M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° 3 a pour objet d'étendre le champ de la taxation à la chaîne hiérarchique des opérateurs de marché, c'est-à-dire aux personnes sous le contrôle desquelles ceux-ci opèrent. Puisque la vocation de la taxe est de participer à un meilleur contrôle des risques, celles et ceux qui définissent les politiques de risques et veillent à leur bonne application sont, non pas les opérateurs qui sont sur la table, dans la salle de marché, mais le chef de secteur chargé des produits négociés, le directeur de la salle des marchés, le responsable hiérarchique de celui-ci, voire le directeur général adjoint auquel il rend compte. Toute cette chaîne hiérarchique me semble devoir être concernée par le dispositif, dans un souci de cohérence.
On aurait pu s’interroger sur l’application de cette taxe aux rémunérations des mandataires sociaux. Nous ne l’avons pas fait, madame la ministre, parce qu’il existe des textes spécifiques les concernant. Sans doute serait-il bon que vous puissiez rappeler à notre assemblée les dispositions prises en la matière, qui reflètent un niveau d’exigence proportionné à la gravité de la crise que nous avons connue.
L’amendement n° 50 de M. Jégou vise à introduire une précision qui ne paraît pas vraiment utile dans la mesure où la formulation retenue par l’article reprend les termes de l’arrêté du 3 novembre 2009, lequel s’applique sans ambiguïté aux rémunérations des opérateurs de marché et dont la rédaction a été établie en concertation avec la profession bancaire. Il ne fait guère de doute que les activités des professionnels des marchés financiers, telles qu’elles sont visées, sont bien des activités « de marché ».
La précision introduite par cet amendement pourrait même, à la limite, entraîner des interprétations défavorables à l’assiette de cette taxe.
S’agissant de l’amendement n° 86 du groupe socialiste, j’aurais vraiment de la peine à le cautionner. En effet, étendre la taxe à tous les salariés des banques, ce serait l’appliquer aux agents de sécurité qui font le tour des parkings la nuit, aux secrétaires des différents échelons, aux femmes ou aux hommes de service, dont on a tant besoin si l’on veut que les locaux demeurent attrayants ! (Sourires sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. François Marc. Ces gens-là ne touchent pas de bonus !
Mme Nathalie Goulet. D’autant qu’il s’agit de tâches souvent « externalisées » !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je suis désolé, mais, tel que l’amendement est rédigé, c’est ce que l’on comprend ! Aucune limite n’est fixée ! Dans ces conditions, il n’est pas possible d’émettre un avis favorable sur cet amendement.
M. François Marc. Caricature !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je ne suis pas favorable non plus à l’amendement n° 86.
L’article 1er vise les opérateurs de marché, c'est-à-dire les personnes qui prennent des risques exceptionnels au titre d’activités qu’ils exercent à des tables de marché. Selon moi, il ne serait pas opportun d’étendre comme le prévoit cet amendement le champ d’application de la taxe, qui pèserait alors sur les rémunérations des chargés de clientèle et des salariés qui proposent des crédits aux entreprises ou aux ménages. Or ces derniers n’exercent pas du tout les activités visées par la taxe !
Au contraire, il est nécessaire de bien cibler le périmètre de l’article 1er, qui doit s’appliquer uniquement au segment « opérations de marché ».
Monsieur Jégou, la rédaction de l’article 1er ainsi que le bref exposé que je vous ai présenté tout à l’heure indiquent clairement que ce sont les activités de marché qui sont visées. Si le Sénat souhaite clarifier ce point en adoptant votre amendement n° 50, je n’y vois pas d’inconvénient. Je m’en remets donc, à son endroit, à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. Michel Charasse. Très bien !
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur général, votre amendement n° 3, à propos duquel j’ai déjà fait part de l’ouverture du Gouvernement, a pour objet d’étendre le champ de la taxation, mais en ciblant bien l’activité de marché. Seraient ainsi concernés tous les professionnels de marché, c'est-à-dire les professionnels de marché salariés, les professionnels de marché qui dirigent des activités de banque de financement et d’investissement – BFI –, les patrons de table, les patrons d’activités et les patrons de salle, ainsi que les professionnels de marché mandataires sociaux et dirigeants des activités de BFI.
Je suis favorable à cet amendement, à condition qu’y soit apportée une clarification. Il me semble en effet important de remplacer les mots « personnes sous le contrôle desquelles » par les mots « professionnels de marché sous le contrôle desquels », afin de bien souligner que seuls les dirigeants des activités de BFI sont visés et d’éviter toute confusion : les mandataires sociaux seraient ainsi exclus puisqu’ils sont, vous l’avez indiqué tout à l’heure, monsieur le rapporteur général, soumis à une réglementation spécifique en vertu des décrets des 30 mars et 20 avril 2009
Le Gouvernement approuve donc l’élargissement du champ de la taxation, mais à condition d’indiquer clairement que les dirigeants visés sont bien des professionnels de marché.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, cédez-vous à la pression de Mme la ministre et acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens proposé par le Gouvernement ? (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est une pression très amicale ! (Nouveaux sourires.)
Je crois comprendre que, sous le vocable « professionnels de marché », on englobe la chaîne hiérarchique intermédiaire que je décrivais, notamment les responsables, qui peuvent être des mandataires sociaux de la banque de financement et d’investissement.
Dès lors que cette précision est apportée, j’accepte volontiers de rectifier mon amendement.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi qu'aux professionnels de marché sous le contrôle desquels opèrent ces salariés
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° 86.
Mme Nicole Bricq. Après les propos caricaturaux qu’a tenus M. le rapporteur général en réponse à notre amendement, je tiens à rappeler la réalité.
Il est bien question, ici, d’une taxe sur les bonus, applicable, comme le souhaite Mme la ministre, à ceux d’entre eux dont le montant excède 27 500 euros. Monsieur le rapporteur général, ne prétendez pas que ces bonus-là sont distribués, dans les établissements dont il est question, aux personnels tels que les femmes de service, les gardiens de parking, etc. Notre amendement reste bien dans l’épure que vous avez tracée.
Non seulement vous n’en voulez pas, monsieur le rapporteur général, mais encore vous avez accepté de réduire la portée de votre propre amendement.
Je souhaite d’ailleurs souligner au passage que nous avions déposé un amendement visant également les mandataires sociaux, mais que celui-ci a été rejeté par la commission au motif que c’était un cavalier. Par conséquent, ceux-ci sont exclus du champ d’application du II de l’article 1er.
Enfin, vous n’avez obtenu aucune réponse sur l’état d’avancement du projet de directive sur les hedge funds, qu’avait proposé dans un premier temps le commissaire Charlie McCreevy, avant qu’il ne soit repoussé par certains États membres, notamment la France. Mme la ministre a simplement indiqué que l’inclusion des rémunérations dans le champ du projet de directive prendrait beaucoup de temps.
Au final, cette taxe sur les bonus ne représentera pas grand-chose et ne vaudra ni réparation pour le passé ni prévention pour l’avenir.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Cette discussion sur les trois amendements, y compris celui du rapporteur général, me pose un problème parce qu’il y a tout de même la question de l’égalité devant l’impôt.
Nicole Bricq, nous instituons une taxe dont la base concerne tous ceux qui touchent des bonus de plus de 27 500 euros. Qu’ils soient ou non énumérés dans la loi, ils sont tous dans la base taxable. Mais si la loi décide de se lancer, ce que personnellement je regrette, dans une énumération, alors il faut que celle-ci soit complète, c’est-à-dire que, pour assurer l’égalité devant l’impôt, tous ceux qui perçoivent un bonus doivent être concernés et visés par la loi. Ou alors, monsieur le rapporteur général, on n’énumère personne et l’on dit simplement, ce qui serait beaucoup plus simple du point de vue rédactionnel, que tous ceux qui perçoivent un bonus de plus de 27 500 euros sont dans la base taxable.
M. Daniel Raoul. Voilà !
M. Michel Charasse. Je ne comprends pas cette discussion parce que, quand on se lance – et je ne critique personne, car nous essayons tous de faire le meilleur travail législatif possible – dans une énumération, il y a toujours un risque d’oublier quelqu’un.
M. Daniel Raoul. Eh oui !
M. Michel Charasse. Mais, je me permets de faire cette observation au passage, nous avons un juge suprême qui, il n’y a pas longtemps, à propos de la taxe carbone, a appliqué rigoureusement le principe d’égalité devant l’impôt et les charges.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. D’ailleurs, il sera peut-être encore plus efficace prochainement ! (Sourires.)
M. Michel Charasse. Je considère, en ce qui concerne l’amendement de Mme Bricq, que la mention qui consiste à ajouter des salariés ne peut concerner que les salariés qui sont dans la base taxable, pas ceux qui n’y sont pas.
Si le ministre disait que, bien évidemment, sans l’amendement de Nicole Bricq, les salariés inclus dans la base taxable sont bien dans cette base, je la connais suffisamment pour savoir qu’elle n’insisterait pas. Mais s’il y a une incertitude, alors, il faut qu’on la lève en écrivant dans la loi ce qui doit être écrit.
De même, l’amendement du rapporteur général visait « les personnes sous le contrôle desquels opèrent ces salariés ». Le ministre propose de remplacer « les personnes » par « les professionnels de marché ». Très bien ! Mais, en tout état de cause, ce ne peut être que ceux qui perçoivent des bonus de plus de 27 500 euros.
Monsieur le président, je me permets, à cette heure de l’après-midi où nous sommes encore bien réveillés, d’appeler l’attention du Sénat sur ce point. Ne rentrons pas dans un processus qui nous conduirait à une décision qui sanctionnerait une inégalité devant les charges et devant l’impôt !
M. le président. Vous voyez, monsieur Jégou, vous avez bien fait de venir ! (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Jégou, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
Lorsque l'attribution porte sur des options sur titres, des actions gratuites
par les mots :
Lorsque la part variable prend la forme d'une attribution d'options sur titres, d'actions gratuites
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Puisque j’ai bien fait de venir, je reste ! (Nouveaux sourires.)
J’y suis d’autant plus incité que cet amendement, le dernier d’une série visant à préciser la nature des rémunérations incluses dans la base taxable, a été « adoubé » par avance par M. le rapporteur général.
Le mot « bonus » fait désormais partie du langage courant. Or il existe plusieurs sortes de bonus. Ainsi, la part variable perçue par les chargés d’affaires et de clientèle qui prêtent de l’argent aux entreprises, qui placent des titres d’assurance vie auprès des particuliers, constitue-t-elle un bonus ? Qu’en est-il lorsque cette part variable prend la forme d’une attribution d’options sur titres ou d’actions gratuites ? Tous ces points doivent être précisés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. À la suite des votes intervenus sur les amendements précédents, je voudrais que le ministre nous confirme bien que les rémunérations de toutes les personnes visées au II de l’article 1er sont dans la base taxable, qu’on les ait énumérées ou pas.
M. Daniel Raoul. Parfait !
M. Michel Charasse. Ce qui veut dire, madame le ministre, chère Christine Lagarde, que cela nécessitera une instruction très précise de l’administration fiscale pour définir le champ d’application en précisant bien que toutes les personnes visées au II…
M. Denis Badré. Ce sont les entreprises qui sont taxables !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les personnes morales !
M. Michel Charasse. Oui, mais il y a aussi les personnes physiques qui sont bans la base puisque sont visés les salariés !
Il faudra donc préciser que tous ceux, personnes morales ou personnes physiques, qui sont taxables au titre du II sont bien taxables, énumération ou pas. Cela me paraît la moindre des choses !
Cela étant, je suis tout à fait d’accord avec l’amendement de notre collègue Jégou.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Je rappelle que les redevables de cette taxe exceptionnelle sont les personnes morales mentionnées à l’article L. 511–1 et L. 531–4 du code monétaire et financier.
M. Michel Charasse. Bien sûr !
Mme Christine Lagarde, ministre. Par ailleurs, le deuxième alinéa de l’article 2 dispose bien que « la taxe est assise sur la part variable des rémunérations attribuées, au titre de l’année 2009, par les personnes morales mentionnées au I, à ceux de leurs salariés, professionnels des marchés financiers dont les activités sont susceptibles d’avoir une incidence significative sur l’exposition aux risques de l’entreprise ».
L’amendement n° 50 de M. Jégou, que le Sénat vient d’adopter, précise même que les activités dont il est question sont les activités de marché.
M. Michel Charasse. Voilà !
Mme Christine Lagarde, ministre. Certes, l’administration fiscale aura tout loisir de produire des instructions, mais le champ d’application de cet alinéa est parfaitement clair et les redevables de cette taxe sont bien identifiés.
Par conséquent, je ne doute pas que le principe d’égalité devant l’impôt et les charges des personnes morales est respecté.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote sur l'article 1er.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je voterai bien évidemment l’article 1er, mais je ferai deux observations.
Premièrement, il est bien clair que ce sont les entreprises qui seront taxées, et non les opérateurs de marché. Par conséquent, ces derniers continueront de bénéficier d’un certain nombre de rémunérations variables, lesquelles échapperont en partie à toute taxation, compte tenu des taux d’imposition.
Deuxièmement, sur proposition de M. le rapporteur général, nous avons accepté, pour des raisons de fiscalité générale, que cette taxation frappant les entreprises soit déductible de leur bénéfice annuel. Cela va dans le bon sens, même si cette mesure reste d’une portée limitée.
Madame la ministre, il faudra que vous abordiez, au cours de vos discussions avec l’ensemble de la profession bancaire, la méthode de rémunération de ces opérateurs de marché, qui nous préoccupe beaucoup. Car c’est bien la rémunération de ces traders qui est en cause. Les mesures décidées par le G20, ainsi que les décisions que devraient prendre prochainement le Royaume-Uni, les États-Unis et peut-être l’Allemagne devraient se traduire, dans les prochaines années, par une modification des modes de rémunération, notamment par une élasticité moindre des rémunérations variables. L’argent ainsi récupéré pourra être consacré au développement des petites entreprises, ce qui va dans le bon sens.
Quoi qu'il en soit, nous ne serons pleinement satisfaits que si les méthodes de rémunération des traders sont modifiées dans le sens des directives du G20, de manière à éviter que les établissements prennent des risques mal mesurés.
M. Michel Charasse et Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Articles additionnels avant l'article 1er (suite)
M. le président. Nous en revenons maintenant à l’examen des articles additionnels avant l’article 1er, que nous avons entamé hier.
L'amendement n° 79, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les articles 8 et 10 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat sont abrogés.
II. - L'article 779 du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Force est de constater que ce projet de loi de finances rectificative augmente très sensiblement notre déficit et notre endettement. Hier, nous avons dénoncé la politique dispendieuse qu’a menée le Gouvernement, consistant en particulier en la distribution indue d’un certain nombre d’avantages et de cadeaux fiscaux, mesures sans lesquelles les 140 milliards d’euros de déficit public auraient pu être réduits.
Nous souhaiterions à tout le moins, madame la ministre, que vous reconnaissiez le bien-fondé de nos arguments et que vous fassiez machine arrière en remettant en cause ces avantages qui obèrent aujourd’hui dramatiquement les finances publiques.
Le présent amendement répond à cette préoccupation.
Nous considérons que les 12 milliards d’euros imputables au paquet fiscal pèsent lourdement sur le budget de 2010. Notre amendement, qui vise la seule mesure afférente aux droits de succession, permettrait à l’État de récupérer plus de 2 milliards d’euros par an. Une telle perte de recettes n’est pas acceptable au vu de la situation de nos comptes publics et de la forte injustice qui caractérise le régime des droits de succession.
Avant le vote de la loi TEPA, la très grande majorité des successions de notre pays n’était pas soumise à l’impôt. Le dispositif institué par cette loi a donc permis une exonération massive des successions élevées des contribuables les plus aisés.
Le présent amendement vise par conséquent à revenir sur cette exonération, à nos yeux injuste et injustifiée.
On peut certes nous objecter que l’adoption de cet amendement ne rapporterait « que » 2 milliards d’euros, mais nous considérons que ce serait déjà un pas intéressant dans un parcours de reconquête d’une situation plus acceptable de nos finances publiques.
M. le président. Le sous-amendement n° 122, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Compléter l'amendement n° 79 par un paragraphe ainsi rédigé :
III.- Le produit des impositions résultant du présent article est affecté au fonds de réserve pour les retraites.
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. L’amendement no 79 vise à rétablir le régime des droits de succession qui existait avant la loi TEPA d’août 2007.
Si cet amendement est adopté, je souhaite que le produit des impositions résultant de ce rétablissement soit affecté au Fonds de réserve pour les retraites.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous assistons, comme hier soir, au « redépôt » d’un amendement déjà examiné dans d’autres circonstances !
Mme Nicole Bricq. Et alors ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit donc de revenir sur des débats qui ont déjà eu lieu.
Mme Nicole Bricq. Il y a une cohérence !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement tend à rétablir cet épouvantable impôt sur la mort ! (M. Michel Charasse s’exclame.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais oui, sur la mort !
M. Michel Charasse. Ceux qu’il frappe sont bien vivants !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise donc à rétablir cet impôt que, grâce au Président de la République, 95 % des Français ne paient plus, s’agissant de patrimoines qui, dans l’ensemble, sont modestes !
M. Michel Charasse. Qu’est-ce que c’est que ce tri entre les morts ? C’est horrible !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On ne va pas jusqu’à les faire voter ! (Sourires.)
M. Michel Charasse. Nous ne sommes pas en Corse ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Bien sûr ! (Nouveaux sourires.)
Au-delà de cette facétie, mes chers collègues, vous aurez compris que la commission des finances est défavorable à cet amendement et, par voie de conséquence, au sous-amendement qui y est attaché.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Décidément, M. Marini est vraiment un rapporteur général « antiredéposition » ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Eh oui !
M. François Marc. Dans la mesure où des amendements analogues ont été déposés à plusieurs reprises, il oppose une fin de non-recevoir au présent amendement : on ne revient pas sur ce qui a été mis en place !
Monsieur le rapporteur général, c’est oublier qu’il y a un élément nouveau. La France est dans une situation financière très dégradée. Le ministre du budget a déclaré fin janvier, et ses propos ont été repris dans de nombreux médias, qu’il fallait trouver 50 milliards d’euros pour ramener le déficit public à 3 % du PIB, conformément aux exigences européennes. Il y a donc une donnée nouvelle : il faut réaliser une économie de 50 milliards d’euros.
Monsieur le rapporteur général, vous pouvez certes refuser notre amendement pour rester fidèle à des positions que vous avez exprimées dans le passé, considérer qu’il n’y a rien de neuf, nous dire : « Circulez, il n’y a rien à voir », mais vous montrez ainsi que vous êtes bien un rapporteur général « antiredéposition ».
Nous estimons, pour notre part, qu’il faut répondre aux problèmes qui se posent à l’instant t. Aujourd’hui, la France a besoin d’argent. Le ministre crie à qui veut l’entendre qu’il faut trouver 50 milliards d’euros pour réduire le déficit public. Nous vous en proposons deux : prenez-les !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Un peu d’imagination !
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement doit, dans un délai de six mois, fournir au Parlement un rapport dans lequel il exposera les modalités concrètes de la mise en place d'une taxe assurantielle sur les activités des banques, en fonction du risque qu'elles prennent sur les marchés financiers.
Cette taxe devra être en adéquation avec la proposition d'une taxe assurantielle pour les banques, faite par le Président du Fonds Monétaire International lors de la réunion du G20 Finances des 24 et 25 septembre 2009.
Le dispositif mis en place ne devra pas prévoir de compensation au moyen d'une baisse de la taxe sur les salaires acquittée par les banques.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur général, nous revenons, là encore, sur un sujet que nous avons déjà abordé, mais dont, en vérité, nous n’avons fait que commencer à débattre. Il s’agit du principe d’une taxe assurantielle sur les activités à risque des établissements bancaires et financiers.
Pour innover quelque peu à ce sujet dans le cadre du présent collectif, nous demandons au Gouvernement de fournir au Parlement un rapport exposant la faisabilité de la création d’une taxe assurantielle payée par les banques afin d’éviter que, comme nous avons pu l’observer au moment de la crise, les États ne deviennent les assureurs en dernier ressort.
La proposition d’une taxe assurantielle pour les banques faite par le président du Fonds monétaire international n’a pas, dans son essence, été contestée par les ministres des finances réunis à l’occasion du G20. Vous-même, madame la ministre, n’y semblez pas hostile, à la condition que tous les pays l’acceptent.
Dans votre propos liminaire, vous avez considéré, à juste titre, que cette taxe n’était pas le seul moyen de prévenir les pratiques à risque et le fait que les États soient appelés à s’endetter pour venir au secours du système financier. Je n’en disconviens pas, et il est vrai que cette mesure peut apparaître trop « rustique ». Il reste que c’est la seule mesure dont il ait été fait état. Mais peut-être la Commission examine-t-elle d’autres pistes. Vous pourrez éventuellement nous dire quelles autres solutions existent qui seraient susceptibles de recueillir notre accord en ce qu’elles permettraient d’obliger les établissements financiers à constituer un niveau de fonds propres suffisants pour assumer les risques qu’ils prennent, de telle manière que cela leur coûte plus cher. Après tout, pourquoi pas ?
Quoi qu'il en soit, la présentation d’un rapport au Parlement nous permettrait de mieux cerner la situation.
Lors de la discussion de la proposition de résolution européenne que nous avions présentée au Sénat le 29 octobre 2009 et qui portait sur la proposition de directive du 13 juillet 2009 relative aux fonds propres des banques, M. le rapporteur général et M. le président de la commission des finances s’étaient déclarés favorables au principe assurantiel, sans aller pour autant jusqu’à accepter qu’il emporte suppression de la taxe sur les salaires. Nous divergeons sur ce point, car nous considérons que, si cette nouvelle taxe devait être neutre, elle n’aurait pas de vertu préventive et ne modifierait donc pas les comportements des acteurs financiers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission considère que l’amendement n° 71 est satisfait par l’article 6 de la loi de finances pour 2010, qui sollicite du Gouvernement un rapport sur l’établissement d’une taxe systémique.
Souvenez-vous de la plaidoirie que nous avions faite alors, souhaitant que cette taxe se substitue à la taxe sur les salaires, qui handicape la compétitivité du secteur bancaire français.
Madame la ministre, vous avez chargé M. Jean-François Lepetit, ancien président, entre autres, de la Commission des opérations de bourse et actuel président du Conseil national de la comptabilité, expert unanimement respecté, de préparer un rapport sur la régulation des acteurs et des marchés systémiques.
Nous serons particulièrement attentifs aux conclusions de ce rapport et nous espérons qu’il sera déposé dans les délais prévus par la loi. Mais peut-être pouvez-vous nous donner quelques informations supplémentaires sur ce sujet, madame la ministre…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?