M. le président. L’amendement n° 94 est retiré.
Monsieur Patient, l’amendement n° 203 l’est-il également ?
M. Georges Patient. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 203 est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 371, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. - Après la première phrase du troisième alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
En concertation avec les acteurs concernés, elle évalue notamment la mise en œuvre de la politique du logement outre-mer.
II. - Dans la dernière phrase du même alinéa, remplacer les mots :
et des rémunérations des fonctionnaires de l'État
par les mots :
, des traitements des fonctionnaires et du niveau des rémunérations
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Il semble utile de prévoir explicitement que la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer évaluera, en concertation avec les acteurs concernés, notamment les collectivités territoriales et les organismes d’HLM, la politique du logement outre-mer.
En ce qui concerne l’ajout de la commission des finances sur l’impact des différents éléments relatifs au mécanisme de formation des prix, la commission des affaires sociales souhaite élargir le champ du rapport triennal de la future commission aux traitements de l’ensemble des fonctionnaires et au niveau des rémunérations en général.
M. le président. L'amendement n° 354 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
I. - Après la première phrase du troisième alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
En concertation avec les acteurs concernés, elle évalue notamment la mise en œuvre de la politique du logement outre-mer.
II. - Dans la dernière phrase du même alinéa, remplacer les mots :
des rémunérations des fonctionnaires de l'État en outre-mer
par les mots :
du niveau des rémunérations
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 354 rectifié est retiré.
L'amendement n° 250, présenté par M. Virapoullé, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du troisième alinéa de cet article, supprimer les mots :
des fonctionnaires de l'État en
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis.
M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis. Nous partageons totalement la volonté de la commission des finances de créer une sorte d’observatoire de l’impact des politiques publiques menées outre-mer. Ce sera un outil très important pour que l’ensemble de la représentation nationale puisse apprécier les avancées réalisées, les difficultés rencontrées, et constater éventuellement l’inutilité de tel ou tel dispositif.
Nous sommes d’accord pour mesurer l’impact des rémunérations, et nous avons conscience que celles de la fonction publique constituent un élément particulièrement important. Cela étant, en cette période de crise et de tensions, nous préférons ne pas cibler une catégorie, en l’occurrence les fonctionnaires. C’est pourquoi notre amendement tend à faire en sorte que soient visées les rémunérations en général, y compris, bien sûr, celles des fonctionnaires, mais sans que soient expressément désignés les serviteurs de l’État.
M. le président. L'amendement n° 95, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Dans la deuxième phrase du troisième alinéa de cet article, remplacer le mot :
trois
par le mot :
deux
II. - Supprimer la dernière phrase du même alinéa.
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. L’amendement n° 371 a deux objets.
Concernant le premier, nous considérons que la précision proposée n’est pas utile, car, aux termes de la rédaction actuelle du texte, l’évaluation de la politique du logement outre-mer est déjà incluse dans le champ des missions de la Commission nationale.
Concernant le second, la commission des finances a pris acte du fait que la question de la formation des prix était au cœur des préoccupations des habitants des collectivités d’outre-mer. Elle souhaite donc que l’impact des rémunérations des fonctionnaires de l’État fasse l’objet d’une attention toute particulière.
Pour ces deux raisons, nous avons émis un avis défavorable sur l’amendement présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.
Nous avons écouté avec attention les explications de M. Virapoullé. Cependant, pour la raison précédemment invoquée, nous sommes défavorables à l’amendement n° 250.
Enfin, nous sommes également défavorables à l’amendement n° 95.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis que la commission sur les amendements nos 371 et 95.
En revanche, il est favorable à l’amendement n° 250. Nous considérons en effet que cibler les fonctionnaires d’État n’est pas forcément la meilleure chose à faire. Dès lors, il nous semble que la rédaction de la commission des lois est plus conforme à ce qui était souhaité.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Je pense que la première partie de l’amendement n° 371, qui vise à une évaluation, réalisée en concertation avec les acteurs concernés, de la mise en œuvre de la politique du logement outre-mer, est très importante.
Quant à la deuxième partie, qui concerne les traitements des fonctionnaires et le niveau des rémunérations, elle résulte d’un compromis qui a été trouvé au sein de la commission des affaires sociales et qui y fait consensus. Je me demande si notre rédaction n’est pas meilleure que celle qui résulterait de l’adoption de l’amendement proposé par la commission des lois. En tout cas, elle a le mérite de prendre en compte les salaires de tous les fonctionnaires, et non pas seulement des fonctionnaires de l’État, ainsi que le niveau de l’ensemble des rémunérations, au-delà de celles de la fonction publique.
M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis. La nôtre aussi !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je pense que, si nous voulons régler les problèmes de l’outre-mer, nous ne devons pas nous livrer à la moindre provocation. Cependant, qui peut contester qu’il y a un problème de sur-rémunération dans la fonction publique outre-mer ?
La rédaction proposée par Mme Payet invite explicitement à prendre en compte cette problématique, tandis que l’amendement de M. Virapoullé ferait disparaître tout l’intérêt de ce libellé. Or il est bon, me semble-t-il, que le Parlement puisse dire clairement qu’il y a matière à réflexion dans les sur-rémunérations que perçoivent les fonctionnaires, qu’ils soient territoriaux ou d’État.
Par conséquent, je crois que nous pouvons être favorables à l’amendement n° 371.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 371.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, les amendements n° 250 et n° 95 n’ont plus d’objet.
L'amendement n° 96, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer l'avant-dernier alinéa de cet article.
Cet amendement a été précédemment retiré.
Je mets aux voix l'article 33, modifié.
(L'article 33 est adopté.)
Intitulé du projet de loi
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 29, présenté par Mmes Hoarau et Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi :
Projet de loi de développement de l'outre-mer
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Au terme de la discussion sur le projet de loi, le moment est venu d’apporter une première conclusion à nos débats. Cette conclusion, nous vous proposons de la tirer en modifiant l’intitulé même du projet de loi.
Il nous semble en effet plus approprié de viser le développement de l’outre-mer en général plutôt que son seul développement économique, car le mouvement social d’une puissance et d’une ampleur inégalée qui traverse l’outre-mer depuis plusieurs semaines montre, à l’évidence, que les problèmes ne sont pas de nature strictement économique.
D’autres enjeux, d’ordre social, sociétal, humain, sont au cœur de ce mouvement. Les Guadeloupéens, les Martiniquais, les Réunionnais, comme les Guyanais cet automne, qui manifestent et font valoir des revendications particulièrement précises, ne demandent pas plus ou moins de défiscalisation, plus ou moins d’activité pour les entreprises de tel ou tel secteur. Ils manifestent pour plus d’égalité, de justice sociale et de respect de la dignité de la personne humaine.
Le texte que nous avons examiné ne peut donc simplement décliner les ajustements de politiques publiques, au gré des seules contraintes budgétaires de l’État. Il doit englober l’ensemble des paramètres d’un véritable développement multiforme des régions et des collectivités ultramarines, en termes d’emploi, de formation, d’égalité des droits, de reconnaissance et de développement culturels.
Notre amendement vise donc à prendre en compte cette approche globale du présent et de l’avenir de l’outre-mer.
Si nos collègues du groupe socialiste en étaient d’accord, nous pourrions adresser un signal fort à l’Assemblée nationale en nous mettant d’accord sur l’intitulé suivant : « loi de développement des outre-mers ».
M. le président. L'amendement n° 156, présenté par MM. Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
développement économique
rédiger comme suit la fin de l'intitulé du projet de loi :
des outre-mers
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Cet amendement vise à reconnaître la diversité des collectivités d’outre-mer et la spécificité de chaque territoire, afin que lui soi apportées des solutions adaptées à ses caractéristiques propres.
Cependant, la modification de l’intitulé de ce projet de loi, outre le fait qu’elle permettrait de qualifier le fond du texte de façon plus conforme à la réalité, aurait deux avantages supplémentaires : celui d’introduire dans notre vocabulaire national une acception plus juste de la réalité ultramarine ainsi que celui de permettre, sur le plan administratif, de marquer d’un seul mot la complexité actuelle des statuts des divers départements, régions et collectivités d’outre-mer, sans oublier, bien sûr, la Nouvelle Calédonie, qui représente une catégorie de collectivité à elle seule.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur. Nous sommes saisis de deux propositions de modification de l’intitulé du projet de loi et notre préférence va à la proposition de M. Patient, aux termes de laquelle l’intitulé deviendrait : « Projet de loi pour le développement économique des outre-mers. »
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement, sensible à ce qui vient d’être dit, est prêt à donner un avis favorable sur la proposition de M. Patient.
Celle-ci nous semble en effet refléter la diversité de nos collectivités d’outre-mer, tout en recouvrant leur unité. L’outre-mer est certes traité dans notre pays de façon unique sur les plans politique et budgétaire, mais nous avons pu mesurer tout au long de ces débats la diversité de ces territoires, de leurs attentes et de leurs approches.
Mme Nicole Bricq. Bien sûr !
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Nous souhaitons achever l’examen de ce texte sur un consensus, afin de montrer que, de temps en temps, les outre-mers et les représentants de la nation savent trouver une unité, cette unité devant être porteuse d’espoir.
Voilà pourquoi le Gouvernement donne un avis favorable sur l’amendement n° 156.
M. le président. Il conviendrait éventuellement de s’assurer que la formulation proposée est conforme aux articles 72-3 et suivants de la Constitution.
La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.
M. Laurent Béteille. Monsieur le président, malgré l’heure tardive, j’ai des préoccupations linguistiques.
L’expression « des outre-mers » est indiscutablement une création, comme l’a d’ailleurs souligné notre collègue, mais il me semble que, en toute hypothèse, le mot « outre-mer » devrait rester invariable. En effet, dans ce mot composé, le mot « mer » est générique et ne désigne pas telle ou telle mer. Il faudrait donc plutôt écrire « des outre-mer », sans « s ».
M. le président. Monsieur Patient, rectifiez-vous votre amendement dans le sens suggéré par M. Béteille ?
M. Georges Patient. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 156 rectifié, présenté par MM. Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Après les mots :
développement économique
rédiger comme suit la fin de l'intitulé du projet de loi :
des outre-mer
Je mets aux voix l’amendement n° 29.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote sur l’amendement n° 156 rectifié.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Nous changeons l’intitulé du texte, en parlant des outre-mer, au pluriel. Mais si nos collègues auteurs de l’amendement ne votent pas le projet de loi, je ne vois pas pourquoi j’accepterais de modifier son intitulé !
M. le président. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette, pour explication de vote
M. Jean-Étienne Antoinette. Je ne souhaite pas retarder la conclusion de nos débats, mais la modification proposée par notre collègue ne se limite pas à un effet de style.
Premièrement, l’outre-mer est caractérisé par des réalités différentes, notamment géographiques : la Guyane est située sur le continent sud-américain, la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion sont des îles.
Deuxièmement, nous avons certes une relation historique, juridique, administrative avec la France, mais nous sommes situés dans des aires géographiques et économiques tout à fait différentes.
Quand nous avons analysé les amendements qui ont été adoptés, nous avons bien vu qu’ils tenaient parfois compte de ces différentiels de développement économique. Ainsi, notre collègue Serge Larcher a pu déplorer que les taux de certaines taxes soient différents entre la Martinique et la Guyane, mais ces écarts se justifient précisément par les réalités différentes que connaissent ces départements.
Leurs voies de développement seront également différentes parce que chacun dispose d’atouts spécifiques : si je prends l’exemple de la Guyane, qui est le territoire que je représente ici, elle doit savoir tirer parti de l’activité aurifère et de la biodiversité ; elle doit également réfléchir à mieux exploiter les retombées économiques de l’activité spatiale, car la Guyane, du fait de cette activité, est une chance pour la France et pour l’Europe.
L’amendement de notre collègue Patient rend bien compte de l’existence de réalités géographiques et géostratégiques différentes : ainsi, le pont que nous allons inaugurer bientôt en Guyane offrira à notre département une ouverture sur le continent sud-américain.
M. le président. La parole est à M. Denis Detcheverry, pour explication de vote.
M. Denis Detcheverry. Nous sommes en train de tergiverser autour de deux mots ! Je regrette personnellement que l’emploi du pluriel dans cet intitulé exprime une dispersion, une division, alors que l’outre-mer a besoin d’union. C’est pour cela en tout cas que je plaide aujourd’hui !
La volonté d’insister sur le pluriel signifie que nous resterons toujours distants les uns des autres, alors que nous avons des points communs que nous devrions absolument tenter de rapprocher. C’est pourquoi je tiens à employer le singulier. Je veux bien que l’on parle de « territoires ultramarins » éloignés les uns des autres, mais conservons le terme d’outre-mer français, au singulier ! (Mme Lucienne Malovry applaudit.)
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, la parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour explication de vote.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que nous achevons l’examen de ce projet de loi, je tiens à souligner la qualité des débats : chacun a pu s’exprimer sur les sujets qui lui tenaient à cœur et nous avons pu ainsi trouver de nombreux point de consensus.
Le contexte de la discussion était tout à fait particulier, puisque dans plusieurs départements, les mouvements sociaux, parfois marqués par des émeutes, comme cela a été le cas mardi soir à la Réunion, se sont poursuivis. Les événements et les incidents, parfois dramatiques, qui se sont déroulés ces derniers mois en Guyane, en Guadeloupe, en Martinique, puis à la Réunion, nous montrent que l’outre-mer vit une crise profonde, que la conjoncture actuelle ne fait que renforcer.
Je me félicite donc de l’adoption par notre assemblée d’un titre relatif au soutien du pouvoir d’achat. Il était indispensable de montrer aux ultramarins que nous sommes conscients des difficultés quotidiennes auxquelles ils doivent faire face. La possibilité donnée au Gouvernement de réglementer les prix des produits ou familles de produits de première nécessité devrait ainsi permettre de clarifier le système de formation des prix dans les départements d’outre-mer et de faire la vérité sur les coûts que supportent effectivement les producteurs. L’objectif de cette mesure, plus que de rétablir un encadrement des prix, est d’inciter la grande distribution à modérer ses prix de vente pour les produits de première nécessité ou, du moins, à justifier des écarts de prix très importants avec ceux qui sont pratiqués en métropole.
Je me félicite également que les observatoires des prix dans les départements d’outre-mer doivent désormais publier régulièrement des comparaisons de prix avec la métropole. Leur création avait suscité beaucoup d’espoirs, qui, malheureusement, avaient été déçus par la suite. En fixant ainsi des objectifs réguliers en termes de publication de données chiffrées, ces observatoires vont retrouver leur légitimité.
En outre, nous avons adopté, sur l’initiative du Gouvernement, plusieurs amendements visant à soutenir le pouvoir d’achat : tarification à la seconde des communications de téléphonie mobile et, surtout, possibilité de verser un bonus exceptionnel, d’un montant maximal de 1 500 euros par salarié et par an.
Toutes ces dispositions répondent aux attentes des ultramarins et je me félicite que le Sénat les ait adoptées.
De même, des avancées importantes ont été réalisées en matière de logement social. L’article 20 de ce projet de loi est, de ce point de vue, absolument primordial. En effet, alors que la population des départements d’outre-mer continue de croître rapidement, le nombre de logements construits outre-mer connaît une diminution sensible ces dernières années et le nombre de logements sociaux subit de son côté un véritable effondrement. En mettant en place une défiscalisation spécifique pour les logements sociaux, ce projet de loi devrait permettre, du moins je l’espère, d’enrayer cette tendance.
Je me réjouis particulièrement de l’adoption de mon amendement qui permet d’étendre la défiscalisation aux logements destinés à héberger les personnes âgées ; pourraient en bénéficier les personnes aux revenus modestes de plus de soixante-cinq ans. En effet, le besoin en logements indépendants pour les personnes âgées est de plus en plus important, en raison des évolutions familiales liées au travail des femmes : les différentes générations vivent de moins en moins souvent sous le même toit.
De plus, nous avons adopté un amendement qui permet de défiscaliser les travaux de réhabilitation dans les logements de plus de vingt ans, contre quarante ans actuellement. En effet, du fait du climat des départements d’outre-mer, les bâtiments vieillissent beaucoup plus rapidement qu’en métropole. De surcroît, l’habitat insalubre y est malheureusement une réalité très répandue. Cet amendement permettra ainsi de remettre aux normes de confort moderne de nombreux logements afin que les habitants retrouvent des conditions de vie décentes.
Enfin, en ce qui concerne le soutien à l’activité économique dans les départements d’outre-mer, je me félicite que les aides à la rénovation des chambres d’hôtel, revalorisées par notre commission des finances, aient été maintenues et étendues à Mayotte. Le tourisme est un secteur économique essentiel pour les départements d’outre-mer et permettre de rénover dans conditions optimales notre parc hôtelier contribuera à le rendre plus compétitif, alors qu’il doit faire face à une conjoncture très déprimée et à la concurrence débridée des pays moyennement avancés, où les prix sont très nettement inférieurs à ceux qui sont pratiqués dans les départements d’outre-mer.
Je me félicite également de l’adoption de mon amendement permettant de favoriser l’écoulement des productions agricoles locales dans les cantines des écoles et des administrations. Il est nécessaire de créer un marché pour toutes nos productions locales, si l’on veut progresser vers l’autonomie alimentaire des départements d’outre-mer.
Pour toutes ces raisons, la majorité des sénateurs centristes voteront ce projet de loi. Toutefois, il est nécessaire de le souligner, il ne répond que bien imparfaitement à la crise que traversent les départements et les collectivités d’outre-mer dans leur ensemble. Les états généraux de l’outre-mer devront permettre, dans les semaines qui viennent, de présenter des propositions concrètes pour redynamiser l’économie de nos territoires. De même, j’espère que la mission commune d’information du Sénat permettra de faire avancer activement cette réflexion. Il me semble donc indispensable de compléter très prochainement ce projet de loi par un autre, qui permettra d’apporter des solutions structurelles adaptées à la crise que nos territoires traversent.
Pour conclure, au nom du groupe Union centriste, je tiens à remercier les rapporteurs pour la qualité de leur travail. Je remercie également les administrateurs de toutes les commissions saisies pour leur engagement sur ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici donc parvenus au terme de la discussion de ce projet de loi relatif au développement économique de l’outre-mer, voire « des outre-mer », après l’adoption de l’amendement de notre collègue Georges Patient.
Au cours de la discussion générale, comme lors de la présentation de la motion tendant à opposer la question préalable, nous avions indiqué à quel point ce projet de loi, même amendé par la commission des finances, selon les modalités fixées par la révision constitutionnelle, nous paraissait en décalage accentué avec les attentes, les aspirations et les revendications des habitants de l’outre-mer.
Cette impression a-t-elle varié au fil de l’examen des articles du texte ? Contraint de donner des gages à des élus porteurs des inquiétudes et des demandes de leurs mandants, le Gouvernement a tenté de manœuvrer en reculant, sans rien céder au fond quant à l’orientation générale du projet de loi.
Cela fait maintenant plusieurs mois, bien avant l’examen de la loi de finances pour 2009, bien avant le développement de la crise économique et financière internationale, que le Gouvernement a arrêté sa ligne de conduite. Prétextant des abus et des travers des dispositifs de défiscalisation existants – effets pervers que nous avions nous-mêmes dénoncés –, il a décidé de remodeler les politiques publiques en faveur de l’outre-mer et de réduire autant que faire se peut leur coût.
Ainsi, la prétendue moralisation de la défiscalisation et la nouvelle définition des politiques de soutien aux entreprises ne sont que les manifestations de cette volonté de réduire le « coût » de l’outre-mer. Les économies de gestion réalisées pour le budget général ne trouvent aucune véritable illustration en engagements fermes et renouvelés en faveur de la dépense publique directe.
En bien des domaines, monsieur le secrétaire d’État, vous avez même contourné la représentation nationale et les difficultés, en renvoyant vers les futurs états généraux, le recours aux décrets ou aux ordonnances, la solution des problèmes que le débat a fait émerger. Pour nous, le développement humain est à placer au cœur de nos préoccupations de législateur. Nous avions déploré les limites de cette loi dite « de développement économique » et la prise en compte insuffisante, de notre point de vue, du développement durable, humain, social et sociétal, comme l’a rappelé ma collègue Gélita Hoarau, lorsqu’elle a défendu un amendement tendant à modifier et compléter l’intitulé de ce projet de loi.
Cependant, notre groupe s’est impliqué dans ce débat avec le souci de porter les légitimes aspirations de la population ultramarine. Nous avons argumenté et débattu en partant de cette priorité. Force est de constater que nous n’avons guère été écoutés sur l’ensemble des problématiques posées par le projet de loi.
Les quelques inflexions imprimées au texte ne changent rien quant aux propositions de fond et à notre position initiale. Cette situation nous amène à rejeter le texte résultant des travaux du Sénat. Nous voterons donc contre ce projet de loi notoirement inadapté à la situation.
S’agissant du devenir des départements et collectivités d’outre-mer, nous avons bien plus confiance en la vitalité et le dynamisme de leurs forces sociales qu’en l’efficacité d’une loi de court terme, purement circonstancielle, qui ne manquera pas d’être dépassée à l’issue des états généraux.
M. le président. La parole est à M. Georges Patient, pour explication de vote.
M. Georges Patient. Mon explication de vote est faite au nom des membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, à l’issue de la discussion de ce projet de loi pour le développement économique des outre-mer, quelle appréciation peut-on porter sur ce texte ?
Que dire d’un texte qui, rédigé il y a plus d’un an, ne tient compte ni de la crise économique mondiale, ni de ses conséquences dans les outre-mer, ni des événements qui, ayant commencé il y a déjà plusieurs mois, ont lieu, encore en ce moment, dans des collectivités territoriales si particulières, des événements qui traduisent des inquiétudes, des craintes, des indignations, des révoltes et des revendications en matière d’emploi, de pouvoir d’achat, de logement, de formation, de transport, de communication ?
Que dire d’un texte que l’on nous a demandé de discuter de toute urgence, alors qu’il n’est même pas inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ?
Que dire d’un texte qui n’apporte pas les réponses les plus urgentes, puisque celles-ci sont fournies, dans la précipitation, par des accords locaux ?
Que dire d’un texte dont tout le monde sait très bien qu’il va être remis en question par les états généraux de l’outre-mer, qui, dès le mois d’avril, sont censés mettre tous les problèmes « à plat », et apporter des réponses durables, à long terme, aux préoccupations de nos compatriotes ultramarins ?
Ce projet de loi est loin de satisfaire les sénateurs du groupe socialiste, apparentés et rattachés. En effet, il ne répond que très partiellement aux attentes de ceux à qui il est censé s’adresser.
Tout en créant des zones franches d’activités, et malgré quelques ajustements votés par cette assemblée, nous n’oublions pas qu’à l’origine de ce texte était le souci de faire des économies.
À l’origine du système de la dégressivité, le souci de faire des économies, avec, pour conséquence, le frein à l’embauche de cadres, dont les PME ont tant besoin pour se développer et être compétitives !
Que dire, également, de la réforme du régime de défiscalisation en matière de logement ? Même si le dispositif initial a été quelque peu corrigé pour tenir compte des besoins en logement intermédiaire, n’est-il pas légitime de craindre une baisse d’activité dans le secteur du bâtiment ? Les moyens budgétaires de l’État en faveur du logement social ne doivent-ils pas être augmentés ?
Que dire, aussi, de l’absence d’aide aux collectivités territoriales, alors que le rôle de celles-ci en matière d’investissement public est supérieur - près de 85 % - à celui des collectivités de métropole, sans parler du poids des départements pour ce qui est des dépenses sociales, indispensables pour faire face au malaise social ?
Et, en regardant plus loin, que dire du désengagement progressif de l’État, beaucoup plus net qu’en métropole depuis 2002 ?
Nous pensons que le Gouvernement ne doit pas casser l’élan dont les outre-mer savent faire preuve quand on leur permet de libérer leurs énergies. Et si l’on nous disait que nous comptons trop sur les effets des mécanismes de défiscalisation en tous genres, nous rétorquerions que nous utilisons les outils que nous pouvons utiliser.
Tout le monde sait qu’un développement endogène de nos régions viendra d’une exploitation rationnelle de nos ressources naturelles et humaines, de la rupture des blocages, de la cassure de monopoles d’un autre âge, et de l’ouverture de tous les outre-mer vers leurs contextes régionaux respectifs.
Le Président de la République nous a annoncé des « états généraux de l’outre-mer ». Nous en prenons acte. Nous considérons le dialogue qui s’est instauré pendant la discussion de ce projet de loi, certes nourri de quelques correctifs concernant la régulation des prix, l’emploi des cadres, la réhabilitation des logements, la santé, ou la taxation des jeux de hasard, comme le début des discussions de ces futurs états généraux. Mais sachez que nous serons très attentifs à tout ce qui sera dit et décidé pendant cette période, ainsi qu’aux perspectives qui se dessineront alors.
En conséquence, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, au nom des membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, nous ne donnerons pas un blanc-seing au Gouvernement pour sa politique vis-à-vis des outre-mer, mais procéderons à un vote d’abstention sur ce projet de loi, gage de bonne volonté, mais aussi d’extrême vigilance. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)