M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Pignard.
M. Jean-Jacques Pignard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie par avance de pardonner ma maladresse puisque, dernier arrivé à la Haute Assemblée, je n’en connais pas encore tous les usages. C’est en effet la première fois que je m’exprime à cette tribune. (Marques d’encouragement et applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.),…
M. Jean-Claude Carle. Vous apprendrez vite !
M. Jean-Jacques Pignard. Mais, pour un homme qui a consacré toute sa carrière professionnelle à l’enseignement, ce débat est une bonne occasion pour une première. Encore que je ne dispose ici que de six minutes ! J’ai d’ailleurs cru comprendre que, dans cette classe-ci, pour en obtenir dix, il fallait avoir redoublé plusieurs fois… (Rires.)
Veuillez aussi me pardonner de ne pas suivre la fiche que l’on m’a préparée. Il y était écrit que certains éléments de la réforme rendaient le groupe centriste « septique », comme la fosse ! S’il fallait trouver une justification pour réhabiliter la filière littéraire, celle-ci suffirait… (Nouveaux rires.)
L’ambition de cette réforme est d’allier, et non d’opposer, l’acquisition d’un socle de culture générale et la légitime ambition d’une orientation personnelle.
Comment ne pas souscrire à cette idée, qui rend d’ailleurs a posteriori inconséquent tout projet d’orientation prématuré, qui ferait litière de notre patrimoine commun, la littérature, l’histoire, la géographie, mais aussi la science et la fréquentation des arts, auxquelles Ivan Renar vient de consacrer l’essentiel de son intervention ?
Comment ne pas souscrire au souhait affiché de ne pas réduire l’excellence à la seule série S, si intéressante soit-elle ?
J’ai débuté ma carrière en enseignant l’histoire à des classes préparatoires, puis j’ai fait le choix de transmettre mes connaissances à des élèves de la filière STI parce que, entre-temps, j’étais devenu maire d’une ville de 35 000 habitants, dont 30 % étaient d’origine étrangère, et que je ne pouvais me résoudre à ce qu’une partie de cette population demeurât à l’écart d’un héritage qu’elle souhaitait généralement s’approprier même s’il ne lui était pas naturel. Dans cet exercice, je n’ai connu que du bonheur.
Mes chers collègues, l’apprentissage des nouvelles technologies, dont nous sommes tous de chauds partisans, ne saurait remplacer le couple que constituent le professeur et l’élève, sauf à transformer l’éducation nationale en une sorte de standard téléphonique : « Pour une information sur l’histoire, tapez 1 ; pour la littérature, tapez 2 ; pour la géographie, tapez 3 ; pour toute autre information, tapez 4 ; veuillez patienter, un conseiller va vous répondre. » (Sourires.) Trop d’élèves ont attendu trop longtemps et ont dû raccrocher !
J’ai bien noté que, dans votre réforme, monsieur le ministre, figurait ce couple essentiel du professeur et de l’élève. L’enseignant dispense un savoir-faire plus que jamais nécessaire, mais il est aussi un accompagnant – terme que je préfère à celui de « référent » – qui, à travers les discussions avec ses élèves, oriente, soigne les lacunes et le mal-être de tous ceux qui ont décroché, qui innove aussi en recourant à de nouvelles méthodes de pédagogie, grâce à la liberté que vous voudrez bien lui accorder.
Votre réforme ne réussira que si les professeurs jouent le jeu. Ce sera, pour nombre d’entre eux, un défi à relever et une nouvelle façon d’appréhender leur métier. Mais, pour cela, il faudra que vous leur donniez les moyens nécessaires. Or le Président de la République a expliqué que ces changements auront lieu à moyens constants. Donc, votre tâche sera difficile, monsieur le ministre.
Certes, l’évolution démographique, la nouvelle organisation des plages horaires, ainsi que les innovations permettant de regrouper des classes pour les cours magistraux et de les dédoubler pour des modules pourront vous aider.
Cette mission délicate peut aussi être pour vous, monsieur le ministre, une chance si elle vous permet de tailler dans l’accessoire pour aller à l’essentiel. Dans la grande administration qui est la vôtre, des redéploiements devraient être possibles. Pour énoncer des choses évidentes, il n’est pas nécessaire de produire quotidiennement des circulaires de cinquante pages, qui font le cauchemar des proviseurs. En réduisant ces textes à dix pages, vous pourriez peut-être redéployer quarante rédacteurs et apprendre à ceux qui restent à rédiger ces textes dans une langue vernaculaire qu’on appelle le français, et non pas dans un volapük intégré qui désespère Billancourt et Neuilly, pour une fois réunis… (Sourires.)
L’essentiel, j’y reviens, c’est le professeur, qui ne vous demandera pas seulement la juste rémunération de son travail, mais qui réclamera aussi ce qui faisait tant défaut à Pygmalion : la considération.
Je me réjouis, pour ma part, que vous ayez adopté une démarche pragmatique. Dans ce pays, au xixe siècle, tous les vingt ans, un régime politique en chassait un autre. Au xxe siècle, tous les dix ans, une réforme de l’éducation en chassait une autre. Aux grandes enjambées du lièvre, vous avez choisi le pas mesuré, prudent de la tortue, mais nous savons tous, depuis La Fontaine, que ce n’est pas la plus mauvaise façon de parvenir au but. Nous souhaitons tous, au groupe de l’Union centriste, que vous parveniez au but. Encore faut-il vous en donner les moyens ; faute de quoi, entre l’ambition et la réalisation, il y aurait non pas une fosse mais un fossé, qui, cette fois-ci, pourrait engendrer notre scepticisme. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. - M. Ivan Renar applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le sujet sur lequel nous débattons aujourd’hui est fondamental. Réformer le lycée, c’est dès à présent faire entrer la France dans la société de la connaissance de demain.
Dans ce but, nous devons réaffirmer la place des filières technologiques et professionnelles au lycée. Il le faut pour deux raisons : d’abord, parce que la démocratisation du lycée s’est faite essentiellement via ces filières ; ensuite, parce que celles-ci ont démontré toute leur utilité et sont une réussite en termes d’insertion sur le marché de l’emploi. Il convient donc de les pérenniser et de les renforcer, d’autant qu’elles souffrent encore trop souvent d’une stigmatisation infondée.
De ce point de vue, monsieur le ministre, on ne peut que regretter que, parmi les mesures annoncées pour la réforme du lycée, si peu d’entre elles leur soient directement consacrées. C’est d’autant plus préjudiciable que la réforme de la voie générale et technologique doit favoriser l’accès à cette dernière d’un plus grand nombre d’élèves, dans le cadre d’une diversité sociale accrue.
En effet, l’orientation dès la troisième en lycée professionnel ou dès la seconde en filière technologique est généralement réservée aux élèves considérés comme n’étant pas capables de réussir en voie générale. Elle constitue donc, encore et toujours, un outil de sélection sociale, la voie royale étant bien sûr la filière scientifique.
Je constate d’ailleurs que, lorsqu’il est question du rééquilibrage à réaliser entre les filières, on finit toujours par n’évoquer que les seules séries du bac général.
On peut certes se féliciter de la volonté affichée de revaloriser le bac littéraire ; de même, il faut se réjouir que le bon sens l’ait enfin emporté et que l’utilité de la filière économique et sociale ne soit plus remise en cause. Néanmoins, on peut regretter que ce rééquilibrage se réduise uniquement à la programmation d’un jeu de vases communicants de la filière S vers les filières ES et L.
J’estime, pour ma part, qu’il ne doit pas se faire uniquement au sein du bac général, mais plutôt entre les filières du bac général et du bac technologique. C’est à cette condition seulement que l’équilibre tant souhaité permettra de mettre enfin en accord les paroles et les actes. Cela montrerait effectivement que les filières technologiques et professionnelles bénéficient de la même considération que les filières générales. Ce ne serait d’ailleurs qu’un juste retour des choses, au regard du nombre d’élèves concernés. En effet, je le rappelle, en 2009, parmi les admis au baccalauréat, 90 000 venaient certes de la série ES, mais ils ont été 89 000, soit quasiment autant qu’en ES, à obtenir un bac technologique en filière tertiaire.
Sur la base de ce constat, je considère que les propositions qui sont avancées pour revaloriser ces filières sont insuffisantes.
Pour prendre un exemple, la refonte des programmes de la filière STI, si elle est nécessaire, ne peut être qu’une étape, non une fin en soi. Des programmes datant de 1993 doivent assurément être adaptés aux réalités contemporaines, mais cette actualisation ne peut qu’être un premier pas vers la nécessaire et attendue revalorisation de ces séries.
Je considère donc, pour en revenir à l’orientation vers les filières professionnelles et technologiques, qu’une des premières actions à mener est de développer un travail pédagogique intense, afin de tordre le cou aux représentations « stigmatisantes » qui affectent ces filières et casser la spirale de la dépréciation. Ce n’est que si l’on change le regard des élèves et de leurs familles sur ces filières, ce n’est que si l’on fait évoluer les mentalités à leur égard qu’elles pourront obtenir la reconnaissance sociale qui leur est due.
Le Président de la République se dit bien conscient de cette ardente nécessité. Dans ce but, il affirme vouloir faire de ces filières des filières d’exception et un outil de promotion sociale qui récompense le mérite par le travail et lui seul, comme il l’a précisé tout récemment. On peut cependant s’interroger sur les moyens qui seront mobilisés pour y parvenir véritablement. On sait bien que les proclamations, dans ce domaine plus encore qu’ailleurs, valent peu de chose…
Des réponses efficaces méritent pourtant d’être apportées. Comment, en effet, proclamer la revalorisation d’une filière lorsqu’on assiste, en pratique, à une mise en concurrence de fait entre les filières techniques et professionnelles, notamment depuis que le bac pro peut être obtenu en trois ans ? D’où ma première question : cette réalité conduira-t-elle, à terme, à l’intégration des bacs pro en BTS ?
On assiste à un autre paradoxe, et c’est, monsieur le ministre, le sens de ma deuxième question.
Au terme d’une sélection drastique, les IUT recrutent de plus en plus de titulaires d’un bac général. De ce fait, ceux qui ont un bac technologique sont contraints de s’engager dans un premier cycle universitaire, où ils connaissent un taux d’échec important.
Face à cette situation, monsieur le ministre, vous proposez la création d’un parcours débouchant sur les métiers d’ingénieur et de technicien pour les sciences et technologies industrielles. Vous envisagez également que soient réservées à ces bacheliers des places au sein des IUT, dans les sections de techniciens supérieurs, ainsi que des classes préparatoires spécifiques.
Au-delà de ces nouvelles annonces, on est en droit de s’interroger sur le devenir de ces projets. Quand verront-ils le jour ? Comment seront-ils financés ? Quel sera le statut de ces classes préparatoires ? Et surtout, quelle sera la politique conduite à l’égard des IUT ?
En effet, si des places doivent être réservées aux bacheliers des filières technologiques, cela suppose qu’il restera moins de places pour ceux qui ne sont pas issus de ces filières. On entre là dans une logique de gestion de la pénurie alors qu’il vaudrait mieux réfléchir aux causes du succès des IUT.
Puisque la formation qui y est dispensée est si recherchée, à juste titre, pourquoi ne pas prévoir un plan de création de places supplémentaires dans les IUT plutôt que d’en limiter l’accès ? Pourquoi ne pas penser en termes de développement d’une offre de formation au lieu de toujours appréhender l’éducation nationale comme une administration qui devrait systématiquement voir le nombre de ses fonctionnaires se réduire ?
On constate également, et c’est mon troisième point, un manque d’harmonisation, à l’échelon d’un bassin de vie, entre les spécialisations offertes dans les lycées et les diplômes auxquels préparent les IUT. Cette situation a pourtant des conséquences très lourdes sur le dynamisme des territoires. En effet, les élèves qui quittent leur région faute de pouvoir trouver dans les IUT proches de chez eux les formations qu’ils recherchent, n’y retournent que rarement une fois leur diplôme en poche.
Évidemment, je ne considère pas qu’il faille empêcher la mobilité des élèves. Cela n’aurait de toute façon pas grand sens au regard du marché du travail actuel ! Néanmoins, il est regrettable que des territoires voient leurs bons élèves partir alors que ceux-ci sont une source potentielle de dynamisme économique, mais également social et démographique.
Élu d’un département rural, je suis d’autant plus sensible à cette problématique que je me bats chaque jour pour entretenir et préserver la vitalité de mon territoire. Pour cette raison, monsieur le ministre, je vous pose la question : là aussi, quels moyens et quels outils seront mobilisés pour y remédier ?
Valoriser la voie technologique est une bonne chose. Introduire des enseignements techniques en seconde, aussi. Instaurer des passerelles entre les filières, pourquoi pas ?
Je note également qu’une orientation « progressive et réversible » est envisagée. Elle doit permettre la reconnaissance d’un « droit à l’erreur » pour les élèves. Mais, là encore, a-t-on véritablement mesuré la juste place qui doit être celle des filières technologiques et professionnelles ?
On voit bien ce que pourraient être les passerelles annoncées, pour passer de la série ES à la série L ou S, par exemple. Mais ces passerelles sont-elles aussi aisément adaptables dès lors qu’un élève souhaiterait aller d’une filière technique ou professionnelle vers une filière générale et réciproquement ? Je n’en suis pas sûr !
Enfin, l’apprentissage des langues étrangères et l’accès à la culture seraient renforcés pour les lycéens. Nul ne saurait s’élever contre ces objectifs. Je note d’ailleurs, monsieur le ministre, que vous avez apparemment entendu l’inquiétude de ceux qui craignaient la disparition des enseignements en arts appliqués dans la filière professionnelle, disparition qui risquerait effectivement d’accroître l’inégalité des chances.
Mais, une fois de plus, est-on bien sûr que la mise en place de ces objectifs ne se heurtera pas à un principe de réalité qui les réduira à néant ?
Prenons le cas des langues étrangères : que chaque élève soit bilingue à la sortie du lycée serait une remarquable avancée. Pourtant, on peut douter que les besoins en matière linguistique soient les mêmes dans les filières techniques et professionnelles que dans les filières générales. Comment en tiendrez-vous compte ? Il existe là un réel danger de perpétuer l’inégalité entre les filières. Aussi, il ne faut pas que les langues étrangères et la culture redeviennent un outil de discrimination entre élèves et entre les filières.
Quelle organisation est donc prévue ? Vous voulez élargir le programme, mais, cela a été rappelé, vous affirmez dans le même temps que la réforme des lycées doit se faire, ainsi que l’a indiqué le Président de la République, à « taux d’encadrement constant » ! On est donc là confronté à une vraie contradiction : on renforcerait des inégalités culturelles qui, par un mécanisme cumulatif, ne feraient qu’accroître les inégalités sociales !
Le rapport Descoings ne donnait que des réponses approximatives à toutes ces questions. Les propositions du Gouvernement, ou plutôt celles du Président de la République, ne sont pas non plus des plus précises !
Je ne prendrai qu’un seul exemple pour illustrer mon propos. Le Président de la République a annoncé que des « liens permanents devraient être noués entre les lycées, les milieux professionnels et l’enseignement supérieur ». Mais, évoquer des « liens permanents », c’est plutôt vague ! Comment ce rapprochement entre les lycéens et les entreprises s’opérera-t-il ? S’agira-t-il pour les élèves d’aller faire des stages d’observation en entreprise, ou bien cela veut-il dire également que les entreprises interviendront dans les lycées ?
Ne vous méprenez pas sur mon propos, monsieur le ministre : je considère qu’il est effectivement nécessaire de faciliter l’insertion professionnelle des élèves. Dans cette perspective, il est logique de renforcer les liens qu’ils peuvent entretenir avec le monde de l’entreprise et, comme il y est fait référence, avec l’université également.
En revanche, je pense que des éclaircissements méritent d’être apportés quant aux modalités de cette rencontre. Il faut veiller à ce que la présence des lycéens en entreprise leur procure un réel bénéfice pédagogique et leur permette de préciser leurs attentes et leurs souhaits au regard de leur projet professionnel.
De même, on ne saurait tolérer que l’entreprise investisse n’importe comment le lycée. Je me souviens d’une vive polémique qui s’était développée voilà quelques années, au sujet d’une banque qui venait proposer aux élèves de la filière ES des jeux de société dans lesquels les élèves devaient se glisser dans le costume d’un trader. Vous en conviendrez, il est légitime de s’interroger sur le bien-fondé d’une initiative de ce genre !
Le lycée est le lycée ; l’entreprise, l’entreprise. Le premier ne doit pas se transformer en succursale ou en pouponnière de la seconde.
C’est donc dans un souci de préservation de l’institution éducative que je vous demande, monsieur le ministre, de préciser quels seront exactement ces liens que vous souhaitez encourager entre les entreprises et les lycées. Et je vous demanderai de le faire plus particulièrement en ce qui concerne la filière technologique, dont vous aurez compris qu’elle est particulièrement importante à mes yeux et me paraît, plus encore que la filière générale, concernée par cette proposition.
Ayant évoqué tous ces points, je conclurai mon propos en rappelant que l’enseignement technique et professionnel est certes un outil de démocratisation des lycées, et nous en sommes tous convaincus. Il reste cependant à répondre à cette question fondamentale : comment en fera-t-on l’outil d’ascension sociale qu’il devrait être ? Si nous n’y apportons pas de réponse, alors, on pourra dire que la réforme des lycées aura manqué son but, une fois de plus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’école a pour objectif la réussite de chacun. Elle est au cœur de notre socle républicain et détermine en grande partie l’avenir de notre jeunesse.
Nous disposons en France d’un excellent service public de l’éducation. Cependant, il pâtit aujourd’hui des arbitrages financiers qui lui sont imposés par le Gouvernement.
Les crédits de la mission « Enseignement scolaire » votés dans le budget pour 2009, même s’ils étaient en légère augmentation par rapport à 2008, ont encore une fois été insuffisants.
Vous nous promettez, monsieur le ministre, la réforme des lycées, la réforme de l’enseignement professionnel, la réforme du recrutement des enseignants et des instituts universitaires de formation des maîtres, ou IUFM, la refonte de l’école primaire autour de nouveaux programmes et de nouveaux horaires, l’accueil des jeunes enfants, et j’en passe… C’est très beau, mais il faudra y mettre la forme et, surtout, les moyens !
Dans ce contexte de réforme, il est impensable de continuer à supprimer des postes comme le Gouvernement s’entête à le faire. Les enseignants doivent être remplacés, des personnels accompagnants recrutés et formés, sans oublier des surveillants, des médecins, des psychologues, des infirmières scolaires et des personnels auxiliaires de vie scolaire, ou AVS, spécialisés pour la scolarisation d’élèves handicapés.
J’en viens au cœur du sujet qui nous réunit aujourd’hui. Le taux élevé d’échec ou d’abandon des étudiants inscrits en licence suffit à lui seul à expliquer l’extrême urgence du débat consacré au lycée.
La réforme de la classe de seconde, proposée à l’automne dernier par votre prédécesseur, monsieur le ministre, avait suscité une levée de boucliers, unanime et justifiée. Face à cette contestation, vous avez décidé de reporter une réforme bâclée. Lors de la discussion budgétaire, je m’étais d’ailleurs émue de la dramatique situation de blocage déclenchée par la précipitation du Gouvernement.
sur un sujet d’une telle importance, l’intervention du Parlement est devenue nécessaire. En effet, si la matière est essentiellement réglementaire, la représentation nationale ne peut rester à l’écart. Il est dommage que le débat arrive au Sénat après l’annonce du Président de la République.
Depuis cette crise, une concertation sur la réforme globale du baccalauréat et du lycée, de la seconde à la terminale, a été menée. Des missions se sont déplacées sur le terrain pour rencontrer les différents acteurs concernés – syndicats d’enseignants, lycéens, etc. – et elles ont publié leurs conclusions. Richard Descoings a remis son rapport au Gouvernement, Benoist Apparu a rendu celui dont il était chargé lorsqu’il était encore membre de l’Assemblée nationale.
Leurs propositions respectives, parfois concordantes, méritaient d’être retenues dans la réforme présentée le 13 octobre dernier : reconnaître le droit à l’erreur et assurer davantage de flexibilité dans l’orientation, lutter contre l’élitisme de certaines filières du baccalauréat, assurer un accompagnement personnalisé des élèves, améliorer l’enseignement des langues vivantes, valoriser la culture et aider les élèves à conquérir leur autonomie.
Je souhaite revenir aujourd’hui sur le point qui me semble fondamental : l’orientation des élèves.
Elle est presque toujours vécue comme extrêmement complexe, anxiogène, tardive et cloisonnée. Nous sommes dans une logique de filières hiérarchisées et ne prenant quasiment pas en compte, ou très mal, la perspective de l’insertion professionnelle. Les premières victimes de cette « culture de la désorientation » sont les enfants des milieux les moins favorisés.
Pour remédier à cette situation, il faut absolument introduire de la souplesse dans l’orientation et améliorer l’information des élèves et des parents, avant le collège. En effet, les premiers choix d’orientation décisifs se font dès la classe de troisième pour les élèves de seconde générale ou technologique, qui doivent choisir une ou plusieurs options, ainsi que pour les élèves orientés en seconde professionnelle.
Il serait donc intéressant de mettre en place une présentation uniforme et systématique des différentes voies de formation et de leurs débouchés, et ce, j’y insiste, le plus tôt possible.
Les journées de découverte, les rencontres ou le développement de stages avec tutorat, participeront à l’amélioration de l’orientation, à la meilleure intégration professionnelle de nos enfants et donc à la réussite de toute une classe d’âge.
Un élève qui envisagerait de changer de voie ou ne réussirait pas dans la filière choisie doit pouvoir être, d’abord, bien conseillé et, ensuite, accompagné. Il est donc impératif de développer davantage de passerelles entre les filières générales, les filières professionnelles et les entreprises.
Enfin, je m’interroge sur la place consacrée à l’art et à la culture au sein du lycée, en ce qui concerne tant les enseignements que la mise en place de nouveaux modes de diffusion de l’art. Je voudrais notamment être certaine qu’il y aura une véritable concertation entre le ministère de la culture et le ministère de l’éducation nationale sur la mise en commun des moyens et des programmes. Mme Catherine Morin-Desailly et M. Ivan Renar ont déjà évoqué ce thème, dont nous débattrons plus précisément la semaine prochaine.
Le sujet de cette réforme est vaste et le temps restreint de ce débat ne me permet pas d’en aborder tous les aspects, mais je forme le vœu que le Parlement soit de nouveau amené à en débattre dans un avenir très proche, notamment grâce aux procédures de contrôle dont nous disposons désormais.
Monsieur le ministre, les six grands axes de votre projet ne peuvent, sur le fond, que faire l’unanimité. Nous sommes tous d’accord pour dire que la réforme est nécessaire. Pourtant, mettre en œuvre les moyens pour atteindre ces objectifs d’ici à la rentrée 2010 me semble illusoire et je doute que le Gouvernement y consacre les fonds nécessaires. J’espère me tromper ! Mais nous aurons très vite l’occasion d’en avoir le cœur net, lors du prochain débat budgétaire. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. « Comment enseigner quand tout le monde ment ? » Permettez-moi, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de commencer mon intervention par une note pessimiste en citant la question que posait Charles Péguy et qui reste d’actualité, qu’on en approuve ou non les termes. En 2007, Alain Bentolila soulevait de nouveau le problème : « L’enseignement a réussi la massification scolaire, mais il a créé des ghettos scolaires et davantage d’illettrisme... Notre école se ment et ment à ses élèves, dont les frustrations seront d’autant plus exacerbées que le constat de leur insuffisance aura été déraisonnablement repoussé. »
Monsieur le ministre, nier que le lycée est en proie à de grandes difficultés, c’est prendre le risque d’une dégradation supplémentaire de notre système éducatif et méconnaître les immenses défis auxquels nos sociétés sont confrontées. Le lycée est pourtant une étape cruciale dans la constitution « des hommes en tant qu’hommes », pour reprendre la formule d’Emmanuel Kant. Il s’agit d’y former de futurs citoyens.
Ces difficultés concernent de nombreux aspects du système lycéen.
La première d’entre elles tient à l’organisation des enseignements. Il semble qu’une double hiérarchie se soit installée au fil des années au sein du système éducatif : d’une part, entre le lycée général et technologique et le lycée professionnel, victime d’une dévalorisation sociale, qui le fait apparaître comme l’institution refuge de jeunes en perdition ; d’autre part, entre les filières de la voie générale. Sa structure actuelle ne favorise en rien l’égalité des chances, car la filière scientifique est devenue une voie royale d’accès aux formations supérieures sélectives, prisée par des élèves issus des milieux sociaux favorisés : quatre bacheliers scientifiques sur dix sont enfants d’enseignants, de cadres ou de chefs d’entreprise, contre trois sur dix en L et en ES. De plus, la structuration des filières tend à enfermer les élèves dans des tuyaux disciplinaires desquels il leur est très difficile de s’extraire.
La deuxième difficulté a trait à l’organisation des filières qui résulte de l’orientation des élèves. Celle-ci engendre un stress permanent, tant pour les parents que pour les élèves, lesquels ont l’impression d’être les victimes d’un processus subi, en raison du manque de transparence sur les différents métiers et les formations y conduisant. Il ressort des consultations menées auprès des élèves et de leurs parents que l’orientation est une étape qui intervient trop tardivement, qui est enfermée dans une logique de filières hiérarchisées et qui ne prend pas en compte la perspective de l’insertion professionnelle et de la formation tout au long de la vie.
Enfin, la troisième difficulté renvoie à l’objectif même du lycée : préparer les élèves à l’insertion professionnelle. Or, aujourd’hui, le lycée est souvent, trop souvent, considéré comme une fin en soi et l’objectif d’emmener 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat y est pour quelque chose.
En outre, notre système éducatif est caractérisé par la médiocrité du niveau de nos lycéens en langues étrangères, en comparaison avec celui de nos partenaires européens. Nous ne pouvons nous le permettre alors que les mutations provoquées par la mondialisation nous imposent de mieux maîtriser plusieurs langues étrangères. L’enjeu est important : il s’agit de la compétitivité économique de la France.
Autre difficulté grave : le système français inspire une certaine mésestime de soi aux élèves qui se dirigent vers un lycée professionnel, convaincus qu’ils ne sont pas assez bons pour s’orienter vers un lycée général. Cette dévalorisation sociale est à l’origine d’une désaffection problématique pour les filières industrielles, notamment, alors même qu’elles donnent accès à de considérables gisements d’emplois.
D’un autre côté, les bacheliers des filières générales, effrayés par l’ampleur des effectifs en premier cycle universitaire, se précipitent vers des formations du type BTS ou IUT, prenant ainsi la place de bacheliers des filières technologiques, évincés des lieux d’études qui leur sont pourtant destinés.
Les difficultés sont légion et nous ne pouvons délaisser plus longtemps le lycée, institution symbole de la République.
Au mois de septembre, une délégation de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat s’est rendue en Finlande pour étudier le système éducatif. La Finlande figure au premier rang des enquêtes du Programme international pour le suivi des acquis des élèves, le PISA, conduites par l’OCDE. Ce système éducatif est fondé sur un principe d’autonomie et l’enfant est au cœur du système. Les résultats paraissent excellents et la compétitivité de ce petit pays de 5 millions d’habitants est remarquable. Si le système n’est pas transposable, de bonnes idées sont à prendre et il y a, en tout cas, de quoi nourrir le débat.
Nous devons mener une réflexion d’ensemble sur notre système éducatif, mais cessons de rêver au grand soir de l’éducation, comme l’a si bien dit Richard Descoings. Attachons-nous d’abord à améliorer ce qui peut être amélioré, à réformer par petites touches les déséquilibres existants.
J’entends dire ici et là que la réforme n’est pas nécessaire, que tout va bien dans de nombreux lycées. Mais les premiers à réclamer le statu quo sont ceux qui bénéficient de cette hiérarchie entre les filières et qui sont issus des milieux favorisés. Richard Descoings a justement fait remarquer, lors de l’audition organisée au Sénat, que les professeurs étaient d’anciens bons élèves. Or l’égalité des chances doit rester au cœur des principes de notre système éducatif.
Au-delà de nos divergences, gardons à l’esprit les trois objectifs qui doivent continuer d’animer le lycée : premièrement, la transmission des savoirs et des connaissances selon des parcours de formation diversifiés ; deuxièmement, la construction progressive de la citoyenneté par le développement de l’esprit critique et la maîtrise d’une culture commune ; troisièmement, enfin, la préparation à l’insertion professionnelle, en développant notamment l’esprit d’initiative et la créativité.
Monsieur le ministre, devant ces objectifs ambitieux, mais indispensables, trois impératifs s’imposent à nous pour réformer le lycée. Nous devons parvenir à construire un lycée plus juste, plus efficace et plus performant pour nos adolescents.
Comment, d’abord, pouvons-nous rendre le lycée plus juste ?
L’égalité des chances est le fondement même de notre modèle républicain méritocratique. Il a orienté notre système éducatif depuis sa formation. Or, aujourd’hui, rares sont les élèves et les parents qui y croient encore, et l’ascenseur social ne fonctionne plus.
Pour rétablir l’égalité des chances, nous devons, d’une part, mettre fin aux hiérarchies qui se sont constituées au fil du temps entre les voies et les filières. Tout en maintenant une distinction entre la voie technologique et la voie générale, nous devons entreprendre une véritable rénovation des filières technologiques : cela passe par la diffusion de la culture technologique comme élément de la culture commune délivrée pendant l’année de seconde.
Une plus grande transparence de ces filières doit aussi s’associer à une volonté politique forte afin de renforcer l’accès de celles-ci à l’enseignement supérieur.
Nous devons, d’autre part, mettre fin à la hiérarchie entre les filières de la voie générale. Gardons un choix large de spécialisations avec les trois séries S, ES et L, mais remettons ces trois filières sur un pied d’égalité.
La filière littéraire, délaissée par les élèves, doit faire figure de filière de pointe pour ce qui concerne les langues étrangères, mais il convient parallèlement d’y faire une plus grande place à la culture scientifique. En revanche, la série S doit gagner en spécialisation scientifique pour préparer à la formation de chercheur et d’ingénieur. Nous éviterons ainsi que les bons littéraires s’inscrivent en filière scientifique pour entamer ensuite des études de lettres, de droit, de sciences politiques ou de commerce.
Donner les mêmes chances de réussite à l’ensemble des élèves, c’est leur assurer une totale liberté de choix pour leur orientation. Le processus d’orientation doit être rendu plus lisible et le choix de chaque élève doit répondre à un projet professionnel concret. Il est indispensable de créer des liens avec des professionnels, des étudiants, qui viennent faire part de leur expérience. Le lycée doit être considéré non plus comme une fin en soi, mais comme une des étapes précédant la formation et l’insertion professionnelle.
De plus, il devrait être possible pour l’élève de changer de décision après s’être orienté. Les passerelles entre les filières à l’intérieur du lycée doivent être prévues si l’on ne veut pas que l’orientation soit ressentie comme un choix imposé, subi. On doit mettre fin à l’enfermement dans une filière sans possibilité d’une seconde chance. Cette situation est devenue inacceptable.
D’autre part, il ne faut surtout pas négliger la mésestime de soi qui habite les élèves et qui est bien souvent à l’origine d’un mauvais choix pour leur orientation. Nombreux sont ceux qui, venant d’un milieu défavorisé, se résignent à une filière par manque d’information ou d’incitation de la part de leurs parents. Au nom du principe d’égalité des chances, donnons à ces jeunes les moyens correspondant à leurs capacités, leurs ambitions. La mise en place d’heures supplémentaires d’accompagnement pour la réalisation des devoirs devra permettre de compenser les inégalités de capital culturel entre les familles.
L’idéal serait que les élèves puissent choisir leur filière selon leurs aptitudes et leur motivation. Il faut les guider vers cet objectif. Il faut valoriser chaque filière et faire en sorte qu’il n’y ait pas de hiérarchie, chaque orientation étant reconnue et respectée.
Notre deuxième impératif est de redonner au lycée toute son attractivité. Comment éviter que, chaque année, des milliers de jeunes quittent le système éducatif sans aucun diplôme ni aucune qualification ?
Dans son Plaidoyer pour une diversité républicaine, Philippe Joutard résume bien le défi qui se pose à nous : « Plus un enseignement devient de masse, plus il doit s’individualiser s’il veut être efficace et attractif. »
De nombreux jeunes issus des filières technologiques et professionnelles disent avoir été conduits dans cette voie par défaut, pour la simple raison que leurs résultats ne leur permettaient pas de prétendre à une filière générale. On passe donc outre toutes les possibilités qu’offrent ces filières. Faute de transparence, ces jeunes ne savent pas dans quelle formation s’inscrire, à quel métier se destiner, et ce dans un sentiment général de mésestime de soi et de dévalorisation sociale.
Dès lors, il faut rendre plus visibles des structures comme les lycées professionnels et technologiques, qui offrent des formations diversifiées et, à terme, de réelles perspectives d’embauche dans des secteurs en pleine croissance, tels le génie électrique et l’informatique industrielle, l’informatique et les réseaux de télécommunications, qui offrent de nombreux emplois, sans parler de tous les métiers du bâtiment.
Accroître la lisibilité des filières technologiques, consentir un effort national sur la valorisation des filières et de leurs débouchés grâce à des parcours de réussite, offrir aux étudiants issus de ces filières une meilleure accessibilité aux BTS et aux IUT, faire de la filière STI une formation de pointe : voilà une série de mesures qui permettront de renforcer l’attractivité des filières technologiques.
Troisième impératif : rendre le lycée plus performant.
Le lycée général ne peut être une fin en soi, car, contrairement au lycée professionnel, il doit nécessairement préparer la plupart de ses élèves à poursuivre des études dans l’enseignement supérieur. Cet objectif répond à besoin économique, social et politique. Comment, en effet, pouvons-nous prétendre affronter un monde globalisé si nous ne formons pas les chercheurs et les cadres diplômés en nombre suffisant ?
Le lycée est, de fait, une étape cruciale dans la formation des jeunes, comme le montre l’exemple finlandais. Ce petit pays réussit la performance d’être l’un des plus innovants au monde, avec l’un des plus forts taux de brevets. Cette créativité étonnante permet à la Finlande d’occuper l’une des premières places, à l’échelle mondiale, en termes de compétitivité économique.
Les liens entre le monde professionnel et le lycée doivent être démultipliés. Les établissements doivent offrir la possibilité aux élèves de rencontrer des personnes susceptibles de les guider dans le choix de leur orientation : salariés, chefs d’entreprise, représentants de diverses professions. Sur ce point, les propositions de Richard Descoings – regrouper les anciens d’un même lycée afin de mettre en avant leurs parcours de réussite et donner la possibilité aux élèves d’effectuer plusieurs stages en entreprise – sont très pertinentes.
Le lycée doit aider les élèves à trouver leur place dans la société : il doit les initier à la rédaction d’une lettre de motivation et à l’élaboration d’un curriculum vitae, car les élèves sont inégaux devant ces exercices selon le niveau socioprofessionnel de leurs parents et leur origine socioculturelle.
En outre, les langues étrangères doivent faire l’objet d’une attention toute particulière. Trop souvent, nous entendons que les élèves français n’ont pas un bon niveau en anglais, ou plus généralement en langues étrangères. Les conditions et les formats d’enseignement doivent être repensés, de même que les formes d’évaluation. Nous y gagnerons en efficience et en cohérence.
Je souhaite vous faire part, monsieur le ministre, de plusieurs propositions dont la mise en œuvre pourrait atténuer, j’en suis sûre, les frustrations dont sont victimes nos lycéens.
Ne pourrions-nous pas mettre en place, de la seconde à la terminale, une heure quotidienne d’anglais ou d’une autre langue vivante ? On trouve ce genre de pratiques en Allemagne, notamment, et l’on sait que les lycéens allemands parlent mieux l’anglais que les lycéens français.
Ne pourrions-nous pas envisager que les programmes télévisés des chaînes publiques fassent une plus grande place aux langues étrangères, en particulier à l’anglais, en sous-titrant certains reportages ou films diffusés en langue originale au lieu de traduire systématiquement ? Cette pratique, qui a cours dans d’autres pays, permet de se familiariser avec d’autres langues.
Ne pourrions-nous pas encourager la mobilité internationale en prévoyant des avantages fiscaux pour les parents souhaitant envoyer leurs enfants à l’étranger via des organismes spécialisés dans les séjours linguistiques ? Pour ne pas pénaliser les familles les moins favorisées, nous pourrions octroyer des bourses aux élèves méritants afin qu’ils effectuent des séjours linguistiques. Une telle mesure me paraîtrait plus justifiée que les actuelles déductions fiscales dont certains parents bénéficient lorsqu’ils payent à leurs enfants des cours privés. Financer indirectement ce type d’enseignement revient à admettre que l’école n’est plus assez performante et concourt à la dégradation progressive de notre système éducatif.
Ne pourrions-nous pas également refonder le rôle des assistants de langues étrangères présents dans les lycées, afin d’optimiser leur utilité pédagogique ?
Il faudrait aussi que chaque lycée de France soit jumelé avec un établissement d’un autre pays d’Europe et, bien sûr, que l’usage des nouvelles technologies soit développé tant pour la communication que pour l’apprentissage.
Enfin, nous ne pourrons rendre nos lycées plus justes, plus attractifs, plus performants, si nous ne leur donnons pas la liberté pédagogique nécessaire. Les lycées doivent relever le pari de l’égalité des chances, que nous voulons gagner. Pour cela, ils doivent être capables de proposer des remèdes adaptés à chaque situation. Ils doivent pouvoir gérer à leur guise les heures d’accompagnement et aménager avec souplesse l’organisation des classes. Ce gain d’autonomie serait soumis à évaluation : les établissements devraient publier un ensemble d’indicateurs démontrant leur capacité à tirer profit de leur liberté pédagogique. Comme l’explique Benoist Apparu dans son rapport d’information, la réforme du lycée offre à la nation une occasion unique de renouveler sa confiance aux enseignants ainsi qu’aux chefs d’établissement.
Monsieur le ministre, le Président de la République a marqué sa volonté de réformer le lycée et vos propositions vont dans le bon sens. Il faut que, dans notre pays, aucun jeune ne soit laissé au bord de la route et que la nouvelle génération puisse faire progresser le niveau de compétitivité de la France. Je peux vous assurer que l’ensemble du groupe UMP soutient votre action. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)