Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
MM. Alain Dufaut, Bernard Saugey.
3. Allocution de M. le président du Sénat
Suspension et reprise de la séance
4. Représentation devant les cours d'appel. – Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (Texte de la commission)
Amendements nos 13 de M. Jean-Pierre Godefroy, 51 rectifié de M. Jacques Mézard et 43 rectifié bis de M. Jean-Pierre Vial ; amendements identiques nos 4 rectifié de M. Yves Détraigne et 38 rectifié de M. Jean-Pierre Vial. – MM. Jean-Pierre Michel, Jacques Mézard, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Yves Détraigne, Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois ; Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. – Retrait des amendements nos 51 rectifié, 4 rectifié et 38 rectifié ; rejet de l’amendement no 13 ; adoption de l’amendement no 43 rectifié bis.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 62 de la commission et 12 de M. Jean-Pierre Michel. – MM. le rapporteur, Alain Anziani, Mme la ministre d’État. – Retrait de l’amendement no 12 ; adoption de l’amendement no 62.
Amendement n° 54 du Gouvernement. – Mme la ministre d’État, M. le rapporteur. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 55 du Gouvernement. – Mme la ministre d’État. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 63 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Adoption.
Amendement n° 6 rectifié de M. Yves Détraigne. – MM. Yves Détraigne, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 64 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
M. Jean Louis Masson
Amendements nos 48 rectifié bis de M. Jacques Mézard et 11 de M. Rachel Mazuir. – M. Jacques Mézard, Mmes Virginie Klès, la ministre d’État. – Adoption de l’amendement no 48 rectifié bis, l’amendement no 11 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 30 de M. François Pillet. – MM. François Pillet, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Adoption.
Amendement n° 47 rectifié bis de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 35 rectifié de M. Jean-Pierre Vial. – MM. Jean-Pierre Michel, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Retrait.
Amendement n° 56 du Gouvernement. – Mme la ministre d’État, le rapporteur. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 7 rectifié de M. Yves Détraigne et 46 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Yves Détraigne, Jacques Mézard, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendements nos 37 rectifié de M. Jean-Pierre Vial et 9 rectifié de M. Yves Détraigne. – MM. Jean-Pierre Vial, Yves Détraigne, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendement n° 36 de M. Jean-Pierre Vial. – MM. Jean-Pierre Vial, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Retrait.
Adoption de l'article.
Amendement n° 65 de la commission. – M. le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l’article 33
Amendement n° 41 rectifié de M. Jean-Pierre Vial. – M. Jean-Pierre Vial. – Retrait.
Amendements identiques nos 8 rectifié de M. Yves Détraigne, 10 de M. Jean-Pierre Michel et 44 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Yves Détraigne, Jean-Pierre Sueur.
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca
MM. Jacques Mézard, le rapporteur, Mme la ministre d’État. – Adoption, par scrutin public, des amendements nos 8 rectifié, 10 et 44 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 34
Amendements nos 20 et 22 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, M. le rapporteur, Mme la ministre d’État, M. Jean-Pierre Michel, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. – Rejet des deux amendements.
M. Jean-Pierre Michel, Mmes Marie-Hélène Des Esgaulx, Josiane Mathon-Poinat, MM. Yves Détraigne, Jacques Mézard.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
M. le président de la commission, Mme la ministre d’État.
Suspension et reprise de la séance
5. Victimes des essais nucléaires français. – Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
Discussion générale : MM. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.
MM. Guy Fischer, André Vantomme, Jacques Gautier.
Clôture de la discussion générale.
Texte de la commission mixte paritaire
M. Nicolas About.
Adoption définitive, par scrutin public, du projet de loi.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Alain Dufaut,
M. Bernard Saugey.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. J’ai le regret, mes chers collègues, de vous faire part du décès de notre ancienne collègue Anne Heinis, qui fut sénateur de la Manche de 1992 à 2001. Demain, au nom du Sénat, je rendrai hommage à sa mémoire dans sa commune de Valognes.
3
Allocution de M. le président du Sénat
M. le président. Madame la ministre d’État, mes chers collègues, après le temps de la révision constitutionnelle, après celui de la réforme de notre règlement, après celui des premières expériences de mise en œuvre, nous sommes entrés, depuis quelques mois, dans une époque assez nouvelle pour le Parlement.
Commençons par ce qui me paraît très positif.
La place du Sénat s’est renforcée dans le nouveau contexte institutionnel. Notre impact sur la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a retenu l’attention. Alors que nous avions débuté l’année dans des conditions difficiles, avec un texte sur l’audiovisuel, nos collègues ont su en quelque sorte transformer l’équation. Il en a été de même pour la réforme pénitentiaire, pour la proposition de loi sénatoriale relative à la lutte contre la fracture numérique, ainsi que pour le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances pour 2010.
La réécriture du dispositif relatif à la taxe professionnelle a été, me semble-t-il, un assez bon exemple de ce que le travail législatif peut apporter notamment aux projets gouvernementaux.
Ces travaux ont mis en lumière une expertise sénatoriale, c’est-à-dire, mes chers collègues, votre expertise d’élus au contact des réalités et des territoires.
Je retiendrai tout de même quelques chiffres pour illustrer l’année parlementaire qui s’achève. Ils donnent matière à réflexion, tant à ceux qui ont soutenu la réforme constitutionnelle de juillet 2008 qu’à ceux qui ne la pensaient pas utile.
En 2009, nous avons siégé 41 semaines, 151 jours, 1 200 heures, soit 46,7 % de plus qu’en 2008, et la nuit près de 30 % plus souvent que l’année dernière. Nous avons examiné en séance publique quelque 9 800 amendements.
Ces chiffres montrent à ceux qui en doutaient que la séance publique a fait plus que conserver son rôle. L’opposition y a occupé une place importante, les statistiques le montrent.
Dans le même temps – c’est une autre conséquence de la réforme constitutionnelle –, le travail en commission s’est encore intensifié. Les commissions du Sénat ont ainsi examiné quelque 4 400 amendements. Malgré ce travail législatif accru, les travaux de contrôle et d’évaluation, ainsi que les initiatives sénatoriales des commissions, ont été poursuivis et augmentés.
Le travail des missions communes d’information, que ce soit sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales, sur la politique en faveur des jeunes ou sur la situation des départements d’outre-mer, s’est lui aussi accru, tout comme celui des commissions permanentes au service de l’initiative sénatoriale.
Nos six commissions permanentes, renforcées par notre refus collectif, après les travaux du groupe de travail sur la révision constitutionnelle et la réforme du règlement, de céder à la tentation de disperser leurs moyens en en augmentant le nombre, ont consacré un temps accru à la finalisation des propositions de loi et de résolution.
Ce travail a nourri les semaines d’initiative sénatoriale, le Sénat ayant décidé de jouer le jeu.
Les commissions permanentes et la commission des affaires européennes ont par ailleurs continué d’affirmer leur expertise dans les domaines de l’évaluation et du contrôle, qui sont devenus leur seconde nature.
C’est ainsi que les travaux de contrôle ont nourri des débats d’initiative sénatoriale de qualité, que ce soit sur les collectivités territoriales, sur les suites de résolutions européennes, sur l’avenir de la presse, la numérisation du livre, la crise financière ou sur la situation en Afghanistan.
Le résultat de ce travail intense – excessif selon certains, au reste assez nombreux – a été amplifié par l’impact de deux sessions extraordinaires, en juillet et en septembre. Les réunions de nos commissions se sont allongées dans le temps et étalées dans la semaine. Elles se poursuivent désormais parfois très tard le soir. Nos délégations et nos groupes de travail n’ont en rien diminué leur activité.
Nous avons siégé, sans discontinuer, à l’exception d’un seul jour, du 2 au 27 novembre, y compris les samedis et les dimanches.
M. Charles Revet. Eh oui !
M. le président. Nos groupes politiques, conséquence directe de la réforme constitutionnelle et de la réforme de notre règlement, ont conforté leur rôle et se sont organisés pour faire face à un tel flot de travail.
Tout cela a des conséquences : la fatigue et, il faut bien le dire, une certaine insatisfaction de la représentation nationale, tous groupes politiques confondus.
Tout cela a une cause : en diminuant le temps législatif du Gouvernement et en augmentant d’autant les temps de contrôle, d’initiative mais aussi d’opposition du Parlement, la réforme constitutionnelle de juillet 2008 comporte des exigences nouvelles.
Il faudra que le Gouvernement se persuade que, si la procédure accélérée constitue un apparent remède dans l’immédiat, elle est inappropriée face à cette situation nouvelle. Je pense que nous sommes tous d’accord sur ce point, quel que soit le groupe auquel nous appartenons, cette procédure porte atteinte à la qualité de la loi et à la sérénité du pouvoir législatif. Au fond, elle me paraît en contradiction avec l’esprit même de la réforme constitutionnelle de juillet 2008.
Le Premier ministre a eu la clairvoyance d’y renoncer pour la réforme des collectivités territoriales. C’est bien, mais c’était, me semble-t-il, indispensable.
Il faudra une meilleure lisibilité et une meilleure prévisibilité du programme législatif du Gouvernement.
Il faudra un plus grand réalisme dans l’évaluation du temps prévu pour l’examen des textes législatifs.
Il faudra aller vers une plus grande compacité des projets de loi soumis à nos commissions.
Il faudra revenir à des temps de travail plus réalistes pour les parlementaires, dont – ne l’oublions pas ! –, le mandat s’exerce aussi – c’est légitime et indispensable pour la démocratie représentative – dans nos territoires.
Il y va de la qualité et de la clarté de la loi. Il y va aussi de la sérénité de nos débats, qui constituent l’expression première de notre démocratie.
Pour notre part, nous nous sommes ensemble efforcés de faire face à cette situation par la réforme de notre règlement, que nous réexaminerons à partir du premier trimestre de l’année prochaine. Cette réforme, nous l’avons voulue aussi consensuelle que possible et, en tous les cas, attentive aux droits de tous les groupes politiques.
Nous avons fait le choix de ne pas retenir l’option du temps global, car nous avons collectivement préféré miser sur la confiance mutuelle et sur une certaine conception du droit d’amendement ainsi que du droit individuel d’expression en séance publique.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. le président. Cependant, la question de la dynamisation et de la compacité de nos séances reste posée et nous devrons collectivement y apporter des réponses.
M. Adrien Gouteyron. C’est vrai !
M. le président. Il faudra continuer à réfléchir aux moyens de rendre à nos séances un plus grand intérêt et une plus grande lisibilité pour nos concitoyens.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. le président. Le rôle d’un Parlement ne se mesure pas au nombre et à la longueur d’interventions en séance publique parfois identiques.
Il ne se mesure pas plus à l’augmentation du nombre des séances de nuit, qui en est la conséquence, ces séances nocturnes souvent peu compréhensibles pour l’opinion et les médias, et usantes pour ceux qui y participent !
Nous avons tracé des voies. Il nous faudra les analyser et en discuter de nouveau, d’une manière très ouverte, respectueuse des uns et des autres. Les solutions que nous avons explorées pour dynamiser nos séances, telles que les questions cribles thématiques ou les débats fondés sur des questions-réponses, comme cela fut le cas notamment au sujet des collectivités territoriales, sont, je le pense, des expériences dont il faudra élargir le principe.
L’une des caractéristiques fortes de ce que nous avons souhaité ensemble est celle d’une gouvernance politique plus collégiale.
C’est au nom de ce principe que chacun des huit vice-présidents et moi-même assurons, selon un ordre établi à l’avance, sans considération d’opportunité politique supposée, dans le respect et la confiance mutuels, la présidence de nos séances publiques. (M. Jean-Pierre Michel applaudit.) Nous avons besoin, là aussi, des secrétaires.
Dans ce contexte de confiance républicaine, la présidence de séance et les pouvoirs qui s’y attachent appartiennent au seul président de séance, sans que ce dernier dépende d’une quelconque tutelle.
Mme Catherine Tasca. Absolument !
M. le président. C’est, me semble-t-il, l’une des bases de notre « vouloir vivre ensemble » sénatorial.
C’est au nom du principe de collégialité que nous avons renforcé le rôle de la conférence des présidents et du bureau du Sénat, qui sont véritablement devenus nos instances politiques communes de décision.
À cet égard, je tiens à saluer l’action décisive d’une autre de nos instances collectives, le conseil de questure. Je rappelle que le conseil a joué un rôle déterminant dans la mise en œuvre et dans l’exécution des objectifs que nous avons décidés ensemble depuis novembre 2008 : le recentrage de nos activités sur les missions que nous attribue la Constitution ; la transparence, l’optimisation et le contrôle interne, avec la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne ; la stabilisation de notre budget au niveau de 2008 pour les trois exercices 2009, 2010 et 2011 ; l’optimisation de nos moyens humains – mais aussi immobiliers et matériels - en considération de l’évolution de nos missions.
Ces mesures étaient nécessaires, nous en sommes responsables devant nos concitoyens.
C’est dans cet esprit collectif, aussi, que nous avons voulu intensifier notre politique de communication.
Nous placerons cette ambition au service, et sous le contrôle, du pluralisme de notre assemblée. Nous allons la soumettre au principe de l’équité de traitement entre les travaux de chacun d’entre nous et de chacune de nos instances collectives de travail, au premier rang desquelles nos commissions et, bien sûr, sous leur responsabilité, nos groupes politiques.
Je voudrais également souligner la mise en place de deux structures nouvelles, parce qu’elles me semblent porteuses pour l’avenir de nos travaux et parce qu’elles soulignent deux expertises particulières du Sénat : la délégation sénatoriale à la prospective et la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, qui viennent s’ajouter à la délégation parlementaire aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et à l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Vous me permettrez d’ajouter un mot sur deux initiatives que nous avons prises ensemble au sein du bureau, mais sur proposition de certains de nos collègues. Elles illustrent la conception de la vie publique qui est celle du Sénat.
Au mois d’octobre 2009, en concertation avec l’Assemblée nationale, notre bureau a adopté un dispositif d’encadrement de l’action des groupes d’intérêt. Cette volonté de transparence me paraissait nécessaire ; la mesure ne constitue qu’une première étape.
Le bureau a également décidé la création d’un comité de déontologie parlementaire. Loin de n’être qu’un symbole, c’est le fruit de la rencontre de deux observations, l’une de M. Robert Badinter, l’autre de M. Josselin de Rohan. Ce besoin d’éthique est tout à la fois un signal et une ambition.
Avant de nous quitter pour un repos plus mérité que jamais, me semble-t-il, et à la veille d’une année nouvelle, je voudrais saluer, en notre nom à tous, ceux qui ont travaillé à nos côtés tout au long de cette année de travail intense et de changements profonds.
Ce travail, ces changements, ces rodages ont beaucoup sollicité les fonctionnaires du Sénat, ainsi que les collaborateurs des groupes politiques et les assistants des sénateurs et des sénatrices. L’adaptation à un contexte institutionnel nouveau a modifié, autant que les nôtres, leurs conditions de travail, dans des proportions qui, pour certains, ont parfois été aux limites de ce qu’il est physiquement et psychologiquement supportable. J’en suis conscient. Je voudrais leur dire que cela n’a échappé à aucun d’entre nous. Je leur exprime notre gratitude à cet instant.
Je voudrais aussi remercier Public Sénat ainsi que les professionnels de la presse écrite et audiovisuelle, qui ont, je dois le dire, suivi nos travaux avec plus de constance tout au long de cette année de changement. Ils ont rendu compte de ce que, dans nos diversités et avec nos convictions, nous avons essayé de faire pour que le Sénat joue pleinement son rôle.
Mes chers collègues, à la fin de cette année, je forme le vœu que nous puissions, dans le respect des convictions de chacun et de notre institution, imprimer dès le mois de janvier 2010, année où nous aurons des rendez-vous extrêmement importants, la marque si particulière que le Sénat apporte à la démocratie dans notre pays. Notre pays en a besoin, tant il se cherche des repères.
Parce que nous sommes issus des territoires et parce que nous les représentons, nous pouvons incarner à la fois la stabilité et, dans le même temps, le dynamisme et l’avenir.
Permettez-moi pour conclure de vous souhaiter à toutes et à tous de très heureuses fêtes et une excellente année 2010. (Applaudissements.)
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quatorze heures cinquante, est reprise à quatorze heures cinquante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Représentation devant les cours d'appel
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
(Texte de la commission)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, portant réforme de la représentation devant les cours d’appel (nos 16, 140, 139).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 15.
Article 15
Les sommes dues en raison des licenciements intervenant sur le fondement du premier alinéa de l’article 14, en application de la convention conclue au titre du reclassement des salariés licenciés, pour la part non prise en charge par le Fonds national pour l’emploi, sont remboursées à la chambre nationale des avoués près les cours d’appel, qui est chargée de leur versement.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 13, présenté par MM. Godefroy, Michel et Anziani, Mme Klès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les indemnités de licenciement ou de démission dues aux salariés d'avoués en application de l'article 14 sont directement prises en charge par le fonds d'indemnisation prévu à l'article 19. Cette prise en charge ne constitue pas une indemnisation de l'avoué au sens de l'article 13.
Les sommes dues en raison des licenciements, en application de la convention conclue au titre du reclassement des salariés licenciés, pour la part non prise en charge par le Fonds national pour l'emploi, sont remboursées au fonds d'indemnisation qui est chargé de leur versement.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement concerne les indemnités de licenciement ou de démission dues aux salariés d'avoués.
Nous souhaitons que le FNE paie directement aux salariés l'indemnisation qui leur est due et que celle-ci ne soit donc pas supportée par les avoués.
En effet, le licenciement est le fait non pas des avoués eux-mêmes, mais de la loi.
M. le président. L'amendement n° 51 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les sommes de toute nature liées à la rupture du contrat de travail, les indemnités de reclassement ainsi que toute mesure de reconversion et d'accompagnement dues aux salariés sur le fondement de l'article 14 pour la part non prise en charge par le Fonds national pour l'emploi, sont prises en charge par le fonds d'indemnisation institué à l'article 19 qui est chargé de leur versement au fur et à mesure de leur exigibilité.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Cet amendement a pour objet de prévoir que le fonds d'indemnisation institué à l'article 19 interviendrait comme guichet unique et serait directement chargé du paiement de l'indemnité de rupture prévue à l'article 14, mais également des sommes légalement dues au titre de la rupture du contrat de travail – je pense au préavis ou aux congés payés –, ainsi que des sommes destinées à favoriser le reclassement des salariés, comme l’aide à l'embauche, à la mobilité, à la création d'entreprise, à la formation ou la reconversion et à la validation des acquis de l'expérience.
M. le président. L'amendement n° 43 rectifié bis, présenté par M. Vial et Mmes Des Esgaulx et Descamps, est ainsi libellé :
Après les mots :
convention conclue
insérer les mots :
, dans un délai de trois mois après la promulgation de la loi,
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Cet amendement a pour objet de prévoir un délai de trois mois après la promulgation de la loi.
En effet, alors qu’un certain nombre de mesures d’accompagnement doivent intervenir dès la promulgation de la loi, rien n’est vraiment prévu.
Ainsi, il apparaît essentiel de préciser la date à laquelle la signature de la convention entre l'État et les représentants des avoués interviendra, faute de quoi le reclassement des bénéficiaires risque de ne pas être assuré.
M. le président. Les amendements nos 4 rectifié et 38 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 4 rectifié est présenté par M. Détraigne, Mme Dini, M. Dubois, Mme N. Goulet, MM. Merceron, Amoudry, Borotra, J. Boyer, Deneux et Soulage et Mmes Morin-Desailly et Payet.
L'amendement n° 38 rectifié est présenté par M. Vial et Mmes Des Esgaulx et Descamps.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Remplacer les mots :
à la chambre nationale des avoués près les cours d'appel
par les mots :
au fonds d'indemnisation prévu à l'article 19
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.
M. Yves Détraigne. Il n’y a aucune raison que la responsabilité d’indemniser les salariés des avoués incombe à la Chambre nationale des avoués près les cours d’appel.
En effet, la décision de licencier ces salariés relève non pas des avoués, mais de l’État.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l'amendement n° 38 rectifié.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. De notre point de vue, il n’y a aucune raison valable d’imposer aux avoués d’avancer les indemnités de licenciement.
Nous pensons comme nos collègues qu’il est normal que le fonds verse directement aux salariés l’indemnisation qui leur est due.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L’amendement n° 13 tend à prévoir le versement direct par le fonds d’indemnisation, d’une part, des indemnités de licenciement et de démission, d’autre part, des sommes dues au titre du reclassement.
Le premier point est d’ores et déjà satisfait par l’article 19 du texte de loi. Le second point relève de la même logique que l’amendement n° 51 rectifié.
Précisément, l’amendement n° 51 rectifié tend à faire prendre en charge par le fonds d’indemnisation l’ensemble des sommes dues aux salariés d’avoués au titre de leur reclassement qui ne seraient pas prises en charge par le FNE.
Il vise en outre toute rupture du contrat de travail, et pas exclusivement les licenciements.
Le système actuellement prévu apparaît plus pertinent, car il fait intervenir les acteurs du monde professionnel, FNE et Chambre nationale des avoués près les cours d’appel, dans une logique de conventionnement, avec, le cas échéant, un prestataire de services extérieur pour assurer certaines missions de reclassement. D’ailleurs, la négociation en cours de la convention prévue ne semble pas avoir suscité de difficultés, ni soulevé de protestations majeures.
Enfin, l’ensemble des sommes engagées sont soit prises en charge directement par le FNE, soit remboursées intégralement par le fonds d’indemnisation.
Il ne paraît pas opportun de remettre en cause le mécanisme proposé.
C’est la raison pour laquelle la commission est défavorable aux amendements nos 13 et 51 rectifié et en demande le retrait.
L’amendement n° 43 rectifié bis vise à prévoir que la convention conclue au titre du reclassement doit être signée dans un délai de trois mois après la promulgation de la loi. C’est là une idée intéressante. La convention est d’ores et déjà prévue et a fait l’objet de négociations avancées, mais il n’y a pas d’inconvénient à imposer un délai de conclusion qui garantira qu’elle interviendra suffisamment tôt. La commission est donc favorable à cet amendement.
Pour ce qui est des amendements identiques nos 4 rectifié et 38 rectifié, mon raisonnement sera le même que celui que j’ai développé à propos des amendements nos 13 et 51 rectifié, et j’en demande le retrait. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Je donnerai un avis global sur ces cinq amendements.
J’indique préalablement qu’il reviendra à la chambre nationale des avoués de conclure la convention de cellule de reclassement en lieu et place des employeurs, ce qui lui permettra d’assurer le suivi des mesures mises en œuvre en faveur des salariés. Je précise que la chambre nationale des avoués a donné son accord pour opérer cette centralisation, ce qui lui donnera la possibilité d’être davantage impliquée dans le suivi du reclassement des salariés.
De plus, les sommes remboursées à la chambre nationale des avoués porteront à 3 000 euros la prise en charge maximale par salarié, en fonction de la qualité du reclassement, alors que l’intervention du fonds national de l’emploi est plafonnée à 2 000 euros par bénéficiaire.
Le Gouvernement demande donc le retrait des amendements nos 13 et 51 rectifié ainsi que des amendements identiques nos 4 rectifié et 38 rectifié. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Pour ce qui est de l’amendement n° 43 rectifié bis de M. Vial et de Mme Des Esgaulx, si j’en comprends l’objet, il ne me paraît pas nécessaire puisque les partenaires sociaux discutent. Le comité technique a même été convoqué pour le 14 janvier prochain afin de finaliser la convention. A priori, les demandes d’ajustement qui nous avaient été transmises ont été satisfaites. La préoccupation des auteurs de l’amendement est donc déjà prise en compte et le problème devrait recevoir une solution satisfaisante.
Cet amendement ne soulève pas de difficulté, mais il n’a plus de raison d’être compte tenu du texte et de la procédure en cours. C’est pourquoi j’en demande le retrait. À défaut, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur Jacques Mézard, l’amendement n° 51 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 51 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 43 rectifié bis.
(L’amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. le président. Monsieur Détraigne, l’amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié est retiré.
Madame Des Esgaulx, l’amendement n° 38 rectifié est-il maintenu ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 38 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 15, modifié.
(L’article 15 est adopté.)
Article 16
Les demandes d’indemnisation présentées en application des articles 13, 14 et 15 sont formées avant le 31 décembre 2012.
Elles sont portées devant une commission nationale présidée par un magistrat hors hiérarchie de l’ordre judiciaire et composée d’un représentant du garde des sceaux, ministre de la justice, d’un représentant du ministre chargé du budget et de deux représentants des avoués près les cours d’appel.
Le président de la commission peut statuer seul sur les demandes d’indemnisation présentées en application des articles 14 et 15.
Les indemnités résultant de l’application de l’article 13 sont versées dans les six mois suivant le dépôt de la demande. Celles résultant de l’application de l’article 14 sont versées dans les deux mois du dépôt de la demande. Les remboursements résultant de l’application de l’article 15 sont versés dans les trois mois du dépôt de la demande.
Les décisions prises par la commission, ou par son président statuant seul, peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’État.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 62, présenté par M. Gélard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 1
Supprimer la référence :
13
II. - Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
les six mois suivant le dépôt de la demande
par les mots :
le mois suivant la décision du juge de l’expropriation
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination avec les modifications adoptées par la commission pour confier au juge de l’expropriation la fiscalisation des indemnités allouées aux avoués.
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par MM. Michel et Anziani, Mme Klès, M. Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les références :
des articles 13, 14 et 15
par la référence :
de l’article 13
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Nous souhaitons que les licenciements des salariés reçoivent la qualification précise de licenciement économique. Cela est tout à fait justifié juridiquement puisque le motif économique peut être appliqué à toute réorganisation ou à toute suppression d’emploi.
Nous souhaitons également préciser que la demande d’indemnisation des salariés ne sera pas limitée dans le temps.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. L’amendement no 12 vise à supprimer le délai dans lequel est enfermée la demande d’indemnisation formée par l’avoué pour obtenir le remboursement des sommes qu’il a versées à ses salariés en raison de leur licenciement.
Il est le complément d’un amendement précédent qui visait à supprimer toute limite de temps à l’application de la qualification de licenciement économique et sur lequel la commission a un avis défavorable. Par coordination, j’émets également un avis défavorable sur l’amendement n° 12.
M. Jean-Pierre Michel. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 12 est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 62 ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Il s’agit d’un amendement de coordination qui tient compte de la compétence du juge de l’expropriation.
La commission et le Gouvernement défendent deux procédures différentes, et le débat d’hier a montré que, à ce stade, nous n’avons pas réussi à nous mettre d’accord.
Cet amendement est cohérent avec la position de la commission, mais je ne peux logiquement y être favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 62.
(L’amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. le président. L’amendement n° 54, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 4, deuxième phrase
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
trois
La parole est à Mme la ministre d’État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Il s’agit d’un amendement de coordination avec les dispositions prévoyant le versement des indemnités de licenciement par le fonds d’indemnisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 16, modifié.
(L’article 16 est adopté.)
Article 17
Tout avoué près les cours d’appel peut demander, dès le 1er janvier 2010 et au plus tard le 31 décembre de la même année :
– un acompte égal à 50 % du montant de la recette nette réalisée telle qu’elle résulte de la dernière déclaration fiscale connue à la date de la publication de la présente loi ;
– le remboursement au prêteur, dans un délai d’un mois, du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou de parts de la société d’exercice à la date où ce remboursement prendra effet.
Lorsque l’avoué demande ce remboursement anticipé, le montant de l’acompte ne peut être supérieur au montant de l’indemnité due en application de l’article 13, déduction faite du montant du capital restant dû.
La décision accordant l’acompte et fixant son montant est prise par le président de la commission prévue à l’article 16.
L’acompte est versé dans les trois mois suivant le dépôt de la demande.
Les demandes de remboursement anticipé sont transmises au fonds institué par l’article 19.
Lorsque l’avoué a bénéficié du remboursement anticipé du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou de parts de la société d’exercice, le montant de ce capital est déduit du montant de l’indemnité due en application de l’article 13.
Lorsque l’avoué a bénéficié d’un acompte, celui-ci est imputé sur le montant de cette indemnité.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 55, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
- le remboursement au prêteur, dans un délai de trois mois, du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou des parts de la société d’exercice à la date à laquelle ce remboursement prendra effet.
II - Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
Lorsque l’avoué demande ce remboursement anticipé, le montant de l’acompte est fixé après déduction du montant du capital restant dû.
La parole est à Mme la ministre d’État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Cet amendement a un double objet.
En premier lieu, il vise à rétablir un délai de trois mois pour le remboursement au prêteur du capital restant dû au titre du prêt d’acquisition de l’office. En effet, un délai d’un mois risque d’être insuffisant pour permettre l’instruction de la demande de remboursement, procédure quelque peu compliquée qui implique, notamment, de vérifier le montant des pénalités de remboursement anticipées du prêt.
En second lieu, l’amendement vise à rétablir la notion d’acompte. Dans la rédaction de l’article qui a été adoptée, il faudrait pouvoir d’ores et déjà calculer l’indemnisation globale due puisque l’acompte versé devrait être du même montant que l’indemnité définitive, ce qui allongera mécaniquement l’instruction du dossier.
Au contraire, la logique de l’acompte est de prévoir des règles de calcul extrêmement simples afin d’aller le plus vite possible et de permettre aux avoués de présenter leur demande d’indemnisation dès la publication de la loi.
Cet amendement va donc dans le sens de l’accélération de l’indemnisation tout en tenant compte des délais raisonnables d’instruction.
M. le président. L’amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Fouché, Lefèvre, P. Blanc, Chatillon, Houpert, Bernard-Reymond et Beaumont, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 8
Remplacer les mots :
est déduit
par les mots :
n’est pas déduit
Cet amendement n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 55 ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale du projet de loi en ce qui concerne le calcul et le versement de l’acompte : l’acompte serait versé dans un délai de trois mois plutôt que dans un délai d’un mois à compter de la demande ; le montant de l’acompte serait fixé après déduction du montant du capital restant dû et non plus en tenant compte de l’indemnisation versée à l’avoué, déduction faite du montant du capital restant dû.
Les modifications apportées par la commission à cet article avaient pour objet de rendre possible un versement rapide de l’acompte pour permettre la liquidation de l’office et de remédier à la situation dans laquelle, compte tenu du montant du remboursement de l’emprunt, l’acompte versé à l’avoué était égal à zéro.
Dans la mesure où la principale dépense de liquidation, c’est-à-dire le versement des indemnités de licenciement, est maintenant prise en charge directement par le fonds d’indemnisation, il n’est plus nécessaire d’assurer aux avoués le versement de l’acompte dans les mêmes délais et pour les mêmes montants.
La commission émet un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 17, modifié.
(L’article 17 est adopté.)
Article 18
Lorsque l’avoué exerce à titre individuel, les demandes formées au titre des articles 13, 14 et 17 sont présentées par celui-ci ou par ses ayants droit.
Lorsque l’avoué exerce au sein d’une société :
1° les demandes formées au titre de l’article 14 sont présentées par la société ;
2° Les demandes formées au titre des articles 13 et 17 sont présentées par la société lorsque celle-ci est titulaire de l’office ou, dans le cas contraire, conjointement par chaque associé.
M. le président. L’amendement n° 63, présenté par M. Gélard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
1° Alinéa 1
Supprimer les mots :
13,
2° Alinéa 4
Remplacer les mots :
des articles 13 et
par les mots :
de l’article
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination avec le dispositif, prévu à l’article 13, qui vise à permettre aux avoués d’obtenir l’indemnisation de leur préjudice auprès du juge de l’expropriation et qui ne requiert dès lors plus qu’ils déposent une demande à ce titre auprès de la commission prévue à l’article 16.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. En coordination avec la position du Gouvernement, je ne peux être favorable à cet amendement !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Naturellement !
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié, présenté par M. Détraigne, Mme Dini, M. Dubois, Mme N. Goulet, MM. Merceron, Amoudry, Borotra, J. Boyer, Deneux et Soulage et Mmes Morin-Desailly et Payet, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
par la société lorsque celle-ci est titulaire de l’office ou, dans le cas contraire, conjointement par chaque associé
par les mots :
par le titulaire du droit de présentation
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement vise à clarifier la rédaction de l’article 18 et à préciser que c’est au titulaire du droit de présentation qu’il revient de présenter la demande d’indemnisation prévue par les articles 13 et 17.
En effet, lorsque la profession d’avoué est exercée dans le cadre d’une société, ce qui est assez fréquent, il n’y a pas nécessairement d’adéquation entre l’office, c’est-à-dire la société, et le détenteur du droit de présentation, c’est-à-dire le ou les associés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement ne me semble pas clarifier la rédaction de l’article 18.
Il tend à réserver au seul titulaire du droit de présentation le pouvoir de déposer auprès de la commission compétente les demandes d’indemnisation et de versement de l’acompte. Or vient d’être adopté l’amendement de coordination de la commission visant à supprimer au présent article la référence faite à la demande d’indemnisation, celle-ci étant adressée au juge de l’expropriation.
S’agissant de la demande de versement de l’acompte, il est légitime qu’elle émane de la société si cette dernière est titulaire de l’office, dans la mesure où la somme versée doit avant tout servir à assurer la liquidation de cet office. L’adresser directement aux avoués reviendrait à compliquer les choses plus qu’à ne les arranger.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Détraigne, l’amendement n° 6 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Compte tenu de la qualité du travail de M. le rapporteur, j’accepte de retirer cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 18, modifié.
(L’article 18 est adopté.)
Article 19
I. – (Non modifié) Il est institué un fonds d’indemnisation doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière.
Le fonds d’indemnisation est administré par un conseil de gestion composé d’un représentant du garde des sceaux, ministre de la justice, d’un représentant du ministre chargé du budget, d’un représentant de la Caisse des dépôts et consignations et de deux représentants des avoués près les cours d’appel.
Sa gestion comptable, administrative et financière est assurée par la Caisse des dépôts et consignations. Une convention passée entre l’État et la caisse fixe le montant et les modalités de rétribution de la caisse.
II. – Le fonds d’indemnisation est chargé du paiement des sommes dues aux avoués près les cours d’appel et aux chambres, ainsi que des sommes dues à leurs salariés en application de l’article 14, en application des décisions de la commission prévue à l’article 16 ou de son président.
Le fonds d’indemnisation procède au remboursement au prêteur du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou de parts de la société d’exercice à la date où il intervient. Il prend en charge les éventuelles indemnités liées à ce remboursement anticipé.
III. – (Non modifié) Les ressources du fonds sont constituées par le produit de taxes ainsi que le produit d’emprunts ou d’avances effectués par la Caisse des dépôts et consignations.
M. le président. L’amendement n° 64, présenté par M. Gélard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
1° Après les mots :
aux chambres,
insérer les mots :
en application des articles 13, 15 et 17,
2° Après les mots :
l’article 14
supprimer la fin de cet alinéa
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s’agit d’un simple amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 19, modifié.
(L’article 19 est adopté.)
Article 20
Un décret fixe les conditions d’application du présent chapitre :
– les modalités de désignation des membres de la commission prévue à l’article 16 et de leurs suppléants, et les modalités de son fonctionnement ;
– les modalités de désignation des membres du conseil de gestion du fonds institué par l’article 19 et les modalités de son fonctionnement ;
– la liste des justificatifs à fournir à l’appui des demandes présentées en application des articles 13, 14, 15 et 17. – (Adopté.)
Chapitre III
Dispositions relatives à l’accès aux professions judiciaires et juridiques
Article 21
(Non modifié)
Les avoués près les cours d’appel qui renoncent à faire partie de la profession d’avocat ou qui renoncent à y demeurer ainsi que les collaborateurs d’avoué justifiant, au plus tard à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l’examen d’aptitude à la profession d’avoué, peuvent, sur leur demande présentée dans le délai de cinq ans à compter de la date de publication de cette même loi, accéder aux professions d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, de notaire, de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d’huissier de justice, d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire. Les conditions dans lesquelles ils peuvent bénéficier de dispense partielle ou totale de stage, de formation professionnelle, d’examen professionnel, de titre ou diplôme sont fixées par décret en Conseil d’État.
Les conditions dans lesquelles les collaborateurs d’avoué, non titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué, peuvent, sur leur demande, présentée dans le même délai, être dispensés de certaines des conditions d’accès aux professions mentionnées au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, sur l’article.
M. Jean Louis Masson. Je souhaiterais profiter de la discussion de cet article pour m’inquiéter de l’évolution de la législation, qui, depuis un certain temps, tend à faciliter l’accès à la profession d’avocat.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est hors sujet !
M. Jean Louis Masson. Or, l’avocat joue un rôle extrêmement important dans une procédure : un procès se gagne plus souvent grâce à son habileté qu’en raison du bien-fondé de la cause défendue !
Dans l’exercice de notre mandat parlementaire, nous sommes tous les jours amenés à rencontrer des personnes qui ont été victimes d’avocats plus ou moins efficaces, voire négligents. Je m’inquiète donc que l’on continue d’ouvrir la porte de cette profession – ma remarque ne vaut pas pour les avoués, dont la compétence est évidente, mais l’article 21 s’applique aussi aux collaborateurs d’avoué. Il me semble qu’il faudrait subordonner l’accès à cette profession à une exigence de diplôme et de formation juridique.
Cette évolution m’inquiète : en effet, si nous savons d’où nous partons, nous ignorons où elle peut nous mener. Nous ne devrons pas nous étonner ensuite si nous recevons, dans nos permanences, de plus en plus de personnes qui se trouvent dans des situations inextricables à cause d’avocats qui ne suivaient pas leurs dossiers, ont laissé expirer des délais, voire se sont trompés de numéro de procédure… Je pourrais citer de nombreux exemples extravagants, et je ne pense pas que le cas de Metz soit particulier !
Je voterai cet article 21, mais je pense que la situation mérite malgré tout réflexion, car le client de l’avocat n’est souvent pas en mesure d’apprécier le niveau de la prestation qui lui sera assurée. Le client d’un restaurant est à même de juger la qualité des plats qui lui sont servis, mais une personne qui n’a jamais eu de contact avec le droit est dans l’incapacité d’évaluer la qualité de son avocat. Le problème est réel : plus les clients sont d’origine modeste et plus souvent ils se font « avoir » !
M. le président. L’amendement n° 48 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Remplacer les mots :
les collaborateurs d’avoué justifiant, au plus tard à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l’examen d’aptitude à la profession d’avoué
par les mots :
les personnes titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué, justifiant d’un exercice professionnel de deux ans minimum dans la profession d’avoué
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. La modification à laquelle tend cet amendement devrait permettre aux titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué de se reconvertir immédiatement et, donc, d’éviter des licenciements qui s’accompagneront nécessairement d’un coût.
M. le président. L’amendement n° 11, présenté par MM. Mazuir, Michel et Anziani, Mme Klès, M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Après les mots :
ainsi que les collaborateurs d’avoué
insérer les mots :
, et tout autre professionnel juridique,
La parole est à Mme Virginie Klès.
Mme Virginie Klès. L’article 21 permet aux avoués qui n’auraient pas intégré la profession d’avocat et aux collaborateurs titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué d’accéder à l’ensemble des professions juridiques et judiciaires libérales réglementées : avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, notaire, commissaire-priseur judiciaire, etc.
Cette passerelle vers les professions juridiques et judiciaires serait ouverte, pendant un délai de cinq ans à compter de la publication de la loi, « aux avoués […] qui renoncent à faire partie de la profession d’avocat ou à y demeurer » et « aux collaborateurs d’avoué justifiant, à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l’examen d’aptitude à la profession d’avoué ».
Le projet de loi tend donc à limiter la réparation des dommages résultant de l’application de la réforme aux seules personnes que celle-ci touche directement. Mais d’autres professionnels subissent indirectement les conséquences de la suppression du métier d’avoué : par exemple, certains avocats, après avoir suivi un stage et une préparation intensive, ont réussi l’examen d’aptitude à la profession d’avoué et s’estiment, à juste titre, lésés par la suppression de ce métier qu’ils avaient pensé, à un moment donné, pouvoir exercer.
Aussi, notre amendement tend à les faire bénéficier des mêmes possibilités de reconversion professionnelle que les avoués et leurs collaborateurs titulaires du diplôme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Ces deux amendements sont intéressants l’un et l’autre.
L’amendement n°48 rectifié vise à élargir les possibilités de reconversion des collaborateurs d’avoué qui auraient quitté leur employeur afin de se reconvertir sans attendre l’adoption définitive de la loi ni leur licenciement. Je souscris naturellement à cet objectif louable.
Toutefois, si les collaborateurs titulaires du diplôme d’aptitude ont nécessairement accompli un stage professionnel, il ne s’agissait pas forcément d’un stage de deux ans auprès d’un avoué : il est en effet possible qu’ils aient effectué deux stages d’un an, l’un auprès d’un avoué, l’autre auprès d’un avocat. Si l’amendement était adopté, certains collaborateurs risqueraient donc d’être exclus du bénéfice de cette passerelle, car ils ne rempliraient pas la condition de deux ans d’activité dans la profession d’avoué.
C’est pourquoi il me semble que l’amendement devrait tendre à remplacer les mots : « collaborateurs d’avoué » par les mots : « personnes ayant travaillé en qualité de collaborateur d’avoué postérieurement au 31 décembre 2008 et ». Si M. Mézard acceptait cette rectification, j’émettrais un avis favorable.
Quant à l’amendement n° 11, il vise à permettre aux professionnels du droit qui auraient réussi l’examen d’aptitude à la profession d’avoué d’accéder à l’ensemble des professions juridiques réglementées, comme les avoués et leurs collaborateurs.
Les passerelles sont destinées aux personnes qui subissent les conséquences directes de l’application de la loi, c’est-à-dire les avoués et leurs collaborateurs. Les personnes qui justifient de la réussite à l’examen mais qui ne travaillent pas dans une étude d’avoué n’ont donc pas vocation, en tant que telles, à bénéficier de ces passerelles.
Néanmoins, cet amendement ne me paraît pas dépourvu d’intérêt. C’est pourquoi je m’en remettrai à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Monsieur Mézard, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur ?
M. Jacques Mézard. Je l’accepte très volontiers, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 48 rectifié bis, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, et ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Remplacer les mots :
collaborateurs d’avoué
par les mots :
personnes ayant travaillé en qualité de collaborateur d’avoué postérieurement au 31 décembre 2008 et
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 48 rectifié bis et 11 ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 48 rectifié bis.
En ce qui concerne l’amendement n° 11, je rappelle que des conditions dérogatoires au droit commun ont été ménagées pour les collaborateurs des avoués parce que leur situation était tout à fait particulière, cela a été souligné pendant toute la discussion d’hier. Il convient donc de réserver le bénéfice de ces conditions dérogatoires aux personnes qui connaissent cette situation particulière. C’est pourquoi l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 11 est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 48 rectifié bis.
(L’amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. le président. L’amendement n° 11 n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 21, modifié.
(L’article 21 est adopté.)
Article 22
(Non modifié)
Par dérogation aux articles 11 et 12 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d’aptitude à la profession d’avocat, les collaborateurs d’avoué justifiant, au plus tard à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l’examen d’aptitude à la profession d’avoué.
Bénéficient des dispenses prévues à l’alinéa précédent les collaborateurs d’avoué qui justifient d’un nombre d’années de pratique professionnelle fixé par décret en Conseil d’État en fonction du niveau de diplôme obtenu. Les années de pratique professionnelle comptabilisées sont celles exercées en qualité de collaborateur d’avoué ou, postérieurement à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, en qualité de collaborateur d’avocat.
M. le président. L’amendement n° 30, présenté par M. Pillet, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
dispensés
insérer les mots :
de la condition de diplôme,
La parole est à M. François Pillet.
M. François Pillet. Cet amendement vise à améliorer la rédaction de l’article 22, qui organise une passerelle au profit des collaborateurs d’avoué en leur octroyant des dispenses de formation théorique et pratique et du certificat d’aptitude à la profession d’avocat.
Pour que cette passerelle fonctionne effectivement, il convient néanmoins de prévoir que les collaborateurs d’avoué puissent être dispensés de l’obligation d’être titulaires d’une maîtrise en droit et d’accepter qu’ils soient seulement titulaires de la licence en droit tout en justifiant de quatre ans de pratique professionnelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement tend à coordonner la rédaction de la loi avec celle de l’avant-projet de décret relatif aux passerelles offertes aux collaborateurs d’avoué titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué.
Ce raisonnement ne paraît pas tout à fait approprié, puisqu’il conviendrait plutôt que le décret respecte les prescriptions de la loi. Toutefois, il est vrai que l’article 11 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques rend nécessaire l’obtention du diplôme de maîtrise en droit pour accéder à la profession d’avocat. Dès lors, les facilités offertes aux collaborateurs d’avoué qui ne seraient titulaires que d’une licence seraient contraires à cette disposition.
Il semble donc préférable d’étendre également la dispense à cette condition de diplôme. Par conséquent, l’avis de la commission est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 47 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
les collaborateurs d’avoué justifiant, au plus tard à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l’examen d’aptitude à la profession d’avoué
par les mots :
les personnes titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué, justifiant d’un exercice professionnel de deux ans minimum dans la profession d’avoué
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Cet amendement a le même objet que l’amendement n° 48 rectifié bis, mais porte sur la dispense de formation théorique et pratique au certificat d’aptitude à la profession d’avocat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard. Avis favorable, sous réserve que les auteurs de l’amendement acceptent la même rectification qu’à l’amendement n° 48 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Même avis que la commission, par coordination avec ce qui vient d’être voté à l’article 21.
M. le président. Monsieur Mézard, acceptez-vous la rectification suggérée par M. le rapporteur ?
M. Jacques Mézard. Je l’accepte, monsieur le président !
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 47 rectifié bis, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, et ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
collaborateurs d’avoué
par les mots :
personnes ayant travaillé en qualité de collaborateur d’avoué postérieurement au 31 décembre 2008 et
Je mets aux voix l’amendement n° 47 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 22, modifié.
(L’article 22 est adopté.)
Article 23
(Non modifié)
Les personnes qui, à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, sont inscrites depuis au moins un an sur le registre du stage tenu par la chambre nationale des avoués pour l’accès à la profession d’avoué peuvent accéder à la formation théorique et pratique prévue à l’article 12 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée pour l’exercice de la profession d’avocat, sans avoir à subir l’examen d’accès au centre régional de formation professionnelle des avocats. – (Adopté.)
Chapitre IV
Dispositions transitoires
Article 24
À compter de la publication de la présente loi, les avoués près les cours d’appel peuvent exercer simultanément leur profession et celle d’avocat. L’inscription au barreau est de droit sur simple demande des intéressés.
Toutefois, ils ne peuvent simultanément postuler et plaider dans les affaires introduites devant la cour d’appel avant cette date pour lesquelles la partie est déjà assistée d’un avocat, à moins que la partie renonce à cette assistance.
M. le président. L’amendement n° 35 rectifié, présenté par M. Vial et Mmes Des Esgaulx et Descamps, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Je sais que cet amendement ne suscite guère l’enthousiasme de M. le rapporteur…
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ni de la commission !
M. Jean-Pierre Vial. … ni de la commission des lois – abstraction faite toutefois des membres de la commission qui, comme moi, défendent cet amendement !
La principale objection opposée aux auteurs de cet amendement est son caractère « pro-avocats » : refuser aux avoués la possibilité d’exercer leur future profession d’avocat pendant la période transitoire pourrait effectivement apparaître comme dicté par le souci de protéger les intérêts des avocats.
Toutefois, les auteurs de cet amendement – faites-nous la grâce de nous accorder au moins ce point-là ! – considèrent que, pendant cette période transitoire, les relations doivent être facilitées entre avoués et avocats, certes, mais également entre avoués.
Imaginons que, dans une cour d’appel moyenne comptant une petite dizaine d’avoués, un avoué soit déjà convenu avec un cabinet d’avocats important de devenir l’avocat-avoué qui fera la procédure – nous savons que des discussions sont déjà en cours entre les avoués et les avocats, au niveau institutionnel. Dans un tel cas, un avoué qui exercerait déjà en qualité d’avocat pourrait ouvrir immédiatement son cabinet d’avocat et remplir les deux fonctions, tandis que les autres avoués de cette même cour d’appel seraient condamnés à exercer leur profession d’avoué jusqu’à l’échéance et à ne pouvoir de facto devenir avocat avant que celle-ci n’intervienne.
Dans un souci d’équilibre entre les avoués et les avocats, mais également entre les avoués, il me semblerait préférable que la mise en œuvre de la réforme n’intervienne qu’à partir de l’expiration du délai de six mois, sans que soit prévue de période où certains avoués se trouveraient dans cette double situation.
C’est la raison pour laquelle je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Mon cher collègue Jean-Pierre Vial, vous entendrez d’abord l’avis de la commission !
Celle-ci, quitte à paraître plus naïve que vous, n’entend pas prendre en considération cette sorte de « cuisine », cette négociation dans l’ombre que vous avez décrite.
La question du délai de transition a constitué un problème très important lors de la rédaction du rapport. Plusieurs solutions étaient envisageables.
La première consistait à conserver une période transitoire d’un ou deux ans, certains souhaitant même trois ans. On aurait ainsi pu aller jusqu’en 2014 !
Deux tendances s’affrontaient effectivement, allant dans le sens l’une d’une période transitoire courte, l’autre d’une période transitoire longue. Cette dernière emportait peut-être l’adhésion d’un certain nombre d’avoués, mais leur personnel, ne pouvant se satisfaire d’une aussi longue incertitude sur leur sort, ne partageait pas ce point de vue.
Nous en sommes donc restés à une formule très courte : une période transitoire durant, selon la date de l’adoption définitive du projet de loi, entre six et huit mois. Si nous trouvons rapidement un terrain d’entente avec Mme la ministre d’État et avec l’Assemblée nationale, nous pouvons espérer que le vote interviendra en mars ou en avril prochains et que la loi entrera en vigueur le 1er janvier 2011. Cela nous laissera un délai de huit mois pour mettre progressivement en place les différentes dispositions. Si l’adoption n’a lieu qu’en juin, ce délai sera raccourci à six mois.
Les avocats, quant à eux, préconisaient une deuxième solution, qui consistait à appliquer immédiatement la loi adoptée, les professions d’avocat et d’avoué étant fusionnées sans délai.
Il ne nous a pas paru possible de retenir cette solution. La période transitoire est nécessaire, notamment parce que l’avoué n’a pas de clientèle – il ne faut pas l’oublier ! – et qu’il doit faire face à une véritable mutation. De plus, la menace de rupture d’égalité ne paraît pas bien réelle : que représentent 445 avoués face à 48 000 avocats ? Pas même 1 % du total ! Cet aspect doit être pris en compte.
Pendant une période relativement courte, les avoués doivent pouvoir remplir la fonction d’avocat, ce qui leur laissera, ainsi qu’à leur personnel, le temps de s’adapter.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 35 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Sans reprendre l’argumentation de M. le rapporteur, je voudrais rappeler, d’une part, que les avoués sont peu nombreux et, d’autre part, que la période de transition sera brève, alors même que certains la souhaitaient beaucoup plus longue.
Nous sommes donc parvenus à un équilibre, résultat auquel a également contribué la concertation que nous avons menée. La solution retenue me semble sage : elle permet aux avoués de s’adapter aux nouvelles dispositions sans pour autant, compte tenu de la durée extrêmement brève de la période de transition – six à huit mois, comme l’indiquait à l’instant M. le rapporteur –, engendrer de distorsion de concurrence.
Je souhaiterais donc que cet amendement soit retiré. Dans le cas contraire, je serai obligée d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Vial, l’amendement n° 35 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Vial. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 35 rectifié est retiré.
L’amendement n° 56, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
À la fin de cet alinéa, remplacer les mots :
à moins que la partie renonce à cette assistance
par les mots :
à moins que ce dernier renonce à cette assistance
La parole est à Mme la ministre d’État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Pendant la période transitoire, l’avoué et l’avocat intervenant dans un même dossier gardent leurs fonctions. Toutefois, comme l’avoué conserve le monopole de la postulation durant cette période, mais peut, en parallèle, exercer la profession d’avocat, il faut bien entendu préserver un équilibre entre les deux professions, ce point vient d’être évoqué. Pour cela, il faut éviter les pressions de l’une ou l’autre profession sur le client.
C’est la raison pour laquelle je vous propose d’en revenir à l’idée que, dans de tels dossiers, seul l’avocat peut renoncer à intervenir. Il s’agit de nouveau de tenir compte du sentiment de concurrence déloyale qui pourrait apparaître et, plus particulièrement, d’éviter tous les frottements entre les deux professions qui pourraient en résulter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement intelligent aura pour conséquence d’éviter toute suspicion d’influence de l’avoué sur la partie intéressée. Notre avis est très favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 24, modifié.
(L’article 24 est adopté.)
Article 25
(Non modifié)
Si elles ne sont pas dissoutes, les sociétés constituées en vue de l’exercice de la profession d’avoué ont pour objet social, dès la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, l’exercice de la profession d’avocat. Leurs membres disposent d’un délai de six mois à compter de cette date pour en adapter les statuts et, notamment, le montant du capital social. – (Adopté.)
Article 26
(Non modifié)
La renonciation par l’avoué près les cours d’appel à faire partie de la profession d’avocat par dérogation au premier alinéa du I de l’article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée, est exercée au plus tard trois mois avant la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi.
Le choix par l’avoué d’être inscrit à un barreau autre que celui prévu à l’article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée est exercé dans le même délai.
Les modalités selon lesquelles sont exercés la renonciation et le choix prévus respectivement aux premier et deuxième alinéas du présent article sont fixées par décret.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Détraigne, Mme Dini, M. Dubois, Mme N. Goulet, MM. Merceron, Amoudry, Borotra, J. Boyer, Deneux et Soulage et Mmes Morin-Desailly et Payet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les avoués qui renoncent à exercer la profession d’avocat dans les conditions prévues au II de l’article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, pourront, dès la promulgation de la loi, présenter au garde des Sceaux, ministre de la justice, une demande d’acceptation de leur démission de leur fonction d’avoué ou leur retrait de la société professionnelle dont ils sont membres, dans les conditions prévues au décret n° 88-814 du 12 juillet 1988
L’arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice, devra faire l’objet d’une publication dans les trois mois de la demande et prendra effet à la date de sa publication.
Les avoués démissionnaires percevront leur indemnisation conformément aux dispositions de la présente loi.
À la demande du premier président de la cour d’appel un suppléant pourra être nommé dans les conditions prévues au décret n° 55-604 du 20 mai 1955 et au décret n° 56-221 du 29 février 1956 en cas de démission d’un avoué ou de tous les associés d’une société professionnelle.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Il nous paraît nécessaire de prévoir les conditions du retrait des avoués qui souhaiteraient quitter la profession, pour quelque cause que ce soit. L’amendement a donc pour objet de garantir la liberté de se retirer aux avoués qui souhaiteront le faire avant la fin de la période dite transitoire et l’entrée en vigueur de la loi entraînant la suppression des offices.
M. le président. L’amendement n° 46 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Toutefois, nonobstant cette renonciation, l’avoué conserve la possibilité, à tout moment, dans un délai de dix ans à compter de la date prévue à l’article 34, de s’inscrire au barreau de son choix.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Au-delà de notre désaccord sur le principe de la suppression de la profession d’avoué, nous considérons qu’il convient, au cas où ce projet de loi serait voté, d’offrir aux avoués, qui incontestablement le méritent, le plus de solutions possible pour limiter les conséquences négatives de la réforme.
Ainsi, un avoué qui n’aurait pas fait le bon choix lors de la suppression de la profession devrait pouvoir se réorienter et s’inscrire finalement au barreau. Le délai de dix ans retenu pour la renonciation définitive à la profession d’avocat nous semble conforme aux statuts de la profession d’avoué.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. L’amendement n° 7 rectifié tend à permettre aux avoués qui quitteraient leurs fonctions après la promulgation de la loi, mais avant la fin de la période transitoire, de bénéficier du dispositif d’indemnisation.
Aux termes de l’article 13 du présent projet de loi, le dispositif d’indemnisation a vocation à s’appliquer aux avoués qui sont en activité à la date de la réforme et qui subiront de ce fait un préjudice.
Aucune précision utile n’est donc apportée au travers de cet amendement, dont nous demandons le retrait ou sur lequel, à défaut, nous émettrons un avis défavorable.
L’amendement n° 46 rectifié est déjà satisfait. En effet, le statut de la profession d’avoué dispose que « sont dispensés de l’examen d’aptitude professionnelle et du stage les anciens avoués près d’une cour d’appel ayant cessé leurs fonctions depuis moins de dix ans ». L’amendement tend à reprendre la même logique pour permettre aux anciens avoués de décider de devenir avocats dans les dix ans suivant leur renonciation à cette profession, ce qui correspond aux dispositions de l’article 97 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat.
Cette précision peut toutefois être utile. Son apport n’est pas considérable par rapport à la législation actuelle, mais elle va dans le bon sens. Notre avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Les préoccupations exprimées au travers de ces deux amendements sont déjà prises en compte dans le projet de loi et, s’agissant plus particulièrement des délais, dans le projet de décret que j’ai proposé de vous remettre. Ces amendements me paraissent donc inutiles, puisque déjà satisfaits par les dispositions existantes, et j’en demande le retrait.
M. le président. Monsieur Détraigne, l’amendement n° 7 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Sous le bénéfice des explications de M. le rapporteur et de Mme la ministre d’État, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié est retiré.
Monsieur Mézard, l’amendement n° 46 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Nous sommes satisfaits des réponses qui viennent de nous être apportées et nous retirons cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 46 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 26.
(L’article 26 est adopté.)
Article 27
(Non modifié)
Dans les instances en cours à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, l’avoué antérieurement constitué qui devient avocat conserve, dans la suite de la procédure et jusqu’à l’arrêt sur le fond, les attributions qui lui étaient initialement dévolues. De même, l’avocat choisi par la partie assure seul l’assistance de celle-ci. Ces dispositions s’appliquent sous réserve de la démission, du décès ou de la radiation de l’un de ces auxiliaires de justice ou d’un accord entre eux ou encore d’une décision contraire de la partie intéressée.
Dans tous les cas, chacun est rémunéré selon les dispositions applicables avant cette entrée en vigueur.
L’avoué qui renonce à devenir avocat avise la partie, au plus tard trois mois avant la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, qu’il lui appartient de choisir l’avocat qui se constituera comme postulant à compter de cette date.
Dans le cas où la partie est bénéficiaire de l’aide juridictionnelle et à défaut d’avocat désigné, l’avoué qui renonce à devenir avocat en avise le bâtonnier afin que soit désigné un avocat habilité à le substituer.
L’avoué dessaisi est rémunéré des actes accomplis antérieurement à son dessaisissement selon les dispositions applicables avant la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 37 rectifié, présenté par M. Vial et Mme Descamps, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1, dernière phrase
Supprimer les mots :
ou encore d’une décision contraire de la partie intéressée
II. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
L’avoué dont la mission a pris fin, quel qu’en soit le motif, dans une instance en cours à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi est rémunéré des actes accomplis antérieurement à son dessaisissement selon les dispositions applicables avant cette même date.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Puisque nous partons du principe que l’avoué peut arrêter son activité à tout moment, cet amendement tend à prévoir qu’il soit rémunéré pour la période d’activité antérieure à ce dessaisissement conformément à la pratique en la matière.
M. le président. L’amendement n° 9 rectifié, présenté par M. Détraigne, Mme Dini, M. Dubois, Mme N. Goulet, MM. Merceron, Amoudry, Borotra, J. Boyer, Deneux et Soulage et Mmes Morin-Desailly et Payet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1, dernière phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ou de l’avoué constitué
II. - Après l’alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
L’avocat ou l’avoué dont les attributions cessent en application de l’alinéa précédent n’est déchargé de son mandat qu’après avoir informé son mandant, le cas échéant l’avocat plaidant ou l’avoué constitué pour la partie, le juge et la partie adverse.
Lorsque l’avoué cesse son concours en application de l’alinéa premier du présent article, son mandat prend fin soit à la date de l’information donnée à l’alinéa précédent, dans le cas où l’avocat assistant la partie appartient à un barreau du ressort de la Cour, lequel assume alors immédiatement la mission de représentation, soit au jour où il est remplacé par un nouvel avocat postulant, au besoin commis par le bâtonnier, dans le cas où l’avocat assistant la partie n’appartient pas à un barreau du ressort de la Cour.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. L’article 27 pose le principe selon lequel l’avoué antérieurement constitué qui devient avocat conserve les attributions qui lui étaient initialement dévolues.
Des dérogations à ce principe sont néanmoins prévues, notamment en cas de « décision contraire de la partie intéressée ». La partie peut alors décider unilatéralement et au cas par cas, dossier par dossier, de la cessation des fonctions de l’avoué. Il convient pour le moins – c’est une question d’équilibre – que l’avoué, à qui est imposée la suppression de sa profession, puisse de manière réciproque décider librement, dossier par dossier, de cesser son intervention.
Cet amendement a donc pour objet, d’une part, de permettre à l’avoué, dans le respect d’une stricte réciprocité avec la partie, de mettre fin à son intervention dans les instances en cours et, d’autre part, d’éviter les hypothèses d’interruptions d’instance, qui seraient un facteur évident de ralentissement des affaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. L’amendement n° 37 rectifié tend à supprimer la possibilité, pour la partie, de renoncer aux services de son avoué ou aux services de son avocat à compter de la disparition des offices d’avoués. Il vise en outre à préciser les conditions de rémunération des avoués pour les actes accomplis avant qu’ils n’aient cessé leur activité.
Ces modifications ne semblent pas opportunes.
En effet, la réforme a pour objectif de simplifier l’accès à la justice d’appel. Le justiciable doit en être le bénéficiaire. Il paraît donc souhaitable que la partie puisse renoncer aux services soit de son avoué devenu avocat, soit de son avocat dès lors que ce dernier pourra postuler en appel.
En outre, le dernier alinéa de l’article 27 paraît assurer une rémunération adaptée aux avoués dessaisis d’un dossier.
Par conséquent, nous demandons le retrait de cet amendement. Sans cela, notre avis sera défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 9 rectifié, les dispositions qu’il contient n’entrent pas du tout dans l’optique que nous avons retenue jusqu’à présent, qui consiste justement à laisser le choix aux parties, et non à l’avocat ou à l’avoué. De plus, l’amendement est très largement satisfait. Par conséquent, nous en demandons le retrait ; à défaut, nous émettrons un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Nous demandons le retrait de l’amendement n° 37 rectifié, car l’un des droits essentiels pour les parties est celui de choisir l’auxiliaire de justice qui les représente. En outre, M. le rapporteur a très clairement expliqué que, en matière de rémunération, les règles déjà prévues donnent satisfaction.
Enfin, nous partageons l’avis de la commission sur l’amendement n° 9 rectifié.
M. le président. Monsieur Jean-Pierre Vial, l’amendement n° 37 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Vial. Je le retire, monsieur le président, même si les explications sont loin de nous convaincre complètement.
M. le président. L’amendement n° 37 rectifié est retiré.
Monsieur Yves Détraigne, l’amendement n° 9 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. J’ai les mêmes interrogations que mon collègue Jean-Pierre Vial. Comme je l’ai expliqué, cet amendement a pour objet d’instaurer un principe logique de réciprocité. Or les explications de M. le rapporteur ne m’ont pas donné l’impression que cette réciprocité soit assurée. Peut-être pourrait-il nous apporter quelques précisions supplémentaires ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L’amendement présenté par M. Yves Détraigne tend à permettre à l’avoué antérieurement constitué et devenu avocat de renoncer à représenter une partie après la disparition de sa profession.
Cette modification n’a jamais été évoquée au cours des auditions. Il semble que la possibilité donnée à l’avocat et à l’avoué de se mettre d’accord sur les modalités d’assistance de la partie répond beaucoup mieux à la question.
En effet, si l’avoué souhaite se retirer, l’avocat voudra probablement récupérer la totalité du dossier. Les auxiliaires peuvent également se retirer tous les deux, auquel cas le retrait de l’avocat ne peut intervenir sans qu’un remplaçant ait été trouvé par la partie ou, à défaut, désigné par le bâtonnier, comme le prévoit l’article 419 du code de procédure civile.
Enfin, je souligne que nous avons déjà adopté un amendement prévoyant que ce sont les parties qui, en fin de compte, choisiront soit l’avoué devenu avocat, soit l’avocat.
Par conséquent, cet amendement me paraît très largement satisfait.
M. le président. Monsieur Détraigne, M. le rapporteur a-t-il répondu à vos interrogations ?
M. Yves Détraigne. Compte tenu des explications beaucoup plus complètes et plus claires qui viennent d’être apportées, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 9 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 27.
(L’article 27 est adopté.)
Article 28
(Non modifié)
L’interdiction temporaire d’exercice ainsi que les peines disciplinaires prononcées à l’encontre d’un avoué près les cours d’appel avant la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi ou postérieurement à celle-ci par application du présent article, continuent à produire leurs effets dans le cadre de la profession réglementée à laquelle l’avoué accède en application de la présente loi.
Les pouvoirs des juridictions disciplinaires sont prorogés à l’effet de statuer sur les procédures pendantes devant elles à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi. Les procédures engagées à compter de cette date sont de la compétence du conseil de discipline prévu à l’article 22 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée, quelle que soit la date des faits poursuivis, sauf si leur auteur a accédé à l’une des professions visées à l’article 21 de la présente loi. Dans ce cas, les procédures engagées à compter de la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi relèvent de l’instance disciplinaire compétente pour la profession exercée par l’ancien avoué, quelle que soit la date des faits pour lesquels les procédures sont engagées. Dans tous les cas, seules peuvent être prononcées les sanctions encourues à la date des faits. – (Adopté.)
Article 29
(Non modifié)
La chambre nationale des avoués près les cours d’appel est maintenue en tant que de besoin jusqu’au 31 décembre 2014, à l’effet notamment de traiter des questions relatives au reclassement du personnel des offices, ainsi qu’à la gestion et à la liquidation de son patrimoine.
Les mandats en cours, à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, des délégués siégeant à la chambre nationale, des membres de son bureau et des clercs et employés membres du comité mixte sont prorogés jusqu’à la dissolution de la chambre nationale.
Un décret en Conseil d’État fixe les conséquences de la suppression de la bourse commune des chambres de compagnie.
M. le président. L’amendement n° 36, présenté par M. Vial et Mmes Des Esgaulx et Descamps, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
La chambre nationale des avoués près les cours d’appel est maintenue jusqu’au 31 décembre 2014, à l’effet notamment de traiter des questions relatives à la défense des intérêts moraux et professionnels des anciens avoués près les cours d’appel, au reclassement du personnel des offices et des structures professionnelles, comme des anciens avoués eux-mêmes, à la gestion et à la liquidation de son patrimoine, et d’une façon générale à l’ensemble des conséquences résultant de l’application de la présente loi.
À compter du 1er janvier 2011, le budget de la chambre nationale sera pris en charge selon les modalités prévues à l’article 19 et prendra notamment en compte les missions citées par l’alinéa précédent.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Cet amendement est lié à la nécessité d’accompagner et de prendre en compte les intérêts de la profession d’avoué, quand bien même cette profession disparaîtrait en 2010.
Madame le ministre d’État, vous avez souligné tout à l’heure la part que la chambre nationale des avoués avait prise dans les négociations qui ont conduit à préciser les conditions dans lesquelles les personnels seront accompagnés. A contrario, qu’adviendrait-il de la mise en œuvre de l’accompagnement si l’un de ses artisans disparaissait ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement vise à modifier l’article 29 du projet de loi afin de préciser que la chambre nationale des avoués est maintenue, mais pas seulement « en tant que de besoin », jusqu’au 31 décembre 2014. Elle serait par ailleurs chargée de la défense des intérêts moraux et professionnels des anciens avoués et du reclassement de ceux-ci. Son budget serait alors alimenté par le fonds d’indemnisation.
Les missions évoquées dans l’amendement ne relèvent pas de la chambre nationale des avoués. Le projet de loi organise les modalités de reclassement des avoués qui deviendront avocats ou prévoit des passerelles vers d’autres professions.
Il paraît cependant souhaitable d’obtenir du Gouvernement des précisions quant aux modalités de financement de l’activité résiduelle de la chambre nationale après la suppression des offices d’avoués.
Sous réserve des indications que vous pourrez nous donner, madame le ministre d’État, je solliciterai le retrait de cet amendement ; sinon, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État. Je rappelle tout d’abord que le projet de loi prévoit le maintien de la chambre nationale des avoués jusqu’au 31 décembre 2014 pour qu’elle puisse traiter, notamment, des questions relatives au reclassement des personnels des offices, à la gestion et à la liquidation du patrimoine.
En ce qui concerne le reclassement et la mise en œuvre de la réforme, je renouvelle ma proposition que soit créé un groupe de travail, auquel seraient associés les parlementaires, chargé du suivi et de la mise en œuvre de la réforme. C’est là un élément important.
En ce qui concerne le problème du financement, comme l’a souligné le rapporteur, la chambre nationale sera maintenue, mais ses pouvoirs et ses missions seront très limités puisqu’il s’agira essentiellement de traiter des questions relatives au reclassement des salariés et de liquider le patrimoine. Or ce patrimoine est relativement important, et nous avons calculé que sa liquidation devrait largement couvrir les besoins en financement, compte tenu du peu d’activité résiduelle, sans qu’il soit nécessaire de leur affecter le produit de la taxe acquittée par les parties en appel.
Par conséquent, sur ces deux points, les dispositifs que je vous propose apportent toutes les garanties. La participation des parlementaires à cette action me paraît également de nature à vous satisfaire.
M. le président. Monsieur Vial, l’amendement n° 36 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Vial. Compte tenu des informations qui viennent d’être données, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 36 est retiré.
Je mets aux voix l’article 29.
(L’article 29 est adopté.)
Article 30
(Non modifié)
Un décret fixe les modalités selon lesquelles, à compter de la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, les administrateurs élus représentant les avoués près les cours d’appel à la caisse d’assurance vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires siègent également au conseil d’administration et à l’assemblée générale de la caisse nationale des barreaux français jusqu’à leur renouvellement. – (Adopté.)
Chapitre V
Dispositions diverses et finales
Article 31
I. – Les mots : « avoué » et « avoués » sont respectivement remplacés par les mots : « avocat » et « avocats » :
1° À l’article 13 de l’ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d’attribution entre les tribunaux et l’autorité administrative ;
2° Au premier alinéa de l’article 3 de la loi n° 56-672 du 9 juillet 1956 instituant diverses mesures de protection envers certains militaires ;
3° (Supprimé)
4° Aux dix-huitième alinéa du a et huitième alinéa du b du 2 de l’article 64 du code des douanes ;
5° Aux dix-neuvième alinéa du II et quatrième alinéa du V de l’article L. 16 B et aux dix-huitième alinéa du 2 et troisième alinéa du 5 de l’article L. 38 du livre des procédures fiscales ;
6° Au deuxième alinéa des articles 418, 544 et 576 du code de procédure pénale ;
7° (nouveau) Au II de l’article 10 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l’attente du vote de la loi instituant une prestation d’autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l’institution d’une prestation spécifique dépendance ;
8° (nouveau) Au premier alinéa du V et du VI de l’article 34 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité ;
9° (nouveau) Au premier alinéa du V et du VI de l’article 7-1 de la loi n° 2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales ;
10° (nouveau) Au premier alinéa du V et du VI de l’article L. 5-9-1 et au premier alinéa du V et du VI de l’article L. 32-5 du code des postes et communications électroniques ;
11° (nouveau) Au premier alinéa du V et du VI de l’article L. 1421-2-1 du code de la santé publique ;
12° (nouveau) Aux dix-neuvième et trentième alinéas de l’article 41 du code des douanes de Mayotte ;
13° (nouveau) Au premier alinéa de l’article 90 et à l’article 1597 du code civil.
II. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Au II de l’article L. 561-3 et au second alinéa du III de l’article L. 561-36, les mots : «, les avocats et les avoués près les cours d’appel » sont remplacés par les mots : « et les avocats » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 561-17 et aux deuxième et troisième alinéas du II de l’article L. 561-26, les mots : «, l’avocat ou l’avoué près la cour d’appel » sont remplacés par les mots : « ou l’avocat » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 561-17, les mots : « au bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat est inscrit ou au président de la compagnie dont relève l’avoué » sont remplacés par les mots : « ou au bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat est inscrit » ;
4° Au deuxième alinéa du même article L. 561-17, les mots : « le bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat déclarant est inscrit ou le président de la compagnie dont relève l’avoué déclarant » sont remplacés par les mots : « ou le bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat déclarant est inscrit » ;
5° Au deuxième alinéa du I de l’article L. 561-19 et au premier alinéa des II et III de l’article L. 561-26, les mots : «, au bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat est inscrit ou au président de la compagnie dont relève l’avoué » sont remplacés par les mots : « ou au bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat est inscrit » ;
6° Au premier alinéa du II de l’article L. 561-26, les mots : «, des avocats et des avoués près les cours d’appel » sont remplacés par les mots : « et des avocats » ;
7° Au deuxième alinéa du I de l’article L. 561-28, les mots : «, le bâtonnier de l’ordre des avocats ou le président de la compagnie des avoués » sont remplacés par les mots : « ou le bâtonnier de l’ordre des avocats » ;
8° (nouveau) À la troisième phrase du cinquième alinéa de l’article L. 621-12, le mot : « avoué » est remplacé par le mot : « avocat ».
III. – (Non modifié) Au f de l’article 279 et au 1 du III de l’article 293 B du code général des impôts, les mots : «, les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation et les avoués » sont remplacés par les mots : « et les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation ».
M. le président. L’amendement n° 65, présenté par M. Gélard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
14° Au 5° de l’article 113, aux deuxième et troisième alinéas de l’article 130, et au premier alinéa de l’article 131 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 31, modifié.
(L’article 31 est adopté.)
Article 32
Sont supprimés :
1° Les mots : « avoués, » et «, avoués » respectivement :
a) À l’article 7 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat, aux articles 2 et 5 de la loi du 25 nivôse an XIII contenant des mesures relatives au remboursement des cautionnements fournis par les agents de change, courtiers de commerce, etc., au premier alinéa de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, au troisième alinéa de l’article 10 de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs, au douzième alinéa de l’article L. 122-20 du code des communes de Nouvelle-Calédonie, à la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 1424-30 et au 11° de l’article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales et au premier alinéa de l’article 860 et à l’article 865 du code général des impôts ;
b) Au second alinéa de l’article 1er, à l’article 2 et au premier alinéa de l’article 4 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers et au premier alinéa de l’article 862 du code général des impôts ;
c) (Supprimé)
2° Les mots : «, un avoué » et «, d’un avoué » respectivement :
a) À l’article 38 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;
b) À l’article 56-3 du code de procédure pénale et au troisième alinéa de l’article L. 212-11 du code de justice militaire ;
3° Les mots : « ou avoué », « ou un avoué » et « ou d’un avoué » respectivement :
a) Au dernier alinéa de l’article L. 144-3 du code de la sécurité sociale ;
b) Au deuxième alinéa de l’article 388-1 et aux articles 415 et 424 du code de procédure pénale ;
c) Au premier alinéa de l’article 504 du code de procédure pénale ;
4° Les mots : « les avoués, » et « des avoués, » respectivement :
a) À l’article 1er de la loi du 25 nivôse an XIII précitée et au cinquième alinéa de l’article 16 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 précitée ;
b) Aux articles L. 211-8, L. 311-5 et L. 311-6 du code de l’organisation judiciaire ;
c) (Supprimé)
5° Les mots : « et avoués » et « et d’avoués » respectivement :
a) À l’article 31 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit ;
b) Au deuxième alinéa de l’article 18 de la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 instituant l’ordre des géomètres-experts ;
c) (Supprimé)
6° Les mots : « ou d’avoué à avoué » au premier alinéa de l’article 866 du code général des impôts ;
7° Les mots : «, l’avoué près la cour d’appel », « les avoués près les cours d’appel, », «, d’avoué près une cour d’appel, d’avoué près un tribunal de grande instance » et «, par un avoué près la cour d’appel » respectivement :
a) À l’article 31 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 précitée ;
b) Au 13° de l’article L. 561-2 du code monétaire et financier ;
c) À l’article 1er de la loi n° 48-460 du 20 mars 1948 permettant aux femmes l’accession à diverses professions d’auxiliaire de justice ;
d) Au deuxième alinéa de l’article 380-12 du code de procédure pénale ;
8° Les mots : « ou la chambre de la compagnie des avoués » et les mots : « ou le président, selon le cas, » au premier alinéa du III de l’article L. 561-30 du code monétaire et financier ;
9° Les mots : «, ou parmi les avoués admis à plaider devant le tribunal » et les mots : «, ou par un avoué près la juridiction qui a statué » et les mots : « près la juridiction qui a statué » respectivement au troisième alinéa de l’article 417, au deuxième alinéa de l’article 502 et au deuxième alinéa de l’article 576 du code de procédure pénale ;
10° Les mots : «, et d’honoraires d’avoués énoncées par l’article 5 de la loi n° 57-1420 du 31 décembre 1957 sur le recouvrement des honoraires des avocats » et les mots : « et, après eux, les avoués selon la date de leur réception, » respectivement à l’article L. 211-6 et au premier alinéa de l’article L. 312-3 du code de l’organisation judiciaire ;
11° (nouveau) Les mots : « des débours tarifés et des émoluments dus aux avoués et » au premier alinéa de l’article L. 663-1 du code de commerce ;
12° (nouveau) La dernière phrase du cinquième alinéa de l’article 131 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;
13° (nouveau) Les mots : «, avoué », au troisième alinéa de l’article L. 622-5 du code de la sécurité sociale. – (Adopté.)
Article 33
Sont abrogés :
1° Les articles 93 à 95 de la loi du 27 ventôse an VIII sur l’organisation des tribunaux ;
2° Les articles 27 et 32 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit ;
3° Les articles 2, 3, 5, 6 et 7 du décret du 2 juillet 1812 sur la plaidoirie dans les cours d’appel et dans les tribunaux de grande instance ;
4° L’article 5 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers ;
5° L’ordonnance n° 45-2591 du 2 novembre 1945 relative au statut des avoués ;
6° La loi n° 57-1420 du 31 décembre 1957 sur le recouvrement des honoraires des avocats ;
7° L’article 82 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée ;
8° Le 8° de l’article 55 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 précitée ;
9° Le 1° de l’article L. 311-4 du code de l’organisation judiciaire ;
10° (nouveau) Le septième alinéa de l’article L. 144-3 du code de la sécurité sociale ;
11° (nouveau) Le deuxième alinéa de l’article 10 de la loi du 22 août 1929 sur l’organisation des tribunaux de grande instance. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 33
M. le président. L’amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Vial et Mmes Des Esgaulx et Descamps, est ainsi libellé :
Après l’article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’exécution de la présente loi fait l’objet d’un suivi par une commission spéciale composée de parlementaires des deux assemblées qui remettra un rapport au garde des sceaux, au terme de la première année de la date d’entrée en vigueur de la loi.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 41 rectifié est retiré.
Article 34
(Non modifié)
Le chapitre Ier et les articles 31 à 33 de la présente loi entrent en vigueur le 1er janvier 2011.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 8 rectifié est présenté par MM. Détraigne et About, Mme Dini, M. Dubois, Mme N. Goulet, MM. Merceron, Amoudry, Borotra, J. Boyer, Deneux et Soulage et Mmes Morin-Desailly et Payet.
L’amendement n° 10 est présenté par MM. Michel et Anziani, Mme Klès, M. Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 44 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
À la fin de cet article, remplacer la date :
1er janvier 2011
par la date :
1er janvier 2012
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.
M. Yves Détraigne. Cet amendement est particulièrement important puisqu’il porte sur la période transitoire prévue à l’article 34.
Telle qu’elle est actuellement prévue, la période transitoire court jusqu’au 1er janvier 2011. Mais, comme cela a été souligné hier dès la discussion générale et encore cet après-midi par le rapporteur, la future loi n’a aucune chance d’être promulguée avant la fin de l’année 2010, si bien que la période transitoire ne sera en réalité que de deux ou trois trimestres.
Or la suppression de leur profession, qui leur est tombée sur la tête sans prévenir (Sourires.), fait qu’un grand nombre d’avoués et la plupart de leurs salariés se trouvent désappointés. Je sais que, face à ce désappointement, il a été considéré en haut lieu qu’il valait mieux abréger la période de souffrance en fixant la limite au 1er janvier 2011.
Ce n’est pas tout à fait notre avis. Nous pensons au contraire que, comme cela a été montré hier, la plupart des salariés ne retrouveront pas très rapidement d’activité professionnelle et qu’il y a un intérêt public à prolonger la période transitoire.
Il ne s’agit évidemment pas de la prolonger de trois, quatre ou cinq ans : il faut effectivement que les avoués et leurs salariés s’engagent dans la recherche active d’une reconversion. Néanmoins, dans la conjoncture actuelle – et parce que, comme je l’ai indiqué hier dans la discussion générale, tous les avoués n’ont pas vocation à devenir avocats, ni l’envie de l’être –, une partie d’entre eux ainsi que la plupart de leurs salariés auront besoin d’un minimum de temps pour prendre leurs dispositions. C’est pourquoi nous proposons que la période transitoire s’arrête non pas au 1er janvier 2011, mais au 1er janvier 2012.
De plus, le Sénat a décidé hier soir que l’indemnisation serait déterminée non plus par la commission, mais par le juge de l’expropriation, procédure qui demandera plus de temps. J’ai d’ailleurs présenté hier soir un amendement prévoyant un délai de six mois : il m’a été objecté que ce n’était pas tenable.
Il est donc clair que les choses seront loin d’être entièrement réglées avant le 1er janvier 2011 et qu’il est tout à fait d’intérêt public de reporter la date limite au 1er janvier 2012.
M. le président. Mes chers collègues, afin que chacun ait le temps de se préparer au vote, je vous informe d’ores et déjà que j’ai été saisi d’une demande de scrutin public sur les amendements identiques nos 8 rectifié, 10 et 44 rectifié.
La parole est à M. Sueur, pour présenter l’amendement n° 10.
M. Jean-Pierre Sueur. La volonté politique de réformer le système de la postulation en appel est annoncée comme devant répondre à un souci de modernisation et de simplification de la justice civile.
Cette volonté ne peut être comprise et admise que si elle répond dans le même temps aux préoccupations des justiciables et des professionnels du monde judiciaire : permettre la continuité du service, assurer une réelle amélioration et modernisation de la justice, conserver une cohérence au système judiciaire et permettre une meilleure gestion des coûts.
Comme vous le savez, mes chers collègues, plusieurs commissions ont été amenées à se pencher sur ce sujet.
Tout d’abord, la commission Magendie II s’est prononcée pour une grande réforme de la procédure d’appel comprenant le renforcement de la voie d’achèvement de l’appel et la généralisation de la dématérialisation des actes. Le décret visant à la mise en place de ces préconisations vient d’être publié, puisqu’il est paru le 11 décembre 2009, et doit entrer en vigueur le 1er janvier 2011.
Par ailleurs, la commission Copé a retenu, entre autres conclusions, la nécessité d’indemniser de tous leurs préjudices les avoués à la cour, si leur profession devait être supprimée, et de prévoir une période transitoire de cinq ans – j’insiste sur ce point, madame la ministre d’État – durant laquelle ils pourraient également exercer en tant qu’avocat pour se préparer à leur profession future.
Enfin, le rapport Darrois préconise une réforme de la postulation d’ici à 2014 – là encore, la date n’est pas anodine – et recommande que la suppression de la profession d’avoué soit adossée à une réforme plus générale.
Le fonctionnement des cours d’appel risque en effet d’être désorganisé si cette suppression est effective dans des délais rapprochés.
À l’heure où une importante réforme de procédure, issue des travaux de la commission Magendie II, est sur le point d’entrer en vigueur et de bouleverser les règles actuelles, il ne nous paraît pas raisonnable que l’administration judiciaire soit privée de l’aide des avoués.
La communication électronique, présentée comme un substitut à la présence des avoués, est très loin d’être opérationnelle. En effet, les travaux de la commission Azibert montrent que les avocats, divisés au sein de leur profession, ne sont pas prêts à assumer une communication électronique structurée avec les greffes des cours d’appel, pas plus que les cours d’appel elles-mêmes.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cela n’a aucun rapport avec le texte !
M. Jean-Pierre Sueur. Ne pas prévoir de période transitoire suffisamment longue revient à prendre le risque de désorganiser durablement le fonctionnement des cours, et donc de pénaliser le justiciable.
Pour notre part, nous ne sommes pas favorables à ce projet de loi, en dépit de toutes les avancées qu’a réalisées la commission et que nous tenons de nouveau à souligner. Si ce texte devait néanmoins être adopté, et pour les raisons que j’ai énoncées, il serait sage, comme l’a expliqué M. Détraigne, d’en reporter la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2012 au lieu du 1er janvier 2011.
(Mme Catherine Tasca remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 44 rectifié.
M. Jacques Mézard. Mes chers collègues, il faut être réaliste : il ne s’agit tout de même pas de la prolongation d’un système comme celui des bouilleurs de cru, dont certains ont pu continuer à exercer pendant de très nombreuses années !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’était un viager !
M. Jacques Mézard. La proposition que nous faisons est de bon sens. Nous aurions même souhaité que la période transitoire puisse encore être étendue.
Quel est le risque de proroger la période transitoire ? Certains font valoir la concurrence avec les avocats. Cela ne me semble pas être un argument sérieux, comme l’a d’ailleurs très sagement rappelé à plusieurs reprises le rapporteur.
D’ailleurs, le nombre d’avoués ne représente que 1 % du nombre d’avocats. Nous le savons depuis très longtemps, la clientèle des avoués est essentiellement fournie par les avocats, qui sont leurs correspondants. Une prolongation de la période transitoire favorisera plus la collaboration entre les deux professions que les conflits : en effet, les avoués, en fin de carrière, apporteront un concours aux avocats, lesquels devront apprendre la procédure, en particulier avec la dématérialisation devant la cour. À mes yeux, loin d’accroître la concurrence, la période transitoire ne pourra qu’apporter cet avantage.
En ce qui concerne le fonctionnement des cours d’appel, il a été très justement rappelé cette évidence : la dématérialisation sera extrêmement difficile à mettre en place pour le début de l’année 2011.
La prolongation de la période transitoire facilitera la reconversion des avoués et de leurs salariés dans une période qui, tout le monde l’a reconnu, est extrêmement difficile pour eux.
Finalement, je ne vois vraiment pas les avantages d’enterrer plus vite la profession d’avoué alors que, manifestement, le renforcement de la durée de la période transitoire n’aurait aucune conséquence véritablement néfaste. Bien au contraire !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Les trois amendements identiques vont à l’encontre de ce que la commission a voté dans ses délibérations précédentes. Nous avons auditionné plus de cinquante-sept personnes. Comme je vous l’ai indiqué tout à l’heure, nous avons constaté une évolution en ce qui concerne le délai d’application de la réforme.
Au départ, les avoués souhaitaient une période transitoire relativement longue. Mais les personnels en ont assez d’être laissés ainsi dans l’incertitude depuis juin 2008. La loi sera applicable aux alentours de juin 2010, soit deux ans après ! Par conséquent, cette période ne peut durer indéfiniment. À partir du moment où il a été décidé que la profession devait disparaître, nous devons fixer une date limite. Plus elle sera repoussée, plus ce sera compliqué.
Les auteurs des amendements ont soulevé un certain nombre d’arguments, notamment le risque de bouleversement du fonctionnement des cours d’appel. Mais c’est l’affaire du Gouvernement, singulièrement du garde des sceaux ! C’est à lui de s’arranger pour que tout fonctionne normalement, pour éviter les embouteillages dans les cours d’appel, et assurer la mise en œuvre de la numérisation – laquelle est d’ailleurs déjà en cours – dans les meilleures conditions possible.
Par conséquent, nous n’allons pas prolonger la période transitoire jusqu’au 1er janvier 2012, ce qui reviendrait à attendre encore deux années complètes. Comment fonctionneront les offices d’avoués, alors qu’ils ne pourront plus recruter personne et que leurs personnels partiront pendant cette période ?
Demander une prolongation de la période transitoire me rappelle les derniers mots prêtés à la Comtesse du Barry : « Encore un moment, monsieur le bourreau ! » Ici, il s’agit d’une année, mais je ne suis pas du tout convaincu que cela rende service à qui que ce soit. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)
La commission ne peut qu’émettre un avis défavorable sur ces trois amendements identiques. Si la disposition est adoptée, nous verrons bien ce qu’il en adviendra dans la suite de la procédure.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Le Gouvernement est également défavorable à ces trois amendements identiques. Nous avons longuement évoqué cette question lors de mon audition devant la commission. Comme je l’avais alors indiqué, nous avons abouti, me semble-t-il, à un point d’équilibre, souhaité par tous, de nature à satisfaire les intérêts des uns et des autres.
La période transitoire doit rester de courte durée pour ne pas laisser trop longtemps en concurrence des professionnels soumis à des statuts différents. C’est ce point qui peut poser problème.
Par ailleurs, les salariés ont également besoin d’être fixés rapidement sur leur sort. Je rappelle que les 380 postes qui leur sont proposés dans les services judiciaires sont à pourvoir en 2010 : les avoués quittant leurs emplois pour occuper ces postes ne seront pas remplacés, faute de perspectives, d’où un risque de désorganisation du système. Prolonger la période transitoire peut avoir des effets négatifs sur le fonctionnement des cours d’appel et le service rendu aux justiciables.
Dans ces conditions, une telle proposition ne me paraît pas raisonnable. Pour donner un ordre de grandeur, de 20 % à 25 % des salariés d’avoués partiront sans être remplacés.
En ce qui concerne l’aménagement du système qui a été prévu, il revient au ministère de le prendre en charge et de faire en sorte que tout se passe bien. Cela relève effectivement de ma responsabilité, et je l’assumerai.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié, 10 et 44 rectifié.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe de l'Union centriste, l'autre, du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 116 :
Nombre de votants | 320 |
Nombre de suffrages exprimés | 319 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l’adoption | 164 |
Contre | 155 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Je mets aux voix l'article 34, modifié.
(L'article 34 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 34
Mme la présidente. L'amendement n° 20, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement rend un rapport avant le 1er juin 2010 sur l'utilité pour le justiciable et le coût pour l'État de l'augmentation de l'aide juridictionnelle.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Madame la présidente, si vous me le permettez, je défendrai en même temps l'amendement n° 22.
Mme la présidente. J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 22, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, et ainsi libellé :
Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'État rédige pendant cinq ans un rapport annuel sur la situation des avoués et des salariés concernant leur reconversion.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Ces deux amendements relèvent de la même philosophie. Ils visent à obtenir du Gouvernement la remise de deux rapports : le premier mesurerait le coût de la réforme, notamment pour le justiciable, ce qui nous permettrait de réajuster éventuellement l’aide juridictionnelle ; le second porterait sur la reconversion des avoués et de leurs salariés.
Madame la ministre d’État, vous l’avez évoqué, la reconversion des salariés de GIAT-Industrie, dans mon département, a été douloureuse économiquement et humainement.
En la matière, les situations individuelles ne sont pas toujours prises en compte. Il est donc temps aujourd'hui de reconnaître enfin la réalité du stress au travail, de mesurer l’ampleur des contraintes nées de la mise en œuvre d’un plan de reconversion et de s’assurer que, dans ce cadre, aucun salarié ne sera laissé sur le bord de la route. La revalorisation des acquis est, à cet égard, un élément primordial.
Il est nécessaire de mesurer l’impact réel de la réforme pour les salariés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La commission des lois est hostile, en règle générale, aux rapports demandés au Gouvernement, car soit ils ne sont jamais rédigés, soit ils s’entassent sur un coin de bureau et on n’y attache pas l’importance que l’on devrait.
En réalité, avec la réforme constitutionnelle, il revient au Parlement d’effectuer le suivi des lois que nous adoptons, sans que le Gouvernement ait à multiplier les rapports. Notre mission en ce domaine est maintenant très claire : non seulement nous faisons la loi, mais nous devons en contrôler l’exécution. C'est la raison pour laquelle j’émettrai un avis défavorable sur ces deux amendements. Quant à l’État – l’exposé des motifs des amendements précise en effet que « l’État doit prendre ses responsabilités » –, je rappelle que le Parlement en fait aussi partie !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Comme vient de le rappeler M. le rapporteur, depuis la réforme constitutionnelle en particulier, le Gouvernement est à la disposition du Parlement pour lui fournir tous les éléments nécessaires en vue d’éclairer sa vision de l’application des lois, ce que je m’efforce de toujours faire de la manière la plus complète possible.
En outre, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis prête, en plus du suivi du Parlement, à associer des parlementaires à un groupe de travail chargé du suivi de la mise en œuvre de cette réforme afin que votre information soit la plus transparente et la plus régulière possible.
Dès lors, il ne me paraît pas nécessaire que vous adoptiez une mesure législative spécifique.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Pour les raisons exprimées par M. Gélard, nous ne voterons pas ces amendements.
Cela étant, une fois la loi promulguée, monsieur le président de la commission, peut-être pourriez-vous envisager de constituer un groupe de travail chargé du suivi de ce texte, qui est particulièrement délicat ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les arguments de la commission et du Gouvernement ne m’ont absolument pas convaincue, même si vous les partagez, monsieur Michel.
On sait ce qu’il en est de nos semaines de contrôle, monsieur le rapporteur. Je ne vais pas insister sur ce point, car ce n’est pas le sujet d’aujourd’hui. Mais lorsque le Gouvernement propose une réforme, qui, à entendre les uns et les autres, n’est pas reçue avec enthousiasme par les parlementaires, du moins par la moitié d’entre eux dirons-nous, c’est le rôle du pouvoir législatif de demander au pouvoir exécutif de rendre des comptes un an après sa mise en œuvre.
Et que l’on ne me réponde pas que les rapports sont tous enterrés !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pas tous !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Sinon, à ce compte, les rapports parlementaires le sont eux aussi !
Nous demandons par avance qu’il soit rendu compte de cette réforme. C’est très clair, et cela fait partie du rôle du législateur.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Lors de la révision constitutionnelle, j’avais beaucoup insisté sur le contrôle de l’action du Gouvernement et l’évaluation des politiques publiques par le Parlement, et pas seulement en séance publique. En la matière, le rôle des commissions est fondamental. Plusieurs groupes de travail sont d’ailleurs chargés d’évaluer la mise en œuvre des lois après leur promulgation.
Si cette réforme devait rencontrer des difficultés majeures d’application, les nombreux interlocuteurs que nous avons auditionnés ne manqueraient pas de nous le faire savoir.
De plus, n’oublions pas que l’examen des missions dans le cadre du projet de loi de finances est l’occasion pour les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis de faire le point sur la mise en œuvre des lois.
Quoi qu’il en soit, monsieur Michel, vous pouvez compter sur la commission, surtout compte tenu de son implication, pour veiller à ce que cette réforme soit appliquée dans de bonnes conditions.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 22.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Madame le ministre d’État, comme nous l’avons vu tout au long des débats, hier soir et cet après-midi, cette réforme est inopportune, mal préparée et mal financée. Dès lors, des questions se posent. Fallait-il faire le vide, c’est-à-dire ne pas distinguer le statut d’officier public et ministériel des avoués, qui pouvait être supprimé, de leur mission de postulation auprès des cours d’appel, qui aurait pu subsister ?
Les conséquences de votre projet de loi présenté avec une certaine hâte seront donc graves, comme l’ont démontré les intervenants sur toutes les travées.
Tout d’abord, les conséquences seront graves pour les justiciables, qui verront leurs frais augmenter. En effet, d’une part, la taxe se transformera en honoraires librement fixés par l’avocat et, d’autre part, le financement de cette réforme se traduira par la création d’une taxe dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009, qui sera à la charge des appelants.
Nous nous interrogeons d’ailleurs sur la conformité constitutionnelle de cette taxe. D’abord, parce qu’elle crée une espèce d’octroi pour pouvoir faire appel ; ensuite, parce que la LOLF n’autorise la création de taxes nouvelles que pour financer des missions de service public. En quoi la suppression de la profession d’avoué est-elle une mission de service public ?
Ensuite, les conséquences seront graves pour la procédure elle-même. Cela a d’ailleurs été dit cet après-midi au moment du débat sur les mesures transitoires. Il n’est en effet pas certain que les cabinets d’avocats et les cours d’appel soient prêts et informatisés à temps. Les lettres qui ont été envoyées par les présidents de cours d’appel et les présidents de chambres civiles aux études d’avoués, notamment celles de province, et qui nous ont été communiquées, montrent l’inquiétude régnant au sein des cours d’appel.
En outre, les conséquences seront graves pour les avoués que l’on supprime d’un trait de plume. Le Gouvernement n’a pas totalement mesuré le préjudice causé à ces professionnels, puisqu’il se limite à envisager la suppression de leur charge sans prendre en compte leur préjudice économique, la perte de clientèle et le problème de la reconversion.
Enfin, les conséquences seront graves pour les salariés. Quoi que vous en disiez, ces 1 400 salariés, qui sont aujourd’hui très bien payés, ne retrouveront jamais un emploi équivalent. Du seul fait de la loi, la situation de ceux qui réussiront à rejoindre l’institution judiciaire ou un cabinet d’avocats sera fortement dégradée, quand ils ne seront pas au chômage. Mais peut-être le Gouvernement juge-t-il qu’il n’y a pas assez de chômeurs ! Dans la région Franche-Comté, par exemple, le chômage a augmenté de 40 % depuis le mois de septembre. C’est magnifique ! Quelle réussite de ce gouvernement et du Président de la République !
Pourquoi cette hâte à contraindre le Sénat à débattre, certes dans des conditions normales, mais à la veille des fêtes de fin d’année alors que vous auriez pu remettre l’ouvrage sur le métier ? Madame le ministre d’État, vous n’étiez pas obligée de suivre ce qui avait été fait à l’Assemblée nationale. Vous auriez pu vous inspirer d’un système qui existe déjà dans d’autres départements français. Que je sache, l’Alsace-Moselle est en France, même si, soit dit entre parenthèses, ses institutions sont encore plus différentes que celles des départements d’outre mer. Dans ces territoires, la charge d’avoué a été supprimée, mais la fonction est restée. Des avocats peuvent ainsi plaider et postuler devant le tribunal de grande instance et devant la cour d’appel ou être avocats aux Conseils. Voilà la bonne solution !
Nous tenons cependant à souligner le rôle de la commission des lois, en particulier de son rapporteur, M. Gélard, qui a effectué un très bon travail. Je me félicite en outre que plusieurs de nos amendements ainsi qu’un certain nombre d’autres amendements de nos collègues aient été adoptés, et ce dès l’examen en commission. Reste que ces améliorations sont marginales. C’est pourquoi nous ne pourrons voter que contre la réforme qui nous est proposée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Au nom du groupe de l’UMP, je souhaite avant toute chose remercier le président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest, de sa qualité d’écoute, qui nous a permis de débattre dans d’excellentes conditions. Ces remerciements s’adressent naturellement aussi au rapporteur, Patrice Gélard, dont le travail de très grande qualité a permis d’enrichir sensiblement le projet de loi.
Nous sommes tous légitimement attachés à la modernisation de notre justice, qui constitue le fondement de notre État de droit et le socle de notre société démocratique. C’est pourquoi nous soutenons pleinement le triple objectif du projet de loi, à savoir simplifier, rendre plus lisible et moins coûteux le fonctionnement du procès en appel.
Les mesures proposées, ainsi que celles que nous avons modifiées, concilient les deux impératifs d’efficacité de la réforme et de protection d’une profession amenée à disparaître du fait de la loi. Ce double impératif a orienté tous nos votes, dans le sens d’une meilleure indemnisation et d’une aide à la reconversion, à la fois pour les avoués et leurs personnels salariés.
Nous nous félicitons ainsi que notre commission, soucieuse de cet équilibre, ait su compléter plusieurs des articles afin de limiter les préjudices causés aux avoués et à leurs personnels et de leur garantir de nouvelles opportunités professionnelles. À ce titre, nous tenons à saluer, madame le ministre d’État, votre engagement quant à la création de 380 postes dans les services judiciaires auxquels pourront postuler les salariés d’avoués dès le printemps de 2010.
La nécessité de la réforme ne saurait générer d’incertitudes pour les quelque 2 000 personnes dont la vie professionnelle va être bouleversée. Ainsi, nous nous réjouissons que, sur l’initiative de notre commission, la période transitoire ait été réduite de douze mois à neuf mois et que nous soyons ainsi arrivés à un point d’équilibre.
Nous soutenons en outre l’amélioration du système d’indemnisation des avoués présentée par la commission. Ainsi, la disposition confiant au juge le soin de déterminer l’indemnité spécifique allouée aux avoués va dans le bon sens.
Guidés par notre souci de justice et d’équité, nous avons été particulièrement sensibles à la situation des plus jeunes. C’est pourquoi nous avons souhaité que l’âge soit pris en compte dans la détermination de cette indemnité par le juge de l’expropriation.
Par ailleurs, on peut se réjouir que, sur mon initiative et celle de mon collègue Raymond Couderc, le texte prévoie la perception par les salariés, dès lors que ces derniers comptent un an d’ancienneté dans la profession, d’indemnités de licenciement calculées à hauteur d’un mois de salaire par année d’ancienneté.
Je tiens donc à vous indiquer, madame le ministre d’État, que nous soutenons tant ce texte que votre engagement à apporter une nouvelle pierre à la modernisation de notre justice. Les membres du groupe de l’UMP voteront donc ce projet de loi, tel que modifié par la commission des lois. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. La commission a œuvré pour améliorer le projet de loi initial. Cependant, madame le garde des sceaux, vous avez hérité d’un texte qu’il aurait à mon avis été préférable de jeter purement et simplement aux oubliettes, puis de retravailler autrement.
Vous nous parlez d’une réforme. Or, en ce qui concerne tant la procédure pénale que la procédure civile, on s’aperçoit qu’il s’agit vaille que vaille de se calquer sur le système anglo-saxon (Mme la ministre d’État fait un signe de dénégation.). Ce copier-coller est inadapté à notre système, auquel il faudra quand même un jour réfléchir pour savoir quelle justice et quelles réformes nous voulons.
Dès le départ, nous avons exprimé notre fort désaccord avec ce texte. Les avoués et leurs salariés eux-mêmes le rejettent. Ce projet de loi fait donc l’unanimité contre lui. C’est pourquoi il faut absolument le repousser. Nous voterons donc contre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Ainsi que cela a amplement été dit au cours de la discussion générale, cette réforme ne s’imposait pas. De plus, elle était totalement inacceptable pour les avoués et leurs personnels. Pour qu’une réforme puisse être acceptée par les personnes concernées, il faut qu’elle soit juste et équitable, ce qui n’était pas le cas.
Le travail accompli par la commission des lois sous l’égide de son rapporteur, dont je tiens à souligner la sagacité, a été largement suivi par notre assemblée. Le texte est désormais plus acceptable.
Certes, les raisons pour lesquelles on souhaite supprimer la profession d’avoué devant les cours d’appel ne sont pas plus justifiées. Cependant, le groupe de l’Union centriste considère qu’à partir du moment où la réforme se fait dans des conditions acceptables – en tout cas nettement plus acceptables, après l’examen par la commission des lois et par la Haute Assemblée, que celles qui nous étaient initialement proposées – il ne servirait à rien de la rejeter.
En effet, les craintes que pourraient avoir les avoués et les salariés pour leur avenir ne seraient pas pour autant dissipées. Cette réforme, je le rappelle, n’est pas apparue pour la première fois voilà dix-huit mois ; après une première étape en 1971, elle avait également été évoquée en 1991…
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Proposée ! Par la gauche !
M. Yves Détraigne. Effectivement ! On peut donc imaginer que, si elle échouait aujourd’hui, elle reviendrait dans quelques années, ce qui ne serait absolument pas satisfaisant pour la profession d’avoué, qui aurait en quelque sorte une épée de Damoclès au-dessus de la tête.
Dans ces conditions, compte tenu de l’excellent travail réalisé par notre assemblée et en souhaitant que la navette parlementaire ne le détricote pas, le groupe de l’Union centriste votera le projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Madame la présidente, madame le ministre d’État, mes chers collègues, le doyen Gélard a rappelé tout à l’heure la célèbre formule : « Encore un moment, monsieur le bourreau ! » C’était le cri du cœur ! Il y a bien un bourreau…
Nous avons cependant salué les avancées réalisées par la commission sur l’indemnisation des avoués, sur la saisine du juge de l’expropriation, même si l’exercice ne sera pas facile juridiquement, avec la volonté d’une réparation intégrale du préjudice, y compris le préjudice futur et certain, ainsi que sur l’indemnisation des salariés à concurrence d’un mois de salaire par année d’ancienneté.
Nous aurions souhaité que la période transitoire soit plus longue que celle qui vient d’être votée. Nous verrons, en deuxième lecture, le texte qui nous reviendra de l’Assemblée nationale…
Mais voter une loi au motif que le texte sera inéluctablement adopté un jour, c’est tout de même faire peu de cas des principes, et du rôle du Parlement !
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument ! C’est un très bon argument !
M. Jacques Mézard. Sur le principe, une large majorité d’intervenants, de toutes les sensibilités politiques, ont clairement fait état de leur incompréhension et, pour beaucoup, de leur opposition à ce projet de loi. Ce dernier est inopportun, finalement très accessoire par rapport au souci de modernisation de la justice ; il ne diminuera en rien le coût de la justice pour le justiciable – en tout cas, nul ne l’a démontré, et le rapport de la commission était tout à fait clair à cet égard –, il n’accélérera pas les procédures et, par sa brutalité, il a plongé dans le doute et, pour beaucoup, dans l’angoisse du lendemain les avoués et plus encore leurs 1 800 salariés.
Pour tout dire, cette réforme a été initiée de telle manière qu’elle n’est appréciée par personne : en effet, elle était viciée au départ par des propositions spoliatrices, même si des améliorations ont été apportées par Mme la ministre d’État puis par la commission des lois.
En conséquence, en l’état, et en attendant l’avenir, nous voterons majoritairement contre ce projet de loi. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 117 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 184 |
Contre | 151 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous avons vite compris que la réforme telle qu’elle nous parvenait de l’Assemblée nationale était insuffisante en matière d’indemnisation des charges des avoués et des salariés. Nous avons rencontré, en examinant cette réforme, une vraie désespérance (Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Yves Détraigne et Daniel Dubois acquiescent.) : quand des gens font bien leur travail, ils ont en effet du mal à comprendre que l’on veuille supprimer leur profession. Beaucoup ont d’ailleurs découvert à cette occasion la qualité du travail des avoués et l’utilité de ce dernier, notamment par la sécurisation des procédures d’appel.
Je m’amuse d'ailleurs à entendre défendre les avoués par les auteurs de projets ou de propositions de loi qui voulaient leur suppression voilà quelques années…
Nous sommes favorables à la modernisation et à la simplification à condition de ne pas singer d’autres formes de professions judiciaires outre-Atlantique ou quelquefois outre-Manche – mais je sais que vous n’êtes pas adepte de cette école, madame le garde des sceaux. Ce n’est pas notre tradition juridique ; les responsabilités des huissiers et des notaires, notamment, ont plutôt été renforcées dans les textes. Cela me semble équilibré.
Dès lors que la décision était prise et votée à l’Assemblée nationale, le devoir du Sénat était de faire en sorte que, pour cette réforme maintenant inéluctable, comme je l’ai dit aux représentants des professions concernées – l’avenir nous dira si cette modernisation, cette simplification étaient fondées, et nous saurons évaluer la loi pour déterminer si la procédure d’appel est améliorée –, une solution équilibrée, mais juste et équitable quant à l’indemnisation tant des avoués que du personnel, soit trouvée. Je vous assure que les membres de la commission ont vraiment écouté les uns et les autres, y compris les avocats. Il faut saluer à cet égard Patrice Gélard, le rapporteur émérite, qui a énormément travaillé pour trouver des solutions.
Madame le garde des sceaux, il reste un point de désaccord dont il faudra, en l’absence de progression à cet égard, envisager les conséquences : je veux parler des préjudices autres que le seul préjudice patrimonial. Nous avons choisi l’expropriation sous le contrôle du juge parce que cela nous paraissait la formule la plus large, mais vous avez bien compris que l’indemnisation des préjudices réels des charges d’avoués doit pouvoir évoluer.
Quoi qu’il en soit, madame le garde des sceaux, nous vous remercions de votre écoute et de l’attention que vous avez portée aux travaux du Sénat. Si toutes les séances du Parlement se déroulaient dans le climat d’écoute et de dialogue qui a prévalu depuis hier, la législation serait bien meilleure ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme le ministre d'État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, à l’issue de cette première lecture, je souhaite remercier non seulement la commission des lois, tout particulièrement son rapporteur, mais également l'ensemble des intervenants. Chacun a exprimé ses idées dans des termes mesurés, et le débat a pu se dérouler dans un état d’esprit constructif, avec le souci de trouver les meilleures solutions possible.
D'ores et déjà, un certain nombre d’avancées ont été obtenues et sont venues enrichir le texte. Bien entendu, nous ne sommes pas d’accord sur tout et la discussion reste ouverte : n’oublions pas l’Assemblée nationale, qui aura son mot à dire ! C’est dans le cadre de ce dialogue élargi – je rappelle que la procédure accélérée n’a pas été engagée – que nous allons pouvoir continuer à travailler pour améliorer encore ce texte.
À mon sens, nous devons toujours garder à l’esprit l’objectif principal, à savoir la modernisation de nos systèmes juridiques par leur simplification. Plus ces derniers seront proches, meilleure sera la lisibilité. Cela a été dit au cours du débat, l’avoué n’intervient pas aujourd'hui en appel dans l'ensemble des domaines du droit pénal. C’est ainsi que la profession n’existe pas outre-mer et que la représentation par avoué devant les chambres sociales des cours d’appel n’est pas obligatoire.
Ces exemples montrent tout l'intérêt qu’il y a, pour notre justice comme pour notre droit, d’aller vers la modernisation et la simplification. Disant cela, je n’ignore pas les contraintes susceptibles de peser sur les femmes et les hommes qui sont touchés par la réforme. Certes, nous ne sommes pas parvenus à un accord total sur ce point, mais nous avons essayé de trouver les meilleures réponses possible aux problèmes qu’ils rencontrent, sur le plan tant matériel, notamment en termes d’emploi, que psychologique. En ce sens, la détermination de la durée de la période transitoire revêt une grande importance.
En me fixant pour objectif de rendre l’organisation judiciaire plus simple et plus moderne, j’entends renforcer notre droit continental ainsi que le modèle judiciaire et juridique français. Comme j’ai coutume de le dire, c’est l’un de mes principaux combats.
Le fait qu’un pays ait un droit qui ressemble au nôtre constitue un atout considérable tant pour nos entreprises à l’exportation que pour l’influence de notre pays. En plus de mes responsabilités nationales, je m’efforce donc, à l’occasion des relations bilatérales que j’entretiens avec un certain nombre de pays, de développer autant que faire se peut en Europe et au-delà cette capacité d’influence du droit français et continental. Il y a là à mes yeux un enjeu tout à fait essentiel.
Il ne s’agit donc pas du tout d’imiter le modèle anglo-saxon ou américain. C’est tout le contraire ! En défendant le droit continental et le modèle judiciaire et juridique français, je cherche à reprendre tous les créneaux conquis par le droit anglo-saxon au cours de ces dernières années, ce qui a contraint nos entreprises à subir une concurrence beaucoup plus importante. Mon ambition est que la France crée son propre système juridique, avec ses spécificités, mais que ce dernier puisse en même temps servir d’exemple.
Pour y parvenir, il importe de mettre en place une organisation simple, compréhensible, efficace. Tel est bien l’objectif de ce texte, comme de ceux que j’aurai l’honneur de présenter prochainement devant vous. Dans le prolongement de la discussion que nous avons eue depuis hier, nous devons, ensemble, continuer à faire progresser notre modèle judiciaire et juridique. Ce faisant, nous participerons aussi à étendre l’influence de la France ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Vial. Très bien !
Mme la présidente. Mes chers collègues, le second texte inscrit à notre ordre du jour étant encore en discussion à l’Assemblée nationale, nous allons interrompre nos travaux. Nous les reprendrons vers dix-huit heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-huit heures trente.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
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Victimes des essais nucléaires français
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français (n° 122).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes arrivés au bout d’un parcours, un parcours au terme duquel les pouvoirs publics ont reconnu leur responsabilité dans les conséquences sanitaires des essais nucléaires français, un parcours au terme duquel, demain, les personnes souffrant d’une maladie radio- induite résultant d’une irradiation due aux essais nucléaires seront indemnisées.
Cela n’effacera pas les années de silence et les souffrances endurées mais cela sera pour les victimes une reconnaissance de leur situation et une réparation financière de leurs préjudices.
Si nous en sommes arrivés là, c’est grâce à la ténacité et à la pugnacité des associations de victimes. Ce texte leur donne raison et, à mon sens, largement satisfaction, même si je comprends que, lorsque l’on n’a pas tout obtenu, on peut avoir le sentiment de ne pas avoir été entendu.
M. Guy Fischer. C’est bien vrai !
M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur. Si nous en sommes arrivés là, à la reconnaissance et à l’indemnisation des conséquences sanitaires des essais, c’est également grâce à la mobilisation des parlementaires. Ils ont élaboré, sur ce sujet, dix-huit propositions de loi.
Si nous en sommes arrivés là, c’est aussi parce que le ministre de la défense a su convaincre tous les acteurs concernés que le moment était venu de rompre ce silence et de bâtir un mécanisme approprié d’indemnisation des victimes, comme l’avaient fait auparavant les Américains et les Anglais.
Si nous sommes à quelques semaines de la mise en place du comité d'indemnisation, c'est enfin grâce au Parlement, qui, dans sa majorité, a non seulement approuvé, mais également renforcé, les garanties offertes aux victimes.
À l'initiative de l'Assemblée nationale et de son rapporteur, dont je veux saluer le travail de qualité, la procédure d'examen des demandes a été mieux encadrée et le suivi de la loi mieux assuré. Le Sénat a poursuivi et complété ce travail. Nous avons, je vous le rappelle, accru les garanties d'indépendance du comité. Nous avons également introduit le principe de présomption de causalité dans l'examen des demandes. Pour les victimes, il s'agit là d'une avancée importante, sur laquelle je reviendrai. Nous avons, enfin, renforcé le pouvoir de la commission de suivi, qui pourra désormais s'autosaisir.
Les apports des deux assemblées étant en tous points complémentaires, nous n'avons pas eu de mal à trouver un accord. Lors de la réunion de la commission mixte paritaire, nous avons proposé, le rapporteur de l'Assemblée nationale et moi, quelques amendements rédactionnels afin de parfaire le dispositif juridique. Mais, sur le fond, nous avons de conserve décidé d’en rester à la dernière rédaction que vous avez adoptée. Tous les apports du Sénat ont été conservés. Il s'agit véritablement d'une rédaction commune, puisque nous avions, pour notre part, repris les modifications introduites à l'Assemblée nationale sur le projet du Gouvernement.
Je voudrais souligner ici combien la situation des demandeurs va être modifiée par ce texte. Hier, les victimes des essais nucléaires devaient prouver devant les tribunaux, non seulement leur participation aux essais nucléaires et leur exposition à des rayonnements ionisants, mais également que ces essais étaient la cause de leur cancer. Or, selon les médecins et les cancérologues, aucun examen médical, aucun prélèvement, aucune analyse histologique ne permet d'établir la cause d'un cancer. Cette maladie n'a pas, selon l'expression consacrée, de signature. Autrement dit, il était demandé aux justiciables la preuve impossible. Nous connaissons des cancers ce que les études épidémiologiques nous ont appris. En d’autres termes, du cancer, nous n'avons que des statistiques. Nous le savons, certaines pratiques, comme le tabagisme, accroissent la probabilité de son déclenchement. Nous sommes en mesure de calculer à peu près le surcroît de risque attribuable à tel ou tel facteur par rapport à la moyenne de la population. Mais rien qui puisse constituer une preuve absolue devant le juge. En conséquence, 80 % des demandeurs étaient déboutés.
À l’avenir, ces mêmes justiciables n'auront plus qu'à apporter la preuve qu'ils souffrent d'une maladie radio-induite, et qu'ils ont séjourné dans les zones de retombée radioactive des essais. S'ils remplissent ces deux conditions, grâce à l'amendement que nous avons adopté, la cause de leur maladie sera présumée être les essais. L'introduction du principe de présomption va bouleverser la logique d’examen des dossiers des justiciables en vigueur jusqu’à présent. Nous avons ainsi opéré un renversement de la charge de la preuve.
À mes yeux, ce texte ressort de nos travaux plus juste, plus équitable et moins équivoque que la version initiale. Mais pour ne pas sombrer dans un exercice d'autosatisfaction, je voudrais profiter du temps qui m'est accordé pour aborder quelques questions qui demeurent posées.
Premièrement, fallait-il mettre en place une présomption irréfragable ? Fallait-il ainsi rendre l'État responsable de tous les cancers des personnes ayant séjourné, ne serait-ce qu'une journée, dans les zones concernées ? Pouvait-on instituer un dispositif d’indemnisation de ces cancers quelle qu’en soit la cause ? Le Sénat comme l'Assemblée nationale ont naturellement apporté une réponse négative. L’État ne se doit d’indemniser, au titre des essais, que les seules maladies qui ont un lien avec ces essais. Les autres doivent normalement être prises en charge par notre système de santé, mais non par l'État au titre de sa responsabilité. Pour cette raison, nous avons maintenu la procédure d’examen individuel des dossiers.
Selon l’article 4 du projet de loi, cet examen se déroulera « au regard de la nature de la maladie et des conditions d'exposition de l'intéressé ». Cela implique, d’une part, de se concentrer sur la maladie. Chaque cancer, il faut le savoir, a ses propres caractéristiques. Comme le montrent les études épidémiologiques, la probabilité qu'une même personne soumise aux mêmes conditions d'exposition déclenche un cancer radio-induit diffère selon la maladie. D’autre part, il s’agit de tenir compte notamment de l'âge de la personne à la date de l'exposition, de celui auquel la maladie s’est déclenchée, et enfin du degré d'exposition.
La deuxième question concerne justement le degré d’exposition. Fallait-il le prendre en compte, au risque de rétablir des seuils d'exposition arbitraires ? Le texte que nous sommes sur le point d’adopter ne se réfère en aucune façon à un seuil d'exposition. En revanche, l’exposition doit, bien sûr, être mentionnée. C'est la cause même de la maladie et le fondement de la responsabilité de l'État. Comme le prévoit l'article 1er du projet de loi, « peuvent obtenir réparation de leurs préjudices toutes les personnes souffrant d'une maladie radio-induite résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français ». La prise en compte de la mesure de cette exposition ne peut donc pas être exclue.
Maintenir l’examen individuel des dossiers dans le cadre d’une présomption de causalité clairement affirmée, c’est évidemment laisser la possibilité au comité de contester la présomption. Sans cette possibilité, cet examen n'aurait pas de sens : autant dans ce cas ne pas perdre de temps et ne procéder qu'à la vérification des conditions de séjour et de maladie. L'examen individuel des dossiers permet d'écarter certaines requêtes. Mais, du fait de l'introduction de la présomption, ces demandes ne pourront être écartées que si le comité démontre pourquoi il conteste cette présomption. C'est cela le renversement de la charge de la preuve de la victime au comité.
La troisième question découle de ce point. Comment le comité pourra-il prouver l’absence de lien entre les essais et la maladie ? Voilà sans doute l'un des principaux enjeux du texte, et une question délicate. Je pourrais aisément, à ce stade de la procédure parlementaire, ne pas y répondre et me dérober au débat. Je voudrais au contraire essayer d'apporter une réponse à ces interrogations légitimes. Cette réponse se trouve à l'alinéa 3 de l'article 4, selon lequel, « lorsque les conditions sont réunies, la victime bénéficie d'une présomption de causalité à moins qu'au regard de la nature de la maladie et des conditions d'exposition de l'intéressé, le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable ».
J’écarterai d’abord l’interprétation selon laquelle cette phrase permettrait de rejeter les dossiers dans lesquels on trouverait d'autres causes possibles des cancers. Non seulement ce n'est clairement pas ce qui est écrit dans la version que nous avons adoptée, mais, de plus, la commission des affaires étrangères du Sénat s'est manifestement opposée à cette possibilité. À ma demande, elle a ainsi refusé un sous-amendement du Gouvernement autorisant le comité à écarter une demande s’il établit l'existence d'une cause de la maladie autre que l'exposition aux rayonnements. Selon les médecins, les chercheurs, d’après les documents du CEA et de l'UNSCAR, la quasi-totalité des cancers radio-induits ont plusieurs causes. Ainsi, pour le CEA, « les cancers sont des maladies multifactorielles, il n'existe aucun moyen simple de distinguer un cancer induit par des radiations, d'un cancer apparu spontanément ».
Ce que l’on peut faire, se conformant à une méthodologie de l’agence internationale pour l'énergie atomique c’est dire à une personne : compte tenu de votre maladie, de votre profil, de votre âge, de la date du déclenchement de la maladie et des analyses épidémiologiques existantes, le risque supplémentaire de contracter un cancer attribuable aux rayonnements est dans votre cas évalué à tel pourcentage. C’est cela le risque attribuable.
Au-delà, disent les médecins, il faut prendre en compte l'interaction des causes. Par exemple, l'exposition aux rayonnements ionisants multiplie, nous le savons, les risques de cancer du fumeur. Si le tabagisme constitue une cause propre de la maladie, et d'un côté dédouane les essais nucléaires, tout se passe, de l’autre, comme si les rayonnements ionisants accéléraient l’apparition d'un cancer chez un fumeur. Ainsi, l’existence d’une autre cause n’exclut pas l'effet des rayonnements ionisants et, en conséquence, la responsabilité des essais. C'est pourquoi nous n'avons pas retenu cette rédaction.
En revanche, nous avons retenu la notion de risque attribuable. Celle-ci correspond en effet à une démarche scientifique fondée sur les études épidémiologiques existantes et sur une méthodologie élaborée au niveau international, et non à une appréciation subjective.
Cela m’amène à la quatrième question. Pourquoi avoir posé le principe selon lequel le comité ne pouvait écarter un dossier que si le risque attribuable était négligeable et pas si le risque attribuable était nul, inexistant, voire impossible ? Parce que nous sommes dans un domaine de lien probable, statistique et non dans un domaine déterministe. De même qu'il aurait été impossible aux victimes de prouver que la cause de leur cancer est de façon certaine l'exposition aux rayonnements, il aurait été impossible au comité de certifier que les contaminations n'en sont pas la cause. Autrement dit, le risque attribuable n'est jamais de 0 %. C'est pourquoi nous avons retenu la notion de risque négligeable.
Il appartiendra aux médecins du comité, et non au législateur, de s’accorder sur une méthodologie. À ma connaissance, des travaux de recherche ont été effectués sur la base d'un risque attribuable de 1 %, c’est-à-dire d’un surcroît de risque d'avoir un cancer de 1 % par rapport à une population non exposée. Selon ce scénario, le dossier d’indemnisation devra être retenu si le risque supplémentaire d’avoir eu un cancer attribuable aux essais est supérieur à 1 %. Cela correspondrait, me semble-t-il, à la volonté de chacun de mettre en place un dispositif généreux, qui prenne en charge assez largement les victimes. J'invite le Gouvernement à interpréter en ce sens la volonté du législateur. Il ne s'agit pas d'un seuil, puisque le calcul résulte de la prise en compte de chaque situation individuelle, de la maladie, de l’âge et de toute une série de facteurs, dont l'intensité de l'exposition mesurée par dosimétrie.
J’en arrive enfin à la cinquième et dernière question. Que se passera-t-il si la victime ne dispose pas de relevés dosimétriques attestant de son exposition ? Auparavant, l'absence de relevés dosimétriques pouvait signifier, devant les tribunaux, l'absence d'exposition à une irradiation et entraîner la non-prise en charge du dossier. À l’avenir, grâce à ce texte, ce qui était un problème pour les justiciables deviendra un problème pour le comité, s'il souhaite contester le lien de causalité présumé. Comment en effet calculer un risque attribuable sans relevés dosimétriques. Encore une fois, conformément à nos vœux, le doute bénéficie à la victime. La portée du renversement de la preuve que nous avons instauré est ici manifeste.
J’arrêterai là la description des enjeux liés à l'application de l'article 4. Nous pourrions y passer des heures. Je voudrais que les associations de victimes aient bien conscience que chaque mot a été examiné avec le sérieux et l'attention légitimement attendus du législateur.
À mon sens, nous pouvons être collectivement fiers de ce texte et de ce débat. Je voudrais remercier tous les intervenants, en commission comme en séance, pour leur implication et la qualité de leurs propos. Nous n'avons pas toujours été d'accord, mais le dialogue a toujours été constructif. Certains amendements ont été retenus, d'autres rejetés, mais jamais en fonction de critères partisans. Pour l’essentiel, il y a eu un consensus républicain sur un sujet qui ne se prête pas à des réflexes de partis.
Je voudrais également remercier à nouveau les associations : d’abord pour leur patience, elles attendent ce texte depuis longtemps ; pour leur disponibilité ensuite, elles nous ont éclairés, très précisément, sur tous les aspects du texte. Les mesures d'application devraient être publiées dans le courant du mois de janvier et les premières instructions de dossier courant février. Elles participeront à la commission de suivi qui devrait se réunir quelques mois après la mise en place du comité.
À ce point de mon intervention, j'allais, monsieur le ministre, vous demander de nous confirmer l'inclusion du myélome et du lymphome dans la liste des maladies radio-induites prévue à l'article 1er. Mais j'ai appris, dans la journée, que non seulement ces deux maladies ne seraient sans doute pas retenues, mais que l'inclusion du groupe 2 n'était pas acquise.
M. Guy Fischer. Scandaleux !
M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur. Pour dire les choses plus clairement, nous travaillons depuis plusieurs mois sur la base d'un projet de décret d'application de l'article 1er qui retenait dix-huit maladies radio-induites. Ce projet de décret, qui a servi de base de discussion avec les associations, les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat, semble aujourd’hui être remis en cause. La liste des maladies radio-induites visées par le projet de loi serait réduite à treize. Si je comprends bien, on voudrait contraindre M. le ministre à revenir sur l'engagement qu’il a pris depuis des mois devant l'ensemble des parties prenantes à l'élaboration de ce projet de loi, un engagement qu’il a renouvelé devant notre commission des affaires étrangères le 7 octobre dernier.
M. Guy Fischer. Merci !
M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur. Si cette information est confirmée, je trouverai cela tout à fait regrettable, même si cela ne modifie pas le texte que nous avons adopté puisqu’il ne s’agit que du décret d'application. Cela modifierait en revanche le contrat moral sur lequel nous nous étions tous engagés auprès des victimes. Aussi, je demande que cet arbitrage soit revu et que la liste des maladies radio-induites et prévue à l'article 1er contienne bien les maladies des groupes 1, 2 et 3, retenues par l'UNSCEAR en 2006. Selon l’article 1er du projet de loi, j'attire votre attention à ce sujet, la liste est « fixée par décret en Conseil d'État, conformément aux travaux retenus par la communauté scientifique internationale ». Les critères de détermination de cette liste doivent être scientifiques et non financiers. Ces maladies ne sont pas issues de l'imagination de quelques responsables associatifs. Leur recensement résulte de travaux scientifiques reconnus par la communauté internationale. Je regrette qu'au moment où nous allons adopter définitivement cette loi, après plusieurs mois d'études et de discussions, on revienne sur ce qui était considéré depuis le début comme acquis.
Je tiens cependant à l’adoption du projet de loi, dans la version issue des travaux de la commission mixte paritaire. En effet, en cas de rejet, les victimes perdraient encore des mois précieux alors même que ne sont pas en cause les dispositions législatives, mais les dispositions réglementaires apparemment envisagées.
Je conserve, en outre, bon espoir d’un retour au projet de décret initialement prévu. Je me battrai pour qu'il en soit ainsi. C'est un problème de gouvernance, c’est un problème de conscience, un problème de respect de la parole donnée !
Ce texte va donc poursuivre son chemin. Il pourrait être promulgué d’ici à la fin de l’année. À partir de cette date, toutes les personnes, qu’elles aient déjà intenté un recours devant les tribunaux ou non, qu’elles aient déjà obtenu une indemnisation ou non, pourront, si elles s’estiment victimes des essais nucléaires, déposer une demande d’indemnisation : par ce texte, l’État s’engage à réexaminer l’ensemble des dossiers pour qu’une juste indemnisation soit apportée à toutes les victimes.
Je crois que cette loi peut faire date. Elle permettra de solder ce contentieux, de tourner la page des essais nucléaires « grandeur nature ».
Je voudrais achever mon intervention par une pensée pour les victimes. Si nous sommes ici ce soir, c’est qu’il y a cinquante ans des hommes et des femmes se sont engagés dans l’aventure nucléaire française. Ces hommes et ces femmes ont construit notre force de dissuasion nucléaire.
C’est grâce à eux que nous avons la garantie qu’en toutes circonstances la France, son territoire, son peuple, ses institutions républicaines sont à l’abri d’une agression ou d’un chantage les mettant directement en péril, comme ce fut le cas en 1940.
C’est grâce à eux que notre pays peut jouer le rôle qui est le sien parmi le cercle très restreint des puissances nucléaires.
Ce texte est de la part de notre République un texte de reconnaissance des souffrances que supportent aujourd’hui ceux qui l’ont servie hier, mais aussi du travail accompli par ces femmes et ces hommes qui ont contribué à assurer sa sécurité et sa grandeur.
Je n’oublie pas non plus la situation des habitants du Sahara, de Reggane ou de In Ecker, dans le Hoggar algérien, non plus que celle des habitants des atolls de Polynésie française, tel l’atoll de Tureia, ou des îles Gambier, qui ont été victimes, bien malgré elles, des retombées radioactives de nos essais.
Les cancers sont des maladies lourdes, leurs traitements souvent éprouvants et pas toujours couronnés de succès. Mes pensées vont à toutes ces victimes. Ce texte leur est dédié. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Hervé Morin, qui, après l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le présent projet de loi à l’Assemblée nationale, dont je viens moi-même, a dû se rendre à une réunion très urgente à l’Élysée.
Il y a tout juste un an, le ministre de la défense s’engageait devant vous à porter un projet de loi sur l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français.
Au cours de l’année écoulée, sa détermination comme la vôtre n’ont jamais faibli.
Pour aboutir, nous avons procédé à une très large concertation et à un travail d’écoute qui mérite d’être souligné.
Aujourd’hui, nous sommes heureux et fiers que l’engagement du Gouvernement ait été tenu.
Le projet de loi que vous vous apprêtez à adopter définitivement crée un dispositif d’indemnisation juste, rigoureux et équilibré.
Juste, parce qu’il prend en compte toutes les victimes, personnels civils et militaires de la défense, personnels du CEA et des entreprises présentes sur les sites, mais aussi populations civiles.
Rigoureux, parce qu’il est fondé à la fois sur une présomption légale d’existence d’un lien de causalité et sur un examen au cas par cas destiné à indemniser les personnes dont l’affection est bien liée à l’exposition aux rayonnements ionisants.
Cet examen est confié à un comité d’indemnisation présidé par un haut magistrat et essentiellement composé de médecins et d’experts, c’est-à-dire de personnes indépendantes, conformément à ce que vous aviez voulu.
La proposition du comité d’indemnisation sera jointe à la décision qu’il appartiendra au ministre de la défense de prendre pour chaque demande d’indemnisation.
Enfin, ce projet de loi est équilibré, du fait de la participation des représentants des associations et des élus au sein d’une commission de suivi qui sera chargée de faire des propositions concernant l’évolution de ce dispositif et qui aura la possibilité de se faire assister.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte est le fruit de notre travail à tous.
Au nom du ministre de la défense, je voudrais d’abord remercier chaleureusement le rapporteur du projet de loi au Sénat, mon ami Marcel-Pierre Cléach, de son investissement et de sa coopération avec le ministère de la défense.
Je souhaite également rendre hommage aux membres de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, saisie au fond, et, plus généralement, à ceux d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui, tout au long de cette année 2009, ont participé aux groupes de travail que le ministre de la défense avait mis en place.
À chaque étape du processus de son évolution, en commission comme en séance, vous avez apporté des contributions qui ont amélioré significativement le texte.
Permettez-moi enfin de saluer le président de la commission, M. Josselin de Rohan, qui a fait en sorte que le texte soit examiné en commission dans des conditions très satisfaisantes. C’est grâce à lui que ce projet de loi aura pu être adopté avant le 31 décembre, comme Hervé Morin s’y était d’ailleurs engagé devant vous.
Mesdames, messieurs les sénateurs, grâce à votre engagement, à votre compétence et à votre détermination, nous permettons aujourd'hui à notre pays de tourner la page, d’être en conscience avec lui-même et de rejoindre les autres grandes démocraties, comme les États-Unis ou la Grande-Bretagne, qui nous ont précédés dans cette voie.
Comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, la grandeur de la France fut de décider, au lendemain du second conflit mondial, en plein cœur de la guerre froide, de se doter d’une force de dissuasion indépendante ; ce fut de retrouver ainsi sa place au sein des grandes nations.
Ce fut également, il y a treize ans, de choisir d’arrêter les essais et de s’engager en faveur du désarmement et de la non-prolifération.
Aujourd’hui, grâce à ce texte, la France est grande dans la reconnaissance. Elle peut enfin clore sereinement un chapitre de son histoire. Elle peut enfin répondre au sentiment d’injustice de femmes et d’hommes qui n’avaient pas ménagé leurs efforts pour permettre à notre pays de relever le formidable défi du nucléaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je veux tout d’abord remercier Marcel-Pierre Cléach, dont le rapport comme l’intervention sont d’une extrême qualité, même si nous ne sommes pas d’accord sur la conclusion.
Avec la présentation des conclusions de la commission mixte paritaire, nous achevons l’examen du projet de loi relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, au terme d’un parcours commun de près de dix ans entre les associations concernées et plusieurs parlementaires, unis par une volonté commune.
Le groupe CRC-SPG est cependant profondément déçu de voir un texte qui avait suscité tant d’espoirs rester en quelque sorte « au milieu du gué ».
Certes, ainsi que l’ont relevé nombre de nos collègues, dans cette enceinte comme à l’Assemblée nationale, ce texte a le mérite d’exister et d’inverser la charge de la preuve.
À cet égard, je voudrais souligner une fois encore qu’il ne doit pas son existence au fait que le Gouvernement aurait soudain décidé d’assumer sa responsabilité vis-à-vis des souffrances endurées par les 150 000 travailleurs civils et militaires présents sur les sites d’expérimentation du Sahara et de la Polynésie française.
Il est le fruit de la mobilisation des associations de victimes, des parlementaires, des personnalités qui, des années durant, ont dénoncé le déni et exigé un droit à réparation. Je suis bien placé pour en parler puisqu’une des principales associations à s’être battues pour qu’il en soit ainsi, l’association des vétérans des essais nucléaires, a été créée à Lyon, donc dans mon département, par le docteur Valatx.
Au terme des débats en séance et en commission, nous mesurons malheureusement combien les légitimes aspirations des victimes et de leurs familles sont imparfaitement satisfaites.
Le Gouvernement a en effet rejeté toutes les améliorations que les différents groupes parlementaires avaient proposées afin de prendre réellement en considération les attentes qui s’exprimaient.
Ainsi, vous avez refusé de créer un fonds d’indemnisation spécifique et autonome, au sein duquel siégeraient les associations représentatives, tel qu’il en existe pour les victimes de l’amiante et des autres maladies professionnelles.
Vous avez refusé l’indemnisation des ayants droit des victimes.
Vous avez refusé la création d’un dispositif de retraite anticipée.
Vous avez refusé l’extension des zones géographiques.
Vous avez refusé de prendre en considération les souffrances des populations polynésienne et saharienne et les dommages environnementaux...
Alors, oui, je ne crains pas de réaffirmer que nous avons affaire à un projet de loi a minima !
Vous avez même atténué la portée des dispositions qui étaient supposées constituer des avancées que nos assemblées avaient apportées.
Ainsi, avec l’article 4, vous vous êtes donné les moyens de rejeter des dossiers en introduisant la notion de « risque négligeable » dans l’article même qui instaure une présomption de causalité. Il fallait le faire !
Ce texte ne comporte aucun alinéa, aucun mot qui n’ait été soigneusement pesé pour indemniser le moins de personnes possible et limiter les recours.
J’en viens aux travaux de la commission mixte paritaire.
Notre rapporteur, dont je salue une nouvelle fois le travail, a lui-même précisé qu’aucun désaccord de fond ne subsistait entre les deux assemblées ; autrement dit, il ne fallait pas s’attendre à ce qu’il en sorte des changements.
Cette CMP a affectivement, sans surprise, procédé à des modifications rédactionnelles, mais, là encore, tout a été bien « verrouillé ».
On trouve un exemple de ce verrouillage dans le remplacement à l’article 4 du mot : « demandeur » par le mot : « intéressé », ce qui, selon moi, exclut d’emblée les veuves ou ayants droit de tout recours !
De la même façon, les discussions ont bien illustré la volonté de la majorité des deux assemblées de laisser au comité d’indemnisation une « liberté d’appréciation » en privilégiant l’examen au cas par cas.
En outre, la CMP a rejeté les propositions visant à étendre le champ de compétence de la commission de suivi aux aspects médicaux et environnementaux.
J’en viens à la question de la liste des affections reconnues.
J’insisterai sur la liste des affections reconnues, car là se trouve une raison majeure de voter contre ce texte.
En l’occurrence, il apparaît clairement qu’on ne peut pas vous faire confiance ! Vous n’êtes pas personnellement en cause, monsieur le secrétaire d’État, car vous n’y êtes pour rien : c’est l’ensemble du Gouvernement que je vise, et il se trouve que c’est vous qui le représentez ici aujourd'hui.
M. Guy Fischer. La liste des dix-huit maladies qui constituait la base de la négociation se trouve en effet remise en cause à l’issue de la commission mixte paritaire – et cela, évidemment, sur les ordres de Bercy – puisque trois maladies sont retirées de cette liste...
M. Guy Fischer. C’est vous qui le dites ! Mais nous savons comment les choses se passent, et notre rôle est de défendre les intérêts des vétérans des essais nucléaires.
Je donne volontiers acte à notre rapporteur de l’intégration à cette liste du myélome et du lymphome. Il indiquait, d’ailleurs, lors des travaux de la commission mixte paritaire, reprenant des informations transmises par votre cabinet, monsieur le secrétaire d’État, que le décret inclurait vraisemblablement ces deux cancers.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous préciser votre position ? Cela nous paraît nécessaire au vu des dernières décisions du Gouvernement, auquel on ne peut décidément pas faire confiance.
Je voudrais revenir particulièrement sur les maladies cardiovasculaires. Le regretté président de l’Association des vétérans des essais nucléaires, le docteur Jean Louis Valatx, avait réalisé une analyse des 1 800 questionnaires remplis par les adhérents de l’association. Il s’avère qu’un vétéran sur cinq souffre de maladies cardiovasculaires. Cette analyse est d’ailleurs corroborée par l’UNSCEAR, le comité scientifique des Nations unies pour l’étude des effets des rayonnements ionisants, qui reconnaît, dans ses publications les plus récentes, que les effets sanitaires de ces rayonnements portent sur trois catégories de pathologies : les cancers, y compris ceux que vous excluez de votre liste, les maladies cardiovasculaires et les répercussions sur le système immunitaire.
Limiter la liste des maladies radio-induites, comme vous le faites, revient, bien entendu, à limiter le champ de l’indemnisation. C’est inacceptable ! Et la nouvelle décision que vous semblez vouloir prendre – même si vous dites que rien n’est arrêté ! – rétrécira encore le champ de l’indemnisation, dans le seul but de réduire les dépenses, c’est-à-dire la réparation du préjudice subi par les victimes.
En définitive, et c’est le reproche le plus important que l’on peut faire à ce texte, le Gouvernement reste juge et partie, même s’il doit motiver ses décisions de refus ; c’est, sans conteste, le point qui a déterminé le groupe CRC-SPG à voter contre ce projet de loi.
Je veux réaffirmer ce soir notre décision de ne pas accréditer une loi en trompe-l’œil.
Nous aurons l’occasion d’en reparler, car la mobilisation des associations ne doit pas être considérée comme achevée. Elles vont, au contraire, toujours avec notre soutien, s’intéresser de très près aux dossiers de demande d’indemnisation de leurs adhérents, aux contentieux qui ne manqueront pas de voir le jour et, bien sûr, aux décrets qui seront publiés. Elles vont continuer leur combat pour faire évoluer le dispositif de reconnaissance et d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Elles nous trouveront, comme par le passé, à leurs côtés.
En attendant, nous réitérons notre désaccord complet avec ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Vantomme.
M. André Vantomme. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce texte est avant tout le signe d’un devoir de reconnaissance, une reconnaissance certes tardive et laborieuse, mais ô combien nécessaire !
Longtemps, l’État a nié cette réalité : les essais nucléaires – « nos » essais nucléaires ! – ont produit des effets non désirés, non programmés, mais réels.
Le ministre de la défense a souhaité prolonger le travail des parlementaires et des associations, et nous a présenté le projet de loi qui est aujourd’hui soumis à notre vote. Après de longues années de silence et de déni, il a eu la volonté de faire cesser cette injustice : c’est bien, très bien même !
Le travail parlementaire a permis d’améliorer un texte qui avait des qualités, mais qui était loin de répondre aux attentes des victimes. Il fallait l’amender profondément, et nous l’avons fait... partiellement, car, hélas ! tous nos amendements n’ont pas été retenus.
Ce texte répond-il à nos attentes, exprimées naguère dans des propositions de loi signées par de très nombreux parlementaires ?
Ce texte répond-il aux revendications des victimes des essais nucléaires, notamment des populations de Polynésie, et à leurs associations ?
Ce texte est-il juste et équilibré ?
Vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, car nous en avons longuement débattu ici même, nous considérons que ce texte, malgré de réelles avancées, est incomplet. Nous reconnaissons le chemin parcouru, mais nous ne pouvons pas être pleinement satisfaits.
S’agissant de la présomption de causalité, des progrès considérables ont été accomplis par rapport au texte initial : dorénavant, le ministère de la défense sera dans l’obligation de motiver une éventuelle décision de refuser un dossier.
Il ne faudrait pas que cette présomption de causalité, définie au cours des débats parlementaires, notamment au Sénat, soit contournée en cours de route et qu’elle puisse servir à limiter le nombre d’indemnisations. Je rappelle, à la suite du rapporteur, notre ami Marcel-Pierre Cléach, que « les sénateurs aveint cherché à limiter au maximum les possibilités pour le Gouvernement de refuser l’indemnisation, sauf à disposer d’éléments très solides ». J’espère donc que le dispositif fonctionnera en respectant l’esprit de nos travaux.
Mais nous voulions aussi conforter le processus même d’indemnisation des victimes. Nous appelions de nos vœux un processus plus équilibré, moins dépendant du ministère de la défense, et nous souhaitions que les ayants droit soient incorporés au dispositif de reconnaissance et d’indemnisation. Nous proposions également qu’un fonds d’indemnisation autonome plus efficace et plus rapide voie le jour.
Nos collègues Richard Tuheiava et Dominique Voynet ont, en outre, fort opportunément signalé que des différences subsistaient quant à la délimitation géographique retenue, quant à la liste des maladies concernées, quant au suivi à moyen et à long terme des conséquences des essais nucléaires sur l’environnement et sur les populations.
Nous avions fait des propositions sur la place des associations et de leurs représentants au sein du dispositif d’indemnisation, et d’autres tendant à améliorer la composition et le travail du comité du suivi.
Mais rassurez-vous, mes chers collègues, je ne referai pas le match... (Sourires.) Le débat a eu lieu ; il s’agit maintenant de trancher et de fixer les perspectives pour l’avenir car, tel qu’il est, ce texte appelle dès maintenant une suite !
Devons-nous rejeter ce texte ? Ma réponse est claire : c’est un texte incomplet, qui s’arrête en chemin. Arrivant après des années de silence et de dénégation, il constitue le premier pas – mais seulement le premier ! – vers la reconnaissance par l’État des victimes des essais nucléaires. Ce premier pas en appelle d’autres !
Même si ce texte ne va pas au bout de la logique de reconnaissance et d’indemnisation, il ouvre une porte : il convient de la franchir afin de continuer la lutte pour une meilleure reconnaissance et une juste indemnisation de toutes les victimes.
Notre groupe se prononcera sur ce texte non pas avec l’idée d’un aboutissement du processus législatif, mais avec la conviction que cette loi nécessaire constitue un jalon, une marche, dans un combat qui, à partir de l’acquis d’aujourd’hui, se poursuivra dès demain.
Le groupe socialiste ne saurait toutefois oublier les engagements que vous aviez pris, monsieur le secrétaire d’État. Vous vous étiez en effet engagé à nous communiquer, avant le vote du projet de loi, le projet de décret. Or nous ne pouvons que constater que cet engagement n’a pas été tenu.
Permettez-moi de vous donner lecture des réponses des membres de la commission mixte paritaire à l’une de mes questions : j’avais demandé si les décrets d’application seraient bien présentés avant l’adoption du texte définitif par le Parlement.
M. Patrice Calméjane, rapporteur pour l’Assemblée nationale, a indiqué que le décret était actuellement en cours d’examen par les instances interministérielles. Il a toutefois partagé mon souhait.
M. Maxime Gremetz, député, a rappelé que cette transmission avait fait l’objet d’un engagement solennel pris par le ministre devant l’Assemblée nationale.
M. Guy Teissier, député, a répondu qu’il partageait notre préoccupation, qu’il s’agissait là de la responsabilité du Gouvernement et qu’il n’y avait pas de raison de douter que le ministre respectât ses engagements.
M. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur pour le Sénat, a précisé que, selon ses informations, le décret d’application devait être très rapidement publié pour que le dispositif prévu par la loi soit opérationnel à partir du mois de février 2010, ce qui constituerait un record.
M. Georges Colombier, député, a ajouté que le ministre de la défense avait toujours tenu parole et que rien ne permettait de penser qu’il puisse changer d’attitude.
M. Charles Gautier. Quel scoop !
M. André Vantomme. Monsieur le secrétaire d’État, quelle que soit la pertinence de ces avis, émis par des députés et des sénateurs de toutes tendances politiques, force est de constater, ce soir, que nous ne disposons pas de ce projet de décret. Sur un aspect essentiel de ce problème, le Parlement n’est donc pas en mesure de se prononcer dans les conditions qui avaient été initialement définies.
Un autre point majeur concerne la liste des maladies prises en compte dans le cadre de cette indemnisation.
On apprend par des bruits de couloir, et alors que les représentants du Parlement et des associations en ont très longuement discuté lors des réunions de concertation avec vos services, que cette liste serait remise en cause de manière très significative par Bercy.
Monsieur le secrétaire d’État, il faudra, dans un très proche avenir, remettre l’ouvrage sur le métier !
Pour l’heure, le groupe socialiste votera contre ce texte (M. Nicolas About s’exclame) parce que des conditions essentielles, préalablement négociées lors de la discussion de ce projet de loi, ne sont pas respectées. Pas de projet de décret : pas d’accord ! Remise en cause de la liste des maladies : pas d’accord ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Guy Fischer. Très bien ! Il faut respecter la parole donnée aux vétérans, et non les trahir !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’espère que le ministre de la défense pourra nous rejoindre avant la fin de ce débat, car je sais quels ont été son engagement et sa volonté pour faire aboutir ce texte. Si nous sommes réunis ce soir pour voter ce texte définitivement, c’est à lui que nous le devons !
M. Jacques Gautier. En cette fin de session, le vote des conclusions de la commission mixte paritaire relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français est un moment solennel.
Vous le savez, la France a procédé à 210 essais nucléaires, dans le Sahara algérien et en Polynésie française. Au cours de ces essais, des retombées radioactives ont exposé les personnels militaires et civils, ainsi que les populations autochtones, aux rayons ionisants. Certains d’entre eux ont pu développer des maladies dites « radio-induites ».
Depuis plusieurs années, les associations de vétérans atteints par ce type de pathologies se battent pour que notre République les reconnaisse en tant que victimes et leur octroie un droit légitime à l’indemnisation. Leur pugnacité est, ce soir, récompensée, et je tiens à saluer leur patience, leur volonté, leur engagement.
Pas moins de dix-huit propositions de loi ont été déposées sur ce sujet, sur l’initiative de députés ou de sénateurs, mais jusqu’à ce jour aucune n’avait abouti.
Je souhaite témoigner du remarquable travail que vous avez accompli, monsieur le rapporteur. Vous avez œuvré, afin d’instaurer un cadre juridique le plus rigoureux et juste possible. Introduire le principe de présomption de causalité pour les demandeurs, sans pour autant ouvrir la porte à une indemnisation massive – cela reviendrait en effet à nier la spécificité même des victimes –, n’était pas facile. Je veux vous en donner acte.
Je salue aussi l’apport de nos collègues de l'Assemblée nationale, ainsi que des services du Médiateur de la République.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, je me félicite du travail accompli et de la méthode. Au mois de novembre 2008, le ministre de la défense s’est personnellement engagé à rendre justice aux vétérans, dont certains ne sont malheureusement plus là aujourd’hui.
Je souhaite rappeler que ce sont les volontés de justice, d’impartialité et de coproduction qui nous ont guidés tout au long de l’élaboration de ce projet de loi. Monsieur le secrétaire d'État, depuis le mois de décembre 2008, un grand nombre de réunions de travail ont été organisées avec des députés et des sénateurs de chaque groupe politique, ainsi qu’avec des représentants des associations et les élus de Polynésie française.
Ce soir, la France et notre défense nationale ont rendez- vous avec elles-mêmes. Il était temps de mettre fin à un tabou qui frappe certaines archives du ministère de la défense !
Je me réjouis de soutenir un gouvernement qui a eu le courage d’assumer les conséquences d’un choix stratégique remontant à plus de cinquante ans : celui de la dissuasion nucléaire. Ce choix gaullien permet aujourd’hui à notre pays de jouer un véritable rôle sur la scène internationale, de peser dans le concert des nations, notamment au Conseil de sécurité de l’ONU, et de garantir la sécurité tant de nos concitoyens que de nos intérêts vitaux. Le présent projet de loi constitue une preuve de courage politique. Si d’autres, dans le passé, se sont avant tout souciés d’appliquer le moratoire international sur les essais nucléaires, ils ont moins manifesté leurs préoccupations quant aux conséquences des essais sur les populations.
Le courage politique, c’est assumer le passé, et vous le faites, monsieur le secrétaire d'État, c’est résoudre, enfin, le problème du vide juridique auquel se trouvaient confrontées les victimes. Trop de demandes d’indemnisation se sont transformées en d’interminables procédures devant un tribunal administratif qui, dans la majorité des cas, ne pouvait bénéficier ni d’éléments officiels relatifs aux contaminations radioactives ni d’expertises médicales spécifiques. Les cancers sont des maladies terribles, sans signature, dont il est encore très difficile d’identifier l’origine. La poursuite de recherches sur une potentielle prédestination génétique en témoigne.
Affirmer que les essais nucléaires n’ont eu aucune conséquence serait déraisonnable. C’est pour cette raison que je me félicite que le présent projet de loi s’appuie sur les travaux les plus avancés : ceux de l’UNSCAER. Il ne se limite pas, vous le savez, mes chers collègues, aux seuls personnels ayant travaillé sur les sites d’expérimentation. Il vise aussi les populations ayant vécu autour des sites. Dès lors, les victimes militaires ou civiles pourront déposer une demande d’indemnisation auprès d’un comité créé spécialement par la loi. Cela atteste un autre point fort du texte : la rigueur. Ce comité, composé d’experts médicaux, nommés conjointement par les ministères de la défense et de la santé et des sports, traduit, avant tout, la volonté d’une parfaite transparence vis-à-vis des victimes.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, vous avez souhaité qu’un délai de six mois maximum soit imposé au comité d’indemnisation pour statuer. En effet, les victimes souffrant de cancers n’ont plus le temps d’attendre !
C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles aucun fonds d’indemnisation ne sera créé. Le présent projet de loi repose sur le pragmatisme : ces structures administratives se caractérisent en effet par des lourdeurs intolérables pour les victimes pour qui le temps est des plus précieux. La création d’un fonds spécifiquement dédié à l’indemnisation des victimes de l’amiante doit nous servir d’exemple… à ne pas suivre ! Sur ce point, je suis en désaccord avec vous, monsieur Vantomme. Deux années auront été nécessaires à la mise en place de ce fonds ! En l’espèce, nous voulons aller plus vite. Ainsi, les indemnisations seront prélevées directement sur les budgets des pensions de la défense, ce qui permettra d’éviter les problèmes liés au plafonnement financier inhérent à tout fonds.
Enfin, à la volonté de justice, de transparence et de rigueur s’ajoute celle de l’évaluation. La création d’une commission consultative du suivi des conséquences des essais nucléaires, au sein de laquelle pourront siéger les représentants d’associations des victimes, démontre, monsieur le secrétaire d'État, votre volonté d’impliquer les associations de victimes. Ces dernières, qui sont à l’origine du texte, auront un rôle à jouer jusqu’au terme de la procédure. Ce point est important, en tout premier lieu pour les victimes, qui, au travers de l’évaluation de l’action du comité, trouveront un soutien dans leur démarche. Enfin, la création de cette commission est révélatrice de l’esprit du projet de loi. Ce texte fixe les conditions d’une procédure d’indemnisation aussi juste qu’efficace, dont nous nous félicitons.
Cependant, monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi, au nom du groupe UMP, de vous demander, comme les précédents orateurs, de vous engager quant au décret qui fixera la liste des pathologies. Cette dernière devra être conforme au décret initial communiqué aux parlementaires et aux associations.
M. Nicolas About. Très bien !
M. Jacques Gautier. Il reste que nous avons à nous prononcer non pas sur un décret, mais sur un texte qui marquera l’histoire. Alors, pour les victimes civiles et militaires et eu égard au long combat qu’ont mené les associations, il nous incombe, à nous sénateurs, d’adopter ce projet de loi. Il y va de l’honneur de la République envers ceux qui l’ont servie. Pour toutes ces raisons, les membres du groupe UMP du Sénat voteront le texte qui nous est aujourd'hui soumis. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, étant appelé à se prononcer après l’Assemblée nationale, le Sénat statue par un seul vote sur l’ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
Article 1er
(Texte voté par le Sénat)
Toute personne souffrant d’une maladie radio-induite résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français et inscrite sur une liste fixée par décret en Conseil d’État conformément aux travaux reconnus par la communauté scientifique internationale peut obtenir réparation intégrale de son préjudice dans les conditions prévues par la présente loi.
Si la personne est décédée, la demande de réparation peut être présentée par ses ayants droit.
…………………………………………………………………………….
Article 3
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
Le demandeur justifie, en cas de besoin avec le concours du ministère de la défense et des autres administrations concernées, que la personne visée à l’article 1er a résidé ou séjourné dans les zones et durant les périodes visées à l’article 2 et qu’elle est atteinte de l’une des maladies figurant sur la liste établie en application de l’article 1er.
Article 4
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – Les demandes individuelles d’indemnisation sont soumises à un comité d’indemnisation, présidé par un conseiller d’État ou un conseiller à la Cour de cassation et composé notamment d’experts médicaux nommés conjointement par les ministres chargés de la défense et de la santé sur proposition du Haut Conseil de la santé publique.
Les ayants droit des personnes visées à l’article 1er décédées avant la promulgation de la présente loi peuvent saisir le comité d’indemnisation dans un délai de cinq ans à compter de cette promulgation.
II. – Ce comité examine si les conditions de l’indemnisation sont réunies. Lorsqu’elles le sont, l’intéressé bénéficie d’une présomption de causalité à moins qu’au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable.
Le comité procède ou fait procéder à toute investigation scientifique ou médicale utile, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel.
Il peut requérir de tout service de l’État, collectivité publique, organisme gestionnaire de prestations sociales ou assureur communication de tous renseignements nécessaires à l’instruction de la demande. Ces renseignements ne peuvent être utilisés à d’autres fins que cette dernière.
Les membres du comité et les agents désignés pour les assister doivent être habilités, dans les conditions définies pour l’application de l’article 413-9 du code pénal, à connaître des informations visées aux alinéas précédents.
Dans le cadre de l’examen des demandes, le comité respecte le principe du contradictoire. Le demandeur peut être assisté par une personne de son choix.
III. – Dans les quatre mois suivant l’enregistrement de la demande, le comité présente au ministre de la défense une recommandation sur les suites qu’il convient de lui donner. Ce délai peut être porté à six mois lorsque le comité recourt à des expertises médicales. Dans un délai de deux mois, le ministre, au vu de cette recommandation, notifie son offre d’indemnisation à l’intéressé ou le rejet motivé de sa demande. Il joint la recommandation du comité à la notification.
Dans l’année suivant la promulgation de la présente loi, les délais d’instruction par le comité d’indemnisation sont portés à huit mois à compter de l’enregistrement de la demande.
IV. – La composition du comité d’indemnisation, son organisation, les éléments que doit comporter le dossier présenté par le demandeur, ainsi que les modalités d’instruction des demandes et notamment les modalités permettant le respect du contradictoire et des droits de la défense sont fixés par décret en Conseil d’État.
…………………………………………………………………………….
Article 7
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
Le ministre de la défense réunit au moins deux fois par an une commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires. Cette dernière peut également se réunir à la demande de la majorité de ses membres. La commission comprend dix-neuf membres dont un représentant de chacun des ministres chargés de la défense, de la santé, de l’outre-mer et des affaires étrangères, le président du gouvernement de la Polynésie française ou son représentant, le président de l’assemblée de la Polynésie française ou son représentant, deux députés, deux sénateurs, cinq représentants des associations représentatives de victimes des essais nucléaires ainsi que quatre personnalités scientifiques qualifiées dans ce domaine.
La commission est consultée sur le suivi de l’application de la présente loi ainsi que sur les modifications éventuelles de la liste des maladies radio-induites. À ce titre, elle peut adresser des recommandations au ministre de la défense et au Parlement.
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de désignation des membres et les principes de fonctionnement de la commission.
…………………………………………………………………………….
Sur ces articles, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Nicolas About, pour explication de vote.
M. Nicolas About. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, par ce projet de loi, la France reconnaît sa responsabilité. Ce texte permet à notre pays de répondre, certes imparfaitement, nous en avons conscience, mais concrètement, à la demande, formulée par tant de Français, d’élus, d’associations, quant à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires qui se sont déroulés tant au Sahara qu’en Polynésie française.
Ce texte consacre l’inversion de la charge de la preuve. Tout en laissant la porte ouverte, il est prudent. Comme vous l’avez confirmé, monsieur le secrétaire d’État, la liste des affections reconnues sera revue…
M. Guy Fischer. À la baisse !
M. Nicolas About. …et examinée dans le cadre du décret, après consultation d’une assemblée d’experts, dans les deux, trois ou quatre semaines à venir, et nous serons bien sûr très vigilants sur ce point.
Ce projet de loi constitue, nous le savons tous, un pas considérable et attendu, que nul n’a le droit de refuser, même si certains le jugent insuffisant.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe Union centriste voteront le texte qui nous est proposé. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 118 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l’adoption | 186 |
Contre | 137 |
Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
6
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 23 décembre 2009 à quatorze heures trente et, éventuellement, le soir
1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Rapport de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat (n° 184, 2009-2010).
2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.
Rapport de M. Pierre Hérisson, rapporteur pour le Sénat (n° 192, 2009-2010).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD