Mme la présidente. Monsieur Autain, l’amendement n° 771 est-il maintenu ?

M. François Autain. Oui, madame la présidente, je le maintiens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 771.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 772, présenté par MM. Cazeau et Le Menn, Mmes Le Texier, Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mme Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les statuts de médecin inspecteur de la santé publique et de praticien hospitalier qualifié en santé publique seront harmonisés par décret.

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Les médecins inspecteurs de santé publique, au nombre de 500 environ aujourd’hui, dépendent du ministère chargé de la santé. Ils sont affectés dans l'administration centrale, notamment dans les agences de veille sanitaire, les DDASS, les DRASS.

Leurs missions sont importantes et s'accroissent : santé publique, surveillance des épidémies, veille et sécurité sanitaire, addictologie, programmes de prévention, surveillance des hôpitaux… Ces missions essentielles sont pourtant menacées du fait de la désaffection qui frappe ce corps, très peu attractif pour les médecins.

De nombreux médecins inspecteurs sont inquiets : alors que l’on compte environ 500 postes, 70 postes sont vacants. Ils déplorent aussi un manque d'infirmières et de secrétaires. Ils craignent qu'en cas de crise grave de santé publique ou environnementale leur faible nombre ne soit insuffisant pour assurer la protection de la population.

Selon certains d’entre eux, leurs lourdes responsabilités sont disproportionnées par rapport aux moyens humains, faute d'attractivité et de reconnaissance de leur métier. Ils demandent donc une harmonisation de leur statut avec celui du praticien hospitalier, ce qui devrait permettre une mobilité, un décloisonnement.

Nous souhaiterions qu’un débat ait lieu au Sénat sur les missions que les médecins inspecteurs de santé publique souhaitent accomplir de manière complémentaire : il faudrait soit leur permettre d’effectuer en parallèle des tâches de praticiens hospitaliers qualifiés en santé publique, soit s’interroger sur l’organisation de l’internat, sur la qualification reconnue : publications, master, etc.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement prévoit l’harmonisation des statuts de médecin inspecteur de santé publique et de praticien hospitalier qualifié en santé publique.

Les effectifs des médecins inspecteurs de santé publique sont en effet insuffisants. Cependant, le dispositif proposé ne répond pas aux enjeux et pourrait même se révéler contre-productif.

En attendant de connaître l’avis du Gouvernement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je souhaite profiter de cet avis pour faire brièvement le point sur le statut des médecins inspecteurs de santé publique, les MISP.

Ces praticiens apportent une contribution essentielle à la mise en œuvre de la politique de santé publique. Ils sont les seuls à intervenir dans le champ du sanitaire et du social, que ce soit dans le cadre de l’expertise collective, des inspections ou des missions d’appui aux autres acteurs intervenant en ce domaine.

La mise en place des agences régionales de santé constitue un tournant majeur pour le développement d’une politique de santé publique territorialisée et décloisonnée. Les MISP ont été, en quelque sorte, les éclaireurs : ils sont à l’origine de la philosophie des agences régionales de santé. Il faut valoriser leur expertise, afin de contribuer à la diffusion d’une culture de santé publique.

C’est dans cette perspective que je souhaite augmenter les recrutements de médecins inspecteurs de santé publique. Pour l’année 2009, trente postes seront mis au concours, contre vingt en 2008, ce qui constitue une progression substantielle.

De même, je veille à la bonne application du protocole signé avec les représentants des MISP en 2007, qui vient renforcer l’attractivité du corps. Ce texte prévoit l’accélération des possibilités d’avancement entre les différents grades de médecins inspecteurs, une revalorisation significative et conduite dans la durée de leur régime indemnitaire – 10 % en 2007, 7 % en 2008, et 7 % sont prévus en 2009 –, enfin la création d’un statut d’emploi dont l’indice terminal culmine à la hors échelle D.

Ces efforts particulièrement soutenus contribueront à renforcer l’attractivité du corps des MISP, dont les compétences sont particulièrement précieuses pour la conduite de leurs missions dans le domaine de la santé. C’est d'ailleurs pour moi l’occasion de rendre publiquement hommage à ces professionnels de très grande qualité.

Monsieur Le Menn, j’émets donc un avis défavorable sur cet amendement, mais vous comprenez bien le sens réel de cet avis.

Mme la présidente. Monsieur Le Menn, l’amendement est-il maintenu ?

M. Jacky Le Menn. Mme la ministre a parfaitement saisi qu’au travers de cet amendement nous voulions nous associer à la reconnaissance du travail exceptionnel accompli par ce corps d’inspecteurs.

Compte tenu des explications fournies, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 772 est retiré.

L'amendement n° 777, présenté par MM. Cazeau et Le Menn, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le montant de la cotisation au régime étudiant de sécurité sociale est gelé jusqu'à l'année universitaire 2011-2012.

II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Aujourd'hui, la situation des jeunes étudiants ne correspond plus à l’image d’Épinal d’une jeunesse dorée et insouciante que les médias ne cessent de véhiculer. Cet âge, qui devrait être celui où tous les choix sont possibles, est désormais celui de tous les risques : précarité de l’emploi, dépendance vis-à-vis de la famille, chômage, etc.

La pauvreté des étudiants n’est pas un vain mot. En octobre 2008, l’Observatoire de la vie étudiante a publié une enquête qui dresse un constat alarmiste. Entre le coût des études, les hausses de loyers et la stagnation du montant des bourses, nombre d’étudiants admettent ne pas s’en sortir. En France, quelque 17 % des jeunes âgés de dix-huit à vingt-quatre ans vivent sous le seuil de pauvreté, avec moins de 680 euros par mois. Un étudiant sur cinq est obligé d’abandonner ses études pour des raisons financières.

Pour réussir à vivre, de plus en plus d’étudiants doivent exercer des petits « boulots ». Or ces jeunes obligés de travailler régulièrement le font au détriment de leur réussite à l’université, et parfois même de la simple poursuite de leurs études. Leur taux de succès aux examens est de 30 % inférieur à celui des étudiants qui ne travaillent pas, selon un rapport de l’Observatoire de la vie étudiante daté de 2004.

L’augmentation de la cotisation au régime étudiant de sécurité sociale constitue un autre facteur d’échec scolaire. Celle-ci augmente tous les ans ; elle a progressé de 12 % depuis 2002, passant de 174 euros à 195 euros. À chaque rentrée, cette cotisation s’ajoute au paiement des frais d'inscription, à la caution pour le logement, aux fournitures et autres dépenses essentielles…

La situation sociale des étudiants continue donc de se dégrader. En moyenne, à la rentrée de l'année universitaire 2008-2009, le coût de la vie étudiante a augmenté de 5,9 %.

Nous proposons donc que la cotisation au régime étudiant de sécurité sociale ne soit plus augmentée durant les trois années universitaires à venir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Le sujet que vient d’aborder M. Le Menn relève non pas du présent texte, mais d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je partage l’avis de M. le rapporteur, mais je voudrais répondre au fond à l’intervention de M. Le Menn.

Nous avons mis en place une série de mesures qui visent à améliorer les conditions de la vie étudiante, grâce à un système d’aides sociales équitables, à la facilitation de l’accès au logement, à la possibilité de fractionner le versement de la cotisation étudiante.

J'ajoute que, malgré un déficit structurel du régime étudiant qui n’est pas mince, puisqu’il atteignait 530 millions d'euros l’an dernier, la revalorisation de la cotisation maladie a évolué strictement comme l’indice des prix à la consommation, ce qui signifie que cette cotisation est restée stable en euros constants.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement pour des raisons de fond, mais aussi parce que la disposition proposée relève strictement d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. François Autain. Comme bien d’autres !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 777.

(L'amendement n'est pas adopté.)

TITRE III

PRÉVENTION ET SANTÉ PUBLIQUE

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous abordons le titre III, le dernier de ce projet de loi, qui est essentiel, comme les deux autres d'ailleurs, car il porte sur ce que l’on nomme dorénavant la « pandémie silencieuse », c'est-à-dire les maladies chroniques. Celles-ci concernent aujourd’hui environ quinze millions de personnes, soit plus de 20 % de la population, et près de 60 % du total des remboursements d’assurance maladie. Les économistes de la santé prévoient même qu’elles représenteront 70 % des dépenses d’assurance maladie dans les dix ans à venir.

M. Guy Fischer. C’est pourquoi on va faire payer les complémentaires !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il s’agit donc d’un enjeu de santé publique aigu, notamment au regard de la pérennité de notre système de soins.

Nous devons nous poser plusieurs questions, et d’abord celle du contrôle de la survenue des maladies chroniques, grâce à la prévention, menée très en amont, auprès des jeunes, en luttant contre ces deux facteurs de risque majeurs de maladies chroniques que sont l’alcool et le tabac.

Quand la maladie est présente, il faut contrôler son évolution et ses conséquences, afin de permettre au patient et à son entourage le retour à une vie normale de qualité ; c’est l’éducation thérapeutique du patient.

C’est la raison pour laquelle, pour la première fois, je donne à l’éducation thérapeutique du patient toute la place qu’elle mérite dans la loi. Celle-ci va promouvoir de nouvelles modalités de relation des professionnels au malade, qui, dorénavant, sera au cœur des stratégies de prise en charge de sa pathologie.

Mon projet tend également à s’attaquer, de manière claire, au phénomène de l’alcoolisation des jeunes, qui constituent une population vulnérable, sans pour autant les stigmatiser.

La précocité de la consommation d’alcool et la recherche de la « défonce », le binge drinking – pardonnez-moi d’employer ces termes –, sont pour notre société des phénomènes dangereux, dont les conséquences sont immédiates, mais parfois aussi différées.

C’est dans ce cadre que j’ai souhaité, d’une part, simplifier et clarifier la loi en prohibant la vente d’alcool aux mineurs, et, d’autre part, interdire les opens bars, qui offrent gratuitement ou par forfait de l’alcool à volonté, en ciblant précisément les jeunes.

En outre, 98 % des 12-17 ans utilisent aujourd’hui internet. J’ai voulu résoudre les problèmes que pose la publicité pour l’alcool sur ce média, tout en m’assurant de la protection des jeunes. C’est pourquoi j’ai accepté d’encadrer sur internet ce type de publicité, qui resterait interdite sur les sites sportifs ou destinés aux jeunes.

Au-delà des dommages sanitaires, est-il besoin de rappeler les dégâts sociaux et les drames humains liés à l’alcool que relate l’actualité quotidienne ? Je pense notamment à la sécurité routière et à l’alcool au volant. Chacun, dans son entourage proche, a certainement eu à connaître de tels drames épouvantables.

La mesure qui, d’une part, interdit toute vente de boissons alcoolisées réfrigérées dans les stations-service, et, d’autre part, élargit les plages horaires d’interdiction de vente d’alcool dans ces mêmes lieux répond à cet enjeu de sécurité routière, tout en tenant compte des préoccupations économiques.

Comme vous pourrez l’apprécier, mesdames, messieurs les sénateurs, ces dispositions destinées à lutter contre l’alcoolisme sont équilibrées et permettent de concilier enjeux de santé publique et impératifs économiques.

En ce qui concerne le tabac, si la lutte contre le tabagisme passif est considérée comme un succès et si personne n’aurait l’idée de revenir sur les mesures d’interdiction que j’ai mises en œuvre au début de l’année dernière, nous devons poursuivre nos efforts pour réduire encore la consommation, particulièrement chez les jeunes.

L’apparition de nouveaux produits destinés à attirer les plus jeunes vers le tabagisme doit être contrée tout de suite, et avec la plus extrême fermeté. L’introduction d’un article interdisant la vente de tabac aux mineurs permet ainsi de mettre en cohérence le régime de vente de ce produit avec celui qui a été voté pour l’alcool.

L’encombrement du calendrier parlementaire et l’évaluation en cours par le Haut conseil de la santé publique de la loi du 9 août 2004 relative à la santé publique nous ont conduits à reporter nos ambitions initiales pour ce titre au prochain rendez-vous, la grande loi de santé publique révisée en 2010, comme l’a annoncé récemment le Président de la République.

Toutefois, la démarche est lancée, et je ne doute pas qu’elle sera enrichie par nos débats ; c’est ainsi que nous progresserons dans la définition des prochaines priorités de santé publique.

Je tiens à rappeler que la politique de santé publique que je mène n’est pas seulement tournée vers l’interdiction.

On m’a parfois fait le reproche de n’avoir prévu que des mesures d’interdictions dans ce projet de loi. Bien sûr, une véritable politique de santé publique repose toujours à la fois sur des mesures d’interdiction, d’information et de prise en charge. Toutefois, ces deux derniers types de dispositions relèvent non pas du domaine législatif, mais de formes d’actions différentes, comme les plans de santé ou les campagnes d’information assurées par le « bras armé » du ministère de la santé, c'est-à-dire l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, et elles utilisent d’autres techniques de communication. Seule la loi porte les mesures d’interdiction ; c’est pourquoi celles-ci apparaissent dans ce texte.

Mesdames, messieurs les sénateurs, tout au long de l’examen de ce projet de loi, vous avez travaillé sur des dispositions novatrices en matière de prévention.

Les ARS visent à déployer une prévention de proximité, plus efficiente, au plus près des populations.

Des instances régionales auront spécifiquement à traiter des questions de promotion de la santé et de prévention au sein des ARS. Celles-ci piloteront un schéma régional de prévention et de promotion de la santé et passeront des contrats locaux de santé permettant de fédérer décideurs et acteurs locaux autour de projets ciblés sur les plus fragiles d’entre nous.

Le Président de la République, lors du discours qu’il a prononcé dans le Jura, à Bletterans,…

M. François Autain. Un discours mémorable ! (Sourires.)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … nous a fixé des objectifs ambitieux, puisque les crédits destinés à la prévention doivent passer de 7 % des dépenses de santé à 10 % en 2012, soit une augmentation de près de 50 %. Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que je vous présente s’inscrit tout à fait dans cet esprit : ses dispositions sont entièrement dédiées à la prévention et à la santé publique.

Articles additionnels après l’article 21 (précédemment réservés)
Dossier législatif : projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires
Article 22 A (Supprimé par la commission) (interruption de la discussion)

Article 22 A

Mme la présidente. L’article 22 A a été supprimé par la commission.

L'amendement n° 786 rectifié, présenté par MM. Desessard, Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mmes Demontès et Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Avant l'article L. 1110-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 110-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 110-1 A- La santé est un état de complet bien être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité.

« La santé environnementale comprend les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de la vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux, psychosociaux et esthétiques de notre environnement. Elle concerne également la politique et les pratiques de gestion, de résorption, de contrôle et de prévention des facteurs environnementaux susceptibles d'affecter la santé des générations actuelles et futures. »

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Je suis admiratif devant la résistance de Mme la ministre qui, après quatre semaines de débat, nous donne des explications aussi détaillées !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Merci, monsieur Desessard !

M. Jean Desessard. Les directeurs d’ARS auront du souci à se faire s’ils n’accomplissent pas leur travail. (Sourires.)

M. Guy Fischer. Elle ne sera plus là !

M. Jean Desessard. Peut-être… Je n’en sais rien !

Cet amendement tend à rétablir le texte de l’article 22 A, adopté par l’Assemblée nationale et supprimé par notre commission des affaires sociales, tout en complétant la définition de la santé adoptée par l’Organisation mondiale de la santé en 1946 par celle de santé environnementale proposée par le bureau européen de l’Organisation mondiale de la santé lors de la conférence d’Helsinki en 1994, et reconnue par l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET.

L’article 22 A visait à insérer en préambule du code de la santé publique la définition de la santé reconnue internationalement par l’Organisation mondiale de la santé depuis 1946. Bien que cette définition ne soit pas parfaite, elle présente l’avantage d’offrir une définition large de la santé qui sorte de la dimension purement curative et prenne en compte le bien être à la fois physique, mental et social. Malheureusement, la commission n’a pas jugé nécessaire de la conserver.

Vous allez me dire, monsieur le rapporteur, que la loi ne doit pas être bavarde, et vous aurez raison, mais j’estime qu’en matière de santé il est important de savoir de quoi l’on parle. Selon la définition que l’on retient, c’est l’orientation d’ensemble des politiques publiques de santé qui peut être changée.

Il me semble nécessaire de rappeler que deux cancers sur trois sont d’origine environnementale. En vingt ans, leur nombre a augmenté de 63 %, et, pour certaines maladies dues à une dégénérescence neurologique, de forts soupçons pèsent sur des facteurs environnementaux.

D’autres maladies chroniques sont en forte progression, telles que les allergies et les maladies neuro-dégénératives comme celles d’Alzheimer et de Parkinson. Les problèmes de santé psychique progressent également de façon inquiétante : la dépression touche 15 % des Français, qui sont les premiers consommateurs au monde d’antidépresseurs, et de nouvelles formes de pathologies mentales se développent, ce qui est la conséquence des conditions actuelles de vie et de travail : isolement, solitude, compétition dans tous les domaines, course à la consommation, dépendance, précarité, harcèlement.

La prise en compte de la santé environnementale dans l’ensemble de nos politiques de santé est une avancée indispensable. Vous l’avez dit, madame la ministre, lorsque nous vous proposions d’inclure la santé environnementale dans les compétences des ARS : la préoccupation de l’environnement doit non pas faire l’objet de mesures spécifiques, mais irriguer l’ensemble des politiques en matière de santé.

En retenant cette définition en préambule du code de la santé publique, nous marquerons notre ambition de ne plus réduire les politiques de santé à leur dimension purement curative et de garantir à tous l’accès à la santé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Sans nier l’intérêt que pourrait avoir le fait d’inclure une définition de la santé dans le code de la santé publique, la commission estime que fixer légalement le contenu d’une notion aussi complexe est porteur de plus de risques que d’avantages.

La reprise de la définition de l’OMS se présente d’abord comme un ajout au droit positif français. En effet, bien que la constitution de l’OMS ait été régulièrement ratifiée et publiée par la France, la définition contenue dans son préambule ne peut trouver à s’appliquer sur le fondement de l’article 55 de la Constitution, car il est d’interprétation constante en droit international public que seules les dispositions contenues dans le corps d’un traité ont une force contraignante.

Par ailleurs, la définition de la santé est par nature évolutive, comme le montre la définition de l’OMS elle-même, qui s’oppose à la définition traditionnelle de la santé comme absence de maladie et inclut des dimensions mentales et sociales.

On ne peut donc espérer fixer une définition légalement consensuelle de la santé, quand bien même celle-ci serait particulièrement large et adaptée à la conduite d’une action internationale destinée principalement à l’amélioration du niveau des soins dispensés dans les pays les plus pauvres de la planète. La santé demeure un concept neutre que chacun est appelé à définir et qu’il n’est pas possible d’appréhender d’une manière générale et abstraite, valable pour tous, en tout lieu et en tout temps.

Enfin, la définition adoptée par l’OMS, volontairement ambitieuse à une époque où les « potentialités de réalisation sociale surpassaient les attentes de tous les philosophes et hommes d’État qui [aient] jamais esquissé dans des programmes utopiques l’idée d’une société vraiment humaine », est restée controversée.

Elle est, selon l’analyse du professeur Jean-Michel de Forges, « étrangement excessive » : « la retenir sans réserve conduirait à aborder l’ensemble du droit social et donc à nier la spécificité du droit de la santé. Le bien-être social est une notion trop subjective pour être retenue, même si chacun comprend qu’il a des répercussions sur la santé physique et mentale ».

Cette définition, dès lors qu’elle aurait force de loi, est susceptible de servir de base à des recours contentieux devant les deux ordres de juridiction. Elle pourrait être utilisée devant les juridictions administratives pour contester la légalité de textes qui ne rempliraient pas les objectifs de « complet bien-être », et devant les juridictions judiciaires pour faire évoluer les notions relatives à la santé, celles de « droit à la santé » ou de « danger pour la santé de l’homme ou de l’animal ».

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. M. Desessard me trouve résistante ; j’y vois une sorte de filiation avec mes deux parents résistants. Je prends donc cette remarque comme un compliment et je l’en remercie.

Monsieur Desessard, je vous félicite, quant à moi, pour votre assiduité à ce débat très technique.

Votre souhait me semble déjà exaucé : la charte de l’OMS, qui a été ratifiée par la France, le traité et son préambule sont applicables en droit interne et il n’y a pas d’obligation à reprendre cette définition dans le chapitre préliminaire du code de la santé publique.

Quant à la santé environnementale telle que définie à Helsinki, elle est déjà reprise dans l’article L.1411-1 du code de la santé publique, qui précise le champ de la santé publique en y incluant explicitement l’identification et la réduction des risques pour la santé liée à des facteurs environnementaux.

Vous pourriez m’objecter qu’il est toujours utile de reprendre un certain nombre de proclamations. Certes, cela peut se comprendre pour certains textes ou discours, mais je doute que le code de la santé publique soit le livre de chevet de nos concitoyens (M. François Autain s’exclame.), sauf vous, monsieur Autain, bien entendu !

M. François Autain. Non, même pas moi !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit de textes très importants, monsieur Desessard : loin de moi l’idée d’en contester l’intérêt.

La Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, l'amendement n° 786 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. Cet amendement tend à rétablir un texte adopté par l’Assemblée nationale. Par conséquent, je le maintiens.

Je remercie toutefois Mme la ministre et M. le rapporteur de leurs explications sur le fond, d’autant que l’un et l’autre ont pris le temps de répondre de façon très précise et détaillée, alors que le débat dure depuis quatre semaines.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous avons tout notre temps !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Milon, rapporteur. Je tiens tout de même à rappeler à M. Desessard que ces quatre semaines de discussion en séance publique ont été précédées de deux semaines de débat en commission au cours desquels tous ces points ont été exposés. (Mme Marie-Thérèse Hermange applaudit.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 786 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 22 A (Supprimé par la commission) (début)
Dossier législatif : projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires
Discussion générale