Sommaire
Présidence de M. Bernard Frimat
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Philippe Nachbar
2. Loi de finances pour 2009. – Suite de la discussion d'un projet de loi.
MM. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances ; André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères ; Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères ; M. Yves Dauge, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
M. Jean-Pierre Chevènement, Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Nathalie Goulet, MM. Robert Hue, Jean-Pierre Cantegrit, Aymeri de Montesquiou, Mme Catherine Tasca, MM. Michel Billout, Robert del Picchia, Mmes Dominique Voynet, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Jean Besson, Christophe-André Frassa, Richard Yung, André Ferrand.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
MM. le président, Jean Arthuis, président de la commission des finances.
Amendement n° II-199 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Nathalie Goulet, M. le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-200 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Nathalie Goulet, MM. le rapporteur spécial, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-2 de la commission. – MM. le rapporteur spécial, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-203 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Nathalie Goulet, MM. le rapporteur spécial, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-47 de Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. – Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis ; MM. le rapporteur spécial, le ministre. – Retrait.
Amendements identiques nos II-48 rectifié de Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis, et II-188 rectifié de M. Louis Duvernois ; amendement no II-209 rectifié de M. Robert del Picchia. – Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis ; MM. Louis Duvernois, Robert del Picchia, le rapporteur spécial, le ministre. – Retrait de l’amendement no II-209 rectifié ; adoption des amendements nos II-48 rectifié et II-188 rectifié.
Adoption des crédits modifiés.
Article additionnel avant l'article 56
Amendement n° II-15 de la commission et sous-amendement n° II-214 rectifié quater de M. André Ferrand ; amendements nos II-45 de M. André Trillard, rapporteur pour avis, et II-187 de M. Robert del Picchia. – MM. le rapporteur spécial, André Ferrand, André Trillard, rapporteur pour avis ; Robert del Picchia, le ministre, Mme Monique Cerisier-ben Guiga. – Adoption du sous-amendement no II-214 rectifié quater et de l'amendement no II-15 modifié insérant un article additionnel, les autres amendements devenant sans objet.
Amendement n° II-234 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Nathalie Goulet. – Retrait.
Amendement n° II-235 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Nathalie Goulet, MM. rapporteur spécial, le ministre. – Retrait.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
Administration générale et territoriale de l’État
Mme Michèle André, rapporteur spécial de la commission des finances ; M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois.
M. Jean-Pierre Sueur, Mme Josiane Mathon-Poinat, M. Jean-Pierre Chevènement.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Amendement no II-239 rectifié de M. Philippe Dominati. – M. Philippe Dominati, Mmes le rapporteur spécial, la ministre, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. – Retrait.
Amendement no II-193 du Gouvernement. – Mmes la ministre, le rapporteur spécial. – Adoption.
Amendements nos II-240 rectifié de M. Bruno Gilles et II-26 de la commission. – M. Adrien Gouteyron, Mmes le rapporteur spécial, la ministre, M. le président de la commission des finances. – Retrait des deux amendements.
MM. le président de la commission des finances, le président.
Adoption des crédits modifiés.
Amendement no II-245 de M. Pierre Jarlier. – M. Pierre Jarlier, Mmes le rapporteur spécial, la ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no II-244 de M. Pierre Jarlier. – M. Pierre Jarlier, Mmes le rapporteur spécial, la ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
M. Jean-Pierre Sueur.
Amendements nos II-13 de la commission et II-385 du Gouvernement. – Mmes la ministre, le rapporteur spécial. – Retrait de l’amendement no II-13 ; adoption de l’amendement no II-385.
Adoption de l'article modifié.
M. le président de la commission des finances.
Relations avec les collectivités territoriales
Compte spécial : avances aux collectivités territoriales
MM. Pierre Jarlier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois.
M. Pierre-Yves Collombat, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jean-Pierre Fourcade, Jean-Pierre Chevènement, Jean-Pierre Sueur, Adrien Gouteyron, Georges Patient.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Amendement no II-196 du Gouvernement. – Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. – Adoption.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.
Adoption des crédits modifiés de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »
Adoption des crédits du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
MM. Philippe Dallier, Jean-Jacques Jégou.
Amendements nos II-230 de Mme Marie-France Beaufils, II-212 rectifié bis, II-213 rectifié bis de M. Jean-Jacques Jégou, II-216 rectifié, II-217 rectifié de M. Pierre-Yves Collombat et II-210 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jean-Jacques Jégou, Pierre-Yves Collombat, Mme Françoise Laborde, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre, M. le président de la commission des finances. – Retrait des amendements nos II-213 rectifié bis et II-217 rectifié ; rejet des amendements nos II-230, II-216 rectifié et II-210 rectifié ; adoption de l’amendement no II-212 rectifié bis.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 67
Amendement no II-221 de M. Georges Patient. – MM. Georges Patient, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Amendements nos II-222 et II-223 de M. François Marc. – MM. Edmond Hervé, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Rejet des deux amendements.
Mme Marie-France Beaufils.
Amendement no II-218 de Mme Nicole Bricq. – MM. Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 68
Amendement no II-219 de Mme Nicole Bricq. – MM. Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Amendement no II-224 de M. François Patriat. – MM. Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
MM. le président de la commission des finances ; Edmond Hervé.
Amendements nos II-231 et II-232 de Mme Marie-France Beaufils. – Mme Marie-France Beaufils, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Mme Marie-France Beaufils.
Amendement no II-154 rectifié de M. Jean-Claude Gaudin. – Mme Catherine Dumas, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Adoption de l'article.
Amendements nos II-233 de Mme Marie-France Beaufils, II-220 de Mme Nicole Bricq et II-10 de la commission. – Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Rejet des amendements nos II-233 et II-220 ; adoption de l’amendement no II-10.
Adoption de l'article modifié.
Mme Josiane Mathon-Poinat.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 72
Amendements nos II-237 et II-243 de M. Denis Detcheverry. – MM. André Ferrand, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Adoption des amendements insérant deux articles additionnels.
Amendement no II-18 de la commission. – M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Suspension et reprise de la séance
MM. Jack Ralite, le président.
Compte spécial : Avances à l’audiovisuel
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances, en remplacement de M. Claude Belot, rapporteur spécial ; Michel Thiollière, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; David Assouline, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Joseph Kergueris, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.
Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jack Ralite, Mmes Christiane Kammermann, Françoise Laborde, MM. Serge Lagauche, David Assouline, Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
M. le président de la commission des finances.
Amendement no II-133 de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. – MM. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre, MM. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles ; Ivan Renar, Joseph Kergueris. – Retrait.
Mme la ministre.
Amendement no II-134 de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. – MM. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Adoption.
Adoption des crédits de la mission « Médias ».
Amendement no II-135 de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. – Adoption.
Amendement no II-136 de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. – Retrait.
Adoption des crédits du compte spécial « Avances à l’audiovisuel ».
Articles additionnels après l'article 63
Amendement no II-85 de M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. – MM. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Amendement no II-228 de M. Jack Ralite. – MM. Ivan Renar, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Rejet.
Amendement no II-229 de M. Jack Ralite. – MM. Jack Ralite, le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Rejet.
MM. le président, le président de la commission des finances, Mme la ministre.
Suspension et reprise de la séance
MM. Yann Gaillard, rapporteur spécial de la commission des finances ; Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Serge Lagauche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
M. Jack Ralite, Mme Françoise Laborde, M. Serge Lagauche, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Yves Dauge.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Amendement no II-131 du Gouvernement. – Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. – Adoption.
Amendement no II-11 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la ministre. – Retrait.
Amendement no II-194 du Gouvernement. – Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. – Adoption.
Amendement no II-384 du Gouvernement. – Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. – Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Article additionnel avant l'article 59 octies
Amendements identiques nos II-189 de M. Yann Gaillard et II-241 de M. Yves Dauge. – MM. Yann Gaillard, Yves Dauge, Mme la ministre. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Articles 59 octies et 59 nonies. – Adoption
3. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
compte rendu intégral
Présidence de M. Bernard Frimat
vice-président
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
M. Philippe Nachbar.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Loi de finances pour 2009
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (nos 98 et 99).
Action extérieure de l’État
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget du Quai d’Orsay fait chaque année l’objet de commentaires nourris sur le mode de la déploration : sont visées et dénoncées les baisses de crédits récurrentes.
Pourtant, dans ce contexte, nos diplomates continuent d’accomplir un travail remarquable. Permettez-moi de souligner tout particulièrement, en 2008, deux éléments majeurs.
Tout d’abord, si la réussite de la Présidence française de l’Union européenne est évidemment celle du Président de la République et du Gouvernement, elle est aussi le fruit d’une mobilisation exceptionnelle de nos diplomates tout au long de l’année et de leurs initiatives. Qu’ils en soient remerciés. Ensuite, je veux saluer la capacité des agents du Quai d’Orsay à faire face aux multiples crises qui secouent aujourd’hui le monde : je tiens à rendre hommage aux fonctionnaires du ministère qui viennent au secours de nos ressortissants étrangers, tout récemment en Inde et en Thaïlande, ou qui gèrent des prises d’otage, en Afghanistan ou au Tchad, avec un dévouement et une disponibilité qui forcent l’admiration.
Quels moyens le Gouvernement propose-t-il d’accorder à la diplomatie française ?
Nous disposons désormais d’un budget triennal, qui nous donne de la visibilité pour les exercices 2009, 2010 et 2011 et permet de discerner les ajustements à l’œuvre au Quai d’Orsay. La stabilité apparente des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », de l’ordre de 2,5 milliards d’euros, masque des tensions difficilement soutenables à moyen terme.
Au sein du plafond de dépenses, il faut constater, d’abord, la part prise par le rebasage des contributions internationales, frappée par ailleurs d’importants aléas de change, ensuite le transfert du paiement des cotisations de pensions des personnels détachés à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, enfin, la montée en puissance progressive de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français à l’étranger.
Or, au sein du budget du Quai d’Orsay, chaque euro compte et tout euro supplémentaire ici a sa contrepartie en moins ailleurs. J’ai donc pu identifier les variables d’ajustement retenues sur le budget triennal.
Ainsi, les moyens alloués à la coopération militaire et de défense sont en diminution constante, alors qu’elle pourrait prendre le relais de la présence militaire française, elle-même en baisse, en Afrique. Selon mes estimations, le budget consacré à l’action culturelle à l’étranger diminuerait de 25 % sur trois ans. En ce qui concerne les dépenses d’action sociale pour les Français établis hors de France, j’ai noté avec inquiétude la baisse de la subvention attribuée à la Caisse des Français de l’étranger, qui annonce, malheureusement, des difficultés à venir.
Je constate également que le transfert des cotisations de pension des personnels détachés à l’AEFE est insuffisamment compensé et pourra avoir des conséquences dramatiques sur le nombre de personnels expatriés, ce qui ne sera pas sans effet sur la qualité des établissements.
Quelles que soient les réformes en cours, le Quai d’Orsay est pris dans un étau budgétaire. Même les emplois économisés au titre de la révision générale des politiques publiques, que le ministère des affaires étrangères s’est efforcé de chiffrer – ce qui n’est pas si courant – dans une fourchette de 320 à 490 emplois sur trois ans, restent très en deçà des 700 emplois devant être supprimés sur la période triennale.
Toutes les initiatives permettant de desserrer l’étau budgétaire autour du Quai d’Orsay sont donc bienvenues.
Pour ma part, j’évoquerai trois pistes.
Premièrement, les contributions de la France aux institutions internationales doivent être révisées. Il est possible de défendre notre attachement au multiléralisme et de promouvoir la place de notre pays dans les enceintes internationales, tout en veillant à un calibrage plus précis des dotations que nous versons au titre du budget régulier de certaines organisations et tout en nous efforçant d’obtenir la meilleure gestion possible des cotisations versées. La masse salariale représente les deux tiers du budget des organisations internationales, avec des mécanismes d’indexation dont les fonctions publiques nationales ne bénéficient plus depuis de nombreuses années. Le Quai d’Orsay a enfin conscience que le financement des contributions internationales pouvait se faire au détriment de son budget et a engagé un effort de rationalisation que je tiens à saluer, monsieur le ministre.
S’agissant des contributions internationales, les exigences sont de plus en plus fortes. Ainsi, le souhait du secrétariat général de l’Organisation des Nations unies d’augmenter le budget de cette institution de 50 % en 2009 a conduit le ministère à ne pas considérer acceptable en l’état une telle demande et à engager une concertation avec les autres grands contributeurs.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je soutiens cette démarche, comme je me félicite que la France ait engagé avec plusieurs de ses partenaires, et sur son initiative, un travail visant à modérer les augmentations de rémunération constatées en 2008 à l’OTAN, au Conseil de l’Europe, à l’OCDE et à l’Union de l’Europe occidentale.
Ce travail patient pourra utilement s’appuyer sur les travaux que mène la Cour des comptes dans certaines organisations internationales en tant que commissaire aux comptes. Ainsi, le récent rapport de la Cour des comptes sur le bureau de la prospective de l’UNESCO met en évidence « de mauvaises habitudes de travail au sein de l’UNESCO, le fonctionnement aléatoire de la hiérarchie et l’inefficacité du contrôle interne ».
Dans le domaine des opérations de maintien de la paix, c’est évidemment la diplomatie qui prime. Je souhaite être sûr qu’en République démocratique du Congo, par exemple, la réponse à la situation actuelle passe par un renforcement de l’opération actuelle plutôt que par un redéploiement des moyens déjà engagés par l’ONU.
Deuxièmement, en ce qui concerne la prise en charge des frais de scolarité, je partage totalement l’esprit de la mesure décidée par le Président de la République. Les 18 millions d’euros qui ont été jusqu’à présent consacrés à cette mesure, principalement pour la classe de terminale, peuvent paraître limités, même s’ils s’accompagnent d’une augmentation sensible des bourses au-delà des enveloppes fixées en loi de finances initiale. Encore ont-ils dû être financés par des redéploiements en provenance d’autres postes de dépense.
À ce sujet, je pose deux questions, qui trouvent leur traduction dans un amendement de la commission des finances, identique à celui de la commission des affaires étrangères, et susceptible de faire consensus.
Première question : si la mesure venait à être étendue au-delà du lycée, cette dépense serait-elle soutenable à terme ? Il est de ma responsabilité de rapporteur spécial, comme il est de notre responsabilité de sénateurs, de nous interroger. En effet, selon les estimations du ministère des affaires étrangères lui-même, l’effort réalisé, non pas uniquement pour la prise en charge des frais de scolarité, mais pour l’ensemble de la scolarité à l’étranger, pourrait représenter, à maturité de la mesure, jusqu’à 40 % du budget du Quai d’Orsay. C’est considérable, insupportable même.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Eh oui !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Comment cela sera-t-il financé ? Nous allons dans le mur, si vous m’autorisez cette expression ! Devrons-nous renoncer à notre diplomatie pour assumer cet effort important en faveur de nos compatriotes à l’étranger ? Il faut établir un moratoire au-delà de la classe de seconde et réfléchir sereinement aux modalités de financement d’une éventuelle extension.
Seconde question : l’égalité entre Français de l’hexagone et Français de l’étranger est-elle préservée ? J’y suis très attaché, comme l’est aussi le parent d’élève de mon département, qui nous regarde peut-être en cet instant. Dans le contexte actuel de crise, celui-ci peut légitimement se demander pourquoi le contribuable français doit régler l’intégralité des frais de scolarité des enfants français inscrits à l’institut Valmont de Lausanne – 11 000 euros par an –, sans condition aucune, dont le montant est bien supérieur à ce que l’éducation nationale paye pour ses propres enfants. Certes, il s’agit là de quelques cas très isolés,...
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Très isolés !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. ...comme le sont aussi les cas de familles très à l’aise qui profitent d’une mesure qui ne leur est pas destinée. C’est une raison de plus pour poser quelques limites raisonnables, afin de rendre la mesure du Président de la République d’autant plus incontestable qu’elle sera juste et propice à l’égalité de tous nos compatriotes face à l’éducation, que ceux-ci résident en France ou à l’étranger.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Évitons les fractures au sein de la communauté française.
Lorsqu’il s’agit véritablement de lycées privés, qui sont simplement homologués et jouissent à ce titre d’une complète liberté tarifaire, il faut avoir une approche similaire à celle que nous avons en ce qui concerne l’enseignement privé en France.
Mme Catherine Tasca. Il faut mettre des limites !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Oui ! Il faut des limites aux frais de scolarité que peuvent pratiquer ces établissements et prévoir un reste à payer pour les familles, comme c’est le cas dans l’enseignement privé en France, même lorsqu’il est, et c’est le cas, subventionné et sous contrat.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je me permets de citer notre collègue Robert Del Picchia, qui s’est exprimé l’année dernière à la même époque en ces termes : « Il me paraît tout de même nécessaire de fixer un plafond.
« Pour en déterminer la hauteur, nous pouvons en débattre au sein du conseil d’administration de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, par exemple, et soumettre nos propositions tant à l’Élysée qu’au Quai d’Orsay. Je suis certain que nous parviendrons à un compromis. » Je fais miens ses propos et souhaite à mon tour que ce compromis soit trouvé.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Après le Livre blanc sur l’action extérieure de l’État et les états généraux de l’enseignement français à l’étranger, nous y sommes, mes chers collègues.
Troisièmement, malgré la RGPP, je souhaite que l’on cesse de toiser les ambassades et que s’arrête l’érosion budgétaire du ministère des affaires étrangères.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. C’est pour cela qu’il nous faut un Quai d’Orsay réformé. Les mesures annoncées par le ministère sont de bon sens. Je pense par exemple au principe de la modularité des ambassades, contrepartie évidente du maintien d’un réseau universel. C'est la raison pour laquelle je les soutiens pleinement.
Il est vrai que j’ai plus de réticences pour ce qui est de l’action culturelle à l’étranger. De mon point de vue, la réforme passe moins par la constitution de nouvelles structures que par une implication croissante du ministère de la culture, des méthodes de travail nouvelles et une redéfinition du métier de conseiller culturel, qui doit devenir un vrai métier. Cette idée est partagée par M. Bernard Faivre d’Arcier, personnalité respectée du monde de la culture, qui s’est récemment exprimé à ce sujet dans le magazine Connaissance des arts.
Je crois enfin que l’idée émise par le Quai d’Orsay d’une foncière portant la propriété des biens de l’État à l’étranger est bonne. Il faut aller jusqu’au bout de la démarche, en prenant des précautions s’agissant d’immeubles de souveraineté. On voit tout l’intérêt des cessions immobilières qui ont été réalisées à Paris et qui ont permis d’offrir aux agents du ministère, rue de la Convention, de nouveaux lieux de travail à la fois dignes et confortables. (M. le ministre approuve.) J’ai visité le nouveau site, il est en tout point remarquable, et j’invite ceux de nos collègues qui ne l’auraient pas encore fait à s’y rendre.
La réussite de la RGPP dépendra de la méthode adoptée pour conduire le changement. Or on hésite, parfois, entre opacité et transparence, entre modèle directif et modèle participatif. C’est le processus global qui est en cause, pas spécifiquement le Quai d’Orsay, et je crois, pour ma part, qu’en amont des décisions prises, une plus grande association des agents, notamment des cadres supérieurs, aurait été utile. Mais, pour ce qui concerne la mise en œuvre des décisions, il nous faut des objectifs clairs et chiffrés, un calendrier détaillé et un modèle suffisamment directif. Ce sont les ambassadeurs, en serviteurs loyaux de la République, qui seront les chevilles ouvrières de la RGPP : ils doivent donc être mobilisés pleinement et soutenus.
Cette dernière mission relève, à mon sens, de la direction générale de la modernisation de l’État, à Bercy, direction qui doit être davantage aux côtés du ministère pour réussir la réforme.
Enfin, la réforme suppose des contreparties. J’ai déjà évoqué les conditions de travail des agents de la rue de la Convention. Je crois aussi que l’adaptation des indemnités de résidence à la difficulté des postes occupés et l’opportunité d’offrir une seconde carrière aux diplomates sont des chantiers auxquels vous êtes légitimement attaché, monsieur le ministre.
En conclusion, sous le bénéfice des amendements que je vous présenterai, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits prévus pour la mission « Action extérieure de l’État ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.
M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je formulerai, tout d’abord, quelques observations sur l’ensemble de la mission « Action extérieure de l’État » avant d’en venir aux programmes 105 et 151 proprement dits.
Dans le projet de loi de finances pour 2009, le budget du ministère des affaires étrangères et européennes représente 1,37 % des dépenses de l’État ; les crédits de paiement s’élèvent à 2,52 milliards d’euros, soit une croissance « optique » de 7 %, mais effective de 2 %, à périmètre constant. En effet, 5 % de ces crédits sont affectés au programme 185 pour la prise en charge de frais de pension d’enseignants détachés à l’étranger, auparavant réglés par le ministère de l’éducation nationale. Ce budget ne représente donc qu’une faible part des dépenses de l’État.
De plus, les nécessaires arbitrages internes au ministère pour redéfinir ses actions sont limités par le poids croissant des contributions obligatoires aux organisations internationales, notamment de celles qui sont consacrées au financement des opérations de maintien de la paix de l’ONU. Vous savez que l’instabilité internationale croissante, qui a marqué la dernière décennie, s’est traduite par l’augmentation du nombre de ces opérations ; la contribution française à leur financement va ainsi passer de 170 millions d’euros en 2000 à 370 millions d’euros en 2009.
Il faut relever que ce financement a bénéficié, ces trois dernières années, d’un « rebasage », c’est-à-dire d’une évaluation financière plus réaliste en loi de finances initiale, en vertu du contrat de modernisation conclu entre le ministère des affaires étrangères et européennes et le ministère des finances. Ainsi, 40 millions d’euros sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 2009 afin de poursuivre cet ajustement aux dépenses engagées, sans parvenir cependant à résorber l’« impasse » constatée à ce jour et évaluée à 115 millions d’euros. Cette somme est comparable à celle qui restait à financer, à la fin de l’année 2006, pour faire face aux coûts des opérations alors en cours.
Cette similitude entre la situation prévalant avant le « rebasage » et la situation actuelle conduit la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées à souligner la nécessité d’une meilleure cohérence entre nos engagements internationaux et leurs modalités de financement. Il s’agit d’un problème récurrent. S’il est compréhensible que la loi de finances initiale ne puisse évaluer avec précision le coût d’opérations en cours, il est surprenant que des décisions de cet ordre, prises au plus haut niveau de l’État, suscitent de telles difficultés de financement. Ces dernières pèsent lourdement sur les actions du programme 105, qui regroupe les actions de la France en Europe et dans le monde.
Si l’on évoque la mission « Action extérieure de l’État » en termes d’emploi, on constate qu’elle dispose d’un plafond de 13 077 équivalents temps plein travaillé, soit 149 postes de moins qu’en 2008.
La programmation triennale des finances publiques se traduira par une réduction de 700 emplois au total d’ici à la fin de l’année 2011. Après avoir touché, ces dernières années, des emplois sous contrat à durée déterminée et des postes de volontaires internationaux, la poursuite de la contraction des personnels du ministère portera, cette fois, sur les titulaires, c’est-à-dire sur « l’ossature » des services. Il conviendra donc que les redéploiements de personnels induits par la modularité des ambassades inspirée par le Livre blanc sur la diplomatie soient rapidement effectués.
Certes, cette nouvelle réduction de postes est atténuée au regard de la règle générale qui s’applique à l’ensemble des administrations et prescrit le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, mais elle conduit à un niveau au-dessous duquel il conviendra de ne pas descendre au-delà de 2011, à moins de modifier substantiellement les missions confiées au ministère des affaires étrangères et européennes.
Il ne s’agit pas de nier que des marges de progression en matière de gestion existent dans ce ministère, comme dans d’autres d’ailleurs. Les réflexions menées, depuis plusieurs années, sur le « calibrage » souhaitable du réseau extérieur ont, grâce à la commission du Livre blanc sur la diplomatie, pu être traduites en décisions opérationnelles.
La modularité apportée aux fonctions remplies par nos ambassades est la condition de la préservation de l’universalité de notre réseau diplomatique, qui, avec 160 ambassades et 21 délégations permanentes, est le deuxième au monde après celui des États-Unis.
Une trentaine de nos postes diplomatiques assureront, avec un personnel réduit à un ambassadeur entouré de quelques collaborateurs, une mission de présence et de veille. Une centaine se verra confier des missions prioritaires, avec un personnel plus étoffé, et une trentaine sur le territoire de nos principaux partenaires seront polyvalentes. Les personnels affectés à ces ambassades de plein exercice seront « lissés », c’est-à-dire restructurés et réduits, ce qui me semble tout à fait opportun, car certains postes semblent proches de la pléthore, alors que d’autres sont sous-dotés.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées estime très opportune cette initiative, qui évitera de créer des déserts diplomatiques, tout en prenant acte que la mission d’un ambassadeur en poste dans une île du Pacifique n’est pas tout à fait la même que celle d’un diplomate basé dans un pays de l’Organisation de coopération et de développement économique, l’OCDE.
Cette nouvelle organisation permettra également à de jeunes cadres d’avoir des responsabilités inédites lorsqu’ils dirigeront des postes de présence et de veille, ce qui dynamisera des carrières parfois un peu stagnantes du fait d’une pyramide des âges peu équilibrée.
J’aimerais que, sur ce point, monsieur le ministre, vous esquissiez un calendrier prévisionnel de mise en œuvre, cadre temporel utile tant pour l’adaptation des personnels à cette réforme que pour la nécessaire pédagogie envers nos partenaires, qui ne doivent pas ressentir la mise en place d’ambassades à format réduit comme une prise de distance à leur égard.
J’en viens maintenant au programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires », dont je souligne le nécessaire maintien, même s’il regroupe les crédits les plus limités de la mission « Action extérieure de l’État ». Il offre une visibilité unique sur les actions conduites en faveur de nos compatriotes expatriés et nos actions consulaires.
Le périmètre de ce programme évolue, avec la création d’un centre de crises et le transfert des crédits de fonctionnement et d’investissement correspondant à l’instruction des demandes de visas au ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, à compter du 1er janvier prochain.
Conformément aux engagements pris par le Président de la République, la prise en charge des frais de scolarité des élèves français fréquentant le réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, sera étendue, à la rentrée 2009, aux classes de seconde, après avoir concerné les classes de terminale en 2007 et de première en 2008. Une enveloppe de 19 millions d’euros supplémentaires est prévue à cette fin. L’essentiel de la croissance du programme tient à cette augmentation.
Cet effort financier est tout à fait justifié ; il était attendu depuis de longues années par les Français de l’étranger. Cependant, son attribution actuelle sans que soient pris en considération le niveau de ces frais et celui des revenus des familles, doit être précisée, particulièrement dans le contexte très tendu pour les finances publiques qui prévaut actuellement.
Le besoin de financement qui en découle ne cesse de croître, ainsi que le nombre d'élèves français scolarisés. Ce fait pourrait être considéré comme positif s’il ne s'accompagnait, faute d'extension des capacités des établissements, d'une éviction des élèves étrangers, alors même que les familles de ces derniers payent des frais de scolarité en augmentation.
L’une des missions de l’AEFE, qui est de contribuer à former des élites francophones, s’en trouve affectée.
De plus, les entreprises françaises, qui prenaient traditionnellement en charge les frais de scolarité des enfants de leur personnel expatrié, se désengagent très rapidement, puisque l’État assume ces dépenses : l’argent public évince ainsi les financements privés.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donc adopté, à l’unanimité, un amendement précisant les modalités de l’attribution de cette prise en charge.
Sous le bénéfice de ces remarques et de cet amendement, elle vous recommande d’adopter les crédits des programmes 105 et 151 pour 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le programme « Rayonnement culturel et scientifique » ne concerne que les crédits affectés à la diplomatie culturelle dans les pays considérés comme développés par l’OCDE. Mais c’est sur ce programme qu’est prélevée la subvention destinée à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, quel que soit le pays où est situé l’établissement subventionné.
De ce fait, sur les 595 millions d’euros figurant dans ce programme, 82 % sont affectés à l’AEFE ; il ne reste donc plus que 92 millions d’euros pour la promotion de la langue et de la culture française dans quarante-sept pays, dont les vingt-sept États membres de l’Union européenne, les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Russie ou encore le Japon.
Selon le document de programmation triennale, de 92 millions d’euros en 2009, contre 105 millions d’euros en 2008, ces crédits passeront à 80 millions d’euros en 2010 et à 77 millions d’euros en 2011.
Cette diminution des crédits destinés à la diplomatie culturelle est également visible au sein du programme 209, consacré à la coopération en direction des pays en développement, dont les crédits diminueront de 9 % en 2009.
En outre, le Gouvernement a présenté deux amendements, adoptés par l’Assemblée nationale, qui visent à minorer les crédits du programme 185 de 2,8 millions d’euros et du programme 209 de 6,9 millions d’euros. Je souhaite savoir, monsieur le ministre, quelles actions seront concernées par ces nouvelles réductions.
En dépit de tous les discours sur la francophonie, sur « le caractère central » de l’action culturelle dans notre politique étrangère, selon votre propre expression, monsieur le ministre, on peut se demander, d’une façon purement rhétorique, si la diplomatie culturelle d’influence ne continue pas d’être la variable d’ajustement du ministre des affaires étrangères.
En 2009, les crédits destinés aux échanges scientifiques diminueront de 5 %.
Je sais, et je m’en félicite, monsieur le ministre, que vous avez personnellement insisté sur le maintien des bourses destinées aux étudiants étrangers, dont les crédits avaient baissé ces deux dernières années. Mais votre budget n’est pas exempt de paradoxes.
Ainsi, au moment où il est question de renforcer le champ d’action du réseau Campus France afin d’en faire l’opérateur central chargé de la mobilité internationale, la subvention de l’État qui lui est consentie baisse de 20 %.
Les subventions d’intervention destinées aux services culturels diminueront de 10% à 15 % en moyenne en 2009 ; celles qui sont consacrées aux centres culturels et aux alliances françaises seront réduites de moitié.
Les financements destinés à la promotion de la langue et de la culture française baisseront, quant à eux, de 14 % en 2009.
Ainsi, le programme « Français langue maternelle », le programme FLAM, qui bénéficie à plus de 4 000 enfants français, est transféré à l’AEFE, elle-même exsangue, mais sans le financement correspondant.
J’ai donc proposé à la commission des affaires étrangères un amendement en faveur du programme FLAM et de la promotion du français en Europe qu’elle a adopté et que je vous présenterai tout à l’heure, mes chers collègues.
Face à cette situation, comment va-t-on gérer la pénurie ?
En ce qui concerne l’action culturelle, domaine dans lequel on ne manque pas d’imagination sémantique, la gestion de la pénurie porte le nom de « réforme », c’est-à-dire que sur le terrain on réduit la voilure et que l’on change d’objectifs et d’organisation à Paris.
Toujours à Paris, on transfère les missions à des opérateurs, comme CulturesFrance, mais sans leur donner les moyens nécessaires à leur action, qui n’est ni évaluée ni orientée.
Sur le terrain, on fusionne les centres et les services culturels, en espérant accroître ainsi leurs capacités d’autofinancement, ou on les transforme en antennes légères, sans évaluation préalable, d’ailleurs, des expériences antérieures. Il s’agit de gestion moderne !
On évoque aussi la fermeture d’une trentaine de centres ou d’instituts culturels en Europe ou en Afrique.
Monsieur le ministre, qu’en est-il exactement ?
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État » et je m’en remets donc à sa sagesse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur le banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Yves Dauge, rapporteur pour avis.
M. Yves Dauge, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires culturelles a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Cette position n’allait pas de soi ! La commission revient de loin, monsieur le ministre, car elle souhaitait s’élever fortement contre la situation actuelle, que vous connaissez.
Je ne reprendrai pas les chiffres que notre collègue Adrien Gouteyron a excellemment présentés. Je me contenterai d’évoquer d’entrée de jeu, en concordance d'ailleurs avec les innombrables déclarations des autorités les plus respectées et les plus respectables, le problème politique que pose ce budget.
Dans le contexte mondial actuel, le rayonnement culturel de la France n’a jamais été aussi nécessaire. Le monde est en quête de sens ! Or, sans prétendre que notre pays a des révélations à faire aux autres nations, notre histoire et notre position nous permettent de jouer un rôle essentiel.
Monsieur le ministre, je ne cherche pas à vous convaincre, car vous connaissez déjà parfaitement cette réalité. Il faut y insister avec force, notre pays doit assumer pleinement sa mission dans le contexte mondial actuel !
La France a apporté une contribution décisive à l’adoption de la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Mais exploite-t-elle, comme il conviendrait, dans l’organisation de ses services et dans les moyens qu’elle leur consacre, l’extraordinaire avancée que représente la reconnaissance de la diversité culturelle comme un droit, face aux forces qui s’en seraient bien passées ? Il s'agit là d’une question politique essentielle.
Or, malgré ce constat, s'agissant des moyens de notre action extérieure, « on touche à l’os », pour reprendre l’expression utilisée par notre collègue Adrien Gouteyron.
Monsieur le ministre, la commission tient à vous alerter sur cette situation, qui devient extrêmement grave, car elle suscite la démobilisation des personnels, qui ne savent pas où ils vont et s’interrogent donc sur leur propre avenir.
Notre réseau à l’étranger, qui reste un atout considérable, est en train de perdre de sa dynamique et de sa force. Il faut absolument arrêter cette dégradation !
La commission souhaite d'ailleurs travailler avec vous en cours d’année, monsieur le ministre, pour que, ensemble, nous tâchions d’améliorer ce budget. Il est évident que nous n’allons pas le modifier tout de suite, mais nous estimons qu’il reste des marges de manœuvre, afin de mobiliser de nouveau le réseau de la France à l’étranger et de lui rendre des moyens.
La question des crédits de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, est posée. Nous avons rencontré les personnels de cette agence, qui se trouve en grande difficulté en raison du transfert de charges qu’on lui impose.
Alors que d’autres institutions ont bénéficié d’une compensation à l’euro près, il n’en va pas de même de l’AEFE : il manque au budget de cette agence quelque six millions d’euros, qui deviendront d'ailleurs vingt ou trente millions d'euros demain, tant la charge augmentera de façon spectaculaire !
Je ne reviendrai pas sur le problème posé par les frais de scolarité des enfants français à l’étranger. J’indiquerai simplement que la commission soutiendra expressément les amendements déposés sur ce sujet par MM. Adrien Gouteyron et André Trillard.
Enfin, la commission est favorable – à titre personnel, je le suis également – à la création d’une grande agence destinée à regrouper les moyens de l’action culturelle de la France à l’étranger, qui disposerait d’un statut d’établissement public et pourrait gérer son personnel.
La future organisation de cette agence reste pour le moment assez floue. Certains évoquent les risques d’externalisation ou de dépossession, mais je ne crois pas que ceux-ci soient fondés : l’établissement public restera dans la main du ministre, qui nommera son directeur ou sa directrice. Ne jouons pas à nous faire peur !
Honnêtement, je crois qu’il est nécessaire d’aller au bout de cette démarche. D'ailleurs, tous les acteurs y sont prêts, leurs vives réticences initiales ayant été surmontées. Il faut agir, vite, avant que la situation ne se dégrade encore plus !
Sous réserve de ces observations, qui visent à vous alerter, monsieur le ministre, et à susciter un sursaut, la commission, je le répète, a approuvé les crédits de cette mission. (Applaudissements sur diverses travées.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle qu’en application des décisions de la Conférence des Présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État » est l’occasion de nous interroger sur la capacité de notre pays à exister en dehors de ses frontières, c’est-à-dire pour les autres, mais aussi pour lui-même, tant il est vrai qu’on ne peut séparer les affaires étrangères de la politique intérieure.
Étrangères, ces affaires le sont si peu qu’elles se répercutent souvent très vite sur les équilibres de la société française et sur nos choix politiques : crises au Moyen-Orient, crise financière, montée irréversible de la Chine, élections américaines qui rebattent les cartes en maints domaines, la multipolarité du monde est d’ores et déjà un fait.
Encore peut-on se demander si elle n’est pas elle-même dépassée par un mouvement brownien de nations qui, à côté de pays continents, aspirent à s’affirmer, hier le Vietnam, aujourd’hui l’Iran, le Venezuela, la Bolivie, la Serbie, demain sans doute la Corée.
Bref, le monde reste fait de nations et la France, puissance ancienne mais encore respectable, membre permanent du Conseil de sécurité, disposant d’une capacité nucléaire dissuasive, tête de la francophonie, qui rassemble, à travers une langue partagée, de très nombreux peuples sur tous les continents, peut encore être influente.
Monsieur le ministre, j’évoquerai tout d’abord votre budget, puis votre politique.
Si votre budget est modeste, votre mission est importante. Si vous ne disposez que de 15 866 emplois, chacun sait que le personnel du Quai d’Orsay est de très grande qualité. Son professionnalisme, sa motivation, son dévouement au service de notre pays en font un corps d’élite et, pour tout dire, une des grandes institutions de la France.
Vous avez hérité, monsieur le ministre, du deuxième réseau diplomatique du monde. C’est un grand atout pour notre pays. Mais que lisons-nous dans ce projet de budget ? À structures constantes, il baisse de 1,53 %, selon les chiffres mêmes que vous avez fournis.
On vous « colle sur le dos » les pensions des enseignants à l’étranger, soit 120 millions d'euros, au risque d’étouffer l’AEFE.
La prise en charge passablement démagogique des frais de scolarité des enfants français – 20 millions d'euros de plus cette année, mais 94 millions d'euros à terme – ne peut manquer d’entraîner un effet d’éviction sur les enfants des élites du pays d’accueil ou de pays tiers. C’est un précieux moyen de rayonnement que nous gaspillons ainsi.
La croissance optique des crédits de votre ministère provient du « rebasage » toujours trop tardif – 41,2 millions d'euros cette année – destiné à financer les opérations de maintien de la paix, les OMP, de l’ONU, comme l’opération Darfour, dont le coût pour la France est estimé à plus de 90 millions d'euros.
Croyez-vous vraiment que des problèmes humanitaires puissent être traités à travers le prisme militaire ? N’existe-t-il pas une approche politique, moins coûteuse, plus efficace et en définitive plus humaine ?
Les contributions de la France hors OMP aux institutions internationales, soit 405 millions d'euros en 2008, représentent plus que le coût de nos ambassades, qui s’élève à 160 millions d'euros, ou que celui de nos consulats, qui atteint 97 millions d'euros.
J’ajouterai un mot, monsieur le ministre, sur la francophonie. Son centre de gravité se trouve de plus en plus en Afrique. N’ayons donc pas peur d’affirmer la nécessité de notre présence, y compris militaire, sur ce continent, pour aider à la construction de jeunes États. Sans sécurité, il n’y a ni développement ni démocratie possibles.
J’observerai également que l’avenir de la francophonie passe par le multilinguisme. Il faut augmenter les moyens accordés au corps des interprètes et traducteurs, non seulement à l’ONU, mais dans toutes les organisations dont nous sommes membres.
Je suggère une surcharge très légère sur les transactions internationales pour préserver la diversité culturelle et linguistique du monde. Voilà une cause qui vaut la peine d’être défendue !
Une contradiction frappe ainsi le budget de votre ministère. La France réduit ses moyens d’action propres et augmente sa participation aux organisations multilatérales. Tout se passe comme si nous avions peur d’agir par nous-mêmes, comme si nous devions dissimuler notre action dans des interventions multilatérales où la France n’apparaît guère.
C’est dans ces conditions que votre ministère se voit appliquer, au nom de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, un plan de rigueur d’une exceptionnelle sévérité.
Vous devez ainsi supprimer 700 emplois en équivalent temps plein, soit 4 % de vos effectifs. Plus d’un départ à la retraite sur deux n’est pas compensé, alors que certains ministères sont beaucoup moins lourdement affectés. Ce sont des économies de bout de chandelle !
Pour reprendre l’expression d’un précédent intervenant, « on touche à l’os ». Plus de la moitié des suppressions de postes concerneront des personnels titulaires, et nous n’améliorerons pas l’image de la France en créant trois catégories d’ambassades. Certains pays se sentiront méprisés par cette différenciation, ce qui sera fortement préjudiciable à notre rayonnement.
Outre les restrictions infligées à l’AEFE, j’observe que les crédits consacrés à l’action culturelle baissent de 13 %, alors qu’on voit l’Allemagne créer des Goethe Instituts, le Royaume-Uni des British Councils, l’Espagne des Instituts Cervantès. Tout se passe comme si la coopération culturelle servait de variable d’ajustement.
D'ailleurs, soyons moins restrictifs à l’accueil des étudiants étrangers, dont l’effectif baisse pour la première fois en 2008.
Comment ne pas comparer la modestie de nos moyens propres au poids des opérations extérieures – 850 millions d’euros dans le budget de la défense, ce qui n’est pas rien, d’autant que les frais réels seraient encore supérieurs – ou au coût du tribunal pénal international pour la Yougoslavie, soit plus de 300 millions d’euros pour plus de 1000 emplois ! Je laisse ces chiffres à votre réflexion, monsieur le ministre, et à celle du Sénat.
Je pourrais également comparer ces crédits à la contribution de la France au budget de l’Union européenne, qui atteindra 17,4 milliards d’euros. En solde net, nous paierons 4 milliards d’euros, ce qui fera de nous le deuxième contributeur net de l’Union européenne, juste derrière l’Allemagne. Où est la cohérence de notre action extérieure ? Voilà une question qui mériterait d’être posée !
Monsieur le ministre, j’en viens à votre politique.
Le XXIe siècle comporte pour la France un grave risque d’effacement, soit que nous nous laissions absorber dans un Empire, soit que notre nation se fracture entre différents communautarismes. Ces deux dangers peuvent d’ailleurs aller de pair.
L’OTAN serait la colonne vertébrale des futurs États-Unis d’Occident, sur lesquels M. Balladur théorise dans un livre récent intitulé Pour une Union occidentale. Je ne crois pas que ce soit là ni l’intérêt ni la vocation de la France : la planète est plurielle, au Sud comme au Nord, et la France a encore un beau rôle à jouer dans un monde de nations.
À quoi sert l’OTAN, monsieur le ministre, quand l’URSS a disparu et dans un monde dont les équilibres se déplacent à grande vitesse vers l’Asie ? Dans deux décennies, le PIB de la Chine aura vraisemblablement rejoint celui des États-Unis.
S’agit-il de nous mettre à la remorque de l’OTAN devenu bras armé de l’Occident, avec les conséquences que l’on observe au Kosovo ou en Afghanistan ?
L’Institut John Hopkins réfléchit, nous dit-on, à un « nouveau concept stratégique de l’OTAN ». Nous aimerions être associés à cette réflexion. Pouvez-vous nous en dire plus ?
S’agit-il de contenir la Russie ? Il est regrettable que le Président de la République ait approuvé le déploiement par l’OTAN de systèmes antimissiles en République tchèque et en Pologne.
M. Jean-Pierre Chevènement. Le principe de l’adhésion à l’OTAN de l’Ukraine et de la Géorgie a été acté, même si sa concrétisation a été renvoyée à un avenir indéfini.
C’est préoccupant, car nous n’avons pas envie de nous laisser entraîner dans les conflits du Caucase ou dans une nouvelle affaire de Crimée dont Sébastopol serait l’enjeu.
Je passe sur le comportement irresponsable de certains leaders politiques qui peuvent mettre en danger la sécurité collective, comme on l’a vu en Géorgie.
On nous dit qu’il existe des critères pour l’admission dans l’OTAN. Je crains qu’en réalité nous n’ayons mis le doigt dans un engrenage.
Le Président de la République nous a expliqué que la réintégration de la France dans l’organisation militaire de l’OTAN était subordonnée dans son esprit à des progrès décisifs en matière de défense européenne. J’avoue ne pas voir ces avancées : on nous parle d’action maritime commune contre la piraterie sous l’autorité d’un amiral britannique ! Monsieur le ministre, ne nous payons pas de mots.
La seule réalisation concrète significative serait la constitution permanente d’un état-major de forces, auquel s’oppose toujours la Grande-Bretagne.
Le retour dans l’organisation militaire intégrée n’aurait pour la France que des inconvénients. Il porterait un coup à l’originalité de notre posture de défense et de politique extérieure aux yeux des peuples du Sud et des puissances émergentes.
Il renforcerait encore la propension de certains de nos officiers généraux à s’évaluer à l’aune du regard américain plutôt qu’à l’aune de l’intérêt national.
En tout cas, le Parlement a un impérieux besoin de débattre de cette question, notamment du « nouveau concept stratégique de l’OTAN », avant toute décision, et avant même le conseil de l’OTAN prévu en avril prochain à Strasbourg. Il ne serait pas admissible que celui-ci soit l’occasion d’une piteuse mise en scène du retour au bercail du fils prodigue.
Certes, il y a quelques aspects positifs dans votre politique. Le succès du lancement de « l’Union pour la Méditerranée » en est un. (M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, acquiesce.) Mais il est obéré par le fait qu’on n’a pas vu se constituer en 2008 un état palestinien viable, contrairement à ce qu’annonçaient des propos imprudents.
Il y a eu surtout le succès de la présidence française de l’Union européenne, d’abord dans la médiation russo-géorgienne, qui préserve la possibilité d’un partenariat indispensable entre la Russie et l’Union européenne et, ensuite, face à la crise financière quand, grâce à une certaine réactivité, le Président Sarkozy a su mettre en congé – mais pour combien de temps ? – les règles européennes qui eussent pu faire obstacle à une stratégie de consolidation bancaire et, je l’espère aussi, de relance économique coordonnée à l’échelle européenne et mondiale.
Leçon de choses pour ouvrir les yeux de ceux qui ne veulent pas voir, on a assisté au retour de la puissance publique, mais aussi des États-nations Le Président Sarkozy a eu la sagesse de le comprendre et d’agir en pratiquant la géométrie variable en matière européenne. C’est par cercles concentriques successifs – G4, Eurogroupe à quinze auquel s’est jointe la Grande-Bretagne, puis Union européenne à vingt-sept – qu’a été dessiné un cadre de cohérence, dans lequel se sont emboîtés des plans qui restent nationaux.
J’observe que le président de la Commission européenne, M. Barroso, ressassant de vieilles patenôtres, voudrait faire valoir à nouveau les règles de concurrence opportunément suspendues, alors qu’il faudrait faire valoir l’idée de politiques industrielles coordonnées.
Opportune également a été la décision de réunir le G20 à Washington, même si l’application tarde et se heurte en Europe aux réticences de Mme Merkel, dont on ne sait si c’est le dogme libéral ou une vision à courte vue des intérêts de l’Allemagne qui les inspirent. Je crois que le rôle de locomotive de la relance correspond à l’intérêt européen et, par conséquent, à l’intérêt national bien compris de l’Allemagne.
La France ne doit pas avoir peur de son ombre, monsieur le ministre. Les retrouvailles avec M. Bush étaient peut-être un peu trop ostensibles, puisque nous allons devoir finalement travailler avec M. Obama, dont M. Védrine a rappelé qu’il n’était pas un Européen de gauche porté à la présidence des États-Unis. L’un de ses premiers discours, à Chicago, évoquait « un nouveau leadership américain ». La vérité est que M. Obama devra réviser à la baisse les objectifs de la politique extérieure de son pays. Il aura aussi besoin de la coopération internationale pour relancer l’économie et instaurer aux États-Unis une société moins inégalitaire.
M. Obama a souhaité nouer un rapport diplomatique avec Téhéran. Il faut résister à la tentation de frapper et donner du temps au temps. L’Iran est la puissance dominante de la région depuis l’écrasement de l’Irak. Les États-Unis peuvent faire comprendre aux dirigeants iraniens que leur intérêt n’est pas dans la prolifération nucléaire dans une région instable du monde. Il serait intelligent de la part de la France de se placer dans la perspective de ce rapprochement irano-américain probable.
M. Aymeri de Montesquiou. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Chevènement. J’ajouterai un mot concernant le Kosovo. Quel intérêt y a-t-il à prolonger notre présence militaire dans un micro-état non viable ? Il ne sert à rien de faire miroiter à une demi-douzaine d’Etats de l’ancienne Fédération yougoslave la perspective d’une adhésion à l’Union européenne, sans leur avoir demandé de procéder à une intégration régionale préalable.
Un mot encore sur l’Afghanistan : c’est une guerre sans issue. La solution n’est pas à Kaboul, elle est à Islamabad, où la jeune démocratie pakistanaise doit s’affranchir de la tutelle de son armée.
Enfin, une question sur la Chine monsieur le ministre : comment expliquez-vous la vivacité regrettable de la réaction chinoise aux propos du Président de la République ? Est-il bien heureux, monsieur le ministre, qu’après avoir échoué à trouver une solution politique viable au conflit israélo-palestinien, ou aux conflits balkaniques, nous allions nous immiscer dans les conflits immémoriaux de l’Hindou-Kouch, du Caucase, des vallées himalayennes ?
Il y a pour la France une manière raisonnable et honnête d’exister, loin de l’hubris de postures que nous ne pouvons soutenir dans la durée, mais tout simplement en nous tenant à la légalité internationale telle que la définit le Conseil de Sécurité, dont nous sommes membre permanent.
Un dernier mot pour dire qu’il suffirait de modifier une simple disposition à la charte de l’ONU, celle qui permet la réélection des membres élus pour deux ans, pour créer des membres semi permanents, ou quasi permanents, et asseoir encore mieux la légitimité déjà grande du Conseil de Sécurité. Ce serait une bonne idée pour la France.
Voilà, monsieur le ministre ! Au XVIe siècle déjà, Montaigne écrivait qu’il se sentait homme en général et Français par accident. J’aimerais que vous ne vous placiez pas dans cette lignée, mais que vous vous rappeliez que l’on peut défendre les intérêts de la France sans trahir ceux de l’humanité. (Applaudissements sur diverses travées.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient au nom du groupe socialiste de me livrer à l’examen critique de la politique internationale de notre pays.
Qu’il me soit permis de rappeler à quel point le budget que nous avons examiné contraint et oriente la politique internationale effectivement menée. Année du Livre blanc et de la révision générale des politiques publiques, 2008 a été de notre point de vue l’occasion manquée d’un vrai choix, celui qu’a fait avec succès voilà quelques années la Grande Bretagne : donner la priorité budgétaire aux capacités d’intervention, d’analyse et d’influence dans des pays clés et mettre fin à la chimère du réseau diplomatique universel. Au lieu de faire de vrais choix, on a fait des demi-choix, des tiers de choix, qu’on n’a pas fini de payer.
Le résultat est que votre ministère perd de sa capacité à agir d’une façon ordonnée et sur le long terme, parce qu’il sacrifie ses hommes, leur intelligence, leur énergie et leur dévouement, au profit des apparences de la puissance et des coups médiatiques.
En réalité, on brade l’action culturelle, on asphyxie l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et l’on triche sur les chiffres de l’aide publique au développement. L’écart s’accroît entre les discours de la France sur la scène internationale et sa capacité à agir conformément aux engagements pris. Face à la mondialisation, la France a besoin d’une diplomatie solide, mise en œuvre par un ministère des affaires étrangères fort de toutes ses richesses humaines, celles de ses diplomates dont on peut louer le professionnalisme, et fort de moyens financiers dignes d’un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU.
Or, après dix ans d’hémorragie, en hommes et en moyens, vos capacités d’action seront encore plus faibles en 2009 qu’en 2008. Il est vrai que, du fait de la centralisation du pouvoir entre les mains de l’hyper président, le Quai d’Orsay pilote de moins en moins la politique étrangère.
De ce fait, plus que les ruptures annoncées par le candidat pendant sa campagne, nous assistons à des renoncements. Le premier est celui de notre politique en Afrique. Je cite ce que proclamait M. Sarkozy le 7 février 2007 : « L’Amérique et la Chine ont déjà commencé la conquête de l’Afrique. Jusqu’à quand l’Europe attendra-t-elle pour construire l’Afrique de demain ?»
La politique africaine de la France est un bon révélateur de la valse-hésitation et des volte-face du Président de la République depuis son élection. Il avait parlé de « rupture » avec les pratiques d’autrefois, avec les réseaux, les amitiés douteuses, en bref avec la Françafrique. L’Afrique allait voir ce qu’elle allait voir !
Mais on a vite vu qu’il n’en était rien. Dès le soir de son élection, parmi les amis du Président de la République invités au Fouquet’s, on trouvait de puissants financiers bien implantés en Afrique, et qui ne sont pas forcément connus pour leur souci du développement. On a vu ensuite une politique dite « d’identité nationale » et plus certainement d’anti-immigration, notamment envers les populations venant d’Afrique.
Ainsi, après avoir lancé aux Africains « un appel fraternel pour leur dire que nous voulons les aider à vaincre la maladie, la famine et la pauvreté », le Gouvernement est revenu bien vite à une politique « d’immigration maîtrisée », réduisant sa politique de soutien au développement. Et, de plus en plus, la politique française en Afrique relève désormais du ministre de l’identité nationale.
Je ne parlerai pas de Jean-Marie Bockel et de ses propos imprudents, qui lui ont valu d’être renvoyé à la demande des autocrates africains.
J’en viens maintenant au second renoncement grave du Président de la République que nous dénonçons et qui concerne notre rôle dans l’OTAN. Le candidat à la présidence avait affirmé : « L’OTAN n’a pas vocation à devenir une organisation concurrente de l’ONU. L’Europe a des intérêts de sécurité qui lui sont propres. Le renforcement de la défense européenne doit donc rester une priorité. ». Là aussi la rupture avec la promesse est pratiquement consommée. Si nos informations sont justes, la France s’apprête à revenir rapidement dans le commandement intégré de l’OTAN.
Qu’y gagnera la France ? Qu’adviendra-il de la politique européenne de sécurité et de défense, que nous sommes pratiquement les seuls à défendre dans l’Union européenne ? Plus grave encore, la France s’est-elle assurée que les perspectives, les contours et les modalités de fonctionnement de l’OTAN seront redéfinis conformément aux intérêts de la France et de l’Union européenne ?
J’en viens à l’Afghanistan, où nous sommes engagés avec force dans le cadre de l’OTAN. Deux opérations coexistent : Enduring freedom et International security assistance force, ISAF Cette coexistence entraîne des incohérences dont nos soldats sont les premiers à pâtir. Je souhaiterais savoir si notre pays œuvre concrètement pour aboutir à un commandement commun, ou au moins à une véritable coordination des actions.
Nous devrions aussi peser fortement sur le commandement américain pour que cessent les bombardements dont sont victimes en majorité les civils. Il n’y a rien de tel pour renforcer une guérilla, comme le montrent les expériences du Vietnam et de l’Algérie. Enfin, je regrette que le montant de notre aide bilatérale en Afghanistan n’ait été que de deux millions d’euros en 2007, quand celle de la Grande-Bretagne s’élevait à 171 millions d’euros. Nous avons le même PIB et l’engagement militaire britannique est aussi important que le nôtre. La disproportion de l’engagement civil est donc frappante.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Depuis 2001, l’aide internationale à l’Afghanistan a été trop faible et mal distribuée. Nous avons de ce fait perdu la confiance de la population. Le combat qui n’a pas été gagné par la solidarité le sera-t-il avec plus de soldats ? Personnellement, j’en doute.
J’en viens maintenant à notre politique face au conflit entre l’état d’Israël et le peuple palestinien. Le Président Sarkozy avait fait un très beau discours à la Knesset. Après le discours, nous attendions les actes. Mais nous avons eu l’approfondissement du partenariat Union Européenne – Israël, qui a failli être voté hier au Parlement européen, sous présidence française.
Monsieur le ministre, il ne me semble pas acceptable de conférer à Israël un statut de quasi-membre de l’Union, au moment où il construit plus de colonies que jamais, c’est-à-dire qu’il conquiert la Cisjordanie par l’installation de populations civiles, ce qui est formellement proscrit par le droit international ; au moment où les entraves à la circulation se multiplient pour les Palestiniens et dépassent les 600 obstacles à la circulation sur 5000 km², c'est-à-dire moins que les deux tiers d’un département français.
Le blocus de Gaza depuis dix-huit mois provoque la faim, la maladie et la mort parmi 1 700 000 civils sans défense, alors que les hôpitaux n’ont plus de matériel et qu’on ne peut plus les entretenir, comme, avec notre collègue Mme Dupont, nous avons pu le voir en juillet dernier.
Monsieur le ministre, vous qui êtes médecin, allez à l’hôpital de Chifa !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Allez voir ces services qu’on ferme parce que les bébés qui viennent d’y naître meurent, parce que les murs sans ciment, sans peinture sont de vrais nids à bactéries, parce qu’il n’est plus possible de faire de travaux d’entretien !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Allez opérer un malade sans avoir pu faire une radio parce que l’appareil est dangereux pour le malade comme pour les opérateurs.
Monsieur le ministre, cet upgrading d’Israël dans le système de l’Union européenne est un encouragement à la violation de la légalité internationale par un Etat créé par l’ONU et qui en est membre. C’est inacceptable.
La pression des parlementaires européens – résolution adoptée par 194 voix contre 173 – a, pour l’instant, permis de reporter cette récompense donnée aux innombrables défis par lesquels Israël répond aux injonctions de la légalité internationale.
L’État d’Israël aurait d’ailleurs bien tort de se priver d’agir ainsi puisqu’il n’a à craindre de la France et de l’Union européenne aucune sanction : il n’en reçoit que des récompenses !
Le Quai d’Orsay ne sait que « déplorer » : déplorer l’explosion de la colonisation en Cisjordanie, qui est en contradiction avec les engagements pris à Annapolis ; déplorer les destructions de maisons à Jérusalem ; déplorer les entraves mises par Israël à la réalisation des projets devant être financés avec les dons promis lors de la conférence de Paris.
Ainsi, le ciment étant bloqué à Eretz, comment construire la station d’épuration des eaux de Gaza, sans laquelle une catastrophe écologique et humaine se produira à Beit Lahiya ? C’est un projet qui vous tient pourtant à cœur, monsieur le ministre.
Enfin, nous aimerions que vous fassiez plus que « déplorer » quand les diplomates français et européens subissent, en violation de la convention de Vienne, vexations et entraves à leurs déplacements. Je vous rappelle l’ouverture à coups de godillots du coffre de la voiture de notre consul à Jérusalem, à l’entrée de Bethléem, il y a un an, sa rétention à Eretz en juin et, récemment, l’interdiction qui lui a été faite d’entrer à Gaza.
Pour résoudre le conflit israélo-palestinien, les solutions sont connues de tous et depuis longtemps. Il faut les mettre en œuvre et, pour cela, exercer les pressions nécessaires. Il faut libérer les Palestiniens de l’oppression insupportable qu’ils subissent et assurer d’un même mouvement la pérennité de l’État d’Israël.
Seules la justice et la paix protégeront l’État d’Israël à long terme : pas le mur, pas l’occupation, pas la colonisation.
Monsieur le ministre, en ce soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, je constate que la France a participé, à côté des États-Unis, à une régression généralisée de ces droits de l’homme : accords sur des mesures de contrôle des voyageurs qui portent atteinte aux libertés individuelles et publiques ; silence sur les injustes incarcérations, sévices et jugements militaires de Guantanamo, amitié et collaboration sécuritaire avec les pires autocrates et même compliments sur leurs prétendues actions en faveur des droits de l’homme, car je n’ai pas oublié ce qui a été dit sur l’élargissement des libertés en Tunisie voilà quelques mois ; soutien à la politique coloniale d’Israël, qui a fait près de 700 morts depuis Annapolis.
On ne peut pas occuper la scène internationale sans définir une ligne de politique étrangère volontariste et cohérente, conforme à nos valeurs fondamentales, ce qui suppose aussi qu’on s’en donne les moyens.
Ce n’est malheureusement pas ce que nous pouvons constater en ce qui concerne la France et c’est pourquoi nous ne voterons pas les crédits qui nous sont proposés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si le rayonnement de la France n’a pas de prix – nous en sommes tous ici convaincus –, il a un coût.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, nous a incités à plusieurs reprises à nous exprimer sans tabous lors de ce débat budgétaire. C’est donc dans cet esprit que j’aborderai tout d’abord la question des cadres du Quai d’Orsay.
Le ministère des affaires étrangères et européennes est, à coup sûr, le plus « grenello-compatible », tant il est vrai que le recyclage y tient une place importante. (Sourires.)
Notre action extérieure ne devrait pas être une agence de recyclage pour des amis en mal d’exotisme, pour des parlementaires ayant perdu leur circonscription ou pour d’anciens ministres, par ailleurs notoirement non anglophones, propulsés au plus haut d’organisations internationales.
Je tiens à citer de brefs extraits du rapport n° 268, fait par M. Adrien Gouteyron au nom de la commission des finances et intitulé « Les cadres du quai d’Orsay : une réforme à engager d’urgence ». Il y relève « un dysfonctionnement dans la gestion des ressources humaines du Quai d’Orsay qui le conduisait à ne pas tirer profit des compétences et des talents de ses agents, d’où pour ceux-ci le risque d’une profonde démobilisation, et d’un malaise particulièrement dommageable dans l’encadrement supérieur ; un dysfonctionnement budgétaire, lié à l’existence de postes occupés par des diplomates expérimentés, et notamment par d’anciens ambassadeurs, ne correspondant pas au niveau de responsabilité que l’on pouvait attendre d’eux, d’où une masse salariale plus coûteuse que nécessaire et des sureffectifs qu’il conviendrait de résorber. »
Nous sommes bien ici, monsieur le ministre, dans le débat budgétaire !
Près d’un diplomate expérimenté sur cinq n’occupe pas un poste correspondant à son grade ou à son expérience.
Parmi les ambassadeurs, se trouvent de surcroît des ambassadeurs dits « thématiques ». Les premiers ont été créés en 1998 par le président Chirac, et cette pratique se poursuit sous l’actuelle présidence. La plupart de ces ambassadeurs thématiques ne proviennent pas du Quai d’Orsay : leur nomination est politique. Cependant, dès lors qu’elle entre dans le plafond d’emploi du ministère des affaires étrangères et européennes, elle accroît la pression sur les effectifs de l’encadrement supérieur, car toute nomination suppose la création d’un équivalent temps plein correspondant. Elle a de plus un effet budgétaire, en termes de « frais de représentation » et de personnel de soutien : secrétaires, chargés de mission, notamment.
Sur ce point, je l’avoue, j’ai un peu l’impression de me répéter d’année en année. Toutefois, depuis l’an dernier, est arrivée une bonne nouvelle.
Mme Nathalie Goulet. En effet, depuis le dernier exercice budgétaire, nous avons remis la main sur l’ambassadeur chargé de la prévention des conflits, qui a fait montre d’une discrétion remarquable tout au long de sa mission : il est désormais président de l’Agence française de développement.
Nous avons aussi, du moins à ma connaissance, perdu l’ambassadeur de la parité – serait-ce que la parité ne mérite plus de représentant ou que le recyclage a fonctionné, par les voies magiques, et cette fois dans le bons sens pour votre budget, du suffrage universel ? (Sourires.) – et il n’est pas remplacé.
Franchement, monsieur le ministre – je le dis sans en faire une question de personnes –, est-ce une pratique convenable, surtout en cette période de crise ?
Par ailleurs, pourquoi envoyer des ambassadeurs non arabisants dans les pays arabes et ceux qui parlent arabe en terre anglophone ? Pourquoi de très brillants ambassadeurs qui parlent des langues rares sont-ils confinés dans des ministères comme conseillers diplomatiques alors que le terrain les appelle ?
Quels sont les critères de sélection pour nos postes d’expansion économique et, surtout, pour des postes d’attaché culturel ?
Je rejoins ce qui a été dit précédemment : nous savons à quel point les relations culturelles et universitaires sont essentielles au soutien des relations économiques.
On ne dira jamais assez les effets majeurs de l’implantation de la Sorbonne et du Louvre à Abu Dhabi ou de Saint-Cyr au Qatar sur le rayonnement de la France. Je tiens à saluer au passage le remarquable travail de M. Dominique Baudis à la tête de l’Institut du Monde arabe, institut atypique qu’il faut soutenir sans réserve.
J’en profite pour dire un mot de la formation en matière de langues étrangères. J’avais déjà alerté, l’an dernier, votre collègue en charge de l'éducation nationale : 0,2 % de nos élèves apprennent l’arabe, 0,5 % étudient le russe.
Comment préparer une génération d’acteurs compétitifs dans ces conditions et pourquoi ne pas utiliser l’excellent Centre de formation interarmées au renseignement, le CFIAR, situé à Strasbourg, comme centre de formation linguistique interministériel ? C’est une proposition que d’autres avant moi ont faite.
Le rayonnement de la France, c’est aussi la politique des visas. Nous en avons longuement et stérilement débattu ici durant l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie.
Vous souhaitez, monsieur le ministre – et l’on vous comprend –, une politique attractive pour les étudiants, comme en témoigne la page 97 du « bleu budgétaire ».
Je vous renvoie également à l’excellent rapport d’Adrien Gouteyron sur le casse-tête des visas.
Vous savez bien entendu que, à la suite de dispositions européennes, nous sommes non seulement les premiers, mais aussi les plus sévères à appliquer cette politique des visas avec empreintes digitales.
Imaginez que tel cheikh des Émirats ou tel membre de la famille royale du Qatar se rendre dans notre consulat à la décoration improbable pour déposer ses empreintes, puis attendre une dizaine de jours pour obtenir un visa !
La présidence française, à l’agenda certes très chargé, n’a rien résolu. Nos amis anglais ont trouvé une solution : c’est leur ambassadeur qui se déplace muni d’une valise et recueille lui-même les empreintes digitales.
M. Brice Hortefeux, à qui j’avais demandé qu’une mesure similaire soit appliquée, m’a répondu, le 20 juin dernier, par la négative.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner quelques raisons d’espérer, s’agissant de ce problème des visas, notamment pour les étudiants ?
Pourriez-vous également faire le point sur la liste de ces ambassadeurs thématiques ou, à défaut, nous transmettre un rapport retraçant sinon leur activité – il ne faut tout de même pas être naïf ! –, du moins leur localisation géographique et leur incidence sur votre budget ?
Il n’est pas douteux que ces ambassadeurs pudiquement qualifiés « thématiques » vivent au-dessus de nos moyens.
Je vais évoquer maintenant l’action de la France à l’étranger – sujet plus classique, épreuve imposée – et notre rôle dans le golfe Persique.
Vous voulez faire des Émirats arabes unis un poste pilote. Bravo ! L’ambassadeur y est brillant, l’équipe est au travail. Les Émirats arabes unis constituent un allié de poids dans la débâcle économique que nous connaissons.
Je souhaite attirer votre attention sur l’Alliance française à Abu Dhabi, qui est totalement incapable de faire face à ses missions en raison d’une demande accrue de formations linguistiques. Il faudrait créer à Abu Dhabi un centre moderne qui unifierait nos outils de francophonie, et y associer les émiriens. Vous ne pouvez pas les solliciter uniquement pour qu’ils donnent des subventions : il faut absolument les associer, car ils sont des partenaires actifs.
M. Aymeri de Montesquiou. Très bien !
Mme Nathalie Goulet. Considérer le Qatar comme un joker diplomatique est une stratégie brillante, dans le dialogue euro-méditerranéen comme dans les autres dossiers. En effet, le Qatar occupe une place stratégique de premier plan. Ses richesses en gaz et en pétrole proviennent d’une nappe qu’il partage avec l’Iran. Ses moyens sont cependant bien supérieurs, et il prélève beaucoup plus que l’Iran, mais leurs intérêts sont liés, ce qui explique le déplacement de Son Altesse l’Émir de l’État du Qatar en Iran et l’invitation du président iranien à la réunion du Conseil de coopération des pays du golfe Persique.
En effet, en cas de conflit ou de dégradation de la situation, le Qatar, ses tours et son développement exemplaire seront aux premières loges. Chacun a donc intérêt à la paix des braves.
J’ajoute que, hormis le royaume de Bahreïn, le Qatar est le seul pays de la région à entretenir des relations avec l’État d’Israël, ce qui peut aider pour les rapprochements dans cet « Orient compliqué ».
Le Yémen, pays le plus pauvre de la région, est prioritaire pour notre action culturelle. Je m’en réjouis.
J’ai passé quelques jours à Sanaa pour y constater l’excellent travail du centre culturel et la francophilie de nos amis yéménites, qui doivent recevoir encore plus de projets de coopération, car ce pays est un maillon faible dans la chaîne du terrorisme et, maintenant, dans celle de la piraterie.
Il faudrait aussi aider les autorités yéménites à résoudre le problème des réfugiés qui, par milliers, quittent la corne de l’Afrique et traversent la mer au péril de leur vie. Le Yémen est débordé par ces réfugiés, qui vivent dans des camps au sud du pays et nourrissent le terrorisme.
Le Koweït nous pose d’autres problèmes. Il est indiqué dans un rapport que ce pays pourrait être doté d’un poste mixte avec un autre pays européen.
Le Koweït est détenteur des quatrièmes réserves pétrolières du monde. Pour entretenir de bons rapports avec lui, je vous encourage chaudement, monsieur le ministre, à nommer un ambassadeur arabisant.
La dernière visite officielle d’un ministre au Koweït fut celle, de quelques heures, de Philippe Douste-Blazy, le 10 mars 2007, un an après celle de Mme Christine Lagarde, alors ministre du commerce extérieur. C’est peu, très peu ! Mais peut-être le site de l’ambassade n’est-il pas à jour, ce qui serait une preuve supplémentaire de ses dysfonctionnements ?
Bien que la situation institutionnelle y soit toujours un peu instable, du fait d’un Parlement un peu turbulent, ce qui est un bon signe pour la démocratie, il faudrait y planifier une visite, monsieur le ministre.
J’en viens à l’Iraq.
Nous n’avons pas appliqué, alors que tous les autres pays européens l’ont fait, la résolution 1483 du 23 mai 2003 du Conseil de sécurité, qui précise, en son article 23, que les États membres de l’Organisation des Nations unies « sont tenus de geler sans retard ces fonds ou autres avoirs financiers ou ressources économiques et (…) de les faire immédiatement transférer au Fonds de développement pour l’Iraq ».
Il faut absolument que ces avoirs soient dégelés avant le 31 décembre prochain. L’ambassadeur d’Iraq en a fait plusieurs fois la demande : il n’a reçu aucune réponse. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
Nous travaillons tous au rayonnement de la France.
Mme Nathalie Goulet. Nous voterons évidemment en faveur des crédits qui nous sont proposés.
Je souhaite que, cette année, on vous laisse le temps de nous répondre, ce qui n’avait pas été le cas l’année dernière puisque vous aviez, à mon grand regret, été contraint d’écourter votre intervention. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, du RDSE et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Robert Hue.
M. Robert Hue. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget pour 2009 de la mission « Action extérieure de l’État » ne permettra guère à notre pays de se distinguer de manière positive sur la scène internationale.
Son examen nous donne aujourd'hui l’occasion, au-delà des débats purement financiers, de faire un bilan, certes non exhaustif compte tenu du temps dont nous disposons, de la politique étrangère de la France.
À l’heure où le monde est bousculé par des conflits de toutes sortes, aux enjeux majeurs, et secoué par une terrible crise du capitalisme financier, aux lourdes conséquences économiques et sociales, à l’heure où la France est aux commandes de l’Union européenne, la question de l’orientation de la politique étrangère de notre pays est plus que jamais posée.
Cette orientation relève toujours, me semble-t-il, du seul ressort du Président de la République,…
M. Robert Hue. …lequel cherche sans cesse davantage à attirer les projecteurs sur lui plutôt que de porter, sur le plan international, une parole de la France qui pourrait être entendue.
Les relations du Président avec les autres dirigeants du monde sont empreintes d’un volontarisme excessif. Des crispations se font sentir çà et là : récemment, la Chancelière allemande n’a pas caché qu’elle était excédée par l’attitude du président Sarkozy. Je l’ai déjà fait remarquer, notre pays gagnerait certainement à rompre avec ce qui, à bien des égards, est perçu à l’extérieur comme de l’arrogance bardée de certitudes, une attitude dont nous n’avons guère les moyens.
Malgré les déclarations intempestives du chef de l’État, le bilan est jugé plutôt terne et l’image de la France dans le monde semble altérée pour les années à venir. (M. le ministre soupire.)
En Afghanistan – c’est le dossier le plus urgent –, sept ans après l’intervention de la coalition internationale, les talibans sont aux portes de Kaboul. À l’évidence, notre présence militaire, engagée dans des opérations guerrières, n’est pas le bon choix. La logique actuelle du Gouvernement français conduit à un renforcement de nos troupes, qui ont pourtant essuyé de lourdes pertes en août dernier et pas moins d’un incident par jour sur les quatre derniers mois. Cela n’a pas de sens !
Je réitère donc notre demande de voir respectés les engagements pris par la France en 2001, à savoir la participation à une mission de maintien de la paix, l’instauration de nouveaux droits pour les femmes et la mise en place d’un contrôle de la drogue.
Nous ne pouvons pas, nous ne devons pas laisser la France s’enliser dans une guerre qui, de plus en plus, nous entraîne dans ce qu’il faut bien appeler un véritable bourbier.
Comment justifier cette tendance de notre pays à augmenter sa présence en Afghanistan, alors que des retraits sont programmés dans des pays à l’avenir incertain ? Je pense à la Bosnie-Herzégovine, en proie à une évolution intérieure gravissime, où le démantèlement de l’EUFOR est pourtant prévu pour 2009. Je pense aussi à la République démocratique du Congo, pays à propos duquel j’aimerais que vous nous précisiez les intentions du Gouvernement. (M. le ministre s’exclame.)
Cette décision de renforcer nos effectifs en Afghanistan participe du retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN. C’est un véritable retour en arrière, qui préoccupe nombre de nos collègues, opposition et majorité confondue, et qui soulève de nombreuses questions. La France risque en effet, d'une part, de voir son rôle et sa place sur la scène internationale affaiblis, et, d'autre part, de ne plus avoir de marge de manœuvre autre que celle, extrêmement réduite, que lui laissera, disons-le, un alignement docile derrière les États-Unis.
Je ne pense pas, pour ma part, que l’élection récente de Barack Obama, qui constitue un incontestable symbole, soit de nature à changer le cours des choses.
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères. Ça !
M. Robert Hue. Les intérêts américains resteront prioritaires : il n’y a aucun doute, aucune illusion à se faire en la matière.
Ce budget pour 2009 s’appuie sur les recommandations du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France, rendu public, l’été dernier, par Alain Juppé. À cet égard, je formulerai un certain nombre d’observations.
Premièrement, la répartition annoncée des ambassades en fonction de l’importance du pays ou de la région constitue un moyen subtil de cacher la baisse des effectifs, sur laquelle je reviendrai. Ambassadeurs ou membres de l’exécutif de certains pays concernés, ils sont quelques-uns à m’avoir fait part – mais sans doute aussi à d’autres – de leurs profondes inquiétudes et de leurs craintes de voir l’image de leur pays altérée par une classification de circonstance qui, à leurs yeux, est purement politique.
Deuxièmement, la réduction du réseau consulaire en Europe se fera au profit des pays émergents, comme la Chine, l’Inde ou le Kurdistan d’Irak. D’autres parlementaires l’ont souligné, la présidence française de l’Union européenne a boudé l’Amérique latine à différents niveaux et à différents moments, notamment en refusant de se rendre au sommet Europe-Amérique latine. La crédibilité des discours officiels sur les pays émergents se trouve alors, bien sûr, fortement entamée.
Troisièmement, concernant l’immigration, le « nouveau regard » sur l’Afrique est naturellement souhaitable, voire obligatoire. Pour cela, il faut redéfinir notre politique africaine, déjà lourdement handicapée par la politique d’immigration et les reconduites à la frontière en hausse constante, ainsi que par une politique d’aide publique au développement – nous l’avons constaté voilà deux jours, en examinant les crédits budgétaires correspondants – qui s’écarte sensiblement et de façon très inquiétante des objectifs fixés.
N’oublions pas non plus les déclarations excessives du Président de la République en Afrique du Sud et à l’occasion de la conférence des ambassadeurs, qui n’ont en rien apaisé la tempête légitime qu’a soulevée chez nos amis africains le discours de Dakar du mois de juillet 2007, lequel a été et est toujours considéré, en Afrique et dans le monde, comme l’un des plus régressifs qui soient.
Quatrièmement, enfin, il reste encore du chemin à parcourir pour concilier les intérêts, notamment économiques et culturels, et le respect des droits de l’homme, au regard de la réception en grande pompe du président Kadhafi, des déclarations en Tunisie ou de l’inconstance pour le moins marquée de nos relations avec la Chine.
Mon collègue Michel Billout reviendra tout à l’heure sur d’autres aspects de notre politique extérieure et insistera, en particulier, sur la situation au Proche-Orient.
J’en viens à présent au budget proprement dit.
La révision générale des politiques publiques, imposée bien avant l’heure au ministère des affaires étrangères, contribue, pour cette année encore, à réduire de 190 agents les effectifs. Ce que vous nommez fièrement une « rationalisation de l’outil » ressemble à s’y méprendre à un plan social. La direction générale de l’administration et vous-même, monsieur le ministre, démentez la formule, bien évidemment, ce qui est tout à votre honneur, mais tout en confirmant les suppressions !
Les perspectives pour 2009-2011 ne sont guère plus réjouissantes. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est exactement, sans masquer la réalité par des restructurations dissimulées ?
Je souhaite également attirer votre attention sur la prise en charge à 100 % des frais de scolarité à l’étranger. Cette mesure est totalement injuste, car elle ne tient pas compte des ressources des familles et avantage assurément les plus hauts revenus.
Dans le même temps, le budget pour 2009 confirme un recul de l’action culturelle et de l’utilisation de la langue française dans le monde, auxquelles j’attache beaucoup d’importance, sous couvert, encore une fois, de rationalisation Nous ne pouvons que le déplorer, et je rejoins nombre des observations formulées à ce propos par notre collègue Monique Cerisier-ben Guiga.
Monsieur le ministre, les actions internationales de la France, affichées tous azimuts, sont à l’image présidentielle, souvent incohérentes et malheureusement peu efficaces. Le budget pour 2009 de la mission « Action extérieure de l’État » est, certes, en légère progression, mais, les programmes n’étant pas dotés dans le sens que nous souhaitons, mes collègues du groupe CRC-SPG et moi-même voterons contre ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le ministre, comme chaque année, je vais vous entretenir non pas de l’action extérieure de la France, sujet qui m’intéresse toutefois au plus haut point, mais des crédits qui y sont affectés et qui sont évidemment indispensables pour que, sous votre conduite, cette action soit menée.
À cet égard, depuis votre entrée en fonction, je me demande si votre ministère n’a pas qu’une seule priorité, à savoir la scolarisation des enfants des Français établis hors de France. Il s’agit d’un sujet extrêmement important, pour lequel le Président de la République a fait un choix simple : assurer la gratuité de l’enseignement français à l’étranger dans les établissements conventionnés de notre important réseau pour les élèves de terminale et de première, et, prochainement, pour ceux de seconde.
Je suis de ceux qui pensent qu’un tel choix est à la fois porteur et bénéfique pour les Français de l’étranger, lesquels peuvent ainsi faire scolariser leurs enfants pratiquement dans les mêmes conditions que nos compatriotes de métropole.
Je constate néanmoins avec regret que, sur ce point, les choix du Président de la République sont contestés dans sa propre majorité. En effet, conformément à ce que souhaite la gauche, certaines associations de parents d’élèves, des parlementaires, des membres de votre ministère et vous-même, me semble-t-il, pensent qu’il aurait été plus judicieux d’augmenter les bourses données aux familles dont les revenus sont les plus modestes plutôt que d’assurer la gratuité.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Certainement !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Les représentants des Français de l’étranger sont partagés. Toutefois, nous nous rappelons que la promesse de François Mitterrand en 1981…
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cela date !
M. Jean-Pierre Cantegrit. …d’assurer la gratuité totale de l’enseignement pour tous les Français de l’étranger s’est soldée, à la fin de son mandat, par le doublement des frais de scolarité pour ces familles.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Elles ont bénéficié de bourses grâce à lui !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Madame, je ne vous ai pas interrompue, alors, je vous en prie, laissez-moi m’exprimer !
Selon moi, l’engagement pris, au cours de sa campagne, par le Président de la République est porteur, même s’il est sélectif ; il a le mérite d’engager résolument une action. Soyons encore plus clairs : le Président n’a pas décidé d’augmenter les bourses scolaires. Ne détournons donc pas sa décision. Je soutiendrai donc l’amendement de mon collègue Robert del Picchia, qui a le mérite de vouloir dresser un bilan avant toute décision.
Mais un autre problème, monsieur le ministre, me guide dans mon intervention : celui de la couverture sociale des Français de l’étranger.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Certains d’entre eux ne sont-ils pas dans une situation précaire, voire difficile, qui nécessite une aide de notre pays leur assurant un minimum de couverture sociale ?
J’ai essayé dans le passé de vous intéresser à ce sujet, mais, je dois l’avouer, je suis quelque peu consterné du résultat du fonds d’action sociale de votre ministère, dont l’objectif est d’agir en faveur des Français âgés, nécessiteux, handicapés, de soutenir les organismes d’assistance, les sociétés de bienfaisance et les centres médicaux, en ce qui concerne, notamment, les rapatriements.
Monsieur le ministre, vous qui, au cours des années passées, avez mené une action résolue et appréciée dans le domaine humanitaire, je vous interroge : l’action sociale de votre ministère est-elle une priorité ? Si c’est le cas, comment se fait-il que les crédits du fonds d’action sociale stagnent de façon dramatique depuis votre arrivée ? Permettez-moi simplement de citer les montants attribués ces dernières années : 16,810 millions d'euros en 2006, 16,340 millions d'euros en 2007, 16,343 millions d'euros en 2008, soit une diminution en euros constants.
Je siège à la Commission permanente pour la protection sociale des Français de l’étranger depuis sa création. Or la réunion annuelle dont l’objet est de répartir les crédits entre les comités consulaires se résume à une gestion de la pénurie, gestion bien faite, d’ailleurs, par les fonctionnaires de votre ministère.
Sur le pôle social de votre ministère, l’adoption internationale, dotée de 160 000 euros, n’a bien entendu qu’une fonction indicative. L’aide de 16 millions d’euros mise en place pour continuer à prendre en charge les Français âgés ou handicapés inscrits au registre des Français établis hors de France est insuffisante, compte tenu de la progression du nombre d’allocataires, passé de 5 162 en 2006 à 5 214 en 2007, puis à 5 358, en 2008.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très juste !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Dans la mesure où l’enveloppe n’augmente pas dans les proportions attendues, on aboutit bien à une gestion de pénurie, qui rend l’accès à cette allocation de plus en plus difficile pour nos compatriotes expatriés.
Pour ce qui est des sociétés de bienfaisance, qui, dans l’esprit de vos prédécesseurs, au début des années quatre-vingt, devaient pratiquement disparaître, nous constatons leur rôle de plus en plus indispensable devant la défaillance de votre ministère, qui doit être comblée par les associations caritatives, vilipendées à une époque, mais que nous avons toujours défendues et que nous considérons comme incontournables.
S’agissant de la Caisse des Français de l’étranger, la CFE, que j’ai l’honneur de présider, la loi de modernisation sociale votée en 2002, sur l’initiative du gouvernement de M. Jospin, a mis en place une troisième catégorie aidée afin de permettre à un certain nombre de nos compatriotes dont les moyens sont limités d’accéder à cette caisse.
Dans les premières années, on a demandé à la CFE de puiser dans ses réserves pour faire face à la mise en place de cette mesure, dont le relais a été assuré, après deux ans d’existence, par une ligne budgétaire créée spécifiquement au sein de votre ministère. Les choses ont bien fonctionné grâce aux directeurs successifs de la direction des Français à l’étranger, mais force est de constater que, pour 2009, la ligne budgétaire ne prévoit que 500 000 euros, ce qui est tout à fait inférieur à la dépense réelle de cette ligne.
Certes, cette troisième catégorie aidée issue de la loi de 2002 pourra faire face à l’année 2009, compte tenu des avances budgétaires mises en place, et j’en remercie le directeur des Français à l’étranger, mais je ne peux qu’être extrêmement inquiet s’agissant de l’année 2010, puisque ces 500 000 euros ne représentent que moins d’un quart de la dépense réelle. La loi de modernisation sociale de 2002 serait-elle donc remise en cause ?
Je n’ose vous rappeler, monsieur le ministre, que le conseil d’administration de la CFE avait demandé à l’unanimité, en 2007, que cette aide soit portée à 50 % de la cotisation. Le nouveau conseil d’administration de la CFE, qui se réunira au début du mois de janvier 2009, aura à se pencher sur ce sujet.
Le poste « Emploi et formation » est doté de 800 000 euros, destinés à soutenir l’emploi et la formation professionnelle des Français de l’étrange. C’est une très bonne idée, mais ces crédits sont bien entendu totalement insuffisants sur ce sujet d’actualité.
Je ne m’étendrai pas sur les rapatriements, dotés de 500 000 euros et sur les subventions aux centres médicaux sociaux, qui s’élèvent à 280 000 euros. La faiblesse de ces chiffres est tout à fait significative.
Monsieur le ministre, je voudrais vous dire à nouveau mon étonnement que ne soit pas mieux prise en compte au sein de votre ministère, quelles que soient les difficultés budgétaires actuelles, la couverture sociale de nos compatriotes Français de l’étranger.
Nous en sommes bien conscients désormais : nous traversons une crise économique majeure, exceptionnelle, et les Français de l’étranger ne seront pas épargnés.
Des mesures vont êtres prises en France pour aider nos compatriotes en difficulté, en situation d’exclusion. Vous êtes le ministre des affaires étrangères, mais aussi le ministre qui veille sur nos compatriotes expatriés. Il vous appartient donc de vous assurer que ces derniers ne sont pas exclus de la solidarité nationale.
Vous avez fait de grandes choses dans le domaine humanitaire. C’est bien ! N’oubliez pas d’aider les Français âgés, nécessiteux, handicapés, exclus, qui sont de plus en plus nombreux dans le monde.
Avant de conclure cette intervention, je tiens à vous dire, monsieur le ministre, combien le président du groupe d’amitié France-Afrique centrale, président délégué de France-Gabon et sénateur des Français de l’étranger que je suis est choqué, ulcéré même, par la relance, pour la énième fois, d’attaques contre les présidents Sassou Nguesso, du Congo, Omar Bongo Ondimba, du Gabon, Obiang Nguema Mbasogo, de Guinée équatoriale, au sujet de leurs propriétés en France. Ces affaires ont fait l’objet d’instructions de la justice française, classées sans suite. Or je constate, une fois encore, que l’on vient les relancer et que des associations qui ne représentent qu’elles-mêmes, relayées complaisamment par certains médias – France Info, Radio France Internationale, Europe 1 –, tentent à nouveau de créer des polémiques.
Est-il utile de vous rappeler que nombreux sont nos compatriotes qui résident au Congo, au Gabon et en Guinée équatoriale, et que la France a des intérêts importants dans ces pays ?
Je constate que les pays anglo-saxons savent mieux que nous gérer leurs intérêts à l’extérieur. Mettre en cause, comme on le fait, des amis de la France comme le président Omar Bongo Ondimba est choquant et irresponsable. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, d’une logique de présence à une logique d’influence, la diplomatie française trouve aujourd’hui un nouveau souffle, en redéfinissant ses priorités selon les enjeux de la mondialisation et en donnant un rôle majeur de coordination interministérielle à l’ambassadeur.
Ce budget triennal de la mission « Action extérieure de l’État », prévoyant 2,50 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,52 milliards d’euros en crédits de paiement pour 2009, marque une nouvelle impulsion de la politique étrangère et une modernisation en profondeur du Quai d’Orsay. Ces réformes voulues par le Président de la République sont le résultat des conclusions du Livre blanc sur la politique étrangère et de la révision générale des politiques publiques.
Ces réformes vont dans le sens que j’appelle de mes vœux depuis des années, et je m’en réjouis. En effet, il était plus que temps de rationaliser la répartition géographique des ambassades et consulats, de l’orienter vers les pays émergents au fort potentiel économique et de donner un rôle central et décisif à l’ambassadeur, qui devient le chef effectif des services extérieurs de l’État dans son pays de résidence.
Le deuxième réseau diplomatique mondial, comptant 160 ambassades, 97 consulats et consulats généraux, et 21 représentations multilatérales, coûte 94,8 millions d’euros, selon le projet annuel de performance 2009. Si l’universalité du réseau qui caractérise la diplomatie française est préservée, celui-ci sera désormais modulé en fonction de nos intérêts et aura un caractère évolutif. L’adaptation du format des ambassades en trois types, en fonction des priorités géographiques de la politique étrangère française, est une mesure efficace et rationnelle.
L’ouverture de consulats dans des pays émergents – deux en Chine, deux en Inde et un en Russie depuis 2005 –, la rationalisation géographique de certaines fonctions consulaires pour créer des pôles régionaux en Europe et aux États-Unis, le besoin de présence de la France dans certains pays, sont des réalités qui conduisent notre pays à redéfinir ses zones d’influence prioritaire. À mon sens, ce sont, entre autres, la Chine et l’Inde, pays qui comptent des villes de plusieurs millions d’habitants et où nos compatriotes sont de plus en plus nombreux à s’installer, la Russie et l’Asie centrale, où les projets, notamment énergétiques, se multiplient et offrent de larges perspectives à nos entreprises, ou encore le monde indo-persan, région conflictuelle où se jouent et la paix et la sécurité mondiales et, bien sûr, le Brésil, qui passe de statut de pays du futur à celui de pays du présent.
Monsieur le ministre, je souhaiterais obtenir des précisions sur les critères qui seront retenus pour définir les zones prioritaires et la modulation en trois catégories de nos ambassades, ainsi que sur le calendrier de mise en œuvre.
Par ailleurs, la création d’un centre de crise compétent pour l’alerte précoce, la réactivité opérationnelle et le partenariat avec les acteurs humanitaires permet au ministère des affaires étrangères de jouer pleinement son rôle de coordination de l’action extérieure. La mise en place d’une direction générale de la mondialisation est l’autre adaptation indispensable à ce monde en effervescence et en pleine mutation.
Notre diplomatie d’influence connaît un nouvel élan grâce à la réorganisation des services culturels, des instituts et centres de recherche ainsi que des Alliances françaises pour une meilleure stratégie culturelle. Elle prend tout son sens grâce à l’image spécifique que la France véhicule dans le monde, en particulier dans des pays sortant des sphères habituelles. Ainsi, les services culturels français en Afghanistan sont actifs et la création d’un bureau d’ambassade et d’une annexe du centre culturel français à Erbil, au Kurdistan irakien, obéit à la même logique de demande de présence française comme élément d’équilibre.
Pour ce qui concerne l’Europe, il existe encore vingt-huit consulats français au sein de l’Union européenne, mais la régionalisation des sections consulaires en Allemagne, Italie, Espagne, Belgique, Portugal et Pologne, ainsi que la transformation de douze consulats généraux en consulats à gestion simplifiée depuis 2004, ont permis l’économie d’une soixantaine d’emplois en Europe et leur redéploiement dans les pays émergents. Le transfert de certaines compétences des postes consulaires aux préfectures ou mairies frontalières françaises est une excellente initiative, qui doit être développée au niveau de tous les membres de l’Union européenne.
Cependant, on devrait aller plus loin en s’appuyant sur le concept de citoyenneté européenne. Les administrations de l’Union européenne devraient pouvoir répondre aux demandes des ressortissants de tous les États membres.
Je préconise depuis longtemps le développement des co-localisations européennes. Elles sont effectives entre la France et l’Allemagne, conformément à l’accord-cadre de 2006, comme à Astana au Kazakhstan ou à Lilongwe au Malawi, en projet à Dacca au Bangladesh et à Maputo au Mozambique, mais encore embryonnaires ou inexistantes avec les autres États membres. Elles doivent être multipliées à partir de ce modèle de référence qu’est l’accord franco-allemand. Les zones prioritaires comme les zones non politiquement stratégiques doivent être définies en coordination au niveau européen.
Enfin, le développement de la formule des postes mixtes consulats-missions économiques est une réalité que je souhaite voir émerger partout pour soutenir, en particulier, notre commerce extérieur déficient. Pouvez-vous m’apporter des précisions sur le nombre et la localisation des postes mixtes existants comme sur les perspectives nouvelles de création ?
En effet, les 165 missions et services économiques sont en nombre équivalent en postes et la coordination avec l’ambassade pour la politique économique est fondamentale. La future direction des politiques de mobilité et d’attractivité, compétente pour l’appui aux entreprises, jouera certainement un rôle moteur dans la mise en œuvre de notre politique économique à l’étranger. Je me réjouis de l’efficacité et de la coordination interministérielle à travers le Comité des réseaux internationaux de l’État à l’étranger, le CORINTE, et du rôle clé de votre ministère.
Monsieur le ministre, les réformes entreprises sont indispensables et courageuses. Je soutiendrai votre budget. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, ce budget, le second sous votre responsabilité, s’inscrit dans la suite d’un double exercice, largement contradictoire : d’une part, les conclusions de la commission du Livre blanc, présidée par MM. Alain Juppé et Louis Schweitzer, et, d’autre part, la révision générale des politiques publiques, la RGPP, aggravée par le contexte de crise économique, financière et donc budgétaire.
Les efforts demandés au ministère des affaires étrangères et européennes qui demeure, non par sa mission mais par ses moyens, un ministère faible, viennent s’ajouter à des efforts lourds et constants déjà consentis par le passé. En effet, la rationalisation du Quai d’Orsay a été entreprise bien avant la RGPP. Il a déjà perdu beaucoup de sa substance. Les coupes pourtant se poursuivent, notamment sur le terrain des emplois, puisque 190 d’entre eux sont supprimés pour l’année 2009.
Le risque est réel, et déjà perceptible, monsieur le ministre, qu’à court terme, après avoir taillé dans la chair, on touche désormais à l’os, selon l’expression maintes fois répétée ici et parfaitement juste. Cette crainte était d’ailleurs évoquée par le Livre blanc, qui évoque dans ses conclusions la hausse nécessaire des crédits de la mission, sous peine de déstabiliser en profondeur l’outil diplomatique et, en conséquence, d’affaiblir notre politique étrangère.
Cette toile de fond étant posée, je souhaiterais aborder, après avoir dit un mot sur les évolutions de structure au sein du ministère, l’action culturelle extérieure, puis la situation de l’audiovisuel extérieur, qui sont probablement les deux domaines à subir le plus largement la dégradation budgétaire évoquée.
Monsieur le ministre, j’avais eu l’occasion, lors du précédent exercice budgétaire, de vous faire part de mes interrogations sur les évolutions dont il était alors seulement question concernant la Direction générale de la coopération internationale et du développement, la DGCID, et de ma crainte de la voir tout simplement disparaître par absorption ou éclatement.
J’avais rappelé à la fois la nécessité d’opérer une actualisation des structures, dix ans après la réunion du ministère de la coopération et du ministère des affaires étrangères, et le risque de voir la DGCID en quelque sorte « effacée » dans une grande direction transversale.
Il n’est pas certain, et c’est un euphémisme, que la transformation de la DGCID en une nouvelle direction générale chargée de la mondialisation, du développement et des partenariats, issue d’un rapprochement entre l’actuelle DGCID et la direction des affaires économiques, soit de nature à nous rassurer.
Vous semblez vouloir faire, monsieur le ministre, de cette nouvelle direction générale un organe de poids. Ma crainte est que ce nouvel organe ne soit plutôt… pesant, quand notre administration centrale aurait besoin de souplesse, de fluidité et de réactivité.
Mon autre crainte est que, au sein de cette nouvelle superstructure, la coopération culturelle ne se trouve désormais, au mieux, reléguée après les questions économiques et de développement, comme la culture l’est trop souvent et, au pis, délaissée. Le risque est vécu avec une particulière acuité dans nos relations avec le continent africain.
Permettez-moi, en outre, d’émettre des doutes sérieux sur la capacité du ministère d’accompagner financièrement et humainement ces évolutions de structure.
L’objectif de confier à cette nouvelle direction générale le pilotage stratégique effectif ne pourra être atteint qu’à la condition qu’elle bénéficie des moyens correspondants. Or la diminution des effectifs, ajoutée à la stagnation ou à la baisse des subventions de l’État aux opérateurs, me laisse, de ce point de vue, dubitative.
La mission « Action extérieure de l’État » est prise en tenaille entre le poids des contributions internationales et le coût croissant de la prise en charge des frais de scolarité des élèves français, décrétée par le Président de la République. C’est l’action culturelle extérieure qui sert de variable d’ajustement. Les crédits diminuent de 13 % en 2009 et, selon le document de programmation triennale, ils pourraient baisser de 25 % de 2009 à 2011.
Je crois que, sous couvert d’une réorganisation qui demande, vous l’aurez compris, monsieur le ministre, quelques réponses de votre part quant au traitement réservé au pôle consacré à la coopération culturelle, le Gouvernement mène en fait une simple politique de réduction des crédits et des emplois.
Partagez-vous, monsieur le ministre, le point de vue exprimé par M. Woerth à l’Assemblée nationale selon lequel il y a suffisamment d’argent dans le domaine culturel ?
Après avoir évoqué la question des moyens financiers conférés aux opérateurs, je souhaite dire quelques mots sur CulturesFrance. Destinée à devenir l’opérateur unique et central en matière de coopération culturelle internationale, cette structure est confrontée à une situation budgétaire dont ne sauraient se satisfaire celles et ceux qui sont profondément attachés à ses missions.
La dotation de l’État était passée de 22 millions d’euros en 2007 à 16 millions en 2008. Le projet de loi de finances pour l’année 2009 n’opère qu’une réévaluation mineure – 18,6 millions d’euros – et qui, surtout, reste artificielle compte tenu de l’élargissement du périmètre d’action de CulturesFrance, comme l’a souligné notre rapporteur pour avis, Mme Cerisier Ben Guiga.
En tout état de cause, les crédits budgétaires pour CulturesFrance, qu’ils proviennent des programmes 185, 209, ou 224, ne lui permettront pas de répondre pleinement aux missions élargies qui sont les siennes.
De plus, CulturesFrance a besoin d’un statut juridique adéquat. Sa structure associative ne lui permet assurément pas de s’imposer comme l’opérateur unique de la coopération culturelle. C’est pour remédier à cette carence que notre Haute Assemblée a adopté en 2006, à l’unanimité, une proposition de loi tendant à donner à CulturesFrance le statut d’établissement public à caractère industriel et commercial. Aussi vous saurais-je gré de bien vouloir nous indiquer, monsieur le ministre, le délai dans lequel la proposition de loi pourrait être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, discutée, et je l’espère, adoptée.
Je souhaiterais clore mon propos en évoquant la dimension audiovisuelle de l’action extérieure de l’État.
La dotation pour 2009 est notoirement insuffisante. Je sais bien que l’audiovisuel extérieur ne relève plus directement de votre compétence ni de la mission « Action extérieure de l’État »: Je sais bien aussi qu’il est actuellement de bon ton de placer l’audiovisuel public au plus près du sommet du pouvoir, mais, en l’occurrence, c’est une aberration pour l’action extérieure de la France.
Cela revient à affaiblir, de fait, toute volonté de rapprochement, de coordination et de cohérence entre le futur opérateur unique de l’action culturelle extérieure et la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France. Ce cloisonnement constituera sans nul doute un « moins-disant » diplomatique et culturel important, autant pour l’opérateur unique annoncé que pour l’outil audiovisuel extérieur.
Cet outil audiovisuel extérieur connaît de profondes mutations, avec la création, en avril 2008, de la nouvelle société « Audiovisuel extérieur de la France ». Alors que l’avènement d’un nouvel outil demandait un effort budgétaire marqué, l’année 2009 consacre pourtant une stagnation des crédits et s’avère être de fait, en contradiction avec les objectifs nouveaux, une année de rigueur budgétaire.
Des projets sont, en conséquence, provisoirement différés ou simplement abandonnés. France 24 va devoir reporter le lancement de son canal en arabe en continu et l’extension de sa couverture en Amérique du Nord et en Asie, deux zones où votre politique étrangère a pourtant de grandes ambitions ! RFI s’attend à d’importantes suppressions de postes, à la fermeture de certaines de ses antennes et à l’arrêt de plusieurs de ses émissions en langue étrangère à destination de l’Allemagne, de la Pologne ou encore de la Turquie.
Nous vous avons adressé, monsieur le ministre, avec plusieurs de mes collègues du groupe socialiste, un courrier vous faisant part de notre vive émotion face à ces annonces multiples de suppressions. Votre récente réponse, qui s’abrite derrière les contraintes budgétaires et les audiences, ne nous éclaire nullement sur la stratégie diplomatique.
L’action culturelle extérieure et l’audiovisuel extérieur sont des leviers majeurs pour notre diplomatie et pour la diffusion de notre culture, de notre langue. Ils sont la marque distinctive de la politique étrangère française. Il vous appartient, monsieur le ministre, de les moderniser, de les actualiser, de les développer, mais aussi de les préserver.
Faute d’engagements en ce sens, nous ne pourrons pas voter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite, à l’occasion de l’examen des crédits sur les actions extérieures de l’État, évoquer le Proche-Orient, qui a constitué longtemps un axe fort de la politique internationale de la France. Or la situation se dégrade fortement dans cette région.
Selon le dernier rapport de la Banque mondiale, c’est à présent 38 % de la superficie de la Cisjordanie qui sont occupés et utilisés par l’État d’Israël, soit pour l’implantation illégale de colonies, au nombre de 120 aujourd’hui, soit pour établir des voies de communication, interdites aux Palestiniens.
La bande de Gaza fait, pour sa part, l’objet d’une « punition collective », d’un blocus inacceptable, encore renforcé depuis le début du mois de novembre, imposant aux populations des conditions de vie intolérables ; je pense notamment à l’accès aux soins, à l’approvisionnement en énergie et en denrées alimentaires, à l’éducation.
Alors que l’ensemble des ONG dénonce une situation qui n’a jamais été aussi déplorable, Israël reste sourd aux appels de la communauté internationale sur la levée du bouclage de Gaza.
La trêve sécuritaire annoncée en juin dernier est aujourd’hui menacée. Nous savons pourtant que la violence d’État perpétré par Israël contre les Palestiniens au nom de la lutte contre le terrorisme nourrit les positions extrêmes qui ajoutent, de façon intolérable, aux drames existants des actions très condamnables. Cela éloigne encore les perspectives de paix dans cette région du monde.
Le non-respect par Israël de la IVe convention de Genève, qui a trait à la protection des populations civiles, et l’indifférence aux résolutions émises par le Conseil de sécurité de l’ONU depuis 1947 appellent aussi une réponse internationale forte.
Pourtant, la Commission et le Conseil européens ont toujours refusé de prendre des sanctions contre la politique d’occupation menée par Israël.
Une sanction nécessaire et juste devrait notamment passer par la suspension de l’accord d’association de l’Union européenne avec ce pays. La demande en ce sens a été rejetée par la Commission et le Conseil européen. À l’inverse, le Conseil de l’Union européenne a donné, le 16 juin dernier, une réponse favorable à la demande israélienne de progresser vers l’établissement d’un partenariat stratégique donnant un droit d’accès à toutes les politiques communautaires. Comme si Israël était quasiment un État membre de l’Union européenne !
Ce projet est même l’un des objectifs rappelés par Nicolas Sarkozy lors de la présentation des priorités de la présidence française du Conseil de l’Union européenne devant la commission des affaires étrangères du Parlement européen, le 15 juillet dernier.
Selon une clause particulière, ce statut spécial est lié aux progrès à réaliser dans le processus de paix. Toutefois, il s’agit plus d’une clause de style que d’une véritable condition puisque aucune contrainte en cas de manquement ou de non-respect des engagements pris.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
M. Michel Billout. Rappelons, à ce titre, que la clause identique dans l’accord d’association n’a jamais empêché, bien au contraire, Israël de poursuivre sa politique contestable et l’Union européenne de considérer ce pays comme un partenaire privilégié. Soyons donc sans illusion sur cette clause, d’ailleurs contestée sur le fond par certains États membres.
En outre, comment ne pas voir dans ce statut privilégié la confirmation d’un système à deux poids, deux mesures ? Je m’explique : lors de la crise du Caucase, l’État russe a été sommé de quitter le territoire géorgien avant toute reprise des discussions sur le nouvel accord de partenariat, ce qui était une bonne chose. À l’inverse, la politique de colonisation et le non-respect du droit par Israël ne sont pas considérés comme des obstacles de principe à la mise en œuvre de partenariats spécifiques par l’Union européenne. C’est profondément regrettable !
Dès lors, comment ne pas voir dans le refus de vote du Parlement européen du 3 décembre dernier sur le rehaussement des relations avec Israël un signal encourageant, qui devrait conduire le Conseil de l’Union à réviser sa position en la matière ?
Le Président de la République avait appelé de ses vœux la création d’un État palestinien avant la fin de l’année 2008. Mais il n’a, malheureusement, engagé aucune action concrète en vue de la réalisation de cet objectif, notamment dans le cadre de la présidence française de l’Union.
Pour le groupe communiste, républicain et citoyen et des sénateurs du parti de gauche, l’objectif de création d’un véritable État palestinien doit redevenir l’une des priorités de l’action française sur le plan international, notamment au niveau de l’Union européenne.
Le Gouvernement français doit donc prendre ses responsabilités en exigeant une prise de position claire sur la levée du blocus imposé à Gaza, sur l’arrêt de la colonisation comme conditions préalables à l’existence d’un quelconque partenariat et en portant résolument cette exigence au niveau de l’Union européenne.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Michel Billout. Dans ce cadre, le Gouvernement français doit, au sein des institutions européennes, prolonger le report du rehaussement des relations avec Israël jusqu’au jour où ce pays aura donné les « signes sérieux de bonne volonté traduits par des résultats tangibles sur le terrain », notamment concernant les engagements pris lors de la conférence d’Annapolis.
En clair, la France doit s’imposer, au sein de l’Union européenne, comme moteur d’une véritable résolution politique du conflit, en travaillant à l’élaboration d’une feuille de route, comme l’avait annoncé le président Sarkozy le 15 juillet dernier devant la commission des affaires étrangère au Parlement européen. Le Gouvernement français devrait enfin s’y engager, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Je voudrais, contrairement à d’autres, commencer par vous féliciter, monsieur le ministre. En effet, malgré les difficultés budgétaires évoquées, malgré la très grande complexité de la situation mondiale, que certains des collègues qui m’ont précédé connaissent peut-être moins bien qu’ils ne le prétendent, la politique que vous menez avec le Président de la République nous satisfait, comme elle satisfait nos compatriotes de l’étranger.
Nous nous réjouissons de voir que l’image de notre pays est plutôt bonne et que celui-ci tient sa place malgré les difficultés. On l’a vu notamment depuis que la France a pris la présidence de l’Union européenne.
Je ne ferai, en cet instant, que citer la crise en Géorgie, sujet qui mériterait sans nul doute d’amples développements. Ceux-ci pourraient d’ailleurs trouver leur place dans un débat de politique étrangère organisé ici.
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
M. Robert del Picchia. Du reste, il est évident que vous ne pourrez pas, aujourd'hui, dans le cadre de ce débat budgétaire, répondre à tous les intervenants sur tous les thèmes qui seront abordés. Un tel débat de politique étrangère n’en paraît que plus justifié.
M. Robert del Picchia. Merci, monsieur le ministre !
Je développerai surtout la question de la prise en charge des frais de scolarité. Comme vous le savez, elle fait couler beaucoup d’encre, certains estimant qu’elle risque de mettre en péril le budget de la nation ou, du moins, de contribuer dangereusement au déficit budgétaire. Nous allons voir que ce n’est pas le cas.
Je voudrais tout d’abord faire quelques rappels à l’attention de ceux de mes collègues qui ne connaîtraient pas tous les aspects du problème. Pourquoi cette prise en charge des trois classes de lycée ?
Il faut être clair et parler vrai : il est exact qu’il s’agit d’une décision politique, prise par le Président de la République. Elle répond à une demande formulée depuis de nombreuses années par de nombreuses familles de Français de l’étranger. Les parents d’élèves réclamaient que la scolarité fût gratuite dans les écoles françaises à l’étranger comme elle l’est dans les écoles publiques en France.
Chers collègues de gauche, Mme Ségolène Royal avait promis exactement la même chose que Nicolas Sarkozy. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Monique Cerisier-ben Guiga et M. Yves Dauge. Non, ce n’est pas vrai !
M. Robert del Picchia. Elle avait fait une promesse du même ordre. La méthode était différente, mais le but était bien celui-là.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Et vous allez sans doute dire que Jospin l’avait aussi promis avant, mais ce sera tout aussi faux !
M. Robert del Picchia. Les trois précédents Présidents de la République avaient pris des engagements en ce sens. Aucun n’a pu les tenir.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ah, ces mensonges, c’est quelque chose !
M. Robert del Picchia. Pourquoi choisir de ne prendre en charge que les frais de scolarité des élèves des trois classes de lycée ? Pour trois raisons.
Premièrement, il faut le reconnaître, nous n’avions pas les moyens de prendre en charge les frais de scolarité de toutes les classes.
Deuxièmement, les parents d’élèves qui ont payé pendant neuf années peuvent, en quelque sorte, profiter d’une prime de fidélité à l’école.
Troisièmement, il s’agissait d’enrayer l’hémorragie des élèves après la classe de troisième, qui correspond à la fin de l’obligation de scolarité. La pyramide des âges des élèves est très claire à cet égard.
Cette mesure a donc été prise et elle est appliquée.
Pour ceux qui s’y opposent, elle est injuste et discriminatoire, coûterait cher et rejetterait les enfants étrangers de nos écoles françaises.
Je crois qu’il faut raison garder et se fonder sur les chiffres réels, non sur des estimations. Selon les chiffres réels, fournis très récemment par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et le ministère – ils ont été présentés hier au conseil d’administration de l’Agence –, nous avons dépensé 18 214 593 euros pour les deux campagnes ouvertes à ce jour.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ce n’est qu’un début !
M. Robert del Picchia. Une fois la mesure étendue aux trois classes du lycée, nous atteindrons un montant d’environ 40 millions d’euros en année pleine ; peut-être 45 millions d’euros.
Si l’on trouve que l’école est trop chère à l’étranger, laissez-moi quand même rappeler que, selon les statistiques de l’éducation nationale, un lycéen coûte en France 10 320 euros par an, en moyenne, contre 3 600 euros pour un élève d’un de nos établissements à l’étranger. Mais laissons là le débat sur le coût par élève.
Des 12 560 lycéens qui peuvent prétendre au bénéfice de la mesure, il faut retrancher les 32 % – pourcentage qui figure dans le « bleu » budgétaire – d’élèves boursiers ou dont les parents perçoivent déjà une prise en charge de l’employeur. D’ailleurs, bon nombre de diplomates et de fonctionnaires, en raison du supplément familial, ne peuvent prétendre à cette prise en charge. La mesure ne concerne donc en fait que 8 540 élèves.
Toujours selon les opposants à cette mesure, la gratuité de la scolarité au lycée provoquerait un appel d’air entraînant des inscriptions en masse. C’est tout simplement faux, car impossible. Un enfant résidant à l’étranger qui, avant l’âge d’entrée au lycée, n’a jamais fréquenté l’école française a nécessairement été jusque-là scolarisé dans une école étrangère. Dès lors, il ne pourra pas entrer directement en classe de seconde ou en classe de première.
Certains pourraient, me direz-vous, venir exprès de France. Mais la circulaire de l’Agence le précise : en raison de l’obligation de résidence des parents dans le pays du lycée concerné, il n’y aura pas de tourisme linguistique à Londres, à Madrid ou à Berlin. Bien entendu, si l’expatriation prévoit que les parents se déplacent dans un pays, ils pourront bénéficier de cette prise en charge. Cependant, nous l’avons vu, l’expatriation augmente peu, sauf en Asie, où elle répond à un but économique.
Quant à la question de l’éviction des enfants étrangers de nos établissements, elle ne se pose pas : il y a, dans nos écoles à l’étranger, plus d’enfants étrangers que d’enfants français.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Il y en a de moins en moins !
M. Robert del Picchia. Selon les chiffres livrés hier par l’Agence, les trois classes de lycée comptent, 12 560 enfants français et 16 600 enfants étrangers.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Heureusement !
M. Robert del Picchia. J’en suis ravi, moi aussi ! C’est excellent pour le rayonnement de la France, pour notre politique. C’est aussi très bon pour le fonctionnement de l’Agence. En tout cas cela n’invalide en rien l’intérêt de la mesure en cause.
On nous parle, bien sûr, d’équité : le fait que des enfants de familles très riches profitent de la prise en charge suscite des réticences. Je peux comprendre ce point de vue et il faudra réfléchir à un éventuel plafonnement de la mesure. J’y reviendrai tout à l’heure en présentant l’amendement que j’ai déposé. Au passage, je remercie d’ailleurs le rapporteur spécial, M. Gouteyron, de m’avoir cité, reconnaissant ainsi que j’étais et demeure favorable à une telle mesure.
En revanche, je souhaite que soit, préalablement à toute décision, établi un bilan de son application à la classe de seconde, car nous ne pouvons évidemment pas encore en apprécier exactement les conséquences. Une fois ce bilan dressé, nous pourrons prendre les dispositions nécessaires, différentes modalités pouvant être envisagées : plafonnement, retour progressif vers des bourses, etc.
En attendant, les sommes correspondant, d’une part, à la prise en charge, d’autre part, aux bourses figurent de toute façon dans le programme 151. Comme elles sont gérées, me semble-t-il, par la direction des Français à l’étranger, l’éventuel surplus d’argent alloué à la prise en charge sera automatiquement affecté aux bourses. L’inverse n’est pas envisageable puisque les bourses nécessitent plus d’argent que la prise en charge.
Quoi qu'il en soit, contrairement à ce que prétendent certains, les Français de l’étranger ne sont pas tous des exilés fiscaux.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ça, c’est sûr !
M. Robert del Picchia. Pour un Johnny Halliday qui s’établit en Suisse, il se trouve des centaines de milliers d’anonymes, ni plus riches ni plus pauvres que les autres Français, qui vont vivre hors de nos frontières ! La population française à l’étranger compte, elle aussi, une classe pauvre et, surtout, une classe moyenne.
Peut-être faudra-t-il aller plus loin que le double plafonnement et opter pour une autre mesure, ramenant vers les bourses de façon progressive, avec un pourcentage de remboursement,…
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Eh bien voilà ! Faisons-le !
M. Robert del Picchia. … mais attendons de disposer d’un bilan de l’application concrète de la prise en charge pour les élèves de seconde.
Pour l’instant, on fait des prévisions, on échafaude des propositions à partir de vagues estimations qui sont manifestement beaucoup trop hautes. Attendons donc d’avoir les chiffres exacts pour déterminer quoi faire.
Je propose d’ailleurs, monsieur le ministre, un moratoire sur l’extension de cette mesure aux autres classes, et tout le monde, me semble-t-il, approuve cette idée. Mais je fais dès aujourd’hui le pari que les chiffres qui ont été avancés se révéleront totalement fantastiques et que nous reviendrons à ordres de grandeur raisonnables.
J’espère que cet amendement sera adopté. Il constitue peut-être la solution qui nous permettra de sortir d’une situation difficile – sinon d’une impasse –, que la crise financière nous incite à gérer de la manière la plus fine possible. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs, je souhaite, si vous le permettez, concentrer mon intervention sur la présidence française de l’Union européenne, qui va se terminer dans quelques semaines.
Au moment même où nous débattons se tient à Poznan la Conférence internationale sur le changement climatique. L’Union européenne, vous le savez, y est particulièrement attendue.
Bien sûr, cette conférence de suivi du protocole de Kyoto est perçue comme intermédiaire. Le rendez-vous le plus crucial, celui qui devra engager le monde dans l’après-Kyoto, aura lieu l’an prochain, à Copenhague. Si c’est une administration américaine défaite qui, à Poznan, représente les États-Unis, nous savons que le président élu, Barack Obama, s’est engagé à ce que son pays adopte une autre politique et se fixe d’autres ambitions, en matière de lutte contre le changement climatique.
Barack Obama ne prenant ses fonctions que le 20 janvier prochain, la conférence de Poznan se déroulera, pour ainsi dire, en apesanteur : il s’agira effectivement, pour l’Union européenne et pour les autres parties prenantes, de négocier avec des représentants américains dont chacun sait bien qu’ils n’ont plus la main. Cet étrange jeu de dupes serait amusant s’il ne s’agissait – nous en conviendrons tous ici – d’affaires si graves.
C’est en tout cas, monsieur le ministre, une raison supplémentaire pour que l’Union européenne ne faille pas à son rôle pionnier dans la lutte contre le dérèglement climatique. C’est pourquoi la France, qui préside actuellement l’Union, doit elle aussi se montrer exemplaire.
De ce point de vue, je dois bien avouer que j’ai quelques inquiétudes. On connaît les aléas du paquet climat-énergie, dont personne ne sait, à l’heure actuelle, s’il pourra effectivement être adopté avant la fin de l’année ni, surtout, s’il est adopté, dans quel état il le sera.
Il y a quelques jours, un compromis sur la future réglementation européenne visant à obliger les constructeurs à réduire les émissions de CO2 des voitures neuves a été conclu entre les États membres de l’Union, le Parlement européen et la Commission européenne. Ce compromis, permettez-moi de le dire aussi franchement que simplement, est déplorable. L’objectif de réduction des émissions de CO2 par kilomètre passe d’une moyenne de 120 grammes à une moyenne de 130 grammes et, au surplus, le délai laissé aux constructeurs pour l’atteindre s’allonge : il n’expire plus en 2012 mais en 2015.
Je ne veux pas être pessimiste, mais quand même : hier, le Président de la République a annoncé une prime au retrait des voitures vieilles de dix ans au profit de voitures neuves à condition que ces dernières n’émettent pas plus de 160 grammes de CO2 par kilomètre. Voilà qui est encore plus laxiste. Ce n’est pas bon signe.
Ce compromis entache nettement la présidence française de l’Union, alors que la lutte contre le dérèglement climatique avait été érigée en priorité, ce qui était une bonne chose.
Vous me répondrez, monsieur le ministre, que le Président de la République n’a ménagé ni ses efforts ni son énergie et qu’il a fait preuve d’un volontarisme considérable. Je vous entends d’ici : « Voyez la Géorgie ! Voyez la crise financière ! La France présidente de l’Union européenne a hissé haut les couleurs de l’Europe ! »
Je vous le concède, monsieur le ministre : vous avez fait preuve de constance, de sérieux et d’efficacité, et M. le secrétaire d’État aux affaires européennes peut-être davantage encore. Si j’en crois la presse, il a plus d’une fois remplacé tel ou tel membre du Gouvernement qui peinait à se rendre à Bruxelles pour y négocier avec les services de la Commission, les parlementaires ou les représentants des États membres. (M. le ministre fait un signe d’approbation.) Plus d’une fois, il a su et pu dénouer malentendus, difficultés et blocages. Je crois que chacun est disposé à le reconnaître, dans cet hémicycle et ailleurs, à droite comme à gauche.
Alors, s’il faut le dire, je vous le dis : ces six derniers mois, la France a plutôt bien mérité de l’Europe. Elle a été meilleure élève qu’elle ne l’a bien souvent été dans son histoire, notre attitude passée nous valant, chez une bonne partie de nos voisins, la fâcheuse réputation de n’être européens que du bout des lèvres et de persister à ne voir l’Europe que comme une France en plus grand.
Cependant, si la France a été bonne élève ces six derniers mois, le sera-t-elle demain ? Ou reviendra-t-elle à ses mauvaises habitudes ? (M. le ministre sourit.)
En termes plus crus, le Président de la République, une fois qu’il aura quitté la présidence de l’Union, saura-t-il poursuivre dans cette voie ou renouera-t-il avec son affligeante manie de contester toute décision européenne comme une pitrerie de technocrates et de traiter nos partenaires comme des subalternes qui devraient, en constatant l’excellence française, le supplier de prendre une nouvelle présidence, celle du gouvernement économique européen ?
Mme Dominique Voynet. Voilà qui peut susciter quelques interrogations, monsieur le ministre. Notre comportement au cours des prochaines années sera-t-il conforme à celui des six derniers mois ?
Si la cohérence d’une action politique se mesure, évidemment, dans les choix budgétaires, elle se mesure aussi dans les valeurs qui sous-tendent ces choix. De ce point de vue également, j’aimerais que vous puissiez me rassurer.
En matière de politique étrangère, les choix de la France sont parfois courageux, et l’on veut croire que votre présence au Gouvernement, dont je ne veux pas discuter ici l’opportunité politique, a été assez liée à cette volonté affichée de rompre avec la vieille diplomatie pour lui préférer une action extérieure fondée, si je me souviens des engagements de campagne du Président de la République, sur la protection des droits humains.
Hélas, les choix du Gouvernement ont parfois été très peu éloignés de la vieille diplomatie : la rupture n’était guère visible. Je n’aurai pas la cruauté de vous rappeler les conditions du séjour en France du dirigeant libyen Kadhafi, la mégalomanie invraisemblable du dictateur et la déplorable faiblesse avec laquelle il fut accueilli.
Je m’attarderai davantage sur la Chine, puisque le Président de la République rencontre demain le dalaï-lama.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Enfin !
Mme Dominique Voynet. Comme toutes celles et tous ceux qui sont solidaires du combat du peuple tibétain, je me réjouis de savoir que cette rencontre, après avoir été annulée en août dernier, aura enfin lieu. Je me pose cependant une question, et je vous la pose évidemment : faudra-t-il, une fois passée cette rencontre, que la France s’excuse à nouveau auprès du régime chinois ? Et s’excusera-t-elle ? Faudra-t-il que nous fassions comme nous avons fait après le passage bousculé de la flamme olympique à Paris ? La France enverra-t-elle à nouveau Jean-Pierre Raffarin offrir à Pékin une nouvelle biographie du général de Gaulle ? Bref, changerons-nous encore une fois d’avis, et nous montrerons-nous très faibles pour faire excuser un acte de bravoure isolé ?
J’attends votre réponse, monsieur le ministre, mais quelque chose me dit qu’elle n’évoquera probablement pas les raisons pour lesquelles nous savons nous montrer si cléments avec Pékin, avec Téhéran et, hélas, avec bien d’autres !
Oserez-vous évoquer les intérêts de nos champions nationaux, celui des technologies ferroviaires, mais aussi celui de l’industrie nucléaire, si à l’étroit à l’intérieur de nos frontières qu’il offre ses technologies à l’étranger ; des technologies si inquiétantes qu’on les livre qu’on les livre sous prétexte de désaliniser l’eau de mer, et à des dirigeants dont on ne sait pas bien, ou dont on redoute de trop bien savoir quelles sont les intentions.
Je terminerai, si vous le voulez bien, sur un constat presque optimiste.
L’élection de Barack Obama à la présidence des États-Unis, que beaucoup à gauche et à droite ont saluée, a brisé bien des tabous : non seulement aux Etats-Unis, sur la question raciale, mais aussi au-delà, sur deux points majeurs.
J’ai déjà évoqué le premier de ces points ; la lutte contre le changement climatique ; je n’y reviens que pour souligner que l’engagement des États-Unis dans cette bataille de laquelle ils sont totalement absents depuis la conférence de Kyoto peut considérablement changer la donne.
Le second point est la nécessité de régulations nouvelles, négociées de manière multilatérale.
Il s’agit d’abord des régulations économiques. L’OCDE, qui n’est pas suspecte d’être une officine de l’ultragauche, a publié récemment un rapport très critique sur les politiques menées depuis trente ans par ses États membres, d’ailleurs sur ses propres conseils. Selon l’organisation, ces politiques de déréglementation ont considérablement accru les inégalités. Elle ne reconnaît pas vraiment s’être trompée, et avec elle les gouvernements qui ont suivi ses indications, mais cela y ressemble.
Il s’agit ensuite des régulations dans les relations internationales et dans la prévention des conflits. Barack Obama s’est engagé à renouer de manière apaisée le dialogue entre les États-Unis et ses partenaires, au premier rang desquels l’Union européenne.
Aussi, ma dernière question est-elle simple, monsieur le ministre : dans ce nouveau paysage, quelle sera la volonté de la France ? Quelles seront, encore une fois, la cohérence et la constance de son action ?
Le Président de la République, quittant la présidence de l’Union, reviendra-t-il à l’alignement atlantiste qui a été le sien ? L’a-t-il, d’ailleurs, jamais vraiment quitté ? Poursuivra-t-on dans la voie d’une intégration européenne plus poussée en matière de défense commune ou devra-t-on constater que le choix privilégié, qui ne fait pas vraiment l’objet d’un débat démocratique, sera celui de l’OTAN ? Continuerons-nous, tête baissée, à poursuivre en Afghanistan un effort de guerre sans issue dans les termes où il est porté aujourd’hui, où accepterons-nous de revoir, enfin, notre stratégie ?
Monsieur le ministre, au-delà des sujets strictement budgétaires, ce sont à ces questions, et à quelques autres qui ont été posées par mes collègues, que je souhaite vous entendre répondre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Monsieur le ministre, permettez-moi tout d’abord de vous dire ma gratitude et de vous féliciter pour le rôle éminent que la France a joué dans l’élaboration de la convention sur l’interdiction des armes à sous-munitions, armes immondes dont 98 % des victimes sont des civils, des enfants pour un tiers.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Voilà à peine deux ans, nous étions encore très peu à y croire. Il a fallu la détermination et l’engagement du président Sarkozy, du Gouvernement, de vous-même et d’Hervé Morin pour parvenir à ce progrès remarquable en matière de droit international humanitaire.
Votre présence et votre intervention à Oslo avant-hier, lors de la cérémonie de signature de cette convention, à côté d’une centaine d’autres ministres des affaires étrangères, ont été un signal fort, important pour l’image de notre pays. Je tenais donc à vous en remercier.
Je lance un appel à mes collègues sénateurs pour que la ratification de cette convention par le Parlement français intervienne le plus rapidement possible.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous, Français de l’étranger, sommes très fiers de l’action de notre pays à l’étranger. La voix de la France y est de plus en plus écoutée, respectée. Nous nous en réjouissons et, là encore, monsieur le ministre, nous vous en remercions.
M. Robert del Picchia. Très bien !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Mais nous, parlementaires, avons aussi la responsabilité de contrôler le budget de l’État. Il est de notre devoir et de notre honneur de veiller à ce que l’argent de la nation, l’argent du contribuable, soit dépensé à bon escient. C’est tout particulièrement le cas aujourd’hui dans le contexte de crise grave qui est hélas le nôtre.
En ce qui concerne la mission « Action extérieure de l’État », qui se décline en trois programmes, je tiens à saluer l’excellent travail et la vigilance de notre collègue Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances, qui a toujours su, dans un esprit particulièrement constructif, veiller au bon emploi de ces crédits et suggérer des gains de productivité importants.
À ce stade de la discussion, beaucoup a déjà été dit et les chiffres ont déjà été largement commentés. Je me limiterai donc à vous livrer quelques interrogations personnelles.
Le budget du ministère s’élève à 4,6 milliards d’euros pour 2009, soit 1,66 % seulement du budget général. C’est bien sûr très décevant pour un parlementaire représentant les Français de l’étranger, soucieux du prestige de notre pays, car c’est largement insuffisant au regard de nos légitimes ambitions.
Vu la crise actuelle et le déficit des finances publiques, l’élaboration d’un budget aussi resserré est bien évidemment rationnelle, voire indispensable : nous nous devons de faire des économies. Toutefois, cette démarche a des limites.
Le ministère des affaires étrangères est sans aucun doute celui qui, depuis des années, a été le plus vertueux en matière de réduction des dépenses, et sans doute aussi celui qui en a le plus souffert.
Notre personnel diplomatique et consulaire, d’une qualité exceptionnelle, reconnue et enviée, a toujours fait la force de notre réseau. Une très large part du succès de la présidence française de l’Union européenne et de nos avancées aux quatre coins du monde lui est également due.
La baisse constante des effectifs, malgré l’accroissement des charges et la nécessité d’ouvrir de nouveaux postes dans les pays émergents, risque de démotiver ces personnels, d’engendrer une baisse de la qualité du travail et de nuire à l’image de nos postes diplomatiques et consulaires, donc à l’image de la France. Comment, par exemple, répondre à nos obligations morales en proposant un accueil digne et respectueux des demandeurs de visa lorsque les files d’attente s’allongent désespérément à l’extérieur de nos consulats ?
Pour contenir ce budget, ne devrions-nous pas envisager non pas une nouvelle contraction du nombre des personnels, car nous ne pouvons guère aller plus loin, mais une simplification des procédures, une amélioration des conditions de travail et des modes de fonctionnement ? Ne devrions-nous pas développer les procédures sur internet ou installer des systèmes de vidéoconférences dans nos ambassades et consulats ? Cela permettrait de supprimer un grand nombre de déplacements aussi coûteux en temps et en énergie qu’en empreinte carbone.
Ne devrions-nous pas aussi réfléchir à des modes d’emploi des seniors, ces jeunes retraités qui ont encore tant à donner. Beaucoup, sans doute, seraient heureux, avec un encadrement minimum, d’offrir leur expérience et leurs compétences à des pays en voie de développement quelques mois par an ?
Dois-je rappeler que le taux de vaccination dans plusieurs pays d’Afrique est passé de 90 % à moins de 20% en l’espace de dix ans et que le nombre d’assistants techniques est tombé de 30 000 à 700 ?
Et que dire de l’externalisation, qui se révèle parfois beaucoup plus coûteuse que nos placements traditionnels ? Je pense en particulier au remplacement de nos gendarmes dans un certain nombre de postes, et ce en dépit de la qualité de leur travail, de leur mobilisation permanente et, surtout, des garanties qu’ils apportent en termes de sécurité.
Je m’interroge toujours sur notre politique en matière de patrimoine immobilier. Plutôt que de vendre les bâtiments que nous ont laissés nos prédécesseurs, ne devrions-nous pas plutôt penser aux futures générations et investir dans les pays où les prix de l’immobilier sont encore au plus bas, notamment dans certains pays d’Asie, mais qui sont appelés à croître de manière considérable dans un futur proche ?
Monsieur le ministre, ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de vous le demander, ne devrions-nous pas réfléchir à un meilleur contrôle de l’utilisation de l’aide internationale ? Des centaines de millions d’euros partent vers des organismes et fonds internationaux à vocation humanitaire et caritative, certes remarquables, et il est du devoir de la France de continuer à les soutenir – je pense en particulier à ceux qui interviennent en Afrique ou au Fonds alimentaire mondial –, car nous nous devons d’honorer nos engagements. Mais on entend ici ou là qu’un pourcentage important des aides versées s’évapore au profit d’intermédiaires, de consultants ou autres officines, qui se sont multipliées du fait de l’externalisation et de la suppression de nombreux postes d’assistants techniques.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous garantir que ces fonds sont bien utilisés ? Comment apporter plus de transparence au processus ? Comment nous assurer que ces fonds vont vraiment à ceux qui en ont le plus besoin ? Nous avons souvent l’impression que des sommes considérables sont attribuées à certains programmes sans véritable contrôle, alors que des initiatives extrêmement modestes – je pense, par exemple, en matière d’enseignement, aux tout petits programmes d’enseignement du français langue maternelle – voient leur budget constamment érodé et subissent un relatif harcèlement en matière de contrôle de leurs dépenses.
Au regard de ces énormes flux, l’aide sociale apportée à nos communautés françaises est dérisoire et elle n’a fait l’objet d’aucune revalorisation depuis plus de dix ans. Je puis pourtant vous garantir qu’aucun euro attribué à nos consulats ou à nos sociétés françaises de bienfaisance n’est gaspillé. Or les demandes ne cessent et ne cesseront de s’amplifier, du moins au cours des quelques années de crise qui nous attendent.
Comme je l’ai indiqué lors de la réunion de la commission des affaires étrangères, il est indispensable d’augmenter le fonds d’action sociale qui est destiné à aider nos compatriotes les plus démunis à l’étranger.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous féliciter d’avoir ouvert un centre de crise au Quai d’Orsay. La sécurité de nos compatriotes est une préoccupation croissante. Il était indispensable d’améliorer notre réactivité.
J’en profite pour vous demander où en est le projet de création d’un fonds de solidarité destiné à aider nos compatriotes qui doivent être rapatriés en France du fait d’événements géopolitiques.
En ce qui concerne les lycées à l’étranger, je salue l’initiative généreuse du Président de la République, qui a répondu au vœu d’équité que formulent nos concitoyens de l’étranger depuis des dizaines d’années, à savoir l’obtention de la gratuité de l’enseignement dans nos établissements français. Beaucoup avaient promis cette gratuité. Le président Nicolas Sarkozy a été le seul à tenir son engagement, et nous ne pouvons que lui en être très reconnaissants.
Force est cependant de constater l’émoi suscité par cette mesure dans un grand nombre de communautés expatriées. Cet émoi est dû non pas à l’octroi en lui-même de la gratuité de l’enseignement, mais à certains comportements. Je tiens à souligner que quelques-uns de nos compatriotes ont eu l’élégance d’en refuser le bénéfice parce qu’ils estimaient que le niveau de leurs revenus leur donnait le devoir de participer à l’effort d’éducation de leurs enfants. L’émoi est dû au fait que, paradoxalement, les charges qui pèsent sur les familles se sont considérablement alourdies : celles-ci ne comprennent pas que de grosses entreprises, qui payaient la scolarisation des enfants de leurs employés, profitent de cette aubaine sans contribuer pour autant aux caisses ou aux fonds sociaux des lycées.
Enfin, dois-je le rappeler, nos établissements scolaires n’accueillent qu’une petite partie des enfants de nos ressortissants. Et, en dehors de ces établissements, c’est souvent le grand désert !
Ainsi, en Grande-Bretagne, un des pays où la présence française est la plus forte – 300 000 personnes et plus de 100 000 inscrits dans les consulats –, il n’y a aucun lycée français en dehors de Londres. Comment les familles françaises qui n’ont pas la chance d’habiter le centre de la capitale britannique peuvent-elles accepter que tous les crédits soient concentrés sur moins de 3 % des enfants, alors que les petits établissements de soutien linguistique hors de Londres perçoivent des aides dérisoires, de l’ordre de quelques milliers d’euros ?
Nous devons également penser aux effets pervers potentiellement induits par cette mesure. Si nos lycées de l’étranger ont un tel niveau d’excellence, avec des taux de réussite atteignant presque toujours 100%, c’est aussi grâce au mixage des nationalités et des cultures. On pourrait craindre que, du fait de cette gratuité, il n’y ait plus de places pour tous.
M. le président. Veuillez conclure, madame Garriaud-Maylam, car vous avez d’ores et déjà dépassé votre temps de parole.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je souhaite aller au bout de mon propos, monsieur le président, puisque tout le monde a dépassé son temps de parole, mais je serai très brève.
C’est déjà le cas dans plusieurs établissements. Je pense au lycée de Londres, qui ne peut accueillir tous les jeunes Français qui demandent une place.
L’AEFE a annoncé un nouveau prélèvement de 6 % sur les frais de scolarité pour couvrir une part des frais associés aux retraites des fonctionnaires et pour alimenter un fonds immobilier susceptible de financer un certain nombre de projets indispensables dans le monde.
Cette charge supplémentaire est très mal acceptée, monsieur le ministre, et je sais que vous avez déjà reçu un certain nombre de télégrammes diplomatiques à ce sujet. Elle s’ajoute à un accroissement des charges déjà considérable. Pour en rester à l’exemple de Londres, les familles ont déjà subi un accroissement annuel de 9 % des frais de scolarité, allant jusqu’à 42 % d’augmentation cette année pour les nouveaux entrants en maternelle et même 68% pour certaines classes bilingues.
C’est pourquoi je considère, avec les associations de parents d’élèves, que les amendements de M. Gouteyron, un nom de la commission des finances et de M. Trillard, au nom de la commission des affaires étrangères, vont dans le bon sens. En instituant un double plafond à cette aide financière étatique, nous répondrons à la fois à l’objectif de soutien à la scolarisation des jeunes français à l’étranger et au principe d’équité réclamé par nos concitoyens, sans encourager pour autant un développement abusif des frais de scolarité dans certains établissements.
Quant aux sommes économisées, leur redéploiement est inévitable si l’on veut que les familles soient traitées de manière plus équitable et que l’AEFE puisse enfin faire face à l’entretien et à l’expansion de son réseau : nombre de nos lycées sont exsangues et doivent réaliser d’importants travaux, ne serait-ce que pour l’indispensable mise aux normes de sécurité. C’est pour cette raison que je ne suis pas favorable à la réaffectation aux bourses scolaires des crédits ainsi dégagés.
Nous avons trop longtemps regretté que le système des bourses, qui reste indispensable, exclue de facto les familles moyennes ou celles qui comptent plus de deux ou trois enfants. Il importe donc d’introduire le principe de subsidiarité et de faire en sorte qu’une part plus grande des sommes économisées revienne aux utilisateurs, aux conseils d’établissement et aux parents d’élèves. Je rappellerai que nombre d’associations de parents d’élèves ont déjà créé des fonds d’aide sociale, variable d’ajustement qui permet d’aider telle ou telle famille, voire de financer l’achat de nouveaux postes informatiques.
J’aurais pu, mes chers collègues, vous entretenir encore longuement de toutes ces questions, mais je ne veux pas dépasser davantage mon temps de parole. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Je vous en remercie, madame ; un dépassement d’un tiers me semble en effet raisonnable !
La parole est à M. Jean Besson.
M. Jean Besson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’année 2008 aura été marquée par la présidence française de l’Union européenne. Or force est de constater que le dynamisme affiché à cette occasion par le Président de la République ne se traduit pas dans le projet de budget pour 2009.
En effet, les crédits en faveur de la présence de la France en Europe restent toujours aussi faibles. Au sein de la mission « Action extérieure de l’État », que nous examinons aujourd’hui, les crédits de paiement du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde » s’élèvent à 1,61 milliard d’euros, soit, il est vrai, une augmentation de 3,8 %.
Malheureusement, seuls 3 % de ce montant sont consacrés à l’action « Action européenne », qui, déjà sous-dotée, voit ainsi ses moyens financiers diminuer de 1,53 % par rapport à 2008. Cette action est pourtant loin d’être négligeable puisqu’elle rassemble, notamment, les crédits d’intervention et de communication mis à la disposition du secrétariat d’État chargé des affaires européennes, les crédits destinés à soutenir la présence d’experts français dans les missions européennes et les contributions au Conseil de l’Europe.
L’action consulaire n’échappe pas non plus à cette diminution progressive de la présence française sur le vieux continent. La poursuite en 2009 de la transformation de consulats généraux de plein exercice en postes « à gestion simplifiée », comme cela s’est déjà fait à Séville, Stuttgart ou encore Turin, en est une illustration.
Le rayonnement culturel de notre pays, notamment chez nos partenaires historiques, est lui aussi affecté par la « rationalisation de la dépense publique », pour reprendre la formule consacrée. À titre d’exemple, un tiers des centres ou des instituts culturels français ont été fermés ces dernières années en Allemagne, et l’on constate un net recul de l’apprentissage mutuel du français et de l’allemand.
La présidence française de l’Union européenne s’était fixé pour objectif de réconcilier l’Europe et les citoyens français. Mais la concrétisation de cet objectif supposerait qu’une politique volontariste de communication et d’information à valeur pédagogique soit menée auprès de nos concitoyens, qui, le plus souvent, hélas, assimilent l’Europe à une administration froide et éloignée de leur quotidien. Or, faute de moyens et d’ambition réelle en la matière, il ne sera pas atteint cette année. Il ne le sera pas non plus en 2009 et, de fait, ce sont les collectivités territoriales qui, dans le cadre de leurs coopérations décentralisées, grâce à un vrai travail de proximité, contribuent le plus souvent à faire émerger ce sentiment d’appartenance à l’Europe.
Depuis cinquante ans, de nombreux liens – près de 4 200 – ont été tissés entre les collectivités françaises et les structures homologues des autres pays européens. Tous les échanges, linguistiques, culturels, économiques, ainsi créés forment un maillage extraordinaire et œuvrent plus à la construction européenne et au rayonnement de la France que bien des discours ou des sommets non suivis d’effets ; vice-président de la région Rhône-Alpes délégué aux affaires européennes et aux relations internationales, je peux en témoigner.
Les collectivités territoriales s’affirment ainsi comme les meilleurs relais de la France et de ses forces vives sur le Vieux Continent. Cela ne poserait d’ailleurs pas de difficulté si elles disposaient des mêmes ressources que les länder allemands ou les régions espagnoles ; or on sait que ce n’est pas le cas.
L’examen du projet de budget pour 2009 confirme donc l’absence de stratégie claire et ambitieuse pour assurer à la France la place qui devrait être la sienne en Europe.
L’insuffisance des moyens que l’État consacre à ses actions extérieures n’est, bien sûr, que partiellement comblée par les collectivités territoriales, qui demeurent asphyxiées par de nombreux transferts de compétences non intégralement compensés par l’État.
C’est notamment pour cette raison que le groupe socialiste ne votera pas ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Christophe-André Frassa. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, être le treizième intervenant dans une discussion présente un avantage : peu de problèmes sont restés dans l’ombre et l’on peut se concentrer sur un sujet unique. J’axerai donc mon intervention sur la collectivité à laquelle j’appartiens, celle des Français de l’étranger, et plus précisément, vous l’aurez deviné, sur l’enseignement français à l’étranger.
La solidarité nationale ne peut s’arrêter aux frontières géographiques de notre pays. Il n’est pas normal qu’un enfant français soit exclu de notre système d’enseignement soit pour des raisons financières, soit pour des raisons géographiques.
Pour cette raison, le Président de la République a souhaité que, dès la rentrée scolaire 2007, le coût de la scolarité des enfants dans les lycées français à l’étranger soit pris en charge par la collectivité nationale, et ce en commençant par la classe de terminale en 2007, en poursuivant par la classe de première en 2008 et, je l’espère, en l’étendant à celle de seconde en 2009.
J’ajouterai que l’on ne peut pas, d’un côté, continuer d’inciter les Français à s’expatrier et, de l’autre côté, leur demander de supporter des frais de scolarité dont le niveau les oblige trop souvent à renoncer à inscrire leurs enfants dans les établissements français.
Si nous adoptions les conditions proposées, qui nous ramèneraient en fin de compte à la situation initiale, le signe que nous donnerions serait aussi fort que déplaisant pour nos compatriotes de l’étranger, qui sont restés trop longtemps ignorés.
Le renforcement du lien entre la République et ses expatriés doit s’opérer dans tous les domaines de la vie quotidienne, au premier rang desquels figure l’éducation de nos jeunes expatriés.
L’expatriation est un pari ; il faut que ce soit un pari gagnant. La France doit être aux côtés de tous ceux qui désirent créer, innover, travailler comme ils le souhaitent et qui ont choisi de s’expatrier pour le faire. Je ne partage pas l’idée, à mon goût un peu trop répandue en métropole, selon laquelle nos expatriés seraient des privilégiés qu’il faudrait à tout prix chercher à contrôler ou à pénaliser pour leur choix. Tous ne résident pas en Suisse, en Grande-Bretagne, aux États-Unis ou dans des paradis fiscaux !
Mme Nathalie Goulet. Ou prétendus tels !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. À Monaco…
M. Christophe-André Frassa. Ce n’est pas un paradis fiscal, madame, vous devriez le savoir ! (Sourires.)
Scolariser ses enfants à Ouagadougou, ce n’est pas aussi simple et évident qu’à New York ou en France, par exemple à Nice, Rosières ou Saint-Gildas-des-Bois… (M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, et M. André Trillard, rapporteur pour avis, sourient.)
Si j’ai bien compris l’exposé des motifs des amendements adoptés par la commission des finances et par la commission des affaires étrangères, l’ambition des auteurs serait de pérenniser la prise en charge des frais de scolarité tout en rendant cette mesure soutenable sur le plan des contraintes budgétaires. Ce souci est probablement très louable sur le plan de l’orthodoxie comptable, mais je ne pense pas que nous puissions décemment remettre en cause une telle mesure par de simples amendements au projet de loi de finances pour 2009, alors même que l’estimation de son coût réel, à maturité, varie du simple au triple selon les sources.
De plus, la complexité liée à la multitude des critères de gratuité doit nous conduire à une plus grande vigilance dans notre manière d’aborder la réforme d’un système qui est, somme toute, encore très récent. Vous me permettrez d’ailleurs de trouver un peu légère la condamnation de la prise en charge par l’État des frais de scolarité de nos jeunes compatriotes fréquentant les lycées français à l’étranger avant même que la mesure soit totalement appliquée : son expérimentation a commencé voilà à peine plus d’un an ! Au demeurant, je suis très favorable à ce que ses conséquences financières sur le budget de la mission « Action extérieure de l’État » soient étudiées en profondeur : en cela, mais en cela seulement, je rejoins l’avis de la commission des finances et de la commission des affaires étrangères.
En revanche, je ne suis pas du tout favorable à une remise en question de cette mesure sur la base des arguments qui ont été présentés. C’est une bonne mesure, espérée et attendue de longue date par nos compatriotes de l’étranger,…
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Personne ne la demandait !
M. Christophe-André Frassa. … et elle doit être étendue, comme le Gouvernement l’a promis et comme nous nous y sommes engagés.
Il faudra certainement, j’en conviens, procéder à des ajustements au cas par cas. Il est notamment possible d’explorer de nouvelles pistes, tels la prise en charge des frais par certaines entreprises ou le conventionnement entre celles-ci et les établissements scolaires. Mais poser des conditions de revenu et plafonner les aides, ce serait faire plusieurs pas en arrière par rapport à notre ambition et à notre volonté. Je ne peux pas l’admettre. Le risque existe d’ailleurs que ces propositions, si elles étaient adoptées, ne provoquent l’effet inverse de celui qui est recherché.
La notion de service public implique que l’on puisse bénéficier d’un enseignement à l’étranger de la même manière qu’en France, c’est-à-dire que les familles françaises résidant à l’étranger ne soient pas contraintes d’en assumer le coût. Nous avons commencé par les classes de terminales : c’est un geste fort !
Je crois plus cohérent et bénéfique de réunir sur le sujet un groupe de travail s’appuyant sur l’expertise de l’Assemblée des Français de l’étranger, du ministère des affaires étrangères et européennes, de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, des sénateurs représentant les Français établis hors de France, mais surtout de l’ensemble des acteurs sur le terrain : c’est par cette voie concertée qu’il convient de rechercher les améliorations susceptibles d’être apportées au système existant afin de le rendre à la fois plus performant et plus supportable pour les finances de l’État. En cela, je rejoins totalement la position exprimée par notre collègue Robert del Picchia, raison pour laquelle j’ai cosigné son amendement.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir prendre en considération cette proposition de bon sens qui, dans le même souci qui anime mes collègues Gouteyron et Trillard, vise à ne laisser personne sur le bord du chemin tout en maîtrisant les dépenses. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme mes collègues sénateurs des Français de l’étranger, je centrerai mon intervention sur l’examen des crédits alloués au programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires ».
Monsieur le ministre, je vous adresserai une première requête : pourriez-vous veiller à la publication rapide de la nouvelle organisation du ministère ? Vous nous avez certes communiqué quelques avant-projets, mais il serait maintenant utile d’aboutir et, en particulier, d’indiquer ce qu’il adviendra de la DGCID, la direction générale de la coopération internationale et du développement : l’incertitude actuelle entraîne un certain trouble, peut-être épargnés aux services de votre ministère, mais qui frappe les postes consulaires, où, pour certaines questions, personne ne sait plus à qui s’adresser. Il serait donc de bonne politique de publier le nouvel organigramme.
Les crédits du programme 151 seront de nouveau en diminution en 2009. La baisse, de 0,2 %, est certes modeste, mais elle vient après de nombreuses autres – elle atteignait plus de 8,3 % dans le budget pour 2008 –, et ce alors même que les communautés expatriées augmentent. Bien entendu, l’action consulaire suit cette évolution budgétaire, que nous déplorons.
Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le rôle des consuls et des consuls généraux. Le système ne tient aujourd’hui que grâce à leur action et à leur dévouement : ils se tuent véritablement à la tâche,…
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Tout à fait !
M. Richard Yung. … travaillant le samedi, le dimanche, s’occupant de tout parce qu’ils n’ont plus d’effectifs, plus de cadres. Ils sont donc la cheville ouvrière du dispositif, grâce à laquelle tout tient et à défaut de laquelle tout risque de s’écrouler.
J’ai l’impression, après avoir visité de nombreux postes consulaires, que leurs personnels souffrent de ne pas être considérés. Ils sont en quelque sorte les soutiers du ministère et je crois exprimer leur sentiment – ils ne me l’ont pas demandé ! – en disant qu’ils souffrent de ne pas être reconnus à leur juste valeur.
Sur les autres éléments du programme 151, je note que les crédits alloués à l’action sociale en faveur des Français de l’étranger augmentent légèrement en 2009 : 16 millions d’euros, contre 15,57 millions d’euros en 2008. Cependant, pour les années suivantes, c’est une baisse qui est anticipée dans votre projet triennal.
En revanche, les crédits consacrés à l’emploi et à la formation professionnelle des Français de l’étranger – sujet important – sont maintenus au même niveau qu’en 2008, 800 000 euros, c’est-à-dire pas grand-chose. C’est un choix que je déplore parce que développer la formation professionnelle permet de maintenir les Français de l’étranger dans les pays où ils vivent et évite d’avoir à les rapatrier en France, avec toutes les difficultés que cela entraîne. Or ces crédits ont baissé de 28 % en 2008 et de 34 % en 2007, c’est-à-dire au total de plus de 50 %.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, je souhaitais vous demander si le futur Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, que nous a présenté hier M. Hortefeux, continuera de participer aux actions relatives à l’emploi et à la formation professionnelle des Français de l’étranger, mission qui est actuellement assurée par l’ANAEM, l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations. Au demeurant, le Sénat a examiné hier un amendement visant à réduire les crédits de l’ANAEM ; je l’ai combattu parce que j’estime que cela aurait pour conséquence de réduire les crédits disponibles pour la formation professionnelle des Français établis à l’étranger.
J’évoquerai au passage, bien que cela ne dépende pas de votre ministère, les problèmes de délais d’obtention des certificats de nationalité. Nous avons l’impression de répéter sans cesse la même chose ! On demande des certificats de nationalité, alors même que M. le directeur des Français à l’étranger a bien donné les instructions nécessaires pour que l’on n’en réclame pas un à tout propos.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. À tort et à travers !
M. Richard Yung. Le problème ne relève donc pas de vos services : il vient de la Chancellerie puisque c’est le tribunal de la rue du Château-des-Rentiers qui n’a pas assez de greffiers qualifiés pour délivrer ces certificats. De ce fait, les Français de l’étranger attendent vingt, vingt-cinq, voire trente mois, ce qui crée des situations juridiquement aberrantes et humainement insupportables.
J’en viens aux questions relatives à l’enseignement français à l’étranger, qui ont été abordées par plusieurs orateurs, et je me réjouis de l’intervention de notre collègue Robert del Picchia : il a reconnu le bien-fondé d’un certain nombre des critiques qui sont formulées, et il n’était pas loin de reprendre à son compte notre proposition initiale de passer par la voie d’une augmentation de l’enveloppe consacrée aux bourses, tout le monde étant par ailleurs d’accord sur l’objectif.
M. Robert del Picchia. En effet !
M. Richard Yung. M. del Picchia a eu la grande sagesse d’évoquer le programme de Ségolène Royal. (Sourires.) Je l’en remercie, il rend hommage à la vertu !
M. Jean-Pierre Chevènement. N’en faites pas une martyre !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères. Il aurait pu citer Martine Aubry, mais malheureusement elle n’a rien dit sur le sujet ! (Nouveaux sourires.)
M. Richard Yung. Je rappelle que ce programme, que je connais quand même un petit peu, était très simple : il consistait à dire que nous parviendrions au même objectif en portant l’enveloppe des bourses de 52 millions ou 53 millions d’euros à 75 millions ou 80 millions d’euros. Telle était la méthode proposée.
L’argument essentiel à mes yeux est le suivant : ce système, tel qu’il est mis en œuvre, a pour inconvénient d’augmenter les frais de scolarité pour les enfants non français. Or ce système ne tient que parce qu’il y a des enfants non français dans nos établissements, et dans une proportion d’environ deux tiers. Autrement dit, si nous écartons les élèves étrangers – mais ils ne vont pas tous partir, Dieu merci ! – il n’y aura plus d’enseignement français à l’étranger.
Par conséquent, en faisant porter le poids de la gratuité sur les enfants non français, on envoie un message négatif aux familles d’élèves étrangers : « Ne mettez plus vos enfants dans nos écoles ! »
Autre conséquence, l’AEFE, qui est étranglée financièrement par d’autres mesures, prévoit de prélever une sorte de super-taxe de 6 % sur les frais d’écolage des écoles conventionnées et de 2 % pour les écoles homologuées.
Selon mes informations, c’est une mesure qui passe évidemment très mal et qui risque d’avoir pour conséquence de pousser certains des 400 établissements à quitter le sein généreux et maternel de l’AEFE, qui doit superviser le système.
Cette mesure est très dangereuse parce qu’elle entraînera le « détricotage » du réseau éducatif français à l’étranger. Nous devons l’éviter à tout prix et je pense qu’il faudra revenir sur l’idée de ces taxes abusives, dont je me demande d’ailleurs quel est le fondement juridique.
Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai l’amendement de la commission des affaires étrangères ou celui de la commission des finances, visant à instaurer un double plafonnement en fonction, d’une part, des revenus des parents et, d’autre part, du montant des droits de scolarité.
De la même manière, j’apporterai mon soutien à l’amendement présenté par notre collège Monique Cerisier-ben Guiga et visant à attribuer 600 000 euros au financement du programme FLAM, « Français langue maternelle », qui rencontre un énorme succès, pour un coût relativement modeste, et qui est une sorte de guichet d’entrée dans le système éducatif francophone.
Telles sont les principales observations que je souhaitais formuler, monsieur le ministre, et qui expliquent que nous aurons quelques hésitations à voter les crédits de votre mission
M. le président. La parole est à M. André Ferrand.
M. André Ferrand. Dernier orateur inscrit, intervenant après un certain nombre de collègues sénateurs des Français de l’étranger, je vous rassure, mes chers collègues, je serai aussi bref que possible.
Monsieur le ministre, je tiens à profiter de cette tribune pour partager avec vous les bonnes nouvelles pour la francophonie que j’ai rapportées de l’océan Indien.
Je reviens de Madagascar, où j’ai eu la bonne surprise d’apprendre de notre chargé d’affaires que le président Ravalomanana, qui n’avait pas jusqu’à maintenant la réputation d’être un grand « francophonophile »…
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C’est surtout qu’il n’aimait pas notre ambassadeur !
M. André Ferrand. Le problème n’est pas là, ma chère collègue. Le problème, nous le savons, est qu’il a introduit l’anglais comme troisième langue officielle dans son pays…
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Absolument !
M. André Ferrand. … et il est clair que, depuis un certain nombre d’années, la francophonie était en régression.
Or, grâce à votre action, monsieur le ministre, le prochain sommet de la francophonie aura lieu à l’automne 2010 dans la Grande Île. Le président malgache en est manifestement très heureux, et cela l’a amené à opérer un virage à cent quatre-vingts degrés : il est devenu notre grand ami.
Monsieur le ministre, il nous faut à tout prix profiter de cette conjoncture tout à fait favorable ; nous avons deux ans devant nous, c’est suffisamment proche pour mobiliser les énergies et suffisamment long pour s’organiser.
J’ai lancé le même appel à votre collègue M. Darcos il y a deux jours dans cet hémicycle et il l’a très bien reçu.
Il convient, me semble-t-il, de profiter de cette chance quasi historique que nous offre ce grand porte-avions qu’est Madagascar, déjà en grande partie francophone, situé à proximité relative – eu égard à la taille de l’océan Indien ! – de cette sorte d’archipel francophone que constituent la Réunion, Maurice, les Comores, Mayotte et les Seychelles. Il s’agit maintenant, selon moi, de décréter un véritable branle-bas de combat !
Nous avons deux ans pour rattraper le temps perdu. La tâche est immense, il ne faut pas se le cacher. Le président Ravalomanana a avancé des chiffres un peu extravagants, parlant de 70 000 enseignants à former en français, ce qui ne semble pas très réaliste.
Il s’agit d’une occasion unique à saisir. Il faut mobiliser toutes nos forces de coopération, l’éducation nationale, l’île de la Réunion, ainsi que l’Agence française de développement, à laquelle on reproche trop souvent de manquer de culture du résultat.
Monsieur le ministre, vous l’avez compris, je suis venu à cette tribune prêcher un véritable plan Marshall pour la francophonie dans l’océan Indien. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Mon intervention sera brève.
Je répondrai d’abord à M. Ferrand – ce sera ma seule réponse de politique générale – que nous sommes conscients de la nécessité d’accélérer les choses à Madagascar. J’espère que notre nouvel ambassadeur sera bien accueilli. Les choses sont un peu compliquées psychologiquement et politiquement, mais la tâche est immense. Le sommet de la francophonie aura lieu dans deux ans ; nous nous y préparons et Madagascar également.
Madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de la richesse de vos interventions. J’aime débattre avec vous…
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères. C’est un plaisir trop rare !
M. Bernard Kouchner, ministre. … mais un débat budgétaire n’est pas un débat de politique générale. (Mme Dominique Voynet sourit.) Je vois que Dominique Voynet a compris ce que je voulais dire...
J’ai déjà eu l’occasion de participer avec vous à un débat de politique générale et je suis tout à fait prêt à en avoir un de nouveau en janvier si vous le souhaitez. En effet, c’est un peu difficile avant la fin de l’année, d’autant que la présidence française est très contraignante.
Par conséquent, vous voudrez bien me pardonner, mais je ne répondrai que sur le budget,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Bernard Kouchner, ministre. … aussi intéressé que je puisse être par tous les sujets qui ont été abordés et par vos interrogations, qui appellent effectivement des réponses.
Je rappellerai tout d’abord que les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » s’élèvent à 2,5 milliards d’euros et sont en progression, il faut tout de même le souligner, de 7 %. Ce n’est pas assez, pensez-vous. Mais vous reprochez toujours à un ministre qui voudrait beaucoup plus d’argent de ne pas en avoir assez ! Je suis d’accord avec vous, mais ces crédits font partie d’un budget général qui tient compte de la situation économique globale de l’économie de notre pays. Ce budget résulte de décisions qu’il a fallu prendre dans une période de crise, laquelle s’est de plus révélée après que les crédits ont été arbitrés.
Ces crédits recoupent trois grandes priorités qui se concrétisent par leur volume financier.
La première concerne nos contributions internationales, grâce auxquelles nous concourons à la paix dans le monde – même si ce n’est pas toujours facile –, à la gestion des crises – nous le faisons de façon très visible et efficace – et à l’animation des forums multilatéraux.
La deuxième priorité concerne notre réseau à l’étranger, qui subit une profonde évolution.
Enfin, la troisième priorité a trait à notre action culturelle. Certes, les moyens qui lui sont dédiés sont insuffisants, je me charge de trouver des fonds supplémentaires, de concentrer notre effort et de donner à cette action une vraie dynamique.
Je sais l’importance de notre action culturelle, qui est même un atout par rapport aux autres diplomaties, mais je souhaiterais qu’elle le soit plus encore, notamment pour ce qui concerne notre réseau de lycées français à l’étranger, de centres culturels, etc.
Avec un projet de budget pour 2009 prévoyant 695 millions d’euros au titre des contributions internationales, c’est une grande partie des crédits du ministère des affaires étrangères et européennes qui est dédiée à cette priorité.
Les budgets des organisations internationales connaissent une croissance constante moyenne de 2,3 % par an. Ainsi, le volume financier des opérations internationales de maintien de la paix est important et continue, depuis l’an 2000, de croître de 10 % par an, avec environ 100 000 Français déployés.
La majorité de ces opérations a lieu dans des zones où la France est très directement concernée ; nous ne pouvons donc guère limiter ses forces d’intervention. Toutefois, la réduction de nos forces armées est à l’étude en Côte d’Ivoire et au Liban. La France contribue ainsi pour le seul Darfour, région où elle n’est pas présente, à hauteur de 85 millions d’euros. Nous avons obtenu une dotation de 340 millions d’euros pour les opérations, soit une hausse de 40 millions d’euros par rapport à 2008, qui correspond aux besoins. Mais le rythme de dépense des opérations telles que la MINUAD, la Mission des Nations unies et de l’Union africaine au Darfour, ou la MINURCAT, la Mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad, remettrait en cause cette évaluation.
Je n’ai pas le temps de développer cette question, mais je vous informe, mesdames, messieurs les sénateurs, que, pour le Tchad, un quart des personnes déplacées sont rentrées chez elles et je parie que, d’ici au mois de mars prochain, échéance à laquelle l’opération EUFOR s’achèvera et sera, je l’espère, remplacée par une opération des Nations unies, la moitié d’entre elles seront rentrées.
Pour autant, nous essayons autant que possible de contenir cette dépense. Ainsi avons-nous transféré à d’autres ministères, à hauteur de 17 millions d’euros, les contributions d’une cinquantaine d’organisations que ces ministères suivaient déjà dans les faits, et nous allons continuer de le faire sur la période 2010-2011.
La France plaide aussi systématiquement pour la discipline budgétaire. Mais il est de notre intérêt de conserver un système multilatéral qui fonctionne.
Monsieur le rapporteur spécial, j’ai bien compris le sens de votre amendement sur l’Union latine, qui regroupe les pays latins d’Europe et d’Amérique latine. La négociation est actuellement en cours, et je puis vous assurer de la plus grande fermeté de notre position à l’égard de nos partenaires.
M. Jean-Pierre Chevènement m’a interrogé sur le budget des Nations unies. Il est certes en très forte hausse, mais celle-ci est concomitante du nombre des opérations engagées.
La demande initiale du secrétariat des Nations unies aurait conduit à une augmentation de notre contribution de 50 % environ, compte tenu de la présence des forces de ces dernières en Irak et en Afghanistan, des investissements informatiques et des créations de poste. Certaines de ces demandes sont légitimes, voire inévitables.
Quand peut-on souhaiter le départ des Nations unies d’Irak ou d’Afghanistan ? C’est une question dont nous pourrons débattre, même si nous ne sommes pas présents en Irak. En tout cas, ce n’est pas notre départ qui est essentiel. Depuis la conférence de Paris, il est désormais primordial aux yeux de tous de passer les commandes aux Afghans ; telle est bien notre stratégie. Il faut faire des choix, et les Nations unies doivent aussi faire des économies partout là où c’est possible.
Par ailleurs, je vous informe, mesdames, messieurs les sénateurs, que, par souci de régionalisation, nous allons réunir, en France, la semaine prochaine, les pays voisins de l’Afghanistan, à savoir l’Iran, le Pakistan, et tous les autres.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Bernard Kouchner, ministre. Ce sera une première ! C’est un début de dialogue pour faire changer les stratégies.
Autre grand axe de dépenses : près de 450 millions d’euros sont accordés à notre réseau à l’étranger. Par son nombre d’implantations, avec 160 ambassades, 97 consulats et consulats généraux, 21 représentations multilatérales, celui-ci est le deuxième au monde, et il le restera, même si, je l’avoue, j’aspirerais à ce qu’il soit le premier…
Notre ambition est de réussir la mutation du ministère des affaires étrangères et européennes, et donc sa réforme, pour le bien de nos services et de l’action extérieure de la France.
Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, je commence à connaître les ministères, et celui-là en particulier. Je puis vous dire, sans trop m’avancer, qu’une rationalisation est possible. Il ne s’agit pas de supprimer des postes par pur plaisir ! Rationaliser, le mot est faible ; en réalité, il faudrait revoir globalement la manière de travailler ensemble pour que chacun remplisse une mission déterminée. Pour éviter les doublons, chacun devrait assurer une tâche spécifique. Ainsi, il serait beaucoup plus fier de son travail et d’appartenir à ce ministère.
Je ne veux pas faire de généralités, mais il arrive souvent que certaines personnes fassent la même chose ! (Mme Monique Cerisier-ben Guiga manifeste qu’elle en doute.) Mais si, c’est souvent le cas !
Hier, j’étais à Helsinki pour participer au Conseil ministériel de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe – mais je l’ai aussi constaté au cours d’autres déplacements en Norvège ou à Bruxelles –, et je puis vous assurer qu’il est possible de rationaliser le travail de tous ces groupes.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. Ah oui ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Souvent, ils font la même chose. Je ne dis pas qu’il faut supprimer des postes, je dis qu’il faut rationaliser !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Très bien !
M. Bernard Kouchner, ministre. L’opinion a retenu que la réforme du Quai d’Orsay consistait, pour l’essentiel, dans la modulation de nos ambassades, avec une trentaine d’ambassades polyvalentes, une centaine d’ambassades à missions prioritaires et une trentaine de postes de présence diplomatique. Ce procédé n’a rien d’insultant pour qui que ce soit. Nous prendrons les pays un par un, et vous verrez, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’on se demandera même pourquoi nous maintenons une représentation dans certains pays.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. Eh oui !
M. Bernard Kouchner, ministre. Nous resterons, mais les tâches devront vraiment être mieux distribuées !
M. Trillard m’a interrogé sur les critères retenus pour la mise en œuvre de cette réforme et sur son rythme.
Le critère fondamental retenu pour la répartition des ambassades est avant tout fonctionnel. Le calendrier est triennal et porte sur la période 2009-2011.
Concernant le rythme, le secrétaire général a demandé aux ambassadeurs de proposer, avant le 15 octobre, un plan triennal d’évolution de leurs moyens fondé sur leur propre analyse. C’est donc en collaboration avec eux que nous engageons cette réforme.
Je vous signale d’ailleurs que cette démarche générale avait été précédée de deux démarches particulières, l’une menée en Allemagne et l’autre au Sénégal. Les résultats y sont excellents, car les personnes concernées ont précisément retrouvé une place qui correspond nettement mieux à leurs spécificités et à leurs goûts. La mise en place de ce plan prend un certain temps. Certes, tout devrait être terminé, mais les listes ont été partiellement publiées.
Enfin, la réforme a une dimension interministérielle forte, qui se traduira par la création d’un comité interministériel, le comité des réseaux internationaux de l’État à l’étranger.
Les réseaux consulaires et culturels se réforment aussi pour assurer une meilleure répartition par rapport à nos dispositions diplomatiques.
Nos consulats s’adaptent à l’évolution du monde. Nous serons, c’est vrai, moins présents en Europe, mais nous le serons plus dans les pays en développement, notamment les pays émergents.
Monsieur de Montesquiou, vous avez relevé dans votre intervention les autres réformes en cours ; je vous remercie de votre soutien:
Le nouveau centre de crise a démontré, depuis le mois de juillet dernier, son efficacité. Ainsi, ces derniers jours, nous avons été confrontés à plusieurs événements en même temps : la situation de crise en Thaïlande et en Inde, l’enlèvement d’un travailleur humanitaire en Afghanistan et de deux journalistes en Somalie. Les cinquante personnes du centre de crise ont travaillé jour et nuit, avec les résultats que l’on connaît : un premier avion rapatriant des touristes français en provenance de Bangkok est arrivé mercredi soir ; nous déplorons des morts à Bombay et la situation continue d’être préoccupante, mais des rescapés des attentats ont été rapatriés ; l’otage français en Afghanistan a été libéré et nous continuons à chercher une solution pour les deux journalistes pris en otage en Somalie, qui, nous venons de l’apprendre, se sont d’ailleurs finalement révélés ne pas être français.
Vous m’avez interrogé sur les postes mixtes consulaires et commerciaux. Actuellement, ils sont au nombre de cinq : à Bombay, Houston, Atlanta, Chengdu et Bangalore. Je ne sais pas si le mouvement se poursuivra, car tout dépend de la satisfaction que nous en retirerons, mais c’est, sans aucun doute, une piste de réforme.
M. Aymeri de Montesquiou. Tout à fait !
M. Bernard Kouchner, ministre. Les discussions se poursuivent avec Bercy pour l’extension du dispositif à Johannesburg.
Nous nous sommes engagés à consentir, au cours des trois années qui viennent, un effort important pour réduire nos effectifs de 700 personnes. Cet engagement sera tenu au rythme suivant : 190 suppressions en 2009, 255 en 2010 et 255 en 2011. Ces 700 suppressions d’emplois procèdent d’une concertation avec les agents concernés et les syndicats ; j’y insiste, car je sais combien c’est important pour eux. Cette réforme, qui était attendue, se passe bien jusqu’à présent ; j’espère que cela continuera ainsi !
Ces diminutions d’emplois seront obtenues en trois ans, par le biais du non-remplacement de départs en retraite ou du non-remplacement d’agents contractuels à l’issue de leur contrat. Cela correspond au non-remplacement de deux agents sur trois pour l’ensemble des personnels et d’un sur trois pour les fonctionnaires titulaires.
En termes fonctionnels, les suppressions se répartissent comme suit : 315 pour les métiers politiques, la gestion et la coordination de l’action de l’État ; 135 pour les métiers consulaires ; 90 dans les secteurs culturel et scientifique ; 160 dans les domaines de la coopération.
La répartition fine par pays dépendra de l’évolution des missions et sera faite en concertation avec les agents.
Le montant global des économies attendues est estimé à 28 millions d’euros. J’ai obtenu de récupérer une partie de ces économies, soit 60 % du montant, pour nos personnels. Mais nous irons bien au-delà.
Nous réformons notre administration centrale en remodelant l’encadrement supérieur et en mettant en place le dispositif innovant de la deuxième carrière. Sur vingt demandes, quatorze nouvelles carrières ont été acceptées. Vous le savez, avec la deuxième carrière, un agent du ministère des affaires étrangères et européennes peut, dès cinquante ans, changer de ministère ou aller dans le privé. À cet effet, il reçoit un petit pécule, lequel n’est d’ailleurs pas, à mon avis, suffisant.
Par ailleurs, nous améliorons les conditions de la tutelle de l’Agence française de développement. Comme le propose M. Duvernois, nous créons également de nouveaux établissements publics, dont CulturesFrance, ou un opérateur chargé de la mobilité et de la politique d’attractivité qui regroupera l’association EGIDE, France coopération internationale, et CampusFrance. Je vous le dis, il y a aura une direction réelle, forte et dynamique de nos opérations culturelles, toutes ensemble. Quoi qu’il en soit, je suis prêt à en discuter avec vous ; un rendez-vous a été fixé avec Yves Dauge. Je n’ai rien à cacher ; au contraire, toutes les idées sont les bienvenues.
Je répondrai maintenant à M. Gouteyron, qui m’a interrogé sur un opérateur en cours de préfiguration : la foncière des biens immobiliers de l’État à l’étranger.
Le travail préalable de rédaction du rapport Dumas a préconisé la création d’une foncière, qui est un instrument de mutualisation de la politique immobilière de l’État à l’étranger, et Dieu sait si nous en avons besoin ! Elle implique une tutelle forte du ministère parce que les besoins diplomatiques et les traditions diffèrent d’un pays à l’autre.
La politique immobilière de l’État à l’étranger est en effet un outil au service de notre action extérieure, pas le contraire ! Les impératifs de souveraineté et de sécurité relèvent du contrôle du ministère des affaires étrangères et européennes.
Le patrimoine historique doit faire l’objet d’un mode de gestion spécifique. Le palais Farnèse, à Rome, le palais d’Abrantes, à Lisbonne, ou encore le palais Bucquoy, à Prague, par exemple, ne doivent pas être traités seulement comme des biens immobiliers.
Nos recommandations sont les suivantes : la foncière doit combler, à sa création, un besoin immédiat pour les opérations complexes menées par les ambassadeurs, alors que ce n’est évidemment pas leur spécialité. Elle doit inclure la question des logements des agents en poste à l’étranger.
Comme l’ont souligné les agents diplomatiques que j’ai reçus, l’indemnité de résidence est absolument insuffisante dans certains pays. Nous allons la revaloriser et commencerons par les pays les plus concernés, tels les États-Unis, où le logement est terriblement cher. En janvier prochain, cette indemnité sera augmentée de 19 %.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à saluer les initiatives nombreuses et différenciées, traduites dans trois amendements qui seront présentés tout à l'heure, concernant la défense de notre réseau, et je me réjouis de l’excellent débat qui s’est engagé sur la gratuité de la scolarité des élèves français dans nos lycées à l’étranger. Cette question mériterait que l’on y consacrât plus de temps, mais, si vous m’accordez la moindre confiance, je vous demande de surseoir à toute décision trop brutale.
Le Président de la République a accepté, dans un débat très ouvert et qui a, me semble-t-il, apporté une grande satisfaction, d’assurer la gratuité des frais de scolarité des élèves français des lycées français à l’étranger pour les classes de terminale, de première et de seconde. Un moratoire a été décidé pour le mois de septembre prochain, afin de mettre en œuvre l’autre promesse faite par le Président de la République, à savoir celle qui a trait aux bourses.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. Ah bon ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Il avait été proposé d’accorder la gratuité de la scolarité et, simultanément, de trouver un équilibre en matière d’octroi de bourses. Je vous demande de ne pas figer la situation, car nous sommes sur la bonne voie. Il y a trois mois, qui aurait pu dire que nous allions décider d’un moratoire pour engager une réflexion ? La discussion préalable a été fructueuse, les deux représentants des Français de l’étranger étant d’accord. Acceptez donc d’attendre les conclusions de cette réflexion.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons la question des bourses. Elle fera l’objet d’une nouvelle proposition, que nous soumettrons au Président de la République. (M. Jean-Pierre Cantegrit applaudit.) C’est, selon moi, la bonne façon d’agir. Sur ce sujet, nous sommes vraiment sur la même ligne.
J’ai conscience que les élèves locaux et leurs familles pourront rencontrer, même si ce n’est pas encore le cas, de grandes difficultés pour assumer une telle charge financière. Même si leur éviction n’est pas encore évidente aux yeux de tous, elle le deviendra. Si certains élèves obtiennent la gratuité de leurs frais de scolarité, alors que ceux de leurs camarades augmentent, nous ne serons pas satisfaits, car nous n’aurons pas fait progresser la francophonie et la fréquentation de nos lycées et de nos universités !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très juste !
M. Bernard Kouchner, ministre. Si vous voulez bien me faire confiance – je vous rappelle que j’ai toujours tenu mes promesses –, je m’engage à discuter de ce problème avec le Président de la République.
Des moyens importants sont mobilisés : les crédits de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, atteignent quelque 500 millions d’euros, dont 415 millions d’euros sont consacrés à son fonctionnement et 86 millions d’euros aux bourses. Plus largement, les crédits de la politique d’attractivité représentent près de 100 millions d’euros.
Cette somme de 500 millions d’euros est répartie entre le programme « Rayonnement culturel et scientifique », pour 415 millions d’euros, et le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires », pour 86,1 millions d’euros. Le rapporteur spécial a souligné à juste titre la hausse des coûts, que je viens d’évoquer, qui pourrait pénaliser les élèves locaux.
L’augmentation de 123,7 millions d’euros au titre du programme « Rayonnement culturel et scientifique », qui atteignait 291,3 millions d’euros en 2008, s’explique par le transfert à ce programme, pour 120 millions d’euros, de la charge des cotisations de pensions civiles. Ce budget, pour le moment, est déséquilibré. Le complément de 3,7 millions d’euros couvrira l’augmentation de la masse salariale et financera le déficit de fonctionnement constaté en 2008.
L’augmentation de 19,14 millions d’euros au titre du programme « Français à l’étranger et affaires consulaires » permettra d’étendre la prise en charge des droits de scolarité des lycéens français.
L’AEFE est pour moi un exemple en matière de tutelle. Nous partageons les mêmes difficultés, mais aussi les mêmes succès. C’est un outil merveilleux, auquel j’attache une très grande importance. Le rapport qui m’a été remis cet été comporte une grande quantité d’idées intéressantes, que nous devrons mettre en œuvre ensemble.
Au-delà, la politique d’attractivité et de promotion du français passe par le maintien de la priorité donnée aux bourses destinées aux étudiants étrangers. Je me bats pour qu’elles soient plus nombreuses, car, aujourd’hui, à l’évidence, leur nombre est bien insuffisant. Dans nos universités, nous ne faisons pas venir suffisamment les étudiants étrangers, y compris ceux qui suivent les cours dispensés dans nos lycées !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument !
M. Bernard Kouchner, ministre. Les alliances, dont le rôle a été souligné, voient leurs moyens maintenus ; la recherche de partenariats, notamment scientifiques, avec le privé doit être développée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’en viens à l’action culturelle. J’évoquerai brièvement l’avenir de notre réseau culturel, objet de toute votre attention. À cet égard, je veux saluer l’excellent travail de Mme Cerisier-ben Guiga et de M. Dauge.
Dans ce domaine aussi, la RGPP a permis de réaffirmer le rôle interministériel fondamental de l’ambassadeur. Or celui-ci n’a pas toujours la capacité ou le goût d’assurer une telle mission. Nous déterminerons donc les postes d’ambassadeurs en fonction de ce critère. Si tel ambassadeur n’aime pas le développement alors qu’une grande partie de ses tâches devrait y être consacrée, il ne sera pas nommé dans ce type de poste. C’est ce rôle fondamental de l’ambassadeur qui légitime le maintien d’un point d’entrée unique, au sein de ce ministère, pour toutes nos opérations de coopération scientifique, universitaire et culturelle.
Je voudrais également vous dire mon sentiment sur ce que doit être et demeurer le sens de notre action culturelle, ô combien importante dans le monde d’aujourd’hui. Je vous le répète : je souhaite reconstituer une forte direction des activités culturelles et du français – une direction ! (Mme Monique Cerisier-ben Guiga s’exclame.)
À l’étranger, nous ressentons un vrai besoin dans le champ culturel. L’action culturelle extérieure, c’est aussi le soutien à nos industries culturelles, qui jouent un rôle important, à une conception pluraliste de la culture, à l’innovation et à l’avant-garde de notre pays.
Enfin, permettez-moi de le souligner, tout cela représente un coût minime pour le budget de la France. Il faut donc absolument maintenir et développer cette action.
Nous essayons, dans ce contexte difficile, de préserver les grandes lignes d’une action culturelle que je serai très heureux d’évoquer avec vous.
Je souhaite maintenant répondre à la question qui a été posée par M. Ferrand sur Madagascar et la francophonie.
Il faut donner un nouvel élan pour construire des relations solides, puisque les difficultés sont désormais réglées, et ce dans un esprit de respect mutuel et de confiance. Un nouvel ambassadeur a ainsi été sélectionné.
Je me réjouis que la candidature de Madagascar ait été retenue pour organiser le sommet de la francophonie en 2010. Il faut désormais travailler à sa réalisation, qui représente un budget important, mais aussi, pour une ville, des efforts colossaux à réaliser. Or deux ans, c’est une durée relativement courte. Ce choix rend hommage au profond attachement que le peuple malgache témoigne au patrimoine culturel et linguistique commun à nos deux pays.
J’ai choisi ainsi de préserver les moyens de fonctionnement de nos opérateurs comme CulturesFrance. J’ai décidé de fusionner les centres culturels et les instituts au sein d’« EspacesFrance ». Nous allons bientôt choisir leur nom. J’avais proposé « Victor Hugo », mais il semble que « Institut français » tienne la corde pour le moment. Au demeurant, c’est moi qui déciderai !
J’en viens aux réponses aux questions plus spécifiques qui m’ont été posées.
Monsieur le rapporteur spécial, je ne suis pas tout à fait d’accord avec la proposition que vous formulez dans votre rapport d’intégrer au plafond d’emploi les personnels des centres culturels de droit local. (M. le rapporteur spécial s’exclame.)
L’intérêt de ces nouveaux établissements réside dans le statut juridique – établissement à autonomie financière à la recherche d’un autofinancement croissant –, qui permet l’intervention des personnalités et, surtout, des entreprises locales. Face à une évolution rapide du contexte, les EspacesFrance adapteront les profils de postes à des métiers en mutation.
Madame Goulet, j’ai rencontré l’Émir, le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères du Koweït les 21 et 22 avril derniers. J’ai ensuite revu le Premier ministre à New York. Le Président de la République compte se rendre de nouveau dans ce pays en 2009.
Pour ce qui concerne l’Irak, il s’agit du contentieux dit des « avoirs gelés » né de la première guerre du golfe. Je ne vous ferai pas l’historique de cette affaire. Mais les Irakiens nous devaient beaucoup d’argent par ailleurs !
Nous avons annulé les dettes. Cette opération a été bénéfique pour le budget irakien, qui est excédentaire ! J’espère que nos relations avec ce pays vont s’intensifier, puisque la situation entre les entreprises françaises et l’État irakien commence à s’améliorer. Je vous rappelle à ce sujet que les entreprises concurrentes allemandes, chinoises, russes et américaines sont évidemment dans ce pays depuis longtemps.
L’État irakien demande depuis 2003 le retour des biens et actifs irakiens gelés par la résolution 687 du Conseil de sécurité des Nations unies. Si l’essentiel du problème a été réglé, on déplore encore des contestations devant les tribunaux, du fait des créances et impayés irakiens dus à des Français, notamment au titre du programme « pétrole contre nourriture ». Il y a aussi des contestations portant sur le droit de propriété, car l’Irak demande par exemple le retour de biens, notamment deux villas, appartenant à des personnalités du régime baasiste. Dans ces affaires, nous faisons le maximum.
Permettez-moi de conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, en vous remerciant encore pour l’ensemble de vos contributions, qui ont nourri notre débat. Je le sais, je n’ai pratiquement répondu à aucune de vos interrogations bien légitimes concernant la politique extérieure de la France. Je le ferai en janvier prochain, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, si vous le souhaitez. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. –Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. André Trillard, rapporteur pour avis. Nous aurons un débat !
M. le président. Mes chers collègues, deux solutions s’offrent à nous : soit nous suspendons la séance et nous examinons les amendements cet après-midi, soit nous poursuivons sur notre lancée. Selon mes estimations, il nous reste encore trois quarts d’heure à une heure de débat. Mais tout dépend de vous, mes chers collègues.
Vous avez la parole, monsieur le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Tout d’abord, je vous remercie, monsieur le ministre, de la concision de votre réponse.
Vous l’avez rappelé, il s’agit aujourd’hui d’un débat budgétaire. Au demeurant, je ne doute pas que nos collègues de la commission des affaires étrangères – je parle sous le contrôle du président de Rohan – apprécient le débat que vous leur proposerez au début de l’année prochaine.
Il est treize heures dix. Il nous reste quatorze amendements à examiner. J’observe que la plupart d’entre eux ont déjà été explicités par leurs auteurs à l’occasion de leur intervention liminaire.
La décision que nous avons à prendre nous engage tous : nous ne pouvons décemment pas aller au-delà de treize heures quarante-cinq, ce qui nécessite naturellement une extrême concision de la part de chacun des auteurs des amendements et de ceux qui voudront, le cas échéant, expliquer leur vote.
La question est donc de savoir si nous sommes prêts, les uns et les autres, à respecter ces horaires, afin de pouvoir suspendre au plus tard vers treize heures quarante-cinq, faute de quoi il convient de suspendre la séance maintenant, pour reprendre nos travaux à quinze heures quinze.
M. le président. Je consulte le Sénat sur l’opportunité de poursuivre nos travaux.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Nous allons donc procéder à l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Action extérieure de l’État |
2 493 165 385 |
2 511 585 695 |
Action de la France en Europe et dans le monde |
1 592 000 226 |
1 610 420 536 |
Dont titre 2 |
523 993 926 |
523 993 926 |
Rayonnement culturel et scientifique |
591 742 458 |
591 742 458 |
Dont titre 2 |
87 758 043 |
87 758 043 |
Français à l’étranger et affaires consulaires |
309 422 701 |
309 422 701 |
Dont titre 2 |
188 536 752 |
188 536 752 |
M. le président. L'amendement n° II-199, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2 |
5.000.0005.000.000 |
5.000.0005.000.000 |
||
Rayonnement culturel et scientifiqueDont Titre 2 |
||||
Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
5.000.000 |
5.000.000 |
||
SOLDE |
-5.000.000 |
-5.000.000 |
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Comme je l’ai déjà indiqué, cet amendement vise, compte tenu de la suppression des ambassadeurs thématiques, à diminuer les crédits de l’action n° 1 « Coordination de l’action diplomatique ».
Je le retirerai dès que vous m’aurez donné l’assurance, monsieur le ministre, que vous nous communiquerez bientôt la liste de ces ambassadeurs thématiques et, subsidiairement, le poids qu’ils représentent dans votre budget. Les sommes correspondantes pourraient sans doute utilement être dirigées vers d’autres actions.
M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous la condition de retrait qui est posée ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Condition acceptée ! Je vous communiquerai cette liste, madame Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Par conséquent, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-199 est retiré.
L'amendement n° II-200, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2 |
2.300.000 |
2.300.000 |
||
Rayonnement culturel et scientifiqueDont Titre 2 |
||||
Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
2.300.000 |
2.300.000 |
||
SOLDE |
-2.300.000 |
-2.300.000 |
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Il s’agit d’un amendement « familial », que mon mari avait déposé bien avant moi. Il concerne la suppression des contributions obligatoires à l’UEO, l'Union de l'Europe occidentale.
Cette organisation est absolument moribonde. Ses missions ont été transférées au Parlement européen, au titre des missions dites de Petersberg. J’ajoute que la signature du traité de Lisbonne rendra cette assemblée, qui a d’abord été temporaire et qui s’est ensuite autoproclamée parlementaire, totalement obsolète.
Par ailleurs, elle coûte un argent fou, essentiellement au titre de pensions et retraites et non pas d’actions. Les sommes qui y sont consacrées permettraient de réunir un brain trust de prix Nobel invités à discuter des problèmes liés à la défense !
Le président de la commission des affaires étrangères du Parlement européen est d’ailleurs tout à fait favorable à une telle suppression.
Monsieur le ministre, je suis également prête à retirer cet amendement. Cela dit, pourriez-vous, dans le cadre de la présidence française, examiner avec vos collègues européens les conditions éventuelles d’une dissolution de cette assemblée, qui relève d’un traité ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Puisqu’il s’agit d’un amendement d’appel (Mme Nathalie Goulet opine), je me tourne vers le Gouvernement, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Hélas ! nous sommes loin de la mise en application du traité de Lisbonne.
M. le président. L’amendement n° II-200 est-il maintenu, madame Goulet ?
Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-200 est retiré.
L'amendement n° II-2, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2 |
600.000 |
600.000 |
||
Rayonnement culturel et scientifiqueDont Titre 2 |
||||
Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
600.000 |
600.000 |
||
SOLDE |
-600.000 |
-600.000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Comme je l’ai annoncé précédemment, il s’agit d’inciter le Gouvernement, qui est engagé sur une très bonne voie, à renégocier les contributions internationales, ce qui paraît indispensable. M. le ministre nous a fait part de sa volonté d’agir en ce sens.
Je propose donc de réduire les crédits affectés à l’Union latine, dont la France assume, en la dotant de 600 000 euros, une large part du financement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Je suis désolé, monsieur le rapporteur spécial, mais le Gouvernement a une préférence pour les amendements identiques nos II-48 rectifié et II-188 rectifié parce qu’ils nous permettent de conserver les crédits.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Monsieur le président, je retire l’amendement n° II-2, au bénéfice des amendements identiques nos II-48 rectifié et II-188 rectifié qui affectent les crédits concernés.
M. le président. L’amendement n° II-2 est retiré.
L'amendement n° II-203, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2 |
195.933 |
195.933 |
||
Rayonnement culturel et scientifiqueDont Titre 2 |
||||
Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
195.933 |
195.933 |
||
SOLDE |
-195.933 |
-195.933 |
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. C’est une victoire de l’optimisme sur l’expérience. Nous avons un ambassadeur de France à Strasbourg, dont la mission est de s’intéresser aux travaux du Conseil de l’Europe, dont très peu de personnes font cas.
M. Jacques Legendre. Hélas !
Mme Nathalie Goulet. Effectivement !
Grâce au TGV, vous pourriez très bien, monsieur le ministre, déléguer l’un de vos nombreux fonctionnaires ou ambassadeurs thématiques pour assister à ces travaux.
Nous ferions une économie de 195 933 euros en supprimant cette ambassade de France à Strasbourg, qui me semble excessive par rapport aux besoins de votre ministère.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Il est défavorable. L’ambassadeur loge dans un bâtiment qui appartient à l’État français.
M. le président. Madame Goulet, l'amendement n° II-203 est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. Si ce bâtiment appartient effectivement à l’État français, pourquoi un loyer est-il inscrit dans le « bleu » budgétaire ?
Cela étant dit, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-203 est retiré.
L'amendement n° II-47, présenté par Mme Cerisier-ben Guiga, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique » de la mission « Action extérieure de l'État » :
Action culturelle et scientifique extérieure
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à changer l’intitulé du programme 185 de la mission « Action extérieure de l'État », afin de trouver des mots qui soient plus conformes à la réalité que l’expression « rayonnement culturel et scientifique ». Toutefois, un peu plus de temps serait sans doute nécessaire pour trouver la bonne formulation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je suggère effectivement qu’on réfléchisse à cette question. En attendant, je sollicite le retrait de cet amendement, car il est impossible de prendre une telle décision en séance.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-47 est-il maintenu ?
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-47 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° II-48 rectifié est présenté par Mme Cerisier-ben Guiga, au nom de la commission des affaires étrangères.
L'amendement n° II-188 rectifié est présenté par M. Duvernois.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2 |
|
600.000 |
|
600.000 |
Rayonnement culturel et scientifiqueDont Titre 2 |
600.000 |
|
600.000 |
|
Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
600.000 |
600.000 |
600.000 |
600.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-48 rectifié.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à utiliser les 600 000 euros que nous retirons à l’Union latine pour financer, d’une part, le programme « Français langue maternelle » – FLAM – qui concerne les deux tiers des enfants français établis à l’étranger et, d’autre part, le « Plan pluriannuel pour le français dans l’Union européenne », lequel nous paraît essentiel. Ces deux programmes ont été brutalement privés de financement cette année.
M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois, pour présenter l’amendement n° II-188 rectifié.
M. Louis Duvernois. Le programme FLAM, qui vient d’être évoqué, a fait la preuve de son succès sur le terrain, ainsi que l’a confirmé un rapport d’audit de 2007, qui recommande la poursuite de sa progression. En tant que sénateur représentant les Français établis hors de France, je milite moi-même régulièrement, sur le terrain, pour la montée en puissance de ce programme. C’est pourquoi je partage l’engagement qu’a exprimé, au nom de la commission des affaires étrangères, ma collègue Monique Cerisier-ben Guiga. Nous démontrons ainsi que l’enthousiasme pour cette initiative dépasse les clivages politiques.
Je voudrais insister, monsieur le ministre, sur le coût très modique de ce programme, qui représente 200 euros seulement par élève, et même 75 euros si l’on prend également en compte les enfants étrangers qui bénéficient du programme.
Le retour sur investissement est particulièrement appréciable, ce programme favorisant la pratique de la langue française chez des enfants français scolarisés localement dans une autre langue que le français, qui sont deux fois plus nombreux que les enfants scolarisés dans notre réseau d’enseignement français à l’étranger.
Que l’on ne se trompe pas sur mes intentions : je regrette d’avoir à chercher les économies nécessaires sur la réduction de notre contribution à l’Union latine. Je reste naturellement très attaché à la coopération linguistique et culturelle entre les pays de langues romanes. Néanmoins, comme l’a rappelé notre collègue Adrien Gouteyron, cette organisation reste profondément méconnue.
Or mon souci est de donner toutes leurs chances à des initiatives prometteuses de la société civile qui, en dépit de moyens extrêmement réduits, font la preuve de leur efficacité sur le terrain et représentent un retour sur investissement de très loin supérieur aux bénéfices que nous retirons de nos contributions à certaines organisations internationales.
Mercredi, j’ai milité, en séance publique, pour une politique francophone d’initiatives. Je poursuis sur la même ligne en demandant que, parmi les économies réalisées sur l’Union latine, un apport de 300 000 euros soit garanti au programme FLAM.
Néanmoins, cet apport me semble encore insuffisant. En 2008, le programme FLAM disposait d’un budget de 310 000 euros. Ma collègue Monique Cerisier-ben Guiga et moi-même avons, je le crois, proposé au Gouvernement un compromis très satisfaisant en offrant que l’autre moitié des économies générées par la réduction de notre contribution à l’Union latine, c’est-à-dire 300 000 euros, soit consacrée au Plan pluriannuel pour le français dans l’Union européenne, car j’estime que cette initiative du Gouvernement mérite d’être saluée et d’être soutenue. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP et au banc des commissions.)
Je veux en effet féliciter notre ministre et le Président de la République pour leurs efforts en faveur du maintien de l’influence du français dans l’Union européenne. À partir de ce compromis, je demande au Gouvernement qu’il s’engage, lui aussi, en faveur du programme FLAM (Nouvelles marques d’impatience sur les travées de l’UMP) qui nous tient tous à cœur, en nous donnant l’assurance qu’il comblera la différence pour que ce programme bénéficie d’un budget important lui permettant de poursuivre sa montée en puissance.
M. le président. Merci de votre concision, monsieur Duvernois ! (Rires.)
M. le président. L’amendement n° II-209 rectifié, présenté par M. del Picchia, Mme Garriaud-Maylam, MM. Guerry et Cantegrit, Mme Kammermann, MM. Cointat et Frassa, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2 |
|
|
|
|
Rayonnement culturel et scientifiqueDont Titre 2 |
|
415.000.000 |
|
415.000.000 |
Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2 |
415.000.000 |
|
415.000.000 |
|
TOTAL |
415.000.000 |
415.000.000 |
415.000.000 |
415.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Cet amendement d’appel a pour objet le rattachement au programme 151 des crédits de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger – l’AEFE – qui figurent actuellement au programme 185, afin de rassembler tous les crédits de l'AEFE au sein du même programme.
Le programme 185 contient déjà les bourses et la prise en charge des frais de scolarité des enfants français. Il est, de surcroît, géré par la Direction des Français à l'étranger.
Nous avions présenté un amendement similaire l’an passé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. La dimension « rayonnement culturel » et l’accueil des enfants étrangers ne doivent pas, non plus, être oubliés. (M. le ministre opine.) Cet amendement d’appel présenterait quelques inconvénients. Mais j’ai compris qu’il est surtout destiné à susciter la réflexion.
En revanche, la commission émet un avis favorable sur les amendements identiques nos II-48 rectifié et II-188 rectifié, puisqu’elle a retiré l’amendement n° II-2 au profit de ceux-ci.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Il est favorable sur les deux amendements identiques. J’ai toutefois une préférence pour l’amendement présenté par Mme Monique Cerisier-ben Guiga, dans la mesure où il autorise davantage de souplesse dans la distribution de ces 300 000 euros. Monsieur Duvernois, j’ai bien entendu tout ce que vous avez dit.
Quant à l’amendement n° II-209 rectifié, présenté par M. Robert del Picchia, le Gouvernement émet un avis défavorable, dans la mesure où il faut conserver certaines ressources pour les inscrits locaux.
M. le président. Monsieur del Picchia, l'amendement n° II-209 rectifié est-il maintenu ?
M. Robert del Picchia. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-209 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos II-48 rectifié et II-188 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Action extérieure de l’État » figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
Article additionnel avant l'article 56
M. le président. J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° II-15, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
A. - Avant l'article 56, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Nonobstant l'octroi de bourses à caractère social, la prise en charge par l'État des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d'enseignement français à l'étranger ne peut excéder un plafond fixé par décret, pris après avis de l'Assemblée des Français de l'étranger. Le décret détermine, en outre, les conditions dans lesquelles le niveau de revenu des familles peut faire obstacle à une telle prise en charge.
II.- Toute extension éventuelle de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d'enseignement français à l'étranger en sus des classes de seconde, de première et de terminale est précédée d'une étude d'impact transmise au Parlement, précisant notamment les modalités de son financement.
B. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Action extérieure de l'État
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Tous les arguments ou presque ayant été exposés et nos collègues étant sans doute informés, j’apporterai simplement quelques précisions.
Tout d’abord, je rappellerai que la situation actuelle est fondée sur une simple instruction. Celle-ci prévoyait deux dispositions qui, à ma connaissance, n’ont pas été appliquées : la prise en compte du revenu brut de la famille et la possibilité pour l’AEFE de plafonner la prise en charge des frais de scolarité en cas de contraintes budgétaires pesant sur la dotation allouée au dispositif. Vous le constatez, mes chers collègues, nous n’innovons guère…
Ensuite, je ferai remarquer que cet amendement comporte deux parties. L’une d’entre elles est un moratoire. On prend acte : la gratuité est appliquée pour les enfants français des classes de seconde, de première et de terminale. Toute extension de la prise en charge des frais de scolarité doit être précédée d’une étude.
En outre, il me semble en effet important de corriger certains effets pervers. C’est pourquoi il est proposé de poser des limites, mais je n’y reviens pas.
Enfin, on constate des distorsions absolument insupportables. Ainsi, pour deux élèves scolarisés dans la même ville, San Francisco, l’État prend en charge 16 000 euros au lycée international franco-américain et 13 000 euros au lycée français La Pérouse. C’est intenable ! (Mme Monique Cerisier-ben Guiga opine.)
M. le président. Le sous-amendement n° II-214 rectifié quater, présenté par MM. Ferrand, J. Blanc et Bourdin, Mme Bout, MM. Cambon, Carle, Cazalet, César et Deneux, Mme Dini, MM. Dulait, Fourcade, Gaillard, Garrec, C. Gaudin et J. Gautier, Mme N. Goulet, MM. Gournac, Lefèvre, Longuet, du Luart et Pozzo di Borgo, Mme Procaccia et MM. Revet, Trucy, Braye, Amoudry, Richert, Adnot, François-Poncet et Legendre, est ainsi libellé :
Compléter le I du A de l'amendement n° II-15 par un alinéa ainsi rédigé :
Le gouvernement remet au Parlement, avant le 31 mars 2009, un rapport précisant les conditions dans lesquelles les économies ainsi réalisées sont affectées au financement de bourses à caractère social pour les enfants français scolarisés à l'étranger.
La parole est à M. André Ferrand.
M. André Ferrand. Pour réfléchir sainement et sérieusement à ces amendements, je crois qu’il faut se reporter aux engagements généreux que le Président de la République avait pris durant sa campagne électorale.
Il avait promis la gratuité pour les classes de lycée. Il a tenu parole : nous sommes actuellement dans la phase finale d’application de ce premier engagement.
Je pense qu’il est temps maintenant de réaliser la deuxième partie de son engagement. Permettez-moi, mes chers collègues, de vous rappeler ce que Nicolas Sarkozy, alors candidat à la présidence de la République, avait déclaré aux Français de l’étranger : « Je souhaite également que les coûts d’inscription de vos enfants, au primaire et au secondaire, soient fortement diminués grâce à une augmentation des bourses. »
Le conseil d’administration de l’AEFE s’est réuni hier. Tous les observateurs ont pu constater que cette agence était pressurée par la compensation très partielle des cotisations de pensions, qui n’était donc pas une compensation à l’euro près, monsieur le ministre. Comme un orateur l’a souligné tout à l’heure, le manque à gagner pour l’AEFE, de 6 millions d’euros la première année, atteindra sans doute 15 ou 20 millions d’euros la deuxième, et ira ensuite crescendo.
Cette agence devra aussi faire face à la dévolution du patrimoine immobilier que l’État lui a transmis sans lui transférer les crédits correspondants.
L’AEFE sera donc obligée d’augmenter considérablement les frais de scolarité, ce qui risque de provoquer des phénomènes d’exclusion au détriment des enfants de l’étranger.
Sur ce point encore, je vous renvoie aux déclarations du Président de la République : « J’affirme tout d’abord qu’il n’est pas normal qu’un enfant français soit exclu de notre système d’enseignement, soit pour des raisons financières, soit pour des raisons géographiques. » Malheureusement, dans toutes les classes qui ne sont pas gratuites, c’est-à-dire partout ailleurs que dans les classes de lycée, nous en sommes là !
La communauté scolaire attend donc du Sénat un geste fort, qui rejoindrait les recommandations du Livre blanc des affaires étrangères ainsi que les conclusions des états généraux de l’enseignement français à l’étranger, qui ont couronné les travaux de la commission de réflexion sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger, laquelle avait regroupé toutes les parties concernées.
Ce sous-amendement, mes chers collègues, a pour objet de s’assurer que l’argent économisé grâce au double plafonnement qui vient d’être présenté ne soit pas versé ailleurs que dans la caisse de l’enseignement français à l’étranger et qu’il serve, par un système de vases communicants, à augmenter le niveau des bourses afin, je le répète, que les enfants de familles modestes ne soient pas exclus de notre enseignement à l’étranger.
M. le président. L'amendement n° II-45, présenté par M. Trillard, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Avant l'article 56, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La prise en charge par l'État des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d'enseignement français à l'étranger ne peut excéder un plafond fixé par décret, pris après avis de l'Assemblée des Français de l'étranger. Ce décret détermine également les conditions dans lesquelles le niveau de revenu des familles est pris en compte pour l'obtention de cette prise en charge.
II. - L'éventuelle extension de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d'enseignement français à l'étranger à d'autres classes que celles de seconde, de première et de terminale est précédée d'une étude d'impact transmise au Parlement, établissant le bilan financier de la prise en charge des classes de lycée, et déterminant les modalités du financement de son extension à de nouvelles classes.
La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.
M. André Trillard, rapporteur pour avis. Cet amendement se rapproche de celui qui a été présenté par le M. Gouteyron. Il laisse se dérouler les opérations en lycée mais prévoit une étude sur des plafonnements et un système modulable en fonction des revenus et du montant des frais de scolarité dans les différents territoires concernés.
M. le président. L'amendement n° II-187, présenté par M. del Picchia, Mmes Garriaud-Maylam et Kammermann et MM. Cantegrit, Cointat, Duvernois, Frassa et Guerry, est ainsi libellé :
Avant l'article 56, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les conditions et modalités d'application de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français inscrits dans les classes de lycée des établissements d'enseignement français à l'étranger telles qu'issues de la réglementation en vigueur sont fixées par décret, établi sur la base d'un bilan complet de cette mesure après sa mise en application aux classes de seconde. Ce décret entrera en vigueur, pour les trois classes de lycées, pour les inscriptions de la rentrée de septembre 2010.
II. - Sur la base des résultats de l'application du décret aux classes de lycée, une étude d'impact sera réalisée pour l'extension éventuelle et progressive de cette prise en charge aux classes de collège des établissements d'enseignement français à l'étranger.
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Je serai bref, chacun ayant amplement développé son point de vue.
Monsieur le ministre, comme vous, je pense qu’il serait plus sage d’attendre que soit dressé un bilan de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français inscrits dans les classes de lycée des établissements d’enseignement français à l’étranger avant de prendre une décision qui sera applicable en septembre 2010.
Trancher dès à présent n’aurait pas de sens, d’autant qu’il sera peut-être nécessaire d’aller au-delà du double plafonnement et de trouver des solutions pour les bourses. De la sorte, nous satisferions la demande du Président de la République, à savoir une prise en charge des frais de scolarité, mais aussi les bourses.
Mon amendement est tout simple et je ne vois aucune raison de le repousser, alors même que nous parvenons en phase finale. Nous avons attendu jusqu’à ce jour, nous pouvons bien attendre encore six mois !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. La commission ne s’est pas prononcée sur le sous-amendement n° II-214 rectifié quater, mais, celui-ci s’inscrivant dans l’esprit des propositions qu’elle a elle-même formulées, je crois pouvoir dire qu’elle aurait émis un avis favorable.
S’agissant de l’amendement n° II-45, M. Trillard a dit lui-même qu’il était quasi identique à celui de la commission des finances. Aussi, peut-être pourrait-il le retirer.
Enfin, monsieur del Picchia, la fixation des grands principes relève non pas d’un décret, ainsi que vous le proposez dans votre amendement n° II-187, mais de la loi. En outre, le moratoire est possible si l’on vote le texte, puisque celui-ci prévoit un décret, qui sera complexe à mettre au point. Ne nous berçons pas d’illusions, il ne pourra pas être publié avant septembre prochain. Nous avons donc le temps de le préparer. Il doit en effet être soigneusement étudié, parce qu’il devra fixer des principes mais en prévoyant une application pays par pays, et même, dans certains pays, en tenant compte aussi précisément que possible des réalités locales. Le découpage sera donc assez fin.
Il n’y a de notre part aucune précipitation. Pour assurer l’équité et afin de pérenniser la mesure, il faut prendre certaines précautions, ce que prévoit notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Vous l’avez compris, le Gouvernement marche sur des œufs…
Sur le fond, nous sommes tous d’accord. C’est pourquoi je fais une dernière tentative – ce n’est pas grand-chose – pour nous permettre d’aboutir à un accord.
À partir du mois de septembre, la prise en charge des frais de scolarité s’appliquera aux classes de seconde, de première et de terminale. Notre seul point de désaccord porte sur la question du plafonnement : je rappelle que les bourses sont concernées par le moratoire, puisque la proposition présidentielle – je ne reviens pas sur celle qu’avait faite la gauche pendant la campagne pour l’élection présidentielle et qui était assez proche – visait à instaurer la gratuité des frais de scolarité mais aussi à mettre en place un régime de bourses plus harmonieux et plus juste.
Je souscris à l’idée de procéder à une étude préalable avant toute extension du dispositif au-delà du lycée. Cependant, je propose à la commission une modification, légère, de son amendement. Pourquoi ne pas parler d’une réflexion sur le plafonnement dans le cadre du moratoire ? Dans ce cas, le décret trouverait toute sa place.
À compter du mois de septembre, une fois acquise la gratuité des frais de scolarité en classes de seconde, de première et de terminale, nous travaillerons sur la question des bourses, de manière à parvenir très rapidement à un accord.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne vous demande pas un effort considérable. Il serait bon que nous puissions procéder ainsi. Nous avons passé un an et demi à ne pas pouvoir aborder ce sujet. Nous pouvons enfin l’aborder : tentons d’harmoniser nos positions.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Moi aussi, je marche sur des œufs ! (Sourires.)
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, quels risques prendrions-nous à voter cet amendement, qui peut être interprété avec suffisamment de souplesse pour autoriser toutes les réflexions souhaitables ?
Aussi, je propose que nous en restions là. La discussion aura lieu ensuite.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre. Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut qu’émettre, à regret, un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-214 rectifié quater.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'amendement n° II-15.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. En tant que sénateur des français établis hors de France, membre du conseil d’administration de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, connaissant le réseau depuis fort longtemps, je me rallie à l’amendement de la commission des finances, modifié par le sous-amendement que le Sénat vient d’adopter, et à l’amendement de la commission des affaires étrangères, que nous avons voté en commission.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 56, et les amendements nos II-45 et II-187 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° II-234, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Avant l'article 56, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 15 mars de chaque année, la liste des ambassadeurs thématiques accompagnée de leur grade ainsi que les charges afférentes à leurs missions.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. M. le ministre s’étant engagé à me communiquer la liste des ambassadeurs thématiques missionnés par le ministère des affaires étrangères, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-234 est retiré.
L'amendement n° II-235, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Avant l'article 56, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est créé au sein du ministère des affaires étrangères une direction des ressources humaines chargée de valider les candidatures des fonctionnaires et agents servant dans les postes diplomatiques et d'apprécier notamment leurs compétences linguistiques.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, que j’avais déjà déposé lors de l’examen du texte qui est devenu la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, vise à créer une direction des ressources humaines au sein du ministère des affaires étrangères.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Mme Goulet fait une proposition de bon sens, mais celle-ci ne relève pas du domaine législatif. Je lui demande donc de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur spécial. De surcroît, permettez-moi de vous signaler, madame la sénatrice, qu’il existe déjà une direction des ressources humaines au sein du ministère.
M. le président. Madame Goulet, l'amendement n° II-35 est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.
Cela dit, je serais heureuse de pouvoir effectuer un stage au sein de cette direction, afin de savoir comment elle fonctionne. (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° II-235 est retiré.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures quarante, est reprise à quinze heures cinquante, sous la présidence de M. Roland du Luart.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l'Assemblée nationale.
Administration générale et territoriale de l’État
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (et articles 56 à 58).
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Michèle André, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » bénéficie, pour 2009, de 2,604 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une baisse de 1,3 % par rapport à 2008.
M. Jean-Pierre Sueur. Ça commence mal !
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Cette mission se situe au cœur des dispositions de la révision générale des politiques publiques, avec notamment une centralisation au sein des préfectures du contrôle de légalité, une redéfinition du rôle des sous-préfectures, ces dernières étant davantage centrées sur les missions de conseil aux collectivités territoriales et de coordination de l’action de l’État, ainsi qu’une réorganisation des services de l’État à l’échelon régional et départemental.
Le nouveau système d’immatriculation des véhicules entrera également en application en 2009, avec une nouvelle plaque d’immatriculation sur laquelle figureront, sur un espace toutefois très réduit, le numéro d’un département et le logo d’une région, laissés au choix du propriétaire du véhicule.
L’ensemble de ces réformes se traduit, pour 2009, par une réduction des effectifs de la mission de 733 emplois équivalents temps plein travaillé.
Au regard de ces perspectives d’évolution, je tiens à souligner les importantes mutations qui devraient, dans les années à venir, caractériser cette administration de mission qu’est l’administration territoriale. Les métiers au sein des préfectures et des sous-préfectures connaîtront aussi de profonds bouleversements.
Dans un tel contexte, il conviendra d’attacher une grande attention aux missions d’accueil qui doivent être remplies dans ces lieux publics, notamment dans les services réservés aux étrangers. Il faut tout spécialement rappeler l’importance, d’une part, du choix des personnels devant assurer cet accueil et, d’autre part, de la qualification et de la formation de ces personnels, souvent amenés à prendre en charge des publics connaissant de grandes difficultés.
Le programme « Administration territoriale » enregistre une hausse de 1,2 % de ses crédits de paiement, lesquels s’élèvent à 1,673 milliard d’euros.
Le premier enjeu de ce programme, en 2009, porte sur l’entrée en application des titres sécurisés, le règlement européen du 13 décembre 2004 imposant le passage au passeport biométrique avant le 28 juin 2009. L’entrée en vigueur de ces titres, fabriqués par l’Imprimerie nationale, est placée sous la responsabilité de l’Agence nationale des titres sécurisés, située à Charleville-Mézières. Le décret du 13 avril 2008 a délégué aux mairies l’enregistrement des demandes de passeports biométriques ainsi que la prise de photos et d’empreintes digitales.
Je reviendrai d’ailleurs sur ce point, d’autant plus épineux qu’il s’inscrit dans un contexte de contentieux entre l’État et les mairies en matière de délivrance de titres depuis 2001, lors de la présentation des deux amendements que propose au Sénat la commission des finances.
Le second enjeu de ce programme réside dans une éventuelle reconfiguration de la carte préfectorale. À cet égard, il faut rappeler que l’adaptation envisagée du réseau des sous-préfectures doit préserver la qualité du service public, assurer la présence de l’État au plus près des attentes des élus et des citoyens et se dérouler selon une méthode privilégiant le pragmatisme et les réalités locales.
Le programme « Administration territoriale : expérimentations Chorus », doté de 106,9 millions d’euros en crédits de paiement comme en autorisations d’engagement, permettra de tester l’outil de gestion budgétaire et comptable Chorus dans deux régions, la Haute-Normandie et les Pays de la Loire. À cet égard, on ne peut que regretter le retard pris dans le déploiement de Chorus au sein des administrations, l’aboutissement de ce projet n’étant désormais prévu qu’en 2010 au plus tôt.
Le programme « Vie politique, cultuelle et associative » enregistre une chute de 49,3 % de ses crédits de paiement, ceux-ci passant à 240 millions d’euros pour 2009. Toutefois, cette très forte baisse ne fait que refléter l’évolution du cycle électoral.
L’analyse de la performance de ce programme permet d’établir un classement des opérations électorales en fonction de leur coût. Ainsi, le coût moyen par électeur inscrit s’élève à 4,60 euros pour l’élection présidentielle, à 3,73 euros pour les élections cantonales, à 3,37 euros pour les élections législatives, à 2,98 euros pour les élections européennes, à 2,86 euros pour les élections municipales et à 0,11 euro pour les élections sénatoriales.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est donné ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas cher ! (Nouveaux sourires.)
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Effectivement !
Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » voit ses crédits de paiement croître de 11,8 %, pour atteindre 584,3 millions d’euros.
Une ombre plane toutefois sur ce programme. En effet, au 31 juillet 2008, le rythme des dépenses liées aux frais de contentieux était en hausse de 65 % par rapport à 2008. On peut donc s’inquiéter, d’une part, du respect de l’autorisation budgétaire accordée sur l’exercice 2008 pour l’action n° 6 « Conseil juridique et traitement du contentieux », dotée de 82,3 millions d’euros, dont une enveloppe de 75,2 millions d’euros pour les frais de contentieux, et, d’autre part, d’une éventuelle sous-évaluation de ce poste de dépenses pour 2009.
Au-delà, il est également permis de s’interroger sur le devenir du contentieux indemnitaire concernant la gestion des cartes nationales d’identité et des passeports par les communes : 336 requêtes étaient en cours au 1er septembre 2008, pour un montant total de 118,2 millions d’euros.
En conclusion, et sous ces réserves, la commission des finances propose au Sénat l’adoption des crédits de cette mission et de chacun de ses programmes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et de l’UMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. le président. Madame le rapporteur spécial, je vous remercie de ne pas avoir dépassé le temps de parole qui vous était imparti.
Mme Michèle André, rapporteur spécial. J’ai été vice-présidente : je sais ce que c’est ! (Sourires.)
M. le président. Il est vrai que vous avez de l’expérience en la matière ! (Nouveaux sourires.)
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je limiterai mes observations à quatre points qui ont fait débat en commission.
Premièrement, vous souhaitez, madame la ministre, une réorganisation rationalisée des services déconcentrés de l’État, ce que nous ne pouvons qu’approuver.
Une question se pose toutefois. Pourquoi avoir une vision aussi jacobine de la réorganisation des services déconcentrés de l’État ? Est-il pertinent de prévoir un schéma unique d’organisation des services, qui s’appliquera à la fois dans la région Île-de-France et dans une zone de montagne ? N’aurait-il pas été préférable de laisser au préfet de région, dont la réforme consacre l’autorité, le pouvoir de décider de la meilleure organisation de ses services ?
Deuxièmement, la commission des lois a noté avec beaucoup de satisfaction votre engagement de ne pas supprimer les sous-préfectures dans les zones fragiles, qu’elles soient rurales ou de montagne, c'est-à-dire là où la densité de service public n’est pas suffisante, pour reprendre vos propres termes, madame la ministre. Une telle décision ne peut que rassurer les élus locaux.
Si la sous-préfecture est maintenue, la fonction de sous-préfet est quant à elle supprimée au profit de celle de conseiller d’administration. À vous entendre, madame la ministre, c’est une bonne chose, la capacité des conseillers d’administration ne faisant aucun doute et leur expérience leur permettant d’apporter autant, sinon plus dans certaines circonstances. Je comprends tout cela.
Pour autant, une autre solution n’aurait-elle pu être envisagée, par exemple faire en sorte que le conseiller d’administration fasse partie intégrante du corps préfectoral ? Pourquoi en faire, si vous m’autorisez l’expression et sans que je sois animé d’un quelconque esprit polémique, une sorte de sous-préfet, mais en moins cher ? (Mme la ministre manifeste sa surprise.)
En effet, si nous pouvons comprendre que le conseiller d’administration ne bénéficie pas d’un certain nombre des attributs liés à la fonction, par exemple une voiture de fonction, en revanche le fait qu’il ne dispose pas d’un logement de fonction pose problème. Si un accident ou des intempéries surviennent dans une zone de montagne, est-on certain que la présence de l’État, donc la mission de service public, sera alors bien assurée ?
Troisièmement, le contrôle de légalité va être centralisé dans les préfectures de département. C’est une bonne chose. Il faut sans doute améliorer l’expertise juridique de l’État. N’oublions pas toutefois que le bon contrôle de légalité est celui qui s’accompagne d’un dialogue constant avec l’élu local. Le fait de centraliser à la préfecture, au chef-lieu du département le contrôle de légalité ne va-t-il pas nuire à la qualité du dialogue entre le service de légalité et l’élu local ? En effet, le sous-préfet a également un rôle de conseil auprès des collectivités locales.
Quatrièmement, les passeports biométriques appellent de la part de la commission trois observations.
D’abord, nous comprenons le souci de proximité qui vous conduit à transférer en mairie l’accueil des personnes voulant un tel passeport. Cet accueil aurait aussi bien pu être assuré par les sous-préfectures, ce qui aurait également répondu à votre préoccupation.
Ensuite, alors que nous sommes dans un État de droit, il est surprenant de constater que depuis trois ans, c’est-à-dire depuis l’arrêt du Conseil d’État « Commune de Versailles », le transfert de cette compétence est privé de tout fondement légal. De ce fait, de multiples contentieux sont apparus et l’État est aujourd’hui amené à payer des indemnités aux communes. N’aurions-nous pas pu régler cette question au cours de ces trois années ?
Enfin, j’aborderai la dotation de 3 200 euros attribuée aux communes et qui a été évoquée par Mme André. Certes, madame la ministre, à Chantilly, vous avez mis huit minutes pour obtenir un passeport biométrique. Je suis certainement moins doué que vous puisque la même expérience dans ma ville de Mérignac a requis plus de vingt minutes. Il est vrai que mon passeport n’était pas préemballé, si je puis dire. J’ai dû remplir le formulaire avec l’aide de l’agent municipal ; la reconnaissance optique de caractères n’est pas fiable à 100 % et nécessite des corrections sur ordinateur. Un certain nombre de manœuvres doivent être effectuées, ce qui amène à dépasser le temps pris en considération pour calculer le montant de la dotation susvisée. D’ailleurs, la commission des finances a déposé un amendement tendant à doubler ce montant ; la commission des lois le soutiendra.
Pour conclure, je formulerai une observation générale. En réalité, toutes les mesures que vous proposez vont vers un repli de l’État sur les territoires. Ce repli, qui intervient après la réforme de la carte judiciaire, celle de la défense nationale, après la disparition de services publics, notamment de La Poste, ne peut qu’inquiéter.
Alors que vous annoncez, par ailleurs, une réorganisation des collectivités locales, n’aurait-il pas été plus cohérent de lier la réforme des services déconcentrés de l’État à celle des collectivités locales ? Nous aurions alors pu avoir une vision globale de nos territoires et réfléchir à d’autres modes d’organisation. À titre personnel, je considère que la question la plus délicate est non pas celle des relations entre les différentes collectivités locales mais celle des relations entre les collectivités locales et l’État.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois propose d’adopter les crédits de la mission. Pour ma part, à titre personnel, je m’y refuserai. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Bernard Saugey applaudit également.)
M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
J’informe le Sénat que je veillerai strictement au respect de ces temps de parole.
Mme Nathalie Goulet. Bonne nouvelle !
M. le président. Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Comme vous le savez fort bien, madame la ministre, et comme l’ont dit excellemment tant Mme le rapporteur spécial que M. le rapporteur pour avis – je les salue tous deux –, ce budget se traduit par une diminution très importante des effectifs. Vous en conviendrez, monsieur le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est vertueux !
M. Jean-Pierre Sueur. En réalité, si une fraction de cette diminution s’explique par un transfert de 93 équivalents temps plein travaillé vers l’Agence nationale des titres sécurisés, en raison des nouvelles missions qui lui sont confiées, le solde de cette baisse, soit tout de même 2,1 % des effectifs, s’inscrit dans l’objectif général de non-remplacement des personnels partant à la retraite.
Le taux de suppression lors des départs à la retraite est de 70 % pour la mission que nous examinons. Ce fait sera bien vu par les autorités qui veillent au respect de la règle des 50 % de non-remplacement. Madame la ministre, vous faites du zèle ! Quel score ! Ainsi, 733 personnes faisant valoir leur droit à la retraite ne seront pas remplacées. Au total, 800 emplois seront supprimés.
Est-il réaliste de faire fonctionner les préfectures et les sous-préfectures avec de telles diminutions d’effectifs ? Les 800 agents qui ne seront pas remplacés assument des tâches utiles. Au nom du groupe socialiste, je tiens à rendre hommage à l’ensemble des personnels des préfectures et des sous-préfectures, qui accomplissent un travail tout à fait remarquable. Leurs tâches sont même plus compliquées depuis quelques années. Ils font face à une charge de travail toujours plus importante.
Permettez-moi d’aborder un sujet que Mme Michèle André a évoqué dans son rapport écrit. Il s’agit des services qui gèrent les populations étrangères, qui accueillent donc les étrangers venant dans notre pays et devant accomplir de nombreuses formalités, notamment solliciter des titres de séjour.
Vous le savez, madame la ministre, dans nombre de préfectures, les conditions dans lesquelles travaillent ces personnels sont au-delà du point de rupture. Pour accéder à certains services, des files d’attente se forment dès cinq heures du matin devant des préfectures de la région Île-de-France. Comment vous paraît-il possible d’améliorer la situation eu égard aux effectifs qui vous restent ? Or une telle amélioration est nécessaire. C’est d’ailleurs souvent une question de dignité et de respect à l’égard des personnes que nous recevons.
Ma seconde question portera sur la réorganisation des services de l’État. J’ai un peu le sentiment que l’on cède à la mode selon laquelle il faut moins de directions.
Si j’ai bien compris, sera instaurée une direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement. Certes, l’environnement est une priorité essentielle. Personne ne dira le contraire.
Dans cette direction, l’aménagement se trouve en deuxième position. Pour ce qui me concerne, je n’ai aucun problème à l’égard de l’aménagement, voire de l’équipement, qui a complètement disparu, comme s’il ne fallait plus parler de direction de l’équipement. Pour ma part, j’aime bien que l’on équipe et que l’on aménage mon pays.
Le logement est cité en dernier alors que chacun connaît l’impérieuse nécessité liée à la politique du logement.
Enfin, je ne comprends pas très bien l’organisation départementale.
Ainsi serait créée une direction départementale des territoires. Fort bien ! Mais cette direction regroupe tellement de choses que l’on finit par se demander si vous n’auriez pas pu pousser la simplification un peu plus loin et créer une seule direction dans chaque préfecture. Vous auriez alors été la championne de la révision générale des politiques publiques, la fameuse RGPP ! Cette direction départementale des territoires va regrouper les directions départementales de l’équipement et de l’agriculture auxquelles s’adjoindraient les subdivisions départementales des directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, les DRIRE, et des directions régionales des affaires culturelles, les DRAC. On associerait ainsi la culture, l’équipement, les transports dans les territoires.
Je ne comprends pas pourquoi on ne fait pas figurer la culture au sein de la direction vouée aux populations qui, elle, va comprendre, me semble-t-il, la police et les services vétérinaires, qui se trouvent séparés de l’agriculture… Tout cela est très arbitraire !
Une direction serait facultative, celle de la cohésion sociale. Pour quelle raison ?
Mme Nicole Bricq. Personne ne l’a compris !
M. Jean-Pierre Sueur. Dans certains départements, la cohésion sociale serait particulièrement nécessaire, comme si tel n’était pas le cas sur l’ensemble du territoire. Quel préfet pourrait soutenir qu’il n’est pas opportun, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines, de mettre en place une direction de la cohésion sociale ?
Je crains que l’on ne crée, en fin de compte, une confusion générale et que l’on ne génère beaucoup d’abstraction. Il y a là beaucoup d’effets de mode et je me demande si le bénéfice sera vraiment celui qui est escompté.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Pierre Sueur. En définitive, mon propos se résume en deux questions. Quelle est la justification profonde de cette organisation qui semble très critiquable ? Comment mener toutes les missions avec 800 personnes en moins, notamment l’accueil des étrangers ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » bénéficie, dans ce projet de loi de finances pour 2009, de 2,604 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une baisse de 1,3 % par rapport à 2008.
Cette baisse des crédits est due, comme l’a souligné la commission des finances, à la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques ou RGPP. Les missions incombant aux préfectures et aux sous-préfectures vont être profondément modifiées. La RGPP prévoit une centralisation, au sein des préfectures, du contrôle de légalité mais également une réorganisation des services de l’État au niveau régional prépondérant et au niveau départemental. Cela conduit le Gouvernement à réduire les effectifs de la mission en supprimant 733 emplois équivalents temps plein travaillé, afin de satisfaire son objectif de réduction des dépenses publiques. La RGPP est son atout maître pour l’atteindre, avec une présence amoindrie de l’État dans nos départements.
La carte judiciaire a programmé la fermeture de tribunaux d’instance et de grande instance, de conseils de prud’hommes. La carte militaire prévoit la fermeture de casernes. Le nombre de trésoreries a déjà fortement diminué et le projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires » comporte également des regroupements d’hôpitaux et des fermetures de services. À cette disparition progressive des services publics et des administrations de l’État, il faut ajouter aujourd’hui la réforme des sous-préfectures.
Ainsi, l’arrêté du 20 mai 2008 prévoit le remplacement de 115 sous-préfets par des conseillers d’administration, en attendant la suppression progressive de certaines sous-préfectures. Ces conseillers d’administration ne seront pas tout à fait tenus aux mêmes obligations que les sous-préfets. En effet, ils ne seront pas soumis à des astreintes en fin de semaine : mais que se passera-t-il si une catastrophe naturelle se produit durant cette période ?
Il est difficilement acceptable de réduire la présence des représentants de l’État dans nos départements pour offrir aux attachés principaux du ministère de l’intérieur des perspectives élargies de promotion professionnelle et d’accès à des postes de responsabilité supérieure, l’un des objets de la création des conseillers d’administration.
En revanche, il est incontestable que leur création a bien pour second objet de faire évoluer les modalités de représentation de l’État sur le territoire. Or le risque existe bel et bien de voir des territoires où les administrations de l’État seront amenées à exercer des missions de service public réduites à leur strict minimum, au détriment des populations qui subissent déjà un désengagement visible de l’État.
Mme le rapporteur spécial s’inquiète également de cette situation. Elle rappelle dans son rapport que « dans les lieux où les services publics sont moins nombreux et la circulation plus difficile, notamment dans les zones rurales, montagneuses ou isolées, cette présence de proximité, de conseil et de contrôle assurée par les sous-préfectures demeure nécessaire et doit absolument être garantie ». Je souscris à cette analyse
Néanmoins, je doute que le Gouvernement suive ce conseil. Nous ne sommes pas crédules quant aux motivations qui le poussent à choisir une telle orientation.
En effet, la RGPP accompagne la réforme territoriale amorcée en 2007 et lancée avec le rapport Attali qui proposait de supprimer le département ; l’Assemblée nationale s’est également emparée du sujet, sa commission des lois proposant dans un rapport intitulé « Pour un big bang territorial » de fusionner le département avec les régions. Enfin, nous attendons les conclusions de notre propre mission d’information sénatoriale sur la question ainsi, bien sûr, que les conclusions de la commission Balladur.
Or la RGPP prévoit une réorganisation des services de l’État à l'échelon régional et départemental, avec un recentrage autour du préfet.
Le Gouvernement procède ainsi, par anticipation, à une réorganisation administrative de l’État, alors que des missions parlementaires et extraparlementaires sont en train de réfléchir à une réforme des collectivités territoriales et que de nombreux élus, maires ou conseillers généraux, sont extrêmement sceptiques quant à la réforme envisagée.
Avant de conclure, j’évoquerai le contrôle de légalité.
Il est envisagé de ne plus assurer le contrôle de légalité dans les sous-préfectures, où les titres ne seraient plus délivrés. La RGPP prévoit de centraliser au sein des préfectures ce contrôle, qui serait de surcroît recentré sur les actes les plus importants.
Le rôle des sous-préfectures serait alors redéfini et réorienté vers les missions de conseil aux collectivités territoriales.
Madame la ministre, cette réforme pose tout de même la question de l’efficacité et de l’utilité du contrôle de légalité, en raison des conseils délivrés aux élus grâce aux lettres d’observations adressées par les services préfectoraux, et parce qu’il intervient en amont des actes, ce qui permet aux collectivités d’édicter ensuite des textes juridiquement solides. Enfin, le contrôle exercé sur les budgets locaux permet de prévenir les risques financiers pesant sur les collectivités.
Le recentrage du contrôle de légalité sur les seules préfectures ne nous semble pas de nature à assurer un service d’un niveau équivalant à celui qui est rendu aujourd’hui par les agents des sous-préfectures. La mission de conseil aux collectivités locales risque de s’estomper, au profit d'ailleurs d’un contrôle essentiellement répressif.
Les orientations budgétaires de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » pour 2009 et les choix politiques opérés par le Gouvernement dans le cadre de la RGPP ne nous inspirent qu’inquiétude. C’est pourquoi nous voterons contre ces crédits.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais exprimer ma profonde préoccupation devant l’application de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, à l’administration territoriale de l’État.
Cette réforme, c’est Attila ! On dénombre 733 suppressions d’emplois en équivalents temps plein travaillé. Ces coups de hache tomberont essentiellement sur l’administration préfectorale, qui subira une profonde restructuration mettant gravement en cause le service public.
Madame la ministre, vous parlez de « modernisation ». Vous alléguez le raccourcissement des distances et la dématérialisation des procédures pour occulter un fait simple : vous vous orientez vers la suppression du département en tant qu’échelon déconcentré de plein droit de l’État, pour le remplacer par la région.
C’est cela, la RGPP : la régionalisation de l’État et la « sous-préfectoralisation » de tous les départements dont la ville chef-lieu n’est pas capitale de région.
Parallèlement, des voix autorisées se font entendre pour affirmer qu’il existe un échelon de trop parmi les collectivités décentralisées. La commission Attali l’avait déjà identifié : c’est le département, non pas en tant qu’échelon déconcentré de l’État, mais en tant que collectivité territoriale !
Cette vision est purement technocratique, car je ne vois pas en quoi les compétences de proximité du département, notamment en matière sociale, seraient mieux exercées dans la capitale de région, souvent distante de plus de cent kilomètres.
Toutefois, revenons à la RGPP appliquée à l’administration territoriale de l’État.
C’est le préfet de région qui devient le vrai patron dans tous les départements, et l’essentiel des services de l’État est regroupé au niveau de la région en huit nouvelles directions. Ne subsisteront plus, dans les autres départements, que deux « unités territoriales », chargées l’une des territoires, l’autre de la protection des populations et, là où cette compétence sera jugée utile, de la cohésion sociale.
Si j’en crois l’expérimentation qui a été menée dans le département dont je suis l’élu, c'est-à-dire le Territoire de Belfort, la fusion de la DDE, la direction départementale de l’équipement, et de la DDAF, la direction départementale de l’agriculture et de la forêt, s’est traduite par une déperdition de compétences qui conduit les communes à se tourner de plus en plus vers les bureaux d’études privés, souvent plus chers.
Ajoutons aux deux unités territoriales de plein droit ce qui restera des inspections académiques, un pôle « finances publiques » et un pôle « sécurité ».
Bref, nous sommes en présence d’une restructuration violente, d’une cure d’amaigrissement pour les personnels départementaux de l’État, dont chacun ici tient à saluer, malgré la faiblesse déjà insigne de leurs moyens, le professionnalisme et l’esprit de service public.
Sur toutes les affaires des départements, le préfet de région aura un pouvoir d’évocation. Il restera par ailleurs préfet de son département, ce qui, quel que soit le mérite des grands commis auxquels vous avez confié cette tâche, ne facilitera pas les arbitrages impartiaux, tant il est vrai que l’on décide souvent selon les critères du lieu où l’on habite...
Avez-vous réfléchi, madame la ministre, à la marginalisation de ces départements périphériques, qui sont quand même plus de soixante-dix ! À ces départements reculés, souvent couverts de friches ou de montagnes, où la présence de l’État était ressentie comme une protection contre l’oubli et le délaissement ?
Il sera loin le temps où l’on pouvait dire, après Napoléon, que « de la création des préfets date le bonheur des Français » !
M. Jean-Pierre Sueur. Et voilà !
M. Jean-Pierre Chevènement. Car le préfet joue dans son département un rôle d’influence et d’équilibre. C’est lui qui réunit, sur tel ou tel dossier brûlant, toutes les parties prenantes, et qui arbitre en cas de désaccord, tant son prestige reste grand, à condition du moins qu’on ne lui retire pas tous ses moyens et qu’on ne le transforme pas en simple boîte postale de la préfecture de région !
La logique d’économies a évidemment prévalu sur la notion de service public. Le préfet aménageur disparaîtra. Ne restera que le préfet policier, ce qui dans ma bouche, d'ailleurs, n’est pas une injure.
Examinons cette réforme dans une perspective dynamique : la logique budgétaire implacable déplacera insensiblement le curseur vers les chefs-lieux de région. Les directeurs régionaux aspireront vers eux les moyens et ne laisseront dans les « unités territoriales » que peu de personnels.
Comment, dès lors, pourront être résolus les conflits sociaux éclatant à l’autre bout de la région ? En vérité, ce « détricotage » du réseau des préfectures ne manquera pas d’influer négativement sur la cohésion sociale !
Et dans le même temps qu’on « sous-préfectoralisera » les villes préfectures, on supprimera des sous-préfectures, on remplacera les sous-préfets par des conseillers d’administration, on fermera des immeubles sous prétexte d’économies alors que, ailleurs, dans les chefs-lieux de région, on construira des cités administratives ! Est-ce intelligent ? J’en doute.
Parallèlement, on centralisera le contrôle de légalité vers les préfets de chefs-lieux au risque de l’affaiblir grandement.
Madame la ministre, la vigilance voudrait que l’on ne détricote pas trop vite le réseau des préfectures et des sous-préfectures, qui sont au contact du terrain, pour y substituer un vague conseil à la procédure du contrôle de légalité.
La France était et reste connue comme un État de droit sérieux, où la corruption et les passe-droits sont moins répandus qu’ailleurs. Toutefois, ce danger ne nous épargnera pas si la vigilance de l’État se relâche.
La RGPP doit en principe entrer en vigueur le 1er janvier 2010. Elle n’a rien d’irréversible, contrairement à ce qu’a déclaré le ministre chargé des comptes, M. Éric Woerth, en conseil des ministres. Il n’est pas trop tard, madame la ministre, pour freiner le zèle de hauts fonctionnaires qui ne raisonnent qu’en termes d’économies budgétaires !
Il faut imaginer des garde-fous, des règles protectrices, et ne pas tout régionaliser au prétexte de mutualisation.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Chevènement !
M. Jean-Pierre Chevènement. Certes, un travail excellent est réalisé dans votre ministère, sur lequel j’aurais aimé m’étendre, mais M. le président me presse de conclure.
J’ajouterai donc simplement que cette réforme a besoin d’un œil politique, madame la ministre, le vôtre, celui du ministre de l’intérieur, qui, par excellence, est le ministre de l’État, pour que ce dernier reste présent sur tout le territoire et que l’on ne regrette pas bien vite des décisions qui auraient été prises à la hâte. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste. – M. Jean-Jacques Jégou applaudit également.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, madame le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » nous conduit à poser une question intéressante : quel État voulons-nous pour les décennies à venir ?
Pour ma part, je répondrai très clairement que je veux un État moderne, c'est-à-dire qui se montre capable de protéger nos concitoyens face à des risques de plus en plus complexes et imprévisibles.
Pour moi, un État moderne, c’est aussi un État capable d’agir au plus près des attentes de nos concitoyens, autrement dit un État de proximité.
Un État moderne, c’est, enfin, un État qui affirme son autorité et sa présence, sereinement, mais de façon déterminée, et sur tous les territoires.
Or, mesdames, messieurs les sénateurs, j’affirme que ce budget pour 2009 nous permettra de répondre à cette exigence de modernisation de l’administration de l’État.
Oui, madame André, les crédits sont en baisse et l’effectif des personnels aussi, monsieur Sueur. Mais nous tirons tout simplement les conséquences d’un certain nombre d’événements, ce qui n’avait pas été fait jusqu’à présent.
À l’heure de la décentralisation, il serait tout de même curieux de transférer un grand nombre de compétences à d’autres collectivités et de garder le même nombre de fonctionnaires. Grâce aux nouvelles technologies, qui permettent, notamment, de produire différemment un certain nombre de titres, et à la dématérialisation, en particulier du contrôle de légalité, de nombreux fonctionnaires, qui accomplissaient jusque-là des tâches purement matérielles, peuvent se consacrer à d’autres activités, leurs missions antérieures ayant disparu.
Je reviendrai en détail sur chacun des points que j’ai annoncés.
Tout d'abord, nous voulons un État capable de protéger les citoyens.
Dès mon arrivée place Beauvau, j’ai voulu apporter au ministère de l’intérieur les capacités, qui lui manquaient, en matière d’anticipation, de prévention et de gestion des crises de toutes natures, dans tous les domaines.
C’est ce qui m’a conduit à créer la délégation à la prospective et à la stratégie et la direction de la planification de la sécurité nationale, mais aussi à désigner la secrétaire générale du ministère de l’intérieur comme haut fonctionnaire de défense.
C’est aussi ce qui m’a conduit à mettre en place le Centre de gestion interministérielle de crise, qui sera installé, à la mi-2009, sous les locaux de la place Beauvau, que vous connaissez bien, monsieur Jean-Pierre Chevènement.
Enfin, c’est ce qui m’a conduit à instituer, au 1er septembre 2008, la délégation générale à l’outre-mer, qui regroupe les services de l’ancien ministère de l’outre-mer, afin de renforcer l’efficacité de notre action hors de métropole.
Ensuite, nous voulons un État plus proche des citoyens, car, quoi qu’on en dise, ceux-ci attendent davantage d’autorité publique.
Rapprocher l’État et les citoyens, refonder leurs relations passe par une administration plus sûre, plus réactive et plus proche.
Pour la proximité, le dispositif de pré-plaintes en ligne est en cours d’expérimentation dans deux départements.
La mise en place des nouvelles cartes grises évitera de longues démarches. Dans le même esprit, la délivrance des titres prendra désormais en compte des exigences de rapidité, de sécurité et de proximité.
Le budget pour 2009 permettra la réalisation de titres plus sûrs, grâce à un mode de production modernisé. Pourquoi s’agit-il là d’une nécessité ? Parce que, chaque année, en France, des dizaines de milliers de faux papiers conduisent à des fraudes, certes, mais aussi et surtout à des captations d’identité dont les conséquences sont parfois dramatiques pour les intéressés.
Il était donc temps de délivrer des titres sécurisés, et c’est ce que nous avons fait avec les passeports. Voilà un mois, j’ai délivré le premier passeport biométrique à Chantilly, où vous vous êtes rendue, madame le rapporteur spécial. Au 1er juillet prochain, les titres de ce type seront généralisés.
Demain, la nouvelle carte d’identité offrira également des garanties de sécurité, notamment pour les transactions sur internet. En effet, comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors de la discussion d’un précédent budget, les escroqueries qui se développent en ligne constituent pour moi une source de préoccupation.
Afin de donner à ces titres sécurisés l’environnement juridique approprié, et compte tenu des questions légitimes qui sont posées, ici ou là, sur l’utilisation de la biométrie, je déposerai un projet de loi sur ce sujet au premier trimestre 2009.
De même, le système d’immatriculation à vie des véhicules contribuera à simplifier les démarches des usagers : désormais, toutes les formalités ou presque pourront se faire chez le garagiste, l’usager recevant ensuite sa carte grise directement à domicile.
Une discussion déjà ancienne a porté sur le référent départemental. Comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, après avoir entendu de nombreux parlementaires, notamment, j’ai décidé de rendre obligatoire un identifiant territorial sur les territoires. Je crois que nous avons trouvé ainsi une solution qui donne satisfaction à tout le monde.
Bien sûr, il faut aussi que les modes de production de ces titres sécurisés soient modernisés et que les relations financières au sein des administrations qui les délivrent soient transparentes. Ces nouveaux titres seront définitivement mis en place en 2009.
Par ailleurs, je sais qu’un contentieux est né sur les titres d’identité, dont j’entends d'ailleurs proposer le règlement, monsieur Anziani.
On peut toujours dire que l’on aurait pu s’apercevoir du problème plus tôt et réagir plus vite. Je constate toutefois que ce contentieux est né d’une erreur juridique commise… en 2001 !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En effet, le gouvernement de l’époque, auquel je ne participais pas, avait choisi d’adopter un règlement alors qu’il aurait dû emprunter la voie législative. C’est cette faute de procédure qui a été sanctionnée par les tribunaux.
Peu importe, il convenait de régler ce contentieux.
J’ai travaillé avec l’Association des maires de France, l’AMF, et son président. Nous sommes parvenus à une solution équilibrée. Elle vous sera soumise très vraisemblablement à l’occasion du prochain collectif budgétaire, donc d’ici peu.
Pour le futur, j’essaie de faire en sorte que les problèmes ne se posent plus. Je le rappelle, l’indemnisation ne concerne que le travail effectué pour des demandes de passeports extérieures à la commune, puisque dans la commune, c’est la règle normale de la délégation faite au maire.
La difficulté à établir une juste indemnisation des passeports fabriqués pour des personnes extérieures à la commune vient de l’absence de toute référence. J’ignore comment cela s’est passé jusqu’à présent. Nous avons donc essayé d’effectuer une évaluation approximative. Après une période d’expérimentation, il est indispensable de procéder à une évaluation.
J’ai proposé au président de l’Association des maires de France un réexamen des conditions de mise en œuvre de cette opération, en concertation avec les élus, et ce dès la fin 2009. En attendant, et pour tenir compte d’un certain nombre de constats effectués sur le terrain, je propose, comme je l’ai annoncé la semaine dernière devant le Congrès des maires de France, de faire passer dès maintenant l’indemnisation des communes de 3 200 euros à 5 000 euros.
En ce qui concerne le nouveau titre d’immatriculation des véhicules, le projet de loi de finances prévoit une redevance et une taxe correspondant à la couverture des coûts de fabrication par l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS, et à leur envoi aux usagers.
Enfin, nous voulons un État qui affirme sa présence et son autorité sur tout le territoire. Monsieur Anziani, je crois à la présence de l’État sur le territoire et je suis même persuadée de sa nécessité, monsieur Chevènement. C’est la raison pour laquelle j’ai toujours manifesté mon attachement aux départements.
Mon objectif est de faire en sorte que l’État exerce réellement son autorité. Pour cela, j’ai l’intention de renforcer sa disponibilité.
D’abord, il s’agit de recentrer les préfectures sur leurs missions essentielles.
Dans les régions, l’organisation de l’État sera calquée sur l’organisation ministérielle. Cela me semble clair. Pour gagner en efficacité, nous regroupons en huit directions la mise en œuvre des politiques publiques qui seront pilotées par le préfet de région. Cette logique de regroupement correspond également à l’esprit de la LOLF.
Dans les départements, l’administration départementale reposera sur la préfecture, la direction départementale de la population et de la cohésion sociale, ou DDPCS, la direction départementale des territoires, ou DDT, l’inspection d’académie, la direction départementale des finances publiques et les services chargés de la sécurité intérieure. Il n’y a donc pas de mélange entre les territoires et la sécurité, comme on l’a dit tout à l’heure.
Monsieur Chevènement, il n’y a pas de sous-préfectoralisation des départements ! Les préfets de département demeurent les responsables de la sécurité des citoyens et de la mise en œuvre des politiques publiques décidées par le Gouvernement. Qu’il s’agisse des préfets de région ou des préfets de département, je souhaite que nos préfets soient forts et crédibles parce qu’ils doivent être l’unique interlocuteur des présidents de conseil général et des présidents de conseil régional.
Ce n’est pas le regroupement des moyens des DDE et des directions départementales de l’agriculture et de la forêt, ou DDAF, qui ont entraîné une déperdition de compétences. L’appel aux bureaux d’études privés est la conséquence de la réglementation et de la jurisprudence européenne que nous sommes bien obligés de suivre.
Quant à l’allégement des effectifs, je vous ferai remarquer, monsieur Sueur, qu’il s’agit tout simplement d’une conséquence de la réalité du transfert d’un certain nombre de compétences, notamment aux départements.
Dans les départements, une direction de la cohésion sociale pourra être créée.
M. Jean-Pierre Sueur. Et pour l’accueil des étrangers ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Selon vous, il faudrait en établir une dans chaque département. Or, je me rends régulièrement dans tous les départements, si l’on peut sentir de réelles tensions dans certains d’entre eux, ce n’est pas le cas dans d’autres.
C’est le préfet qui décidera et qui fera des propositions aux ministères, et non pas l’inverse.
Bien entendu, avec Yves Jégo, nous avons demandé que le même travail soit effectué outre-mer, en tenant compte des spécificités qui font que les DOM sont en même temps des régions.
Depuis le 28 novembre, j’ai commencé à examiner les propositions des préfets. Elles feront bientôt, au niveau interministériel, l’objet d’arbitrages du Premier ministre.
Ensuite, se pose le problème des sous-préfectures. Je l’ai dit à maintes reprises, je suis attachée aux sous-préfectures parce que, pour les populations comme pour les territoires les plus fragiles, elles constituent l’interlocuteur étatique nécessaire.
Je ne fermerai donc pas de sous-préfectures sur ces territoires. Il ne peut ni ne doit être question d’un abandon des territoires par l’État.
En revanche, ma responsabilité politique est de tenir compte de l’évolution des missions. Depuis la décentralisation les choses ont changé, elles ne sont plus ce qu’elles étaient voilà cinquante ans ! La dématérialisation de certaines procédures a modifié les modalités de travail. Les nouveaux modes d’élaboration des titres entraîneront la disparition de certaines fonctions. Je dois donc adapter les missions et les effectifs à une réalité.
Ce n’est pas en se tournant vers le passé et en refusant d’avancer que l’on construit un État moderne !
L’évolution des missions et le dimensionnement des sous-préfectures tiendront compte de ces réalités. Mais, quoi qu’il en soit, les sous-préfectures seront là.
Le conseil juridique est très important mais il ne se confond pas avec le contrôle de légalité. Il s’agit de deux choses très différentes. Le conseil juridique est souvent requis par les maires des petites communes, en particulier lorsqu’ils sont confrontés au fouillis législatif, en particulier celui du code des marchés publics.
Cependant, lorsqu’une sous-préfecture se situe dans la banlieue immédiate d’une grande agglomération – de nombreuses sous-préfectures sont à trois kilomètres d’une préfecture –, les élus et parfois les citoyens s’adressent déjà plutôt à la préfecture. Dans ce cas, il est possible de supprimer la sous-préfecture et de mettre en place, si cela s’avère nécessaire, un bureau d’accueil du public, en particulier un bureau des étrangers, ou encore dans les domaines où le besoin se ferait sentir.
Je voudrais tordre le cou à une idée fausse : cela n’a rien à voir avec la possibilité de confier certaines sous-préfectures soit à un sous-préfet soit à un conseiller d’administration.
Monsieur Anziani, j’ignore si vous fixez l’autorité d’un fonctionnaire d’après sa voiture ou son logement. Aucune règle n’a été établie en la matière. Je déterminerai les règles par la suite en tenant compte des réalités, y compris en matière de logement, puisqu’il faut en garder un. Là aussi, beaucoup de fausses idées persistent.
Je suis particulièrement surprise et même choquée quand j’entends certains affirmer qu’un conseiller d’administration serait un sous-préfet au rabais. En réalité, il s’agit de personnels parvenant à ces fonctions par promotion professionnelle ; ils sont donc considérés comme les meilleurs.
Aujourd’hui, 25 % des directeurs de cabinet des préfets ne sont pas sous-préfets mais conseillers d’administration. Que je sache, personne ne s’en plaint et d’ailleurs personne n’en a même parlé !
Il s’agit d’étendre une mesure de promotion professionnelle. De surcroît, cela va dans le sens des demandes des élus, qui souhaitent avoir un interlocuteur expérimenté et au fait des dossiers. D’ailleurs, contrairement à ce que vous avez dit, madame Mathon-Poinat, ils sont astreints à la même permanence que le corps préfectoral, par leur fonction même en ce qui concerne les directeurs de cabinet, et il en ira de même pour les sous-préfets.
De plus, et pour répondre à une autre question qui a été posée, le rôle de conseil juridique sera mieux assuré par eux. En effet, ils ont plus l’habitude de déceler les problèmes juridiques qu’un jeune sous-préfet frais émoulu de l’ENA qui a du droit une vision très théorique. Et c’est l’ancien professeur de droit qui le dit. L’apprentissage du droit est effectivement toujours théorique.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est vrai !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Or les élus ont besoin de connaître la manière dont le droit est réellement appliqué. De ce point de vue, j’en suis persuadée, les conseillers d’administration sont de meilleur conseil que des personnes sans expérience.
Sur tous ces sujets, qui seront réalisés au cours de l’année 2009, j’associerai les élus, comme je l’ai toujours fait.
Enfin, la mise en œuvre du nouvel État territorial modernisé ouvre des perspectives aux fonctionnaires du ministère de l’intérieur. Je viens d’évoquer ce point à travers le cas des conseillers d’administration. D’une manière plus générale, il faut relever au moins trois avancées majeures pour les personnels.
Il s’agit, d’abord, de la qualification. Le projet de budget permet de requalifier 1 100 emplois supplémentaires dans les préfectures. Cela n’a pas été souligné. Je tiens à le faire remarquer, ce n’est pas une reconnaissance verbale, c’est une reconnaissance concrète de la qualité des fonctionnaires auxquels sont offertes de réelles perspectives.
Il s’agit, ensuite, de la reconnaissance en matière indemnitaire. Un accent particulier sera mis sur la prise en compte des résultats individuels et collectifs dans la rémunération des agents. Nous dégageons des fonds à cet effet.
Il s’agit, enfin, de la promotion sociale. L’accent mis sur la formation, l’individualisation des parcours et la prise en compte de l’adéquation profil/poste permettront à chacun des agents du ministère de pleinement valoriser ses compétences et son envie de progresser au service de nos concitoyens.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, à travers ce projet de loi pour l’année 2009, je veux restaurer un lien de confiance entre l’administration, l’État et le citoyen. Le temps d’une administration distante, routinière, kafkaïenne et pesante est bel et bien révolu. La logique technocratique du passé, dont certains ont parlé, doit céder le pas à une logique démocratique. Ce n’est pas aux administrés de s’adapter aux besoins de l’administration. C’est à l’administration de s’adapter aux besoins des administrés. Le budget 2009 nous en donnera les moyens. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » figurant à l’état B.
État b
(En euros) |
||
Administration générale et territoriale de l’État |
2 605 090 637 |
2 596 240 736 |
Administration territoriale |
1 670 164 968 |
1 670 164 968 |
Dont titre 2 |
1 336 211 154 |
1 336 211 154 |
Administration territoriale : expérimentations Chorus |
106 778 702 |
106 778 702 |
Dont titre 2 |
92 058 201 |
92 058 201 |
Vie politique, cultuelle et associative |
244 584 170 |
237 888 262 |
Dont titre 2 |
31 994 615 |
31 994 615 |
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur |
583 562 797 |
581 408 804 |
Dont titre 2 |
305 031 370 |
305 031 370 |
M. le président. L'amendement n° II-239 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Beaumont, Bécot, Bernard-Reymond, Bizet, J. Blanc et P. Blanc, Mme Bout, MM. Braye, Cambon, Carle et Cointat, Mme Descamps, M. Doublet, Mme B. Dupont, MM. Fouché et Fourcade, Mme G. Gautier, MM. Gournac et Grignon, Mmes Henneron et Hermange, MM. Houel, Humbert et Huré, Mme Lamure, MM. Laurent, du Luart, Lefèvre, Mayet et Milon, Mmes Papon et Procaccia, M. Revet, Mme Sittler, M. Lardeux, Mme Bruguière et MM. Juilhard, Longuet, Leclerc et Paul, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Administration territorialeDont Titre 2 |
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Administration territoriale : expérimentations ChorusDont Titre 2 |
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Vie politique, cultuelle et associativeDont Titre 2 |
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2 407 932 |
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2 407 932 |
Conduite et pilotage des politiques de l'intérieurDont Titre 2 |
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TOTAL |
2 407 932 |
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2 407 932 |
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SOLDE |
-2 407 932 |
-2 407 932 |
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Les partis sont très utiles à la vie de la nation. Ce sont des lieux où des militants bénévoles défendent leurs convictions, dialoguent, parfois fermement, et essaient d’éduquer la jeunesse du pays. Ils sont donc essentiels à la démocratie. Aussi, ils doivent être exemplaires.
Nous le savons, l’année 2009 sera particulièrement difficile, notamment dans le domaine de l’économie. Beaucoup d’organisations de nature économique sont au service du public, sont d’utilité publique et sont extrêmement respectables mais elles dépendent de l’argent public.
Il convient d’associer les partis et les formations politiques aux efforts qui concernent individuellement tous les Français sur le plan économique pour l’année à venir. À travers cet amendement, il s’agit également d’informer les organisations de nature économique que, quel que soit l’étendue de leur objet, elles devront mettre en œuvre des budgets plus rigoureux.
C’est pourquoi un grand nombre de mes collègues et moi-même proposons cet amendement qui prévoit un effort financier. Il s’agit de réduire la dotation linéaire attribuée aux partis politiques pour l’année 2009.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Je voudrais apporter quelques précisions sur le montant des aides publiques aux partis politiques. D’ailleurs, de nombreux pays nous envient notre système de financements publics des partis politiques, qui permet d’empêcher d’importantes dérives.
Le montant des aides publiques aux partis et groupements politiques est inchangé depuis 1995. Il s’élève à 40,1 millions d’euros pour chacune des deux fractions, soit un total de 80,2 millions d’euros.
Entre 2003 et 2007, le montant effectivement réparti n’atteignait que 73,2 millions d’euros et 7 millions d’euros n’ont donc pas été distribués du fait des sanctions pour non-respect de la parité.
Toutefois, une légère amélioration est à noter, amélioration dont la nouvelle présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes que je suis se réjouit ici publiquement : en 2007 et en 2008, après les dernières élections législatives, le montant a distribué s’est élevé à 74,8 millions d’euros ; la sanction pécuniaire pour non-respect de la parité n’était plus que de 5,4 millions d’euros.
Mon cher collègue, je comprends votre intention et j’approuve votre souhait d’associer les partis politiques aux efforts qui, individuellement, concernent tous les Français. Cependant, compte tenu de la conjoncture actuelle, il me semblerait que, plutôt qu’un simple amendement déposé ici, sans que les responsables des partis politiques soient avertis, une concertation directe avec eux serait préférable, plus naturelle : les partis politiques, dont l’existence est inscrite dans notre Constitution, sont précieux pour notre démocratie, même si, parfois, leurs dirigeants ont du mal à s’accorder ou s’expriment dans les médias d’une façon qui peut être plus ou moins bien appréciée.
Je souhaiterais donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En la matière, l’article 8 de la loi de 1988, relative à la transparence financière de la vie politique, dispose : « Le montant des crédits inscrits dans le projet de loi de finances de l’année pour être affecté au financement des partis et groupements politiques peut, de la part des Bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, faire l’objet de propositions conjointes au Gouvernement. »
Un problème de procédure se pose donc.
Par ailleurs, tous les partis politiques existants ne sont pas représentés au sein de cette assemblée.
Or, selon moi, il faut les associer aux décisions que nous prenons.
Je demande donc à M. Philippe Dominati de bien vouloir retirer son amendement, afin d’entrer éventuellement dans le cadre d’une procédure plus conforme à ce qui est prévu par le législateur.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, que je prie de bien vouloir faire preuve de concision.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Vous avez raison, monsieur le président, de rappeler que les orateurs doivent être concis, compte tenu de nos contraintes d’horaires.
Je me réjouis que la position de la commission ait été formulée par la présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Selon le système actuel, moins la parité est respectée, plus on contribue à l’équilibre du budget de l’État.
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Voilà !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Lors d’une discussion budgétaire, ce constat constitue une sorte d’encouragement à ne pas respecter les exigences de parité. (Sourires.)
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Ah non !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mme le rapporteur spécial l’a précisé, les amendes payées par les partis pour non-respect de la parité rapportent beaucoup plus à l’État que ce que lui procurerait la contribution proposée dans votre amendement, monsieur Dominati.
Je vous suggère donc, moi aussi, de retirer votre amendement, notamment pour respecter la procédure prévue par la loi relative à la transparence financière de la vie politique et qu’a rappelée Mme la ministre. Peut-être pourrions-nous attendre que la parité soit effective ?
Mmes Nicole Bricq et Catherine Procaccia. On peut attendre longtemps !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Votre amendement prendrait alors son plein effet.
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Dans cinq ans !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je ne veux pas m’engager sur une échéance…
Mme Josiane Mathon-Poinat. Si ! C’est intéressant !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. …mais elle ne le sera probablement pas avant le prochain renouvellement.
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement n° II-239 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Monsieur le président, les mots de « concertation » et de « procédure » ayant été employés par Mme le rapporteur spécial, par Mme la ministre et par M. le président de la commission des finances, fort de l’assurance que la concertation est lancée et ayant bon espoir qu’elle aboutisse, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° II-239 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-193, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Administration territorialeDont Titre 2 |
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923 595923 595 |
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923 595923 595 |
Administration territoriale : expérimentations ChorusDont Titre 2 |
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Vie politique, cultuelle et associativeDont Titre 2 |
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Conduite et pilotage des politiques de l'intérieurDont Titre 2 |
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TOTAL |
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923 595 |
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923 595 |
SOLDE |
- 923 595 |
- 923 595 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Cet amendement vise à matérialiser le transfert d’effectifs et de responsabilités entre l’État et les conseils généraux pour deux compétences qui ont été transférées aux départements : la gestion du RMI et la gestion du fonds de solidarité logement.
Par voie de conséquence, il s’agit de minorer les crédits de rémunération du programme « Administration territoriale » pour tenir compte du transfert des agents ayant opté pour la fonction publique territoriale.
Cette annulation de crédits est compensée, pour les collectivités territoriales concernées, par une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers.
Je signale que, pour tenir compte de ce transfert, le Gouvernement a déjà procédé, par voie d’amendement, lors de l’examen de la première partie de ce projet de loi de finances, à la majoration des fractions de tarif de cette taxe. Il s’agit donc d’une régularisation.
M. le président. Cette régularisation interviendra-t-elle à l’euro près ?
Vous avez la parole, madame le rapporteur spécial, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement.
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Je ne sais pas si cette régularisation interviendra à l’euro près, et je ne me risquerai pas sur ce terrain.
Quant à l’amendement n° II-193, il s’agit d’un amendement de conséquence : avis favorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-240 rectifié, présenté par MM. Gilles, J.C. Gaudin, Cambon, Gouteyron et Ferrand, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Titres sécurisés : concours aux communes
II. - En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Titres sécurisés : Concours aux communesDont Titre 2 |
18 000 000 |
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18 000 000 |
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Administration territorialeDont Titre 2 |
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|
|
Administration territoriale : expérimentations ChorusDont Titre 2 |
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18 000 000 |
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18 000 000 |
Vie politique, cultuelle et associativeDont Titre 2 |
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Conduite et pilotage des politiques de l'intérieurDont Titre 2 |
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TOTAL |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Adrien Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. L’enregistrement des demandes de passeports et de cartes nationales d’identité électroniques va concerner deux mille communes en 2009 et se traduira évidemment, pour ces communes, par un coût supplémentaire en termes de personnels, de moyens d’accueil, de sécurisation des locaux et de fonctionnement.
Pour compenser cette charge nouvelle, l’État attribue à ces communes une dotation d’un montant global de 6,34 millions d’euros.
Nous savons que cette dotation est insuffisante. D’ailleurs, Mme le rapporteur spécial propose, elle aussi, d’augmenter le montant de cette dotation, pour le porter à 12 millions d’euros.
L’évaluation de ce montant a été calculée par les services de l’État à partir d’une estimation d’un temps de traitement pour chaque demande de titre sécurisé égal à environ dix minutes. Or, les premières communes ayant ces nouvelles stations d’enregistrement l’évaluent, elles, à près de trente minutes.
Aussi, nous proposons une augmentation annuelle des crédits budgétaires de 18 millions d’euros. L’indemnisation forfaitaire serait portée de 3 200 euros à 5 000 euros.
Je note avec satisfaction que le Gouvernement a pris conscience de cette réalité et a lui-même déposé un amendement allant dans le même sens que celui-ci : j’attends avec intérêt la présentation que va en faire Mme la ministre.
M. le président. L'amendement n° II-26, présenté par Mme M. André, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Titres sécurisés : concours aux communes
II. - En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Titres sécurisés : concours aux communesDont Titre 2 |
12.000.000 |
|
12.000.000 |
|
Administration territorialeDont Titre 2 |
|
12.000.000 |
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12.000.000 |
TOTAL |
12.000.000 |
12.000.000 |
12.000.000 |
12.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme le rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-240 rectifié.
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° II-26 et l’amendement n° II-13, ces deux amendements ayant une cohérence technique.
L’amendement n° II-13 vise à supprimer l’article 58, qui prévoit la création d’une dotation d’un montant total de 6,34 millions d’euros destinée à compenser les charges pesant sur les deux mille communes qui se verront équiper en 2009 de stations d’enregistrement permettant de délivrer des titres sécurisés.
Par titres sécurisés, on entend les futurs passeports et cartes d’identité biométriques. Ces titres comprendront, outre une photo prise selon dix-sept critères spécifiques – la commission tient un document à la disposition de ceux que cela intéresse –, les empreintes des deux index.
Ces données seront stockées sur une puce incorporée au document.
S’agissant des passeports, la France se conformera ainsi au règlement européen du 13 décembre 2004, qui impose un passage aux documents sécurisés d’ici au 28 juin 2009.
Le montant de la dotation proposée par le Gouvernement aux communes est fondé, notamment, sur une estimation réalisée par le ministère de l’intérieur de l’ordre de dix minutes pour délivrer un titre, c’est-à-dire faire remplir un formulaire CERFA, prendre une photo et les empreintes digitales.
Or, comme vient de le signaler M. Adrien Gouteyron, les communes estiment ce temps à environ trente minutes.
Ce matin, je me suis rendue à la mairie de Chantilly afin de tester les conditions de délivrance d’un passeport biométrique : j’ai ainsi pu me forger une opinion sur le temps nécessaire pour accomplir ces démarches.
Elles se décomposent en trois séquences : tout d’abord, l’accueil et le renseignement du formulaire CERFA, ensuite, la prise de photos et d’empreintes, enfin, le retrait du passeport par l’usager quelques jours plus tard en mairie, après vérification.
Il est donc apparu à la commission des finances que le montant de la dotation était notoirement insuffisant : il ne permet pas de couvrir les charges de personnels induites par cette nouvelle tâche.
En outre, certaines charges de sécurisation des locaux accueillant en mairie les stations d’enregistrement ne paraissent pas avoir été prises en compte dans l’évaluation du ministère.
Il est donc proposé au Sénat d’adopter deux amendements, qui correspondent à un dispositif à double détente permettant d’aboutir à un quasi-doublement de cette dotation, qui passerait ainsi de 6,34 millions d’euros à 12 millions d’euros.
L’amendement n° II-13 vise à supprimer l’article 58, rattaché à la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
L’amendement n° II-26 tend à créer un nouveau programme au sein de la mission, intitulé : « Titres sécurisés : concours aux communes ». Il est doté de 12 millions d’euros, ces crédits provenant de l’action 2 « Garantie de l’identité et de la nationalité, délivrance de titres » du programme « Administration territoriale ».
Il faut rappeler que cette action couvre les domaines des passeports, des cartes nationales d’identité, des cartes grises, des permis de conduire et du droit des étrangers. Elle comprend 676,8 millions d’euros. La suppression des crédits correspond donc à 1,8 % des crédits.
La solution proposée au travers de ces deux amendements s’appuie sur de nombreux échanges conduits au cours des dernières semaines avec l’Association des maires de France, dont les positions ont également été utilement relayées par M. Pierre Jarlier et les membres de votre cabinet, madame la ministre, avec lesquels nous avons échangé nos points de vue longuement et à plusieurs reprises.
Le dispositif proposé par la commission des finances ne permet certes pas de régler tous les problèmes posés par l’arrivée des stations d’enregistrement dans les deux mille mairies. Je songe, en particulier, à l’activité des photographes professionnels, qui aura à souffrir de la prise gratuite en mairie des photos nécessaires à l’établissement des titres.
Il a néanmoins le mérite d’apporter un début de réponse aux inquiétudes des maires quant à la non-compensation d’un transfert de charges dû à ce nouveau système de délivrance des titres d’identité.
Je prends note, madame la ministre, de votre suggestion du dépôt d’un projet de loi – indispensable – afin de répondre à cette question mais aussi à d’autres problématiques.
On peut d’ailleurs s’interroger – permettez-moi de le faire sans impertinence – sur la pertinence du dispositif imaginé par vos services, madame la ministre. N’aurait-il pas été plus pratique de laisser aux préfectures et aux sous-préfectures, quels que soient leurs dirigeants, avec ou sans casquette pour déposer les gerbes, la charge de la délivrance des titres ?
À l’évidence, l’entrée en application des titres sécurisés soulève encore beaucoup d’interrogations.
C’est la raison pour laquelle je mènerai, dès le début de l’année 2009, une mission de contrôle au nom de la commission des finances, en étroite collaboration avec notre collègue, comme celle-ci s’y était engagée, afin d’accompagner cette profonde évolution et d’aider l’administration dans sa mission.
S’agissant de l’amendement n° II-240 rectifié, qui peut le plus peut le moins, si notre assemblée, dans sa sagesse, l’adoptait, la commission ne pourrait que s’en féliciter car la proposition qu’elle a présentée est plus modeste.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Nous avons décidé de ne pas laisser aux préfectures et aux sous-préfectures la charge de la délivrance des titres parce que nous voulons rapprocher le service des usagers.
Notre pays compte deux cent quarante sous-préfectures et cent préfectures, soit trois cent quarante lieux où sont actuellement délivrés les documents. Avec le nouveau dispositif, deux mille communes au moins au départ, et probablement plus par la suite, les délivreront : ce nombre élevé garantit la proximité du service. Nos concitoyens se rendront dans un lieu situé bien plus près de chez eux.
Par ailleurs, je tiens à préciser que les calculs du Gouvernement ont été effectués sur une estimation non pas de dix minutes, pour délivrer un passeport, mais d’un quart d’heure, soit un temps supplémentaire de 50 %.
Madame le rapporteur spécial, lorsque vous vous êtes rendue ce matin à la mairie de Chantilly, je crois savoir qu’il n’a fallu que neuf minutes pour réaliser l’ensemble des démarches. Certes, je veux bien admettre qu’en règle générale cela puisse prendre un peu plus de temps, surtout au début de la mise en place du dispositif. Pour autant, parler d’une demi-heure, soit le triple de la durée constatée, me paraît tout de même quelque peu exagéré, que l’on soit dans le Nord ou dans le Midi de la France !
Cela dit, je le répète, je suis tout à fait disposée à prévoir une évaluation au bout de quelques mois de fonctionnement, car il n’y a aucune raison de ne pas prendre les choses objectivement. Il sera alors possible de connaître ce que tout cela représente en termes de coût et, partant, de prévoir les compensations nécessaires en ce qui concerne la délivrance des titres pour les personnes extérieures à la commune – de toute façon, c’est la règle.
Au demeurant, monsieur Gouteyron, par l’amendement n° II-385 déposé à l'article 58, nous proposons déjà de relever de 3 200 euros à 5 000 euros le montant forfaitaire prévu pour l’indemnisation. Cela correspond à votre demande. Par conséquent, je vous prie de bien vouloir retirer l’amendement n° II-240 rectifié, au profit de celui du Gouvernement, qui aboutit exactement à la même solution.
D’ailleurs, le procédé auquel vous avez recours, qui se justifie par les contraintes juridiques existantes, a un double inconvénient.
En premier lieu, il aboutit à priver de sa base légale une dotation que le Gouvernement a voulue pérenne, en limitant l’effet de la mesure à la seule année budgétaire 2009.
M. Adrien Gouteyron. Certes !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. C’est tout de même un élément important à prendre à compte.
En second lieu, les crédits alloués aux préfectures, sur lesquels vous souhaitez opérer un prélèvement, intègrent d’ores et déjà les économies liées à la nouvelle procédure de délivrance des titres. Autrement dit, vous leur feriez faire les économies deux fois. Le prélèvement serait donc double, ce qui, pour le coup, poserait un réel problème.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame le ministre, je voudrais, tout d’abord, vous remercier d’avoir pris en compte les souhaits exprimés par la commission au travers de son amendement.
Si nous avons suggéré la suppression de l’article 58, c’est parce que, à nos yeux, il encadre d’une manière trop contraignante l’indemnisation des municipalités.
Sans doute faudra-t-il une première période d’expérimentation pour mieux appréhender le coût réel du dispositif, dans la mesure où certaines communes délivreront un nombre limité de titres, quand d’autres, en revanche, devront mobiliser des moyens, notamment en personnels, plus importants.
En ce sens, arrêter le principe d’une contribution égale pour toutes les mairies, quelle que soit la charge à assumer, aboutirait manifestement à créer une injustice.
Par conséquent, ce dispositif ne peut pas être définitivement consacré par la loi. Il serait, à mon sens, plus judicieux de prévoir, d’une part, une fraction forfaitaire identique pour l’ensemble des municipalités qui contractualisent avec l’État, et, d’autre part, un complément d’indemnisation en fonction du nombre de titres délivrés, passeports ou cartes nationales d’identité.
En définitive, madame la ministre, le montant du transfert de crédits souhaité par la commission, soit 12 millions d’euros, correspond à peu près à l’enveloppe totale intégrant votre nouvelle proposition d’indemnisation forfaitaire fixée à 5 000 euros par municipalité. Nous devrions donc pouvoir trouver un équilibre entre notre amendement et le vôtre.
En tout état de cause, il faudra, bien entendu, procéder très rapidement à une évaluation et revenir sur le dispositif. C’est sur ce point que nous aimerions recevoir un engagement de votre part.
Se posera ensuite la question du devenir des sous-préfectures, qui, à la veille d’une année de réflexion sur la réforme des collectivités territoriales, ne peut pas être taboue.
D’après moi, si les titres ne sont plus délivrés en sous-préfectures et que le contrôle de légalité est centralisé dans les préfectures, il est tout de même légitime de s’interroger sur la nécessité de maintenir « physiquement » les premières. Cela n’exclut pas de conserver les postes de sous-préfets.
J’observe, dans mon département, que les sous-préfets sont les principaux collaborateurs du préfet. Ce sont des hommes et des femmes aux compétences reconnues et aux talents multiples. Pour autant, il arrive qu’un certain nombre d’entre eux – fonctionnaires d’une administration centrale parisienne ou magistrats de tribunal administratif, par exemple – occupent ce poste dans le cadre de leur mobilité et aient ainsi choisi de passer deux années dans une sous-préfecture. Naturellement, ils ne seraient pas sous-préfets s’ils n’avaient pas un talent immense ! Mais je ne suis pas sûr qu’ils soient, d’emblée, parfaitement opérationnels.
Par conséquent, le fait de prévoir des collaborateurs de haut niveau auprès du préfet, pour assurer la présence et l’autorité de l’État dans le département et la relation avec l’ensemble des élus, me paraît une formule alternative.
Puisque la délivrance des titres sera transférée des sous-préfectures à un certain nombre de municipalités, les secondes devront recruter des collaborateurs pour assumer cette nouvelle mission tandis que les premières se retrouveront avec des agents peut-être moins mobilisés par leurs tâches.
Telles sont les raisons pour lesquelles, madame le ministre, je souhaite que nous puissions, au cours de l’année 2009, évoquer sans a priori le devenir des sous-préfectures, lequel n’est pas de nature à remettre en cause la place et le rôle des sous-préfets.
M. le président. Monsieur Gouteyron, accédez-vous à la demande de retrait de l’amendement n° II-240 rectifié formulée par Mme le ministre ?
M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, après avoir bien écouté Mme le ministre, je me rends à ses arguments. Outre la nécessité, bien entendu, de procéder à une expérimentation pour vérifier, sur le terrain, le fonctionnement du dispositif, j’ai été particulièrement sensible à sa remarque sur la pérennité des crédits, qui est en effet un point essentiel.
Par conséquent, sous réserve que la commission des finances se rallie également à la proposition du Gouvernement, je retire cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Monsieur le président de la commission des finances, je suis tout à fait prête à débattre de l’avenir des sous-préfectures.
Personnellement, je reste très attachée à la présence des sous-préfectures dans les endroits où, finalement, elles sont la marque, et peut-être la dernière, de l’autorité de l’État.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Assurément !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Mais la multiplicité des situations exige une étude pragmatique, au cas par cas.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui !
M. Adrien Gouteyron. Absolument !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. C’est d’ailleurs ce à quoi je m’attache pour celles qui sont situées dans les grandes agglomérations, pour lesquelles il n’y a pas de réel problème.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens vraiment à ce que l’autorité de l’État puisse, dans tous les cas, être proche des citoyens.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Monsieur Gouteyron, je vous remercie d’avoir bien voulu retirer votre amendement. Je le répète, la proposition du Gouvernement permet d’obtenir exactement les mêmes résultats.
Du reste, monsieur le président de la commission des finances, une certaine modulation est d’ores et déjà prévue dans l’amendement gouvernemental, puisque l’indemnité forfaitaire de 5 000 euros est versée par machine et non par commune. Par conséquent, les municipalités les plus importantes, qui disposeront de trois ou quatre machines, pourront ainsi percevoir 15 000 ou 20 000 euros.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il y a des machines qui en font plus que d’autres !
M. le président. Madame le rapporteur spécial, pour la clarté du débat, acceptez-vous de retirer l’amendement n° II-26 ?
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Monsieur le président, le moins que l’on puisse dire, c’est que ce débat est pour le moins confus ! En réalité, madame le ministre, deux options s’offrent à nous.
Soit nous supprimons l'article 58, conformément au souhait initial de la commission des finances, soit nous acceptons de le conserver, en y intégrant la nouvelle proposition du Gouvernement, c'est-à-dire une enveloppe de 10 millions d’euros, ce qui correspond à une indemnité forfaitaire de 5 000 euros versée à chacune des 2 000 communes concernées.
Mes chers collègues, la commission ne s’étant pas de nouveau réunie, je me prononcerai à titre personnel. Sous réserve que la somme annoncée soit juste et vérifiable, je considère que la mesure gouvernementale est un compromis acceptable, qui a le mérite de nous faire avancer sur la question. Sa mise en œuvre exigera une attention toute particulière de la part de la commission des finances, mais je m’y engage.
M. le président. L’amendement n° II-26 est retiré.
Dans ces conditions, monsieur Gouteyron, confirmez-vous le retrait de l’amendement n° II-240 rectifié ?
M. Adrien Gouteyron. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-240 rectifié est retiré.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, avant que le Sénat se prononce sur les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » puis procède à l’examen des articles rattachés, je rappelle que l’article 58 fixe des crédits relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dont nous débattrons tout à l’heure.
Il conviendra alors de tirer les conséquences du vote, à l’article 58, de l’amendement du Gouvernement, qui se substitue à celui de la commission des finances et qui vise à abonder de 10 millions d’euros les crédits en faveur du nouveau programme « Titres sécurisés : concours aux communes ».
M. Jean-Jacques Jégou. Très bien !
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, nous sommes d’accord. Cela montre que, dans le Maine, nous parlons tous le même langage !
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion les articles 56 à 58 qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
II. – Autres mesures
Administration générale et territoriale de l’État
Article 56
I. – Après l’article 955 du code général des impôts, il est inséré un IV ainsi rédigé :
« IV. – Carte nationale d’identité
« Art. 960. – En cas de non-présentation de la carte nationale d’identité en vue de son renouvellement, celui-ci est soumis à un droit de timbre dont le tarif est fixé à 25 €. »
II. – À l’article 955 du même code, après les mots : « Les passeports, », sont insérés les mots : « les cartes nationales d’identité, ».
III. – Le produit du droit de timbre mentionné à l’article 960 du code général des impôts est affecté à l’Agence nationale des titres sécurisés.
M. le président. L’amendement n° II-245, présenté par M. Jarlier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Compléter le III de cet article par les mots :
dans la limite de 12,5 millions d’euros
La parole est à M. Pierre Jarlier.
M. Pierre Jarlier. Le produit du droit de timbre prévu en cas de renouvellement de la carte nationale d’identité sans présentation de l’ancien titre est affecté en totalité à l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS. Cet amendement vise à préciser le montant des recettes qui lui sera affecté, dans la mesure où la gestion des droits de timbre est globale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Michèle André, rapporteur spécial. L’article 56 prévoit effectivement la création d’un droit de timbre de 25 euros perçu en cas de renouvellement anticipé de la carte nationale d’identité, ce dernier étant défini comme un renouvellement effectué plus de douze mois avant la date d’expiration.
Le renouvellement est exonéré de droit de timbre en cas d’une modification de l’état civil, d’un changement d’adresse ou d’une erreur imputable à l’administration, ou lorsque la carte nationale d’identité n’est pas dotée d’un composant électronique.
Par ailleurs, sur l’initiative de notre collègue député Marc Le Fur, l’Assemblée nationale a prévu la gratuité du renouvellement de la carte nationale d’identité si l’ancienne est fournie lors de la demande.
Le plafond de 12,5 millions d'euros que nous propose M. Jarlier correspond à l’estimation qui nous a été communiquée par le ministère de l’intérieur. Le produit de ce droit de timbre a vocation à alimenter le budget de l’ANTS.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 56, modifié.
(L'article 56 est adopté.)
Article 57
I. – Après l’article 955 du code général des impôts, il est inséré un V ainsi rédigé :
« V. – Certificat d’immatriculation des véhicules
« Art. 961. – I. – La délivrance du certificat d’immatriculation d’un véhicule neuf ou d’occasion est soumise à un droit de timbre dit “taxe pour la gestion des certificats d’immatriculation des véhicules” dont le montant est fixé à 4 €.
« II. – Les 3 et 4 de l’article 1599 octodecies et l’article 1599 novodecies A s’appliquent à la taxe pour la gestion des certificats d’immatriculation des véhicules.
« III. – Le droit de timbre mentionné au I est perçu selon les modalités applicables à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules mentionnée à l’article 1599 quindecies. »
II. – Au premier alinéa de l’article 1599 quindecies du même code, après le mot : « régions », sont insérés les mots : « et de la collectivité territoriale de Corse ».
III. – Au 1 du I de l’article 1599 sexdecies du même code, après le mot : « région », sont insérés les mots : « ou la collectivité territoriale de Corse » et, après les mots : « conseil régional », sont insérés les mots : « ou du conseil exécutif de Corse ».
IV. – À l’article 1599 novodecies du même code, après les mots : « conseil régional », sont insérés les mots : « ou le conseil exécutif de Corse ».
V. – À l’article 1599 novodecies A du même code, le mot : « peut » est remplacé par les mots : « ou le conseil exécutif de Corse peuvent ».
VI. – Le produit du droit de timbre mentionné à l’article 961 du code général des impôts est affecté à l’Agence nationale des titres sécurisés.
VII. – L’article 961 du même code est applicable à Mayotte.
M. le président. L'amendement n° II-244, présenté par M. Jarlier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
I. - À la fin du III de cet article, remplacer les mots :
du conseil exécutif
par les mots :
de l'assemblée
II. - Dans les IV et V de cet article, remplacer les mots :
le conseil exécutif
par les mots :
l'assemblée
La parole est à M. Pierre Jarlier.
M. Pierre Jarlier. L'article 57 instaure un droit de timbre perçu à l'occasion de l'immatriculation des véhicules au profit de l'Agence nationale des titres sécurisés. Pour cette raison, les articles du code général des impôts relatifs à la taxe sur les certificats d'immatriculation instituée au profit des régions ont été légèrement modifiés, afin d'y mentionner la collectivité territoriale de Corse.
Le présent amendement vise à rectifier une erreur matérielle : l'organe délibérant de cette collectivité est l'assemblée de Corse, et non le conseil exécutif de Corse comme cela est mentionné dans l'article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Michèle André, rapporteur spécial. La commission ne peut qu’être favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 57, modifié.
(L'article 57 est adopté.)
Article 58
Le chapitre V du titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Dotation relative à l’enregistrement des demandes et à la remise des titres sécurisés
« Art. L. 2335-16. – Il est institué une dotation annuelle de fonctionnement en faveur des communes équipées d’une ou plusieurs stations d’enregistrement des demandes de passeports et de cartes nationales d’identité électroniques, appelée “dotation pour les titres sécurisés”.
« Cette dotation forfaitaire s’élève à 3 200 € par an et par station en fonctionnement dans la commune au 1er janvier de l’année en cours.
« Ce montant évolue chaque année, à compter de 2010, en fonction du taux d’évolution de la dotation globale de fonctionnement.
« Pour chaque station installée entre le 1er janvier et le 28 juin 2009, la dotation versée au titre de 2009 est fixée à 1 600 €. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Sueur. Ma collègue Virginie Klès, sénatrice de l’Ille-et-Vilaine, retenue dans son département, m’a demandé de bien vouloir porter à votre connaissance l’intervention qu’elle avait préparée sur l’article 58, ce que je fais bien volontiers.
La mise en place, à partir de juin 2009, du passeport biométrique à l’usage des citoyens français est une obligation sur laquelle il n’est pas question de revenir. Mais pourquoi ce dossier est-il traité dans des délais si courts, alors que le règlement européen date du 13 décembre 2004, et ce sans concertation réelle avec les maires, sans afficher tous les objectifs à moyen terme et sans prise en compte des réalités financières des nouvelles procédures à mettre en place ?
Une première augmentation du coût des passeports pour les particuliers de 29 à 30 euros sera pourtant en application dès le 1er janvier 2009, un second « coup de pouce » à ce tarif n’étant pas exclu à partir de juin 2009, lors de la mise en place effective de ces nouveaux titres. En revanche, l’expérimentation proposée ne prévoyait à l’origine aucune indemnisation pour les 2 000 communes qui assumeront désormais la compétence pour tout le monde.
Une première inquiétude concernant la compétence juridique des maires, agissant alors pour le compte de citoyens ne résidant pas sur leur territoire, semble avoir été levée très récemment.
Reste l’illusion du volontariat des maires. Rendons hommage au travail des services de l’État : les critères de démographie, d’importance relative des communes et de prise en compte des particularités locales ont pu conduire à une carte tout à fait pertinente en matière de maillage territorial de ce service public. Comment expliquer à nos concitoyens que, pour autant, celui-ci ne sera plus rendu dans leur mairie, mais ailleurs, selon des critères qui n’ont plus rien à voir avec l’aménagement du territoire ?
Dans quelles conditions, à l’issue de l’évaluation promise dans un an, un maire pourra-t-il, le cas échéant, sortir du dispositif ou au contraire, rassuré quant au respect des engagements de l’État et conforté par l’existence d’un besoin réel pour le territoire de sa commune, y entrer ?
Enfin, le surcoût engendré pour les villes qui accueilleront les bornes prévues pour traiter 2 500 dossiers par an est aujourd’hui, de l’avis de l’ensemble des maires, toutes tendances confondues, largement sous-évalué, même en tenant compte de l’amendement proposé par la commission des finances.
Peut-on espérer, madame le ministre, que le travail réalisé actuellement par quelques communes volontaires, qui fait état d’un coût « brut » de fonctionnement plus proche de 20 000 euros par an que de 3 200 ou même 6 400 euros par an, sera réellement pris en compte ?
Peut-on espérer que les nécessaires réorganisations des services communaux en matière, par exemple, d’amplitude horaire d’ouverture des mairies, notamment hors des grandes zones urbaines, seront prises en compte ?
Peut-on espérer que la piste d’une indemnisation liée au coût réel « à l’acte » sera étudiée ?
Peut-on espérer, enfin, que le dossier des cartes nationales d’identité sera ouvert rapidement et que l’ensemble des maires seront largement consultés sur ce sujet, afin d’aboutir cette fois à un réel consensus ne faisant pas fi de l’activité des personnels communaux dans toutes nos mairies ?
Les maires aimeraient obtenir des assurances de votre part, madame le ministre.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-13, présenté par Mme M. André, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement est retiré.
L’amendement n° II-385, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Au deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales, remplacer le montant : « 3 200 € » par le montant : « 5 000 € ».
II. - Au dernier alinéa du même texte, remplacer le montant : « 1 600 € » par le montant : « 2 500 € ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Cet amendement est de nature à répondre en partie aux interrogations exprimées par M. Sueur et auxquelles j’ai déjà largement répondu lors de mes précédentes interventions.
Je tiens à préciser à M. Sueur, qui s’est fait le porte-parole de Mme Klès, qu’il existe encore des stations d’enregistrement disponibles. Les maires qui souhaiteraient revenir sur une décision prise antérieurement ou sur une décision de non-participation ont donc la possibilité de le faire actuellement, ou dans un an à l’occasion de l’évaluation.
Je ne reviendrai pas sur les chiffres quelque peu fantaisistes qui ont été évoqués, car nous en avons déjà parlé.
L’amendement n° II-385 vise à permettre le relèvement de l’indemnisation forfaitaire des mairies de 3 200 euros à 5 000 euros, soit une augmentation de 56 %.
Pour les stations installées entre le 1er janvier et le 28 juin 2009, le montant de la dotation versée en 2009 est relevé, dans la même proportion, de 1 600 à 2 500 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Michèle André, rapporteur spécial. Favorable.
Je rappelle simplement, comme je l’ai fait à propos des amendements précédents, que la commission restera vigilante tout au long de l’année afin d’accompagner et de soutenir l’action de Mme la ministre de l’intérieur.
M. Jean-Pierre Sueur. Quelle sollicitude !
M. le président. Je suis certain de la vigilance de la commission des finances sur ce point, comme sur d’autres.
Je mets aux voix l’amendement n° II-385.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je tiens à rappeler à Mme le ministre que, lors de l’examen des articles de la première partie du projet de loi de finances, Mme André avait proposé un dispositif tendant à moduler le droit de timbre applicable au passeport selon que le citoyen désireux d’obtenir ce document fournit lui-même une photographie d’identité ou se fait photographier par un appareil qui appartient à l’État.
Cet amendement, qui avait été adopté par le Sénat, n’a pas survécu à une seconde délibération. Mais nous sommes convenus d’examiner à nouveau cette question à l’occasion du collectif budgétaire, afin de la résoudre avant le 1er janvier prochain.
M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Relations avec les collectivités territoriales
Compte spécial : avances aux collectivités territoriales
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 67 à 72) et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question des relations financières entre l’État et les collectivités locales a déjà fait l’objet de nombreuses interventions lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, à l’occasion du débat sur les collectivités territoriales. Je n’y reviendrai donc pas.
En première partie, nous avons adopté le cadre général qui nous était proposé par le Gouvernement et nous avons ajusté l’effet de l’augmentation de la DGF, la dotation globale de fonctionnement, et de l’intégration du FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA, au sein de l’enveloppe que l’on qualifie non plus d’enveloppe normée, mais plutôt d’enveloppe fermée.
Dans ce contexte budgétaire tendu, je retiendrai deux points positifs : l’application dérogatoire, en 2009, d’un taux de progression supérieur de 0,5 % à celui de l’inflation prévisionnelle, et l’atténuation de la baisse des variables d’ajustement, grâce à l’intégration d’une partie de l’augmentation des recettes des fonds départementaux de taxe professionnelle.
La seconde partie du projet de loi de finances nous amène désormais à nous intéresser, d’une part, à la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et au compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », et, d’autre part, à certaines questions essentielles comme la péréquation, les compensations de transferts de charges et, surtout, la répartition de la dotation forfaitaire de la DGF des communes à l’intérieur d’une enveloppe fermée.
Je l’ai dit la semaine dernière, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne constitue qu’un aspect, très limité, des concours de l’État aux collectivités territoriales, soit 2,4 milliards d’euros en 2009.
Cette mission est constituée de quatre programmes qui connaissent des évolutions contrastées par rapport à la loi de finances pour 2008.
Le programme 119 « Concours financiers aux communes et groupements de communes » augmente de 6,45 % du fait de l’intégration de deux nouvelles dotations : la dotation forfaitaire « titres sécurisés », dont nous venons de discuter dans le cadre de l’examen de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » – je me félicite, à cet égard, de la solution obtenue –, et la dotation de développement urbain. Au total, ce programme représente 739 millions d’euros.
Le programme 120 « Concours financiers aux départements », qui rassemble 484 millions d’euros, augmente légèrement en raison de la prise en compte du transfert de certains immeubles classés au titre des monuments historiques, de la DGD fluviale en faveur de la Guyane et de l’évolution de la DGD en faveur des ports maritimes.
Le programme 121 « Concours financiers aux régions » baisse de 2,88 % en raison d’une réduction de 82,7 millions d’euros au titre du versement, en hors taxes, des subventions d’exploitation des services régionaux de voyageurs à la SNCF.
Enfin, le programme 122 « Concours spécifiques et administration » progresse de 54 % du fait de mesures de périmètre liées à la prise en compte, à hauteur de 102 millions d’euros, de dotations pour l’outre-mer qui étaient inscrites précédemment dans une autre mission.
Pour leur quasi-totalité, les crédits inscrits dans la mission correspondent à des dotations dont la norme d’évolution et la répartition sont fixées par la loi.
C’est le cas pour les trois premiers programmes de la mission : les crédits de la dotation générale de décentralisation, de la dotation globale d’équipement et de la dotation de développement rural. Je veux souligner que l’effort de l’État en faveur des investissements des collectivités est maintenu pour 2009, ce qui est appréciable dans la situation que nous connaissons actuellement.
Dans le cas du programme 122 « Concours spécifiques et administration », les crédits, constitués essentiellement des aides exceptionnelles et des crédits de fonctionnement de la Direction générale des collectivités locales, ne laissent pas de marge de manœuvre au responsable de programme.
Cette absence de marge de manœuvre est renforcée par le fait que, depuis le 1er janvier 2008, les effectifs de la mission, correspondant aux emplois de la Direction générale des collectivités locales, ont été transférés sur le programme 216 « Conduite et pilotage des missions de l’intérieur » de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Je serai très bref sur le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », dont je rappelle qu’il a été institué par la loi de finances pour 2006.
Ce compte retrace, d’une part, les avances de l’État à des collectivités territoriales et à des établissements publics connaissant des difficultés de trésorerie ou ayant besoin d’emprunter et, d’autre part, les avances sur les recettes fiscales des collectivités territoriales.
Plus de 86,22 milliards d’euros transiteront en 2009 sur ce compte, dont l’examen appelle deux observations positives de la part de la commission des finances.
En premier lieu, il faut souligner que les résultats des indicateurs de performance ont enregistré une amélioration très sensible. Par exemple, les pourcentages des opérations de versement réalisées par le comptable à la date prévue ont atteint 100 % en 2008 tant pour les contributions directes locales que pour les avances sur TIPP, la taxe intérieure sur les produits pétroliers.
En second lieu, je constate que le contrôle budgétaire sur les relations de trésorerie entre l’État et les collectivités territoriales, mené en 2007 par mon prédécesseur, notre collègue Michel Mercier, a porté ses fruits, notamment parce que le ministère du budget a été conduit à justifier plus précisément les règles de fonctionnement de ce compte d’avances.
Au total, selon les informations qui m’ont été communiquées, le bilan global des relations financières entre l’État et les collectivités locales ferait apparaître une situation de léger déficit, pris en charge par l’État pour un montant moyen annuel, sur la période 2001-2007, de 150 millions d’euros.
J’en viens aux articles rattachés aux crédits de la mission.
L’article 67, relatif aux règles d’évolution de certaines composantes de la DGF, vise à préserver, malgré les contraintes pesant sur la DGF en 2009, des marges de manœuvre en faveur des dotations de péréquation.
En 2009, la DGF subira, je le rappelle, une triple contrainte : une progression globalement limitée au sein du périmètre normé des concours de l’État aux collectivités territoriales ; la prise en considération, pour sa répartition, des résultats du nouveau recensement de la population ; la prise en considération des évolutions de l’intercommunalité. Chacune de ces contraintes entraîne un risque d’affaiblissement de l’effort de péréquation existant, qui, je le rappelle, a néanmoins augmenté de près de 40 % entre 2004 et 2008.
Que prévoit cet article ?
Il s’agit d’abord d’améliorer le solde de la DGF disponible, en ralentissant la croissance des dotations forfaitaires, ce qui passe par une baisse de 2 % du complément de garantie des communes, et en minorant la bonification des dotations d’intercommunalité.
Puis, il s’agit d’optimiser l’effet de ces mesures en aménageant certaines dotations de péréquation.
À cet égard, le Gouvernement propose de réserver la DPU au bénéfice des départements urbains dont le potentiel financier par habitant est inférieur ou égal à 1,5 fois le potentiel financier par habitant moyen.
À propos de cet article, qui va permettre le maintien de la poursuite des efforts de péréquation, je me permets de rappeler ici que, si personne ne peut contester les efforts de péréquation consentis par le Gouvernement ces dernières années, il n’en demeure pas moins que, dans un contexte budgétaire tendu, la nature de la répartition de la solidarité nationale au sein des collectivités mérite d’être revisitée. Le débat sur la DSU sur lequel je vais revenir en est la preuve.
Mais cette remarque est aussi particulièrement vraie pour la péréquation régionale.
En effet, si, en volume, on peut saluer le fait que cette péréquation a été portée de 76 millions d’euros en 2004 à 152 millions en 2008, soit une augmentation de 100 %, la nature des critères de répartition actuels, qui n’ont pas changé depuis 2004, conduit à des situations pour le moins paradoxales.
Ainsi, l’Auvergne, par exemple,...
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Au hasard ! (Sourires.)
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. ...qui est l’une des régions dont le PIB est le plus faible de France, a perdu le bénéfice de sa dotation de péréquation en 2008, et cela parce qu’elle justifie d’un taux de base plafonné de taxe professionnelle plus élevé que la moyenne nationale. L’éligibilité à la dotation de péréquation est donc liée actuellement à une richesse constatée totalement virtuelle.
Vous conviendrez donc, madame le ministre, que les critères d’éligibilité de cette dotation aux régions méritent d’être revisités au plus vite.
J’en viens à l’article 68, qui concerne le droit à compensation des régions au titre de la compétence « Services régionaux de voyageurs ». Il vise à calculer hors TVA le droit à compensation des régions dans la mesure où la TVA n’est plus exigible pour les subventions pratiquées par les régions dans ce cadre.
Il convient de souligner que cette opération reste neutre pour les régions dans la mesure où l’État ne compensera plus ce que les régions elles-mêmes n’acquitteront plus.
L’article 69 prévoit d’atténuer les effets de la diminution de la dotation de compensation de taxe professionnelle, la DCTP, en 2009 au profit de 256 communes défavorisées pour lesquelles la DCTP représente une part importante de leurs ressources.
Les articles 70 et 71 sont relatifs à la péréquation en faveur des communes urbaines confrontées à des graves difficultés. Ils mettent en œuvre les engagements pris au titre du plan de cohésion sociale, selon lequel la dotation de solidarité urbaine, la DSU, devait bénéficier, entre 2005 à 2009, d’un abondement supplémentaire, à hauteur de 120 millions d’euros par an.
S’agissant de la DSU, dont le projet de loi de finances fixe la progression à 70 millions d’euros, la solution que vous avez proposée, madame le ministre, à la suite des concertations avec les associations d’élus, est provisoirement satisfaisante.
Il faudra pourtant que le travail de réflexion se poursuive dans le cadre d’une négociation déjà entreprise entre l’État et les associations d’élus pour définir des critères cohérents avec l’objectif de péréquation poursuivi par la DSU.
Je souhaite souligner aussi la création de la dotation de développement urbain, la DDU. Cette nouvelle dotation est destinée à financer les projets d’aménagement et de développement urbains d’une centaine de communes prioritaires éligibles à la DSU.
L’Assemblée nationale a prévu que les objectifs prioritaires conditionnant l’octroi de cette dotation soient fixés chaque année par le Premier ministre, après avis du Conseil national des villes.
Cette amélioration du texte permettra d’associer les élus et de favoriser la transparence des choix qui seront effectués.
Pour autant, la nature de la dotation de développement urbain comme ses modalités de mise en place restent incertaines, en particulier son intégration au sein de l’ensemble de l’effort de l’État pour la politique de la ville.
La commission des finances vous propose donc un amendement qui vise à établir un lien entre les contractualisations existantes dans le domaine de la politique de la ville, en particulier les contrats urbains de cohésion sociale et les nouveaux contrats État-collectivités qui donneront droit à des subventions de la DDU.
Enfin, l’article 72 prévoit de créer un fonds, doté de 5 millions d’euros en 2009, destiné aux communes perdant des ressources du fait de la restructuration des armées. Il n’est, à ce titre, qu’un élément du plan d’accompagnement territorial de la restructuration des armées.
La commission des finances vous présentera un amendement tendant à créer un article additionnel, d’une part, pour prendre en compte, dans la répartition 2009 de la part insertion du Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion, le FMDI, les expérimentations du revenu de solidarité active, le RSA, et de la réforme des contrats aidés conduites en 2008 par certains départements, d’autre part, pour permettre l’individualisation dans les comptes du département des dépenses relatives au RSA.
Sous le bénéfice de ces observations et des amendements de la commission des finances, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales », ainsi que les articles rattachés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, lors du débat sur les recettes des collectivités territoriales, le 25 novembre dernier, j’ai eu l’occasion d’évoquer les contraintes pesant sur les concours financiers de l’État aux collectivités, ainsi que l’impact des normes sur les finances des collectivités locales. Je m’étais notamment félicité de la création de la commission consultative d’évaluation des normes.
Mes remarques se concentreront aujourd’hui sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dont nous examinerons dans un instant les crédits : cette mission n’apparaît toujours pas représentative des concours financiers de l’État aux collectivités.
Je dirai également quelques mots des dispositifs destinés à préserver l’effort de péréquation en faveur de nos territoires les plus fragiles.
Je voudrais, en préambule, rappeler que la mission « Relations avec les collectivités territoriales » regroupe les dotations budgétaires inscrites au budget du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Son montant atteint environ 2,4 milliards d’euros pour 2009.
Les crédits de cette mission ne sont représentatifs ni de l’ensemble des crédits budgétaires destinés aux collectivités ni de l’ensemble des concours financiers de l’État. En effet, d’une part, des crédits budgétaires sont également inscrits au budget du ministère de l’économie, au titre de la Dotation générale de décentralisation, la DGD, relative à la formation professionnelle, d’autre part, 93 % des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales figurent désormais en prélèvements sur les recettes de l’État. Nous les avons examinés la semaine dernière, vous vous en souvenez, mes chers collègues.
Au total, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représente donc que 4 % des concours financiers de l’État aux collectivités locales.
En outre, l’État ne dispose d’aucune marge de manœuvre pour près des trois quarts des crédits de cette mission, qui correspondent à des dotations dont la norme d’évolution et la répartition sont fixées par la loi.
L’année dernière, ce constat avait conduit notre collègue Michel Mercier, alors rapporteur spécial de la commission des finances, à proposer la suppression de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Nous voyons bien que cette proposition conserve cette année toute sa pertinence.
En outre, si l’on additionne les crédits budgétaires et les prélèvements sur recettes affectés aux collectivités, l’ensemble des concours financiers de l’État atteint en 2009 environ 56,5 milliards d’euros.
Nous le savons, la progression de cet ensemble fait désormais l’objet d’un encadrement pluriannuel et d’une progression limitée à l’inflation prévisionnelle.
Toutefois, si l’on veut se rendre compte de l’effort financier global de l’État en faveur des collectivités territoriales, il faut également tenir compte, d’abord, des subventions diverses versées par les ministères aux collectivités, ensuite, des dégrèvements d’impôts locaux, qui sont la conséquence des aménagements ponctuels apportés à la fiscalité locale au gré des réformes successives, enfin, de la fiscalité transférée, utilisée prioritairement depuis 2004 pour financer les transferts de compétences aux régions et aux départements.
Au total, on parvient à un effort financier global de près de 100 milliards d’euros, 96,8 milliards d’euros pour être précis.
Je veux faire ici deux remarques : premièrement, ce manque de lisibilité me semble fâcheux, car il ne facilite pas la compréhension des relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, relations qui sont déjà particulièrement complexes ; deuxièmement, il est représentatif d’une dépendance accrue des collectivités à l’égard de l’État, qui est tout aussi regrettable. Nous avons évoqué ce point lors de notre débat la semaine dernière ; je n’y reviens pas.
En revanche, je tiens à revenir brièvement sur la question de la péréquation et de l’effort réalisé en faveur des collectivités les plus défavorisées. Cette question constitue un fil conducteur des articles 67 à 72 que nous examinons aujourd’hui.
L’évaluation de l’efficacité des mécanismes consacrés à la péréquation a fait l’objet d’une étude montrant que, sur la période 2001-2006, l’efficacité en termes de péréquation des dotations de l’État aux régions a progressé. En revanche, celle des dotations consacrées aux communes et aux départements a régressé.
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas bien !
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Cela doit d’autant plus attirer notre attention qu’en 2009 les marges de manœuvre consacrées à la péréquation sont doublement contraintes : d’une part, par la limitation de la progression des concours de l’État à 2 %, d’autre part, par l’impact de la nouvelle procédure de recensement.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Je rappelle que la péréquation figure parmi nos principes constitutionnels.
M. Jean-Pierre Sueur. Des principes essentiels !
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. En outre, en ces temps de crise, il n’est pas concevable que les collectivités qui rencontrent le plus de difficultés ne fassent pas l’objet d’une attention particulière et prioritaire.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. C’est pourquoi je tiens à souligner l’ensemble des dispositions techniques prévues à l’article 67 du projet de loi de finances pour préserver des marges de manœuvre en faveur des dotations de péréquation, même si, ici ou là, des aménagements ont été apportés par l’Assemblée nationale ou pourraient encore y être apportés.
En outre, je me félicite de l’effort particulier réalisé en faveur des villes particulièrement défavorisées et des communes touchées par les restructurations du ministère de la défense.
Les critères de répartition et d’évaluation de ces deux dotations restent encore à préciser, et je souhaiterais, madame le ministre, que le Gouvernement nous apporte rapidement des éclaircissements sur ce point. Néanmoins, il y a là une attention apportée à nos territoires les plus fragiles qui mérite d’être encouragée et renforcée.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois, consultée pour avis, s’est déclarée favorable à l’adoption des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la présentation budgétaire des relations financières de l’État avec les collectivités locales s’analyse d’abord comme un exercice de camouflage.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. Celui-ci est particulièrement réussi. Ainsi part-il du principe qu’il est légitime « d’associer » – ce qui signifie « contraindre » – les collectivités locales à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. « Cependant, l’objectif de réduction du déficit public que l’État s’est fixé â l’horizon 2012 […] doit être partagé par les collectivités territoriales. » : ce sont les propos tenus par M. Marleix devant le congrès de l’Association nationale des élus de la montagne, l’ANEM.
J’émettrai toutefois quelques réserves.
En premier lieu, la crise aidant, il faudra bien financer par l’endettement les 20 milliards d'euros de la partie française du plan de relance européen, dont le Président de la République a donné hier les détails.
En bruxellois, cela donne : « Le plan de relance tire pleinement parti de la flexibilité offerte par les règles de l’Union européenne en matière de déficits budgétaires nationaux qui permettent aux gouvernements d’emprunter davantage, de façon ponctuelle, en cas de conjoncture difficile. ».
Et en français, cela donne – je cite Nicolas Sarkozy : « Le plan de relance ne pèsera pas au-delà de 2009, car il est conçu pour être temporaire. » Plus fort encore : « De ce fait, le déficit public en 2011 et 2012 sera légèrement amélioré. » Si ce n’est pas nous prendre pour des demeurés, qu’est-ce que c’est ?
Les collectivités locales réalisant les trois quarts des investissements publics, le Gouvernement serait mieux inspiré de les mobiliser pour la relance économique, plutôt que de procéder à un versement anticipé du FCTVA, versement qui ne changera rien à leurs difficultés structurelles, ou de poursuivre un objectif 2012 d’équilibre financier parfaitement illusoire.
Réseaux d’eau, de voirie, de transport, équipements publics, etc., ce ne sont pas les investissements utiles, mais d’effets limités sur le déficit de notre balance commerciale, qui manquent ! Quant au logement social, les mesures annoncées, qui n’apportent aucune réponse au problème essentiel du bouclage des plans de financement des projets, n’auront que des effets homéopathiques.
Cette discussion budgétaire, complètement décalée par rapport aux réalités financières et aux exigences de l’heure, en totale apesanteur, a quelque chose de surréaliste : navigation dans le brouillard avec deux boussoles, l’une dont le nord indique la relance économique et l’autre est pointée sur l’entretien de la déflation.
Déjà irréels, comme l’a souligné le rapporteur général, Philippe Marini, les objectifs fixés aux collectivités locales par la loi de programmation des finances publiques 2009-2012 deviennent, avec le plan de relance, hautement fantaisistes. Parier sur une chute du taux de progression moyen des dépenses annuelles, hors décentralisation, de 3,25 % à 1,25 % est évidemment illusoire.
Et le rapporteur général conclut : « Surtout, les finances locales devront assumer une bonne part des conséquences de la crise. […] Il ne faut donc pas être grand clerc pour prédire, sur la période 2009-2010, un rythme soutenu de la dépense locale en même temps qu’une hausse des impositions locales. La rigueur affichée par l’État dans le calcul des dotations comporte, de ce point de vue, une grande part d’hypocrisie. » On ne saurait être plus clair !
En deuxième lieu, les collectivités locales ne sont pas responsables des dérives des finances publiques.
Si la dette française est préoccupante, c’est non par son niveau, mais par sa nature : elle sert surtout à financer le fonctionnement de l’État quand elle devrait, comme pour les collectivités locales, privilégier l’investissement. La dette des collectivités représente quelque 11 % de la dette publique, contre 80 % pour l’État.
Philippe Séguin en a conclu devant la commission des finances de l’Assemblée nationale qu’il était difficile d’attribuer aux collectivités territoriales une responsabilité directe dans l’évolution de la situation de nos comptes. Il a été plus direct encore devant la commission des finances du Sénat en convenant qu’il était injuste de faire des collectivités locales un bouc émissaire.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. En troisième lieu, il n’est question que des dépenses et de leur réduction, quand le déficit est aussi le résultat d’une politique constante de réduction des recettes fiscales, comme des cotisations sociales, sans résultat probant, et encore moins pérenne, sur l’emploi. Si vous le souhaitez, je pourrai vous donner des chiffres tout à l’heure, lors de l’examen des amendements.
Voila pour le cadre général dans lequel on enferme la discussion budgétaire avec les collectivités locales.
Quand on entre dans le détail, la confusion, soigneusement entretenue – car la complexité est un élément essentiel du camouflage –, est encore plus grande.
Comment peut-on dire et répéter, sans rire, que l’effort financier de l’État sera de 96,8 milliards d’euros en 2009, alors que, sur cette somme, 21,4 milliards d’euros sont des recettes fiscales compensant des charges transférées, 20,4 milliards d’euros la contrepartie de dégrèvements et d’exonérations fiscales imposées par l’État, 5,9 milliards le FCTVA, remboursement incomplet de la TVA payée par les collectivités, 4,6 milliards d’euros la contrepartie, sous forme de dotations et de fonds, de charges transférées ?
Donc, à strictement parler, « l’effort financier de l’État » en faveur des collectivités locales s’élève non pas à 96,8 milliards d’euros, mais, au maximum, à 44,5 milliards d’euros. « Au maximum », j’y insiste, car la DGF est, à l’origine, la contrepartie de taxes communales captées par l’État : taxes locales sur la consommation – jusqu’à l’invention, juteuse pour l’État, de la TVA,…
M. Jean-Pierre Sueur. Eh oui !
M. Pierre-Yves Collombat. …–, taxe sur les salaires, versement représentatif de la taxe sur les salaires et, enfin, DGF. Vu le dynamisme de la TVA, il n’est pas sûr que les collectivités locales aient gagné au change !
Mais, en tout état de cause, la taxe sur les salaires rapportant aujourd’hui de l’ordre de 10 milliards d’euros, « l’effort financier de l’État » en faveur des collectivités locales ne dépasse pas, en réalité, 34 milliards d’euros en 2009, soit 35% du chiffre affiché.
Dire que la progression de la DGF s’inscrit dans le cadre d’un « contrat de stabilité » n’a aucun sens. Un « contrat » imposé n’est pas un contrat ; une « stabilité » décrétée est une tromperie.
Comme on le sait, les concours de l’État aux collectivités sont censés progresser au rythme de leurs dépenses, soit une augmentation de 2 %, selon une première boule de cristal gouvernementale, ou de 1,5 %, selon une seconde boule de cristal. Cette progression était censée procurer 275 millions d’euros de bonus aux collectivités.
Cependant, à périmètre constant, la progression de l’enveloppe fermée, autrefois appelée enveloppe normée, est de l’ordre de 0,7 % à 0,8 %. À périmètre constant, c’est-à-dire sans la dotation de développement urbain, le fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées et la dotation pour les titres sécurisés, sur lesquels je reviendrai, les crédits de la mission « Relation avec les collectivités territoriales » sont identiques à ceux de 2008, à ceci près que les prévisions retenues en matière d’inflation sont des plus fantaisistes.
Chaque année apporte ses innovations dans l’art du camouflage budgétaire. Dans le projet de loi de finances pour 2009, la plus importante est sans conteste l’introduction du FCTVA dans l’enveloppe fermée. En y faisant rentrer – c’est une suggestion ! – les 2,5 milliards d’avances du plan de relance, nous toucherions à la perfection !
Pour nous en tenir à ce que nous savons, en 2009, les apparences d’une progression du fonds indexée sur les investissements des collectivités – soit une hausse de 12,8 % – sont sauves, certes au détriment des compensations d’exonérations fiscales, mais nous sommes si habitués à les voir diminuer régulièrement que nous ne nous en apercevons même plus.
La première étape d’une désindexation du FCTVA sur les investissements communaux vient d’être franchie. Comme pour la compensation de la part salaires de la taxe professionnelle, désormais intégrée à la DGF, nul n’est besoin d’être devin pour prédire qu’il évoluera bientôt non comme la contribution financière des collectivités à l’État, mais comme le taux officiel de l’inflation.
L’innovation la plus digne d’admiration, à mes yeux, est quand même la dotation pour les titres sécurisés, censée, en principe, compenser un transfert de charges. Tout d’abord, le coût réel de chaque opération est apparemment plutôt minoré. Ensuite, seules les charges induites par les demandeurs extérieurs à la commune sont prises en compte dans le calcul. Cependant, l’essentiel n’est pas là !
Astuce suprême, la charge imposée est non pas compensée par l’État, mais assumée par l’ensemble des collectivités : cette nouvelle dotation étant intégrée à l’enveloppe fermée, c’est bien au détriment des collectivités qu’elle est financée. Cette remarque vaut d’ailleurs également pour la dotation de développement urbain et pour celle qui est accordée aux communes affectées par la disparition de leurs garnisons.
À l’issue de ses travaux, le congrès de l’Association des maires de France, l’AMF, a demandé au Gouvernement de « recréer les conditions d’une nouvelle relation de confiance ». La toute première de ces conditions serait que le Gouvernement, usant enfin d’un langage de vérité, cesse d’appeler « effort financier contractuel » des remboursements de taxes et des compensations de charges, de captations de recettes fiscales ou de diminutions de recettes, toutes imposées.
Je vous ai écoutée avec attention, madame la ministre : vous vous flattez de construire un État moderne, en rupture avec les errements du passé. Or un État moderne est avant tout un État qui parle vrai ; tout le reste n’est que rhétorique !
Chacun pourra mesurer le chemin qu’il nous reste à parcourir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2009 est axé, plus encore que l’année dernière, sur la maîtrise des dépenses publiques.
La révision générale des politiques publiques entraîne des coupes sévères dans ce projet de loi de finances. Aucun ministère, aucune administration n’échappe à ce plan drastique de réduction des dépenses et de suppression de postes de fonctionnaires.
Les collectivités territoriales ne sont pas épargnées. La ministre des finances, Mme Lagarde, et le ministre du budget, M. Woerth, font tous deux pression afin que les collectivités territoriales contribuent à la réduction des dépenses publiques. Le Gouvernement en tire argument pour mettre un terme à ce qui est appelé le « millefeuille territorial ».
C’est dans ce but que l’Assemblée nationale a mis en place une mission d’information en novembre 2007, que le Sénat a fait de même en octobre dernier et que le Président de la République a installé le Comité pour la réforme des collectivités locales, dit commission Balladur, le 22 octobre dernier. Les points de vue de toutes ces missions semblent converger, sans surprise d’ailleurs : elles préconisent de réduire le nombre des collectivités en incitant financièrement ces dernières à se regrouper volontairement soit sous la forme d’une union avec une collectivité de même niveau, soit par l’accroissement de compétences résultant de la fusion avec une collectivité d’un autre niveau.
Mais l’idée générale se résume ainsi : la réduction d’un échelon territorial constitue un élément de réduction des dépenses publiques.
Dans le contexte de la révision générale des politiques publiques, accentué par la crise financière et économique, le Gouvernement ne cherche qu’à contraindre les collectivités à adopter des solutions insatisfaisantes pour les populations : soit une hausse de la fiscalité locale, soit une réduction de l’offre de services publics. Pourtant, de façon encore plus criante pendant cette crise, les populations sont en attente de plus de services publics et s’adressent à leurs élus locaux pour qu’ils répondent à leurs besoins.
Alors que seuls 10 % de la dette publique peuvent être imputés aux collectivités, celles-ci assurent 75 % des investissements publics du pays. Elles participent ainsi pleinement à l’économie et ne méritent pas le procès d’intention dont elles sont l’objet.
Lorsque les collectivités investissent dans des équipements, elles créent l’activité économique. Ce sont environ 800 000 emplois qui ont ainsi pu être maintenus dans le secteur privé grâce à l’implication financière des collectivités locales.
Ces investissements ne peuvent pas être considérés comme source de coûts excessifs pour les finances publiques. Ils traduisent les efforts accomplis par les collectivités en faveur de leurs populations et plus particulièrement les populations en difficulté.
Le Gouvernement se targue d’avoir maintenu une enveloppe globale de dotations en hausse de 2 % pour 2009. En réalité, cette augmentation n’est possible qu’en raison de l’intégration du FCTVA dans les dotations que l’État accorde aux collectivités. Corrigée de ce grossier tour de passe-passe, la hausse de l’enveloppe globale de dotations n’est plus que de moins de 1%, au lieu des 2 % annoncés.
Ce n’est ni plus ni moins que l’étranglement financier des collectivités territoriales qui est ici organisé, à un moment où elles doivent faire face à une amplification des besoins d’interventions publiques pour contenir les dégâts de la crise.
La situation risque de s’aggraver si le Gouvernement s’engage dans une réforme de la taxe professionnelle ne visant en fait qu’à la supprimer. Même si, pour l’instant, il n’est pas question d’aller jusque-là, le Président de la République et le Gouvernement prévoient déjà une exonération de la taxe professionnelle pour certaines entreprises. La proposition du Gouvernement consiste à accorder une exonération temporaire de taxe professionnelle, sous la forme d’un dégrèvement total sur les investissements en équipements et en biens mobiliers réalisés entre le 23 octobre 2008 et le 31 décembre 2009.
Si le Président de la République et le Gouvernement se sont engagés à compenser à l’euro près le manque à gagner qui en résulterait pour les collectivités, nous ne doutons pas un seul instant que cette décision amorce un processus qui aboutira, sur le long terme, à une suppression de la taxe professionnelle.
Le problème réside avant tout dans la redéfinition de la base de calcul de la taxe professionnelle. Certaines entreprises ont des actifs financiers considérables et cette part de richesse n’est pas comprise dans la base de calcul de la taxe professionnelle.
Cela correspond à une demande ancienne de notre groupe ! Nous avons en effet déposé, dès 2005, une proposition de loi sur les finances locales. La prise en compte des actifs financiers des entreprises permettra de dégager les marges de manœuvre nécessaires pour répondre aux besoins de financement des collectivités locales, lesquels concernent des questions aussi diverses que la préservation de l’environnement, la lutte contre les exclusions sociales, l’aménagement du territoire, ou encore le développement socioéducatif et culturel.
Le Gouvernement reste cependant sourd à cet argument et ne montre guère d’empressement à assurer des relations financières équilibrées entre l’État et les collectivités territoriales.
L’exemple de la DSU est frappant ! Un groupe de travail avait été mis en place dans le cadre du Comité des finances locales pour étudier les dysfonctionnements en la matière et faire des propositions, mais le Gouvernement n’a pas attendu ses conclusions pour supprimer la DSU à 238 communes en excluant du dispositif le critère du logement social. Certes, le Gouvernement a reculé, mais nous ne sommes pas dupes : cela ne vaut que pour cette année et cette réforme. Sachant que le projet demeure, nous resterons vigilants.
Votre politique et vos intentions à l’encontre des collectivités territoriales vont se heurter à plusieurs difficultés.
Les collectivités territoriales reflètent les besoins des populations. Leurs élus, désignés au suffrage universel, jouissent de la légitimité nécessaire pour arrêter leurs choix d’investissements en fonction des politiques définies avec leurs populations, leurs électeurs.
Les collectivités sont ainsi des pôles de résistance à la politique du Gouvernement. Cela constitue certainement, à vos yeux, un obstacle à surmonter impérativement pour mettre en œuvre votre politique de réduction des dépenses. Les élus ne sont pas de simples exécutants du Gouvernement : ils ne sont pas prêts à mettre en œuvre sa politique au détriment, d’ailleurs, de celle qui est définie avec leurs populations.
Je conclurai en disant que nous voterons contre les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Ils traduisent effectivement la volonté du Gouvernement d’étrangler financièrement les collectivités. Bien évidemment, nous ne pouvons pas souscrire à cette logique, qui est contraire à l’objectif fondamental de solidarité et de satisfaction des besoins des populations. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, compte tenu de la situation actuelle de l’économie française et des difficultés qui nous attendent en 2009 et peut-être en 2010, je me permettrai de sortir des vieilles querelles sur les relations tumultueuses qu’entretiennent l’État et les collectivités territoriales pour vous poser une question : comment les collectivités territoriales peuvent-elles contribuer à la relance de notre appareil économique ?
M. Jean-Pierre Chevènement. Très bonne question !
M. Jean-Pierre Fourcade. Telle est la question de fond ! Bien sûr, les crédits, l’évolution de la DGF, l’intégration du FCTVA à l’enveloppe fermée, et j’en passe, n’invitent pas à une réponse très optimiste. C’est pourquoi je voudrais proposer trois axes de travail.
M. Jean-Pierre Chevènement. C’est trop tard !
M. Jean-Pierre Fourcade. Mais nous avons besoin de vous, madame la ministre, car nous ne pouvons rien faire sans l’aide du Gouvernement. Le plan de relance annoncé par le Président de la République comporte quelques éléments positifs, tels le remboursement accéléré de la TVA, qui permettront d’engager un certain nombre d’actions. Nous n’en avons pas moins besoin de vous.
Première idée, les collectivités locales peuvent sans doute assez rapidement, c’est-à-dire dans les trois prochains mois, accélérer leurs investissements traditionnels, tels les réaménagements, entre autres, d’écoles, de crèches, de collèges, de lycées et de centres sociaux. Ces investissements présentent en effet l’immense avantage de faire travailler des petites et moyennes entreprises. Or ce sont précisément les petites et moyennes entreprises qui risquent de souffrir le plus de la crise actuelle.
Si l’ensemble de nos collectivités engagent rapidement les programmes classiques de travaux d’entretien, de modernisation ou de création de nouvelles unités, le remboursement accéléré de la TVA annoncé par le Président de la République peut entraîner des effets positifs sur les petites entreprises.
Mais vous pouvez nous aider de deux autres façons, en matière d’investissements.
En premier lieu, vous pourriez raccourcir les délais administratifs. Cela faciliterait la coordination des projets importants qui font appel à des financements croisés, à des financements européens, ce qui est souvent le cas des collectivités de province. Cela permettrait également de savoir plus vite si les partenariats public-privé sont respectueux de l’éthique que le Conseil d’État essaie d’imposer pour protéger les services publics et éviter qu’ils ne soient livrés aux marchands.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est de la caricature !
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame la ministre, une simplification et une accélération des procédures permettraient de lancer des investissements plus importants dans les mois à venir et contribueraient à alimenter, d’abord les carnets de commandes, puis la trésorerie du très important tissu de PME qui travaillent avec nos collectivités.
En second lieu, vous pouvez aider les collectivités dans la gestion de leurs personnels. Les collectivités territoriales ont beaucoup recruté depuis quelques années, notamment depuis la création des groupements et des communautés urbaines, d’agglomération ou de communes. On ne peut donc pas leur recommander de continuer à accélérer les recrutements.
En revanche, il est trois secteurs dans lesquels les collectivités pourraient essayer d’améliorer la gestion de leurs personnels.
Le premier secteur concerne la généralisation de la pratique des contrats d’apprentissage que certaines collectivités ont mise en place depuis quelque temps. Dans la commune que j’ai administrée pendant treize ans, j’avais créé quinze postes de contrats d’apprentissage. Plus d’une centaine de jeunes en ont bénéficié. Un petit quart d’entre eux est entré dans le cadre des personnels municipaux. Les autres, après avoir obtenu leur diplôme, sont partis dans le secteur privé. Au total, ces contrats d’apprentissage ont permis à des jeunes en difficulté de passer leurs examens et d’entrer dans la vie professionnelle.
Toutes les collectivités d’une certaine importance peuvent conclure des contrats d’apprentissage. Toutes peuvent ainsi contribuer à l’insertion de jeunes en difficulté, qui n’ont aucune chance d’être embauchés par une entreprise dans les mois qui viennent.
Pour ce qui est de la rémunération des stagiaires, nous avons enfin, dans un texte récent, régularisé la situation. Les collectivités ont besoin de stagiaires compétents pour réaliser des études, effectuer des opérations de contrôle et d’évaluation des politiques municipales, cantonales ou départementales. La mise en place d’un système de rémunération des stagiaires devrait nous permettre d’offrir une voie d’insertion à quelques dizaines de milliers de jeunes, plus qualifiés que ceux que l’on prendra en contrat d’apprentissage. Ils pourraient ainsi participer à cet effort de reprise.
Le deuxième secteur a trait au développement des partenariats entre l’université et les collectivités territoriales, notamment les plus importantes. Ces partenariats sont encore beaucoup trop faibles. C’est pourtant un secteur dans lequel, en accord avec Mme le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, nos collectivités peuvent offrir des débouchés.
Le troisième secteur est celui de la fiscalité : c’est de loin le plus difficile et le plus contesté.
En début mandat, la tentation est très forte, pour de nombreux nouveaux maires, d’augmenter fortement les impôts afin de pouvoir invoquer en fin de mandat – on aura oublié le grand coup d’accélérateur des premières années – leur bonne gestion. Il faut lutter contre cette tentation, qui risque de se traduire par des majorations d’impôts considérables.
Comme nous le verrons lors de la discussion des articles non rattachés du projet de loi de finances, le Gouvernement a eu la bonne idée de prévoir une revalorisation des valeurs locatives pour la taxe d’habitation et la taxe foncière de l’ordre de 2,5 %. Cela améliore l’élasticité d’une matière fiscale assez immobile.
Il faut tout faire pour éviter, dans les mois qui viennent, une multiplication des majorations d’impôts sur les ménages, qui pourraient être de l’ordre de 4 % à 6 %, mais qui pourraient aussi atteindre 10 %, voire davantage : je connais des maires qui veulent augmenter de 15 % les taux de la taxe foncière et de la taxe d’habitation. Il en résulterait des conséquences importantes sur la consommation des ménages.
À cet égard, que peut faire le ministre chargé du dialogue avec les collectivités locales ?
Il faut d’abord, surtout dans les trois mois qui viennent, et peut-être sur une période un peu plus longue, éviter tout nouveau transfert de charges.
Madame la ministre, en ce qui concerne les passeports biométriques, vous avez engagé une politique sérieuse. Il s’agit, certes, d’un transfert de charges, mais vous vous efforcez de le compenser, ce qui va le bon sens.
Il faut éviter que, du fait du blocage de leurs dépenses, les administrations françaises demandent aux collectivités locales de leur fournir des moyens, matériels par exemple.
Madame la ministre, la plupart des commissariats de police qui sont logés par les collectivités locales ne paient pas de loyer. Cela n’empêche pas les chefs de poste de demander aux collectivités territoriales de réaliser les travaux d’entretien des bâtiments, du chauffage, etc.
L’État et les collectivités territoriales doivent s’efforcer, ensemble, de gommer les aspérités, d’éviter les transferts insidieux de charges qui viennent régulièrement grever le budget des collectivités.
Nous vivons une période difficile. Il faut sortir du cycle fermé dans lequel nous évoluons, examiner les conséquences de la mondialisation sur nos activités. Il faut soutenir de manière claire et localisée les petites et moyennes entreprises, les grandes entreprises disposant d’autres moyens et d’autres possibilités.
C’est ainsi que le dialogue nécessaire entre les collectivités territoriales et l’État pourra s’améliorer. Cessons de nous reprocher tel ou tel changement. Chaque année, après le vote du budget, l’État impose aux collectivités territoriales des modifications de leur système financier pour tenir compte de votes qui visent parfois à répondre à des problèmes ponctuels. L’État et les collectivités territoriales devraient s’efforcer de s’engager dans une politique de stabilité, avec pour objectif la relance de notre économie, qui en aura bien besoin en 2009.
Madame la ministre, mon groupe vous fait pleinement confiance pour améliorer le climat des relations entre l’État et les collectivités locales. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne concerne qu’un montant limité de crédits : 2,4 milliards d’euros, soit 4 % seulement des concours financiers que l’État apporte aux collectivités locales.
En 2007, M. Mercier avait proposé la suppression de cette mission ; vous n’avez pas suivi cette suggestion. Nous avons donc l’occasion de porter un regard d’ensemble sur la place que l’État accorde aux collectivités territoriales.
Nous constatons d’abord le souci d’associer les collectivités territoriales à l’effort de maîtrise des finances publiques, euphémisme pour évoquer la réduction de leurs dotations. Ce souci est approuvé par la majorité, mais je m’interroge sur la logique de la politique mise en œuvre par le Gouvernement.
D’abord, il convient d’observer que la dette des collectivités locales, c’est de la bonne dette, celle qui finance les investissements, qu’il faut distinguer de la mauvaise dette, comme cela est ressorti du débat sur la dette publique. M. Sarkozy, en annonçant hier son plan de relance, à Douai, a sans le savoir – comme M. Jourdain faisait de la prose – théorisé le concept de bonne dette.
Son plan de relance de 26 milliards d’euros va essentiellement, pour plus des deux tiers, gonfler la trésorerie des entreprises. Je ne suis pas persuadé que cela aura un effet très rapide sur l’activité économique. Ce plan abondera aussi la trésorerie des collectivités locales puisque l’État leur remboursera par anticipation 5 milliards d’euros sur le FCTVA. Cela devrait permettre de réaliser 2,5 milliards d’euros d’investissements.
Ce dispositif est très curieux. En effet, le Fonds de compensation de la TVA est inclus par votre projet de budget dans l’enveloppe normée. Sa vive croissance – 12,8 % – va donc venir en déduction des dotations que l’État affecte aux collectivités locales.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
M. Jean-Pierre Chevènement. Il donne d’une main ce qu’il reprend de l’autre !
M. Jean-Pierre Sueur. Exactement !
M. Jean-Pierre Chevènement. Pourtant, « donner et retenir ne vaut » dit le proverbe !
Le débat, très compliqué, porte sur la nature même du FCTVA : est-ce une dotation ou simplement un remboursement ? M. Woerth, ministre des comptes publics, a fini par rendre les armes. Il a reconnu, ici même, au Sénat, qu’il s’agissait en fait du remboursement d’une dette. Dès lors, les choses sont claires : le FCTVA ne devrait pas être intégré dans l’enveloppe normée.
Le Gouvernement prévoit de rembourser par anticipation 5 milliards d’euros sur le FCTVA au mois de janvier dans l’espoir que les collectivités locales vont investir. Rien n’est moins sûr ! Compte tenu de la conjoncture, elles peuvent préférer se désendetter. L’effet n’est donc nullement garanti.
Si le Gouvernement avait voulu accélérer le rythme des investissements des collectivités locales, il aurait pu augmenter, ne fût-ce que légèrement, le taux de remboursement sur les investissements réalisés en 2009 et 2010. Au lieu de cela, il prétend rembourser par anticipation ce qu’il devra payer de toute façon.
Certes, vous avez prévu une convention entre le préfet et la collectivité pour conditionner cette aide à l’investissement réalisé en 2009, mais il n’est que trop prévisible que ce système favorisera les effets d’aubaine : les collectivités effectueront en 2009 les investissements qu’elles ont de toute façon prévu de réaliser.
Le choix du FCTVA comme levier de la relance est donc très contestable. C’est le serpent qui se mord la queue, madame le ministre.
L’augmentation des remboursements dus au titre du FCTVA va donc réduire le montant des dotations d’ajustement, notamment la DCTP perçue par les villes anciennement industrialisées, qui sont souvent parmi les plus pauvres.
Par un jeu d’amendements, le Sénat a obtenu qu’une déduction s’opère à hauteur de 100 millions d’euros. Il n’y a pas de petits profits ! Au terme de la construction de cette usine à gaz, les dotations d’ajustement, qui devaient initialement baisser de 21 %, ne devraient donc plus diminuer que de 14 %.
Certes, M. Marini fait valoir que l’inclusion du FCTVA dans l’enveloppe normée ne change rien au calcul des droits de chaque collectivité ayant réalisé un investissement donnant lieu à remboursement. C’est peut-être exact au niveau de chaque collectivité prise séparément, mais ce n’est pas vrai globalement ; il y aura un effet systémique : l’inclusion du FCTVA dans l’enveloppe normée découragera les collectivités d’investir puisque les remboursements de TVA viendront en déduction des dotations de fonctionnement.
Tout occupé qu’il est à freiner l’investissement des collectivités locales, politique préalablement annoncée et qui, au fond, sous-tend ce budget, le Gouvernement se prend les pieds dans le tapis en prétendant accélérer des remboursements qui viendront en déduction de ses concours.
M. Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué que le FCTVA ne devait pas se transformer subrepticement en dotation. ; je ne peux qu’approuver ce propos. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire, madame le ministre !
Ce projet de budget est essentiellement restrictif. Le projet de loi de finances inclut dans le périmètre de l’enveloppe normée, outre le FCTVA, diverses lignes nouvelles telles que la dotation de développement urbain, dédiée à cent communes particulièrement défavorisées, et le Fonds d'accompagnement des communes au titre des restructurations de Défense. Ce dernier est doté de 5 millions d’euros : une poignée de cacahuètes, madame le ministre ! Au surplus; ces nouvelles lignes budgétaires ne coûteront rien à l’État, puisqu’elles viendront en déduction de la DCTP.
Vous faites valoir comme un cadeau aux collectivités une augmentation de 2 % de la DGF et de l’enveloppe normée, avec une inflation qui, avez-vous décrété, sera de 1,5 %. Mais, en 2007, l’inflation était de 3,5 % ! Et maintenant, il n’y a plus de régularisation a posteriori, ce que je déplore profondément.
J’observe la stabilisation en valeur, voire la baisse, de nombreuses dotations : dotation générale de décentralisation, dotation spéciale instituteurs, dotation globale d'équipement des communes et des départements, dotation départementale d’équipement des collèges, dotation régionale d’équipement scolaire, dotation de développement rural, compensation de la part salaires de la taxe professionnelle, compensation des pertes de base d'imposition à la taxe professionnelle…
La baisse prévue pour les dotations d’ajustement est ramenée de 2 milliards d’euros à 1,5 milliard, paraît-il ; mais elle n’en jette pas moins une lumière crue sur le contenu essentiellement restrictif, je le répète, de ce budget.
L’effort supplémentaire de péréquation, que je salue – 70 millions d’euros au travers de la DSU, 50 millions d’euros via la DDU –, viendra lui aussi en déduction de la dotation forfaitaire, qui constitue le minimum vital pour des milliers de petites communes.
Enfin, la réforme de la taxe professionnelle est inquiétante pour l’autonomie fiscale de nos communes, de nos intercommunalités et des départements ; il faudrait au demeurant veiller à ne pas priver les intercommunalités des concours financiers dont elles ont besoin, car elles constituent, je le crois, une réponse adéquate à la spécificité française que représente dans un pays européen l’existence de 36 600 communes.
Nous aurons d’autres occasions, madame le ministre, d’évoquer l’architecture territoriale du pays, le « millefeuille », comme on l’appelle, et j’ai quelques idées sur le sujet.
J’aimerais que vous nous annonciez, comme tout à l’heure le ministre des affaires étrangères à un autre propos, que cette grande question fera l’objet d’un débat de fond : elle exige que vous recherchiez le consensus, qui implique forcément une discussion large, approfondie, dont l’examen de ce fascicule budgétaire ne nous donne pas la possibilité. Quand donc, madame le ministre, y serez-vous disposée ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il faut, je pense, en revenir à certains principes simples.
M. Jean-Pierre Fourcade, tout à l’heure, a adressé une sorte d’admonestation aux collectivités locales quant à leurs choix fiscaux. J’ai envie, en réponse, de l’exhorter à respecter l’autonomie financière et fiscale des collectivités locales. Les élus locaux sont assez bien avisés, et ils ont le droit, avec leurs conseils, de choisir la politique fiscale qui leur paraît la meilleure pour le bien public !
Madame la ministre, je voudrais revenir sur l’objet même de ce projet de budget et évoquer le fait que nous ayons inscrit dans la Constitution l’autonomie financière des collectivités locales. Celle-ci n’en est pas pour autant devenue réalité, vous le savez bien, et cela en raison du poids considérable des dotations de l’État dans les ressources des collectivités locales : notre pays est un pays étrange où, finalement, c’est le contribuable national qui est le plus grand pourvoyeur de fonds des collectivités locales de la République.
Cela fait quelques années que nous avons l’occasion de nous pencher sur ces sujets, et je constate, madame la ministre, que, cette fois-ci encore, vous avez cédé à ce que j’appellerai les « vieilles ficelles » du métier. Il faudrait tout de même arrêter ! M. Collombat, notamment, a été particulièrement éloquent sur ce sujet : on retrouve toutes les astuces.
Première astuce, les prévisions évidemment fausses. Ainsi, l’inflation est officiellement déclarée à 2 % alors que chacun sait qu’elle sera de 3 % : cela permet de retirer 400 millions d’euros à la DGF. Personne n’est dupe, pas même vous, madame la ministre.
Deuxième astuce, les périmètres à géométrie variable. Ils présentent, certes, l’avantage de nous donner chaque année l’occasion de nous remettre à niveau ; peut-être nous faudrait-il d’ailleurs effectuer un stage annuel au sein de l’excellente direction générale des collectivités locales : avec des périmètres qui changent à chaque budget, les comparaisons deviennent toujours plus rudes !
Naturellement, l’enveloppe normée de 2009 n’est pas du tout celle de 2008 puisque, cela a été abondamment rappelé, le FCTVA y fait son apparition, de même que le prélèvement au titre des amendes forfaitaires, mais aussi le fonds de solidarité en faveur des collectivités, sans compter le fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées. Au total, cette deuxième astuce, qui est bien connue, fait perdre 300 millions d’euros aux collectivités locales.
Troisième astuce, l’inéluctable dégénérescence des dotations de compensation, qui, tragiquement, deviennent des variables d’ajustement.
Je voudrais cette année saluer la dotation globale de décentralisation, qui ne compense plus du tout ce qu’elle était censée compenser. Et je ne manquerai pas de citer une fois encore le sort tout à fait remarquable, si je puis dire, de la fameuse dotation de compensation de la taxe professionnelle : destinée à compenser toutes les réductions de taxe professionnelle accordées par les nombreux gouvernements qui eurent recours à ce procédé, elle ne compense plus rien puisque, un beau jour, il a été décidé qu’elle serait la variable d’ajustement du système. Il est donc totalement absurde de parler de dotation « de compensation » !
Qui plus est, elle ne parvient même plus à assurer l’ajustement du système ! De nouvelles variables d’ajustement sont donc introduites, comme la compensation au titre de la réduction de la fraction des recettes des titulaires de bénéfices non commerciaux, comme la compensation au titre de l’exonération des parts départementale et régionale de taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles ; et je n’évoquerai même pas la compensation au titre de la réduction de taxe professionnelle pour création d’établissement.
Quatrième astuce, la recentralisation. Je me réjouis, bien sûr, des modifications qui ont été apportées aux dispositions initiales concernant la DSU, car il eût été difficilement défendable de réduire la dotation de solidarité urbaine. Mais la méthode…
Je me souviens qu’il y avait jadis au sein de la DGF une dotation touristique : un certain nombre de communes l’ayant trouvée insuffisante, le ministère de l’intérieur, dans sa grande sagesse, en a créé une deuxième, dont les objectifs n’étaient d’ailleurs pas tout à fait cohérents avec ceux de la première.
Aujourd’hui, à la DSU – que l’on pourrait d’ailleurs réformer dans le sens d’une plus grande péréquation –, on ajoute une DDU. Pensez-vous vraiment, madame la ministre, que la juxtaposition de la DSU et de la DDU soit la bonne solution ? Qui plus est, la DDU fonctionne selon des critères que le Gouvernement critiquait lorsqu’il reprochait à la DSU de prendre trop largement en compte les ZFU et les ZUS, à savoir les zones franches urbaines et les zones urbaines sensibles. Vous le savez, nous avons beaucoup de zones de toute nature ! Il faut donc que cela change.
Néanmoins, rien ne change puisque vous reprenez les mêmes critères pour la DDU, mais en y ajoutant une condition : elle ne peut être perçue que par les collectivités ayant signé avec l’État un contrat portant sur des réalisations auxquelles l’État donne son aval. Si bien que nombre de collectivités ont fait observer qu’il s’agissait tout simplement d’une nouvelle formulation de la subvention ; et encore faudrait-il que les subventions à la politique de la ville ne soient pas réduites à due concurrence !
Au total, madame la ministre, toutes ces astuces aboutissent à la réduction du montant des dotations de l’État aux collectivités locales, chacun l’a souligné, ce qui nous confronte à une grande réalité : l’autonomie financière et, surtout, la péréquation sont insuffisantes. Le rapporteur pour avis, M. Bernard Saugey, a prononcé tout à l’heure des mots forts que je voudrais relever : pour les communes, la péréquation régresse.
Nous sommes donc placés devant un paradoxe. Nous avons énormément de dotations de l’État aux collectivités dont la seule justification, pourrait-on dire, est de permettre la péréquation, puisque seul l’État peut favoriser cette redistribution ; or dans cette masse de dotations, qui est en régression, la part de la péréquation, notamment celle qui est destinée aux communes, diminue. C’est absurde !
Le système doit être réformé de façon que les dotations de l’État soient moins nombreuses, ce qui permettra une plus grande autonomie financière, et que, à l’intérieur des dotations de l’État qui subsisteront, la péréquation soit beaucoup plus forte. Depuis des années et des années, nous allons dans le sens opposé. Avez-vous, madame la ministre, l’intention d’agir enfin dans la bonne direction ?
Pour finir, j’aborderai de manière extrêmement succincte un second sujet : la fiscalité locale et les valeurs locatives.
Vous avez bien voulu indiquer il y a quelques mois, madame la ministre, que vous alliez engager une réflexion sur cette fameuse réforme des valeurs locatives qui, depuis des décennies, est totalement bloquée. J’habite dans un quartier de la ville d’Orléans – ville à laquelle je suis très attaché – qui s’appelle La Source. C’est un quartier neuf, que vous connaissez, madame la ministre. Ses habitants, que je rencontre tous les jours, ne comprennent pas pourquoi la base sur laquelle leurs impôts sont calculés est plus élevée que dans des quartiers résidentiels ou du centre-ville, par exemple. Je n’ai aucune réponse à leur apporter, sinon que le système est vétuste et que l’on n’a pas conduit les réformes nécessaires. Et quand je dis « on », madame la ministre, c’est un « on » très collectif : nous connaissons tous très bien l’histoire ! Il reste qu’il faudra, un jour ou l’autre, faire des choix courageux et revenir à une plus grande justice.
Monsieur Fourcade, j’évoquais tout à l’heure les observations que vous avez formulées au sujet des collectivités locales : je les ai appréciées ! J’espère que vous sentez qu’il y a quelque ironie dans mon propos, car je crois que nos élus locaux ont la sagesse de gérer leur fiscalité en toute autonomie.
C’est à l’État qu’il faudrait rappeler la nécessité d’élaborer une fiscalité plus juste, car c’est par la loi qu’il doit être mis fin le plus vite possible à cette véritable injustice que continue de faire peser sur des foyers modestes la grande inégalité de la fiscalité locale. L’initiative en revient au Gouvernement, à qui s’impose l’ardente nécessité de la réforme des valeurs locatives. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Madame la ministre, tout à l’heure a été prononcé à plusieurs reprises le mot « péréquation ». J’aborderai aujourd’hui un sujet que je n’ai pas l’habitude de traiter, du moins à cette tribune, mais je le ferai avec beaucoup de conviction, et aussi avec beaucoup d’inquiétude.
Le conseil général du département de la Haute-Loire, comme les autres, a récemment procédé au débat d’orientation budgétaire. Je ne siège plus au conseil général depuis quelques mois, mais, bien évidemment, je continue de suivre ce qui s’y passe. Or ce que j’ai lu dans la presse, ce que l’on m’a rapporté, m’a beaucoup inquiété, et je vais, madame la ministre, sachant que vous y serez attentive, vous exposer pourquoi.
Vous le savez, la péréquation départementale s’organise autour de deux dotations qui font partie de la DGF, mais qui prennent en compte le potentiel financier des départements dans la détermination des montants versés : la dotation de péréquation urbaine, ou DPU, et, bien sûr, la dotation de fonctionnement minimale, ou DFM. Vous aurez compris que c’est cette dernière qui retient mon attention.
La DFM est attribuée aux départements qui ne répondent pas aux critères démographiques d’éligibilité à la DPU et dont le potentiel financier par habitant est inférieur à deux fois la moyenne des départements non urbains. Il en résulte que l’ensemble des départements non éligibles à la DPU bénéficient de la DFM : ces deux dotations sont exclusives l’une de l’autre.
Il y a quelque temps, on a élargi le champ des bénéficiaires de la DFM, et les bénéficiaires historiques, ceux dont la situation a justifié la création de la dotation, se sont trouvés en quelque sorte lésés – je cherchais un mot plus fort, mais je ne l’ai pas trouvé. Quoi qu’il en soit, il est bien évident que leur situation ne s’est pas améliorée.
Le Comité des finances locales a décidé de taux d’évolution identiques pour la DFM et la DPU : 6,94 %, soit 744 millions d’euros pour la DFM et 555 millions d’euros pour la DPU. Toutefois, en ce qui concerne le département de la Haute-Loire, il est bon qu’on le sache – je n’aime pas beaucoup évoquer les cas particuliers, mais la situation me paraît suffisamment grave pour le faire –, la DFM n’a augmenté que de 0,02 % en 2008 par rapport à 2007, contre 6,94 % en moyenne nationale.
Ainsi, malgré l’accroissement des sommes qui leur sont consacrées, l’effet péréquateur des dotations de péréquation départementales semble donc avoir globalement diminué. Au demeurant, je constate qu’une étude récente réalisée pour le Comité des finances locales par le Conseil d’analyse stratégique donne des résultats qui confortent un peu, en moins dramatique, bien entendu, ce que j’ai pu observer dans mon département. Au total, selon cette étude, l’effet péréquateur est passé de 50,6 % en 2001 à 47,7 % en 2006. L’évolution est donc préoccupante.
L’article 67 du projet de loi de finances pour 2009 prévoit – vous l’aviez signalé dans un débat récent, madame la ministre – le resserrement du seuil d’éligibilité des départements à la DPU pour rendre celle-ci plus efficace.
On ne fait rien pour la DFM, qui reste répartie entre un grand nombre de départements.
Je souhaite, madame la ministre, que l’on tienne compte de la situation des départements ruraux difficiles comme le mien. Le département de la Haute-Loire a le deuxième plus faible potentiel financier des départements français, alors qu’il ne figure qu’au quarantième rang pour l’importance de la DGF par habitant. Il y a donc bien quelque chose qui ne va pas !
Madame la ministre, je citerai quelques chiffres, et pour mesurer la situation d’un département comme le mien, je mettrai en parallèle le coût net par habitant de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, c’est-à-dire une fois déduite la participation de l’État, et le produit net des droits de mutation. Certes, les droits de mutation diminuent, mais je prendrai les chiffres de 2006, faute d’en avoir d’autres, car ils me paraissent extrêmement intéressants. Ne voulant nuire à personne, je ferai référence uniquement au département de la Haute-Loire.
En Haute-Loire : coût net de l’APA par habitant, 60 euros ; produit net des droits de mutation, 62 euros. Dans tel autre département : coût net de l’APA, 66 euros ; produit net des droits de mutation, 292 euros. Dans un autre encore : coût net de l’APA, 32 euros ; produit net des droits de mutation, 125 euros. En voici un qui est aussi défavorisé que mon département : coût net de l’APA, 76 euros ; produit net des droits de mutation, 52 euros. Et dans un autre : coût net de l’APA, 33 euros ; produit net des droits de mutation, 197 euros. Le dernier département auquel je ferai allusion est pourtant un département dont on se préoccupe beaucoup et qui n’a pas la réputation d’être oublié ; il s’agit d’un département de la région parisienne dont je tairai le nom : coût net de l’APA, 44 euros ; produit net des droits de mutation, 103 euros.
Il y a donc bien un problème, madame la ministre, sur lequel je souhaite attirer votre attention.
La péréquation est un acte de solidarité. Pour ma part, je crois à la solidarité nationale ! Des mesures doivent être prises pour renforcer la cohésion nationale. Cela vaut à la fois pour les habitants et pour les collectivités.
Je sollicite une attention toute particulière pour un département comme la Haute-Loire, non pas parce que c’est le mien, mais parce qu’il est parfaitement injuste qu’il soit, à l’instar d’autres départements, traité de la sorte, si l’on rapporte les dotations dont il dispose à celles dont bénéficient d’autres départements. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Depuis la crise provoquée en Guyane par le coût excessif du carburant, vous ne cessez, madame la ministre, ainsi que M. le secrétaire d’État chargé de l'outre-mer, d’avancer que le taux de la taxe sur les carburants appliqué en Guyane est trop élevé et qu’il devrait être ramené au niveau du taux qui est appliqué dans les autres départements d’outre-mer, seule solution pour parvenir à une réelle baisse et à un prix supportable pour les consommateurs de Guyane.
M. le secrétaire d’État chargé de l'outre-mer a carrément jeté en pâture aux médias locaux les élus du conseil régional et du conseil général de Guyane, qualifiés « d’irresponsables », car ils refuseraient, selon lui, de prendre leurs responsabilités, alors que vous, vous auriez pris les « vôtres ».
Quelles responsabilités avez-vous prises, madame la ministre ?
Vous avez fait pression sur la SARA, société qui détient le monopole de la distribution, pour l’obliger à baisser son prix de trente centimes d’euros, prix administré entre cette dernière et vos services, mais que vous-même jugez suspect puisque vous vous êtes engagée à dépêcher sur place une « mission vérité des prix ».
S’exprimer ainsi témoigne déjà d’un manque flagrant de respect à l’égard d’élus dont le seul tort serait peut-être de ne pas être du même bord politique que vous. Mais c’est aussi révélateur d’une méconnaissance de la question des finances locales de Guyane, voire d’une totale indifférence à l’égard de la situation financière de nos collectivités.
Pourtant, le chef de l’État lui-même l’avait bien compris quand il déclarait à Cayenne, il n’y a pas si longtemps, en janvier 2008 : « Les collectivités locales doivent jouer pleinement leur rôle en matière d’aménagement du territoire et d’accompagnement des projets structurants [...] Mais je sais parfaitement qu’en Guyane, les collectivités locales connaissent des difficultés matérielles importantes.
« Au cours des dernières années, des mesures spécifiques ont été prises, notamment pour adapter les critères d’attribution de certaines dotations. Mais visiblement cela ne suffit pas [...] ».
Ces phrases sont la reconnaissance explicite, au plus haut niveau, que les dotations de l’État en faveur de la Guyane doivent être revues à la hausse. En effet, celles-ci ne représentent que 20 % des recettes de fonctionnement, contre 29,5 % en moyenne hexagonale.
Par ailleurs, les recettes fiscales directes sont, elles aussi, beaucoup plus faibles : 22 %, contre 39 % en moyenne hexagonale, en raison non seulement de la faiblesse des bases d’imposition due à la situation économique de la Guyane, mais aussi des exonérations particulières concernant le domaine privé de l’État – il est propriétaire de 90 % du territoire – et une partie du secteur spatial. Il faut le savoir et en tenir compte !
La fiscalité indirecte est donc devenue la variable d’ajustement, la recette qui permet aux collectivités de suivre tant bien que mal le rythme élevé des dépenses publiques : 6,30 % en moyenne annuelle pour les recettes, contre 8,3 % pour les dépenses, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé et des équipements.
Cet effet de ciseau a entraîné de fait une dégradation du taux de couverture des dépenses : de 119 % en 2002, on atteint à peine 100 % aujourd'hui, un niveau insuffisant pour participer aux cofinancements exigés pour mobiliser des ressources extérieures ; un problème se posera quand il faudra mobiliser les 10 millions d’euros que vous vous êtes engagés à nous accorder, sur les 16 millions d’euros de crédits de paiement du fonds exceptionnel d’investissement destiné à tout l’outre-mer. Tant mieux pour la Guyane si la « promesse » est tenue !
Un rééquilibrage des sections de fonctionnement semble donc nécessaire pour redonner des marges d’autofinancement suffisantes aux collectivités. Or, en leur demandant de diminuer le taux de la taxe sur le carburant, vous les contraignez à aggraver une situation déjà fragile et à accroitre, pour certaines d’entre elles, leur déficit.
La taxe sur les carburants ainsi que l’octroi de mer sont pour l’heure et à leur niveau indispensables à ces collectivités tant sur le plan budgétaire que sur celui de la trésorerie en raison des versements mensualisés y afférents. Diminuer ces produits, c’est les entraîner vers la chambre régionale des comptes, quand elles ne sont pas déjà sous tutelle.
Il faut donc revoir votre approche des finances des collectivités locales de Guyane. Si celles-ci doivent nécessairement passer par un rééquilibrage de leur section de fonctionnement, la solution ne doit pas consister uniquement dans les prêts de restructuration, qui sont déjà octroyés à certaines d’entre elles.
S’agissant de « prêts » – j’insiste sur ce terme –, certaines communes ne pourront pas en bénéficier, car elles connaissent une situation de déficit structurel et ne disposent pas, en conséquence, de l’épargne nécessaire pour rembourser un prêt.
La véritable solution passe, comme le laissait entendre le Président de la République, par une révision des mécanismes de garantie qui assortissent plusieurs dotations et qui sont fondés sur des critères peu opérants pour la Guyane. Il faudrait insister davantage que ne le font les dotations actuelles sur des critères relatifs aux charges des collectivités, pour autant que celles-ci soient structurelles, comme le revenu moyen par habitant, le nombre d’élèves scolarisés sur le territoire, la longueur de la voirie, le nombre de logements sociaux, la situation sociodémographique – la pyramide des âges des populations guyanaises, avec sa base très élargie, n’a rien à voir avec les standards nationaux –, la superficie du territoire commercial, l’enclavement, les particularités géographiques, le nombre de constructions scolaires chaque année, qui atteint en Guyane des sommets exceptionnels, l’éloignement par rapport au chef-lieu.
Le Comité des finances locales, saisi par le Gouvernement d’une demande d’avis et de propositions dans le cadre de la DGF, tout en prenant la bonne mesure de la situation, a préféré éluder la question des critères spécifiques dans son rapport rendu en mai 2004. Il arguait du fait qu’il ne paraissait pas envisageable de complexifier la répartition de l’ensemble de la DGF en retenant des critères particuliers pour le calcul de l’enveloppe globale outre-mer elle-même.
Mais ce même comité s’est montré favorable à la proposition du ministère de l’outre-mer de l’époque de créer une dotation spécifique outre-mer, en dehors du cadre de la DGF, qui permettrait de mieux prendre en compte certaines particularités ultramarines. Il serait intéressant que cette bonne proposition soit retenue.
J’ai d’ailleurs noté avec satisfaction qu’un engagement avait été pris dans le protocole d’accord de fin de conflit, signé entre le préfet et les responsables des collectivités territoriales de Guyane, pour la constitution d’un groupe de travail, avec l’objectif de trouver, d’ici à juillet 2009, des ressources pérennes adaptées à nos collectivités.
Il est en effet du devoir de l’État de veiller à corriger les disparités de conditions et de moyens des institutions locales, afin de tendre vers une plus grande égalité des citoyens devant le service public sur tout le territoire.
Le cinquième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution dispose : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales. » En ce sens, les réponses ne sont pas seulement techniques : elles sont aussi politiques et la péréquation doit être un facteur essentiel de maintien de la cohésion.
Par les recettes fiscales, directes et indirectes, en 2006 – ce sont malheureusement les derniers chiffres dont je dispose – les Guyanais ont participé aux dépenses publiques locales à hauteur de 1713 euros, montant largement supérieur à la moyenne nationale de 1232 euros par habitant.
Si l’État veut réellement et rapidement agir de son côté pour l’amélioration des finances locales en Guyane, il peut déjà réparer une injustice en supprimant le plafonnement de la dotation superficiaire, mesure qui frappe uniquement la Guyane, alors même que cette dotation a été majorée jusqu’à 5 euros pour des communes de métropole.
Cette dotation superficiaire est un élément qui, pourtant, colle parfaitement à la réalité de la Guyane, prenant en compte pour une fois son trait le plus caractéristique, l’immensité de son territoire. Elle était censée rapporter 27 millions d’euros à la Guyane. Malheureusement, on a nié la réalité de sa superficie, la ramenant à 26 480 kilomètres carrés, soit moins du tiers de sa superficie réelle, qui est de l’ordre de 90 000 kilomètres carrés, nous faisant ainsi perdre plus de 18 millions d’euros.
Rétrocédez cette somme aux communes de Guyane, à leurs intercommunalités, voire à un fonds de péréquation réservé à toutes les communes de Guyane : cette somme doit leur revenir !
Pour l’heure, je ne vois dans votre budget aucune évolution notable pour les finances locales de Guyane, madame le ministre. En l’état, je ne le voterai donc pas. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, soyons clairs : aujourd'hui, État et collectivités locales sont confrontés aux mêmes défis.
M. Pierre-Yves Collombat. À cause de qui ?
M. Pierre-Yves Collombat. Qui a voulu la mondialisation ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … implique l’adaptation de notre économie, nationale ou locale, à la nouvelle donne mondiale.
Par ailleurs, nous devons tous relever le défi de la crise financière, …
M. Pierre-Yves Collombat. Qui l’a créée ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … car nous sommes confrontés à une restriction des liquidités et à une défiance qui exigent la mobilisation de tous.
Nous sommes également confrontés, aux niveaux local et national, au défi du vieillissement démographique. Le poids des dépenses en matière de santé et de retraite devrait croître d’un peu plus de trois points de PIB entre 2005 et 2050.
Face à ces défis – car il faut envisager l’avenir ! –, nous avons fait le choix, avec ce projet de loi de finances pour 2009, de la lucidité, du pragmatisme, de la responsabilité, mais aussi du travail en commun.
Il ne s’agit pas, madame Mathon-Poinat, de stigmatiser de quelque manière que ce soit les collectivités territoriales. Encore une fois, nous sommes tous dans le même bateau ! Je le sais aussi bien en tant qu’élue locale que comme membre du Gouvernement.
Agir ensemble implique une action commune pour maîtriser l’évolution des finances publiques, qu’il s’agisse des dépenses nationales ou de celles des collectivités. Tel est d’ailleurs le sens des mesures que vous avez adoptées, mesdames, messieurs les sénateurs, dans la première partie du projet de loi de finances pour 2009.
Cela exige aussi que nous modernisions ensemble la vie publique locale ; c’est l’objectif que j’ai retenu pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Cela passe par un partenariat d’avenir, en élaborant un avenir commun qui soit empreint non seulement de solidarité, mais également de responsabilité et, bien entendu, de confiance. Car il ne saurait y avoir de partenariat sans confiance.
Un partenariat d’avenir suppose une plus grande solidarité. Je ne reviendrai pas sur l’évolution d’ensemble des concours financiers qui ont déjà été votés, M. Jarlier l’a rappelée tout à l'heure. Je rappellerai simplement que ces concours évolueront de 2 % en 2009, soit 276 millions d’euros de plus que l’inflation annoncée ; c’est la seule référence que je connaisse et ce n’est pas moi qui en fixe le taux !
Dans cette évolution d’ensemble, j’ai fait le choix de soutenir particulièrement l’effort de solidarité envers les collectivités qui en ont le plus grand besoin. C’est ainsi que le pouvoir d’achat de la DGF sera préservé, puisque celle-ci reste indexée sur 2 %, même si la prévision de l’inflation a été ramenée à 1,5 % en 2009. Cela représente 200 millions d’euros de plus par rapport à l’inflation prévue – pas par moi, encore une fois –, alors que nous avions annoncé l’année dernière un alignement de la DGF sur l’inflation prévisionnelle.
Les dotations de solidarité seront les premières à bénéficier de la progression de la DGF. Les aménagements de la dotation forfaitaire des communes permettront d’augmenter de 107 millions d’euros les dotations de solidarité, ce qui n’est pas rien !
L’indexation de la DGF permettra de prendre en compte le recensement de la population.
Les collectivités locales dont la population a augmenté verront leur DGF augmentée en conséquence. C’est vrai pour les communes comme pour les départements, ainsi que pour l’intercommunalité, qui bénéficie, elle aussi, directement des effets du recensement. Comme la dotation de l’intercommunalité dépend du nombre d’habitants, celle-ci bénéficiera l’an prochain de 32,4 millions d’euros supplémentaires, du seul fait de l’augmentation de la population.
Évidemment, des difficultés se posent à plusieurs niveaux.
Pour les communes dont la population baisse de 10 % ou plus, le Gouvernement a soutenu l’amendement proposé par la commission des lois et la commission des finances de l’Assemblée nationale, tendant à permettre une adaptation progressive des budgets grâce à une baisse plus graduelle de la dotation forfaitaire.
L’année dernière, déjà, j’avais proposé que la dotation globale de fonctionnement progresse au même rythme que les années précédentes, soit la prise en compte de l’inflation augmentée d’une croissance de 0,5 %. En effet, je sais parfaitement, pour avoir moi-même à gérer des budgets, qu’il est particulièrement difficile de devoir s’adapter en l’espace de deux mois, surtout lorsque les revenus sont moindres à cause d’une diminution de la population.
J’entends bien les inquiétudes exprimées par les maires, qui souhaiteraient que l’on tienne compte des recensements complémentaires réalisés après 2006.
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Messieurs Jarlier, Dallier et Jégou, je comprends vos préoccupations, car il s’agit souvent de populations supplémentaires disposant de faibles moyens. Mais il n’est pas facile de trouver une solution. De toute façon, ce que l’on donne d’un côté, on le reprend de l’autre !
Sur le plan des principes, on ne peut faire coexister des estimations différentes pour un même critère : 2006, pour certaines communes ; 2007 ou 2008, pour d’autres. Ce ne serait pas très lisible, d’autant que se poserait alors un problème d’égalité, selon que les communes auraient eu ou pas un recensement intermédiaire.
De plus, le Comité des finances locales a rappelé que le fait d’accorder un avantage à certaines collectivités se ferait au détriment des dotations de péréquation. Bref, la situation n’est pas simple ! Ce comité devant se prononcer sur les critères retenus pour la DSU, on pourrait aussi lui demander de réfléchir à la manière de mieux prendre en compte l’augmentation de la population qui intervient, notamment, après les recensements complémentaires.
Au-delà de la prise en compte générale des augmentations ou des baisses de population, l’effort de solidarité doit être mieux ciblé ; c’est la condition de son efficacité. Le saupoudrage n’aboutit pas à grand-chose !
Le Président de la République a souhaité engager une réforme ambitieuse de la dotation de solidarité urbaine. J’ai proposé de concentrer les aides sur les communes qui en ont le plus besoin, car en couvrant les trois quarts des communes, on n’aide pas vraiment celles qui sont le plus en difficulté.
Certains élus ont considéré que leurs dotations allaient diminuer de manière importante avec les nouveaux critères retenus et ont estimé qu’ils seraient dans une situation financière impossible si ces derniers étaient appliqués dès 2009.
J’ai donc proposé des aménagements, qui ne remettent en rien la réforme en cause, mais qui permettent de la mettre en place plus progressivement, de manière à tenir compte des situations les plus difficiles. Ces propositions ont été acceptées à l’unanimité par les associations d’élus.
Dès 2009, une première étape sera franchie en faveur des 150 villes les plus en difficulté : elles bénéficieront de l’essentiel de la progression des 70 millions d’euros, une progression qui a d’ailleurs toujours été prévue ! Contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, il n’a jamais été question de diminuer la DSU.
Pour les autres villes, 2009 sera une année de transition, tant pour celles qui connaîtront une augmentation de leur dotation que pour celles qui sortiront du dispositif.
Ainsi, 327 communes appartenant à la première moitié des communes les plus défavorisées bénéficieront d’une augmentation de 2 %, soit un taux supérieur à l’inflation. Pour les autres, le montant de la DSU sera garanti à hauteur de celui de l’an dernier. J’ai déposé un amendement en ce sens, qui vous sera soumis tout à l'heure.
Pour les départements, j’ai proposé de renforcer la solidarité exercée par le biais de la dotation de péréquation urbaine, la DPU : elle est aujourd'hui perçue par les 33 départements urbains, dont deux départements ont un potentiel fiscal plus important. Le projet de loi de finances prévoit d’aider davantage les départements les plus défavorisés.
Monsieur Gouteyron, je sais votre attachement, que je partage, aux départements ruraux. La péréquation pour les départements ruraux n’est pas oubliée. Elle bénéficiera des aménagements apportés à la DGF : le Comité des finances locales pourra choisir une indexation forte pour la péréquation.
S’agissant de la Haute-Loire, je tiens à vous assurer que ce département n’est pas pénalisé par la réforme de 2005 : il perçoit une dotation de fonctionnement minimale de 43 euros par habitant, contre une moyenne de 28 euros.
Certes, il ne faut pas ignorer les difficultés spécifiques à certains départements ruraux, qui cumulent un certain nombre de handicaps, notamment en matière de voirie ou de climat. Je pense que le Comité des finances locales tiendra compte de certaines réalités
Monsieur Jarlier, le groupe de travail avec l’Association des régions de France n’est pas parvenu à dégager des conclusions dans les délais de préparation du projet de loi de finances. Je regrette que les régions n’aient pas abouti à un consensus, mais nous continuons d’y travailler.
En outre, des dispositifs nouveaux seront mis en place pour répondre aux problématiques particulières de certaines communes.
Ainsi, les communes les plus fragiles connaîtront une baisse moindre de leur dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP.
Par ailleurs, une dotation de développement urbain est créée pour aider à financer des équipements ou des actions de première importance.
Monsieur Sueur, j’ai bien entendu votre critique concernant les modalités d’attribution de la DGF. Mais nous voulons précisément favoriser un certain nombre d’actions prioritaires, comme nous le faisons pour la DGE. Je vous rappelle que, concernant la DGE, les critères d’attribution procèdent d’une discussion entre les élus locaux et le préfet, lequel les transmet ensuite. Dans la même logique, nous proposons un partenariat. Je ne savais pas que la DGE représentait, dans ses modes d’attribution, une recentralisation au bénéfice de l’État.
M. Jean-Pierre Sueur. Pour la DGF, on ne discute pas !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je vous parle non pas de la DGF, mais de la DGE, qui ressemble beaucoup plus à ce que l’on veut faire avec la dotation de développement urbain dans la mesure où elle est essentiellement destinée à des investissements et, éventuellement, à quelques actions spécifiques !
Je vous rappelle tout de même que le montant de la DDU s’élève à 50 millions d’euros, une somme non négligeable.
Monsieur Saugey, je souhaite qu’un partenariat réel soit établi avec la centaine de communes prioritaires, qui seront identifiées en fonction de leurs ressources et de leurs charges.
Un fonds d’accompagnement de 5 millions d’euros est créé pour les communes qui, du fait des restructurations de la Défense, perdront une part importante de leur population. Il ne s’agit évidemment pas d’une compensation des départs mise en place par le ministère. Nous voulons simplement accompagner les communes pour leur permettre d’adapter leur budget à leur nouveau périmètre. Il s’agit donc d’une aide supplémentaire !
Monsieur Patient, vous souhaitez que les collectivités de Guyane bénéficient d’une aide plus soutenue. Vous avez eu l’honnêteté de le reconnaître : tel est le sens de la démarche engagée par Yves Jégo et moi-même au travers des dispositions inscrites dans le protocole d’accord sur le prix du carburant. Nous poursuivrons notre réflexion. Yves Jégo a d’ailleurs proposé la constitution d’un groupe de travail sur les finances des collectivités locales, spécifiquement en Guyane.
Mesdames, messieurs les sénateurs, un partenariat d’avenir passe par plus de responsabilité et de confiance.
La responsabilité consiste à clarifier aujourd’hui les compétences. Nous le savons tous, il est illusoire de dire qu’il ne faut rien modifier.
Notre système est devenu complexe et coûteux. Redondances et confusion des compétences sont une source d’inefficacité et d’illisibilité pour nos concitoyens et pour certains de nos élus.
Le Comité pour la réforme des collectivités locales présidé par Édouard Balladur examine diverses voies, dans un souci d’ouverture et de pluralisme.
Cela a été dit, les compétences clarifiées devront s’accompagner de ressources réajustées.
Ma conviction profonde, je vous l’ai toujours dit, c’est qu’il faut simplifier le système fiscal pour qu’il corresponde mieux aux compétences exercées. Dès lors que nous clarifierons les compétences lors des discussions menées au terme du comité Balladur, il faudra adopter un système fiscal plus simple, plus lisible et plus responsabilisant, garantissant mieux l’autonomie financière et la visibilité des ressources des collectivités, car ce sont elles qui doivent avoir la maîtrise de l’essentiel des financements. Monsieur Sueur, c’est ainsi qu’il y aura une vraie responsabilité ! Dès que le comité Balladur aura rendu ses conclusions, nous y travaillerons.
La réforme des valeurs locatives sera examinée dans le cadre de cette réflexion d’ensemble. Voilà trente ans que l’on en parle, sans rien faire !
M. Jean-Pierre Sueur. Quarante ans !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Au demeurant, une telle réforme ne peut être séparée de celle de la fiscalité. Nous ferons ce travail ensemble ! D’ores et déjà, un groupe de travail s’est réuni avec les associations d’élus pour avancer très concrètement sur ce sujet, dès la remise des conclusions du comité Balladur.
Il ne peut y avoir de vrai partenariat sans confiance ni de confiance sans transparence. Pour ma part, j’ai cette volonté de transparence. J’ai entendu certains propos, que je qualifierai d’habituels…
M. Pierre-Yves Collombat. Il est dommage qu’ils soient habituels !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Ma devise, c’est bien faire et laisser dire ! Certains propos sont outranciers, polémiques…
M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas outrancier, c’est la vérité !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je ne suis pas là pour polémiquer ! je suis là pour avancer et pour établir un véritable partenariat et une réelle transparence !
M. Pierre-Yves Collombat. Pas du tout !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. La transparence suppose de mieux associer les collectivités territoriales dans les instances de pilotage et de décision. Je vous ferai remarquer que, depuis dix-huit mois, il n’a jamais été autant fait en ce sens. C’est l’enjeu de la Conférence nationale des finances publiques et de la Conférence nationale des exécutifs ; c’est l’objectif de la Commission consultative d’évaluation des normes, présidée par M. Alain Lambert, dont j’avais souhaité la création dès ma première intervention au Sénat.
Monsieur Chevènement, c’est aussi dans le souci d’associer les collectivités que j’avais proposé au Comité des finances locales une réflexion sur le fonctionnement du FCTVA. J’entends en effet un certain nombre de personnes regretter un manque de clarté en la matière, concernant notamment les critères retenus. Pour ma part, je souhaite que l’on puisse mieux soutenir l’investissement des collectivités. Il y a toujours intérêt à discuter ! On peut ne pas être d’accord, mais nous devrions être capables de dresser un bilan commun, afin de réfléchir sur la manière d’améliorer la situation.
La politique de croissance implique la participation des collectivités. Le Président de la République a totalement intégré cette idée, monsieur Fourcade, dans le plan de relance pour notre économie qu’il a annoncé hier. Premiers investisseurs publics, les collectivités territoriales y ont toute leur place.
Les actions des collectivités qui accepteront d’investir plus seront soutenues par le biais d’un remboursement anticipé et définitif du FCTVA, estimé à 2,5 milliards d’euros, ce qui n’est pas négligeable.
Monsieur Chevènement, cet engagement fort du Gouvernement en faveur de l’investissement local devrait être reconnu.
La réforme de la taxe professionnelle, souhaitée par le Président de la République, s’inscrit aussi dans la perspective de mieux soutenir l’activité de nos entreprises et les investissements. L’exonération des investissements réalisés entre octobre 2008 et le 1er janvier 2010 aura un effet immédiat sur l’économie.
Monsieur Chevènement, vous avez sans doute raison de critiquer la contradiction qu’il peut y avoir entre un projet de loi de finances « restrictif » – c’est votre propre terme ! –, pour ce qui concerne les concours aux collectivités locales, et le plan de relance tel qu’il est aujourd’hui présenté.
Au-delà des effets de rhétorique, ce qui importe, dans les circonstances actuelles de crise financière, devenue crise économique, c’est que le Gouvernement garantisse 5 milliards d’euros de concours aux collectivités locales, via les banques et la Caisse des dépôts et consignations.
Ce qui importe, c’est que le Gouvernement ait veillé au risque des « produits toxiques » dans l’endettement des collectivités. Je vous rappelle la rencontre que j’ai organisée avec Mme Lagarde, pour aider les collectivités qui en avaient besoin et veiller à ce qu’elles ne manquent pas de financement, en cas de repli des banques sur elles-mêmes. Tout cela fait l’objet d’un suivi permanent ; une réunion s’est encore tenue hier à ce propos.
Ce qui importe, c’est que le Gouvernement ait mis en œuvre un plan de relance facilitant, notamment par le biais du FCTVA, un plan massif et immédiat d’investissement.
Le Président de la République et le Gouvernement ont réagi vite et fort, face à une situation effectivement préoccupante, et c’est ce qui compte ! C’est ce qu’attendent les Français ! Il est bien dommage, dans ce débat, de n’entendre aucune autre proposition, émanant notamment de l’opposition.
M. Pierre-Yves Collombat. On peut en faire !
M. Pierre-Yves Collombat. Augmentez la DGE et on investira !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, solidarité, responsabilité, confiance, transparence : tels sont les fondements du partenariat que je souhaite mettre en place depuis toujours entre l’État et les collectivités territoriales. Il est le gage d’une action efficace au service des Français. Tel est l’objectif que se fixe le Gouvernement et tel est le sens de mon action. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », figurant à l’État B.
État B
(En euros) |
||
Relations avec les collectivités territoriales |
2 486 322 145 |
2 411 187 026 |
Concours financiers aux communes et groupements de communes |
802 190 999 |
739 565 268 |
Concours financiers aux départements |
488 303 371 |
484 877 288 |
Concours financiers aux régions |
799 665 079 |
799 665 079 |
Concours spécifiques et administration |
396 162 696 |
387 079 391 |
M. le président. L'amendement n° II-196, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux communes et groupements de communes |
|
|
|
|
Concours financiers aux départements |
563 702 |
|
563 702 |
|
Concours financiers aux régions |
12 837 903 |
|
12 837 903 |
|
Concours spécifiques et administration |
10 159 015 |
|
10 159 015 |
|
TOTAL |
23 560 620 |
23 560 620 |
||
SOLDE |
+ 23 560 620 |
+ 23 560 620 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il s’agit d’augmenter de 23,56 millions d’euros les montants prévus dans le projet de loi de finances, pour tenir compte des derniers chiffres disponibles sur les transferts de personnel.
Je l’ai évoqué rapidement tout à l’heure, un certain nombre de transferts étant effectués dans le cadre de la décentralisation, ces ajustements sont nécessaires.
Par ailleurs, la dotation générale de décentralisation de La Réunion est augmentée de 10,4 millions d’euros au titre du transfert de la voierie nationale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement de coordination avec des amendements, d’ores et déjà adoptés, visant à supprimer certains crédits d’autres missions.
La commission des finances est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », figurant à l’état B.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la ministre, je souhaiterais simplement obtenir de votre part une confirmation.
Tout à l’heure, lors de l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », vous nous avez proposé un amendement, qui répondait à nos vœux, visant à doter les crédits des titres sécurisés, c'est-à-dire ceux qui permettront d’indemniser les communes acceptant de sous-traiter, en quelque sorte, des travaux qui, jusque-là, incombaient aux préfectures ou sous-préfectures, pour la délivrance des passeports et des cartes nationales d’identité.
Or il est nécessaire de prévoir un complément de crédits, puisque le coût de chaque machine va passer de 3 200 euros à 5 000 euros. Ainsi, la dotation, qui avoisinait les 6 millions d’euros, va devoir être portée à 10 millions d’euros. J’aimerais que vous nous confirmiez, madame la ministre, que vous prendrez toutes les mesures nécessaires au sein du programme 119.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission, modifiés.
M. Pierre-Yves Collombat. Le groupe socialiste vote contre.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Le groupe CRC-SPG vote également contre.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : avances aux collectivités territoriales
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales », figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Avances aux collectivités territoriales |
85 794 800 000 |
85 794 800 000 |
Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie |
6 800 000 |
6 800 000 |
Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes |
85 788 000 000 |
85 788 000 000 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de ce compte spécial.
M. Pierre-Yves Collombat. Le groupe socialiste vote contre.
M. le président. J’appelle en discussion les amendements sur les articles 67 à72, ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Article additionnel avant l'article 67
M. le président. L'amendement n° II-49, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Avant l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les dotations par habitant de l'État aux communautés de commune, communautés d'agglomération et communautés urbaines seront, dans les trois années suivant l'entrée en vigueur de la présente loi, amenées à être identiques en vue de préserver l'égalité des Français vis-à-vis des niveaux de subvention par habitant.
Un décret en Conseil d'État précise les modalités de cette évolution.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 67
I. – Le onzième alinéa de l’article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En 2009, le complément de garantie dû à chaque commune correspond à son montant de 2008 diminué de 2 %. »
I bis. – L’article L. 2334-9 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2334-9. – En 2009, lorsque la population d’une commune définie au deuxième alinéa de l’article L. 2334-2, authentifiée au 1er janvier 2009, est inférieure de 10 % ou plus à celle de 2008, la dotation de base prévue au 1° de l’article L. 2334-7 revenant à cette commune est majorée d’un montant égal à 50 % de la différence entre le montant de la dotation de base qu’elle a perçue en 2008 et le montant de la dotation qu’elle devrait percevoir en 2009. »
II. – Le quatrième alinéa de l’article L. 2334-13 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En 2009, cette garantie de progression est calculée de telle sorte que le total des attributions revenant aux communes d’outre-mer au titre de la dotation globale de fonctionnement, hors les montants correspondant au complément de garantie prévu au 4° de l’article L. 2334-7, progresse au moins comme l’ensemble des ressources affectées à cette dotation. »
III. – La deuxième phrase du cinquième alinéa de l’article L. 3334-3 du même code est ainsi rédigée :
« Ces taux sont au plus égaux, pour la dotation de base et sa garantie, respectivement à 70 % et 50 % du taux de croissance de l’ensemble des ressources de la dotation globale de fonctionnement. »
IV. – L’article L. 3334-6-1 du même code est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « au double du » sont remplacés par les mots : « à 1,5 fois le » ;
2° Le dixième alinéa est supprimé ;
3° Au douzième alinéa, les mots : « des deux précédents alinéas » sont remplacés par les mots : « du précédent alinéa », et les mots : « ces alinéas » sont remplacés par les mots : « cet alinéa ».
V. – Après les mots : « chaque année », la fin de la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 3334-7-1 du même code est ainsi rédigée : « selon un taux fixé par le comité des finances locales au plus égal au taux d’évolution de la dotation globale de fonctionnement mise en répartition. »
VI. – La deuxième phrase du dernier alinéa de l’article L. 4332-8 du même code est complétée par les mots : «, après prélèvement de la quote-part consacrée aux régions d’outre-mer ».
VII. – Le II de l’article L. 5211-29 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ne peut être inférieure » sont remplacés par les mots : « est au plus égale » ;
2° À la dernière phrase du quatrième alinéa, les mots : « au moins » sont supprimés.
VIII. – Les deuxième et troisième alinéas du I de l’article L. 5211-30 du même code sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« À compter du 1er janvier 2009, la somme affectée à la catégorie des communautés urbaines est répartie de telle sorte que l’attribution revenant à chacune d’entre elles soit égale au produit de sa population par la dotation moyenne par habitant de la catégorie des communautés urbaines, augmenté, le cas échéant, d’une garantie.
« En 2009, cette dotation moyenne est fixée à 60 € par habitant.
« Les communautés urbaines ayant perçu, au titre de cette même catégorie, en 2008, une attribution de la dotation d’intercommunalité bénéficient d’une garantie, lorsque le montant prévu au 1° ci-dessous est supérieur au montant prévu au 2°. Elle est égale en 2009 à la différence entre :
« 1° Le montant de la dotation d’intercommunalité perçue par la communauté urbaine en 2008, indexé selon un taux fixé par le comité des finances locales, qui ne peut excéder le taux d’évolution pour 2009 de la dotation forfaitaire prévue à l’article L. 2334-7 ;
« 2° Le produit de sa population au 1er janvier 2009 par le montant moyen mentionné au troisième alinéa du présent I.
« À compter de 2010, le montant de l’attribution totale par habitant due à chaque communauté urbaine évolue chaque année selon un taux fixé par le comité des finances locales dans la limite du taux d’évolution de la dotation forfaitaire prévue à l’article L. 2334-7. »
IX. – Après les mots : « chaque année », la fin de l’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 5211-33 du même code est ainsi rédigée : « selon un taux fixé par le comité des finances locales au plus égal au taux d’évolution de la dotation forfaitaire prévue à l’article L. 2334-7. »
X. – Après le mot : « commune », la fin de l’article L. 5334-17 du même code est ainsi rédigée : « , visée au deuxième alinéa de l’article L. 2334-2, une population égale à la différence de population entre 2008 et 2009, minorée de 20 % en 2009, 40 % en 2010, 60 % en 2011 et 80 % en 2012. Cette majoration est supprimée à compter de 2013. Elle cesse également de s’appliquer, par anticipation, à une commune, dès la première année où sa population, authentifiée par décret, atteint ou dépasse son niveau de 2008. »
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, sur l’article.
M. Philippe Dallier. Madame la ministre, je souhaite tout d’abord vous remercier d’avoir évoqué tout à l’heure le problème qui se posera effectivement aux collectivités locales qui ont vu leur population augmenter à la suite d’un recensement complémentaire. Je rappelle que l’augmentation doit être supérieure à 15 % pour être comptabilisée.
Un certain nombre de collectivités ont effectué ces recensements complémentaires en 2005 et 2006 et ont donc bénéficié, en 2006, 2007 et 2008, d’une dotation plus importante. Malheureusement, en 2009, avec l’application du nouveau mode de calcul de l’INSEE, ces collectivités vont perdre le bénéfice de ces populations, qui existent pourtant bel et bien dans leurs communes.
Madame la ministre, vous avez peut-être entrouvert la porte à la discussion. Il faut que nous trouvions une solution ! Les collectivités qui seront pénalisées sont celles qui ont fait ce que le Gouvernement leur demandait, c'est-à-dire construire des logements.
Comme le disait notre excellent collègue Adrien Gouteyron, il est un peu délicat d’évoquer son propre cas. Je le ferai néanmoins, comme lui tout à l’heure.
Dans ma commune, 900 logements, dont 400 logements sociaux, ont été construits en douze ans. Le recensement complémentaire de 2006 a permis de comptabiliser 3 000 habitants de plus. Ainsi, tout à coup, ô miracle, en 2007, la commune est devenue éligible à la DSU et au Fonds de solidarité entre les communes de la région d’Île-de-France, son potentiel financier étant dès lors inférieur de 36 % à la moyenne régionale. Ainsi, 900 000 euros supplémentaires sont venus abonder le budget de la ville, soit 25 % de plus que le montant de DGF, y compris la compensation de la part « salaires », ce qui est considérable !
En 2007 et 2008, la base est la même, mais, en 2009, nous retournerons à la case départ, si rien n’est fait. Car nous allons perdre le bénéfice du recensement complémentaire. D’autres collectivités se trouvent dans cette situation : au moins trois sénateurs peuvent en témoigner dans l’hémicycle. Il n’est pas possible d’en rester là !
Il a été prévu pour les communes qui perdent une partie de leur population un « amortisseur » : si la diminution de la population est égale ou supérieure à 10 % par rapport à 2008, les communes seront aidées. Mais pour celles dont la population a augmenté, rien n’est prévu ! Elles se retrouveront pénalisées, parfois lourdement.
J’ai cosigné l’amendement que notre collègue Jean-Jacques Jégou défendra dans un instant. Nous souhaitons que, pour les deux années qui viennent, en 2009 et 2010, un « amortisseur positif » soit prévu, pour que la population réellement présente dans la commune soit prise en compte comme base de calcul, sans que soit comptabilisée ce qui pouvait être considéré comme une population fictive au moment des recensements complémentaires. Cela me paraît être la base de l’équité.
Ces communes ont fait l’effort de construire ou d’agrandir des écoles, des crèches, pour y accueillir des populations nouvelles, notamment défavorisées. On leur a donné les moyens de le faire pendant deux ans et, brusquement, on leur dirait que l’INSEE a changé son système de calcul !
En la matière, il y a eu un léger bug, madame la ministre, car on aurait dû prévoir une transition pour les collectivités qui ont réalisé ces recensements complémentaires. Il est toujours possible de rectifier le tir ! Voilà pourquoi nous pourrions adopter l’amendement que M. Jégou présentera dans un instant, en nous donnant rendez-vous en commission mixte paritaire pour procéder, autant que faire se peut, à un ajustement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, sur l'article.
M. Jean-Jacques Jégou. Les propos de M. Philippe Dallier sont frappés au coin du bon sens. Sans être redondant, je rappellerai, madame la ministre, avec beaucoup d’émotion, que les communes concernées par le recensement complémentaire ont beaucoup construit, notamment des logements sociaux. Ce faisant, elles ont répondu à la demande des gouvernements successifs.
J’entends dire, ici ou là, que l’amendement adopté par l’Assemblée nationale en faveur des communes qui ont vu leur population diminuer l’a été pour éviter que celles-ci ne subissent une rupture dans leur financement. Mais la rupture existe aussi pour les communes qui ont vu leur population augmenter et qui, en conséquence, ont construit de nouveaux équipements. Dans ma commune, j’ouvre une crèche par an !
Je suis totalement solidaire de Philippe Dallier, même si les situations de nos communes respectives divergent quelque peu. La solution qu’il vient d’exposer est d’ailleurs reprise dans un amendement que j’aurai l’occasion de présenter dans un instant.
Dans ma commune, le recensement complémentaire de 2005 a été confirmé avant la publication de la nouvelle formule de recensement en 2007. Et voilà que, pour 2009, on me dit : retour à la case 2006 ! S’il y a une iniquité, elle est bien là !
Généralement, les communes qui ont beaucoup construit sont pauvres. N’oubliez pas, mes chers collègues, qu’il y a des disparités au sein de la région d’Île-de-France ! Sont concernées les communes qui ont peu de taxe professionnelle, qui sont éligibles à la DSU et au Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France, le FSRIF, dispositif spécifique à cette région.
Avec Philippe Dallier, nous connaissons cela depuis des années. Sa commune fait encore plus figure de victime que la mienne car, tour à tour, elle entre et sort du dispositif, ce qui complique la gestion de cette collectivité qui connaît de nombreux problèmes sociaux.
Je ne siège au Sénat que depuis quatre ans, mais avec une expérience précédente à l'Assemblée nationale. En homme responsable, je souhaite que l’État réduise son déficit. Mais, en l’occurrence, il s’agit d’une discussion entre élus. Le Comité des finances locales, que préside mon ami Gilles Carrez – un homme au-dessus de tout soupçon en termes de dépense publique –, pourra très certainement nous aider à prendre une décision équitable au sein de la commission mixte paritaire.
Je demande au Gouvernement de montrer aujourd’hui qu’il est sensible à cette situation dramatique. Car si vous ajoutez 400 000 ou 500 000 euros à la perte, en deux ans, de 400 000 euros issus de la taxe additionnelle aux droits de mutation – certes, personne n’en est responsable, si ce n’est la crise – vous obtenez un manque à gagner compris entre 700 000 et 1 million d’euros, sur des budgets déjà faméliques dont la DGF est parfois inférieure de moitié à la moyenne des communes de la même strate d’un même département.
C’est donc l’ensemble de la fiscalité locale qu’il faut revoir ! Nous ne demandons aucun passe-droit. Nous voulons seulement que la DGF soit maintenue pendant deux ans au niveau de 2007 et 2008. Philippe Dallier a raison d’évoquer un bug.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-230, présenté par Mmes Beaufils, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. L’article 67 consacre, sous bien des aspects, la rupture que le Gouvernement met en œuvre dans les relations qu’il entretient avec les collectivités territoriales. Cet article, c’est un peu le tribut que les élus locaux doivent payer à l’exigence de réduction des déficits publics qui sous-tend le présent texte.
Notre profond désaccord repose sur cette orientation, parfaitement contradictoire avec la nécessité de conforter la décentralisation et le rôle qu’elle assigne aux collectivités dans l’accomplissement de leurs missions au service de nos concitoyens.
L’actualité vient d’ailleurs de nous le montrer de façon éclatante : il suffit de réécouter les orientations indiquées hier par le Président de la République pour voir à quel point elles sont en contradiction avec les dispositions de l’article 67 et les annonces effectuées.
Le fait de prolonger le pacte de stabilité des relations entre l’État et les collectivités locales et de permettre aux dotations budgétaires de progresser selon leur rythme propre, selon l’économie des textes qui les régissent, ne pouvait-il, sur le fond, supporter que les prélèvements sur recettes soient plus importants que ceux qui sont prévus dans le projet de loi de finances ?
Quelles seront les conséquences de cette orientation, largement développée dans cet article 67, qui consiste à mettre les finances locales sous la coupe de l’équilibre budgétaire de l’État ?
Elle va tout simplement placer les élus locaux en situation d’effectuer les plus mauvais choix possibles.
Elle va entraîner une réduction des effectifs de la fonction publique territoriale et diminuer les services offerts à la population, services qui sont de plus en plus attendus au moment où le tissu social dans son ensemble se déchire.
Elle va aboutir à l’externalisation de nombreuses fonctions et services, avec le risque de perdre, dans la sous-traitance au privé, la qualité de service inhérente au service public local.
Elle va avoir pour effet d’augmenter les impositions locales, bien au-delà de l’indice des prix à la consommation, plaçant ainsi les ménages les plus modestes et les familles issues des couches moyennes salariées face à un accroissement de la charge fiscale qui leur est infligée. Dans le même temps, la réforme fiscale, que tout le monde attend, ne voit toujours pas le jour, s’agissant tout au moins des impositions locales.
Enfin, et c’est sans doute le plus discutable, cette orientation aboutira à remettre à plus tard la réalisation d’équipements structurants pour la vie économique et sociale de nos villages, de nos villes, de nos départements et de nos régions.
En réduisant la masse des dotations budgétaires attribuées aux collectivités locales, vous créez les conditions de la réduction de l’investissement public local, élément pourtant indispensable à la vie économique lorsqu’on examine la situation de l’investissement public en général.
Cet article 67 condamne par avance la création de nouvelles communautés urbaines et met en difficulté la raison d’être de nombreuses structures intercommunales. D’ailleurs, il ne représente qu’un élément de cette véritable dénonciation unilatérale du contrat entre l’État et les collectivités territoriales.
À l’heure où le Président de la République demande aux collectivités de se mobiliser pour donner une nouvelle dynamique à l’économie du pays, la réponse proposée dans cet article prend le chemin opposé. La vie sociale ne pourra qu’en être fortement dégradée.
C’est pourquoi nous vous proposons la suppression de cet article.
M. le président. L'amendement n° II-212 rectifié bis, présenté par MM. Jégou, Badré et Dallier, est ainsi libellé :
Après le I bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Pour les communes de plus de 10 000 habitants, ayant réalisé un recensement complémentaire en 2005 et confirmé en 2007, éligibles à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et dont le potentiel financier par habitant est inférieur de 25 % à la moyenne de la strate régionale, la population prise en compte pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement pour les années 2009 et 2010 est celle ayant servi au calcul de la dotation globale de fonctionnement au titre de l'exercice 2008.
« Pour les communes de plus de 10 000 habitants, ayant réalisé un recensement complémentaire en 2006, et pour lesquelles a été constatée une augmentation de la population supérieure à 15 %, éligibles à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et dont le potentiel financier par habitant est inférieur de 25 % à la moyenne de la strate régionale, le nombre de logements retenus pour le calcul de la population prise en compte dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement pour les années 2009 et 2010 sera celui du répertoire d'immeubles localisés 2008. »
L'amendement n° II-213 rectifié bis, présenté par MM. Jégou, Badré et Dallier, est ainsi libellé :
Après le I bis de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... Pour les communes de plus de 10 000 habitants, ayant réalisé un recensement complémentaire en 2005 et confirmé en 2007, éligibles à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et dont le potentiel financier par habitant est inférieur de 25 % à la moyenne de la strate régionale, la population prise en compte pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement pour les années 2009 et 2010 est celle ayant servi au calcul de la dotation globale de fonctionnement au titre de l'exercice 2008. »
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Jacques Jégou. Ces amendements s’expliquent par leur texte même.
M. le président. L'amendement n° II-216 rectifié, présenté par MM. Collombat, Sueur, Mirassou, Patient, Collomb et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. Dans le deuxième alinéa (1°) du VII de cet article, supprimer les mots :
au plus
II. Dans les cinquième (1°) et dernier alinéas du VIII et dans le IX de cet article, après le mot :
selon
rédiger comme suit la fin de ces alinéas et de ce paragraphe :
le taux d'évolution prévu au II de l'article L. 5211-29
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Je voudrais tout d’abord dire, au nom de mes collègues du groupe socialiste, que nous voterons les amendements nos 212 rectifié et 213 rectifié, l’argumentation de MM. Jégou et Dallier nous semblant imparable.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° II-217 rectifié.
M. le président. Je vous en prie, monsieur Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. L’amendement n° 216 rectifié tend à indexer la dotation par habitant perçue par les communautés d'agglomération sur le taux prévisionnel de l'inflation. Il vise également à indexer la dotation d’intercommunalité perçue par les communautés urbaines, les syndicats et communautés d’agglomération nouvelle sur le taux prévisionnel de l’inflation. L’article 67 prévoit seulement une évolution de ces dotations « au plus égale » au taux d’évolution pour la dotation forfaitaire des communes.
Quant à l’amendement n° 217 rectifié, il vise à faire bénéficier les intercommunalités créées avant le 1er janvier 2009 de la clause de garantie prévue par le présent article au bénéfice des communautés urbaines.
M. le président. L'amendement n° II-210 rectifié, présenté par Mme Laborde et M. Daunis, est ainsi libellé :
I. - Dans le troisième alinéa du VIII de cet article, remplacer le montant :
60 €
par le montant :
85,87 €
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... Les pertes de recettes résultant pour l'État de la fixation à 85,87 € par habitant de la dotation moyenne d'intercommunalité attribuée aux communautés urbaines sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L'article 67 prévoit qu’à compter du 1er janvier 2009 la somme affectée à la catégorie des communautés urbaines est répartie de telle sorte que l'attribution revenant à chacune d'entre elles soit égale au produit de sa population par la dotation moyenne par habitant de la catégorie des communautés urbaines, augmenté, le cas échéant, d'une garantie. Pour 2009, cette dotation moyenne est fixée à 60 euros par habitant, alors que l’on attendait plus.
Cet amendement tend à permettre à de nombreux territoires ayant impérativement besoin d’être financièrement soutenus d'obtenir une hausse équitable de la dotation d’intercommunalité prévue à l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales.
Au 1er janvier 2009, les seize communautés urbaines regrouperont plus de sept millions d’habitants, soit près de 12 % de la population française. Ces communautés assurent toutes les compétences obligatoires, mais aussi des compétences sociales, culturelles ou sportives d’intérêt communautaire au bénéfice d’une population bien plus large que celle des communes qui les composent.
Enfin, les communautés urbaines permettent de disposer de territoires compétitifs dans la concurrence européenne. En remettant donc en cause la garantie de ressources au-delà de 2009, le texte présenté prive ces structures d’une visibilité indispensable à l’engagement de politiques de solidarité.
La Haute Assemblée a, je crois, le devoir de veiller à la préservation des intérêts locaux. Le budget de l’État doit accompagner les communautés urbaines en fonction de leur potentiel fiscal, afin d’atténuer les effets de la crise économico-financière sur les territoires de province.
Au travers de cet amendement, cosigné par M. Daunis, je vous demande non pas de privilégier une logique d’économies immédiates, en choisissant l’État contre les territoires, mais plutôt d’affirmer la position d’un État partenaire des collectivités territoriales.
M. le président. L'amendement n° II-217 rectifié, présenté par MM. Collombat, Sueur, Mirassou, Patient, Collomb et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. Dans la première phrase du quatrième alinéa du VIII de cet article, remplacer les mots :
ayant perçu, au titre de cette même catégorie, en 2008, une attribution de la dotation d'intercommunalité
par les mots :
créées avant le 1er janvier 2009
II. Après le sixième alinéa (2°) de ce même paragraphe, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les communautés urbaines créées en 2008, le 1° correspond au produit de leur population à la date de leur création par la dotation moyenne par habitant pour 2008 de la catégorie des communautés urbaines, indexée selon un taux fixé par le Comité des finances locales, compris entre zéro et le taux d'évolution pour 2009 de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 2334-7.
Cet amendement a été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. L’amendement de suppression n° II-230 défendu par Mme Mathon-Poinat serait à notre sens contre-productif. En effet, l’article 67 du projet de loi de finances prévoit, pour chaque catégorie de collectivité territoriale, une modification des règles d’évolution de certaines composantes de la DGF, afin de ne pas affaiblir l’effort de péréquation associé à celle-ci.
En l’état du droit en vigueur, si cet amendement était adopté, la péréquation associée à la DGF serait nulle. Je vous rappelle que, en ce qui concerne la mission « Relations avec les collectivités territoriales », nous débattons dans le cadre d’une enveloppe fermée : elle est figée depuis l’adoption de la première partie du projet de loi de finances.
L’avis de la commission est donc défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° II-212 rectifié bis, nous ne pouvons rester insensibles aux arguments développés par nos collègues MM. Dallier et Jégou. Il peut paraître légitime de tenir compte de la situation particulière de certaines communes urbaines pauvres, dont la population a beaucoup augmenté. Ces communes ont beaucoup investi et doivent donc bénéficier des moyens nécessaires.
Mais il convient également de rappeler que l’objectif du nouveau dispositif est de mettre en place, pour toutes les communes, un mode de calcul unique pour la dotation de base de la DGF afin de bénéficier, comme vous l’avez indiqué, madame la ministre, d’un cadre de référence cohérent. Cet amendement n’a pas été étudié par la commission. Je sollicite donc l’avis du Gouvernement.
J’émettrai le même avis pour l’amendement de repli n° II-213 rectifié bis.
S’agissant de l’amendement n° II-216 rectifié, présenté par M. Collombat, sur le principe, on ne peut que souscrire à l’idée qu’il faille maintenir une évolution forte des dotations d’intercommunalité. Nous partageons tous ce souci ! Mais, là encore, nous nous situons dans le cadre d’une enveloppe fermée. Une évolution de la dotation d’intercommunalité équivalente à l’inflation prévisionnelle équivaudrait donc à baisser la DSR et la DNP, dans la mesure où la DSU est fixée par la loi. Elle pourrait même nous obliger à réduire la dotation forfaitaire pour maintenir la péréquation.
Cet amendement aurait donc pour conséquence de dégrader l’effort de péréquation associé à la DGF. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° II-210 rectifié, je rappellerai le contexte actuel : la dotation moyenne par habitant des communautés urbaines s’établit à 85,87 euros, contre 23,74 euros pour les communautés de communes à TPU non bonifiée, 33,02 euros pour les communautés de communes à TPU bonifiée, et 44,53 euros pour les communautés d’agglomération.
Le maintien de la dotation des communautés urbaines à un niveau plus élevé, objet de cet amendement, aurait pour conséquence de dégrader l’effort de péréquation associé à la DGF et, de la sorte, contreviendrait à l’objet du projet de loi de finances de limiter à 60 euros par habitant les dotations aux communautés urbaines.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
L’amendement n° II-217 rectifié vise à rétablir le mécanisme de garantie de dotation en faveur des communautés urbaines, créé en 2008, qui était initialement prévu à l’article 67 du projet de loi de finances, mais qu’a supprimé l’Assemblée nationale.
La commission émet un avis défavorable, puisqu’il aurait pour effet, lui aussi, de diminuer la péréquation de 50 millions d’euros.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° II-230 visant à supprimer l’article 67. Cette suppression serait contraire à l’objectif de solidarité qui sous-tendait la limitation de la progression de certaines composantes de la DGF.
Je comprends la préoccupation exprimée par les auteurs des amendements nos II-212 rectifié bis et II-213 rectifié bis. Je suppose que l’un sera retiré au bénéfice de l’autre. À défaut de pouvoir proposer, à ce jour, avant la réunion de la commission mixte paritaire, une meilleure solution, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
S’agissant de l’amendement n° II-216 rectifié, le Gouvernement souhaite poursuivre le rattrapage qui a été opéré à partir de 2005 au profit des communautés de communes, qui étaient très défavorisées. En outre, cet amendement aurait pour conséquence de retirer tout pouvoir au Comité des finances locales. Pour ces deux raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Il émet également un avis défavorable sur l’amendement n° II-210 rectifié. L’objectif poursuivi par son auteur est exactement l’inverse de celui du Gouvernement.
Enfin, s’agissant de l’amendement n° II-217 rectifié, l’Assemblée nationale avait supprimé la garantie pour deux communautés urbaines, d’un montant total de 50 millions d’euros, afin de soutenir les dotations de solidarité des communes et de financer en partie la garantie mise en place pour les communes qui perdent plus de 10 % de leur population. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je remercie Mme la ministre de laisser ouverte la recherche d’une solution au problème qu’ont excellemment exposé nos collègues Jean-Jacques Jégou et Philippe Dallier. Il serait inique de clore cette discussion en repoussant leurs amendements. Il nous faut aller en commission mixte paritaire avec un texte différent de celui de l’Assemblée nationale. En tout état de cause, les mesures proposées ne sont pas de nature à dégrader le solde du budget de l’État, car il s’agit d’un problème interne à la DGF et à sa répartition.
Puisque Gilles Carrez, qui préside le Comité des finances locales, participera, en sa qualité de rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, à la commission mixte paritaire, je propose à M. Jégou et à M. Dallier de retirer l’amendement n° II-213 rectifié bis au profit de l’amendement n° II-212 rectifié bis, sur lequel nous nous baserons pour trouver une solution d’ici là.
M. le président. Monsieur Jégou, l'amendement n° II-213 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, monsieur le président.
Je remercie M. le président de la commission des finances de l’accueil favorable qu’il a réservé à l’amendement n° II-212 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° II-213 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-230.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je constate que l’amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur l'amendement n° II-216 rectifié.
M. Pierre-Yves Collombat. Nous rendant aux arguments de M. Jarlier, nous retirons l’amendement n° II-217 rectifié.
En revanche, nous maintenons l’amendement n° II-216 rectifié, parce que optimiser la péréquation en jouant sur des indices ne nous paraît pas une bonne méthode.
M. le président. L'amendement n° II-217 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-216 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Madame Laborde, l'amendement n° II-210 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'article 67, modifié.
(L'article 67 est adopté.)
Article additionnel après l'article 67
M. le président. L'amendement n° II-221, présenté par MM. Patient et Antoinette, est ainsi libellé :
Après l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la dernière phrase du 2° de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, le mot : « triple » est remplacé par le mot : « quadruple ».
II. - Ce même 2° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le solde est attribué à l'établissement public de coopération intercommunale dont la commune est membre. »
III. - Les conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. - Les conséquences financières résultant pour l'État du III ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. La situation financière des communes de Guyane est très fragilisée par deux opérations que je considère comme iniques : le prélèvement de 27 millions d’euros opéré à leur détriment au profit du conseil général et le plafonnement de la dotation superficiaire.
Si, pour l’heure, il est difficile de revenir sur la première opération, en revanche, s’agissant de la seconde, je considère que l’État peut faire un effort.
C’est pourquoi, Jean-Etienne Antoinette et moi-même présentons cet amendement visant à déplafonner la dotation superficiaire en la portant à quatre fois la dotation de base, au lieu de trois, le solde étant reversé à l’intercommunalité dont est membre la commune bénéficiaire ou à un fonds de péréquation intercommunal.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Comme vient de l’expliquer M. Patient, cet amendement vise à supprimer le plafonnement de la dotation superficiaire perçue par les communes de Guyane et à en affecter le reliquat à l’établissement public de coopération intercommunale dont la commune bénéficiaire est membre.
Cette dotation, issue de la réforme de la DGF qui a eu lieu en 2004, avait été plafonnée afin de tenir compte de la superficie des communes de Guyane, qui peut parfois être égale à celle d’un département métropolitain. C’est pourquoi ce plafonnement paraît justifié. Un déplafonnement réduirait parallèlement les composantes de la DGF dédiées à la péréquation, ce qui n’est pas souhaitable.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Monsieur le sénateur, comme je vous l’ai dit tout à l’heure, le Président de la République et le Gouvernement sont très attentifs à la situation des collectivités guyanaises, ainsi que l’attestent la signature du protocole d’accord sur le prix des carburants et la constitution du groupe de travail sur les finances des collectivités locales.
Votre amendement ne permet pas de prendre en compte l’ensemble des aspects de la question et contrevient quelque peu à l’objet de la DGF. Je vous demanderai, par conséquent, de bien vouloir le retirer. En contrepartie, je prends l’engagement que le groupe de travail étudiera les moyens les plus appropriés pour aménager les dotations aux collectivités et accordera une attention particulière au point que vous avez soulevé.
À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Patient, l'amendement n° II-221 est-il maintenu ?
M. Georges Patient. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-221 est retiré.
L'amendement n° II-222, présenté par M. Marc, Mme Blondin, M. Fichet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 5° de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est également doublée pour les communes insulaires situées dans les surfaces maritimes classées en cœur de parc national. »
II. - Les conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - Les conséquences financières résultant pour l'État du II ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Edmond Hervé.
M. Edmond Hervé. Monsieur le président, avec votre permission, je présenterai en même temps l’amendement n° II–223.
Un certain nombre de communes insulaires, bien qu’elles soient situées dans un parc naturel national, sont exclues du bénéfice de la dotation « cœur de parc naturel national ». Tel est le cas du parc naturel marin d’Iroise, dont certaines des communes, en particulier les îles d’Ouessant et de Sein, ne peuvent bénéficier de cette ressource au seul motif de leur insularité.
Ce parc marin, dont l’objet est d’intégrer la protection de l’environnement dans la gestion de l’espace maritime, nécessite des investissements financiers importants de la part des communes concernées.
Or ces communes, du fait de leur double caractéristique – insulaires et situées dans un parc naturel –, ne peuvent bénéficier de recettes et ne peuvent faire face aux investissements nécessaires. Il paraît donc totalement injustifié de les exclure du bénéfice de cette dotation.
L’amendement n° II-222 vise à remédier à cette inégalité par un doublement de cette dotation pour les communes concernées.
J’en viens à l’amendement n° II-223.
Pour des raisons historiques, et en l’absence de cadastre, deux communes insulaires du Finistère ne perçoivent pas d’impôts directs locaux.
Pour tenir compte de l’absence de recette fiscale, un amendement a été adopté en 1999 par l’Assemblée nationale visant à modifier l’article 1648 B bis du code général des impôts relatif au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
Actuellement, les communes qui ne disposent d’aucune ressource au titre des quatre taxes directes locales et qui sont membres d’un EPCI à fiscalité propre bénéficient d’une attribution de dotation nationale de péréquation égale à douze fois l’attribution nationale moyenne par habitant.
Depuis lors, le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle a été remplacé par la dotation nationale de péréquation. Or cette ressource n’a cessé de diminuer ces dernières années pour les communes dénuées de bases fiscales, qui ont dû supporter une baisse de 9 % de leur dotation entre les années 2002 et 2008.
Une telle ressource est indispensable à ces collectivités pour leur permettre de faire face à leurs charges et à leur handicap lié à leur insularité. Il nous paraît donc nécessaire de sécuriser le montant de leur dotation. Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à instaurer, pour les années à venir, une dotation minimale qui ne pourra être inférieure à celle qui a été perçue en 2008.
Mes chers collègues, cette mesure n’est pas très coûteuse, puisqu’elle porte sur un montant de 63 000 euros. Par conséquent, c’est un geste symbolique que les îliens vous demandent, au nom du principe d’égalité. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. le président. L'amendement n° II-223, présenté par M. Marc, Mme Blondin, M. Fichet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'avant-dernier alinéa du IV de l'article L. 2334-14-1 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « À compter de 2009, son montant ne peut être inférieur à celui perçu par les communes concernées au titre de l'année 2008. »
II. - Les conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales du I sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - Les conséquences financières résultant pour l'État du II sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. L'amendement n° II-222 vise à faire bénéficier les services maritimes classés en cœur de parc national de la part de la dotation forfaitaire des communes appelée « cœur de parc naturel ».
Une dotation est en effet versée aux communes dont le territoire est pour tout ou partie compris dans un parc national. Le montant a été fixé par la loi de finances pour 2007 à 3 millions d'euros. En 2008, 177 communes se répartissent 3 046 858 euros.
L’extension ici proposée concernerait le parc naturel marin d’Iroise.
La commission des finances n’ayant pu se prononcer sur cet amendement, elle souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
L'amendement n° II-223 tend à instaurer un montant plancher de dotation au bénéfice des communes qui ne disposent d’aucune ressource au titre des quatre taxes directes locales et qui sont membres d’un EPCI à fiscalité propre.
Sur ce sujet, la commission souhaite également connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. La dotation réservée aux communes classées en cœur de parc national est attribuée suivant un dispositif d’enveloppe fermée.
Par conséquent, l’adoption de l'amendement n° II-222 réduirait les attributions déjà prévues au titre de ce dispositif. En outre, étant peu peuplées, les îles concernées sont moins pénalisées que d’autres par le classement en parc national.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Les trois communes concernées par l'amendement n° II-223 ont un niveau de dotation nationale de péréquation par habitant bien supérieur à la moyenne de leur strate.
La dotation nationale de péréquation fonctionnant, là encore, à enveloppe fermée, ce qui serait accordé en plus à certaines communes le serait au détriment des autres. C’est donc un sentiment d’équité qui pousse le Gouvernement à émettre également un avis défavorable sur cet amendement.
M. Jean-Pierre Sueur. Il n’est pas facile de vivre là-bas !
M. le président. Monsieur Hervé, les amendements nos II-222 et II-223 sont-ils maintenus ?
M. Edmond Hervé. Oui, je les maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-223.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 68
I. – Le huitième alinéa de l’article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La part de la compensation correspondant à la contribution pour l’exploitation des services transférés est calculée hors taxe sur la valeur ajoutée. »
II. – La dotation générale de décentralisation des régions inscrite au sein du programme « Concours financiers aux régions » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est minorée, à compter du 1er janvier 2009, de 82 774 323 €.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Cet article décline une des orientations du présent projet de loi de finances s’agissant des concours apportés par l’État aux collectivités locales.
D’après le rapport de la commission des finances sur cette mission, il s’agit ici de prendre acte du non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des subventions versées par les régions pour le fonctionnement des services ferroviaires de transport de voyageurs.
Nous sommes particulièrement attachés à la régularisation, donc au remboursement de la TVA, même s’il nous semble que cela n’ira pas sans poser de problèmes pour la SNCF.
Puisque l’occasion nous en est donnée, comment ne pas rappeler qu’il est aujourd’hui nécessaire d’envisager des concours plus significatifs en direction des régions, dès lors que le développement des transports ferroviaires régionaux constitue une solution de remplacement du transport routier ? Une telle mesure serait d’ailleurs valable pour les déplacements individuels, ce qui pourrait avoir une incidence sur le pouvoir d’achat des ménages.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons être rassurés sur les modalités de ce remboursement final de TVA.
M. le président. L'amendement n° II-218, présenté par Mme Bricq, MM. Collombat, Sueur, Patient et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
III. L'article 1-4 de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959 relative à l'organisation des transports de voyageurs en Île-de-France est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'incidence financière des évolutions du régime fiscal applicable aux entreprises de transport et aux conventions conclues entre ces dernières et le Syndicat des transports d'Île-de-France est compensée intégralement par l'État aux collectivités territoriales intéressées à proportion de leur participation respective au Syndicat des transports d'Île-de-France. »
IV. La perte de recettes résultant pour l'État du III ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. L’article 68 tire les conséquences de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes de 2001 et 2004, laquelle précise la notion de subvention directement liée au prix, au sens de la sixième directive TVA.
Selon cette jurisprudence, sont assujetties à la TVA uniquement les subventions qui constituent la contrepartie totale ou partielle d’une opération de livraison de biens ou de prestations de services et qui sont versées par un tiers au vendeur ou au prestataire.
Par conséquent, la Direction de la législation fiscale a modifié sa position sur la contribution pour l’exploitation des services transférés versée à la SNCF par les régions et compensée par l’État. En vertu de cette jurisprudence, celle-ci ne serait plus assujettie à la TVA.
Par cet article, le Gouvernement entend diminuer la dotation de compensation versée aux régions du montant de la TVA. Or de nombreuses critiques ont été émises par les régions, dont je dois me faire l’écho.
Tout d’abord, cette proposition se situe en dehors du cadre législatif et constitutionnel.
La loi prévoit en effet que toute disposition législative ou réglementaire ayant une incidence financière sur les charges transférées au titre des TER donne lieu à révision de la dotation de compensation. La loi du 13 décembre 2000 précise que « cette révision a pour objet de compenser intégralement la charge supplémentaire pour la région résultant de ces dispositions ».
Or il s’agit ici d’une application de la doctrine fiscale qui ne concerne pas directement les régions, mais qui vise la SNCF. La législation, comme la réglementation fiscale, n’a pas évolué à cet égard depuis la décentralisation.
Quand bien même l’application de l’exonération se traduirait par une diminution de dépenses pour les régions, le législateur a prévu un dispositif de garantie seulement lorsqu’est constatée une charge supplémentaire du fait de la loi ou du règlement, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Par ailleurs, le principe posé par la loi de finances rectificative pour 2007 pour l’utilisation des compensations prévoit que « les collectivités locales bénéficiaires utilisent librement la dotation générale de décentralisation ».
Aucune disposition légale n’oblige une collectivité à dépenser la totalité de la dotation perçue au titre de la compétence transférée en totalité.
La compensation reçue est d’autant plus librement utilisée que l’article 72 de la Constitution garantit la libre administration des collectivités locales.
Enfin, la question de la procédure reste entièrement posée. Dès lors qu’il s’agit de modifier une dotation liée à la décentralisation, un passage devant la commission consultative d’évaluation des charges est indispensable. Or il n’est pas à ce jour programmé. Un tel examen permettrait également de mettre au clair le débat d’interprétation juridique entre les régions et le Gouvernement.
J’ajoute qu’une autre injustice doit être réparée.
Tel qu’il est rédigé, l’article 68, n’est pas applicable à l’Île-de-France. Les modalités d’organisation des transports de voyageurs dans cette région sont fixées par l’ordonnance du 7 janvier 1959, qui prévoit la mise en place du syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF.
Or les collectivités d’Île-de-France versent une contribution au STIF, qui reverse lui-même une subvention aux entreprises de transport. Si cette subvention n’est plus assujettie à la TVA, il faut en tirer les conséquences pour la dotation de compensation versée à ces collectivités, comme cela a toujours été le cas pour les autres régions.
Par ailleurs, le non-assujettissement à la TVA aurait pour conséquence, d’après le ministère des finances, l’assujettissement de l’entreprise de transport à la taxe sur les salaires, ce qui entraînerait une hausse de la subvention du STIF, et cette hausse devra également être prise en compte dans la dotation de compensation versée aux collectivités d’Île-de-France.
Il s’agit donc là d’une question complexe, qui justifie cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. L'article 68 n’est pas applicable à la région d’Île-de-France, ce qui s’explique par les spécificités de la situation francilienne.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est sûr !
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. À la différence de ce qui se passe dans les autres régions, le STIF est l’unique autorité organisatrice des transports en Île-de-France, mais la diversité des modes de transport pris en charge se traduit par la diversité des entreprises bénéficiant des subventions du STIF. En outre, le mode de financement du STIF diffère de celui des services régionaux de voyageurs transférés aux régions.
Il s’agit donc d’un sujet extrêmement complexe, qui nécessite une analyse spécifique. Le Gouvernement a d’ailleurs lancé une étude sur le sujet. C'est la raison pour laquelle la commission souhaite connaître son avis sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. L'article 68 ne s’applique pas à l’Île-de-France, car les modalités d’organisation des transports de voyageurs sont extrêmement différentes dans cette région. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a besoin d’une expertise plus précise, ainsi que vient de le souligner M. le rapporteur spécial. Il est en effet impossible en l’occurrence de proposer exactement les mêmes formules et les mêmes modalités d’application de la mesure.
Dans la mesure où une expertise approfondie est en cours, dont les conclusions vous seront transmises, monsieur le sénateur, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° II-218 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, je ne peux malheureusement le retirer, car l’application de l'article 68 a des conséquences très lourdes pour le système des transports de la région d’Île-de-France.
L’adoption - à l’unanimité des présents - de l'amendement n° II-212 rectifié bis de nos collègues Jean-Jacques Jégou et Philippe Dallier devrait ici faire jurisprudence : adoptons l'amendement n° II-218, et nous pourrons utilement bénéficier des résultats de l’étude que vous avez demandée, madame la ministre, et trouver une solution à ce problème en commission mixte paritaire.
M. le président. Je mets aux voix l'article 68.
(L'article 68 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 68
M. le président. L'amendement n° II-219, présenté par Mme Bricq, MM. Collombat, Sueur, Patient et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 68, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le huitième alinéa de l'article L. 1614-8-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La part de la compensation correspondant à la contribution pour l'exploitation des services transférés donne lieu à révision pour tenir compte des incidences sur les charges du service ferroviaire régional, de la soumission des entreprises de transport, à la taxe sur les salaires, prévue à l'article 231 du code général des impôts. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État de la compensation aux régions de la hausse de la contribution versée à la Société nationale des chemins de fer français est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement est le complément du précédent et entend résoudre le problème né du non-assujettissement à la TVA et donc de l’assujettissement à la taxe sur les salaires de la contribution pour l’exploitation des services transférés versée par les régions aux entreprises de transport.
L’article 231 du code général des impôts prévoit que les sommes payées à titre de rémunération par les entreprises sont soumises à une taxe sur les salaires à la charge des personnes ou organismes qui paient ces rémunérations, lorsqu’ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l’ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires au titre de l’année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations.
Dès lors que les contributions versées aux entreprises de transport étaient soumises à la TVA, ces entreprises ne pouvaient pas être également assujetties à la taxe sur les salaires, en application de l’article 231. En revanche, dès qu’elles ne sont plus assujetties à la TVA, l'article 231 s’applique.
En conséquence, la contribution financière versée par les collectivités aux entreprises de transport devra nécessairement prendre en compte le montant de cette nouvelle taxe, sauf si Bercy renonce à la percevoir, ce qui est une possibilité…
Mais, dans l’hypothèse où cette bonne nouvelle ne serait pas confirmée, il faut, ainsi que le prévoit la loi, que cette charge supplémentaire soit compensée par une hausse de la dotation de compensation versée aux régions.
Tel est l’objet de cet amendement, qui est d’une logique imparable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Je souhaite rassurer M. Sueur.
La Direction du budget nous a indiqué que la SNCF ne serait pas soumise à la taxe sur les salaires au titre de l'article 68 du projet de loi de finances pour 2009, étant donné qu’il n’est pas possible d’isoler, au sein de l’activité de cette entreprise, ce qui relève du service régional par rapport à ce qui relève du service national qu’elle assure. L’opération réalisée par l'article 68 est donc neutre pour les régions.
La commission souhaite toutefois savoir si le Gouvernement confirme cette analyse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je confirme tout à fait les propos de M. le rapporteur spécial. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir une mesure législative supplémentaire. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° II-219 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Sueur. Dans la mesure où vous venez de confirmer que la SNCF ne serait pas assujettie à la taxe sur les salaires, je vais retirer cet amendement, madame la ministre.
J’indique cependant que, lors de l’examen des articles de la seconde partie non joints aux crédits, nous déposerons un amendement relatif à la situation d’institutions culturelles telles que les centres dramatiques nationaux, les centres chorégraphiques nationaux et les scènes nationales, qui sont strictement dans la même situation.
En effet, ces institutions, qui étaient assujetties à la TVA, ne le seront plus en vertu des décisions européennes, et elles en sont très satisfaites. Cependant, le ministère de l’économie et des finances a considéré que, dès lors qu’elles ne payaient plus la TVA, elles devaient acquitter la taxe sur les salaires, ce qui ne les satisfait pas du tout, d’autant moins que le montant de la taxe sur les salaires risque d’être plus lourd que le montant de TVA qu’elles acquittaient jusqu’alors.
Nous soutiendrons donc cet amendement dans l’espoir de recevoir pour ces institutions culturelles une réponse identique à celle que vous venez de faire, madame la ministre.
Cela dit, monsieur le président, je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° II-219 est retiré.
L'amendement n° II-224, présenté par M. Patriat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 68, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'article L. 4332-5 du code général des collectivités territoriales, les mots : « la pénultième année » sont remplacés (trois fois) par les mots : « l'année précédente ».
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Lors de sa réunion du mois de février 2008, le comité des finances locales a décidé de constituer un groupe de travail sur la péréquation interrégionale, composé de quatre de ses membres présidents de région.
Nous allons, je l’espère, bientôt connaître les conclusions de ce groupe de travail. Mais, d’ores et déjà, un consensus semble s’être dégagé sur une mesure simple et de bon sens, que cet amendement vise à mettre en place.
Le critère du potentiel fiscal est en effet pris en compte pour l’éligibilité et la répartition de la dotation de péréquation entre les régions. Or, actuellement, pour le calcul dudit potentiel, les données fiscales utilisées sont celles de la pénultième année par rapport à l’année de répartition. Il existe donc un décalage de deux ans entre les données fiscales de référence prises en compte et l’année de répartition de la dotation. Il semble qu’une large majorité de présidents de conseil régional soit favorable à la prise en compte des données de l’année précédant la répartition, au lieu de celles de la pénultième année.
Tel est l’objet de cet amendement clair, de bon sens et consensuel, madame la ministre !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Cet amendement est intéressant. Il tend à ce que la répartition de la dotation de péréquation régionale soit déterminée en fonction des données de l’année précédente.
La disposition présentée semble procéder d’un légitime souci d’adéquation du calcul de la répartition de la dotation de péréquation aux données les plus récentes, à l’instar de ce qui est pratiqué pour les autres collectivités. Cependant, la commission n’ayant pu examiner cet amendement, elle souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Les régions sont le seul échelon de collectivités dont la DGF est établie selon les données des deux années précédentes. La mesure proposée me paraît de bon sens. Elle a, je le sais, reçu un avis favorable du groupe de travail du comité des finances locales, et j’émets donc un avis favorable sur l’amendement n° II-224.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je tiens à remercier Mme la ministre de la part de M. François Patriat, qui est à l’initiative de cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 68.
L'amendement n° II-103 rectifié ter, présenté par M. Mézard, est ainsi libellé :
Après l'article 68, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article L. 4332-8 du code général des collectivités territoriales, le taux : « 15 % » est remplacé par le taux : « 10 % ».
Cet amendement n’est pas soutenu.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mes chers collègues, il est vingt heures, et neuf amendements restent à examiner. Si nous souhaitons terminer avant la suspension de la séance l’examen des crédits de cette mission, nous devons tous faire preuve de concision dans nos interventions, afin de pouvoir clore ce débat au plus tard à vingt heures trente.
À cette condition, peut-être accepterez-vous, monsieur le président, que nous poursuivions la discussion ?
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, je suis favorable à votre proposition, à condition que votre appel à la concision soit entendu. En effet, le personnel doit pouvoir disposer d’une suspension de deux heures, d’autant que nous allons sans doute avoir une très longue nuit de travail.
La parole est à M. Edmond Hervé.
M. Edmond Hervé. Je souhaite revenir sur l’amendement n° II–103 rectifié ter, qui n’a pas été soutenu.
Monsieur le président de la commission des finances, cet amendement était parfaitement conforme à la proposition du comité des finances locales sur la péréquation, qui met en jeu des sommes très importantes.
Le comité des finances locales a mis en place un groupe de travail sur la dotation de péréquation régionale. Je souhaite qu’il puisse remettre rapidement ses conclusions, afin d’éclairer nos discussions.
Article 69
Le IV de l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, toute diminution de cette dotation par rapport au montant de l’année précédente est modulée de telle sorte que supportent une diminution égale à la moitié de la diminution moyenne de la dotation de compensation, par rapport à 2008, les communes dont le potentiel financier par habitant, calculé conformément aux articles L. 2334-2 et L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales, au titre de l’année précédente, est inférieur à 95 % du potentiel financier moyen par habitant de l’ensemble des communes du même groupe démographique, au sens de l’article L. 2334-3 du même code, au titre de la même année, et dont la dotation de compensation représente plus de 5 % de la dotation globale de fonctionnement dont elles ont bénéficié l’année précédente. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-231, présenté par Mmes Beaufils, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. L’article 69 appelle de nombreuses observations, mais j’essaierai d’être aussi brève que possible.
Il s’agit d’atténuer les effets de la nouvelle réduction de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP, qui avait été instituée en 1987 pour compenser l’allégement transitoire des bases de la taxe professionnelle à hauteur de 16 % mis en œuvre pour aider les entreprises à créer des emplois et à investir.
Depuis la loi de finances de 1996, la DCTP sert de variable d’ajustement pour les dotations budgétaires de l’État aux collectivités territoriales. Vous exerciez à l’époque des fonctions ministérielles, monsieur le président de la commission des finances, et vous n’ignorez donc pas que ce sujet avait suscité de vifs débats.
En 1996, le montant de la DCTP représentait l’équivalent de 2,688 milliards d'euros, hors inflation.
En 2000, comme le rappelle M. Jarlier dans son rapport, la DCTP n’était plus que de 1,8 milliard d'euros, et il est prévu qu’elle s’établisse à 729 millions d'euros pour 2009.
Si l’on tient compte de l’évolution des prix à la consommation, on constate que le montant de la dotation a été réduit des trois quarts ! On peut se demander si, aujourd'hui, le surcroît de recettes fiscales perçu par l’État au titre de l’impôt sur les sociétés en raison de l’allégement des bases de la taxe professionnelle n’est pas supérieur au montant de la dotation qu’il attribue aux collectivités territoriales…
La DCTP a cessé de couvrir réellement les pertes de recettes fiscales locales qu’elle est censée compenser depuis qu’elle sert à « fermer l’enveloppe normée », pour reprendre l’expression de M. le rapporteur général, des concours budgétaires aux collectivités territoriales. Il devient de plus en plus intolérable d’assister chaque année à cette extinction progressive de la dotation, qui, au train où vont les choses, finira par être réduite à néant.
Quelle variable d’ajustement utiliserez-vous lorsque la DCTP aura disparu de fait ? Nous ne pouvons accepter la poursuite de la réduction de cette dotation. Au travers de cet amendement de suppression de l’article 69, nous revendiquons pour le moins son maintien, sinon sa progression, eu égard au sort réservé à la plupart des autres dotations budgétaires de l’État.
M. le président. L'amendement n° II-232, présenté par Mmes Beaufils, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
I. - Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots :
à la moitié
par les mots :
au quart
et remplacer le taux :
5 %
par le taux :
10 %
II. - Compléter ce même alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En tout état de cause, cette diminution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle ne devra pas conduire à une diminution globale des dotations d'État (somme de la dotation globale de fonctionnement et de la dotation de compensation de la taxe professionnelle), auquel cas, la modulation de la diminution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle sera ajustée de manière à garantir un niveau de dotations au moins égal à celui de l'année précédente.
III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - 1. La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales de la modification de la modulation de la diminution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle est compensée à due concurrence par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement.
2. La perte de recettes résultant pour l'État du 1 ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Il s’agit d’un amendement de repli.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. J’ai bien entendu les arguments développés par Mme Beaufils, mais ces amendements vont à l’encontre de la position de la commission des finances.
Mme Marie-France Beaufils. Je m’en doutais !
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Par conséquent, la commission des finances émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. L’amendement n° II-231 tend à supprimer l’article 69, qui est une mesure de solidarité en faveur des communes les plus défavorisées, caractérisées par un potentiel fiscal inférieur à la moyenne de la strate dont elles relèvent. Celles-ci se trouveraient donc pénalisées par l’adoption de cet amendement. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° II-232, je ne sais pas, madame Beaufils, si vous avez envisagé les implications de son adoption. Alors que la disposition présentée par le Gouvernement permettra d’aider 25 000 communes, la vôtre ne profiterait qu’à 37 communes. Cet amendement tend tout simplement à priver de sa portée l’article 69, qui est un dispositif de solidarité. Par conséquent, j’émets là aussi un avis défavorable.
M. le président. Madame Beaufils, les amendements nos II-231 et II-232 sont-ils maintenus ?
Mme Marie-France Beaufils. Oui, monsieur le président.
Madame la ministre, je comprends tout à fait, bien sûr, que l’on veuille faire preuve de solidarité à l’égard des communes les plus pauvres. Cependant, les communes qui bénéficient de la DCTP, fût-ce pour des montants importants, connaissent des situations de pauvreté bien plus lourdes qu’on ne croit. Par conséquent, quand on entend prendre des mesures de solidarité, il convient d’abord d’examiner les choses de plus près.
M. le président. Je mets aux voix l'article 69.
(L'article 69 est adopté.)
Article 70
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa de l’article L. 2334-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour 2009, et à titre dérogatoire, elle s’établit au minimum à 70 millions d’euros. » ;
2° Le deuxième alinéa de l’article L. 2334-18-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette disposition ne s’applique pas en 2009. » ;
3° L’article L. 2334-18-2 est ainsi modifié :
a) Au début de la dernière phrase du quatrième alinéa, les mots : « Pour les années 2008 et 2009 » sont remplacés par les mots : « En 2008 » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« En 2009, les communes éligibles au titre de l’article L. 2334-16 perçoivent une dotation égale à celle perçue en 2008, majorée le cas échéant de l’augmentation prévue à l’article L. 2334-18-4. Pour les communes situées dans la première moitié des communes de la catégorie des communes de 10 000 habitants et plus, classées en fonction de l’indice synthétique de ressources et de charges défini à l’article L. 2334-17, la dotation est égale à celle perçue en 2008, augmentée de 2 % et majorée le cas échéant de l’augmentation prévue à l’article L. 2334-18-4. Les communes qui n’étaient pas éligibles à la dotation en 2008 mais le deviennent en 2009 bénéficient d’une attribution calculée en application du présent article. » ;
4° Après l’article L. 2334-18-3, il est inséré un article L. 2334-18-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 2334-18-4. – En 2009, l’augmentation de la dotation, après répartition des attributions calculées en application des articles L. 2334-16 à L. 2334-18-2, bénéficie :
« 1° Aux cent cinquante premières communes de 10 000 habitants et plus, classées en fonction de l’indice synthétique de ressources et de charges défini à l’article L. 2334-17 ;
« 2° Aux vingt premières communes dont la population est comprise entre 5 000 et 9 999 habitants, classées en fonction de l’indice synthétique de ressources et de charges défini à l’article L. 2334-18.
« L’augmentation de la dotation, après répartition des attributions calculées en application des articles L. 2334-16 à L. 2334-18-2, est répartie entre les deux catégories démographiques au prorata de leur population dans le total des communes bénéficiaires.
« La part d’augmentation revenant à chaque commune bénéficiaire est égale au produit de sa population par la valeur de l’indice qui lui est attribué. Ce produit est pondéré par un coefficient variant uniformément de 2 à 1 dans l’ordre croissant du rang de classement des communes qui en bénéficient. » ;
5°Supprimé.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Cet important article porte sur la réforme de la dotation de solidarité urbaine, la DSU.
Alors que le groupe de travail sur ce thème qui avait été constitué au sein du comité des finances locales n’a pas encore présenté ses propositions, une disposition visant à exclure plus de 200 communes du bénéfice de cette dotation a été insérée dans le projet de loi de finances.
Sous la pression des élus locaux et des parlementaires, y compris de la majorité, vous avez repoussé d’un an, madame la ministre, la modification des critères de définition de l’indice synthétique de la dotation, et donc son application au montant de dotation attribué à chacune des communes bénéficiaires.
J’y insiste, c’est en effet l’action des élus, parfaitement relayée par les députés lors du débat à l'Assemblée nationale, qui a contraint le Gouvernement à revoir sa copie.
La proposition initiale, qui consistait à supprimer l’élément relatif au logement social dans la définition de l’indice, participait de la logique exclusivement comptable que suit le Gouvernement en matière de relations entre l’État et les collectivités territoriales : il s’agit uniquement de réduire le nombre de collectivités bénéficiaires.
Or, les situations communales doivent être analysées en prenant le temps d’étudier avec rigueur les conséquences des modifications qui peuvent être proposées. Les charges pesant sur les communes, selon leur situation, doivent être mieux appréciées. Les simulations effectuées pour le moment ont montré qu’aucune proposition ne peut recueillir un accord des collectivités si l’on veut véritablement leur donner les moyens de répondre aux besoins des populations les plus fragiles.
Vous pouvez compter, madame la ministre, sur les élus de notre groupe pour relayer la revendication, d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2010, d’un renforcement de l’efficacité de la dotation de solidarité urbaine !
En tout état de cause, la péréquation des ressources financières locales et la prise en compte des difficultés particulières de certaines villes et localités, tant pour la DSU que pour la DSR, appellent d’autres solutions que celles qui nous ont été proposées.
En effet, nos territoires ont besoin d’un accompagnement beaucoup plus important que celui qui a été prévu. Nous aurions d’ailleurs souhaité que la dotation de développement urbain reste intégrée à la DSU.
M. le président. L'amendement n° II-154 rectifié, présenté par MM. J. C. Gaudin, Gilles et Ferrand et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Avant le a) du 3° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Le troisième alinéa est supprimé.
La parole est à Mme Catherine Dumas.
Mme Catherine Dumas. L'article 70 du projet de loi de finances pour 2009 réforme la dotation de solidarité urbaine afin d'en améliorer l'efficacité péréquatrice et de concentrer davantage l’effort de solidarité nationale sur les communes pauvres ayant une population pauvre.
Cependant, ce dispositif laisse subsister une mesure d'écrêtement profondément injuste pour les communes les plus peuplées. Ainsi, une commune de plus de 500 000 habitants ne peut voir le montant de sa dotation augmenter de plus de 8 euros par habitant.
Le présent amendement a pour objet de résoudre ce problème en supprimant le plafonnement de l'accroissement de la dotation.
Près de 30 % de la population marseillaise vit dans des zones urbaines sensibles. Les nouvelles dispositions relatives à la dotation de solidarité urbaine engendreront, pour le budget de l’année 2009 de la ville, une perte de ressources supérieure à 3 millions d'euros, soit 20 millions d'euros sur la durée de la mandature.
Le nouveau mode de calcul de la dotation devrait prendre en compte les difficultés communales, indépendamment de la taille de la commune ; en l’état, il s’avère, s’agissant de Marseille, contraire à l’esprit de la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Depuis la loi du 18 janvier 2005, les communes éligibles à la DSU ne peuvent voir leur dotation progresser de plus de 4 millions d'euros par an, ce qui est déjà beaucoup.
En 2008, une seule commune se trouve concernée par ce mécanisme, pour un montant écrêté d’environ 1,43 million d'euros, la ville de Marseille. Et encore n’est-il pas certain qu’elle soit affectée par cet écrêtement en 2009.
La modification de cette règle irait à l’encontre de l’objectif visé à l’article 70, à savoir concentrer la progression de la DSU sur les communes les plus défavorisées.
La commission suggère donc le retrait de cet amendement, mais souhaiterait en tout état de cause entendre l’avis du Gouvernement sur cette disposition.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En ce qui concerne la DSU, je le rappelle, nous sommes parvenus à un compromis qui fait l’unanimité parmi les associations d’élus. Je pense donc qu’il est préférable de nous y tenir, d’autant que cet accord a exigé beaucoup de travail et de longues discussions.
En outre, le ministère de l’intérieur a procédé à des simulations, dont il ressort que les dispositions de cet amendement ne concerneraient aucune commune en 2009.
Enfin, l’année prochaine sera une période de transition : nous allons travailler sur cette question jusqu’à Pâques, pour affiner les critères de la DSU, apporter des solutions définitives – je l'espère ! – aux problèmes qui se posent et régler la question des dotations dans sa globalité. Naturellement, M. Jean-Claude Gaudin sera pleinement associé à ces travaux.
Compte tenu de ces explications, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
M. le président. Madame Dumas, l'amendement n° II-154 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Dumas. Je prends acte des déclarations de Mme la ministre et je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-154 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 70.
(L'article 70 est adopté.)
Article 71
I. – Le chapitre IV du titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Dotation de développement urbain
« Art. L. 2334-41. – Il est institué une dotation budgétaire intitulée dotation de développement urbain.
« Peuvent bénéficier de cette dotation les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale prévue à l’article L. 2334-15 qui figurent parmi les cent premières d’un classement de ces communes établi chaque année en fonction de critères tirés notamment de la proportion de population résidant dans des quartiers inclus dans les zones prioritaires de la politique de la ville, du revenu fiscal moyen des habitants de ces quartiers et du potentiel financier.
« Lorsque la compétence en matière de politique de la ville a été transférée par une commune éligible à un établissement public de coopération intercommunale, celui-ci peut bénéficier, sur décision du représentant de l’État dans le département, de la dotation de développement urbain pour le compte de cette commune.
« Les crédits de la dotation de développement urbain sont répartis entre les départements en tenant compte du nombre de communes éligibles dans chaque département et de leur classement selon les critères prévus au deuxième alinéa.
« Pour l’utilisation de ces crédits, le représentant de l’État dans le département conclut une convention avec la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale. Ces crédits sont attribués en vue de la réalisation de projets d’investissement ou d’actions dans le domaine économique et social. La subvention accordée ne doit pas avoir pour effet de faire prendre en charge tout ou partie des dépenses de personnel de la commune. Le représentant de l’État dans le département arrête les attributions de dotations sur la base d’objectifs prioritaires fixés chaque année par le Premier ministre après avis du Conseil national des villes.
« La population à prendre en compte pour l’application du présent article est celle définie à l’article L. 2334-2.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Le montant de la dotation créée par le I est fixé à 50 millions d’euros en 2009.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-233, présenté par Mmes Beaufils, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet article a trait à la dotation de développement urbain, la DDU, dont le montant est relativement modeste, puisqu’il s’élève aujourd’hui à 40,7 millions d'euros, contre 50 millions d'euros prévus initialement.
Je ne rappellerai pas les remarques, auxquelles je souscris largement, que M. Jarlier a formulées sur cette dotation dans son rapport. Les incertitudes qui entourent cette DDU posent un véritable problème.
Je reprendrai plutôt l’argumentation des élus qui siègent au groupe de travail sur la dotation de solidarité urbaine du comité des finances locales,…
Mme Marie-France Beaufils. … qui n’étaient pas favorables à la création de la dotation de développement urbain. Je partage entièrement leur point de vue.
En effet, je considère que c’est dans le cadre de la DSU que ces moyens doivent être mis à la disposition des communes.
En outre, je ne crois pas que la référence à la notion d’investissement permette de résoudre les problèmes qui se posent à nous.
Il faut plutôt, selon moi, veiller à maintenir, voire à développer, les services publics dans les quartiers concernés. Ceux-ci doivent bénéficier de davantage de moyens, provenant notamment de l’État, en ce qui concerne tant l’éducation que la sécurité. C’est à ce prix que la politique publique restera efficace dans ces quartiers.
M. le président. L'amendement n° II-220, présenté par Mme Bricq, MM. Collombat, Sueur, Patient, Marc et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter la troisième phrase du cinquième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 2334-41 du code général des collectivités territoriales par les mots :
sauf si ces dépenses de personnel participent de la mise en œuvre des projets et actions retenus
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement a pour objet d'élargir l'utilisation des crédits de la DDU aux dépenses de personnel concernant les agents municipaux qui travaillent directement à la mise en œuvre des projets et actions retenus pour l'attribution de ces fonds.
M. le président. L'amendement n° II-10, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
III. - Les objectifs prioritaires fixés en application de l'article L. 2334-41 du code général des collectivités territoriales sont intégrés dans les contrats d'objectifs et de moyens relevant de la politique de la ville visés à l'article L. 1111-2 du même code.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos II-233 et II-220.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. L’amendement n° II-10 vise à attirer l'attention sur la nécessité de coordonner la contractualisation entre l'État et la commune, qui ouvrira le bénéfice d'une subvention au titre de la DDU, et les contrats existant déjà dans le domaine de la politique de la ville, en particulier les contrats urbains de cohésion sociale.
L’amendement n° II-233 tend à supprimer l’article 71 ; cette proposition est contraire à la position de la commission, qui soutient la mise en place de la dotation de développement urbain. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Quant à l’amendement n° II-220, la commission ne s’est pas prononcée sur la disposition présentée ; elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. L’amendement n° II-233 a pour objet de supprimer la dotation de développement urbain. Cette proposition est contraire à la politique que nous voulons mener. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable, ce dont nul ne s’étonnera !
L’amendement n° II-220 vise quant à lui à supprimer une partie des dispositions que l’Assemblée nationale a adoptées, par voie d’amendement, en rendant éligibles à la dotation de développement urbain des dépenses de personnel communal.
Bien sûr, certaines dépenses de fonctionnement pourront entrer dans ce cadre, mais l’objet de la dotation de développement urbain n’est pas de servir à payer le personnel des communes ! Cette proposition semble même assez contraire à l’esprit de la DDU. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° II-10 tend à mieux coordonner les différentes actions de la politique de la ville. Sur le principe, il s'agit d’une bonne idée, mais je ne suis pas certaine que la rédaction retenue soit la mieux à même de prendre en compte l’ensemble des dispositifs existants.
Le Gouvernement s'en remet sur ce point à la sagesse de la Haute Assemblée, en souhaitant toutefois que des améliorations rédactionnelles soient apportées à cet amendement.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous l’améliorerons d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire !
M. le président. Je mets aux voix l'article 71, modifié.
(L'article 71 est adopté.)
Article 72
I. – Après l’article L. 2335-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2335-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2335-2-1. – Il est institué un fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées.
« La répartition des crédits du fonds tient compte de l’évolution des ressources des communes concernées par le plan de redéploiement territorial des armées. Elle est fixée par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé du budget.
« Par dérogation aux articles L. 2224-1 et L. 2224-2, les subventions accordées au titre du fonds peuvent être reversées, en tout ou partie, aux services publics communaux à caractère industriel ou commercial afin de compenser les effets sur leur exploitation du redéploiement territorial des armées. »
II. – Le montant du fonds créé par le I est fixé à 5 millions d’euros en 2009.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l'article.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet article a pour objet la revitalisation des communes touchées par le redéploiement territorial des armées.
Pour notre part, nous encourageons plutôt la cession gratuite des terrains et des bâtiments publics, voire la conclusion d’un bail emphytéotique, afin de permettre ensuite aux communes de procéder sans frais excessifs à des requalifications.
Les communes concernées pourraient ainsi bénéficier d’une bouffée d’oxygène et favoriser la croissance économique par la mise en œuvre de programmes intéressant l’ensemble de la filière du bâtiment.
M. le président. Je mets aux voix l'article 72.
(L'article 72 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 72
M. le président. L'amendement n° II-237, présenté par M. Detcheverry et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 72, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa de l'article L. 2334–13, les mots : « et de la dotation de solidarité rurale » sont remplacés par les mots : «, la dotation de solidarité rurale et la dotation nationale de péréquation » ;
2° Après le troisième alinéa de l'article L. 2334-13, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La quote-part destinée aux communes d'outre-mer est calculée en appliquant au montant de la dotation d'aménagement le rapport, majoré de 33 %, existant, d'après le dernier recensement de population, entre la population des communes des départements d'outre-mer, de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, des circonscriptions territoriales de Wallis-et-Futuna et de la collectivité départementale de Mayotte et celle des communes de métropole et des départements d'outre-mer, de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, des circonscriptions territoriales de Wallis-et-Futuna et de la collectivité départementale de Mayotte. Elle se ventile en deux sous-enveloppes : une quote-part correspondant à l'application du ratio démographique mentionné dans le présent alinéa à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et à la dotation de solidarité rurale, et une quote-part correspondant à l'application de ce ratio démographique à la dotation nationale de péréquation. Elle est répartie dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État. »
3° La deuxième phrase du II de l'article L. 2334-14-1 est ainsi rédigée :
« Cette quote-part est calculée en appliquant au montant de la dotation nationale de péréquation le ratio démographique mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 2334-13. »
4° Après l'article L. 2571-2, il est inséré un article L. 2571-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 2571-3. - Pour l'application des quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 2334-13, la quote-part de la dotation d'aménagement destinée aux communes de Saint-Pierre-et-Miquelon est calculée par application à la dotation d'aménagement du rapport existant, d'après le dernier recensement de population, entre la population des communes de Saint-Pierre-et-Miquelon et la population totale nationale. Le quantum de la population des communes de Saint-Pierre-et-Miquelon, tel qu'il résulte du dernier recensement de population, est majoré de 33 %. Le montant revenant à chaque commune de Saint-Pierre-et-Miquelon, calculé dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, est ensuite majoré pour la commune de Saint-Pierre de 445 000 euros et pour celle de Miquelon-Langlade de 100 000 euros. Cette majoration s'impute sur le montant de la quote-part, prévue au quatrième alinéa de l'article L. 2334-13, correspondant à application du ration démographique, prévu au même alinéa, à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion et à la dotation de solidarité rurale. »
5 ° Au I de l'article de l'article L. 2573-52, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq », et au III du même article, les mots : « troisième et quatrième » sont remplacés par les mots : « quatrième et cinquième »:
II – Le I de l'article 116 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 est abrogé.
La parole est à M. André Ferrand.
M. André Ferrand. Monsieur le président, si vous le voulez bien, je présenterai en même temps l’amendement n° II-243.
M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue.
M. André Ferrand. Ces deux amendements, dont le texte a été mis en ligne sur le site internet du Sénat, et par là même porté la connaissance de tous nos collègues, se justifient par leur objet même. Ils devraient recueillir un large assentiment.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Jarlier, rapporteur. La commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. L’an dernier, je le rappelle, je m’étais engagée à diligenter une étude sur les dotations de Saint-Pierre-et-Miquelon. Celle-ci a été réalisée, et l’amendement n° II-237 tend à en tirer toutes les conséquences. J’y suis donc favorable.
Par ailleurs, le Gouvernement émet également un avis favorable sur l’amendement n° II-243, qui sera appelé en discussion dans quelques instants : cette disposition, d'une part, répond à un souci d’équité en introduisant une garantie qui existe déjà pour les départements ruraux de métropole, et, d'autre part, permettra de rendre plus prévisibles les budgets.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 72.
L'amendement n° II-18, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 72, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans l'article L. 3321-2 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « au revenu minimum d'insertion » sont insérés les mots : «, au revenu de solidarité active ».
II. Dans le IV de l'article L. 3334-16-2 du même code, les mots : « et des primes mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles » sont remplacés par les mots : « , des primes mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale des familles ainsi que des contrats conclus et des prestations de revenu de solidarité active attribuées dans le cadre des expérimentations conduites sur le fondement des articles 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 et 18 à 23 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Cet amendement vise à prendre en compte, dans la répartition pour 2009 de la part insertion du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, les expérimentations du revenu de solidarité active, le RSA, et la réforme des contrats aidés conduites en 2008 par certains départements.
Par ailleurs, il tend à permettre l'individualisation dans les comptes des départements des dépenses relatives au RSA.
En bref, il s'agit de permettre le financement des expérimentations entreprises en 2008, notamment pour préparer la mise en place du RSA.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je ne saurais terminer l’examen des crédits de cette mission en la présence de M. le président de la commission des finances sans émettre un avis favorable sur cet amendement ! (Sourires.)
Au reste, il s'agit d’un excellent amendement de coordination.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 72.
L'amendement n° II-243, présenté par M. Detcheverry et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 72, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa de l'article L. 3334-4, les mots : « et de la dotation de compensation prévue à l'article L. 3334-7-1 » sont remplacés par les mots : « de la dotation de compensation prévue à l'article L. 3334-7-1 et de la quote-part destinée aux départements d'outre-mer, à la collectivité départementale de Mayotte, à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, ainsi qu'à la collectivité de Saint-Martin, ».
2° Le quatrième alinéa de l'article L. 3334-4 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les départements d'outre-mer, la collectivité départementale de Mayotte, la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et la collectivité de Saint-Martin bénéficient d'une quote-part de la dotation de péréquation, constituée d'une quote-part de la dotation de péréquation urbaine et d'une quote-part de la dotation de fonctionnement minimale.
« À compter de 2009, la quote-part de la dotation de péréquation urbaine versée à chaque département ou collectivité d'outre-mer est au moins égale à celle perçue l'année précédente. De même, la quote-part de la dotation de fonctionnement minimale destinée à chaque département ou collectivité d'outre-mer, qui en remplit les conditions, est au moins égale à celle perçue l'année précédente. »
3° L'article L. 3443-1 est complété par les mots : «, sous réserve des dispositions mentionnées au cinquième alinéa de l'article L. 3334-4 ».
Cet amendement a déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 72.
Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente.)
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour un rappel au règlement.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon rappel au règlement se fonde sur les termes de l’article 36, alinéa 3, de notre règlement.
Je veux tout d’abord regretter, très vivement et très gravement, que le débat sur les crédits des médias, alors même que l’examen du projet de loi relatif à l’audiovisuel occupe particulièrement l’Assemblée nationale, vienne à une heure si tardive.
M. le président. Je suis de votre avis !
M. Jack Ralite. Et que dire de la discussion sur les crédits de la culture ?
Mais venons-en aux faits.
Le 8 janvier 2008, le Président de la République fait un coup d’éclat en annonçant la suppression de la publicité à la télévision publique.
Le 25 juin 2008, le Président de la République fait un coup d’État en se réservant la nomination et la révocation du président de la télévision publique.
Le 4 décembre 2008, le Président de la République, par l’intermédiaire de Mme la ministre de la culture, fait un coup de force en décidant de supprimer par décret la publicité sur la télévision publique.
C’est une sortie violente du cadre parlementaire, pourtant muni de solutions : l’article 49-3 pour le Gouvernement, et son pendant, la possible censure du Gouvernement par l’opposition.
C’est une utilisation méprisante de la télévision pour faire avancer son désir d’être souverain éducateur. C’est une violation de la Constitution, qui prévoit le recours à la loi pour ce qui concerne les médias.
Coup après coup, le Président de la République fait cheminer sa volonté farouche de concentrer tous les pouvoirs en foulant le principe démocratique de leur séparation. C’est du despotisme bureaucratique !
Comme disait le grand libéral du début du xixe siècle Alexis de Tocqueville, le Président de la République « se fabrique peu à peu un pouvoir immense et tutélaire, absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux. Le souverain étend ses bras sur la société toute entière… Il ne brise pas les volontés, il les amollit, les plie et les dirige. Il ne les tyrannise pas, il gêne, il comprime, il énerve, il éteint. »
C’est une « globale manipulation », arrogante, arbitraire, qui vise à encager les libertés. Chaque jour témoigne d’une blessure de l’une d’entre elles.
Nous n’avons ni besoin, ni envie d’être conduits ainsi. Le Président de la République, qui veut être le grand éducateur du peuple, ne nous trouvera pas obéissants.
Soyons – c’est ma démarche et celle de mes amis ! – des mutins éclairés de la République !
M. Ivan Renar. Très bien !
M. le président. Mon cher collègue, je vous donne acte de votre intervention, qui n’avait guère de rapport avec un rappel au règlement !
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Médias
Compte spécial : Avances à l’audiovisuel
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits relatifs aux missions : « Médias » et compte spécial « Avances à l’audiovisuel » (et articles 86, 87 et 88).
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, en remplacement de M. Claude Belot, rapporteur spécial. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est en remplacement du rapporteur spécial Claude Belot, empêché, que je formulerai les principales observations de la commission des finances.
M. Jack Ralite vient d’exprimer son étonnement que les crédits de ces missions soient examinés à cette heure tardive : cela est dû au fait que, après maintenant plus de deux semaines de débat budgétaire, nous avons pris un peu de retard, en raison de nombreuses et longues prises de parole.
Je souhaiterais d’ailleurs que la discussion budgétaire n’empiète pas trop sur celle du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, que nous aborderons sans doute – je parle sous votre contrôle, madame la ministre – au début de l’année 2009. (Mme la ministre fait un signe d’assentiment.)
Les crédits de la politique publique de communication de l’État sont regroupés dans la mission « Médias », dont les crédits s’élèvent à 1,02 milliard d’euros, et le compte spécial « Avances à l’audiovisuel », doté de 3 milliards d’euros, soit un total de 4,02 milliards d’euros.
Ce secteur en pleine réforme enregistre un certain nombre d’évolutions que je souhaiterais brièvement évoquer.
Auparavant, je tiens à féliciter M. Claude Belot, qui a été à l’initiative d’une réforme importante de la maquette : le regroupement des crédits de l’audiovisuel extérieur français en un seul programme.
Au sein du budget général de l’État, la mission « Médias » accueille un nouveau programme destiné à compenser les pertes de ressources publicitaires partielles, à compter du 5 janvier 2009, de France Télévisions et de Radio France, à hauteur respectivement de 450 millions d’euros et de 23 millions d’euros.
Les conséquences financières d’une telle réforme sont en effet lourdes. Avant même la mise en œuvre de cette suppression partielle de la publicité, France Télévisions avait enregistré en 2008 une baisse de ses revenus publicitaires de l’ordre de 18,6 %.
Une autre réforme fut la création de la société holding « Audiovisuel extérieur de la France », qui a été mise en place en avril 2008 et regroupe France 24, RFI et TV5 Monde afin de développer les synergies.
Cependant, il est à craindre que l’augmentation des dépenses de l’audiovisuel extérieur de 0,8 % ne permette de répondre ni aux projets de développement de France 24 ni aux besoins de financement de RFI et de TV5 Monde.
S’agissant des aides à la presse, le montant des crédits demeure stable. Cependant, les aides directes à la presse sont en diminution de 1,16 %, dans l’attente de l’analyse des préconisations des états généraux de la presse et de la refonte éventuelle des régimes d’aides pour accompagner les mutations technologiques, sociales et économiques.
S’agissant du compte spécial « Avances à l’audiovisuel », les crédits progressent de 3,7 %, en raison du passage à la télévision numérique.
Lancée en mars 2005, la télévision numérique terrestre couvrait, fin juillet 2008, 87 % de la population ; 95 % de la population métropolitaine devrait être couverte d’ici à la fin de l’année 2011.
Le paysage audiovisuel numérique est en train de se structurer. L’offre de TNT gratuite comprend à ce jour dix-huit chaînes, dont sept de service public. Jusqu’au 30 novembre 2011, le groupement d’intérêt public « France Télé numérique » bénéficie de la redevance audiovisuelle au même titre que les organismes de l’audiovisuel public.
Ce financement du passage de la diffusion analogique à la diffusion numérique donne lieu à débat.
Par ailleurs, nous regrettons que les autorisations d’engagement ne fassent pas apparaître la dotation de 72 millions d’euros prévue pour 2010, non plus que celle de 131 millions d’euros prévue pour 2011, que vous avez annoncées, madame la ministre, le 26 septembre dernier.
France Télévisions est au cœur d’une triple réforme : celle de son financement, du fait de la disparition programmée de la publicité, celle de sa gouvernance et, plus généralement, celle de l’industrie audiovisuelle.
Elle bénéficie d’une progression de ses crédits de 2,7 %. Or, elle accuse un déficit, pour l’année 2008, de 100 millions d’euros.
En effet, l’attribution d’une dotation en capital de 150 millions d’euros pour compenser les pertes de ressources propres constatées dès l’année 2008 n’a pas eu de conséquences sur le compte d’exploitation, car elle a augmenté les fonds propres de France Télévisions. Elle n’a pas été une contribution au compte de résultat.
Arte France, dont la gestion a permis de réaliser des économies, bénéficie d’une progression de ses crédits de 4 %, qui lui sera nécessaire car elle sera confrontée en 2009 à de nouveaux défis technologiques non prévus ou insuffisamment budgétés.
Comme en 2008, l’INA, l’Institut national de l’audiovisuel, bénéficie d’une hausse de crédits de 3,4 % et poursuit sa mission de sauvegarde et de numérisation des fonds menacés de dégradation.
Enfin, M. Claude Belot avait souligné le dépassement des dépenses prévues pour la réhabilitation de la Maison de la radio, en raison de la complexité technique du projet et de l’inflation.
Un dépassement supplémentaire pour 2009 est évoqué et il nous a été confirmé que le plan d’économies avait d’ores et déjà porté sur 70 millions d’euros, grâce à la simplification des éléments techniques du projet et à la négociation avec les entrepreneurs.
La commission des finances vous recommande, mes chers collègues, l’adoption sans modification des crédits de la mission « Médias » et du compte d’affectation spéciale « Avances à l’audiovisuel », ainsi que des articles 86 à 88 rattachés.
M. le président. La parole est à M. Michel Thiollière, rapporteur pour avis.
M. Michel Thiollière, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en dépit des annonces catastrophistes entendues çà et là, je tiens d’entrée de jeu à souligner que les crédits consacrés par l’État aux médias, notamment audiovisuels, seront en 2009 plus élevés que jamais.
Il faut s’en féliciter et constater que l’État est conscient des défis majeurs qui attendent ce secteur dans les prochaines années en raison de la révolution numérique : les chaînes de télévision devront mettre en place un « média global », impératif pour offrir aux programmes diffusés une continuité de la télévision à internet, et investir lourdement afin d’assurer la diffusion des programmes en haute définition et sur tous les supports.
Ces crédits sont, d’une part, inscrits dans la mission « Médias », qui rassemble plus de 1 milliard d’euros de crédits de paiement, dont plus de 732 millions d’euros sont consacrés à l’audiovisuel, et, d’autre part, retracés dans le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel », au sein duquel est réparti le produit de la redevance.
En 2009, la redevance financera les organismes de l’audiovisuel public pour un montant de quasiment 3 milliards d’euros, soit une hausse de 3,7 % par rapport à 2008.
Cette augmentation sera rendue possible par l’indexation de la redevance sur l’inflation, que la commission des affaires culturelles réclame depuis quelques années. Je me réjouis que le Gouvernement se soit enfin rallié à cette option.
Un peu d’avance a cependant été prise, puisque cette mesure sera débattue lors de la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, discussion au cours de laquelle des changements pourraient encore intervenir. M. le président de la commission des finances vient d’indiquer qu’elle aurait lieu au début de l’année 2009.
Qui va profiter de cette hausse des crédits ? France Télévisions, tout d’abord, qui, après avoir bénéficié d’une hausse de ses crédits de 3,5 % en 2008, verra sa dotation augmenter de 53,3 millions d’euros en 2009, conformément au contrat d’objectifs et de moyens ambitieux qui avait été signé en 2007.
En outre, le nouveau programme 313 de la mission « Médias », intitulé « Contribution au financement de l’audiovisuel public », prévoit une dotation de 450 millions d’euros correspondant à la compensation des pertes de recettes commerciales occasionnées par la disparition partielle de la publicité sur les chaînes de France Télévisions, dans le cadre de la réforme de la télévision publique.
C’est la commission pour la nouvelle télévision publique qui a évalué la hauteur de cette compensation, tenant compte à la fois de la disparition de la publicité après 20 heures, de son effet sur la décote sur les écrans publicitaires maintenus en journée, de la décrue globale du marché publicitaire et, enfin, des effets des modifications du cadre réglementaire.
Prenant pour base les revenus publicitaires de France Télévisions en 2007, qui s’élevaient à 800 millions d’euros, la commission présidée par M. Copé a fixé la compensation de l’État en déduisant de cette somme, d’une part, les recettes attendues des opérations de parrainage et de la publicité sur les antennes régionales, sur celles d’outre-mer et sur les nouveaux supports, qui devraient s’établir à 150 millions d’euros en 2009, et, d’autre part, 200 millions d’euros, au titre des revenus publicitaires sur la publicité en journée.
J’insiste sur le fait que cette dotation diminue très fortement le risque économique encouru auparavant par France Télévisions, dont le chiffre d’affaires publicitaire pouvait être très fluctuant. Au-delà de la question des taxes, dont on discutera bientôt, le budget de l’État permet donc déjà à France Télévisions de disposer de perspectives financières à la fois solides et sécurisantes, qui lui permettront notamment de contribuer d’une manière suffisante au soutien à la création.
Il sera cependant nécessaire que la loi relative à l’audiovisuel public comporte une clause de revoyure avant la suppression totale de la publicité. Cela permettra aux parlementaires de constater que les crédits sont suffisants pour financer France Télévisions.
Par ailleurs, nous serons tous vigilants, je le crois, lorsqu’il s’agira de contrôler le respect des engagements financiers que l’État a pris dans les contrats d’objectifs et de moyens, les COM, passés avec les organismes de l’audiovisuel public.
Le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » prévoit une augmentation de 3,7 % de la dotation prévue pour Radio France, dont les crédits représentent 559,7 millions d’euros pour 2009. Cette augmentation correspond, à l’euro près, aux engagements pris par l’État dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens. Cette hausse des crédits doit permettre à Radio France de financer les chantiers du numérique et du multimédia.
Madame la ministre, j’ai, par ailleurs, appris récemment de bonnes nouvelles sur l’évolution des coûts des travaux liés à la réhabilitation de la Maison de la radio. J’espère que vous pourrez nous donner des précisions sur cette question.
Le programme 313 de la mission « Médias » comprend en outre une dotation additionnelle de 23 millions d’euros qui a pour objet de compenser un recentrage de la publicité de Radio France, afin de mettre en conformité la diffusion des messages publicitaires sur ses antennes avec les prescriptions de son cahier des charges.
Arte bénéficie quant à elle d’une hausse de ses crédits de 4 %, conforme au contrat d’objectifs et de moyens, soit une augmentation de 10 millions d’euros. Grâce à sa bonne gestion, la chaîne va pouvoir consacrer ces moyens à la diffusion en haute définition et sur la télévision mobile personnelle, ce que le COM n’avait pas intégré.
L’Institut national de l’audiovisuel bénéficie pour sa part d’une hausse de 3,4 % de ses crédits, qui s’élèveraient ainsi à 86 millions d’euros en 2009. Cette augmentation est une nouvelle fois conforme au COM de 2005-2009, notamment grâce au dynamisme de la redevance. On peut se satisfaire de cette hausse des crédits, qui financera notamment la numérisation intégrale des fonds menacés de dégradation. Elle récompense également à juste titre la pertinence de la politique menée par l’INA depuis la signature du COM.
Des inquiétudes apparaissent sur la budgétisation des crédits du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, le FSER, qui subventionne les radios associatives de proximité. Néanmoins, je tiens à le souligner, ces radios bénéficiaient en 2008 d’une taxe sur les recettes publicitaires des radios et télévisions, à hauteur de 25 millions d’euros. Or, celle-ci aurait forcément baissé en 2009. L’État a fait un réel effort budgétaire en dotant le nouveau programme « Soutien à l’expression radiophonique locale » de 26,5 millions d’euros de crédits de paiement pour 2009, soit une hausse de 6 % par rapport à 2008.
La difficulté majeure, pour ces radios, sera en réalité le passage au numérique, en raison des coûts de la double diffusion. Une réflexion devra donc être menée sur le soutien à leur apporter. La commission des affaires culturelles sera très attentive, lors de l’élaboration des prochaines lois de finances, à la pertinence du niveau des crédits affectés au FSER, dans la mesure où les radios associatives de proximité remplissent un rôle fédérateur très intéressant à l’échelon local.
Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur les projets du ministère visant à soutenir le passage au numérique de ces radios locales ?
Évoquons enfin le financement de l’audiovisuel extérieur. La nouvelle holding « Audiovisuel extérieur de la France », dont l’appellation n’est pas définitive, a été créée le 4 avril 2008 afin de mettre en œuvre la réforme de l’audiovisuel extérieur en regroupant Radio France Internationale, France 24 et TV5 Monde.
Les crédits du programme 115 de la mission « Médias », relatif à l’audiovisuel extérieur, s’élèvent à 232 millions d’euros pour 2009, dont 1 million d’euros pour Médi 1, la radio franco-marocaine. Les crédits du programme 844 du compte de concours financiers représentent pour leur part 65,3 millions d’euros.
Au total, l’audiovisuel extérieur serait ainsi doté de 297 millions d’euros de crédits en 2009, contre 296 millions d’euros en 2008.
Cette hausse très légère est inférieure à la seule augmentation des crédits prévus pour France 24 dans son contrat de subvention avec l’État. La répartition des crédits qui sera opérée par la société de l’audiovisuel extérieur entre les trois chaînes, en accord avec les partenaires de la France pour TV5 Monde, s’annonce donc extrêmement difficile. Les économies de structures réalisées, annoncées par M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent lors de leur récente audition par la commission des affaires culturelles et la commission des affaires étrangères, permettront peut-être de dégager de nouveaux financements. Des indications plus précises sur ce point seraient tout à fait utiles, madame la ministre.
Enfin, j’ajouterai un dernier commentaire sur la dotation de 15 millions d’euros au profit du groupement d’intérêt public « France Télé numérique ». La commission des affaires culturelles s’est clairement prononcée en défaveur de l’utilisation de la redevance pour financer ce groupement d’intérêt public.
Pour 2010, il faudra profiter de la récente création du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien », qui regroupe les crédits obtenus par la vente des fréquences libérées grâce au numérique, pour abonder les crédits du GIP.
En conclusion, conformément à mes préconisations, la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Médias » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, rapporteur pour avis.
M. David Assouline, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans un contexte particulièrement morose pour la presse écrite payante, le Président de la République a ouvert, le 2 octobre 2008, des états généraux de la presse, l’objectif étant de dégager des pistes de réflexion sur l’organisation de ce secteur, ainsi que de formuler des propositions de réforme.
Dans l’attente des conclusions et des recommandations de ces états généraux, annoncées pour la fin du mois de décembre 2008, le régime des aides à la presse est globalement reconduit dans le projet de loi de finances pour 2009.
Les aides directes à la presse s’élèveront en 2009 à un peu plus de 173 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une très légère diminution par rapport à 2008. Cette baisse a toutefois vocation à s’amplifier, à la suite de l’adoption d’un amendement en seconde délibération par l’Assemblée nationale, qui tend à minorer encore les crédits du programme « Presse » de presque 2 millions d’euros.
Je ne me livrerai pas à un commentaire exhaustif des crédits du programme « Presse » ; j’insisterai plutôt, si vous me le permettez, sur un double problème de notre dispositif d’aide à la presse : son incapacité à préserver efficacement le pluralisme de la presse et à accompagner la modernisation du secteur. Ces deux enjeux sont au cœur du débat des états généraux de la presse.
Les aides au pluralisme, d’un montant de près de 10 millions d’euros en 2009, se concentrent principalement sur le soutien aux titres à faibles ressources publicitaires. Or, c’est l’ensemble de la presse quotidienne payante qui se trouve confronté à des effets d’éviction publicitaire puissants, provoqués par la concurrence de la presse gratuite, d’internet, mais aussi de la télévision.
À cet égard, le Gouvernement a annoncé une série de mesures tendant à favoriser les revenus publicitaires des télévisions commerciales. Ces mesures me semblent inquiétantes, puisqu’elles risquent de renforcer l’effet d’éviction publicitaire dont est déjà victime la presse.
L’augmentation du quota publicitaire horaire autorisé de six à neuf minutes sur les chaînes privées, le passage de l’« heure glissante » à l’« heure d’horloge » et l’autorisation d’une seconde coupure publicitaire pendant la diffusion des œuvres de fiction provoqueront une croissance quasiment immédiate des recettes publicitaires des deux principales chaînes privées, TF 1 et M 6, de près de 500 millions d’euros, soit un montant équivalent au double des investissements dans la presse quotidienne nationale sur un an !
Par ailleurs, l’idée est parfois avancée d’abaisser les seuils de concentration pour permettre aux journaux de consolider leurs assises financières. Permettez-moi de douter de sa pertinence.
En effet, la France se caractérise déjà par une hyper-concentration de ses groupes de presse, en particulier en ce qui concerne la presse régionale.
Des soupçons croissants d’intrusion du pouvoir politique dans la sphère médiatique ont justement conduit le groupe socialiste à déposer une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur les liens existant entre le pouvoir exécutif et les organismes de presse et sur leurs conséquences pour l’indépendance et le pluralisme de la presse.
S’agissant des aides à la modernisation de ce secteur, je déplore que les moyens ne soient pas à la hauteur des ambitions affichées. Le projet de budget pour 2009 continue à privilégier des ajustements par le bas, via le soutien à la cessation d’activité professionnelle, au détriment du soutien aux projets innovants.
En effet, le montant accordé au fonds d’aide au développement des services en ligne des entreprises de presse, soit 500 000 euros pour 2009, apparaît dérisoire au regard des investissements considérables et réguliers que le développement de l’internet de presse requiert. Un investissement massif dans la création de sites internet de presse et dans le développement de rédactions bi-médias devrait clairement constituer une priorité pour le dispositif d’aides à la presse.
J’observe que la majorité elle-même a manifesté, de façon quelque peu périlleuse, son mécontentement à l’égard de l’insuffisance et du saupoudrage des aides au développement numérique de la presse. Ainsi, un amendement, qui se voulait d’appel, a été adopté à ce sujet à l’Assemblée nationale, avant que le Gouvernement revienne sur ce vote en seconde délibération.
Je conclurai en indiquant que, en dépit des réserves formulées sur le manque d’ambition du programme « Presse » de la mission « Médias », et malgré mon avis contraire, la commission des affaires culturelles a proposé d’émettre un avis favorable à l’adoption des crédits.
Je poserai enfin deux questions à Mme la ministre.
Quel avenir le Gouvernement compte-t-il réserver au statut de l’Agence France-Presse ? Je m’inquiète en effet des déclarations récentes du Gouvernement à ce sujet, qui pourraient remettre en cause l’indépendance rédactionnelle de l’AFP.
Où en est la réflexion sur la portabilité des droits d’auteur des journalistes entre différents supports ? Un avant-projet de loi sur cette question n’est-il pas justement en cours d’élaboration au ministère de la culture et de la communication ? En particulier, la sous-représentation des journalistes dans les débats des états généraux sur cette question menace la construction d’un compromis acceptable par l’ensemble des parties. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jack Ralite. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la réforme de l’audiovisuel extérieur, lancée sous l’impulsion du Président de la République, s’est traduite par la création de la société holding « Audiovisuel extérieur de la France » en avril dernier.
Cette réforme vise à offrir davantage de cohérence, de visibilité et d’efficacité à l’audiovisuel extérieur français. Elle est en cohérence avec la réforme plus générale de l’audiovisuel public, sur laquelle notre assemblée sera appelée à se prononcer prochainement.
La société holding, qui a vocation à regrouper l’ensemble des participations publiques dans les sociétés de l’audiovisuel extérieur, c’est-à-dire TV5 Monde, Radio France Internationale et France 24, a pour mission de définir les priorités stratégiques des différents opérateurs.
On a déjà beaucoup discuté de la valeur de cette réforme. Selon moi, seul l’avenir nous dira ce qu’il en est. Avant de porter un jugement définitif, il convient d’attendre qu’elle ait pu produire ses effets.
Ce n’est qu’après un certain délai, dans un an, par exemple, lors de l’examen du prochain projet de loi de finances, que l’on pourra réellement mesurer ses effets. Je souhaite d’ailleurs, madame la ministre, qu’un bilan détaillé soit alors établi.
Dans l’attente de cette évaluation, il convient, me semble-t-il, de donner leur chance aux dirigeants de la holding « Audiovisuel extérieur de la France », pour réussir là où l’État n’y est pas nécessairement parvenu. Mais, pour cela, il faut d’abord leur accorder les moyens de mettre en œuvre les réformes.
Or, lorsque je regarde les financements prévus sur les trois prochaines années, j’avoue avoir, madame la ministre, quelques inquiétudes sur ce point.
Les crédits de l’audiovisuel extérieur représentent 298 millions d’euros pour 2009, soit une quasi-reconduction de la dotation versée en 2008. Ils ne sont d’ailleurs pas tellement éloignés de ceux dont disposent les organisations similaires de certains pays proches, comme le Royaume-Uni.
À titre de comparaison, le financement de l’audiovisuel public national représente plus de 3,5 milliards d’euros.
La dotation d’Arte, la chaîne franco-allemande, s’élève, à elle seule, à 300 millions d’euros, soit l’équivalent de l’ensemble des crédits des opérateurs de l’audiovisuel extérieur, pour une couverture mondiale.
Or, selon les estimations des opérateurs pour 2009, les besoins s’élèvent à 322 millions d’euros, qui se répartissent comme suit : 117 millions d’euros demandés par France 24, conformément aux termes de sa convention de partenariat avec l’État ; 72 millions d’euros demandés par TV5 Monde ; enfin, 133 millions d’euros pour RFI.
Il y a donc, entre les demandes et les dotations prévues, une différence de l’ordre de 25 millions d’euros. Dans ce cas, la répartition des dotations entre les différents opérateurs risque d’être un réel casse-tête pour les dirigeants de la holding, à qui cette responsabilité incombe désormais.
Surtout, selon le document de programmation triennale, la subvention versée à la holding devrait diminuer sur les trois prochaines années, passant de 233 millions d’euros en 2009 à 218 millions d’euros en 2010, puis à 203 millions d’euros en 2011, soit une réduction de 30 millions d’euros.
J’en conviens volontiers, le développement des synergies et des mutualisations entre les opérateurs devrait favoriser des économies d’échelle, et donc des économies tout court.
Néanmoins, dans un contexte très concurrentiel marqué par le développement des nouvelles technologies, la réforme de l’audiovisuel extérieur risquerait à mon sens d’être compromise si les moyens venaient à diminuer trop fortement à l’avenir.
Je pense non seulement au basculement de l’analogique au numérique, au développement du multimédia – télévision par internet ou sur la téléphonie mobile –, mais aussi aux nécessaires réformes de structures, qui, souvent, ne sont d’ailleurs pas exemptes de coûts sociaux.
C’est la raison pour laquelle, tout en étant consciente des fortes contraintes budgétaires qui pèsent sur notre pays, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté plusieurs amendements visant à garantir un financement pérenne de l’audiovisuel extérieur par le biais d’une augmentation de la part de la redevance audiovisuelle versée à son profit.
Sous réserve de l’adoption de ces amendements, elle a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Médias ». (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Médias » pour 2009 sont marqués par plusieurs mesures liées à la réforme de l’audiovisuel public, lancée par le Président de la République en début d’année et que nous allons examiner prochainement au Sénat, un peu plus tard que prévu, certes, mais cela est heureux pour la qualité de nos travaux.
Cette réforme de grande ampleur de l’audiovisuel public se déroule dans un paysage audiovisuel en mutation, affecté par la révolution numérique. Le secteur audiovisuel connaît en effet actuellement des bouleversements majeurs. Il se voit contraint d’évoluer, afin, d’une part, d’accompagner les évolutions technologiques – généralisation de la télévision numérique avec dix-huit chaînes en concurrence, développement de la télévision haute définition, émergence de la télévision mobile personnelle, décollage des télévisions locales –, et, d’autre part, de s’adapter aux nouveaux modes de diffusion que sont internet et la télévision mobile.
Ce sont autant de développements que la commission des affaires culturelles a accompagnés chaque fois qu’elle en a eu l’occasion, notamment lors de l’examen des derniers projets de loi. Cela mérite d’être souligné !
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. C’est vrai !
Mme Catherine Morin-Desailly. De tels développements nécessitent des investissements lourds, dans un contexte économique aujourd’hui difficile. Toutes ces évolutions technologiques démultiplient les offres télévisuelles et remettent en cause l’univers concurrentiel des chaînes existantes, privées et publiques.
Ce paysage audiovisuel nouveau rend la réforme de l’audiovisuel public indispensable. Le groupe France Télévisions doit inventer un modèle de développement nouveau, que la commission pour la nouvelle télévision publique, dont j’ai été membre, a appelé le « média global ». Il est appelé à se transformer en entreprise unique pour poursuivre sa modernisation, ce qui ne manquera pas d’accroître la rationalisation et la synergie des moyens, et sa transformation en véritable média global.
Avec ce nouveau modèle de développement, France Télévisions aura les moyens de répondre à ces enjeux de manière globale. L’audiovisuel public doit pouvoir proposer une offre déclinable sur l’ensemble des moyens de diffusion, et de ce fait enrichie et diversifiée. La transformation d’un ensemble de chaînes et d’entreprises en un média global aura pour conséquence de mettre au cœur de l’activité de ce dernier les contenus et de recentrer les chaînes sur leur rôle éditorial.
Il faut bien entendu donner au secteur de l’audiovisuel, qui ne dispose pas des moyens adaptés à de telles ambitions, les crédits budgétaires nécessaires à la mise en œuvre de ce nouveau modèle. Comme l’ont souligné la commission présidée par M. Copé, ainsi que notre collègue Claude Belot dans son rapport spécial, si un tel développement permettra économies et rationalisation des moyens, il aura aussi un coût.
Telle est, en effet, la question principale : pour préserver un service public audiovisuel puissant, garant de la diversité et de l’expression démocratique, capable de s’adapter dans un paysage audiovisuel en mutation, il faut lui garantir un financement pérenne et dynamique.
C’est pourquoi je consacrerai les quelques minutes qui me sont imparties à cette question du financement de la télévision publique.
La mission « Médias » connaît une croissance importante, liée à la création du programme « Contribution au financement de l’audiovisuel public », qui alloue 473 millions d’euros à France Télévisions et à Radio France.
Cette somme doit permettre de compenser le manque à gagner dû à la suppression progressive de la publicité sur les chaînes publiques à partir du 5 janvier prochain, ainsi que le prévoit le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Elle correspond à l’estimation faite par la commission pour la nouvelle télévision publique, la perte de ressources publicitaires pour les chaînes du service public s’élevant à 650 millions d’euros en année pleine.
Paradoxalement, il faut avoir conscience que la suppression de la publicité sur les chaînes du service public peut être une chance pour France Télévisions, et ce pour une double raison.
D’une part, le service public de l’audiovisuel échange ainsi une recette aléatoire et en perte de vitesse – la publicité – contre une recette fixée et garantie par l’État. Le marché publicitaire est en effet morose, pour ne pas dire dépressif, et les ressources publicitaires migrent aujourd’hui vers les nouveaux médias.
D’autre part, il échange une recette contraignante pour la programmation contre une recette qui la libère. Plutôt que de se soumettre aux annonceurs et à l’obsession de l’audience, France Télévisions pourra « oser » des programmes novateurs et ambitieux.
Pour ces deux raisons, il me semble que la réforme du financement, en libérant les chaînes du service public de la publicité, les obligera à renforcer leur identité et leur différence par rapport aux chaînes privées et, par là même, la légitimité du service public de l’audiovisuel. Son financement public en sera d’autant plus justifié aux yeux de nos concitoyens.
La condition, bien évidemment, est que l’État garantisse les ressources prévues dans le contrat d’objectifs et de moyens. L’autonomie financière sera d’ailleurs l’une des conditions requises pour garantir l’autonomie tout court du président de France Télévisions.
Tel sera l’objet des quelques réflexions que je ferai maintenant sur la redevance.
À cet égard, la mission « Médias » anticipe la réforme de l’audiovisuel public, en prévoyant l’indexation de la redevance sur l’inflation, mesure que la commission des affaires culturelles et le groupe de l’Union centriste, auquel j’appartiens, réclament depuis des années, à chaque examen du projet de loi de finances. Enfin !
Il aura fallu engager cette réforme supprimant la publicité pour voir une telle mesure acceptée par le Gouvernement. Le combat aura été long et difficile, mais nous y sommes arrivés ! Permettez-moi donc d’avoir, ce soir, une pensée pour nos anciens collègues Jacques Valade et Louis de Broissia, qui furent respectivement président de la commission des affaires culturelles et rapporteur pour avis de la mission « Médias ». (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.) Ils ne sont pas avec nous pour vivre ce moment, eux qui se sont battus inlassablement en faveur de cette réforme.
Pour en revenir à la redevance, il convient, dans le contexte de la réforme de l’audiovisuel, d’en faire une ressource dynamique et pérenne. Son indexation, prévue dans le projet de loi relatif à l’audiovisuel pour compenser le manque à gagner en ressources propres de France Télévisions, rapportera ainsi 50 millions d’euros supplémentaires.
L’année dernière, j’ai rappelé que la redevance s’élèverait cette année à environ 128 euros si elle avait suivi l’indice des prix depuis 2002, alors qu’elle est fixée à 116 euros.
Elle se justifie d’autant plus que son niveau, comparé à celui qui est constaté dans d’autres pays européens, est faible. Faute d’augmentation, même légère, de la redevance, il faut, outre l’indexation, mettre fin au plafonnement des remboursements des dégrèvements de redevance, qui revient à faire financer les exonérations pour motifs sociaux par le budget de l’audiovisuel public. Ce plafonnement est contraire au principe de remboursement intégral des exonérations inscrit, par la loi du 1er août 2000, à l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Le Gouvernement doit respecter cet engagement.
En outre, comme je l’ai soutenu à plusieurs reprises devant vous, notamment l’année dernière, il conviendrait d’élargir l’assiette de la redevance en taxant les nouveaux supports permettant la réception des programmes télévisés. C’est d’ailleurs ce qui se fait en Allemagne. Aujourd’hui, une instruction fiscale exonère les ordinateurs équipés en ce sens, alors qu’ils constituent un « dispositif assimilé permettant la réception de la télévision pour l’usage privatif », pour reprendre les termes de l’article 1605 du code général des impôts.
Un tel élargissement, conforme au principe de neutralité technologique, a été proposé voilà quelques jours à l’Assemblée nationale par notre collègue député Jean Dionis du Séjour. Bien encadré, ne visant, par exemple, que les abonnés à des offres « triple play » ayant déclaré ne pas payer la redevance audiovisuelle, il serait fiscalement juste et équitable.
Enfin, et nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ce point au début de la discussion budgétaire, il nous semble anormal de faire financer l’extinction de la diffusion analogique par la redevance, comme le prévoit l’article 23 du projet de loi de finances pour 2009. Ces mesures d’accompagnement du passage au numérique supervisé par le groupement d’intérêt public « France Télé numérique » doivent être financées sur le budget de l’État. Aux yeux de la commission des affaires culturelles, qui s’est exprimée plusieurs fois sur ce sujet, ce n’est pas acceptable au moment où l’on cherche à clarifier les modalités du financement de l’audiovisuel public et à pérenniser ses ressources.
Au-delà de ces remarques, il faudra, me semble-t-il, réfléchir à une démarche pédagogique concernant la redevance. Si celle-ci n’a pas été augmentée depuis des années, c’est bien parce que sa mise en œuvre souffre d’un déficit d’explication, à la fois chez nos concitoyens et chez les parlementaires.
Il faut donc entreprendre une grande campagne de présentation de cette contribution, pour la faire accepter par nos concitoyens. Combien de Français aujourd’hui savent à quoi sert la redevance et ce qu’elle finance ? Combien d’entre eux peuvent dire combien ils payent à ce titre ? Cet effort pédagogique me semble absolument indispensable, et il sera encore plus efficace si nos concitoyens voient sur leurs écrans la différence entre le service public et les chaînes privées.
Nous aurons bien entendu l’occasion d’évoquer de nouveau et de façon beaucoup plus approfondie toutes ces questions lors de l’examen du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais terminer mon propos en attirant votre attention sur un aspect souvent méconnu du secteur audiovisuel.
C’est une industrie considérable de création, qui est source de nombreuses richesses et de nombreux emplois, en faisant travailler en partenariat des producteurs, des auteurs, des créateurs, des techniciens, ainsi que des intermittents, autant de métiers artistiques qui la font vivre et qui en vivent. Notre pays peut s’enorgueillir de cette industrie culturelle. Ainsi, la moitié des films nommés aux César 2008 étaient coproduits par France 2 Cinéma et France 3 Cinéma. Il me semble important d’avoir cela à l’esprit, à la veille de l’examen d’une réforme profonde du paysage audiovisuel français. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant de développer mon propos, je souhaiterais évoquer un souvenir.
Le 12 mai 1976, devant la commission des libertés de l’Assemblée nationale, à laquelle j’appartenais, André Malraux a pris la parole publiquement pour la dernière fois : « La meilleure loi sur les libertés serait peu de choses si elle ne se rendait pas maîtresse du plus puissant instrument de liberté et d’asservissement qui ait été conçu par l’esprit humain. La prochaine alphabétisation sera l’enseignement audiovisuel. Réforme utopique ? C’est ce que l’on a dit de toutes les grandes réformes. L’utopie, c’est l’espoir des autres… Il ne s’agit pas d’une réforme, mais d’une révolution… »
Si j’ai tenu à citer ces phrases, c’est parce que j’ai fait mien cet esprit-là, que vous pouvez retrouver dans toutes mes interventions.
Au moment où nous allons débattre du budget des médias, l’Assemblée nationale examine le projet de loi relatif à l’audiovisuel public.
Le Gouvernement considère la discussion de ce texte comme secondaire, semble-t-il, puisqu’il en a inscrit les conséquences, dès septembre, dans le projet de budget de l’État. Nous débattrons ainsi de sommes fixées pour compenser la suppression de la publicité, cette même publicité qu’un décret va effectivement rayer de la carte.
Ce projet de budget est représentatif de l’idée que se fait le Gouvernement des processus de débat démocratique et de son projet général pour le secteur des médias.
Démocratie et espace public médiatique font tous deux l’objet de mauvais coups gouvernementaux successifs, incessants et profonds. Envers et contre tous – en tout cas envers de très nombreux citoyens, professionnels et travailleurs –, de manière imperturbable, et malgré les protestations qui s’élèvent de toutes parts, le Gouvernement met en place ses projets de mainmise étatique sur les médias et de soutien aux grands groupes privés.
L’opposition et les professionnels s’expriment-ils contre la réforme de l’audiovisuel en quittant la commission Copé –j’en étais ! – ou en la désavouant publiquement ? Le Gouvernement n’en a que faire !
Les personnels de France Télévisions, de RFI, de l’Agence France-Presse font-ils grève et manifestent ? Le Gouvernement reste sourd !
Pour le Gouvernement, une seule feuille de route : étatisme et affairisme à tous les étages et dans tous les secteurs ! Qu’il s’agisse de l’audiovisuel public, de l’audiovisuel extérieur ou encore de la presse, il n’a de cesse de fragiliser et de précariser le service public au bénéfice de groupes comme Lagardère, Bouygues-TF 1, Bolloré…
Cela fait un an que je dénonce la nature réelle du projet de suppression de la publicité sur le service public. Dans cette affaire, la culture et la création sont détournées et ravalées au rang d’arguments fallacieux pour justifier de nouveaux cadeaux au privé, notamment à TF 1, principale bénéficiaire de l’amputation du service public.
Depuis l’annonce du 8 janvier, France Télévisions est entraînée dans une spirale déficitaire. D’ores et déjà, pour la fin de 2008, le groupe constate plus de 200 millions d’euros de retard par rapport à sa prévision initiale de recettes publicitaires : le conseil d’administration de France Télévisions a dû corriger plusieurs fois son budget rectificatif.
Aujourd’hui, aucun modèle économique valable de substitution à la publicité n’a été présenté et le plan d’affaires n’est toujours pas réglé.
En effet, la majorité persiste dans son refus d’augmentation, même raisonnable, de la redevance.
Les 450 millions d’euros destinés à compenser la disparition des revenus publicitaires ne suffiront pas : le budget de 2008 prévoyait un chiffre d’affaires publicitaire de 800 millions d’euros. Or la régie publicitaire du groupe indique que l’on atteindra au mieux 250 millions ou 260 millions d’euros, compte tenu des modifications de prix et de positions concurrentielles provoquées par la réforme. Il manquera donc au moins 100 millions d’euros. Et c’est sans compter que cette somme ne permettra même pas de couvrir le coût des programmes de remplacement, évalué à 70 millions d’euros.
Par ailleurs, le modèle économique proposé ne tient compte ni des besoins d’investissement dans les nouvelles technologies, ni de l’effet inflationniste sur les coûts de grille du transfert de 450 millions d’euros vers les chaînes privées, ni des coûts sociaux de cette réforme, en particulier au plan salarial.
Enfin, les diverses taxes prévues par le projet de loi font l’objet d’amendements qui les minorent et sont menacées de futures condamnations de la Commission européenne.
Cette asphyxie financière de l’audiovisuel public se décline dans le secteur de l’audiovisuel extérieur. La création, le 4 avril dernier, de la holding « Audiovisuel extérieur de la France » aura, du fait de sa forme actuelle et des mesures qui l’accompagnent, des conséquences importantes sur l’existence et l’indépendance d’organes médiatiques aussi essentiels au pluralisme de l’information que RFI ou l’Institut national de l’audiovisuel.
Cette holding, rappelons-le, réunit en son sein France 24, RFI et TV5 Monde. Son sous-financement, unanimement reconnu, est inquiétant pour le budget de RFI et de TV5 Monde : d’une part, comme l’a relevé le sénateur Claude Belot, la hausse des crédits proposés au titre de ce programme pour 2009, soit 2,5 millions d’euros, est inférieure à celle qui est proposée pour France 24, qui reçoit 3,2 millions d’euros par son contrat de subvention avec l’État ; d’autre part, aucune clé de répartition équitable de ce budget ne figure dans le projet de loi de finances.
La réalité nous fournit d’ores et déjà des éléments d’information sur le rapport de force qui s’installe dans la holding. Ainsi, RFI a dû fermer des antennes, tandis qu’il n’y a pas à s’inquiéter, semble-t-il, pour France 24.
Et c’est à un tel audiovisuel extérieur qu’un amendement vise à transférer la part de la redevance prévue pour l’INA ! C’est inquiétant, car toucher au financement pérenne de l’INA, c’est mettre en cause l’équilibre et la stabilité financière de cet établissement et s’attaquer indirectement à notre patrimoine.
Un autre amendement tend à attribuer une partie de la redevance au GIP « France Télé numérique » et donc, indirectement, à des entreprises non publiques. Or France 24, vous le savez, n’est pas une chaîne entièrement publique, puisque 50 % de son capital sont détenus par TF 1. Cela explique sans doute qu’à l’article 23 du projet de loi de finances, le mot « public » ait été supprimé de l’intitulé du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public ». Cela est significatif du hold-up que subissent les fonds publics au profit du privé.
Venons-en à la presse.
Les mauvais coups se multiplient, comme en témoignent, notamment, le départ de nombreux syndicats de journalistes des états généraux de la presse, en protestation contre le tour pro-industriel que prennent ceux-ci, mais aussi la dépénalisation de la diffamation, qui menace de transformer le droit de la presse en simple terrain de règlement de conflits entre particuliers, la menace de privatisation qui plane sur l’AFP depuis les recommandations inquiétantes du rapport Giazzi, et la hausse des seuils anti-concentration votée lors de l’élaboration de la loi de modernisation de l’économie, en juillet, par le biais d’un cavalier.
Et tandis que l’on prépare le terrain pour que les grands groupes de médias deviennent encore plus grands, le tiers secteur, notamment audiovisuel, attend toujours que l’on s’intéresse à lui.
Le présent projet de budget est l’exact reflet de cette tectonique des plaques médiatiques : le secteur public est menacé d’insularisation, tandis que le secteur privé s’apprête à devenir un continent de plus en plus menaçant pour le pluralisme et la diversité.
Non seulement nous ne pouvons voter de tels crédits, mais nous nous élevons contre le projet dont ils sont la traduction. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Christiane Kammermann. Monsieur le président, madame le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, l’année 2009 sera l’année de la réforme pour les médias, comme l’a souhaité le Président de la République.
En effet, le paysage médiatique français ne peut rester figé dans un contexte marqué par de profondes mutations technologiques et par l’évolution de nos rapports aux médias.
Tout d’abord, 2009 sera la première année de la nouvelle télévision publique, entreprise unique créée par un projet de loi examiné actuellement par nos collègues députés.
Ensuite, RFI, France 24 et TV5 Monde fonctionneront pour la première fois en commun, au sein d’une holding dénommée « Audiovisuel extérieur de la France », ce qui renforcera la visibilité de la France à l’étranger.
Cette année sera également celle de la tenue des états généraux de la presse, secteur en crise depuis plusieurs années.
J’évoquerai ces trois sujets, en m’attardant plus particulièrement sur la question de l’audiovisuel extérieur français, thème qui me tient à cœur.
En ce qui concerne le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, je tiens à souligner, sans anticiper sur nos prochains débats, combien il me semble important de libérer la télévision publique de la course à l’audimat.
Il existe aujourd’hui une concurrence grandissante entre les chaînes de télévision, mais également entre les chaînes et de nouveaux supports : internet, la télévision sur téléphone, la vidéo à la demande, etc. Grâce aux nouvelles technologies, le consommateur reçoit une offre de plus en plus étendue.
Mais la logique commerciale peut faire craindre une uniformisation des contenus, voire un nivellement vers le bas.
Notre groupe estime que la réforme est une chance : une chance pour le téléspectateur, et une chance pour France Télévisions.
Nos concitoyens doivent avoir accès à un service public qui leur offre une véritable ouverture culturelle et intellectuelle. Soustraite aux règles de la concurrence et à la nécessité de trouver des annonceurs, France Télévisions pourra affirmer sa différence et diffuser des programmes qui ne seront pas destinés à « faire du chiffre ».
De plus, dorénavant entièrement dépendante du financement public, France Télévisions aura une réelle obligation de résultats. Elle devra, encore plus qu’aujourd’hui, accorder une place importante à la création et à la diversité. Il faut bien évidemment lui donner les moyens de le faire.
Les avis sont partagés quant au mode de financement de France Télévisions.
La commission Copé a écouté tous les avis et étudié les différentes solutions possibles. Je ne souhaite pas prendre parti, mais je pense qu’il était sage de rendre progressive la suppression de la publicité, car cela permettra de mener des évaluations et d’examiner les effets de la réforme.
Au Sénat, nous sommes également sensibles à l’autre grand défi qui attend la télévision dans les prochaines années : le passage au tout-numérique, prévu pour le 30 novembre 2011.
Nous nous réjouissons, madame le ministre, que vous financiez une campagne nationale d’information et un fonds d’aide en faveur des foyers les plus modestes, et nous espérons que vous pourrez accélérer la couverture de l’ensemble du territoire. Pourriez-vous nous préciser quelles sont les dispositions prises en ce sens ?
J’en viens maintenant à la question de l’audiovisuel extérieur.
L’année 2009 sera décisive pour la mise en œuvre de la réforme, décidée par le Président de la République, tendant à regrouper au sein d’une holding l’ensemble des participations publiques dans les sociétés RFI, France 24 et TV5 Monde. En tant que sénateur représentant les Français de l’étranger, je me réjouis de cette réforme.
Depuis longtemps, il était reproché à l’audiovisuel extérieur français d’empiler les structures en multipliant les tutelles, de coûter trop cher et de manquer d’efficacité.
Dans le cadre de cette réforme, les sociétés se sont vu assigner une double mission : une mission d’influence, la France devant rivaliser avec les grands médias internationaux, comme CNN ou Al Jazeera, et une mission culturelle, consistant à promouvoir nos valeurs, c’est-à-dire la démocratie, les droits de l’homme, la laïcité, sans oublier la francophonie.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !
Mme Christiane Kammermann. Le choix de la holding permettra de faire travailler selon un même plan stratégique RFI, France 24 et TV5 Monde, en respectant la personnalité de chaque institution et en nouant des synergies entre les acteurs. Leur visibilité sera ainsi renforcée.
Vous avez donné dans la presse, madame le ministre, des exemples intéressants des synergies qui pourraient être trouvées. Vous avez notamment cité le cas de France 24, qui souhaite développer ses émissions en langue arabe, sans toutefois parvenir à trouver les financements nécessaires. RFI disposant de rédactions arabophones remarquables, je pense que nous avons là un exemple intéressant de synergie possible.
Pour 2009, le Gouvernement consacre à l’audiovisuel extérieur 298 millions d’euros.
Je souhaiterais émettre une réserve. Comme l’ont souligné nos rapporteurs, le montant des crédits est quasiment identique à celui de l’année précédente et, selon la programmation budgétaire triennale, les financements consacrés à la holding devraient diminuer en 2010 et en 2011.
Certes, des économies devraient être réalisées par la mutualisation des moyens entre les différents opérateurs, ce qui permet d’espérer une baisse des coûts de fonctionnement, mais je partage l’inquiétude de nos rapporteurs. Il serait dommage que la réorganisation des structures souffre d’une faiblesse du financement. Je souhaiterais connaître votre sentiment à ce sujet, madame le ministre.
J’ajouterai que la nouvelle organisation est une première étape et qu’il reste beaucoup à faire. Il est notamment nécessaire que RFI assainisse sa situation financière et recentre ses missions. Je rappelle que, faute d’audience, les dirigeants de RFI ont annoncé, fin octobre, leur intention de supprimer la diffusion des programmes en six langues, dont l’allemand, tandis que trois autres langues – le persan, le chinois et le russe – ne seraient plus utilisées que sur internet. RFI doit s’adapter à la concurrence grandissante des autres chaînes et des autres médias. Ne devrait-elle pas identifier des zones cibles de diffusion prioritaire ? Pourriez-vous nous éclairer sur ce sujet ?
Enfin, j’évoquerai la crise de la presse.
Le constat est connu : depuis plusieurs années, la presse française, plus particulièrement la presse quotidienne, traverse une crise.
Une analyse portant sur les dix dernières années permet de constater une diminution régulière de la diffusion des douze quotidiens nationaux, et l’on note une baisse de la diffusion de 25 % en vingt ans. La tendance est encore plus accentuée pour la presse locale.
Les difficultés du secteur sont dues à plusieurs facteurs : désaffection du lectorat, développement de l’internet et des blogs, diffusion de journaux gratuits, baisse continue des recettes publicitaires, coûts de production élevés.
Le 2 octobre dernier, le Président de la République a lancé des états généraux de la presse écrite, en soulignant qu’il était prêt à revoir les aides publiques et à lutter contre les immobilismes pour sortir ce secteur d’une crise particulièrement marquée en France.
Tous les professionnels intéressés seront réunis pour refonder un système de fabrication, de diffusion et de financement garant du pluralisme et de l’attractivité de la presse. Pour que la politique de soutien engagée soit efficace, je pense qu’il est urgent de définir quel visage devra avoir la presse de demain.
Pour 2009, les aides à la presse et les dotations de l’Agence France-Presse s’élèveront à 279 millions d’euros en crédits de paiement, soit le niveau élevé atteint en 2008. C’est un signe extrêmement positif. Il est important que le Gouvernement maintienne son effort, car la presse contribue de manière essentielle à l’information des citoyens. Elle est un acteur clé de la vie démocratique.
Le présent projet de budget traduit une politique ambitieuse et tournée vers l’avenir. Aussi notre groupe lui apportera-t-il son soutien. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, madame le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, c’est aujourd’hui un secteur tout entier qui est en pleine mutation : nous le savons bien, l’audiovisuel et la presse écrite doivent notamment faire face au bouleversement technologique du passage au numérique, à la modification des modes de consommation des médias, ainsi qu’à une concurrence internationale de plus en plus forte.
C’est pourquoi nous allons devoir rapidement relever de très nombreux défis fondamentaux afin de permettre la pérennité, la modernisation et le développement de nos médias.
La mission dont nous examinons ce soir les crédits tend à cibler au mieux ces objectifs au travers des différents programmes qu’elle comprend.
Cependant, concernant tout d’abord le programme relatif à la contribution au financement de l’audiovisuel public, je dois avouer ma stupéfaction, madame le ministre.
Le Sénat sera bientôt saisi du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Or, vous nous demandez d’adopter un projet de budget qui comporte une compensation des pertes de ressources publicitaires pour France Télévisions et Radio France, alors même que la suppression de la publicité sur les chaînes publiques n’a pas encore été définitivement votée. Qui plus est, elle est largement contestée, y compris au sein même de votre majorité. Dès lors, il me semble que nous sommes en droit de nous interroger sur le respect accordé aux travaux du Parlement.
De plus, vous me permettrez de m’interroger sur l’opportunité d’une réforme d’une telle ampleur du paysage audiovisuel français au moment où une crise financière d’une rare violence frappe notre pays et inquiète au plus haut point nos concitoyens.
Mais je ne m’attarderai pas davantage sur le sujet de l’audiovisuel, car j’aurai précisément l’occasion d’y revenir lors de l’examen du prochain projet de loi.
Je souhaiterais, pour l’instant, insister sur le thème de l’expression radiophonique locale. Seul média de proximité couvrant l’ensemble du territoire, les radios associatives locales jouent un rôle fondamental dans nos régions. Au-delà de leur dimension sociale et unificatrice à l’échelon de la vie locale, elles remplissent également des missions de formation et d’intégration, en employant plus de 2 000 personnes.
La mission « Médias » est marquée cette année par la budgétisation des crédits du programme de soutien à l’expression de la radiophonie locale, qui étaient, jusqu’au 31 décembre 2008, inscrits au sein d’un compte d’affectation spéciale. Cette budgétisation, qui intervient à la suite de la disparition de ce compte, se justifie surtout par la nécessité de compléter par des crédits budgétaires le montant de la taxe sur la publicité radiodiffusée et télévisée, jusque-là principale source de financement des radios locales associatives.
En effet, à partir de 2009, le produit de cette taxe alimentant le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, le FSER, diminuera fortement du fait de l’arrêt progressif de la publicité sur les chaînes du groupe France Télévisions, très important contributeur. Les radios locales auront donc, elles aussi, à souffrir de la mise en œuvre des dispositions du projet de loi dont je parlais tout à l’heure.
Le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, créé en 1982, est chargé de la gestion de l’aide publique aux radios associatives locales assurant une mission de communication sociale de proximité. Il s’agit de favoriser à la fois l’expression de la diversité des groupes sociaux et culturels, les échanges entre eux, le soutien au développement local, la protection de l’environnement, ou encore la lutte contre l’exclusion.
Les subventions de ce fonds sont attribuées par le ministre chargé de la communication aux radios locales associatives répondant à un cahier des charges précis et dont les ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur chiffre d’affaires total. Ces subventions assurent la survie de quelque cinq cents radios associatives.
C’est la raison pour laquelle je me réjouis vivement que l’État joue son rôle en permettant au FSER de maintenir ces aides essentielles à la diversification du tissu radiophonique. L’enjeu est crucial, car les radios devront rapidement prendre en compte les nouveaux besoins liés à la technologie numérique. Il nous appartiendra donc désormais, à nous parlementaires, de veiller à ce que les crédits votés chaque année pour le financement de ce fonds soient adaptés.
Madame le ministre, les objectifs visés au travers de votre projet de budget sont tout à fait louables. Dans l’environnement concurrentiel que nous connaissons, et du fait des bouleversements technologiques auxquels les médias doivent faire face, nous nous devons d’être très attentifs.
L’effort budgétaire que l’on relève dans les crédits de cette mission est un signe extrêmement positif. Peut-être sera-t-il à même d’apaiser certaines craintes en cette période de profonde réforme de l’audiovisuel et d’interrogations sur le devenir de la presse écrite, dont les états généraux se tiennent en ce moment.
Je voterai donc les crédits de la mission « Médias », madame le ministre, en attendant avec impatience le débat relatif à la réforme de l’audiovisuel. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, s’agissant du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public », je me bornerai à porter une appréciation sur les amendements présentés par le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, M. Joseph Kergueris.
Il nous sera en effet proposé de transférer la part de la redevance audiovisuelle actuellement affectée à l’Institut national de l’audiovisuel au financement de l’audiovisuel extérieur. M. le rapporteur pour avis indique lui-même très clairement la raison de ce transfert de ressources : « une plus forte incertitude sur le montant de la dotation publique, en particulier dans le contexte budgétaire actuel ».
Pour nous, il est hors de question de transférer cet aléa budgétaire à l’INA ! Le fait que l’INA ne soit pas une société de radio ou de télévision n’est pas un argument recevable pour mettre un terme à son financement par la redevance. Les missions de l’INA sont intrinsèquement de nature audiovisuelle.
Il s’agit, d’abord, de la sauvegarde de notre patrimoine audiovisuel, avec la tâche colossale d’assurer la préservation et la numérisation, d’ici à 2015, de plus de 820 000 heures de programmes audiovisuels enregistrés sur des supports analogiques périssables.
Il s’agit, ensuite, de l’enrichissement des collections, par acquisition et, surtout, par captage des programmes de 101 chaînes de télévision et de radio, chiffre qui doit être porté à 120 en 2009, puisque l’INA est chargé du dépôt légal de la radio-télévision.
Il s’agit, enfin, de la valorisation et de l’exploitation de ces collections en direction des particuliers ou des professionnels : ainsi, le site « inamediapro.com », qui rend possibles la recherche, la sélection et la commande d’images d’archives, constitue la première source audiovisuelle mondiale.
J’ajouterai que l’INA assure également une mission de création audiovisuelle, à travers la production et l’édition de films ou de documentaires conçus à partir de ses archives.
Je comprends tout à fait l’intention de notre collègue Joseph Kergueris d’interpeller le Gouvernement sur la pérennité et le niveau de financement de l’audiovisuel extérieur – qui, soit dit en passant, souffre d’un montage juridique et financier alambiqué –, mais cela ne peut pas se faire au détriment de l’INA.
Ces choses étant clairement affirmées, j’en viens maintenant au secteur de la presse.
Avec le lancement des états généraux de la presse, le Gouvernement a renouvelé le concept de la commission Copé, structure occupationnelle de réflexion à fonds perdus… Là encore, le Président de la République s’étant empressé de donner le « la », une partie des conclusions est connue d’avance, ce qui a incité plusieurs syndicats de journalistes à quitter la table.
À quoi bon, en effet, faire de la figuration quand les dés sont pipés, quand les groupes de travail ne sont en réalité réunis que pour entériner des réformes déjà décidées et écrites ailleurs ? Ce qui se profile, c’est bien la remise en cause des droits d’auteur des journalistes, notamment autour de la question de leur portabilité entre les différents supports de presse, l’abaissement de la plupart des « contraintes » du statut de journaliste, telles que la clause de cession, ou bien encore l’assouplissement des lois anti-concentration. Cela recoupe les principales demandes des patrons de presse !
Notre pays se caractérise déjà par une hyper-concentration de ses groupes de presse, par une intrusion croissante du pouvoir politique dans la sphère médiatique et par l’instauration en cours d’un lien de subordination entre le pouvoir exécutif et les organes de direction des télévisions publiques.
C’est ce qui a conduit le groupe socialiste, sur l’initiative de notre collègue Jean-Pierre Sueur, à déposer une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur les liens existant entre le pouvoir exécutif et les organismes de presse et de la communication audiovisuelle et leurs conséquences pour l’indépendance et le pluralisme de la presse et des médias. Face à la recrudescence des dérives institutionnelles, législatives et factuelles constatée, il devient urgent que la Haute Assemblée inscrive cette proposition de résolution à son ordre du jour et approuve la constitution de cette commission d’enquête.
Pour 2009, si le régime global des aides à la presse est reconduit, il convient de noter, cependant, que le montant des aides directes, initialement de 173,17 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une légère diminution de 1,16 % par rapport à 2008, a été revu à la baisse, à la suite de l’adoption, en seconde délibération à l’Assemblée nationale, d’un amendement du Gouvernement tendant à minorer davantage les crédits du programme 180, à hauteur de 1,87 million d’euros.
Dans ce contexte, et dans la perspective de la réforme de l’audiovisuel, des inquiétudes fortes pèsent sur les aides au pluralisme, dont le montant devra nécessairement être revu à la hausse.
Ces aides se concentrent principalement sur le soutien aux titres à faibles ressources publicitaires. Or, c’est l’ensemble de la presse quotidienne payante qui se trouve confrontée à des effets d’éviction publicitaire puissants, provoqués par la concurrence exercée par la presse gratuite, par internet, mais aussi par la télévision.
Or, les mesures à venir favorisant les télévisions commerciales – relèvement du quota publicitaire horaire autorisé de six à neuf minutes sur les chaînes privées, passage de l’« heure glissante » à l’« heure d’horloge » et autorisation d’une seconde coupure publicitaire pendant la diffusion des œuvres de fiction – vont provoquer un report de recettes publicitaires prioritairement vers les deux principales chaînes privées, TF 1 et M 6, ajoutant ainsi un facteur conjoncturel à une crise plus profonde du secteur de la presse écrite.
Pour l’heure, le secteur de la presse est suspendu aux futures conclusions de ses états généraux. Malheureusement, celles-ci risquent de sonner comme un bis repetita des orientations retenues par l’actuelle réforme de l’audiovisuel, dont les grands perdants seront les journalistes et, avec eux, l’information pluraliste et indépendante que tout citoyen est en droit d’attendre en démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame la ministre, lorsque je relis – car il faut toujours essayer de revenir aux sources – le courrier que vous avait adressé le Président de la République le 1er août 2007, j’y trouve l’affirmation suivante : « L’accès aux œuvres de l’esprit passant aussi, de plus en plus, par la médiation audiovisuelle, […] la culture doit être davantage présente dans les programmes de télévision. »
Ainsi, pour promouvoir la culture à la télévision, le chef de l’État a décidé, seul ou presque, d’organiser dans la loi, ou du moins dans le projet encore en discussion à l’Assemblée nationale, l’appauvrissement de l’audiovisuel public et l’enrichissement des groupes audiovisuels privés.
Autrement dit, pour permettre à tous d’accéder par la télévision aux œuvres de l’esprit, le Président de la République a délibérément choisi de permettre à TF 1 et à M 6 de diffuser des « tunnels » de publicité encore plus longs qu’aujourd’hui, et même de pouvoir couper une deuxième fois la diffusion de leurs programmes, notamment cinématographiques, par de la réclame. C’est bon pour l’esprit…
Dans ce débat budgétaire qui précède la bataille que nous, sénateurs de l’opposition, conduirons avec détermination, à la suite de nos camarades députés, contre le projet de réforme de l’audiovisuel voulu par le Président de la République, nous devons à la vérité de rappeler que le sous-financement de France Télévisions date non pas du 8 janvier 2008, mais du retour de la droite au pouvoir, après l’élection présidentielle de 2002.
Ce n’est d’ailleurs pas moi qui le dis, mais le rapporteur pour avis des crédits de l’audiovisuel pour 2008.
Notre ancien collègue de Broissia constatait en effet, il y a tout juste un an, que « les taux de redevance en vigueur en métropole (116 euros) et dans les départements d’outre mer (74 euros) n’ont pas été modifiés depuis 2002 (à l’exception de l’ajustement – à la baisse – consécutif à la réforme du mode de perception en 2005), dépréciant ainsi, en euros constants, la valeur de la taxe ».
Il proposait en conséquence, par deux amendements approuvés unanimement, mes chers collègues, par la commission des affaires culturelles, d’une part, de « faire passer le taux de la redevance de 116 à 120 euros en métropole et de 74 à 78 euros dans les départements d’outre-mer afin de rattraper partiellement le retard accumulé au cours des années passées », et, d’autre part, d’« instaurer un mécanisme d’indexation de l’évolution de la redevance audiovisuelle sur l’indice d’évolution des prix afin de garantir aux organismes de l’audiovisuel une progression régulière et constante de leurs ressources ».
L’objet de ces deux dispositions, combattues par le Gouvernement qui obtint alors gain de cause, était de donner à la télévision publique les moyens de saisir les possibilités de développement que lui offre la révolution numérique et, dans le même temps, de répondre aux exigences éditoriales du contrat d’objectifs et de moyens, le COM, signé le 27 avril 2007.
Nous faisons volontiers nôtre la double ambition du COM : transformer France Télévisions en « média global » – la paternité de cette idée, figurant dans le COM, ne revient donc pas à la commission Copé – proposant une offre de programmes valorisant la spécificité du service public. Nous ne comprenons cependant pas comment France Télévisions pourra la poursuivre efficacement avec les moyens à sa disposition dans les trois années qui viennent.
Selon une communication d’octobre 2007 de la Cour des comptes à la commission des finances du Sénat, la bonne exécution des COM signés avec les organismes bénéficiaires de la redevance – France Télévisions, Radio France et Arte France – supposait, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation d’au moins 3,5 % des dotations à ces sociétés en 2008.
Qu’en sera-t-il réellement au 31 décembre prochain, madame la ministre, alors que les annonceurs fuient les antennes de France Télévisions depuis le mois de janvier dernier et que le produit de la redevance risque d’être inférieur aux prévisions en raison de la conjoncture économique ?
Pouvez-vous confirmer que, dans ce contexte, le groupe France Télévisions clôturera l’exercice 2008 sur un déficit de 160 millions d’euros, alors que l’exercice précédent avait été arrêté à l’équilibre ?
Trouvez-vous normal que, du fait de cette situation budgétaire très dégradée, le directeur de l’information de France 3 n’ait plus les moyens d’envoyer des reporters à l’étranger d’ici à la fin de l’année ?
Êtes-vous satisfaite de la perspective de voir les comptes du groupe public rester déficitaires d’environ 100 millions d’euros pour l’exercice 2009 ?
Savez-vous que la direction de France Télévisions estime que le retour à l’équilibre de l’exploitation du groupe n’est pas envisageable avant 2012 ? Cela ne correspond pas à vos exigences affirmées publiquement. Quelles sont donc les mesures envisagées ? La mise en œuvre d’un plan social sera-t-elle encouragée ? Attendrons-nous 2012 ? Nous attendons en tout cas vos réponses !
Et que répondez-vous, madame la ministre, à l’inquiétude des personnels, qu’ils soient journalistes, techniciens ou personnels administratifs, réduits par certains membres influents de la majorité, tel l’inénarrable député Lefebvre, au rôle de variable d’ajustement budgétaire dans la réorganisation annoncée ?
Enfin, avez-vous demandé aux Français ce qu’ils pensaient de la suppression de leurs deux journaux télévisés préférés, c’est-à-dire le 19/20 et Soir 3 ? Une telle suppression serait la conséquence logique de l’entrée en vigueur de la version actuelle du cahier des charges de France Télévisions, qui oublie de mentionner que France 3 a vocation à proposer de l’information nationale et internationale.
Avec sa réforme de l’audiovisuel, le Président de la République aura au moins tenu sa principale promesse électorale, celle d’incarner la rupture, mais il s’agit, en l’occurrence, de la rupture avec une certaine conception de la diversité culturelle et du pluralisme démocratique auxquels contribuait jusqu’alors de manière essentielle la télévision publique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au sein de l’audiovisuel extérieur, Radio France Internationale est certainement, actuellement, la station la plus en danger.
Certes, son audience est peut-être en recul, certains de ses coûts sont peut-être trop élevés, mais il faut se rappeler que RFI est la seule radio française qui diffuse une information internationale de qualité.
S’il est vrai que les audiences sont faibles en Pologne, en Allemagne, en Albanie ou en Russie, l’émotion provoquée dans ces pays par l’annonce de la suppression des émissions dans leur langue témoigne qu’elles ne sont pas pour autant négligeables. Les évolutions en cette matière doivent donc être prudentes, même si certaines sont nécessaires, je le reconnais.
Je voudrais parler un peu plus longuement de France 24. Nous avions stigmatisé, lors de la création de cette chaîne, l’attelage baroque formé de France Télévisions et de TF 1 pour la capitalisation de la nouvelle société : l’État détient 50 % des parts et finance l’intégralité de l’investissement et du fonctionnement ; TF 1 a obtenu les 50 % restants, contre 17 500 euros.
Depuis deux ans, le rôle de TF 1 a surtout consisté à bloquer la diffusion de France 24 en France, par exemple sur l’ADSL, de peur que sa filiale LCI ne pâtisse d’une telle concurrence. C’est pour cette raison que l’on ne peut pas regarder cette chaîne à Paris.
En contrepartie de la mise de fonds de 17 500 euros en 2006 – appréciez l’énormité du chiffre ! –, combien TF 1 demande-t-elle pour le rachat de ses parts en 2008 ? Je vous le donne en cent, je vous le donne en mille : 90 millions d’euros ! Oui, vous avez bien entendu !
On nous présente comme une victoire le fait d’avoir ramené à 2 millions d’euros ces prétentions. C’est exactement comme au souk : le marchand demande énormément, il baisse beaucoup son prix, il ajoute un cadeau, mais finalement le client paie encore trop cher. En l’occurrence, il y a effectivement un cadeau : à ces 2 millions d’euros, on ajoute 1,6 million d’euros par an pendant sept ans, soit un total de 11,2 millions d’euros, pour la fourniture d’images d’archives et – il est vrai que cela coûte plus cher – pour les images de sport.
Je trouve qu’un placement rapportant 11,2 millions d’euros en 2008 pour 17 500 euros investis en 2006, soit 750 fois la mise en deux ans, c’est tout de même un placement de rêve ! Ses bénéficiaires n’ont même pas eu besoin de passer par un paradis fiscal : il suffit d’avoir des amis bien choisis et, en définitive, c’est le contribuable qui paie…
Nous qui représentons le contribuable, nous dénonçons cette opération ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je me suis réjouie d’entendre certains intervenants qui soulignaient l’ampleur de la réforme actuellement menée dans l’ensemble de notre paysage médiatique. Je crois effectivement que l’on n’avait pas vu depuis longtemps un mouvement de cette portée et de cette ambition.
S’agissant d’abord de l’audiovisuel public, la réforme de France Télévisions est actuellement discutée à l’Assemblée nationale. Elle le sera bientôt – au début de l’année 2009 – à la Haute Assemblée.
Chacun connaît le sens profond de cette réforme, qui est animée par une ambition nouvelle pour les programmes, tendant à renforcer le service public. Les projets récemment annoncés par les dirigeants de France Télévisions montrent bien que nous allons résolument dans ce sens, avec davantage de fictions intéressantes, de films, de courts métrages et une plus grande place donnée à l’Europe. Je sais combien beaucoup d’entre vous sont attentifs à ce dernier point.
Bref, il s’agit d’une véritable ambition pour le service public, servie notamment par de nouveaux horaires marquant un réel découpage de la soirée en trois parties. L’offre sera donc encore plus riche.
Cela sera permis par la suppression partielle de la publicité, entre 20 heures et 6 heures du matin, qui sera compensée par un financement pérenne et dynamique. Ce point est bien sûr très important.
Notre télévision publique est très correctement financée si on la compare aux autres. En effet, son budget s’élève tout de même, au total, à 3 milliards d’euros, dont 2,3 milliards d’euros proviennent de la redevance, 350 millions d’euros de la publicité, qu’elle continuera naturellement à diffuser en journée ou dans le cadre des décrochages régionaux, et des parrainages, 450 millions d’euros étant en outre garantis par l’État à titre de compensation de la suppression partielle de la publicité.
Inscrite dans le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, cette compensation de 450 millions d’euros a également été votée par l’Assemblée nationale lors de son examen du projet de loi de finances pour 2009 et sera soumise ce soir, dans le même cadre, à la Haute Assemblée. En effet, il est important que la perte de recettes publicitaires puisse être compensée dès le début de l’année 2009.
Comme on le sait, cette compensation est assise sur deux taxes.
Une première taxe porte sur le chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunications. Son taux est de 0,9 %, ce qui représente un produit de 370 millions d’euros. Il s’agit d’un secteur en expansion, dont les bénéfices et le chiffre d’affaires sont tout à fait considérables, qui en outre produit et diffuse lui-même toujours davantage de programmes, tendance qui ne fera que s’accentuer.
Par ailleurs, un prélèvement de 3 % sera opéré sur les ressources publicitaires des chaînes de télévision. Compte tenu de la crise actuelle, une attention particulière est accordée aux modalités de ce prélèvement. Dans un contexte de crise du marché publicitaire, il paraît en effet raisonnable de prévoir un plancher, assorti d’une taxation spécifique des éventuels surplus de recettes liés aux transferts.
En tout état de cause, cette compensation de 450 millions d’euros est garantie par l’État. Ces crédits seront donc disponibles quoi qu’il arrive.
Cette réforme de la télévision publique est essentielle et porte, je le répète, une grande ambition.
J’ai senti, au travers de vos interventions, mesdames, messieurs les sénateurs, tout l’intérêt que vous portez à la réforme de l’audiovisuel extérieur de la France.
Le financement de l’audiovisuel extérieur était jusqu’à présent non pas médiocre, mais dispersé. Comme cela a été souligné, on avait empilé des structures sans mettre en place de synergies.
La création de la société holding « Audiovisuel extérieur de la France », en avril dernier, permettra de remédier à cette situation. Elle regroupera l’intégralité du capital de RFI et de celui de France 24, ainsi que 49 % du capital de TV 5 Monde, 17 % de ce dernier restant détenu par l’INA, Arte et France Télévisions, le solde, soit 34 %, appartenant à nos partenaires francophones.
Le total des crédits consacrés à l’audiovisuel extérieur, y compris la radio Médi 1, s’élève à 298,4 millions d’euros, dont 65 millions d’euros provenant de la redevance.
Ces crédits, dont le montant n’est pas négligeable, garantissent le versement à France 24 de la subvention de 91,7 millions d’euros prévue pour 2009, ainsi que le financement de certains de ses développements. Par ailleurs, TV 5 Monde pourra, grâce à ces mêmes crédits, financer son fonctionnement et mettre en œuvre les développements prévus par son plan stratégique pour 2009. Enfin, RFI pourra amorcer son redressement financier et engager sa modernisation.
J’ajoute que RFI est un média très intéressant, car il est vraiment présent partout, ce qui est encore loin d’être le cas de France 24.
La stratégie actuelle de RFI me paraît forte. Elle consiste à développer sa diffusion partout, notamment dans les zones à fort enjeu stratégique. RFI peut jouer un rôle très important, en particulier en Afrique.
Un petit nombre de rédactions en langues étrangères installées à Paris, six en tout, ont effectivement été fermées, des études ayant montré que leur audience était très faible.
En revanche, la volonté de RFI de se développer selon des supports divers – la radio, bien évidemment, mais également internet – est très marquée. Ainsi, RFI s’attache à accroître sa diffusion en Russie, en recourant non plus aux ondes courtes, qui sont de plus en plus difficiles à capter, mais plutôt à la FM et à internet.
Il est possible d’instaurer des synergies fortes entre les différentes structures. Par exemple, le souhait de France 24 de développer sa diffusion en langue arabe était difficile à satisfaire dans l’épure budgétaire actuelle, mais l’établissement de synergies avec RFI, qui est très présente dans le monde arabe, lui permettra d’atteindre cet objectif.
En ce qui concerne le cadre pluriannuel de financement, la diminution des crédits prévue pour 2010 et 2011 correspond précisément aux engagements pris par les dirigeants actuels de l’audiovisuel extérieur de mettre en place des synergies, qui devraient permettre des gains de productivité. Cela me semble aller dans le bon sens.
Bien entendu, la trajectoire pluriannuelle de financement de la société holding « Audiovisuel extérieur de la France » fera l’objet d’une négociation dans le cadre du futur contrat d’objectifs et de moyens. Des modifications pourront être apportées en fonction des besoins : la holding a été créée en avril dernier, elle va seulement commencer à exister, et des ajustements financiers interviendront nécessairement.
J’ai également été interrogée sur les évolutions de structures de France 24, qui avait deux actionnaires essentiels. Nous souhaitons que 100 % du capital soit détenu par la holding, ce qui suppose la sortie des actionnaires privés, notamment de TF 1.
Une banque d’affaires bien connue avait valorisé la chaîne à 90 millions d’euros, soit 45 millions d’euros pour chacun des deux actionnaires. Nous avons mené des discussions pour que la sortie de TF 1 du capital s’effectue contre 2 millions d’euros, ce qui demeure raisonnable si l’on considère que la valorisation actuelle de France 24 s’établit entre 18 millions et 20 millions d’euros.
Pour être en mesure d’assurer sa diffusion, France 24 devra en effet acheter des programmes, ceux d’Eurosport par exemple. Je ne pense pas que ce soit surprenant ou scandaleux.
Tous les éléments sont en place, à mon sens, pour permettre le développement de notre audiovisuel extérieur dans de bonnes conditions.
Monsieur Thiollière, le chantier de Radio France est effectivement complexe. Il s’agit, pour l’essentiel, de travaux de mise aux normes de sécurité, notamment d’opérations de désamiantage, dont il était impossible de se dispenser.
Ces travaux sont aussi l’occasion de moderniser les installations, d’offrir un cadre fonctionnel aux salariés et d’améliorer l’insertion du bâtiment dans la ville.
Ces travaux ont été prévus dans le contrat d’objectifs et de moyens pour la période 2006-2009. Les premiers appels d’offres ont été lancés en 2007. Les réponses n’ayant pas été très satisfaisantes, il a été nécessaire de relancer la procédure pour certaines catégories d’opérations, ce qui a été fait au printemps et à l’été de 2008. La présence d’amiante dans les bâtiments a rendu les choses encore plus complexes. La date de fin de chantier, initialement estimée à 2013, est aujourd’hui repoussée à 2015.
Pour autant, les travaux ont déjà commencé, notamment avec la construction du parking souterrain. Certains travaux de réhabilitation devraient également débuter prochainement.
Le coût global du chantier, qui était initialement, en 2006, de 241 millions d’euros au titre de l’investissement et de 93 millions d’euros au titre du fonctionnement, doit aujourd’hui être revu à la hausse. Nous nous efforçons de faire baisser les coûts au regard de ce qui ressortait des premiers appels d’offres. Nous attendons d’avoir une vision globale, mais le coût sera de toute façon élevé.
J’évoquerai maintenant l’avenir du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale. Les crédits de ce fonds figuraient dans le compte d’affectation spéciale par lequel transitaient également ceux du Centre national de la cinématographie. Le produit des taxes finançant le CNC devant désormais lui être directement versé, il a été décidé de rebudgétiser le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, ce qui a le grand avantage de le soustraire aux aléas du marché publicitaire. De plus, ses crédits augmenteront de 6 %, passant de 25 millions à 26 millions d’euros.
En ce qui concerne le soutien au passage à la diffusion numérique, les radios associatives ont montré leur volonté d’être présentes dans le paysage radiophonique numérique en répondant massivement à l’appel à candidatures lancé par le CSA. Le Gouvernement portera une attention particulière à ce dossier. Un nouveau système de soutien, au sein du Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, est en cours d’élaboration, sur la base des travaux conduits avec les radios associatives pour évaluer les coûts auxquels elles vont devoir faire face. L’augmentation des crédits du fonds permettra justement la mise en œuvre de ce nouveau dispositif de soutien.
La presse traverse elle aussi une période de profondes mutations. De nombreuses réflexions sont menées afin de déterminer quelles réformes pourraient être engagées.
Les aides de l’État à la presse sont sans doute, en proportion, les plus élevées au monde. Le projet de loi de finances pour 2009 prévoit de doter la presse écrite de 282,7 millions d’euros. Il s’agit d’un effort marqué.
Afin de permettre aux bénéficiaires des aides publiques de disposer d’une meilleure visibilité économique pour mener à bien les changements nécessaires, le Gouvernement accompagnera en priorité les efforts de modernisation de la presse pour consolider le soutien traditionnel de l’État à la diffusion et au pluralisme.
En dépit des aides qui lui sont apportées, la presse écrite ne se porte pas bien. Elle est manifestement en crise, d’où la décision de mettre en place des états généraux de la presse. Il a été choisi de confier leur animation à des personnalités telles que Bruno Frappat, Arnaud de Puyfontaine, Bruno Patino et François Dufour. Des groupes de travail ont été constitués sur des thèmes précis, ce qui permet des échanges très denses, auxquels participent des parlementaires, notamment Mme Morin-Desailly. Sur les cent cinquante personnes prenant part à ces groupes de travail, une cinquantaine possèdent une carte de presse.
Un Livre vert rassemblera les différentes préconisations issues de ces états généraux. Des dissonances pourront apparaître, le consensus n’étant pas une nécessité. Ce Livre vert sera rendu public fin décembre. Le mois de janvier sera ensuite consacré à la réflexion, et les apports du Parlement seront précieux pour définir ce qu’il conviendra de faire.
Les préconisations comporteront sans doute des éléments d’ordre interprofessionnel, que l’État pourra encadrer. D’autres dispositions relèveront du règlement, voire de la loi. Je pense notamment à la question très sensible des droits d’auteur. Il faudra probablement donner un fondement législatif aux accords, pour l’heure d’une grande fragilité juridique, qui sont conclus sur ce sujet dans de nombreuses entreprises de presse.
Le rayonnement de l’Agence France-Presse est grand, mais elle est, comme ses concurrents, confrontée à de nombreux défis. Elle doit notamment procéder à une modernisation radicale de son outil de production technique.
Ainsi, le projet 4 XML, système de production multimédia intégré, lui permettra de mieux répondre aux nouvelles attentes de ses clients et de conquérir de nouveaux marchés.
L’État accompagnera bien sûr l’Agence dans cette mutation en lui accordant les moyens financiers nécessaires à son développement. Après la mise en œuvre, de 2003 à 2007, d’un premier contrat d’objectifs et de moyens qui avait permis d’apurer une situation financière dégradée, un nouveau COM liera l’État et l’AFP pour la période 2009-2013.
L’État s’engage sur une évolution régulière de ses abonnements pour l’ensemble de la période. Ainsi, le taux d’augmentation sera d’au moins 1,8 % pour 2009, 2010 et 2011. De plus, une aide spécifique à l’investissement contribuera au financement du projet 4 XML : 20 millions d’euros devraient lui être consacrés en cinq ans, dont 4 millions en 2009. Ces versements prendront la forme d’une dotation en fonds propres.
En contrepartie de cet effort financier, l’AFP s’est engagée à accroître ses recettes commerciales de 4,75 % en moyenne par an. Pour ce faire, elle s’appuiera notamment sur la croissance de deux marchés stratégiques : le multimédia et les zones géographiques à fort potentiel de croissance. Par ailleurs, l’Agence veillera au maintien de son équilibre financier. Son résultat devrait ainsi atteindre 8,4 millions d’euros au terme du COM.
Bien sûr, nous n’avons nullement l’intention de privatiser l’AFP, à laquelle nous sommes tous très attachés.
La redevance audiovisuelle a été évoquée. Il est vrai qu’elle n’a pas évolué ces dernières années, je le regrette, et je sais que je ne suis pas la seule ici. La situation de l’audiovisuel public en eût été meilleure aujourd’hui puisque la redevance tangenterait 130 euros. Il vous sera donc proposé de procéder à son indexation pour qu’au moins elle cesse de baisser. En cette période difficile, il ne faut pas peser sur le pouvoir d’achat des Français.
Madame Morin-Desailly, je comprends tout à fait votre idée de taxer les nouveaux supports et, par exemple, les ordinateurs. Cependant, je ne suis pas très convaincue, parce que les personnes qui ont seulement un ordinateur sont souvent des étudiants et qu’il me paraît difficile de les taxer : d’une part, nous ne sommes même pas sûrs de leurs pratiques exactes et, d’autre part, je crains que ce ne soit très difficile à vérifier.
Le passage au tout numérique se poursuivra effectivement jusqu’en 2011. D’ailleurs, Coulommiers sera entièrement numérique à la fin février, puis ce sera le tour de Cherbourg et sa région.
C’est un processus complexe. Le Gouvernement, cela a été rappelé, a prévu un budget pour financer la campagne d’information du grand public, mais également un fonds d’aide aux foyers les plus démunis : il ne faut évidemment pas laisser se créer une zone noire, ce qui implique d’aider les foyers exonérés de redevance audiovisuelle qui ne reçoivent les services de télévision en clair que par la voie hertzienne en mode analogique.
Il faut également financer le groupement d’intérêt public France Télé numérique. L’État le finance à hauteur de 50 %, les chaînes assumant les 50 % restants.
Le financement du passage au tout numérique par la redevance a suscité ici certaines inquiétudes. Je rappelle toutefois que les contrats d’objectifs et de moyens sont actuellement tenus et continueront de l’être, qu’ils garantissent leurs ressources aux différents médias et qu’il ne s’agit pas d’appauvrir les chaînes pour financer le GIP France Télé numérique. Si les fonds prévus pour ce dernier s’avèrent insuffisants, l’État y remédiera, car il est d’autant moins question de retarder le passage au tout numérique que celui-ci doit être une ressource importante pour les chaînes. On sait bien que cela représente un gain financier non négligeable.
Telles sont les réponses que je tenais à vous apporter, mesdames, messieurs les sénateurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur quelques travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Je remercie Mme la ministre de toutes les précisions qu’elle vient de nous apporter.
Je souhaite que nous puissions prolonger, sinon ce soir, du moins dans les jours et les semaines qui viennent, la discussion qui nous permettra de comprendre l’opération entre TF1 et France 24.
Si j’ai bien saisi, en 2006, le budget en recettes se réduit pratiquement aux dotations de l’État, avec, en 2008, 88,5 millions d’euros et, en 2009, 117 millions d’euros.
Je n’arrive pas à comprendre comment une banque, si experte soit-elle, puisse, même après la crise, valoriser à 90 millions d’euros une société dont les seules ressources sont des crédits publics. Cela n’a pas de sens ! Ne nous laissez pas, madame la ministre, sur l’impression d’une opération à ce point déséquilibrée au détriment des contribuables. C’est pourquoi je souhaite que, dans les semaines qui viennent, cette affaire puisse être tirée au clair. (Applaudissements sur quelques travées de l’UMP, de l’Union centriste et du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes.)
médias
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Médias », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Médias |
1 015 286 151 |
1 010 286 151 |
Presse |
282 691 351 |
277 691 351 |
Soutien à l’expression radiophonique locale |
26 524 800 |
26 524 800 |
Contribution au financement de l’audiovisuel public |
473 000 000 |
473 000 000 |
Audiovisuel extérieur de la France |
233 070 000 |
233 070 000 |
M. le président. L'amendement n° II-133, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Institut national de l'audiovisuel
II. – En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Presse |
||||
Soutien à l'expression radiophonique locale |
||||
Contribution au financement de l'audiovisuel public |
||||
Institut national de l'audiovisuel |
+ 86 172 400 |
+ 86 172 400 |
||
Audiovisuel extérieur de la France |
- 86 172 400 |
- 86 172 400 |
||
TOTAL |
- 86 172 400 |
+ 86 172 400 |
- 86 172 400 |
+ 86 172 400 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. Ma présentation de l’amendement no II-133 vaudra également pour l’amendement no II-136, qui, sous une forme différente, a un objet identique.
Il s’agit de transférer, à l’état B, des crédits du programme « Audiovisuel extérieur de la France » à un nouveau programme « Institut national de l’audiovisuel » dont nous proposons la création au sein de la mission « Médias ». Ce transfert de crédits correspond à un mouvement du même montant, cette fois du programme « Institut national de l’audiovisuel » au programme « Contribution au financement d’Audiovisuel extérieur de la France » du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public », que prévoit l’amendement n° II-136 déposé à l’état D.
Le sujet a été longuement évoqué. Bien évidemment, notre démarche n’est aucunement la marque d’une quelconque aversion à l’égard de l’INA, dont nous admettons tous qu’il remplit son office avec une grande efficacité. Notre souci est de trouver pour la holding Audiovisuel extérieur de la France, compte tenu du défi que cette société doit relever, un moyen de financement qui, dans les années qui viennent, lui assure une relative stabilité de ses moyens.
Tel qu’il est prévu aujourd’hui, ce financement repose très largement sur une subvention de l'État qui est versée au titre du programme 115 et, pour une petite part seulement – celle qui était auparavant dédiée à Radio France Internationale –, sur la redevance audiovisuelle, alors que ces crédits, désormais rassemblés, sont destinés à des sociétés audiovisuelles telles que TV5 Monde, RFI ou France 24.
Le fait de dépendre d’une dotation publique, singulièrement dans le contexte budgétaire actuel, est une source de grande incertitude. C’est ce qui justifie notre proposition, l’un et l’autre amendement se complétant pour en permettre la mise en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Il s’agit de substituer à la redevance une dotation budgétaire. C’est un choix stratégique, et la commission souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Je voudrais tout d’abord revenir sur le financement de l’INA.
Le législateur a toujours considéré que l’utilisation de la redevance allait au-delà du financement des seules chaînes de télévision et de radio. Il a donc décidé, dès la création de l’Institut en 1974, que l’INA recevrait une part de la redevance précisément pour assurer le financement de ses missions de service public : la sauvegarde, la conservation et la valorisation de notre patrimoine audiovisuel.
Monsieur Kergueris, je comprends très bien votre souci de sécuriser le financement de l’audiovisuel, mais le transfert de la part de redevance destinée à l’INA ne me semble pas être la meilleure solution. De toute façon, les sommes ainsi dégagées, autour de 80 millions d’euros, je crois, ne suffiraient pas à financer l’audiovisuel extérieur, dont les ressources resteraient mixtes. Au surplus, cette nouvelle répartition des crédits entre compte de concours financiers et dotation budgétaire ne simplifierait pas la maquette budgétaire…
Il vaut mieux, pour l’audiovisuel extérieur, nous appuyer sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale, qui prévoit d’encadrer la trajectoire financière de la holding Audiovisuel extérieur de la France par un contrat d’objectifs et de moyens. Nous y reviendrons, car ce projet de loi, bien sûr, vous sera également soumis.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement no II-133.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, mes chers collègues, j’avoue mon embarras.
Nous attachons tous une grande importance aux activités de l’INA. Nous nous trouvons devant une proposition qui peut sembler retirer à cet institut certains moyens qui lui étaient à juste titre accordés jusqu’ici.
Nous attachons aussi une grande importance à TV5. On connaît assez, dans cet hémicycle, l’intérêt que je porte à la francophonie. Or TV5 est sans doute l’un des plus grands succès de la francophonie et, en tout cas, une télévision indispensable à l’affirmation, à l’extérieur, de la langue française et des valeurs de la diversité culturelle. Aussi, je comprends et je partage tout à fait le désir de M. Kergueris de voir assurer dans les meilleures conditions le financement de TV5.
Actuellement, TV5 tire l’essentiel de ses ressources de la subvention de l’État français – 94 % de la part française provient de la subvention de l’État et 6 % de la redevance. Faut-il, alors que nous sommes sur le point d’aborder le débat sur l’audiovisuel, remettre ici en cause des équilibres difficiles, à l’occasion de la discussion budgétaire, sans avoir exactement mesuré les conséquences de ce que nous allons décider ?
Cet amendement est utile parce qu’il met le doigt sur un vrai problème : la nécessité de financer TV5 de manière sérieuse et pérenne ; mais il me semblerait hâtif, et peut-être imprudent, d’en décider aujourd’hui en modifiant, à quelques semaines, voire à quelques jours d’un débat de fond sur l’audiovisuel français, un équilibre par définition délicat.
Pour cette raison, je souhaiterais que chacun de nous soit sensible à cet amendement d’appel sans pour autant que nous tranchions aujourd’hui ce problème important mais complexe.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Madame la ministre, ce soir, pour une fois, nous allons nous retrouver ! (Sourires.)
En effet, nous nous élevons vivement contre l’amendement de notre collègue Kergueris, qui vise à retirer à l’Institut national de l’audiovisuel la partie de la redevance audiovisuelle qui lui revient, au profit de la société Audiovisuel extérieur de la France.
Je citerai deux des raisons de notre opposition à cet amendement.
L’INA – vous l’avez rappelé, madame le ministre – est depuis sa fondation, en 1974, une partie essentielle, même si ce n’est pas la plus visible, de l’audiovisuel public. Ses missions publiques - l’archivage, désormais numérisé et reconnu dans le monde entier, le dépôt légal de la radio et de la télévision, la recherche et la production audiovisuelle - justifient son financement par la redevance.
Soumettre ce financement pérenne à la fluctuation de discussions politiques déboucherait sur une précarisation de son budget et risquerait de remettre en cause l'équilibre de l'entreprise.
Ensuite, un tel transfert est contraire à la vocation de la redevance, qui est de financer l'audiovisuel public. La société holding Audiovisuelle extérieur de la France comprend notamment France 24, dont TF1 détient 50 % des parts.
Le rôle de la redevance a déjà été écorné en première partie de loi de finances par l’attribution d’une part de la redevance au groupement d’intérêt public « France télé numérique ». Sur le fond, cet amendement reflète les difficultés financières entraînées par la suppression de la publicité sur la télévision publique. D'ailleurs, la commission pour la nouvelle télévision publique, présidée par M. Copé, avait dans un premier temps adopté une proposition semblable avant de l’abandonner.
Pour conclure, je dirai oui à un financement correct de TV5 Monde, mais je dirai non à ce que propose notre collègue M. Kergueris. Rien ne justifie que l'INA fasse les frais de la situation de sous-financement qui a été exacerbée par la décision arbitraire du Gouvernement de bouleverser le modèle économique de la télévision publique.
C’est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n°II-133 est-il maintenu ?
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. Je retirerai volontiers cet amendement, à condition que Mme le ministre me confirme un certain nombre d’éléments.
Tout d’abord, il a eu la vertu de faire parler longuement de la belle institution qu’est l’INA, mais aussi de mettre l’accent sur ce qui préfigure la création de la société holding Audiovisuel extérieur de France.
Ce n’est ni de TV5 Monde, ni de France 24 ou de RFI qu’il s’agit. L’objectif du projet loi relatif à la communication audiovisuelle est de doter notre pays d’un outil permettant de défendre la langue française et de renforcer l’influence de la France et de ses valeurs à l’international. Efficacité et sérénité sont de mises pour atteindre ce but. Nous pourrons en ce sens nous inspirer des modèles développés à l’étranger. Devant se livrer à un exercice semé d’embûche, les responsables, directs ou indirects, devront avoir à leur disposition des moyens suffisants et une lisibilité dans le temps. Cela nous semble indispensable.
En outre, ce texte tend à faire de la société holding « Audiovisuel extérieur de France » une institution audiovisuelle publique. Les modalités de désignation de son président et celles relatives à l’organisation du conseil d’administration sont semblables à celles qui sont appliquées à une structure publique. Par ailleurs, l’action de cette société holding relève à l’évidence d’une mission de service public. Enfin, son financement est assuré par des dotations de l’État et par l’attribution d’une part de la redevance.
J’ai compris, madame le ministre, qu’une convention d’objectif et de moyens, qui permet une certaine lisibilité, sera applicable à « Audiovisuel extérieur de la France ». Cette institution sera toutefois soumise aux aléas budgétaires, et à l’incertitude qui en découle.
Madame le ministre, la commission des affaires étrangères soutient ce projet, mais il lui appartient de s’assurer que cette nouvelle structure bénéficie de financements à la hauteur de ses besoins. S’il existe toujours une différence entre les besoins exprimés et les crédits obtenus, quelles solutions pouvez-vous nous apporter à ce sujet ? Pouvons-nous espérer la mise en place d’un financement relativement stable et pérenne ? Je vous remercie par avance de votre réponse et je retire donc cet amendement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre. Je suis reconnaissant à M. Kergueris d’avoir retiré l’amendement n°II-133. Je lui confirmerai que le financement d’Audiovisuel extérieur de la France fera l’objet d’un contrat d’objectifs et de moyens, qui sera bien évidemment soumis à la Haute Assemblée. Ainsi le Gouvernement témoignera-t-il de son engagement à bâtir un audiovisuel extérieur digne de nos ambitions.
M. le président. L'amendement n° II-133 est retiré.
L'amendement n° II-134, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du programme « Audiovisuel extérieur de la France » : « Action audiovisuelle extérieure ».
La parole est à M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. Par les amendements n°II-134 et n°II-135, il est proposé de substituer à l'intitulé « Audiovisuel de la France » l’intitulé « Action audiovisuelle extérieure ». L’audiovisuel extérieur est un ensemble composite, qui regroupe à la fois des opérations strictement françaises, et d’autres menées en partenariat avec des pays comme la Suisse, la Belgique, le Québec ou le Canada, et ce au moyen de TV5 Monde notamment. Nos partenaires ont parfois eu le sentiment d’être tenus à l’écart de nos délibérations sur ces sujets. Au cours de la conférence tenue à Vancouver les 26 et 27 novembre, les échanges avec nos partenaires ont permis de dissiper ces craintes. Cet amendement serait à leur égard un signe de notre volonté de poursuivre une collaboration fructueuse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Il s’agit de deux modifications d’intitulés, l’une sur la mission « Médias », l’autre sur le compte spécial « Avances à l’audiovisuel ». M. Claude Belot, rapporteur spécial de la commission des finances, avait déjà formulé cette proposition l’année dernière. La commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Tout d’abord, l’intitulé « Audiovisuel extérieur de la France » désigne également un programme budgétaire. Par ailleurs, je l’avoue, cette formulation nous plaisait particulièrement. L’appellation « Audiovisuel extérieur de la France » a déjà été déposée et je m’interroge sur les conséquences d’une éventuelle adoption de votre amendement. Je m’en remets donc à la sagesse de Haute Assemblée.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Médias », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de cette mission, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte spécial : avances à l’audiovisuel
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des amendements portant sur les crédits du compte spécial : « Avances à l’audiovisuel », figurant à l’état D.
État D
(En euros) |
||
Avances à l’audiovisuel |
2 997 645 613 |
2 997 645 613 |
France Télévisions |
2 039 141 200 |
2 039 141 200 |
ARTE France |
232 348 970 |
232 348 970 |
Radio France |
559 694 843 |
559 694 843 |
Contribution au financement d’Audiovisuel extérieur de la France |
65 288 200 |
65 288 200 |
Institut national de l’audiovisuel |
86 172 400 |
86 172 400 |
Passage à la télévision tout numérique |
15 000 000 |
15 000 000 |
M. le président. L'amendement n° II-135, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du programme « Contribution au financement d'Audiovisuel Extérieur de la France » :
« Contribution au financement de l'action audiovisuelle extérieure ».
Cet amendement de coordination a déjà été soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° II-136, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
France Télévisions |
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ARTE France |
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Radio France |
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Contribution au financement d'Audiovisuel Extérieur de la France |
+ 86 172 400 |
|
+ 86 172 400 |
|
Institut national de l'audiovisuel |
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- 86 172 400 |
|
- 86 172 400 |
Passage à la télévision tout numérique |
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|
TOTAL |
+ 86 172 400 |
- 86 172 400 |
+ 86 172 400 |
- 86 172 400 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-136 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial : « Avances à l’audiovisuel », figurant à l’état D.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de ce compte spécial, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 63 qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Médias ».
Articles additionnels après l'article 63
M. le président. L'amendement n° II-85, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Après l'article 63, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le président-directeur général et le directeur général délégué de la société « Audiovisuel extérieur de la France » rendent compte à intervalles réguliers devant les commissions des finances, des affaires culturelles et des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat des priorités de leur action et de l'exécution des dépenses consacrées à l'audiovisuel extérieur.
La parole est à M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis.
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. Les auteurs de cet amendement ont souhaité permettre au président-directeur général et au directeur général délégué de la société holding « Audiovisuel extérieur de France » de venir rendre compte régulièrement de leurs activités devant les commissions des affaires étrangères, des affaires culturelles et des finances.
Rappelons-le, l’État est seul propriétaire du capital et les financements attribués à « Audiovisuel extérieur de France » proviennent pour l’essentiel de dotations publiques, votées chaque année par le Parlement dans le cadre des lois de finances. Dès lors, le Parlement devrait pouvoir auditionner les responsables de la société holding et être informé de ses activités. Nous savons que le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle prévoit la présence de représentants du Parlement au conseil d’administration d’Audiovisuel extérieur de la France. Il s’agit ici de la simple formulation d’un souhait. Ces auditions permettraient aux dirigeants de la société holding de présenter au Parlement les orientations et les objectifs stratégiques assignés à Audiovisuel extérieur de la France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. La commission des finances est évidemment favorable à toute mesure permettant le renforcement du contrôle parlementaire et émet donc un avis favorable.
Toutefois, cette proposition nous semble anticipée. Elle aurait en revanche sa place dans le prochain débat sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle. À cette heure avancée, je propose que l’on s’en tienne à des considérations strictement budgétaires. Il serait donc peut-être plus judicieux de reporter l’examen de cette mesure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Je suis favorable à l’esprit de cet amendement. Toutefois, je pense préférable d’intégrer cette proposition à la discussion sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et suggère son retrait.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n°II-85 est-il maintenu ?
M. Joseph Kergueris, rapporteur pour avis. Je le retire. Il s’agira simplement de compléter le projet de loi afin de prévoir une possibilité de contrôle de la commission des affaires étrangères.
M. le président. L'amendement n° II-85 est retiré.
L'amendement n° II-228, présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, M. Renar et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 63, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa du I de l'article 39 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le taux : « 8 % » est remplacé par le taux : « 2,5 % ».
II. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Médias
L'amendement n° II-229, présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, M. Renar et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 63, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 143 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie est abrogé.
II. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Médias
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Nous souhaitons revenir sur une disposition votée le 3 juillet dernier, en catimini, en pleine torpeur estivale, au cours de la discussion de la loi « fourre-tout » de modernisation de l'économie.
La formulation adoptée de l’article 37 bis de cette loi, avait été très fortement suggérée à l’Assemblée Nationale par notre collègue Frédéric Lefebvre, député des Hauts-de-Seine. De nombreuses chaînes de télévision ont implanté leur siège social dans ce département. Je pense notamment à TF1 à Boulogne Billancourt, à M6 à Neuilly-sur-Seine, ou encore à Direct 8, propriété du groupe Bolloré, à Puteaux. Dès lors, on comprend aisément l’activisme audiovisuel de M. Lefebvre.
Cet article 37 bis modifie la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dite loi « Léotard ». Il assouplit les règles relatives à la concentration dans le secteur de la télévision. Ainsi, le seuil d'audience à partir duquel un actionnaire ne peut détenir seul une chaîne a été relevé. Il passe de 2.5% à 8 % de parts d’audience.
En votant cette disposition, le législateur est revenu sur une garantie du pluralisme des médias. Au prétexte du « modèle économique fragile » des chaînes de la TNT, selon les mots de Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de nouveaux cadeaux ont été offerts à des groupes comme Bolloré, TF1 ou M6, qui détiennent aujourd'hui de nombreuses parts dans plusieurs chaînes de la TNT.
Pourtant, ces mêmes groupes avaient fortement combattu la mise en place de la TNT en 2000. Aujourd'hui, la TNT se développe et leur position a changé.
Si nous voulons revenir aujourd'hui sur ce texte, c’est parce que cette disposition comme d’autres font système avec le projet actuel d'asphyxie de l'audiovisuel public par la suppression de la publicité au profit des chaînes privées.
Le président de la République ne cesse de le répéter, il veut des « groupes de médias puissants ». Pour notre part, nous ne cesserons de militer en faveur d’un espace médiatique sain, pluraliste et indépendant, ce que seuls de véritables seuils anti-concentration pourront garantir. C’est pourquoi nous vous demandons de voter ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Monsieur le président, nous avons ce soir deux types d’amendements : des amendements qui anticipent sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et d’autres qui reviennent sur la loi de modernisation de l’économie votée l’été dernier, la loi LME.
En l’occurrence, les amendements nos II-228 et II-229 reviennent respectivement sur les articles 142 et 143 de la loi LME.
Monsieur Renar, la commission des finances ne reviendra pas sur ces dispositions et ne vous suivra pas. Elle émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les deux amendements. Pour l’amendement n° II-228, il est dommage, à mon avis, d’obliger une chaîne à vendre 51 % de son capital dès lors qu’elle a du succès.
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.
M. Jack Ralite. On nous dit d’attendre la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle pour statuer. Mais, quand on a voté la loi LME au mois de juillet, on ne nous a pas dit d’attendre. On l’a fait avant. Ces cavaliers du mois de juillet sont plutôt sur des percherons que sur des chevaux de course.
Dès lors, l’argument devient incompréhensible.
M. le président. J’appelle en discussion les articles 86, 87 et 88 qui sont rattachés pour leur examen aux crédits du compte spécial : Avances à l’audiovisuel public.
Avances à l’audiovisuel
Article 86
Au dernier alinéa du 3° de l’article 1605 bis du code général des impôts, les mots : « l’année 2008 » sont remplacés par les mots : « les années 2008 et 2009 ». – (Adopté.)
Article 87
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2009, un rapport analysant les avantages et les inconvénients du maintien des dispositions prévues par l’instruction codificatrice n° 05-029-A8 de la direction générale de la comptabilité publique du 6 juillet 2005. – (Adopté.)
Article 88
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2009, un rapport analysant l’évolution des frais d’assiette, de recouvrement et de trésorerie de la redevance audiovisuelle depuis 2004 – (Adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances de la mission « Médias ».
Monsieur le président de la commission des finances, il est une heure moins le quart. La conférence des présidents interdit de commencer l’examen des crédits d’une mission après minuit. Si vous souhaitez déroger à ce principe, j’accepterai de bon cœur.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je reconnais toute votre courtoisie et votre bienveillance, monsieur le président.
Il est vrai que nous avons posé le principe de ne pas engager la discussion des crédits d’une mission au-delà de minuit, mais nous arrivons au dernier soir de la discussion des crédits des missions. Par conséquent, mes chers collègues, ce serait une épreuve de vous demander de revenir demain à dix heures.
Si Mme le ministre le veut bien et si vous-mêmes, mes chers collègues, l’acceptez, nous pourrions maintenant commencer l’examen des crédits de la mission « Culture ».
Je rappelle que le Sénat est invité à se réunir demain à quatorze heures pour examiner les crédits de la mission « Sport, vie associative, jeunesse » et les crédits de la mission « Économie ».
M. le président. Qu’en pense le Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Je souhaite commencer maintenant l’examen des crédits de la mission « Culture ».
M. le président. Avant de vous inciter, mes chers collègues, à respecter scrupuleusement votre temps de parole, parce que je trouve déraisonnable de travailler à des heures pareilles un vendredi soir, je vous propose d’interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à zéro heure cinquante, est reprise à zéro heure cinquante-cinq.)
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Culture » (et articles 59 octies et 59 nonies).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la mission « Culture » continue à être partagée en trois programmes : le programme 175 « Patrimoines », le programme 131 « Création » et le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».
Le compte d’affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale », qui leur était associé, a disparu.
La mission représente au total : 2,841 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,782 milliards d’euros en crédits de paiement.
Ces crédits sont complétés par 55,83 millions d’euros en autorisations d’engagement et 42,19 millions d’euros en crédits de paiement par des fonds de concours, profitant essentiellement aux dépenses d’investissement du programme 175 « Patrimoines » ; 55 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, par un financement extrabudgétaire, issu des recettes de cession du patrimoine immobilier de l’État – compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Ces crédits seront affectés, pour 20 millions d’euros, au Centre des monuments nationaux, pour 20 millions d’euros aux écoles d’architecture, pour 9,3 millions d’euros à l’Opéra de Paris et l’Établissement public du parc et de la grande Halle la Villette et pour 5,7 millions d’euros au Grand auditorium à la Villette.
La mission emploie 29 104 équivalents temps plein travaillé, dont 11 130 pour le ministère et 17 874 pour les établissements publics, qui en constituent depuis toujours la force de frappe essentielle.
Les dépenses fiscales affectées à la mission sont de 1,2 milliard d’euros environ, dont 500 millions d’euros pour le ministère et un peu moins de 700 millions d’euros pour les grands opérateurs.
La principale observation depuis l’an passé, c’est le profond déséquilibre entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement.
Depuis le projet de loi de finances pour 2008, les bleus budgétaires, qui sont beaucoup plus clairs, contiennent des tableaux présentant le suivi des crédits de paiement associés à la consommation des autorisations d’engagement qui présentent la « soutenabilité » de la politique publique.
En 2008, il apparaissait que 6,5 % des crédits de la mission « Culture » servaient à couvrir des engagements antérieurs à 2008, cette proportion s’étend à 12,6 % pour le programme 175 « Patrimoines ».
En 2009, ce pourcentage est de 11 %, soit un quasi-doublement. À la fin de l’année 2009, les engagements pris et non couverts s’élèvent à 1 559 millions d’euros, à comparer avec les 2 790 millions d’euros ouverts au titre de la mission.
Cette glissade est particulièrement menaçante pour le programme « Patrimoines » : 22,66 % des crédits ouverts en 2009 serviront à financer des engagements pris avant 2009. Le solde des engagements non couverts par des crédits de paiement à la fin de 2009 sera supérieur au montant des crédits ouverts en 2009 : 1 129 millions d’euros seront alloués à la politique du patrimoine en 2009 et 1 136 millions d’euros seront dus au 31 décembre 2009 au titre de cette même politique. L’affaire est maintenant bien connue, nous en avons parlé lors de la dernière réunion sur les monuments historiques.
Notons que la contrainte est moins forte pour les deux autres programmes de la mission. La part des crédits 2009 consacrés aux engagements antérieurs est de 3,28 % pour le programme 131 « Création » et 2,77 % pour le programme 224 « Transmission des savoirs ». Le solde des engagements non couverts à la fin de l’année ne sera donc, si l’on peut dire, que de 30,81 % pour le programme 131 et de 20,7 % pour le programme 224.
Il convient, bien sûr, de s’interroger sur la capacité du ministère à honorer à l’avenir les engagements déjà pris et les coûts éventuels du ralentissement de la couverture des engagements que prévoit le projet de loi de finances pour 2009, soit pour l’État – éventuelles pénalités contractuelles –, soit pour les créanciers du ministère, à commencer par les entreprises et les collectivités locales.
C’est en ce sens que je vous présenterai un amendement de réduction des autorisations d’engagement de moitié pour l’année à venir, bien qu’il s’agisse d’un amendement de principe qui ne sera probablement pas voté, mais qui vise d’abord à susciter le débat.
Ne faut-il pas aussi prendre en compte les engagements prévus par les contrats État-régions, soit 250 millions d’euros supplémentaires, et les besoins d’investissements inéluctables du ministère et de ces opérateurs, à commencer par l’auditorium de la Villette appelé encore « philharmonique de Paris », déclaré prioritaire par le Président de la République ?
Logiquement, compte tenu non seulement de la situation budgétaire en général, mais aussi de cette fuite en avant sur les crédits du patrimoine, il conviendrait de ne se lancer, au cours des prochaines années, dans aucun grand projet culturel.
La gestion du passé est, à elle seule, suffisamment contraignante. L’entretien des monuments historiques a fait l’objet de prévisions extrêmement sombres. Il suffit de rappeler le rapport sur l’état du parc monumental français, prévu par l’article 90 de la loi de finances pour 2007, à la suite d’un amendement de votre commission des finances, qui conclut sur un investissement global de 2 milliards d’euros dans les cinq ans à venir, soit 400 millions d’euros par an. La commission des affaires culturelles a fait également la même étude.
Or nous nous trouvons face à des enjeux pharaoniques. La Philharmonie de Paris coûterait en investissement 204 millions d’euros hors taxes. Les coûts de fonctionnement de l’association porteuse ne sont pas évalués. Il est question d’un partage entre l’État, la Ville de Paris et la région. L’État devrait donc payer 91,8 millions d’euros. Le projet de loi de finances inscrit 139,97 millions d’euros, soit 48,17 millions d’euros de plus. La part de l’État serait donc portée de 45 % à 68,6 %, au titre du « financement de la procédure de dialogue compétitif » dans l’hypothèse d’un partenariat public-privé.
Il est prévu, pour le fonctionnement, 5,7 millions d’euros en autorisations de programme et en crédits de paiement, compte tenu d’un financement spécifique à partir du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». J’ai demandé des éclaircissements sur ces différents points à Mme la ministre.
On admire la bienveillance du Conseil de modernisation des politiques publiques chargé de mettre en œuvre la révision générale des politiques publiques, qui a décidé de la réalisation du Grand auditorium dans ces conditions. Mais enfin, puisque telle est la volonté du Président de la République, n’insistons pas !
Par ailleurs, il faudra aussi compléter le financement du plan de modernisation des écoles d’architecture, qui s’élève à 157,93 millions d’euros. Ainsi, 35 % des crédits alloués sont hors ministère de la culture, provenant du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Quelles cessions immobilières viennent nourrir le compte d’affectation spéciale permettant ces financements qui dépassent le budget de la mission « Culture » ?
Pourra-t-on compter, comme semble l’espérer Mme le ministre dans le dossier de présentation du projet de budget pour 2009, sur l’affectation d’une recette fiscale pérenne ? Et si oui, laquelle ? Les paris en ligne non sportifs ? Ce n’est pas encore décidé ! La Française des Jeux ? N’en parlons pas, elle est déjà sollicitée pour le financement du sport !
L’expérience tentée l’an dernier avec le Centre des monuments nationaux avait débouché sur un décevant fonds de concours au budget de la DAPA, la direction de l’architecture de l’architecture et du patrimoine.
Mais tout n’est pas négatif dans ce projet de budget, qui prévoit un apport particulier pour les monuments appartenant aux collectivités locales et aux propriétaires privés, avec 103,51 millions d’euros au titre des autorisations d’engagement.
L’important, surtout pour les entreprises spécialisées du groupement français des entreprises de restauration de monuments historiques, le GMH – elles sont fort capables de se faire entendre –, est de leur donner de la visibilité à moyen terme, ne serait-ce que pour le renouvellement de leurs ouvriers spécialisés, dont certains pourraient être qualifiés, à la manière japonaise, de « trésors vivants », donc de « trésors mortels ». (Sourires.)
De même, il convient de se féliciter que la commission des finances ait décidé de supprimer le plafonnement à 200 000 euros de l’avantage fiscal accordé pour les monuments historiques non ouverts au public, qu’avait adopté l'Assemblée nationale contre l’avis du Gouvernement ; c’est l’article 42 bis. Rappelons que la dépense fiscale ainsi évaluée entre 45 millions d’euros et 100 millions d’euros, selon les sources, vient compléter, ou suppléer, une dépense budgétaire hélas, déficiente, mais les temps sont durs ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis.
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il m’appartient, en cinq minutes – c’est peu, mais j’espère que j’aurai le temps de dire l’essentiel –, de rapporter les crédits des deux programmes « Patrimoines » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui représentent respectivement 41 % et 30 % des dotations de la mission « Culture ».
Je limiterai mon intervention à quatre points qui ont particulièrement retenu, cette année, l’attention de la commission des affaires culturelles.
J’évoquerai d’abord le patrimoine monumental.
Vous savez, madame la ministre, combien le Sénat, et plus particulièrement notre commission, y est attentif. Pour 2009, les crédits consacrés à l’entretien et à la restauration des monuments historiques s’établiront à 303 millions d’euros, grâce notamment à l’apport de 20 millions d’euros provenant de la cession d’immeubles de l’État.
Je salue l’effort que cela représente eu égard aux contraintes budgétaires. Néanmoins, notre commission n’a pas caché ses préoccupations.
En effet, la situation est tendue dans certaines DRAC, les directions régionales des affaires culturelles, en raison du volume des engagements passés restant à couvrir, ce qui conduit à différer le lancement d’opérations nouvelles, avec les conséquences que nous connaissons pour les entreprises spécialisées et la conservation des bâtiments. Par conséquent, il serait souhaitable de disposer d’un état des lieux précis de la situation, région par région.
Un récent rapport sur l’état sanitaire des monuments classés, que mon collègue Yann Gaillard vient à l’instant d’évoquer, montre que 20 % d’entre eux sont en situation de « péril ». Ainsi, selon cette étude, 400 millions d’euros par an seraient nécessaires. Une mission d’information, présidée par Philippe Richert et dont j’étais le rapporteur, avait abouti, en 2006, aux mêmes conclusions.
Il apparaît donc plus que jamais nécessaire d’affecter une ressource complémentaire durable en faveur des monuments historiques. Nous avons eu successivement les recettes de la privatisation des autoroutes, la taxe additionnelle aux mutations immobilières, puis, cette année, une partie des ventes de l’immobilier de l’État.
Des pistes sont à l’étude, avez-vous indiqué, madame la ministre, devant la commission, pour ce qui concerne les paris en ligne, lesquels ne sont pas encore autorisés, ou un prélèvement sur le produit de la Française des Jeux, qui est déjà très convoité par de nombreux autres secteurs de la vie sociale. Quoi qu’il en soit, il importe que l’on aboutisse à une décision définitive.
Par ailleurs, j’aborderai le mécénat, levier essentiel de financement.
En 2007, le Sénat avait introduit dans la loi de finances un dispositif fort intéressant. Les textes réglementaires doivent être pris dans les meilleurs délais, car il est aujourd'hui essentiel de mettre en place ce dispositif au plus vite.
Enfin, je tiens à souligner la préoccupation exprimée par la commission des affaires culturelles à l’égard de l’amendement tendant à plafonner le régime fiscal des monuments historiques introduit par l'Assemblée nationale.
Nous présenterons, au nom de la commission, des amendements dont l’objet est de revenir partiellement sur cette disposition, qui va à l’encontre des engagements très fermes pris par le Premier ministre en juin dernier. Ce régime fiscal, comme le régime qui protège les secteurs sauvegardés au titre de la loi Malraux, est en effet un soutien essentiel à l’initiative privée pour la préservation et la transmission de notre patrimoine historique.
Permettez-moi maintenant de formuler une remarque sur l’archéologie préventive.
La commission des affaires culturelles exprime, là aussi, son souci de voir concilier les besoins de la recherche, qu’elle ne conteste pas – le rapport annuel de l’INRAP, l’Institut national de recherches archéologiques préventives, que j’ai reçu hier est intéressant à de nombreux égards –, avec les impératifs du développement économique et urbain dans cette période ô combien difficile pour l’activité économique française. Il est essentiel que la réforme envisagée et conduite par le ministère de la culture permette de trouver une solution alliant recherche et développement.
Concernant les musées, je me réjouis d’abord que le projet de budget pour 2009 confirme la priorité donnée à la réalisation du MUCEM, le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, situé à Marseille. Je ne peux manquer de souligner l’importance de ce projet dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée et de la désignation de Marseille comme capitale de la culture en 2013.
Je salue également l’action que vous avez entreprise, madame la ministre, en liaison avec Mme le garde des sceaux, pour renforcer la sécurité des musées et lutter contre le trafic illicite des biens culturels.
Je m’interroge, en revanche, sur les suites qui seront données à l’expérimentation de la gratuité des musées. Notre commission avait engagé, en mars dernier, un débat en séance publique, qui avait permis aux sénateurs des différents groupes d’exprimer un certain nombre de réserves quant à l’impact de cette mesure sur la démocratisation des publics des musées, objectif visé. Le bilan partiel de l’opération montre que les mesures ciblées en faveur des jeunes ont incontestablement été efficaces, mais qu’il n’en va pas de même pour les autres publics. C’est la raison pour laquelle il importe que le Gouvernement fasse rapidement connaître ses intentions en la matière.
Enfin, pour ce qui concerne le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », j’insiste sur le développement de l’éducation artistique, point essentiel.
En 1959, avait été confiée à André Malraux la mission de rendre accessibles au plus grand nombre les œuvres capitales de l’humanité. Comme je l’ai souligné depuis que je suis rapporteur de ce budget, cette question est toujours d’actualité, et aujourd'hui plus que jamais.
Je me réjouis de constater que l’histoire des arts est introduite à l’école primaire, mais j’attends avec impatience qu’elle le soit également au lycée et au collège.
Telles sont les remarques que je voulais formuler, mes chers collègues, dans les quelques minutes qui m’ont été imparties.
En conclusion, la commission des affaires culturelles a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits des programmes « Patrimoines » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » pour 2009. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis.
M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tenterai, dans les cinq minutes qui me sont imparties, de vous présenter quelques-unes de mes observations et préoccupations concernant, d’une part, le programme « Création », qui représente 38 % des crédits de la mission « Culture » et, d’autre part, le secteur du cinéma.
Au titre du programme « Création », 15 millions d’euros de ressources extrabudgétaires seront affectées à l’action n° 1 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant ». Mais, compte tenu de la programmation pluriannuelle retenue pour la période 2009-2011, j’estime nécessaire de pérenniser les ressources extrabudgétaires au bénéfice de la création.
Par ailleurs, je m’interroge sur le nouvel et intéressant indicateur relatif à « l’optimisation de la procédure de traitement des demandes de subvention ». Pourquoi le coût de ce traitement varie-t-il du simple à plus du double, selon l’instance qui instruit le dossier ?
Pour ce qui concerne les autorisations de programme, je comprends tout l’intérêt du projet de la Philharmonie de Paris à la Villette, mais je m’inquiète du fait que, dans un cadre budgétaire contraint, ce projet concentre une part importante des crédits d’investissement, sans parler des frais de fonctionnement à venir. Il ne faudrait pas que les grands projets parisiens viennent creuser à l’excès le déséquilibre existant entre la capitale et les régions.
Les conclusions des Entretiens de Valois devraient être bientôt connues. Parmi les objectifs figure le souhait de voir engager une collaboration régionale et une meilleure articulation entre les interventions de chacun des acteurs. Ce point est essentiel, mais je relève que les collectivités territoriales souffrant elles-mêmes de contraintes budgétaires, il me paraît difficile qu’elles puissent renforcer plus encore leur soutien au spectacle vivant et, plus généralement, aux actions culturelles.
L’an dernier, nous avions soutenu l’idée de créer un observatoire du spectacle vivant qui centraliserait l’ensemble des données statistiques et pourrait ainsi produire des données fiables et incontestables. Il semble aujourd’hui seulement envisagé de connecter des observatoires régionaux ou autres. Madame la ministre, quelle sera l’efficacité d’une telle mise en réseau ?
Par ailleurs, que pensez-vous de la proposition émise par certains professionnels de créer un centre national du spectacle vivant, à l’image du Centre national de la cinématographie, le CNC, dans le domaine du cinéma ?
Concernant la diffusion et la circulation des spectacles, certains progrès ont été réalisés, mais l’évolution est trop lente. En effet, même dans les domaines où les efforts sont les plus importants, à savoir le théâtre et le cirque, chaque spectacle fait l’objet de 2,7 représentations en moyenne, contre 1,9 toutes disciplines confondues !
Pour le secteur du cinéma, je rappelle que le présent projet de loi de finances prévoit l’affectation directe au CNC des taxes du compte de soutien aux industries cinématographiques et audiovisuelles. Il en résulte, parallèlement à la suppression du compte d’affectation spéciale, la disparition de la mission « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ». Nous sommes satisfaits de constater que le Parlement reste néanmoins informé, de la même manière qu’aujourd’hui, de l’évolution et de l’utilisation des ressources du CNC. Sa gouvernance sera parallèlement réformée, mais je regrette que l’option d’un projet de loi spécifiquement dédié au secteur du cinéma n’ait pas été retenue.
Par ailleurs, pouvez-vous nous préciser, madame la ministre, les dispositions envisagées pour soutenir les investissements nécessaires au développement de la projection numérique ?
Des mesures sont prévues pour renforcer l’attractivité de notre territoire en vue d’y accueillir davantage de tournages, grâce à la création d’un crédit d’impôt international. Nous soutiendrons cette initiative.
L’an dernier, des professionnels avaient formulé des propositions sur la réforme du dispositif de soutien au secteur. Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, les orientations retenues dans ce domaine ?
Pour ce qui concerne l’emploi culturel, je relève que la courbe du nombre d’intermittents allocataires remonte, après trois années de baisse, et le déficit des annexes 8 et 10 est de 1 milliard d’euros environ !
S’agissant des pratiques amateurs, j’attire l’attention sur la nécessaire souplesse dont doit bénéficier l’action des bénévoles, que ce soit dans le domaine culturel comme dans d’autres d’ailleurs, tel le sport. Un cadre trop rigide ne permettrait pas de prendre en compte la diversité des situations et conduirait à la suppression pure et simple de nombreuses activités.
Par ailleurs, j’ai quelques doutes sur la proposition de directive européenne visant à allonger la durée de protection des droits des artistes interprètes et exécutants, et par conséquent de leurs producteurs.
Est-il normal d’aligner cette durée de protection sur celle des auteurs, en la faisant passer de cinquante ans à quatre-vingt-quinze ans ? N’est-ce pas contre-productif et contradictoire avec le souhait de favoriser le développement de la diffusion légale des œuvres ? Ne protège-t-on pas ainsi davantage les enfants et petits-enfants des artistes que ces derniers eux-mêmes ?
Enfin, cette démarche ne viendrait-elle pas en contradiction avec le projet consistant à réserver le droit de suite sur la revente des œuvres d’art aux seules œuvres des artistes vivants ? J’ai d’ailleurs aussi des doutes sur ce dernier projet concernant le droit de suite.
En conclusion, je vous indique que notre commission des affaires culturelles a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits consacrés au programme « Création » de la mission « Culture » pour 2009 ainsi qu’aux deux articles rattachés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Je vous rappelle que le temps de parole attribué aux groupes pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le 2 décembre dernier, j’étais au Louvre, sous la pyramide de Pei, où Pierre Boulez et l’Orchestre de Paris, à l’invitation du directeur du musée, Henri Loyrette, interprétaient L’Oiseau de feu de Stravinsky. Il y avait trois mille personnes, dont cinq cents lycéens. Ce fut un moment de bonheur.
La veille, au théâtre des Amandiers, à Nanterre, avec quinze autres passionnés de théâtre, nous regardions et écoutions Dominique Blanc interpréter le si beau texte de Marguerite Duras intitulé La Douleur, sous le regard affectueux et rigoureux de Patrice Chéreau. Là aussi, la voix et les gestes de Dominique Blanc nous faisaient un merveilleux cadeau de pensée et de sensibilité.
J’ai scrupule à ne pas nommer d’autres rendez-vous artistiques, mais, à travers ces deux aventures, je voulais dire ce que des artistes, de toutes disciplines, sensibilités et origines, créent actuellement en France.
Ces créations, je voudrais tant que tout un chacun en soit partenaire, notamment les salariés, que le grand patronat, tente – il y parvient trop souvent – de transformer en « boxeurs manchots » ! Je voudrais tant que la vitalité de ces actes fasse comprendre le bien-fondé d’une politique de création. Je voudrais aussi, très simplement, remercier les artistes.
Parlant ainsi, je participe au mouvement de colère dite, non dite, rentrée, mais qui explosera un jour, car le budget du ministère de la culture, cinquante ans après sa création, n’est plus une garantie. Souvent, il détricote le travail accompli avec des artifices dont il faut dire un mot.
Pour le budget de 2007, Renaud Donnedieu de Vabres annonçait « +7,8 % de moyens pour la culture ». Pour le budget 2008, madame la ministre, vous avanciez : « +3,1 % de progression des crédits de la mission “Culture” par rapport à la loi de finances pour 2007 ». Pour l’année 2009, sur ce budget de cinquante ans d’histoire, vous communiquez de la manière suivante : « +2,6 % de progression des crédits de la mission “Culture”, y compris les ressources extrabudgétaires, par rapport à 2008 ».
La première réaction venant à l’esprit de qui croit à l’imprimé ministériel, c’est que les crédits de la création, des savoirs, de la culture, du patrimoine, ont augmenté de près de 14 % en trois ans. Mais, je le dis douloureusement, ce n’est pas la vérité. Pour 2007, 70 millions d’euros avaient été comptabilisés deux fois, ce qui ramène la hausse à 5,48 %. Pour 2008, 70 millions d’euros étaient encore là qui ne pouvaient y être, l’augmentation n’étant plus que de 0,5 %, ce que vous avez d’ailleurs dit le 26 septembre dernier, lors de votre conférence de presse budgétaire.
Pour l’année 2009, le chiffre de 2,6 % est exact, mais, sur trois ans, les 14 % ne feront en fait que 8,7 %. Si l’on considère les ressources extrabudgétaires, donc non pérennes, que vous avez tenacement obtenues de Bercy, au cours des trois dernières années, les crédits de la culture n’ont augmenté que de 3,6 %.
Avec une inflation de 6,6 %, la progression en trois ans, avec les ressources extrabudgétaires, n’est donc que de 2,1 %, soit de 0,7 % par an !
Au surplus, Bercy et l’Élysée veulent qu’un gel de 5 % soit inscrit dans le budget des équipements. Ce « gel » prendra donc le chemin de l’institutionnalisation.
Enfin, nous votons avec ce projet de budget pour 2009 un budget triennal encadré jusqu’à la fin de l’année 2011. Les chiffres bruts sont, pour 2010, de 17 millions d’euros, soit une augmentation de 0,60 %, et, pour 2011, de 18 millions d’euros, soit une hausse de 0,64 %. Or l’inflation annuelle dépassera très sûrement ce 0,6 % par an !
Ainsi, les budgets tels que présentés sont des budgets opaques, voire, souvent, tricheurs. Je ne trouve pas cela très « cultivé ». Et si j’épluchais les comptes, tout cela se confirmerait…
L’action culturelle réservée au cinéma est toujours en maltraitance, malgré le secours du CNC. Le patrimoine en appelle aux collectivités locales pour tendre vers sa bientraitance. Quant à l’INRAP, qui manque de tout, il est envoyé à Reims, non pas dans le cadre d’une délocalisation, mais comme compensation à la fermeture d’une caserne !
Je ferai une remarque supplémentaire : sur ces trois ans, 415 suppressions d’emplois sont prévues. Voilà qui fragilise le ministère et maltraite les femmes et les hommes, chaînon essentiel de la politique culturelle. Si l’on évalue à environ 40 000 euros l’économie réalisée pour un emploi supprimé, on obtient 17 millions d’euros, soit 0,7 % du budget du ministère, qui représente moins de 1 % du budget de l’État. C’est pour ces « queues de cerises », et presque uniquement pour cela, que la RGPP fragilise considérablement l’organisation et les missions du ministère, en déstabilisant gravement tous ses services !
Élargissons notre regard. Avec le budget que je viens d’évoquer, madame la ministre, vous organisez les « Entretiens de Valois », dont la conclusion tarde. Toutes les organisations de théâtres publics et privés – ce sera mon seul exemple – ont exprimé leur vif désaccord sur ce budget, lundi 24 novembre, au Théâtre du Rond-Point.
Vous avez la responsabilité de la presse, et M. Sarkozy organise les « États Généraux de la presse écrite », où les journalistes sont mal considérés, même blessés, tandis que M. Lagardère propose que les kiosquiers aient la liberté de choisir les titres pour leurs clients, en ayant la possibilité de moduler leurs prix de vente jusqu’à 5 % en plus ou en moins.
Vous avez la responsabilité des médias, que M. Sarkozy bouleverse en profondeur selon la règle de « l’étatisme-affairisme mêlés ». La commission Copé s’est volatilisée, les personnels de France Télévisions ont fait grève trois fois et, en juin et septembre, deux lieux de spectacles parisiens ont été remplis par des contestataires de la réforme.
Mme Pécresse a autonomisé les universités et, mercredi, en conseil des ministres, elle a annoncé que 20 % des crédits attribués, contre 3 % auparavant, impliqueraient la performance et l’obligation de résultats liés à la professionnalisation. Par ailleurs, le CNRS est malmené et vous avez vu l’ampleur et la vigueur de la réponse de ses chercheurs.
M. Darcos « mine » le système scolaire et ne vous accompagne plus pour l’éducation artistique qu’avec des confettis. Les manifestations d’enseignants et de parents étaient de grande ampleur le 20 novembre dernier, et ce n’est pas fini.
Comment ne pas voir, ne pas considérer, ce bloc offensif, le Gouvernement malmenant comme jamais la pensée, l’imaginaire, la création, l’intelligence, la recherche et la formation ? Les premières colères devraient vous alerter.
Car il y a un texte fondateur, que je ne cesserai de rappeler, dessinant le modèle d’une société de contrainte, et qui est devenu la feuille de route des pouvoirs publics, sans qu’aucun débat au Parlement ait eu lieu. Je veux parler du rapport Jouyet-Lévy de décembre 2006, L’économie de l’immatériel, la croissance de demain, écrit par huit inspecteurs des finances et onze dirigeants d’entreprise, en présence d’un artiste.
Ce rapport a la même importance qu’eut, en 1978, le rapport Nora-Minc, intitulé L’Informatisation de la société. Aujourd’hui, il s’agit de libéraliser les secteurs de la culture, de la recherche, de la création et de l’enseignement, la révolution numérique étant convoquée comme un prétexte pour enclencher la mutation socio-économique recherchée.
Pour cela, il convient de traiter les actifs immatériels dans une approche technico-financière. Les auteurs du rapport demandent notamment la transformation des universités et des musées en les identifiant à des « marques », « éléments du rayonnement de la France ».
Au nom de l’économie de l’immatériel sont remis en chantier les droits d’auteur. Cette économie est élastique et floue, inspirée d’un modèle publicitaire et managérial. Certes, elle souligne un fait majeur, l’importance de la connaissance et de la culture dans la société et l’économie, mais elle prend valeur idéologique en visant la standardisation de la culture et de la connaissance en simple « actif comptable » et, surtout, en se transformant en projet normatif et global de société.
Le chercheur Pierre Musso écrit : « Parce que la culture est, selon la formule de Gaston Bachelard, “une accession à une émergence”, l’économie de l’immatériel étendue aux affaires de l’esprit risque de conduire à “un saut dans le vide”, comme le pressentait Yves Klein, l’artiste visionnaire de l’immatériel ».
C’est dans ce texte que le Président de la République a puisé l’injonction qu’il vous a faite, en août 2007, d’étudier la mise en cause du caractère inaliénable du patrimoine muséal. Jacques Rigaud, fondateur de l’ADMICAL, la première grande démarche de mécénat dans notre pays, vous a rendu un rapport d’opposition, où il écrit : « Force est de constater que l’on a affaire à une approche réductrice, car strictement commerciale […] On ne saurait certes en conclure que le plus sûr moyen de “valoriser le patrimoine de la Nation” soit de le vendre ».
Ainsi, la première tentative d’application du rapport Jouyet-Lévy a échoué. Pourtant, que d’efforts gouvernementaux !
J’ai participé aux deux rencontres européennes sur ce sujet, l’une engagée par vous-même, les 2 et 3 octobre, intitulée « Les Nouvelles frontières de l’économie de la culture », au musée du Quai Branly, une autre organisée par votre prédécesseur, les 16, 17 et 18 novembre au Palais des Papes, intitulée « Le Forum d’Avignon ».
Au cours de la première, les déclarations manichéennes – c’était avant la crise visible ! – de l’ancien secrétaire d’État à la culture des Pays-Bas m’ont frappé, puisqu’il affirmait : « Il faut savoir si l’on choisit le libéralisme ou le protectionnisme […] Si l’on choisit l’art pur ou l’art appliqué ».
Au cours de la seconde rencontre, vous-même et le Premier ministre avez parlé, entourés d’une grande assemblée des industries culturelles d’Europe et même d’Amérique. Certains parlent d’« industries créatives », ce qui n’est pas un détail. La presse a nommé cette réunion le « Davos de la culture ». À votre place, je me méfierais ! On en a dit, des vérités éternelles à Davos, et le monde, aujourd’hui, tremble de cette éternité auto-endommagée. À méditer…
De ces deux réunions, j’ai conclu que le Président de la République et chaque ministre dans sa partie, quand il s’agit de pensée, de création, d’imaginaire et d’intelligence, appellent les grands groupes culturels et médiatiques à prendre en charge toute une partie de la politique culturelle, avec la déréglementation que cela implique. Vous savez bien que l’industrie et le mécénat culturels ne se sont développés que quand l’État a augmenté ses crédits.
« L’homme symbolise comme il respire », selon Pierre Legendre. Déjà, il respire de plus en plus mal, et il serait gêné, comprimé, éteint, hébété, réduit enfin, dans son aptitude à la symbolisation ? Nous ne l’accepterons pas !
Marguerite Duras, dans La Douleur, œuvre transmise par Dominique Blanc, m’a ébloui au Théâtre des Amandiers. Elle évoque, dans un autre ouvrage, « le hurlement intérieur du refus ». Quant à Boulez, mon bonheur de rendez-vous au Louvre, il eut cette simple et décisive phrase, dans l’un de ses cours au Collège de France : « L’histoire n’est pas ce qu’on subit, mais ce qu’on agit. » (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au risque de me répéter, je dirai que le grand rendez-vous attendu avec la culture est, en 2009, celui de la réforme de l’audiovisuel public, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale. Pour autant, ce débat sur l’audiovisuel public ne doit pas monopoliser toute notre attention ce soir.
Madame la ministre, vous présentez un budget en légère progression. Je ne peux que me réjouir de cette hausse, car il est plus que jamais nécessaire de soutenir la diversité culturelle par la mobilisation de financements appropriés, qui permettent d’assurer l’accès de tous à l’information, ainsi qu’aux activités artistiques et culturelles, aux loisirs et, plus largement, de garantir le développement d’une culture indépendante face à l’industrie, concentrée entre les mains d’un nombre très réduit d’opérateurs privés. C’est le prix à payer pour que nos concitoyens restent des acteurs à part entière de la société de demain.
La hausse de votre budget devrait donc nous rassurer pleinement, mais elle repose sur des bases de calcul et des jeux d’écriture parfois étonnants.
Il est tout à fait louable de votre part de veiller à la bonne gestion des crédits dont vous avez la responsabilité, mais la culture ne se résume pas à des coûts.
Je ne vous surprendrai pas en affirmant que je ne suis pas la seule à douter de la sincérité des chiffres. D’une part, ils nous sont présentés en euros courants, sans tenir compte de l’inflation et, d’autre part, ils semblent gouvernés par une logique de performance et de rentabilité.
Gonflés par des opérations exceptionnelles, telle la vente de la marque du Louvre à Abu Dhabi, pour 400 millions d’euros, encaissables sur trois exercices, ils sont parfois artificiellement abondés par des opérations immobilières.
Ces écritures masquent une absence de financement structurel et une situation d’endettement très inquiétante qui, loin de pérenniser le secteur de la culture, le fragilisent. Et les exemples ne manquent pas pour illustrer ce constat.
Mon premier sujet de préoccupation concerne les autorisations d’engagement. Comment pouvez-vous nous présenter un budget en hausse qui comporte autant d’arriérés de paiement ? Ceux-ci sont évalués à 450 millions d’euros, rien que pour les directions régionales des affaires culturelles. En termes de comptabilité d’entreprise, parler de faillite serait plus approprié.
Un autre point vient illustrer le biais que vous donnez aux lignes budgétaires. Les crédits du programme 224 concernent, notamment, le partenariat de votre ministère avec les associations du secteur de l’éducation populaire. Il semblerait que le périmètre de ce programme ait changé. Toute référence à la charte pluriannuelle conclue avec ces associations a disparu. Pouvez-vous nous confirmer que cette charte d’objectifs, signée en 1999, avec les onze fédérations d’éducation populaire sera pérennisée ? Celles-ci sont, jusqu’à aujourd’hui, des acteurs privilégiés du développement culturel de nos territoires et des partenaires de confiance pour les collectivités territoriales.
Permettez-moi de m’attarder plus longuement sur les crédits que vous entendez consacrer, madame la ministre, au spectacle vivant et au livre.
Je serai particulièrement attentive au soutien effectif que vous pourrez apporter, comme vous prévoyez de le faire, au développement du livre numérique, des librairies indépendantes, des médiathèques de proximité et, plus généralement, à la démocratisation de la lecture. Tous les efforts en ce sens ne peuvent qu’être encouragés !
Pour ma part, en tant qu’élue locale ayant sous ma responsabilité la gestion d’une médiathèque, d’une salle de cinéma et d’une salle de spectacle municipales, j’agis au quotidien pour promouvoir et diffuser la culture de proximité dans toute sa diversité.
Dans cette perspective, le spectacle vivant devrait être davantage valorisé, car il est un excellent outil pour faire vivre nos territoires et, avec eux, nos cultures régionales avec leurs spécificités. Il connaît un succès croissant auprès du public et donne du corps à notre identité culturelle. Les crédits de paiement que vous y consacrez atteignent environ 650 millions d’euros. C’est insuffisant au regard des coûts incompressibles qui correspondent essentiellement à des dépenses de personnel. Il faudrait faire un effort supplémentaire, madame la ministre. C’est pourquoi je soutiens la proposition de M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis, qui vise à pérenniser les ressources extrabudgétaires de 15 millions d’euros issues de cessions immobilières.
Je ne peux m’éparpiller en évoquant chaque point du projet de budget de la mission « Culture », mais je voudrais encore dire quelques mots sur deux points.
D’une part, en ce qui concerne la valorisation de l’enseignement artistique à l’école dans le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », j’espère que l’introduction de l’histoire de l’art comme matière au primaire puis au collège sera un « plus » et ne se fera pas au détriment de l’initiation aux pratiques artistiques, mais sera accompagnée d’une pédagogie vivante, faite de sorties aux concerts et aux spectacles, ainsi que de visites dans les musées, même si, là aussi, il faudra en assumer le coût.
D’autre part, permettez-moi d’insister sur la nécessité de rétablir l’équilibre des dépenses entre une capitale « budgétivore » et des territoires en demande. Heureusement, Marseille va permettre de rééquilibrer la balance en faveur de la province ! (Sourires.)
Pour terminer, je voudrais évoquer les Entretiens de Valois, dont nous ignorons encore les conclusions, alors qu’ils auraient dû fournir des orientations budgétaires susceptibles de déterminer notre vote. Mais nous aurons tout le temps nécessaire pour les étudier avant la discussion du projet de loi de finances pour 2010…
Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, madame la ministre, ainsi que sur le devenir du statut des intermittents du spectacle et la reconnaissance des bénévoles, qui font vivre notre patrimoine culturel et les pratiques amateurs ?
Chaque euro consacré à la culture est un euro bien employé. C’est pourquoi tous les membres du groupe RDSE n’auront de cesse, madame la ministre, de vous demander des efforts supplémentaires !
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’année 2009, qui est celle de la célébration du cinquantième anniversaire de la création du ministère de la culture, sera à n’en pas douter une année charnière pour l’ensemble des acteurs culturels de notre pays.
La réforme de l’audiovisuel public, la mise en place d’une nouvelle législation sur la protection des droits d’auteur sur internet, les conclusions des États généraux de la presse ou encore celles des Entretiens de Valois sont autant de mesures qui impacteront le rapport de nos concitoyens avec le monde de la culture et de la création pour les années à venir.
Dans ce contexte de quasi-foisonnement des réformes engagées par votre ministère, nous nous attendions, avec mes collègues du groupe socialiste, à la présentation d’un budget offensif et volontaire d’accompagnement des mesures engagées. Il n’en est rien.
L’augmentation des crédits du ministère de la culture et de la communication, qui passent de 2,750 milliards d’euros en 2008 à 2,821 milliards d’euros en 2009 - soit une hausse affichée de 2,6 % - doit être relativisée. Cette augmentation est tout d’abord celle des crédits de paiement, qui incluent 35 millions d’euros de ressources extrabudgétaires issues de cessions d’immeubles appartenant à l’État, donc des recettes non pérennes.
Hors ressources extrabudgétaires et hors dépenses de personnel - ces dernières étant incompressibles -, ladite augmentation n’est plus que de 0,2 %, c’est-à-dire qu’elle est quasi nulle.
En outre, cet affichage en hausse ne concerne pas les autorisations d’engagement de votre ministère, qui chutent de 2,7 % par rapport à 2008, si l’on déduit les dépenses de personnel et les ressources extrabudgétaires.
Les capacités de dépense de votre ministère seront donc inférieures à ce qu’elles étaient l’an passé, alors que, dans le même temps, la révision générale des politiques publiques vous impose un gel de 5 % des crédits.
Dans ces conditions, on comprend mieux, madame la ministre, le désarroi que vous avez exprimé auprès de nos collègues de l’Assemblée nationale lors de l’examen en commission élargie du projet de budget de la culture. Vous aviez en effet eu ce mot, permettez-moi de vous citer : « Quand je m’observe, je me désole, mais quand je me compare, je me console ! »
Permettez-moi de vous dire que nous ne partageons pas du tout ce sentiment et que nous sommes loin de nous sentir consolés, quelle que soit la situation de vos homologues européens. Bien au contraire, nous sommes inquiets de la faiblesse des moyens qui vous sont alloués.
S’agissant du programme « Patrimoines », sinistré depuis six ans, les crédits destinés à la conservation, à l’entretien et à la restauration des monuments historiques seront, en 2009, de 283 millions d’euros, soit 4 millions d’euros de moins qu’en 2008. Quant à l’endettement des DRAC, il atteindra 600 millions d’euros, soit deux ans de crédits budgétaires. Je n’insiste pas davantage sur les lacunes de votre budget en la matière, mon collègue Yves Dauge aura l’occasion d’y revenir.
Le programme « Création » de la mission « Culture » est présenté en progression de 2,8 %, passant de 798 millions d’euros à 821 millions d’euros en 2009. Mais, là encore, il faut relativiser, car il s'agit d’un effet d’optique. En effet, hors ressources extrabudgétaires, la progression n’est que de 0,6 %. Les industries culturelles progressent, certes, de 24 %, mais uniquement en raison des 6,7 millions d’euros inscrits pour la création de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, la HADOPI. Les crédits affectés aux arts plastiques stagnent et ceux qui sont alloués au livre et à la lecture chutent de 2,2 %.
J’en viens maintenant au spectacle vivant, dont la hausse affichée des crédits de 2,4 % n’est, une fois de plus, que le fait de l’affectation de 15 millions d’euros issus des recettes de cessions d’immeubles appartenant à l’État. Vous faites de nouveau appel à des ressources extrabudgétaires, qui viennent certes, avec 5 millions d’euros affectés aux DRAC, rétablir partiellement l’équilibre entre les crédits centraux et crédits déconcentrés, mais qui ne sont pas renouvelables.
Or les documents budgétaires qui nous ont été transmis sont clairs, du moins sur ce point des recettes extrabudgétaires : il y est explicitement dit que « ces dotations viennent en substitution des crédits budgétaires habituellement alloués ». En d’autres termes, l’augmentation de 15 millions d’euros sera effective en 2009, mais elle fragilise le mode de financement régulier du spectacle vivant en introduisant une ressource ponctuelle et non pérenne. Or, vous le savez, madame la ministre, le spectacle vivant est un secteur dont les acteurs, pour mener à bien leur projet artistique, ont particulièrement besoin de lisibilité vis-à-vis des subventions qui leur sont attribuées.
Il s’agit de soutenir un réseau de près de mille lieux de création, de production ou de diffusion situés sur l’ensemble du territoire et destinés aux théâtres, aux arts du cirque et de la rue, à la musique, à la danse ainsi qu’aux centres culturels pluridisciplinaires. Pour la plupart d’entre eux, qui n’intègrent pas les opérateurs historiques des arts dramatiques que sont les établissements publics nationaux, toute création est un risque, artistique certes, mais également financier.
Pour le théâtre et le cirque, par exemple, mais c’est valable pour l’ensemble des représentations en public, il ressort que chaque spectacle fait en moyenne l’objet de moins de deux représentations. Nous serons attentifs à ce que ce très faible taux de représentation ne soit pas utilisé comme un prétexte pour limiter les subventions attribuées par les services centraux ou déconcentrés de votre ministère. En effet, on ne calcule pas l’efficience d’un spectacle - terme barbare en matière culturelle - en fonction du succès qu’il rencontre auprès du public.
C’est pourtant ce que sous-entend l’obligation de résultat mentionnée dans la lettre de mission que vous a remise le Président de la République à votre entrée en fonction. Ce dernier estime en effet que la démocratisation culturelle, c’est avant tout « veiller à ce que les aides publiques à la création favorisent une offre répondant aux attentes du public ». Or cette obligation de résultat est un non-sens en matière culturelle.
Vous conviendrez qu’on ne fabrique pas un spectacle en fonction de son succès escompté auprès du public. Ou alors on catégorise les goûts artistiques et culturels présupposés du public selon son âge, son origine sociale, et l’on finit par ne subventionner que des lieux et des troupes qui proposent un type bien défini de spectacles. En d’autres termes, on formate et on assèche la création originale.
C’est si vrai que cette obligation de résultat ainsi formulée a déclenché, de manière finalement salutaire, les foudres de l’ensemble des professionnels concernés, qui vous ont demandé la mise en place, l’an passé, d’un « Grenelle de la culture », rebaptisé finalement « Entretiens de Valois », qui arrivent aujourd’hui à leur terme et dont les conclusions devraient être rendues dans les jours à venir.
Madame la ministre, les Entretiens de Valois se concluront-ils par des propositions concrètes pour augmenter de manière significative le nombre de représentations en public de chaque spectacle ? La circulation des œuvres doit notamment être encouragée entre les théâtres publics et les théâtres privés. Il y va de la démocratisation de l’accès à la culture dont votre ministère a fait l’une des priorités de son action. Or tout amalgame entre démocratisation et uniformisation serait mal venu.
Les professionnels du spectacle vivant sont d’ailleurs très inquiets et craignent que leurs principales revendications ne soient pas prises en compte dans le cadre des conclusions des Entretiens de Valois. C’est ce qu’ils ont exprimé le 24 novembre dernier, au Théâtre du Rond-Point.
Les employeurs du spectacle vivant, public et privé, associés à l’Union fédérale d’intervention des structures culturelles, l’UFISC, voyaient en effet dans les Entretiens de Valois l’opportunité de co-élaborer avec les services du ministère de la culture et de la communication une loi d’orientation et de programmation pour le spectacle vivant.
Une telle loi représenterait à leurs yeux le meilleur moyen de repenser les liens existants entre les structures publiques et privées et de mutualiser entre elles la diffusion des spectacles afin d’en augmenter le nombre de représentations. Or il semble que cet objectif ne fasse plus partie des priorités de votre ministère.
C’est d’autant plus inquiétant qu’une telle loi d’orientation et de programmation pourrait également être le moment de la clarification des responsabilités respectives de l’État et des collectivités territoriales en matière de financement culturel. Une meilleure articulation des interventions entre l’État, les DRAC et les collectivités constituait d’ailleurs l’un des quatre grands objectifs que s’étaient fixés les groupes de travail constitués dans le cadre des Entretiens de Valois.
Il faut cependant relever que les collectivités souffrent elles-mêmes de contraintes budgétaires, notamment dans cette période de crise. Il ne serait donc pas raisonnable d’alourdir leurs charges lorsqu’elles assument déjà plus des deux tiers des interventions publiques en matière culturelle.
Par ailleurs, le gel de 5 % des crédits de votre ministère au titre de la RGPP fait peser sur les épaules des programmateurs publics et privés un risque réel de récession sur la chaîne création-production-diffusion et, par conséquent, sur l’emploi dans le spectacle vivant. Il faudra donc prendre en compte l’ensemble de ces éléments lors de la future renégociation des annexes 8 et 10 de la convention UNEDIC sur le régime d’indemnisation du chômage des intermittents du spectacle. Nous serons tout particulièrement attentifs sur ce point.
Vous l’avez compris, madame la ministre, nous attendons les conclusions des Entretiens de Valois.
Face à la faiblesse de votre projet de budget pour le spectacle vivant, qui repose exclusivement sur des ressources extrabudgétaires ponctuelles, nous attendons une réforme à même de redonner du souffle à la création artistique et de convaincre les plus hautes instances gouvernementales de l’intérêt pour notre pays d’un grand plan de relance culturelle publique, car, pour l’heure, vos moyens sont si faibles, madame la ministre, que la politique publique culturelle risque de disparaître.
Nous sommes d’autant plus inquiets que la loi de programmation des finances publiques pour la période 2009-2011 prévoit, pour le programme « Création », hors ressources extrabudgétaires, une baisse de 3 % des moyens d’interventions du ministère de la culture. Il y a là un choix politique clair auquel nous ne pouvons souscrire. C’est pourquoi, malheureusement, le groupe socialiste du Sénat ne votera pas les crédits alloués à la mission « Culture » pour 2009. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget de la mission « Culture » se caractérise par une stabilité des crédits, laquelle est garantie pour les années 2009, 2010 et 2011. Il devrait permettre, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, de dégager des marges de manœuvre suffisantes pour faire face aux besoins réels de ce secteur, à condition de pérenniser les ressources extrabudgétaires indispensables.
S’agissant du programme « Patrimoines », les crédits alloués en faveur des monuments historiques pour 2009 sont consolidés à leur niveau de 2008. Il est surtout à noter que cette stabilisation s’inscrit dans une perspective pluriannuelle. Un socle de crédits budgétaires connu et garanti pour les trois ans à venir, c’est une excellente chose quand on sait que les fluctuations budgétaires ont des conséquences désastreuses sur l’état général des monuments.
Je rejoins d’ailleurs ici l’avis de M. le rapporteur spécial, Yann Gaillard, qui juge nécessaire d’estimer le caractère d’urgence des travaux d’entretien ou de restauration prévus afin de mieux orienter les crédits. Nous savons tous que la dégradation d’un monument entraîne des travaux de réparation souvent bien plus coûteux que des travaux d’entretien.
Cependant, je tiens à exprimer à mon tour une inquiétude devant la diminution de 18 % des autorisations d’engagement, qui risque de se traduire en 2009, faute de crédits déconcentrés, par des reports ou des arrêts de chantiers en région, les DRAC ayant déjà un niveau élevé de « dettes ».
À cela viennent s’ajouter deux inquiétudes liées à la remise en cause de dispositifs fiscaux indispensables pour l’entretien des monuments historiques, d’une part, la réforme du dispositif de la « loi Malraux » en faveur des secteurs sauvegardés, d’autre part, le plafonnement décidé par l’Assemblée nationale de l’avantage fiscal dont bénéficient les propriétaires de monuments historiques inscrits ou classés.
Ces deux mesures sont particulièrement malvenues, d’abord, parce que les crédits budgétaires restent, malgré les efforts notables réalisés, insuffisants par rapport aux immenses besoins du secteur, ensuite, parce que plusieurs rapports sont venus rappeler le mauvais état du patrimoine monumental. Ainsi que l’a rappelé notre collègue M. Gaillard, la proportion de monuments en mauvais état ou en péril est passée de 32 % à 41 % entre 2002 et 2007.
C’est pourquoi d’ailleurs je soutiendrai les amendements qu’il présentera et qui tendent à supprimer les plafonnements ainsi institués.
J’ai moi-même, avec ma collègue Jacqueline Gourault, déposé un amendement de suppression de l’article 42 bis du projet de loi de finances, car l’entretien de monuments historiques, même non ouverts au public, concourt à l’intérêt collectif et à soutenir l’emploi.
Je tiens à saluer la priorité accordée aux crédits destinés aux monuments n’appartenant pas à l’État. Les monuments appartenant aux collectivités locales et aux propriétaires privés se verront ainsi affecter 20 millions d’euros de crédits supplémentaires via les budgets alloués aux directions régionales des affaires culturelles.
Enfin, madame la ministre, je soutiens votre projet d’affecter aux monuments historiques, à compter de 2010, une partie des recettes issues des paris en ligne non sportifs et une fraction des produits de la Française des Jeux.
Cette recommandation de la mission sénatoriale nous apparaît comme une bonne façon de mobiliser une ressource extrabudgétaire pérenne et d’atteindre ainsi les 350 à 400 millions d’euros nécessaires.
Concernant le spectacle vivant, si l’on excepte la hausse des autorisations d’engagement liée au lancement de la construction de la Philharmonie de Paris, certes nécessaire, mais qui absorbe une partie des crédits au détriment des investissements en province, les crédits de paiement stagnent.
Comment, dans une enveloppe constante de 805 millions d’euros affectée au programme « Création », ne pas fragiliser l’action en faveur du spectacle vivant, alors que les crédits des autres actions progressent, notamment en raison de la création de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet ?
Dans ce contexte, je souhaite aussi vous interroger, madame la ministre, sur les crédits alloués aux arts de la rue et du cirque.
En tant que présidente du groupe d’études du Sénat, j’aimerais disposer de quelques informations sur la politique menée par la rue de Valois, afin de rassurer les acteurs de ce secteur.
Madame la ministre, sous votre impulsion, le secteur du spectacle vivant connaît actuellement plusieurs réformes dans le cadre de la révision générale des politiques publiques et des discussions menées à l’occasion des Entretiens de Valois.
Ces derniers, lieu de la redéfinition des modalités de l’intervention de l’État en faveur du spectacle vivant, étaient indispensables.
Les professionnels, mais aussi certains parlementaires, réclamaient depuis longtemps l’organisation de tels entretiens, afin de repenser l’économie du spectacle vivant dans son ensemble. Nous sommes nombreux ici à en attendre les conclusions avec impatience.
Parallèlement à ces entretiens, le ministère de la culture met en œuvre la RGPP. Les pistes de réformes évoquées dans ces instances interrogent les professionnels du spectacle vivant qui craignent, dans un contexte de stagnation des crédits, que le montant des subventions ne baisse, rendant de ce fait plus difficile la gestion des établissements confrontés à l’augmentation de leurs frais de fonctionnement.
Il est légitime d’améliorer la gestion des établissements culturels et de généraliser les contrats pluriannuels de performance, mais cela pose la question de la reconduction automatique des aides aux établissements.
La fixation d’objectifs précis implique une « obligation de résultat », mais les structures du spectacle vivant sont peu habituées à ce mode de fonctionnement. On peut comprendre que les professionnels craignent que les aides à la création ne soient prioritairement attribuées à ceux qui proposent des œuvres répondant aux attentes du public. Il faudra donc les rassurer en leur expliquant que ce mode de fonctionnement et de gestion est aussi une garantie pour les établissements culturels.
La signature de contrats d’objectifs et de moyens avec le ministère leur donne ainsi l’assurance, pour une période définie, de pouvoir conduire leurs projets tout en remplissant leurs objectifs.
Il convient d’aborder, dans le même état d’esprit, la question de la « mesure » et du choix des critères servant à établir la performance des structures artistiques. Dans ce domaine, on ne peut retenir uniquement des critères quantitatifs ; il faudra privilégier les évaluations qualitatives, afin de laisser du temps aux spectacles pour s’installer et conquérir leur public.
L’autre objectif des Entretiens de Valois est de redéfinir les modalités de l’intervention de l’État en faveur du spectacle vivant, en concertation avec les collectivités territoriales
Depuis plusieurs années, au sein de notre groupe, nous demandons le vote d’une loi d’orientation du spectacle vivant destinée à redéfinir et à clarifier les rôles de chacune des collectivités territoriales.
Les Entretiens de Valois et la réactivation du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel attestent que l’État a compris qu’il ne peut plus être seulement ordonnateur, mais qu’il doit devenir un partenaire à part entière. Nous en sommes satisfaits. Ce nouveau mode de partenariat, qui participe de la modernisation du ministère de la culture, doit se traduire sur le terrain par une évolution des rapports qu’entretiennent les DRAC avec les collectivités.
Le maintien des DRAC, dans le cadre de la RGPP, témoigne d’ailleurs que l’État a décidé de rester présent sur les territoires. Bien sûr, il ne faut pas que, sous couvert d’une meilleure organisation, il donne l’impression de se désengager et mette davantage à contribution les collectivités territoriales dans le financement des structures du spectacle vivant.
Les enjeux culturels et artistiques ne doivent pas être absents de la recomposition territoriale qui se profile. Les collectivités sont prêtes à prendre toute leur part dans cette répartition nouvelle des compétences, et la réforme des collectivités locales doit être l’occasion de traiter cette question.
Enfin, s’agissant du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », je voudrais insister sur trois points.
Je me réjouis, dans un contexte de stagnation des crédits de ce programme, de la sanctuarisation des 28,8 millions d’euros de crédits destinés à la décentralisation des enseignements artistiques. À cet égard, j’espère que les propositions que nous avons formulées permettront d’aboutir sur cette question essentielle de la formation et la sensibilisation de nos jeunes à la culture.
En revanche, pour la deuxième année consécutive, les crédits de paiement de l’action « Actions en faveur de l’accès à la culture » baissent de plus de 8 %. Les actions les plus touchées concernent les territoires les moins favorisés, les personnes handicapées, les associations d’éducation populaire et les associations de lutte contre l’exclusion, ce dont nous nous inquiétons.
En revanche, nous notons avec satisfaction une augmentation de 2,44 % des crédits de l’action « Soutien à l’éducation artistique et culturelle » à l’école. Néanmoins, madame la ministre, nous nous interrogeons sur les suites qui seront données aux recommandations qu’a formulées Éric Gross dans le cadre de la mission que vous lui avez confiée conformément à la lettre de mission que vous avait adressée le Président de la République, dans laquelle l’éducation artistique et culturelle était une priorité.
Deux mesures ont été rapidement annoncées par le Gouvernement : le Pass culture, pour les enseignants, et l’introduction d’un enseignement de l’histoire de l’art. Ainsi, dès la rentrée 2008, le ministre de l’éducation nationale a inscrit, dans un souci de sensibilisation et de formation des enseignants, la gratuité, à titre professionnel et personnel, pour les professeurs de l’enseignement scolaire et agricole, de tous les musées et de tous les monuments nationaux dépendant des ministères de la culture et de l’enseignement supérieur.
En outre, comme cela avait été annoncé, les élèves du primaire, dès la rentrée de 2008, et les collégiens, dès 2009, bénéficieront d’un enseignement en histoire de l’art.
Bien sûr, nous approuvons l’introduction de cet enseignement, qui concernera tous les élèves, qui sera assuré par tous les enseignants et qui traitera de tous les arts.
Néanmoins, nous souhaiterions aussi savoir ce que deviennent les autres mesures qui avaient été annoncées, à savoir le renforcement de la pratique artistique, le contact des jeunes avec les œuvres et les artistes, la fréquentation des institutions culturelles par le public scolaire, le partenariat avec les collectivités locales, autant d’éléments constitutifs d’une politique ambitieuse d’éducation artistique et culturelle à l’école.
Nous nous interrogeons donc sur l’état d’avancement de ce plan, car le ministère de l’éducation nationale semble refuser de dégager des moyens. Or chacun sait que le travail interministériel est aujourd’hui indispensable.
Nous avons posé des questions, nous avons formulé des remarques. Cependant, il faut reconnaître que, dans le contexte contraint qui est celui de l’économie de notre pays, l’augmentation de plus de 2 % des crédits de la mission « Culture » témoigne du réel effort consenti par le Gouvernement en faveur de la politique culturelle.
Aussi, madame la ministre, le groupe de l’Union centriste votera ces crédits. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Yves Dauge.
M. Yves Dauge. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre inquiétude principale porte sur la réduction des crédits consacrés aux monuments historiques, question pendante depuis plusieurs années. Les besoins annuels, estimés à 400 millions d’euros, sont malheureusement loin d’être satisfaits, puisque les crédits qui y sont consacrés se montent actuellement à environ 300 millions d’euros.
Je pensais que le plan de relance qu’a annoncé hier le Président de la République comporterait un dispositif en faveur du patrimoine. J’espère que la discussion reste ouverte. Ce serait là une occasion exceptionnelle de venir en aide aux entreprises du secteur et de permettre aux DRAC d’engager des actions.
Madame la ministre, vous connaissez la position du Groupement français des entreprises de restauration de monuments historiques, qui ne cesse de nous solliciter et de vous solliciter. Un plan de relance en faveur du patrimoine aurait une efficacité immédiate et serait bénéfique tant pour les entreprises du secteur que pour les collectivités territoriales et relancerait dans la durée tout un secteur d’activité. Il permettrait, dans la perspective de ce que vous nous avez annoncé récemment, de dégager des ressources supplémentaires pour consacrer annuellement, en régime de croisière, 400 millions d’euros à la conservation des monuments historiques.
Quelle chance ce serait, madame la ministre ! En tout cas, nous sommes prêts !
Madame la ministre, je le répète, il s’agit là d’une question centrale pour moi. Comptez-vous, au cours des prochaines semaines, saisir cette occasion qui se présente à vous ?
S’agissant de l’INRAP et du fonds national d’archéologie préventive, Yann Gaillard et moi-même avons chacun déposé un amendement visant à en augmenter les moyens. À l’avenir, madame la ministre, il sera indispensable de sécuriser durablement leurs sources de financement.
Pouvez-vous aussi nous confirmer que les monuments historiques seront fiscalement hors plafonds, qu’il s’agisse du plafond global concernant les niches fiscales ou du plafond « travaux » de 200 000 euros ?
Je crois savoir que le Gouvernement n’est pas favorable à ce dernier plafond, qui a été introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement et dont j’espère qu’il sera supprimé. Reste le premier plafond : je crains, s’il subsiste, qu’il n’ait des effets négatifs dans le cas d’espèce.
Je n’insisterai pas davantage sur la question des secteurs sauvegardés, puisqu’elle sera abordée lundi prochain. Néanmoins, je relève une contradiction entre une volonté afficher de relancer l’activité des métiers d’art, de soutenir l’économie du patrimoine, et une série de mesures tout à fait inopportunes qui auront pour conséquence de « casser » cette dynamique.
Indépendamment du difficile contexte budgétaire, certains prétendent qu’il s’agit de mesures de justice fiscale. Pour ma part, je considère que le dispositif Malraux a fait l’objet de suffisamment de débats, qu’il a largement fait ses preuves et qu’il est faux de prétendre que ces avantages fiscaux ne seraient réservés qu’à quelques privilégiés.
Je n’insiste pas, madame la ministre, mais cette contradiction doit absolument être levée, et je sais que vous en êtes convaincue également. Disant cela, je me mets dans votre camp, madame la ministre. Beaucoup de nos collègues, notamment ceux qui sont membres de la commission des affaires culturelles, regrettent également ces contraintes et pensent qu’il serait vraiment opportun de relancer une grande politique en faveur du patrimoine. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, nombre d’entre vous l’ont relevé : le budget de la mission « Culture » est en augmentation de 2,8 %. En ces temps de réforme de l’État et de tension budgétaire, il s’agit d’un effort remarquable, rendu possible grâce à d’importantes ressources extrabudgétaires.
Ainsi, pour le patrimoine et les monuments historiques, 20 millions d'euros supplémentaires ont été alloués en 2009, ce qui porte ce budget à 305 millions d'euros, hors fonds de concours.
Il est exact que je suis favorable au principe de nouvelles ressources extrabudgétaires. Ainsi, la piste de la Française des Jeux, régulièrement évoquée, est sérieuse ; de nombreuses réunions ont actuellement lieu avec cette entreprise publique, mais des arbitrages restent nécessaires. Il existe également des pistes spécifiques pour le patrimoine. Nous sommes optimistes.
Il faut se réjouir de l’inscription d’un volet « culture » dans le plan de relance. Celui-ci vise à réaliser très rapidement des investissements dont les effets se feront immédiatement sentir, notamment sur le patrimoine.
Sur les 4 milliards d'euros d’investissements supplémentaires mobilisés par l’État en 2009 dans le cadre de ce plan de relance, 100 millions d'euros seront alloués à la culture, soit 2,5 %. Il s’agit là d’un accroissement tout à fait remarquable pour le ministère. Nous espérons qu’une telle décision préfigure l’instauration de cette ressource extrabudgétaire pérenne que nous appelons de nos vœux.
Cette somme nous permettra non seulement de lancer plus de cent cinquante opérations de restauration de monuments historiques sur l’ensemble du territoire, mais également d’accélérer la réalisation de grands projets culturels, comme le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, et de solder un certain nombre de dettes relatives à des équipements culturels en région, d’aucuns l’ont évoqué. Le détail de ces mesures vous sera donné très prochainement, il nous faut encore travailler sur ce sujet.
Outre l’intervention directe de l’État en faveur du patrimoine, il existe des aides fiscales, qui sont importantes. Comme vous le savez, dans le débat sur les niches fiscales, le Gouvernement a estimé que, s’il était envisageable de plafonner le dispositif Malraux, le régime fiscal propre aux monuments historiques ne devait ni être plafonné ni entrer dans le périmètre du plafonnement global.
En ce qui concerne le dispositif Malraux, qui a été modifié par l'Assemblée nationale, nous pensons que la réflexion pourrait utilement se poursuivre dans trois directions : le périmètre des charges imputables, les taux de réduction – le Gouvernement n’était pas contre un relèvement à 30 % pour les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, et à 40 % pour les secteurs sauvegardés –, et la mise en place d’un mécanisme de report des excédents.
Sur le dispositif fiscal des monuments historiques privés et le plafonnement introduit pour les monuments historiques non ouverts au public, des discussions nourries sont en cours. Je me félicite des positions prises tant par la commission des affaires culturelles que par la commission des finances de la Haute Assemblée à ce sujet.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Oui !
Mme Christine Albanel, ministre. Les amendements qui ont été déposés sont extrêmement importants et je forme le vœu qu’en commission mixte paritaire un consensus favorable aux monuments historiques soit trouvé.
Comme vous tous ici, mesdames, messieurs les sénateurs, je considère que les avantages fiscaux accordés aux personnes privées propriétaires de monuments historiques constituent non pas des niches fiscales,...
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !
Mme Christine Albanel, ministre. ... mais une forme d’engagement pour ceux qui en bénéficient.
Le mécénat en faveur des monuments historiques privés est un sujet tout aussi important. Il faut que nous puissions mobiliser des financements privés destinés à la réalisation des travaux de restauration et de rénovation des monuments historiques privés. Le dispositif mis en place par l'article 10 de la loi de finances pour 2007 est incitatif. Ses textes d’application sont récents, puisque l’instruction fiscale a été publiée le 31 décembre 2007 et le décret décrivant les modalités de rédaction des conventions de subventionnement entre les fondations habilitées et les propriétaires est paru le 26 février 2008.
Il est donc un peu tôt pour dresser un premier bilan. Toutefois, d’après la Fondation du patrimoine, la ressource escomptée permet en général de compléter, dans une fourchette de 20 % à 50 %, le financement des opérations allant de 70 000 euros à 1 million d'euros, plusieurs exemples le montrent. Ce dispositif est donc tout à fait pertinent, même si son efficacité est contrariée par l’impossibilité de financer des monuments historiques dont l’exploitation procure à leur propriétaire des recettes commerciales supérieures à 60 000 euros par an. Cette restriction est très pénalisante et il serait bienvenu qu’elle puisse être réexaminée.
Vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur spécial, des tensions pèsent sur le programme « Patrimoines ». La politique que je mets en œuvre en tient compte de manière très raisonnable. Qui plus est, le projet de loi de finances pour 2009 prend en compte l’objectif de réduction du volume des restes à payer : le montant des autorisations d’engagement par rapport à la loi de finances initiale pour 2008 a été calibré au plus juste.
Ainsi, le montant en autorisations d’engagement passe de 1,106 milliard d'euros en loi de finances initiale pour 2008 à 899 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2009, soit une baisse de 18,7 %. Abaisser davantage le niveau des autorisations d’engagement reviendrait à enclencher une nouvelle politique de stop and go, ce que nous ne voulons pas.
Le plan de relance nous permettra également de disposer d’autorisations d’engagement égales aux crédits de paiement, ce qui devrait permettre une évolution favorable.
Par ailleurs, nous avons augmenté les crédits de paiement destinés à couvrir les engagements antérieurs par rapport à la loi de finances initiale pour 2008.
Par exemple, les dépenses d’investissement destinées aux musées territoriaux progressent de 12 % en crédits de paiement, soit un total de 15,7 millions d’euros.
De même, dans le secteur des monuments historiques, les crédits de restauration destinés aux monuments n’appartenant pas à l’État passent de 110 millions d'euros en crédits de paiement en loi de finances initiale pour 2008 à 127 millions d'euros en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2009, soit une hausse 16 %.
J’évoquerai rapidement le projet de la Philharmonie de Paris, qui suscite de nombreuses interrogations. Sa réalisation ne risque nullement de se faire au détriment des investissements en régions. J’en veux pour preuve l’inauguration récente du théâtre auditorium de Poitiers ou celle du grand théâtre de Provence l’an dernier. En outre, l’État participe à la construction de l’auditorium de Bordeaux.
La révision des contrats de plan État-régions, qui interviendra en 2010, sera également l’occasion d’examiner les opérations structurantes pour le territoire d’un point de vue culturel.
Sur la faisabilité de ce projet, plus particulièrement sur la question de la maîtrise d’ouvrage, l’État envisage de recourir à un schéma contractuel de financement de type « partenariat public privé ».
L’avantage d’un tel système est de différer et d’étaler la charge financière de la construction, mais aussi de responsabiliser l’opérateur privé, qu’il s’agisse du respect des délais ou de la qualité de la construction d’un bâtiment dont il aura ensuite à assumer l’entretien.
Deux options sont envisageables, selon que la maîtrise d’ouvrage est confiée ou non à l’opérateur. Dans le cas où serait mis en place un véritable partenariat public privé, la procédure de dialogue compétitif sera observée et la maîtrise d’ouvrage du projet sera transférée au partenaire privé. Dans le cas où serait retenu un dispositif alternatif, la partie « financement » et la partie « réalisation et exploitation » seraient distinguées, la maîtrise d’ouvrage étant conservée par la structure de préfiguration.
Le choix de la solution la plus efficace est encore à l’étude, dans le cadre d’une concertation avec les collectivités territoriales partenaire, la Ville de Paris et la région.
Il est évident que le projet « Philharmonie de Paris » entraîne une révision du paysage musical de Paris et exige plus spécifiquement une réflexion sur l’avenir de la salle Pleyel. Nous envisageons que la Cité de la musique devienne propriétaire de la salle Pleyel, en faisant jouer une clause d’option d’achat prévue par le bail. Une telle opération de rachat suppose un emprunt qui serait souscrit par la Cité de la musique et dont le remboursement serait intégralement couvert par le produit des loyers tirés de la location de la salle Pleyel. Cette piste est actuellement à l’étude.
Sur les réformes en cours dans le domaine de l’archéologie préventive et l’avenir de l’INRAP, de nombreuses questions ont été posées. Nous sommes bien conscients qu’il faut améliorer la situation actuelle. Les réformes portent pour l’essentiel sur l’amélioration des délais d’intervention de l’INRAP et le développement de l’offre concurrentielle. Plusieurs actions ont déjà été menées en ce sens.
Tout d’abord, la capacité d’intervention des équipes de l’INRAP sur le terrain a été accrue. Aussi les effectifs ont-ils été renforcés en 2007 par la transformation de 338 contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée et, en 2008, par l’autorisation de mobiliser 200 équivalents temps plein travaillé en contrats à durée déterminée dès le 1er janvier.
Par ailleurs est poursuivi l’effort de maîtrise des prescriptions d’archéologie préventive.
Ainsi, 6,7 % des dossiers d’aménagement instruits par les DRAC ont fait l’objet d’une prescription de diagnostic, contre 14,9 % en 2002, alors même que le nombre de dossiers soumis à cette instruction a pratiquement doublé entre 2002 et 2007. Le nombre de prescriptions de fouilles est globalement stable depuis 2002. En 2007, 1,5 % seulement des dossiers d’aménagement soumis à l’instruction des DRAC ont donné lieu à prescription de fouilles.
En outre, pour faire face à des opérations exceptionnelles, comme le canal Seine-Nord Europe, nous étudions la possibilité de créer un nouveau type de contrat, dont la durée serait liée à celle des opérations. Nous nous efforçons également d’augmenter le nombre des opérateurs en délivrant de nouveaux agréments : dix ont été accordés lors du Conseil national de la recherche archéologique, le 18 septembre dernier. Toutes ces mesures vont dans le bon sens.
Plusieurs orateurs m’ont interrogée sur les suites qui seront données à l’expérimentation de la gratuité dans les musées nationaux.
J’ai déjà eu l’occasion de rappeler que, si l’expérimentation de gratuité totale avait montré une augmentation assez massive de la fréquentation, celle-ci concernait surtout les lieux très peu fréquentés, qui n’accueillent que quelques dizaines de milliers de visiteurs par an. En d’autres termes, cette réforme n’a pas changé profondément la structure des publics.
La décision est imminente, les derniers ajustements financiers sont en cours. Nous nous orientons vers une gratuité totale, exclusivement réservée aux jeunes âgés de 18 à 25 ans. Cette tranche d’âge se rend peu dans les musées et a peu de moyens. Accorder la gratuité de la naissance à l’âge de 25 ans est pour nous une mesure très significative et pertinente en termes de démocratie culturelle.
Par ailleurs, le principe de la gratuité pour les enseignants sera très certainement adopté, Mme Morin-Desailly l’a évoqué. Une telle mesure, dont le coût est estimé à 12 millions d'euros, doit être financée par le ministère de l’éducation nationale. C’est en cours d’arbitrage.
J’en viens maintenant à l’éducation artistique et culturelle. Le développement de l’enseignement de l’histoire des arts à l’école relève davantage de la responsabilité du ministre de l’éducation nationale. Ainsi, dans le primaire, les programmes d’éducation artistique ont été augmentés, des épreuves spécifiques sont désormais prévues au brevet des collèges, et une option histoire de l’art sera progressivement proposée au lycée.
Le ministère de la culture est mobilisé pour donner vie à cette ambition en faveur de l’éducation artistique. Il offre déjà de nombreuses formations qui s’inscrivent dans les plans académiques conçus chaque année, dans chaque rectorat. Il concourt également à la formation des jeunes professeurs, grâce aux nombreux partenariats conclus par les DRAC.
Le ministère de la culture souhaite donc devenir un véritable centre de ressources humaines. Tous les partenariats qui sont conclus entre les établissements culturels et scolaires en régions vont dans ce sens. Sans entrer dans le détail, de multiples projets existent aujourd'hui, à la suite des réunions entre les DRAC et les rectorats.
Le ministère entend également devenir un centre de ressources numériques. Nous sommes très avancés dans ce domaine, puisque, s’agissant du site Europeana de bibliothèque numérique, qui vient d’être lancé, la France fournit 52 % des documents mis en ligne.
Enfin, nous travaillons à la mise en place d’un grand portail de la ressource gratuite pour l’éducation artistique et culturelle, qui sera destiné à la communauté scolaire et enseignante.
Tout comme vous, monsieur Lagauche, je souhaite que soit pérennisée la ressource extrabudgétaire de 15 millions d'euros qui a permis que le programme « Création » consacré au spectacle vivant passe à 655 millions d'euros. Nous y réfléchissons dans le cadre des Entretiens de Valois, grâce à la création d’un fonds d’aide à la production et à la diffusion. Il faut un engagement collectif de tous les acteurs. La mise en place d’un tel fonds serait extrêmement intéressante. C’est pourquoi nous travaillons sur les ressources qui pourraient l’alimenter.
Monsieur Lagauche, vous m’avez interrogée sur l’indicateur relatif à l’optimisation de la procédure de traitement des demandes de subvention. L’évolution du coût de traitement des subventions tient à l’élargissement du champ de l’indicateur d’une année sur l’autre et à des modes de comptage différents entre l’administration centrale et les DRAC. Nous travaillons à fiabiliser ces indicateurs. Un effort a été fait pour alléger le coût de traitement des subventions, notamment par des regroupements de personnels sur les services budgétaires et comptables.
De manière plus générale, les Entretiens de Valois visent non pas à accroître l’effort des collectivités territoriales, déjà considérable dans le domaine du spectacle vivant, mais à travailler en partenariat avec elles. Ils tendent également à accroître la diffusion des œuvres, qui est beaucoup trop réduite, et à la faciliter à l’extérieur de notre territoire, à favoriser l’emploi, à réfléchir sur les labels. Tous ces sujets ont beaucoup avancé.
Vers la mi-décembre, les réflexions seront rassemblées dans un rapport et, à la fin de l’année, nous ferons des propositions assez précises. Nous souhaitons, par exemple, une instance régionale de concertation, afin de mieux redessiner la carte du spectacle vivant.
En matière de statistiques, une plateforme unique a été créée dans un souci de méthodologie, car il est très important, pour avancer, de disposer des mêmes instruments d’appréciation.
Je ne crois pas qu’il soit vraiment nécessaire de créer un centre national du spectacle vivant, sur le modèle du Centre national de la cinématographie. Les professions sont différentes. Le spectacle vivant a un nombre d’acteurs infini. La régulation et le soutien économique du spectacle doivent se faire sans doute au plus près des territoires.
J’ai réactivé le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel. Les commissions régionales des professions du spectacle, les COREPS, doivent agir puissamment en région. Si, en plus, nous avons les instances régionales, nous irons vraiment dans le bon sens. La diffusion des œuvres sera améliorée et les labels seront recentrés.
Les centres dramatiques régionaux et les scènes nationales ne sont pas censés exercer exactement les mêmes activités ; les uns font plus de la production alors que les autres font plus de la diffusion. Or nous voulons redéfinir les missions des uns et des autres, afin de favoriser une meilleure diffusion des œuvres.
Le cinéma numérique fait partie des grandes évolutions de ce secteur. Des groupes de travail ont été mis en place pour définir les normes techniques en la matière et le modèle économique permettant d’envisager une adaptation de l’ensemble des salles de cinéma à cette technique. Nous travaillons sur ce point, car l’enjeu est important. Ce modèle économique doit conjuguer les investissements des exploitants, une participation des distributeurs de films et des aides complémentaires.
Le nombre d’intermittents indemnisés au titre du régime d’assurance chômage est stabilisé à environ 100 000 personnes. La progression, au rythme qu’elle a connu, a été enrayée. Il n’y a pas eu d’exclusion massive du système conduisant à la RMIsation de milliers d’entre eux, comme d’aucuns ont pu le soutenir.
Cependant, la part du déficit imputable à cette indemnisation a continué à se creuser. En effet, le déplafonnement des indemnités versées consécutif au protocole de 2003 a conduit à un accroissement des dépenses. Les indemnisations ont eu tendance à augmenter, mais cette hausse a profité plus aux techniciens qu’aux artistes.
L’année qui va commencer s’annonce importante, car elle verra la renégociation des annexes 8 et 10 du régime d’assurance chômage. Aujourd’hui, je n’ai pas le sentiment que l’existence même de ces annexes soit remise en question. Les responsables de l’UNEDIC sont sensibles à l’effort engagé par la profession, notamment pour ce qui concerne les conventions collectives. On est passé de quarante-cinq accords et conventions collectives à huit. Seul un texte doit encore être signé. Nombre d’avancées ont donc été obtenues sur ce plan.
L’aide à la professionnalisation ou à la reconversion financée par le ministère de la culture et gérée par le fonds Audiens offre des perspectives professionnelles à des artistes et techniciens qui en manquaient.
Les spectacles amateurs constituent un sujet également important. Selon nous, il n’est pas souhaitable de légiférer en la matière. Il vaut mieux s’orienter vers des chartes, des accords pour prendre en compte les spécificités, voire les difficultés de certaines situations.
Les aides aux libraires ont été doublées et une politique en faveur du livre a été menée. La mise en place d’un label est en cours. Les librairies de référence vont recevoir des aides spécifiques du CNL, le Centre national du livre.
Pour ce qui concerne les arts plastiques, les autorisations d’engagement connaissent une hausse de 8 %.
Enfin, 12 millions d’euros sont consacrés à la politique en faveur des arts du cirque, madame Morin-Desailly. Un effort est fait en faveur de la formation. Notons la mise en place d’un parcours pédagogique qui concerne les trois grandes écoles du cirque, à savoir le Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne, l’Académie Fratellini de Saint-Denis et l’École nationale des arts du cirque de Rosny-sous-Bois.
L’appui aux compagnies va être réorganisé en 2009 pour mieux articuler les aides octroyées respectivement par l’administration et par les DRAC.
L’itinérance du cirque sur tout le territoire va être également favorisée. Un colloque a eu lieu à Avignon sur ce thème. La charte d’accueil des cirques se développe dans de bonnes conditions. Trente-neuf communes y sont adhérentes ; vingt accords d’adhésion ont été signés ; trente-cinq cirques sont déjà adhérents et trois sont en cours d’adhésion.
Telles sont les réponses, sans doute trop brèves, que je me devais de vous apporter, mesdames, messieurs les sénateurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B.
État b
(En euros) |
||
Culture |
2 838 554 082 |
2 778 036 587 |
Patrimoines |
1 049 184 391 |
1 124 133 265 |
Dont titre 2 |
155 444 065 |
155 444 065 |
Création |
949 052 937 |
806 731 950 |
Dont titre 2 |
58 539 692 |
58 539 692 |
Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
840 316 754 |
847 171 372 |
Dont titre 2 |
385 373 199 |
385 373 199 |
M. le président. L'amendement n° II-131, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
PatrimoinesDont Titre 2 |
||||
CréationDont Titre 2 |
||||
Transmission des savoirs et démocratisation de la cultureDont Titre 2 |
6 217 0005 495 000 |
6 217 0005 495 000 |
||
TOTAL |
6 217 000 |
6 217 000 |
||
SOLDE |
6 217 000 |
6 217 000 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre. Cet amendement a pour objet de tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Culture » de la décision de rattachement de la Direction du développement des médias au ministère de la culture et de la communication, ce qui permettra en 2009 de créer une nouvelle direction générale chargée des médias, du livre et des industries culturelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Favorable !
M. le président. L'amendement n° II-11, présenté par M. Gaillard, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
PatrimoinesDont Titre 2 |
449 500 000 |
|||
CréationDont Titre 2 |
449 500 000 |
|||
Transmission des savoirs et démocratisation de la cultureDont Titre 2 |
226 500 000 |
|
|
|
TOTAL |
|
1 125 500 000 |
|
|
SOLDE |
-1 125 500 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Dans mon intervention liminaire, j’ai expliqué l’esprit de cet amendement un peu rhétorique. Si Mme la ministre me demande de le retirer, je le ferai avec plaisir, tout en ayant à l’esprit l’absurdité du problème auquel nous sommes confrontés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, je vous demande en effet de bien vouloir retirer cet amendement. J’ai pris soin dans ma réponse de relever tous les éléments positifs, et même très positifs, notamment le plan de relance, qui me font dire que nous allons dans le bon sens.
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Je retire donc cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II–11 est retiré.
L'amendement n° II-194, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
PatrimoinesDont Titre 2 |
||||
CréationDont Titre 2 |
||||
Transmission des savoirs et démocratisation de la cultureDont Titre 2 |
1 023 7671 023 767 |
1 023 7671 023 767 |
||
TOTAL |
1 023 767 |
1 023 767 |
||
SOLDE |
- 1 023 767 |
- 1 023 767 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre. Cet amendement a pour objet de tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Culture » des mesures de décentralisation de l’Inventaire général des monuments historiques, en application de la loi du 13 août 2004.
Il tend à annuler les crédits du titre 2 d’un montant de 1 023 767 euros, somme qui correspond aux rémunérations des agents ayant opté pour un transfert de la fonction publique d’État vers la fonction publique territoriale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Favorable !
M. le président. L'amendement n° II-384, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
PatrimoinesDont Titre 2 |
161 884 |
161 884161 884 |
161 884 |
161 884161 884 |
CréationDont Titre 2 |
164 580 |
164 580164 580 |
164 580 |
164 580164 580 |
Transmission des savoirs et démocratisation de la cultureDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
326 464 |
326 464 |
326 464 |
326 464 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre. Cet amendement prévoit le transfert d'un montant de 326 464 euros sur la mission « Culture ». Ce montant correspond à la prise en charge par deux opérateurs du ministère de la culture et de la communication, le musée d'Orsay et le Centre national des arts plastiques, de la rémunération de leurs dirigeants, conformément à la circulaire du 8 octobre 2007 du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Favorable !
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Culture », figurant à l’état B.
J’avais été saisi d’une explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Culture ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion les amendements identiques tendant à insérer un article additionnel avant l’article 59 octies, ainsi que les articles 59 octies et 59 nonies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Culture ».
Culture
Article additionnel avant l'article 59 octies
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-189 est présenté par MM. Gaillard, Legendre et Richert.
L'amendement n° II-241 est présenté par MM. Dauge, Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant l'article 59 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 524-7 du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa du I, le taux : « 0,3 % » est remplacé par le taux : « 0,6 % » ;
2° Au premier alinéa du II, le montant : « 0,32 euro » est remplacé par le montant : « 0,6 euro ».
La parole est à M. Yann Gaillard, pour présenter l’amendement n° II–189.
M. Yann Gaillard. Le fait que ces deux amendements identiques émanent des deux côtés de l’hémicycle démontre déjà qu’ils sont bons ! (Sourires.)
Un véritable problème se pose, à savoir l’arrêt des chantiers en raison de l’insuffisance des ressources de l’INRAP. Je vous remercie beaucoup, madame la ministre, d’avoir présidé la réunion du Conseil national de la recherche archéologique ; je le demandais depuis des années, et je me réjouis de cette première.
Par l’amendement n° II-189, il est proposé une augmentation, modeste, de la redevance qui correspond à un service rendu et ne fait pas partie des prélèvements obligatoires. Cette solution devrait nous permettre de sortir de l’ornière. Elle a obtenu l’accord de M. Legendre, par ailleurs président de la commission des affaires culturelles, et de M. Richert, qui ont cosigné avec moi cet amendement. Le problème devrait donc pouvoir être réglé.
M. le président. La parole est à M. Yves Dauge, pour présenter l'amendement n° II–241.
M. Yves Dauge. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-189 et II-241.
(Les amendements sont adoptés à l'unanimité des présents.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 59 octies.
Article 59 octies
Au plus tard le 31 janvier 2009, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur l’incidence de l’application de l’article L. 441-6 du code de commerce pour les opérations d’achat, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon de livres et, le cas échéant, les mesures de soutien budgétaire et fiscal et les mesures dérogatoires qu’il compte mettre en œuvre pour ces opérations. – (Adopté.)
Article 59 nonies
Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente un rapport aux commissions chargées des finances et des affaires culturelles de chacune des assemblées parlementaires pour déterminer l’impact du droit de suite sur le budget de l’État et les modalités de réforme de ce droit afin que son application ne crée pas de distorsion de concurrence entre la France et les autres États membres de l’Union européenne. – (Adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Culture ».
3
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement de la Commission portant application de la directive 2005/32/CE du Conseil et du Parlement européen concernant les exigences relatives à l’écoconception des décodeurs numériques simples.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4149 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement de la Commission portant application de la directive 2005/32/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences d’écoconception relatives à la consommation d’électricité hors charge et au rendement moyen en mode actif des sources d’alimentation externes.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4150 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement de la Commission modifiant le règlement (CE) nº .../2008 de la Commission portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) nº 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil, concernant des modifications à la norme internationale d’information financière IFRS 1 et à la norme comptable internationale IAS 27. Amendements de IFRS 1 première adoption des normes internationales d’information financière et de IAS 27 États financiers consolidés et individuels. Coût d’une participation dans une filiale, une entité contrôlée conjointement ou une entreprise associée.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4151 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement de la Commission modifiant le règlement (CE) n° .../2008 de la Commission portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil, pour ce qui concerne des améliorations aux normes internationales d’information financière (IFRS).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4152 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet d’accord entre l’Union européenne et l’Islande et la Norvège pour l’application de certaines des dispositions de la décision du Conseil 2008/615/JAI relative à l’approfondissement de la coopération transfrontalière, notamment en vue de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière, et de la décision 2008/616/JAI de mise en œuvre de la décision du Conseil 2008/615/JAI relative à l’approfondissement de la coopération transfrontalière, notamment en vue de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière, y compris son annexe. Résultat des négociations. Projet de décision du Conseil relative à la signature de l’accord.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4153 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement de la Commission modifiant le règlement (CE) n° .../2008 de la Commission portant adoption de certaines normes comptables internationales conformément au règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil, pour ce qui concerne la norme comptable internationale IAS 32 et la norme comptable internationale IAS 1.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4154 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement de la Commission mettant en œuvre la directive 2005/32/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences en matière d’écoconception applicables aux lampes fluorescentes sans ballast intégré, aux lampes à décharge à haute intensité, ainsi qu’aux ballasts et aux luminaires qui peuvent faire fonctionner ces lampes, et abrogeant la directive 2000/55/CE du Parlement européen et du Conseil.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4155 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4156 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne la fraude fiscale liée aux importations et autres opérations transfrontalières.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4157 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1255/96 portant suspension temporaire des droits autonomes du tarif douanier commun sur certains produits industriels, agricoles et de la pêche.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4158 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Recommandation de la Commission au Conseil autorisant la Commission à ouvrir des négociations au nom de la Communauté pour la conclusion d’un accord de partenariat de pêche avec la République de Guinée.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4159 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation de l’instrument de flexibilité.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4160 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de virement de crédits n° DEC45/2008. Section III. Commission - du budget général pour l’exercice 2008 (DNO).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4161 et distribué.
4
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, samedi 6 décembre 2008, à quatorze heures :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (n° 98, 2008 2009).
Rapport (n° 99, 2008-2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Examen des missions :
Sport, jeunesse et vie associative (+ articles 77, 78 et 78 bis)
M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 30) ;
MM. Pierre Martin et Jean-Jacques Lozach, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 100, tome VIII).
Économie
Compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien
MM. André Ferrand et François Rebsamen, rapporteurs spéciaux (rapport n° 99, annexe n° 11) ;
MM. Pierre Hérisson, Gérard Cornu et Mme Odette Terrade, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 101, tome II).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 6 décembre 2008, à deux heures trente.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD