Mme Christine Lagarde, ministre. Je vous rappelle que la réforme des chambres de commerce et d’industrie a été soumise au conseil des ministres en juillet dernier et qu’elle sera très probablement examinée au cours des trois premiers mois de l’année 2010 ; c’est en tout cas ce que laisse entendre le ministre chargé des relations avec le Parlement, et l’ordre du jour semble le permettre.
Par conséquent, j’aurais tendance à vous demander de retirer cet amendement, bien que je sache que vous répugnerez à le faire, monsieur le rapporteur général, pour toutes les raisons que je viens d’évoquer : la distinction entre le service public et l’intérêt général, l’aspect constitutionnel concernant les lois organiques et les taxes additionnelles, la nécessité de concertation avec les chambres de commerce et d’industrie et, enfin, le fait que nous mettons en place un financement avant même d’avoir réformé l’ensemble du système comme nous nous y préparons depuis plusieurs mois.
À défaut de retrait, c’est, je le regrette, un avis défavorable du Gouvernement qui s’appliquerait mutatis mutandis à l’ensemble des sous-amendements soutenus par MM. Charasse, Fourcade et Détraigne, étant précisé qu’un certain nombre de ces sous--amendements sont, dans le fond, parfaitement légitimes dans la mesure où l’amendement de M. le rapporteur général serait adopté.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. J’ai présenté ce texte comme un amendement d’orientation, comme une base qui servira au débat, à la concertation.
Certes, je l’ai souligné moi-même, la définition entre les charges couvertes par l’une et l’autre fraction n’est pas aujourd’hui très rigoureuse ; mais il va falloir travailler pour y remédier. De toute manière, cet amendement d’orientation n’a pas vocation à s’appliquer le 1er janvier. En un an, bien des choses peuvent être faites !
S’agissant des aspects juridiques, il n’y a aucun problème, puisque nous nous sommes référés à la définition, figurant à l’article 1601 du code général des impôts, de la « taxe pour frais de chambres de métiers », laquelle est composée de deux parties : un droit fixe et un droit additionnel. Nous l’exprimons différemment du texte d’origine qui est plus ancien, mais la mécanique juridique est la même.
Il s’agit donc non d’une taxe parafiscale, mais d’une taxe additionnelle, ici à la taxe professionnelle, qui va devenir taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises ; c’est totalement symétrique. Si cela pose des problèmes juridiques pour les chambres de commerce et d’industrie, alors cela devrait en poser aussi pour les chambres de métiers et de l’artisanat. Mais j’en serais surpris !
J’en viens aux aspects relatifs à la réforme.
De manière générale, nous pensons – mais c’est en quelque sorte une déformation que nous avons au sein de la commission des finances ! – qu’il est préférable d’inscrire les dispositions fiscales dans la loi de finances, même si, par ailleurs, toutes sortes de dispositions fiscales fleurissent chaque année dans des textes sectoriels.
M. Nicolas About. De moins en moins, la commission des finances y veille !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Aussi, quand nous en avons la possibilité, nous pensons que nous livrer à une réflexion fiscale dans la loi de finances est un facteur d’harmonisation.
Cela étant dit, dans un an, nous verrons bien où en sera la réforme, quels équilibres auront été trouvés, et nous reprendrons la discussion à l’occasion de la loi de finances pour 2011. À ce stade, il ne s’agit encore que d’une orientation.
À ce titre, j’ai la faiblesse de penser que c’est une orientation utile pour aborder le débat sur la réforme dans de bonnes conditions.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Raffarin. La proposition de M. Marini est effectivement très utile, car elle nous permettra, là encore, de faire des évaluations. Le problème est un peu du même type que celui de tout à l’heure : si nous ne définissons pas une perspective, nous allons avoir du mal à faire les évaluations. Et si le projet de loi sur la réforme des réseaux consulaires français est voté avant la fin de la période probatoire, nous nous retrouverons au mois de juin sur le sujet !
Il serait bon de conserver cet amendement d’orientation pour nous permettre de travailler sur des hypothèses, à partir de simulations, avant de nous retrouver au mois de juin prochain.
Dans la proposition de la commission des finances, un élément important me semble intelligent, si je puis me permettre : pour une fois, on reconnaît bien la double identité des chambres de commerce et d’industrie. D’une part, des établissements publics auxquels l’État demande des services pour lesquels ils ont des obligations et, d’autre part, une organisation représentative de toutes les formes d’entreprises.
Je trouve tout à fait normal que la part qui financera les missions dites d’État soit très encadrée et que l’on accorde, en revanche, une plus grande liberté aux entrepreneurs qui seront mis face à leurs responsabilités. Ce sont eux qui, par collège, décideront s’ils financent ou non tel ou tel type de service.
Les chambres de commerce et d’industrie sont très souvent décriées. Pourtant, aujourd’hui, le rôle de formation de ces établissements ne cesse de croître. Toutes les régions de France ont des écoles de commerce, des centres de formation d’apprentissage. L’œuvre de formation accomplie par ces établissements publics est un service public qui est très utile à notre pays et dont il faut mesurer l’importance.
Naturellement, subsiste la question de savoir si l’on anticipe ou non sur le projet de loi sur la réforme des réseaux consulaires français.
Le sous-amendement de M. Détraigne contient plusieurs idées.
La première est une anticipation sur l’espace régional et M. Houel n’a pas, si j’ai bien compris, présenté son sous-amendement, car la commission des finances a arbitré entre l’échelon régional et l’échelon départemental.
La seconde idée intéressante dont il faudra reparler pour la fin de la période probatoire est le prélèvement d’une fraction de cette taxe au profit de l’assemblée des chambres de commerce et d’industrie, autrement dit un financement de l’ensemble.
Voilà pourquoi la position du rapporteur général est positive, constructive et permet de préparer l’avenir.
En conclusion, je voudrais saluer Mme le ministre. En effet, madame, bien que l’examen de ce texte n’ait pas très bien commencé, grâce à votre sens de l’écoute, à votre énergie et à votre force de conviction, nous avons pu aboutir, avec la commission des finances, à un certain nombre de résultats qui, pour nous, sont très significatifs ; je tenais à vous en remercier. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° II-202 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Dans cette affaire, il y a plusieurs manières de voir les choses. Nous savons qu’il n’y a pas de problème particulier pour 2010, puisque le système est reconduit, inchangé, comme pour les collectivités locales. Pour tout le monde, la question se posera donc en 2011, M. le rapporteur général et Mme le ministre l’ont d’ailleurs reconnu.
Mes chers collègues, il faudra bien, alors, une ressource pour les chambres de commerce et d’industrie. En cet instant, je ne suis pas certain que nous ne soyons pas majoritaires pour considérer que cette ressource pourra difficilement ne pas être de nature fiscale. Par conséquent, il n’est pas anormal que la commission des finances se soit engagée dans cette voie-là. Voilà pour l’aspect purement administratif. Effectivement, pour 2010, nous n’avons besoin de rien et nous pouvons très bien attendre les simulations de 2011.
M. Jean-Pierre Raffarin. Il faut voter un texte avant les élections de novembre 2010 !
M. Michel Charasse. J’irai même plus loin : je suis très satisfait d’entendre Mme le ministre dire qu’il vaut mieux attendre la réforme des chambres de commerce pour voter la ressource, soit le contraire du raisonnement qu’on a suivi depuis quatorze heures trente à propos des collectivités locales... Quel dommage de ne pas y avoir pensé plus tôt !
Mme Nicole Bricq. Oui, l’argument ne manque pas de sel !
M. Michel Charasse. Mais c’était une pique lancée, au passage, à cette heure avancée de la nuit, sans aucune intention de vous empêcher de dormir !
Cela dit, la réforme engagée de la taxe professionnelle a plongé les chambres de commerce et d’industrie dans une inquiétude et une incertitude majeures. Quoi que nous pensions de ces organismes et de leur utilité, ils assurent une mission de service public. Par conséquent, il est difficile de les laisser dans l’expectative, sans leur donner un minimum de pistes ou d’orientations pour le très proche avenir. Et c’est, en matière fiscale, aussi le rôle du Parlement puisque, jusqu’à nouvel ordre, c’est lui qui vote la loi.
Je comprends donc très bien que les chambres de commerce et d’industrie soient venues nous voir les uns et les autres pour nous alerter. Ceux de leurs représentants que j’ai rencontrés, en particulier le très aimable et raisonnable président de l’Assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie, M. Jean-François Bernardin, ont surtout insisté sur tout ce qui concerne le financement de la formation et les différentes filières, considérant qu’il fallait aux chambres une perspective et une vision sur deux ou trois ans au minimum pour mettre en place les processus et les programmes. Par conséquent, je ne trouve pas anormale la démarche du rapporteur général.
Si j’ai bien compris, monsieur le rapporteur général, vous maintenez l’amendement n° II-202. Pour ma part, je suis prêt à retirer le sous-amendement n° II-359 rectifié, sous réserve que le sous-amendement de notre collègue Jean-Pierre Fourcade soit adopté.
Après tout, le vote à la majorité qualifiée est une bonne chose. Sinon, une catégorie professionnelle particulière pourrait imposer sa loi aux autres, ce qui n’est pas imaginable !
Je voudrais cependant vous faire une proposition, monsieur le rapporteur général. Le système d’une cotisation de base et d’une contribution complémentaire aura pour conséquence de faire riper toutes les dépenses qui n’entreront pas dans la première catégorie – celle visée par la convention avec l’État – sur la contribution complémentaire. Or la cotisation de base étant calculée et encadrée en fonction d’une convention conclue avec l’État, ce sera peut-être une manière de contourner l’encadrement de la convention. Aussi, tout ce qui ne « tiendra » pas dans la cotisation de base sera basculé sur la cotisation complémentaire.
Donc, monsieur le rapporteur général, accepteriez-vous de remonter le membre de phrase « dans le cadre d’une convention d’objectif et de moyens conclue avec l’État » au premier alinéa du texte proposé par le 3°, de façon à prévoir que « la taxe, établie dans le cadre d’une convention d’objectif et de moyens conclue avec l’État dans la circonscription territoriale de chaque chambre de commerce et d’industrie », est composée d’une cotisation de base et d’une contribution complémentaire ? Si les deux contributions figurent dans la convention conclue avec l’État, nous aurons – je ne parle plus d’encadrement : j’ai bien compris que mes propos de tout à l’heure avaient pu heurter – un cadre général qui dominera les deux catégories de cotisations, ce qui serait de nature, me semble-t-il, à équilibrer le dispositif.
Dans ce cas, la convention porterait sur l’ensemble des aspects et il n’y aurait pas de risque de dérive sur la cotisation complémentaire.
M. le président. Mes chers collègues, dans ces conditions, je vous propose de nous prononcer d’abord sur le sous-amendement n° II-330 de M. Fourcade, faute de quoi le débat risque d’aller à hue et à dia…
La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Monsieur le président, loin de tirer à hue et à dia, je veux simplement expliquer pourquoi je ne suis pas favorable au sous-amendement de M. Fourcade.
Comme M. Jean-Pierre Raffarin, je pense que l’on critique un peu trop facilement les chambres de commerce et d'industrie alors qu’elles rendent des services tout à fait remarquables.
Ainsi, dans mon département, la chambre de commerce et d'industrie est l’opérateur des collectivités pour le développement économique, ce qui permet d’éviter des doublons d’organisation et contribue par conséquent à la maîtrise de la dépense publique. Il est donc essentiel que cette situation puisse perdurer.
Par conséquent, il ne me semble pas pertinent de leur infliger des contraintes inutiles, telle l’instauration d’un vote à la majorité qualifiée. En effet, il est extrêmement difficile de convaincre des chefs d’entreprise de contribuer au financement d’une école supérieure de commerce, par exemple. Cela montre que, dans certains cas, le vote à la majorité qualifié peut être contre-productif.
Cela étant dit, je suis tout à fait favorable à l’amendement n° II-202, car il permet de donner une orientation réelle. Encore faut-il ne pas alourdir le dispositif par des contraintes inutiles !
M. le président. En conséquence, le sous-amendement n° II-359 rectifié n'a plus d'objet.
Monsieur Détraigne, le sous-amendement n° II-386 est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. M. le rapporteur général m’a demandé de le retirer au motif qu’il anticipe sur la future réforme. Toutefois, un tel argument ne me paraît pas décisif dans la mesure où, depuis une quinzaine de jours, nous travaillons sur une réforme financière qui anticipe, plutôt qu’elle ne l’accompagne, la future réforme institutionnelle.
Cela dit, j’ai écouté attentivement les interventions de mes collègues, notamment celle de M. Jean-Pierre Raffarin. Je crois comprendre que, par le fait d’une clause de « revoyure » – terme peu élégant s’il en est ! –, nous serons amenés à réexaminer cette question après que nous aurons débattu de la réforme des chambres de commerce et d’industrie. M. le rapporteur général l’a dit lui-même, l’amendement n° II-202 est indicatif…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Un amendement d’orientation !
M. Yves Détraigne. Il donne le la !
Je retire donc mon sous-amendement, en espérant toutefois que, une fois la réforme intervenue, nous nous pencherons effectivement de nouveau sur cette question du financement des CCI, pour la traiter de manière définitive.
M. le président. Le sous-amendement n° II-386 est retiré
Monsieur le rapporteur général, rectifiez-vous l’amendement n° II-202 dans le sens indiqué par M. Charasse ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les suggestions de notre collègue Michel Charasse sont toujours extrêmement intéressantes et judicieuses. Mais, à cette heure tardive, je ne sais pas si j’ai les idées suffisamment claires pour reprendre la rédaction de l’amendement n° II-202. Peut-être serait-il préférable de trancher cette question en commission mixte paritaire.
Sur le fond, nos positions sont parfaitement convergentes. Cependant, si la convention d’objectif et de moyens intègre les deux composantes de la taxe, cela relativise la liberté que je souhaitais donner aux représentants consulaires élus pour déterminer la ressource complémentaire destinée aux missions qu’ils assument librement.
Quoi qu’il en soit, je ne dispose pas, en cet instant, d’éléments suffisants pour résoudre ce problème, qui pourra tout à fait être intégré aux réflexions que nous mènerons dans le cadre de la commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Frécon, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Frécon. Monsieur le rapporteur général, votre amendement n° II-202 peut en effet faire l’objet d’une certaine convergence entre nous, ce qui ne veut tout de même pas dire que nos idées sur la question sont exactement les mêmes.
Cela étant, les propos tenus tout à l’heure par notre collègue Jean-Pierre Raffarin reflètent bien notre état d’esprit dans cette affaire. En effet, il y a incontestablement une part de l’activité des chambres de commerce et d'industrie qui relève bel et bien d’un service public et peut donc tout à fait être financée par une cotisation à caractère fiscal. D’un autre côté, dans la mesure où les chambres de commerce et d'industrie ont également une fonction de représentativité professionnelle, il est parfaitement logique que ce financement public soit complété par d’autres ressources dont elles décident elles-mêmes.
C’est pourquoi, à titre personnel, je soutiens résolument votre proposition, monsieur le rapporteur général.
Monsieur Raffarin, j’ai beaucoup apprécié – je ne suis pas le seul dans cet hémicycle ! – votre présentation de la situation. Vous vous êtes interrogé sur l’ordre dans lequel les différents textes nous sont soumis. Faut-il, vous êtes-vous demandé, faire précéder le texte définitif d’un texte d’orientation ? Nous partageons vos interrogations, tout en faisant remarquer que la démarche aurait également pu être inversée concernant les collectivités territoriales. En effet, nous pensons qu’il aurait été plus avisé d’envisager des pistes de réflexion avant de supprimer la taxe professionnelle. Cela ne nous aurait-il pas permis d’aborder le problème dans de meilleures conditions ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. L’amendement n° II-202 me laisse un peu perplexe : non que je remette en question son orientation générale, mais je doute de notre capacité, à cette heure avancée, après l’évocation de multiples sujets, à apporter aux chambres de commerce et d’industrie de notre pays, pour les périodes postérieures à l’année 2010, une solution définitive.
Monsieur le rapporteur général, dans l’objet de l’amendement, il est proposé que la cotisation de base de la taxe additionnelle à la CFE prenne en charge les missions de service public – cela paraît de bon sens – et que la contribution complémentaire – celle-ci ayant un caractère en quelque sorte plus volontaire –, qui serait désormais fixée à la majorité qualifiée, prenne en charge ce qui ne ressortit pas au service public.
Dans le même temps, s’agissant de la cotisation de base, vous évoquez une « convention d’objectif et de moyens conclue avec l’État », ce qui peut aller bien au-delà des missions de service public d’une chambre de commerce et d’industrie. On peut en effet imaginer que l’État et la chambre de commerce et d’industrie de telle région ou de tel département, selon la réforme qui sera votée dans quelques semaines, décident que la gestion d’un port, le développement d’une infrastructure de transport ou un établissement d’enseignement supérieur figurent dans le cadre de la convention.
Autrement dit, on pourra trouver dans la convention des éléments qui ne relèvent pas d’une mission de service public.
Si, dans toute la France, les chambres de commerce et d’industrie sont des acteurs de l’enseignement, une activité dans laquelle elles ont su déployer leurs compétences et, de fait, admirablement réussi, elles n’assurent pas, à ce titre, une mission régalienne : c’est une simple prestation de services, quelle qu’en soit par ailleurs la qualité.
J’ajoute que, si le plafond de la cotisation de base est égal au montant de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle acquittée en 2009, on va obtenir des sommes largement supérieures aux dépenses occasionnées par les seules missions régaliennes.
En outre, ainsi que notre collègue Michel Charasse en a fait la remarque en commission des finances, en 2009, la taxe additionnelle à la taxe professionnelle a représenté environ 1 milliard d’euros, soit grosso modo 3 % des 29 milliards d’euros du montant global de la taxe professionnelle théorique. Or, si la cotisation de base que nous instituerons ultérieurement reprend ce pourcentage, il faut le rapporter à la partie « cotisation foncière des entreprises », qui revient entièrement au bloc communal et intercommunal, ce dont nous nous réjouissons tous, mais ne représente que 20 % de l’ancienne taxe professionnelle. Ainsi, 3 % rapportés à 20 %, ce n’est pas tout à fait la même chose que 3 % rapportés à 100 % : le rapport est de 1 à 5 !
Je crains que, dans ces conditions, les chambres de commerce et d'industrie n’apparaissent comme un élément pesant lourdement sur la fiscalité locale puisqu’elles bénéficieront d’une taxe additionnelle représentant à elle seule 15 % à 20 % de la cotisation foncière des entreprises.
Je mesure l’amateurisme dont mes arguments, en cet instant, portent la marque. Heureusement, pour le moment, nous ne sommes appelés qu’à nous prononcer sur un amendement visant à indiquer une orientation, prévoyant d’instaurer une cotisation de base destinée à financer des missions régaliennes et une contribution complémentaire décidée à la majorité qualifiée. Nous aurons ensuite à examiner le texte portant réforme des CCI, dont nous pourrons tirer les conséquences dans le projet de loi de finances pour 2011.
Ce soir, madame la ministre, vous aurez ainsi participé à un débat général sanctionné par un texte d’orientation, et non, comme d’habitude, par un texte d’exécution. Il faut en effet admettre cette nuance, monsieur le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Pour ma part, je partage les orientations de cet amendement, même s’il ne débouche pas immédiatement sur un texte opérationnel et qu’il diffère en cela des autres amendements que nous avons adoptés précédemment.
Voyez-vous, mes chers collègues, tout est probatoire et fugitif dans la vie… Ce qu’une loi a fait, une autre peut le défaire. Mais si, grâce à cet amendement, nous pouvions nous inscrire un tant soit peu dans la durée et éclairer la réflexion sur la réforme des CCI, nous n’aurions pas perdu notre journée !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. La volonté de stabiliser le financement des chambres de commerce et d’industrie me semble louable ; je souhaiterais simplement qu’on en fasse autant pour les collectivités territoriales, qui aspirent, elles aussi, à davantage de stabilité dans leurs ressources.
Je suis toutefois soucieuse du niveau de cette taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises, et j’aurais donc voulu savoir si, dans l’esprit du rapporteur général, elle était ou non incluse dans le plafonnement par rapport à la valeur ajoutée. Alors que la fiscalité locale connaît des évolutions profondes, cette question mérite d’être posée, car ce point n’est pas indifférent pour les collectivités territoriales.
Ensuite, la proposition de la commission survient avant une réforme des CCI dont on ne sait pas grand-chose. Je salue cette démarche qui consiste à tracer des orientations pour l’avenir et j’aurais aimé, là encore, qu’on procède de la même façon pour les collectivités locales, c’est-à-dire qu’on réfléchisse simultanément à la réforme et au financement, au lieu de décider du financement avant d’avoir véritablement réfléchi à la réforme.
L’amendement présenté par le rapporteur général prévoit que les représentants des chambres de commerce et d’industrie auront la responsabilité exclusive de fixer le niveau de la contribution complémentaire. Il me semble que cette absence d’encadrement pose un problème, d’autant que, de leur côté, les collectivités territoriales sont plus qu’encadrées, soumises à des contraintes très strictes, quant à la fixation des taux de cotisations qui s’appliquent aux entreprises. J’aurais souhaité que les élus aient davantage de liberté pour fixer ces taux. Mais, dès lors qu’un choix différent a été fait, il faut être cohérent, et respecter le parallélisme des formes.
De même, à partir du moment où le financement des CCI se fait par la voie de la fiscalité, leur budget devrait être parfaitement transparent et accessible.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je pense qu’il est temps de conclure. Le mieux est parfois l’ennemi du bien. Il était sans doute important que la commission des finances, au travers de l’amendement présenté par Philippe Marini, donne une orientation et un signal aux responsables des chambres consulaires. Toutefois, ne demandons pas à cette proposition plus qu’elle ne prétend apporter.
Ce qui me paraît essentiel, c’est de poser le principe d’une relation contractuelle entre les entreprises et les chambres de commerce et d’industrie. Nous avons vécu jusqu’à présent des situations assez baroques où les CCI devaient venir quémander une autorisation au Parlement. Et, comme le produit fiscal était généralement insuffisant, elles allaient ensuite solliciter des subventions auprès des conseils généraux et régionaux...
Nous devrions maintenant pouvoir avancer dans le sens d’une simplification et d’une régularisation.
Les responsables des entreprises vont devoir, eux aussi, exprimer leurs attentes vis-à-vis des CCI, et veiller à en « avoir pour leur argent ».
Trop souvent, les organismes consulaires ont accusé les collectivités territoriales de lever trop d’impôts, notamment trop de taxe professionnelle. Cela doit cesser. Je ne suis pas favorable à un encadrement des contributions destinées aux chambres de commerce et d’industrie, car c’est au monde de l’entreprise de fixer, en toute responsabilité, et le niveau de leurs ressources et la répartition de la charge en son sein. Si les entreprises n’y trouvent pas leur compte, elles devront en tirer les conséquences.
L’amendement présenté par M. le rapporteur général étant purement indicatif, il ne met pas un terme au débat, mais permet à ceux qui participent actuellement aux négociations de connaître les orientations du Parlement. Ainsi, lorsqu’ils présenteront un projet de réforme des CCI, ils ne se méprendront pas sur les modalités de financement. C’est un signal important, et il me semble que le Sénat serait ce soir dans son rôle en adoptant cet amendement, modifié par le sous-amendement de Jean-Pierre Fourcade.
En outre, les simulations effectuées par le rapporteur général font effectivement ressortir, dans certains cas, des proportions relativement importantes de la cotisation foncière des entreprises, pouvant aller jusqu’à 20 %. Eh bien, il est important que le monde de l’entreprise le sache. (M. Gérard Longuet marque son approbation.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l’article 43.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Rassurez-nous, monsieur le président de la commission, vous ne comptez pas nous faire revenir tout à l'heure ?... (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il sera dit que nous avons travaillé ce dimanche, puisqu’il est près de deux heures du matin ! (Nouveaux sourires.) Mais je me réjouis que nous ayons pu aller au bout du programme que nous nous étions fixé.
Certains d’entre nous vont sans doute profiter de la journée de ce dimanche pour regagner leur département. Afin de leur permettre de ne revenir que demain, lundi, dans la matinée, je suggère que nous reprenions nos travaux à onze heures, au lieu de dix heures comme cela avait été prévu.
Il nous reste quelque 130 amendements à examiner. J’espère que nous pourrons adopter le projet de loi de finances le mardi 8 décembre, avant la suspension du soir.