M. Jean-Pierre Sueur. Tout à fait, ma chère collègue.

Nous sommes hostiles à l’idée de « cantonaliser » les régions, car ce serait contraire à l’idée que nous nous faisons de cette collectivité. C'est pourquoi, monsieur Mézard, nous étions profondément opposés au sous-amendement que vous avez présenté.

Pour ce qui est de l’amendement n° 645 rectifié, je redis notre colère, et je reprends entièrement à mon compte les propos de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Monsieur le ministre, vous n’avez cessé d’affirmer qu’il n’était pas question de débattre des modalités électorales, ce que nous avons regretté, car nous aurions voulu que vous fassiez toute la lumière sur ce sujet, en toute transparence. Et puis, tout à coup, vous changez d’avis, parce qu’un amendement a été déposé par M. About. Il est clair d'ailleurs que ce texte, comme d’autres l’ont souligné avant moi, n’apportera aucune garantie par rapport au texte qu’a voulu le Président de la République !

Nos collègues centristes n’auront obtenu qu’un plat de lentilles, qui d’ailleurs ne contient pas beaucoup de lentilles...

M. Nicolas About. Attendez ! Nous n’avons pas encore négocié les lentilles !

M. Pierre Fauchon. Et il y a du fer et de l’énergie dans les lentilles ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur About, vous n’avez rien obtenu qui n’existe déjà.

M. Nicolas About. Mais il n’existe rien aujourd'hui !

M. Jean-Pierre Sueur. Si vous avalez à ce prix le conseiller territorial, cette transaction ne sera vraiment pas très satisfaisante, c’est le moins que l’on puisse dire !

Nous nous opposions au sous-amendement n° 685 parce que nous refusons le conseiller territorial. Nous voulons des régions fortes et des départements qui soient des collectivités de proximité !

De même, nous sommes hostiles à l’amendement n° 645 rectifié, parce que, d'une part, il témoigne d’un revirement tout à fait inacceptable – j’y insiste – par rapport aux propos qui nous étaient tenus auparavant et que, d'autre part, il présuppose l’existence de ce fameux conseiller territorial que, en ce qui nous concerne, nous n’avalerons pas aussi facilement !

Monsieur le ministre, voilà notre position. Elle est claire et nette.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Le mode de scrutin des élections régionales est plutôt bon, il faut le souligner. Personne ne s’est plaint que les régions étaient ingouvernables. Je n’ai jamais entendu un mot sur ce thème !

M. Jean-Pierre Sueur. Sauf dans le passé !

M. Jean Desessard. Certes, mon cher collègue, quand s’appliquait l’ancien mode de scrutin, mais l’actuel est bon. Pour assurer une majorité stable, il accorde une prime de 25 % des sièges à la liste arrivée en tête ; ce système est positif, et même préférable à celui qui est en vigueur aux municipales, où la prime majoritaire est de 50 % des sièges, ce qui est beaucoup.

M. Nicolas About. Vous voulez instaurer le système allemand ?

M. Jean Desessard. Nous reviendrons sur le système allemand, monsieur About.

En outre, ce mode de scrutin prend en compte la notion de territoire, à travers l’existence de sections départementales. En fait, il n’a qu’un inconvénient pour la droite, c’est qu’elle est minoritaire dans vingt régions sur vingt-deux ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Provisoirement !

M. Jean Desessard. Je comprends que cette situation l’énerve quelque peu et qu’elle veuille changer ce mode de scrutin qui, pour le reste, n’a été critiqué par personne et dont on ne dit que du bien !

Examinons à présent l’amendement de M. About. Nous pourrions considérer que cette disposition est intéressante, parce qu’elle nous rapprochera du mode de votation allemand, c'est-à-dire celui qui allie le scrutin uninominal à la proportionnelle. Toutefois, derrière cette proposition, il y a l’idée de M. le ministre, qui entend réserver à la proportionnelle, au mieux, 20 % des sièges !

M. Pierre Fauchon. Rien n’est voté !

M. Nicolas About. Les modalités seront discutées plus tard !

M. Jean Desessard. M. About a évoqué lui-même une « part substantielle de proportionnelle » lorsqu’il a présenté cet amendement. Néanmoins, dans le texte de ce dernier, le terme « substantiel » n’apparaît pas ! Autrement dit, il s’agit d’un chèque en blanc !

M. Nicolas About. Pas du tout !

M. Jean Desessard. J’en veux bien un aussi ! Si le Gouvernement ne respecte pas ses engagements, je veux bien encaisser le mien également. (Sourires.)

M. Pierre Fauchon. C’est une condition sine qua non !

M. Nicolas About. N’ayez pas peur !

M. Jean Desessard. Prenons le cas d’une assemblée de deux cents conseillers. Si l’on applique le système proposé par le Gouvernement, à savoir 20 % des sièges obtenus à la proportionnelle, quarante conseillers territoriaux seront élus grâce à ce mode de scrutin. Et comme il s’agit d’un système compensatoire, ces sièges seront réservés aux formations politiques qui n’en ont obtenu aucun avec le scrutin majoritaire.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Jusque-là, je suis d’accord !

M. Jean Desessard. Dans ces conditions, le système est pertinent. Les formations politiques qui ont déjà des élus grâce au scrutin uninominal ne profitent pas du système compensatoire ; ce sont les petites formations qui se partagent les quarante sièges restants et elles peuvent même espérer obtenir une dizaine de sièges. Certes, en proportion, c’est peu, mais cela reste intéressant.

Or le système que propose le ministre de l’intérieur n’est en rien compensatoire ! Selon lui, l’UMP, qui a déjà obtenu le plus grand nombre des sièges, doit aussi détenir une grande partie des quarante sièges qui restent à répartir. C’est aussi valable pour le parti socialiste. Ainsi, les petites listes qui n’auront obtenu que 8 % des voix – je ne sais pas d’où je tiens ce chiffre… – devront se contenter de 8 % des quarante sièges restants, c'est-à-dire seulement trois sièges ! Ce n’est pas cela, la proportionnelle !

M. Nicolas About. Non ! On ne vous abandonnera pas ! Faites-moi confiance !

M. Jean Desessard. C’est ce qui va se passer, monsieur About ! Je le répète, vous faites un chèque en blanc !

Dans le système prévu par le Gouvernement pour la répartition de ces 20 % de sièges, une formation qui atteint 8 % à la proportionnelle et rien au scrutin uninominal n’obtiendra que 8 % des quarante sièges attribués à la proportionnelle !

M. Nicolas About. Non ! Nous tiendrons les modalités !

M. Jean Desessard. Le courant majoritaire de l’UMP est contre la proportionnelle. Vous n’avez donc aucune garantie concernant les modalités en votant un texte aussi flou !

M. Pierre Fauchon. C’est une première étape !

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Je souhaite répondre aux arguments avancés par un certain nombre de nos collègues de l’opposition.

Tout d’abord, cet amendement est non pas celui de Nicolas About, mais celui du groupe de l’Union centriste unanime.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On l’a bien compris !

M. Hervé Maurey. Ensuite, cet amendement ne vise pas à fixer des règles relatives au mode de scrutin.

M. Hervé Maurey. Il tend à poser des principes. C’est tout à fait différent !

Enfin – je l’affirme avec beaucoup de solennité et de force, et vous savez aussi bien que moi que mes propos figureront au Journal officiel de la République française –, les principes contenus dans cet amendement, dans mon esprit en tout cas, excluent le mode de scrutin proposé jusqu’à présent par le Gouvernement.

J’ai insisté sur ce point dans la discussion générale : le mode de scrutin envisagé par le Gouvernement n’est pas mixte. Il s’agit d’un mode de scrutin-alibi, d’un leurre – peu importe comment on le qualifie – ...

M. Jean Desessard. Nous sommes d’accord !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes naïf !

M. Hervé Maurey. ... qui vise à broyer le pluralisme. C’est précisément ce dont nous ne voulons pas.

De ce point de vue, je partage votre position, monsieur Desessard. Si le scrutin à la proportionnelle ne concerne que 20 % des sièges dans une assemblée qui compte quinze ou vingt-cinq membres, seuls trois ou quatre conseillers territoriaux seront élus grâce à ce mode de scrutin. En outre, s’il ne vise pas à corriger les effets du scrutin uninominal mais est lui aussi au service des grands partis, il ne remplit pas les fonctions que nous souhaitons lui voir assigner.

Je l’ai déjà indiqué au cours de la discussion générale, mais je le répète aujourd'hui : le groupe de l’Union centriste juge impérative l’instauration d’un scrutin véritablement mixte et équilibré. Celui-ci se caractérise par une part de scrutin majoritaire, seul moyen d’assurer une représentation des territoires – nous y tenons beaucoup, et c’est ce qui nous distingue du groupe CRC-SPG –, et par une part substantielle de proportionnelle, qui corrige les effets du scrutin uninominal en assurant le pluralisme politique, une juste représentation démographique et la parité. Tel est le sens de notre démarche.

Certes, j’en conviens, ces principes, une fois posés, ne seront pas faciles à mettre en œuvre, notamment à l’échelle d’une petite assemblée. C'est la raison pour laquelle il faudra sans doute envisager des assemblées départementales un peu plus importantes.

De ce point de vue, il est heureux que nous disposions d’un peu de temps avant l’examen du projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale. Nous aurons en effet besoin de mener une réflexion approfondie pour trouver un mode de scrutin qui réponde aux principes que nous entendons poser aujourd’hui et qui exclue totalement le système proposé par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur Maurey, ou vous êtes un grand naïf ou vous essayez de nous le faire croire, mais – M. le ministre ne me démentira pas, je pense – le mode de scrutin envisagé par le Gouvernement, dont je ne sais s’il sera finalement retenu, est parfaitement compatible avec les principes que tend à fixer cet amendement déposé par l’ensemble des membres de l’Union centriste.

M. Hervé Maurey. C’est pour cela que j’ai tenu à apporter des précisions !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. De ce point de vue, vous vous trompez lourdement. Il n’est qu’à lire l’exposé des motifs du projet de loi : 20 % de proportionnelle sont réservés aux formations qui n’auraient pas d’élus au premier tour.

M. Nicolas About. Nous n’avons pas parlé de 20 % !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous verrez ce qu’il adviendra par la suite et comme vous en serez satisfaits !

Je voudrais insister sur un point qui me semble éminemment critiquable. Quand, nous, nous proposons d’inscrire le principe de la proportionnelle, on ne nous répond pas qu’on est contre, on nous oppose que ce n’est pas possible, car le choix du mode de scrutin sera examiné plus tard. Or quand, vous, vous voulez inscrire le principe d’un scrutin uninominal, qui permet en même temps la parité et la proportionnelle, on vous donne satisfaction, considérant que ce principe peut être inscrit dans la loi. C’est totalement inadmissible !

M. Jean-Pierre Sueur. C’est évident ! On nage en pleine contradiction !

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Peyronnet. Force est de reconnaître que cette attitude qui se répète depuis qu’a commencé, à la fin de l’année dernière, la discussion des textes relatifs à la réforme des collectivités territoriales est tout à fait scandaleuse. Systématiquement, on nous renvoie à la norme et à des textes à venir pour nous opposer que ce n’est pas le moment. Là, c’est le moment !

J’ai écouté attentivement M. Maurey et je mesure la portée des grands principes que cherche à poser cet amendement. Pour autant, je vous invite à vous remémorer la phrase que l’on prête à Clemenceau sur ce sujet : « Appuyons-nous sur les principes, ils finiront bien par céder. » Selon moi, l’UMP va beaucoup s’appuyer sur les principes et vous allez céder. (Sourires.)

Sur cette question, vous n’avez pas la moindre garantie. Certes, vous pouvez inscrire le mode de scrutin qui a été envisagé. À partir du moment où est prévue une petite dose de proportionnelle,…

M. Pierre Fauchon. Pourquoi petite ?

M. Jean-Claude Peyronnet. ... le principe du pluralisme politique est assuré.

M. Pierre Fauchon. Justement, on verra !

M. Jean-Claude Peyronnet. Je suis prêt à prendre le pari, monsieur Fauchon, que vous serez finalement floués. Si vous gagnez, je vous offrirai un bon repas dans le restaurant de votre choix. (Sourires.) Le scrutin proportionnel introduira forcément une petite dose de parité.

Ce débat est un modèle d’hypocrisie de la part du parti dominant de la majorité et un modèle de naïveté de la part du groupe de l’Union centriste.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Fausse naïveté !

M. Pierre Fauchon. Ne confondez pas naïveté et espérance !

M. Jean-Claude Peyronnet. Au bout du compte, c’est un marchandage un peu honteux qui vient de se dérouler sous nos yeux.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Quand la gauche parle du principe d’un scrutin à deux tours, il s’agit de modalités. Quand le groupe de l’Union centriste évoque le scrutin uninominal, c’est un principe. Nous le découvrons ce soir.

Nous voterons contre cet amendement pour une question de principe. À cet instant, aucune logique, aucune cohérence ne justifient que nous adoptions un amendement sur le cadrage du mode d’élection du conseiller territorial, alors que l'article 1er de ce projet de loi n’est toujours pas voté et que la fonction de conseiller territorial n’existe pas encore.

Procéder ainsi, c’est faire la politique que nos concitoyens n’aiment pas : c’est ce que l’on appelle de la manœuvre politicienne !

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant, pour explication de vote.

M. Michel Boutant. La situation est en réalité très simple. Voilà quelques semaines, le président du Sénat a déclaré que, sur cette réforme et la création de la fonction de conseiller territorial, il n’existait pas de majorité à la Haute Assemblée. Cet après-midi, nous avons assisté à une séance de charcutage. Ce soir, nous assistons à une séance de marchandage.

M. Michel Boutant. Pour disposer de la majorité indispensable à l’adoption de ce projet de loi de réforme des collectivités territoriales, qui suscite de vives réticences de la part d’un certain nombre d’élus de la majorité, le Gouvernement doit céder sur certains sujets : là, il s’agit de principes, de modalités. C’est le prix du ralliement et du reniement.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, pour explication de vote.

M. Claude Biwer. Au cours de notre réflexion sur ce sujet, nous avons évoqué la création des conseillers territoriaux. Faut-il conserver le système que nous connaissons ou instaurer une nouvelle organisation ?

Si nous approuvons le principe des conseillers territoriaux, c’est parce que ces derniers auront vocation à représenter les territoires, notamment les territoires ruraux, ce qui ne sera possible qu’avec un scrutin uninominal.

En revanche, dans toutes nos discussions, que ce soit en séance publique ou en commission, on insiste sur le fait que la population devrait être plus largement représentée. Si l’on s’achemine vers cette voie, cela signifie que les territoires à faible densité de population seront beaucoup mieux représentés que les autres. Nous ne partageons pas ce point de vue.

Certes, nous sommes prêts à voter la création de conseillers territoriaux et autres délégués pour les départements, étant entendu qu’il faudra sans doute plus d’élus dans certains d’entre eux, car, avec une dizaine ou une quinzaine d’élus, on fait assez peu de chose.

Cette réflexion très sereine au sein de notre groupe nous a incités à accepter la création des conseillers territoriaux, à condition que la représentation des territoires soit assurée. C’est pourquoi nous avons fixé les principes fondamentaux du scrutin.

Nous essayons de répondre à deux questions à la fois. C’est la différence entre vos propositions, madame Borvo Cohen-Seat, et les nôtres.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 645 rectifié, présenté par M. About, tendant à insérer un article additionnel avant l’article 1er.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'Union centriste.

Je vous rappelle que l’avis de la commission et du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin public dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Ceux qui souhaitent voter « pour » remettront au secrétaire un bulletin blanc.

Ceux qui souhaitent voter « contre » remettront un bulletin bleu.

Ceux qui souhaitent s’abstenir remettront un bulletin rouge.

Le scrutin sera ouvert dans quelques instants.

………………………………………………………...

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 135 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 181
Contre 157

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 1er.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, ne pourrions-nous pas poursuivre nos travaux jusqu’à vingt et une heures trente ?

M. le président. Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Nous allons donc poursuivre nos travaux, mais après une brève suspension de séance.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures trente-cinq, est reprise à vingt heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 357 rectifié bis, présenté par MM. Sueur, Bel, Peyronnet et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy et Povinelli, Mme Alquier, MM. Andreoni, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet et Chastan, Mme Cartron, MM. Courteau et Daunis, Mme Durrieu, MM. Fichet et Jeannerot, Mme Ghali, MM. Guérini et Guillaume, Mmes Khiari et Klès, MM. Lagauche, Marc, Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Miquel, Mirassou, Patriat, Percheron, Rebsamen, Ries, Sergent, Signé et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. L'article L. 193 du code électoral est ainsi rédigé

« Les conseillers départementaux sont élus au suffrage universel direct dans une circonscription qui respecte le périmètre des communautés urbaines, d'agglomération et d'une ou plusieurs communautés de communes. »

II. Une loi fixe le nombre d'élus représentant les habitants de chaque communauté au sein du conseil départemental en prenant en compte le respect des équilibres démographiques et de la représentation des territoires.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, j’imagine que vous allez en revenir à votre jurisprudence et considérer que cet amendement vise des modalités électorales, que celles-ci sont naturellement hors sujet et que l’on en débattra ultérieurement.

M. Michel Mercier, ministre. Je vous répondrai gentiment !

M. Jean-Pierre Sueur. De toute façon, cet amendement ne s’inscrit pas du tout dans votre logique, puisque nous ne voulons pas, nous, de conseillers territoriaux. Nous sommes pour des élus de la région et des élus du département.

Notre proposition concerne ces derniers. Sans préjuger d’ailleurs du mode de scrutin, les conseillers départementaux sont élus dans une circonscription dont le périmètre est aujourd’hui appelé canton. Or, considérant qu’il y a une réalité montante dans ce pays, qui est celle des communautés, …

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Évolutive aussi !

M. Jean-Pierre Sueur. … à tel point que chacun est d’accord pour la généraliser à l’ensemble du territoire, il ne nous paraît pas souhaitable de laisser s’instaurer des dysharmonies touchant aux périmètres.

Afin de les éviter, nous proposons que, pour l’élection des futurs conseillers départementaux, et non pas des conseillers territoriaux, le Gouvernement puisse procéder le cas échéant à des modifications de périmètre ou, dans le cas de l’établissement de nouveaux périmètres, qu’il prenne en compte ceux des communautés de communes, des communautés d’agglomération et des communautés urbaines.

Je m’explique : aujourd'hui, un même canton – je parle de canton pour être clair – peut ne compter qu’une seule communauté de communes, comme il peut en englober deux ou trois. Nous pensons qu’il serait sage de prendre en compte cette donnée dans une communauté d’agglomération ou dans une communauté urbaine, au moment où l’on établit un périmètre. Autrement dit, il faut qu’il puisse y avoir un certain nombre de périmètres à l’intérieur d’une communauté urbaine ou d’une communauté d’agglomération pour élire les conseillers départementaux.

Il s’agit d’éviter ce que l’on constate aujourd’hui, à savoir une sorte de concurrence, voire de dysharmonie, entre le fait communautaire et le fait cantonal, et de faire en sorte que l’on organise les départements en prenant en compte la réalité vivante, montante et dynamique que constitue, vous le savez bien, monsieur le ministre, l’intercommunalité.

M. le président. L'amendement n° 583 rectifié, présenté par Mmes Voynet et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Blandin et M. Muller, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 193 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. L. 193. - Les conseillers généraux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation.

« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du quatrième alinéa ci-après.

« Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour. Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. En cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du quatrième alinéa ci-après.

« Les listes qui n'ont pas obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges.

« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus. »

II. -  Le premier alinéa de l'article L. 192 du même code est ainsi rédigé :

« Les conseillers généraux sont élus pour six ans. »

III. - L'article L. 191 du même code est abrogé.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise à rédiger ainsi l’article L. 193 du code électoral : « Les conseillers généraux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l’ordre de présentation.

« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir arrondi à l’entier supérieur. […]

« Si aucune liste n’a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour. »

Tel est le détail des élections des conseillers généraux au scrutin de liste.

Cet amendement vise à changer le mode de scrutin actuellement en vigueur pour les élections cantonales et à le calquer à l’avenir sur celui qui est aujourd’hui utilisé pour les élections régionales. L’enjeu est de taille, puisqu’il s’agit d’étendre l’égalité entre les hommes et les femmes dans leur représentation au sein des conseils généraux.

Après l’obtention du droit de vote en 1944, venant corriger l’anomalie du code civil et le préambule de la Constitution de 1946 garantissant « à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme », la moitié des citoyens français, en l’occurrence les citoyennes, auront dû attendre 1999 et la révision constitutionnelle pour enfin constater la reconnaissance de leurs droits. Celle-ci proclamait que la loi devrait désormais favoriser « l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ». Et c’est la loi sur la parité en politique qui est venue apporter une concrétisation législative à ce principe, en juin 2000.

La promotion de l’égalité des droits, monsieur le ministre, ce n’est pas uniquement des mots ! Et lorsque vous nous proposez, dans un mouvement profondément passéiste, d’inverser la vapeur en créant des conseillers territoriaux élus dans le cadre d’un scrutin uninominal non soumis à des mesures paritaires contraignantes, c’est contraire à la Constitution. Vous ne pouvez d’ailleurs pas ignorer que, depuis les élections cantonales de mars 2008, seulement 12,3 % des sièges sont occupés par des femmes, quand les élections régionales de mars 2004 ont permis l’élection de 47,6 % de conseillères régionales.

La démocratie est imparfaite, monsieur le ministre, mais, plutôt qu’un retour en arrière, je propose de poursuivre la marche vers une démocratie, toujours imparfaite certes, mais plus aboutie. Tel est l’objet de cet amendement qui tend à proposer l’élection des conseillers généraux par scrutin de liste.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’amendement n° 583 rectifié vise à calquer le mode d’élection des conseillers généraux sur celui des conseillers régionaux. En maintenant deux scrutins séparés pour l’élection des conseillers généraux et des conseillers régionaux, il est contraire à la solution du conseiller territorial.

M. Jean-Pierre Sueur. C’est évident !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Donc, par définition, puisque la commission est favorable au conseiller territorial, elle ne peut qu’être défavorable à votre amendement, monsieur Desessard.

L’amendement n° 357 rectifié bis prévoit que les conseillers départementaux sont élus au suffrage universel direct dans une circonscription qui respecte le périmètre des communautés urbaines, d’agglomération et d’une ou plusieurs communes.

Pour les mêmes raisons, la commission est défavorable à cet amendement. J’attire en outre l’attention de ses auteurs sur le fait que les communautés d’agglomération peuvent être situées sur plusieurs départements, voire sur plusieurs régions. La disposition, si elle était appliquée, poserait le problème de savoir dans quel département ou quelle région siégeraient les conseillers territoriaux élus au sein de ces communautés d’agglomération.

M. Jean-Pierre Sueur. Vous pourriez déposer un sous-amendement, monsieur le rapporteur !