M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Monsieur Desessard, me recevez-vous ? (Rires.)
Mon avis sera proche de celui que j’ai donné tout à l’heure sur l’amendement relatif au doublement des heures du DIF lorsque celui-ci est en rapport avec le développement durable.
Je comprends que vous teniez à soutenir l’éco-construction et la sobriété énergétique. Comme l’a rappelé l’excellent ministre d’État qu’est M. Jean-Louis Borloo, il s’agit d’un domaine très important. Nous partageons cette volonté.
Toutefois, là encore, priorité doit être donnée à la formation des salariés licenciés pour motif économique ou peu qualifiés. En effet, l’objectif de fond est d’abord d’aider ces salariés à retrouver un emploi. Si cet emploi appartient au secteur de l’éco-construction, tant mieux ! Mais l’éco-construction ne peut pas être une priorité et encore moins passer, d’une manière ou d’une autre, avant les besoins et les attentes des salariés.
Monsieur Desessard, je souhaite que vous retiriez cet amendement. Dans le cas contraire, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de revenir sur ce qui nous opposait à propos de mon amendement n° 120.
Arguant du fait que les fonds devaient financer des actions utiles, vous avez proposé de réduire le nombre des catégories visées tout en en introduisant une nouvelle, dont j’ai mis en cause la pertinence, à savoir celle des « salariés occupant un type d’emplois dont le volume diminue en raison des mutations économiques ». De la sorte, vous avez bien fait référence à un secteur, en l’occurrence un secteur en déclin.
De deux choses l’une : soit vous considérez que tel secteur est en déclin parce que les salariés ne sont pas assez formés, et il faut alors mieux les former pour assurer le redémarrage du secteur considéré, soit il s’agit d’un secteur condamné et il faut alors former les salariés concernés pour qu’ils puissent se diriger vers un secteur plus prometteur en termes d’emploi. Dans ce cas, vous me rejoignez sur mon terrain !
Je ne vous ai pas forcé à dire que M. Jean-Louis Borloo avait raison d’affirmer que les secteurs prometteurs dépendaient de l’économie verte. Alors, comment faire autrement que d’envisager de former aux métiers de l’économie verte ces salariés qui sont prioritaires parce que le secteur dans lequel ils travaillaient est en déclin ?
Vous affirmez qu’il est nécessaire de les former à des métiers nouveaux, mais vous ne précisez pas où. Il me semble donc, monsieur le rapporteur, que vous n’allez pas au bout de votre logique !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 118.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean Desessard. L’avenir se lève ! (Sourires.)
Si c’était pour mieux se retrouver, cela valait la peine de se séparer ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. L'amendement n° 9 rectifié bis, présenté par Mme Laborde et MM. Mézard, Collin, Charasse et Tropeano, est ainsi libellé :
Rétablir le 3° du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-21 du code du travail dans la rédaction comme suivante :
« 3° De financer une allocation spécifique pour les jeunes de 16 à 25 ans qui suivent toute action de formation qualifiante professionnelle, universitaire ou technique.
« Le montant de cette allocation est librement déterminé par le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels et les modalités de son versement sont définies par un décret pris en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement tend à mettre en place une allocation d'autonomie pour les jeunes de seize à vingt-cinq ans qui suivent une formation qualifiante, afin de ralentir leur paupérisation.
Au sein de la mission commune d’information sur la politique en faveur des jeunes, nous n’étions pas tous d’accord sur les modalités d’attribution. Pour éviter l'écueil de l'assistanat, cette allocation pourrait être conditionnée au suivi d'un cursus qualifiant. Ce dernier permettrait de replacer le jeune sans qualification dans une logique de projet, de réussite et de confiance en l'avenir.
En envoyant ce signe fort, notre société montrerait que, loin d'abandonner les plus jeunes au bord du chemin, elle entend leur donner le temps et les moyens de se former et d'acquérir des compétences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L’allocation d’autonomie pour les jeunes dont il est question dans votre amendement, madame Laborde, est une idée intéressante, qui mérite effectivement d’être approfondie.
Toutefois, la vocation du fonds n’est pas de la financer.
M. Daniel Raoul. C’est scandaleux !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. En dehors de la question de principe, la prise en charge de cette allocation reviendrait tout simplement à vider le fonds de toutes ses ressources. C’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Daniel Raoul. Scandaleux !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Sans entrer dans le détail, bien qu’il y ait beaucoup à dire, je rappellerai que l’argent de ce fonds est destiné à financer la formation et non un dispositif d’autonomie.
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.
Mme Christiane Demontès. Cette proposition d’allocation d’autonomie pour les jeunes qui suivent une formation qualifiante est effectivement très intéressante et nous y sommes favorables. Nous connaissons bien tous les enjeux que recouvre la mise en place d’une telle allocation et nous savons combien cette mesure serait utile aux jeunes.
Cela dit, même si nous souscrivons à l’idée, il n’est pas possible, selon nous, d’utiliser le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels pour financer cette allocation. C’est tout le problème !
Cette question essentielle sera posée à M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse, à l’occasion de la parution du Livre vert qui a été élaboré par la commission de concertation sur la jeunesse et qui sera soumis au débat public durant l’été.
En attendant, nous ne participerons pas au vote sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié bis.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
M. Jean Desessard. Alors, madame Catherine Troendle, on fait son marché de bulletins appartenant à d’autres groupes pour voter à leur place ?...
M. le président. Mon cher collègue, la réunion administrative des sénateurs n’appartenant à aucun groupe a transmis à la présidence une délégation de vote au groupe UMP valable pour toute la séance du 22 septembre 2009.
M. Jean Desessard. Ce n’est tout de même pas tout à fait normal ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 215 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 220 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 111 |
Pour l’adoption | 36 |
Contre | 184 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 23 rectifié bis est présenté par MM. Vanlerenberghe et Merceron, Mme Férat et MM. Jégou, Badré et Deneux.
L'amendement n° 142 est présenté par M. Jeannerot, Mme Demontès, M. Fichet, Mmes Blondin, Printz, Le Texier, Schillinger et Bourzai, MM. Patriat, Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans la première phrase du onzième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-21 du code du travail, après les mots :
donne lieu
insérer les mots :
pour les actions mentionnées au 1°
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié bis.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Dans la rédaction actuelle de l’article 9, la totalité des ressources du FPSPP fait l'objet d'une convention annuelle avec l'État. Or la péréquation, qui vise à soutenir les branches qui s'engagent en faveur des contrats de professionnalisation, ne peut pas fonctionner si elle est soumise à un conventionnement annuel avec l'État, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, les OPCA ont besoin, pour investir dans des contrats de professionnalisation au-delà de leurs ressources, d'avoir la certitude que le mécanisme de péréquation viendra les soutenir et comblera la différence entre leurs investissements et leurs ressources. Or, si la péréquation est soumise à une convention avec l'État, ils n'auront jamais cette certitude puisque le fonctionnement de la péréquation dépendra des arbitrages opérés par l'État. Les OPCA choisiront, par prudence, de ne plus s'engager au-delà de leurs ressources, ce qui aboutira à faire baisser le nombre global de contrats de professionnalisation, alors même qu'ils sont un outil efficace d'insertion des jeunes.
Ensuite, un tel manque de visibilité et de sécurité, lesquelles conditionnent les investissements des entreprises, se fera également sentir sur les contrats de professionnalisation dont la durée est supérieure à un an : comment les OPCA pourraient-ils s'engager sur plusieurs années alors que le niveau de leurs ressources dépendra, chaque année, des arbitrages de l'État ?
En un mot, cet amendement vise donc à remplacer une péréquation administrée inefficace par une péréquation régulée opérationnelle.
Surtout, le conventionnement de la péréquation est un coup de canif porté à l’Accord national interprofessionnel puisque celui-ci prévoit que la péréquation est gérée de manière paritaire et non par l’État. Au nom de la pérennité du contrat de professionnalisation, l’ensemble des partenaires sociaux demandent que la péréquation sorte du champ de la convention avec l’État. C’est tout simplement son efficacité qui est en jeu.
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot, pour présenter l’amendement n° 142.
M. Claude Jeannerot. Cet amendement d’ajustement correspond à un souhait des partenaires sociaux exprimé dans l'Accord national interprofessionnel du 7 janvier 2009. Il a pour objet de préserver l'effectivité de la péréquation au bénéfice des salariés et demandeurs d'emploi concernés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je comprends tout à fait la préoccupation de notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe.
Toutefois, il est normal, selon moi, que l’État dispose d’un droit de regard sur l’ensemble du fonds, y compris en ce qui concerne la péréquation. Et Dieu sait qu’il ne s’agit absolument pas de méfiance à l’égard des partenaires sociaux !
La commission spéciale a donc émis un avis défavorable sur les amendements identiques nos 23 rectifié bis et 142.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je comprends parfaitement vos préoccupations sur ce sujet, monsieur Vanlerenberghe. Toutefois, je souhaite que chacun ici comprenne bien ce à quoi l’adoption de l’amendement n° 23 rectifié bis aboutirait.
Vous proposez de mettre en place, pour ce fonds de 900 millions d’euros, deux dispositifs de gestion différents, qui se juxtaposeront. Selon vous, seuls les partenaires sociaux doivent gérer le mécanisme de péréquation, tandis que la mutualisation relèverait d’une convention-cadre. À mes yeux, ce serait une véritable usine à gaz !
Par ailleurs, il est très difficile de faire la part des choses. Supposons que l’UIMM, l’Union des industries et des métiers de la métallurgie, enclenche un dispositif pour renforcer ses contrats de professionnalisation. Pour le financer, elle fera appel à la mutualisation, mais aussi à la péréquation, sous prétexte qu’elle est « au taquet » en termes de financement.
L’amendement n° 23 rectifié bis nous contraindrait donc à une mission quasi impossible, consistant à tracer une frontière entre, d’une part, la péréquation et, d’autre part, la mutualisation, c'est-à-dire entre deux dispositifs très lourds à gérer. La formation professionnelle est déjà suffisamment complexe pour que nous ayons à cœur de garder les idées claires dans ce domaine !
Tout en comprenant votre préoccupation au sujet de la nécessaire confiance dans laquelle les partenaires sociaux doivent œuvrer, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, je ne pourrai qu’émettre un avis défavorable. J’en appelle vraiment à votre bon sens pour conserver une gestion simple, opérationnelle et proche du terrain.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Monsieur le président, avant que vous ne mettiez aux voix ces deux amendements identiques, je souhaite que la séance soit suspendue pendant environ dix minutes.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante, est reprise à vingt-trois heures deux.)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. J’ai bien compris, à travers votre intervention, monsieur Vanlerenberghe, que vous vouliez trouver un équilibre en permettant aux partenaires sociaux de garder une certaine souplesse de gestion.
Je crains toutefois que votre amendement n’affaiblisse l’objectif principal de la réforme, qui est de réorienter suffisamment de fonds vers des formations destinées à des demandeurs d’emploi, des salariés faiblement qualifiés et des personnes travaillant dans les PME, ainsi que vers des formations trop rarement utilisées mais qui correspondent pourtant aux métiers de demain.
Vous évoquiez le chiffre de 87 millions d’euros pour la péréquation, monsieur le sénateur. Outre qu’il est difficile d’en calculer le montant au million d’euros près, le chiffre est beaucoup plus proche de 300 millions d’euros – 200 millions d’euros destinés aux contrats de professionnalisation, 50 à 80 millions d’euros dévolus au CIF et 20 millions d’euros supplémentaires alloués à différents dispositifs de péréquation. De surcroît, la dynamique de péréquation étant importante au sein du FPSPP, ce montant pourrait être réévalué à l’avenir.
Ce n’est donc pas 10 %, mais bien 30 % à 40 % de l’argent du fonds que l’on entend redéployer vers des mesures de plus grande justice sociale.
Au regard de ces éléments chiffrés, il me semble que votre amendement pourrait avoir des effets ravageurs. Il risquerait véritablement d’affaiblir la réforme, ce qui, j’en suis sûr, n’est pas votre souhait.
M. le président. Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement n° 23 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je rappelle tout d’abord que deux amendements identiques ont été déposés et que je ne suis donc pas le seul concerné par vos précisions, monsieur le secrétaire d’État.
Je n’ai aucune raison de mettre en doute les chiffres que vous venez d’exposer. En effet, la question se pose différemment selon que la péréquation représente 10 % ou 40 % du FPSPP.
Nous souhaitons tous permettre le transfert de fonds suffisants vers les publics en difficulté, notamment les jeunes. Il ne s’agit pas d’ébranler la colonne vertébrale du texte.
En conséquence, sur la foi des chiffres que vous avancez, j’accepte de retirer cet amendement. Je le fais en mon âme et conscience, en regrettant de ne pouvoir donner satisfaction aux partenaires sociaux, mais en étant également conscient des erreurs qui sont parfois commises dans la gestion des fonds de formation professionnelle, comme l’a souligné le rapport de la Cour des comptes.
M. le président. L'amendement n° 23 rectifié bis est retiré.
Monsieur Jeannerot, retirerez-vous également l'amendement n° 142 ?
M. Claude Jeannerot. J’ai bien écouté les explications de M. le secrétaire d’État. Nous avons le sens des responsabilités. Néanmoins, compte tenu de notre philosophie, que M. le secrétaire d’État a bien voulu reconnaître, nous préférons maintenir cet amendement.
Il faudrait vraiment que nous puissions disposer, avant la réunion de la commission mixte paritaire, de tous les éléments d’information nécessaires pour exercer pleinement notre responsabilité. En l’état, j’avoue être quelque peu troublé et partagé.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 71, présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Supprimer la seconde phrase du onzième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-21 du code du travail.
II. - Compléter l'avant-dernier alinéa du même texte par une phrase ainsi rédigée :
Cette convention précise, dans le respect des compétences respectives de chacun des signataires, leurs engagements respectifs, notamment financiers.
L'amendement n° 68, présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du onzième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-21 du code du travail, remplacer les mots :
peut prévoir une
par les mots :
précise la
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter ces deux amendements.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet article 9 fait naître une situation pour le moins paradoxale, où l’État pourrait être partie prenante d’une convention portant sur l’utilisation des ressources du Fonds sans que sa participation financière soit clairement prévue.
Vous avez, monsieur le secrétaire d’État, justifié cette situation par une belle référence à la République, précisant que l’État n’avait pas à payer pour avoir droit à la parole. Nous pouvons en convenir.
Mais, entre avoir voix au chapitre et décider de l’orientation des ressources du fonds, il y a quand même un monde !
Évidemment, nous n’entendons pas conditionner la participation de l’État à la gestion du fonds à une condition financière, mais nous jugeons tout de même choquant que votre Gouvernement profite de la situation pour se désengager financièrement.
Au final, seul l’État ne participera pas obligatoirement au financement de ce fonds. Je le regrette d’autant plus que l’accord auquel les partenaires sociaux sont parvenus prévoit explicitement, dans son article 27, que « des conventions, formalisant l’engagement, notamment sur le plan financier, de chacun des partenaires dans le respect de son champ de compétences, pourront être signées ».
La rédaction actuelle bouleverse considérablement cette disposition qui avait fait consensus. Là où les partenaires sociaux envisageaient la possibilité de signer des conventions qui préciseraient les engagements financiers respectifs de chacun des acteurs, la rédaction actuelle prévoit une convention-cadre renforçant considérablement les pouvoirs de l’État, tout en rendant facultative sa participation financière.
Telle n’est pas la conception que nous nous faisons de la solidarité nationale. C’est pourquoi nous entendons qu’il soit prévu dans la loi que la convention précise la participation financière de l’État au fonds.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je suis partisan de la contractualisation. Il me semble toutefois que le Gouvernement n’a pas souhaité prévoir une participation financière obligatoire de l’État. Mieux vaut donc engager la totalité des sommes allouées au FPSPP, quitte à ce que l’État apporte un complément financier si les ressources se révèlent insuffisantes.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Premièrement, l’État finance bel et bien : il consacre 12 milliards d’euros aux politiques de l’emploi et 9 milliards d’euros aux politiques de la formation. Cela justifie, au moins, l’existence d’un point de passage entre l’emploi et la formation professionnelle, afin de mieux articuler ces deux domaines.
Je répète que le fonds sera géré de façon paritaire, la convention-cadre ne servant qu’à articuler les priorités des partenaires sociaux avec la vision de l’État.
Deuxièmement, je m’élève contre cette idée, que l’on voit parfois poindre, selon laquelle l’État n’aurait voix au chapitre que s’il paye. Parce qu’il est porteur de la légitimité du contrat social, du suffrage universel et de la République, dont vous êtes aussi l’expression, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État ne saurait réduire son intervention à sa seule participation financière.
Ainsi, l’État n’aurait-il légitimité à réguler le système financier qu’à condition d’investir les mêmes sommes que les fonds de pension ? De même, dans le domaine de la santé, ne doit-il développer des politiques de prévention que s’il met de l’argent au « pot » ?
Nous ne devons pas tomber dans ce piège qui consiste à réduire la vision de l’intérêt général à la simple contrepartie financière. Ce n’est pas un marchandage ! Nous avons besoin d’un acteur qui porte une vision nationale et républicaine de l’intérêt général, dans le respect de l’intervention de tous les autres acteurs.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Remplacer le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-21 du code du travail par deux alinéas ainsi rédigés :
« Un comité composé des signataires de la convention-cadre, ainsi que des représentants des régions, assure le suivi de l'emploi des ressources du fonds et en évalue l'impact.
« Un décret en conseil d'État précise les modalités de désignation des représentants des régions au sein du comité.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Finalement, nous allons peut-être pouvoir trouver un terrain d’entente avec M. le secrétaire d’État.
En effet, cet amendement a pour objet de créer un comité composé des signataires de la convention-cadre, ainsi que des représentants des régions, qui pourrait être chargé d’assurer le suivi de l’emploi des ressources du fonds et d’en évaluer l’impact.
Vous l’aurez compris, notre amendement a deux finalités.
Il vise, d’une part, à rendre aux signataires de la convention-cadre, c’est-à-dire aux partenaires sociaux, le pouvoir de décider, en association avec d’autres partenaires, de l’affectation des ressources du fonds. Cela traduit notre volonté de reconnaître la légitimité des partenaires sociaux, quand le Gouvernement entend la leur retirer en s’octroyant le droit de décider seul de l’orientation des ressources de ce fonds.
D’autre part, nous entendons poursuivre avec cet amendement la logique d’association des régions que nous n’avons eu de cesse de défendre. Car, si nous sommes convaincus que la meilleure des péréquations interrégionales ne remplacera jamais la solidarité nationale, nous souhaitons défendre partout la connaissance et les compétences que les régions ont acquises en la matière.
La proposition que nous formulons est simple : elle vise à intégrer les régions au comité de suivi dont nous souhaitons la création.
La participation des régions nous semble légitime au regard des compétences qui leur sont actuellement dévolues. J’ai entendu les réserves du rapporteur et du secrétaire d'État sur ce sujet. Il nous a été opposé que les régions ne pouvaient être associées à la gestion du fonds sous prétexte qu’elles ne participaient pas à son financement. J’avoue mon étonnement devant cette réponse pour le moins curieuse : alors qu’il ne participe pas directement au financement de ce fonds, l’État intervient dans l’affectation de ses ressources !
Si cette disposition était maintenue en l’état, elle serait en contradiction avec les conclusions du rapport d’information établi par Bernard Seillier au nom de la mission commune d’information sur le fonctionnement des dispositifs de formation professionnelle, conclusions qui préconisent une plus grande association dans les modes de gestion afin d’éviter les concurrences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J’ai déjà eu l’occasion de préciser que, pour des raisons d’efficacité, il n’était pas souhaitable que les régions entrent dans la gouvernance du FPSPP. Par conséquent, il serait quelque peu paradoxal qu’elles intègrent le comité de suivi de l’emploi des ressources du fonds : elles seraient amenées à évaluer des choix qu’elles n’ont pas validés.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Annie David. Les régions participent pourtant au financement du fonds !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. L’État participe à hauteur de 8 milliards à 9 milliards d'euros à la formation. À entendre M. le secrétaire d'État, cela justifie son intervention dans la répartition des ressources du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. Et les régions, qui se trouvent pourtant dans une situation analogue, ne peuvent participer à de telles décisions. Cette réponse me semble contradictoire ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. Mme David nous a convaincus !
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Virapoullé et Mme Payet, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-21 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette convention-cadre prévoit également la prise en compte et le financement d'actions de formation professionnelle répondant aux caractéristiques des publics et aux situations particulières de l'emploi dans les départements d'outre-mer. ».
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Des interventions spécifiques du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels doivent pouvoir être entreprises dans les départements d'outre-mer, compte tenu de la situation particulière du marché de l'emploi, de la présence d'un nombre important de bénéficiaires de minima sociaux ainsi que d'un phénomène d'illettrisme plus marqué qu'en métropole.