M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 72.
Mme Annie David. M. le secrétaire d’État l’a dit, nous n’avons pas la même vision de la formation professionnelle et de la formation continue : cela est apparu clairement dès le début de nos débats.
En ce qui concerne l’article 9, notre opposition porte essentiellement sur cette préparation opérationnelle à l’emploi, que vous voulez faire financer par le fonds de la formation professionnelle et qui avantagera uniquement les entreprises.
Nous ne sommes donc pas en désaccord sur le point que vous avez soulevé, monsieur le secrétaire d’État, mais sur la finalité de la POE telle qu’elle ressort du dispositif proposé.
Vous ne nous avez peut-être pas bien écoutés, à moins que nous ne nous soyons pas suffisamment exprimés…
Si la POE débouche sur un poste en CDI ou en CDD de douze mois, comme le prévoit l’ANI, nous y sommes favorables. Or la POE ne conduira pas nécessairement à ce type d’emplois mais pourra déboucher sur un contrat de professionnalisation, et c’est là que nous ne sommes plus d’accord. Voilà 400 heures déjà payées à une entreprise, pour un poste bien ciblé et, au final, le salarié reprendra un contrat de professionnalisation pour suivre à nouveau une formation et occuper toujours le même poste ! Cela fait beaucoup d’aides et d’avantages accordés aux entreprises. Même si les emplois sont en tension dans certains secteurs, il faut aussi respecter les salariés.
M. Jean Desessard. Très bien !
Mme Annie David. Comme je l’ai dit concernant un autre amendement, les salariés éloignés de l’emploi peuvent bénéficier, plutôt que d’une POE, d’un contrat d’aide à l’emploi. Dans ce cadre, des formations, financées par un autre fonds, permettent aux salariés éloignés de l’emploi de reprendre pied dans la vie de l’entreprise. (M. Jean Desessard applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 74 et 143.
M. Claude Jeannerot. J’ai bien entendu les propos de M. le secrétaire d’État et je constate avec plaisir – ce n’est pas la première fois – que nous sommes d’accord sur le fond.
C’est évident, on ne peut pas obliger un demandeur d’emploi à s’engager dans un cursus de formation s’il ne l’a pas librement choisi.
Mme Annie David. Absolument !
M. Claude Jeannerot. Dans ces conditions, si nous sommes d’accord, monsieur le secrétaire d’État, pourquoi ne pas l’inscrire dans la loi ? Ce serait un signe positif et clair envoyé aux signataires de l’accord et surtout, au-delà, aux demandeurs d’emploi.
Je me permets de réitérer ma demande pour me mettre en conformité avec ce que vous avez vous-même précisé tout à l’heure. Puisque nous sommes en phase, tirons-en la conséquence dans le texte !
M. Jean Desessard. Je constate que M. le secrétaire d’État refuse de répondre. Il ne devrait pas oublier que, s’il a le droit de parler, il a aussi le devoir de répondre.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 74 et 143.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 75.
Mme Annie David. Le secrétaire d’État n’a pas émis un avis défavorable sur l’amendement n° 75, il a demandé une rectification. (M. le secrétaire d'État acquiesce.)
Il s’agirait en fait de transformer notre proposition de remplacement en un e proposition d’ajout.
Mme Annie David. Nous acceptons de rectifier notre amendement en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 75 rectifié, présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, et ainsi rédigé :
I - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6326-1 du code travail, supprimer les mots :
à la fois
II- Compléter ladite phrase par les mots :
dans la zone géographique privilégiée précisée par le demandeur d'emploi dans son projet personnalisé d'accès à l'emploi mentionné à l'article L. 5411-6-1
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je rejoins la position du secrétaire d’État, monsieur le président.
M. Jean Desessard. Après une période glaciaire, voici une embellie ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 117.
Mme Catherine Procaccia, président de la commission spéciale. « Paroles, paroles ! »…
M. Jean Desessard. Monsieur le secrétaire d’État, j’aurais aimé entendre votre réponse concernant l’ajout du mot « volontaires » prévue dans l’amendement n° 143. Pourquoi ne l’avez-vous pas accepté alors que vous étiez d’accord sur le fond ?
Cela m’aurait intéressé parce qu’il en va de même pour l’amendement n° 117 : vous dites que vous allez tenir compte du développement durable et que vous lui donnerez une priorité, mais vous ne voulez pas accepter mon amendement.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Tenir compte, ce n’est pas donner une priorité !
M. Jean Desessard. Si vous refusiez de tenir compte du développement durable parce que beaucoup d’éléments sont encore incertains, je pourrais, à la rigueur, comprendre votre avis défavorable ; cela signifierait que vous préférez ne pas prendre de risques et ne pas l’inscrire dans la loi.
Mais vous dites : « Je vais le faire ». Alors pourquoi n’êtes-vous pas favorable à mon amendement ? Vous ne m’aimez pas ? (Sourires.)
Plusieurs sénateurs de l’UMP. Mais si ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean Desessard. On n’aime pas Desessard, donc on refuse son amendement !
Mais ce n’est pas le cas puisque vous avez également refusé l’amendement de M. Jeannerot. Ou alors vous n’aimez pas l’opposition ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Vous pensez qu’il faut bien marquer la frontière politique entre l’opposition et vous !
Pourtant, vous êtes d’accord sur le fond : cette question ne fait pas l’objet d’un clivage.
J’ai réfléchi. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Il m’a fallu du temps – c’est pourquoi j’ai du mal avec l’urgence ! – et je me suis dit : s’il accepte un amendement, il risque de m’encourager à en déposer d’autres, sur les prochains projets de loi ! Et cela vous obligerait encore à rester deux ou trois jours jusque tard le soir dans cet hémicycle ! (Sourires.)
J’ai compris, monsieur le secrétaire d’État, vous n’acceptez aucun amendement de l’opposition…
Mme Catherine Procaccia, présidente de la commission spéciale. Mais si, nous en avons adopté beaucoup !
M. Jean Desessard. … pour être vite débarrassé du débat démocratique. Vous préférez que le projet de loi soit adopté quasiment tel que vous le présentez.
Mme Catherine Procaccia, présidente de la commission spéciale. Mais ça ne vous empêcherait pas de parler, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Voilà, j’ai compris pourquoi vous refusez d’inscrire ma proposition dans le projet de loi même si vous êtes d’accord !
Vous y trouveriez pourtant un gain politique, monsieur le secrétaire d’État : d’abord, cela vous donnerait de temps en temps l’occasion de satisfaire l’opposition, ensuite, cela vous permettrait de mettre l’accent, dans les textes, sur cette priorité que constitue le développement durable.
Dans une prochaine émission de télévision, on verra sûrement M. Borloo s’agiter et déclarer : « Au début je ne comprenais rien, mais maintenant j’ai compris : le développement, c’est l’économie verte ! C’est une révolution, tout est changé ! » (Nouveaux sourires.)
Drôle de Gouvernement que celui qui ne suit ni la perspective tracée par un ministre d’État ni ses directives puisqu’il demande le rejet de chaque amendement que nous proposons et qui va dans le sens de ces directives !
Alors là, à la télévision, nous ne manquerons pas de dire : « Paroles, paroles ! » Parce que vous parlez, mais vous ne faites rien ! Un amendement proposé par Jean Desessard, voté par l’opposition, n’a été accepté ni par le rapporteur du groupe UMP ni par le secrétaire d’État d’un Gouvernement UMP ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. J’ai une première interrogation : l’énergie de M. Desessard est-elle durable ? (Sourires.)
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. En tout cas, elle est renouvelable ! (Nouveaux sourires.)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Sans aucun doute !
Je vous réponds, monsieur Desessard, pour que vous ne voyiez aucun a priori personnel à votre égard dans ma position vis-à-vis de ces amendements.
Moi qui réfléchis moins et qui suis moins dans cette trituration intellectuelle que vous avez poussée fort loin, je reviens au cours de grammaire basique.
Ce qui me gêne dans votre amendement, c’est le mot « prioritairement ».
Nous avons évoqué, à l’occasion de l’amendement de Jean-Marie Vanlerenberghe, un autre champ qui offre de vastes perspectives en termes d’emploi : les services à la personne, notamment tous les emplois liés au vieillissement, à la solidarité et au grand âge. Beaucoup de personnes doivent être formées pour ces emplois.
Le développement durable ne peut pas être le seul domaine prioritaire pour les années 2010, 2011, 2012, etc. Il faut agir dans ce domaine, mais sans en faire notre unique priorité. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'amendement n° 76.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Une coquille s’est effectivement glissée dans la rédaction de l’objet de cet amendement, où il est question de « contrat de transition professionnelle ». Si M. le secrétaire d’État m’a écoutée avec attention, il l’aura remarqué, j’ai parlé, dans mon intervention, de « contrat de professionnalisation ».
Nous maintenons cet amendement parce qu’il s’agit d’un amendement de fond, en raison même des financements publics mobilisés, qui méritent une responsabilisation sociale des entreprises par l’octroi d’un contrat de droit commun, un CDI, au salarié concerné.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'article.
Mme Annie David. Cet article 9 concerne un point important de l’Accord national interprofessionnel signé par les partenaires sociaux à l’unanimité puisqu’il traite notamment du fonds de péréquation.
Nous avons réussi, par les travaux de la commission et du rapporteur, à apporter un peu de sécurité dans le financement de ce fonds.
Trop d’incertitudes demeurent cependant, notamment sur la gouvernance du fonds. L’État reprend, à notre goût, un peu trop la main sur cette gouvernance. Il reste surtout cette préparation opérationnelle à l’emploi qui ne nous semble pas aller dans le sens des intérêts des salariés.
En conséquence, nous nous abstiendrons sur cet article.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Article 9 bis
(Non modifié)
I. - Au 1° du I de l’article 32 de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 pour le retour à l’emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « six ».
II. - L’ordonnance n° 2006-433 du 13 avril 2006 relative à l’expérimentation du contrat de transition professionnelle est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa et à la première phrase du deuxième alinéa de l’article 1er et au second alinéa de l’article 2, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2010 » ;
2° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 1er, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « trente-trois ».
M. le président. L’amendement n° 77, présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter le II de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le deuxième alinéa de l’article 6 est ainsi rédigé :
« L’allocation versée au bénéficiaire du contrat de transition professionnelle est considérée par la sécurité sociale comme la rémunération visée à l’article L. 3221-3 du code du travail. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L’article 9 bis de ce projet de loi, plus particulièrement son II, permet à la fois de prolonger jusqu’en 2010 l’expérimentation des contrats de transition professionnelle et de l’étendre géographiquement, en faisant passer de dix-huit à trente-trois le nombre de bassins d’emplois concernés.
Ces contrats s’adressent aux salariés d’une entreprise qui envisage des licenciements économiques alors qu’elle n’est pas soumise à l’obligation de proposer un congé de reclassement. Force est de constater que les CTP sont devenus, avec la hausse massive du chômage, un véritable outil de lutte contre la crise actuelle, permettant aux salariés de ne pas connaître de périodes d’inactivité.
Toutefois, l’allocation versée au salarié, car il ne s’agit pas d’un salaire, est partiellement exonérée des cotisations de sécurité sociale. Or le contexte actuel nous invite à prendre toutes les mesures utiles pour apporter les financements nécessaires à la pérennisation de notre protection sociale.
Alors que Mme Bachelot déclare vouloir augmenter le forfait hospitalier, c’est-à-dire contraindre nos concitoyens à mettre une nouvelle fois la main à la poche, nous entendons, pour notre part, supprimer l’ensemble des exonérations de cotisations sociales, comme nous y invite la Cour des comptes elle-même. Dois-je le rappeler, mes chers collègues, celles-ci atteignent aujourd’hui 42 milliards d’euros, montant qui risque de faire peser un poids trop lourd sur l’emploi et les salaires.
MM. Jean Desessard et Jacky Le Menn. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Madame David, il ne me semble pas opportun de supprimer l’exonération de cotisations sociales dont bénéficient les contrats de transition professionnelle, qui, je vous le rappelle, sont destinés à soutenir des salariés licenciés pour motif économique, souvent à la suite d’une restructuration. Tout doit être au contraire mis en œuvre pour les aider, y compris une exonération de cotisations sociales.
Mme Annie David. Surtout patronales !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Je suis également défavorable à cet amendement. Ce n’est, en effet, pas le moment, compte tenu de la crise actuelle, de dégrader les prestations versées à des salariés en situation difficile.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Absolument !
M. le président. L’amendement n° 182, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L’article L. 5122-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5122-1. - Les salariés sont placés en position de chômage partiel et bénéficient d’une allocation spécifique de chômage partiel à la charge de l’État, s’ils subissent une perte de salaire imputable :
« - soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d’établissement,
« - soit à la réduction de l’horaire de travail pratiqué dans l’établissement ou partie d’établissement en deçà de la durée légale de travail.
« L’allocation spécifique de chômage partiel est également attribuée aux salariés exerçant la même activité qui subissent la réduction collective de l’horaire de travail pratiqué dans l’établissement ou partie d’établissement en deçà de la durée légale de travail, appliquée, dans les mêmes conditions, individuellement et alternativement. Dans ce cas, les entreprises de plus de 250 salariés doivent conclure une convention d’activité partielle de longue durée prévue par les dispositions du 2°de l’article L. 5122-2 du présent code.
« Les salariés restent liés à leur employeur par un contrat de travail.
« La mise en chômage partiel des salariés indemnisés au titre de l’allocation spécifique de chômage partiel entraîne la suspension de l’exécution de leur contrat de travail. Durant cette période, les salariés peuvent suivre des actions de formation en dehors du temps de travail. »
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. L’activité partielle est aujourd’hui, je le rappelle, l’une des meilleures armes anti-crise à notre disposition : elle a ainsi permis à près de 320 000 salariés de rester dans leur entreprise.
L’activité partielle correspond à petite révolution dans notre politique de l’emploi : au lieu d’agir après coup, une fois les licenciements décidés, le but est d’intervenir avant, par le biais d’un accompagnement et d’un soutien financier, pour que les salariés restent dans l’entreprise et soient formés.
Pour autant, ce dispositif, héritier d’une conception ancienne du marché du travail, a d’abord été conçu pour les entreprises industrielles, qui, en cas de problème, ferment alors des ateliers entiers et recourent à l’activité partielle pour tous les salariés. Il n’est donc pas adapté aux entreprises de la distribution et des services, dans lesquelles il est possible de s’organiser par rotation.
Dans le cadre de l’ANI conclu le 8 juillet dernier, les partenaires sociaux ont donc souhaité que les modalités de l’activité partielle puissent être assouplies, mus toujours par la même obsession : prévenir plutôt que guérir, agir avant les licenciements plutôt que de jouer les pompiers quand il est trop tard.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission n’a pas été en mesure de se prononcer sur cet amendement. En ce qui me concerne, j’y suis favorable, car cette proposition destinée à assouplir les modalités de l’activité partielle va dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le secrétaire d’État, si je vous comprends bien – je ne voudrais pas déformer vos propos ! –, en cas de chômage partiel dans une entreprise, l’État n’hésiterait pas à mettre la main au portefeuille en avançant les fonds alors qu’il doit lui-même faire face, depuis plusieurs années, à un déficit budgétaire abyssal et à une dette colossale !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Vous préféreriez que les personnes concernées soient licenciées ?
M. Jean Desessard. Et vous nous dites que tout cela est fait pour répondre à l’intérêt des salariés !
M. Jean Desessard. Imaginons une entreprise subissant une baisse temporaire de son activité, liée à la conjoncture ou à son implantation géographique, et qui, à la fin de l’année, enregistre malgré tout d’énormes bénéfices. Le chômage partiel est inévitable ; bien sûr, les salariés s’y retrouveront, mais l’employeur y recourra d’autant plus volontiers s’il sait que l’État apporte une compensation financière, permettant de réduire les coûts et d’augmenter les profits.
Puisque l’État est si endetté – et c’est loin d’être fini ! –, comment le Gouvernement peut-il, dans le même temps, annoncer son intention de réduire la fiscalité, notamment l’impôt sur les sociétés, pour prétendument relancer l’activité, et, dans certaines zones, se montrer si généreux à l’égard d’entreprises qui, au final, n’auront aucun compte à lui rendre même si elles font des bénéfices colossaux ?
Dans un souci de bonne gestion, vous auriez pu au moins assortir le dispositif d’une clause prévoyant, dans ce cas, un remboursement des fonds versés. Lorsqu’on gère un pays très endetté, on doit tout de même, me semble-t-il, vérifier que l’argent que l’on injecte dans les entreprises n’est pas complètement perdu !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Monsieur Desessard, le dispositif proposé repose sur la volonté non pas du Gouvernement, mais des syndicats et des représentants des employeurs. En critiquant cet amendement, ce sont eux que vous visez. En le défendant, c’est leur travail que je mets en avant. En effet, FO, la CFDT, la CGC, la CFTC...
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mais pas la CGT !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. … et le patronat ont su, par une action de terrain menée mois après mois, se montrer pragmatiques pour essayer de mettre en place des dispositifs utiles, constructifs et directement opérationnels, permettant de préserver les salariés des licenciements. Ce que je défends devant vous, ce n’est pas tant la proposition du Gouvernement que le travail qui a été accompli, dans le cadre de l’ANI, par la grande majorité des partenaires sociaux.
Plutôt que de se torturer l’esprit comme vous le faites à imaginer je ne sais quelle hypothèse fantaisiste où une entreprise aurait recours à l’activité partielle pour l'ensemble de ses salariés et ferait dans le même temps des bénéfices colossaux, les partenaires sociaux ont préféré prendre en compte les réalités du terrain pour lutter contre la crise. Car ceux qui ont recours à l’activité partielle, ce sont aussi bien des PME de la vallée de l’Arve, des producteurs de céramique du Var, des industries nautiques de Vendée ou des entreprises automobiles. Sans cet outil, toutes ces entreprises auraient licencié massivement.
Les partenaires sociaux l’ont bien compris, l'intérêt est d’agir très rapidement plutôt qu’après coup, pour éviter aux salariés de perdre leur emploi et leur permettre, notamment aux plus démunis qui sont rémunérés au niveau du SMIC, de recevoir non seulement une compensation financière, mais également une offre de formation adaptée.
Monsieur Desessard, pardonnez-moi mon ton quelque peu vigoureux, mais je vous trouve très injuste de remettre en cause le travail des partenaires sociaux, qui ont passé beaucoup de temps à concevoir un outil pragmatique et adapté aux réalités de terrain. (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.
Mme Christiane Demontès. Monsieur le secrétaire d’État, sans vouloir être polémique, permettez-moi tout de même de vous dire que je trouve votre réponse quelque peu partiale.
N’est-ce pas remettre en cause le travail des partenaires sociaux que de refuser de transposer dans la loi les dispositions de l’ANI relatives à la formation initiale différée ? N’est-il pas plus anormal d’empêcher les demandeurs d’emploi de refuser une offre valable d’emploi que de demander à une entreprise l’état de sa situation financière pour justifier une mise au chômage partiel ? Il est bien regrettable qu’il y ait ainsi deux poids, deux mesures. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)