec « solidarité » !
L’État, conscient des difficultés, veut à juste titre donner des moyens financiers accrus aux communes les plus pauvres dont la population rencontre de grandes difficultés sociales et économiques, en particulier dans les « quartiers sensibles ». Cette nouvelle aide financière devrait être répartie par le préfet entre les communes prioritaires de son département et servir au financement de projets d’investissement sur la base d’un contrat d’objectifs conclu entre les communes bénéficiaires et l’État.
Comme l’ensemble de mes collègues, je ne peux que me féliciter de cette initiative du Gouvernement. Cependant, madame le ministre, j’aimerais que vous nous apportiez des précisions complémentaires sur le type d’opérations qui pourra être proposé par nos collègues au préfet. Par ailleurs, je m’interroge sur la façon dont l’État pourra contrôler l’utilisation de ces fonds.
Je souhaite enfin, madame le ministre, revenir sur la dotation de solidarité urbaine, la DSU, que vous avez prévu de réformer en instaurant une nouvelle répartition de ses crédits entre les communes de plus de 10 000 habitants afin d’en améliorer l’efficacité péréquatrice en faveur des « communes pauvres ayant des pauvres » et de garantir à celles-ci une relative prévisibilité des fonds dont elles disposeront.
Ce projet de réforme, qui a fait l’objet d’une concertation avec les élus, a évolué de manière positive. L’année 2009 constitue une transition qui permettra de réfléchir tranquillement à de nouveaux critères. J’aimerais savoir, madame le ministre, quelles pistes vous souhaitez explorer avec les parlementaires et les associations d’élus pour définir à terme un véritable consensus dans ce domaine.
Par ailleurs, je constate avec satisfaction que, malgré la baisse prévisionnelle du niveau de l’inflation en 2009, qui serait de 1,5 % au lieu de 2 %, le Gouvernement a proposé, de manière exceptionnelle, de maintenir à 2 % l’augmentation de l’enveloppe du concours de l’État pour 2009, comme cela avait été initialement prévu. Grâce à cette mesure, les collectivités territoriales préserveront leur capacité d’investissement et de solidarité. On ne peut que s’en réjouir, à un moment où ces dépenses sont d’autant plus indispensables que la situation économique est particulièrement difficile.
En conclusion, madame le ministre, mes chers collègues, je soulignerai à quel point la situation des finances publiques, notamment locales, est tendue, du fait de charges qui augmentent rapidement et de recettes peu dynamiques. Dans un contexte aussi délicat, il n’est pas anormal que les collectivités locales participent à un effort partagé de maîtrise des finances publiques. J’espère néanmoins, madame le ministre, une remise à plat complète de leur système fiscal actuel, afin qu’elles retrouvent des marges de manœuvre.
Compte tenu de la dure réalité des faits et de l’espoir que nous plaçons dans le Gouvernement quant à la réalisation d’une vraie réforme de la fiscalité locale, je voterai, madame le ministre, les crédits de la mission et approuverai votre budget. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord remercier les rapporteurs, bien sûr, mais également l’ensemble des orateurs de la qualité du débat qui a eu lieu. Certes, je ne peux pas demander que nous soyons tous d’accord sur toutes les mesures, mais je pense que le ton qui a été adopté était juste, que les arguments avancés étaient de bons arguments : finalement, c’est aussi cela, le travail parlementaire, le travail de la Haute Assemblée.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Effectivement !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Nous le savons bien, les finances de l’État ne sont pas seulement des questions de pure comptabilité : elles engagent la vision que, tous, nous nous faisons de la France pour les décennies à venir, et ce dans un contexte que M. Fourcade a eu raison de rappeler, celui de la mondialisation, du développement, pour ne pas dire de l’explosion des concurrences entre les pays, entre les économies, entre les entreprises.
C’est ensemble que l’État et les collectivités locales doivent aujourd’hui préparer l’avenir du pays. Un État est un tout, et il est indispensable que tout le monde tire dans le même sens, surtout compte tenu, précisément, de ce contexte. Or c’est bien la responsabilité, la raison d’être, et je dirais l’honneur, des responsables de l’État aussi bien que des collectivités locales que de savoir prendre la hauteur nécessaire pour aborder ces grandes questions.
Face aux défis, qui sont de plus en plus complexes et, vous l’avez souligné, de plus en plus nombreux, qui sont majeurs, la maîtrise des finances publiques s’impose à tous ; cela a été relevé sur pratiquement toutes les travées, et, même quand cela n’a pas été dit, je crois que cela a été pensé… (Sourires.)
Cet effort partagé doit aussi être pour nous l’occasion de moderniser ensemble la vie publique locale. Car c’est souvent dans les périodes où l’on est obligé de faire un effort que l’on a aussi l’imagination et la volonté nécessaires pour moderniser.
Tel est, mesdames, messieurs les sénateurs, le débat que je vous propose aujourd’hui, à l’occasion de l’examen dans le projet de loi de finances pour 2009 des recettes des collectivités locales.
Oui, préparer l’avenir, c’est d’abord et certainement maîtriser l’évolution de nos finances publiques. Aujourd’hui, leur redressement est une exigence. M. Nègre, à fort juste titre, l’a rappelé : le déséquilibre entre les dépenses et les recettes est permanent depuis vingt-cinq ans, et chacun porte sa part de responsabilité. Je n’aurai pas la cruauté, monsieur Patriat, d’évoquer les dévaluations auxquelles vos amis ont été amenés à procéder, peut-être, justement, parce qu’ils ne maîtrisaient pas suffisamment les finances publiques !
Bref, quoi qu’il en soit, aujourd’hui, l’objectif du Gouvernement, parce que c’est une nécessité, parce que c’est une exigence pour notre pays, est de tendre vers l’équilibre des finances publiques. Certes, cet objectif est ambitieux, cet objectif, aussi, est difficile ; mais il est nécessaire. Il y va bien sûr de nos engagements européens, mais, au-delà, il y va de notre responsabilité à l’égard des générations futures : nous savons très bien que le déficit, ce sont aussi des intérêts à payer, des intérêts dont aujourd’hui la masse – ce n’est pas le président de la commission des finances qui me contredira – pèse sur nos finances, sur nos capacités d’investissement et même sur nos capacités de solidarité.
Quand nous faisons porter notre effort sur les finances publiques, il ne peut y avoir d’un côté l’État et de l’autre les collectivités territoriales,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh non !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. …et je remercie M. Marini de l’avoir souligné avec talent : il est évident qu’ensemble ils forment un tout et qu’aucun ne peut refuser de partager l’effort, voire de demander davantage encore aux autres.
Cela est d’autant plus vrai que, ainsi que le rappelait M. Nègre, l’effort financier consenti par l’État pour les collectivités territoriales représentera 75 milliards d’euros en 2009, soit 21,5 % du budget de l’État. Si nous ne parvenons pas à fournir quelque effort que ce soit quand plus de 20 % du budget sont en jeu, je ne vois pas comment nous parviendrions à un effort significatif sur l’ensemble du budget !
Monsieur Doligé, je ne considère pas du tout qu’il s’agisse là de largesses de l’État. Je ne l’ai jamais pensé. Je dis simplement que les collectivités ne peuvent être dissociées de la maîtrise des finances publiques. Et cela vaut pour toutes les collectivités, monsieur Gillot !
C’est la raison pour laquelle, messieurs Doligé et Dubois, le même effort sera appliqué aux dotations aux collectivités et aux dépenses de l’État l’an prochain. Il n’est pas question de largesses ; nous nous appliquons la même règle.
Et même nous l’appliquons davantage aux collectivités. Cela a été souligné par plusieurs d’entre vous, je n’y reviendrai pas, l’inflation prévisionnelle pour l’an prochain a été rabaissée à 1,5 % – certains, d’ailleurs, souhaitaient peut-être réduire la progression des dotations aux collectivités à 1,5 % –, mais j’ai finalement obtenu que le taux de 2 % soit maintenu. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.) Cela représente malgré tout 1,1 milliard d’euros !
Dans ce contexte, je veux aussi souligner que l’État tient ses engagements, notamment ceux qui sont inscrits dans la Constitution et qui sont relatifs aux compensations de transferts dans le cadre de la décentralisation. L’État réévalue de près de 600 millions d’euros la compensation de la décentralisation afin de tenir compte, tout naturellement, des transferts qui ont été réalisés en 2008 et de ceux qui sont prévus pour 2009.
Ces ajustements financiers accompagnent ainsi chaque année la mise en œuvre effective de la décentralisation. D’ailleurs, deux amendements du Gouvernement, qui seront examinés tout à l’heure, augmentent encore cette compensation de 140 millions d’euros pour tenir compte des derniers chiffres de transferts de personnels, qui ont été plus nombreux que prévu.
Messieurs Baylet et Miquel, vous ne pouvez pas affirmer qu’il n’y a pas de compensation intégrale au jour du transfert. La Constitution précise en effet que l’État attribue aux collectivités ce qu’il consacrait lui-même à l’activité transférée. Cela est fait, sinon nous serions sanctionnés.
En revanche, on constate que les transferts ont engendré des progrès. Ce fut le cas en ce qui concerne les collèges dans les départements et les lycées dans les régions. Nous ne pouvons que nous en réjouir, le vaste effort des collectivités nous permet de disposer d’établissements remarquables. C’est également le cas, comme cela a été souligné tout à l’heure, pour le transfert de personnels. Certains avantages ont en effet été accordés aux personnels venant de l’État afin de rendre leur situation équivalente à celle des personnels des conseils généraux. Cette mesure n’a pas été prise par l’État, elle provient des collectivités.
La compensation se fait au jour du transfert et représente exactement ce que l’État consacrait à l’activité en question. Ensuite, libre à chacun, en vertu du principe de l’autonomie des collectivités territoriales,…
M. François Marc. Ah !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. …de faire davantage s’il le souhaite. Si une collectivité fait plus, c’est très bien, mais elle ne doit pas ensuite reprocher à l’État de ne pas lui avoir assez transféré, car ce serait juridiquement faux.
M. François Marc. C’est l’autonomie sans la péréquation !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le réajustement des ressources et la clarification des compétences sont attendus à la fois par les citoyens et par les élus. Certains d’entre vous l’ont souligné et je partage ce sentiment : notre système est devenu trop complexe et trop coûteux. Redondances et confusion des compétences sont une source d’inefficacité et d’illisibilité pour nos concitoyens, en particulier pour les maires des petites communes, comme je l’ai constaté, y compris dans ma circonscription.
De ce point de vue, le comité sur la réforme des collectivités territoriales, présidé par Édouard Balladur, va permettre d’examiner chacune des hypothèses d’organisation et d’attribution de compétences, et ce dans un esprit de pluralisme, à l’image de la composition de la commission, et dans un esprit d’ouverture.
Les débats de cet après-midi l’ont montré, la clarification des compétences devra aussi s’accompagner d’un réajustement des ressources (M. Louis Nègre opine) et d’une répartition des ressources en fonction des compétences de chacun.
Cela est devenu indispensable. L’autonomie financière des collectivités en dépend. N’oublions pas que l’État est aujourd’hui le premier contributeur de bien des budgets ; il est le premier contribuable de bien des collectivités, et en tout cas des communes. Comment voulez-vous acquérir une autonomie financière et une liberté lorsque vous n’êtes pas totalement maître de vos ressources ? C’est là le travail qu’il faudra faire ! Je vous le dis dès maintenant, ce ne sera pas facile. Les interventions des uns et des autres révèlent des intérêts contradictoires entre les différents niveaux de collectivités territoriales.
J’espère que la clarification des compétences permettra d’effectuer cet ajustement. Mais nous aurons sans doute encore de vastes discussions sur ce point. D’ailleurs, je ne crois pas qu’elles vous opposeront au représentant du Gouvernement, il me semble plutôt que le débat se tiendra parmi les membres de votre assemblée et qu’il reviendra alors au Gouvernement d’arbitrer, ce qui d’ailleurs ne me déplaît pas forcément.
Cette clarification, c’est l’objectif de la réforme de la fiscalité locale. Je souhaite, comme vous, que nous mettions en place un système fiscal plus simple, plus lisible et plus responsabilisant. De ce point de vue, je soutiens les positions défendues par MM. Doligé, Dallier et Brun.
J’ai entendu et apprécié les propositions de M. Fourcade notamment sur les exonérations de la taxe professionnelle. Cet élément devra faire partie de nos discussions.
La taxe professionnelle sera réformée afin de soutenir la compétitivité de nos entreprises et donc de nos territoires. Dès 2009, une mesure sera appliquée en ce sens : les nouveaux investissements seront exonérés. Je veux dire à MM. Brun et Gillot que ce soutien à notre économie sera intégralement compensé pour les collectivités territoriales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pendant combien de temps ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il ne faut donc pas laisser croire que l’on ferait peser sur les collectivités territoriales cette mesure voulue par le Président de la République.
Il faut en être conscient, préparer l’avenir, ce n’est pas l’action d’un jour, ni l’action d’un homme ou d’une femme. Nous devons mettre en œuvre, dans la durée, un partenariat de confiance, pour reprendre un mot qui a notamment été employé par M. Mercier.
La modernisation, c’est d’abord travailler ensemble, en toute transparence et en toute confiance.
Cela implique de dire la vérité. Pour ma part, je m’y emploie, qu’elle soit agréable ou non. Mme Beaufils et M. Hervé évoquent la suppression des sous-préfectures ou du conseil juridique ou technique. Ce n’est pas exact ! (M. Edmond Hervé est dubitatif.) À preuve : j’ai rappelé devant cette assemblée, mais peut-être n’étiez-vous pas présent, que, comme gaulliste, je tiens à l’autorité de l’État sur le terrain. Or l’autorité de l’État sur le terrain, c’est notamment les sous-préfectures. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Je l’ai dit à plusieurs reprises, il n’y aura pas de disparition des petites sous-préfectures dans les territoires isolés, parce que j’attends des sous-préfets qu’ils apportent ce conseil juridique et technique indispensable en particulier aux maires des petites communes. En effet, ces derniers ne peuvent pas effectuer d’expertise juridique, notamment devant la complexité des codes comme le code des marchés publics. Il y a donc là un besoin.
Si on supprime certaines structures préfectorales, ce sera dans le cadre d’une réorganisation de la région parisienne. En effet, lorsqu’une sous-préfecture se situe à trois kilomètres à peine de la préfecture, il me paraît préférable de tout concentrer à la préfecture et, éventuellement, de conserver un bureau consacré à tel ou tel problème spécifique.
La confiance et la transparence impliquent aussi une meilleure association dans les instances de pilotage et de décision. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place, et pour la première fois dans notre histoire, ces instances de concertation et de décision avec les collectivités territoriales.
Monsieur Dubois, ces instances – notamment la Conférence nationale des exécutifs, la CNE, et la Commission consultative d’évaluation des normes, la CCEN, que j’ai installée le 9 octobre et qui a été créée grâce à un amendement de M. Lambert – vont être le cadre de ce dialogue, que je souhaite serein, confiant et transparent.
C’est là que nous pourrons examiner, monsieur le président Arthuis, monsieur le rapporteur général Marini, les éléments nécessaires à une véritable adéquation. Je suis tout à fait d’accord pour que toute modification de norme – je sais, en tant qu’élue locale leur coût direct ou indirect – soit confiée à cette commission. J’ai d’ores et déjà bloqué certains textes réglementaires.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Excellent !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Pour ma part, je souhaite donc que les textes législatifs créant des normes puissent être soumis préalablement. Je souhaite également que, dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, une commission similaire d’évaluation du coût des normes soit instaurée au niveau européen, placée auprès de la Commission et du Parlement européens. En effet, aujourd’hui et de plus en plus, c’est l’Europe qui crée l’obligation de nouvelles normes coûteuses ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Travailler ensemble, c’est également savoir établir un diagnostic commun. Nous pouvons parfois avoir des divergences sur les solutions mais il nous faut au moins des diagnostics communs. C’est pourquoi, au sujet du problème des emprunts des collectivités, j’ai tenu à réunir, avec Christine Lagarde, au ministère de l’intérieur, début novembre, les banques et les associations d’élus. Il me paraissait indispensable que nous sachions au moins ce qu’il en était.
Nous avons pu constater que, pour l’immense majorité, les collectivités territoriales ont contracté soit des emprunts à taux fixe, soit des emprunts à taux variable mais qui ne sont pas des emprunts à risque pouvant faire peser des menaces sur elles. Nous avons également pris un certain nombre de décisions.
Monsieur Nègre, cette réunion doit notamment déboucher sur l’élaboration d’une charte des bonnes pratiques à destination des banques et des collectivités. Nous avons également, dans des cas précis, demandé aux banques de renégocier les emprunts qui paraissaient les plus problématiques pour quelques collectivités en grande difficulté. (M. Louis Nègre applaudit.)
Enfin, et d’une façon plus générale, je souhaite améliorer l’information, notamment des assemblées délibérantes, sur les emprunts contractés en produits structurés. Là aussi, c’est une avancée majeure, qui permettra à chacun de mesurer les risques éventuellement pris.
Établir un diagnostic commun, c’est aussi un préalable à une réforme du Fonds de compensation pour la TVA. À la limite, la question du FCTVA n’était pas tellement mon problème. Mais j’ai écouté les reproches qui étaient faits sur le système actuel et j’ai demandé que soit établi en commun un diagnostic de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas. Il est dommage que certains n’aient pas accepté d’établir un tel diagnostic.
En tout cas, monsieur Brun, je peux vous assurer que les investissements déjà réalisés bénéficieront du concours de l’État, selon les mêmes règles qu’aujourd’hui.
Travailler ensemble, dans la confiance et la transparence, c’est également écouter les inquiétudes des élus locaux, inquiétudes qui peuvent tenir à certaines évolutions en cours, par exemple sur le RMI. Nous en discutions tout à l’heure.
Monsieur Gillot, le fonds de mobilisation départementale pour l’insertion sera bien reconduit. J’y reviendrai dans quelques instants.
D’autres orateurs ont évoqué le RSA. Mais ce nouveau dispositif permettra de diminuer le nombre d’allocataires, en favorisant le retour à l’emploi.
Sur la compensation, j’ai ajouté la clause de révision. Voilà qui devrait faire disparaître certaines inquiétudes.
Par ailleurs, et je tiens à le rappeler, le prélèvement sur la Guadeloupe correspond strictement – j’y veillerai – aux sommes que celle-ci consacrait auparavant à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy. Même si nous ne sommes pas dans le dispositif constitutionnel que j’évoquais tout à l’heure, j’ai tenu à faire en sorte que les règles applicables soient les mêmes.
En outre, comme vous le savez, les crédits de la mission « Outre-mer » sont en progression de 16 %. L’accent est notamment mis sur le logement et les contrats avec les collectivités locales.
Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous se sont exprimés sur la dotation de solidarité urbaine. Sur le principe, tout le monde convient qu’une réforme de ce dispositif s’impose. Mais dès qu’il s’agit de prendre des mesures concrètes, chacun commence à s’inquiéter des effets éventuels sur sa propre commune, et les positions varient alors fortement ! (Sourires.)
M. François Marc. C’est la preuve qu’il faut plus de péréquation !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Nous avons, il est vrai, besoin d’une réforme de la DSU. Il faut recentrer cette dotation sur ses objectifs initiaux en concentrant l’effort de solidarité sur les communes qui en ont le plus besoin.
Pourtant, – vous voyez que je vous ai écoutés avec attention – plusieurs élus, notamment M. Dallier, ont souligné qu’il leur serait difficile de réaliser un tel effort dès le mois de septembre 2009.
Pour ma part, je sais en quoi consiste l’élaboration d’un budget. Le travail de préparation commence bien en amont.
C'est la raison pour laquelle j’ai effectivement proposé une entrée plus progressive dans la réforme, ainsi qu’un certain nombre d’aménagements. Je remercie MM. Saugey, Brun et Nègre de m’en donner acte. D’ailleurs, ces aménagements ont été acceptés à l’unanimité par les associations d’élus.
Une première étape sera franchie dès 2009. Les 150 villes les plus en difficulté bénéficieront de l’essentiel de la progression de 70 millions d’euros, ce qui représente 6 % de plus que l’année dernière. Pour les autres communes, 2009 sera une année de transition. Ainsi, 327 communes appartenant à la première moitié des villes les plus défavorisées bénéficieront d’une augmentation de 2 % par rapport à l’année dernière, soit un taux supérieur à l’inflation. Les autres communes auront la garantie de percevoir une DSU dont le montant sera égal à celui de l’an dernier. Un amendement en ce sens a été adopté par l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, même s’il s’agit de sujets qui n’ont pas de conséquences financières, j’ai également écouté les élus locaux sur la question de l’immatriculation des véhicules – les départements sont très sensibles sur ce sujet – et sur les nouvelles procédures liées au passeport biométrique.
Comme cela a été souligné à juste titre, il est indispensable que nous ayons plus de prévisibilité et de lisibilité. Il s’agit là d’une nécessité pour toute personne en charge de la gestion d’une commune, ou même d’un ministère. La modernisation, c’est également cela.
C'était d’ailleurs la raison pour laquelle il était important que le « pouvoir d'achat » de la dotation globale de fonctionnement soit préservé.
Toujours dans un souci de prévisibilité, j’avais déjà annoncé l’an dernier une réforme du mode de calcul de la DGF. Il était ainsi envisagé de l’aligner sur l’inflation. Certes, j’avais précisé qu’il ne serait pas possible de procéder aux ajustements nécessaires en seulement quelques mois ; il n’était donc pas question de supprimer la moitié de la croissance qui était liée depuis plusieurs années à la progression de la DGF. Mais j’avais en même temps indiqué que la nouvelle règle s’appliquerait à compter du projet de loi de finances pour 2009.
Si nous avions aligné la progression de la DGF sur le taux d’inflation, elle serait de 1,5 % en 2009. Mais, grâce à la mesure que j’ai mentionnée tout à l’heure, la progression sera en fait de 2 %, ce qui représente 800 millions d’euros, soit 200 millions d’euros de plus que si nous nous étions alignés sur le taux d’inflation prévisionnel.
De même, – cela n’a pas été évoqué, mais je souhaite insister sur ce point parce qu’il me semble important pour un certain nombre de communes – l’indexation de la DGF permettra de prendre en compte les résultats du dernier recensement de la population. La DGF des collectivités locales dont la population a augmenté depuis cette date progressera en conséquence.
À présent, si vous me le permettez, mesdames, messieurs les sénateurs, j’aimerais revenir sur le vocabulaire utilisé par certains d’entre vous. Même si nous ne sommes pas là pour faire de la sémantique, le choix des mots peut avoir des conséquences. Il n’y a plus – je m’adresse tout particulièrement à MM. Dubois et Gillot – d’enveloppe normée. Il y a une enveloppe financière de l’État aux collectivités locales. Les mots ont un sens, et je vous demande de les utiliser avec précision.
Compte tenu de notre conception d’une société qui avance, et face à tous les défis qui sont les nôtres, la modernisation, c’est aussi plus de solidarité.
Le projet de loi de finances contient plusieurs mesures destinées à renforcer l’effort de solidarité au profit des collectivités les plus pauvres. Je me suis déjà exprimée sur la DSU ; je n’y reviens pas. Mais, en l’occurrence, je fais référence à l’ensemble des autres dotations de solidarité.
Monsieur Jarlier, compte tenu de leur mode de calcul, les dotations de solidarité seront les premières à bénéficier de la progression de la dotation globale de fonctionnement.
Les aménagements de la dotation forfaitaire des communes permettront d’augmenter de 107 millions d’euros les dotations de solidarité.
Le Comité des finances locales aura la possibilité d’augmenter encore davantage cet effort de solidarité, en modulant l’indexation de certaines composantes de la DGF.
En outre, et cela a été évoqué par plusieurs orateurs, de nouveaux dispositifs seront mis en place pour répondre aux problématiques particulières de certaines communes. Ainsi, les plus fragiles d’entre elles connaîtront une moindre baisse de leur dotation de compensation de la taxe professionnelle.
De même, une dotation de développement urbain sera créée. Il s’agit d’une innovation. J’ai souhaité qu’un partenariat puisse être établi avec les 100 communes prioritaires, afin de les aider à financer des équipements ou des actions de première importance. Tel sera l’objet de cette dotation de développement urbain, qui s’élèvera à 50 millions d’euros par an.
Monsieur Nègre, vous m’avez interrogée sur cette dotation. Comme je viens de le souligner, elle a vocation à financer en priorité des investissements, par exemple pour la rénovation de quartiers, ou des opérations de fonctionnement qui se révéleraient essentielles pour la cohésion de la commune.
M. Dallier m’a posé une question sur la manière dont les critères seraient mis en œuvre. Grâce à l’adoption, à l’Assemblée nationale, d’un amendement soutenu par le Gouvernement, c’est le Conseil national des villes qui sera consulté pour déterminer les politiques prioritaires. Le préfet négociera ensuite la convention avec les villes concernées sur cette base.
En d’autres termes, le système n’est pas très différent de celui qui s’applique aujourd'hui pour l’attribution de la DGE. En l’occurrence, une commission départementale établit de manière transparente des priorités, que le préfet utilise ensuite pour répartir les attributions entre les communes. Nous pourrions, me semble-t-il, appliquer une méthode similaire.
Je voudrais également évoquer un élément important qui n’a pas été mentionné. Un fonds d’accompagnement d’un montant de 5 millions d’euros sera mis en place pour les communes concernées par les restructurations de défense. Je le précise d’emblée, l’objet de ce fonds sera de compenser non pas l’éventuel départ d’un régiment, mais le manque à gagner pour les commerces et la vie économique locale.
Tout à l’heure, j’ai précisé que les dotations actuelles nous permettaient de prendre en compte les augmentations de population constatées par le dernier recensement. Bien entendu, il y a également des communes qui perdent des habitants. Elles se retrouvent alors face à des difficultés, car elles doivent assurer l’entretien d’équipements prévus pour une population plus importante tout en perdant un certain nombre d’aides au niveau des impôts locaux. Je propose donc de les aider pendant la période qui sera nécessaire à l’adaptation progressive de leur budget. Nous pouvons, me semble-t-il, faire un tel geste, d’autant que les communes concernées se situent souvent dans des zones assez difficiles.
Monsieur Gillot, j’ai souhaité que le fonds de mobilisation départemental pour l’insertion soit reconduit à hauteur de 500 millions d’euros en 2009, afin d’accompagner les départements dans la mise en place du revenu de solidarité active. Un certain nombre d’entre vous ont effectivement abordé cette question.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vos questions étaient nombreuses. J’espère avoir répondu à l’essentiel, sinon à la totalité, des interrogations qui ont été soulevées.
Plus de transparence, plus de responsabilité, plus de solidarité, tels sont les termes du partenariat de confiance que je propose aux élus locaux et au Parlement.
Encore une fois, il s’agit d’une politique qui intéresse tout l’État. Il n’est pas question que chacun agisse seul dans son coin. Il doit y avoir une véritable solidarité.
J’en suis convaincue, quelles que soient nos sensibilités politiques, nous avons tous la volonté de remettre la France sur les rails de la croissance et de la prospérité. Certes, nous pouvons diverger sur notre appréciation des moyens. Mais je pense, en tout cas j’espère, que nous voulons tous aider notre pays non seulement à sortir d’une situation aujourd'hui difficile, mais également à faire face à des défis auxquels le monde entier est confronté.
Cela nécessitera du courage. Pendant vingt ou vingt-cinq ans, nous n’avons pas pris les décisions qui s’imposaient. Je crois qu’il est temps de dire la vérité à nos concitoyens.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. C’est du moins ce que j’ai essayé de faire aujourd'hui. J’ai exprimé ma part de vérité, fondée sur des analyses. Et cette vérité, je vous la dois. À mon sens, c’est ainsi que doivent s’établir des relations responsables entre le Parlement et le Gouvernement.
La vérité, ce sont les chiffres que j’ai mentionnés. La vérité, ce sont également les difficultés rencontrées par nos collectivités locales. La vérité, c’est enfin notre volonté commune d’aider nos concitoyens à affronter les défis du monde contemporain. C’est grâce à cela qu’il existe un pays vers lequel se tournent les regards des personnes à la recherche d’un modèle pour la tolérance, la liberté, l’épanouissement des personnes et les valeurs. Ce pays, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est la France ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Nous avons achevé le débat relatif aux recettes des collectivités territoriales.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Guy Fischer.)
PRÉSIDENCE DE M. guy fischer
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Rappel au règlement
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce rappel au règlement est fondé sur l’article 30 du règlement du Sénat, relatif à l’organisation de nos travaux.
Nous avons engagé le débat sur la situation des collectivités locales, et force est de constater que le non-dit de ce débat, que nous nous efforçons de mettre au jour, consiste à présenter la facture aux collectivités locales et à leur demander de consacrer l’équivalent de 1 ou 2 milliards d’euros à la réduction du déficit budgétaire.
Tenus de présenter des budgets locaux en équilibre, les élus arbitreront, comme chacun sait, soit en augmentant les impôts, soit, malheureusement, en réduisant les coûts, ce qui impliquera ici le non-remplacement des départs à la retraite des fonctionnaires, là une concession de service public, ailleurs l’augmentation des tarifs d’accès du public.
Pendant ce temps, la crise continue, et Dexia essaie de se refaire une santé, après la baisse de plus de 16 milliards d’euros de sa capitalisation boursière depuis le début de l’année, en imposant aux collectivités territoriales des taux d’intérêt accrus sur les lignes de trésorerie, ainsi que sur les emprunts nouveaux.
Mais le Président de la République s’apprête, semble-t-il, en accord avec la Chancelière allemande, à publier dans le cadre d’une tribune à paraître demain dans un grand quotidien national des propositions qui tordent le cou à certaines des dispositions du présent projet de loi de finances.
Ainsi, les deux auteurs de cette tribune recommanderaient un assouplissement des critères de convergence européens, pouvant aller jusqu’à un glissement de dette et un déficit public susceptible d’atteindre 1 point de produit intérieur brut marchand.
Nous ne croyons pas que le Président de la République se soit subitement converti aux vertus de la relance par la dépense publique ou qu’il ait décidé d’adhérer aux thèses néo-keynésiennes, mais le fait est que ces propositions modifient notre cadre de réflexion.
Faisons donc en sorte qu’une part de ce déficit assumé en faveur de la croissance soit mobilisée pour les collectivités locales !
Adaptons clairement les concours budgétaires dévolus aux collectivités locales aux exigences de la relance de l’activité économique !
Les collectivités territoriales sont prêtes, dans les faits, à tout faire pour soutenir, par leur intervention, par leurs investissements, l’emploi local, l’activité, et contribuer ainsi à la nécessaire relance économique, qui apparaît de plus en plus comme le seul véritable moyen permettant de résoudre les difficultés présentes.
Ensemble, donc, prenons au mot les propositions présidentielles et modifions le contenu du projet de loi de finances pour 2009 ! Cela me semblerait tout à fait à l’ordre du jour.
M. le président. Madame Beaufils, je vous donne acte de votre déclaration.
Nous passons à la discussion des dispositions relatives aux recettes des collectivités territoriales.
Article additionnel après l'article 9
M. le président. L'amendement n° I-75, présenté par M. Miquel, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le e du 1 du I de l'article 1641 du code général des impôts est supprimé.
II. - Le même article est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Pour les frais d'assiette, de recouvrement, de dégrèvement et de non valeur, l'État perçoit 4 % du montant de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Ce taux est maintenu à 8 % dans le cas où la taxe comporte une part variable incitative avec gestion d'un fichier d'usagers par les services fiscaux. »
III - Les conséquences financières résultant pour l'État des I et II ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Cet amendement vise à diminuer de 50 % les frais d’assiette, de recouvrement, de dégrèvement et de non-valeur prélevés par l’État pour la gestion de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Ce point précis s’inscrit dans le thème plus large du prélèvement de l’État sur la fiscalité locale, prélèvement jugé depuis longtemps trop élevé.
En effet, notre collègue Michel Mercier a publié l’année dernière un excellent rapport d’information démontrant que sur l’ensemble des relations de trésorerie avec les collectivités territoriales l’État gagne 1 milliard d’euros.
L’État paierait ainsi plus de 2 milliards d’euros aux collectivités territoriales au titre des admissions en non-valeur et des dégrèvements ordinaires. Cependant, il prélève 4,5 milliards d’euros au titre des frais d’assiette et de recouvrement et pour dégrèvement et non-valeur. Or le coût réel pour l’État de ces opérations s’élève à 1 milliard d’euros seulement, soit un bénéfice net de 3,5 milliards d’euros. Au final, l’État gagne bien le milliard d’euros évoqué par Michel Mercier.
Par ailleurs, malgré la RGPP, la révision générale des politiques publiques, qui, selon vous, doit permettre de moderniser votre ministère et votre administration, ces taux restent curieusement inchangés.
Cette même RGPP entraîne la suppression de nombreux fonctionnaires dans les services fiscaux, ce qui oblige de nombreuses collectivités à payer des fonctionnaires pour faire le travail des services fiscaux. La ville de Dijon, par exemple, a recruté cinq personnes pour l’actualisation des bases.
Outre les prélèvements qu’elles subissent, les collectivités doivent donc elles-mêmes payer pour effectuer un travail que la disparition des services de l’État ne permet plus d’assurer.
Nous avons pris connaissance de la réponse de votre ministère, publiée dans le rapport spécial de notre collègue Pierre Jarlier sur le compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
Étrangement, nous constatons que le ministère met en avant non plus un bénéfice, mais un déficit de l’ordre de 150 millions d’euros sur la période 2001-2007.
Mais, dans ce calcul, le Gouvernement intègre le coût des prestations de conseil et la réévaluation du coût des recouvrements d’impôt locaux qui augmente, curieusement, même en période de RGPP.
Si l’on s’en tient au coût financier net du recouvrement, y compris la prise en charge des dégrèvements, l’État obtient bien un gain de 965 millions d’euros pour 2007 et de 431 millions d’euros sur la période 2001-2007.
En ce qui concerne la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, objet de notre amendement, la plupart des collectivités ayant institué la redevance d’enlèvement des ordures ménagères témoignent que les impayés dépassent rarement 2 % à 3 % et que le coût de gestion global de la redevance s’établit à environ 4 %.
Or le prélèvement des services fiscaux sur la taxe d’enlèvement des ordures ménagères a été augmenté artificiellement dans les années quatre-vingt de 4 % à 8 % – soit 3,6% plus 4,4 % – pour financer la réforme des bases locatives qui n’a finalement jamais eu lieu.
Or les coûts de la gestion des déchets ayant été triplés en vingt ans, il paraît normal de rétablir un niveau de prélèvement cohérent avec le coût réel des opérations réalisées par les services fiscaux.
Notre amendement prévoit néanmoins de maintenir le taux au niveau actuel pour le cas où les services fiscaux accepteraient d’assurer la gestion d’une taxe comprenant une part fixe et une part variable incitative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Des amendements de ce type reviennent très régulièrement dans nos discussions budgétaires.
Il s’agit en effet, dans l’esprit des auteurs, de diminuer le prélèvement de l’État sur des produits de fiscalité locale au motif qu’ils ne correspondent pas à la réalité de la dépense engagée pour la prise en charge des frais directement concernés.
Cette question ne touche pas uniquement la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. En réalité, elle concerne l’ensemble des impôts locaux recouvrés par l’État.
Bien entendu, la mesure que vous proposez serait coûteuse.
Je me dois de rappeler les arguments qui avaient été développés l’an dernier par M. le ministre et qui sont régulièrement rappelés dans les rapports de la commission des finances.
Le poids global des dégrèvements et des admissions en non-valeur pris en charge par l’État a presque triplé entre 1992 et 2006, passant de 4,8 milliards d’euros à près de 13 milliards d’euros, alors que les recettes prélevées par l’État, en contrepartie, ont été portées de 1,3 milliard d’euros à un peu plus de 5 milliards d’euros sur la même période.
C’est donc en se situant à ce niveau global des dégrèvements et des prises en charge d’admissions en non-valeur que l’on peut se placer pour solliciter le retrait de votre amendement, faute de quoi la commission émettra un avis défavorable.
Au demeurant, la commission entendra le Gouvernement avec intérêt.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. C’est effectivement un amendement récurrent dans les débats budgétaires, comme l’a souligné M. le rapporteur général.
Le produit de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères devrait atteindre plus de 5 milliards d’euros en 2008, soit une progression de 6 % par rapport à 2007.
On peut estimer que le coût de gestion augmente également, notamment en raison du recours croissant des communes à la TEOM, puisque 67 % des communes y ont eu recours en 2006, contre 50 % en 2000, ce qui représente un travail supplémentaire pour l’administration.
Sur cette question qui a tendance à être tous les ans un sujet de préoccupations et de discussions, d’une manière générale, les chiffres montrent que, en réalité et contrairement à une idée reçue, l’État équilibre les choses.
D’un côté, il perçoit des recettes. Ainsi, si l’on prend une période de cinq ans, plus significative qu’un calcul par année en raison des variations annuelles, entre 2001 et 2007, l'État a encaissé environ 5 milliards d’euros, dont la répartition est la suivante : 4,8 milliards d’euros au titre des principales taxes de fiscalité directe locale, dont la TEOM – ils se décomposent en 2 milliards d’euros pour les frais de dégrèvement et de non-valeur, que l’on néglige souvent, et 2,8 milliards d’euros pour les frais d’assiette eux-mêmes – et 0,2 milliard d’euros correspondant aux frais perçus sur les autres recettes locales, comme les droits de mutation à titre onéreux.
De l’autre côté, l’État dépense. Il a déboursé 5 milliards d’euros en moyenne entre 2001 et 2007. Cet équilibre n’est pas un hasard miraculeux. C’est la réalité. C’est pour cela d’ailleurs que nous avons ce type de taux de recouvrement. L’État dépense 4,7 milliards d’euros au titre des coûts d’assiette et de recouvrement et des dégrèvements ordinaires, dont 2,5 milliards d’euros au titre des dégrèvements ordinaires et des admissions en non-valeur. Ces dégrèvements ordinaires correspondent aux aléas liés à la vie de l’impôt, notamment les corrections d’impôts indûment versés à la suite d’un contentieux, les erreurs de calculs. Enfin, pour 2,1 milliards d’euros, l'État prend en charge les coûts de recouvrement des recettes locales.
Par ailleurs, l’État dépense 300 millions d’euros au titre du coût de trésorerie, puisqu’il avance la trésorerie aux collectivités locales par un versement mensuel.
Tout cela, évidemment, a un prix ! Le solde global, État-collectivités, est parfaitement équilibré : 5 milliards d’euros en recettes et 5 milliards d’euros en coût.
Nul ne peut dire aujourd'hui que l’État facture aux collectivités, au titre tant des frais de recouvrement que de couverture de l’impôt, des sommes indues.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, j’ai bien entendu vos explications sur ce sujet. Il est vrai que cet amendement est récurrent, puisque nous le retrouvons à chaque examen des projets de loi de finances.
Je préférerais, monsieur le ministre, que vous me répondiez non pas globalement, mais précisément sur la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. Que coûte à l’État la gestion de cette taxe ? Il s’agit du prix d’un service. Vous le savez, nos concitoyens ont de plus en plus de difficulté à payer la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, la taxe d’habitation, la taxe sur le foncier bâti quand ils sont propriétaires, l’eau, l’assainissement et les diverses redevances.
La situation de crise que nous traversons ne va pas arranger les choses. Les collectivités ont besoin, sur chacun de ces secteurs, d’arriver à la vérité des coûts afin d’optimiser la gestion de leurs services.
Si les dépenses de l’État équivalent aux recettes qu’il perçoit sur le service d’enlèvement des ordures ménagères, j’accepte facilement de retirer mon amendement. Mais je crois que tel n’est pas le cas.
Il nous faut bien arriver à vérifier quel est le véritable coût d’un service. En la matière, il me semble qu’il y a des gains à trouver pour diminuer, à due concurrence de ce que l’État nous rendrait en diminuant le prélèvement, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères qu’acquittent nos concitoyens.
C'est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-75.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9 bis
I. – L’article 279 du code général des impôts est complété par un l ainsi rédigé :
« l) Les remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux exploitants assurant les prestations de déneigement des voies publiques lorsqu’elles se rattachent à un service public de voirie communale. »
II. – Les pertes de recettes pour l’État résultant du I sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. L'amendement n° I-130, présenté par Mme Gourault, est ainsi libellé :
I. – À la fin du second alinéa du I de cet article, supprimer les mots :
lorsqu'elles se rattachent à un service public de voirie communale
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée aux prestations de déneigement des voies publiques qui ne se rattachent pas à un service public de voirie communale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale réservent le taux réduit de TVA aux prestations de déneigement effectuées pour les besoins de la gestion du service public de voirie communale.
Selon cette rédaction, seules les prestations de déneigement réalisées par les communes et leurs groupements sur les voiries leur appartenant devraient bénéficier du taux réduit de TVA, à l’exclusion des prestations réalisées sur les voies ne relevant pas de leur patrimoine.
Ainsi, notamment les communes qui assurent le déneigement de voiries appartenant au conseil général – il arrive souvent que des routes départementales traversent les communes et qu’elles soient gérées directement par les communes au titre de l’agglomération –, devraient acquitter deux taux de TVA différents pour des prestations de même nature selon qu’elles concernent des portions de voirie communale ou départementale.
L’amendement proposé a pour objet d’éviter cette distinction, car il s’agit en général de voiries traversant une commune.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet d’étendre le dispositif de l’article, lequel prévoit que le taux de TVA réduit s’applique aux rémunérations versées par les communes aux exploitants assurant le déneigement de leurs voiries. Ce sujet a été traité dans plusieurs projets de loi de finances successifs, et nous en avons déjà amplement débattu.
Mme Jacqueline Gourault. Ça commence mal !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Chère collègue, vous souhaitez que ce même taux réduit s’applique à la commune, y compris lorsque la voie ne se rattache pas à un service public de voirie communale. Si j’ai bien compris votre intention, la disposition s’appliquerait à l’ensemble des prestations mises en œuvre par les communes.
Mme Jacqueline Gourault. Absolument !
M. Philippe Marini, rapporteur général. On suppose qu’une partie de la route qui traverse un village est sur voirie communale et une autre partie sur voirie départementale ou privée.
Mme Jacqueline Gourault. Départementale !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Soit !
Selon vous, dès lors que la commune traite le tout, il ne serait pas rationnel que seule la partie de la prestation effectuée sur le linéaire communal bénéficie du taux réduit et que le taux majoré soit appliqué sur le linéaire non communal.
Cet amendement vise à répondre à l’imbrication étroite entre voiries communales et voiries départementales. La complexité technique du sujet est telle que j’ai besoin de solliciter l’avis du Gouvernement. (Sourires.)
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Moi qui attendais de fonder mon avis sur celui de la commission ! (Nouveaux sourires.)
Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, l’année dernière, l’Assemblée nationale avait introduit un dispositif de taux réduit de TVA pour le déneigement de la voirie communale,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Éric Woerth, ministre. …. spécialiste en déneigement, notamment.
Si mes souvenirs sont exacts, le Sénat avait, in fine, supprimé la mesure. Vous vous étiez posé plusieurs questions. Pourquoi les communes ? Pourquoi pas les régions, les départements ou les intercommunalités ?
Au terme de ce débat, le Sénat avait décidé de ne retenir aucune proposition pour ne pas faire de jaloux.
Cette disposition a été réintroduite cette année par l’Assemblée nationale, et vous proposez de l’étendre, si je comprends bien, à la voirie départementale pour les travaux effectués par les communes pour le compte des départements.
Mme Jacqueline Gourault. Non !
M. Michel Mercier. Pas pour le compte des départements : c’est l’exercice des pouvoirs de police du maire !
Mme Jacqueline Gourault. Tout à fait !
M. Éric Woerth, ministre. Quoi qu’il en soit, le maire décide de déneiger une voirie qui n’est pas communale. Cette mesure a un coût d’environ 40 millions d’euros, qui viendrait directement dégrader le solde. En ces temps particulièrement difficiles, je suis enclin à ne pas souhaiter la dégradation du solde, sachant que nous faisons déjà le principal en prévoyant un déneigement à taux réduit pour les communes.
C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Il est question, depuis un certain temps, de simplification. Ce cas est relativement simple ! On dirait un sketch : une commune déneigera la voirie communale et s’arrêtera au milieu du chemin, c’est-à-dire à la partie départementale qu’il ne faudra pas déneiger. C’est l’absurdité totale !
Ce qui semble encore plus absurde, c’est que les fonctionnaires de Bercy aient réussi à chiffrer le coût de cette mesure : 40 millions d’euros ! Comment sont-ils arrivés à ce résultat ?
Je le dis franchement : je voterai des deux mains cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis, modifié.
(L'article 9 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 9 bis
M. le président. L'amendement n° I-129, présenté par Mme Gourault et M. Jarlier, est ainsi libellé :
Après l'article 9 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le k) de l'article 279 du code général des impôts, les mots : « lorsqu'elles se rattachent au service public de voirie communale » sont supprimés.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Le Code général des impôts prévoit que le taux réduit de TVA s’applique, à compter du 1er janvier 2007, aux rémunérations versées par les communes ou leurs groupements aux exploitants assurant les prestations de balayage des caniveaux et voies publiques, lorsqu’elles se rattachent au service public de la voirie communale. (Sourires.) Ce sont des détails, mais en plein congrès des maires de France, ce sont des discussions très importantes !
Introduite par amendement parlementaire lors des débats en loi de finances pour 2006, cette mesure a été adoptée afin de mettre un terme à la distinction opérée jusqu’alors en matière de taux applicable aux prestations de balayage.
Lorsqu’elles étaient effectuées au titre du service de l’eau ou de l’assainissement, elles bénéficiaient du taux réduit, en vertu de l’article 279 b du code général des impôts, qui prévoit l’application du taux réduit pour les rémunérations versées par les communes et leurs groupements aux exploitants des services de distribution d’eau et d’assainissement. En revanche, lorsqu’elles étaient effectuées au titre du service de la voirie, elles devaient être soumises au taux plein.
Dans son principe, la mesure est légitime, car elle met fin à une situation source de distorsion de concurrence et d’erreur, donc de redressements. Toutefois, sa mise en œuvre soulève des difficultés en raison de la délimitation de son champ d’application.
La loi réserve, en effet, le taux réduit aux prestations de balayage effectuées pour les besoins de la gestion du service public de voirie communale. En sont donc exclues les prestations qui se rattachent au service public de voirie départementale.
Ainsi, les communes qui assurent le nettoyage des voiries appartenant au conseil général, par exemple dans le département du Rhône, et traversant leur agglomération doivent acquitter deux taux de TVA différents pour des prestations pourtant de même nature, selon qu’elles concernent les portions de voirie communale ou départementale.
Alors que la mesure adoptée en loi de finances pour 2006 avait pour objet de mettre un terme à la différence de taux applicable selon le service au titre duquel était effectuée la prestation, elle introduit une nouvelle distinction en fonction du propriétaire de la voirie qui n’existait pas dans le régime antérieur.
L’amendement proposé a pour objet de mettre un terme à cette distinction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement paraît être de même inspiration que le précédent.
M. Adrien Gouteyron. Il est tout à fait symétrique !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cependant, il traite un cas de figure plus général, parce qu’il faut supposer que l’on balaie plus souvent que l’on ne déneige ! (Sourires.)
M. Michel Mercier. En Haute-Loire, non ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Certes, tout dépend de la situation géographique !
En tout état de cause, sur ce sujet également, la commission souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Vous parliez de sketch, madame la sénatrice. Mais le problème résulte de l’enchevêtrement des compétences en matière de voiries, pas de l’enchevêtrement des taux de TVA !
Mme Jacqueline Gourault. Je suis d’accord avec vous !
M. Éric Woerth, ministre. En vérité, on ne devrait pas instaurer de taux réduit dans de tels cas ; ce serait la meilleure solution !
Initialement, l’Assemblée nationale et le Sénat ont voulu soulager les communes qui ont le plus de difficultés sur le plan financier – notamment les plus petites d’entre elles –, en leur accordant un taux réduit de TVA. Et, patatras ! On a mis le doigt dans l’engrenage et il faut maintenant distinguer le caniveau qui appartient à Pierre, les routes qui appartiennent à Paul et, demain, ce sera autre chose !
Une telle situation incite plutôt à mettre tout le monde au même taux, qu’il s’agisse d’une petite commune ou d’un département, qui a toujours besoin d’argent, bien sûr, mais qui est peut-être moins sensible à cette ponction.
J’aurais tendance à vous inviter à conserver les taux actuels pour les communes. Les compétences sont entrecroisées, c’est une réalité : cela fait partie de la vie de nos collectivités aujourd’hui !
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le ministre, êtes-vous en mesure de nous indiquer le coût de cet amendement ?
M. Christian Gaudin. Quarante-trois millions ! (Sourires.)
M. Éric Woerth, ministre. Deux milliards d’euros !... (Exclamations amusées.) Plus sérieusement, j’ignore le coût de ce dispositif : nous avons pu chiffrer la mesure « déneigement », mais je ne connais pas le coût de la mesure « caniveau » !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par solidarité avec le Gouvernement et par souci de ménager le solde budgétaire, la commission est encline à solliciter le retrait de cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pourquoi est-ce moins cher que le déneigement ? Cela me semble peu logique : on balaie plus souvent ! (Sourires.)
M. Michel Mercier. Oui, mais c’est fait à la main ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission étant très partagée, elle s’en remet à nouveau à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Je ne vois pas comment on peut envisager ce problème d’un point de vue strictement domanial : cela ne tient pas debout ! Il faut uniquement prendre en compte les pouvoirs de police du maire, qui est compétent en agglomération, quelle que soit la nature de la voirie. Hors agglomération, selon la nature de la route, la compétence incombe soit au président du conseil général, soit à l’État.
Deux solutions sont envisageables : ou bien accorder le taux réduit pour toutes les voiries situées dans l’agglomération, ou bien reconnaître que le dispositif est excessivement complexe – ce qui est plutôt le cas – et le supprimer ! Mais il est absurde de vouloir garder un morceau de TVA à taux réduit pour un morceau de l’exercice des pouvoirs de police sur un morceau des voiries concernées ! Le montant de la taxe est incalculable, même pour un directeur du budget, car il ne va pas aller mesurer les voiries dans chaque commune : personne n’arrivera à établir une facture correcte !
Monsieur le ministre, soit vous supprimez ce taux réduit en déposant un amendement, soit Mme Gourault a raison et nous adoptons son amendement. Mais il faut choisir !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 9 bis.
Articles additionnels avant l’article 10
M. le président. L’amendement n° I-184, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 85 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) est abrogé.
II. - Les pertes de recettes pour l’État découlant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Le plafonnement de la taxe professionnelle représente une addition de 645 millions d’euros pour les collectivités. C’est ce qui ressort d’un rapport au Gouvernement évaluant la mise en œuvre de ce plafonnement.
Le coût global du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée augmente de 50 % entre 2006 et 2007, passant ainsi de 5 683 millions d’euros à 8 525 millions d’euros. La situation s’aggrave pour de nombreuses communes soumises à un plafond de participation : elles sont 3 991, soit près de 11 % du total, et 50 communes supportent plus de 50 % de ce plafond de participation.
Certaines communes sont extrêmement touchées, comme Saint-Ouen, à hauteur de 1,182 million d’euros, ou Levallois-Perret, pour 892 000 euros. Les EPCI à fiscalité additionnelle ont été touchés, au titre de l’année 2007, dans la proportion de 58 %. Il en est de même pour les EPCI à taxe professionnelle unique, dont 452 sont soumis à un plafond de participation. Quatre-vingt-cinq départements sont logés à la même enseigne et certains, comme le Nord, la Seine-Saint-Denis ou le Pas-de-Calais, connaissent des difficultés particulièrement criantes. Vingt-quatre régions, dont quatre dépassent 50 % du plafond, sont également concernées, comme les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur ou Rhône-Alpes.
Nombreux sont les spécialistes en fiscalité à avoir observé que l’article 85 de la loi de finances pour 2006 laisse la porte ouverte à toutes les interprétations, permettant aux entreprises d’explorer toutes les possibilités d’« optimisation fiscale » dans le seul but de payer la cotisation de taxe professionnelle la moins élevée possible.
La réalité est là : cette mesure a permis aux plus grosses entreprises d’économiser 3 milliards d’euros en 2007 et 3,7 milliards en 2008. Certains secteurs ont vu une baisse de cotisation supérieure à 15 %, comme l’industrie automobile qui, aujourd’hui, licencie. Une nouvelle fois, ce sont les salariés qui pâtissent de ces politiques essentiellement fondées sur des réductions de charges patronales totalement inefficaces !
Vous bridez le pouvoir d’achat en bloquant les salaires et en baissant les cotisations sociales, mais vous favorisez les dividendes des actionnaires. Des milliers d’intérimaires vont connaître le chômage ; c’est aussi l’un des aspects des conséquences de cette politique fiscale.
Pour l’entreprise, il s’agit soit de payer sur les immobilisations, si elle est sous-capitalisée, soit d’invoquer le plafonnement de la valeur ajoutée, si elle dispose de fortes bases taxables.
Mais cet aménagement semble déjà insuffisant pour le MEDEF, qui rêve de voir disparaître la taxe professionnelle, ce que les projets gouvernementaux laissent présager. Le plus choquant dans cette méthode, c’est le manque de concertation évident, alors que cette taxe assise sur les immobilisations représente une part non négligeable des ressources des collectivités territoriales. Qu’il faille moderniser la taxe professionnelle, de nombreux élus locaux en sont convaincus, mais la supprimer soulèverait chez eux une réprobation unanime !
Les exonérations que nous subissons régulièrement ne représentent pas non plus une solution, puisque leurs compensations ont toujours une durée limitée, le temps que l’État ajuste son budget.
Le projet de loi de finances pour 2009 prévoit de réduire de 25,6 % les compensations d’exonérations de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties dues par l’État aux collectivités locales.
Il semble incohérent d’invoquer l’investissement comme une priorité, tout en coupant le robinet des ressources aux collectivités locales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, comme le suivant qui n’a pas encore été présenté, tend à revenir sur la dernière en date des réformes de la taxe professionnelle, celle qui a été réalisée par l’article 85 de la loi de finances initiale pour 2006.
La commission ne peut qu’y être défavorable, sachant que, par ailleurs, nous nous dirigeons vers une nouvelle phase d’étude susceptible de déboucher sur une autre réforme de la taxe professionnelle. Mais à chaque jour suffit sa peine : mieux vaut ne pas aggraver l’instabilité législative en ce domaine !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° I-185, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 1° de l’article 1467 du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...) L’ensemble des titres de placement et de participation, les titres de créances négociables, les prêts à court, moyen et long terme. Ces éléments sont pris en compte pour la moitié de leur montant figurant à l’actif du bilan des entreprises assujetties. Pour les établissements de crédits et les sociétés d’assurances, le montant net de ses actifs est pris en compte après réfaction du montant des actifs représentatifs de la couverture des risques, contrepartie et obligations comptables de ces établissements.
« La valeur nette des actifs, déterminée selon les dispositions du précédent alinéa, est prise en compte après réfaction de la valeur locative des immobilisations visées au a. »
II. - L’article 1636 du même code est ainsi rétabli :
« Art. 1636. - Le taux grevant les actifs définis au c de l’article 1467 est fixé à 0,3 %. Il évolue chaque année, pour chaque entreprise assujettie, à proportion d’un coefficient issu du rapport entre la valeur relative aux actifs définis au c de l’article 1467 au regard de la valeur ajoutée de l’entreprise. »
III. - L’article 1648 du même code est ainsi rétabli :
« Art. 1648. - Il est créé un fonds de péréquation de la taxe professionnelle, alimenté par le produit de l’imposition des actifs visés à l’article 1467.
« Les ressources du fonds sont réparties suivant les règles fixées pour la dotation globale de fonctionnement par les articles L. 2334-1 à L. 2334-23 du code général des collectivités territoriales. »
IV. - 1. Le I ter de l’article 1647 B sexies du même code, est complété par les mots « à l’exception de celle définie par le c de l’article 1647 ».
2. Le premier alinéa du 4° du 1 de l’article 39 du même code est complété in fine par les mots « et de l’imposition résultant de la prise en compte des actifs financiers définis au c de l’article 1467, selon les règles fixées par l’article 1636. »
V. - Le II de l’alinéa 1647 E du même code est ainsi rédigé :
« II. - Le supplément d’imposition, défini par différence entre la cotisation résultant des dispositions du I et la cotisation de taxe professionnelle déterminée selon les règles définies au III, est une ressource des fonds départementaux de péréquation définis à l’article 1648A. »
VI. - Pour compenser la perte de recettes découlant pour l’État des dispositions ci-dessus, il est créé une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous vous proposons justement de participer à la réflexion sur la réforme de la taxe professionnelle, qui nous semble essentielle pour les finances locales.
Il s’agit de répondre à une question simple : comment assurer aux collectivités locales les moyens financiers de leur action et leur permettre de répondre aux attentes de leurs administrés pour redonner tout son sens à la démocratie locale ?
Vous opérez a contrario, en partant du principe que tout service rendu est avant tout une dépense et non un objectif à atteindre pour assurer le bien-être de nos concitoyens et de nos entreprises. Il est utile de mener un débat dans notre pays afin d’examiner toutes les propositions de nature à changer la donne des finances locales pour plus de progrès social, de citoyenneté et d’égalité des hommes et des territoires.
En étranglant nos finances locales, vous imposez la destruction des services publics, de tout ce qui structure la conception républicaine de notre société. Avec ce projet de loi, vous nous invitez, comme vous le dites, à participer à la « maîtrise de la dépense publique ». Or les collectivités locales sont contraintes de présenter des budgets en équilibre, de rendre compte dans la proximité de leur action ; elles ne participent en rien aux déficits accumulés de l’État qui, effectivement, comme l’a dit un de nos collègues cet après-midi, ne donne pas l’exemple en la matière.
En effet, si les caisses de l’État ont été vidées, ce ne sont ni les municipalités, ni les départements, ni les régions qui en sont responsables : ce sont bien les cadeaux inconsidérés aux ménages les plus riches et aux entreprises qui n’en avaient pas le plus besoin, loin s’en faut !
Au contraire, les collectivités locales créent des richesses, elles participent au développement économique local, elles n’endettent pas autrement la nation et elles alimentent la croissance. Monsieur le ministre, vous avez rappelé qu’elles réalisent 75 % des investissements publics. Vous voudriez les culpabiliser en leur imposant de participer à une politique destructrice, à notre avis, de ces biens publics !
Le rôle économique et financier des collectivités locales est irremplaçable. Nous avons bien souvent été invités à nous associer à la modernisation de l’État – Mme la ministre le rappelait tout à l’heure –, mais j’ai cru comprendre que, pour vous, moderniser est synonyme de reculs sociaux, de déréglementation, d’impôt allégé pour les plus riches – avec le bouclier fiscal – ou de suppression de la taxe professionnelle.
Cette taxe demeure l’une des ressources essentielle de nos collectivités. S’il est indispensable de la moderniser, il va de soi que nous sommes énergiquement opposés à sa suppression. Au contraire, c’est en l’adaptant à la réalité de notre économie qu’elle donnera toute la mesure de son efficacité.
La spéculation est devenue et reste, malgré la crise, une source essentielle d’enrichissement. Il convient de taxer les actifs financiers de ces entreprises qui utilisent l’argent à d’autres fins que le développement de l’emploi, de la recherche et des salaires. Une entreprise qui réinvestit dans l’activité économique ne serait pas davantage taxée. La taxe professionnelle doit, nous semble-t-il, inciter les entreprises à réinvestir dans l’activité économique et dans l’emploi.
Nous pensons que la modernisation peut donc prendre en compte les besoins des habitants, l’amélioration des conditions de vie et de travail de la grande majorité de nos concitoyens.
La taxe professionnelle est le seul impôt qui établit un lien direct entre l’entreprise et son lieu d’implantation. C’est le mécanisme principal qui permet de responsabiliser l’entreprise devant la collectivité territoriale. Les investissements en infrastructures, les dépenses d’éducation, sociales, culturelles et de loisirs sont déterminantes pour le fonctionnement des entreprises, pour la vie de leurs salariés et leurs formations.
Perdre le lien entre les collectivités territoriales et les entreprises par l’intermédiaire de cet impôt, serait probablement facteur de perte de dynamisme économique.
La modernisation de la taxe professionnelle nous semble donc indispensable.
Nous vous proposons donc de faire en sorte que la base d’imposition intègre les actifs financiers des entreprises, afin de prendre en compte l’évolution de la structure de l’activité économique.
Je rappelle que, aujourd'hui, ce sont les entreprises de production et de l’énergie qui, avant le plafonnement à 3,5 %, acquittent une cotisation de taxe professionnelle supérieure à 5 %. Quant aux activités économiques qui recueillent la part la plus importante de leurs ressources par l’intermédiaire de placements financiers, en même temps que leurs salariés sont soumis au régime sec, elles sont bien souvent à un pourcentage de la valeur ajoutée inférieur à 2 %.
Telle est donc le sens de notre proposition. Cette modernisation de la taxe professionnelle pourrait alimenter un fonds de péréquation qui pourrait être attribué en incluant les charges réelles des collectivités et, bien sûr, en concertation avec les acteurs dans ce domaine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission rend hommage, chers collègues, à votre imagination, à votre créativité, et nous espérons que ces contributions pourront être versées aux travaux de la commission qui sera appelée à traiter de la réforme de la taxe professionnelle.
Dans l’immédiat, et pour les raisons déjà exprimées à propos de l’amendement précédent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je salue, moi aussi, la créativité des sénateurs du groupe CRC. Une réflexion est néanmoins engagée à la fois sur les collectivités et la fiscalité locale, et il sera tenu compte des questions soulevées dans cet amendement.
L’intégration des actifs financiers dans la base de la taxe professionnelle me semble difficile. Il n’y a pas plus volatiles que les actifs financiers, ainsi qu’on a pu le vérifier récemment. Donc, l’idée en elle-même ne me semble pas opérationnelle.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Les propos de M. le ministre ne me rassurent pas vraiment sur la volonté du Gouvernement de réformer la taxe professionnelle.
Depuis plusieurs années, nous avons entendu bon nombre de déclarations. Nous avons eu le rapport de la commission présidée par Olivier Fouquet qui, après des semaines de travail, a abouti à un dispositif a minima. Depuis deux ans, on nous dit que l’on va reprendre ce dossier et qu’un jour on arrivera peut-être à trouver une solution.
Donc, plutôt que de se féliciter de la créativité des parlementaires, le Gouvernement devrait manifester une volonté d’action beaucoup plus déterminée. Ce n’est pas en tout cas ce qui ressort des propos que nous venons d’entendre.
En ce qui concerne cette réforme de la taxe professionnelle qui a été introduite a minima, il faut savoir que les régions et les départements vont perdre l’équivalent, sur l’année, de 555 millions d'euros, sur un total de 645 millions d'euros pour l’ensemble des collectivités.
Aujourd'hui, les collectivités territoriales perdent près de 4 % de ce qu’aurait dû être la recette de taxe professionnelle, ce qui est tout de même considérable, compte tenu de leurs besoins actuels et de la nécessité de relancer l’investissement.
Il est donc urgent de mener à bien cette réforme de l’impôt économique.
L'amendement n° I-185, comme d'ailleurs l'amendement n° I-184 qui l’a précédé, présente peut-être quelques imperfections, ainsi que le ministre l’a souligné, mais il a l’intérêt d’apporter un début de réponse structurée. Le Sénat pourrait donc, au titre de cette amorce de réflexion, l’adopter et voir si, au cours de la navette, il peut être enrichi. Ce serait déjà un signe en direction de nos concitoyens montrant que l’action est engagée, que cette réforme sera menée rapidement et que les collectivités territoriales vont retrouver ce manque à gagner de 400 millions ou 500 millions d'euros qui est constaté aujourd'hui, ce qui est gravissime.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-185.
(L'amendement n'est pas adopté.)
II. – RESSOURCES AFFECTÉES
A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales
Article 10
I. – L’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1613-1. – I. – À compter de 2009, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite dans la loi de finances de l’année précédente du taux prévisionnel, associé au projet de loi de finances de l’année de versement, d’évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année.
« II. – Pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement de 2009, le montant de 2008 est diminué du montant de la dotation globale de fonctionnement calculée en 2008 au profit de la collectivité de Saint-Barthélemy en application de l’article L. 6264-3. »
II. – L’article L. 1613-2 du même code est abrogé.
III. – Le deuxième alinéa de l’article L. 2334-1 du même code est supprimé.
IV. – Après les mots : « dotation globale de fonctionnement », la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 2334-26 du même code est supprimée.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-57, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Il s’agit d’un amendement de suppression de la nouvelle manière d’indexer la dotation globale de fonctionnement.
En effet, le Gouvernement, dans sa logique de réduction des dépenses publiques, poursuit l’extension de la norme d’évolution de dépenses « zéro volume » aux concours financiers de l’État aux collectivités territoriales.
Après avoir instauré le contrat de stabilité dans la loi de finances pour 2008, qui avait déjà fait perdre près de 400 millions d'euros aux collectivités territoriales, vous vous apprêtez cette année à supprimer le mécanisme actuel d’évolution de la DGF, fondée jusqu’ici, je le rappelle, sur l’inflation majorée d’une part de la croissance du produit intérieur brut.
Vous nous proposez donc une évolution de la DGF fondée uniquement sur le taux d’inflation prévu en loi de finances initiale.
Bien sûr, on pourrait dire qu’en période de crise financière et économique le fait de ne pas tenir compte de la croissance ne change pas le montant final de la DGF, au regard de la très faible croissance du PIB en 2008. Mais l’on ne peut pas se satisfaire de cette situation et il faut espérer que nous retrouverons le plus rapidement possible - c’est souhaitable pour notre pays et pour nos concitoyens - une croissance à peu près correcte. Or, quand nous la retrouverons, les collectivités territoriales ne pourront plus bénéficier de cette indexation majorée.
Pourtant - et c’est le sens de cet amendement de suppression -, la prise en compte de la croissance dans l’évolution des dotations est légitime. En effet, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises, cet après-midi, dans le débat général, les collectivités territoriales participent à plus de 70 % à l’effort d’investissement public civil en France. Par conséquent, les faire bénéficier de l’évolution de la richesse de notre pays est une juste compensation des efforts qu’elles réalisent.
Justement parce que nous sommes en période de crise, les collectivités territoriales peuvent jouer un rôle d’amortisseur. Il est donc indispensable de leur donner les moyens de poursuivre leur politique d’investissement et de soutien à l’économie locale.
À l’occasion du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012, le Gouvernement a révisé, de manière habile, ses prévisions d’inflation pour 2009 de 2 % à 1,5 %, ce qui lui permet aujourd'hui d’afficher un prétendu cadeau aux collectivités territoriales en proposant de maintenir l’évolution de la DGF à 2 %. Selon le rapporteur général, Philippe Marini, cela permet un surplus de DGF d’environ 180 millions d'euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, 280 millions d'euros !
Mme Nicole Bricq. Au-delà du problème de la stricte évolution des dotations de l’État en faveur des collectivités, le nouveau mode de calcul des dotations de l’État illustre deux visions différentes de la décentralisation et, pour ce qui nous concerne, du lien de confiance essentiel qui doit unir les collectivités territoriales à l’État.
Tout à l’heure, notre collègue Edmond Hervé évoquait une nouvelle étape qu’il a appelée, à juste titre « le temps de la décentralisation projet ». En effet, les collectivités territoriales demandent à être de véritables partenaires de l’État et non pas de simples exécutants de compétences que celui-ci n’a plus les moyens d’assumer.
Pour toutes ces raisons, nous demandons que soit supprimé l’article 10 et que soit maintenue la prise en compte de la croissance dans l’évolution de la DGF, signe d’un partenariat équitable entre collectivités territoriales et État.
M. le président. L'amendement n° I-186, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - L'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1613-1. - I. - À compter de 2009, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite dans la loi de finances de l'année précédente d'un indice faisant la somme du taux prévisionnel, associé au projet de loi de finances de l'année de versement, d'évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année et de la moitié de la croissance prévue du produit intérieur brut marchand.
« II. - Pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement de 2009, le montant de 2008 est diminué du montant de la dotation globale de fonctionnement calculée en 2008 au profit de la collectivité de Saint-Barthélémy en application de l'article L. 6264-3. »
II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Les règles d’indexation des dotations proposées pour cette année représentent un véritable bouleversement. Il est certain que les conséquences seront lourdes pour les budgets des communes, des intercommunalités, des départements et des régions. Avec ces règles est enclenché un cycle de régression pour les finances locales.
L’objectif de réduction de la dépense risque de se traduire par la dégradation des prestations et des services rendus à la population dans une période où la politique économique et financière de ce pays tend à appauvrir et à jeter à la rue de nombreux salariés.
Comme vient de le rappeler Nicole Bricq, comme nous l’avons dit dans le débat général, et comme même M. le rapporteur général l’a souligné, les collectivités territoriales sont, d’une certaine manière, des amortisseurs de la situation que vivent nos populations.
Nous vous demandons donc de revenir à l’évolution telle qu’elle était prévue dans les années antérieures, pour que les collectivités puissent répondre aux besoins. En effet, auparavant, le mode d’indexation était conçu à partir de l’évolution des prix de l’année n et de 50 % du taux de croissance en volume de l’année n-1. Elle donnait ainsi lieu à une régularisation sur l’année n+2.
Ce mécanisme en faveur de la valeur définitive des indices est aujourd’hui abandonné. Vous avez accepté d’abandonner la régularisation négative au titre de 2007, soit 66,8 millions d’euros, mais vous ne tiendrez pas compte non plus de la régularisation au titre de 2008, alors que l’inflation se situe aux alentours de 2,9 % au lieu de 1,6 % prévu en loi de finances initiale.
Vous allez donc supprimer ce dispositif de régularisation, y compris pour 2008, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009 au titre de l’année 2008. En nous accordant généreusement 66,8 millions d’euros pour 2007, vous allez également garder 500 millions d’euros de ce que vous auriez dû redonner aux collectivités territoriales sur la régularisation de 2008. Donc, au final, le différentiel équivaudra à une perte et non à un gain.
C’est par un véritable tour de prestidigitation que vous nous annoncez dans le projet de loi de finances pour 2009 une somme de 1 100 millions d’euros, en intégrant dans l’enveloppe des sommes qui n’y figuraient pas les années précédentes, ce qui vous permet d’afficher une augmentation de 2 %.
Je ne reviendrai pas en détail sur ce sujet, dont j’ai déjà parlé lors de mon intervention générale. Je rappelle quand même que le FCTVA n’a rien à faire dans cette enveloppe globale. Il s’agit de 663 millions d’euros, ce qui n’est pas une petite somme. Je précise également que c’est le résultat de l’investissement des collectivités territoriales durant les deux années qui ont précédé.
Les 2 % annoncés vont se réduire au final, compte tenu de l’intégration d’autres enveloppes, telles que les amendes de police, à la portion congrue de 0,8 % au grand maximum ; il est important de le rappeler.
Par ailleurs, une erreur d’appréciation d’un demi-point du taux d’inflation prévisionnelle correspond à 200 millions d’euros ; cela est d’autant plus grave qu’aucune mesure de correction n’est prévue.
La DGF des communes et des EPCI sera rognée de 115 millions d’euros par rapport à ce qu’elle aurait été selon les calculs que nous utilisions précédemment. La perte pour la DGF totale est estimée à 202 millions d’euros.
C’est pourquoi nous vous proposons de revenir à des calculs qui intègrent bien l’évolution des prix et la croissance de la richesse.
M. le président. L'amendement n° I-58, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales :
« I. - À compter de 2009, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite en loi de finances de l'année précédente, du taux réellement constaté d'évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année.
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'indexation de la dotation globale de fonctionnement sur l'inflation constatée l'année précédente est compensée, à due concurrence, par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Nous n’avons pas trop confiance dans le Gouvernement s’agissant de la position qu’il adoptera sur l’amendement n° I-57. Cet amendement n° I-58 est donc, en quelque sorte, un amendement de repli dans la mesure où il vise à indexer la DGF sur l’inflation réellement constatée.
Nous voulons en effet poser la question de la fiabilité des prévisions proposées par le Gouvernement pour les indices macroéconomiques contenus dans le projet de loi de finances, et notamment l’inflation.
Les prévisions du Gouvernement, en raison des révisions qu’il a opérées, sont fondées sur l’hypothèse d’un baril de pétrole à 70 dollars et d’un taux de change à 1,33 dollar. Mais on peut légitimement se demander, compte tenu du cours erratique de l’un et de l’autre, ce qu’il en sera réellement en 2009.
Les prévisions sont ce qu’elles sont, mais vous leur accordez, nous semble-t-il, une importance disproportionnée puisque l’évolution de la DGF dépend du niveau de l’inflation.
En 2008, vous aviez estimé l’inflation à 1,6 %. Or, dans la note d’information de l’INSEE du mois d’octobre 2008, l’inflation hors tabac sur un an serait de 2,7 %, soit une différence de 1,1 %, ce qui représente pour les collectivités locales un manque à gagner de 440 millions d’euros.
Depuis plusieurs années maintenant, les collectivités territoriales ont l’habitude de constater l’évolution des prix qu’elles subissent, en référence à l’indice intitulé « panier du maire » ou indice des prix des dépenses communales. Cet indice est censé refléter de manière plus exhaustive la réalité de la hausse des coûts, en fonction de dépenses réelles des collectivités territoriales.
Ainsi, au 1er trimestre 2008, l’évolution de cet indice sur les quatre derniers trimestres était de 3,4 %, alors que, sur cette même période, l’inflation était de 1,9 %, soit une différence de 1,5 point. La tendance dynamique de cet indice est due, notamment, à la hausse des indices de coût dans le secteur du BTP, à une accélération du prix des charges de personnel, des produits et des services et des produits alimentaires.
Les différences entre ces multiples indicateurs provoquent d’éternels débats. C’est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement, que la dotation globale de fonctionnement de l’année n+1 soit calculée par application à la DGF de l’année n du taux réellement constaté d’évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, de la même année n.
Au regard des contraintes de plus en plus importantes et du risque d’étranglement financier auxquels les collectivités territoriales doivent faire face, nous ne pourrons, nous semble-t-il, échapper au débat sur la sincérité de ces indices et sur l’opportunité de leur sélection.
Cette question a été abordée par le Comité des finances locales, qui s’est également interrogé sur l’opportunité de conserver un tel décalage entre les différents indices retenus pour le calcul de la DGF.
Pour conclure, il me faut rétablir une vérité à laquelle les collectivités tiennent fortement : si l’enveloppe des dotations, telle que définie pour 2009, augmente effectivement de 2 %, l’évolution de l’enveloppe normée, selon le périmètre défini en 2008, est bien inférieure à 1 % ; elle pourrait même se situer entre 0,7 et 0,8% selon l’AMF.
M. le président. L'amendement n° I-126, présenté par M. Dubois et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
I. - Compléter le I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales par les mots :
augmenté de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours, sous réserve que celui-ci soit positif
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de la prise en compte de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Comme je l’indiquais tout à l’heure, la France doit engager des réformes en profondeur et notamment assainir ses finances. C’est ce que fait le Gouvernement, et c’est tout à fait satisfaisant. Mais cette rigueur se télescope aujourd'hui avec une crise mondiale qui va avoir un impact très sérieux sur l’économie réelle. Un plan de relance va être engagé ; les collectivités locales seront alors des partenaires incontournables et le Gouvernement devra travailler avec elles en toute confiance et dans la plus grande transparence.
C'est la raison pour laquelle il faut laisser aux collectivités des capacités financières d’investissement. Ces dernières représentent, je le rappelle, près de 75 % des investissements publics civils de la nation et engendrent, chaque année, une activité économique permettant le maintien de 850 000 emplois de la sphère privée, répartis à parts égales dans la construction, les services et l'industrie.
Cet amendement vise, conjointement au maintien de l'évolution d'autres prélèvements sur recette de l'article 12 et à une moindre baisse des variables d'ajustement de l'article 15, à neutraliser l'impact de l'intégration du Fonds de compensation de la TVA dans l'enveloppe – je ne dirai pas « normée », puisqu’il semble que tel n’est plus le cas – des transferts des recettes de l'État aux collectivités, soit 66 millions d’euros.
M. le président. L'amendement n° I-249, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales :
« II. - Par dérogation au I, la dotation globale de fonctionnement pour 2009 est égale au montant de la dotation globale de fonctionnement de 2008 diminué du montant de la dotation globale de fonctionnement calculée en 2008 au profit de la collectivité de Saint-Barthélemy en application de l'article L. 6264-3, puis majoré de 2 %. »
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement permet d’appliquer à l’évolution des concours de l’État un taux de progression de 2 %, et non de 1,5 %, ce dernier taux étant celui sur lequel a été construit le projet de loi de finances. Initialement, un taux d’inflation de 2 % avait été prévu ; finalement, il est inférieur, mais nous avons décidé d’en rester à 2%.
L’écart est de plus de 275 millions d’euros, dont 200 millions d’euros seront consacrés à la DGF, ce qui est significatif.
M. le président. L'amendement n° I-59, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Compléter le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, il est procédé au plus tard le 31 juillet à une régularisation sur la dotation globale de fonctionnement de cet exercice, du montant des dotations afférentes aux deux exercices précédents, calculée sur la base du taux d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages, hors tabac, relatif à ces deux exercices, tels qu'ils sont connus à cette date. »
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de la prolongation du mécanisme de régularisation de la dotation globale de fonctionnement est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Le Comité des finances locales s’est saisi de la question de la régularisation de la DGF pour 2009, qui est l’objet de cet amendement. Toutes tendances politiques confondues, celui-ci a souhaité que l’on adopte des dispositions moins défavorables aux collectivités. Notre amendement vise à donner corps à cette revendication.
L’article 10 du projet de loi de finances initial prévoyait que la régularisation négative de la DGF afférente à l’exercice 2007, d’un montant négatif de 67 millions d’euros, ne s’imputerait pas sur le montant de la DGF ouvert au titre de l’année 2009. Nous aurions pu saluer un nouveau cadeau du Gouvernement à l’adresse des collectivités – on nous en annonce beaucoup en ce moment, mais on tarde à les constater ! – si, derrière cette manœuvre, ne se cachait pas un mauvais tour pour les collectivités.
Comme cela est expliqué dans l’exposé des motifs, le Gouvernement envisageait de supprimer le dispositif de régularisation au titre de 2008 et des années suivantes dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009. Le rapporteur général de l’Assemblée nationale, M. Gilles Carrez, a préféré soulager le Gouvernement de cette réforme, et a fait adopter la suppression du dispositif dans l’article 10 que nous examinons actuellement.
Si l’on regarde de plus près le dispositif de régularisation, son impact cumulé sur la période des dix dernières années est très minime. Sa suppression n’aurait donc dans la durée que de faibles conséquences.
Néanmoins, nous ne pourrions souscrire entièrement à cette proposition qu’à une double condition : premièrement, cette suppression ne doit pas intervenir au moment le plus désavantageux pour les collectivités territoriales ; deuxièmement, l’indice sur lequel est basée l’évolution de la DGF, à savoir le taux d’inflation, doit être reconnu et admis par tous comme incontestable.
Notre précédent amendement, que Nicole Bricq vient de présenter, tendait à résoudre ce second problème. À l’inverse, le premier problème, celui du moment choisi pour supprimer une telle mesure, reste entier à nos yeux et engendre une injustice flagrante pour les collectivités territoriales. En effet, cette suppression intervient au moment même où les collectivités pourraient bénéficier d’une régularisation positive, de plus de 500 millions d’euros, au regard du taux élevé de l’inflation en 2008, qui devrait être de 2,9 %, contre 1,6 % prévu en loi de finances initiale.
C’est précisément au moment où le gain net pour les collectivités territoriales aurait donc été d’environ 440 millions d’euros que le Gouvernement choisit de changer les règles du jeu et de supprimer le mécanisme de régularisation. Cela lui permet de se dégager d’une obligation financière qu’il prétend, en l’état actuel, ne pas pouvoir remplir.
Notre amendement tend à s’opposer à ce que le Gouvernement, qui est juge et partie dans cette affaire, puisse à sa guise changer les règles au détriment des collectivités territoriales. Nous proposons donc que la régularisation au titre des années 2007 et 2008 ait bien lieu, comme par le passé, afin de rendre aux collectivités ce à quoi elles ont légitimement droit. Nous nous appuyons, mes chers collègues, sur la préconisation de l’ensemble des tendances politiques siégeant au Comité des finances locales.
L’adoption de cet amendement permettrait d’assurer aux collectivités une manne financière tout à fait indispensable aujourd'hui pour consolider leur effort d’investissement.
M. le président. L'amendement n° I-245, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. - Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement de 2009, le taux mentionné au I du présent article est majoré de 0,5 %. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes résultant pour l'État de la majoration du taux de progression de la dotation globale de fonctionnement est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission avait déposé, à titre conservatoire, un amendement strictement identique à celui du Gouvernement, que M. le ministre vient de présenter. Ledit amendement peut donc être retiré, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-245 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes ici au cœur d’une question importante pour l’équilibre des finances publiques. Le Gouvernement propose que le taux d’évolution de l’ensemble des concours aux collectivités territoriales reste fixé à 2 % : c’est une disposition clé de cette loi de finances ; la commission estime donc qu’il n’est ni possible ni souhaitable d’y porter atteinte.
Par ailleurs, permettez-moi de souligner qu’il est assez paradoxal de solliciter une indexation, même partielle, sur la croissance dans une période où nous pouvons légitimement nous attendre à voir la production reculer au cours de l’année prochaine.
Mme Nicole Bricq. C’est pour les années 2007 et 2008.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est d’autant plus curieux que vous reprenez des formules d’indexation de périodes passées en leur appliquant, en quelque sorte, un effet de cliquet à la baisse, c'est-à-dire en ne prenant pas en compte les éventuelles variations négatives du PIB.
En des temps plus fastes, nous avions souhaité que les concours versés aux collectivités territoriales soient corrélés à la croissance. Nous avions eu des débats sur la fraction du taux de croissance qu’il fallait affecter à l’évolution de l’enveloppe normée : il s’agissait de faire bénéficier les collectivités d’une évolution favorable de l’économie.
En vertu du même principe, il serait raisonnable de penser que l’évolution des concours de l’État puisse être affectée d’un coefficient négatif en cas de croissance négative.
Il semble que la disposition la plus précautionneuse, celle qui, dans une période de grand trouble des marchés et de l’économie, préserve le mieux les budgets locaux, c’est la garantie d’un taux d’augmentation de 2 %, car celui-ci ne sera affecté d’aucune incertitude.
Mme Nicole Bricq. Il faut que l’État verse ce qu’il doit aux collectivités !
M. Philippe Marini, rapporteur général. On ne peut pas, chère collègue, considérer que les collectivités territoriales doivent être « sanctuarisées » quand l’économie va mal. Ce raisonnement n’est pas acceptable ! Je fais appel à votre sens des responsabilités.
On ne peut pas se soustraire à l’évolution générale. Soit on affirme le principe d’une association directe des collectivités territoriales à la conjoncture en sollicitant une quote-part du taux de croissance quand l’économie va bien, mais on doit alors admettre, par symétrie, une minoration lorsque le produit intérieur brut va moins bien. Soit on adopte une règle forfaitaire. En proposant 2 %, soit un demi-point au-dessus du taux d’inflation prévisionnelle, le Gouvernement adopte une attitude raisonnable.
En ce qui concerne la régularisation de la DGF – sujet qui est souvent évoqué par les élus locaux –, je veux persuader les auteurs de l’amendement, notamment Mme Bricq, que ce mécanisme peut fluctuer en fonction de l’inflation réelle et selon les périodes et la qualité de la prévision économique. Sur le long terme, nous pourrions le démontrer si nous en avions le temps, les régularisations négatives et positives finissent par s’annuler.
La complexité du dispositif et ses lacunes sont telles que le Comité des finances locales a été conduit, à plusieurs reprises, à s’interroger sur le maintien de la régularisation. Dès le 5 juillet 2006, il proposait même d’y mettre fin. Dans une délibération du 1er juillet 2008, ce comité observe que les régularisations de la DGF résultent essentiellement de la régularisation de l’inflation prévisionnelle utilisée en loi de finances pour calculer la DGF de l’année et s’interroge, à ce titre, sur l’opportunité de mettre fin au décalage existant entre les indices utilisés pour le calcul de la DGF, inflation prévisionnelle de l’année et taux d’évolution du PIB de la pénultième année.
Je l’ai rappelé dans mon rapport écrit, que vous avez pu consulter, mes chers collègues, si l’on avait transposé à la séquence 2008-2009 les règles antérieures, le bouclage du budget de l’État serait devenu encore plus difficile, voire impossible. Il aurait fallu prélever des sommes supplémentaires significatives sur les crédits des missions et des programmes de l’État, alors que les arbitrages, je le suppose, monsieur le ministre, ont déjà été compliqués.
Pour toutes ces raisons, la commission souhaite que le Sénat adopte l’amendement n° I-249 et appelle au retrait des autres amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. J’ajouterai peu de choses à ce qu’a dit excellemment M. le rapporteur général.
Pour reprendre son expression, nous sommes au cœur de la construction du projet de loi de finances : d’un côté, il y a les dépenses de l’État qui progressent compte tenu des charges, de l’intérêt de la dette et des pensions et, de l’autre, il y a celles qui n’augmentent pas en euro courant, comme les dépenses d’intervention et la masse salariale. Comme vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État accomplit les efforts nécessaires et assume ses responsabilités.
L’État, c’est nous ! Il n’y a pas, d’un côté, l’État et, de l’autre, les collectivités locales : il y a les pouvoirs publics qui conduisent des politiques publiques. Comme le dit M. le rapporteur général, prendre sur les recettes de l’État, c’est toucher à l’éducation nationale, à la défense, à la culture, domaines auxquels vous êtes légitimement attachés.
Les arbitrages budgétaires au sein du Gouvernement et le débat sur le projet de loi de finances aujourd’hui au Parlement sont évidemment extrêmement difficiles, puisque la dépense est terriblement contrainte. Crise ou pas, il faut maîtriser la dépense publique : nous nous engageons à le faire sur trois ans.
Sans chercher à embellir la vérité, nous avons voulu préserver les collectivités territoriales en indexant les dotations sur l’inflation. Souvenez-vous du débat que nous avions eu l’année dernière : nous avions dit que nous prendrions en compte la moitié du PIB majorée de l’inflation et que nous prendrions une année pour que chacun puisse bien intégrer cette idée.
L’enveloppe normée a tellement évolué ces dernières années qu’elle est devenue un leurre. Nous avons donc clarifié la situation en présentant une enveloppe globale des dotations de l’État consacrées aux collectivités. La norme d’évolution est le taux d’inflation, auquel nous ajoutons 0,5 % cette année.
L’amendement du Gouvernement est donc fondateur et vise à préserver l’avenir des collectivités.
Gérer une collectivité locale n’est pas facile. Je sais que l’on est tenté de dépenser plus, parce que l’on veut offrir plus de services de proximité. Mais le panier du maire est comme celui du ministre du budget : il contient des dépenses publiques avec le même type d’évolution.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est un panier percé !
M. Éric Woerth, ministre. Il n’y a pas, d’un côté, l’État, qui bénéficierait par je ne sais quel miracle de faibles augmentations, et, de l’autre, les collectivités qui subiraient les hausses et qui verraient leurs dépenses progresser. Le panier est aussi lourd à porter, qu’il s’agisse de l’État ou des collectivités locales. Du reste, nous exerçons souvent des responsabilités à la fois nationales et locales. Nous sommes donc confrontés aux mêmes réalités.
Nous aimerions tous voir les choses progresser. Mais les collectivités sont des structures publiques, et elles n’échappent pas aux contraintes qui s’imposent aux structures publiques dans le monde entier en raison de la crise. Toutefois, nous essayons de faire en sorte que les répercussions de cette crise soient les moins fortes possibles et de préserver nos concitoyens sur le plan tant national que local.
Tel est le sens de l’amendement du Gouvernement, mais tel est également le sens de la construction générale du projet de loi de finances. L’intégration du FCTVA relève de la même logique.
Il faut que les collectivités puissent jouer leur rôle, dans l’éventualité d’un plan de relance. C’est la raison pour laquelle la dotation progresse de 2 %. Les collectivités représentent en effet une part importante de l’investissement public et j’imagine qu’elles auront à cœur de continuer à investir dans un cadre plus restreint et plus maîtrisé de leurs finances publiques.
Si la France engage un plan de relance, en coordination, je l’espère, avec nos amis européens, c’est l’État qui paiera in fine.
Mme Nicole Bricq. Pas avec ce budget !
M. Éric Woerth, ministre. Les bénéficiaires en seront alors les Français dans leur ensemble, mais aussi les collectivités locales. Un processus de relance du secteur du bâtiment, par exemple, permettra aux collectivités locales de percevoir des droits de mutation.
Toute initiative, quelle qu’elle soit, a pour objet de favoriser la croissance, par conséquent d’augmenter les recettes de l’État, donc d’accroître les ressources des collectivités territoriales. Vous le voyez, tout est imbriqué ! C’est pourquoi je demande solennellement au Sénat de soutenir le Gouvernement dans cette affaire. Nous agissons avec sincérité et en ayant le sens des responsabilités. J’espère que vous partagez ce sentiment.
M. Robert del Picchia. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce soir, le ton est grave.
Mme Nicole Bricq. Oui !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Face à cet appel à la responsabilité, je voudrais m’associer aux propos du ministre et à ceux du rapporteur général.
Nous ne pouvons pas constater le déficit probable de l’État, qui ne fait qu’éloigner un peu plus l’horizon qui nous permettrait d’équilibrer les recettes et les dépenses, et laisser dériver les fonds mis à la disposition des collectivités territoriales.
La formule qui nous est proposée correspond en grande partie aux propositions de plusieurs d’entre nous, à savoir une indexation sur l’inflation à laquelle s’ajoute la moitié d’une croissance prévisionnelle de 1 %, ce qui est bien plus optimiste que les prévisions révisées il y a quelques jours par le Gouvernement. Je plaide donc pour que nous nous en tenions à la formule qu’il propose.
Monsieur le ministre, nous sommes peut-être à la veille d’un plan de relance. Je me permets de dire une nouvelle fois qu’un déficit de 57 milliards d’euros est en soi un plan de relance. (Sourires.) Ayons donc le sens de la mesure !
S’il devait y avoir un plan de relance, j’ai compris que les collectivités territoriales seraient les premiers opérateurs auxquels l’État ferait confiance en leur transférant sans doute les ressources nécessaires pour stimuler une économie en difficulté.
Je souhaite donc que le Sénat adopte l’amendement n°I–249 que nous présente le Gouvernement.
Pour la clarté du débat, monsieur le président, je demande le vote par priorité de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est de droit.
La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Le débat qui vient de se dérouler comporte des éléments de satisfaction pour l’opposition. En effet, le Gouvernement nous parle à présent d’un plan de relance, alors que voilà six ans que l’on entend prôner ici une logique économique totalement inverse : le laisser-faire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous aviez prévu la crise ?
M. François Marc. Combien de fois avons-nous entendu qu’il fallait laisser l’économie s’organiser, ne pas imposer trop de contraintes, favoriser la politique de l’offre et réduire la fiscalité ?
Il est heureux, monsieur le ministre, qu’une conversion s’opère. Cette nouvelle philosophie politique qui semble s’amorcer, totalement à l’opposé de la précédente, est un élément de satisfaction.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous prenez vos désirs pour des réalités !
M. François Marc. La très mauvaise conjoncture qui s’annonce légitime ce changement de cap. Demain, semble-t-il, on va nous annoncer des chiffres catastrophiques pour le chômage dans notre pays. Il est donc urgent d’agir.
Dès lors qu’il est question de relance, ne perdons pas de vue que 75 % de l’investissement public dans notre pays sont réalisés par les collectivités locales. On doit donc tout mettre en œuvre pour que celles-ci puissent accomplir un effort d’investissement important, en préservant leur autonomie fiscale et leur autonomie de gestion et en prenant en compte leurs besoins par des transferts nécessaires.
Je ne reviens pas sur la question de la régularisation, puisque notre amendement sera visiblement ignoré du fait de la priorité annoncée. Je veux néanmoins vous interroger, monsieur le ministre, puisque vous voulez absolument faire passer cet amendement en priorité.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est la commission qui a demandé la priorité !
M. François Marc. Vous nous dites – et vous êtes venu l’annoncer au Sénat il y a deux semaines – que le Gouvernement a révisé sa prévision en ce qui concerne l’inflation : il avait anticipé une inflation de 2 %, et ce taux est ramené à 1,5 % ; dès lors, étant donné que la hausse des dotations s’élève à 2 %, un cadeau est fait aux collectivités. Le raisonnement est simple ! Le problème, c’est que le lendemain de cette déclaration Luc Chatel indiquait que l’inflation serait comprise entre 2 et 2,5 %.
Alors, nous aimerions comprendre, monsieur le ministre : qui a raison ? Tout cela ne serait-il pas un simple effet d’habillage visant à nous faire croire que les collectivités vont recevoir des cadeaux ? Au fond, c’est véritablement une question de confiance qui est posée à l’égard de tout ce que vous nous racontez en ce moment.
Nous ne pouvons absolument pas nous rallier à l’amendement que vous nous soumettez, car il est en contradiction totale avec ce que sera réellement l’inflation demain.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. J’ai entendu M. le ministre et M. le rapporteur général parler de « dépenses contraintes ». Mais qui a décidé d’auto-liquider le bouclier fiscal, si ce n’est la majorité sénatoriale ? Et qui a imposé, dans le même temps, les indemnités pour les accidentés du travail ? C’est toujours la majorité sénatoriale !
Nous avons fait des propositions de recettes et elles ont été rejetées. Il est possible de faire autrement !
M. le président de la commission des finances déclare que le déficit s’élève à 50 milliards d’euros…
M. Philippe Marini, rapporteur général. À 57 milliards ! Ce n’est pas grand-chose, 7 milliards d’euros…
M. Thierry Foucaud. En effet, 57 milliards d’euros, mais qui creuse aujourd’hui le déficit ?
L’amendement du Gouvernement, dans sa simplicité et sa brutalité, confirme l’abandon pur et simple du contrat liant l’État et les collectivités territoriales.
Jadis, il s’agissait d’un contrat de croissance et de stabilité. Puis c’est devenu un pacte de stabilité. Et le mouvement de transfert de charges vers les élus locaux se poursuit.
Qu’il me soit permis de prendre quelques exemples, notamment celui de la disposition relative à la régularisation de la dotation globale de fonctionnement. L’abandon pur et simple de l’« amendement Auberger », qui avait d’ailleurs été chèrement négocié par les élus de droite sous une législature déjà ancienne, entraîne dès cette année, compte tenu du décalage évident entre la hausse des prix à la consommation prévue et celle qui sera constatée, une perte sèche de 500 millions d’euros pour les collectivités territoriales. Il faut en avoir conscience !
Sans cette mesure, la dotation de compensation de la taxe professionnelle aurait pu, sans difficulté majeure, être maintenue au niveau, déjà réduit, qu’elle avait atteint l’an dernier.
Cela aurait pu également nous épargner une réforme de la dotation d’aménagement, de la dotation de solidarité urbaine, mais aussi de la dotation globale de fonctionnement des groupements, qui va tendre, naturellement, à la réduction des concours budgétaires destinés soit à la solidarité, soit à la coopération intercommunale.
L’abandon du principe de régularisation, comme du principe faisant évoluer la DGF en tenant compte de la croissance, c’est la mort programmée de l’intercommunalité, notamment en milieu rural, c'est-à-dire là où nous en avons le plus besoin.
Année après année, les effets de l’article 85 de la loi de finances de 2006 se font sentir et frappent de plein fouet toutes les petites structures intercommunales, notamment celles qui regroupent un, deux ou trois cantons dans les départements ruraux.
Avec ces mesures, nous sommes entrés dans une logique de « déménagement » du territoire que nous ne pouvons pas accepter. Il faudra bien, un jour ou l’autre, faire le bilan exact des ressources dont les collectivités territoriales sont aujourd’hui privées ! De la taxe professionnelle, qui se retrouve vidée de son contenu, aux transferts de charges non compensés, en passant par la minoration de la TVA remboursable sur les investissements, ou encore le poids des recettes que s’assure l’État au titre des frais de rôle et de la cotisation minimale de taxe professionnelle, ce sont ainsi des milliards et des milliards d’euros dont les élus locaux sont privés.
Au demeurant – et je m’exprime ici au nom du groupe CRC –, tant qu’un point complet de la situation n’aura pas été fait, nous ne pourrons, en parlementaires conscients de nos responsabilités, que soumettre au débat des propositions, comme nous l’avons encore fait aujourd’hui au travers des amendements défendus par Marie-France Beaufils et Bernard Vera.
Nous sommes d’accord avec nos collègues du groupe socialiste qui demandent la suppression de l’article.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le président de la commission des finances, le rapporteur général et le ministre ont dit une chose qui me semble juste.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah !
Mme Nicole Bricq. Nous nous trouvons à un moment crucial, je dirais même grave. Sans reproduire l’histoire de la chèvre de M. Seguin, qui combattit jusqu’à l’aube avant d’être mangée, vous permettrez que, sur ce point précis, nous nous battions un peu !
Tout à l’heure, M. le rapporteur général a dit que, d’une certaine manière, le nouveau mode d’indexation sanctuarisait les collectivités locales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je dis qu’il les préserve !
Mme Nicole Bricq. Mais je voudrais rappeler ce qu’il écrit dans son rapport, de façon que nos collègues se prononcent tout à l’heure en toute connaissance de cause : la nouvelle norme d’évolution contraindra – c’est vous qui l’écrivez, monsieur le rapporteur général – « à des choix plus difficiles entre les dotations de péréquation intégrées dans son montant global et la dotation forfaitaire des communes.
« Elle rendra également plus délicate la prise en compte des effets du recensement qui viendra impacter les calculs de DGF des communes en 2009. »
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout est plus difficile en période de crise ! Il ne faut pas voir la réalité en rose !
Mme Nicole Bricq. Certes, mais encore faut-il bien comprendre l’épure dans laquelle nous nous trouvons !
Monsieur le président de la commission, vous avez évoqué, de manière assez sibylline, du reste, un plan de relance qui devrait nous être proposé par le Président de la République d’ici à une dizaine de jours. Vous avez dit que ce plan pourrait avoir un impact favorable sur les collectivités territoriales. Peut-être en savez-vous plus que nous ! Mais alors, que faisons-nous ici ce soir ?
M. Thierry Foucaud. Voilà !
Mme Nicole Bricq. Sommes-nous au cinéma, en pleine fiction ?
Dès le début de la discussion de ce projet de loi de finances pour 2009, nous avons posé la question de la relance, de même que nous l’avions fait lors du débat d’orientation sur les finances publiques. Tout à l’heure, mon collègue Edmond Hervé, dans son intervention, vous a lui aussi entretenu de ce sujet. Je vous le demande donc encore une fois : pourquoi sommes-nous ici ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour vous réjouir ! Faites-nous confiance !
Mme Nicole Bricq. Nous sommes en pleine fiction ! Permettez donc que nous nous étonnions non seulement de la tournure que prend ce débat, mais aussi que nous devions attendre qu’une parole quasi divine nous annonce la relance !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est justement un budget de relance que nous examinons !
Mme Nicole Bricq. Une telle attitude à l’égard des parlementaires que nous sommes n’est pas du tout convenable !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Je voudrais d’abord vous dire, monsieur le ministre, que les collectivités locales sont tout à fait conscientes de leurs responsabilités, car elles votent, elles, des budgets en équilibre. Quand elles s’engagent, elles savent qu’elles ont l’obligation de compenser leurs dépenses par leurs recettes.
Si, aujourd’hui, les collectivités locales se trouvent avec des recettes de fonctionnement comportant 64 % de dotations de l’État, c’est parce que celui-ci l’a bien voulu ! En quinze ans, ce pourcentage est passé de 50 à 64 %.
Cela étant dit, je suis intimement persuadé que les collectivités locales sont tout à fait responsables et conscientes de la situation, …
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !
M. Daniel Dubois. … et qu’elles se comportent pleinement en partenaires de l’État. Mais l’intégration de la TVA dans les dotations normées était une erreur.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ça, c’est autre chose !
M. Daniel Dubois. Si un réel débat s’était instauré avec les collectivités locales, sachez que celles-ci sont suffisamment responsables pour accepter de partager l’effort de redressement du pays.
D’ailleurs, pour tout vous dire, monsieur le ministre, le président de la commission des finances a réussi à me convaincre qu’un réel effort était accompli par l’État. Toutefois, je souhaite insister sur la transparence et la confiance nécessaires, faute de quoi les collectivités, qui sont partenaires de l’État, ne seront pas au rendez-vous du plan de relance annoncé, ce qui serait dommage !
Cela étant, je retire mon amendement n° I-126, et je voterai l’amendement du Gouvernement. Mais, encore une fois, je pense que vous commettez une erreur de méthode et, si j’ose dire, de casting !
M. le président. L'amendement n° I-126 est retiré.
La parole est à M. Edmond Hervé, pour explication de vote.
M. Edmond Hervé. J’ai été très surpris par ce que je viens d’entendre. Tous, ici, nous partageons l’impératif qu’est le dialogue parlementaire avec le Gouvernement.
Hier, et encore aujourd’hui, mes collègues socialistes – ou plus généralement de gauche – et moi-même avons dit que nous considérions les collectivités territoriales comme un facteur de relance. Cet après-midi, j’ai consacré la quasi-totalité de mon intervention à cette question de la relance par les collectivités territoriales. Or à aucun moment le représentant du Gouvernement ne nous a répondu sur ce point !
M. Edmond Hervé. Votre collègue, monsieur le ministre, s’est contenté de glisser quelques allusions ironiques à ce qu’on pourrait appeler, pour aller vite, une certaine « irresponsabilité » de plusieurs de nos collègues. En réalité, ce qui nous différencie, c’est tout simplement le fait que nous n’avons pas la même conception de la décentralisation. Je me souviens très clairement des débats que nous avons eus lors de l’examen des lois de décentralisation de 1981 et 1982. Et ça continue !
Nous estimons que les collectivités territoriales ont une capacité d’entraînement. Vous n’auriez pas voté le RMI et le RSA si les collectivités n’avaient pas apporté la preuve de ce qu’elles pouvaient faire en matière de solidarité.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le RSA, ce n’est pas vous !
M. Edmond Hervé. En ce qui concerne le RSA, monsieur Marini, le principal reproche que je pourrais adresser à votre majorité, c’est d’avoir lancé une procédure expérimentale sans attendre son résultat. Le département dont je suis l’élu s’est lancé dans cette expérimentation ; je suis donc bien placé pour vous dire que nous avons eu raison de plaider la cause de l’expérimentation.
Nous avons deux conceptions très différentes des collectivités territoriales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Une bonne et une mauvaise !
M. Edmond Hervé. Vous avez une approche financière et comptable des collectivités territoriales. Ce n’est pas notre conception ! (Protestations sur les travées de l’UMP et au banc des commissions.) J’ai eu d’autres responsabilités et j’ai toujours eu une démarche de rigueur, que vous avez d’ailleurs reconnue les uns et les autres !
En 1982, nous avons lancé le Fonds spécial de grands travaux, avec des résultats extrêmement positifs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne remontez pas au déluge !
M. Edmond Hervé. Nous sommes optimistes et vous êtes enfermés dans le pessimisme ! (Nouvelles protestations sur les travées de l’UMP.) L’un des moyens de dépasser la situation actuelle, c’est l’investissement. J’ai bien entendu que, dans quelques jours, un plan de relance sera annoncé. Faites confiance à la représentation parlementaire ! À l’heure où nous discutons de questions aussi importantes, il est tout à fait normal que nous soyons informés des projets du Gouvernement.
Je comprends que vous ne puissiez pas nous donner des réponses précises, monsieur le ministre. J’aimerais néanmoins vous poser une question.
Je considère que les collectivités territoriales jouent un rôle déterminant en matière d’équipement, d’aménagement, de logement neuf ou de réhabilitation. Il n’y a d'ailleurs pas de politique du logement si les collectivités territoriales ne sont pas « dans le coup », si vous me permettez l’expression.
Respectueux de l’autorité gouvernementale, je vous poserai une seule question : quelles demandes allez-vous adresser aux autorités bancaires françaises pour relancer véritablement le domaine du logement et de la réhabilitation ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Monsieur le ministre, je vous ai écouté attentivement. À l’évidence, nous vivons un moment difficile, qui exige de nous beaucoup de rigueur et de solidarité.
Nous avons connu une longue période de décentralisation, au cours de laquelle le Gouvernement a transféré de nombreuses compétences aux collectivités locales, qui n’en sont encore, pour certaines d’entre elles, qu’au début de leur mise en œuvre. La situation est donc loin d’être stabilisée.
Le Gouvernement s’est déchargé d’un certain nombre de responsabilités sur les collectivités. Aujourd’hui, vous bloquez la DGF, alors que la crise va provoquer l’augmentation du nombre de RMIstes et de personnes en difficulté. Les collectivités territoriales seront confrontées au paiement de contributions très importantes dont elles ne maîtrisent pas le montant, alors que leurs ressources auront diminué.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elles n’auront pas diminué, elles auront augmenté de 2 % en moyenne !
M. Gérard Miquel. Monsieur le rapporteur général, nous n’allons pas reprendre la discussion !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est sur ce point que nous votons : plus 2 % !
M. Gérard Miquel. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le double d’une croissance illusoire de 1 % !
M. Gérard Miquel. Monsieur le rapporteur général, vous êtes bien conscient des difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous les vivons tous !
M. Gérard Miquel. Certes, mais la répartition de la ressource est aujourd’hui mal effectuée en direction des collectivités.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est vrai !
M. Gérard Miquel. Certaines d’entre elles ont besoin d’investir. Si nous voulons relancer l’économie dans notre pays, l’effort des collectivités doit être soutenu, sinon nous irons vers une récession : dans cette période, les collectivités vont devoir payer des charges importantes liées aux effets d’une décentralisation mal conduite dans le passé.
C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas souscrire à vos propositions. Nous vous demandons de bien réfléchir, car le moment est déterminant pour l’avenir des collectivités et pour leurs capacités d’investissement ! (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Nous sentons bien, dans cette discussion, que deux visions s’opposent.
On ne peut pas considérer que la progression de 2 % décidée pour l’année prochaine soit une formidable opportunité pour sortir de la difficulté les collectivités territoriales.
Comme certains collègues viennent de le rappeler, la situation de la population risque d’être difficile au regard de l’emploi.
Si on ne donne pas les moyens aux collectivités territoriales de jouer leur rôle à l’échelon de leur territoire, si on ne leur offre pas la possibilité de maintenir les services à un niveau correspondant aux besoins, le pouvoir d’achat de la population sera affecté, avec les conséquences que l’on sait sur la consommation.
Au lieu de voter un budget de relance, pour reprendre l’expression du président de la commission des finances,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est un budget de relance !
Mme Marie-France Beaufils. …on va au contraire remettre en cause ladite relance.
En ce domaine, tant en investissement qu’en fonctionnement, toutes les collectivités territoriales ont un rôle important à jouer. Si on n’utilise pas ce levier, je suis convaincue que la dégradation économique sera beaucoup plus forte.
C’est pourtant ce qui nous est proposé dans ce projet de budget. Vous refusez, sur le fond, toutes les propositions qui permettraient d’accroître les recettes de l’État, parce que vous ne voulez pas reconnaître que certaines mesures que vous avez prises les années précédentes ont eu des effets nocifs, renforcés par la crise financière. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos I-57, I-186 et I-58 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° I-59.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
I. – Au deuxième alinéa de l’article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2010 ».
I bis. – Après le deuxième alinéa du même article L. 1613-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, ce fonds bénéficie, au titre de 2009, d’un prélèvement de 10 millions d’euros sur la dotation instituée au IV de l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986). »
II. – L’article L. 1614-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À titre dérogatoire, la dotation générale de décentralisation mentionnée à l’article L. 1614-4 et les crédits prévus aux 1° et 2° de l’article L. 4332-1 n’évoluent pas en 2009. »
III. – Après la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 2334-26 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
IV. – Le dernier alinéa de l’article L. 4425-2 et le premier alinéa de l’article L. 4425-4 du même code sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
V. – Le dernier alinéa du I de l’article 98 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, le quatrième alinéa de l’article 6 de la loi n° 88-1089 du 1er décembre 1988 relative aux compétences de la collectivité territoriale de Mayotte en matière de formation professionnelle et d’apprentissage et le I de l’article 55 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
VI. – Le II de l’article 134 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002) est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À titre dérogatoire, l’évolution prévue au deuxième alinéa ne s’applique pas en 2009. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-60 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-187 est présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Claude Jeannerot, pour présenter l’amendement n° I-60.
M. Claude Jeannerot. Le Gouvernement et la majorité parlementaire nous assurent que l’intégration du FTCVA au sein de l’ensemble des prélèvements sur recettes destiné aux collectivités territoriales n’a aucun impact sur le FCTVA lui-même.
L’argument, en première analyse, semble juste. L’intégration du FCTVA n’a effectivement, pour l’instant, aucune conséquence sur le fonds. À l’inverse, et nous commençons à le vérifier aujourd’hui, elle exerce une contrainte et une déformation sur toutes les autres dotations. C’est la raison pour laquelle nous maintenons notre position, qui est de retirer le FCTVA de cette enveloppe et de lui conserver son caractère de remboursement intégral.
Notre conviction, en effet, est que la pression qu’exerce le FCTVA, et qu’il exercera plus encore à l’avenir s’il conserve son mode d’évolution, entraînera la disparition ou le gel d’autres dotations. Les premières conséquences ne se font pas attendre, puisque l’article 11, dès aujourd’hui, propose le gel de plusieurs dotations de fonctionnement.
Ainsi est gelée, au titre de l’année 2009, la dotation générale de décentralisation – soit 989 millions d’euros –, qui vise à compenser financièrement une partie des transferts des actes I et II de la décentralisation pour les communes, les départements et les régions.
Ce sont évidemment autant de missions dont la mise en œuvre sera remise en cause en 2009. Pour les communes et leurs groupements, il s’agit de la réalisation des documents d’urbanisme, du financement des bureaux municipaux d’hygiène, etc. Pour les départements, c’est le transfert d’un certain nombre de responsabilités dans le domaine culturel ou dans le domaine des ports maritimes. Pour les régions, c’est la compensation versée au STIF au titre du transport scolaire en Île-de-France, ou le transfert de compétence dans le domaine culturel, etc.
Il en sera de même, mes chers collègues, pour la dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle, destinée à compenser le transfert progressif de 1983 à 2004 de nouvelles charges de l’État vers les régions en matière de formation professionnelle.
Si nous n’avions pas entendu, aujourd’hui, le Président de la République affirmer, lors de son déplacement à Valenciennes, que la réforme de la formation professionnelle était son « challenge » pour l’année 2009, nous aurions évidemment beaucoup de mal à le croire au regard du seul projet de loi de finances examiné ce soir.
Autrement dit, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est un coup de frein porté à la décentralisation. Une nouvelle fois, l’État se déresponsabilise en transférant des charges sans permettre aux collectivités d’assurer de manière convenable leur mise en œuvre.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 11.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-187.
M. Thierry Foucaud. En gelant de nombreuses dotations de compensation, monsieur le ministre, vous allez placer les collectivités locales dans des difficultés énormes en limitant leurs capacités d’investissement, alors que leurs charges de fonctionnement augmentent.
Le dernier indice de prix des dépenses communales est en hausse de 0,9 % au premier trimestre de 2008, comparé au trimestre précédent. Sur les quatre derniers trimestres, la progression de l’indice est de 3,4 %, contre 1,9 % pour l’indice des prix des ménages hors tabac, soit un écart de 1,5 point, contre un écart de 1,9 point au quatrième trimestre de 2007.
Quatre principaux phénomènes ont marqué le premier trimestre de 2008 : la légère accélération des charges de personnel, la hausse des indices de coût dans le secteur du BTP, l’accélération du prix des produits et des services divers, mais aussi le prix des produits alimentaires.
Au regard de ces résultats, le dynamisme de l’inflation supportée par les communes demeure élevé. Une étude de la DGCL, la Direction générale des collectivités locales, confirme également que, pour 2006, les dépenses de fonctionnement dans les communes de plus de 10 000 habitants ont progressé de 3,3 %, alors que l’inflation a été de 1,6 % pour la même période. On pourrait mettre en parallèle le taux prévisionnel de 2 % dans le PLF pour 2009 avec les 3 % qui sont déjà annoncés pour 2008.
Vous savez que nombre de collectivités traversent aujourd’hui des difficultés ; je ne reviendrai pas sur la crise financière qui ne les épargne pas. Votre positionnement crée de l’instabilité, de l’insécurité ; on plonge ainsi les collectivités dans une situation qu’elles n’ont jamais connue à ce jour.
En bloquant les évolutions de nos dotations de fonctionnement, vous ne faites qu’ajouter à ces incertitudes. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, nous avons voté à l’article précédent l’enveloppe globale des concours avec une évolution de 2 % et nous abordons maintenant l’exercice de répartition. Certaines dotations évoluant à un rythme plus rapide, notamment le FCTVA, il faut trouver des compensations ; ce sont les fameuses variables d’ajustement, sur lesquelles notre discussion va se focaliser.
Pour éviter que les variables d’ajustement ne pâtissent trop de la contrainte de l’enveloppe, le Gouvernement a dû faire des choix, parmi lesquels figure le maintien en euros courants des dotations qui font l’objet de cet article. Par conséquent, si nous supprimons cet article, nous allons exercer une pression encore plus forte sur les variables d’ajustement et cela va se traduire dans tous les budgets par des situations sans doute difficiles à gérer, voire insupportables.
Telle est la raison pour laquelle il n’est pas possible de donner suite à ces amendements de suppression. La commission en demande donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Tout cela relève d’un équilibre finement pesé et, en ce qui concerne les dotations de fonctionnement autres que la DGF, il est prévu de les laisser en euros courants pour éviter de trop peser sur les autres variables d’ajustement.
Il y a donc une logique, que nous déclinons de façon efficace et juste, me semble-t-il.
M. le président. Monsieur Jeannerot, l’amendement n° I-60 est –il maintenu ?
M. Claude Jeannerot. Oui, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président. Monsieur Foucaud, l’amendement n° I-187 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Oui, monsieur le président, je le maintiens également.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-60 et I-187.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
I. – L’article L. 2334-32, le premier alinéa de l’article L. 2334-40 et l’article L. 3334-12 du code général des collectivités territoriales sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
II. – L’article L. 3334-16 du même code est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, le montant alloué à chaque département est égal à celui de 2008. » ;
2° Au troisième alinéa, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2010 ».
III. – L’article L. 4332-3 du même code est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, le montant alloué à chaque région est égal à celui de 2008. » ;
2° Au troisième alinéa, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2010 ».
IV. – L’article L. 2334-24 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, le produit prélevé sur les recettes de l’État est minoré de 100 millions d’euros. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-61 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-188 est présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Claude Jeannerot, pour défendre l’amendement n° I-61.
M. Claude Jeannerot. Pour les mêmes raisons de contraintes budgétaires, liées à l’intégration du FCTVA dans l’enveloppe normée, l’article 12 gèle un certain nombre de dotations d’investissement, dotations en principe indexées sur le taux de formation brute de capital fixe. Seront concernés par ce gel les 12 332 communes et les 1365 EPCI qui ont bénéficié de la dotation globale d’équipement des communes à hauteur de 486 millions d’euros et dont le montant n’évoluera pas en 2009.
Avec le gel de la dotation globale d’équipement des départements, le même traitement sera appliqué aux départements, qui seront pénalisés, d’une part, pour assurer les dépenses d’aménagement et les travaux d’équipement rural et, d’autre part, pour permettre une véritable péréquation entre les départements.
Les services publics en milieu rural seront aussi remis en cause avec le gel de la dotation de développement rural, qui permettait d’aider les communes et les EPCI à financer des opérations de maintien et de développement des services publics en milieu rural.
Enfin, mes chers collègues, ce sont à la dotation départementale d’équipement des collèges, la DDEC, et à la dotation régionale d’équipement scolaire, la DRES, de subir les foudres de ce projet de loi de finances et de voir leur augmentation supprimée pour 2009.
En gelant le montant de ces dotations, le Gouvernement porte un coup d’arrêt à la politique d’investissement développée par les collectivités territoriales, ce qui ne va pas dans le sens de ce qui était annoncé tout à l’heure. Ces dernières effectuent à elles seules près de 73 % des investissements publics civils, nous l’avons souvent souligné, et elles maintiennent, grâce à leur effort, de nombreux emplois dans ces secteurs.
C’est donc un recul des investissements et, par là même, de la place du service public qui s’annonce pour l’avenir dans les territoires, au détriment de l’ensemble de nos concitoyens.
Vous nous opposez l’argument selon lequel vous avez maintenu le montant du FCTVA et celui des amendes forfaitaires, qui servent à financer les dépenses d’investissements. Certes, mais pour combien de temps ?
Depuis le début de cet après-midi, vous n’avez de cesse de nous répéter, monsieur le ministre, que le Gouvernement conservera la fonction de remboursement du FCTVA. Mais alors, pourquoi avoir soumis au Comité des finances locales des propositions de réforme qui, sauf erreur d’interprétation de ma part, vont à l’encontre de vos déclarations de ce soir ?
Vous proposiez, en particulier, trois pistes de travail ; je ne les développerai pas. Les première et deuxième options visaient à instaurer un taux différencié de concours du FCTVA en fonction soit des bénéficiaires, soit de la nature des dépenses. La troisième option, qualifiée « d’ambitieuse », prévoyait la création d’une dotation globale d’investissement.
Il est temps, monsieur le ministre, sans remettre en cause vos propos, de clarifier les choses et de rétablir la vérité dans les faits. Cette question est évidemment d’une importance capitale pour la suite. Les collectivités territoriales attendent d’être rassurées sur le cadre financier qui les attend, faute de quoi elles peuvent craindre – les éléments que j’indiquais tout à l’heure en sont la traduction– un véritable début d’asphyxie financière.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° I-188.
M. Bernard Vera. En proposant, comme pour les dotations de fonctionnement, de geler les dotations d’investissement, vous allez pénaliser nos collectivités et, surtout, ralentir les investissements publics dans notre pays.
Une étude réalisée par la Direction générale des collectivités locales, la DGCL, montre que, pour les villes de plus de 10 000 habitants, les dépenses d’équipement ont augmenté de 7 % en 2006 par rapport à 2005. Cette augmentation est due essentiellement aux normes toujours plus contraignantes en matière de sécurité et d’environnement, ainsi qu’à la hausse des prix du bâtiment et des travaux publics.
Connaissant en particulier la situation des entreprises de bâtiment et de travaux publics, vous allez participer à leur mise en difficulté et à celle de centaines de milliers d’emplois.
Si, en 2009, le FCTVA est substantiel, cela est dû non pas à un sursaut de générosité de votre part, mais au dynamisme en matière d’investissement des collectivités, qui ne perçoivent que deux ans après le remboursement partiel de cette taxe.
Vous nous demandez de corriger les mauvaises orientations de votre politique en réduisant les dépenses publiques de nos collectivités. Nous pensons, au contraire, qu’il est aujourd’hui utile de participer au développement de nos économies locales par l’investissement public à l’initiative de nos collectivités. C’est un outil efficace, indispensable, et qui a fait ses preuves.
Par cette mesure vous allez mener à la faillite de nombreuses petites entreprises et accroître le chômage de nos concitoyens. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. L'amendement n° I-123, présenté par M. Dubois et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
I. - Après le mot :
département
rédiger comme suit la fin du second alinéa du 1° du II de cet article :
évolue au même rythme que le taux prévisionnel d'évolution des prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement. » ;
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'indexation de la dotation départementale d'équipement des collèges sur les prix à la consommation des ménages est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-124, présenté par M. Dubois et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
I. - Après le mot :
région
rédiger comme suit la fin du second alinéa du 1° du III de cet article :
évolue au même rythme que le taux prévisionnel d'évolution des prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement. » ;
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'indexation de la dotation régionale d'équipement scolaire sur les prix à la consommation des ménages est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Les explications que j’ai données tout à l’heure pour les communes valent pour les départements et les régions.
J’ai retiré mon amendement sur les communes. Je retire donc ces deux amendements concernant les départements et les régions.
M. le président. Les amendements nos I-123 et I-124 sont retirés.
L'amendement n° I-220, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
V. - Après le dixième alinéa de l'article L. 2334-35 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le représentant de l'État refuse l'attribution de dotation globale d'équipement à un projet, sa décision doit être clairement motivée. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement est extrêmement simple : il vise à contraindre le représentant de l’État à motiver les refus d’attribution de DGE.
En effet, on assiste parfois, dans nos lointaines contrées, à des procédés quelque peu curieux où l’autorité préfectorale utilise le refus de dotation pour contraindre, par exemple, des communes à intégrer une intercommunalité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. S’agissant des amendements identiques nos I-61 et I-188, je pourrais réitérer les arguments que j’ai utilisés à l’article précédent ; le raisonnement serait strictement le même.
Il s’agit d’un exercice de répartition dans une enveloppe qui, si elle n’est plus normée, n’en est pas moins fermée.
Mme Nicole Bricq. On va l’appeler ainsi !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est un tout et on s’efforce de rendre les arbitrages les moins mauvais possibles, sans prétendre qu’ils soient les meilleurs possibles. Dans cet équilibre délicat, il ne faut pas déplacer une seule pièce. Sinon, l’harmonie de l’ensemble, toute relative, en pâtirait.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
L’amendement n° I-220 est intéressant, car il obligerait les préfets à motiver les décisions de refus d’inscrire un projet en tant que bénéficiaire de la dotation globale d’équipement des communes.
Je ne sais pas si cet amendement s’explique par une situation particulière,…
Mme Nathalie Goulet. C’est le cas !
M. Philippe Marini, rapporteur général. … mais un peu de transparence est en effet utile dans tout système public. De ce point de vue, ledit amendement nous semble mériter une certaine attention.
Mme Nathalie Goulet. Il ne coûte rien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est un grand mérite pour un amendement, par les temps qui courent !
On pourrait en demander le retrait pour inscription en seconde partie. Mais nous traitons de ce sujet ce soir ; c’est un amendement original. En tout cas, je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. En ce qui concerne les deux amendements de suppression n° I-61 et I-188, je partage le sentiment de M. le rapporteur général. Il s’agit d’un équilibre fragile : si vous y touchez, vous risquez de peser sur les autres variables d’ajustement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° I-220, j’y suis défavorable, car si l’on commence à motiver les refus de subventions, les collectivités vont devoir, elles aussi, motiver les leurs. Toutes les collectivités sont assaillies de demandes de subventions et il n’y a pas de droit à motivation. En adoptant cet amendement, vous ouvririez la voie à la motivation de tout refus de subvention.
La transparence est nécessaire, le préfet doit pouvoir s’exprimer ; peut-être faudrait-il envisager un dispositif permettant à la collectivité de savoir pourquoi une DGE lui est refusée.
Mais franchement – et je m’adresse là aux maires et aux présidents de conseils généraux –, si les collectivités doivent à chaque fois motiver de façon précise les refus de subvention à telle ou telle association, où va-t-on ? De plus, qui dit obligation de motivation, dit recours possible, donc jugement. Cette mesure me semble assez peu opérationnelle.
Même si l’idée peut paraître bonne au départ, elle me semble en réalité plus dangereuse qu’avantageuse.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Après avoir entendu le Gouvernement, je suis enclin à émettre un avis de sagesse plutôt négative. (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’appuierai la demande de notre collègue Nathalie Goulet. Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre, en matière de subventions, les collectivités mettent en place des règles, qu’elles appliquent et expliquent à leurs interlocuteurs.
En tant que vice-présidente de la communauté d’agglomération de Tours Plus chargée du secteur culturel et sportif, je puis vous dire que si je ne motivais pas toutes les décisions que nous prenons, les demandes de rendez-vous afflueraient. Être d’accord ou non avec la motivation avancée est un autre problème !
Il est normal qu’une collectivité ait connaissance des raisons pour lesquelles la DGE lui a été refusée ; le préfet doit pouvoir expliquer ses motivations. Sinon, on tomberait dans l’arbitraire ; du moins pouvons-nous le supposer. Nous ne pouvons l’accepter ! Nous avons tout intérêt à la transparence.
M. Bernard Vera. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot, pour explication de vote.
M. Claude Jeannerot. Je tiens à profiter de votre présence parmi nous, monsieur le ministre, pour vous demander des éclaircissements sur les choix du Gouvernement en matière de FCTVA.
J’aimerais savoir si les pistes envisagées dans le compte rendu du Comité des finances locales du 25 septembre 2008 ne sont que des hypothèses de travail. Je rappelle que les options présentées au Comité des finances locales étaient de trois ordres et reposaient sur une enveloppe « dont le montant serait préalablement fixé ».
Afin de rassurer l’ensemble des collectivités locales, pouvez-vous nous dire si le FCTVA restera en l’état, c'est-à-dire sera intégralement remboursable et totalement adossé sur les dépenses d’investissement des collectivités ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Cette note administrative, produite par la Direction générale des collectivités locales comme base de travail, a suscité une sorte d’excitation au sein du Comité des finances locales.
J’ai déjà répondu mille fois à cette question, mais je répète ici que cette note n’a pas de valeur particulière. Aujourd'hui, le Gouvernement n’a pas de projet sur le FCTVA. S’il devait en avoir un demain, celui-ci ferait l’objet d’une discussion, mais on n’en est pas là. Les élus n’ont donc pas à être inquiets en la matière. Il s’agit d’une note technique destinée à inciter le Comité des finances locales à discuter de ce sujet, ni plus ni moins !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. On ne peut pas assimiler la DGE, une dotation à laquelle certaines communes ou intercommunalités sont éligibles, à une simple subvention accordée à un club sportif ou à un club de tricot. Il est normal que la commune connaisse les raisons pour lesquelles la DGE lui a été refusée
On assiste, dans nos territoires, à un certain nombre de procédés inadmissibles. À cet égard, je citerai l’exemple de certaines communes qui n’obtiennent pas de permis de construire tant qu’elles n’ont pas de carte communale, mais je pourrais prendre d’autres exemples. Je connais des cas très précis concernant la DGE, et M. le rapporteur général a bien senti que cet amendement était directement inspiré du terrain.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-61 et I-188.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13 (supprimé)
M. le président. L’article 13 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de deux amendements tendant à rétablir cet article et faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° I-15, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans le huitième alinéa de l’article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales, les mots : « sur la période 2003-2008 » sont remplacés par les mots : « sur la période 2003-2010 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le présent amendement vise à rétablir dans sa rédaction initiale l'article 13, qui a été malencontreusement supprimé par l'Assemblée nationale.
Cet article tendait à proroger jusqu'en 2010 le dispositif en vigueur permettant aux collectivités territoriales de bénéficier du FCTVA au titre des dépenses d'investissement qu'elles réalisent pour couvrir leur territoire par des réseaux de téléphonie mobile.
La dérogation, qui date de 2003, avait pour objet de favoriser la couverture des 3 072 communes alors identifiées en « zone blanche », c'est-à-dire sans aucun réseau de téléphonie mobile. Elle a été prorogée plusieurs fois, avec l’avis favorable de la commission des finances
Le nombre de sites qui restent à couvrir est aujourd'hui évalué à 236, ce qui correspond à moins de 700 communes. Cette disposition a donc montré son efficacité et tend à répondre à un objectif d'intérêt général en matière d'aménagement du territoire. De plus, son coût, de l’ordre de 4 millions d’euros, est faible, monsieur le ministre, comparé à l’enveloppe prévisionnelle du FCTVA d’u montant de 5 855 millions d'euros.
Par cohérence avec les positions antérieures de la commission, il vous est proposé de rétablir l'article 13 dans sa rédaction initiale.
M. le président. Le sous-amendement n° I-229, présenté par M. de Montgolfier, est ainsi libellé :
Compléter l'amendement n° I-15 par deux paragraphes ainsi rédigés :
II. - Le même alinéa est complété par les mots : « et d'accès à Internet ».
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle prévue aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
M. Albéric de Montgolfier. Ce sous-amendement vise tout simplement à étendre le régime de l’éligibilité au FCTVA à l’internet à haut débit.
M. le rapporteur général vient à l’instant de rappeler que la commission des finances s’est montrée très favorable à la prorogation de deux années du régime dérogatoire d’éligibilité au FCTVA pour la téléphonie mobile. Dans le souci de soutenir à la fois l’investissement et les efforts que consentent les collectivités en matière d’internet à haut débit, on pourrait tout à fait étendre ce régime à l’internet à haut débit, car des besoins importants existent dans ce domaine.
Si je me réfère à votre rapport, monsieur le rapporteur général, je puis ajouter que cette mesure n’entraîne pas un coût supplémentaire pour l’État, puisqu’elle devrait être compensée par la réduction d’autres dotations accordées aux collectivités territoriales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle habileté !
M. le président. L'amendement n° I-189, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – À la fin de la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales, le taux : « 15,482 % » est remplacé par le taux : « 16,388 % ».
II. - La perte de recettes pour l'État découlant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Le FCTVA a été créé pour compenser, en partie, la TVA supportée par les collectivités locales sur leurs investissements. Son remboursement n’est pas total, alors que les collectivités locales assument, on le sait, les deux tiers des investissements publics. Aujourd'hui, elles sont contraintes de freiner leurs efforts, pourtant essentiels aux habitants, et devront malheureusement réduire plus encore à l’avenir leurs investissements vu les taux d’intérêt auxquels elles peuvent aujourd'hui emprunter.
L’an dernier, la croissance des dépenses de fonctionnement a été moindre que l’année précédente, alors que celle des dépenses d’investissement n’a été que de 7,1 %, contre 8,3 % en 2005. L’autofinancement, qui augmente pourtant, ne suffit plus à financer l’investissement, d’où un recours plus important à l’emprunt. Mais, ce faisant, les collectivités hypothèquent leurs investissements à venir, alors que des centaines de milliers d’emplois dans le secteur privé et dans le secteur associatif sont maintenues grâce à leur intervention.
La capacité de dépense des collectivités s’érode, ce qui est dommageable si l’on veut vraiment que celles-ci participent à la croissance et au redressement de la situation économique du pays. Elles doivent donc être en capacité d’investir. Connaissant le manque à gagner déjà induit par le plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée, on mesure sans mal l’impact de la mesure sur leur capacité d’investissement.
Nous proposons donc de revenir à une politique visant à soutenir les investissements des collectivités, en portant à 16,388 % le taux du FCTVA.
Je voudrais profiter de cette occasion pour dire à M. le ministre que la note relative aux pistes de réforme envisagées pour répondre à une demande ministérielle, qui a été remise aux membres Comité des finances locales, n’a pas particulièrement excité ceux-ci !
Mme la ministre a rappelé cet après-midi qu’elle souhaitait une meilleure cible des investissements de l’État, ce qui fait référence à l’une des pistes envisagées dans le cadre du FCTVA. Certes, ce fonds est bien maintenu cette année pour les collectivités territoriales, mais il ne l’est que pour cette année !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° I-229, mais elle a abordé cette proposition dans un esprit tout à fait positif, qui devrait conduire, au minimum, à une sagesse assez favorable.
En revanche, l’amendement n° I-189 est coûteux et il modifie les règles du jeu, alors que le FCTVA est maintenu dans son intégralité. On ne porte nullement atteinte à son fonctionnement.
Ma chère collègue, quelle imagination ! Vous demandez que le taux de compensation forfaitaire soit porté à 16,388 %. Mais pourquoi pas 18,415 % ou je ne sais quel autre taux ?
Mme Marie-France Beaufils. C’est le taux normal !
M. Philippe Marini, rapporteur général. De plus, il faudrait compenser cette mesure d’un coût de 340 millions d’euros par une diminution d’autres variables d’ajustement, ce qui constituerait un lourd préjudice pour nombre de collectivités.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission ne peut pas être favorable à l’amendement n° I-189.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Tout en comprenant bien la logique qui sous-tend le sous-amendement n° I-229, le Gouvernement n’y est pas favorable.
Certes, il y a bien un lien avec la téléphonie mobile et on a besoin de l’internet à haut débit. Cependant, plus nous étendrons le domaine, déjà vaste, de la compensation de la TVA, plus sera réduite la place dévolue au reste. Le FCTVA augmente déjà, cette année, de 660 millions d’euros.
Il s’agit ici d’investissements d’opérateurs, et non de travaux réalisés par les collectivités elles-mêmes.
Mon sentiment est donc le suivant : même si nous pouvons continuer d’en discuter pour parvenir à un texte clair, je préférerais, compte tenu des explications données, que vous retiriez votre sous-amendement, monsieur de Montgolfier. Peut-être pourrions-nous ensuite examiner plus attentivement ce qui pourrait être fait en matière d’extension de réseaux, sachant que l’État contribue à celle-ci par d’autres moyens.
M. le président. Monsieur de Montgolfier, le sous-amendement est-il maintenu ?
M. Albéric de Montgolfier. C’est un dispositif temporaire, avec une prorogation de deux ans. Son coût est faible et théoriquement neutre pour les finances publiques.
Cela dit, il s’agit des investissements non pas des opérateurs, mais des collectivités là où il n’y a pas d’opérateurs, pour le compte, effectivement, d’opérateurs.
Si un dispositif meilleur que le mien est proposé, je retire mon sous-amendement…
M. le président. Le sous-amendement n° I-229 est retiré.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je le reprends, monsieur le président !
M. le président. Il s’agit donc du sous-amendement n° I-229 rectifié !
Veuillez poursuivre, monsieur le président.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est un bon sous-amendement d’aménagement du territoire ! Sont concernées les zones privées d’accès à l’ADSL en général. Il y a là une forme de fracture numérique, contre laquelle le Gouvernement entend lutter.
Il est clair que les opérateurs n’interviennent pas dans les endroits où la densité de population est trop faible et où les contraintes imposées par le relief rendent difficile l’accès au réseau internet à débit satisfaisant, c’est-à-dire à l’ADSL. Les collectivités territoriales sont donc obligées de se substituer aux opérateurs pour assurer le service public.
Ce n’est pas tout à fait neutre pour le budget de l’État, mais ce type d’initiatives déclenchera des travaux qui n’auraient peut-être pas été réalisés. En outre, ce sous-amendement est gagé.
Je souhaiterais que le Sénat puisse se prononcer sur ce sous-amendement et c’est pourquoi je le reprends.
M. Albéric de Montgolfier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. Tout en approuvant à la fois les propos du président de la commission des finances et le sous-amendement d’Albéric de Montgolfier, je voudrais poser une question à M. le ministre.
Tout à l’heure, vous avez déclaré, monsieur le ministre, que les équipements n’étaient pas directement réalisés par les collectivités locales. Or tout l’intérêt du sous-amendement qui a suscité l’intervention du président de la commission réside dans le fait qu’il donne à penser que les collectivités locales peuvent effectuer elles-mêmes ces équipements.
Pour ma part, je rencontre un problème que connaissent peut-être d’autres élus. Bien que maire d’une ville de 20 000 habitants à vingt kilomètres de Paris, je ne suis pas en mesure d’offrir aux habitants de l’internet à haut-débit. Voilà plusieurs années que je me bats, et je n’ai pas le droit de faire des travaux. L’autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, interdit aux collectivités locales d’intervenir.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Que fait le conseil général ?
M. Jean-Jacques Jégou. Pour l’instant, il ne fait rien !
Je souhaite que M. le ministre nous précise, à l’occasion de l’examen de ce sous-amendement, si les collectivités locales peuvent véritablement intervenir à la place des opérateurs.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je voudrais soutenir l’amendement et le sous-amendement et rappeler à M. le rapporteur général que nous avons longuement débattu cet été, à l’occasion de l’examen de la loi de modernisation de l’économie, de la question des zones blanches, des zones vertes et des aides. Nous avions adopté un excellent amendement de notre collègue Philippe Leroy,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je l’avais soutenu !
Mme Nathalie Goulet. ...qui a été supprimé à la suite d’une seconde délibération à deux heures et demie du matin.
Non seulement je voterai volontiers l’amendement et le sous-amendement, mais je voudrais également rappeler que l’entreprise France Telecom est soumise, en l’espèce, à une obligation de couverture des quelque 400 ou 600 communes qui se trouvent en zone blanche ; il faudrait la presser de remplir son obligation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Je souhaite simplement préciser que j’ai déposé un amendement qui a le même objet que le sous-amendement repris par le président Jean Arthuis et dont l’examen interviendra plus tard : il s’agit de défendre les communes les plus éloignées, essentiellement les communes rurales, qui n’intéressent pas les opérateurs. Ceux-ci sollicitent donc l’aide des collectivités pour financer les travaux d’investissement.
Il est logique que ces collectivités puissent bénéficier du FCTVA au titre de la part des investissements qu’elles réalisent, ces investissements étant tout aussi nécessaires pour ces territoires que pour d’autres.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Ce sous-amendement est très intéressant.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quel succès !
M. Gérard Miquel. Il démontre, monsieur le ministre, la différence qui existe entre les collectivités. Sur le territoire de certaines communes, les opérateurs interviennent sans demander quoi que ce soit, car la densité de population leur garantit la rentabilité de leurs investissements. Des communes beaucoup plus démunies doivent investir si elles veulent que leurs habitants puissent bénéficier, dans des conditions tarifaires identiques, des mêmes services que les habitants des grandes agglomérations.
S’agissant de l’internet à très haut débit, en effet, les conseils généraux interviennent : j’ai moi-même réalisé certains travaux dans ce domaine, aux frais des contribuables de mon département. Il est normal de récupérer la TVA sur de tels investissements.
Je soutiens donc ce sous-amendement et je le voterai.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je souhaite apporter une précision.
En fait, le sous-amendement est déjà satisfait. Soit vous passez par le FCTVA, cas de figure relativement classique, soit vous vous trouvez dans le cadre d’une activité industrielle et commerciale qui est assujettie à la TVA ; c’est le cas, par exemple, d’internet. Si vous faites réaliser des travaux et mettez des services à disposition, cette activité donne accès à la récupération directe de la TVA, puisque la prestation est facturée.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous devons effectivement distinguer deux cas de figure. Dans certains cas, la collectivité publique investit et concède l’utilisation des équipements. Elle est alors assujettie à la TVA et il n’y a pas de difficulté.
Dans d’autres cas, le département peut investir directement, sans espérer le moindre retour sur investissement de la part des opérateurs : tel est notamment le cas des nœuds de raccordement des abonnés en zones d’ombre, ou NRA-ZO.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’était précisément l’objet de l’amendement « Leroy » !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il n’y a alors pas de mise à disposition rémunérée ; c’est la prise en charge d’un équipement sans contrepartie. Il n’y a donc pas d’assujettissement à la TVA, ni de possibilité de bénéficier du FCTVA. La collectivité territoriale lance un appel d’offres pour un marché. Des intervenants mettent en place les équipements. La collectivité ne peut bénéficier du FCTVA, puisque l’équipement est mis à la disposition d’un tiers.
C’est pourquoi le sous-amendement de M. de Montgolfier me paraît très opportun.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Vial. Monsieur le ministre, j’approuve une partie de vos observations. Cependant, trois cas doivent être distingués.
Soit les équipements sont réalisés par les opérateurs : nous sommes alors dans le droit commun et la TVA est récupérée au titre du droit commun.
Soit la collectivité réalise un équipement que personne d’autre ne veut faire, même pas un opérateur, et le met à la disposition d’un opérateur par sous-location : nous retombons alors dans le droit commun.
Dans le cas des NRA-ZO ou d’autres bouclages qu’aucun opérateur ne veut réaliser et que la collectivité prend en charge, nous avons affaire à un investissement public : si nous ne permettons pas à la collectivité de récupérer la TVA, elle s’en trouve privée pour une opération dont elle supporte pourtant intégralement le coût. Au moins dans ce cas-là, nous devons permettre la récupération de la TVA.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Nous nous trouvons dans une situation assez particulière.
Je me souviens du débat qui a eu lieu voilà quelques années à propos de la transformation de France Télécom et de La Poste : ces questions avaient été abordées ! La mise en place d’opérateurs qui se font concurrence sur le territoire conduit en effet au délaissement des parties les moins rentables.
Nous voyons aujourd’hui les conséquences de la disparition de l’entreprise publique : auparavant, les secteurs rentables permettaient de financer les secteurs non rentables.
Madame Goulet a évoqué tout à l’heure des obligations de France Télécom.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Pas forcément de France Télécom !
Mme Marie-France Beaufils. Quelle sont ces obligations ? Je pose volontairement la question, même si je dispose de quelques éléments de réponse. J’aimerais également savoir quelles obligations pèsent sur les autres opérateurs.
Lorsqu’une collectivité finance des réalisations, ce sont les opérateurs qui en tirent profit grâce aux abonnements et aux consommations. J’aimerais que le Gouvernement précise dans quelle mesure il peut formuler des exigences en la matière.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Dans le cas qui nous occupe, aucun opérateur n’est visé a priori. La collectivité publique qui lance un appel d’offres ne peut pas présager l’attributaire du marché.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° I-229 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’article 13 est rétabli dans la rédaction proposé et l'amendement n° I-189 n'a plus d'objet.
Articles additionnels après l'article 13
M. le président. L'amendement n° I-68, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le huitième alinéa de l'article L.1615-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient des attributions du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre de leurs dépenses d'investissement réalisées sur la période 2008-2012, sous maîtrise d'ouvrage publique, en matière d'aménagement numérique sur leurs territoires dans le cadre du plan de développement de l'économie numérique. »
II. - Les conséquences financières pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° I-68 est retiré.
L'amendement n° I-27, présenté par MM. Doublet, Laurent, Belot, Bailly, Bécot, Bizet, Braye, Cazalet, César, Dulait et Grignon, Mme Lamure, MM. Houel et Poniatowski, Mmes Henneron et Hummel et MM. Huré, Vasselle et Dufaut, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 121-7 du code de l'urbanisme, après les mots : « la révision de leurs documents d'urbanisme », sont insérés les mots : «, ainsi que pour la numérisation du cadastre, ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État de l'élargissement de l'éligibilité au fonds de compensation de la TVA est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard Bailly.
M. Gérard Bailly. Le présent amendement vise à rendre éligibles au Fonds de compensation pour la TVA les dépenses engagées par les collectivités territoriales dans le cadre des opérations de numérisation du cadastre.
Ces dépenses sont actuellement exclues du dispositif mis en place par la loi urbanisme et habitat du 2 juillet 2003, qui dispose que seules sont éligibles au FCTVA « les dépenses exposées par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale pour les études, l'élaboration, la modification et la révision de leurs documents d'urbanisme ».
Les dépenses éligibles au FCTVA doivent en principe être destinées à accroître le patrimoine de la collectivité, comme le précisent les articles L. 1615-1 et R. 1615-1 du code général des collectivités territoriales.
Certes, l'État est le seul titulaire des droits de propriété intellectuelle relatifs à des données cadastrales ; néanmoins, ce sont bien les collectivités territoriales qui engagent des dépenses en vue de la numérisation du cadastre, dont l'État bénéficie également in fine.
La question de l'éligibilité au FCTVA des dépenses liées à la numérisation du cadastre semble par ailleurs donner lieu à des interprétations divergentes selon les départements. Ainsi, certaines collectivités ont bénéficié d'un remboursement ad hoc du FCTVA, en inscrivant les dépenses de numérisation du cadastre en tant que dépenses d'investissement, alors que les dépenses effectuées au même titre par d'autres collectivités ont été exclues du bénéfice du fonds.
Le présent amendement, qui a été cosigné par un grand nombre de nos collègues, vise à clarifier la situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission rappelle que les dépenses exposées par les collectivités locales sont bien éligibles au FCTVA s’il s’agit d’élaborer, de modifier ou de réviser des documents d’urbanisme.
Curieusement, quand une collectivité réalise une dépense pour le compte de l’État, qui sera le propriétaire du cadastre, elle est moins bien traitée que si elle élabore ses propres documents d’urbanisme.
Cela est d’autant plus paradoxal qu’il semblerait que les interprétations faites sur cette question ne soient pas forcément les mêmes d’un département à l’autre. Il faudrait donc fixer la doctrine dans ce domaine.
Notre collègue Michel Doublet, qui s’intéresse à ce sujet depuis de nombreuses années, notamment dans son département de Seine-Maritime, était tout à fait fondé à déposer un tel amendement, qui a été accueilli assez favorablement par la commission des finances.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Pour ma part, je pense que, à force d’étendre le champ des dépenses éligibles au FCTVA, on finit par n’y plus comprendre grand-chose ! Les maires et les comptables publics ont de plus en plus de mal à s’y retrouver…
Cela étant, je comprends bien le raisonnement suivi par M. le rapporteur et les auteurs de l’amendement : il est nécessaire de numériser les documents d’urbanisme, ce que l’État ne fait pas toujours, même si le cadastre est plutôt bien conçu.
Sur cette question, je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée, tout en considérant que le fait d’étendre, au fil du temps et des amendements, le champ de l’éligibilité au FCTVA n’est pas une bonne démarche. Il vaudrait mieux étudier le problème au fond, d’une manière plus rationnelle. En tout état de cause, je ne lève pas le gage.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 13.
Article 14
Dans le premier alinéa de l’article L. 3334-16-2 du code général des collectivités territoriales, ainsi que dans les 1°, 2° et 3° du I du même article, le mot et l’année : « et 2008 » sont remplacés par les années : «, 2008 et 2009 ».
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l'article.
M. Yves Daudigny. L’article 14 du projet de loi de finances pour 2009 prévoit de reconduire pour un an le Fonds de mobilisation départemental pour l’insertion, le FMDI, dont l’existence devait initialement couvrir la période 2006-2008.
Ce fonds, créé sur l’initiative de notre commission des finances en 2005, était destiné à récompenser les départements les plus « méritants » en matière d’insertion, au regard de la proportion de personnes retournant à l’emploi et du nombre de projets innovants présentés.
Ce fonds n’a pas été mis en place en 2006, mais il a été utilisé, cette même année, sur décision prise par le Premier ministre de l’époque – elle fut annoncée, comme le relève M. le rapporteur général, à l’issue d’une réunion avec l’Assemblée des départements de France –, pour compléter la compensation du transfert du RMI. Il fut doté de 500 millions d’euros.
Monsieur le ministre, cet effort financier doit être apprécié, mais à sa juste valeur, c’est-à-dire dans le contexte de sous-compensation des compétences transférées par l’État aux départements et de forte contrainte s’exerçant sur les recettes des collectivités locales, dont témoignent nos discussions depuis plusieurs heures.
À la lumière de ces réalités, ce fonds apparaît de nouveau comme une mesure provisoire et insuffisante, voire comme un leurre pour les collectivités, qui récupéreront par ce biais ce qui leur est retiré par ailleurs.
En ce qui concerne le transfert du RMI, le décalage entre le montant de la compensation et les charges que supportent les départements à ce titre s’est révélé d’emblée. Il n’a pas été soldé par l’abondement exceptionnel de plus de 450 millions d’euros inscrit dans la loi de finances rectificative pour 2005, ni par l’affectation, décidée par la loi de finances rectificative de 2006, de deux des trois parts du FMDI, soit 350 millions d’euros, à titre de compensation et de péréquation.
Ce décalage représente aujourd’hui un « trou » financier de plus de 2 milliards d’euros pour les départements. Pour un département moyen comme l’Aisne, qui compte 535 000 habitants, l’écart a été de plus de 7 millions d’euros en 2006 et en 2007. Depuis 2004, c’est une charge de plus de 22 millions d’euros cumulés qui a ainsi été transférée au contribuable départemental !
Last but not least, le FMDI, bien qu’ayant totalement changé de nature, se trouve désormais inclus dans l’enveloppe qui est non plus « normée » mais « fermée », terme qui exprime d’ailleurs mieux les choses. Les 500 millions d’euros de ce fonds sont donc gelés, bien qu’il joue également un rôle péréquateur – annoncé comme prioritaire par le Gouvernement ! – et vienne nécessairement se fondre dans le périmètre contraint des concours de l’État aux collectivités locales, au détriment d’autres dotations.
Le Gouvernement se félicite de respecter strictement ses obligations légales et constitutionnelles de compensation : les réajustements exceptionnels auxquels il a lui-même procédé confirment, si besoin était, que ce sont les règles mêmes de la compensation financière qui doivent impérativement être revues.
Le discours alibi sur la « responsabilisation » des acteurs locaux n’est pas non plus acceptable, qui vise à rendre les départements responsables du déficit résultant de cette sous-compensation. Sous couvert d’un tel discours, le Gouvernement se décharge ainsi de sa propre responsabilité.
Pour 2009, la reconduction à l’identique des montants du FMDI aura au mieux l’effet d’une rustine. Bien que je n’aime guère ce mot, il est tout à fait parlant : il s’agit d’un bricolage de court terme, et non pas d’une solution pérenne.
Alors que la suppression des départements ne semble plus être aujourd’hui un objectif affiché, entend-on charger la barque pour qu’elle coule d’elle-même ? En toute hypothèse, la question de la répartition entre solidarité nationale et solidarité territoriale pour le financement des grandes allocations sociales demeure entière.
M. le président. L'amendement n° I-190, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Après le premier alinéa de l'article L. 3334-16-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, il est doté de 750 millions d'euros. ».
II. - La perte de recettes pour l'État découlant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous le savons tous, la crise que nous connaissons va amplifier la pauvreté dans notre pays, comme le présage d’ailleurs le dernier rapport de la Croix-Rouge. Des fermetures d’usines et l’éviction de nombreux intérimaires vont venir gonfler les statistiques du RMI.
Les départements vont donc être assaillis de demandes d’aide et les dépenses sociales vont bien sûr augmenter. Voilà quelques jours, un article des Échos indiquait ainsi que « les conséquences de la crise économique font apparaître de nouveaux publics touchés par la précarité et accentuent les difficultés anciennes ».
Le même constat est dressé par le Secours populaire et par Emmaüs France, dont le directeur général tenait les propos suivants dans l’article précité : « Il y a une aggravation depuis quelques semaines, c’est vrai, mais dès le début de l’année 2008, sous l’effet de l’augmentation des prix alimentaires, de l’énergie et des loyers, la situation s’est nettement détériorée. »
Cette dure réalité vécue par nombre de nos concitoyens, qui n’imaginaient pas dériver socialement de la sorte, s’aggrave et s’étend à des couches sociales jusqu’ici épargnées. Aujourd’hui, 500 000 ménages connaissent des impayés de loyer supérieurs ou égaux à deux mois, soit un chiffre en augmentation de 96 % sur les quatre dernières années.
Cette situation délicate fait craindre aux associations des expulsions nombreuses en avril 2009, au terme de la trêve hivernale. À cet égard, d’ailleurs, le Gouvernement doit prendre l’engagement qu’il n’y aura pas d’expulsions au printemps.
« Il y a un bouclier fiscal, un bouclier pour les banques, nous voulons un bouclier pour les pauvres », conclut le délégué général d’Emmaüs France. Je crois que nous pouvons l’écouter !
Par cet amendement, nous souhaitons bien sûr une meilleure prise en compte, au titre de la compensation, des dépenses liées au RMI, en particulier celles qui sont relatives à l’insertion. Cette compensation doit être intégrale et correspondre aux dépenses réelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Même si nous comprenons les motivations qui ont inspiré les auteurs de l’amendement, ceux-ci doivent avoir à l’esprit qu’une telle augmentation du FMDI entraînerait une baisse plus importante des variables d’ajustement, puisqu’il s’agit d’une enveloppe fermée !
Mme Nicole Bricq. C’est un sac ! (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. Recyclable !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne saurais aller aussi loin, mes chères collègues ! (Nouveaux sourires.)
Quoi qu’il en soit, c’est un exercice de répartition, et dans cette optique déshabiller Pierre pour habiller Paul n’est pas nécessairement une bonne solution.
Vous avez utilement rappelé, monsieur Daudigny, que la création du FMDI, voilà quelques années, résultait d’une initiative de la commission des finances du Sénat. Dans mon rapport écrit, je retrace l’historique de cette dotation, qui ne correspond d’ailleurs plus tout à fait à celle que nous avions imaginée, puisqu’il devait s’agir, dans une large mesure, de favoriser la mise en place, par les départements, de programmes innovants d’insertion, en particulier en misant, autant que possible, sur l’activation des dépenses d’assistance. Or le FMDI est maintenant davantage un fonds budgétaire permettant de compléter les différentes actions des départements dans le domaine de la politique sociale.
Je ne pense pas que son relèvement soit possible dans le contexte contraint des concours de l’État aux collectivités territoriales. Il paraît donc souhaitable, monsieur Foucaud, que vous retiriez cet amendement. À défaut, la commission se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Je comprends votre position, monsieur le rapporteur général. Cependant, vous-même avez soutenu des amendements dont le dispositif sollicitait l’enveloppe fermée.
Cela étant, nous voulons bien réfléchir avec vous pour tenter de trouver une solution. Assurément, les dépenses des départements vont augmenter et, très certainement, des amendements similaires au nôtre seront présentés l’an prochain, y compris par des collègues siégeant à droite de l’hémicycle…
Par exemple, le département de la Seine-Saint-Denis, qui dépense 23 millions d’euros chaque mois, soit 276 millions d’euros sur l’année, ne perçoit que 170 millions d’euros au titre de la TIPP et 27 millions d’euros au titre du fonds d’insertion, soit 197 millions d’euros au total. Le manque à gagner est donc de 79 millions d’euros, ce qui représente tout de même une somme importante pour un département.
Il convient de se pencher sur cette question pour tenter de la résoudre. En conséquence, si j’entends vos arguments, monsieur le rapporteur général, je maintiens néanmoins cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels avant l'article 15 ou après l'article 15
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-191, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le II de l'article 1641 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« II. - Pour frais d'assiette et de recouvrement, l'État perçoit 3% du montant des taxes visées au I, ainsi que de la taxe d'habitation due pour les locaux meublés affectés à l'habitation principale. Ce taux est réduit à 2 % pour les impositions perçues au profit des collectivités locales et de leurs groupements. »
II. - La perte de recettes pour l'État découlant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Depuis la loi du 30 juillet 1990 relative à la révision des valeurs locatives, l’État perçoit, au titre des frais d’émission des rôles, un pourcentage sur le montant des taxes foncière, d’habitation et professionnelle. Nous avons déjà eu l’occasion, tout à l’heure, de discuter de l’évolution de ces taux. Je n’y reviendrai donc pas.
Des interrogations subsistent néanmoins.
En 2009, ces droits représenteront 3,86 milliards d’euros de recettes pour le budget général, alors que l’examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques » montre que les coûts de fonctionnement des secteurs d’assiette de la direction générale des finances publiques s’élèveront, pour leur part, à environ 1,8 milliard d’euros.
Il faut observer que cette somme recouvre toutes les activités des secteurs d’assiette, qu’ils instruisent les rôles des impositions locales, ceux de l’impôt sur le revenu ou encore, depuis la réforme, ceux de la redevance audiovisuelle.
Cet écart avait déjà été mis en exergue, notamment, dans le rapport de l’an dernier de notre collègue Michel Mercier. Ce dernier rapport ayant déjà été évoqué plus tôt, je n’y reviendrai pas en détail.
J’aimerais néanmoins obtenir quelques éclaircissements sur les coûts de gestion. L’an dernier, j’avais relevé de fortes contradictions dans les informations qui nous avaient été communiquées à cet égard.
Ainsi, je n’arrive pas à comprendre, eu égard aux gains de productivité qui ont pu être réalisés dans les services fiscaux à la suite de la réduction significative des effectifs et des frais de fonctionnement, pourquoi les coûts de perception sont toujours aussi élevés. Comment expliquer une telle situation ?
Certes, l’article 1641 du code général des impôts ne fait pas de distinction entre dégrèvement législatif et dégrèvement ordinaire, ce qui vous permet de dire, monsieur le ministre, que le prélèvement en question pourrait servir à financer l’ensemble des dégrèvements. C’est là, à notre sens, une interprétation très large du dispositif, qui vous permet de récupérer chaque année 3,5 milliards d’euros.
J’aimerais mieux comprendre la raison de ce décalage entre prélèvement et coûts réels de perception. C’est pourquoi je tenais à maintenir cet amendement, votre intervention n’ayant pas permis, me semble-t-il, d’éclaircir la situation.
M. le président. L'amendement n° I-63, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase du II de l'article 1641 du code général des impôts, le taux : « 5,4 % » est remplacé par le taux : « 2,7 % » à compter du 1er janvier 2009.
II. - Dans la seconde phrase du même II, le taux : « 4,4 % » est remplacé par le taux : « 2,2 % » à compter du 1er janvier 2009.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à diminuer de moitié la contribution pour frais d'assiette et de recouvrement perçue par l'État pour la gestion de la fiscalité locale.
Je ne reprends pas l’argumentation qui a été développée en début de soirée par Gérard Miquel à propos du prélèvement concernant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Je rappelle simplement que notre collègue Michel Mercier avait estimé, dans le rapport d'information qu’il a rendu en 2007, que le gain réalisé par l’État sur le recouvrement des impôts locaux s’élevait, en 2006, à 1 milliard d'euros.
Il serait donc temps de réunir autour d’une table tous les partenaires et de revoir les taux actuellement appliqués. Ce serait un bon début pour essayer de restaurer la confiance, qui n’aurait jamais dû être rompue, entre l’État et les collectivités territoriales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les amendements nos I-191 et I-63, qui sont analogues, nous renvoient à une discussion sur les frais d’assiette et de recouvrement que nous avons en effet eue, plus tôt dans la soirée, à l’occasion de l’examen de l’amendement n° I-75, défendu par Gérard Miquel.
À travers ces amendements, Nicole Bricq et Marie-France Beaufils s’interrogent sur l’équité des relations entre l’État et les collectivités territoriales en la matière.
Vous vous êtes référées, mes chères collègues, au rapport d’information de Michel Mercier sur le compte d’avances aux collectivités territoriales, publié en 2007. Ce rapport faisait la somme de tout ce que l’État gagnait et payait dans ses relations de trésorerie avec les collectivités territoriales, et concluait à un solde net positif, pour l’État, d’environ 1 milliard d’euros par an.
Cependant, les dégrèvements, qui représentent 12 milliards d’euros et connaissent une très forte augmentation, notamment en raison du financement par l’État d’un volume significatif d’admissions en non-valeur, n’étaient pas pris en compte. Il est donc vraisemblablement possible de dégager de cette masse de 12 milliards d’euros de dégrèvements, auxquels s’ajoutent les admissions en non-valeur, une somme permettant de compenser le milliard d’euros de solde net positif en faveur de l’État que faisait apparaître le rapport de Michel Mercier. (Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste.)
Je n’ai pas de meilleure analyse à vous présenter, surtout à ce stade de notre discussion, mais si vous le voulez, nous pourrons approfondir ces investigations ultérieurement.
En tout état de cause, à l’heure actuelle, le coût des mesures présentées au travers de ces amendements, à savoir 1,5 milliard d’euros, est tout à fait insupportable pour les finances publiques. Nous ne pourrions donc qu’inviter le Sénat à les rejeter s’ils étaient maintenus.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je me suis déjà exprimé sur cette question. Je ne renouvellerai donc pas ma démonstration. Nous avons également tenté de fournir, dans le « jaune », les explications nécessaires sur ce sujet récurrent. Je serais donc reconnaissant aux auteurs des amendements de bien vouloir se référer à ce document,…
Mme Marie-France Beaufils. C’est bien ce que j’ai fait !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l’amendement n° I-191.
Mme Marie-France Beaufils. Dans mon intervention, j’ai fait référence aux documents relatifs à la mission « Gestion des finances publiques », où est précisé le coût de perception des taxes locales.
Je souhaiterais que l’on puisse établir de vraies comparaisons entre ce coût et le prélèvement opéré, et que l’on nous fournisse des éléments plus probants que ceux qui nous ont été livrés ce soir.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. M. Jouyet devant impérativement quitter le Sénat demain à douze heures, il souhaite que le débat sur la participation française au budget des Communautés européennes puisse commencer à dix heures, ce qui nous impose de lever maintenant la séance.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, serez-vous alors en mesure de prendre le relais, afin que nous puissions terminer la discussion des articles relatifs aux collectivités territoriales avant treize heures ? (M. le ministre acquiesce.)
Je vous en remercie, monsieur le ministre.
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
6
Dépôt d'une proposition de loi
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. Richard Yung, Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Claudine Lepage, Michèle André, MM. Robert Badinter, Didier Boulaud, Mmes Bernadette Bourzai, Christiane Demontès, MM. Bernard Frimat, Charles Gautier, Serge Lagauche, Jean-Marc Pastor, Bernard Piras, Mme Gisèle Printz, MM. Daniel Raoul, Daniel Reiner, Mme Patricia Schillinger, M. Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Tasca et les membres du groupe socialiste et apparentés, une proposition de loi tendant à permettre la reconnaissance des unions conclues dans un autre État de l’Union européenne par tous les couples quelle que soit leur orientation sexuelle.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 111, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
7
Dépôt d'un rapport
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
Le rapport sera imprimé sous le n° 112 et distribué.
8
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 26 novembre 2008, à dix heures, quinze heures et le soir :
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (n° 98, 2008 2009). Suite de l’examen des articles de la première partie - Conditions générales de l’équilibre financier (articles 15 à 34 et état A).
Rapport (n° 98, 2008-2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
- Examen de l’article 33 (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes).
M. Denis Badré, rapporteur spécial (rapport n° 99, tome II, fascicule 2 : Affaires européennes et article 33 : évaluation de la participation française au budget des Communautés européennes).
- Suite de l’examen des articles de la première partie.
- Examen de l’article d’équilibre 34 et état A et dans ce cadre :
- débat sur les effectifs de la fonction publique
- débat sur l’évolution de la dette de l’État.
Explications de vote.
Vote sur l’ensemble de la première partie.
En application de l’article 59, premier alinéa, du règlement, il sera procédé à un scrutin public ordinaire.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 26 novembre 2008, à une heure.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD