M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La disposition me paraît donc difficilement applicable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Sueur, l’idée que vous défendez au travers de l’amendement n° 357 rectifié bis, à savoir faire en sorte que le découpage « respecte le périmètre des communautés urbaines, d’agglomération et d’une ou plusieurs communautés de communes », me semble intéressante. Pour autant, rien ne dit qu’il y aura une circonscription par communauté urbaine, car il pourrait y en avoir plusieurs. Mais force est de constater qu’au sein d’une même communauté urbaine se manifestent un certain nombre de solidarités.
On ne peut donc pas rejeter cette idée d’un revers de la main. L’idée est bonne, mais il faut y travailler, et je vous propose donc d’y revenir au moment de l'examen du projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux. Cela étant, il existe un point de divergence majeur entre nous puisque vous continuez à parler de « conseillers départementaux ». Si vous acceptiez de faire référence aux « conseillers territoriaux », je pourrais saluer l’excellence de votre amendement !
Monsieur Desessard, l’amendement n° 583 rectifié, qui porte sur le mode de scrutin pour l’élection des conseillers généraux, appelle la même remarque de ma part. Si vous consentiez à le modifier pour y faire apparaître les « conseillers territoriaux », nous pourrions l’examiner plus au fond, car, en l’état actuel, le Gouvernement ne peut l’accepter.
Je le reconnais, le mode de scrutin que vous proposez est éminemment sophistiqué et mériterait une étude approfondie. Mais dans la mesure où il s’applique à des élus que nous voulons voir transformés en conseillers territoriaux, je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 357 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le rapporteur, il ne me paraît pas suffisant, pour récuser l’idée qui est la nôtre, d’exciper de quelques situations particulières qui peuvent tout à fait trouver une solution.
Prenons le cas d’une communauté d’agglomération située sur deux départements. Puisqu’il y aura forcément en son sein plusieurs périmètres pour l’élection départementale, il est tout à fait possible d’imaginer que, parmi les cantons qui la composent, certains appartiennent au premier département et d’autres au second.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Non !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le rapporteur, dès lors que l’on veut bien prendre en compte nos propositions, je le répète, les solutions existent. Je remarque d’ailleurs que, sur ce point, vous vous opposez, somme toute légèrement, à M. le ministre, lequel a bien voulu juger notre idée intéressante…
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela s’arrête là !
M. Jean-Pierre Sueur. … et dire qu’elle pourrait éventuellement être reprise.
Naturellement, monsieur le ministre, je ne peux souscrire à votre proposition : dans votre esprit, nous atteindrions l’excellence dès lors que nous accepterions de faire apparaître, dans notre amendement, le conseiller territorial en lieu et place du conseiller départemental.
Notre position est à la fois logique, cohérente et extrêmement claire : nous sommes opposés à la création des conseillers territoriaux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 357 rectifié bis.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 583 rectifié.
M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, je vous ai bien écouté, mais peut-être vous ai-je mal compris : êtes-vous allé jusqu’à dire que vous étiez prêt à émettre un avis positif sur mon amendement si j’acceptais de remplacer les conseillers généraux par les conseillers territoriaux ?
Mme Éliane Assassi. Cela y ressemblait !
M. Jean Desessard. Si vous confirmez vos propos, cela mérite réflexion, et je vais demander une suspension de séance pour avoir le temps de téléphoner à tous mes amis ! (Sourires.)
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. De grâce, non ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. Ce qui se passe en ce moment est bigrement intéressant, monsieur le ministre, car vous êtes en train de nous apprendre que l’élection des prochains conseillers territoriaux aurait lieu par scrutin de liste.
M. Yves Daudigny. Ne rêvons pas ! Un amendement a été voté tout à l’heure !
M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, j’attends donc avec intérêt que vous confirmiez vos dires !
Je profite de cette intervention pour vous solliciter de nouveau : nous avons été privés de dîner ce soir pour pouvoir continuer à débattre, mais j’aurais tout de même besoin d’une fourchette. (Rires.)
Ne nous leurrons pas : le Gouvernement a travaillé sur les modalités ; les centristes ont d’ailleurs d'ores et déjà négocié. (Mme Nathalie Goulet lève les bras au ciel.) Certains parlent de lentilles,…
Mme Nathalie Goulet. Même pas !
M. Jean Desessard. … quand d’autres évoquent une plus grosse récompense. J’ai donc besoin de connaître ce qui est exactement prévu.
Vous n’allez pas me faire croire que le Président de la République, qui veut régler tous les problèmes avec l’aide de M. Guéant – sur le changement climatique, il n’a pas hésité à intervenir auprès de la Chine, des États-Unis et de l’ensemble des pays du monde ! – a décidé de présenter un texte, ici, au Sénat, sans avoir envisagé un mode de scrutin !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est dans le projet de loi n° 61 !
M. Jean Desessard. Sa décision de réformer les collectivités territoriales ne date pas d’hier, et il doit tout de même avoir une petite idée en la matière.
Que vous ne nous fournissiez pas les estimations au pourcentage près, soit ! Mais indiquez-nous au moins ce qui est « dans les tuyaux », comme l’on dit. En quoi la proposition des centristes constitue-t--elle à vos yeux une avancée ? Nous sommes en droit d’attendre que vous nous donniez les éléments du débat : c’est la transparence, c’est la démocratie. Nous n’avons tout de même pas accepté de siéger jusqu’à vingt et une heures passées pour ne rien entendre !
Monsieur le ministre, je réitère donc mes deux questions : étiez-vous sérieux tout à l’heure ? Allez-vous nous donner des informations sur le mode de scrutin ?
M. le président. L'amendement n° 348, présenté par Mme M. André, MM. Peyronnet, Sueur, Bel et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Andreoni, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet et Chastan, Mme Cartron, MM. Courteau, Daunis et Daudigny, Mme Durrieu, MM. Fichet et Jeannerot, Mme Ghali, MM. Guérini et Guillaume, Mmes Khiari et Klès, MM. Lagauche, Marc, Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Miquel, Mirassou, Patriat, Percheron, Rebsamen, Ries, Sergent, Signé et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article 9-1 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque, pour un parti ou un groupement politique, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ayant déclaré se rattacher à ce parti ou groupement, lors du dernier renouvellement des conseillers généraux et régionaux, dépasse 2 % du nombre total de ces candidats, le montant de la première fraction qui lui est attribué en application des articles 8 et 9 est diminué d'un pourcentage supplémentaire égal à la moitié de cet écart rapporté au nombre total de ces candidats. »
La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Cet amendement vise à renforcer les sanctions applicables aux partis qui ne respectent pas la parité dans les candidatures aux élections départementales et régionales.
Les sanctions prévues jusqu’à présent concernent uniquement les élections nationales. Pour pallier les conséquences fâcheuses, pour la parité, du scrutin uninominal, nous souhaitons amener les partis politiques à prendre leurs responsabilités et, pour les y aider, si j’ose dire, nous entendons les sanctionner dès lors qu’ils ne respectent pas cette exigence.
La nécessité de mettre en place un tel système coercitif tient – faut-il le rappeler ? – à la situation particulière de notre pays. La parité a du mal à s’établir partout, mais, dans le domaine politique en particulier, la France se signale des autres démocraties occidentales par ses manquements.
Aux élections municipales, 83 % des têtes de liste étaient masculines. Aux élections cantonales, 77 % des candidats étaient des hommes. Il n’est pas du tout sûr – peut-être même est-ce l’inverse – que l’instauration d’un ticket associant deux candidats de sexe opposé ait permis de réduire les inégalités. En outre, il y a un côté macabre à tout cela : celle qui est suppléante doit attendre le décès du titulaire pour espérer prendre sa place. Ce n’est pas une position très enviable !
Mme Éliane Assassi. Ni très valorisante !
M. Jean-Claude Peyronnet. Au-delà des problèmes de représentation en termes de suffrages se pose également la question de la place des femmes dans les différentes fonctions.
Là encore, la représentativité des femmes dans la vie politique française est tout à fait dramatique. Elles participent relativement peu aux exécutifs régionaux, départementaux et cantonaux. Au Parlement, il a fallu attendre l’année 2009 pour qu’une femme accède à la présidence d’une commission.
Si la gauche a fait des efforts et a imposé un certain nombre d’avancées, il ne s’agit pas de jeter l’anathème sur les autres partis, car, dans ce domaine, notre responsabilité est collective.
Il nous faut prendre conscience de la réalité. En 2008, à l’occasion des élections sénatoriales, l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes faisait ainsi remarquer : « La progression du nombre d’élus à gauche bénéficie, toutes proportions gardées, aux femmes : parmi les nouveaux élus, on compte 13 élues sur 61 à gauche […] contre 5 sur 47 à droite ».
Nous sommes, je le répète, tous responsables de cette situation. Il est impératif d’imposer la présence des femmes sur les listes. En dehors des scrutins de liste, il revient aux partis de se discipliner pour faire respecter la parité ou, du moins, s’en approcher le plus possible. De ce point de vue, le renforcement des sanctions que nous proposons peut les amener à la sagesse. C’est dans ce sens que nous avons déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Monsieur Peyronnet, la question de la parité, soulevée par cet amendement, est extrêmement importante et requiert toute notre vigilance. Pour autant, mieux vaut en débattre à l’occasion de l'examen du texte sur le mode de scrutin, qui viendra prochainement en discussion, aux alentours du mois de mai ou de juin.
C'est la raison pour laquelle la commission vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Tout en faisant miennes les observations de M. le rapporteur, je veux rappeler les engagements pris, ici même, mardi dernier, par le ministre de l’intérieur, M. Hortefeux. « Le Gouvernement abordera ce débat, a-t-il déclaré, en cherchant à définir avec les parlementaires le mode de scrutin répondant le mieux aux exigences qui doivent nous guider : la représentation de l’ensemble des territoires, la prise en compte des réalités démographiques, le respect du pluralisme et l’objectif de parité. »
Nous reprendrons donc cette discussion lorsque sera examiné au Parlement le texte relatif au mode de scrutin. Pour l’heure, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je m’attendais à cette réponse de M. le rapporteur, confirmée par M. le ministre. Mais, comme nous ne sommes pas des centristes, nous voudrions du concret ! (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.)
Les vagues promesses, pour le coup non normatives, de M. Hortefeux ne sauraient nous satisfaire. Nous préférons que notre amendement soit voté dès à présent, pour pouvoir fixer un cadre législatif.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Que je sache, l’adoption tout à l’heure de l’amendement n° 645 rectifié, présenté par Nicolas About, a permis d’inscrire dans la loi que la parité sera un élément déterminant du mode d’élection du conseiller territorial.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Absolument !
Mme Nathalie Goulet. En tous les cas, au stade où l’on en est arrivé, de gré ou de force, il semblerait que les conditions soient posées. Nous verrons bien ce qu’il en sera dans le texte relatif à l’élection des conseillers territoriaux.
À titre personnel, je pense qu’il aurait été préférable d’examiner l'ensemble des textes en même temps. On a vu les acrobaties auxquelles il a fallu se livrer pour trouver des circonscriptions aux députés des Français de l’étranger nouvellement instaurés. On ne se laissera pas piéger deux fois.
Au stade actuel, je le répète, le vote de l’amendement n° 645 rectifié, qui vaut ce qu’il vaut, semble apporter les garanties nécessaires. Les propos tenus hier par Mme Michèle André vont d’ailleurs en ce sens.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous ne sommes pas très favorables aux sanctions financières. Mais les partis politiques ne respectant pas la parité – à des degrés très divers, il faut bien le dire –, il faut bien recourir aux sanctions.
Nous allons voter cet amendement, car il s’agit pour nous du respect d’un principe. Je ne comprends absolument pas pourquoi le rapporteur et le ministre veulent renvoyer à plus tard la discussion de ce sujet : lorsque les partis ne respectent pas la parité – quel que soit le mode de scrutin, ils trouvent toujours des moyens de s’y dérober –, des sanctions doivent s’appliquer.
M. Jean Desessard. C’est comme pour Copenhague, ils ont remis à plus tard !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je ne comprends donc pas, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, que vous ne puissiez pas approuver cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 347 rectifié, présenté par Mme M. André, MM. Peyronnet, Sueur, Bel et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy et Povinelli, Mme Alquier, MM. Andreoni, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet et Chastan, Mme Cartron, MM. Courteau, Daunis et Daudigny, Mme Durrieu, MM. Fichet et Jeannerot, Mme Ghali, MM. Guérini et Guillaume, Mmes Khiari et Klès, MM. Lagauche, Marc, Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Miquel, Mirassou, Patriat, Percheron, Rebsamen, Ries, Sergent, Signé et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code électoral est ainsi modifié :
1° Le chapitre II du titre IV du livre Ier du code électoral est abrogé ;
2° L'intitulé du chapitre III du titre IV du livre Ier du code électoral est ainsi rédigé :
« Dispositions relatives au scrutin »
II. - Pour toutes les communes de moins de 500 habitants, les candidatures isolées sont interdites. Néanmoins, les électeurs conservent le droit de déposer dans l'urne des bulletins dont la liste est incomplète.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Il s’agit d’une proposition novatrice qui consiste à étendre le mode de scrutin aujourd’hui en vigueur dans les communes de 3 500 habitants à la totalité des 36 700 communes françaises, ce qui se traduirait par l’application de la parité dans toutes les communes, sans aucune exception.
Mes chers collègues, les communes de moins de 3 500 habitants constituent 88,8 % des communes françaises. Or, dans ces communes, siègent 32 % de conseillères municipales alors que, dans les communes de plus de 3 500 habitants, cette proportion est de 48,5 %. On est presque arrivé à 50 % en raison des modalités de l’élection.
Pourquoi proposons-nous cet amendement ?
Premièrement, il permet de développer la parité, comme chacun le comprend.
Deuxièmement, même si l’on nous dit qu’il est difficile d’appliquer un tel mode de scrutin dans les petites communes, il faut bien admettre qu’il se produit quelquefois certaines surprises. C’est le cas, par exemple, lorsque des personnes qui n’étaient pas candidates se retrouvent élues, ou lorsque des maires qui ont eu la sagesse de refuser deux permis de construire en paient lourdement les conséquences. Cela est si fréquent, mes chers collègues, que l’Association des maires ruraux de France, dont nous connaissons tous les travaux et au sein de laquelle M. Collombat joue d’ailleurs un rôle éminent, souscrit à cet amendement.
Afin d’être tout à fait réalistes et pragmatiques, nous proposons que, si les candidatures isolées ne sont plus possibles dans les communes de moins de 500 habitants, les électeurs conservent le droit de déposer des bulletins dont la liste est incomplète. Ainsi, il y aurait un scrutin de liste avec possibilité de liste incomplète et, dans toutes les listes, l’obligation de la parité. La parité serait donc respectée dans les conseils municipaux.
Cette réforme ne nuirait pas au débat démocratique, même là où il ne s’organise pas selon des clivages politiques, comme c’est le cas dans un très grand nombre de communes. Elle permettrait que l’élection prenne en compte les différentes sensibilités qui s’exprimeront. Ce serait une innovation, et j’espère qu’on ne nous dira pas que c’est un sujet dont on parlera la prochaine fois, au motif que nous ne sommes pas des centristes ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nathalie Goulet. Oh !
M. Jean Desessard. Quel coup dur !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Elle a le même avis que précédemment. La question soulevée est effectivement importante ; nous devrons débattre afin de déterminer l’organisation des modes de scrutin dans les communes de moins de 3 500 habitants. Mais elle n’a pas sa place dans le texte que nous examinons.
Mme Éliane Assassi. Et voilà !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Elle sera examinée dans le cadre du projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale, vers le mois de mai ou de juin 2010.
Je demande donc, au nom de la commission, le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. M. Sueur sait pertinemment que je partage la position de M. le rapporteur.
Je voudrais tout de même signaler que le Gouvernement a déposé sur le bureau du Sénat le texte visant à organiser le système électoral des collectivités territoriales. (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, le confirme.) C’est un effort de clarification de la part du Gouvernement que l’on ne salue pas suffisamment. Certes, on ne peut pas discuter de tout en même temps. Il vous a été demandé d’étudier le texte institutionnel mais, afin que les choses soient claires, le texte électoral a été déposé sur le bureau du Sénat.
Chacun connaît les positions du Gouvernement, et il est tout à fait logique que l’on respecte un certain ordre dans l’examen de textes qui ont par ailleurs été déposés simultanément. Comme nous ne savons pas parler, ni les uns ni les autres, de plusieurs choses à la fois, il faut, pour le bon déroulement de la discussion, respecter cet ordre. La réponse du rapporteur ne fait que traduire ce souci de cohérence et de logique.
S’agissant de l’amendement n° 347 rectifié, le seuil de 500 habitants retenu dans le texte du Gouvernement est le résultat d’une concertation avec l’Association des maires de France. Vous avez dit, monsieur Sueur – je le confirme, car j’étais présent à leur congrès –, que l’Association des maires ruraux de France était prête à aller plus loin.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pas les maires ruraux dans leur ensemble : l’association ne représente qu’une minorité d’entre eux !
M. Michel Mercier, ministre. Dans le temps qui nous reste avant la discussion du texte électoral, il serait bon que les associations de maires se mettent d’accord afin d’adopter une position unique quant à ce seuil. Après tout, le Gouvernement peut accepter l’un ou l’autre chiffre, mais il ne pourra pas engager de concertation si la commission rurale de l’AMF défend une position différente de celle de l’Association des maires ruraux de France.
Je souhaite donc que soit mis à profit le délai qui nous sépare de la discussion du texte électoral afin de clarifier la position des associations d’élus sur ce point.
En attendant, je vous demande, monsieur Sueur, de retirer cet amendement qui pourra revenir en discussion à ce moment-là. À défaut d’un tel retrait, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote sur l’amendement n° 347 rectifié.
M. Hervé Maurey. Je suis en totale opposition avec M. Sueur puisque son amendement va au-delà de ce que propose déjà le Gouvernement. Comme j’ai eu l’occasion de le dire dans la discussion générale, le fait d’étendre le mode de scrutin applicable aux communes de plus de 3 500 habitants à celles qui ont plus de 500 habitants me semblait déjà inopportun et ne correspond absolument pas au souhait des élus. Je suis très étonné d’entendre dire que les associations d’élus souhaitent l’abaissement du seuil. Cela tendrait à prouver que les associations d’élus, comme c’est parfois le cas, ne sont pas si représentatives qu’elles le disent.
Comme tout sénateur, je rencontre régulièrement des élus. Je ne suis pas le seul dans cet hémicycle à les avoir entendu dire qu’ils étaient opposés à l’application du mode de scrutin en vigueur dans les communes de plus de 3 500 habitants aux communes à partir de 500 habitants et, a fortiori, en dessous de 500 habitants. Cela entraînerait inévitablement une politisation des élections municipales et, par là même, de la vie politique locale.
La seule chose qui me paraît intéressante dans l’amendement de M. Sueur, et je crois qu’il faudra y revenir dans le texte concernant les modes électoraux, c’est le fait qu’il n’est pas souhaitable que l’on puisse être élu sans être candidat. Sur ce point, je le rejoins tout à fait. Il n’est pas normal non plus que l’on puisse être candidat sur plusieurs listes. Aujourd'hui, dans les petites communes, une clarification est nécessaire.
Même si ce n’est pas le cœur du débat de ce soir, je voulais, à partir de cet amendement, réaffirmer mon opposition à ce que propose le Gouvernement sur ce point et a fortiori à ce que propose M. Sueur, qui va encore plus loin.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, j’ai lu le troisième projet de loi que vous avez bien voulu nous faire parvenir, et il m’a semblé qu’il comportait des lacunes.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous les comblerons !
M. Jean-Pierre Sueur. Si l’on s’en tient à la création des fameux conseillers territoriaux, sur laquelle nous sommes en désaccord, ce projet de loi ne précise pas combien il y aura de conseillers territoriaux dans la région Rhône-Alpes ou dans le département du Rhône. Cela ne vous a pas ému, moi si. C’est la différence qui existe entre nous.
Par ailleurs, je voudrais dire à M. Maurey que nous nous honorons de faire des propositions qui vont plus loin que celles du Gouvernement. C’est pour nous une raison de persister dans notre sentiment.
Je l’invite également à être très attentif aux modalités électorales qui s’appliquent dans les petites communes. J’en connais une, par exemple, où un nouveau venu à qui on avait demandé d’être candidat et qui avait accepté pour rendre service a recueilli le plus grand nombre de suffrages. Il est arrivé en tête pour une raison tout à fait évidente : comme personne ne le connaissait, personne n’avait de grief contre lui et personne n’avait rayé son nom, alors que le maire sortant, qui avait fait valoir certains principes républicains et refusé un certain nombre d’autorisations, a été durement sanctionné.
Voilà comment un monsieur que personne ne connaît est en situation d’être maire tandis que le maire est battu ! C’est la démocratie, me direz-vous. Mais cet exemple montre que ce que nous proposons, et ce que d’ailleurs le Gouvernement prévoit pour les communes de plus de 500 habitants, présente un intérêt, le moindre des avantages de notre proposition, chers collègues, n’étant pas de garantir la parité.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, eu égard à la jurisprudence About désormais bien connue, nous maintiendrons notre amendement. Ce qui nous distingue de M. About, c’est que nous n’avons pas de plat de lentilles (Sourires.) et que nous défendrons notre position quoi qu’il arrive. C’est une idée positive qui est versée au débat et que nous soumettons à la sagesse commune.
M. le président. Évitons d’évoquer les aliments, cher collègue, car, à cette heure tardive, nous avons très faim ! (Nouveaux sourires.)
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dans l’exemple donné par notre collègue Jean-Pierre Sueur, il devait s’agir d’un homme totalement apolitique ; c’est la raison pour laquelle il voulait être maire. Or, pour moi, la politique, c’est la vie de la cité. Donc, ne pas faire de politique dans les petites communes, c’est une curieuse façon de comprendre l’intérêt de la vie de la cité.
Ensuite, je crois que l’on peut constater le peu de crédibilité de la volonté paritaire de nos collègues centristes : dès qu’il s’agit de renforcer la parité, ils sont tout à fait contre. Il faut donc se méfier des amendements qu’ils font voter tardivement avec l’accord du Gouvernement, car ils manquent de sincérité.
L’Association des maires ruraux de France, dont je ne sais pas si elle est aussi représentative que vous le souhaiteriez, n’y est en tout cas pas hostile. Nos collègues à l'Assemblée nationale, en particulier M. Chassaigne, ont déposé une proposition de loi en ce sens. Nous soutenons donc bien entendu cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, pour explication de vote.