M. Alain Houpert. Je partage la préoccupation de M. Barbier. Cette disposition permet en effet au directeur de l'organisme local, en lien avec l'échelon médical, de proposer au médecin d'atteindre un objectif de réduction des prescriptions en cause dans un délai maximum de six mois. Le défaut de réalisation de l'objectif est sanctionné.
Sous couvert de simplification, cet article est en fait plus coercitif encore que les dispositions existantes, en laissant tout pouvoir au directeur pour fixer aux médecins des objectifs statistiques inatteignables, et donc rendre la sanction financière inéluctable, ce que nous ne souhaitons pas.
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour présenter l'amendement n° 376.
M. Dominique Leclerc. Il est défendu, monsieur le président.
M. Alain Milon. L’amendement n° 479 également, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends bien la préoccupation de nos collègues : ils se font l’écho des professionnels de santé, qui ont le sentiment que ce dispositif va être plus coercitif que celui qui s’applique actuellement.
Actuellement, les médecins dont on constate qu’ils prescrivent de manière excessive, au-delà d’une moyenne régionale, sont mis sous entente préalable. Ce dispositif est déjà assez contraignant pour les professionnels.
Aujourd’hui, on propose un dispositif beaucoup plus souple, avec des critères affinés, de manière qu’un dialogue s’instaure entre le médecin et la caisse primaire d’assurance maladie. Cela me paraît aller plutôt dans le sens que vous souhaitez, mes chers collègues ! (Mme la ministre, marque son approbation.)
Je peine donc à comprendre l’objection des professionnels de santé qui, par l’intermédiaire de leurs syndicats, vous ont « vendu » cet amendement. (Mme Marie-Thérèse Hermange proteste.)
M. Gilbert Barbier. Le terme « vendu » n’est pas acceptable !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous avez raison, mon cher collègue ; je le retire. Il est vrai que personne dans cette assemblée ne dépose d’amendements soufflés par des lobbies… En tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales, je suis bien placé pour savoir que les syndicats ne cherchent jamais à influencer les parlementaires…
Cela étant dit, le système proposé me semble beaucoup plus responsable et beaucoup moins coercitif que le dispositif existant. Il instaure une coresponsabilité de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Premièrement, le médecin peut refuser l’objectif proposé et décider de poursuivre la procédure telle que nous la connaissons actuellement. S’il décide de ne rien changer, il a toutes les manettes en main ! C’est d’ailleurs plus le manque que l’excès de contraintes qui pourrait nous être reproché. Il s’agit en effet d’une procédure librement consentie, assortie d’un objectif de réduction partagé entre l’assurance maladie et le praticien concerné.
Deuxièmement, la fixation de l’objectif est encadrée, la convention étant cosignée avec le médecin-conseil chef de service. Il ne s’agit pas de présenter des objectifs de prescriptions irréalistes : ils ne pourront d’ailleurs pas être inférieurs à la moyenne régionale constatée pour les praticiens ayant une activité comparable, ce qui constitue vraiment une limite basse, et c’est là une garantie importante.
Ces deux contraintes imposent de prendre en compte des éléments d’ordre médical et constituent autant de garde-fous contre la fixation, par le directeur, d’objectifs inatteignables. Tout au plus ce dernier pourra-t-il proposer au médecin concerné d’adopter une pratique similaire à celle de ses confrères ayant une activité comparable. Si le médecin ne veut pas s’y plier, il aura toute liberté de refuser.
Troisièmement, s’agissant du caractère coercitif de la procédure, comme l’a dit fort justement M. le rapporteur général, celle-ci présente des avantages importants pour le praticien, qui poursuivra son activité normalement sans être soumis à un contrôle continu du service médical, avec les lourdeurs que cela peut engendrer, pour lui comme pour ses patients.
Bien sûr, une pénalité limitée pourra être prononcée si l’objectif n’est pas atteint, mais c’est un corollaire indispensable afin d’éviter tout effet d’aubaine. Toutefois, cette pénalité sera vraisemblablement exceptionnelle, car on imagine mal un praticien entrer volontairement dans un dispositif et ne pas se donner les moyens de parvenir à ses fins.
Enfin, je le répète, le professionnel qui estimera cette procédure trop coercitive pourra librement la refuser. C’est donc pour lui un gain.
Voilà pourquoi, compte tenu de ces toutes ces précisions sur le caractère facultatif et volontariste du dispositif, qui se substitue, si le praticien le souhaite, à des démarches coercitives, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces quatre amendements identiques. Cette disposition que plusieurs d’entre vous souhaitent supprimer représente en fait un vrai gain de liberté.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 120 rectifié, 219, 376 et 479.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas les amendements.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 30.
(L'article 30 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 30
M. le président. L'amendement n° 432, présenté par Mme Escoffier et MM. Charasse et Milhau, est ainsi libellé :
Après l'article 30, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le premier alinéa de l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les travailleurs indépendants visés à l'alinéa précédent, ainsi que les associés uniques personnes physiques non salariés de sociétés à responsabilité limité visées à l'article L. 223-1 du code de commerce, lorsqu'ils exercent une activité salariée dont la durée hebdomadaire est au moins égale à 17,5 heures, peuvent, sur simple demande, être exonérés des cotisations perçues au titre des assurances maladie par les organismes visés à l'article L. 611-8. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 512, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 30, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Le 14° de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 14° Le montant de la contribution annuelle des caisses nationales d'assurance maladie au développement professionnel continu ; ».
II - Avant le dernier alinéa de l'article L. 182-2-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Arrête le montant de la contribution annuelle des caisses nationales d'assurance maladie au développement professionnel continu pour chaque catégorie de professionnel mentionné aux articles L. 162-5, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-12-9, L. 162-14, L. 162-16-1 et L.162-32-1.»
III - Le présent article entre en vigueur à la date d'effet de la convention prévue au XXI de l'article 59 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a simplifié le dispositif de formation professionnelle continue des professionnels de santé.
Les fonds publics destinés au financement de ce qu’on appelle désormais le DPC, c'est-à-dire, monsieur le président (Sourires.), le développement professionnel continu,…
M. François Autain. Oui, le nom a changé !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … sont regroupés dans un fonds unique dont a la charge un organisme gestionnaire ad hoc, en lieu et place des organismes de gestion conventionnels.
L’article 59 de la loi HPST a cependant prévu que les contributions de l’assurance maladie au titre de chaque profession exerçant en libéral étaient fixées par les conventions ou avenants à ces conventions. Cela signifie que, si la vie conventionnelle est bloquée pour une raison ou une autre, les financements de l’assurance maladie au profit du développement professionnel continu seront bloqués.
Par cet amendement, je propose que les partenaires conventionnels conservent la compétence de l’évaluation des besoins de formation, mais que ce soit le collège des directeurs de l’UNCAM qui arrête le montant annuel des contributions de l’assurance maladie.
Ce dispositif parachève donc celui qui a été mis en place par la loi HPST. Ainsi, le financement du développement professionnel continu et l’indemnisation des professionnels de santé libéraux seront garantis en cas de blocage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. On ne peut être que favorable à cet amendement !
Le développement professionnel continu, nouvelle désignation de la formation professionnelle continue, a été rendu obligatoire voilà douze ans, en 1997. Or, à ce jour, en raison des multiples modifications législatives qui sont intervenues depuis lors, cette disposition n’est toujours pas entrée en vigueur.
En outre, se pose le problème du financement de cette formation professionnelle continue. Un fonds a été créé à cet effet. Or, madame la ministre, vous n’ignorez pas que celui-ci est abondé à hauteur de 98 % par l’industrie pharmaceutique. De fait, on est bien obligé de s’interroger sur l’indépendance de la formation qui est dispensée aux médecins à l’égard de cette industrie, dont le métier, chacun le sait, est de fabriquer et de commercialiser des médicaments. Dans la mesure où les médecins sont prescripteurs, on ne peut que s’interroger sur l’éventuelle existence de liens d’intérêt préjudiciables à la qualité de la formation dispensée.
Autant je pense que la création de ce fonds a été un progrès, autant je considère qu’il faudra malheureusement revoir son financement, en prévoyant notamment une participation de la sécurité sociale. Nous renouerions d’ailleurs ainsi avec une pratique qui avait cours dans le passé. Il conviendrait néanmoins revoir cette participation à la hausse, étant entendu que cela ne suffira pas à financer entièrement la formation professionnelle.
La question est de savoir si l’État et les médecins veulent s’impliquer dans le financement de cette dernière, afin de rendre la contribution de l’industrie pharmaceutique aussi faible que possible. D’ailleurs, l’inspection générale des affaires sociales avait rédigé un rapport dans lequel elle exprimait très clairement le vœu que ce mélange des genres prenne fin. C’est à cette occasion qu’elle avait proposé la création de ce fonds.
Idéalement, il faudrait trouver d’autres sources de financement que celles que procure l’industrie pharmaceutique, qui n’a rien d’une entreprise philanthropique.
M. François Autain. Si celle-ci finance la formation médicale continue, c’est bien parce qu’elle y trouve son intérêt en matière de prescriptions médicales. Or, si les médecins prescrivent moins, l’assurance maladie ne s’en portera que mieux. C’est pourquoi nous devons nous efforcer d’atteindre ces objectifs, tout en préservant la qualité des soins dispensés.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 30.
Je constate que l’amendement n° 512 a été adopté à l’unanimité des présents.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 215 est présenté par MM. Houpert et Milon.
L'amendement n° 372 est présenté par M. Leclerc.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 30, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
...° Le contenu et les contreparties financières liées aux engagements individuels de médecins conventionnés. Ces engagements peuvent porter sur la prescription, la participation à des actions de dépistage et de prévention, des actions destinées à favoriser la continuité et la coordination des soins, la participation à la permanence de soins, le contrôle médical, ainsi que toute action d'amélioration des pratiques, de la formation et de l'information des professionnels.
La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 215.
M. Alain Houpert. Il s’agit d’un amendement de précision, pour lequel valent les arguments que j’ai développés en présentant les amendements nos 216 et 217.
M. Dominique Leclerc. L'amendement n° 372 est défendu, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le Gouvernement et la commission se sont déjà largement exprimés sur l’articulation entre les CAPI et les négociations conventionnelles. Aussi, je demanderai à nos collègues de bien vouloir retirer ces amendements ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Houpert. Je retire l'amendement n° 215, monsieur le président.
M. Dominique Leclerc. Je retire également l'amendement n° 372, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 215 et 372 sont retirés.
L'amendement n° 15, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 30, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La convention ou, à défaut, le règlement arbitral mentionné à l'article L. 162-14-2, définissent un secteur d'exercice auquel les médecins relevant de certaines spécialités peuvent adhérer et dans lequel ils ne peuvent pratiquer des dépassements encadrés que pour une partie de leur activité. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je défendrai simultanément les amendements nos 15 et 16, qui concernent tous deux le secteur optionnel.
M. le président. J’appelle donc dès à présent en discussion l’amendement n° 16, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
Après l'article 30, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 6112-3 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Seuls peuvent être appelés à assurer une ou plusieurs des missions de service public mentionnées à l'article L. 6112-1 les établissements privés dans lesquels plus de la moitié des médecins pouvant exercer dans le secteur d'activité visé au dernier alinéa de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale exercent dans ce secteur ou dans le secteur à tarifs opposables. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, je ne retracerai pas l’histoire de ce secteur optionnel, dont il a déjà été beaucoup question au cours de la discussion générale.
Le 15 octobre dernier, l’assurance maladie et certains syndicats de médecins ont signé avec l’UNOCAM, l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaires, un protocole d’accord sur la mise en place du secteur optionnel, à la suite d’un amendement adopté à l’initiative du député Yves Bur lors de la réunion de la commission mixte paritaire sur la loi HPST et qui faisait lui-même écho à une déclaration du Président de la République.
Le présent amendement tend donc à prévoir la mise en œuvre de ce secteur optionnel par la convention médicale ou, à défaut, par le règlement arbitral. Ce secteur optionnel peut être tout à fait vertueux pour limiter les dépassements d’honoraires et il est donc important qu’il entre en vigueur le plus rapidement possible.
L’objectif est d’inciter la majorité, voire, idéalement, la totalité des médecins actuellement en secteur 2, c'est-à-dire ceux qui pratiquent des dépassements d’honoraires, à rejoindre ce secteur optionnel.
Dans le même temps, les médecins du secteur 1 se demandent pourquoi ils ne pourraient pas rejoindre, eux aussi, le secteur optionnel. Or la migration des médecins du secteur 1 vers le secteur optionnel aurait un effet inflationniste sur les dépenses de santé, ce qui n’est évidemment pas souhaitable.
Aussi, il est impératif que ce qui résultera des négociations conventionnelles soit aussi précis que possible sur ce point. J’ai cru comprendre que l’UNOCAM adhérait à cette position, du moins si j’en crois un courrier électronique qu’elle m’a adressé dès qu’elle a eu connaissance des amendements de la commission. Cela étant, la cohérence n’est pas toujours parfaite entre ce que ses responsables disent et ce qu’ils font…
J’ajoute que le développement du secteur optionnel devrait aider le Gouvernement dans ses efforts pour faire converger les tarifs des hôpitaux publics et privés. C’est pourquoi l’amendement n° 16 vise à inciter les médecins relevant du secteur 2 à rejoindre le nouveau secteur optionnel en prévoyant que seuls les établissements privés dont la majorité des médecins exerce en secteur 1 ou en secteur optionnel pourront exercer des missions de service public, en application de la loi HPST.
Les responsables des établissements privés m’ont objecté que, si une majorité de leurs médecins ne voulait pas rejoindre le secteur optionnel, je privais les établissements en question de la possibilité d’exercer des missions de service public.
Quant à Mme la ministre, elle a invoqué le fait que la formation des jeunes médecins faisait partie des missions de service public et qu’il serait fort inopportun d’empêcher ainsi certains établissements privés d’assurer cette formation. Il conviendra évidemment, dans le cadre des négociations conventionnelles, de trouver une voie qui permette que cette activité indispensable puisse continuer à se dérouler dans les établissements qui ne rempliraient pas les conditions fixées dans l’amendement n° 16.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur ces sujets, en particulier sur celui qui est abordé par l’amendement n° 15, lors de la discussion générale.
L’UNCAM, l’UNOCAM et deux syndicats représentatifs de médecins ont signé, le 15 octobre dernier, non pas un avenant à la convention, mais un protocole d’accord définissant les modalités de mise en place du secteur optionnel. Bien qu’il laisse encore beaucoup de questions en suspens, ce protocole constitue une amorce positive et une base de discussion.
La mise en place effective de ce nouveau secteur d’exercice nécessite la signature et l’approbation d’un texte conventionnel. Beaucoup de points restent à régler puisque l’objectif est de provoquer une migration significative des praticiens du secteur 2 vers le secteur optionnel.
Comme l’a dit excellemment M. le rapporteur général, il ne s’agit pas de vider le secteur 1 au profit du secteur optionnel. Car le but n’est pas d’assurer une meilleure rémunération des médecins, il est de permettre à nos concitoyens de bénéficier d’un réel accès aux soins à des tarifs opposables. Là est le cœur du débat.
Sur un sujet aussi sensible, je souhaite que nous laissions les partenaires conventionnels discuter sans leur mettre le couteau sous la gorge. Les placer sous une menace juridique ne serait pas de bonne politique. Leur imposer une obligation de résultat sur le secteur optionnel dans la convention pourrait perturber l’équilibre de la négociation et produire des effets contraires : en particulier, cela fragiliserait les chances d’aboutir en cette période rendue difficile par la perspective des élections des représentants des partenaires conventionnels, qui se dérouleront en février 2010 et à la suite desquelles les résultats ainsi obtenus pourraient être remis en cause.
La rédaction actuelle de l’article L. 162–5 du code de la sécurité sociale n’empêche pas la définition ni la mise en œuvre par voie conventionnelle du secteur optionnel, qui peut aussi, en application du code de la sécurité sociale, être défini par règlement arbitral. Il n’y a donc, malgré le calendrier de la vie conventionnelle, aucune raison de précipiter les choses. Dans ces conditions, je vous serais donc reconnaissante, monsieur le rapporteur général, de retirer l’amendement no 15. À défaut, j’y serai défavorable.
Je suis également défavorable à l’amendement n° 16, qui tend à réserver l’exercice des missions de service public aux établissements de santé privée dont la majorité des médecins exercent en secteur 1 ou en secteur optionnel.
Je rappelle que la loi HPST exige l’absence de dépassement d’honoraires pour les activités correspondant à des missions de service public dans les établissements de santé. Les missions de service public qui donnent lieu à facturation ne peuvent donc être réalisées qu’à tarifs opposables. La loi est sans ambiguïté sur ce point.
Le secteur optionnel n’étant pas encore défini, il est prématuré de prévoir dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale une disposition qui anticipe sa création.
Par ailleurs, certaines missions de service public ne font pas l’objet de tarification au sens strict et ne donnent donc pas lieu à dépassements d’honoraires. Je pense, entre autres, aux missions de recherche, d’enseignement et de formation initiale des professionnels de santé. Il serait peu productif, pour ne pas dire contre-productif, de subordonner l’exercice de ces missions à un seuil de médecins pratiquant en secteur 1 ou en secteur optionnel.
J’ajoute qu’en matière de formation de médecins, compte tenu des difficultés que l’on constate pour trouver des terrains de stage, il convient de pouvoir s’adresser au plus grand nombre possible d’établissements de santé, même s’ils ne correspondent pas aux critères que vous avez fixés.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, vous aurez compris que ces amendements constituent en fait un appel fort en direction du Gouvernement afin que nous avancions sur ce dossier.
M. Xavier Bertrand, lorsqu’il occupait vos fonctions, …
M. François Autain. Cela fait quatre ans !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … parlait déjà du secteur optionnel. Or, depuis, il ne s’est rien passé. Il aura fallu attendre une déclaration du Président de la République pour que la situation évolue un peu.
Je tiens également à rappeler – et ce faisant, j’espère ne pas être cruel – que j’avais défendu des amendements analogues lors de la discussion du projet de loi HPST. Le rapporteur, M. Alain Milon, en avait demandé le retrait. Vous aviez fait de même en avançant des arguments identiques à ceux que vous développez aujourd’hui.
C’est finalement un amendement d’Yves Bur qui a fixé une date limite, ce qui a amené l’ensemble des syndicats de médecins et l’UNOCAM à signer un protocole.
Comme on peut le constater, lorsque la volonté politique s’exprime, et pour peu qu’on leur mette l’épée dans les reins, les acteurs conventionnels acceptent de se mettre autour de la table pour négocier et, en l’occurrence, établir les bases de ce pourraient être les futurs accords conventionnels.
Ma grande crainte est qu’on ne laisse encore traîner les choses. En tout état de cause, il est illusoire de penser qu’il y aura du nouveau avant les élections de février prochain, le mandat de l’actuelle représentation des acteurs conventionnels arrivant à échéance le 11 février. Cela provoquera le report des discussions d’au moins une année, voire plus.
On ne peut présager du résultat des élections, mais je crains que la question du secteur optionnel ne soit abordée qu’au bout du bout des nouvelles négociations conventionnelles. On discutera de bien d’autres sujets avant de s’y intéresser ! Autrement dit, si l’on ne pousse pas les feux, ce dossier risque fort de traîner.
Je souhaite donc qu’au moins l’amendement no 15 soit adopté afin que l’on puisse évoquer ce sujet en CMP avec nos collègues de l’Assemblée nationale. Il importe en effet d’affirmer notre volonté d’avancer. Nous sommes suffisamment nombreux à dénoncer le poids toujours plus important des dépassements d’honoraires dont pâtissent nos concitoyens pour ne pas essayer de trouver une porte de sortie.
M. François Autain. C’est sûr !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement no 16, j’en conviens, madame la ministre, présente, dans l’état actuel de la législation, plus d’inconvénients que d’avantages. Il relève plus de l’affichage que du concret et son application soulèverait quelques difficultés.
La commission ne s’est pas réunie pour décider du sort de cet amendement, mais je me crois autorisé à le retirer.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je tiens tout d’abord à remercier M. Alain Vasselle d’avoir entendu mes arguments et retiré l’amendement n° 16.
En ce qui concerne le protocole du 15 octobre dernier, je constate que les garanties que vous souhaitez, monsieur le rapporteur général, n’ont pas été réunies puisque la plateforme exige des travaux complémentaires extrêmement importants.
Si les engagements de l’assurance maladie sont d’une grande clarté, force est de reconnaître que ceux des professionnels de santé sont beaucoup plus flous.
Je comprends bien le sens de votre propos, monsieur le rapporteur général. Vous souhaitez, avant le terme de l’actuelle convention, forcer un peu le pas et obliger les partenaires conventionnels à achever un travail qui est juste entamé.
J’ai envie de vous retourner cette argumentation. Si nous procédons ainsi, nous nous exposons à un double risque.
En premier lieu, nous risquons d’aboutir à un accord qui ne serait pas satisfaisant pour le Gouvernement parce qu’il n’apporterait pas la principale garantie que nous voulons, c’est-à-dire, je le répète, assurer un meilleur accès aux soins pour nos concitoyens. Encore une fois, notre objectif n’est pas d’apporter une rémunération supplémentaire aux médecins.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous sommes d’accord !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais il semble que certains partenaires ne s’inscrivent pas dans cette logique.
En forçant le pas, je crains que nous n’aboutissions à un règlement conventionnel qui ne concrétiserait pas cette garantie, en d’autres termes, à un engagement conventionnel a minima.
En second lieu, un accord conventionnel obtenu à marche forcée pourrait être immédiatement dénoncé par les partenaires conventionnels issus des prochaines élections.
Cela reviendrait à collectionner les désavantages : aboutir à un mauvais accord que nous pourrions être obligés de dénoncer et qui, si nous ne le faisions pas, risquerait de l’être par les partenaires conventionnels nouvellement élus.
Monsieur le rapporteur, je souhaite vraiment que vous prêtiez attention aux risques de la démarche que vous proposez.