Mme Nathalie Goulet. Très romantique !
Mme Nicole Bricq. … qui, il faut le dire, est ridicule.
Il s’agit, pour la seconde, de l’introduction d’un morceau de réforme institutionnelle. C’est l’article 35, qui a trait à une nouvelle organisation des institutions publiques de la consommation, et vise à placer trois institutions sous la responsabilité du directeur de l’INC, l’Institut national de la consommation : la commission de la sécurité des consommateurs, la commission des clauses abusives ainsi que la commission de la médiation de la consommation.
Je ne vais pas jusqu’à dire que c’est là un cavalier, mais nous sommes tellement habitués à ce que le Gouvernement, par morceaux, dans des textes qui ne sont pas faits pour cela, place des bouts de réformes que je tenais à le souligner. La motivation habituelle de mutualisation est avancée. Toutefois, ces commissions garderaient leur personnalité morale et leur président, ce qui ne trompe ni ne rassure personne. La commission spéciale sans autre examen se contente d’affirmer qu’il y aura ainsi des synergies réelles sans se donner les moyens d’en vérifier l’existence, et se satisfait des dires du Gouvernement qui affirme vouloir développer la médiation.
Au moins pourrait-on disposer d’un bilan de la médiation dans les domaines où elle s’exerce déjà. Quelle qu’en soit l’extension, cette procédure n’est pas la garantie pour les consommateurs d’obtenir réparation des préjudices commerciaux toujours plus nombreux qu’ils subissent.
Madame la ministre, nous en reparlerons très prochainement, le jeudi 24 juin, quand je défendrai, avec mon groupe, notre proposition de loi visant à introduire en droit français la procédure de recours collectif. En tout état de cause, il n’est pas normal que le Sénat accepte cette modification sans en débattre.
Vous voulez donc un vote conforme qui écourte la navette, qui évite la commission mixte paritaire. Nous défendrons nos amendements sans illusion mais avec conviction. M. le rapporteur nous a invités, lors de la réunion de la commission spéciale, à soumettre le texte – je reprends son expression – « à l’épreuve de la réalité » : je pense que celle-ci nous donnera raison ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Sueur. Excellent !
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Madame le président, madame le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, voilà un an, notre assemblée adoptait en première lecture un projet de loi portant réforme du crédit à la consommation. Après un passage à l’Assemblée nationale, ce texte, économiquement urgent et socialement prioritaire, s’est enrichi de dispositions aussi innovantes que diverses.
Bien entendu, l’objet principal demeure, puisqu’il s’agit de mieux encadrer les conditions d’accès au crédit, de mieux protéger les consommateurs et de responsabiliser davantage les professionnels du crédit.
Je rappellerai quelques chiffres : quatorze millions de Français font appel au crédit à la consommation, neuf millions au crédit renouvelable et, parmi eux, chaque année, plus de 213 000 déposent un dossier de surendettement, soit un taux d’augmentation de plus de 18 % entre 2008 et 2009.
En effet, non seulement le nombre de nos concitoyens surendettés va croissant, mais cette tendance socio-économique s’accompagne d’un phénomène de banalisation particulièrement dangereux. Différentes études laissent à penser que, à ce jour, plus de sept millions de personnes, c’est-à-dire 15 % de la population, seraient insolvables.
Depuis plusieurs années, les associations de consommateurs alertent régulièrement les pouvoirs publics sur les véritables « pièges » financiers dont nombre de nos compatriotes sont victimes. Le vieil adage qui voulait jadis que l’on ne prête qu’aux riches est désormais contredit, puisque ce sont bien les plus pauvres ou les plus fragiles qui sont endettés. Ce constat dressé, nous devons bien admettre que le remède législatif à un tel fléau a tardé à venir. Et nous ne pouvons que le regretter.
Devant l’ampleur d’un phénomène allant jusqu’à saper les bases de la société contemporaine et un dispositif législatif devenu inopérant, le Sénat, en première lecture, n’est pas demeuré inerte, loin s’en faut, et a enrichi le texte initialement proposé par le Gouvernement, en y apportant des exigences d’encadrement du crédit accrues et une plus grande protection des ménages les plus exposés aux risques liés à l’endettement.
Le crédit à la consommation bien utilisé est légitime et mérite toute l’attention du législateur. Le Sénat, pour la seconde fois, devra y apporter toute sa force pour rendre ce texte encore plus efficace afin d’améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens.
Rappelons que, dans son rapport annuel de 2010, la Cour des comptes affirme que « la politique française de lutte contre le surendettement est déséquilibrée, le dispositif légal visant à traiter la situation individuelle des surendettés plutôt qu’à prévenir le surendettement ».
Toutefois, l’enjeu fondamental de notre débat, de cette réforme, a trait à l’évaluation de la solvabilité de l’emprunteur. Contracter un crédit est un engagement non seulement pour l’emprunteur, mais aussi pour le prêteur. Il faut privilégier une coresponsabilisation des deux acteurs du prêt.
On voit bien trop souvent des organismes peu regardants accorder des crédits à des personnes dont la situation financière n’offre manifestement aucune garantie de remboursement. Dès lors, le fichier national de l’endettement se justifie et a toute sa place.
Comment ne pas adhérer à l’esprit même des dispositions proposées, qui devraient avoir pour effet non pas de tarir le crédit à la consommation – ce serait une très grave erreur – mais de le maîtriser ?
Avec l’apport de nouvelles mesures adoptées au Sénat puis à l’Assemblée nationale le projet de loi privilégie l’accès à un crédit responsable, faisant une part véritable à l’information du consommateur. Plusieurs dispositions auront une véritable portée. Je pense, notamment, à l’allongement du délai de rétractation, à la séparation des destinations de la carte de fidélité ou au remboursement imposé d’une partie du capital. Autant de mesures dont les familles françaises pourront bénéficier rapidement, en tout cas, je l’espère.
En première lecture, mon groupe avait proposé trois amendements que le Sénat a adoptés, afin de renforcer l’information du prêteur à l’emprunteur. Je me réjouis que l’Assemblée nationale ait maintenu en l’état le premier amendement et ait conservé l’esprit des deux autres en dépit de quelques modifications rédactionnelles. Bien entendu, les progrès apportés par le texte demanderont à être vérifiés au quotidien et sur le terrain.
Soulignons également l’amélioration introduite par le texte dans le fonctionnement des commissions de surendettement, disposition qui devrait permettre à ces dernières d’accélérer les processus d’examen des dossiers et de prendre des décisions relevant jusqu’à présent de la compétence du juge. Cette mesure de simplification des procédures ne peut que favoriser le règlement de dossiers souvent difficiles, tout en veillant à l’accompagnement des personnes fragilisées par leur situation financière.
Il est grand temps que, grâce au renforcement des règles applicables en matière de publicité, qu’il s’agisse des encarts publiés dans les magazines de programmes TV ou des publicités faisant l’objet de mailing, il ne soit dorénavant plus possible de faire croire au consommateur que le recours au crédit peut améliorer sa situation financière.
Le renforcement des conditions d’obtention d’un crédit, par le biais d’une vérification accrue et systématique de la solvabilité de l’emprunteur, devrait contribuer à limiter les cas de surendettement. Les prêteurs ne doivent plus échapper à leurs responsabilités.
Concernant le taux de l’usure, les dispositifs adoptés en première lecture, même s’ils peuvent ne pas paraître tout à fait satisfaisants, permettent d’accroître l’attractivité du crédit amortissable et de réduire la part du crédit renouvelable.
Dans ces conditions et face à l’urgence de la situation, madame le ministre, mes chers collègues, les membres de mon groupe et moi-même demeurerons attentifs à nos travaux en séance publique. Aussi, nous espérons que, à l’issue de l’examen des articles, nous pourrons prendre, sur ce projet de loi portant réforme du crédit à la consommation, la même position que celle que nous avions adoptée en première lecture, et ainsi l’approuver à l’unanimité. (Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, au terme d’une assez longue attente, puisque le texte a été examiné en première lecture voilà désormais plus d’un an – un an de gagné pour les établissements bancaires, un an de gagné pour continuer de proposer des offres aussi alléchantes que mensongères –, nous voici en présence d’une version revue et corrigée du projet de loi portant réforme du crédit à la consommation.
Quelques observations formelles, de portée institutionnelle, doivent d’emblée être formulées.
Le Gouvernement n’avait pas engagé la procédure accélérée pour l’examen de ce texte, ce qui participe d’une volonté plus ou moins affichée de réduire le recours à ce mode de discussion parlementaire et de tenter de sauver les apparences, dans un contexte où les droits du Parlement sont largement mis en question.
À la vérité, cette procédure, dans le cas précis, ne peut pas être considérée de manière tout à fait positive. Dans les faits, l’ensemble des textes relatifs aux activités bancaires et financières, notamment les collectifs budgétaires ayant pour objectif de soutenir le secteur financier, ont, eux, bénéficié en effet du traitement de faveur que constitue la procédure accélérée.
N’est-il pas paradoxal qu’un texte dont l’objet plus ou moins affirmé était de donner aux clients et aux usagers des banques quelques droits nouveaux ait mis une année pleine à être étudié par les deux assemblées ?
Pour le coup, on rappellera qu’un certain nombre de propositions de loi portant sur le sujet avait été déposées dès l’automne 2008 et que le Gouvernement a présenté son projet de loi le 22 avril 2009…
Ces délais particulièrement longs, notre collègue Philippe Dominati, rapporteur de la commission spéciale, nous propose désormais de les abréger, puisqu’il nous recommande l’adoption conforme du texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Une telle démarche ne peut évidemment recevoir notre assentiment.
Si la discussion a été particulièrement longue, ce n’est pas une raison pour que l’on remette en question le droit élémentaire dont bénéficie chaque parlementaire d’amender les textes soumis à son examen, d’autant que des questions essentielles ne sont pas résolues, à commencer par le taux de l’usure ou les procédures engageant la responsabilité des prêteurs dans l’émergence des difficultés des emprunteurs. Ces questions méritent par conséquent débat.
Nous aurons eu, avec la discussion de ce projet de loi, à la fois une latence très profitable aux établissements de crédit, libérés des éventuelles contraintes que pourrait faire naître l’application du texte, et un texte insuffisamment amélioré pour être totalement opérationnel.
Au demeurant, l’extrême fréquence du recours à la voie réglementaire pour l’application du texte soulève de nouvelles questions.
Madame la ministre, vous avez rappelé tout à l’heure les engagements pris au sujet de la bonne trentaine de décrets et arrêtés induits par l’adoption du texte, mais vous me permettrez de préciser que cette inflation réglementaire risque fort de créer des difficultés concrètes dans la mise en œuvre du projet de loi.
Nous connaissons la force de frappe des banques, nous savons qu’elles savent se faire entendre, et qu’elles sont souvent entendues ! Par conséquent, nous craignons que, dans le cadre de la consultation interministérielle, les arguments présentés par l’Association française des banques ne soient plus aisément pris en compte que ceux que portent les associations de consommateurs.
Voter le projet de loi en l’état, c’est donc, dans le schéma proposé par M. le rapporteur, abandonner notre droit d’amendement et confier la mise en œuvre concrète de la loi au rapport de force entre consommateurs et banquiers, rapport dont il est à craindre qu’il ne soit quelque peu déséquilibré.
Revenons-en à quelques points essentiels du texte comme du contexte.
Ce projet de loi intervient, en cette année 2010, alors même que le secteur bancaire et financier s’est largement « requinqué » après ses mésaventures de l’été 2007.
L’affaire Kerviel appartient, ces jours-ci, à l’actualité juridique et a quitté le champ de la pure comptabilité et de la mise en cause de la profitabilité de la Société Générale.
BNP Paribas, opérateur essentiel du crédit à la consommation à travers ses filiales dédiées, présente même une situation financière florissante qui, alors même que la banque avait fait appel au concours de l’État, en 2007, devrait la conduire à récompenser ses cadres et ses traders par de généreuses primes de résultat !
C’est donc un secteur financier largement remis en état de marche, grâce à l’utilisation peu onéreuse et bienveillante des fonds publics, qui va « affronter » un texte finalement peu exigeant, et ce d’autant moins que les pratiques actuelles en matière de taux d’intérêt pour les crédits à la consommation continuent d’offrir une marge confortable aux établissements prêteurs, une marge que la réduction du taux directeur de la Banque centrale européenne a d’ailleurs quelque peu renforcée.
Nous sommes également, compte tenu du contexte de 2010, dans une situation pour le moins déroutante du point de vue de la distribution du crédit.
En effet, alors même que la tendance à la hausse des produits nets bancaires s’est affirmée, l’orientation des politiques de distribution de crédit est à la raréfaction des lignes ouvertes, qu’il s’agisse des entreprises, des PME ou des particuliers. Et le faible niveau de la croissance économique au premier trimestre est sans doute dû en grande partie à cette difficulté nouvelle, pour les particuliers qui souhaitent obtenir des crédits.
J’en reviens à quelques-uns des aspects essentiels de la question du crédit à la consommation.
Le crédit est tout simplement un instrument essentiel de la croissance économique, non seulement du point de vue des banques, mais aussi du point de vue de l’économie nationale en général.
Dès lors que le Gouvernement a fait sienne une politique de modération salariale appliquée dans le secteur public et largement encouragée dans le secteur privé, le crédit devient naturellement l’outil de développement de la consommation populaire.
« À défaut de salaire, endettez-vous ! », semble-t-on dire à nos concitoyens dans le droit fil de ce texte, ne serait-ce que parce que les ménages français sont finalement assez peu endettés comparés aux ménages nord-américains, britanniques ou espagnols, pour ne citer que quelques exemples.
Cette situation ne nous dispense pas, cependant, de constater, au fil de l’activité des commissions de surendettement, la persistance de situations dramatiques pour de nombreuses familles – les chiffres ont été rappelés –, situations pour lesquelles le texte ne prévoit pas, hélas ! de solutions parfaitement acceptables.
Parmi les raisons qui conduisent nombre de familles au surendettement figure le recours contraint à des formules de crédit renouvelable que l’on appelle revolving, et que nous avons stigmatisé sous le vocable de « crédit revolver », solutions de plus en plus utilisées par les familles pour faire face aux dépenses du quotidien.
Il faut dire que, avec le temps partiel imposé à trois millions de salariés et un salaire moyen inférieur à 1 600 euros mensuels, les ménages ne savent pas toujours comment faire face à leurs charges fixes ou aux simples dépenses de la vie courante. Or, nous le savons bien, le surendettement est essentiellement provoqué par les dépenses quotidiennes, notamment d’alimentation.
Pour notre part, nous sommes attachés à la juste rémunération du travail, qui constitue le meilleur moyen de relancer la consommation populaire et de donner quelque assurance, aux prêteurs comme aux emprunteurs, quand il s’agit de passer à la conclusion d’un contrat de prêt.
Sans cet effort en faveur de la rémunération du travail, qui passe notamment par la revalorisation des minima légaux, nous ne pourrons pas prévenir avec suffisamment d’efficacité les dérives éventuelles d’un dispositif de crédit à la consommation qui peut devenir un facteur aggravant de l’endettement des ménages.
Nous pensons même que devrait exister sur le marché – appelons-le ainsi – un produit financier permettant aux ménages, dans des limites admissibles, d’emprunter à très faible taux, y compris pour faire face à des dépenses d’équipement de la maison ou de la famille en général.
Le microcrédit ne peut se limiter, de notre point de vue, aux seuls cas d’insertion professionnelle et de création ou de reprise d’entreprise.
Viendra d’ailleurs peut-être un jour où l’on créera un outil financier spécifique, de type « compte sur livret », dont l’allocation visera précisément les dépenses aujourd’hui mal prises en charge par les crédits à la consommation.
En tout état de cause, nous ne sommes pas partisans d’un recours accru et quasi rituel au crédit pour financer la consommation populaire, d’une part, parce que les conditions de distribution de ce crédit sont loin d’être rééquilibrées par le présent texte, d’autre part, parce que cela ne peut nous faire oublier la nécessité de la juste rémunération du travail.
Les garanties offertes par le présent texte étant largement insuffisantes pour répondre aux besoins des consommateurs salariés, nous risquons, une fois encore, d’être amenés à voter contre le texte issu de nos travaux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – Mme Nicole Bricq applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le Sénat examine aujourd’hui, en deuxième lecture, le projet de loi portant réforme du crédit à la consommation.
Le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale est très proche de la version adoptée par le Sénat en première lecture, ce qui témoigne de la qualité du travail effectué par notre commission spéciale, sous la responsabilité de son président, Philippe Marini, et de son rapporteur, Philippe Dominati, deux Philippe tout aussi compétents qu’impliqués. (Sourires au banc des commissions.)
Le Sénat s’est en effet mobilisé depuis longtemps sur les questions du crédit à la consommation et de la lutte contre le surendettement, avec pas moins de cinq propositions de loi traitant de ces thèmes, dont deux ont été déposées par nos collègues Philippe Marini et Charles Revet pour l’UMP.
L’engagement de la Haute Assemblée en faveur d’un crédit à la consommation plus responsable, d’une meilleure prévention du surendettement et d’un accompagnement renforcé des personnes surendettées doit donc être souligné.
Les travaux et débats, au Sénat d’abord, puis à l’Assemblée nationale, ont permis d’aller au-delà encore du texte du Gouvernement, tout en permettant d’en conserver l’esprit.
En première lecture, sur l’initiative de sa commission spéciale, le Sénat avait estimé indispensable d’introduire trois dispositions importantes, lesquelles ont été confirmées par nos collègues de l’Assemblée nationale.
Premièrement, le Sénat avait retenu un nouveau mode de calcul du taux de l’usure, si cher au rapporteur général de la commission des finances (Sourires), c’est-à-dire la fixation des taux en fonction non pas de la catégorie du produit, mais du montant du crédit.
L’Assemblée nationale a adopté pratiquement sans aucune modification cette réforme du taux de l’usure.
Deuxièmement, le Sénat avait souhaité que le principe de la création d’un fichier positif, qui fait débat depuis des années, soit effectivement posé dans le cadre du projet de loi. Le Gouvernement a donné son accord lors des travaux à l’Assemblée nationale, et un rapport sur la création d’un registre national des crédits aux particuliers sera remis au Gouvernement et au Parlement dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi ; le Sénat avait retenu, à l’origine, un délai de trois ans, mais la présente rédaction nous permet d’accélérer la démarche.
Troisièmement, le Sénat avait souhaité procéder à une nouvelle définition du microcrédit personnel en le centrant sur sa finalité sociale, afin d’en faire un instrument de soutien à l’emploi – maintien dans l’emploi ou retour à l’emploi – ainsi qu’à tout projet d’insertion sociale.
Il avait également semblé important au Sénat de mettre l’accent sur l’accompagnement social et, dans cette perspective, de permettre au Fonds de cohésion sociale de financer non seulement les garanties, mais aussi directement les dépenses d’accompagnement des bénéficiaires. L’Assemblée nationale a suivi le Sénat dans cette démarche et a même complété le dispositif.
Les députés ont, de leur côté, fort opportunément enrichi les travaux du Sénat et introduit dans le texte adopté par notre assemblée un certain nombre de compléments que nous estimons tout à fait opportuns.
Nos collègues ont également voté une réforme des institutions publiques chargées de la consommation, autour d’un Institut national de la consommation rénové, notamment sur la base des préconisations des Assises de la consommation qui se sont tenues en octobre dernier.
Enfin, plusieurs amendements du Gouvernement visant à améliorer les relations entre les banques et leurs clients surendettés ont permis de compléter très utilement ce texte, madame la ministre.
L’ensemble du projet de loi constitue un compromis équilibré entre les intérêts des consommateurs et des prêteurs, la responsabilisation des différents acteurs et la prévention du surendettement.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que le rapporteur et le président de la commission spéciale ont estimé préférable, à ce stade de la procédure, de nous proposer une adoption sans modification du texte transmis par l’Assemblée nationale.
Cela devrait permettre, d’une part, d’appliquer rapidement le projet de loi, d’autre part, de ne pas trop dépasser les délais de transposition en droit interne de la directive européenne, qui devait être effective au plus tard le 12 mai 2010.
Je me félicite, madame la ministre, que les décrets et arrêtés nécessaires à l’application du texte soient publiés avant la fin de l’année. Cependant, ce délai, qui peut paraître court, est à mes yeux encore trop long si l’on se met à la place de ceux qui vivent ou qui pourraient vivre des situations difficiles.
Madame la ministre, le groupe UMP s’inscrit entièrement dans votre démarche et votera ce projet de loi portant réforme du crédit à la consommation, qui est une réponse adaptée aux attentes des consommateurs et des associations représentatives. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Mesdames les sénateurs, ou mesdames les sénatrices – c’est une question de préférence –, je répondrai successivement à vos différentes interventions.
Madame Goulet, l’Assemblée nationale a modifié le régime des cessions de créances, en particulier la notification au débiteur cédé. Je vous invite donc, à l’aune de votre expérience notamment en Basse-Normandie, à m’apporter tout élément de nature à m’éclairer dans la rédaction du décret d’application.
Par ailleurs, je soumettrai à M. Bruno Le Maire votre suggestion d’instaurer, dans chaque préfecture, une réunion mensuelle réservée aux questions agricoles, et nous reviendrons vers vous avec une proposition.
Madame Bricq, je ne m’attendais évidemment pas à un satisfecit de votre part, pas plus que je n’entends arborer au revers de ma veste une quelconque médaille pour avoir rédigé une loi sur la consommation.
Sachez simplement que le présent projet de loi me tient particulièrement à cœur, pour des raisons qu’il n’est nul besoin d’évoquer ici, ne serait-ce que parce qu’il est bon pour nos concitoyens.
La navette a certes pu vous sembler un peu longue, en dépit de nos efforts pour l’écourter, précisément afin que le texte bénéficie le plus rapidement possible à nos concitoyens. C’est dans cet esprit que je me suis efforcée, avec mes services, de réduire le nombre de textes d’application et d’intégrer dans quatorze décrets et quatre arrêtés les trente mesures réglementaires nécessaires à la mise en œuvre du présent projet de loi.
J’ajoute à l’attention de Mme Procaccia, non sans l’avoir remerciée de son soutien, que la plupart des quatorze décrets prévus seront publiés dès la fin du mois d’octobre.
Mme Catherine Procaccia. Donc, très rapidement !
Mme Christine Lagarde, ministre. Certains paraîtront dès le mois de juillet. Seuls trois resteront à publier entre octobre et décembre. Comme vous pouvez le constater, nous poussons les feux et nous accélérons la manœuvre.
Madame Bricq, je répondrai à vos arguments à l’occasion de la discussion des amendements que vous avez déposés et que, je n’en doute pas, vous défendrez avec conviction, même si vous ne vous faites sans doute pas d’illusion quant au sort qui leur sera réservé. Je vous apporterai des réponses les plus complètes possible, mais elles seront relativement brèves, afin de ne pas prolonger le débat.
Mme Nicole Bricq. J’ai bien compris que vous souhaitiez assister à la fête de la musique ! (Sourires.)
Mme Christine Lagarde, ministre. Sachez, madame, que je souscris à certaines de vos propositions. Vous pourrez d’ailleurs constater, lors de la discussion des articles, que vous avez déjà satisfaction sur certains points.
En ce qui concerne le contrôle de l’application de la loi, si vous reconnaissez, même du bout des lèvres – je le comprends – que ce texte comporte des progrès, vous regrettez que la loi actuelle ne soit pas vraiment appliquée et que les banquiers s’affranchissent en général de certaines de leurs obligations.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas moi qui le dis, cela figure dans des documents officiels !
Mme Christine Lagarde, ministre. J’ai donc demandé à l’Autorité de contrôle prudentiel, qui est issue de la réforme que nous avons mise en œuvre, de se concentrer sur le secteur du crédit à la consommation dans la commercialisation des produits. Nous renforçons ainsi l’action de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, et des divers organismes qui, en région, sont directement chargés de vérifier que les banques respectent leurs obligations, notamment en matière de publicité. Il reviendra donc à l’Autorité de contrôle prudentiel de vérifier la commercialisation des produits, donc le respect de la loi, ce que les autorités de contrôle bancaire ne faisaient pas de manière particulièrement assidue.
Mme Nicole Bricq. Très bien !
Mme Christine Lagarde, ministre. Madame Escoffier, je vous remercie de votre soutien. Vous avez souligné certaines avancées que contient ce texte qui n’ont pas toujours été relayées dans la presse, bien qu’elles soient réelles. Je pense notamment aux trois obligations supplémentaires que nous mettons à la charge des banques et des établissements financiers : la vérification de la solvabilité de l’emprunteur, la consultation du Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, le FICP, et l’obligation, que j’avais toujours appelée de mes vœux, pour le prêteur et le consommateur de remplir ensemble – à quatre mains – une fiche de dialogue.
Madame Terrade, vous nous reprochez un recours excessif à la voie réglementaire. Nous avions trente mesures à prendre et nous avons ramené le tout à quatorze décrets et quatre arrêtés. Nous nous sommes par ailleurs efforcés, notamment devant le Sénat, qui a considérablement enrichi le texte, de faire la part juste entre les articles 34 et 37 de la Constitution, pour ne pas charger la barque réglementaire afin que la loi soit respectée dans sa pureté et, je l’espère, appliquée, ce à quoi je sensibiliserai mes services.
Je conclurai cette brève réponse en remerciant Mmes les sénateurs de leurs interventions et M. le président et M. le rapporteur de la commission spéciale de leurs appréciations sur le texte.