Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Nous poursuivons la démarche engagée à travers les CAPI, puisque la prescription des génériques fait partie des objectifs assignés aux médecins qui souscrivent un tel contrat.
Cette démarche volontariste me semble extrêmement intéressante. Les CAPI rencontrent certes un grand succès, puisque 12 000 ont été signés. Cependant, certains médecins se refusent à le faire, ce qui motive la mesure plus coercitive prévue par M. Bur.
Sur cette question, je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Monsieur le rapporteur général, je ne me sens nullement responsable du fait que nous soyons obligés de travailler un samedi, un dimanche, et peut-être un lundi sur ce PLFSS !
M. François Autain. Ce n’est pas nous qui avons la maîtrise de l’ordre du jour, c’est le Gouvernement, et je dois reconnaître qu’il se débrouille extrêmement mal. Peut-être faudrait-il changer de gouvernement pour parvenir à un ordre du jour mieux maîtrisé ?
M. François Autain. En tout cas, actuellement, nous travaillons dans des conditions scandaleuses.
Quoi qu’il en soit, cela ne doit pas nous empêcher de prendre le temps de délibérer et de nous exprimer – dans la mesure, bien entendu, où le règlement nous le permet. Je vais donc mettre à profit les quatre minutes et quarante-cinq secondes du temps de parole qu’il me reste pour vous faire part de ce que je pense de l’article 29 quinquies et des amendements tendant à sa suppression.
L’article qui nous est parvenu de l’Assemblée nationale procède des meilleures intentions du monde puisqu’il s’agit de lutter contre la tendance des médecins à ne pas prescrire de génériques. Cela dit, la faute ne leur en revient pas exclusivement : ils y sont contraints, ainsi que Mme la ministre l’a enfin reconnu à l’instant, par la pression qu’exercent sur eux les laboratoires, qui les incitent à prescrire des fausses nouveautés, ne figurant évidemment pas au répertoire des génériques.
En effet, pour que le pharmacien puisse éventuellement substituer un générique au médicament prescrit par le médecin, encore faut-il que le médicament princeps soit inscrit dans ce répertoire. L’astuce utilisée par les laboratoires pour contourner la difficulté consiste à sortir sans arrêt de nouveaux médicaments. Cela a déjà été dit, la Commission de la transparence, aidée par le Comité économique des produits de santé, identifie chaque année de 250 à 300 nouveaux médicaments considérés comme de fausses innovations et qui permettent aux médecins de « s’évader » du répertoire.
C’est pourquoi je comprends que le rapporteur général et plusieurs de mes collègues proposent la suppression de l’article 29 quinquies. Mais encore eût-il fallu prévoir un système qui permette d’éviter la dérive des prescriptions au profit de médicaments non substituables. Or, dans ce domaine, il faut bien le reconnaître, aucune proposition n’est avancée.
Cet article n’est manifestement pas applicable, d’autant qu’il porte atteinte à la sacro-sainte liberté de prescription du médecin. Il n’est pas question de s’attaquer à ce principe, qu’il faut toutefois relativiser : les médecins doivent respecter les référentiels, toujours plus nombreux, établis par la Haute Autorité de santé.
Il n’est pas non plus possible d’invoquer la liberté de prescription quand, dans le même temps, on attend des médecins qu’ils respectent les bonnes pratiques, en essayant de soigner le mieux possible et dans les conditions économiques les plus favorables pour la sécurité sociale.
Il y a là un véritable problème, mais nous ne le trancherons pas aujourd'hui. Toutefois, bien que je sois favorable à la suppression de cet article, j’aurais souhaité que d’autres dispositions soient proposées.
Pour ma part, j’ai présenté à plusieurs reprises des propositions, mais elles ont toujours été « retoquées » par la majorité. Pourtant, la solution est simple et elle se situe en amont de la prescription : il faut cesser de mettre sur le marché des médicaments qui ne présentent aucune amélioration du service médical rendu. Or nous faisons exactement le contraire ! Dès lors, le problème ne fait que s’aggraver.
Face à cette situation préoccupante, j’attends du Gouvernement qu’il fasse preuve d’initiative pour atteindre les objectifs visés par cet article. Hélas, je ne vois rien venir !
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. Je partage tout à fait l’analyse de François Autain. Je veux simplement souligner combien est inquiétant le retard que nous avons pris par rapport aux autres pays européens en matière de génériques : cela nous prive d’importantes économies, pourtant absolument nécessaires.
Mon groupe s’abstiendra donc sur ces cinq amendements de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13, 214, 371, 475 et 503.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 29 quinquies est supprimé et les amendements nos 122 rectifié et 65 n'ont plus d’objet.
Article 29 sexies
Le deuxième alinéa de l’article L. 162-12-21 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le contrat peut faire l’objet d’avenants destinés à y intégrer les objectifs fixés chaque année en matière de maîtrise médicalisée des dépenses d’assurance maladie. »
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet article inséré par l'Assemblée nationale prévoit que les contrats d'amélioration des pratiques individuelles, les CAPI, pourront faire l'objet d'avenants intégrant les objectifs fixés chaque année en matière de maîtrise médicalisée des dépenses.
La portée normative de cet article est limitée, car les signataires d'un contrat peuvent le modifier ou le compléter sans y être autorisés par la loi. En outre, cette disposition n'a pas véritablement sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale.
C'est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je rappelle que le CAPI, dont chacun a souligné ici le grand succès, n’est pas un contrat comme les autres puisque c’est un contrat type établi par le directeur général de l’UNCAM. Les médecins choisissent d’y adhérer ou non et ils ne négocient pas les engagements avec l’assurance maladie.
La décision du 9 mars 2009 assure aux médecins une certaine visibilité sur leurs engagements et leurs objectifs, dont la réalisation ouvre droit à une contrepartie financière. Ainsi, le CAPI est signé pour une durée de trois ans et ne peut être modifié que pour tenir compte de l’évolution des acquis de la science.
Pour autant, et sans remettre en cause la stabilité du CAPI, je souhaite qu’une articulation puisse être introduite entre ses objectifs et ceux de la maîtrise médicalisée, qui sont, eux, négociés entre les syndicats médicaux et l’assurance maladie et assurent la rationalisation des dépenses de cette dernière.
Toutefois, afin de respecter la visibilité des professionnels sur les contrats en cours, cette nouvelle formule ne s’appliquera pas aux 11 600 contrats déjà signés, elle s’appliquera seulement aux contrats à venir.
Pour toutes ces raisons, monsieur le rapporteur général, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, accepter d’intégrer aux CAPI, par des avenants, des décisions prises aujourd'hui par la CNAM et demain par les directeurs des agences régionales de santé ou le secrétaire général du ministère dans le cadre d’objectifs de maîtrise médicalisée des dépenses apporte de l’eau au moulin de mon collègue Alain Milon, qui voulait renvoyer la définition des contrats à la négociation conventionnelle.
Cela étant, je ne me battrai pas pour cet amendement, que je retire bien volontiers.
M. le président. L'amendement n° 14 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 216 est présenté par MM. Houpert et Milon.
L'amendement n° 373 est présenté par M. Leclerc
Tous deux sont ainsi libellés :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Au début du premier alinéa de l'article L. 162-12-21 du code de la sécurité sociale sont insérés les mots : « À défaut de dispositif spécifique prévu à la convention mentionnée à l'article L. 162-5 ou à l'article L. 162-32-1, ».
La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 216.
M. Alain Houpert. Si cet amendement est adopté, le CAPI ne sera proposé aux médecins conventionnés et aux centres de santé que si la convention ne prévoit pas d’engagements identiques en matière de prescription, de dépistage et de prévention, de continuité et de coordination des soins, de permanence de soins, de contrôle médical, d'amélioration des pratiques, de formation et d'information des professionnels.
Négociés par les partenaires conventionnels, ces engagements individuels feraient ainsi partie intégrante du champ conventionnel et deviendraient un outil utile à l'accompagnement des stratégies conventionnelles. Ils feraient l'objet d'un suivi individuel et donneraient lieu à une rémunération individuelle en cas de réalisation des objectifs.
À partir du moment où la convention prévoit des contreparties financières liées au respect d'engagements individualisés, elle doit automatiquement se substituer aux contrats déjà signés.
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour présenter l’amendement n° 373.
M. Dominique Leclerc. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Puisque Mme la ministre a souhaité maintenir les dispositions de l’article 29 sexies, je lui laisse le soin de donner son avis sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Notre discussion s’inscrit dans la continuité du débat que nous avons eu ce matin à propos de l’amendement de M. Milon, sur lequel je me suis longuement exprimée.
Il est vrai qu’un certain nombre de syndicats représentatifs – pas tous, heureusement ! – se sont violemment opposés au contrat d’amélioration des pratiques individuelles – vous le voyez, monsieur le président, je cède à vos objurgations et m’efforce d’éviter l’utilisation de l’acronyme (Sourires.) –, allant jusqu’à engager des actions en justice.
Ce contrat ayant rencontré un très grand succès, les partenaires conventionnels essayent maintenant de le réintégrer dans leurs négociations. Il y a là un détournement auquel je ne peux pas adhérer. Il faut distinguer, d’un côté, une vie négociation conventionnelle sur ce que j’appellerai la « base » entre les syndicats représentatifs et l’assurance maladie, négociation dont les conclusions reçoivent – ou non – la « bénédiction » du Gouvernement et du ministre de la santé, et, de l’autre côté, une démarche contractuelle, dont le contenu est défini par le directeur général de l’UNCAM et à laquelle les médecins adhèrent s’ils le souhaitent.
Le CAPI constitue, en quelque sorte, un supplément d’engagement pour les médecins. Ne confondons pas les deux démarches et ne jouons pas le match retour de l’échec enregistré par un certain nombre de partenaires conventionnels, qui veulent détourner le CAPI à leur profit.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Aux termes de l’article 29 sexies, le contrat peut faire l’objet d’avenants destinés à y intégrer des objectifs fixés chaque année en matière de maîtrise médicalisée des dépenses d’assurance maladie. Le contrat étant signé entre une organisation, la CPAM, et un médecin, les avenants ne sont proposés que par la CPAM. Le médecin se retrouve donc seul face à un organisme important. C'est la raison pour laquelle j’ai estimé nécessaire de prévoir une protection supplémentaire du médecin.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Milon, si j’ai émis un avis défavorable sur l’amendement qui tendait à fixer des objectifs de maîtrise médicalisée dans le CAPI, c’est justement parce que je souhaite que ces objectifs soient discutés dans le cadre de la vie conventionnelle.
Vous avez raison de souligner que le médecin ne doit pas être démuni. D’un point de vue éthique, il est normal que les objectifs de maîtrise médicalisée ne soient pas négociés individuellement, car ils doivent être partagés par l’ensemble des médecins.
La position du Gouvernement sur ces différents amendements est donc tout à fait cohérente et je remercie M. le rapporteur général d’avoir retiré son amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, si je vous ai bien compris, vous ne voulez pas que l’on introduise la notion de maîtrise médicalisée dans les contrats individuels.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pas pour ce qui concerne ce que j’ai appelé la « base », qui relève de la vie conventionnelle ! Les objectifs fixés en matière de maîtrise médicalisée doivent évidemment être respectés par tous.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends bien, mais vous admettrez que la rédaction de l’article laisse planer une certaine ambiguïté. En fait, il faut faire la distinction entre la « base » et le reste ! Dans l’article, il est tout de même question d’avenants au contrat « destinés à y intégrer les objectifs fixés chaque année en matière de maîtrise médicalisée des dépenses d’assurance maladie ». Admettez, madame la ministre, que ce n’est pas très clair et comprenez que, au regard de vos déclarations, on puisse s’interroger sur cette disposition.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Pour une fois, je souscris aux observations formulées par Mme la ministre sur l’amendement de suppression présenté par M. le rapporteur général. Pourquoi se priverait-on de la possibilité de modifier chaque année un certain nombre d’objectifs contenus dans les CAPI, d’autant que ceux-ci sont conclus pour trois ans ?
En revanche, je ne suis pas d’accord avec vous, madame la ministre, quand vous prétendez qu’il n’y a pas de maîtrise médicalisée dans les CAPI. Il y en a quand même un peu puisque le champ « optimisation des prescriptions » prévoit qu’on tient compte de ces prescriptions : cette année, sont visés les inhibiteurs de la pompe à protons, les statines, les hypertenseurs, etc., mais il n’en ira pas nécessairement de même dans un an ou deux. D’où la nécessité de pouvoir revoir chaque année les objectifs fixés dans les contrats.
C’est la raison pour laquelle je suis très favorable à l’article 29 sexies, et je ne comprends pas que M. le rapporteur général ait voulu le supprimer.
Vous le voyez, je penche tantôt du côté du rapporteur général, tantôt du côté de Mme la ministre ! Je ne veux pas faire de jaloux ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 216 et 373.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 217 est présenté par MM. Houpert et Milon.
L'amendement n° 374 est présenté par M. Leclerc.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dès lors que la convention mentionnée à l'article L. 162-5 ou à l'article L. 162-32-1 prévoit des contreparties financières liées à l'atteinte d'engagements individualisés, elle se substitue à ce contrat, y compris ceux en cours d'exécution »
La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 217.
M. Alain Houpert. Je vous renvoie, mes chers collègues, à la défense de l’amendement n° 216.
M. Dominique Leclerc. L’amendement n° 374 est défendu, monsieur le président !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 217 et 374.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article additionnel après l'article 29 sexies
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 29 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 162-1-18 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces conditions peuvent prévoir, pour une période limitée à deux ans, une expérimentation au bénéfice d'une partie de la population visée au premier alinéa. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à réintroduire une disposition de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite HPST, disposition qui a été censurée par le Conseil constitutionnel au motif que l’expérimentation qu’elle prévoyait n’était pas limitée dans le temps.
Il s’agissait en effet de permettre aux assurés ou ayants droit âgés de seize à vingt-cinq ans de bénéficier chaque année d’une consultation de prévention, réalisée par un médecin généraliste, pour laquelle ils seraient dispensés de l’avance des frais. Tout le monde s’accordera pour dire que cette disposition constituait une avancée, qu’elle présentait un grand intérêt tant pour les assurés sociaux, qui pouvaient bénéficier d’un véritable accès à la prévention, que pour la sécurité sociale, une maladie dépistée précocement coûtant souvent moins cher qu’un traitement délivré une fois qu’elle est installée.
Pour rendre cette mesure pleinement effective, nous entendons satisfaire aux exigences du Conseil constitutionnel en précisant que cette expérimentation sera limitée dans le temps.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous avions effectivement tenté d’introduire une telle disposition dans la loi HPST, mais le Conseil constitutionnel s’y était finalement opposé.
La commission des affaires sociales estime qu’il s’agissait d’une initiative heureuse. En effet, bien que des progrès considérables aient été réalisés dans ce domaine, notre pays souffre encore d’une politique de prévention insuffisamment dynamique. Cette expérimentation, qui cible le public jeune, mérite d’être tentée. C’est la raison pour laquelle la commission est favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cet amendement reprend une démarche du Gouvernement qui avait été censurée par le Conseil constitutionnel faute de prévoir une date limite.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis favorable.
Tout arrive, monsieur Ficher, y compris un avis favorable du Gouvernement sur l’un de vos amendements… Champagne ! (Rires.)
M. François Autain. Nous n’aurons pas perdu notre week-end ! (Sourires.)
M. le président. Madame la ministre, vous ne demandez tout de même pas une suspension de séance pour célébrer cet accord ?... (Nouveaux sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 298.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 29 sexies.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents et je ne doute pas que M. Autain offrira le champagne à la suspension ! (Nouveaux sourires.)
Article 30
I. – Le 6° du II de l’article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « ou lorsque le médecin n’atteint pas l’objectif de réduction des prescriptions ou réalisations prévu au II du même article ».
II. – L’article L. 162-1-15 du même code est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est insérée la mention : « I. – » ;
2° Au 2°, après le mot : « journalières », sont insérés les mots : « ou d’un nombre de tels arrêts de travail rapporté au nombre de consultations effectuées », et sont ajoutés les mots : « ou dans le ressort du même organisme local d’assurance maladie » ;
3° Au 3°, après les mots : « nombre de prescriptions de transports », sont insérés les mots : « ou d’un nombre de telles prescriptions rapporté au nombre de consultations effectuées », et sont ajoutés les mots : « ou dans le ressort du même organisme local d’assurance maladie » ;
4° Le 4° est complété par les mots : « ou dans le ressort du même organisme local d’assurance maladie » ;
5° À la première phrase du 5°, après les mots : « produit ou prestation », sont insérés les mots : « ou d’un nombre de telles réalisations ou prescriptions rapporté au nombre de consultations effectuées », et sont ajoutés les mots : « ou dans le ressort du même organisme local d’assurance maladie » ;
6° Sont ajoutés un II et un III ainsi rédigés :
« II. – Le directeur peut également, conjointement avec le service du contrôle médical, proposer au médecin, en alternative à la procédure de mise sous accord préalable prévue au I, de s’engager à atteindre un objectif de réduction des prescriptions ou réalisations en cause dans un certain délai. En cas de refus du médecin, le directeur poursuit la procédure prévue au I.
« III. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
III. – Le présent article s’applique aux faits postérieurs à la date de publication du décret pris conformément au III de l’article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du présent article.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l’article.
M. Bernard Cazeau. Le I de l’article 30 permet de durcir encore la procédure de mise sous accord préalable. En clair, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie pourra imposer au professionnel de santé de réduire ses prescriptions d’arrêts de travail ou de transports pendant une période correspondant à la réalisation d’un chiffre équivalent à celui réalisé par ses collègues régionaux sur le reste de l’année où la « déviance de prescription » est constatée. En cas de non-coopération ou d’échec, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie pourra prononcer à l’encontre du médecin une pénalité égale à deux mois de salaires !
Sans me faire le héraut de l’indépendance médicale, j’aimerais quand même vous inviter à réfléchir aux effets pervers que pourrait avoir cet article tel qu’il est rédigé. Je pense notamment à la sélection de la clientèle et à la discrimination des malades les plus « polymédicamentés ».
En théorie, les praticiens sont tenus de ne pas choisir leurs patients. Certains le font malheureusement pour des raisons financières. Il ne faudrait pas que, demain, d’autres esquivent certains malades au prétexte que ces derniers pourraient leur faire dépasser leur quota de prescriptions autorisées par l’article 30.
Un peu de bon sens ! Ne réitérons pas la pensée sanitaire du début des années soixante-dix. Il faut se sortir de la tête cette représentation technocratique qui tend à présenter chaque médecin comme une source de dépenses. (M. Paul Blanc marque son approbation.)
Dans sa rédaction actuelle, la suspicion de mauvaise pratique est focalisée sur une véritable obsession : « tel médecin prescrit beaucoup trop d’actes »… Cet article induira une forme d’autocensure chez certains médecins qui, ne voulant pas être soupçonnés injustement, compteront actes et nuitées en fonction, non de l’état médical ou social des patients, mais de contraintes procédurales ou comptables.
Nous vous appelons à ne pas renouveler le raisonnement « numero-clausien », qui a fait tant de ravages en matière d’organisation des soins voilà quelques années.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 120 rectifié est présenté par MM. Barbier et Charasse et Mme Escoffier.
L'amendement n° 219 est présenté par M. Houpert.
L'amendement n° 376 est présenté par M. Leclerc.
L'amendement n° 479 est présenté par M. Milon et Mmes Sittler et Panis.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 120 rectifié.
M. Gilbert Barbier. M. Cazeau, qui n’a pas déposé d’amendement sur cet article, nous rejoindra certainement pour en demander la suppression.
Vouloir augmenter le contrôle est une bonne chose, mais la manière dont est rédigé cet article fait craindre des dérives considérables. En effet, pour donner au médecin un objectif en matière de prescriptions, on se fonde sur des statistiques régionales. Il en résultera que le médecin accusé de trop prescrire des transports ou des médicaments renoncera à traiter les patients dont la situation sociale nécessite de lourdes prescriptions, notamment des arrêts de travail.
Nous allons pénaliser des médecins qui exercent souvent dans des conditions difficiles, particulièrement dans les banlieues.
M. François Autain. Cela n’a rien à voir !
M. Gilbert Barbier. Bien sûr que si ! Ces médecins sont souvent surprescripteurs, en raison des pathologies de leurs patients.
Comme l’a souligné M. Cazeau, cette procédure devrait être menée d’une manière beaucoup plus fine. Je pense qu’il faut lutter contre l’exagération en matière de prescriptions médicales, mais la méthode utilisée me semble contraire à notre objectif.
À l’instar de nombreux collègues, je souhaite donc que nous supprimions cet article.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 219.