M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame la ministre, lorsque je relis – car il faut toujours essayer de revenir aux sources – le courrier que vous avait adressé le Président de la République le 1er août 2007, j’y trouve l’affirmation suivante : « L’accès aux œuvres de l’esprit passant aussi, de plus en plus, par la médiation audiovisuelle, […] la culture doit être davantage présente dans les programmes de télévision. »
Ainsi, pour promouvoir la culture à la télévision, le chef de l’État a décidé, seul ou presque, d’organiser dans la loi, ou du moins dans le projet encore en discussion à l’Assemblée nationale, l’appauvrissement de l’audiovisuel public et l’enrichissement des groupes audiovisuels privés.
Autrement dit, pour permettre à tous d’accéder par la télévision aux œuvres de l’esprit, le Président de la République a délibérément choisi de permettre à TF 1 et à M 6 de diffuser des « tunnels » de publicité encore plus longs qu’aujourd’hui, et même de pouvoir couper une deuxième fois la diffusion de leurs programmes, notamment cinématographiques, par de la réclame. C’est bon pour l’esprit…
Dans ce débat budgétaire qui précède la bataille que nous, sénateurs de l’opposition, conduirons avec détermination, à la suite de nos camarades députés, contre le projet de réforme de l’audiovisuel voulu par le Président de la République, nous devons à la vérité de rappeler que le sous-financement de France Télévisions date non pas du 8 janvier 2008, mais du retour de la droite au pouvoir, après l’élection présidentielle de 2002.
Ce n’est d’ailleurs pas moi qui le dis, mais le rapporteur pour avis des crédits de l’audiovisuel pour 2008.
Notre ancien collègue de Broissia constatait en effet, il y a tout juste un an, que « les taux de redevance en vigueur en métropole (116 euros) et dans les départements d’outre mer (74 euros) n’ont pas été modifiés depuis 2002 (à l’exception de l’ajustement – à la baisse – consécutif à la réforme du mode de perception en 2005), dépréciant ainsi, en euros constants, la valeur de la taxe ».
Il proposait en conséquence, par deux amendements approuvés unanimement, mes chers collègues, par la commission des affaires culturelles, d’une part, de « faire passer le taux de la redevance de 116 à 120 euros en métropole et de 74 à 78 euros dans les départements d’outre-mer afin de rattraper partiellement le retard accumulé au cours des années passées », et, d’autre part, d’« instaurer un mécanisme d’indexation de l’évolution de la redevance audiovisuelle sur l’indice d’évolution des prix afin de garantir aux organismes de l’audiovisuel une progression régulière et constante de leurs ressources ».
L’objet de ces deux dispositions, combattues par le Gouvernement qui obtint alors gain de cause, était de donner à la télévision publique les moyens de saisir les possibilités de développement que lui offre la révolution numérique et, dans le même temps, de répondre aux exigences éditoriales du contrat d’objectifs et de moyens, le COM, signé le 27 avril 2007.
Nous faisons volontiers nôtre la double ambition du COM : transformer France Télévisions en « média global » – la paternité de cette idée, figurant dans le COM, ne revient donc pas à la commission Copé – proposant une offre de programmes valorisant la spécificité du service public. Nous ne comprenons cependant pas comment France Télévisions pourra la poursuivre efficacement avec les moyens à sa disposition dans les trois années qui viennent.
Selon une communication d’octobre 2007 de la Cour des comptes à la commission des finances du Sénat, la bonne exécution des COM signés avec les organismes bénéficiaires de la redevance – France Télévisions, Radio France et Arte France – supposait, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation d’au moins 3,5 % des dotations à ces sociétés en 2008.
Qu’en sera-t-il réellement au 31 décembre prochain, madame la ministre, alors que les annonceurs fuient les antennes de France Télévisions depuis le mois de janvier dernier et que le produit de la redevance risque d’être inférieur aux prévisions en raison de la conjoncture économique ?
Pouvez-vous confirmer que, dans ce contexte, le groupe France Télévisions clôturera l’exercice 2008 sur un déficit de 160 millions d’euros, alors que l’exercice précédent avait été arrêté à l’équilibre ?
Trouvez-vous normal que, du fait de cette situation budgétaire très dégradée, le directeur de l’information de France 3 n’ait plus les moyens d’envoyer des reporters à l’étranger d’ici à la fin de l’année ?
Êtes-vous satisfaite de la perspective de voir les comptes du groupe public rester déficitaires d’environ 100 millions d’euros pour l’exercice 2009 ?
Savez-vous que la direction de France Télévisions estime que le retour à l’équilibre de l’exploitation du groupe n’est pas envisageable avant 2012 ? Cela ne correspond pas à vos exigences affirmées publiquement. Quelles sont donc les mesures envisagées ? La mise en œuvre d’un plan social sera-t-elle encouragée ? Attendrons-nous 2012 ? Nous attendons en tout cas vos réponses !
Et que répondez-vous, madame la ministre, à l’inquiétude des personnels, qu’ils soient journalistes, techniciens ou personnels administratifs, réduits par certains membres influents de la majorité, tel l’inénarrable député Lefebvre, au rôle de variable d’ajustement budgétaire dans la réorganisation annoncée ?
Enfin, avez-vous demandé aux Français ce qu’ils pensaient de la suppression de leurs deux journaux télévisés préférés, c’est-à-dire le 19/20 et Soir 3 ? Une telle suppression serait la conséquence logique de l’entrée en vigueur de la version actuelle du cahier des charges de France Télévisions, qui oublie de mentionner que France 3 a vocation à proposer de l’information nationale et internationale.
Avec sa réforme de l’audiovisuel, le Président de la République aura au moins tenu sa principale promesse électorale, celle d’incarner la rupture, mais il s’agit, en l’occurrence, de la rupture avec une certaine conception de la diversité culturelle et du pluralisme démocratique auxquels contribuait jusqu’alors de manière essentielle la télévision publique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au sein de l’audiovisuel extérieur, Radio France Internationale est certainement, actuellement, la station la plus en danger.
Certes, son audience est peut-être en recul, certains de ses coûts sont peut-être trop élevés, mais il faut se rappeler que RFI est la seule radio française qui diffuse une information internationale de qualité.
S’il est vrai que les audiences sont faibles en Pologne, en Allemagne, en Albanie ou en Russie, l’émotion provoquée dans ces pays par l’annonce de la suppression des émissions dans leur langue témoigne qu’elles ne sont pas pour autant négligeables. Les évolutions en cette matière doivent donc être prudentes, même si certaines sont nécessaires, je le reconnais.
Je voudrais parler un peu plus longuement de France 24. Nous avions stigmatisé, lors de la création de cette chaîne, l’attelage baroque formé de France Télévisions et de TF 1 pour la capitalisation de la nouvelle société : l’État détient 50 % des parts et finance l’intégralité de l’investissement et du fonctionnement ; TF 1 a obtenu les 50 % restants, contre 17 500 euros.
Depuis deux ans, le rôle de TF 1 a surtout consisté à bloquer la diffusion de France 24 en France, par exemple sur l’ADSL, de peur que sa filiale LCI ne pâtisse d’une telle concurrence. C’est pour cette raison que l’on ne peut pas regarder cette chaîne à Paris.
En contrepartie de la mise de fonds de 17 500 euros en 2006 – appréciez l’énormité du chiffre ! –, combien TF 1 demande-t-elle pour le rachat de ses parts en 2008 ? Je vous le donne en cent, je vous le donne en mille : 90 millions d’euros ! Oui, vous avez bien entendu !
On nous présente comme une victoire le fait d’avoir ramené à 2 millions d’euros ces prétentions. C’est exactement comme au souk : le marchand demande énormément, il baisse beaucoup son prix, il ajoute un cadeau, mais finalement le client paie encore trop cher. En l’occurrence, il y a effectivement un cadeau : à ces 2 millions d’euros, on ajoute 1,6 million d’euros par an pendant sept ans, soit un total de 11,2 millions d’euros, pour la fourniture d’images d’archives et – il est vrai que cela coûte plus cher – pour les images de sport.
Je trouve qu’un placement rapportant 11,2 millions d’euros en 2008 pour 17 500 euros investis en 2006, soit 750 fois la mise en deux ans, c’est tout de même un placement de rêve ! Ses bénéficiaires n’ont même pas eu besoin de passer par un paradis fiscal : il suffit d’avoir des amis bien choisis et, en définitive, c’est le contribuable qui paie…
Nous qui représentons le contribuable, nous dénonçons cette opération ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je me suis réjouie d’entendre certains intervenants qui soulignaient l’ampleur de la réforme actuellement menée dans l’ensemble de notre paysage médiatique. Je crois effectivement que l’on n’avait pas vu depuis longtemps un mouvement de cette portée et de cette ambition.
S’agissant d’abord de l’audiovisuel public, la réforme de France Télévisions est actuellement discutée à l’Assemblée nationale. Elle le sera bientôt – au début de l’année 2009 – à la Haute Assemblée.
Chacun connaît le sens profond de cette réforme, qui est animée par une ambition nouvelle pour les programmes, tendant à renforcer le service public. Les projets récemment annoncés par les dirigeants de France Télévisions montrent bien que nous allons résolument dans ce sens, avec davantage de fictions intéressantes, de films, de courts métrages et une plus grande place donnée à l’Europe. Je sais combien beaucoup d’entre vous sont attentifs à ce dernier point.
Bref, il s’agit d’une véritable ambition pour le service public, servie notamment par de nouveaux horaires marquant un réel découpage de la soirée en trois parties. L’offre sera donc encore plus riche.
Cela sera permis par la suppression partielle de la publicité, entre 20 heures et 6 heures du matin, qui sera compensée par un financement pérenne et dynamique. Ce point est bien sûr très important.
Notre télévision publique est très correctement financée si on la compare aux autres. En effet, son budget s’élève tout de même, au total, à 3 milliards d’euros, dont 2,3 milliards d’euros proviennent de la redevance, 350 millions d’euros de la publicité, qu’elle continuera naturellement à diffuser en journée ou dans le cadre des décrochages régionaux, et des parrainages, 450 millions d’euros étant en outre garantis par l’État à titre de compensation de la suppression partielle de la publicité.
Inscrite dans le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, cette compensation de 450 millions d’euros a également été votée par l’Assemblée nationale lors de son examen du projet de loi de finances pour 2009 et sera soumise ce soir, dans le même cadre, à la Haute Assemblée. En effet, il est important que la perte de recettes publicitaires puisse être compensée dès le début de l’année 2009.
Comme on le sait, cette compensation est assise sur deux taxes.
Une première taxe porte sur le chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunications. Son taux est de 0,9 %, ce qui représente un produit de 370 millions d’euros. Il s’agit d’un secteur en expansion, dont les bénéfices et le chiffre d’affaires sont tout à fait considérables, qui en outre produit et diffuse lui-même toujours davantage de programmes, tendance qui ne fera que s’accentuer.
Par ailleurs, un prélèvement de 3 % sera opéré sur les ressources publicitaires des chaînes de télévision. Compte tenu de la crise actuelle, une attention particulière est accordée aux modalités de ce prélèvement. Dans un contexte de crise du marché publicitaire, il paraît en effet raisonnable de prévoir un plancher, assorti d’une taxation spécifique des éventuels surplus de recettes liés aux transferts.
En tout état de cause, cette compensation de 450 millions d’euros est garantie par l’État. Ces crédits seront donc disponibles quoi qu’il arrive.
Cette réforme de la télévision publique est essentielle et porte, je le répète, une grande ambition.
J’ai senti, au travers de vos interventions, mesdames, messieurs les sénateurs, tout l’intérêt que vous portez à la réforme de l’audiovisuel extérieur de la France.
Le financement de l’audiovisuel extérieur était jusqu’à présent non pas médiocre, mais dispersé. Comme cela a été souligné, on avait empilé des structures sans mettre en place de synergies.
La création de la société holding « Audiovisuel extérieur de la France », en avril dernier, permettra de remédier à cette situation. Elle regroupera l’intégralité du capital de RFI et de celui de France 24, ainsi que 49 % du capital de TV 5 Monde, 17 % de ce dernier restant détenu par l’INA, Arte et France Télévisions, le solde, soit 34 %, appartenant à nos partenaires francophones.
Le total des crédits consacrés à l’audiovisuel extérieur, y compris la radio Médi 1, s’élève à 298,4 millions d’euros, dont 65 millions d’euros provenant de la redevance.
Ces crédits, dont le montant n’est pas négligeable, garantissent le versement à France 24 de la subvention de 91,7 millions d’euros prévue pour 2009, ainsi que le financement de certains de ses développements. Par ailleurs, TV 5 Monde pourra, grâce à ces mêmes crédits, financer son fonctionnement et mettre en œuvre les développements prévus par son plan stratégique pour 2009. Enfin, RFI pourra amorcer son redressement financier et engager sa modernisation.
J’ajoute que RFI est un média très intéressant, car il est vraiment présent partout, ce qui est encore loin d’être le cas de France 24.
La stratégie actuelle de RFI me paraît forte. Elle consiste à développer sa diffusion partout, notamment dans les zones à fort enjeu stratégique. RFI peut jouer un rôle très important, en particulier en Afrique.
Un petit nombre de rédactions en langues étrangères installées à Paris, six en tout, ont effectivement été fermées, des études ayant montré que leur audience était très faible.
En revanche, la volonté de RFI de se développer selon des supports divers – la radio, bien évidemment, mais également internet – est très marquée. Ainsi, RFI s’attache à accroître sa diffusion en Russie, en recourant non plus aux ondes courtes, qui sont de plus en plus difficiles à capter, mais plutôt à la FM et à internet.
Il est possible d’instaurer des synergies fortes entre les différentes structures. Par exemple, le souhait de France 24 de développer sa diffusion en langue arabe était difficile à satisfaire dans l’épure budgétaire actuelle, mais l’établissement de synergies avec RFI, qui est très présente dans le monde arabe, lui permettra d’atteindre cet objectif.
En ce qui concerne le cadre pluriannuel de financement, la diminution des crédits prévue pour 2010 et 2011 correspond précisément aux engagements pris par les dirigeants actuels de l’audiovisuel extérieur de mettre en place des synergies, qui devraient permettre des gains de productivité. Cela me semble aller dans le bon sens.
Bien entendu, la trajectoire pluriannuelle de financement de la société holding « Audiovisuel extérieur de la France » fera l’objet d’une négociation dans le cadre du futur contrat d’objectifs et de moyens. Des modifications pourront être apportées en fonction des besoins : la holding a été créée en avril dernier, elle va seulement commencer à exister, et des ajustements financiers interviendront nécessairement.
J’ai également été interrogée sur les évolutions de structures de France 24, qui avait deux actionnaires essentiels. Nous souhaitons que 100 % du capital soit détenu par la holding, ce qui suppose la sortie des actionnaires privés, notamment de TF 1.
Une banque d’affaires bien connue avait valorisé la chaîne à 90 millions d’euros, soit 45 millions d’euros pour chacun des deux actionnaires. Nous avons mené des discussions pour que la sortie de TF 1 du capital s’effectue contre 2 millions d’euros, ce qui demeure raisonnable si l’on considère que la valorisation actuelle de France 24 s’établit entre 18 millions et 20 millions d’euros.
Pour être en mesure d’assurer sa diffusion, France 24 devra en effet acheter des programmes, ceux d’Eurosport par exemple. Je ne pense pas que ce soit surprenant ou scandaleux.
Tous les éléments sont en place, à mon sens, pour permettre le développement de notre audiovisuel extérieur dans de bonnes conditions.
Monsieur Thiollière, le chantier de Radio France est effectivement complexe. Il s’agit, pour l’essentiel, de travaux de mise aux normes de sécurité, notamment d’opérations de désamiantage, dont il était impossible de se dispenser.
Ces travaux sont aussi l’occasion de moderniser les installations, d’offrir un cadre fonctionnel aux salariés et d’améliorer l’insertion du bâtiment dans la ville.
Ces travaux ont été prévus dans le contrat d’objectifs et de moyens pour la période 2006-2009. Les premiers appels d’offres ont été lancés en 2007. Les réponses n’ayant pas été très satisfaisantes, il a été nécessaire de relancer la procédure pour certaines catégories d’opérations, ce qui a été fait au printemps et à l’été de 2008. La présence d’amiante dans les bâtiments a rendu les choses encore plus complexes. La date de fin de chantier, initialement estimée à 2013, est aujourd’hui repoussée à 2015.
Pour autant, les travaux ont déjà commencé, notamment avec la construction du parking souterrain. Certains travaux de réhabilitation devraient également débuter prochainement.
Le coût global du chantier, qui était initialement, en 2006, de 241 millions d’euros au titre de l’investissement et de 93 millions d’euros au titre du fonctionnement, doit aujourd’hui être revu à la hausse. Nous nous efforçons de faire baisser les coûts au regard de ce qui ressortait des premiers appels d’offres. Nous attendons d’avoir une vision globale, mais le coût sera de toute façon élevé.
J’évoquerai maintenant l’avenir du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale. Les crédits de ce fonds figuraient dans le compte d’affectation spéciale par lequel transitaient également ceux du Centre national de la cinématographie. Le produit des taxes finançant le CNC devant désormais lui être directement versé, il a été décidé de rebudgétiser le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, ce qui a le grand avantage de le soustraire aux aléas du marché publicitaire. De plus, ses crédits augmenteront de 6 %, passant de 25 millions à 26 millions d’euros.
En ce qui concerne le soutien au passage à la diffusion numérique, les radios associatives ont montré leur volonté d’être présentes dans le paysage radiophonique numérique en répondant massivement à l’appel à candidatures lancé par le CSA. Le Gouvernement portera une attention particulière à ce dossier. Un nouveau système de soutien, au sein du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, est en cours d’élaboration, sur la base des travaux conduits avec les radios associatives pour évaluer les coûts auxquels elles vont devoir faire face. L’augmentation des crédits du fonds permettra justement la mise en œuvre de ce nouveau dispositif de soutien.
La presse traverse elle aussi une période de profondes mutations. De nombreuses réflexions sont menées afin de déterminer quelles réformes pourraient être engagées.
Les aides de l’État à la presse sont sans doute, en proportion, les plus élevées au monde. Le projet de loi de finances pour 2009 prévoit de doter la presse écrite de 282,7 millions d’euros. Il s’agit d’un effort marqué.
Afin de permettre aux bénéficiaires des aides publiques de disposer d’une meilleure visibilité économique pour mener à bien les changements nécessaires, le Gouvernement accompagnera en priorité les efforts de modernisation de la presse pour consolider le soutien traditionnel de l’État à la diffusion et au pluralisme.
En dépit des aides qui lui sont apportées, la presse écrite ne se porte pas bien. Elle est manifestement en crise, d’où la décision de mettre en place des états généraux de la presse. Il a été choisi de confier leur animation à des personnalités telles que Bruno Frappat, Arnaud de Puyfontaine, Bruno Patino et François Dufour. Des groupes de travail ont été constitués sur des thèmes précis, ce qui permet des échanges très denses, auxquels participent des parlementaires, notamment Mme Morin-Desailly. Sur les cent cinquante personnes prenant part à ces groupes de travail, une cinquantaine possèdent une carte de presse.
Un Livre vert rassemblera les différentes préconisations issues de ces états généraux. Des dissonances pourront apparaître, le consensus n’étant pas une nécessité. Ce Livre vert sera rendu public fin décembre. Le mois de janvier sera ensuite consacré à la réflexion, et les apports du Parlement seront précieux pour définir ce qu’il conviendra de faire.
Les préconisations comporteront sans doute des éléments d’ordre interprofessionnel, que l’État pourra encadrer. D’autres dispositions relèveront du règlement, voire de la loi. Je pense notamment à la question très sensible des droits d’auteur. Il faudra probablement donner un fondement législatif aux accords, pour l’heure d’une grande fragilité juridique, qui sont conclus sur ce sujet dans de nombreuses entreprises de presse.
Le rayonnement de l’Agence France-Presse est grand, mais elle est, comme ses concurrents, confrontée à de nombreux défis. Elle doit notamment procéder à une modernisation radicale de son outil de production technique.
Ainsi, le projet 4 XML, système de production multimédia intégré, lui permettra de mieux répondre aux nouvelles attentes de ses clients et de conquérir de nouveaux marchés.
L’État accompagnera bien sûr l’Agence dans cette mutation en lui accordant les moyens financiers nécessaires à son développement. Après la mise en œuvre, de 2003 à 2007, d’un premier contrat d’objectifs et de moyens qui avait permis d’apurer une situation financière dégradée, un nouveau COM liera l’État et l’AFP pour la période 2009-2013.
L’État s’engage sur une évolution régulière de ses abonnements pour l’ensemble de la période. Ainsi, le taux d’augmentation sera d’au moins 1,8 % pour 2009, 2010 et 2011. De plus, une aide spécifique à l’investissement contribuera au financement du projet 4 XML : 20 millions d’euros devraient lui être consacrés en cinq ans, dont 4 millions en 2009. Ces versements prendront la forme d’une dotation en fonds propres.
En contrepartie de cet effort financier, l’AFP s’est engagée à accroître ses recettes commerciales de 4,75 % en moyenne par an. Pour ce faire, elle s’appuiera notamment sur la croissance de deux marchés stratégiques : le multimédia et les zones géographiques à fort potentiel de croissance. Par ailleurs, l’Agence veillera au maintien de son équilibre financier. Son résultat devrait ainsi atteindre 8,4 millions d’euros au terme du COM.
Bien sûr, nous n’avons nullement l’intention de privatiser l’AFP, à laquelle nous sommes tous très attachés.
La redevance audiovisuelle a été évoquée. Il est vrai qu’elle n’a pas évolué ces dernières années, je le regrette, et je sais que je ne suis pas la seule ici. La situation de l’audiovisuel public en eût été meilleure aujourd’hui puisque la redevance tangenterait 130 euros. Il vous sera donc proposé de procéder à son indexation pour qu’au moins elle cesse de baisser. En cette période difficile, il ne faut pas peser sur le pouvoir d’achat des Français.
Madame Morin-Desailly, je comprends tout à fait votre idée de taxer les nouveaux supports et, par exemple, les ordinateurs. Cependant, je ne suis pas très convaincue, parce que les personnes qui ont seulement un ordinateur sont souvent des étudiants et qu’il me paraît difficile de les taxer : d’une part, nous ne sommes même pas sûrs de leurs pratiques exactes et, d’autre part, je crains que ce ne soit très difficile à vérifier.
Le passage au tout numérique se poursuivra effectivement jusqu’en 2011. D’ailleurs, Coulommiers sera entièrement numérique à la fin février, puis ce sera le tour de Cherbourg et sa région.
C’est un processus complexe. Le Gouvernement, cela a été rappelé, a prévu un budget pour financer la campagne d’information du grand public, mais également un fonds d’aide aux foyers les plus démunis : il ne faut évidemment pas laisser se créer une zone noire, ce qui implique d’aider les foyers exonérés de redevance audiovisuelle qui ne reçoivent les services de télévision en clair que par la voie hertzienne en mode analogique.
Il faut également financer le groupement d’intérêt public France Télé numérique. L’État le finance à hauteur de 50 %, les chaînes assumant les 50 % restants.
Le financement du passage au tout numérique par la redevance a suscité ici certaines inquiétudes. Je rappelle toutefois que les contrats d’objectifs et de moyens sont actuellement tenus et continueront de l’être, qu’ils garantissent leurs ressources aux différents médias et qu’il ne s’agit pas d’appauvrir les chaînes pour financer le GIP France Télé numérique. Si les fonds prévus pour ce dernier s’avèrent insuffisants, l’État y remédiera, car il est d’autant moins question de retarder le passage au tout numérique que celui-ci doit être une ressource importante pour les chaînes. On sait bien que cela représente un gain financier non négligeable.
Telles sont les réponses que je tenais à vous apporter, mesdames, messieurs les sénateurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur quelques travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Je remercie Mme la ministre de toutes les précisions qu’elle vient de nous apporter.
Je souhaite que nous puissions prolonger, sinon ce soir, du moins dans les jours et les semaines qui viennent, la discussion qui nous permettra de comprendre l’opération entre TF1 et France 24.
Si j’ai bien saisi, en 2006, le budget en recettes se réduit pratiquement aux dotations de l’État, avec, en 2008, 88,5 millions d’euros et, en 2009, 117 millions d’euros.
Je n’arrive pas à comprendre comment une banque, si experte soit-elle, puisse, même après la crise, valoriser à 90 millions d’euros une société dont les seules ressources sont des crédits publics. Cela n’a pas de sens ! Ne nous laissez pas, madame la ministre, sur l’impression d’une opération à ce point déséquilibrée au détriment des contribuables. C’est pourquoi je souhaite que, dans les semaines qui viennent, cette affaire puisse être tirée au clair. (Applaudissements sur quelques travées de l’UMP, de l’Union centriste et du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes.)