M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 183 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. Philippe Dallier. Je retire mon amendement n° 184, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 184 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 46.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote sur l'amendement n° 137.
M. Jean-Pierre Caffet. Permettez-moi, mes chers collègues, de revenir un instant sur le débat que nous venons d’avoir.
Le mode de désignation des élus locaux qui siégeront au sein du conseil de surveillance de la SGP pose tout de même un problème. Je constate que rien n’a été prévu par le Gouvernement sur ce point et que, en conséquence, nous allons devoir nous en remettre à la décision du Conseil d’État. Je ne vois pas d’autre solution puisque, selon le texte de l’article 8, c’est un décret en Conseil d’État qui fixera les modalités de fonctionnement et la composition des organes dirigeants de la SGP.
J’ai bien écouté M. le rapporteur pendant les travaux de la commission spéciale et j’ai lu son rapport. Si j’ai bien compris, l’effectif du conseil de surveillance devrait rester proche du plafond fixé dans le code de commerce, à savoir dix-huit membres. Nous pouvons donc supposer que, dans le meilleur des cas, cette instance devrait comprendre dix représentants de l’État et huit représentants des collectivités locales. Nous verrons ce que le Conseil d’État décidera…
Il reste que ce n’est vraiment pas de bonne méthode, car on imagine difficilement que, par exemple, la région puisse ne pas être représentée au sein de ce conseil de surveillance. Je m’étonne même que sa représentation n’ait pas été prévue dès l’origine. Mais l’intention secrète du Gouvernement était peut-être d’écarter la région du conseil de surveillance…
M. Jean Desessard. Pour ma part, j’ai compris qu’il y aurait huit représentants des départements et un représentant de la région.
M. Jacques Gautier. C’est marqué !
M. Jean-Pierre Caffet. Dans ce cas, on ne saurait se limiter à dix-huit membres, puisque, avec neuf représentants des collectivités territoriales et, par déduction, neuf représentants de l’État, il y aurait parité exacte. Or il est prévu que les représentants de l’État occupent « au moins » la majorité des sièges.
D’ailleurs, c’est précisément l’objet de l’amendement que nous avons déposé. Nous proposons de remplacer les termes « au moins la moitié » par « la moitié au plus ». Si le Gouvernement a réellement l’intention de voir huit représentants des départements et un représentant de la région siéger dans une instance respectant une limite de dix-huit membres, peut-être faut-il que j’envisage de retirer cet amendement qui, de fait, serait satisfait ! (Sourires.)
Nous voyons bien que le Gouvernement entend être majoritaire au sein du directoire, ce qui a priori n’est pas choquant, mais également au sein du conseil de surveillance. Or, d’après le rapport, ce dernier remplira des missions éminemment stratégiques. Quelles seront ses fonctions ? On pense évidemment à des fonctions de contrôle, mais je suppose qu’il y en aura d’autres, car, si les élus ne doivent siéger au conseil de surveillance que pour exercer des fonctions de contrôle, ils seront peu nombreux à se porter candidat !
Pour revenir à la position défendue par Philippe Dallier depuis déjà plusieurs jours, il faudra bien, dans cette instance dont les responsabilités et les compétences seront extrêmement larges, qu’un minimum de travail soit réalisé sur la cohérence des aménagements. L’idée d’un organe paritaire entre l’État et les collectivités locales n’est pas complètement absurde au regard de cette cohérence des aménagements et, je le rappelle, c’était le sens de notre amendement.
Très franchement, prétendre que l’État doit être majoritaire pour des questions d’efficacité ou de financement, selon l’adage « qui paie décide », me semble résulter d’une analyse un peu limitée. Avec cet amendement n° 137, nous entendions simplement ne pas laisser des fonctionnaires d’État être majoritaires dans une instance qui aura à se préoccuper – je le répète, comme l’a fait Philippe Dallier au cours des derniers jours – de cohérence des aménagements.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Je finis par comprendre la préoccupation exprimée à de nombreuses reprises par M. Caffet au sujet du rôle de la région. Je veux bien le déclarer ici de la façon la plus solennelle : le président de la région devra faire partie du conseil de surveillance.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pourquoi ne pas l’inscrire dans le projet de loi ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. J’ai cité tout à l’heure le nombre de dix-huit membres qui figure dans le code de commerce, mais celui-ci n’est pas obligatoire. Il est clair que nous serons obligés de le dépasser,…
M. Jean-Pierre Caffet. Si vous voulez la majorité, c’est sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. … car le conseil de surveillance accueillera forcément parmi ses membres – c’est le sentiment de la majorité de la commission spéciale – le représentant de la région, les représentants des huit conseils généraux, soit neuf personnes, auxquelles il faudra ajouter un ou deux représentants des autres collectivités territoriales. Le plafond de dix-huit membres sera donc dépassé, mais notre objectif est que le conseil de surveillance soit le plus restreint possible.
M. Jean-Pierre Caffet. Le projet de loi pourrait le préciser. En l’état, nous nous en remettons à un décret.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote sur l'amendement n° 139.
Mme Dominique Voynet. M. le rapporteur s’est exprimé en faveur de l’amendement présenté par mon collègue David Assouline en expliquant que la présence de deux députés et de deux sénateurs au sein du comité stratégique permettrait une représentation, pour chacune des assemblées, de la majorité et de la minorité. Mais, selon lui, la partie s’annonce plus compliquée pour la parité !
C’est vrai, monsieur Fourcade, dans notre monde, la parité, cela reste compliqué !
Je voudrais simplement inviter les parlementaires qui soutiennent le travail du Gouvernement à un peu de cohérence. D’un côté, on nous annonce à grand renfort de communication un projet de loi tendant à rendre obligatoire une forme de parité dans les conseils d’administration des grandes entreprises…
Mme Nicole Bricq. En tout cas, 40 % de femmes !
Mme Dominique Voynet. … et, de l’autre, on se montre totalement incapable de l’organiser, ne serait-ce qu’à la marge, ne serait-ce que de façon très mesurée, dans les textes de loi.
De même que nous confions au Conseil d’État le soin de détailler la composition du conseil de surveillance, nous pourrions convenir que, par principe, la désignation des représentants du Sénat au comité stratégique respectera la parité homme-femme, en espérant que les députés feront de même. Compte tenu de la personnalité du président de l’Assemblée nationale, je ne doute pas que ce sera le cas.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je veux tout d’abord prendre acte de ce fait, rare depuis le début de ce débat : un amendement présenté par le groupe socialiste est accepté par la commission spéciale et par le Gouvernement.
Pour aller au-delà de ce que prévoit explicitement cet amendement, nous aurions certes pu le rectifier ou le compléter. Mais, jusqu’à maintenant, la parité n’a été qu’une affaire de volonté. Bien sûr, monsieur le rapporteur, la parité, c’est compliqué, mais chaque fois qu’on a voulu l’introduire, on a finalement constaté que c’était plus simple que prévu. Du reste, si cela peut vous simplifier la vie, chers collègues de la majorité, nous nous engageons à respecter la parité dans la désignation du sénateur et du député de l’opposition. Vous n’avez donc plus qu’à trouver un homme et une femme pour les deux parlementaires de la majorité.
En outre, puisque cette question de la parité n’apparaît pas dans l’amendement lui-même, pourquoi, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d’État, n’exprimeriez-vous pas maintenant votre volonté sur cette question ? Le Conseil d’État ne manquera pas de l’enregistrer au moment de l’élaboration du décret, et cela rendra la chose tout de suite moins compliquée !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Je suis tout à fait prêt à indiquer, au nom du Gouvernement, que nous souhaitons que le décret prévoie la parité pour ces nominations.
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Très bien !
M. le président. Monsieur le secrétaire d'État, nous connaissons tous l’importance que, dans sa mission réglementaire, le Conseil d’État attache aux débats parlementaires.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Notre groupe ne peut être accusé de ne pas être féministe et de ne pas appliquer la parité. Permettez-moi tout de même de faire remarquer que la très grande majorité des collectivités locales sont dirigées par des hommes. On peut revendiquer la parité dans les organismes, mais il faudrait déjà faire un effort sur ce point au niveau des exécutifs locaux.
Par ailleurs, je m’interroge : comment comptez-vous assurer le respect du pluralisme des idées politiques ? Ce point est très important car, comme vous le savez, mes chers collègues, nous avons beaucoup de mal à obtenir le respect de ce principe dans des institutions de plus en plus marquées par le bipartisme.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 138.
Mme Nicole Bricq. J’aurais souhaité, monsieur le rapporteur, que vous suiviez votre raison, votre cœur et votre expérience ! J’ai assisté au point de presse que vous avez fait le 30 mars dernier. Peut-être vous êtes-vous alors laissé emporter, mais il m’a semblé que vous livriez vraiment le fond de votre pensée. Vous l’avez d’ailleurs laissé entendre tout à l’heure, lorsque vous avez déclaré que, personnellement, vous étiez favorable à notre amendement, mais que la commission en avait décidé autrement.
Lors de ce point de presse, vous avez dit qu’il fallait une personne jeune pour cette mission – si je ne me trompe, vous avez parlé de « quinquagénaire » – et surtout qu’elle reste à ce poste pendant au moins dix ans, parce qu’il s’agit d’un projet de longue haleine. Mais c’est exactement ce que nous pensons !
Nous maintenons bien évidemment cet amendement. Nous regrettons qu’une dérogation intuitu personae ait été prévue, quel qu’en soit le bénéficiaire. Nous avons bien compris vos intentions : placer à la tête de la société une personne de plus de soixante-cinq ans qui, en même temps, présenterait l’avantage de dégager une place d’élu pour un autre, un peu plus jeune. La ficelle est grosse ! Comme l’a dit Mme Voynet tout à l’heure, ces pratiques ne sont plus acceptables. Elles s’apparentent à du népotisme !
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Sur cette question, je connais le point de vue personnel de M. le rapporteur et j’ai remarqué, monsieur le secrétaire d’État, que, par deux fois, vous aviez dit : « Sans commentaire ! » Selon moi, cela signifie que vous auriez pu en faire, mais que vous ne voulez pas trop cautionner cette démarche.
Je voudrais m’adresser à mes collègues de la majorité sénatoriale, dont dépend le sort de cet amendement. Je tiens à vous faire remarquer que son adoption ne risque pas de bouleverser en quoi que ce soit le projet de loi. En revanche, si vous laissez le texte en l’état sur ce point, c’est à vos propres convictions que vous manquerez puisque vous accepterez une dérogation à un droit commun que vous approuvez, à savoir la limite d’âge fixée à soixante-cinq ans, et puisque vous considérez qu’il faut absolument, à la tête de la SPG, une direction dynamique, susceptible de se maintenir sur une longue période.
Si le projet dont il est ici question doit sortir de terre dans treize ans, nous avons tout intérêt à ce que la continuité de la direction soit assurée et à ce qu’une même personne soit aux commandes le plus longtemps possible.
Imaginez l’effet en termes d’affichage si la personne qui est nommée a soixante-neuf ans : treize ans plus tard, à l’heure du bouclage du projet, elle en aura quatre-vingt-deux ! Franchement, peut-on considérer qu’elle reflétera cette image de force et de dynamisme que l’on prétend donner à ce projet emblématique du xxie siècle ?
La décision est entre vos mains. Vous pouvez très bien rejeter cet amendement en estimant que ce point est fondamental, peut-être pour des raisons idéologiques. Mais vous pouvez aussi prendre en compte la position personnelle du rapporteur et le fait que l’adoption de l’amendement ne déstabiliserait pas l’ensemble du texte pour vous permettre d’exercer, une fois n’est pas coutume, votre liberté de vote individuelle dans cet hémicycle.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Monsieur le président, je n’aime pas du tout la tournure que prend la discussion depuis quelques instants.
Je comprends parfaitement que l’on soit pour ou contre cette disposition sur la limite d’âge et je respecte les positions de chacun. La question se pose non seulement pour la Société du Grand Paris, mais aussi pour l’établissement public de Saclay.
Il reste que les suppositions sur les raisons pour lesquelles cette disposition figure dans le texte ne sont pas acceptables ! J’ai déjà entendu à peu près les mêmes remarques à l’Assemblée nationale, où certains noms ont même été prononcés.
M. David Assouline. Moi, je n’en ai pas mentionné !
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Vous, vous avez évoqué un âge. Permettez-moi de vous dire que cela n’est pas convenable.
Quand j’ai dit tout à l’heure « sans commentaire », c’est parce que je considérais qu’il n’y avait pas à en faire, et non parce que je me suis retenu d’en faire.
Je pense qu’il convient de se prononcer sur des principes et de s’en tenir là.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. En écoutant Mme Bricq, j’ai compris que nos collègues de gauche estimaient que ce texte était rempli d’arrière-pensées. On peut donc en dire autant de leur amendement.
Je voudrais essayer de sortir de ce raisonnement. Lorsque je me suis engagé en politique, comme président des jeunes centristes, je pensais qu’il fallait tout changer et mettre en place la jeune génération. Monsieur Assouline, vous qui êtes intervenu sur cette question, il me semble que vous avez également débuté votre carrière politique dans un mouvement de jeunes. J’imagine que vous teniez à l’époque le même discours que moi.
Je ne voudrais pas faire de comparaisons désobligeantes avec l'Assemblée nationale, mais je me suis rendu compte que, sur ce texte, l’action du Sénat était beaucoup plus substantielle et qu’on la devait en grande partie au travail de M. le rapporteur, que j’admire et respecte. L’efficacité de son travail est le produit de son expérience d’ancien ministre des finances, d’ancien élu régional, d’ancien maire, d’élu local. Moi qui ai été membre de cette commission spéciale, je peux vous assurer que le travail qu’il a fourni est exceptionnel. Et je ne me permettrai pas de rappeler son âge.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas le sujet !
M. Yves Pozzo di Borgo. La question de la limite d’âge est un problème de société beaucoup plus global. L’Inde, qui est la plus grande démocratie du monde, est dirigée par un homme de soixante-seize ans. Il faut changer de mentalité et sortir de vos pesanteurs !
M. David Assouline. Pourquoi la limite d’âge de soixante-cinq ans figure-t-elle dans la loi, alors ?
Mme Nicole Bricq. Il faut régler ce problème globalement !
M. Yves Pozzo di Borgo. Respectons l’expérience, car c’est elle qui permet de fournir, ici comme ailleurs, un travail beaucoup plus efficace. (Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.
M. Serge Dassault. Je voudrais simplement dire à notre jeune et sémillant collègue David Assouline que l’on n’est pas forcément gâteux à quatre-vingt-cinq ans ! Et qu’à cet âge on a une expérience que lui n’a pas ! Le problème n’est pas celui de la limite d’âge : ce qu’il faut, c’est prendre ceux qui sont les plus sages.
Mme Nicole Bricq. Est-ce pour cela que les seniors sont chassés de l’emploi ?
M. Serge Dassault. Alors, il est vain de faire une sélection par l’âge ! Vous verrez bien un jour…
M. David Assouline. Il paraît qu’à vingt-trois ans on peut diriger l’EPAD…
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. M. Pozzo di Borgo a bien décrit la mécanique par laquelle, quand on est ou quand on se sent jeune, on veut bouter hors des institutions ceux dont on brigue la place, avant de changer d’avis quelques décennies plus tard. Alors même qu’il a déjà quelques cheveux blancs, David Assouline a le mérite de ne pas avoir encore changé d’avis.
Ne nous trompons pas de débat. Je n’ai entendu personne mettre en cause le droit des têtes chenues à siéger et à s’exprimer ici. La loi ne fixe pas d’âge maximum pour être sénateur. En revanche, elle bride la capacité pour les sexagénaires avancés d’être nommés à la tête d’institutions pour lesquelles la limite d’âge est de soixante-cinq ans.
Nous vous demandons d’être cohérents : soit vous changez la loi pour tout le monde, soit vous la respectez.
Mme Nicole Bricq. Voilà !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Jusqu’à présent, M. le rapporteur a justifié les dérogations à plusieurs codes, dont ceux de l’urbanisme et de l’environnement, par le caractère exceptionnel du projet et par la nécessité d’exécuter le projet avec rapidité. La dérogation à la limite d’âge répond-elle à ce souci ?
Si l’on introduit au fur et à mesure dans le texte un ensemble de dérogations, on en vient à une démocratie schizophrène.
D’un côté, il y a les lois générales, bien-pensantes, dans lesquelles on prévoit la parité, la limite d’âge, la consultation des citoyens. On passe beaucoup de temps à les discuter, on pinaille, on se met d’accord et on finit par voter une loi formidable.
De l’autre, il y a la réalité. Après avoir voté la loi, on se rend compte qu’elle pose problème. On constate, par exemple, qu’on ne pourra pas utiliser les compétences d’une personne âgée ou que cela prendra trop de temps de consulter les citoyens sur un projet.
On a vraiment deux systèmes parlementaires qui s’affrontent : l’un dans lequel on vote des lois bien-pensantes ; l’autre dans lequel la réalité du pouvoir, l’exécution ou la rapidité des décisions conduisent à déroger aux principes adoptés précédemment.
Ainsi, dans un texte, on fixe la limite d’âge à soixante-cinq ans ; dans un autre, considérant que certaines personnes sont encore vaillantes à cet âge-là, on y déroge. Ou bien encore, sous prétexte qu’il faut aller vite, on fait passer à la trappe la consultation des citoyens ou celle des associations.
Pourquoi les mêmes – c’est en effet la même majorité au Sénat depuis plus de deux siècles ! – qui avaient voté ces principes une première fois les remettent-ils en cause à un autre moment ? Cette façon de fonctionner est vraiment bizarre !
M. le secrétaire d’État n’a pas toutes les mauvaises pensées qu’on lui prête ? Soit ! Mais on s’aperçoit qu’il y a un système de pensée dans la vie politique qu’on voit sans cesse s’installer. Comme je l’ai dit ce matin, en matière de protection sociale, d’urbanisme, de fonctionnement démocratique, etc., se met en place une idéologie de la dérégulation généralisée.
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. C’est une question de principe qui est posée ici. Tout le monde est d’accord pour dire que l’âge civil et l’âge biologique sont deux choses radicalement différentes, et le physiologiste que j’ai été le sait bien. Certains possèdent de grandes facultés à un âge avancé alors que d’autres, plus jeunes, sont beaucoup moins alertes.
Mme Nicole Bricq. Changez la loi !
M. Dominique Braye. Notre assemblée n’échappe d’ailleurs pas à cette règle. Notre rapporteur prouve à lui seul que l’âge ne fait rien à l’affaire.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a toujours eu des jeunes idiots et des vieux qui ne l’étaient pas du tout !
M. Dominique Braye. Cela étant, le problème n’est pas là.
Dès lors qu’une loi a été adoptée, elle doit être respectée. Le seul fait d’inscrire une telle disposition dans ce texte porterait atteinte à sa crédibilité.
Sur la question de l’âge, il suffit de regarder les sondages : ils vont tous dans le même sens. Dès lors, pourquoi échapperions-nous à la règle commune en raison de nos activités ou de nos responsabilités ? Je ne suis pas sûr que déroger à l’âge légal de la retraite soit un très bon message adressé à l’opinion.
Sans vouloir insister, je vous rappellerai les déclarations du Président de la République sur la respiration démocratique et le renouvellement des responsables politiques. Évitons donc d’avoir un discours qui change selon les circonstances !
C’est donc pour des raisons de principe que je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission spéciale.
M. Laurent Béteille, vice-président de la commission spéciale. Je veux ramener les choses à leur juste mesure.
La commission a examiné cet amendement. Elle a majoritairement émis un avis défavorable, même si le rapporteur n’y était pas opposé.
Mme Nicole Bricq. Il y était même très favorable !
M. Laurent Béteille, vice-président de la commission spéciale. Nous souhaitons que la gouvernance de la société du Grand Paris connaisse une certaine stabilité.
Mme Nicole Bricq. Justement !
M. Laurent Béteille, vice-président de la commission spéciale. Dans ces conditions, il faut que le président puisse rester en place un certain nombre d’années. Certains pensent à une dizaine d’années.
M. Dominique Braye. Plus il sera vieux, moins ça durera : c’est mathématique ! (Rires et exclamations.)
M. Laurent Béteille, vice-président de la commission spéciale. Mes chers collègues, si vous voulez bien m’écouter, je vous citerai un simple exemple, qui reprend d’ailleurs un peu le raisonnement de M. Assouline. Si l’on nomme un président âgé de cinquante-huit ans, cela signifie que celui-ci sera obligé de passer la main au bout de sept ans, ce qui ne serait pas nécessairement une bonne chose. La commission a donc souhaité que, dans ce cas précis, il puisse y avoir une dérogation, et je pense qu’elle a eu raison.
Cette disposition n’introduit pas un changement considérable. Nous pourrions donc la conserver.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 138.
(L'amendement est adopté. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste, l'autre, du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 186 :
Nombre de votants | 334 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 167 |
Pour l’adoption | 182 |
Contre | 151 |
Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, pour les raisons que je vous ai exposées à quatorze heures trente, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
Mes chers collègues, je viens de m’entretenir avec le président Larcher. Il considère que, la conférence des présidents ayant inscrit l’examen de ce texte à neuf heures trente, à quatorze heures trente et la nuit, nous devons poursuivre nos travaux. M. le président du Sénat nous rejoindra vers vingt-trois heures ; nous ferons le point à ce moment-là.
Nous nous sommes cependant entendus sur le fait que nous ne poursuivrions pas la séance s’il apparaissait que celle-ci ne permettrait d’achever la discussion du projet de loi qu’à une heure confinant à la déraison.
M. Christian Cambon. À quelle heure commence la déraison ? (Sourires.)
M. le président. Je vous laisse interpréter cette phrase… Disons que, si la séance de nuit devait s’achever à dix heures et demie du matin, je considérerais, personnellement, que la déraison est atteinte depuis très longtemps.
M. Dominique Braye. C'est-à-dire depuis combien de temps ? (Nouveaux sourires.)
Mme Nicole Bricq. « Un certain temps », disait Fernand Raynaud !
M. le président. Monsieur Braye, je vous renvoie à la phrase célèbre sur le temps de refroidissement du fût du canon… (Nouveaux sourires.)
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le président, nous sommes toujours dans l’incertitude. Avez-vous évoqué avec le président Larcher la possibilité que nous n’achevions pas l’examen de ce texte dans un délai acceptable et envisagé de le poursuivre demain ou après la suspension des travaux en séance plénière ?
M. le président. Ma chère collègue, nous ne sommes pas entrés dans ce débat, qui relève de la compétence de la conférence des présidents. Pour l’instant, nous nous en tenons à l’ordre du jour fixé par celle-ci. À titre personnel, il me semble inenvisageable que le Sénat siège demain samedi, et c’est la position que je défendrai au sein de la conférence des présidents. Quoi qu’il en soit, ce débat n’est pas ouvert et il est de notre intérêt commun de reprendre maintenant le cours de nos travaux.
Articles additionnels après l'article 8