M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce serait de la simplification à la hache !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Il n’en reste pas moins que la simplification du droit est une nécessité. C’est dans cette optique que plusieurs habilitations à codifier par la voie d’ordonnances ont été inscrites dans le texte. Elles permettront de procéder à un examen minutieux du code de l’urbanisme ou du code général des collectivités territoriales, par exemple, pour proposer des mesures de simplification efficaces et encadrées.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion qui nous réunira jusqu’à demain soir est importante, comme en témoigne le grand nombre d’amendements déposés. À ce titre, je félicite la commission des lois du travail qu’elle a réalisé, puisqu’un certain nombre de ses amendements sont déjà intégrés au texte, ce qui est un effet de la révision constitutionnelle. Il va de soi que le Gouvernement suivra de très près les débats de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
CHAPITRE IER
Mesures de simplification en faveur des citoyens et des usagers des administrations
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le délai visé à l'alinéa précédent expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il y a lieu d'admettre la recevabilité d'un recours présenté le premier jour ouvrable suivant. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement porte sur la notification des recours contre les décisions de refus de demande d’asile.
La loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, qui a créé la Cour nationale du droit d’asile et instauré un droit de recours contre les décisions de refus d’asile à la frontière, est muette sur un point de procédure qui nous semble fondamental.
En effet, le dispositif créé ne permet pas, dans la pratique, l’exercice effectif d’un droit au recours, alors qu’il s’agit pourtant d’une garantie fondamentale prévue à l’article 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
L’article 24 de cette loi, modifiant l’article L. 213-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ouvre le droit, pour l’étranger qui a fait l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile, de demander l’annulation de cette décision dans les vingt-quatre heures suivant sa notification.
Ce délai, que nous avions à l’époque jugé trop court, ne nous semblait pas garantir suffisamment aux étrangers concernés un droit de recours effectif. Plus d’un an après la promulgation de la loi, je suis en mesure de confirmer que nos craintes étaient fondées.
Nous avons été sollicités par plusieurs associations qui aident les déboutés du droit d’asile à former un recours. Toutes déclarent qu’il est impossible, en vingt-quatre heures, de préparer un dossier, de fonder une argumentation et de réunir les preuves nécessaires.
Gardons à l’esprit que dans les zones d’attente des personnes en instance, les permanences d’avocats n’existent pas. L’étranger qui souhaite saisir le juge est obligé de s’adresser aux bénévoles de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers, l’ANAFÉ. Or ceux-ci sont généralement absents en soirée ou durant les week-ends et les jours fériés. Si l’étranger reçoit une notification de refus un samedi, il pourra être refoulé le dimanche sans avoir pu se défendre.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de simplifier la procédure, conformément d’ailleurs à une jurisprudence du Conseil d’État relative aux notifications d’arrêté préfectoral de reconduite à la frontière : lorsque le délai pour former un recours expire un samedi, un dimanche ou un jour férié, le recours est considéré comme recevable jusqu’au premier jour ouvrable suivant. Cela laissera à l’étranger la possibilité de se faire assister de manière correcte par un permanent de l’ANAFÉ.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. Cet amendement tend à modifier les règles de computation des délais de recours contre les décisions de refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile.
Le souci des auteurs de cet amendement est compréhensible. Des étrangers placés en zone d’attente ne sont pas armés pour exercer seuls leur droit dans des délais aussi brefs, a fortiori le week-end, lorsqu’il est plus difficile de bénéficier d’une assistance juridique. Pour autant, faut-il modifier la computation des délais ? Je ne le pense pas.
La quasi-totalité de ce contentieux est concentrée sur la plateforme de Roissy-en-France. Les étrangers placés en zone d’attente des personnes en instance qui ont déposé une demande d’asile à la frontière sont encadrés et accompagnés juridiquement par l’ANAFÉ. Cette aide juridique est apportée dès le dépôt de la demande d’asile. On peut donc penser que, pendant le délai de traitement de la demande d’asile, ces étrangers préparent leur recours pour le cas où leur demande serait rejetée.
Dans ces conditions, j’estime que cet amendement mériterait de faire l’objet d’un examen approfondi dans un cadre plus approprié. C'est la raison pour laquelle la commission en demande le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 38 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Je l’ai moi-même constaté : dans une zone d’attente des personnes en instance, les étrangers n’ont pas la possibilité de se faire assister par un avocat ou d’obtenir les moyens de se défendre en cas de refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile.
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° La première phrase est complétée par les mots : « et le cas échéant, s'il formule un recours devant la Cour nationale du droit d'asile dans le délai mentionné à l'article L. 751-2, jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile » ;
2° La seconde phrase est complétée par les mots : « et le cas échéant, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, avant la décision de la Cour ».
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet d’instituer un recours suspensif, pour les cas de refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile autres que celui qui est prévu par la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile.
Certes, un recours suspensif de plein droit pour les demandes d’asile à la frontière a été introduit, mais il existe d’autres procédures en matière d’asile, pour lesquelles aucun recours suspensif n’est prévu.
En vertu de l’article 39 de la directive 2005/85/CE du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres, directive européenne dont nous attendons toujours la transposition en droit interne, les autorités françaises sont tenues d’instituer des recours effectifs contre toutes les décisions concernant les demandes d’asile.
Aujourd’hui, les décisions qui sont prises dans le cadre de la procédure dite « Dublin II » ne peuvent faire l’objet d’un recours suspensif, ce qui va à l’encontre de nombreux textes.
Ainsi, dans son dernier rapport relatif aux conditions d’exercice du droit d’asile en France, la Commission nationale consultative des droits de l’homme rappelle que « tout refus d’entrée sur le territoire entraînant une mesure de refoulement du demandeur d’asile doit être susceptible de recours suspensif devant la juridiction administrative dans un délai raisonnable ».
En outre, dans une recommandation du 18 septembre 1998, le comité des ministres du Conseil de l’Europe précise que « tout demandeur d’asile s’étant vu refuser le statut de réfugié et faisant l’objet d’une expulsion vers un pays concernant lequel il fait valoir un grief défendable, prétendant qu’il serait soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants doit pouvoir exercer un recours effectif devant une instance nationale »…
Malheureusement, la procédure actuelle ne comporte pas cette possibilité. C’est pourquoi l’amendement n° 36 vise à instituer un recours suspensif pour les cas de refus d’asile à la frontière autres que celui que j’ai évoqué.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. Le fait que le recours devant la CNDA ne soit pas suspensif n’a pas pour effet de le priver d’effectivité au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
Cependant, ma chère collègue, je partage votre souci que la liste des pays d’origine sûrs soit arrêtée avec la plus grande prudence. C’est non pas tant la procédure prioritaire qui doit retenir notre attention que la manière dont ces pays sont déterminés.
En tout état de cause, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Cet amendement, qui vise à assortir l’ensemble des recours d’un effet suspensif et à permettre le maintien sur notre territoire des demandeurs d’asile jusqu’à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile, n’est pas acceptable aux yeux du Gouvernement. Un tel dispositif permettrait notamment à tout étranger placé en rétention en vue de l’exécution d’une mesure d’éloignement prise conformément à la loi d’y faire obstacle en déposant une demande d’asile, actuellement examinée par l’OFPRA, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, selon une procédure prioritaire, puis en formant un recours devant la CNDA, qui ne pourrait être étudié avant la fin de la période de rétention.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 37, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l'article 515-3 du code civil, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, en cas d'empêchement grave, le procureur de la République du lieu d'enregistrement du pacte civil de solidarité pourra requérir le greffier de se transporter au domicile ou à la résidence de l'une des parties pour l'enregistrement du pacte civil de solidarité. En cas de péril imminent de mort de l'un des futurs partenaires, le greffier du tribunal d'instance pourra s'y transporter avant toute réquisition ou autorisation du procureur de la République, auquel il devra ensuite, dans le plus bref délai, faire part de la nécessité de cet enregistrement hors du tribunal d'instance.
« Mention en sera faite dans la déclaration de pacte civil de solidarité. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Par cet amendement, je souhaite attirer votre attention, mes chers collègues, sur une lacune du dispositif d’enregistrement des PACS auprès du greffe du tribunal d’instance.
Aujourd’hui, toute personne qui souhaite conclure un PACS doit se présenter au greffe du tribunal d’instance. Cette obligation de comparution personnelle fait obstacle à la conclusion d’un PACS par une personne hospitalisée ou incarcérée.
Voilà quelques semaines, nous avons examiné le projet de loi pénitentiaire. Nous nous étions alors accordés sur le principe selon lequel les détenus bénéficient des mêmes droits que tout citoyen, à l’exception de celui d’aller et venir. L’exigence de comparution personnelle est pourtant un obstacle à l’exercice du droit de conclure un PACS pour les personnes qui ne peuvent se déplacer, telles que les détenus ou les malades hospitalisés.
À plusieurs reprises, le ministère de la justice a été saisi de ces difficultés par les greffes eux-mêmes, dont certains souhaitent pouvoir se déplacer pour enregistrer un PACS. En l’absence, à l’heure actuelle, d’un texte législatif ou réglementaire ad hoc, une véritable discrimination est de fait opérée au préjudice de ceux qui ne peuvent se déplacer en personne. L’exigence de comparution personnelle pourrait être allégée dans certains cas.
Ainsi, en cas d’empêchement grave, le greffe devrait pouvoir se déplacer hors du tribunal d’instance pour enregistrer un PACS, comme cela se pratique pour les mariages.
Nous proposons donc de créer une telle procédure dérogatoire, qui permettra à certains de nos concitoyens de conclure un PACS malgré un empêchement faisant obstacle à leur comparution.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. Cet amendement tend à transposer au pacte civil de solidarité les règles édictées pour le mariage par l’article 75 du code civil.
La possibilité, pour le greffier, de se déplacer auprès d’un futur partenaire empêché pour raisons de santé, à son domicile ou au lieu où il est hospitalisé, est déjà prévue par une circulaire du 5 décembre 2007.
En tout état de cause, la commission souhaiterait entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Madame le sénateur, à l’heure actuelle, les greffiers se déplacent déjà pour procéder à l’enregistrement d’un PACS auprès du futur partenaire empêché par une hospitalisation durable ou une immobilisation à domicile. Une circulaire est par ailleurs en cours d’élaboration pour permettre un tel déplacement sur un lieu de détention.
La mesure dont vous proposez l’adoption risque d’être contreproductive. En effet, en créant le PACS in extremis, vous excluez, de fait, les détenus : les hypothèses de décès imminent ou d’empêchement grave du futur partenaire ne couvriront pas la situation de la personne incarcérée.
De surcroît, l’adoption de l’amendement n° 37 alourdirait la procédure pour les personnes hospitalisées ou empêchées, en imposant aux greffiers l’obligation de requérir le procureur de la République, alors même que leurs déplacements dans cette hypothèse ne sont actuellement subordonnés à aucune autorisation ou information préalable de quelque autorité que ce soit.
Au surplus, aux termes de l’article 515-1 du code civil, le pacte civil de solidarité est un contrat conclu entre deux personnes majeures pour organiser leur vie commune. Une telle projection dans l’avenir est en fait inconciliable avec le PACS in extremis, caractérisé par le décès imminent de l’un des futurs partenaires.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Bien sûr !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. L’adoption de l’amendement n° 37 risquant donc d’alourdir les procédures au lieu de les simplifier, le Gouvernement vous demande de bien vouloir le retirer.
M. le président. Madame Boumediene-Thiery l’amendement n° 37 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, monsieur le président.
D’une part, les greffiers eux-mêmes nous ont fait part des fréquentes difficultés auxquelles ils sont confrontés lors de tels déplacements. Il serait bon de rédiger au moins une note afin de leur faire savoir qu’ils ont la possibilité de se déplacer dans de telles hypothèses.
D’autre part, ce n’est pas parce que des personnes sont malades qu’elles vont forcément décéder dans de très brefs délais, sans pouvoir organiser une communauté de vie avec leur partenaire. Par ailleurs, une personne incarcérée ne doit pas, de ce fait même, être empêchée de conclure un PACS.
M. le président. L'amendement n° 39 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 515-7 du code civil, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré, ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement. »
II. - Les pertes éventuelles de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement concerne la reconnaissance en France des partenariats conclus à l’étranger.
De nombreux pays européens – l’Allemagne, le Danemark, la Finlande, le Royaume-Uni, la Suède notamment – reconnaissent un partenariat comparable au PACS. Cependant, le régime de ces unions est très variable d’un État à l’autre. Ainsi, le droit à une pension de réversion est reconnu au partenaire survivant dans certains cas, mais pas dans d’autres, comme celui du PACS.
À cette variété des régimes s’ajoute le problème de la reconnaissance des effets de ces partenariats sur le territoire français. Les partenariats enregistrés à l’étranger ne produisent en France aucun effet, alors même que des États étrangers reconnaissent au PACS français des effets sur leur territoire.
Comment est-il possible que le PACS français soit reconnu au Royaume-Uni, par exemple, et puisse y produire des effets juridiques, tandis que la France ne reconnaît pas, quant à elle, le civil partnership britannique ? La réponse est simple : dans le code civil, aucune règle de droit international privé ne permet aux partenariats étrangers de produire des effets en France.
À titre d’exemple, le partenariat enregistré aux Pays-Bas instaure, sauf convention contraire, un régime de communauté universelle entre les partenaires, alors que le PACS prévoit la séparation de biens. Quel droit s’applique, dans ces conditions, à un couple néerlandais habitant en France ? Ni la loi française – le partenariat néerlandais n’étant pas considéré comme un PACS – ni la loi néerlandaise ne lui étant applicables, nous sommes devant un vide juridique. Soit le couple conclut un PACS après avoir rompu au préalable son partenariat étranger, soit il reste dans ce vide juridique et ne bénéficie d’aucun des deux régimes.
Afin de ne pas inciter à la rupture de ces partenariats, il convient de les soumettre, à l’instar de ce que prévoit la législation allemande, à la loi du pays où ils ont été enregistrés.
Tel est l’objet de cet amendement, dont la paternité revient à notre collègue député Vert François de Rugy et au Médiateur de la République. Ensemble, ils ont élaboré voilà plusieurs mois cette règle de conflit de lois, permettant de mettre un terme à une injustice flagrante subie par les couples étrangers. Nous nous faisons donc leur porte-voix dans cette enceinte.
La non-reconnaissance des partenariats étrangers peut avoir des conséquences financières importantes pour les personnes concernées, puisque tous les avantages liés à leur partenariat ne sont pas pris en compte par l’administration française, qui s’acharne à les considérer comme célibataires.
Ces couples étrangers, qui ont choisi de vivre en France, parfois depuis dix ans ou vingt ans, qui payent leurs impôts et contribuent au développement de notre économie, doivent pouvoir bénéficier de tous les droits découlant de leur union, sans autre restriction que celles qui sont relatives à l’ordre public international français.
La règle de droit international que nous vous proposons d’instaurer répond à cette préoccupation. Son caractère général laisse intactes les règles de conflit spéciales applicables à certaines matières, telles les successions, l’obligation alimentaire ou l’adoption. Dans tous les cas, la loi étrangère pourra être écartée si elle est contraire à l’ordre public international français.
Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’un amendement identique a déjà été présenté à l’Assemblée nationale. Il a été rejeté au prétexte que la présente proposition de loi de simplification du droit n’est pas un vecteur adapté à la création d’une telle règle de conflit de lois. C’est pour cette raison que les sénateurs Verts ont à leur tour déposé, en décembre 2008, une proposition de loi reprenant la formule élaborée par M. de Rugy et le Médiateur de la République. Elle est malheureusement restée lettre morte, et nous espérons donc que le présent amendement pourra être adopté.
M. le président. L'amendement n° 107 rectifié, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 515-7 du code civil, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré, ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Les sénateurs représentant les Français établis hors de France sont aussi, quelque peu, les représentants des étrangers installés en France !
À de nombreuses reprises, des couples ayant passé un contrat similaire au PACS dans un pays membre ou non de l’Union européenne ont attiré notre attention sur le fait que la forme juridique de leur union n’est pas reconnue en France. Souvent, on leur demande de rompre l’union qu’ils ont passée à l’étranger et de conclure ensuite un PACS en France. Cette situation est tout de même étonnante !
Un certain nombre de collègues et moi-même avons déposé au mois de novembre dernier une proposition de loi portant sur ce sujet et un débat sur le même thème a eu lieu à l’Assemblée nationale. Une convergence est apparue sur la nécessité de trouver une solution.
On pourrait demander l’élaboration d’une directive européenne pour régler la question, s’agissant du moins des unions conclues dans un État membre de l’Union européenne. Mais, compte tenu des différences culturelles entre les vingt-sept pays, cela paraît difficile.
On pourrait également imaginer que la France, à l’instar du Danemark, passe avec les autres pays des accords bilatéraux visant à reconnaître les différentes formes d’union.
Cependant, il nous a semblé que l’introduction d’une disposition ad hoc dans la loi française était la solution la plus complète, la plus élégante et la plus simple. Cela permettrait l’égalité de tous devant la loi et une circulation facilitée des personnes au sein de l’Union européenne.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 39 rectifié et 107 rectifié ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. Ces deux amendements, quasiment identiques, visent à répondre à une préoccupation largement partagée. Leur adoption permettrait de prévenir tout risque de contentieux avec la Commission européenne sur ce sujet. La commission émet donc un avis favorable, mais demande au Gouvernement de bien vouloir lever le gage.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Ces deux amendements correspondent parfaitement à l’objet de la proposition de loi, en visant à simplifier la vie des personnes qui, ayant contracté un partenariat à l’étranger, sont installées en France et ont des difficultés à faire reconnaître leur engagement.
L’introduction d’une règle de conflit de lois dans le code civil mettra fin à ces situations. Le Gouvernement donne donc un avis favorable à ces deux amendements et lève le gage.
M. le président. Il s’agit donc des amendements nos 39 rectifié bis et 107 rectifié bis, désormais identiques.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 1er.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 86, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 3142-1 du code du travail est complété par les mots : « ou pour l'enregistrement de son pacte civil de solidarité ».
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement est lui aussi dicté par un souci de rapprochement des régimes applicables au mariage et au PACS.
Les salariés bénéficient d’un congé pour événement familial de quatre jours en cas de mariage : cet amendement vise à ce qu’ils en bénéficient également, dans les mêmes conditions, s’ils concluent un PACS.
Le droit à un tel congé existe déjà dans le secteur public, puisque les fonctionnaires bénéficient de cinq jours au maximum d’autorisation exceptionnelle d’absence. Pourquoi aucune disposition de cette nature n’existe-t-elle pour les salariés du secteur privé ? Une telle différence de traitement entre salariés du privé et fonctionnaires ne nous semble pas justifiée. Il conviendrait donc, selon nous, d’harmoniser les deux régimes, afin que tous les salariés puissent bénéficier d’un congé en cas de conclusion d’un PACS.
Cet amendement s’inscrit dans la logique des propositions formulées par le Médiateur de la République, qui a établi un bilan du PACS dix ans après sa création.
M. le président. L'amendement n° 108 rectifié, présenté par MM. Godefroy, Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 3142-1 du code du travail est complété par les mots : « ou la conclusion d'un pacte civil de solidarité ».
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.