M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Nous sommes au regret de ne pas pouvoir soutenir vos amendements, madame Hermange, monsieur Gaudin. Nous venons d’étendre le dispositif de réduction d’impôt à un certain nombre d’établissements et cette évolution vaut pour les territoires ruraux. Il me semble donc que nous avons déjà réalisé certaines avancées ce soir.
Nous serions ravis que vous puissiez retirer vos amendements.
M. le président. Madame Hermange, acceptez-vous de retirer votre amendement ?
Mme Marie-Thérèse Hermange. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-344 rectifié bis est retiré.
M. le président. Monsieur Christian Gaudin, acceptez-vous de retirer votre amendement ?
M. Christian Gaudin. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-307 est retiré.
Je mets aux voix l'article 44, modifié.
(L'article 44 est adopté.)
Article 44 bis
I. – Après l’article 200 quaterdecies du code général des impôts, il est inséré un III ainsi rédigé :
« III. – Plafonnement de certains avantages fiscaux
au titre de l’impôt sur le revenu
« Art. 200-0 A. – 1. Le total des avantages fiscaux mentionnés au 2 ne peut pas procurer une réduction du montant de l’impôt dû supérieure à la somme d’un montant de 25 000 € et d’un montant égal à 10 % du revenu imposable servant de base au calcul de l’impôt sur le revenu dans les conditions prévues au I de l’article 197.
« 2. Les avantages fiscaux retenus pour l’application du plafonnement mentionné au 1, au titre d’une année d’imposition, sont les suivants :
« a) L’avantage en impôt procuré par les déductions au titre de l’amortissement prévues aux h et l du 1° du I de l’article 31 et à l’article 31 bis ;
« b) L’avantage en impôt procuré par l’imputation sur le revenu global des charges mentionnées au 1° ter du II de l’article 156 et de la fraction supérieure à 10 700 € des déficits mentionnés au 3° du I du même article, lorsque ces déficits et charges sont afférents à des immeubles classés monuments historiques, inscrits à l’inventaire supplémentaire ou ayant fait l’objet d’un agrément ministériel qui ne sont pas ouverts au public ;
« c) Les réductions et crédits d’impôt sur le revenu, à l’exception de ceux mentionnés aux articles 199 quater B, 199 quater C, 199 quater F, 199 septies, 199 terdecies-0 B, 199 quindecies, 199 octodecies, 199 vicies A, 200, 200 bis, 200 quater A, 200 sexies, 200 octies, 200 decies A, 200 undecies, 238 bis, 238 bis-0 AB, aux 2 à 4 du I de l’article 197, des crédits d’impôt mentionnés au 1° du II de la section 5 du chapitre Ier du présent titre, et du crédit d’impôt correspondant à l’impôt retenu à la source à l’étranger ou à la décote en tenant lieu, tel qu’il est prévu par les conventions internationales ;
« d) L’imputation de la créance mentionnée au vingt et unième alinéa du I de l’article 199 undecies B.
« 3. La réduction d’impôt acquise au titre des investissements mentionnés à la première phrase du dernier alinéa du I de l’article 199 undecies B ainsi que les créances résultant d’une réduction d’impôt au titre des mêmes investissements sont retenues pour l’application du plafonnement mentionné au 1 du présent article pour 40 % de leur montant. La réduction d’impôt acquise au titre des investissements mentionnés à la deuxième phrase du dernier alinéa du I de l’article 199 undecies B ainsi que les créances résultant d’une réduction d’impôt au titre des mêmes investissements sont retenues pour l’application du plafonnement mentionné au 1 du présent article pour la moitié de leur montant.
« 4. Un décret fixe les modalités d’application du présent article. »
II. – Après le mot : « bénéfices », la fin du premier alinéa du 1 de l’article 170 du même code est ainsi rédigée : « , de ses charges de famille et des autres éléments nécessaires au calcul de l’impôt sur le revenu, dont notamment ceux qui servent à la détermination du plafonnement des avantages fiscaux prévu à l’article 200-0 A. »
III. – Les I et II sont applicables à compter de l’imposition des revenus de 2009, sous réserve des dispositions spécifiques mentionnées aux alinéas suivants.
Pour l’application du I, il est tenu compte des avantages fiscaux accordés au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1er janvier 2009.
Toutefois, il est tenu compte des seuls avantages procurés :
1° Par la déduction au titre de l’amortissement prévue aux h et l du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts au titre des logements acquis neufs ou en l’état futur d’achèvement à compter du 1er janvier 2009 et des logements que le contribuable a fait construire et qui ont fait l’objet, à compter de cette date, d’une déclaration d’ouverture de chantier ;
2° Par la déduction au titre de l’amortissement prévue aux h et l du 1° du I de l’article 31 du code général des impôts au titre des locaux affectés à un usage autre que l’habitation acquis à compter du 1er janvier 2009 et que le contribuable transforme en logements ainsi que par les logements acquis à compter de cette date que le contribuable réhabilite en vue de leur conférer des caractéristiques techniques voisines de celles des logements neufs ;
3° Par la déduction au titre de l’amortissement prévue à l’article 31 bis du même code, au titre des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital réalisées à compter du 1er janvier 2009 ;
4° Par les réductions d’impôt sur le revenu mentionnées aux articles 199 undecies A et 199 undecies B et de la créance mentionnée au vingt et unième alinéa du I de l’article 199 undecies B du même code acquises au titre :
a) Des investissements pour l’agrément ou l’autorisation préalable desquels une demande est parvenue à l’administration après le 1er janvier 2009 ;
b) Des acquisitions d’immeubles ayant fait l’objet d’une déclaration d’ouverture de chantier après le 1er janvier 2009 ;
c) Des acquisitions de biens meubles corporels livrés à compter du 1er janvier 2009, à l’exception de ceux commandés avant cette date et pour lesquels ont été versés des acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix ;
d) Des travaux de réhabilitation d’immeuble engagés après le 1er janvier 2009, à l’exception de ceux pour lesquels des acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix ont été versés avant cette date.
M. le président. L'amendement n° II-322, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Dans le 1 du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200-O A du code général des impôts, la mention « 10% » est remplacée par la mention « 5 % ».
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Le débat sur la dépense fiscale, qui est au cœur de cet article 44 bis, trouve ici une expression particulière, puisqu’il est question du plafonnement des niches fiscales.
Notons immédiatement que ce plafonnement est d’une portée plus que limitée. Il s’agit ici de viser quelques dépenses fiscales relativement restreintes et de définir des exceptions avant même que d’appliquer un principe.
Sur la seule question des réductions et crédits d’impôt sur le revenu établis dans notre législation, on observera que l’ensemble des dispositifs existants représente un coût légèrement supérieur à 14 milliards d’euros. On pourrait donc supprimer l’ensemble de ces mesures et modifier le barème d’imposition progressif dans des proportions non négligeables, sans toucher au rendement de l’impôt.
En matière d’évaluation des voies et moyens, le niveau de dépenses fiscales est compris entre 41 et 42 milliards d’euros, dont un tiers de réductions et de crédits, un tiers de dispositions de caractère général et un tiers de dispositions spécifiques pour certains revenus catégoriels, singulièrement ceux des revenus du capital, du patrimoine et d’activités non salariées.
Ainsi, par exemple, la seule taxation à taux particulier des plus-values serait d’un coût compris entre 1,5 milliard d’euros et 2 milliards d’euros, ce qui vaut bien des mesures de réduction d’imposition !
De fait, la solution dont il est question dans cet article 44 bis est assez éloignée de ce qu’il conviendrait de faire.
Sur la dépense fiscale, notre positon de fond est donc la suivante : il faut la réduire, car elle nuit profondément au principe d’égalité devant l’impôt, et il faut la recycler pour dégager des marges qui permettraient, à la fois, de restreindre le déficit et de repenser la dépense publique.
Paradoxe parmi d’autres, on n’a toujours pas mis en place, avec l’allocation personnalisée d’autonomie, l’outil de lutte collective contre les effets de la dépendance des personnes âgées. On laisse pourtant la dépense fiscale liée aux emplois à domicile croître et embellir.
Pour citer un autre exemple tiré de l’actualité récente, on taille dans le vif des crédits de la recherche, en précarisant les conditions de travail des chercheurs eux-mêmes, mais on se félicite d’avoir réuni 100 millions d’euros de promesses de dons au travers des différentes initiatives, au demeurant louables, qui ont été prises au titre du Téléthon.
Les choix budgétaires et fiscaux qui sont induits par la dépense fiscale doivent donc être révisés de manière intégrale, objective et critique. Nous devons parvenir, comme le recommandait d’ailleurs le Conseil national des impôts dans un rapport déjà ancien, à réduire, et très sensiblement, l’impact des mesures d’allégement fiscal contenues dans l’évaluation des voies et moyens.
Avec cet article 44 bis, nous sommes donc très loin du compte !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L’amendement n° II-322 vise à réduire le seuil d’effet du plafonnement global pour le passer de 25 000 euros augmenté de 10 % du revenu imposable à 25 000 euros augmenté de 5 % du revenu imposable.
Mes chers collègues, mettre en place ce plafonnement global est déjà un bel effort, qui nous permet de continuer à peaufiner toutes les niches possibles et imaginables et à les priver d’une part de leurs effets.
À chaque jour suffit sa peine ! Nous reviendrons peut-être sur le niveau de ce plafonnement, ce qui peut d’ailleurs être souhaitable pour un meilleur rendement de l’impôt. Mais, dans l’immédiat, je crois que nous devons en rester à l’équilibre défini par l’Assemblée nationale.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Nous avons beaucoup travaillé avec le Sénat et l’Assemblée nationale sur ce dispositif de plafonnement global des niches. J’estime que les montants auxquels nous sommes parvenus sont significatifs et raisonnables et qu’ils permettent de prendre en compte les plafonnements spécifiques et sectoriels.
Par exemple, monsieur Foucaud, votre taux de 5% empêcherait la niche fiscale « outre-mer » de fonctionner, puisque, par le jeu de la rétrocession, nous atteignons 6 % du revenu.
Je pense donc que, pour des raisons d’équilibre et d’efficacité, nous devons maintenir la proposition d’un montant forfaitaire de 25 000 euros majoré de 10 % du revenu imposable du foyer fiscal.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je voudrais poser une question à M. le ministre.
Il y a déjà eu une tentative de plafonnement global des niches fiscales, mais elle a été bloquée par le Conseil constitutionnel, celui-ci estimant que chaque dépense fiscale avait son origine et sa valeur propres et qu’il ne convenait pas de globaliser. Quelle précaution avez-vous prise sur ce point ? Quelle réponse pensez-vous apporter à cet argument dans l’hypothèse où cet article serait de nouveau soumis au Conseil constitutionnel ?
M. Albéric de Montgolfier. Bonne question !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je voudrais intervenir, à l’occasion de cet amendement, sur l’article 44 bis.
Dans son rapport écrit, le rapporteur général relate la genèse des différentes dispositions et le cheminement qui, bon an, mal an, a finalement permis d’aboutir au principe du plafonnement global. Notamment, il mentionne la proposition qu’avait présentée Pierre Méhaignerie d’un impôt minimum alternatif.
La solution à laquelle on est arrivé – après bien des hésitations, puisque le Gouvernement est maintenant d’accord sur le plafonnement global – n’est pas forcément satisfaisante rapportée à l’objectif de départ, et c’est ce qui donne toute sa valeur à l’amendement de nos collègues du groupe CRC-SPG : 25 000 euros plus 10 % du revenu, c’est encore loin de la solution idéale ! Vous le savez bien, du reste, monsieur le rapporteur général, puisque vous reconnaissez dans votre rapport qu’il n’y a pas de seuil parfait.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L’idéal, c’est la suppression des niches !
Mme Nicole Bricq. La solution qui est sur le point d’être adoptée n’est pas suffisante, parce que, je l’ai indiqué tout à l’heure lors de la discussion sur l’architecture de notre fiscalité, elle ne permettra pas d’éviter le cumul des avantages, elle ne permettra pas d’atteindre, finalement, ceux qui bénéficient de tous les mécanismes d’optimisation fiscale et qui, d’une certaine manière, échappent à leur devoir de citoyen. Elle n’est qu’un pis-aller par rapport à d’autres propositions qui sont dans le débat, mais qui n’ont pas reçu l’aval du Gouvernement.
L’amendement du groupe CRC-SPG, s’inscrivant dans le cadre de l’article 44 bis, est malgré tout moins mauvais que le dispositif que le Gouvernement a fini par accepter.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. M. le rapporteur général a objecté que notre amendement allait un peu trop loin. Eh bien ! avec l’article 44 bis, nous estimons que nous sommes trop loin du compte, puisqu’on ne s’attache ici qu’à la dépense fiscale, singulièrement celle qui est consentie au titre de l’impôt sur le revenu.
Cela permet d’ailleurs de masquer tout ce qui n’est pas placé sous les feux médiatiques. J’irai même plus loin : à force d’éclairer un seul point du débat, on parvient à passer le reste sous silence – c’est bien ce qui est en train de se produire –, comme la mise en pièces de l’impôt de solidarité sur la fortune, dont le rendement sera réduit d’au moins 20 % ; comme les allégements de l’impôt sur les sociétés, dénaturé par la perte de 30 % à 40 % de son montant, et je pourrais citer d’autres exemples.
Monsieur le ministre, chers collègues, nous devons nous saisir de la réduction de la dépense fiscale, et une réduction plus nette que celle qui nous est proposée dans le projet de loi, comme d’un outil nécessaire pour financer avec plus de souplesse encore le plan de relance économique dont nous avons besoin.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur Fourcade, il est exact qu’en 2005 le Conseil constitutionnel avait censuré le mécanisme. Peut-être, après tout, l’opposition ne l’en saisira-t-elle pas cette fois-ci : il faut compter sur la fin d’année et son lot de bonnes surprises ! (Sourires.)
Plusieurs éléments avaient conduit à l’époque le Conseil constitutionnel à sanctionner le dispositif : rendement budgétaire insuffisant, complexité et illisibilité du dispositif…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Surtout la complexité ! Le texte était illisible !
M. Éric Woerth, ministre. Voyons ce qu’il en est aujourd'hui.
Le rendement budgétaire, après ce qui a été décidé pour les niches fiscales outre-mer, serait de 150 millions d’euros ; il est donc significatif. Nous avons par ailleurs transformé plusieurs niches en réductions d’impôt, ce qui permet de connaître le montant de l’avantage fiscal sans avoir à le calculer par rapport au revenu, avec les difficultés que cela peut poser ; c’est donc plus clair. Enfin, un mécanisme de double liquidation permet de calculer l’impôt avant et après les niches fiscales : une calculette est mise à la disposition du contribuable.
Au total, le dispositif proposé est plus simple, lisible, et, sur le plan budgétaire, il est significatif.
M. Jean-Pierre Fourcade. Merci, monsieur le ministre !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement no II-256 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement no II-147 rectifié est présenté par MM. Nachbar, Legendre et Richert, au nom de la commission des affaires culturelles.
L'amendement no II-242 est présenté par Mme Escoffier et M. Collin.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le b du 2 du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200-0 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement no II-256.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d’un amendement de coordination, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, au nom de la commission des affaires culturelles, pour défendre l’amendement no II-147 rectifié.
M. Philippe Richert, au nom de la commission des affaires culturelles. L’amendement étant identique, je fais mien l’argumentaire de M. le rapporteur général !
M. le président. L’amendement no II-242 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° II-147 rectifié ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-256 et II-147 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement no II-314, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le c du 2 du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200-O A du code général des impôts :
« c) – Les réductions et crédits d'impôt sur le revenu.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Par souci de cohérence, je présenterai en même temps l’amendement no II-315, monsieur le président.
Notre proposition est simple : plafonner de manière équilibrée et équivalente l’ensemble des réductions et crédits d’impôt sur le revenu existants et les maintenir à un niveau que nous pourrions qualifier de « raisonnable ».
Dans l’absolu, pour tout redevable de l’impôt sur le revenu, l’effet du cumul des dispositions corrigeant l’application du barème serait donc limité à 25 000 euros et 5 % du montant de son revenu. Ainsi, un contribuable disposant de 100 000 euros de revenus aurait un plafond de 30 000 euros au titre des niches fiscales : cela reste relativement élevé, mais correspond mieux à la nécessité de voir chaque contribuable participer à la charge commune.
N’oublions pas qu’une partie du débat sur les niches fiscales est liée au fait que 7 000 contribuables aisés, disposant en moyenne de plus de 200 000 euros de revenu annuel, n’acquittent aujourd’hui aucune cotisation d’impôt sur le revenu et que le revenu de référence de ces contribuables est de près de 1,5 milliard d’euros. Sont dans le même cas plus de 50 000 contribuables dont les revenus sont confortables, ce qui fait échapper à l’impôt plus de 4 milliards d’euros de revenu fiscal de référence. Tel est bien l’effet cumulatif des dispositions dérogatoires visées par l’article 44 bis !
Notons aussi que certains contribuables très aisés, par l’accumulation de revenus de capitaux et d’avoirs fiscaux, demeurent imposables mais récupèrent l’équivalent auprès du Trésor public.
Bref, il est grand temps que nous mettions un terme à une fiscalité dérogatoire qui met en cause l’égalité devant l’impôt, ampute les recettes de l’État et creuse les déficits publics.
Ce que nous souhaitons, c’est qu’en lieu et place d’une fiscalité dérogatoire toujours plus obscure, nous procédions à une véritable réforme de l’impôt sur le revenu.
Utilisons donc la remise en cause de la dépense fiscale pour modifier les règles d’imposition au barème, par exemple en allégeant l’impôt pesant sur l’activité salariée, et, surtout, pour la recycler en dépense publique nouvelle.
Pour ne prendre qu’un exemple, on manque d’argent pour humaniser les centres d’hébergement, et on continue de déduire les dons aux œuvres qui interviennent en direction du même public… Or, s’il faut aider les gens qui souffrent de la faim, il faut aussi se donner les moyens de les sortir de la situation dans laquelle ils sont !
Sur le plafonnement des niches fiscales, on observera, indépendamment des règles de calcul, que tout revenu inférieur à 25 000 euros n’est pas concerné. Or c’est la situation majoritaire dans notre pays, puisque c’est celle de vingt-cinq des trente-six millions de contribuables recensés en France. Une grande partie de ces redevables, comme d’ailleurs de ceux qui vivent d’abord et avant tout de leur travail, ne sont pas des professionnels de l’optimisation fiscale comme peuvent l’être les détenteurs de revenus les plus aisés.
Les mesures que nous préconisons ont donc pour objet de réduire de manière significative la dépense fiscale, puisqu’il est établi qu’elle est fortement concentrée sur quelques centaines de milliers de contribuables.
M. le président. L'amendement no II-362 rectifié, présenté par MM. Richert, A. Dupont, Lefèvre, Legendre, Nachbar, Thiollière et J.-L. Dupont, est ainsi libellé :
I. – Dans le c du 2 du texte proposé par le I de cet article pour l'article 200-0 A du code général des impôts, après la référence :
199 quater F,
insérer la référence :
199 quatervicies,
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l'État de l'exclusion du régime « Malraux » du plafonnement global des avantages fiscaux, est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Richert.
M. Philippe Richert. Cet amendement a pour objet d'exclure le dispositif « Malraux » du plafonnement global des niches fiscales instauré par l'Assemblée nationale.
Nous avons déjà beaucoup discuté de ce dispositif « Malraux » qui, comparé à ce que nous connaissions, sera désormais davantage encadré et réduit, même si ce soir nous sommes revenus sur les restrictions qu’avait prévues l’Assemblée nationale.
Nous souhaitons que le dispositif « Malraux » ne soit pas considéré comme faisant partie des niches fiscales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous ne sommes évidemment pas favorables à l’amendement no II- 314, parce que nous estimons que la démarche du groupe CRC-SPG est trop systématique et, plus encore, parce que nous ne pouvons pas partager les appréciations portées sur les régimes fiscaux qui correspondent à des situations subies : la dépendance, le handicap, les pensions alimentaires, la composition de la famille, les charges de famille. Tout cela ne doit pas et ne peut évidemment pas entrer dans le plafonnement global, ce serait une très grande injustice.
De la même façon, les dispositifs sans contrepartie – le mécénat, les dons… – doivent manifestement être eux aussi exclus du plafonnement global.
La commission, vous l’aurez compris, est tout à fait hostile à la proposition du groupe CRC-SPG.
J’en viens à la proposition de notre collègue Philippe Richert, à qui je voudrais répondre de manière un peu détaillée.
Le plafonnement global dont il est question est calculé sur la base d’un forfait de 25 000 euros auquel s’ajoutent 10 % du revenu imposable. Or le dispositif « Malraux », tel qu’il résulte du texte adopté par l’Assemblée nationale et des modifications que nous y avons apportées, conduit à une réduction d’impôt pour un investissement maximal de 100 000 euros de 25 % en droit commun et de 35 % dans les secteurs sauvegardés. En d’autres termes, la réduction d’impôt annuelle est encadrée par un plafonnement spécifique d’un montant qui s’élève soit à 25 000 euros, soit à 35 000 euros.
S’agissant du droit commun, le plafonnement global est par principe supérieur au plafonnement spécifique. Dès lors, on ne comprend pas pourquoi il faudrait exclure le dispositif « Malraux » du plafonnement global.
En ce qui concerne les secteurs sauvegardés, le plafonnement global ne vient écrêter le plafonnement spécifique fixé à 35 000 euros qu’à partir d’un niveau de revenu assez élevé. En effet, le plafonnement global n’atteint 35 000 euros qu’à partir de 100 000 euros de revenu et reste supérieur à l’impôt dû. Il ne produit ses effets qu’à partir d’un revenu de 124 000 euros pour un célibataire, de 160 000 euros pour un couple marié sans enfant, de 170 000 euros pour un couple marié avec un enfant.
Il convient donc de souligner que le plafonnement global produit ses effets sur les revenus les plus élevés, ce qui correspond tout simplement à la progressivité de l’impôt.
Cher collègue, j’espère vous avoir convaincu qu’il ne serait ni utile ni opportun d’exclure le dispositif « Malraux » du plafonnement global.
M. Philippe Richert. Non !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si l’on est vraiment motivé par les opérations relevant du dispositif « Malraux » et des textes ultérieurs, notamment en secteur sauvegardé, on a la possibilité d’agir sans être plafonné, et ce jusqu’à un niveau de revenu substantiel.
Tels sont les éléments que je peux indiquer, en espérant qu’il soit possible à notre excellent collègue Philippe Richert de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Nous ne sommes évidemment pas favorables à l’amendement présenté par M. Vera.
Sur la méthode retenue, il était tout à fait naturel de sélectionner les niches entrant dans le plafonnement global. Après un examen niche par niche, nous avons retenu celles qui permettent de tirer un avantage économique d’une situation choisie, quelle qu’elle soit. En revanche, les niches qui s’attachent à des situations que l’on subit – je pense plus particulièrement à la réduction d’impôt au titre de la dépendance, au titre de la prestation compensatoire – n’ont pas à être placées sous plafond global.
Nous avons examiné chaque niche, et je crois au contraire que nous sommes parvenus à un résultat tout à fait juste.
En ce qui concerne l’amendement n° II-362 rectifié, il ne faut pas exclure du plafond des niches qui ont toutes les raisons d’y figurer.
Ces niches fiscales sont liées à des travaux considérés comme utiles. Elles ne sont pas subies, car c’est bien le contribuable qui choisit d’en bénéficier.
Il est de l’intérêt général que des travaux soient effectués dans les secteurs sauvegardés – il en va d’ailleurs ainsi depuis des dizaines d’années –, et il faut évidemment les favoriser. Mais l’avantage doit être plafonné ; le plafond a été revu tout à l’heure, et le dispositif me semble ainsi très cohérent. Le plafonnement global à 25 000 euros plus 10 % du revenu permet d’intégrer le maximum de la niche liée au dispositif « Malraux ».
Sous réserve de ces explications, j’invite M. Richert à retirer son amendement.