Sommaire
Présidence de Mme Catherine Tasca
MM. Jean-Pierre Godefroy, Bernard Saugey.
2. Loi de finances pour 2011. – Suite de la discussion d'un projet de loi
Amendement n° I-314 de M. Thierry Foucaud. – M. Thierry Foucaud.
Amendement n° I-136 de Mme Alima Boumediene-Thiery. –Mme Alima Boumediene-Thiery.
MM. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. – Rejet des amendements nos I-314 et I-136.
Amendement n° I-315 de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
3. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire d’Indonésie
4. Loi de finances pour 2011. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Demande de réserve des articles 14 à 17 bis. – MM. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement ; Jean Arthuis, président de la commission des finances. – La réserve est ordonnée.
Articles additionnels après l’article 2
Amendement n° I-216 de Mme Nicole Bricq. – MM. Michel Sergent, le rapporteur général, le ministre, Mme Nicole Bricq. – Rejet.
Amendement n° I-215 de M. François Marc. – M. François Marc.
Amendement n° I-138 de Mme Alima Boumediene-Thiery. – Mme Alima Boumediene-Thiery.
MM. le rapporteur général, le ministre, Mme Nicole Bricq. – Rejet des amendements nos I-215 et I-138.
Amendement n° I-217 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-363 de M. Yvon Collin. – M. Denis Detcheverry.
MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet des amendements nos I-217 et I-363.
Amendement n° I-213 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-317 rectifié de M. Thierry Foucaud, M. Bernard Vera.
MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet des amendements nos I-213 et I-317 rectifié.
Amendement n° I-210 de M. Marc Massion. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre, Bernard Vera. – Rejet.
Amendement n° I-211 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° I-218 de M. Jean-Pierre Sueur. – M. Jean-Pierre Sueur.
Amendement n° I-352 de Mme Catherine Dumas. – Mme Catherine Dumas.
MM. le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Fourcade, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Dumas. – Rectification des deux amendements ; adoption des amendements identiques nos I-218 rectifié et I-352 rectifié insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos I-1 de la commission et I-316 de M. Thierry Foucaud. – MM. le rapporteur général, Thierry Foucaud, le ministre, Philippe Adnot, Philippe Dominati. – Adoption des deux amendements supprimant l'article, l’amendement no I-64 devenant sans objet.
Amendements identiques nos I-437 de M. Yvon Collin et I-442 de Mme Nicole Bricq. – M. Denis Detcheverry, Mme Michèle André.
Amendement n° I-351 de M. Thierry Foucaud. – M. Bernard Vera.
MM. le rapporteur général, le ministre, Mme Nicole Bricq. – Rejet des amendements nos I-437, I-442 et I-351.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 2 ter
Amendements identiques nos I-214 de Mme Nicole Bricq et I-361 de M. Yvon Collin. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° I-318 de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
M. Thierry Foucaud.
Amendements identiques nos I-140 de Mme Alima Boumediene-Thiery et I-219 de Mme Nicole Bricq. – Mmes Alima Boumediene-Thiery, Nicole Bricq
Amendement n° I-220 de Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-319 de M. Thierry Foucaud. – M. Bernard Vera.
Amendement n° I-221 de M. Thierry Repentin. – M. François Marc.
Amendement n° I-110 de M. Philippe Dominati. – M. Philippe Dominati.
Amendements identiques nos I-2 de la commission et I-34 de M. Michel Houel. – MM. le rapporteur général, Philippe Dominati.
Amendement n° I-222 de M. Thierry Repentin.
Amendement n° I-3 de la commission. – M. le rapporteur général.
Amendement no I-458 du Gouvernement. – M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Bernard Vera, Mme Nicole Bricq. – Retrait de l’amendement no I-110 ; rejet des amendements nos I-140, I-219, I-220, I-319, I-221 et I-222 ; adoption des amendements nos I-2, I-34, I-3 et I-458.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 3
Amendements identiques nos I-157 rectifié de Mme Alima Boumediene-Thiery et I-313 rectifié de M. Thierry Foucaud. – Mme Alima Boumediene-Thiery, M. Bernard Vera.
Amendement n° I-249 rectifié de Mme Nicole Bricq. – M. François Marc.
Amendement n° I-139 rectifié de Mme Alima Boumediene-Thiery. – Mme Alima Boumediene-Thiery.
Amendement n° I-156 rectifié de Mme Alima Boumediene-Thiery. – Mme Alima Boumediene-Thiery.
Amendements identiques nos I-155 rectifié de Mme Alima Boumediene-Thiery et I-254 rectifié de Mme Nicole Bricq. – Mmes Alima Boumediene-Thiery, Nicole Bricq.
Amendement n° I-251 rectifié de Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-158 rectifié de Mme Alima Boumediene-Thiery. – Mme Alima Boumediene-Thiery.
Amendement n° I-257 rectifié de Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-422 rectifié de M. Nicolas About. – M. Nicolas About.
Amendement n° I-256 rectifié de Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-419 rectifié de M. Nicolas About.
Amendement n° I-250 rectifié de Mme Nicole Bricq.
Amendement n° I-258 rectifié de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq.
MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Mme Nicole Bricq, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; François Marc, Jean-Pierre Fourcade, Denis Badré. – Rejet, par scrutin public, des amendements nos I-157 rectifié et I-313 rectifié ; rejet des amendements nos I-249 rectifié, I-139 rectifié, I-156 rectifié, I-155 rectifié, I-254 rectifié, I-251 rectifié, I-158 rectifié, I-257 rectifié, I-422 rectifié, I-256 rectifié, I-419 rectifié, I-250 rectifié et I-258 rectifié.
Amendement n° I-333 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendements nos I-103 rectifié à I-105 rectifié de M. Philippe Dominati. – M. Philippe Dominati. – Retrait des trois amendements.
Amendement n° I-334 rectifié de M. Thierry Foucaud. – M. Bernard Vera.
Amendement n° I-255 rectifié de Mme Nicole Bricq.
MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Mme Nicole Bricq. – Rejet des amendements nos I-334 rectifié et I-255 rectifié.
Amendement n° I-336 rectifié de M. Thierry Foucaud. – M. Bernard Vera.
Amendements identiques nos I-70 rectifié de M. Philippe Adnot et I-291 rectifié de M. Jean-Jacques Jégou. – MM. Philippe Adnot, Jean-Jacques Jégou
MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, le président de la commission, Philippe Adnot. – Rejet des amendements nos I-336 rectifié, I-70 rectifié et I-291 rectifié.
M. Bernard Vera.
Adoption de l'article.
5. Communications du Gouvernement
6. Loi de finances pour 2011. – Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme Marie-France Beaufils.
Amendement n° I-133 rectifié de M. Alain Fouché. – MM. Philippe Dominati, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. – Retrait.
Adoption de l'article.
7. Souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat colombien
8. Modification de l'ordre du jour
9. Loi de finances pour 2011. – Suite de la discussion d'un projet de loi
Articles additionnels après l'article 5
Amendement n° I-223 de Mme Nicole Bricq. – MM. François Marc, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. – Rejet.
Amendement n° I-4 de la commission. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement rédigeant l’article.
Amendement n° I-224 de M. François Marc. – MM. François Marc, le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 6
Amendement n° I-226 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° I-5 de la commission. – M. le rapporteur général.
Amendement n° I-322 de M. Thierry Foucaud. – Mme Marie-France Beaufils.
MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement n° I-5 insérant un article additionnel, l’amendement no I-322 devenant sans objet.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° I-324 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le secrétaire d'État, Mme Marie-France Beaufils. – Rejet.
Amendement n° I-229 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° I-6 de la commission et sous-amendements nos I-455 du Gouvernement, I-447 de M. Jean-Jacques Jégou et I-463 de M. Roland du Luart. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Jean-Jacques Jégou, Philippe Dominati. – Retrait des sous-amendements nos I-447 et I-463 ; adoption du sous-amendement no I-455 et de l'amendement no I-6 modifié insérant un article additionnel.
Amendement n° I-230 de Mme Nicole Bricq. – MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° I-227 de M. François Rebsamen. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° I-321 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° I-320 rectifié de M. Thierry Foucaud. – Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Mme Nicole Bricq. – Rejet.
Amendement n° I-7 de la commission, sous-amendement no I-456 du Gouvernement et sous-amendements identiques nos I-448 de M. Jean-Jacques Jégou et I-462 de M. Roland du Luart. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Jean-Jacques Jégou, Philippe Dominati. – Retrait des sous-amendements nos I-448 et I-462 ; adoption du sous-amendement no I-456 et de l'amendement no I-7 modifié insérant un article additionnel.
Amendement n° I-446 rectifié de la commission. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-228 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° I-404 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Retrait.
Amendement no 460 du Gouvernement. – MM. le secrétaire d'État, le rapporteur général. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos I-231 à I-235, I-240 à I-242 de M. François Marc et I-237 à I-239 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet des onze amendements.
Amendement n° I-8 de la commission. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement supprimant l'article, les amendements nos I-43 et I-323 devenant sans objet.
Article additionnel après l'article 6 bis
Amendement n° I-453 rectifié de la commission. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Mmes Catherine Procaccia, Marie-France Beaufils, Nicole Bricq. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-9 de la commission. – MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement supprimant l'article, l’amendement no I-44 devenant sans objet.
Amendement n° I-49 rectifié de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. – Mme Colette Mélot, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État, Jean Arthuis, président de la commission des finances. – Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Amendement n° I-116 de Mme Esther Sittler. – Mme Esther Sittler, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'État. – Rejet.
Adoption de l'article.
Renvoi de la suite de la discussion.
10. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de Mme Catherine Tasca
vice-présidente
Secrétaires :
M. Jean-Pierre Godefroy,
M. Bernard Saugey.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2011 (projet n° 110, rapport n° 111).
Nous en sommes parvenus à la discussion des articles de la première partie.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
A. – Autorisation de perception des impôts et produits
Article 1er
I. – La perception des impôts, produits et revenus affectés à l’État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir continue d’être effectuée pendant l’année 2011 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi.
II. – Sous réserve de dispositions contraires, la présente loi s’applique :
1° À l’impôt sur le revenu dû au titre de 2010 et des années suivantes ;
2° À l’impôt dû par les sociétés sur les résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2010 ;
3° À compter du 1er janvier 2011 pour les autres dispositions fiscales.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
B. – Mesures fiscales
Article additionnel avant l'article 2
Mme la présidente. L'amendement n° I-356, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’avantage en impôt résultant des réductions et crédits d’impôt visés au second tome de l’annexe Voies et Moyens du présent projet de loi fait l’objet d’une diminution de 10 %.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 2
I. – Le I de l’article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les quatre premiers alinéas du 1 sont ainsi rédigés :
« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 5 963 € le taux de :
« – 5,50 % pour la fraction supérieure à 5 963 € et inférieure ou égale à 11 896 € ;
« – 14 % pour la fraction supérieure à 11 896 € et inférieure ou égale à 26 420 € ;
« – 30 % pour la fraction supérieure à 26 420 € et inférieure ou égale à 70 830 € ; »
1°bis (nouveau) Au dernier alinéa du 1, le montant : « 69 783 € » est remplacé par le montant : « 70 830 € » ;
2° Le 2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le montant : « 2 301 € » est remplacé par le montant : « 2 336 € » ;
b) Au deuxième alinéa, le montant : « 3 980 € » est remplacé par le montant : « 4 040 € » ;
c) Au troisième alinéa, le montant : « 884 € » est remplacé par le montant : « 897 € » ;
d) Au dernier alinéa, le montant : « 651 € » est remplacé par le montant : « 661 € » ;
3° Au 4, le montant : « 433 € » est remplacé par le montant : « 439 € ».
II. – À la première phrase du second alinéa de l’article 196 B du même code, le montant : « 5 753 € » est remplacé par le montant : « 5 698 € ».
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-314, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéas 6 et 7
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
« - 30% pour la fraction supérieure à 26 420 euros et inférieure ou égale à 44 910 euros ;
« - 40% pour la fraction supérieure à 44 910 euros et inférieure ou égale à 70 830 euros ;
« - 54% pour la tranche supérieure à 70 830 euros. » ;
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement a pour objet de poser à nouveau la question essentielle des tranches supérieures de l’impôt sur le revenu et de revenir sur le rendement même de cet impôt.
À bien y regarder, l’impôt sur le revenu est, au fond, assez mal défini.
L’un de ses défauts essentiels réside dans son assiette, par trop réduite, notamment au regard de ce qu’il en est pour la contribution sociale généralisée, qui s’apparente tout de même de plus en plus à une sorte d’impôt sur le revenu minimal.
Tout se passe, dans l’architecture de nos prélèvements obligatoires, comme si la CSG était devenue l’ancien impôt général sur le revenu, et l’impôt sur le revenu l’ancienne surtaxe progressive, soit un retour au système fiscal antérieur à la réforme de 1970.
Cette étroitesse de l’assiette de l’impôt relativise le débat que nous avons sur les taux d’imposition des tranches du barème. À nos yeux, la question du taux marginal est donc importante, sans être nécessairement déterminante.
Nous nous attachons, depuis de longues années, à défendre et à illustrer le principe constitutionnel en vertu duquel chaque contribuable contribue à la charge publique à proportion de ses facultés.
La « défense et illustration » de ce principe passe, à notre avis, par un double mouvement : d’abord, le renforcement de la progressivité de l’impôt par le biais du barème ; ensuite, le rééquilibrage du traitement de la « matière » fiscale pour chacune des catégories de revenus.
Cet amendement vise à favoriser le premier terme de ce mouvement en faisant en sorte que la progressivité du barème soit plus clairement affirmée.
Et ce alors que, depuis de longues années, on a surtout visé une baisse sensible du taux marginal, qui est passé de 65 % à 40 % et ne concerne, si je ne me trompe, que 1 % environ des contribuables de notre pays.
Et ce alors même que la floraison continue des niches fiscales a rendu ce taux quasiment inopérant, au point qu’une Mme Bettencourt, par exemple, est moins taxée qu’un cadre moyen ou un couple d’enseignants !
Pour notre part, nous estimons donc nécessaire de maintenir l’existence du taux marginal au niveau où nous le proposons.
C’est aussi pour des raisons évidentes de rendement de l’impôt que nous défendons cet amendement.
Si l’on se limite au seul cas des contribuables dont le revenu excède 70 830 euros par part – plus de 6 000 euros mensuels ! –, cette mesure serait susceptible de produire de 7 milliards à 10 milliards d’euros de recettes.
Ces recettes serviraient autant à prendre en charge les dépenses utiles qu’à réduire les déficits et, donc, à permettre, dans les années à venir, de réduire les impôts de tout le monde.
Mme la présidente. L'amendement n° I-357 rectifié, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 7
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
1° Au 1, les taux : « 5,5 % », « 14 % », « 30 % » et « 40 % » sont remplacés par les taux : « 3,5 % », « 8,5 % », « 18 % » et « 30 % ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-136, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
« - 40 % pour la fraction supérieure à 70 830 € et inférieure ou égale à 100 000 € ;
« - 50 % pour la fraction supérieure à 100 000 € et inférieure ou égale à 200 000 € ;
« - 60 % pour la fraction supérieure à 200 000 € et inférieure ou égale à 500 000 € ;
« - 70 % pour la fraction supérieure à 500 000 €. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous souhaitons, par cet amendement, rétablir une progressivité de l’impôt sur le revenu en tenant compte de l’existence des très hauts revenus.
Le nombre de contribuables percevant de très hauts revenus n’a cessé d’augmenter ces dernières années, sans que le mode de calcul de l’impôt ait fait l’objet de modifications.
Au contraire, de manière quasiment symétrique, plus le nombre de personnes percevant de très hauts revenus augmente, plus la tranche marginale recule ! Je vous rappelle qu’en quinze ans le taux marginal est passé de 57 % à 40 %, avec pour effet de creuser toujours plus les écarts, qui sont devenus aujourd’hui indécents.
II faut ajouter à cette diminution de la progressivité les niches fiscales, qui ont aggravé ces écarts.
Dans le cadre du budget alternatif que nous, écologistes, avons présenté il y a quelques semaines, nous avons prôné un mouvement d’intégration de l’ensemble des revenus, et pas seulement des revenus salariaux, dans le calcul de l’impôt sur le revenu.
C’est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement, de taxer les revenus supérieurs à 70 000 euros non plus à 40 %, mais à 50 %. Nous proposons également de créer deux tranches supplémentaires : 60 % sur la part des revenus compris entre 100 000 et 500 000 euros, 70 % au-delà.
Une telle évolution permettrait un gain de 2 milliards d’euros pour le budget de l’État : selon nous, écologistes, cet effort de redistribution des richesses est inévitable si l’on veut construire, comme nous le souhaitons, une fiscalité plus juste.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En abordant le débat sur la structure de nos prélèvements, je vais vous faire part, mes chers collègues, de considérations que j’aurai bien entendu l’occasion de reformuler au cours des jours qui viennent.
La volonté de la commission des finances est de renvoyer au projet de loi de finances rectificative qui nous est annoncé pour le premier semestre 2011 l’examen de tout ce qui a trait à l’articulation entre impôt sur le patrimoine et impôt sur le revenu. Il en va de même s’agissant de l’architecture des tranches, des taux, de la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Je suis de ceux qui pensent qu’on ne peut envisager une réforme globale comportant une forte simplification de l’impôt sur le patrimoine sans mettre en place, à titre compensatoire, une tranche marginale supplémentaire de l’impôt sur le revenu.
La proposition formulée à cet égard par Thierry Foucaud – qui est, à mon sens, très excessive – nous conduirait à trop segmenter les éléments du problème. Il faudra avoir, le moment venu, une approche globale.
L’amendement n° I-136 appelle des remarques de même nature.
La commission souhaite donc que ces amendements soient retirés quitte à être de nouveau déposés lors de l’indispensable débat de fond sur le devenir de notre fiscalité qui interviendra au cours du premier semestre 2011.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Le Gouvernement émet le même avis défavorable, pour les raisons développées par le rapporteur général.
Nous avons pris l’engagement – le Président de la République l’a rappelé en début de semaine – de mettre en œuvre une réforme fiscale d’envergure. Ce sera l’un des grands chantiers des dix-huit mois à venir, d’ici à la fin de cette législature.
Un rendez-vous est pris dans le calendrier parlementaire pour le dépôt d’un projet de loi de finances rectificative qui permettra d’engager un large débat. Cette réforme devra obéir à un double objectif : d’une part, être équitable et acceptée – cette notion d’acceptabilité de l’impôt comme contribution au financement des politiques publiques est importante ; d’autre part, être au service du développement économique.
C’est tout le sens du rapport demandé sur la convergence fiscale entre l’Allemagne et la France, s’agissant aussi bien de la fiscalité des particuliers que de celle des entreprises.
Je ne doute pas que, lors de la discussion du collectif budgétaire de cette fin d’année, vous formulerez de nouveau des propositions ayant le même objet. Il y sera naturellement apporté la même réponse : je vous donne rendez-vous au premier semestre de l’année prochaine.
Mme la présidente. L'amendement n° I-315, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 14
Remplacer le montant :
5698 €
par le montant :
5845 €
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement porte sur le plafonnement des effets du rattachement des enfants majeurs au foyer fiscal des parents.
La mesure peut être considérée comme mineure au regard de l’architecture générale de l’impôt sur le revenu, et singulièrement de son barème, puisqu’elle procède, comme d’autres, d’une indexation des différents seuils d’application de tel ou tel élément de l’impôt sur le revenu des personnes physiques.
Néanmoins, dans ce cas précis, après avoir constaté une révision globale à la hausse d’environ 1,5 point de l’ensemble des tranches de l’impôt sur le revenu, nous constatons une remise en cause des effets du rattachement, conduisant à une réduction du plafond retenu.
Chacun sait comment le mécanisme fonctionne : le revenu des parents est réduit forfaitairement, d’un montant aujourd’hui fixé à 5 753 euros, et leur imposition est calculée à concurrence de leur revenu après abattement.
On pouvait s’attendre à ce que ce seuil soit porté à 5 840 euros, et voici qu’il est ramené légèrement en dessous, à 5 698 euros.
Le rapporteur général de l’Assemblée nationale, M. Carrez, a expliqué que cela représentait les 40/41e du montant que le plafonnement aurait dû atteindre s’il n’y avait eu relèvement du taux d’imposition des plus hauts revenus.
Cependant, il ne faut pas confondre les choses : c’en est une de rattacher ses enfants majeurs, mariés ou non, à son foyer fiscal – cela se comprend d’ailleurs parfaitement, du point de vue de l’obligation alimentaire, par exemple, en des temps où la solidarité familiale joue de plus en plus pour préserver les jeunes de la précarité de l’existence découlant de la précarité de leur situation professionnelle ou des incertitudes de la période de formation initiale ; c’en est une autre d’être assujetti au taux supérieur de l’impôt sur le revenu, qui ne s’applique tout de même qu’à partir d’un revenu supérieur à 70 000 euros par part.
L’article 196 B du code général des impôts ne concerne que 5 800 ménages et ne représente que 5 millions d’euros de dépense fiscale, c’est-à-dire moins de 1 000 euros par ménage.
Le dispositif participe de la solidarité familiale et il est probable que, pour quelques ménages, il entraîne la non-imposition.
La mesure proposée par le rapporteur général de l’Assemblée nationale est donc mesquine et parfaitement inappropriée, puisqu’elle touche, là encore, une niche fiscale peu coûteuse et concernant plutôt les ménages aux revenus modestes. Aurait-on décidé que la réduction des déficits publics passe par une sorte de « grappillage » en règle de quelques fifrelins auprès des ménages les plus modestes…
Puisqu’il nous semble que la limitation de la dépense fiscale passe par d’autres voies, plus rentables et plus justes, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement me conduit à vous interroger, monsieur le ministre.
Je comprends que le chiffre de 5 698 euros résulte d’une coordination ente les articles 2 et 3, à la suite du vote intervenu à l’Assemblée nationale. La fixation de ce montant est liée au taux de la tranche d’imposition la plus élevée du barème, jusque-là établi à 40 %. Puisque ce taux est augmenté d’un point par l’article 3, pour atteindre 41 %, il serait nécessaire d’ajuster en conséquence le montant de l’abattement pour rattachement d’un enfant marié ou chargé de famille. Le résultat de cet ajustement donnerait donc le montant de 5 698 euros.
Ainsi, le montant prévu pour les revenus de 2010 serait inférieur à celui qui était applicable aux revenus de 2009. Pour ma part, j’y vois un effet pervers et je pense que les contribuables auront de la peine à le comprendre. Pouvez-vous nous donner une explication, monsieur le ministre ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Cet amendement permet effectivement de mettre en lumière un point important. Il appelle un avis défavorable de la part du Gouvernement parce que le montant de l’abattement pour rattachement d’un enfant marié ou chargé de famille doit bien être fixé à 5 698 euros et non à 5 845 euros.
Quelle en est la raison ?
Dans chaque projet de loi de finances, un article prévoit l’actualisation du barème applicable pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit d’indexer les tranches de revenus et les seuils associés sur la base de l’évolution de l’indice des prix hors tabac entre 2009 et 2010, soit 1,5 %.
Parallèlement, le projet de loi prévoit la création d’une contribution supplémentaire de 1 % sur les hauts revenus et sur les revenus du capital ; vous le savez, il en a été décidé ainsi dans le cadre de la réforme des retraites.
L’augmentation du taux d’imposition de la dernière tranche du barème nécessitait une correction du montant fixé au titre de l’abattement pour rattachement d’un enfant marié ou chargé de famille. Cette correction a été réalisée par l’amendement de M. Carrez adopté par l’Assemblée nationale.
Cet abattement est cependant fixé de telle sorte que sa déduction procure aux contribuables imposés au taux marginal le plus élevé un avantage en impôt au plus égal à celui résultant du quotient familial.
Ainsi, pour les revenus de 2009, l’avantage maximal en impôt procuré par une demi-part s’établit à 2 301 euros et le montant de l’abattement est fixé à 5 753 euros.
Dans le cadre de l'article d’actualisation du barème, il est proposé de procéder à une indexation générale de 1,5 %, sans modification du taux de la tranche d’imposition la plus élevée du barème, laquelle relève d’un autre article devant être examiné postérieurement.
Ainsi, dans cet article relatif au barème, il est proposé de fixer l’avantage maximal en impôt procuré par une demi-part de quotient familial à 2 336 euros. En conséquence, l’abattement pour rattachement d’un enfant marié ou chargé de famille est ajusté au montant de 5 840 euros.
Dès lors que l’article 3 augmente d’un point le taux de la tranche d’imposition la plus élevée du barème, il convient d’ajuster en conséquence le montant de l’abattement pour rattachement d’un enfant marié ou chargé de famille. Par conséquent, c’est à juste titre que l’abattement susvisé a été ajusté au montant de 5 698 euros.
Ce point n’est pas neutre. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité prendre le temps nécessaire pour vous donner les explications que vous aviez demandées.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est d’une logique lumineuse car tout à fait fiscale, monsieur le ministre ! (Sourires.)
Si je comprends bien, on augmente légèrement, et c’est une bonne chose, nous y avons souscrit, le taux de la tranche marginale, qui passe de 40 % à 41%. Cette mesure va frapper les contribuables aux ressources correspondantes.
La conséquence, nous dites-vous, monsieur le ministre, est une baisse, en euros courants, de l’abattement accordé pour rattachement d’un enfant majeur marié ou chargé de famille, quels que soient les revenus du foyer fiscal. Si, pour les revenus de 2009, cet abattement était de 5 753 euros, pour les revenus de 2010, il devrait diminuer et s’établir à 5 698 euros.
J’avoue ne pas comprendre. Si j’ai bien suivi le cheminement des calculs, j’ai de la peine à y trouver de la logique. En effet, j’ai peine à comprendre pourquoi l’augmentation d’un point de la tranche d’imposition supérieure fait baisser l’abattement pour rattachement d’un enfant majeur marié ou attaché à la famille, et cela en euros courants. Je suis surpris de cet effet secondaire.
Considérant cette disposition comme incompréhensible à cette heure, je me demande si nous ne devrions pas la laisser en débat, dans l’attente d’une éventuelle seconde délibération ou de la commission mixte paritaire, afin de mieux l’appréhender.
Je recommande donc à nos collègues, non pas de voter l’amendement du groupe CRC-SPG, mais d’effectuer un vote technique de façon que la question reste en suspens.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. François Baroin, ministre. Monsieur le rapporteur général, je vous ai présenté les éléments techniques d’un effet mécanique résultant d’une mesure fiscale. Si vous avez du mal à comprendre, alors que vous êtes l’un des meilleurs spécialistes de ces matières,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je suis très mauvais en arithmétique !
M. François Baroin, ministre. … c’est dire si le sujet est confus et compliqué. Je ne pourrai vous apporter d’élément supplémentaire, sinon que le coût de la mesure est de 4 millions d’euros.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Je propose que nous votions cet amendement, pour revenir ultérieurement sur le sujet. Je crois que les arguments du rapporteur général sont de bon sens et que le ministre est un peu gêné face à cette situation.
J’en appelle donc à la sagesse de notre assemblée.
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Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire d’Indonésie
Mme la présidente. Mes chers collègues, j’ai le très grand plaisir, au nom du Sénat tout entier, de saluer la présence, dans notre tribune officielle, de M. Irman Gusman, président de la Chambre haute du Parlement indonésien. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.) Il est accompagné par notre collègue Catherine Procaccia, présidente du groupe d’amitié France-Indonésie.
Créée en 2003, la deuxième chambre du Parlement indonésien rassemble des représentants des différentes régions qui composent l’archipel.
Nous sommes particulièrement sensibles à l’intérêt et à la sympathie que le président Gusman porte à notre institution.
Au nom du Sénat de la République, je forme des vœux pour que son séjour en France contribue à renforcer les liens d’amitié entre nos deux pays et je lui souhaite, ainsi qu’à sa délégation, la plus cordiale bienvenue. (Applaudissements.)
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Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2011.
Demande de réserve
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Madame la présidente, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve des articles 14, additionnels après l’article 14, 14 bis, 15, additionnels après l’article 15, 16 et additionnels après l’article 16 et 16 bis jusqu’à l’après-midi du lundi 22 novembre prochain.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La commission est favorable à cette demande de réserve et s’est préparée à examiner les amendements concernés, lundi après-midi, en présence de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mme la présidente. Je consulte le Sénat sur la demande de réserve formulée par le Gouvernement.
Il n’y a pas d’opposition ?...
La réserve est ordonnée.
Articles additionnels après l’article 2
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-216 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° I-362 est présenté par MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° À l’article 80 quinquies, les mots : « de la fraction des indemnités allouées aux victimes d’accidents du travail exonérée en application du 8° de l’article 81 et des indemnités » sont remplacés par les mots : « des indemnités qui, mentionnées au 8° de l’article 81, sont allouées aux victimes d’accidents du travail et de celles ».
2° Au 8° de l’article 81, les mots : « à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les » sont supprimés.
II. - Le I s’applique pour les rentes versées au titre de l’année 2010.
III. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Sergent, pour présenter l’amendement n° I-216.
M. Michel Sergent. La loi de finances pour 2010 a instauré, sur l’initiative de la majorité et avec le soutien du Gouvernement, la fiscalisation des indemnités journalières des accidents du travail à partir de 2011.
Cette mesure est totalement inacceptable et même choquante. En effet, utiliser le mot « équité », comme le fait la majorité, est une provocation, sachant qu’il existe dans notre pays des niches fiscales représentant près de 75 milliards d’euros en 2010 et, après le léger coup de rabot annoncé, encore 67 milliards ou 68 milliards d’euros en 2011. Et ce ne sont pas les 125 millions d’euros à attendre de cette mesure qui vont permettre de colmater la brèche constatée dans les finances publiques !
En revanche, c’est un signal extrêmement dur qui est envoyé à toutes celles et à tous ceux qui sont qualifiés par la terminologie légale de « victimes d’accident du travail ». Maintenir ce dispositif en l’état, c’est, en réalité, considérer que ce qui arrive à ces personnes est normal, voire banal.
Il convient de rappeler que le revenu de substitution est de l’ordre du 60 % du salaire. Soumettre au surplus cette fraction du salaire à fiscalisation n’est pas admissible.
Nos comptes sociaux sont en déficit de près de 25 milliards d’euros en 2010, ceux de l’État de 150 milliards d’euros. Or les dispositions de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, la fameuse loi TEPA, qui entraînent des pertes de recettes fiscales représentant une dizaine de milliards d’euros sont maintenues, alors qu’elles concernent des gens qui vivent de leur rentes, qui ne travaillent pas, qui ne risquent donc certainement pas, eux, d’être victimes d’un accident du travail !
À titre d’exemple, en 2007 – ce sont les derniers chiffres précis disponibles, mais ils ne doivent guère varier pour les années suivantes –, 622 salariés ont péri dans un accident du travail, on a dénombré 720 150 accidents du travail avec arrêt, plus de 35 millions de journées d’indemnisation, et un peu plus de 46 000 accidents ont entraîné une incapacité permanente.
Il s’agit donc bien de victimes, que l’on veut encore doublement victimiser avec la fiscalisation.
Par ailleurs, le Conseil économique, social et environnemental, consulté l’année dernière par le président de l’Assemblée nationale, s’est montré défavorable à cette mesure, aux effets souvent dramatiques : au-delà même des souffrances physiques endurées, les victimes perdent une partie de leurs revenus.
Pour toutes ces raisons, au nom de la justice fiscale et sociale, il convient d’abroger cette mesure inique.
Mme la présidente. L’amendement n° I-362 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° I-216 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’est pas favorable à cet amendement, car son adoption nous conduirait à revenir sur plusieurs votes successifs du Sénat. Avant que ne soit trouvé ce qui constitue à mes yeux un juste équilibre sur ce sujet, cette question avait en effet été mise sur la table au cours de plusieurs discussions budgétaires, notamment sur l’initiative de Jean-Jacques Jégou.
Il convient de faire un triple rappel.
Tout d’abord, en vertu de nos votes de l’an dernier, les indemnités journalières allouées aux personnes atteintes d’une affection « longue et coûteuse » demeurent exonérées d’impôt sur le revenu.
Ensuite, le dispositif introduit l’année dernière ne concerne pas les prestations et rentes viagères versées aux victimes d’accidents du travail, qui restent également exclues de l’assiette de l’impôt sur le revenu.
Enfin, ce dispositif permet de ne fiscaliser les indemnités journalières « accident du travail » qu’à hauteur de 50 % de leur montant.
Selon la commission, il s’agit d’un dispositif équilibré et équitable. Il faut le maintenir et, par voie de conséquence, rejeter l’amendement n° I-216.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Notre amendement se justifie, d’abord, bien sûr, par un souci d’équité fiscale et de justice sociale.
La majorité a effectivement bataillé plusieurs années de suite pour offrir au Gouvernement l’occasion – et celui-ci, ravi d’une telle aubaine en période de disette budgétaire, s’en est évidemment saisi – de racler quelques fonds de tiroirs, ce qui est tout de même la caractéristique de ce projet de loi de finances.
Au-delà du fait qu’elle est injuste, la disposition votée l’année dernière a véritablement un côté absurde : comme si on faisait exprès d’être victime d’un accident du travail et de se trouver pénalisé !
C'est la raison pour laquelle nous défendons résolument cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-215, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 81 quater du code général des impôts est abrogé.
II. - Les articles L. 241-17 et L. 241-18 du code de la sécurité sociale sont abrogés.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Alors que les destructions d’emplois se multiplient et que le chômage repart fortement à la hausse, notre pays présente la particularité d’être le seul au monde à avoir institué un système de destruction d’emplois financé par des fonds publics.
En effet, le dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires instauré par la loi TEPA, que ne cessent de dénoncer depuis 2007 les membres de notre groupe, conduit à rendre, pour les entreprises, les embauches plus chères que le recours aux heures supplémentaires. En période de faible activité, c’est un frein à l’embauche ; en période de récession, c’est une véritable machine à créer des chômeurs.
De plus, ce mécanisme a démontré son inefficacité totale non seulement en termes d’emploi, puisque, je le répète, il freine l’embauche et favorise le chômage, mais aussi en termes d’augmentation du pouvoir d’achat. Dans la période de crise que nous traversons, ce sont les Français les plus modestes et, parmi eux, les intérimaires et les travailleurs employés en CDD qui sont les premiers à en faire les frais.
Au regard du coût considérable qu’il représente – plus de 4 milliards d’euros par an –, ce système est à nos yeux intenable et très dangereux. Il revient à priver l’ensemble des Français d’autant de moyens qui pourraient être utilisés pour soutenir vraiment l’emploi et le pouvoir d’achat.
Nous proposons donc de supprimer ce dispositif inique. Nous voulons bien comprendre l’argument qui nous est servi pour refuser certains de nos amendements sur la fiscalité, selon lequel une partie des dispositions fiscales votées dans la loi TEPA pourrait faire l’objet d’un réexamen dans le cadre de la réflexion globale annoncée pour l’année prochaine. Toutefois, en l’espèce, il n’y a aucune raison objective justifiant qu’on nous réponde une fois de plus : « On verra plus tard ! »
Aujourd'hui, nous constatons une montée très forte du chômage. C’est au regard de cet indicateur qu’il nous faut être très vigilants pour favoriser tout ce qui peut permettre à ceux de nos concitoyens qui n’ont pas d’emploi d’en trouver un.
La suppression d’un tel dispositif serait véritablement un ballon d’oxygène. Voilà pourquoi cet amendement nous paraît si important dans le contexte de crise que nous vivons aujourd'hui.
Mme la présidente. L'amendement n° I-138, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 81 quater du code général des impôts est abrogé.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Par cet amendement, nous, écologistes, souhaitons abroger les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires. Cette proposition participe d’une volonté de suppression des niches socialement inefficaces ; elle pourrait, au total, rapporter plus de 15 milliards d’euros à l’État.
« Travailler plus pour gagner plus » : cette promesse a un coût. Pour l’État, c’est 4 milliards d’euros par an ; pour les travailleurs, c’est l’augmentation du chômage.
Au slogan sarkozyste, nous préférons : « Travailler tous et travailler mieux ». Nous entendons mieux partager le temps de travail plutôt que d’augmenter celui de ceux qui ont déjà un emploi.
Nous avons d’emblée combattu cette disposition introduite par la loi TEPA, car elle est absurde : le seul cas où les heures supplémentaires pourraient être considérées comme intéressantes serait, à la limite, celui des périodes de forte expansion ; encore faudrait-il, même dans ce cas, qu’il n’y ait pas de chômage ! Or nous avons malheureusement connu des périodes de forte croissance où le nombre des demandeurs d’emploi restait très élevé.
Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas du tout dans une telle situation aujourd’hui. C’est pourquoi il faut absolument supprimer ce dispositif.
Les 4 milliards d’euros ainsi économisés pourraient être affectés, par exemple, au financement de la protection sociale. On sait en effet combien votre réforme des retraites est déséquilibrée financièrement. Mais on pourrait trouver bien d’autres moyens d’utiliser à bon escient une telle somme !
Être écologiste, c’est utiliser au mieux les ressources, les répartir justement et les investir utilement. C’est s’assurer que les dépenses de l’État ont bien une utilité sociale et environnementale. C’est soutenir la conversion écologique de la société. Voilà pourquoi il faut, dès à présent, remettre à plat les comptes publics.
Mes chers collègues, je vous invite donc à voter cet amendement, dont l’adoption ferait économiser, je le répète, 4 milliards d’euros par an à l’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous revenons sur un sujet bien connu. Pour être bref, je me bornerai à dire que, du point de vue de la commission, par rapport aux années précédentes, aucun nouvel élément ne peut être versé à l’analyse.
Les chiffres qui ont été cités sont complètement ambivalents. La mesure est chère, oui, mais c’est la preuve qu’il y a beaucoup d’heures supplémentaires comptabilisées et, partant, que la mesure est efficace ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Sergent. Il y a surtout beaucoup de chômage !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. D’un côté, je peux émettre un regret, de l’autre, je ne peux que me réjouir.
De même, s’il y a autant d’heures supplémentaires, cela veut bien dire qu’un certain nombre de salariés modestes voient leur rémunération s’améliorer, et donc aussi leur pouvoir d'achat. Mais la répartition des gains de pouvoir d'achat ne se fait-elle pas, dans la machine économique, au détriment de celles et de ceux qui ne bénéficient pas d’un CDI et qui se trouvent dans les situations de plus grande précarité que M. Marc et Mme Boumediene-Thiery ont décrites ?
Sincèrement, je ne pense pas qu’il soit possible de trouver une vérité statistique en pareille matière.
Cela étant, nous sommes nombreux à être convaincus que la mesure votée en 2007 était indispensable, dès lors qu’il n’apparaissait pas envisageable de revenir de manière frontale sur le temps de travail. C’est l’arbitrage qui a été fait à l’époque. Il convient de l’assumer, car il a assurément des effets bénéfiques.
Il n'y a pas lieu de considérer que la situation est, en cette fin de l’année 2010, différente de ce qu’elle était à la fin de 2009.
C’est en vertu de l'ensemble de ces éléments que la commission, maintenant la position qu’elle a constamment adoptée sur ce sujet, souhaite le rejet de ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur général, nous ne nous situons pas par rapport à l’année dernière, mais par rapport à la mesure prise en 2007, qui coûte cher aux finances publiques et dont l’efficience n’est pas démontrée.
Je sais que vous n’aimez pas le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires d’octobre dernier.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je ne l’aime ni ne le déteste !
Mme Nicole Bricq. Je le citerai néanmoins : « Bien qu’il faille tenir compte du contexte économique dans lequel [le dispositif d’exonération] a été mis en œuvre, son efficience n’a pas encore été établie ».
Le Conseil des prélèvements obligatoires propose d’aller à la suppression totale ou bien d’adapter la mesure pour qu’elle cible les revenus les plus modestes. Or vous ne voulez pas bouger ! On comprend qu’il s’agit pour vous d’un totem qui découle de la promesse électorale du candidat Sarkozy, le fameux slogan « Travailler plus pour gagner plus ! », un slogan qui a fait long feu...
Mon collègue François Marc l’a bien expliqué : au moment où le taux de chômage se situe à près de 10 %, un taux qui a malheureusement peu de chances de baisser en 2011, on constate un effet de substitution. Et il n’y a rien là d’« idéologique ». D’ailleurs, Mme Boumediene-Thiery l’a reconnu : dans une période où l’on serait proche du plein emploi, cette exonération pourrait éventuellement avoir un intérêt. Mais nous ne sommes pas du tout dans cette phase du cycle et, du coup, cette mesure tourne à la catastrophe !
Il faut toujours mettre en regard les coûts et les avantages. Selon vous, monsieur le rapporteur général, si ça coûte cher, c’est qu’il y a plus d’activité. Mais, même dans cette hypothèse, il faut prendre en considération le choc que produit ce dispositif sur les finances publiques : 4,1 milliards d’euros ! Au demeurant, si l’on veut procéder à une véritable évaluation de son coût en termes budgétaires, à ce choc direct il faut ajouter sa contrepartie, à savoir les hausses d’impôts et les réductions de dépenses qui sont proposées dans ce projet de lois de finances.
En conséquence, si l’on fait le bilan des avantages et des inconvénients, il apparaît non seulement que cette mesure est catastrophique dans la phase du cycle où nous nous trouvons, non seulement qu’elle n’a pas l’efficacité attendue, mais de surcroît qu’elle provoque un manque à gagner qui vous conduit à prendre d’autres mesures aussi douloureuses qu’injustes.
Hélas, ce dispositif reste pour vous un tabou, ou un totem, c’est selon. C’est pourquoi nous proposons, cette année encore, de le supprimer, et cette suppression nous semble encore plus justifiée en 2010 qu’en 2009.
Mme la présidente. L'amendement n° I-358, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la première phrase de l’article 199 quindecies du code général des impôts, les mots : « d’une réduction d’impôt égale » sont remplacés par les mots : « d’un crédit d’impôt égal ».
II. – Cette disposition n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par l’institution d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-217, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 3 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Aux premier et deuxième alinéas, et aux première et avant-dernière phrases du dernier alinéa, le montant : « 12 000 euros » est remplacé par le montant : « 7 000 euros ».
2° Au deuxième alinéa, le montant : « 15 000 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros ».
3° À l'avant-dernier alinéa, le montant : « 20 000 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros ».
II. - Ces dispositions sont applicables pour les revenus de l'année 2010.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Le 15 septembre, avant la présentation du projet de loi de finances pour 2011, Mme la ministre de l’économie et des finances déclarait, à l’occasion d’un entretien accordé à un journal du matin, que le Gouvernement s’attaquait aux « niches galopantes ».
Il s’agit ici du régime des emplois à domicile, que, dans un premier temps, le Gouvernement avait pensé modifier.
Des études l’ont prouvé, ces emplois à domicile profitent essentiellement aux ménages les plus aisés.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et les salariés concernés, sont-ils très aisés ?
Mme Nicole Bricq. Je parle des ménages employeurs, qui bénéficient de l’avantage fiscal !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’important, c’est que cela permet à des gens de travailler !
Mme Nicole Bricq. Je vais y venir. Pour l’instant, je présente l’amendement du groupe socialiste, qui n’est d’ailleurs pas une surprise pour vous puisque nous l’avions déjà déposé.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est chaque année la même chose !
Mme Nicole Bricq. Nous avons défendu pendant des années, sans succès, la proposition qui consistait à transformer la réduction d’impôt en crédit d’impôt. C’est ce qu’ont fini par mettre en place le Gouvernement et sa majorité.
Le « galop » de la niche est dû à cette majorité et aux gouvernements qu’elle a soutenus. Initialement, avait été fixé un plafond s’élevant à 3 811 euros. En 1994, il est passé à 3 964 euros. En 1995, il a fait un bond spectaculaire, passant à 13 720 euros ! En 1998, alors que nous étions aux responsabilités, nous l’avons réduit de moitié, en revenant à un montant raisonnable, soit 6 860 euros. En 2005, la majorité a fixé un taux de déduction proche de celui qui avait été atteint en 1995, avec un plafond à 12 000 euros, mais qui peut atteindre 15 000 euros – ce n’est tout de même pas négligeable ! – compte tenu des diverses majorations.
Par cet amendement, nous proposons, non pas d’abroger la mesure – c’est nous qui, jadis, l’avions mise en place ! –, mais d’établir un plafond à un niveau tel qu’elle soit davantage favorable aux familles plus modestes.
Nous considérons que, par ailleurs, il faut accroître l’effort concernant les crèches et tout le système de garde des enfants, qui reste encore insuffisant. Nous, nous sommes pour un service public de la petite enfance : on ne peut donc pas nous reprocher de ne pas chercher à aider les familles ! Nous voulons un véritable service public local et national de la petite enfance.
Pour ce qui est des emplois à domicile, je le répète, nous considérons que le « galop » de cet avantage concerne essentiellement les familles aisées et nous proposons, en baissant le plafond, qu’il concerne d’abord les familles les plus modestes.
Mme la présidente. L'amendement n° I-363, présenté par MM. Collin, Alfonsi, Barbier, Baylet, de Montesquiou et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Aux premier et deuxième alinéas et aux première et avant-dernière phrases du dernier alinéa du 3, le nombre : « 12 000 » est remplacé par le nombre : « 10 000 »;
2° Le a) du 4 est complété par les mots : « ou qui bénéficie d’une pension de retraite » ;
3° Après le mot : « commune », la fin du b) du 4 est ainsi rédigée : « dont l’une d’entre elles satisfait à l’une ou l’autre conditions posée au a) ».
II. – La disposition mentionnée au I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – Les pertes de recettes pour l’État sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Detcheverry.
M. Denis Detcheverry. Afin d’encourager l’emploi de personnes au titre de l’aide à domicile par toutes les catégories sociales, quels que soient leurs revenus, le code général des impôts met en œuvre deux dispositifs distincts.
En premier lieu, l’article 199 sexdecies de ce code dispose que les sommes versées par un particulier à un salarié ou à une association agréée dans le cadre des services à la personne donnent droit, dans certaines limites, à un abattement fiscal pour les contribuables redevables de l’imposition sur le revenu des personnes physiques ou à un crédit d’impôt pour ceux qui en sont dispensés.
En second lieu, le dispositif de crédit d’impôt s’applique aux couples mariés dont les deux membres exercent une activité professionnelle ou sont inscrits sur une liste de demandeurs d’emplois, excluant ainsi les couples dont un seul des membres exerce une activité professionnelle ou est inscrit sur la liste précitée, alors qu’ils ont également besoin de ces services à la personne.
Or, aux termes de l’alinéa 4 de l’article 199 sexdecies, le dispositif de crédit d’impôt s’applique à tous, sauf aux personnes retraitées, qui ont pourtant grand besoin de services à la personne.
En outre, ce dispositif instaure une inégalité entre, d’une part, les retraités qui, payant des impôts, bénéficient d’un abattement fiscal et voient donc le coût du service à la personne à domicile réduit et, d’autre part, les retraités qui ne payent pas d’impôts et sur lesquels pèse entièrement le coût du service à la personne à domicile.
Notre amendement a donc pour objet de fixer les mêmes règles pour tous. La disposition serait ainsi beaucoup plus favorable à l’emploi. Il ne faut pas perdre de vue, en effet, que le but du dispositif est de favoriser l’emploi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ces deux amendements portent sur le même sujet mais ne procèdent pas exactement des mêmes intentions.
Madame Bricq, le régime des emplois à domicile devra subir en 2011 la suppression de l’abattement de 15 points de cotisations patronales. (Mme Nicole Bricq en convient.) Cela représente, aux yeux de beaucoup d’entre nous, un lourd effort, allant peut-être au-delà de ce qu’ils auraient souhaité. C’est une raison de plus pour ne pas dégrader le régime fiscal des emplois à domicile et pour ne pas toucher à la réduction d’impôt existante.
Pour cette raison, la commission est défavorable à votre amendement.
L’amendement du groupe RDSE, qui a été présenté par M. le sénateur de Saint-Pierre-et-Miquelon, Denis Detcheverry, vise à transformer en crédit d’impôt la réduction d’impôt accordée aux retraités au titre de l’emploi de salariés à domicile.
Il est difficile, techniquement, de transformer dans la loi et en procédant par l’initiative parlementaire, une réduction d’impôt en crédit d’impôt. En effet, les règles de recevabilité financière, au titre de l’article 40, sont impératives et rendent cet exercice quasiment impossible. C’est pourquoi votre amendement, monsieur Detcheverry, prévoit que l’extension de l’avantage fiscal souhaitée ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû. De ce fait, le dispositif ne peut pas vraiment satisfaire votre objet – mais je ne crois pas que vous puissiez rédiger l’amendement de façon très différente – puisque vous souhaiteriez que la partie de la réduction qui excède l’impôt soit remboursée au titre du crédit d’impôt.
Votre amendement a aussi valeur de questionnement et il serait utile que le Gouvernement s’exprime à son sujet. Quant à la commission, pour des raisons essentiellement techniques, elle en demande le retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos I-217 et I-363.
Je signale que les mesures proposées dans l’amendement n° I-217 représentent 154 millions d’euros et, pour répondre à M. le rapporteur général, celles que prévoit l’amendement de M. Detcheverry, 959 millions d’euros.
Mme la présidente. L'amendement n° I-364, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le 1 ter de l'article 200, il est inséré un 1 quater ainsi rédigé :
« 1 quater Lorsqu'un logement est loué à un organisme sans but lucratif en vue de sa sous-location à des personnes mentionnées au II de l'article L. 301-1 du code de la construction et de l'habitation, l'abandon total ou partiel du loyer par le propriétaire correspond à un abandon exprès de revenus ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue au 1. L'abandon de loyer est caractérisé soit par la fixation explicite d'un loyer inférieur d'un minimum de 30 % au loyer de marché, soit par une renonciation expresse, avec un minimum semblable, à la perception de tout ou partie du loyer prévu par le bail. »
2° Le 2 de l'article 200-0 A est complété par un c) ainsi rédigé :
« c) La réduction d'impôt prévu au 1 quater de l'article 200. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos I-213 et I-360 sont identiques.
L'amendement n° I-213 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-360 est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa de l'article 200-0 A du code général des impôts, après les mots : « supérieure à », la fin de l'alinéa est ainsi rédigée : « un montant de 15 000 euros. »
II. - Cette disposition s'applique aux revenus imposés au titre de l'année 2010.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° I-213.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement concerne également ces niches qui mitent notre fiscalité, mais il s’agit ici du plafond global de la réduction d’impôt sur le revenu procurée par les divers dispositifs d’exonération fiscale, ce plafond par lequel on prétend faire passer un rabot, auquel certains préféreraient une lime à ongles…
Dans la loi de finances pour 2010, les sénateurs, sur votre initiative, monsieur le rapporteur général, ont abaissé le plafonnement de 25 000 euros à 20 000 euros, auxquels s’ajoutent 8 % du revenu imposable. Le Gouvernement avait éprouvé quelques difficultés à accepter ce montage, mais, finalement, il avait fait montre de bonne volonté et s’était rendu aux arguments des sénateurs de la majorité, que nous avions du reste soutenus.
Toutefois, nous voudrions diminuer encore le niveau de ce plafonnement global. En effet, quand ce dernier avait été instauré, le Gouvernement et sa majorité avaient estimé qu’il représentait un gain budgétaire de 200 millions d'euros. Ce montant n’a jamais véritablement été confirmé, mais peut-être, monsieur le ministre, nous direz-vous quel est son effet réel.
En tout cas, nous considérons que l’on peut obtenir encore davantage de ressources fiscales en fixant à 15 000 euros le plafond et en se dispensant d’ajouter à ce montant une fraction du revenu imposable.
Une telle mesure aurait pour vertu de toucher, si je puis m’exprimer ainsi, les 10 000 plus gros contribuables bénéficiaires des niches fiscales. L’intérêt de notre proposition réside donc non pas seulement dans son rendement budgétaire, mais aussi et surtout dans sa capacité à limiter plus fortement et justement les effets d’aubaine liés à toutes les niches fiscales existantes. En effet, le contribuable aurait à arbitrer entre différents dispositifs d’incitation fiscale en fonction de ses revenus et de ses objectifs propres d’allocation. Cette solution n’est donc nullement attentatoire à la liberté de décision des individus.
Elle permettrait en outre de réduire rapidement et sensiblement le coût des dispositifs fiscaux dérogatoires, qui est passé, je le rappelle, de 50 milliards d'euros en 2002 à 75 milliards d'euros en 2010, et même à plus de 100 milliards d'euros si l’on considère globalement l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés.
La réduction maximale de l’impôt obtenue grâce à la combinaison de plusieurs dispositifs serait ainsi de 15 000 euros, les divers plafonds applicables à chaque réduction ou crédit d’impôt restant bien sûr applicables.
Pour nous, mes chers collègues, il s'agit d’une mesure tout à fait essentielle.
Mme la présidente. L'amendement n° I-360 n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-317 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le montant : « 20 000 € », la fin du premier alinéa de l'article 200-0 A du code général des impôts est supprimée.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Si l’on s’en tient aux seules réductions et crédits d’impôt sur le revenu prévues par notre législation, on observe que le coût de l’ensemble des dispositifs existants est légèrement supérieur à 14 milliards d’euros.
Nous avons souligné que l’État renonçait à des sommes considérables pour alléger l’impôt sur le revenu. Si l’on se réfère à l’évaluation des voies et moyens, on se situe aux alentours de 41 milliards à 42 milliards d’euros de dépenses fiscales, qui se répartissent en trois tiers : les réductions et crédits ; les mesures de caractère général ; les dispositions spécifiques à certains revenus catégoriels, singulièrement ceux qui sont issus du capital, du patrimoine et de l’activité non salariée.
Ainsi, le coût de la seule taxation à taux particulier des plus-values serait compris entre 1,5 et 2 milliards d’euros, ce qui vaut bien des mesures de réduction d’imposition.
Notre position de fond sur la dépense fiscale est la suivante : il faut la réduire parce qu’elle nuit profondément au principe d’égalité devant l’impôt et il faut la recycler, de manière à dégager des marges qui serviraient à la fois à réduire le déficit et à repenser la dépense publique, en adéquation avec la réalité des besoins.
Autre paradoxe : on n’a toujours pas mis en place, avec l’allocation personnalisée d’autonomie, l’outil de lutte collective contre les effets de la dépendance des personnes âgées, mais on laisse croître la dépense fiscale liée aux emplois à domicile, au point de définir, cette année, des mesures que la plupart des acteurs du secteur ne comprennent pas.
De même, on réduit les crédits de la recherche, on précarise les conditions de travail des chercheurs eux-mêmes et on laisse perdurer un crédit d’impôt recherche qui se transforme en outil d’optimisation fiscale, les premiers bénéficiaires en étant les holdings de tête de nos grands groupes !
Les choix budgétaires et fiscaux induits par la dépense fiscale doivent donc être révisés de manière intégrale, objective et critique, d’autant que l’on ne s’attache qu’à l’impôt sur le revenu, ce qui permet de masquer le reste.
À force d’éclairer un seul point du débat, on peut laisser dans l’ombre tous les autres, comme la mise en pièces de l’impôt de solidarité sur la fortune, dont le rendement a été réduit d’au moins 20 %, ou les allégements de l’impôt sur les sociétés, qui dénaturent cette imposition en en réduisant le rendement de plus de 100 milliards d’euros si l’on en croit le Conseil des prélèvements obligatoires.
Une réduction de la dépense fiscale encore plus nette que celle qui figure dans le présent projet de loi de finances est donc l’une des pistes que nous devons suivre pour financer avec plus de souplesse encore le plan de relance économique dont nous avons besoin.
Un, trois ou cinq milliards d’euros de dépenses fiscales en moins, c’est autant de nouveaux titres d’emprunts publics que l’État n’aura pas à émettre. Or diminuer aujourd'hui notre dette, c’est le meilleur moyen de baisser les impôts de demain.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Chers collègues, les propositions concernant le plafonnement global des niches doivent-elles être débattues en première ou en seconde partie de la loi de finances ?
Je comprends bien que les propositions qui nous sont soumises auraient un impact sur les revenus de 2010, et c’est pour cette raison que vous les présentez lors de la discussion de la première partie. Je ne vous cache pas que cela me pose problème, car changer la règle du jeu pour les contribuables alors que l’année 2010 est presque terminée, c’est leur faire subir un traitement qu’ils ne méritent peut-être pas.
Quant à s’interroger sur le niveau de ces plafonds en valeur absolue et en pourcentage pour les revenus de l’année 2011, pourquoi pas ? Peut-être le ferons-nous ensemble, chers collègues, mais lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances.
En vertu de ces éléments d’analyse et de ces interrogations, je vous serai tout à fait obligé de bien vouloir retirer ces amendements, pour que nous réexaminions, le cas échéant, des dispositions similaires lorsque nous aborderons l’article 58 bis, dans la seconde partie du projet de loi de finances.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° I-213.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste n’a pas cherché ici à créer un effet de surprise puisque nous avions déjà déposé un amendement similaire l’année dernière. Nous faisons notre travail d’opposition.
Je sais que M. le rapporteur général a des idées sur cette question et que les députés en ont eu également lorsqu’ils ont examiné la seconde partie du projet de loi de finances. De telles dispositions pourraient donc tout à fait être adoptées. Cela étant, nous pouvons les laisser de côté et y revenir lors de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances, au vu des propositions que vous nous ferez alors, monsieur le rapporteur général, et même si nous sommes déjà quelque peu éclairés par le débat qui a eu lieu à l’Assemblée nationale.
Nous déposerons alors de nouveau un amendement et j'espère que nous aurons une discussion fructueuse sur ce sujet.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-317 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-210 est présenté par M. Massion, Mmes Demontès et Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-359 est présenté par MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le premier alinéa du 1 de l’article 200 quater C du code général des impôts est complété par les mots : « ou de logements achevés avant l’approbation du plan de prévention des risques technologiques qu’ils louent ou s’engagent à louer pendant une durée de cinq ans à des personnes, autres que leur conjoint ou un membre de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. »
II. – Cette disposition n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° I-210.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement, dont mon collègue Marc Massion a pris l’initiative, vise à rétablir l’égalité entre les propriétaires, qu’ils soient résidents ou bailleurs, de logements situés dans les zones de prévention des risques technologiques, là où se trouvent les établissements industriels à risque fort, c'est-à-dire les établissements classés « Seveso ».
Ces zones se situent souvent dans les vallées industrielles, par exemple le long de la Seine, notamment en aval de Paris – sachant que, en amont, bien des industries ont malheureusement disparu –, ou encore dans le sillon rhodanien.
La loi Grenelle 2 a instauré un crédit d’impôt pour les travaux obligatoires de sécurité, afin de renforcer les habitations situées au sein du périmètre d’un plan de prévention des risques technologiques. Or cette mesure ne bénéficie qu’aux propriétaires résidents et ignore les bailleurs sociaux. Il y a là une inégalité véritablement aberrante !
Nous proposons donc que ce dispositif, qui a été adopté par la majorité sénatoriale, profite aussi aux bailleurs sociaux. En effet, nous ne voyons pas pourquoi ceux-ci seraient pénalisés par rapport aux autres, sachant qu’ils subissent déjà le prélèvement HLM, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir.
J’ajoute que ce cas pose un problème général, monsieur le ministre : qu’appelle-t-on une niche fiscale ?
Mme Nicole Bricq. Comme je l’ai souligné lors de la discussion générale, vous avez de cette notion une vision sélective et arbitraire. En fait, c’est le ministre du budget qui décide si un dispositif constitue ou non une niche.
J’ai été très surprise de constater – même si, à la limite, je peux comprendre le raisonnement suivi – que certaines dispositions de l’article 200 quater C du code général des impôts, introduites par la loi Grenelle 2, avaient été supprimées lors de l’examen de la seconde partie du PLF, sur l’initiative du rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale et au motif qu’il s'agissait d’une niche fiscale. Voilà qui prouve l’absurdité de ce genre de dispositifs !
Lorsque nous débattrons de la fiscalité, l’an prochain et au moment de la campagne présidentielle de 2012 – ce qui nous permettra, je l’espère, de confronter directement nos projets en la matière –, nous réaffirmerons notre position, qui consiste à rompre avec ce système absurde.
En effet, la France compte près de 500 niches fiscales ; à cet égard, nous sommes les champions ! Si nous voulons aider certains secteurs, pour des motifs sociaux, environnementaux ou économiques, nous devons mettre en place des subventions. Il faut en finir avec ce mitage de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés.
Pour en revenir à l’objet de cet amendement, nous proposons de corriger une situation aberrante puisque, je le répète, il existe dans ces vallées industrielles une inégalité entre les propriétaires résidents et les bailleurs sociaux, au détriment de ces derniers, qui ne sont pourtant pas forcément dans une situation financière des plus favorables et dont les locataires ne ressortissent pas aux couches les plus aisées de la population.
Vous pensez bien qu’il n’est très plaisant pour les habitants de ces zones, qui sont déjà confrontés à des risques technologiques, de constater que leur immeuble HLM n’est pas mis aux normes de sécurité. Là, on frise l’absurdité sociale : des personnes qui habitent dans ces périmètres et qui, a priori, ne se situent pas en haut de l’échelle sociale se voient, de surcroît, pénalisés au regard de leur sécurité dans leur logement !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce matin, notre collègue Marc Massion nous a sensibilisés à ce sujet. Cependant, la commission n’a pas été favorable à son amendement, car celui-ci tend à élargir une niche fiscale.
Madame Bricq, la définition des niches fiscales est en effet éminemment relative.
Mme Nicole Bricq. N’est-ce pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Sartre disait : « L’enfer, c’est les autres ». On pourrait dire, en matière de fiscalité : « La niche, c’est les autres. » (Sourires.) Autrement dit, une niche fiscale, c’est allégement de fiscalité dont les autres bénéficient !
Tout au long de la préparation de cette loi de finances, je n’ai pas rencontré un seul bénéficiaire d’un régime privilégié qui qualifie lui-même ce dernier de « niche ». En général, les lettres que nous recevons sur ce sujet commencent par la phrase : « Le régime n° … n’est pas une niche fiscale, car je peux invoquer en sa faveur un intérêt général de tout premier rang. »
Ce n’est d'ailleurs pas totalement faux : si le législateur a fait des encoches dans les assiettes des impôts, c’est bien en vertu de considérations d’intérêt général ; sinon, il en aurait été empêché.
Cela étant dit, madame Bricq, j’ai le sentiment qu’il y a un léger écart entre l’explication que vous avez développée et le contenu de l’amendement. En effet, alors que, dans votre propos, vous avez particulièrement mis l’accent sur les bailleurs sociaux, l’amendement est, lui, d’une portée tout à fait générale.
Le crédit d’impôt que vous sollicitez serait égal à 40 % du montant des dépenses engagées dans la limite de 30 000 euros par logement. Il s’appliquerait aux dépenses effectuées entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2013. À notre sens, rien ne garantit que le bailleur ne puisse pas récupérer au moins une partie de ces dépenses auprès du locataire.
Nous sommes bien sûr prêts à prendre en considération la situation particulière des communes frappées par un plan de prévention des risques technologiques. Cependant, dans la conjoncture actuelle, le signal donné par la création d’un nouveau crédit d’impôt ne nous semble pas aller exactement dans le bon sens. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pu émettre un avis favorable sur cet amendement.
Toutefois, si le Gouvernement éclairait notre lanterne de manière différente, nous pourrions naturellement réexaminer ce sujet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Je crains d’échouer, monsieur le rapporteur général, dans la mission que vous semblez m’assigner, car le Gouvernement émet le même avis que la commission.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je souhaite simplement proposer à M. le rapporteur général à et M. le ministre d’aller expliquer aux bailleurs sociaux et aux résidents concernés que, à leurs yeux, ceux-ci demandent à bénéficier d’une niche…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce n’est pas un déshonneur !
Mme Nicole Bricq. Sur le plan politique, ce sera sûrement très facile à expliquer !
Du reste, il ne s’agit pas ici de créer une niche : vous avez tous déjà voté la création du crédit d’impôt dans le Grenelle 2 !
J’affirme simplement qu’il n’est pas justifié que les bailleurs sociaux ne soient pas considérés comme les autres propriétaires.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dans ce cas, limitez la portée de votre amendement aux bailleurs sociaux !
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.
M. Bernard Vera. L’amendement de nos collègues du groupe socialiste pose le problème de la mise aux normes de sécurité des bâtiments et notamment des ensembles locatifs.
En effet, dans les dispositions issues du Grenelle 2, figure un crédit d’impôt destiné à la réalisation des travaux de mise en sécurité des bâtiments qui sont exposés aux risques technologiques. Comme l’a précisé notre collègue Nicole Bricq, il s’agit des bâtiments construits dans les zones Seveso, qui pourraient se trouver directement concernés par tout accident industriel susceptible de se produire dans ces secteurs.
Les plans de prévention des risques technologiques, ou PPRT, étant en phase de conception, nous allons sans doute nous retrouver avant peu avec un nombre croissant de bâtiments, y compris des logements, directement concernés par leurs prescriptions. Bien entendu, un certain nombre de ces logements sont des logements locatifs et, singulièrement, des logements locatifs sociaux. Or le crédit d’impôt ne vise, pour le moment, que les travaux effectués par un propriétaire sur son habitation principale et il ignore le cas spécifique des locataires.
C’est à cette distorsion que nos collègues socialistes entendent mettre un terme avec leur amendement, et nous approuvons leur démarche, sous réserve que lesdits logements relèvent effectivement de la législation relative au logement social.
Au-delà du cas particulier des bailleurs privés, qui peuvent être concernés par le présent amendement, il conviendra d’examiner de quelle manière les travaux qui seront rendus nécessaires par les PPRT ainsi que par les PPRI, les plans de prévention des risques d’inondation, pourront être financés avec le concours de l’État et les formes que ce concours pourra prendre.
C’est la raison pour laquelle le groupe CRC-SPG votera cet amendement, qui concerne des parties importantes de départements à forte tradition industrielle. Nous espérons que des mesures spécifiques seront prises en direction des bailleurs sociaux.
Mme la présidente. L'amendement n° I-211, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le IV de l'article 200 sexies du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les montants prévus aux I, II, III et IV sont actualisés chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondis à la dizaine d'euros la plus proche. »
II. - La disposition mentionnée au I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. L’objet de cet amendement est bien connu du rapporteur général et peut-être du ministre car, depuis que le barème de la prime pour l’emploi a été gelé, nous réclamons qu’un parallélisme soit instauré avec l’impôt de solidarité sur la fortune, pour lequel a été introduit un dispositif d’indexation sur l’inflation. En effet, la première tranche du barème de l’ISF, qui n’est pourtant pas si basse, est relevée d’année en année, ce qui permet d’exonérer de cet impôt un certain nombre de personnes.
Nous voulons que, par homothétie avec l’ISF, il soit mis fin au gel du barème de la prime pour l’emploi, de manière qu’il profite à ceux qui en ont le plus besoin.
Mais je n’insisterai guère, car je connais par avance la punition que cet amendement va recevoir : un avis défavorable et de la commission et du Gouvernement. On peut toujours espérer une bonne nouvelle, mais je sais que la prime pour l’emploi n’est pas beaucoup appréciée sur les travées de la droite. D’ailleurs, lors de la création du RSA, des velléités de suppression de cette prime s’y étaient manifestées.
Je veux néanmoins ajouter que c’est encore un des signes qui montrent que notre système d’imposition du revenu est vraiment à bout de souffle. Afin que la prime pour l’emploi profite vraiment à ceux qui en ont besoin, il serait utile de mettre en place un impôt sur le revenu avec une assiette élargie ; c’est une des propositions que nous ferons.
Nous souhaitons que l’impôt sur le revenu soit autant que possible non mité, progressif, qu’on y intègre la CSG et la prime pour l’emploi. C’est à ces conditions que nous aurons un impôt sur le revenu large, redistributif et ainsi conforme à sa vocation originelle.
En attendant, nous vous proposons d’indexer la prime pour l’emploi sur l’inflation, comme c’est le cas pour l’ISF aujourd’hui ; du reste, cette indexation était appliquée il y a encore trois ans.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Chère collègue, vous le savez, au sein de la commission des finances, les membres de la majorité et ceux de l’opposition ne peuvent raisonner de la même façon s’agissant de la prime pour l’emploi.
Pour les membres de la majorité, ce dernier dispositif devait être une sorte d’impôt négatif visant à favoriser le retour à l’emploi ; vous vous souvenez du débat qui a eu lieu à l’époque.
Or force est de constater que la prime pour l'emploi s’est très largement diffusée, qu’elle s’est diluée jusqu’à devenir aujourd’hui un instrument complémentaire de pouvoir d’achat.
Les conditions qui entouraient la création de ce dispositif – c’était lorsque M. Lionel Jospin était Premier ministre – ont substantiellement évolué au fil des années. Nous sommes aujourd’hui très loin des motivations d’origine, qui, à la fin des années quatre-vingt-dix, étaient assez consensuelles au sein de la Haute Assemblée. En effet, il ne faut pas oublier que, lors des premiers débats sur le sujet, la commission des finances avait formulé des propositions de crédit d’impôt dont les intentions ont été reprises par le Gouvernement de l’époque pour aboutir au dispositif de la prime pour l’emploi.
Cependant, l’« enfant » issu de cette gestation n’a pas été exactement celui que nous attendions et, surtout, au fil du temps, le dispositif s’est étendu jusqu’à recouvrir une diversité sociale sensiblement plus grande. Aujourd’hui, on constate que cette prime est versée à 9 millions de foyers, dont la moitié n’est pas imposable. En outre, ainsi que beaucoup d’études l’ont montré, cette prime a très peu d’effets sur le retour à l’emploi. Enfin, la réalité observée maintenant semble très éloignée de la motivation initiale.
Depuis des années, la commission des finances plaide pour que le dispositif soit concentré sur des catégories qui se trouvent à la limite de l’emploi ou sur les travailleurs pauvres, vis-à-vis desquels un effort est nécessaire. Malheureusement, cela n’a pas été fait.
Par ailleurs, madame Bricq, vous le savez, voilà quelques jours, lors de l’examen en commission des crédits de la mission « Travail et emploi », nous avons voté, sur l’initiative de notre excellent collègue Serge Dassault, un amendement qui va tout à fait à l’opposé de ce que vous avez préconisé. Cet amendement vise en effet à réduire de 10 % les taux de la prime pour l’emploi, ce qui représente une économie de 300 millions d’euros.
En d’autres termes, nous avons estimé que le rabot devrait passer sur la prime pour l’emploi…
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas une niche !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais la prime pour l’emploi est une dépense qui s’est substituée à un crédit d’impôt ; je dirais donc que c’est une niche par intention. (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Bricq. Eh bien, voilà autre chose !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet enfant est né dans une niche, il s’est développé à l’extérieur de la niche (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.), mais nous sommes tout à fait fondés à appliquer à ce dispositif le rabot de 10 %, comme l’a préconisé Serge Dassault.
Chère collègue, en vertu de toutes ces considérations, vous ne m’en tiendrez pas rigueur si la commission réitère un avis fermement défavorable sur votre proposition.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Robert del Picchia. Il met la chaîne !
M. François Marc. Et fermement !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° I-218, présenté par MM. Sueur, Rebsamen, Sergent et Patriat, Mme M. André, MM. Hervé, Frécon, Marc, Angels, Auban, Demerliat, Haut, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 244 quater O du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les dispositions du présent article s'appliquent aux crédits d'impôt calculés au titre des dépenses exposées par les entreprises mentionnées au III jusqu'au 31 décembre 2015. »
II. - Le I ne s'applique qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement concerne les métiers d’art.
Nous l’avions déjà déposé, comme d’autres collègues – c’est une proposition consensuelle –, l’année dernière. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, il fut affirmé alors qu’il était très intéressant, mais qu’il serait particulièrement opportun l’année suivante, c'est-à-dire maintenant.
C’est pourquoi nous le présentons de nouveau cette année : de fait, se pose cette année la question du renouvellement du crédit d’impôt dont bénéficient à ce jour les entreprises artisanales qui exercent dans le domaine des métiers d’art, renouvellement que nous appelons de nos vœux.
Du marqueteur au facteur d’orgues, du bronzier d’art au forgeron et au joaillier, sans compter toutes les entreprises artisanales, petites ou moyennes, qui travaillent dans l’ameublement d’art, 217 métiers sont reconnus comme des métiers d’art ; Mme Michèle André me souffle qu’il convient d’ajouter à cette liste la coutellerie d’art, qui fait également honneur à notre pays.
Mes chers collègues, ces métiers sont des métiers de l’avenir. Ils relèvent de notre patrimoine et de notre culture, et je sais combien cela vous est cher, madame la présidente.
En France, le secteur des métiers d’art compte 37 000 entreprises, emploie 43 000 personnes et réalise un chiffre d’affaires de 8 milliards d'euros. J’ajoute que, en termes d’exportation, il pèse beaucoup plus qu’un grand nombre de secteurs de l’industrie ou des services que l’on cite habituellement.
Les Journées des métiers d’art nous permettent de mesurer l’importance croissante qu’ils occupent dans notre société.
Je veux souligner l’action que mènent à cet égard un certain nombre de régions : la région Centre, que je connais bien, mais aussi la région Bourgogne, dont les initiatives sont si remarquables que mes collègues François Patriat et François Rebsamen ont marqué leur particulier soutien à cet amendement, la région Auvergne, où, Michèle André l’assure, les métiers d’art sont très présents... À vrai dire, mes chers collègues, on pourrait citer toutes les régions de France !
Il faut y voir le symbole d’une excellence française, d’une qualité très largement reconnue.
En outre, au regard de la formation, le domaine des métiers d’art offre à de nombreux jeunes la possibilité de s’engager et de trouver un avenir. Savez-vous, mes chers collègues, que les trois quarts des artisans d’art sont âgés de moins de 44 ans ? C’est donc un secteur d’activité dans lequel la jeunesse s’investit.
Toutes proportions gardées, les prélèvements obligatoires que subissent un certain nombre de sociétés ou même celles du CAC 40 sont inférieurs à l’imposition de ces entreprises, qui relèvent pourtant des PME.
Pour toutes ces raisons, il nous paraît tout à fait justifié de continuer à soutenir et à aider les métiers d’art, si importants pour notre commerce extérieur comme pour l’image de notre pays dans le monde, et je suis heureux de constater que notre collègue M. Fourcade paraît très intéressé par cette proposition.
M. Jean-Pierre Fourcade. En effet !
Mme la présidente. L'amendement n° I-352, présenté par Mmes Dumas et Desmarescaux, MM. Dubois, Merceron, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 244 quater O du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les dispositions du présent article s'appliquent aux crédits d'impôt calculés au titre des dépenses exposées par les entreprises mentionnées au III jusqu'au 31 décembre 2013. »
II. - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévue aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Dumas.
Mme Catherine Dumas. Jean-Pierre Sueur vient de défendre brillamment les métiers d’art. Notre amendement est d’ailleurs très proche de l'amendement n° I-218 puisqu’il tend également à proroger – la différence ne porte que sur la durée de cette prorogation – le crédit d’impôt en faveur des entreprises de ce secteur. Il s’agit d’une mesure fiscale que soutiennent tous mes collègues du groupe UMP.
Nous avions entrepris cette démarche l’année dernière, mais, dans la mesure où le dispositif était maintenu jusqu’au 31 décembre 2010, nous n’avions pas insisté. Nous parvenons donc maintenant au terme de l’application de cette mesure. C'est la raison pour laquelle nous défendons de nouveau cet amendement.
Je me contenterai de souligner, à la suite de Jean-Pierre Sueur, le grand nombre d’emplois que concerne ce dispositif, ainsi que le fait, mes chers collègues, que chacun de nos départements est riche de représentants des métiers d’art.
Jean-Pierre Sueur a eu raison d’insister sur la formation : les métiers d’art représentent l’avenir, notamment l’image de la France à l’extérieur. Il faut encourager ces entreprises dans la voie de la création.
Afin de prévenir toute remarque, je précise qu’il ne s’agit en aucun cas d’un « amendement Fabius ». Nous entendons défendre de toutes petites entreprises, parfois des artisans qui travaillent seuls, qui ont vraiment besoin de ce crédit d’impôt pour conserver un rang et une attractivité mondialement reconnus. En effet, la réputation de la France en la matière n’est plus à faire.
L’avenir de cette filière, qui est l’un des fleurons de notre économie et l’une des fiertés de notre pays, concerne chacun des membres de notre Haute Assemblée.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je sollicite votre soutien unanime à la prorogation de ce crédit d’impôt : il montrerait que nous sommes tous solidaires pour défendre les métiers d’art.
M. Robert del Picchia. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Face à cette problématique, la commission des finances est très mal à l’aise, elle qui lutte contre les dépenses fiscales et les niches fiscales et contre leur prolongation, surtout si celle-ci devait être indéfinie.
À parcourir le répertoire des métiers concernés – perruquier posticheur, au titre des arts du spectacle, tanneur, au titre des arts et traditions populaires, enlumineur, imagier au pochoir, décorateur sur métaux précieux, lapidaire, médailleur, etc. –; on voit bien qu’il s’agit d’une liste merveilleuse, qui traduit, pour une bonne part, l’inventivité, l’intelligence immémoriale de notre peuple. Car c’est bien de cela que les métiers d’art témoignent.
Pour pouvoir aller au-delà de la nécessaire sécheresse de nos positions – mais on nous en voudrait si nous transigions avec nos principes, car nous sommes peut-être la seule commission véritablement contrainte d’avoir des principes (Exclamations sur diverses travées.) –,…
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas aimable pour les autres !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. ... il nous faut entendre le Gouvernement.
Par principe, notre avis est négatif, surtout s’il s’agit de prolonger indéfiniment le dispositif, notre opposition étant plus tempérée s’il ne s’agit que d’une prorogation de quelques années, a fortiori d’une seule année.
Il me semble important de disposer, pour ce régime comme pour tout autre, d’éléments qualificatifs et quantitatifs, de comprendre, discipline par discipline, les avantages que ce crédit d'impôt apporte, de mesurer s’il incite véritablement à transmettre le savoir, en particulier à former des jeunes à ces beaux métiers. Je sais que notre collègue Catherine Dumas est très attachée à ces aspects et qu’elle s’efforce, dans les rapports successifs qu’elle remet à la Haute Assemblée, de faire des points d’étape en la matière.
Nous avons besoin d’indicateurs de performance de ce régime, qui présente assurément l’intérêt de braquer le projecteur sur un grand nombre de métiers d’art.
Je conclurai en mentionnant un autre métier d’art concerné par ce dispositif, le rotinier. Cet artisan tisse les tiges fines et flexibles d’un palmier, le rotin, choisit, selon l’effet recherché, entre nœuds, tresses, entrelacs. La fente, le planage et la filature de ce végétal permettent d’obtenir des lamelles ou éclisses, ainsi que des moelles rondes…
Eh bien, espérons que, nous aussi, nous obtiendrons, au cours de l’examen de ce projet de loi de finances, quelques moelles rondes : nous en avons bien besoin ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Je viens d’examiner la liste des métiers d’art : elle est poétique en même temps qu’elle définit pleinement la réalité de la France du coin de la rue. Il faut donc porter un regard attentif sur la transmission d’un savoir-faire de génération en génération, seule à même d’en assurer la pérennité.
Nous ne pouvons nier que le cadre fiscal permet aussi de conserver, même si c’est marginal, quelques niches qui n’ont rien de fiscal mais qui sont d’ordre professionnel. Nous avons une forme de devoir et de responsabilité à l’égard de ces métiers d’art.
Mme Catherine Dumas. Très bien !
M. François Baroin, ministre. Les entreprises qui relèvent de ce secteur et qui engagent des dépenses de conception de nouveaux produits peuvent bénéficier d’un crédit d'impôt égal à 10 % des dépenses de création.
L'amendement n° I-352 tend à proroger le dispositif existant jusqu’au 31 décembre 2013. Le Gouvernement entendait initialement proroger la durée de cette mesure d’un an. Toutefois, il se veut ouvert à la discussion et, fort des arguments avancés par Mme Catherine Dumas, accepterait d’aller au-delà, par exemple en la portant à deux ans.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. François Baroin, ministre. L'amendement n° I-218 tend, lui aussi, à proroger le dispositif, en prévoyant toutefois son extinction le 31 décembre 2015, soit dans cinq ans. Cet horizon semble trop lointain. Je le répète, je pense qu’il est possible de tomber d’accord sur une prolongation de deux ans.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le ministre, votre proposition me semble pouvoir faire consensus sur ce sujet important. Accepter de prolonger ce crédit d’impôt de deux ans, soit jusqu’au 13 décembre 2013, constituerait un geste sur lequel nous pouvons tous nous accorder. Pour ma part, j’y suis favorable.
Je remercie M. Sueur et Mme Dumas d’avoir prononcé ce plaidoyer en faveur des métiers d’art, un plaidoyer que le rapporteur général a enluminé. (Sourires.) Mais il a oublié les doreurs.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ils sont sur la liste !
M. Jean-Pierre Fourcade. Dans les ministères,...
M. Adrien Gouteyron. Au Sénat aussi !
M. Jean-Pierre Fourcade. ... ceux qui interviennent sur les dorures sont de plus en plus rares. C’est une profession qu’il faut essayer de relancer.
Monsieur le ministre, je forme le vœu que les agents des missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes et ceux de Pôle emploi n’oublient pas qu’il existe des métiers d’art et tentent d’orienter les jeunes vers les métiers de tailleur de pierre, d’enlumineur, de tanneur, ou toute autre profession pour laquelle ils peuvent développer une véritable passion. Notre système d’insertion des jeunes dans l’emploi ne tient pas compte de l’existence de ce secteur tout à fait important, qui jouit d’un rayonnement international et qui est susceptible de créer un certain nombre d’emplois.
Je souhaite que le Gouvernement s’en souvienne lui aussi, afin qu’il prenne toutes les mesures nécessaires à la diffusion d’informations sur les réalisations de ces 217 professions et sur les emplois qu’elles offrent.
De même, je demande à M. Sueur et Mme Dumas de persuader les artisans d’accueillir davantage de jeunes en contrat d’apprentissage pour que ceux-ci puissent intégrer ces secteurs.
M. Robert del Picchia. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je suis très sensible aux réactions que suscitent ces amendements et je tiens à dire que je partage les propos de Catherine Dumas.
Nous nous sommes plu, les uns et les autres, à citer des métiers d’art – M. le rapporteur général et M. Jean-Pierre Fourcade ont apporté leur pierre à l’édifice –, mais je ne voudrais pas que l’on en conclue qu’il s’agit de métiers quelque peu folkloriques, passéistes, provinciaux, régionalistes,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce n’est pas une tare !
M. Jean-Pierre Sueur. ... tous ces termes qu’exécrait André Malraux, à juste titre d’ailleurs.
Il s’agit de métiers d’avenir et de métiers importants pour l’économie. J’évoquerai le secteur de la joaillerie et de la bijouterie d’art, qui est également essentiel pour nos échanges extérieurs. Le secteur de l’ameublement d’art l’est tout autant : c’est aux artisans d’art et aux PME de notre pays que l’on préfère faire appel lorsqu’il s’agit d’aménager l’intérieur de paquebots, d’hôtels, de résidences, de logements de toutes sortes dans le monde entier. Voilà qui offre d’intéressantes perspectives d’exportation. Il faut s’en féliciter ! Ce sont des secteurs tout à fait porteurs.
Monsieur le ministre, en vérité, nous craignions que ces amendements ne fussent balayés. Or vous nous avez proposé de prolonger le dispositif de crédit d’impôt non pas d’un an, mais de deux ans. En deux ans, il peut se passer « bien des choses, en somme », comme fait dire un auteur dramatique célèbre à son personnage le plus fameux !
Nous pensons, pour notre part, que cette prorogation de deux années sera perçue très positivement par les professionnels concernés, qui sont attachés, vous avez raison de le souligner, cher collègue Jean-Pierre Fourcade, à la formation des jeunes.
Par conséquent, nous souscrivons tout à fait à cette proposition d’un maintien pendant deux ans de ce crédit d’impôt et nous rectifions notre amendement en ce sens, étant entendu que, dans deux ans, nous pourrons en reparler.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour explication de vote.
Mme Catherine Dumas. Je remercie M. le ministre de sa proposition, que M. le rapporteur général paraît prêt à accepter et à laquelle je me rallie bien entendu en rectifiant mon amendement.
Deux ans représentent une bonne durée, car elle permet aux petites entreprises concernées d’avoir une meilleure vision stratégique.
J’ajoute que, lors de mes nombreux déplacements, tant à Paris qu’en province, auprès des professionnels du secteur des métiers d’art, je me ferai l’écho de l’intérêt et même de la passion que ce débat a suscités aujourd'hui au Sénat. Dans la mesure où notre assemblée est aussi le représentant des territoires et de leurs particularités, il me paraît très important de faire passer ce message.
Mme la présidente. Je suis donc saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-218 rectifié est présenté par MM. Sueur, Rebsamen, Sergent et Patriat, Mme M. André, MM. Hervé, Frécon, Marc, Angels, Auban, Demerliat, Haut, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-352 rectifié est présenté par Mmes Dumas et Desmarescaux, MM. Dubois, Merceron, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 244 quater O du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les dispositions du présent article s'appliquent aux crédits d'impôt calculés au titre des dépenses exposées par les entreprises mentionnées au III jusqu'au 31 décembre 2012. »
II. - Le I ne s'applique qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage sur ces deux amendements identiques ?
Mme la présidente. Il s’agit donc des amendements n° I-218 rectifié bis et I-352 rectifié bis.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 2.
Je fais observer que ces deux amendements identiques ont été adoptés à l’unanimité des présents.
Article 2 bis (nouveau)
I. – Au premier alinéa du II bis de l’article 199 terdecies-0 A du même code, le montant : « 50 000 € » est remplacé par le montant : « 200 000 € » et le montant : « 100 000 € » est remplacé par le montant : « 400 000 € ».
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du même code.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-1 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-316 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° I-1.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission a estimé que ce n’était pas vraiment le moment de quadrupler le plafond de la réduction d’impôt sur le revenu, dite « Madelin ». Ce n’est ni opportun ni cohérent au regard des principales dispositions du présent projet de loi de finances.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-316.
M. Thierry Foucaud. Une fois n’est pas coutume, nous allons être d’accord avec M. le rapporteur général !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela peut arriver !
M. Thierry Foucaud. En effet, nous demandons également la suppression de l’article 2 bis du projet de loi de finances.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Non seulement le Gouvernement est favorable à cet amendement du rapporteur général, mais il s’en réjouit.
L’article visé a été introduit par l’Assemblée nationale, et ce à l’issue d’un débat assez nourri. L’augmentation du plafond de réduction d’impôt sur le revenu qu’il prévoit est à contre-courant de toute la construction budgétaire, s’agissant notamment des dépenses fiscales. Il me paraît donc parfaitement pertinent d’accompagner la proposition du rapporteur général.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Si, par malheur, l’amendement de M. le rapporteur général est voté, je n’aurai pas la possibilité de présenter mon amendement n° I-64.
Je considère, pour ma part, qu’il vaudrait mieux suivre le vote de nos collègues de l’Assemblée nationale.
Lors d’un colloque organisé à Bercy, voilà quelques semaines, j’ai eu l’occasion de présenter, avec le député Nicolas Forissier, une proposition de loi devant un parterre de chefs d’entreprises, d’investisseurs et de business angels. L’amendement qui a été déposé à l’Assemblée nationale par Nicolas Forissier est la reprise de cette proposition de loi.
En quoi consiste-t-il ? Il ne crée pas un centime d’euro de dépenses supplémentaires, monsieur le ministre. Il s’agit, à l’intérieur du plafond des déductions fiscales, d’orienter l’effort en direction des entreprises en incitant les contribuables, dans le cadre de la défiscalisation à laquelle ils procèdent déjà, à préférer le financement des PME, pour permettre à ces dernières de renforcer leurs fonds propres.
Monsieur le ministre, au moment où l’on annonce que l’on va supprimer l’ISF et où le coût pour l’État serait de 750 millions d’euros pour 1 milliard d’euros d’investissements par les holdings dans les fonds propres des entreprises, la mesure que nous proposons représente, pour la même somme de 1 milliard d’euros, un coût de 250 millions d’euros seulement. Elle aurait donc un effet de levier considérable : de 4 pour 1.
Tout le monde veut des ETI, des entreprises de taille intermédiaire, tout le monde veut voir naître des entreprises et prospérer celles qui existent, tout le monde souhaite la croissance de l’économie pour régler les problèmes sociaux. Pour cela, il faut bien que les entreprises puissent renforcer leurs fonds propres !
Dès lors, chers collègues de l’UMP, sachant que la mesure que nous proposons ne coûte pas un centime d’euro de dépenses fiscales supplémentaires, je vous en prie, confirmez le vote de tous vos collègues députés de l’UMP.
Bien sûr, nous sommes tout à fait d’accord avec M. le ministre pour considérer qu’il faut maîtriser les dépenses, mais je le répète, cette mesure n’en crée aucune.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Je trouverais, moi aussi, regrettable de supprimer cet article. Comme vient de le démontrer Philippe Adnot, dont j’ai cosigné l’amendement n° I-64, il s’agit d’une disposition qui n’est pas coûteuse pour le budget de l'État. Elle résulte d’un amendement qui a été déposé à l’Assemblée nationale, sur l’initiative de l’UMP, qui a donné lieu à un long débat et qui a été adopté à une forte majorité de ce groupe.
Elle est aussi le fruit d’une réflexion qui se développe depuis de nombreux mois, voire plusieurs années.
Dès lors qu’il n’est pas onéreux, il serait dommage qu’un tel dispositif, centré sur les entreprises d’environ cinquante salariés, ne puisse pas être conservé.
J’ajoute que, de manière générale, dans le cadre de la discussion budgétaire, je ne comprends pas pourquoi, sur certains dispositifs votés par l’Assemblée nationale, nous devrions nous montrer contraignants, alors même que le Gouvernement a parfois une vision plus souple, et non sur d’autres.
C’est en cela que l’amendement n° I-1 me gêne. J’aurais préféré, pour ma part, qu’un véritable débat s’instaure sur la disposition qui nous vient de l’Assemblée nationale, où elle a été adoptée sur l’initiative des députés du groupe UMP.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-1 et I-316.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 2 bis est supprimé.
L'amendement n° I-64, présenté par MM. Adnot, Türk, Bourdin, Doligé, Gouteyron, P. Dominati, Chatillon, du Luart, Beaumont et Lefèvre, était ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le montant :
200 000 €
par le montant :
199 999 €
et le montant :
400 000 €
par le montant :
399 999 €
Cet amendement n’a plus d’objet.
Article 2 ter (nouveau)
L’article 92 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 est ainsi modifié :
1° Au II, l’année : « 2011 » est remplacée par l’année : « 2012 » ;
2° Après l’année : « 2009, », la fin du III est ainsi rédigée : « 680 € au titre de l’imposition des revenus de 2010, 400 € au titre de l’imposition des revenus de 2011, 120 € au titre de l’imposition des revenus de 2012. »
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos I-437 et I-442 sont identiques.
L'amendement n° I-437 est présenté par MM. Collin, Alfonsi, Barbier, Baylet, de Montesquiou et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° I-442 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Les II, III et V de l'article 92 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 sont abrogés.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Detcheverry, pour défendre l’amendement n° I-437.
M. Denis Detcheverry. Madame la présidente, si vous le permettez, je défendrai également l’amendement n°°I-361, qui a un objet similaire.
Ces amendements visent à rétablir l’ancienne rédaction de l’article 195 du code général des impôts, qui ne subordonnait pas le bénéfice de la demi-part accordée aux contribuables ayant élevé seuls un ou plusieurs enfants à la preuve qu’ils en aient supporté la charge à titre exclusif ou principal pendant au moins cinq années au cours desquelles ils vivaient seuls.
L’actuel libellé de l’article 195, qui a déjà suscité de nombreux débats au Parlement, nous semble très difficile à justifier, car il pénalise gravement nombre de personnes veuves ou divorcées n’ayant que des revenus modestes.
La perte d’une demi-part pour le calcul des revenus a des effets dramatiques pour nos concitoyens les moins fortunés, même s’ils ont élevé des enfants en couple.
Ainsi, nombre de veuves ou de veufs, titulaires d’une pension de réversion modeste, se voient non seulement surimposés, mais également privés des dispositifs qui sont attachés à la non-imposition, tels que l’exonération de la taxe d’habitation et la redevance télévision.
Les conséquences de cette disposition n’ont pas été mesurées lorsqu’elle a été adoptée. Il est donc indispensable de mieux les évaluer et, préalablement, de revenir sur cette mesure qui est totalement injuste.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle André, pour présenter l'amendement n°I-442.
Mme Michèle André. Madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° I-214, qui a le même objet.
Ces amendements visent à rétablir l’ancienne rédaction de l’article 195 du code général des impôts, qui ne conditionnait pas cette demi-part fiscale attribuée aux personnes vivant seules ou ayant élevé seules leurs enfants.
En effet, la nouvelle rédaction, proposée par voie d’amendement au Sénat, puis partiellement rectifiée en commission mixte paritaire, a été intégrée à la loi de finances pour 2009 sans que l’ensemble de ses effets aient véritablement été pris en compte.
La perte d’une demi-part pour le calcul des revenus a des effets dramatiques pour certains de nos concitoyens les moins fortunés, même s’ils ont élevé des enfants en couple.
Ainsi, nombre de veuves, mais parfois aussi des veufs, titulaires d’une pension modeste, qu’elle soit personnelle ou de réversion, se verront non seulement imposés alors qu’ils ne l’étaient pas jusqu’ici, mais également privés des dispositifs qui sont attachés à la non-imposition, telle que l’exonération de la taxe d’habitation et de la redevance télévision.
Le coût budgétaire d’une telle mesure peut être compensé, nous en sommes certains, par la suppression de niches fiscales aussi injustes qu’inefficaces et qui représentent des dizaines de milliards d’euros.
Nous souhaitons donc revenir sur cette disposition. Je dirai que, s’il y avait un doute, les débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle voilà quelques semaines sur les pensions bien misérables d’un certain nombre de femmes devraient nous incliner à nous montrer attentifs à cette catégorie de population, qui représente tout de même un nombre non négligeable de personnes.
Mme la présidente. L'amendement n° I-351, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - L'article 92 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 est ainsi modifié :
1° Au II, les mots : « au titre des années 2009 à 2011 » sont supprimés ;
2° Les III et V sont abrogés.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État des dispositions ci-dessus, il est créé une taxe additionnelle aux droits fixés aux articles 575 et 575 U du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. En 2008, un avantage fiscal dont bénéficiaient plus de 4 millions de parents isolés, imposés séparément à raison des enfants qu’ils avaient élevés ou qu’ils élevaient encore, a été remis en cause. Il s’agissait en effet, avec cet article 92 de la loi de finances pour 2009, de revenir sur la situation des contribuables célibataires, veufs ou divorcés, ayant des enfants à charge et qui bénéficiaient d’une demi-part supplémentaire au titre de l’impôt sur le revenu.
Cette dépense fiscale déjà ancienne concerne un nombre important de ménages, pour un montant relativement significatif, soit 1 440 millions d’euros estimés pour 2011.
Ce montant est toutefois en baisse puisque l’article 92 en question a permis de reprendre, en deux ans, plus de 260 millions d’euros dans la poche des ménages concernés !
L’avantage en impôt qui découle de cette conception du quotient familial est aujourd’hui limité à environ 300 euros par an et par contribuable. On est donc fort loin des montants unitaires bien plus élevés atteints avec le dispositif « Malraux », les investissements outre-mer ou le régime particulier d’imposition des plus-values…
Outre le fait qu’il participe d’une conception pour le moins dépassée de la vie privée, puisque célibat et divorce sont des situations de plus en plus fréquentes dans la société moderne, cet article ne vise au fond qu’à gager quelques éléments du déficit public sur le dos du plus grand nombre.
Parmi les contribuables isolés concernés par le dispositif actuel, nombreux sont ceux qui n’ont plus d’activité professionnelle, ainsi que ceux dont l’attribution de la demi-part découlant de la législation actuelle est suffisante pour les rendre non imposables au titre de l’impôt sur le revenu.
Objectivement, on peut penser qu’il y a des niches fiscales plus importantes que celle-ci à vider de leur contenu !
Cela est d’autant plus vrai que, l’avantage fiscal lié au quotient familial étant plafonné, ce sont les contribuables les plus modestes qui perdront le plus.
Nous nous plaçons, nous, du côté des femmes divorcées ayant assumé seules l’éducation de leurs enfants et ayant, à ce titre, travaillé, consenti des sacrifices durant toute leur vie professionnelle. Nous nous plaçons aussi du côté des parents célibataires, veufs ou divorcés qui ont pris leurs responsabilités devant l’adversité de la vie. Enfin, nous nous plaçons du côté de ces personnes retraitées qui ont fait ces efforts et ces choix durant leur vie professionnelle, lesquels n’ont pas toujours été compris par la société. Pensons, par exemple, mes chers collègues, au cas des parents adoptants qui connaîtraient demain l’effet de la mesure contenue dans le présent article.
La sagesse impose, à notre sens, de revenir sur les termes de l’article 92 de la loi de finances de 2009 en adoptant cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cette question est en effet délicate, voire douloureuse, pour un nombre significatif de contribuables.
L’Assemblée nationale, en adoptant l’article 2 ter, a permis de proroger d’un an le régime transitoire, afin, sans doute de prendre en compte les situations les plus difficiles, dues, notamment, aux effets collatéraux – si j’ose dire – que peuvent représenter les pertes d’exonération d’impôts locaux ou d’autres avantages.
Pour la majorité de la commission, le dispositif adopté l’année dernière, amélioré par la prorogation d’un an du régime transitoire, paraît être une réponse suffisante aux préoccupations exprimées.
En vertu de cette analyse, je demande aux auteurs des amendements identiques I-437 et I-442, ainsi que de l’amendement n° I-351 et des amendements identiques nos I-214 et I-361 de bien vouloir les retirer.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Nous avions dénoncé, lors de l’introduction de cette mesure dans le code général des impôts, cette mauvaise action. En effet, dans la mesure où il est impossible de considérer la disposition antérieurement applicable comme étant une niche fiscale, cette démarche est absurde.
Le problème du caractère arbitraire des niches fiscales est de nouveau posé. Vous considérez que la tristement célèbre niche concernant les cessions de participations des entreprises, dite « niche Copé », n’en est plus une, contrairement à la mesure évoquée en cet instant. Pourtant, il n’en est rien : on ne choisit pas d’être veuve et le divorce est parfois subi. Il s’agit de ce que l’on appelle des « accidents de la vie ».
Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, toujours en prévision du débat fiscal – qui sera, j’espère, « grandeur nature » –, j’attire votre attention sur la remarque tout à fait pertinente de notre collègue Bernard Vera. En effet, du fait de l’évolution de la société, les situations sont de plus en plus individualisées, les célibataires et les divorcés sont de plus en plus nombreux. Il sera nécessaire, à un moment ou un autre, d’engager un débat de fond sur l’individualisation de l’impôt, et je crains que les positions ne soient pas semblables au sein des partis politiques. Si notre système d’imposition n’est pas adapté à la situation actuelle, de nombreuses absurdités verront le jour.
Je sais qu’un tel débat est délicat, mais il est nécessaire, d’autant plus eu égard à l’accroissement du nombre de femmes travaillant de manière indépendante.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-437 et I-442.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2 ter.
(L'article 2 ter est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 ter
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-214 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-361 est présenté par MM. Collin, Alfonsi, Barbier, Baylet, de Montesquiou et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 1 de l'article 195 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au a, après le mot : « distincte », la fin de l'alinéa est supprimée ;
2° Au b, après le mot : « guerre », la fin de l'alinéa est supprimée ;
3° À la dernière phrase du e, après le mot : « ans », la fin de l'alinéa est supprimée.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Ces amendements ont été défendus, et la commission ainsi que le Gouvernement ont donné leur avis.
Je les mets aux voix.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 2 quater (nouveau)
Pour l’établissement de l’impôt sur le revenu, le montant des primes versées par l’État après consultation ou délibération de la Commission nationale du sport de haut niveau aux sportifs médaillés aux jeux olympiques et paralympiques d’hiver de l’an 2010 à Vancouver peut, sur demande expresse et irrévocable de leur bénéficiaire, être réparti par parts égales sur l’année au cours de laquelle le contribuable en a disposé et les cinq années suivantes.
L’exercice de cette option est incompatible avec celui de l’option prévue à l’article 163-0 A du code général des impôts.
Mme la présidente. L'amendement n° I-318, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article premier de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat est abrogé.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement appelle à la réflexion sur le bien-fondé de l’allocation des deniers publics à la compensation des heures supplémentaires défiscalisées et désocialisées en vertu de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA ». Présentée comme l’archétype de la démarche politique du « travailler plus pour gagner plus », la défiscalisation des heures supplémentaires présente la caractéristique de coûter des sommes considérables, pesant sur le budget de l’État aussi bien que sur les comptes sociaux.
Si l’on en croit l’évaluation des voies et moyens, 8,8 millions de salariés en bénéficieraient aujourd’hui, pour une dépense fiscale estimée à 1,36 milliard d’euros, soit une moyenne de bonus fiscal de 155 euros par an, c’est-à-dire moins de 15 euros par mois. Pour résumer, le principe « travailler plus pour gagner plus » permet de payer deux paquets de cigarettes par mois.
Un problème se pose : le coût total de la mesure est majoré des exonérations de cotisations sociales accordées tant sur la part ouvrière que sur la part patronale. L’ensemble du dispositif coûte aujourd’hui plus ou moins 4,1 milliards d’euros. Cette exonération, séduisante au premier abord, a pour conséquence de ne pas ouvrir de nouveaux droits pour les salariés concernés, notamment du point de vue du calcul de leur future pension de retraite.
Finalement, le peu qui aura été gagné au cours d’une vie professionnelle – plus ou moins soumise aux aléas du cycle de production – sera perdu au moment de la liquidation des droits à pension. Or l’impact sur le PIB est estimé à 3 milliards d’euros.
Dans son rapport, le Conseil des prélèvements obligatoires – rattaché à la Cour des comptes – recommande d’ailleurs la suppression pure et simple de cette mesure. Il indique : « La mise en œuvre de la loi TEPA n’a pas modifié profondément le lien, constaté dans l’industrie et les services marchands ces dix dernières années, entre les fluctuations cycliques de l’activité et celles de l’intérim et du volume d’heures supplémentaires ». Autrement dit, on a simplement offert à quelques entreprises un bon moyen de ne pas augmenter les salaires. Rien n’a changé dans les pratiques de gestion et d’utilisation du travail. En effet, il faudra bien, à un moment donné, parler du travail.
Peu ou pas d’emploi, peu de production, simplement un effet d’aubaine pour quelques entreprises ! Nous constatons une détérioration globale du travail. Comme par hasard, c’est dans des secteurs où le travail qualifié est discrédité – le BTP, l’hôtellerie ou la grande distribution, par exemple – que le recours aux heures supplémentaires a été le plus important.
Il est temps de mettre un terme à ce gaspillage éhonté de fonds publics qui résulte de l’article 1er de la loi TEPA. Tel est le sens du présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous avons déjà abordé ce sujet tout à l’heure à l’occasion de l’examen d’amendements déposés par les membres du groupe socialiste qui, je le crains, n’ont pas été adoptés. Par souci de cohérence, nous devons réserver le même traitement à l’amendement n° I-318.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2 quater.
(L'article 2 quater est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 quater
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont présentés par M. Houpert.
L'amendement n° I-355 est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa du 4 de l'article 39 du code général des impôts, après les mots : « l'exercice », sont insérés les mots : « non-professionnel ».
II. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du même code.
L'amendement n° I-277 est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les 1 bis et 2 de l'article 1657 du code général des impôts sont abrogés.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Article 3
I. – Au dernier alinéa du 1 du I de l’article 197 du même code, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 41 % ».
II. – Au premier alinéa du 1 du I de l’article 117 quater, au premier alinéa du 1°, au 1° bis, au premier alinéa du 6°, au 7°, aux premier et second alinéas du 8° et au premier alinéa du 9° du III bis de l’article 125 A, au premier alinéa du I de l’article 125 C, au quatrième alinéa du 1 de l’article 187 et au 2 de l’article 200 A du même code, le taux : « 18 % » est remplacé par le taux : « 19 % » et, à la première phrase du premier alinéa du 6 de l’article 200 A du même code, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 41 % ».
II bis (nouveau). – Aux 1°, 2°, 3°, 4°, par deux fois au 6°, au b du 8° et au deuxième alinéa du a du 9° du V de l’article 150-0 D bis du même code, l’année : « 2006 » est remplacée par l’année : « 2009 ».
II ter (nouveau). – Au premier alinéa du I de l’article 150-0 D ter du même code, l’année : « 2006 » est remplacée par l’année : « 2009 ».
II quater (nouveau). – À la fin de la seconde phrase du A du XVIII de l’article 29 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, l’année : « 2013 » est remplacée par l’année : « 2016 ».
III. – À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article 200 B du code général des impôts, le taux : « 16 % » est remplacé par le taux : « 19 % ».
IV. – Le a du 2 de l’article 1649-0 A du même code est complété par les mots : « , à l’exception de la fraction supplémentaire d’impôt résultant de l’augmentation de 40 % à 41 % du taux prévu au dernier alinéa du 1 du I de l’article 197 et du taux prévu à la première phrase du premier alinéa du 6 de l’article 200 A, de l’augmentation de 18 % à 19 % du taux prévu au premier alinéa du 1 du I de l’article 117 quater, au premier alinéa du 1°, au 1° bis, au premier alinéa du 6°, au 7°, aux premier et second alinéas du 8° et au premier alinéa du 9° du III bis de l’article 125 A, au premier alinéa du I de l’article 125 C, au quatrième alinéa du 1 de l’article 187 et au 2 de l’article 200 A, ainsi que de l’augmentation de 16 % à 19 % du taux prévu à la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article 200 B ».
IV bis (nouveau). – Le e du 2 de l’article 1649-0 A du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le prélèvement prévu à l’article L. 245-14 du code de la sécurité sociale est retenu dans la limite du taux de 2 %. »
IV ter (nouveau). – Le f du même 2 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le prélèvement prévu à l’article L. 245-15 du code de la sécurité sociale est retenu dans la limite du taux de 2 %. »
IV quater (nouveau). – À la fin du I de l’article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, le taux : « 2 % » est remplacé par le taux : « 2,2 % ».
IV quinquies (nouveau). – Après le mot : « retenues », la fin de la deuxième phrase du a du 4 de l’article 1649-0 A du code général des impôts est ainsi rédigée : « pour leur montant net soumis à la contribution sociale généralisée en application du 2° du I de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale. »
IV sexies (nouveau). – Au huitième alinéa du I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, après la référence : « 150-0 D bis », est insérée la référence : «, à l’article 151 septies B ».
IV septies (nouveau). – Le 2° du I de l’article L. 136-7 du même code est complété par les mots : « , le cas échéant retenues avant application de l’abattement prévu au I de l’article 150 VC du même code ».
V. – Le présent article est applicable :
a) À compter de l’imposition des revenus de l’année 2010 pour la majoration de taux mentionnée au I ;
b) Aux revenus perçus ainsi qu’aux gains et profits réalisés à compter du 1er janvier 2011 et aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2011 pour la majoration de taux prévue au II ;
c) Aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2011 pour la majoration de taux prévue au III ;
d) (nouveau) Aux revenus du patrimoine mentionnés à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale perçus à compter du 1er janvier 2010 pour la majoration de taux prévue au IV quater ;
e) (nouveau) Aux produits de placements mentionnés au I de l’article L. 136-7 du même code et à ceux mentionnés au II du même article pour la part de ces produits acquise et, le cas échéant, constatée à compter du 1er janvier 2011, pour la majoration de taux prévue au IV quater ;
f) (nouveau) À la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l’année 2011 pour le IV quinquies ;
g) (nouveau) Aux plus-values réalisées à compter du 1er janvier 2011 pour les IV sexies et IV septies.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l’article.
M. Thierry Foucaud. L’article 3 du projet de loi de finances vise, entre autres, à améliorer la participation de certains revenus du capital et du patrimoine au financement de notre régime de sécurité sociale, et, singulièrement, de notre régime d’assurance vieillesse, à la suite de la promulgation de la loi portant réforme des retraites.
Il s’agit, notamment, de majorer d’un point le taux d’un certain nombre de prélèvements libératoires, notamment de ceux qui concernent les plus-values de cessions d’actifs.
Je dois avouer, monsieur le ministre, que vous faites très fort !
M. Robert del Picchia. Il est très fort !
M. Thierry Foucaud. Présenter comme une avancée majeure le relèvement du taux d’imposition des plus-values des particuliers d’un point – hors bouclier fiscal – n’est rien d’autre qu’une forme de mystification.
Que le rapporteur général s’y oppose est somme toute ordinaire, le jeu du débat parlementaire étant peut être de renforcer l’« audace » et le « courage » du Gouvernement au regard de ce qui pourrait être la position de sa majorité.
En clair, la mesure n’est qu’une simple égratignure faite aux privilèges exorbitants accordés aux détenteurs de gros patrimoines, dont ces derniers auront tôt fait de se remettre, ne serait-ce qu’en adaptant à la hausse le prix de vente de leurs actifs pour compenser le surplus d’impôt à payer !
Vous avez concédé cette « mesurette » – elle doit rapporter environ 200 millions d’euros, étant donné que nous comptons 18 milliards d’euros de plus-values imposées par retenue à la source – parce que cela aurait « fait désordre » de ne demander des efforts qu’au monde du travail. Vous pouvez donc la présenter avantageusement comme une mesure d’équité, et ne vous en êtes pas privés !
Réalisez-vous que l’obligation imposée aux trois millions de smicards de notre pays de cotiser deux ans de plus correspond à 5 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires, sans, que je sache, le montant des pensions en soit pour autant augmenté ?
Alors, assez d’hypocrisie et de tromperie ! Pas de faux- semblants, pas de communication facile sur des mesures de portée très limitée !
Le taux de prélèvement recommandé – 19 % au lieu de 18 % – est tout de même assez nettement éloigné du taux maximal de l’impôt sur le revenu fixé aujourd’hui à 40 %, je le rappelle.
Certes, nous sommes également partisans de la sollicitation des revenus du capital et du patrimoine, mais d’une sollicitation plus significative, parce que nous sommes encore loin de l’égalité devant l’impôt.
De surcroît, de notre point de vue, c’est bel et bien le moment d’agir ! En effet, l’on constate que le CAC 40 tend à se raffermir, bien que – ou peut-être en est-ce la cause ? –la situation économique et sociale se dégrade et que les prix de l’immobilier soient repartis à la hausse, au motif que le Gouvernement a annoncé la suppression de la réduction d’impôt sur les intérêts d’emprunt.
Toujours est-il que les membres du groupe CRC-SPG ne voteront évidemment pas, en l’état, l’article 3.
Mme la présidente. Je suis saisie de quinze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les amendements nos I-140 et I-219 sont identiques.
L'amendement n° I-140 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° I-219 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les articles 117 quater et 125 A à 125 C sont abrogés ;
2° L'avant-dernier alinéa du 1 de l'article 187 est supprimé.
II. - Le présent article est applicable aux revenus perçus ainsi qu'aux gains et profits réalisés à compter du 13 octobre 2010.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° I-140.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Par le biais de cet amendement, nous vous proposons d’aligner la fiscalité des revenus du capital sur celle des revenus du travail.
Aujourd’hui, en effet, rien ne justifie la différence de traitement entre ces deux types de revenus : les dividendes, les intérêts, les plus-values doivent être réintégrés à l’impôt sur le revenu au barème progressif.
Le prélèvement libératoire permet de ne taxer ces revenus qu’à hauteur de 18 %, ce qui constitue une différence de traitement fiscal injustifiée au regard non seulement du taux, mais également de l’augmentation rapide et continue des revenus du capital ces dernières années.
Il est donc temps d’adapter la fiscalité à la situation économique actuelle de notre pays.
Je ne reviendrai pas sur le caractère extrêmement avantageux de la fiscalité pesant sur les revenus du patrimoine, à l’image du dispositif Scellier en faveur de l’investissement qui permet de déduire des sommes très importantes de l’impôt sur le revenu.
Les dispositifs actuels, dont fait partie le prélèvement forfaitaire libératoire, sont obsolètes économiquement et parfaitement injustes tant socialement que fiscalement.
Nous vous proposons donc d’introduire une mesure qui serait parfaitement comprise par nos concitoyens, pour ne pas dire appelée de leurs vœux.
Il est inacceptable que les revenus du capital ne subissent pas le même sort que les revenus du travail et ne soient pas imposés au barème progressif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l'amendement n° I-219.
Mme Nicole Bricq. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai en même temps les amendements nos I-219 et I-220, parce qu’ils relèvent de la philosophie que nous avons exposée lors de la discussion générale : l’alignement de la fiscalité des revenus du travail et des revenus du capital, et la stigmatisation du prélèvement libératoire.
D’année en année, depuis 2002, tous les gouvernements n’ont eu de cesse de baisser le taux du prélèvement libératoire sur les revenus du capital.
D’aucuns nous diront que nous devrions repousser cette discussion au moment de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2011. Nous le refusons, parce que les injustices se sont accumulées par rapport aux revenus du travail.
Surtout, le principe même du prélèvement libératoire, que vous pourriez très bien relever modestement de 18 % à 19 %, alors que vous n’avez cessé de le diminuer chaque année, de loi de finances en loi de finances, ne doit pas faire écran à la réalité de l’atteinte portée à la progressivité de l’impôt : l’imposition est la même, que l’on tire un petit ou un important revenu de son capital.
L’effet « redistributif » du dispositif actuel est complètement nul ; ce mécanisme est même régressif.
À nos yeux, ce débat est important.
S’agissant de l’amendement n° I-219, il vise les revenus du capital, intérêts et dividendes. Je rappelle que le dispositif actuel a été introduit en 2006. Substituant à l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu une imposition proportionnelle au taux de 18 % – majoré à 19 % dans le présent projet de loi –, il n’est, par définition, favorable qu’aux contribuables dont le taux moyen d’imposition, compte tenu de l’application du barème, est supérieur à ce niveau.
Or il faut tout de même souligner que moins de un contribuable sur dix paie un impôt sur le revenu dont le taux moyen dépasse 10 %. Il faut d’ailleurs remarquer que, paradoxalement, certains contribuables modestes optent pour le prélèvement forfaitaire, alors même que son application leur est plus défavorable que le barème de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. C’est le monde à l’envers ! Cette méthode a été généralisée, et ce n’est pas acceptable !
L’amendement n° I-220, quant à lui, vise les plus-values de cessions mobilières et immobilières. Notre proposition doit évidemment s’articuler avec les règles d’assiette concernant les plus-values dont certaines peuvent être conservées.
Ne m’opposez pas, mes chers collègues, qu’une telle mesure affecterait les ménages modestes qui réaliseraient des cessions. Elle est préférable aux propositions visant à relever le taux proportionnel d’imposition, dès lors que l’imposition moyenne qu’ils doivent acquitter au titre de l’impôt sur le revenu est inférieure au taux proportionnel.
Un tel dispositif est favorable à la fois à la diminution du niveau d’imposition des ménages modestes, puisque l’impôt sur le revenu leur est plus favorable, et à une majoration de l’imposition des ménages les plus aisés, qui bénéficient actuellement d’un prélèvement proportionnel à un taux inférieur à leur taux moyen d’imposition.
Si vous souhaitez que nous argumentions sur l’effectivité du barème de l’impôt sur le revenu, qui est régressif au fur et à mesure de l’échelle des revenus, nous pourrons y procéder lors des explications de vote.
Mme la présidente. L'amendement n° I-220, présenté par Mme Bricq, MM. Marc et Repentin, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Au 2. de l'article 200 A du code général des impôts, après les mots : « imposés au », la fin de l'alinéa est ainsi rédigée : « titre de l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires selon le barème visé à l'article 197 du code général des impôts ».
II. - L'article 200 B du même code est ainsi rédigé :
« Art. 200 B. - Les plus-values réalisées dans les conditions prévues aux articles 150 U à 150 UC sont imposées au titre de l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires selon le barème visé à l'article 197 du code général des impôts. »
III. - Le présent article est applicable aux revenus perçus ainsi qu'aux gains et profits réalisés à compter du 13 octobre 2010.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° I-319, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 2
Remplacer le taux :
19 %
par le taux :
30 %
et le taux :
41 %
par le taux :
50 %
III. - Alinéa 6
Remplacer le taux :
19 %
par le taux :
30 %
IV. - Alinéa 7
Remplacer le taux :
41 %
par le taux :
54 %
et les taux :
18 % à 19 %
par les taux :
18 % à 30 %
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Pour mettre un terme au handicap créé, pour les épargnants et les entreprises françaises, par l’existence de l’avoir fiscal, le Gouvernement a mis en œuvre une réforme profonde de la fiscalité du patrimoine, conduisant d’une part, à unifier, plutôt à la baisse, le taux d’imposition des plus-values de cessions d’actifs et, d’autre part, à mettre en place un nouveau dispositif de prélèvement libératoire pour les dividendes perçus par les particuliers.
Cette démarche s’est avérée particulièrement coûteuse pour les finances publiques, et elle n’a évidemment pas permis de mettre un terme à l’inégalité profonde qui demeure dans le traitement fiscal et social des salaires au regard des revenus du capital.
En effet, un revenu salarial peut, dans l’absolu, être soumis à une imposition au taux de 40 % et ce après avoir subi des prélèvements sociaux d’environ 20 % sur la rémunération brute. Le revenu net d’impôt est de 57,6 euros pour un salaire brut de 120 euros.
Pour ce qui concerne une plus-value, les prélèvements sociaux sont aujourd’hui de 12,1 %, tandis que le prélèvement libératoire optionnel s’élève à 18 %. Par conséquent, le revenu net d’impôt est de 86,5 euros pour une plus-value de 120 euros.
Force est de constater une moindre reconnaissance et une plus forte taxation du travail.
Notre proposition est donc simple : elle vise à réduire cette différence de traitement en procédant à un relèvement significatif du taux d’imposition des plus-values au prélèvement libératoire.
Nous proposons de faire passer ce taux de 18 % à 35 %. Ainsi, dans la pratique, la plus-value de 120 euros susvisée supporterait désormais un prélèvement fiscal et social proche du traitement réservé aux salaires.
Ce serait un pas vers l’égalité de traitement entre revenus du capital et revenus du travail, condition nécessaire et indispensable à l’équilibre de notre système de prélèvements obligatoires et à l’amélioration des comptes publics.
Mme la présidente. L'amendement n° I-128, présenté par MM. Fouché, Détraigne, Bécot, Lefèvre, Pierre, Milon et Gilles, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le taux :
41 %
par le taux :
41,8 %
Cet amendement n’est pas soutenu.
Les trois amendements suivants sont présentés par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° I-365, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 7
Remplacer le taux :
41 %
par le taux :
43 %
L'amendement n° I-366 est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le taux :
19 %
par le taux :
24 %
II. - En conséquence, alinéa 7
Remplacer les mots :
18 % à 19 %
par les mots :
18 % à 24 %
L'amendement n° I-367 est ainsi libellé :
I. - Alinéa 6
Remplacer le taux :
19 %
par le taux :
22 %
II. - En conséquence, Alinéa 7
Remplacer les mots :
16 % à 19 %
par les mots :
16 % à 22 %
Ces amendements ne sont pas soutenus.
L'amendement n° I-221, présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer le taux :
19 %
par le taux :
20 %
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements nos I-221 et I-222, qui s’inscrivent dans la même logique. Vous l’aurez compris, il s’agit de trouver une recette de substitution pour résoudre les problèmes posés par l’article 99 du présent projet de loi de finances.
Vous le savez, cet article a vocation à établir un dispositif de péréquation pour le financement du logement qui, en définitive, conduirait à opérer un prélèvement de 340 millions d’euros sur les organismes gestionnaires de logements sociaux. Or nombre d’élus craignent que cette somme ne soit payée, in fine, par les locataires des logements de cette nature, ce qui serait, de notre point de vue, tout à fait inacceptable. De surcroît, une telle ponction pénaliserait lourdement le logement social.
Par conséquent, il convient de trouver une autre recette de substitution qui nous paraîtrait plus légitime, dès lors que nous voulons tout de même atteindre l’objectif recherché à travers la péréquation.
Ces deux amendements ont vocation à flécher le prélèvement qui pourrait être opéré en substitution.
L’amendement n° I-221 vise à proposer une augmentation de 19 % à 20 % de la taxation des plus-values immobilières, afin de compenser ce prélèvement sur les organismes d’HLM prévu à l’article 99 du projet de loi de finances.
L’amendement n° I-222 tend à créer une taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux.
Il s’agit bien, vous l’aurez compris, d’éviter que les occupants des logements sociaux ne soient mis à contribution, et de tenir compte du fait que les transactions immobilières repartent aujourd’hui de plus belle. Les plus-values immobilières vont de nouveau augmenter dans des proportions importantes, et les droits de mutation à titre onéreux ont recommencé à progresser de façon significative. Il ne me paraît donc pas anormal de solliciter ces revenus.
Tel est le sens de ces deux amendements, qui, à nos yeux, correspondent bien à notre philosophie en ces temps de crise : prélever les ressources nécessaires sur ceux qui ont les moyens, plutôt que sur ceux qui ne perçoivent que de très modestes revenus, comme, en particulier, les occupants des logements sociaux.
Mme la présidente. L'amendement n° I-110, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, du Luart, Gilles et Milon, Mme Sittler, M. Chatillon et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les taux :
16 % à 19 %
par les taux :
16 % à 17 %
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Initialement, le Gouvernement avait proposé d’augmenter le taux d’imposition forfaitaire applicable aux plus-values immobilières d’un point, en le faisant passer de 16 % à 17 %, afin d’assurer le financement des mesures adoptées dans le cadre de la réforme des retraites.
Le présent amendement a pour objet de revenir à cette intention initiale, ce taux ayant été porté à 19 % par les députés.
Or, selon les prévisions du Gouvernement, l’essentiel des recettes attendues proviendrait de l’augmentation du taux de prélèvement social sur le revenu du capital, qui passe également de 2 % à 2,2 %, et s’élèverait à 206 millions d’euros et non à 340 millions d’euros, comme prévu.
Mme la présidente. Les amendements nos I-2 et I-34 sont identiques.
L'amendement n° I-2 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-34 est présenté par MM. Houel, du Luart, Beaumont, Bécot et P. Dominati, Mlle Joissains et MM. Fouché et Revet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 3 à 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° I-2.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous attachons une certaine importance à cet amendement.
Différentes mesures ont été prises en matière de fiscalité de l’épargne de manière à financer la réforme des retraites. Nous nous réjouissons d’avoir livré à bon port cette dernière, édifice pourtant assez compliqué. Par conséquent, n’y revenons pas !
Par ailleurs, d’autres mesures, qui relèvent également de la fiscalité de l’épargne, sont affectées au remboursement de la dette sociale et font partie d’un cocktail assez complexe de ressources que seul, sans doute, notre collègue Jean-Jacques Jégou, doit comprendre, tellement le sujet est épineux !
Toutefois, d’autres mesures, adoptées par la commission des finances de l’Assemblée nationale, dépassent le besoin de financement du remboursement de la dette sociale et de la réforme des retraites. Elles nous semblent donc devoir être disjointes du présent projet de loi de finances
En la matière, il nous semble préférable d’attendre l’examen, prévu au printemps prochain, du projet de loi de finances rectificative, annoncé par le Président de la République, dont la préparation a été confirmée par le ministre du budget, et qui sera l’occasion d’avoir une vision globale et transversale de l’imposition des revenus du patrimoine. Pour l’instant, nous devons préparer cette réforme, et non la préempter.
C’est pourquoi l’amendement n° I-2 vise à supprimer le report de l’entrée en vigueur de l’abattement applicable aux plus-values mobilières en cas de détention des titres pendant une longue durée.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° I-34.
M. Philippe Dominati. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° I-222, présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Il est institué une taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux d'immeubles et de droits immobiliers perçus par les collectivités locales sur les seuls logements visés au 1° du 1 de l'article 1584 du code général des impôts et au 1° de l'article 1595 bis du même code. Son taux est fixé à 0,10 %.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-3, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéas 13 à 15, 22 et 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement procède du même raisonnement que l’amendement n° I-2.
Il s’agit de supprimer la soumission à la CSG dès le premier euro des plus-values immobilières et des plus-values professionnelles portant sur des immeubles bénéficiant d’un abattement de 10 % à compter de la sixième année.
Nous pourrons réexaminer un tel dispositif dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, attendu au printemps prochain.
Mme la présidente. L'amendement n° I-458, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 18
Remplacer les mots :
de taux
par les mots :
du taux de 18 %
II. - Après l'alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« b bis) Aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2011 pour la majoration du taux prévu à la première phrase du premier alinéa du 6 de l'article 200 A prévue au II ; »
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, chargé de la fonction publique. Cet amendement a pour objet de préciser la date d’entrée en vigueur de la mesure, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à augmenter d’un point le taux maximal d’imposition applicable aux gains de levées d’options, désormais fixé à 41 %. Il tend à soumettre à cette majoration l’ensemble des gains de levées d’options sur titres dont la cession interviendra à compter du 1er janvier 2011.
Il s’agit ainsi d’assurer une cohérence avec l’entrée en vigueur du taux majoré d’imposition des plus-values de cessions de titres.
À défaut, les options sur titres levées avant le 1er janvier 2011 et cédées après cette date ne seraient pas soumises à la majoration d’un point du taux d’imposition des gains de levées d’options.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je m’efforcerai d’être synthétique.
La commission est favorable à l’amendement de précision qui vient d’être présenté par M. le secrétaire d’État.
En revanche, elle est défavorable à tous les autres amendements, non pas sur le fond, mais parce qu’il lui semble que les propositions qu’ils contiennent devront plutôt être versées au débat qui aura lieu au printemps prochain sur les questions relatives à la réforme de la fiscalité du patrimoine et des revenus du patrimoine, un débat que, je l’espère, nous allons tous ensemble préparer d’ici là.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements nos I-2, I-3 et I-34, et défavorable sur les autres amendements présentés dans le cadre de cette discussion commune.
Comme M. le rapporteur général, le Gouvernement ne s’oppose pas à ces amendements par principe, mais dans un souci de cohérence, afin de ne pas anticiper sur le débat que nous aurons l’an prochain sur la fiscalité du patrimoine.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-140 et I-219.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l'amendement n° I-110 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° I-110 est retiré.
La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote sur les amendements identiques nos I-2 et I-34.
M. Bernard Vera. M. le rapporteur général nous invite à rendre un peu moins efficace l’article 3 du présent projet de loi, en revenant à sa rédaction initiale et en en supprimant les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale.
Celles-ci contribuaient à accroître, en quelque sorte, le rendement de l’article 3, en procédant à une fiscalisation, dès le premier euro, des plus-values de long terme et des plus-values immobilières, qui faisaient jusqu’ici l’objet d’un abattement spécial lié à la durée de détention des biens.
L’examen de ce dispositif engage, avec un peu d’avance, le débat sur la fiscalité du patrimoine et souligne les enjeux de la réforme fiscale annoncée cette semaine par le Président de la République.
Dans les faits, l’imposition des plus-values au premier euro ne nous choque pas nécessairement, mais force est de constater que les « petits bénéficiaires » de plus-values seront bien plus mis à contribution que ceux dont la profession est d’en réaliser de très importantes.
Nous n’approuvons cependant pas la volonté de M. le rapporteur général de venir au secours des détenteurs de plus-values mobilières de long terme et de plus-values immobilières qui, alors qu’ils sont largement exonérés d’imposition sur le revenu par le régime particulier, bénéficient aussi d’une large exonération au titre des contributions sociales.
La fiscalité du patrimoine doit, en réalité, être repensée pour éliminer toutes les mesures dérogatoires permettant à quelques contribuables avisés de réaliser de juteuses opérations d’optimisation.
Pour ce qui concerne les plus-values, notre position est arrêtée de longue date : il convient de les taxer dès le premier euro selon le barème progressif, l’objectif étant non seulement de financer les retraites, mais aussi de répondre à d’autres besoins en matière de finances publiques.
Toute autre considération ne peut légitimement être prise en compte, notamment au moment où l’on impose aux Français une cure d’austérité de longue durée, assortie d’une hausse déguisée des impôts.
L’effort doit être partagé, sinon c’est l’injustice !
C’est la raison pour laquelle nous ne voterons pas les amendements présentés par M. le rapporteur général sur cet article 3.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je suis quelque peu surprise, sans l’être vraiment, par l’amendement n° I-2.
J’ai bien compris que M. le rapporteur général voulait revenir sur une disposition qui tend à entamer les plus-values des détenteurs de revenus du capital. Outre qu’une telle démarche est en complète contradiction avec nos propres positions, je ferai remarquer que, au cours des travaux qu’elle a mené sur les causes de la crise financière, la commission des finances a identifié les actions à court terme comme un facteur de risque majeur.
De surcroît, la mesure adoptée par les députés, que vous voulez supprimer, monsieur le rapporteur général, vise à favoriser la détention de l’épargne mobilière sur le long terme. Or vous avez soutenu, à plusieurs reprises, l’idée selon laquelle il faut favoriser l’investissement de longue durée. Il vous faudra assumer cette contradiction !
La mise en œuvre des principes proclamés obéit décidément à une géométrie bien variable…
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-2 et I-34.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 3
Mme la présidente. Je suis saisie de vingt amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos I-157 rectifié, I-276 rectifié, I-313 rectifié et I-375 rectifié sont identiques.
L'amendement n° I-157 rectifié est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° I-276 rectifié est présenté par M. Jarlier.
L'amendement n° I-313 rectifié est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-375 rectifié est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, MM. Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 1eret 1649-0 A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° I-157 rectifié.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cet amendement vise à supprimer le trop fameux bouclier fiscal, symbole éclatant de l’injustice de la politique du Gouvernement en matière fiscale qui favorise les plus riches au détriment des plus pauvres et qui a conduit plus de 1 100 contribuables à percevoir en moyenne plus de 300 000 euros sans le moindre effort, alors que, chaque jour, des milliers de Français « triment » pour boucler leurs fins de mois !
Ce bouclier fiscal est indécent : il traduit le mépris du Gouvernement pour les classes populaires et sa fascination pour les hauts revenus, qu’il entretient par divers outils fiscaux très favorables.
L’annonce faite par le Président de la République lors de son intervention télévisée est un véritable marché de dupes : en conditionnant la suppression du bouclier fiscal à celle de l’ISF, c’est, en réalité, une aggravation de l’injustice fiscale qu’il cherche à nous imposer.
Je vous laisse faire le compte : l’État récupère d’une main 679 millions d’euros grâce à la suppression du bouclier fiscal, tandis qu’il donne de l’autre 4 milliards d’euros grâce à celle de l’ISF !
Nul besoin de sortir de HEC pour comprendre la manipulation ! Derrière la suppression du bouclier fiscal se cache, en réalité, une mesure encore plus indécente : les riches pourront désormais bénéficier, en plus des niches fiscales, d’une économie cinq fois plus importante que celle que leur procurait le bouclier fiscal ! Quelle hypocrisie ! Finalement, du point de vue des recettes budgétaires, l’État perdra plus de 3,3 milliards d’euros, au lieu des 600 millions d’euros dus au bouclier !
Comment ne pas être scandalisé par cette manipulation ?
Depuis dix ans, plus de 40 milliards d’euros de baisses d’impôts sur le revenu ont été enregistrés, les niches fiscales injustes et les cadeaux qui profitent aux seuls plus riches sont de plus en plus nombreux, tandis que les plus pauvres se voient supprimer les quelques avantages auxquels ils ont droit.
Comment expliquer à nos concitoyens les plus pauvres et les plus précaires qu’ils devront désormais payer de leur poche une partie de l’aide juridictionnelle totale ou à des étudiants boursiers qu’ils devront acquitter la totalité de leurs frais de transport, tandis que les plus riches vont s’enrichir encore un peu plus, grâce aux largesses inconsidérées de votre gouvernement ?
Un comble dans une société démocratique qui se targue de solidarité que de faire payer les plus pauvres et d’exonérer les plus riches !
Il suffit de regarder le sort réservé aux étrangers : avec la loi de modernisation de l’économie, ou LME, la majorité étend aux étrangers les plus riches vivant en France depuis plus de trois ans les mesures du bouclier fiscal, tandis que, dans le même temps, elle veut faire payer aux étrangers sans papiers, les plus pauvres et les plus précaires, un forfait de trente euros pour l’accès à l’aide médicale d’État !
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons la suppression de ce symbole de l’indécence, ce symbole de l’injustice.
Mme la présidente. L'amendement n° I-276 rectifié, n'est pas soutenu.
La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l’amendement n° I-313 rectifié.
M. Bernard Vera. Comme le précédent, cet amendement tend à revenir sur le bouclier fiscal, dispositif créé par la loi de finances de 2006 et amélioré depuis, notamment par la loi TEPA.
Les attentes de l’époque n’ont d’ailleurs pas été concrétisées.
Alors que l’on nous annonçait près de 100 000 bénéficiaires et plusieurs centaines de millions d’euros de remise d’impôts, en réalité, le bouclier fiscal peine à trouver son audience.
En 2010, moins de 20 000 demandes de restitution ont été enregistrées, dont la majeure partie porte sur des montants faibles, inférieurs à 800 euros.
Cependant, moins de 1 200 contribuables très fortunés et imposés comme tels ont bénéficié, quant à eux, de 423 millions d’euros de restitution, c’est-à-dire qu’ils ont capitalisé les deux tiers de la dépense fiscale !
Tout ce qui avait été dénoncé lors de l’instauration du dispositif a été confirmé par les faits.
Oui, le bouclier fiscal est particulièrement luxueux, puisque le plafonnement des impôts en fonction du revenu profite, pour l’essentiel, comme nous le disions, à « ceux qui sont déjà concernés par le plafonnement de l’impôt de solidarité sur la fortune, soit environ 5 000 personnes, parmi lesquelles les deux tiers ont un patrimoine net supérieur à 6,9 millions d’euros ».
Oui, l’essentiel de la dépense fiscale globale est concentré entre quelques mains, comme nous l’a prouvé l’actualité récente, avec la double révélation de l’identité de la principale bénéficiaire du dispositif.
Indépendamment du médiocre effet économique des articles 1er et 1649-O A du code général des impôts, il est parfaitement évident que c’est dans le champ de l’impôt de solidarité sur la fortune que le bouclier fiscal joue pleinement son rôle.
Or la situation désastreuse des comptes publics impose d’autres choix que ceux qui ont encore cours.
Par ailleurs, il y a quelque mystification à laisser croire que c’est le travail qui serait trop taxé, alors que l’on réduit, avec le bouclier fiscal, le montant de l’ISF d’une poignée de contribuables...
Par conséquent, nous ne devons pas laisser subsister dans notre législation une disposition parfaitement injuste et qui ne profite décidément qu’à quelques-uns, et absolument pas à la collectivité.
Mme la présidente. L'amendement n° I-375 rectifié, n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-249 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1er du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. L’argumentation que je vais vous exposer, mes chers collègues, est bien connue : elle a été développée maintes fois dans cette enceinte, notamment lors de la discussion sur les orientations budgétaires. Il s’agit de remettre en cause le dispositif du bouclier fiscal totalement injuste, eu égard aux méfaits qu’il engendre sur le plan de la fiscalité.
M. le ministre du budget nous avait indiqué, voilà quelques semaines, je le rappelle, que le bouclier fiscal pouvait être perçu aujourd’hui comme « un symbole d’injustice. »
Cette prise de conscience implicite devrait donner lieu à quelques décisions visant à corriger cette injustice.
Les chiffres cités à l’instant par mon collègue Bernard Vera montrent à quel point nous sommes éloignés des estimations qui nous ont été fournies au moment de la mise en place du bouclier et, surtout, lors de l’examen de la loi TEPA qui a conduit à sa diminution à 50 % : 1 200 contribuables perçoivent 423 000 euros chacun et consomment les deux tiers de l’enveloppe.
L’argument fallacieux avancé pour nous convaincre du bien-fondé de la mesure selon lequel celle-ci servirait principalement à des petits contribuables s’est avéré inexact. En réalité, certains bénéficiaires paient 17 % ou 18 % d’impôts, comme la presse l’a révélé récemment à propos de quelques gros contribuables français. Cela démontre, s’il en était encore besoin, à quel point le bouclier fiscal est aujourd’hui symbole d’injustice et pénalise la crédibilité de la gouvernance publique dans notre pays.
Que les gouvernements, quels qu’ils soient, soient attentifs : s’ils veulent réussir à mener à bien la réforme de la fiscalité, ils doivent détenir un minimum de légitimité. Or cette dernière sera appréciée en fonction de la crédibilité des dispositifs qu’ils auront mis en place.
Le dispositif du bouclier fiscal démontre à tout le pays qu’il y a aujourd’hui deux poids deux mesures. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé, une nouvelle fois, cet amendement tendant à sa suppression.
Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont présentés par M. Masson.
L'amendement n° I-45 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les 4 et 5 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« 4. Pour l’ensemble des contribuables, l’aide prend la forme d’un crédit d’impôt sur le revenu égal à 50 % des dépenses mentionnées au 3 au titre des services définis aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail, supportées au titre de l’emploi, à leur résidence, d’un salarié ou en cas de recours à une association, une entreprise ou un organisme, mentionné aux b ou c du 1.
« Les dispositions de l’alinéa précédent ne s’appliquent qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû. »
II. – Les articles 1er et 1649-0 A du code général des impôts sont abrogés.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 402 bis et 403.
L'amendement n° I-46 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après l'article 885 H, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - L'immeuble occupé à titre de résidence principale par son propriétaire dont la valeur vénale réelle est inférieure ou égale à 300 000 € n'est pas compris dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune. » ;
2° À la première phrase du second alinéa de l'article 885 S, les mots : « 30% est effectué sur la valeur vénale réelle de l'immeuble » sont remplacés par les mots : « 300 000 € est effectué sur la valeur vénale réelle de l'immeuble ».
II. - Les articles 1er et 1649-0 A du code général des impôts sont abrogés.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-41 rectifié est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter du 1er janvier 2011, l’article 1649-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le e et le f du 2 sont abrogés ;
2° Au a du 4, après les mots : « Des revenus nets soumis à l’impôt sur le revenu, majorés, le cas échéant, », sont insérés les mots : « d’une part, du montant des niches fiscales, d’autre part, » ;
3- Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« 10. Le total des restitutions effectuées en application du présent article à un contribuable ne peut être supérieur à 50 000 euros. »
Ces amendements ne sont pas soutenus.
L'amendement n° I-139 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
I. - Au dernier alinéa du 1 du I de l'article 197, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 46 % ».
II. - Au premier alinéa du 1 du I de l'article 117 quater, au premier alinéa du 1°, au 1°bis, au premier alinéa du 6°, au 7°, aux premier et second alinéas du 8° et au premier alinéa du 9° du III bis de l'article 125 A, au premier alinéa du I de l'article 125 C, au quatrième alinéa du 1 de l'article 187 et au 2 de l'article 200 A, le taux : « 18 % » est remplacé par le taux : « 28 % ».
III. - Au premier alinéa de l'article 200 B, le taux : « 16 % » est remplacé par le taux : « 21 % ».
IV. - Le a du 2 de l'article 1649-0 A est complété par les mots : « , à l'exception de la fraction supplémentaire d'impôt résultant de l'augmentation de 40 % à 46 % du taux prévu au dernier alinéa du 1 du I de l'article 197, de l'augmentation de 18 % à 28 % du taux prévu au premier alinéa du 1 du I de l'article 117 quater, aux 1°, 1° bis, 6°, 7°, 8° et 9° du III bis de l'article 125 A, au premier alinéa du I de l'article 125 C, au quatrième alinéa du 1 de l'article 187 et au 2 de l'article 200 A, ainsi que de l'augmentation de 16 % à 21 % du taux prévu au premier alinéa de l'article 200 B ».
V. - Le présent article est applicable :
a) À compter de l'imposition des revenus de l'année 2010 pour la majoration de taux mentionnée au I ;
b) Aux revenus perçus ainsi qu'aux gains et profits réalisés à compter du 1er janvier 2011 et aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2011 pour la majoration de taux prévue au II ;
c) Aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2011 pour la majoration de taux prévue au III.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à augmenter la contribution supplémentaire sur les hauts revenus.
Plus de 40 milliards d’euros de baisses d’impôts sur le revenu en dix ans, des niches fiscales toujours plus nombreuses en faveur des plus riches, des rémunérations économiquement inefficaces et socialement injustes, qui atteignent des niveaux extravagants...
Mais, comme vous aimez à nous le rappeler, la France taxe suffisamment, taxe trop ; elle deviendrait même un véritable enfer fiscal pour les plus riches. Pourtant, elle se situe à la troisième place mondiale du point de vue du nombre de millionnaires : elle en compte 9 %. L’Allemagne, que M. Sarkozy aime citer en exemple à propos de n’importe quel sujet, est à la traîne, et pourtant elle n’a pas mis en place de bouclier fiscal.
En cette période difficile pour les finances publiques, mais agréable pour les plus riches, nous vous proposons, mes chers collègues, le présent amendement, qui vise à augmenter la contribution supplémentaire de 1 % à 5 % sur les hauts revenus et sur les revenus du capital.
Cette mesure répond à un impératif de justice sociale et fiscale.
Bientôt, nous rattraperons les sommets atteints aux États-Unis en termes d’explosion des revenus primaires. Indépendamment de cela, vous affirmez que la priorité est de réduire la progressivité de l’impôt !
Comment faire croire à nos concitoyens qu’il faut instaurer de nouvelles franchises médicales pour combler le gouffre de la sécurité sociale si, à côté, on s’insurge lorsque les plus riches doivent payer un peu plus d’impôt, ce qui ne leur posera pas le moindre problème, eu égard à leurs gigantesques revenus, pour boucler les fins de mois, contrairement à une majorité des Français ?
Vous vous apprêtez à faire un nouveau cadeau aux plus riches en supprimant le bouclier fiscal et l’ISF, largesse que l’on peut estimer à 3,6 milliards d’euros.
L’amendement n° I-139 rectifié est donc entièrement justifié face à l’indécence de votre politique, qui, comme d’habitude, consiste à aider les plus riches et à « enfoncer » encore un peu plus les plus pauvres.
Mme la présidente. L'amendement n° I-156 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les c, d, e et f du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Il s’agit d’un amendement de repli par lequel nous proposons de retirer du calcul du bouclier fiscal le montant des impôts locaux, ainsi que celui de la CSG et de la CRDS.
Nous savons tous que ce dispositif profite massivement à nos concitoyens percevant de très hauts revenus, par ailleurs détenteurs des patrimoines les plus importants.
Dès lors que la tranche marginale de l’impôt sur le revenu ne dépasse pas 40 %, le bouclier fiscal concerne essentiellement des contribuables fortement imposés sur leur patrimoine.
En 2008, 755 foyers possédant les patrimoines les plus importants – d’une valeur de plus de 15,5 millions d’euros – et les revenus les plus élevés – supérieurs à 42 500 euros par an –ont touché 66 % des sommes remboursées par le biais du bouclier fiscal ; ils représentaient 5,4 % des bénéficiaires et les sommes perçues correspondaient environ aux deux tiers du coût du dispositif.
En 2009, pratiquement 100 % des sommes relatives au bouclier fiscal ont bénéficié à des contribuables assujettis à l’ISF et plus de 90 % des montants ont été versés à des foyers disposant d’un patrimoine supérieur à 7,36 millions d’euros.
Il n’est pas anormal, au regard de ces chiffres, que les impôts locaux puissent échapper au calcul du bouclier fiscal. Tel est l’objet du présent amendement.
Nous vous proposons également de retirer le montant de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale de ce calcul.
Les très gros revenus sont, en effet, pour partie exonérés de la CSG et de la CRDS. Or ces contributions universelles doivent viser tous les contribuables de manière individuelle et devraient porter sur tous les revenus, y compris sur ceux du capital.
D’ailleurs, le Gouvernement envisage une hausse de ces contributions pour financer la Caisse d’amortissement de la dette sociale ou la dépendance, par exemple : allons-nous continuer à faire payer ces contributions par les moins aisés, tandis que les détenteurs des plus hauts revenus en sont partiellement exonérés ?
Nous refusons que l’effort fiscal soit toujours supporté par les mêmes, les classes moyennes, tandis que les plus riches en sont exonérés. Notre proposition est, en réalité, une mesure de justice fiscale.
Mme la présidente. Les amendements nos I-155 rectifié et I-254 rectifié sont identiques.
L'amendement n° I-155 rectifié est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° I-254 rectifié est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les c et d du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° I-155 rectifié.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Il s’agit d’un amendement de repli ; il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° I-254 rectifié.
Mme Nicole Bricq. Madame la présidente, je souhaite présenter en même temps les amendements nos I-254 rectifié, I-251 rectifié, I-257 rectifié, I-256 rectifié et I-250 rectifié, car ils visent à limiter les effets les plus pernicieux du bouclier fiscal, si notre amendement tendant à la suppression de ce dispositif n’était pas adopté, ce que je n’ose croire eu égard aux déclarations des uns et des autres.
L’amendement n° I-254 rectifié a pour objet d’exclure les impôts locaux du droit à restitution ouvert par le bouclier fiscal.
L’amendement n° I-251 rectifié vise à exclure du calcul du dispositif la CSG et la CRDS.
L’amendement n° I-257 rectifié a le même objet à propos des plus-values immobilières qui ne sont pas passibles de l’impôt sur le revenu, des plus-values immobilières et des plus-values sur cession de biens meubles passibles de l’impôt sur le revenu, avant l’application de l’abattement à 10 % pour durée de détention.
L’amendement n° I-256 rectifié vise à prendre en compte les revenus du patrimoine et les produits de placement avant déduction de la CSG pour la détermination du droit à restitution susvisé.
Quant à l’amendement n° I-250 rectifié, il tend à exclure les impositions portant sur les revenus issus des stock-options, des parachutes dorés et des retraites chapeaux.
Mme la présidente. L'amendement n° I-251 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les e et f du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts sont abrogés.
II. - Le I s'applique pour les restitutions versées en 2011.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° I-158 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au f du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, les mots : « et au III de l'article L. 262-24 » sont supprimés.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement procède du même esprit que les précédents.
Il vise à retirer du calcul du bouclier fiscal le montant de la contribution de 1,1 % sur les revenus de l’épargne que le Gouvernement a créée en même temps que le revenu de solidarité active, le RSA.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que, dans le cadre de la préparation du projet de loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, Martin Hirsch avait exclu l’inclusion dans le bouclier fiscal de la taxe de 1,1 % sur le capital destinée à financer le dispositif. Ceux qui bénéficiaient du bouclier fiscal devaient quand même s’acquitter de cette taxe.
C’est le Président de la République lui-même qui a annoncé que ce nouveau prélèvement serait inclus dans l’assiette des impôts ouvrant droit au plafonnement, permettant ainsi automatiquement aux bénéficiaires du bouclier fiscal d’être exclus de cette imposition. Une fois de plus, on favorisait les plus riches !
Voilà un exemple concret de la possibilité accordée aux personnes disposant des plus hauts revenus de s’exonérer purement et simplement des hausses d’impôts, taxes et autres contributions que les autres Français doivent pourtant, eux, acquitter.
Encore une fois, cela démontre que l’effort fiscal demandé aux Français est toujours supporté par les moins fortunés.
Nous vous proposons donc de revenir à l’esprit des travaux préparatoires de la réforme du RSA.
Mme la présidente. L'amendement n° I-257 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 4 de l'article 1649-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après la référence : « 150 V », la fin de la deuxième phrase du a est ainsi rédigée : « 150 VA, 150 VB, 150 VD et 150 VE. » ;
2° À la première phrase du c, les mots : « des plus-values mentionnées aux II et III de l'article 150 U et » sont supprimés.
II. - Le I s'applique au droit à restitution versé en 2011.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-422 rectifié, présenté par MM. About, Dubois, Détraigne et Maurey, Mme Férat, M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 5 de l'article 1649-0 A du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M Nicolas About.
M. Nicolas About. Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement n° I-419 rectifié, qui relève du même esprit.
Dans sa rédaction actuelle, le dispositif du bouclier fiscal autorise l'application d'une série de diminutions aux revenus pris en compte pour le calcul du droit à restitution.
Ces dispositions abaissent indument le seuil ouvrant droit à restitution et permettent aux bénéficiaires d'optimiser le montant qui leur est restitué. Elles n'ont aucune justification et détournent le dispositif du principe posé à l'article 1er du code général des impôts selon lequel « les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent être supérieurs à 50 % de ses revenus. »
Les présents amendements visent donc à supprimer ces dispositions, afin de corriger cette dérive.
Mme la présidente. L'amendement n° I-256 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 5 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, il est inséré un 5 bis ainsi rédigé :
« 5 bis. Les revenus soumis aux contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale sont retenus avant application de la fraction déductible en application du II de l'article 154 quinquies du présent code. »
II. – Le I est applicable au droit à restitution versé en 2011.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-419 rectifié, présenté par MM. About, Détraigne, Dubois et Maurey, Mme Férat, M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 5 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, il est inséré un 5 bis ainsi rédigé :
« 5 bis. Les revenus soumis aux contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale sont retenus avant application de la fraction déductible en application du II de l'article 154 quinquies du présent code. »
II. – Le I est applicable au droit à restitution acquis à compter du 1er janvier 2012.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-250 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'ensemble des impositions au titre de l'impôt sur le revenu dû par un contribuable au titre de la levée d'une option attribuée conformément à l'article L. 225-177 du code de commerce, de la revente des titres acquis dans ce cadre, au titre des rémunérations différées visées aux articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du même code, ne sont pas prises en compte pour l'application du plafonnement prévu à l'article 1649-0 A du code général des impôts.
II. – Le I s'applique au droit à restitution versé en 2011.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-258 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 1649-0 A du code général des impôts, il est inséré un article 1649-0 B ainsi rédigé :
« Art. 1649-0 B. - L'application du droit à restitution défini à l'article 1649-0 A ne peut conduire à rendre la cotisation d'impôt de solidarité sur la fortune payée en 2010 au titre de 2009 et calculée en application de l'article 885 U inférieure à :
« - 1 230 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 790 000 euros et inférieur ou égal à 1 290 000 euros ;
« - 4 346 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 1 290 000 euros et inférieur ou égal à 2 530 000 euros ;
« - 6 610 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 2 530 000 euros et inférieur ou égal à 3 980 000 euros ;
« - 21 814 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 3 980 000 euros et inférieur ou égal à 7 600 000 euros ;
« - 67 963 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 7 600 000 euros et inférieur ou égal à 16 540 000 euros ;
« - 100 000 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 16 540 000 euros. »
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° I-255 rectifié. Ces deux amendements ont un objet un peu différent de celui des amendements précédents.
L’amendement n° I-258 rectifié concerne l’ISF et les liens incestueux qu’il entretient avec le bouclier fiscal pour permettre à certaines personnes de s’exonérer de la contribution à l’impôt.
De la même façon qu’on institue un plafonnement global des « niches fiscales » à l’impôt sur le revenu, il paraît légitime d’instaurer un plafonnement global des niches fiscales à l’impôt de solidarité sur la fortune qui se sont également multipliées.
Il n’est pas acceptable que la mise en place du bouclier fiscal conduise à créer une nouvelle niche fiscale parmi les plus importantes, au bénéfice des redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune. Il s’agit, si je puis dire, d’une « double niche ».
Le bouclier fiscal représente, en réalité, une mise en cause insidieuse de l’ISF.
Nous proposons que son application ne puisse avoir pour effet de réduire l’imposition due par le contribuable au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune en dessous d’une cotisation minimale calculée pour chaque tranche d’imposition du patrimoine.
L’adoption de l’amendement n° I-258 rectifié ne conduirait pas à relever la cotisation d’impôt de solidarité sur la fortune due par un contribuable par rapport à celle qui est payée hors application du bouclier fiscal. Par le biais de cet amendement, nous voulons simplement nous assurer que des contribuables redevables de l’ISF ne pourront pas purement et simplement annuler leur cotisation grâce à l’application du bouclier fiscal, mais qu’ils resteront redevables d’une cotisation minimale à ce titre.
L’amendement n° I-255 rectifié a pour objet de remettre en cause les transferts fiscaux organisés par la majorité parlementaire pour l’ensemble des ménages, mais surtout en direction d’une petite fraction de contribuables redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune qui représentent moins de 2 % des contribuables français.
L’article 885 I quater du code général des impôts permet, en effet, à un contribuable de bénéficier d’un abattement des trois quarts de la valeur réelle de ses placements dans une ou plusieurs entreprises, à la condition qu’il y exerce, ou y ait exercé, des fonctions de salarié ou de mandataire social.
Plus grave, cette exonération est accordée pour les titres détenus depuis plus de trois ans par un mandataire ou un salarié qui quitte une entreprise pour partir en retraite.
Très directement, ce dispositif vise les salariés et, surtout, les mandataires ayant acquis des titres au travers de mécanismes tels que les stock-options.
Non seulement le Gouvernement a refusé, malgré la multiplication du nombre de scandales depuis 2002, de moraliser réellement ces dispositifs, mais il offre, au contraire, à leurs bénéficiaires de nouveaux cadeaux fiscaux.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer cette disposition.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je m’efforcerai de faire un commentaire global sur tous ces amendements d’inspiration diverse. (Mme Nicole Bricq fait une moue dubitative.)
Ma chère collègue, cette diversité ne ressort pas des arguments qui ont été avancés, mais elle apparaît à la lecture de tous les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui nous sont soumis. J’en veux pour preuve l’amendement de notre collègue Philippe Dominati qui tend à supprimer l’ISF.
M. Philippe Dominati. Mon amendement sera appelé en discussion ultérieurement !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je me permets d’anticiper légèrement, mon cher collègue.
Les membres des groupes de l’opposition souhaitent la suppression immédiate du bouclier fiscal, mais j’aurais tendance à dire, mes chers collègues, que vos approches sont, en quelque sorte, complémentaires. On pourrait les conjuguer, dans la mesure où plusieurs amendements visent à modifier le calcul du bouclier fiscal ou celui de l’ISF.
M. Nicolas About. Oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. À cet égard, les amendements présentés par M. About, notamment, qui s’inscrivent dans le cadre de la législation fiscale telle que nous la connaissons depuis 2007 tendent à apporter des correctifs au calcul du bouclier fiscal.
L’ensemble de ces préoccupations doivent certainement rejoindre la réflexion d’ensemble sur la nouvelle stratégie fiscale qu’il convient de mener à bien pour ce qui concerne les impôts sur le patrimoine et les revenus du patrimoine.
La commission des finances du Sénat a défendu, vous le savez, au cours de plusieurs discussions budgétaires, une position synthétique dont nous nous rapprochons ces jours-ci, du moins dans les intentions. Elle reposait sur ce que nous avons appelé une « trilogie », un « triptyque ».
Le premier élément concerne la suppression du bouclier fiscal.
Ce dispositif se concevait fort bien dans une période de baisse tendancielle de la fiscalité. Mais, dès lors que l’on demande à nos concitoyens de faire des efforts en cette période postérieure à la crise, il est clair qu’il n’est pas supportable d’en excepter les mieux pourvus d’entre eux. Et cette seule constatation conduit à condamner politiquement, de façon probablement irréversible, le bouclier fiscal.
Le deuxième terme, indissociable du premier, a trait à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, outil de délocalisation de capitaux. Cet impôt repose sur la déclaration de valeur vénale que le contribuable a de la peine à établir, surtout s’il s’agit d’un redevable se trouvant à la limite de l’imposition ou dont une part significative de l’imposition provient de la valorisation d’un principal actif, par exemple, une résidence principale.
La commission des finances a toujours eu pour préoccupation, voire pour obsession, d’éviter une réforme fiscale qui ait des conséquences financières sur le solde des administrations publiques et se traduise, en d’autres termes, par un déficit supplémentaire.
La réforme de la taxe professionnelle que nous avons dû mener à bien l’année dernière s’est traduite, elle, par une majoration annuelle récurrente de 5 milliards d’euros du déficit des administrations publiques.
Nous ne pouvons nous permettre de perdre un seul euro avec la réforme fiscale de l’imposition du patrimoine ; il me semble que cette vision est aujourd'hui partagée à la quasi-unanimité.
La suppression du bouclier fiscal et de son enfant, dont je ne sais s’il est naturel ou légitime, l’ISF – vos propos n’ont pas été très éloignés, chère Nicole Bricq – impliquent des compensations, qui font l’objet du troisième et dernier élément de la trilogie.
M. Jean-Pierre Fourcade. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Plusieurs pistes ont été évoquées, chemin faisant, par les uns et les autres, et il va falloir y mettre bon ordre.
Il faut savoir que la fiscalité de l’épargne, en d’autres termes la fiscalité des revenus du capital, n’est pas sans limite. On peut d’ailleurs établir des comparaisons avec les régimes fiscaux existants chez nos voisins.
De plus, en matière de barème d’impôt sur le revenu, sans doute est-il possible d’instituer une tranche marginale supplémentaire, de manière à achever d’équilibrer l’opération en faisant en sorte que la réforme soit réalisée dans un esprit d’équité. Cette réforme doit témoigner d’une vraie simplification en étant lisible et compréhensible.
J’ajouterai un dernier point, qui soulève un paradoxe.
Nous allons consacrer sans doute un temps non négligeable – mais le sujet le mérite ! – à évoquer les niches de l’ISF, notamment la plus belle d’entre elles, très harmonieuse, très bien façonnée, pourrais-je dire, par les métiers d’art que nous incarnons à cet égard, à savoir la réduction d’ISF en cas d’investissement dans les PME.
Connaissez-vous, mes chers collègues, le sujet du jour ?
Des inquiétudes apparaissent dans certains milieux, et on commence à entendre : mais si vous supprimez l’ISF, que deviendra ce régime si intéressant pour le financement des entreprises ? C’est assez paradoxal, mais si l’on pousse cette réflexion à l’extrême, certains interlocuteurs vont nous demander de supprimer l’ISF, mais de garder la niche, en créant un crédit d’impôt pour un impôt qui, par hypothèse, n’existerait plus ! (Sourires.) J’espère que nous n’en arriverons pas là, mais un tel raisonnement montre les contradictions intimes qui caractérisent la fiscalité à la française.
Mes chers collègues, nous avons quelques mois – en réalité, quelques semaines seulement ! – pour préparer le débat sur le projet de loi de finances rectificative.
Toutes vos idées seront prises en compte. Il était parfaitement utile et opportun de les exprimer. Toutefois, vous comprendrez que la commission des finances vous appelle, les uns et les autres, à retirer vos amendements ici et maintenant, toutes ces propositions devant s’intégrer dans un raisonnement plus global et être mises en perspective. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Je ne saurais que faire, avec les mêmes mots, le même développement que M. le rapporteur général, car l’avis du Gouvernement est évidemment identique à celui de la commission.
Le présent débat sur la manière de repenser, de façon ordonnée et cohérente, notre système fiscal est important, personne ne le nie. Des arguments ont été développés avec modération. Les propositions figurant dans la série d’amendements que nous examinons, dont je comprends parfaitement la logique, apportent une pierre à notre réflexion commune.
Des éléments nouveaux ont été présentés par rapport au débat qui a eu lieu à l’Assemblée nationale ces dernières semaines. Ils tiennent compte de l’évolution du contexte budgétaire et financier.
Toute la question a été très bien résumée par M. le rapporteur général : faut-il supprimer le bouclier fiscal maintenant ou attendre un peu ?
Plusieurs faits militent en faveur de la seconde solution. D’abord, nous sommes dans un cadre budgétaire et non spécifiquement fiscal. On peut donc décaler.
Ensuite, le Président de la République a demandé à la Cour des comptes de procéder à une comparaison des dispositifs français et allemand. Il est important d’avoir l’avis de cette instance, qui apporte toujours des éléments pertinents à notre réflexion globale.
En conclusion, le Gouvernement souhaite le retrait de l’ensemble de ces amendements. À défaut, il émettra un avis défavorable. Mais sachez qu’il tient compte, mesdames, messieurs les sénateurs, de vos arguments, dont aucun ne mérite d’être balayé d’un revers de main.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Voilà un moment important. Le grand soir fiscal promis par le Président de la République et la majorité pour le mois de juin prochain, ou en tout cas avant l’été, ne saurait être remis à plus tard, alors que nous pouvons agir dès aujourd’hui.
Notre proposition est fondamentalement différente de celles qui nous sont régulièrement faites par MM. Marini et Arthuis avec leur fameuse trilogie.
Pour nous, je l’ai indiqué lors de la discussion générale, la suppression du bouclier fiscal n’est pas une monnaie d’échange, ni une contrepartie à l’ISF ; c’est un préalable à toute réforme fiscale de fond.
Même si je vous suis sur votre terrain et si je prends en compte, pour la combattre, l’argumentation que vous développez, votre trilogie ne fonctionne pas car, en refusant de vous attaquer aux revenus du capital et même au capital, vous savez très bien que vous êtes loin du compte !
Il faut, dites-vous, augmenter la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu. Faites une grande réforme de l’impôt sur le revenu, affichez les taux réels et appliquez l’effort contributif à toutes les tranches, et particulièrement à celles du haut ; vous avez largement de quoi faire ! Mais comme vous ne voulez pas vous attaquer au prélèvement libératoire, proportionnel et non progressif, vos marges de manœuvre sont bien évidemment très limitées. Aucun des subterfuges que vous pourrez trouver ne permettra jamais de combler ce que représente l’impôt sur la fortune. Par conséquent, même en vous suivant sur votre terrain, je peux être d’autant moins d’accord avec vous que vous mélangez patrimoine et revenu du travail. Vous « larguez » une recette de 4,1 milliards d’euros pour l’année écoulée contre un produit dont le coût devrait être de 665 millions d’euros. Le compte n’y est pas !
Je voudrais également revenir sur vos justifications d’un bouclier fiscal à 50 % dans le cadre de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, appellation fallacieuse d’encouragement au travail, car on a vu ce qu’il en était...
Tous les chiffres de 2008 et de 2009 le montrent, il faut avoir un patrimoine très important, de 15 millions d’euros, pour bénéficier de l’effet maximal du bouclier fiscal. Cela signifie que vous n’encouragez absolument pas le travail. Vous favorisez la rente et la thésaurisation. Mieux vaut être rentier, y compris rentier retraité, que créateur d’entreprise. Alors ne venez pas nous faire la leçon par rapport à vos objectifs de 2007 !
De plus, vous avez justifié le bouclier fiscal en disant que, dans un contexte de compétition internationale, cette mesure empêcherait les départs – ce qui n’a pas été constaté – et favoriserait les retours. Mais le petit mouvement de retour qui a eu lieu en 2008 était dû à l’effet de la crise plutôt qu’au bouclier fiscal ! Par conséquent, même sur l’argumentation liée à l’efficacité, vous n’êtes pas au rendez-vous.
Pour toutes ces raisons, permettez que l’on supprime le bouclier fiscal dès aujourd’hui.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais vous dire combien la tentation est forte de voter l’abrogation du bouclier fiscal,...
Mme Nicole Bricq. Succombez-y !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ... car le réquisitoire est accablant !
M. Bernard Vera. Mais oui !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Lorsque nous avions voté cette mesure, nous pensions qu’elle s’appliquait au revenu de référence. Mais, en fait, elle vise le revenu fiscal, c’est-à-dire après déduction des abattements, réductions, tout ce qui est le fruit de la surabondance des niches fiscales. Par conséquent, le bouclier fiscal est une injustice absolue.
M. Bernard Vera. Absolument !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. De plus, l’objectif visé était de permettre le retour des capitaux. Mais, manifestement, cela n’a pas marché ! Lorsque l’on doit augmenter l’impôt, c’est un drame, car seuls contribuent ceux qui ne bénéficient pas du bouclier fiscal.
Pour faire simple, on vient de voter un point supplémentaire d’imposition, ce qui est une grande simplification dans la fiscalité : une partie de l’impôt est dans le bouclier, l’autre en est exclue. C’est un argument supplémentaire accablant !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faut le dynamiter !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Enfin, l’Europe venant de porter le coup de grâce, il ne reste plus un seul argument en faveur du maintien du bouclier fiscal. Il faut donc le supprimer.
Mme Nicole Bricq. Et tout de suite !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela dit, si nous votions maintenant sa suppression, cette disposition aurait un caractère rétroactif. Or nous devons nous prémunir contre une telle rétroactivité. En même temps, le fait de devoir attendre le printemps prochain me met dans l’embarras, car la mesure non seulement sera aussi rétroactive, mais ne s’appliquera qu’en 2013.
Chers collègues, un vote en première partie de la loi de finances entraînant une rétroactivité de la mesure, je vous proposerai une disposition identique en deuxième partie, afin que la mesure s’applique en 2011 sur les produits fiscaux de 2012.
S’agissant des contreparties, Philippe Marini a admirablement justifié le triptyque. Mais, selon moi, il conviendra de s’orienter vers une tétralogie. En effet, le produit de l’impôt sur le revenu, y compris avec une tranche supplémentaire fixée à 45 %, ne suffira pas à gager la perte de ressources.
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Par conséquent, nous devrons revoir le barème et les assiettes d’imposition des plus-values mobilières et immobilières.
Dans les amendements que je proposerai au nom de la commission des finances et, à défaut, à titre personnel, il sera prévu de mettre à contribution les plus-values dans une optique d’équité, car c’est cela qui nous préoccupe. Et il faut simplifier considérablement.
J’entends bien aussi les appels de tous ceux qui ont monté des opérations de défiscalisation, des officines, des holdings, et mis au point des opérations assez sophistiquées au demeurant, fruit d’une belle intelligence ! Demain, ils vont nous expliquer que c’est dramatique, car la suppression du bouclier fiscal va détruire des emplois. Ne résistons pas à la tentation d’introduire plus de simplicité en supprimant un certain nombre de pages du code général des impôts.
Cette supplique me rappelle les propos que j’entendais à une époque où, exerçant des responsabilités gouvernementales, j’envisageais d’abaisser le taux marginal d’impôt sur le revenu. Je recevais des lettres accablantes de protestations de ceux qui vendaient de la défiscalisation. Ils m’expliquaient que leur argument de vente était justement ce taux marginal qu’ils rêvaient de voir pratiquement fixer à 100 %.
Arrêtons ces opérations totalement artificielles et profondément scandaleuses ! Je vais donc résister à la tentation de voter ces amendements tendant à l’abrogation du bouclier fiscal, mais je ne résisterai pas à celle de déposer un amendement en faveur d’une tétralogie en deuxième partie du projet de loi de finances.
Mme la présidente. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Je tiens à expliquer mon vote sur la suppression du bouclier fiscal, car c’est l’un des principaux points auxquels nous tenons dans la discussion de ce projet de loi de finances.
Je remercie M. le président de la commission des finances de ses propos, qui montrent, tout comme l’expérience vécue depuis trois ans, la pertinence des arguments que nous avions avancés lorsque nous avions abordé ce problème en 2007.
Après l’intervention de M. Jean Arthuis et l’explication de vote de Mme Nicole Bricq, permettez-moi de répondre à la justification selon laquelle ce n’est pas le bon moment pour supprimer le bouclier fiscal.
Le premier argument qui nous a été opposé est que, cette suppression devant s’inscrire dans une nouvelle stratégie fiscale, il était nécessaire d’attendre l’année prochaine pour trouver une solution allant dans le sens d’une simplification.
Je ne trouve pas mon compte dans cet argument lié à la simplification qui nous a déjà été opposé à l’occasion de la réforme de la taxe professionnelle proposée l’année dernière.
En effet, le système étant devenu totalement aberrant, il fallait aussi de la simplification, mais il était trop compliqué pour les entreprises de réformer immédiatement la taxe professionnelle ! Le dispositif d’adaptation qui s’avère nécessaire, mois par mois, année après année, est loin d’être achevé et l’on constate le résultat de cette simplification et la situation complexe dans laquelle on se trouve aujourd’hui.
Mme Nicole Bricq. Oh oui !
M. François Marc. Je crains vraiment que nous n’ayons du mal à concevoir cet argument de simplification eu égard à ce qui s’est passé l’année dernière !
Le second argument est qu’il faut tendre vers plus d’équité. Mes chers collègues, sur quoi se fonde cette idée de loi unique pour une nouvelle stratégie fiscale ? Sur une idée qui est essentielle, que l’on entend depuis des années et qui est simple dans l’esprit de ceux qui veulent la mettre en avant : il faut supprimer l’ISF. Il n’y a aucune raison plus forte que celle-là !
Parler aujourd’hui d’équité et d’amélioration de la justice fiscale dans notre pays, alors même que le fondement de cette stratégie nouvelle est de supprimer l’ISF, c’est vraiment être à côté de l’objectif visé.
Par conséquent, nos arguments en faveur de la suppression immédiate du bouclier fiscal sont incontestables. Certes, nous pourrions souscrire à l’idée du président de la commission des finances, qui préférerait attendre la deuxième partie du projet de loi de finances.
Ces amendements méritent, par principe, d’être soumis aujourd’hui même au vote.
Au regard de tous ces arguments, le moment semble incontestablement venu, mes chers collègues, de supprimer le bouclier fiscal, qui fait tant de mal à notre pays et démotive profondément nombre de nos concitoyens. Ces derniers perdent ainsi le sens de l’initiative et ressentent un sentiment d’injustice.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce débat, tout à fait passionnant, me rappelle ma jeunesse, ce qui est très agréable.
À l’époque où j’exerçais des fonctions gouvernementales, j’avais créé un impôt sur les plus-values intégré dans l’impôt sur le revenu. Or, depuis 1975, le Parlement n’a eu de cesse de sortir les plus-values de l’assiette du barème progressif de l’impôt sur le revenu, en créant des éléments de taxation forfaitaires et proportionnels. J’observe donc avec plaisir que la tendance s’inverse aujourd’hui…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Voilà !
M. Jean-Pierre Fourcade. Au nom du groupe UMP, je souhaite affirmer de la manière la plus claire qu’il n’est pas question de supprimer le bouclier fiscal et l’ISF sans rétablir une imposition équivalente pour ne pas grever le budget de l’État dont l’assiette intègre les plus-values et les revenus du capital.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais pas seulement !
M. Jean-Pierre Fourcade. J’insiste sur ce point, car j’entends dire un peu partout, notamment dans cette enceinte, je lis dans la presse que l’on va concéder un nouveau cadeau aux classes possédantes et aux riches ! Or l’étude sérieuse à laquelle nous allons nous livrer dans les mois prochains pour supprimer le bouclier fiscal et l’ISF doit déboucher sur une taxation des revenus du patrimoine et des plus-values.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela ne suffira pas !
M. Jean-Pierre Fourcade. Peut-être faudra-t-il modifier également la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Quoi qu’il en soit, il n’est pas question, dans la conjoncture budgétaire actuelle et étant donné l’endettement de notre pays, de priver l’État de 4 ou 5 milliards d’euros de recettes ! Il faut le dire de la manière la plus claire, pour éviter tout malentendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.
M. Denis Badré. J’ajouterai simplement quelques mots, à la suite des interventions tout à fait, pédagogiques et lumineuses de M. le rapporteur général et de M. le président de la commission des finances.
L’ISF, comme le bouclier fiscal, a des effets pervers – je pense notamment aux délocalisations –, qui engendrent des injustices. Alors que nous nous efforçons, d’année en année, d’améliorer ces deux dispositifs, nous ne réussissons qu’à les compliquer davantage et à les rendre illisibles. Il est temps de renoncer aux ajustements.
Je me revois ici même, à ce micro, l’année dernière, et peut-être même voilà deux ans, plaidant, comme Jean Arthuis tout à l’heure, en faveur de cette fameuse trilogie, qui s’est depuis enrichie et pourrait devenir une tétralogie.
Je me tournais alors vers mes collègues siégeant sur la gauche de cet hémicycle, leur faisant valoir que la suppression du bouclier fiscal devait être mise en perspective avec une remise en cause de l’ISF. Puis je m’adressais à mes collègues de la majorité, expliquant que, s’ils souhaitaient voir l’ISF disparaître, leur position sur le bouclier fiscal devrait forcément évoluer.
Je constate aujourd’hui que nous avons progressé en la matière. M. le président de la commission a raison de nous proposer d’étudier ce problème au cours de l’examen de la deuxième partie du projet de loi de finances, pour des questions de rétroactivité.
L’année dernière, l’ensemble des membres de mon groupe avaient demandé un scrutin public sur un amendement relatif à ce sujet. Nous avions alors été les seuls à nous prononcer en faveur de cette trilogie, future tétralogie. Mais les temps n’étaient peut-être pas venus ! Aujourd’hui, il semble que la situation ait évolué. Je souhaite que nos propositions se concrétisent à l’occasion de l’examen de la deuxième partie de ce projet de loi de finances pour 2011.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-157 rectifié et I-313 rectifié.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont demandé le retrait de ces amendements.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 104 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 334 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 180 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° I-249 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-139 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-156 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-155 rectifié et I-254 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-251 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-158 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-257 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-422 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-256 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-419 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-250 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-258 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° I-333 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les cotisations d'impôt de solidarité sur la fortune dues au titre de 2011 et des années suivantes font l'objet d'une majoration de 10 %.
Les dispositions des articles premier, 885 I bis, 885 I quater, 885 0-V bis et 1649-0 A du code général des impôts ne sont pas applicables à la majoration.
Cette majoration est constatée, contrôlée et recouvrée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que l'impôt de solidarité sur la fortune.
II. - Pour l'année 2011, les redevables doivent acquitter la majoration au plus tard le 30 juin 2011 auprès de la recette des impôts de leur domicile au 1er janvier 2011.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. En 1995, à la suite de l’élection de Jacques Chirac à la Présidence de la République et en raison de l’état désastreux des finances publiques, le Gouvernement avait été contraint de procéder à une mise à jour fiscale d’importance, en accroissant le taux normal de la TVA, mais aussi de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Ainsi, la majorité parlementaire de l’époque avait consenti une hausse temporaire de 10 % de l’ISF, hors application de toute mesure correctrice.
Bien entendu, les 800 millions de francs attendus de cette disposition n’avaient rien à voir avec les 50 milliards de TVA brute encaissés grâce à la majoration de deux points du taux normal de cette taxe ! Mais le fait est là.
Rappelons que le déficit public atteignait alors 65,5 milliards d’euros et représentait 5,5 points du PIB de l’époque. Il était alors considéré comme particulièrement alarmant et consécutif à un mauvais usage des deniers publics entre 1993 et 1995, malgré l’affectation au budget général des recettes liées aux privatisations.
Ainsi donc, avec un peu plus de 65 milliards d’euros de déficit public, soit moins de la moitié du montant actuel, la décision avait été prise de majorer de 10 % l’ISF.
La situation actuelle des comptes publics et des comptes sociaux, qui est pire qu’en 1995, exige que vous soyez logiques avec vous-mêmes, chers collègues de la majorité. Imposer aux détenteurs des 600 000 patrimoines les plus importants de ce pays un petit effort de solidarité serait la moindre des choses. Cela permettrait à l’État d’engranger 400 millions d’euros de recettes supplémentaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission ne peut pas être favorable à cet amendement, qui soulève les mêmes difficultés que les précédents. Au demeurant, je ne doute pas que ce sujet reviendra à l’ordre du jour dans le cadre de la discussion plus globale que nous aurons d’ici à quelques mois.
Dans l’immédiat, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-333 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-105 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, du Luart, Milon, Chatillon et Revet et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Les articles 885 A à 885 Z du code général des impôts sont abrogés.
II - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 402 bis, 438, 520 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Depuis que je suis parlementaire, chaque année lors de la discussion budgétaire, je dépose, avec un certain nombre de collègues, un amendement visant ni plus ni moins à supprimer l’ISF, dont j’ai maintes fois, avec d’autres, démontré la stupidité d’un point de vue économique.
Le fait de voter le bouclier fiscal et la loi TEPA avec l’ensemble de la majorité présidentielle, au nom d’un principe auquel je crois, même s’il a été mal compris par l’opinion publique, ne m’avait d’ailleurs pas empêché de déposer, comme les autres années, un tel amendement. De fait, je voudrais dire à François Marc que, pour moi, la suppression de l’ISF est indépendante de la nécessité de corriger les effets pervers du bouclier fiscal.
Madame la présidente, je souhaite présenter en même temps que cet amendement, deux autres amendements concernant la résidence principale : le premier vise à exonérer totalement celle-ci de l’assiette de l’ISF ; le second vise à porter l’exonération de 30 % à 40 % de la valeur de la résidence principale de l’assiette de l’ISF.
Cela étant, M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur général ont, par anticipation, exprimé leur avis sur ces trois amendements. En particulier, M. le rapporteur général a expliqué qu’il souhaitait que ce débat sur l’ISF soit reporté et que tous les aspects de celui-ci soient examinés globalement. À cet égard, la décision qu’a prise le Président de la République me réjouit. L’an dernier, après des années et des années de discussion, nous avons enfin voté la réforme de la taxe professionnelle ; eh bien je suis heureux d’apprendre que, normalement, je présente cette année ces trois amendements pour la dernière fois.
Je retire l’amendement n° I-105 rectifié, madame la présidente, de même que je retirerai les amendements nos I-103 rectifié et I-104 rectifié lorsqu’ils seront appelés en discussion.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° I-105 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-334 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 885 I bis à 885 I quater du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’impôt de solidarité sur la fortune a, au fil du temps, été « mité » par un certain nombre de dispositions réduisant tant son assiette que son rendement.
Un sondage publié par un grand quotidien populaire deux jours après l’intervention du Président de la République à la télévision indique que, si une large majorité de Français – 53 % contre 27 % d’opinion contraire – sont favorables à la suppression du bouclier fiscal, une majorité aussi large – 56 % – est opposée à celle de l’impôt de solidarité sur la fortune.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui, mais une majorité de Français est favorable à notre triptyque !
M. Bernard Vera. Ainsi, les Français sont contre le bouclier fiscal et pour l’ISF, et ils sont même favorables à un nouvel impôt sur les plus-values et le patrimoine.
Le présent amendement vise à revenir sur trois niches spécifiques à l’ISF, qui coûtent au total 258 millions d’euros et concernent, selon les mesures, de 10 000 à 15 000 assujettis, soit environ 2 % des redevables de cet impôt.
Il nous semble donc nécessaire, en cette période de déficits publics, que les plus fortunés contribuent à la charge commune de manière plus significative.
Mme la présidente. L'amendement n° I-255 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 885 I quater du code général des impôts est abrogé.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-103 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Milon et A. Dupont, Mme Bout, M. Revet, Mme Sittler, M. Chatillon et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du second alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 100 % ».
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-104 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Milon et A. Dupont, Mme Bout, M. Revet, Mme Sittler, M. Chatillon et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du second alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 40 % ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Comme je l’ai annoncé voilà quelques instants, je retire ces deux amendements, madame la présidente.
Mme la présidente. Les amendements nos I-103 rectifié et I-104 rectifié sont retirés.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos I-334 rectifié et I-255 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Après avoir écouté les partisans de l’abolition du bouclier fiscal, nous avons pris connaissance des arguments de Philippe Dominati en faveur de l’abolition, cette fois-ci, de l’ISF. Nous aurons ainsi fait le tour complet du sujet, dans un mouvement de parfaite symétrie.
Monsieur Vera, je voudrais, rétrospectivement, revenir quelques instants sur la raison pour laquelle les œuvres d’art n’ont pas été incluses dans l’assiette de l’ISF et ne le sont toujours pas à ce jour, et cette décision a été prise sans état d’âme.
Il s’agit d’un motif d’intérêt public qui conduit à défendre le patrimoine et à éviter toute mesure qui pourrait inciter les détenteurs d’œuvres d’art à quitter notre territoire.
Ces rappels étant faits, j’invite naturellement les auteurs de ces amendements à les retirer et à nourrir de leurs idées le débat que nous aurons en 2011 pour faire de celui-ci un bain de jouvence. (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° I-334 rectifié.
Mme Nicole Bricq. Je ne voudrais pas laisser passer ces échanges sans réagir, d’autant que les études dont nous disposons, y compris celle de la commission des finances, nous permettent de prendre un peu de recul sur cette question de l’ISF. Il me semble nécessaire d’en revenir aux fondamentaux.
Vous voulez « tuer » l’ISF au motif qu’il est anti-compétitif, au motif que la France est le seul pays en Europe à l’avoir instauré. Ainsi, toutes les raisons ont été avancées pour le supprimer, y compris par le Président de la République.
Mais, face à ces arguments, voyons les chiffres.
Par définition, les redevables de l’ISF font partie de ce que l’on appelle la « base mobile » : ce sont des contribuables qui se déplacent d’un pays à l’autre. Seulement, à y regarder de plus près, on s’aperçoit que le nombre de redevables tout comme la perte de base et le rapport entre perte budgétaire et rendement global restent stables.
Par ailleurs, tant la commission des finances que le Conseil des prélèvements obligatoires ont montré, dans leur étude respective, que la résidence principale ne représente que 15 % de la base taxable, contre 28 % pour les valeurs mobilières. De fait, le syndrome de l’île de Ré n’a aucune réalité et le discours auquel nous avons eu droit à ce sujet n’a pas lieu d’être.
Clairement, le défaut majeur de cet impôt, c’est l’étroitesse de sa base. Dès sa création, nombre de biens patrimoniaux ont été exclus de son assiette, mouvement qui s’est poursuivi par la suite, puisque vous n’avez cessé de créer de nouveaux mécanismes de « dérivation ». Dès lors, ceux qui l’acquittent peuvent évidemment, sans doute à juste titre, en être pénalisés.
En outre, je rappelle que, lorsqu’il a été créé, l’ISF était plafonné, et c’est vous-même qui avez supprimé ce plafonnement ! Si l’on considère que les biens immobiliers sont pénalisés par l’ISF dans sa forme actuelle, faisons comme l’Allemagne, les Pays-Bas, les États-Unis ou le Canada et créons un grand impôt foncier. Je crains que la trilogie, voire la tétralogie, ne soit complexe à mettre en œuvre, d’une part, et n’ait pas le même rendement fiscal que l’actuel ISF, d’autre part.
Vous avez beau renvoyer le débat sur cette question au printemps prochain, nous sommes, pour notre part, parfaitement éclairés au vu des chiffres dont nous disposons sur l’ISF. Autant nous convenons que cet impôt soit éventuellement réformé, autant nous nous opposons à son abolition.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-334 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-255 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-336 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 885-0 V bis et 885-0 V bis A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’article 16 de la loi TEPA a mis en place un dispositif destiné, en principe, à rendre « utile » l’ISF.
Il s’agit, en effet, de procéder à la réduction du montant de l’impôt à raison des investissements effectués par ses redevables dans le capital des PME.
Dans l’absolu, cette mesure pouvait conduire à faire disparaître 97 % des contribuables de l’ISF, puisque ceux-ci acquittaient moins de 50 000 euros de cotisation.
Dans la pratique, comme chacun sait, il n’en a rien été et les éléments d’analyse disponibles relatifs à l’application de l’article 16 susvisé mettent singulièrement en cause son efficacité. En effet, le nombre de contribuables de l’ISF faisant jouer le dispositif est resté relativement faible et est fort loin de représenter un courant majoritaire.
Si l’on en croit l’évaluation contenue dans l’annexe « Voies et moyens » du projet de loi de finances pour 2011, ce sont environ 81 000 ménages, soit 15 % des assujettis à l’ISF, qui ont tiré parti du dispositif, pour un montant de remise de droits de 803 millions d’euros, soit environ 20 % du produit de l’impôt.
Cela représente tout de même un pactole moyen de près de 10 000 euros par donataire, ce qui peut laisser rêveurs ceux de nos compatriotes qui vivent avec un SMIC de 1 000 euros par mois.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faudrait sans que tout le monde soit dans cette situation…
M. Bernard Vera. Le volume de fonds apportés est resté anecdotique, avec un montant situé entre 1 milliard d’euros et 1,5 milliard d’euros, somme que l’on pourra, par exemple, utilement comparer aux 255 milliards d’euros de collecte du livret A et du livret de développement durable.
Les versements effectués par les redevables de l’ISF, versements qui ont souvent quelque peine à franchir le sas des intermédiaires pour arriver dans les entreprises, ont tendance à suivre les mouvements erratiques de la bourse.
La moindre contraction du CAC 40, et donc de la valeur des patrimoines imposables au titre de l’ISF, entraîne une contraction des versements ! En clair, ceux-ci sont liés non pas aux besoins des entreprises en fonds propres, mais essentiellement aux besoins de réduction d’impôt des contribuables.
Tout cela montre une chose, que nous pressentions dès l’été 2007 : la réduction d’ISF liée à l’investissement dans les PME n’est qu’un outil d’optimisation fiscale et n’a rien à voir avec une volonté durable de financement de l’économie.
Mme la présidente. Les amendements nos I-70 rectifié et I-291 rectifié sont identiques.
L'amendement n° I-70 rectifié est présenté par MM. Adnot et Türk.
L'amendement n° I-291 rectifié est présenté par M. Jégou.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le c) du 1 du VI de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les mots : « à hauteur de 50 % » sont remplacés par les mots : « à hauteur de 30 % » ;
2° Après l'année : « 2010 », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : «, à hauteur de 60 % au plus tard à la fin du premier exercice et à hauteur de 100 % au plus tard à la fin du deuxième exercice. »
II. - La deuxième phrase du premier alinéa du c) du 1 du III de l'article 885-0 V bis du même code est ainsi modifié :
1° Les mots : « à hauteur de 50 % » sont remplacés par les mots : « à hauteur de 30 % » ;
2° Après l'année : « 2010 », la fin de la phrase est ainsi rédigée : «, à hauteur de 60 % au plus tard à la fin du premier exercice et à hauteur de 100 % au plus tard à la fin du deuxième exercice. »
III. - La perte éventuelle de recettes pour l'État résultant du I et du II ci-dessus est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot, pour défendre l’amendement n° I-70 rectifié.
M. Philippe Adnot. Au préalable, je tiens à souligner auprès de M. le rapporteur général, dont je sais par avance quelle sera la réponse, que cet amendement ne porte pas seulement sur la disposition de la loi TEPA accordant une réduction de 75 % d’ISF pour les contribuables qui investissent dans des PME non cotées ; il concerne également les fonds d’investissement de proximité, les FIP, et les fonds communs de placement dans l’innovation, les FCPI, qui ne sont pas liés à l’ISF.
Cet amendement, qui n’a aucun coût budgétaire pour l’État, a pour objet de réorganiser le rythme d’investissement dans les entreprises. Lorsque la crise a éclaté, M. le président de la commission avait souhaité, fort justement, que les délais d’investissement dans les entreprises soient accélérés. Mais, contraints dès lors d’investir rapidement dans les entreprises, les fonds d’investissement n’ont plus été en mesure de procéder à un second tour. Or les entreprises innovantes doivent pouvoir bénéficier de plusieurs tours d’investissement, au risque que le pacte d’actionnaires ne soit remis en cause.
C’est pourquoi, à travers cet amendement, je propose de modifier le rythme d’investissement. Ainsi, le quota d’investissement devrait être atteint à hauteur de 30 % de celui-ci dans un délai maximum de huit mois, à hauteur de 60 % à l’issue du premier exercice et dans sa totalité à la fin du second exercice.
Ce rythme, qui reste malgré tout extrêmement raisonnable, permettrait aux entreprises concernées de réaliser plusieurs tours de table dans leur recherche d’investisseurs et éviterait que ne soient remis en cause les pactes d’actionnaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° I-291 rectifié.
M. Jean-Jacques Jégou. À la suite de Philippe Adnot, qui a excellemment exposé ses arguments, je rappellerai simplement que mon amendement, identique au sien, concerne aussi les FCPI et qu’il n’entraîne aucune dépense pour l’État, ce qui est très important en ces temps de disette.
Mme la présidente. L'amendement n° I-408 rectifié, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le f du 3 du I de l’article 885-0 V bis du code général des impôts, il est inséré un 4 ainsi rédigé :
« 4. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
« a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celles prévues aux b, f et h ;
« b) La société d’investissement de proximité a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1 situées dans la même région géographique que la société d’investissement de proximité ou dont l’activité dépend de la filière économique que représente l’opérateur au sens du d ci-dessous.
« La société d’investissement de proximité dispose à cet effet de la possibilité de réaliser des investissements au capital des petites et moyennes entreprises accueillant d’autres investisseurs ou d’autres sociétés d’investissement de proximité. Elle peut également réaliser des investissements au capital des petites et moyennes entreprises relevant d’un même pôle d’activité ou d’une même filière économique que celui de celles comprises dans le portefeuille d’investissement de proximité constitué par le même opérateur désigné au sens ci-dessous ;
« c) La société ne compte pas plus de cinquante associés ou actionnaires ;
« d) La société a exclusivement pour mandataires sociaux des personnes morales ayant la qualité de syndicats ou fédérations professionnelles, chambres de commerce et d’industrie agréés à cet effet par le ministère du budget ;
« e) La société n'accorde aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en contrepartie de leurs souscriptions ni aucun mécanisme automatique de sortie au terme de cinq ans ;
« f) La société communique à chaque investisseur, avant la souscription de ses titres, un document d'information précisant notamment la période de conservation des titres pour bénéficier de l'avantage fiscal visé au 1, les modalités prévues pour assurer la liquidité de l'investissement au terme de la durée de blocage, les risques générés par l'investissement et la politique de diversification des risques, les règles d'organisation et de prévention des conflits d'intérêts, les modalités de calcul et la décomposition de tous les frais et commissions, directs et indirects, et le nom du ou des prestataires de services d'investissement chargés du placement des titres.
« Le montant des versements effectués au titre de la souscription par le redevable est pris en compte pour l'assiette de l'avantage fiscal dans la limite de la fraction déterminée en retenant :
« - au numérateur, le montant des versements effectués, par la société mentionnée au premier alinéa au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1, entre la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année d'imposition. Ces versements sont ceux effectués avec les capitaux reçus au cours de cette période ou de la période d'imposition antérieure lors de la constitution du capital initial ou au titre de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit ;
« - au dénominateur, le montant des capitaux reçus par la société mentionnée au premier alinéa du présent 4 au titre de la constitution du capital initial ou de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit au cours de l'une des périodes mentionnée au numérateur.
« Un décret fixe les conditions dans lesquelles les investisseurs sont informés annuellement du montant détaillé des frais et commissions mentionnés au f et encadre ceux relatifs à la commercialisation et au placement des actions de la société mentionnée au premier alinéa. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° I-336 rectifié appelle les mêmes observations que les amendements précédents du même ordre ; la question de l’ISF sera examinée en son heure et c’est pourquoi j’invite son auteur à le retirer.
Les amendements identiques nos I-70 rectifié et I-291 rectifié visent à revenir sur un dispositif que nous avons adopté voilà tout juste un an. Veillons à ne pas introduire une instabilité excessive et maintenons, par conséquent, les rythmes d’investissement tels que nous les avons décidés.
Le souhait émis l’an dernier par la commission des finances, qui paraît toujours aussi justifié, était de s’assurer que les organismes initiateurs de ces différents types de fonds lancent les appels de fonds non pas avec une avance excessive, mais une fois qu’ils disposent d’un programme et d’un concept d’investissement. On évite ainsi de faire des appels de fonds pour avoir d’abord à gérer de la trésorerie, en prenant tout son temps pour trouver les supports des investissements.
Le rythme prévu l’année dernière dans l’amendement Arthuis semble réaliste et personne, en tout cas au sein de la majorité et malgré le talent de Philippe Adnot et Jean-Jacques Jégou, ne nous a jusqu’à présent convaincus de revenir sur une décision qui a été prise voilà seulement un an, et qu’il faut laisser perdurer, au moins jusqu’à ce que tout cela disparaisse. En effet, avec la disparition de l’ISF, nous pouvons espérer que toutes ces complications vont aussi passer à la trappe. (M. le président de la commission des finances marque son approbation) Ce ne serait pas le moindre avantage d’une réforme radicale que, pour ma part, j’appelle de mes vœux.
Aboutir à la suppression d’une partie du code général des impôts, que nous avons fait bourgeonner depuis quelques années, ce serait tout de même un beau résultat. En tout cas, c’est un résultat que je souhaite.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Sur l’amendement n° I-336 rectifié, je suis du même avis que le rapporteur général. Cette question doit faire l’objet d’un grand débat, mais il aura lieu le moment venu.
Les deux autres amendements, qui visent en réalité à allonger les délais d’investissement dont disposent les fonds, appellent trois réponses, auxquelles je souscris bien entendu.
Premièrement, un minimum de pérennité est nécessaire au dispositif afin d’en apprécier l’efficacité. Dans le domaine fiscal comme dans beaucoup d’autres, il est bon de ne pas changer les règles trop régulièrement. C’est un principe général auquel j’adhère sans difficulté.
Deuxièmement, et je répète les propos du rapporteur général qui me semblent couler de source, le grand débat que nous aurons l’an prochain permettra de simplifier les choses et des dispositifs de ce type seront sans doute modifiés, voire supprimés.
D’un point de vue plus technique, le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition. Le dispositif que vous souhaitez réorganiser accorde aux fonds une période de souscription de huit mois puis deux périodes d’investissement de huit mois chacune, pour atteindre respectivement 50 % puis 100 % des quotas. Les investissements sont réalisés au plus tard seize mois après le terme de la période de souscription. Il s’agit d’un cycle complet de 24 mois.
C’est un calendrier d’investissement qui a été adopté sur l’initiative du président Arthuis. Celui-ci ayant moins d’un an, il présente, au-delà du fait qu’il faut de la constance, un avantage de lisibilité. (M. Philippe Adnot fait un signe de dénégation.) Je pense sincèrement que fixer deux périodes aux durées identiques, ainsi que deux ratios identiques est une très bonne chose. (M. Philippe Adnot marque son désaccord.) Je ne vous convaincs manifestement pas, monsieur le sénateur, mais je pense sincèrement que la lisibilité du dispositif est un élément important.
Par ailleurs, votre proposition rallongerait les délais d’investissement, puisque le délai pour investir 100 % du quota passerait à 30 mois – 18 plus 12 –, soit 6 mois de plus qu’actuellement. Ce serait en quelque sorte un retour à la situation qui prévalait avant la réforme proposée par le président Arthuis, et je ne puis donc y souscrire.
Dernière observation, je tiens à signaler que, pour les délais intermédiaires, les séquences proposées ne fonctionneraient pas avec des fonds ayant des exercices de douze mois. Ces derniers doivent en effet avoir investi au moins 60 % de leur quota douze mois après la consultation. Dès lors, le délai intermédiaire pour atteindre 30 % ne pourrait s’appliquer.
Sous le bénéfice de ces explications, je pense donc qu’il serait souhaitable de retirer ces amendements. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je souhaiterais m’adresser, très brièvement, à mes excellents collègues Philippe Adnot et Jean-Jacques Jégou.
Les apports dont il s’agit ici sont pris en charge à 50 % ou 75 % par l’État. Le bénéfice fiscal est immédiat et la trésorerie reste dans une tirelire pendant un certain nombre de mois.
Je comprends bien les contraintes du pacte d’actionnaires et du second tour. Mais il existe une certaine continuité : il est rare qu’un contribuable qui, une année, acquitte un montant significatif au titre de l’ISF ne soit plus soumis à cet impôt l’année suivante. Aussi, les personnes concernées peuvent très bien s’engager à verser tous les ans leur contribution d’ISF sous forme d’apport à des PME. Il serait regrettable, alors qu’on entend partout que ces dernières manquent de liquidités, de laisser dans des organismes de montage d’opérations une liquidité pendant des délais aussi longs.
C’était l’objet de l’amendement que j’avais soumis l’an passé au Sénat, et que celui-ci avait bien voulu approuver.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-336 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote sur les amendements identiques nos I-70 rectifié et I-291 rectifié.
M. Philippe Adnot. Mes chers collègues, je vais à nouveau tenter de vous convaincre, car si je comprends parfaitement qu’on puisse s’opposer à un amendement, je n’accepte pas qu’on le fasse avec des arguments inexacts.
On prétend que la stabilité est nécessaire. Cependant, si tel était vraiment le cas, les règles n’auraient pas été changées l’an dernier, alors qu’elles n’avaient qu’un an ! Ce qui est vrai une fois doit l’être une deuxième fois !
On prétend également que toutes ces difficultés disparaîtront avec la suppression de l’ISF. C’est faux ! J’ai expliqué voilà quelques instants que cela concerne les fonds d’investissements de proximité et les FCPI qui préexistaient à l’ISF et qui lui survivront. Il est donc inexact de dire que le problème ne se posera plus du fait de la suppression de l’ISF.
Par ailleurs, M. Arthuis, qui est fin connaisseur du sujet, sait parfaitement que chaque fonds est créé avec des actionnaires précis. Ce sont ces derniers qui doivent réaliser le deuxième tour d’investissement, pas d’autres ! Sans quoi il conviendrait d’établir un nouveau pacte d’actionnaires.
C’est la raison pour laquelle j’essaie de vous sensibiliser à un problème auquel je suis régulièrement confronté, et dont me parlent de nombreux responsables d’entreprise. En effet, établir un nouveau pacte d’actionnaires suppose de faire des valorisations d’actifs à la période la plus difficile d’une entreprise.
J’accepte que vous vous opposiez à cet amendement, mais pas en avançant des arguments inexacts !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-70 rectifié et I-291 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 4
L’article 200 septies du code général des impôts est abrogé.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Vera, sur l’article.
M. Bernard Vera. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’article 4 du projet de loi de finances inaugure une série de dispositions tendant à réduire de manière marginale la dépense fiscale qui constitue l’un des principaux maux frappant l'efficacité sociale et économique de l'impôt sur le revenu.
Cet article supprime en effet l’article 200 septies du code général des impôts, qui prévoit l’existence d'un crédit d'impôt de 115 euros pour un contribuable seul, ou de 230 euros pour un couple marié ou assimilé, sur les revenus distribués au titre des dividendes accordés par les entreprises françaises et étrangères.
Une telle mesure est loin d'être dépourvue de rendement, puisque celui-ci est estimé à 645 millions d’euros en 2011, soit un peu plus de 1 % de l'impôt sur le revenu. Cependant, elle touche 11 253 000 ménages en 2010, puisque toute personne bénéficiant d'un minimum de revenus financiers dans notre pays est concernée par ce dispositif.
Comme l’indique d'ailleurs l'exposé des motifs, pour 58 % des foyers fiscaux visés, le rendement du crédit d’impôt est inférieur à 50 euros.
Cela concerne par exemple les personnes âgées ayant un peu d’argent en banque placé dans des SICAV, les jeunes couples qui ont souscrit une assurance vie, les étudiants que leurs parents ont doté d’un contrat de prévoyance, ou encore les salariés qui, au titre de l'intéressement et de la participation, touchent quelques euros de dividendes car ils détiennent quelques actions de leur entreprise.
Il n’est d'ailleurs pas impossible que quelques-uns de ces contribuables se voient contraints de payer un impôt, même modeste. Une telle situation montre clairement que ces mesures sont loin de s’attaquer réellement aux avantages exorbitants du droit commun accordés aux détenteurs du capital.
Avec l’article 4, ce sont les détenteurs de l’épargne populaire non défiscalisée – lesquels possèdent souvent un plan d’épargne logement, un livret A ou un livret de développement durable – qui vont devoir participer au redressement des comptes publics.
Pendant ce temps-là, le directeur général d'Hermès pourra réaliser 18 millions d'euros de plus-value nette sur la cession de ses actions achetées sous le régime des plans d'option, sans que son imposition réelle connaisse la même orientation !
Dès lors, la révision de la fiscalité des revenus du capital et du patrimoine est une nécessité, qui semble aller dans le sens de certaines déclarations récentes... Mais ce n’est pas avec l’article 4 que nous allons trouver la solution la plus adaptée au problème.
5
Communications du Gouvernement
Mme la présidente. Par lettre en date du 18 novembre 2010, M. François Fillon, Premier ministre, a informé M. le président du Sénat qu’un membre du Gouvernement présenterait le texte de la déclaration de politique générale qu’il prononcera au même moment devant l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, le Premier ministre demandera l'approbation du Sénat en application de l'article 49, alinéa 4, de la Constitution.
Acte est donné de ces communications.
L'organisation du débat qui suivra cette déclaration sera fixée par la conférence des présidents, qui se réunira mardi prochain à dix-neuf heures trente. Conformément à l’article 60 bis du règlement, le Sénat statuera sur cette demande par un scrutin public à la tribune.
Cette conférence des présidents permettra également de tirer les conséquences de ce changement de l'ordre du jour sur les conditions d'examen du projet de loi de finances pour 2011.
6
Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2011.
Nous en sommes parvenus à l’article 5.
Article 5
I. – Le second alinéa de l’article 150 duodecies du même code est supprimé.
II. – L’article 150-0 A du même code est ainsi modifié :
A. – Le 1 du I est ainsi modifié :
1° Après les mots : « le revenu », la fin du premier alinéa est supprimée ;
2° Le second alinéa est supprimé ;
B. – Au premier alinéa du 2 et au 4, les mots : «, quel que soit le montant des cessions réalisées au cours de cette année » sont supprimés ;
C. – La dernière phrase des 2, 2 bis, 6 et 7 du II est supprimée.
III. – Le troisième alinéa du II de l’article 151 sexies du même code est supprimé.
IV. – Au dernier alinéa du 1 de l’article 170 du même code, après les mots : « gains nets exonérés en application », la référence : « du 1 du I et » est supprimée.
V. – Le premier alinéa du 6 de l’article 200 A du même code est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « lorsque le montant des cessions du foyer fiscal excède le seuil mentionné au premier alinéa du 1 du I de l’article 150-0 A » sont supprimés ;
2° La seconde phrase est supprimée.
VI. – Le 7 de l’article 1649-0 A du même code est abrogé.
VII. – Le I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 1° est abrogé ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
VIII. – A. – Les I à V et le VII s’appliquent aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2011. Le VI s’applique pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter du 1er janvier 2011.
B. – Lorsqu’au cours de l’année 2010, la limite prévue au 1 du I de l’article 150-0 A du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur du II du présent article n’a pas été franchie :
1° Le montant des moins-values nettes de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux reportables au 1er janvier 2011 dans les conditions prévues au 11 de l’article 150-0 D du code général des impôts est aligné sur le montant des moins-values reportables à la même date en matière de prélèvements sociaux dans les conditions prévues au dernier alinéa du I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur du VII du présent article ;
2° Les moins-values nettes de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux subies par le contribuable et reportables dans les conditions prévues au 11 de l’article 150-0 D du code général des impôts au 1er janvier 2010 ouvrent droit, pour leur montant imputé sur les plus-values de même nature réalisées en 2010 pour l’imposition aux prélèvements sociaux, à un crédit d’impôt sur le revenu égal à 19 %. Ce crédit d’impôt est imputé sur l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2010 après application des réductions d’impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis du même code, des autres crédits d’impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires prévus par le même code. S’il excède l’impôt dû, l’excédent est restitué.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la série de mesures relatives à la fiscalité du patrimoine pose la question suivante : quels sont ceux qui seront épargnés, ou quelles seront les victimes du surcroît d'imposition découlant de ces dispositions ? En quelques mots, s'attaque-t-on réellement, avec le présent projet de loi de finances, à l'inégalité de traitement devant l'impôt, qui s’exerce au détriment des revenus d'activité et au profit des revenus financiers ?
Mes chers collègues, concernant la loi de finances pour 2011 telle qu'elle est conçue à ce stade, vous me permettrez de penser que l'ensemble des mesures gouvernementales relatives à la taxation des patrimoines vise singulièrement les petits épargnants. Qu’on se rassure : elle ne touchera pas ceux qui réalisent près de 25 000 euros de plus-values financières ou boursières par an, mais bien plutôt le reste de la population française !
On a pu s’apercevoir que la suppression du crédit d'impôt sur les dividendes concernait plusieurs millions de personnes pour un rendement certes loin d'être négligeable – 600 millions d’euros –, mais dont la portée unitaire est, dans la majorité des cas, inférieure à 50 euros par foyer fiscal.
On est loin, par exemple, du rendement du régime séparé d'imposition sur les plus-values, qui peut être estimé entre 1,5 milliard et 2 milliards d'euros pour les 300 000 ménages qui en déclarent chaque année. Cela représente à un bonus fiscal de plus de 5 000 euros par article…
Prenons un autre exemple : le Gouvernement souhaite supprimer le traitement fiscal particulier accordé aux jeunes mariés, ce qui rapportera a priori 500 millions d’euros sur le dos de plusieurs centaines de milliers de foyers en 2012. Il laisse cependant perdurer un dispositif, issu de la loi TEPA, qui permet à certaines familles de transmettre sans paiement du moindre droit de mutation plus de 300 000 euros de patrimoine à l'un de leurs enfants !
Ainsi, on ne baissera plus ses impôts en se mariant, mais les parents et beaux-parents les plus fortunés pourront continuer à baisser les leurs en alimentant généreusement la dot des jeunes époux !
Cela augure mal du sens de la réforme que le Gouvernement prévoit de faire sur la fiscalité du patrimoine.
On va frapper le revenu des petits épargnants – les « petits revenus financiers » – et l’on va largement épargner les détenteurs des plus gros patrimoines capitalistiques !
Si nous pouvons partager le principe de l’imposition au premier euro des plus-values, nous sommes aussi obligés de rappeler quelle est notre position de fond : il faut tendre à la disparition du dispositif dérogatoire et imposer les plus-values selon le barème de l’impôt progressif.
C’est d’ailleurs là le seul moyen de rendre justice à ceux qui ont juste un peu d’argent de côté au Crédit Mutuel ou au Crédit Agricole de leur chef-lieu de canton, par rapport à ceux qui possèdent des stock-options en nombre ou des plans d’épargne en actions au siège parisien de leur banque de dépôt ou d’affaires.
Si l’article 5 reste en l’état, nous n’irons pas au bout de la réforme équitable dont notre fiscalité de l’épargne a besoin.
Pourquoi, en effet, laisser perdurer un mode spécifique d’imposition des plus-values, qui n’intéresse réellement que ceux qui peuvent en tirer profit, c’est-à-dire moins de 1 % des contribuables de l’impôt sur le revenu ?
Mme la présidente. L'amendement n° I-133 rectifié, présenté par MM. Fouché, P. Dominati, Détraigne, Bécot, Lefèvre, Vestri, Pierre, Milon et Gilles, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je présente cet amendement au nom de M. Alain Fouché et d’un certain nombre de collègues.
L’article 5 du projet de loi de finances pour 2011 tend à prévoir la suppression du seuil de cession pour la soumission à l’impôt sur le revenu des gains de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux réalisés par les particuliers. Les gains de cette suppression sont évalués à 180 millions d'euros.
Actuellement, il n’est procédé à l’imposition au titre des plus-values mobilières des particuliers qu’en cas de dépassement d’un seuil annuel de cession fixé à 25 830 euros pour l’imposition des revenus de l’année 2010. Ce principe de seuil existe depuis 1978 aux fins d’exonérer les petits épargnants et connaît des équivalents, notamment pour les plus-values immobilières.
La suppression du seuil ne répond pas à notre objectif de mettre à contribution les hauts revenus et certains revenus du capital. En effet, une telle suppression, sans mécanisme tendant à préserver les petites cessions, va entraîner une taxation dès le premier euro des plus-values obtenues sur de petits portefeuilles d'actions. L'impôt sur le revenu sera donc dû par les contribuables moyens, voire très moyens, qui détiennent un modeste portefeuille d'actions.
L'amendement proposé tend à rétablir le seuil de cession afin de maintenir la protection offerte à ces petits épargnants, qui sont inéquitablement visés par cet article.
La perte de recettes est compensée par le relèvement du taux d'imposition de la tranche la plus élevée du barème progressif de l'impôt sur le revenu de 40 % à 41,8 %, et non plus à 41 % comme actuellement proposé.
Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission est évidemment très sensible à l’argumentaire de notre excellent collègue Philippe Dominati. Le seul ennui, c’est que cette mesure contribue au financement de la réforme des retraites.
J’en suis le premier gêné… On ne m’a pas demandé mon avis, alors que j’étais très attaché à ce seuil de cession, dont, par le passé, j’ai obtenu à plusieurs reprises la revalorisation.
Cela étant dit, – M. le secrétaire d’État est bien placé pour le savoir, après avoir conduit pendant des mois, auprès d’Éric Woerth, la réforme des retraites – il fallait y arriver, il fallait que le dispositif tienne debout, il fallait financer la réforme.
Nous n’allons pas détricoter ce que nous avons fait. C’est donc avec un peu d’insatisfaction que je constate cet état de fait et sollicite le retrait de l’amendement n° I-133 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, chargé de la fonction publique. Au travers de cette proposition, comme l’a très justement dit M. le rapporteur général, nous revenons sur une question que nous avons largement débattue au sein de cette assemblée, la question du financement, ou plutôt du sauvetage – il n’y a pas d’autre mot – de notre système de retraite.
Parce qu’il reste très prudent par rapport à toutes les mesures touchant à cette question, le Gouvernement n’est pas favorable à la proposition de M. Philippe Dominati.
En premier lieu, cet article 5 du projet de loi de finances s’inscrit tout naturellement dans la volonté affichée par le Gouvernement, au cours des dernières semaines, de faire participer les revenus du capital à l’effort général de financement.
Nous avons eu suffisamment d’échanges sur le sujet, ici, comme à l’Assemblée nationale, pour que je n’aie pas besoin de réexpliquer à quel point le dispositif que nous avons mis en place pour financer le sauvetage de notre système de retraite est équitable. En sus des mesures d’âge, nous mettons à contribution les hauts revenus et les revenus du capital pour assurer ce financement.
En second lieu, depuis le 1er janvier 2010, le seuil de cession ne s’applique plus en matière de prélèvements sociaux et il résulte de cette déconnexion des assiettes fiscale et sociale une complexité accrue de la norme fiscale. La suppression de ce seuil de cession doit donc permettre de redonner une plus grande lisibilité aux régimes fiscal et social des plus-values mobilières des particuliers, tout en les simplifiant.
Au bénéfice de ces précisions, je vous invite, monsieur Dominati, à retirer votre amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l'amendement n° I-133 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° I-133 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
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Souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat colombien
Mme la présidente. J’ai le plaisir et l’honneur de saluer la présence dans notre tribune officielle d’un membre éminent du Sénat colombien, M. Juan Carlos Vélez Uribe. (Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le secrétaire d’État se lèvent.)
Cette délégation est reçue au Sénat par notre groupe d’amitié France-Pays Andins présidé par M. Philippe Adnot.
Je formule des vœux, au nom de notre Haute Assemblée, pour que cette visite, qui confirme les excellentes relations qui existent entre nos parlements, et avec le Sénat français en particulier, contribue au renforcement des liens d’amitié unissant nos deux pays. (Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le secrétaire d’État applaudissent.)
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Modification de l'ordre du jour
Mme la présidente. Mes chers collègues, permettez-moi d’apporter une double précision à mon annonce sur la déclaration de politique générale, afin que vous puissiez en tenir compte pour vos emplois du temps.
La lecture de la déclaration de politique générale aura lieu le mercredi 24 novembre 2010, à quinze heures, et le débat sur la demande d’approbation de la déclaration de politique générale pourrait être organisé le jeudi 25 novembre 2010, dans l’après-midi.
Je rappelle que la conférence des présidents en décidera le 23 novembre 2010, à dix-neuf heures trente.
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Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2011.
Nous en sommes parvenus aux amendements portant article additionnel après l’article 5.
Articles additionnels après l'article 5
Mme la présidente. L'amendement n° I-369, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au d du 1° du II de l’article 125-0 A du code général des impôts, le mot : « huit » est remplacé par le mot : « douze ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-368, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 3 de l’article 158 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du 2°, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;
2° Le 5° est supprimé.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-223, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
II. - Les dispositions du présent I sont applicables pour l'établissement des impositions perçues en 2011.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Il s’agit, par cet amendement, de réduire le niveau de l’abattement proportionnel de 40 % sur le montant des dividendes perçus.
Cet abattement est historiquement présenté comme un moyen d’éviter une double imposition des dividendes versés, qui, ayant été soumis à l’impôt sur les sociétés avant leur distribution, ne devraient pas, de ce fait, subir un second prélèvement lorsqu’ils sont versés aux détenteurs du capital.
Cette justification est largement remise en question, car le taux réel d’imposition des sociétés s’éloigne très largement du taux facial de 33,33 % aujourd’hui affiché.
À cet égard, mes chers collègues, j’attire votre attention sur les informations qui nous sont données par le Conseil des prélèvements obligatoires. Selon les données statistiques réunies par ce dernier, le taux d’imposition sur les sociétés est de 8 % seulement pour les sociétés du CAC 40, de 13 % pour les sociétés de plus de 2 000 salariés et de 19 % pour les sociétés employant entre 500 et 2 000 salariés. On le voit, plus on est gros, moins on paie d’impôt. La situation est claire !
Dans ces conditions, on ne peut nous dire que le prélèvement de 33,33 % est déjà très lourd et qu’il faudrait veiller à ne pas faire supporter aux entreprises concernées un deuxième prélèvement. Toute cette argumentation est complètement artificielle, puisque l’impôt réellement payé par les sociétés ne correspond pas du tout au taux facial annoncé de 33,33 %.
Par ailleurs, des parts importantes des bénéfices enregistrés ne sont, en réalité, soumises à aucune imposition. C’est notamment le cas, par exemple, des bénéfices enregistrés dans le cadre de plus-values de cessions de parts d’entreprises détenues depuis plus de deux ans. L’exonération quasi totale de ces plus-values – la fameuse « niche Copé » – rend totalement injustifiée l’application, ensuite, d’un abattement de 40 % sur les dividendes qui pourraient être distribués à raison du bénéfice qu’elles constituent.
Il est donc proposé de réduire le niveau de cet abattement de 40 % à 20 %, comme y invite notamment le Conseil des prélèvements obligatoires dans son récent rapport sur les niches fiscales et sociales dont bénéficient les entreprises.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’est absolument pas convaincue par ce raisonnement, car l’abattement dont il est question permet tout simplement d’éviter une double imposition sur les mêmes revenus.
Je comprends naturellement que M. François Marc ait tendance à avoir une vision très négative dès qu’il voit le mot « dividendes ». Il n’en reste pas moins que le dispositif existant a de solides justifications techniques.
Cela devrait conduire notre collègue à retirer son amendement et nous amener, s’il ne le fait pas, à voter contre.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, chargé de la fonction publique. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition qui tend, en quelque sorte, à revenir sur les principes qui sont issus de la réforme du régime fiscal des distributions, intervenue dans le cadre de la loi de finances pour 2004.
Deux abattements sont appliqués de manière combinée : un abattement proportionnel fixé à 40 % du montant des dividendes et un abattement forfaitaire dont le montant annuel diverge selon la situation de la famille. S’y ajoute le crédit d’impôt, qui est égal à 50 % des dividendes perçus et plafonné, dont le Gouvernement a proposé la suppression à l’article 4 du projet de loi de finances pour 2011. La situation est donc cohérente.
Par ailleurs, même si la suppression de ce crédit d’impôt, qui doit tout de même rapporter 645 millions d’euros dès 2011, est possible sans dommage économique, tel n’est pas le cas d’une remise en cause de l’abattement sur les dividendes, ce dernier permettant, de manière satisfaisante, d’éviter de taxer deux fois les résultats d’une société.
Enfin, dernier élément d’information, la proposition qui nous est faite touche directement la fiscalité des revenus du patrimoine. Or, je n’ai pas besoin de rappeler – nous avons déjà évoqué ce point à plusieurs reprises – que nous engagerons une réflexion globale sur ce sujet l’année prochaine.
Pour ces trois raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° I-370, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 6 de l’article 200 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, les taux : « 30 % » et « 40 % » sont remplacés respectivement par les taux : « 40 % » et « 50 % » ;
2° Au troisième alinéa, les taux : « 18 % » et « 30 % » sont remplacés respectivement par les taux : « 30 % » et « 40 % ».
II. – Les dispositions du I s'appliquent à compter du 1er janvier 2011.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 5 bis (nouveau)
Le II de l’article 3 de la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009 est abrogé.
Mme la présidente. L'amendement n° I-4, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - À la fin du II de l’article 3 de la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009, la date : « 31 décembre 2010 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2012 ».
II. - À la fin du premier alinéa du I de l'article 93 quater du code général des impôts, la référence : « 39 quindecies » est remplacée par la référence : « 39 novodecies ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement concerne l’article 5 bis, qui pérennise le régime de cession-bail permettant l’étalement, sur la durée du contrat, de la taxation des plus-values de cession.
Ce dispositif, qui était l’une des mesures efficaces du plan de relance, a, il est vrai, obtenu un grand succès. Il provenait, il faut le rappeler, d’une initiative du Sénat. Nous avions toutefois souhaité qu’il soit borné dans le temps au 31 décembre 2010. Ce dispositif, qui a un coût de trésorerie pour l’État, n’a pas vocation, de notre point de vue, à être pérennisé. Toutefois, nous considérons qu’il peut être prolongé pour une durée de deux ans.
Quant au II de l’amendement, c’est une disposition de coordination.
J’insiste, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, sur le fait qu’il s’agit bien d’un dispositif dérogatoire dans son principe. En tant que tel, nous ne saurions guère admettre qu’il soit transcrit de manière permanente dans la législation. Un délai de deux ans nous semble de nature à ne pas trop injurier l’avenir.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Je vais reprendre les termes de M. le rapporteur général et dire qu’un délai de deux ans n’injurie pas réellement l’avenir. C’est la raison pour laquelle, bien qu’il y ait sans doute matière à discussion sur quelques modalités, le Gouvernement est, dans l’ensemble, favorable à cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 5 bis est ainsi rédigé.
Article 6
La dernière phrase du second alinéa du I de l’article 216 du code général des impôts est supprimée.
Mme la présidente. L'amendement n° I-224, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Au début de cet article
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... L'article 145 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au b du 1, le taux : « 5 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;
2° Au b ter du 6, le taux : « 5 % » est remplacé par le taux : « 10 % ».
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Cet amendement concerne le régime « mère-fille », qui permet à une société mère d’être exonérée à raison des produits de participation reçus d’une filiale dès lors que la participation dans la filiale est supérieure à 5 % de son capital, sauf sur une quote-part de frais et charges égale à 5 % de leur montant.
Comme dans le cas évoqué précédemment, ce dispositif vise à supprimer une double imposition économique des dividendes provenant de bénéfices déjà imposés.
Ce dispositif existe également dans les autres pays européens. Le Conseil des prélèvements obligatoires, le CPO, signale qu’au regard des critères d’éligibilité de ce régime le dispositif français apparaît « relativement favorable », et ce depuis plusieurs années. Au surplus, le coût de cette exonération, que l’on a commencé à qualifier en 2006 de « modalité particulière de calcul de l’impôt », est exponentiel depuis les années 1990.
Relativement stable de 1980 à 1990 – 2,5 milliards de francs en 1980 et 6,5 milliards de francs en 1990, soit 0,1 point de PIB –, il s’est considérablement accru à compter de 2007 pour atteindre 27 milliards d’euros en 2008 – vous le voyez, la différence est considérable ! – et 34,9 milliards d’euros en 2009, soit 1,8 point de PIB.
Aujourd’hui, nous devons bien constater la réalité que nous n’appréhendons pas sur le mode idéologique. Vous avez dit tout à l’heure, monsieur le rapporteur général, que le mot « dividende » fait naître en nous des inquiétudes. Si vous écoutez bien notre argumentation, ce n’est pas tout à fait ce que nous disons.
Nous invoquons la recherche d’une justice et d’une équité fiscale. En l’occurrence, le dispositif est devenu aujourd’hui exorbitant compte tenu du montant en jeu, qui était proche de 35 milliards d’euros en 2009. Le dispositif français est nettement plus favorable que celui qui est pratiqué dans beaucoup d’autres pays européens.
Dans un souci de réduction du coût de cette exonération, la proposition du CPO de relever le taux de détention de 5 % à 10 % paraît tout à fait légitime et devrait, à notre sens, être suivie d’effet.
C’est la raison pour laquelle il nous a semblé opportun d’inscrire cette proposition dans un amendement que nous demandons à notre assemblée de bien vouloir voter.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, je n’ai pas tout à fait la même lecture du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires. Et pourtant, le texte et la référence sont les mêmes.
Le CPO, que vous avez cité, estime, en effet, que le dispositif français du régime mère-fille est relativement favorable.
M. François Marc. Je l’ai dit !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument !
Sur ce point, il nous indique, en particulier, que le taux de participation exigé est, en France, en Espagne et aux Pays-Bas, avec 5 % du capital, plus faible qu’il ne l’est dans la moitié des pays de l’OCDE, où l’on trouve plutôt des taux de 10 % ou 15 %. Il nous indique, en revanche, que l’exonération des dividendes est subordonnée en France à la durée de détention la plus longue, soit deux ans, comme en Grèce, en Pologne et en Norvège.
Par ailleurs, le CPO, a, en effet, formulé une recommandation, qui consiste à relever le taux de détention de 5 % à 10 %, ce qui permettrait de priver mécaniquement un certain nombre de sociétés du bénéfice du régime mère-fille.
Le CPO reconnaît toutefois que le surplus de rentrées fiscales sur le long terme lié à une telle évolution devrait être relativisé, et ce pour deux raisons.
D’une part, cela ne concernerait que les distributions effectuées en dehors d’un groupe fiscal puisque, au sein de ce groupe, les distributions bénéficient d’un dispositif spécifique de neutralisation.
D’autre part, les sociétés mères chercheraient sans doute à faire progresser leur pourcentage de détention jusqu’à 10 % afin de continuer à bénéficier du régime, si bien qu’au fur et à mesure du temps l’augmentation du taux de détention aurait probablement de moins en moins d’incidence. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
J’observe qu’à l’Assemblée nationale un amendement analogue a été rejeté à la fois par le Gouvernement et par la commission des finances. Et je partagerai bien volontiers la réponse qui a été faite par mon homologue Gilles Carrez selon lequel une telle mesure devrait faire l’objet d’une concertation européenne ou, en tout cas, être examinée à l’aune des régimes de nos principaux partenaires.
Pourquoi n’en ferait-on pas l’un des thèmes de la comparaison franco-allemande ? (M. François Marc s’exclame.) En tout état de cause, on observerait qu’aujourd’hui l’Allemagne – ce qui est, d’ailleurs, assez surprenant de mon point de vue – ne prévoit plus aucun seuil minimal de détention du capital de la filiale. Ce sujet, qui est évolutif dans les différents pays, est donc un peu plus complexe que vous ne semblez le penser au travers de votre amendement.
Enfin, procéder à une telle modification, qui consiste à porter le taux de 5 % à 10 %, nécessite sans doute un peu de concertation avec le milieu des entreprises. Sans en refuser définitivement le principe, je recommande d’approfondir les analyses pour savoir si cette idée est véritablement bonne.
Sous le bénéfice de ces explications, je suppose - j’espère ! – que vous accepterez de retirer l’amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, en proposant cette restriction du régime des sociétés mères, on voit bien – et je vous en donne volontiers acte – l’intérêt budgétaire que vous souhaitez mettre en avant et qui serait procuré par ce rehaussement du taux de détention nécessaire pour l’application du régime des sociétés mères.
Je voudrais, pour ma part, compléter – si tant est que l’on puisse compléter –, redire, à ma façon, ce qu’a dit M. le rapporteur général, en formulant trois observations.
D’abord, le gain budgétaire qui serait obtenu grâce à votre proposition ne serait sans doute pas pérenne puisque le seuil de détention est, en réalité, structurant. Les sociétés concernées chercheraient vraisemblablement assez vite à s’adapter à ce nouveau seuil de 10 %. Si l’effet budgétaire est évident en année n+1, il serait, selon toute vraisemblance, très nettement amoindri au cours des années suivantes.
Ensuite, le régime des sociétés mères fait déjà l’objet d’un aménagement que je ne qualifie pas de défavorable aux entreprises mais qui, en tout cas, ne leur est pas favorable - c’est ce que l’on appelle un euphémisme ! – dans le cadre de l’article 6 du présent projet de loi. En effet, celui-ci prévoit la suppression du plafonnement de la quote-part taxable des frais et charges. En ce qui nous concerne, nous pensons qu’il n’est pas utile, dans l’état actuel des choses en tout cas, d’aller beaucoup plus loin.
Enfin, monsieur le sénateur, vous avez entendu M. le rapporteur général évoquer le cas de l’Allemagne. Je voudrais, à mon tour, observer qu’outre-Rhin les dividendes peuvent être exonérés quel que soit le taux de détention du capital de la filiale distributrice.
Donc, s’il y avait une évolution du régime des sociétés mères, elle devrait plutôt s’orienter, dans une logique de cohérence européenne, vers la baisse ou la suppression du seuil minimal. Le rehaussement de 5 % à 10 % du taux de détention nous éloignerait, en effet, encore plus de nos partenaires allemands, ce qui n’irait pas dans la bonne direction.
Je conclurai sur ce point en rejoignant M. le rapporteur général. Dans le cadre de l’étude comparée actuellement conduite sur la situation de la fiscalité en France et en Allemagne, il me paraît préférable que vous retiriez cet amendement. Sinon, je serais contraint d’émettre, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur François Marc, l’amendement n° I-224 est-il maintenu ?
M. François Marc. Je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
Mme la présidente. L'amendement n° I-226, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, il est inséré un 2 ter ainsi rédigé :
« 2 ter. Pour l'application du 1 et du 2, les charges d'intérêts liées à l'émission d'emprunts par une société sont admises, en déduction pour le calcul du bénéfice net, à condition que le rapport entre les capitaux propres et la dette financière ne soit pas inférieur à 66 %. »
II. - Les dispositions du présent I ne sont applicables qu'à compter du 1er novembre 2010.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à limiter les effets de la pratique dite du LBO. Selon l’assureur crédit COFACE, sur les 1 600 entreprises en LBO dans notre pays, 900 sont en zone de surveillance et plusieurs en zone d’alerte.
Si les LBO ne sont pas à l’origine des difficultés des entreprises, elles en constituent souvent un facteur aggravant. Les banques ont octroyé des crédits allant jusqu’à 70 à 80 % de la valeur des sociétés achetées, alors que des entreprises rachetées de cette façon sont censées rembourser la dette grâce aux résultats qu’elle génère. Mais avec le ralentissement de l’économie, la dette devient vite insupportable.
Notre amendement vise à décourager les opérations LBO les plus risquées en supprimant l’avantage fiscal dû à la déductibilité des intérêts d’emprunt lorsque le rapport entre capitaux propres et dette financière est inférieur à 66 %.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est un vrai sujet qu’évoque Mme Bricq. Pour autant, sa proposition apporte-t-elle la bonne réponse ?
Il est clair que pendant toute une période, notamment entre 2004-2007, les opérations de rachat à effet de levier, les LBO, ont fleuri. Les effets de levier ont souvent été supérieurs à 4 ou à 5.
Le secteur auquel se sont appliquées ces opérations a suivi le cycle économique. La crise et les baisses d’activité ont conduit à des situations qui peuvent apparaître difficiles.
À l’époque où ces LBO ont été montés, régnaient la surabondance des liquidités, une assez faible aversion aux risques et des pratiques d’enchères, voire un enchaînement de LBO successifs, des rachats sur rachats, qui ont impliqué, à chaque stade des opérations, un relèvement de l’effet de levier, en d’autres termes, un relèvement des exigences de rentabilité de l’entreprise pour garantir la faisabilité du montage.
Certaines sociétés-cibles ont été exagérément pressurées d’intérêts, malgré les qualités intrinsèques dont elles disposaient. Certaines se retrouvent aujourd’hui ou se retrouveront demain devant ce « mur du LBO », qui a été souvent évoqué dans les enceintes spécialisées ou dans la presse.
La question évoquée est tout à fait pertinente. Pour autant, alors que l’ambiance des affaires n’est pas aujourd’hui – à certains égards, hélas ! – celle des années 2004-2007, la bonne formule est-elle l’adoption d’une limite de déductibilité à un effet de levier de 1,5 ? Il aurait sans doute fallu le faire à l’époque dont je parle.
Une telle mesure ne prépare-t-elle pas, dans une certaine mesure, la guerre précédente ? Ce n’est pas une critique, c’est une interrogation, que nous partageons avec vous, madame Bricq.
L’effet de levier raisonnable est-il de 1,5 ? N’est-il pas un peu plus haut, à 2 ou à 3 ? En tout cas, c’est certain, il n’est pas à 4 ou à 5, ou même au-delà.
Les LBO ne sont pas nocifs par nature. Ils peuvent, si le mélange dette-capital est adéquat, permettre à la société-cible de franchir des paliers de croissance, mais il faut bien entendu éviter trop de rapacité et des montages trop tendus.
J’avoue mon incertitude. J’aurais souhaité que le Gouvernement puisse nous faire part de son analyse sur le sujet.
Je ne crois pas que la mesure soit adéquate ou pertinente aujourd’hui. Je crois, en revanche, qu’il convient de nous intéresser à cette question de manière réaliste, pour proposer une solution appropriée.
En conclusion, se pose aussi la question du dénouement des anciens LBO, trop exigeants pour les entreprises. Comment en sort-on ? C’est un sujet sans doute du ressort de Mme Christine Lagarde et sur lequel elle devrait être interrogée. Il serait en effet utile de connaître son estimation de ce risque pour l’économie. Il y a certainement un risque substantiel, en nombre d’entreprises et en volume d’emplois. Il ne peut pas être sous-estimé.
Sans doute faut-il enfin, par ailleurs, éviter que les dispositifs ne soient trop pousse-au-crime. Est-ce le dispositif imaginé par Nicole Bricq qui convient ? Faut-il regarder dans d’autres directions ? Nous aurions besoin d’un peu d’imagination et de capacité d’expertise.
Sous réserve de l’avis du Gouvernement, je ne crois pas que cet amendement puisse être adopté à ce stade.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Je voudrais essayer à nouveau de tenir un propos similaire à celui du rapporteur général, avec la même modération, c’est-à-dire en ayant une approche permettant de bien comprendre si, au-delà de l’esprit, la lettre de l’amendement est adaptée à l’objectif visé.
Le droit fiscal français, madame la sénatrice, permet la déduction intégrale des intérêts d’emprunt, mais des mesures ont d’ores et déjà été adoptées, comme vous le savez, pour limiter, dans certaines hypothèses, la déductibilité des charges financières. C’est le cas, par exemple, des intérêts excessifs qui sont versés par les entreprises à leurs associés.
Mais il existe d’autres dispositifs anti-abus. Un dispositif récent, entré en application au 1er janvier 2008, appelé « dispositif antI-sous-capitalisation », limite très précisément la déductibilité des charges financières supportées par les entreprises sous-capitalisées.
Par ailleurs, le dispositif dit « amendement Charasse », auquel le rapporteur général faisait allusion, aménagé en 2005 et 2006, limite également cette déductibilité en cas d’achat de titres à soi-même.
Nous sommes bien sûr tous attachés à ce que les entreprises soient capitalisées de manière suffisante. C’est ce que nous essayons de faire. Néanmoins, nous ne voulons pas, et c’est la réponse que j’apporte à la question posée par le rapporteur général en introduction de son propos, entrer dans un dispositif qui n’atteigne pas l’objectif que nous fixons.
Or, en l’occurrence, je crains qu’en ne retenant qu’un seul critère, un seul ratio, celui qui est évoqué dans cet amendement, on ne mette en place un dispositif qui soit susceptible de déséquilibrer financièrement des entreprises, bien au-delà des LBO que vous entendez viser. Au demeurant, les LBO, comme l’a dit le rapporteur général et je reprends à mon compte ses propos, ne sont pas nécessairement mauvais en soi.
C’est la raison pour laquelle je vous suggère, madame la sénatrice, de retirer cet amendement ; à défaut, je demanderais son rejet. En effet, il n’est pas bien ajusté par rapport à une véritable question, qui est bien posée.
Mme la présidente. Madame Bricq, l’amendement n° I-226 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Je ne vais pas le retirer, madame la présidente, car nous souhaitons l’apporter au débat.
En revanche, j’ai bien écouté le rapporteur général. Le groupe socialiste ne dispose pas des moyens pour viser juste. Je suggère que la commission des finances se saisisse du sujet, même si, je le sais, nous traitons déjà de nombreuses questions. En effet, ce sujet mérite que l’on s’y intéresse. Il s’agit de l’économie réelle : le sort d’un certain nombre d’entreprises est en jeu. Les chiffres que j’ai indiqués ne sont pas contestables. Il faudrait donc faire le clair, afin de déterminer quel est le bon mécanisme.
Aussi, je souhaiterais que le rapporteur général et le président de la commission, qui ont les moyens d’accéder aux services de Bercy, travaillent sur ce sujet, nous en rendent compte au sein de la commission des finances.
Ensuite, si la majorité parlementaire veut proposer l’ajustement adéquat pour éviter la disparition du tissu de nos entreprises que les chiffres que j’ai cités laissent entrevoir, libre à elle de le faire. Je crois que cela vaut la peine. C’est la raison pour laquelle je souhaite apporter cet amendement au débat. S’il est peut-être imparfait, il a au moins le mérite de poser le problème.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-5, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au troisième alinéa du c du 1 de l’article 145 du même code, les mots : « de l’une des opérations visées aux » sont remplacés par les mots : « d’opérations dont le profit ou la perte ne sont pas compris dans le résultat de l’exercice de leur réalisation en application des ».
II. – Le troisième alinéa de l’article 223 B du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque les titres n’ont pas été conservés pendant un délai de deux ans, leur prix de revient est diminué, pour la détermination de la plus-value ou moins-value de cession, du montant des produits de participation y afférents dont le montant a été retranché du résultat d’ensemble en application du présent alinéa. »
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement s’inscrit dans un ensemble de mesures « anti-abus », auxquelles j’ai travaillé ces dernières semaines avec les services de Bercy, en matière d’impôt sur les sociétés. En l’occurrence, il s’agit de parer à deux types de montages d’optimisation qui sont de même nature.
Ces schémas reposent sur des opérations successives de distribution et de fusion visant à vider une société-cible de sa trésorerie, puis à la faire disparaître par fusion, peu de temps après son acquisition, le cas échéant après une cession intragroupe.
Dans ce cas de figure, il est possible de cumuler deux dispositifs fiscaux favorables, l’exonération des dividendes perçus au titre du régime mère-fille, que nous avons évoqué tout à l’heure, et la déductibilité d’une moins-value dans le cadre d’une fusion.
Le présent amendement mettrait fin à la coïncidence de ces deux schémas et accroîtrait ainsi les recettes d’impôt sur les sociétés par une neutralisation en amont de la moins-value déductible, laquelle se réaliserait techniquement en deux temps et dans les conditions précisées dans le rapport écrit de la commission, auquel vous pouvez vous référer. Le commentaire de l’article concerné détaille en effet cette mesure dont nous préconisons l’adoption.
M. le président. L’amendement n° I-322, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l’article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l’article 223 B du code général des impôts est supprimé.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Parmi les centaines de mesures de dépense fiscale et dispositifs dérogatoires touchant l’impôt sur les sociétés, le mécanisme prévu au troisième alinéa de l’article 223 B du code général des impôts est très intéressant. À l’entendre, celui-ci fait même « tiquer » M. le rapporteur général. Il permet en effet des optimisations fiscales contre lesquelles, me semble-t-il, on ne peut que lutter.
Dans le régime des groupes, où nous sommes donc en présence d’une société mère, de filiales et sous-filiales, il n’est pas rare que l’on procède à des opérations de cession partielle d’actifs, voire d’entités économiques entières, au fil notamment des besoins de trésorerie.
Ainsi l’entreprise peut-elle procéder à une stratégie de « répartition » des opérations de cession, qui font « porter » à telle ou telle entité du groupe les plus-values, comme les moins-values, à raison des besoins de pure optimisation fiscale du résultat.
On imagine rapidement les suites susceptibles d’être données au processus.
Prenons l’exemple d’un groupe vendant une société moyennant une plus-value. Plutôt que d’enregistrer ladite plus-value dans les comptes de la holding de tête, il décide de l’imputer sur les comptes d’une des sociétés, dont la qualité est d’être domiciliée dans un pays où n’existe pas de taxation des plus-values des entreprises.
Arguant du fait qu’on ne peut établir de double imposition du même bénéfice, la holding ne paiera rien sur cette plus-value et la société pas plus, au seul motif qu’elle bénéficie d’un régime très favorable de ce point de vue.
Et le total reste dans les comptes du groupe, sachant que le dividende que la société verse à la holding peut évidemment se trouver majoré l’année où l’on « localise » dans cette société le produit de la plus-value concernée.
C’est bien d’une pure opération d’optimisation qu’il s’agit. Elle n’a qu’un très lointain rapport avec ce que l’on pourrait attendre des mesures d’allégement de la fiscalité des entreprises.
Nous vous proposons donc de mettre un terme à ce système de défiscalisation et d’optimisation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° I-322 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Madame Beaufils, s’il y a, dirais-je, un certain tronc commun entre nos amendements, force est de reconnaître qu’il n’est tout de même pas très imposant !
Mme Marie-France Beaufils. J’ai cru le comprendre !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous visons, d’un côté comme de l’autre, l’article 223 B du code général des impôts. Mais alors que vous voulez supprimer son troisième alinéa, la commission préconise de le compléter.
Le dispositif proposé par la commission me semble plus réaliste que votre proposition. Il tient compte des avertissements formulés, en particulier, par le Conseil des prélèvements obligatoires, et également des leçons tirées du contrôle fiscal.
Par conséquent, ma chère collègue, vous pouvez, vraiment sans aucun état d’âme, vous rallier à la position de la commission, après avoir retiré votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Le Gouvernement est tout à fait favorable à l’amendement n° I-5 de la commission des finances. M. le rapporteur général l’a expliqué, il s’agit de mettre fin à des situations qui permettent de cumuler une exonération de dividendes tout en offrant la possibilité de déduire des moins-values en cas de fusion. Concrètement, pour dire les choses telles qu’elles se déroulent, les moins-values en question correspondent en fait au montant des dividendes préalablement perçus. À l’évidence, le dispositif est excessivement « optimisant » et il est tout à fait logique de vouloir le corriger.
Madame Beaufils, l’amendement n° I-322 vise à supprimer le dispositif de neutralisation des distributions de produits de participation entre membres d’un groupe fiscal.
Selon vous, ce dispositif procure des avantages injustifiés. Nous ne pouvons vous suivre dans cette analyse, car nous avons une perception différente de la façon dont le régime de groupe fonctionne.
En effet, le régime de l’intégration fiscale permet à une société tête de groupe de se constituer, sous certaines conditions, comme seule redevable de l’impôt sur les sociétés dû par elle et l’ensemble de ses filiales, un peu comme s’il s’agissait d’une société unique.
Ce régime permet ainsi d’assurer la neutralité fiscale quel que soit le mode d’organisation du groupe économique, que celui-ci soit structuré sous formes de succursales ou de filiales.
Lorsqu’un groupe est structuré avec des succursales, les sommes qui passent de l’une à l’autre sont en réalité des flux internes à la société, qui ne sont pas imposés.
Quand un groupe est structuré avec des filiales, les sommes qui passent d’une filiale à la société mère sont des distributions, qui sont, elles, imposées, une première fois, comme bénéfices de la filiale distributrice et, une seconde, comme produits reçus par la société qui les perçoit.
Vous le voyez, madame la sénatrice, le dispositif de neutralisation des dividendes intragroupe permet donc de rétablir la neutralité entre ces deux modes d’organisation.
Telles sont les raisons pour lesquelles je me permets de vous suggérer le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serais défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 6, et l'amendement n° I-322 n'a plus d'objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2011.
Nous poursuivons l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 6.
L'amendement n° I-324 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article 193 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, la fraction des revenus correspondant aux éléments de rémunération, indemnités et avantages visés aux articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du code de commerce, dont le montant annuel excède dix fois le montant annuel du salaire minimal interprofessionnel de croissance, est taxée au taux de 95 %. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. À travers cet amendement, il s’agit de poser clairement la question de la prise en compte, sur le plan fiscal, des indemnités de départ accordées à certains grands patrons au terme de l’exercice de leurs fonctions.
Ces « parachutes dorés » offrent un certain confort : indemnités de départ largement supérieures aux règles conventionnelles du droit du travail, distribution gratuite d’actions de l’entreprise ou encore retraite supplémentaire à prestations généreuses.
Cette situation, chacun le sait, ne concerne a priori que les dirigeants des sociétés inscrites au CAC 40 et quelques dizaines d’autres.
Le nombre de contribuables visés est donc faible, et les mesures que nous proposons n’auront sans doute que peu d’occasions d’être mises en œuvre. Mais ces mesures ont un fort caractère de justice et d’équité fiscale.
Il s’agit de rendre quasiment impossible de pratiquer, à l’intention de ces dirigeants d’entreprise, toute politique de rémunération de départ de niveau exceptionnel, en mettant en œuvre une forte taxation des émoluments ainsi versés.
Nous ne mettons évidemment pas en cause les qualités individuelles de tel ou tel dirigeant mais chacun comprendra que l’on ne puisse tolérer plus longtemps ces pratiques si spécifiques de rémunération.
Aucune disposition législative n’a véritablement réglé la question et, selon nous, les articles dont nous débattons ne font pas le compte.
C’est pourquoi nous vous invitons à adopter cet amendement, dont le caractère symbolique, au sens de la justice fiscale et sociale, est, nous en convenons, plus important que le rendement pour les comptes publics.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’est pas vraiment convaincue et a considéré que ce dispositif serait quelque peu confiscatoire.
En d’autres termes, il va tout de même un peu trop loin, de notre point de vue. Nous ne sommes pas prêts à aller jusque-là, du moins ce soir. (Sourires et exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Jacques Jégou. En attendant le Grand soir !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Il faut reconnaître que l’amendement de M. Bernard Vera, que je prends comme le symbole d’une très forte conviction, n’y va pas avec le dos de la cuillère ! En effet, pour le coup, c’est fort !
J’ajouterai trois brèves remarques.
D’abord, l’encadrement des parachutes dorés des dirigeants des sociétés, et M. Vera le sait, a déjà été renforcé. De fait, tout ne doit pas être possible. Nous nous y sommes attachés, notamment à travers l’article 17 de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA », qui a mis en place ce régime juridique pour éviter que les indemnités de départ ne soient versées aux dirigeants de manière indue. De ce point de vue, nous avons déjà agi.
Ensuite, des mesures diverses sont prises pour encadrer davantage, sue le plan fiscal et social, les rémunérations différées des dirigeants. Plus particulièrement, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, à travers l’article 15, a doublé le taux de la contribution patronale sur les régimes de retraites chapeaux et elle a instauré une contribution spécifique de 30 % à la charge de l’employeur sur les rentes versées.
Enfin, sur le plan fiscal, je vous rappelle qu’en application de l’article 21 de la loi de finances pour 2009 les rémunérations différées ne sont plus admises en déduction du bénéfice net des sociétés cotées ou dans la seule limite d’un montant fixé à six fois le plafond annuel de la sécurité sociale.
Très concrètement, comme vous le voyez, nous avons fait tout ce qu’il fallait pour éviter des abus.
Sur la base de ces indications, je puis vous dire, monsieur Vera, que je partage votre souci d’éviter les abus et les excès. Mais je ne corrige pas un abus par un abus. Par conséquent, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Je tiens à réagir sur la notion d’abus.
Dans cette période de sortie de crise, dont on nous a beaucoup parlé lors de la présentation du budget, demander aux bénéficiaires des retraites chapeaux de faire un effort marquant est un minimum, d’autant que, parallèlement, on supprime la niche fiscale dont les jeunes mariés bénéficiaient jusqu’à présent. Je sais de quel côté se trouve l’abus. Il n’est pas de notre côté.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-324 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° I-229, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 209 quinquies du code général des impôts est abrogé.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je m’arrêterai un moment sur cet amendement car il vise à supprimer le dispositif qualifié de « bénéfice mondial consolidé », plus connu sous le nom de « niche Vivendi ».
Ce dispositif n’est pas jeune, il a été créé en 1965, dans le contexte dynamique des Trente Glorieuses. Aujourd’hui, il semble totalement inadapté. La recommandation de le supprimer vient du Conseil des prélèvements obligatoires.
Je rappelle que ce régime permet d’intégrer fiscalement toutes les sociétés détenues à plus de 50 % en France et à l’étranger. Il permet de déduire des impôts les pertes passées – c’était le cas de l’ère Messier pour Vivendi –, ainsi que les pertes actuelles des filiales étrangères, qui peuvent donc être déduites des bénéfices des sociétés les plus rentables.
On parle de « niche Vivendi » parce qu’en 2004, lors du bref passage de Nicolas Sarkozy à Bercy, ce régime avait été accordé à Vivendi, qui, aujourd’hui, demeure son principal bénéficiaire – très peu de sociétés en bénéficiant, seulement trois, dont Total, me semble-t-il.
Depuis 2004, Vivendi a touché un chèque d’environ 500 millions d’euros chaque année. C’est, je crois, la deuxième source de cash pour le groupe ! Cette mesure lui avait été accordée jusqu’à la fin de l’année 2011. Nous proposons de la supprimer parce que le contexte économique actuel est totalement différent de celui de 1965.
Selon l’exposé des motifs du Conseil des prélèvements obligatoires, cette niche « apparaît aujourd’hui mal adaptée, dans un contexte où le développement international fait partie de la stratégie naturelle des grands groupes et où de nombreuses réformes fiscales favorables aux grandes entreprises ont été conduites au cours de la période récente. » Le Conseil ajoute : « La suppression de ce régime, dont l’utilité économique n’est pas démontrée, apparaît souhaitable. »
Lorsque cette facilité fiscale avait été accordée à Vivendi, une contrepartie avait été négociée, en termes de création d’emplois. Entre 1 500 et 1 600 contrats à durée indéterminée devaient ainsi être créés, ce qui revient très cher – environ 362 000 euros l’emploi ! Mais cette contrepartie n’a jamais été évaluée.
Cette mesure devait s’achever en 2011. Il faut suivre la recommandation du Conseil des prélèvements obligatoires. On trouvera ainsi 500 millions d’euros assez facilement, ce qui est intéressant par les temps qui courent…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Quand j’étais directeur financier d’un groupe public, il y a une petite trentaine d’années, celui-ci était titulaire du bénéfice mondial consolidé. J’ai le souvenir qu’une douzaine de groupes étaient agréés à ce titre ; aujourd’hui, ils ne sont plus que cinq, notamment celui que vous avez cité, madame Bricq.
Il ne faudrait pas oublier qu’au moment où son agrément a été renouvelé, il lui a été demandé de financer des outils de capital investissement et d’aide à la création ou au maintien d’emplois dans certaines zones géographiques.
Je puis témoigner que ce dispositif fonctionne assez correctement dans mon département, bien entendu pour des sommes qui sont sans commune mesure avec celles que vous avez citées.
Vous avez, par ailleurs, chère collègue, participé avec moi, en 2007, à la mission d’information du Sénat sur les centres de décisions économiques, que rapportait notre ancien et excellent collègue Christian Gaudin.
Toucher à un tel régime, comme vous proposez de le faire de manière brutale, serait un signal désavantageux quant à la localisation de grands quartiers généraux à Paris. Je ne crois pas que l’on puisse le faire.
Cela étant dit, il est toujours utile d’évaluer un régime et les avantages que l’on en retire. C’est, d’ailleurs, ce qui est prévu à ce titre, comme pour les autres régimes fiscaux privilégiés. Vous le savez, la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques fait obligation de réaliser des évaluations de ce type de régime.
Sous le bénéfice de ces observations, je me permets, madame Bricq, sans escompter forcément de résultat positif, de vous suggérer un retrait de votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, vous considérez que ce dispositif dérogatoire, dont vous avez rappelé à juste titre qu’il avait été mis en place il y a longtemps de cela, en 1965, présente un coût élevé et que son utilité économique n’est pas démontrée aujourd’hui.
Je ferai quatre remarques assez succinctes.
Premièrement, le bénéfice de ce régime est subordonné à un agrément du ministre de l’économie et des finances pris après l’avis du comité des investissements à caractère économique et social. De fait, il est procédé en amont à une expertise considérable.
Deuxièmement, cet agrément est attribué après que l’expertise approfondie de chaque société candidate ait permis de porter une attention toute particulière aux contreparties – j’y insiste – qui sont proposées en termes d’emploi et d’implantation ou de maintien d’activités en France. Le régime n’est donc pas accordé de façon abstraite et sans que des engagements réciproques aient été pris.
Troisièmement, l’agrément est accordé pour une durée de cinq ans, comme vous le savez, madame la sénatrice. Il est renouvelable par périodes de trois ans à l’issue de ce délai, ce qui assure à la fois la stabilité de ce dispositif et la pérennité des engagements.
Quatrièmement, ce régime est véritablement attractif, et pas seulement pour les grandes entreprises que vous avez citées. Certains renouvellements sont demandés au titre des agréments par de petits groupes, ce qui semble montrer que ce régime fiscal est bien adapté et permet aux sociétés concernées de se déployer à l’international.
Je le répète, ce dispositif est bien contrôlé, semble assez sûr et permet à des entreprises qui ne sont pas forcément de grands groupes de développer leurs activités. Pour toutes ces raisons, madame la sénatrice, je me place dans le sillage de M. le rapporteur général et vous prie d’avoir l’obligeance de retirer cet amendement, faute de quoi je demanderais son rejet.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le secrétaire d'État, vous souhaitez à l’évidence le rejet de cet amendement.
Je reviendrai tout de même sur les bénéficiaires de ce régime : vous évoquez de « petits groupes », mais je ne sais pas de quelles sociétés il s'agit. Peut-être serait-il intéressant de publier la liste des entreprises qui y sont assujetties, ou du moins de la porter à la connaissance des membres de la commission des finances.
En effet, d’après les informations dont je dispose, les entreprises qui utilisent encore – ce point est intéressant – ce régime sont Vivendi, que j’ai déjà évoqué, Total, qui a annoncé les résultats que l’on sait il y a quinze jours – sans commentaire –, NRJ et Euro Média.
Toutes les autres entreprises qui en ont bénéficié dans le passé ne l’utilisent plus, et ce sont des groupes industriels, comme Areva, Aventis, Renault et Saint-Gobain. Honnêtement, il s'agit tout de même d’une liste très circonscrite.
Par ailleurs, si l’on observe les sommes versées à Vivendi au cours de la période concernée, on s’aperçoit que le groupe a reçu 464 millions d’euros en 2005, 507 millions d’euros en 2006, 603 millions d’euros en 2007, 548 millions d’euros en 2008 et 435 millions d’euros en 2009. Dans leur dernier rapport annuel, qui ne tient pas compte de l’année 2009, les responsables de Vivendi expliquaient que ce dispositif devait rapporter à l’entreprise 2,1 milliards d’euros sur l’ensemble de la période. Il me semble que cela se passe de commentaires.
J’en viens au coût de cette mesure par rapport à l’emploi créé. Vivendi aurait signé 1 600 CDI, me semble-t-il – 2500 en prenant en compte toute la période jusqu’en 2011. Si l’on divise les sommes versées au groupe par le nombre de nouveaux postes proposés, on obtient un coût astronomique. Et encore, en admettant que ces emplois existent !
Mme la présidente. L'amendement n° I-6, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article 212 du même code est complété par un 3 ainsi rédigé :
« 3. Pour l’application du 1, sont assimilés à des intérêts servis à une entreprise liée directement ou indirectement au sens du 12 de l’article 39, les intérêts qui rémunèrent des sommes laissées ou mises à disposition dont le remboursement est garanti par une sûreté accordée par une entreprise liée au débiteur, ou par une entreprise dont l’engagement est garanti par une sûreté accordée par une entreprise liée au débiteur. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Voici le deuxième amendement de la série « anti-abus » relative à l’impôt sur les sociétés.
Nous avons effleuré ce sujet tout à l’heure avec M. le secrétaire d’État : il s’agit de prévenir le contournement du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation des groupes, qui, dans son état actuel, ne limite la déduction des bénéfices qu’aux seuls intérêts versés à des sociétés du groupe.
Or il arrive que l’on puisse substituer à un prêt intragroupe un emprunt qui est souscrit auprès d’une banque extérieure mais garanti par une société du groupe. Les intérêts versés par l’emprunteur au sein de ce dernier échappent alors aux limites de déduction.
Notre proposition s’inspire d’un régime qui existe, notamment, aux États-Unis. Nous suggérons d’étendre le périmètre des emprunts couverts par le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation aux prêts consentis hors du groupe, mais garantis ou cautionnés par une société appartenant à ce dernier, quelle que soit la nature juridique de la sûreté – personnelle ou réelle – dont il s’agit.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-455, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° I-6
I. – Alinéa 3
Après le mot :
rémunèrent
insérer les mots :
la part
II. - Après l'alinéa 3
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les sommes laissées ou mises à disposition dont le remboursement est garanti par une sûreté réelle sont retenues pour un montant égal à la valeur du bien à la date où la sûreté a été constituée sur lui ou pour un montant égal à sa valeur estimée à cette même date, en cas de bien futur.
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux sommes laissées ou mises à disposition :
« 1° à raison d'obligations émises dans le cadre d'une offre au public au sens de l'article L. 411-1 du code monétaire et financier ;
« 2° en cas de remboursement garanti par le nantissement des titres du débiteur ;
« 3° à la suite du remboursement d'une dette préalable, rendu obligatoire par la prise de contrôle du débiteur, dans la limite du capital remboursé. »
III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les dispositions du 3 du II de l'article 212 s'appliquent aux exercices clos à compter du 1er janvier 2011.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur général, comme vous l’avez très justement rappelé, les dispositions de l’amendement n° I-6 que vous avez déposé, et je vous en remercie d'ailleurs, doivent mettre fin aux pratiques abusives actuelles. Celles-ci, que vous avez bien décrites, consistent à contourner le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation en assimilant tout simplement aux prêts intragroupe visés par ce mécanisme des prêts externes qui sont garantis par des entreprises liées.
Si j’ai bien compris, votre proposition vise des garanties qui peuvent prendre diverses formes, mais seulement celles qui ont pour objet le remboursement de ces prêts.
Économiquement, les prêts s’apparentent en effet à des prêts intragroupe ; le Gouvernement partage pleinement votre volonté de les faire désormais tout simplement entrer dans le champ de ce dispositif. Toutefois, monsieur le rapporteur général, si nous vous suivons tout à fait sur ce point, quelques aménagements pourraient être apportés à cette mesure anti-abus, me semble-t-il. Tel est l’objet de ce sous-amendement.
En premier lieu, il conviendrait de recentrer le dispositif sur son objectif et donc d’exclure du champ de cette mesure les financements purement externes qui sont, d'une part, les émissions d’obligations publiques et, d'autre part, les dettes renégociées à l’occasion d’un changement de contrôle du groupe.
Par ailleurs, les prêts externes garantis par un nantissement de titres de l’entreprise emprunteuse devraient également être exclus dès lors que la sûreté conduit à une situation identique à celle d’un prêt accordé moyennant le gage ou l’hypothèque des actifs de l’entreprise emprunteuse elle-même.
En second lieu, pour clarifier la mesure, il nous semblerait préférable, d'une part, de figer la valeur garantie dans le cadre d’une sûreté réelle à la valeur du bien à la date de l’octroi de cette sûreté, afin d’éviter toute difficulté ultérieure de valorisation, et, d'autre part, d’indiquer qu’en cas de prêt partiellement garanti seule la partie garantie du prêt entre dans le champ de la mesure anti-abus.
En troisième lieu, et enfin, si vous en étiez d'accord, monsieur le rapporteur général, nous pourrions fixer l’entrée en vigueur de la mesure aux exercices clos à compter du 1er janvier 2011.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l’ensemble de ces adaptations sont reprises dans le sous-amendement que je soumets à l’attention de votre assemblée.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-447, présenté par M. Jégou, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3 de l'amendement n° I-6
Après le mot :
sûreté
Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
portant sur des liquidités ou des instruments de trésorerie accordée par une entreprise liée au débiteur, ou par une entreprise dont l’engagement est garanti telle par une sûreté accordée par une entreprise liée au débiteur, à concurrence du rapport entre la valeur, à la date d'octroi de la sûreté, des biens donnés en garantie et des sommes laissées ou mises à disposition. Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque la sûreté accordée par une entreprise liée trouve son origine dans un emprunt contracté directement ou indirectement par cette même entreprise auprès du débiteur et financé par les sommes laissées ou mises à disposition visées dans la première phrase.
II. - Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du 3 s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011. »
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le secrétaire d'État, en vous écoutant défendre votre sous-amendement, je vérifiais qu’il était bien quasiment identique à celui que j’ai déposé. En effet, ma proposition tend à recentrer le dispositif proposé, à viser les sûretés portant sur des actifs liquides – liquidités en caisse, parts d’OPCVM, c'est-à-dire d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières, monétaires – qui auraient pu donner lieu à un prêt appelé dans le jargon financier « back to back », enfin à calibrer la contamination du prêt bancaire en fonction du montant octroyé en garantie.
Par ailleurs, le présent sous-amendement a pour objet de créer une exception à l'application des limitations de l'article 212-II. Il s'agit du cas où les sommes mises à disposition du débiteur par un tiers sont en totalité ou en partie prêtées de nouveau par le débiteur à une société du groupe qui consent dans ce cadre des sûretés au bénéfice, éventuellement direct, de ce tiers et à hauteur du montant emprunté auprès du débiteur.
Enfin, la date du 1er janvier 2011 est elle aussi ciblée au travers de ce texte.
Sans outrepasser ma condition, je coprésente donc ce sous-amendement avec vous, monsieur le secrétaire d'État. (Sourires.)
Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-463, présenté par MM. du Luart et P. Dominati, est ainsi libellé :
A. – Alinéa 3 de l'amendement n° I-6
I. - Après les mots :
garanti par une sûreté
Insérer les mots :
portant sur des liquidités ou des instruments de trésorerie
II. - Après les mots :
dont l'engagement est garanti par une
insérer le mot :
telle
III. - Compléter la fin de cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :
, à concurrence du rapport entre la valeur, à la date d'octroi de la sûreté, des biens donnés en garantie et des sommes laissées ou mises à disposition. Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque la sûreté accordée par une entreprise liée trouve son origine dans un emprunt contracté directement ou indirectement par cette même entreprise auprès du débiteur et financé par les sommes laissées ou mises à disposition visées dans la première phrase
B. - Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les dispositions du 3 du II de l'article 212 du code général des impôts s'appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011. »
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Roland du Luart et moi-même partagions les mêmes craintes que M. Jégou. C’est pourquoi nous avons déposé ce sous-amendement.
Toutefois, et sous réserve d’une vérification de sa rédaction, le sous-amendement du Gouvernement répond à nos préoccupations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les sous-amendements nos I-455, I-447 et I-463 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je fais confiance au Gouvernement, surtout sur un tel sujet et compte tenu du travail qui a été effectué en amont avec les services de Bercy. Les quelques rectifications que vise à apporter le sous-amendement n° I-455 sont utiles et tiennent compte de la concertation à laquelle il semble avoir été procédé avec certaines organisations d’entreprise.
Quant aux sous-amendements nos I-447 et I-463, ils sont analogues à celui du Gouvernement. Je pense que leurs auteurs pourront se rallier à ce dernier texte, sur lequel – à titre personnel, puisque la commission ne s’est pas formellement prononcée, et sous votre contrôle, monsieur le président de la commission – je crois pouvoir émettre un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les sous-amendements nos I-447 et I-463 ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Comme l’ont très justement souligné MM. Jean-Jacques Jégou et Philippe Dominati, ces sous-amendements ont à peu près le même objet.
Si les auteurs de ces propositions ne trouvent pas infamant de se rallier au sous-amendement du Gouvernement, je les invite à le faire.
Mme la présidente. Monsieur Jégou, le sous-amendement n° I-447 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, madame la présidente.
Monsieur Dominati, qu’en est-il du sous-amendement n° I-463 ?
M. Philippe Dominati. Je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. Les sous-amendements nos I-447 et I-463 sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° I-455.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 6.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-145, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Le taux normal de l'impôt est fixé à 33,1/3 %, dans la limite d'un plancher égal à 22 % minimum de l'assiette nette d'impôt sur les sociétés majorée des dépenses fiscales visées dans l'annexe Voies et moyens du projet de loi de finances. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-372 rectifié, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du I. de l’article 219 du code général des impôts est complété par les mots : « dans la limite d’un plancher égal à 15 % minimum de l’assiette nette d’impôt sur les sociétés majorée des dépenses fiscales visées dans l’annexe Voies et Moyens annexée à la loi n° …du … de finances pour 2011. »
Cet amendement n'est pas non plus soutenu.
L'amendement n° I-230, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de l'impôt est fixé à 34,1/3 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 15 000 000 €. »
II. - Les dispositions du présent article s'appliquent au 1er janvier 2011.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Cet amendement vise à compenser, via une légère augmentation de l’impôt sur les sociétés, la suppression progressive, prévue sur trois ans, de l'imposition forfaitaire annuelle due par les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés.
Les premières entreprises bénéficiaires de cette suppression – à partir du 1er janvier 2009 – ont été celles dont le chiffre d’affaires était inférieur à 1,5 million d'euros.
Puis, à compter du 1er janvier 2010, cette mesure a concerné les entreprises dont le chiffre d’affaires était inférieur à 15 millions d’euros. Enfin, à partir du 1er janvier 2011, l’imposition forfaitaire annuelle devra être supprimée pour l’ensemble des entreprises.
Or, dans le contexte de forts déficits que nous connaissons, ces dispositions en faveur des entreprises creusent un peu plus la dette, alors que les mesures de relance les plus efficaces sont celles qui favorisent la consommation des ménages.
Il est donc logique de reporter le coût d’une telle réforme sur l’ensemble des entreprises qui font des bénéfices.
Monsieur le rapporteur général, cet amendement tend à récupérer en un an le coût de la suppression de l’impôt forfaitaire annuel pour 2010 et 2011, soit au total 1,3 milliard d'euros de recettes fiscales supplémentaires pour l’État. Comme je sais que vous êtes très attaché au rétablissement de nos finances publiques, je pense que vous émettrez un avis favorable sur mon amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je crains de décevoir notre excellent collègue Bernard Angels ! En effet, comme il le sait d'ailleurs, l’angle d’attaque de la commission c’est « assiette large, taux faibles » plutôt que « assiette mitée, taux élevés ».
Or augmenter le taux de l’impôt sur les sociétés est une solution de facilité. Ce qu’il faudrait faire, c’est réduire les niches – une politique que nous n’avons pas réellement engagée en matière d’impôt sur les sociétés.
Mme Marie-France Beaufils. C’est le moins que l’on puisse dire !
Mme Nicole Bricq. Ce que vous ne faites pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais ce qu’il conviendrait de faire ! J’ai le souvenir – ce n’est pas très vieux, cela date de quelques années – d’avoir entamé une réflexion sur le sujet et d’avoir rencontré les principales organisations patronales à cette fin. Ces dernières m’ont toutes dit : « Passez, il n’y a absolument rien à voir ». J’ai donc pensé que d’autres sujets étaient peut-être plus immédiatement mobilisateurs. Il n’en reste pas moins qu’il faudra y revenir un jour.
Je conclurai en rappelant l’existence d’un exercice sur le plan européen, que vous connaissez bien : ACCIS, l’assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés, qui vise à homogénéiser l’assiette des impôts sur les sociétés des États membres de l’Union européenne. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
Malheureusement, comme tout ce qui est d’ordre fiscal dans l’Union, cette initiative est complètement encalminée. Il s’agit pourtant simplement de se doter d’un même outil d’analyse des résultats des entreprises, mais quand bien même un tel exercice ne préjuge de rien, d’aucune décision ni d’aucun taux, il fait vraiment très peur et il est très vraisemblable que plusieurs États membres de l’Union européenne suivent précisément ce qui se passe afin de bloquer toute avancée significative dans ce domaine.
Pour revenir à votre amendement, monsieur Angels, nous ne pensons pas qu’il aille dans le bon sens. Des progrès sont nécessaires en matière d’impôt sur les sociétés mais pas selon la logique que vous proposez.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition, et ce pour des motifs simples et logiques.
Quel est en réalité notre objectif, monsieur le sénateur ? C’est de mener une politique qui vise à renforcer la trésorerie et à soutenir la compétitivité des entreprises pour favoriser la reprise économique, tout simplement. En d’autres termes, il s’agit d’éviter d’augmenter la pression fiscale.
C’est pour cette raison que nous avons proposé la suppression de l’imposition forfaitaire annuelle, l’IFA, tout d’abord en faveur des PME et, à l’horizon 2011, en faveur de l’ensemble des entreprises. En effet, ce dispositif grevait la rentabilité des entreprises, en particulier celle des entreprises qui étaient déjà déficitaires.
Tout naturellement, dans la mesure où nous avons supprimé une taxe ou, en tout cas, une disposition qui nous semblait aller dans le sens inverse des objectifs que je viens de décrire, nous avons estimé qu’il n’était pas nécessaire de la remplacer par autre chose. De fait, je le répète, nous considérons qu’une telle mesure aurait un impact négatif sur l’attractivité du territoire.
Enfin, je tiens à préciser que l’Assemblée nationale a adopté le report de la suppression définitive de l’IFA en 2014, ce qui est de nature à vous rassurer s’agissant de la préoccupation budgétaire que vous avez exprimée en défendant votre amendement.
Je vous propose donc de retirer votre amendement, monsieur le sénateur. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° I-227, présenté par M. Rebsamen, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le troisième alinéa de l'article 219 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«...° Le taux fixé au présent article est fixé à 31 % pour la fraction du bénéfice imposable mise en réserve ou incorporée au capital au sens de l'article 109, à l'exclusion des sommes visées au 6° de l'article 112. Il est fixé à 49 % pour la fraction du bénéfice imposable distribuée. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement est proposé par notre collègue François Rebsamen, qui y est très attaché et qui a convaincu les autres membres du groupe socialiste, notamment ceux qui sont également membres de la commission des finances, de le suivre dans cette voie.
Notre collègue propose de moduler le taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’affectation du bénéfice réalisé.
Nous avions déjà déposé un amendement analogue. On nous avait alors soutenu qu’une telle disposition était techniquement difficile à mettre en œuvre. Ce n’est pas tout à fait vrai, car la distinction entre bénéfices réinvestis et bénéfices distribués est pratiquée par certains de nos voisins européens.
L’intérêt de ce dispositif est de répondre à un problème tout à fait récurrent dans notre économie, à savoir le manque de capital des PME. Une incitation fiscale au réinvestissement des bénéfices serait peut-être un bon moyen, pas forcément très spectaculaire, mais en tout cas régulier, pour remédier à ce mal français.
En effet, l’État est intervenu pour renforcer les capitaux propres des PME, soit directement, soit par l’intermédiaire de fonds d’investissement ou de banques publiques ; OSEO est par exemple considéré comme l’organisme le plus à même de renforcer les fonds propres des PME non cotées.
Par ailleurs, des dispositifs fiscaux ont été mis en place pour inciter les particuliers à investir dans les fonds propres des petites entreprises. Nous serons amenés à aborder de nouveau ce sujet lundi prochain, à propos de l’investissement « ISF-PME ».
Certes, cette stratégie, utilisée depuis plusieurs années, a permis de faire de la France le quatrième marché mondial pour les capitaux investis et les fonds empruntés et le deuxième marché européen des LBO en termes de volume, mais force est de constater qu’elle n’a pas été suffisante pour entraîner une augmentation des fonds propres des sociétés nouvelles, en croissance, comme on dit.
Un tel afflux de capital investissement a bien plus profité aux cessions et aux successions qu’à la création et au développement des entreprises. C’est pourquoi le dispositif actuel de l’impôt sur les sociétés encourage finalement les entreprises à la sous-capitalisation, les entrepreneurs ayant intérêt à ne pas réinvestir les bénéfices et à s’endetter afin de réduire l’assiette de leur impôt sur les sociétés. Ce système fiscal les pousse à choisir l’endettement !
La redéfinition de l’impôt sur les sociétés devrait être le moyen de répondre au manque de fonds propres. C’est pourquoi nous proposons une piste de réforme, laquelle devrait être au moins expertisée par le Gouvernement.
Une telle disposition réduirait le coût de constitution des fonds propres et permettrait d’éviter les effets pervers induits par l’ouverture d’un guichet de distribution de capital.
Il est également souhaitable que le renforcement des fonds propres soit endogène, car ce sont les chefs d’entreprise qui sont les plus à même de choisir le moment opportun et le montant à affecter pour la consolidation de leur entreprise.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nicole Bricq ne m’en voudra pas de rappeler notre opposition de fond sur ce sujet, qui revient dans chaque discussion budgétaire.
Au demeurant, avant 2002, le gouvernement de l’époque avait suscité un débat sur ce thème et nous avions observé que cette idée apparemment séduisante – le secrétaire d’État Georges Tron s’en souvient, puisqu’il était alors à la commission des finances de l’Assemblée nationale – soulevait des impossibilités.
Concernant tout d’abord les sociétés cotées, il est tout à fait clair qu’un tel dispositif, qui influe sur les distributions de dividendes, ne pourrait pas être pratiqué par de grandes sociétés internationales régies par le droit français et cotées à Paris sans que ces dernières se déconsidèrent par rapport à leurs analystes et à l’environnement financier international.
Au surplus, sans doute vaut-il mieux faire confiance aux organes sociaux pour définir la juste part à mettre en réserve et celle qu’il convient de distribuer aux actionnaires, dont la confiance est nécessaire.
Permettez-moi d’évoquer brièvement une petite histoire. Il y avait autrefois, dans le domaine de la sidérurgie, une très belle entreprise d’origine française qui, par des fusions successives, est devenue Arcelor. Cette entreprise a été sur le plan technique un succès total dont nous pouvions nous enorgueillir. Toutefois, on pouvait émettre une toute petite réserve à son égard : les dirigeants, dont les qualités étaient très grandes et qui, en général, étaient issus d’un très grand corps de l’État, ne portaient peut-être pas toute l’attention qu’il fallait à leurs actionnaires. Ce qui devait se produire se produisit : aujourd'hui, on ne parle plus d’Arcelor mais d’ArcelorMittal.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° I-227.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet le même avis que celui qui vient d’être exprimé très clairement par le rapporteur général.
Je ferai deux observations, non pas complémentaires mais sans doute redondantes, afin d’éclairer l’avis du Gouvernement.
Tout d’abord, l’objectif qui est le nôtre, celui qui concerne la baisse de la pression fiscale sur les entreprises pour libérer l’investissement, sans entrer dans des situations d’une complexité excessive, s’est traduit par des crédits d’impôts qui sont destinés à encourager les entreprises à réaliser certaines dépenses ou certains investissements.
Prenons l’exemple d’une entreprise qui réalise des dépenses de recherche. Celle-ci peut bénéficier d’un crédit d’impôt égal à 30 % de ses dépenses ; la corrélation avec le sujet que vous évoquez dans votre amendement paraît claire, madame la sénatrice. De même, un crédit d’impôt peut être accordé sous certaines conditions à raison des primes d’intéressement qui sont versées aux salariés.
Comme vous le voyez bien, des parallélismes de forme existent.
Je reprendrai les propos du rapporteur général en les reformulant, mais cela revient strictement au même : le dispositif de modulation que vous proposez – d’ailleurs, il est, me semble-t-il, développé dans le cadre du récent projet de la formation politique à laquelle vous appartenez – et qui prévoit une taxation au taux réduit de 19 % des bénéfices sous condition d’intégration au capital a été supprimé en 2000 en raison du faible intérêt qu’il suscitait auprès des entreprises du fait de sa complexité. Un tel dispositif suppose en effet un suivi sur plusieurs années de la part de l’entreprise et s’accompagne de lourdes tâches de gestion.
Le Gouvernement préfère donc proposer des mesures qui incitent les entreprises à investir plutôt que de pénaliser celles qui, du fait de leurs performances, distribuent des dividendes. Une telle mesure se situerait à l’opposé de l’esprit et de la lettre de la politique que nous menons et que nous souhaitons poursuivre.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. M. le rapporteur général a raison sur un point : ce n’est pas la première fois que nous revenons sur ce sujet. Une proposition de loi du groupe socialiste déposée par notre collègue François Rebsamen a même été débattue dans le cadre d’une journée mensuelle réservée aux groupes politiques d’opposition et minoritaires.
Peut-être faut-il à un moment donné clore le débat s’il n’y a aucune réceptivité ni de la part du rapporteur général ni de la part du Gouvernement et de ses services.
Je voudrais néanmoins revenir sur l’échange qui a eu lieu lors de la discussion de la deuxième loi de finances rectificative pour 2009. Le ministre du budget, à l’époque M. Éric Woerth, nous avait dit que ce débat méritait d’être approfondi. Il s’était engagé à interroger le Trésor, plus précisément la Direction de la législation fiscale, afin qu’une expertise soit menée sur le sujet et nous avait fixé rendez-vous au projet de loi de finances pour 2010.
Or nous examinons actuellement le projet de loi de finances pour 2011 et nous n’avons pas de retour sur un sujet qui, je le pense, mériterait au moins une expertise. La porte est fermée, peut-être un jour s’ouvrira-t-elle. Pour l’heure, concernant cette proposition, nous nous y tenons.
Mme la présidente. L'amendement n° I-321 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le a du I de l'article 219 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 19 % » est remplacé par le taux : « 25 % » ;
2° Les deuxième et avant-dernier alinéas sont supprimés.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Avec cet amendement, il s’agit de modifier de manière non négligeable la fiscalité des entreprises en mettant en place un taux unique d’imposition des plus-values de cession d’actifs, qu’il s’agisse de biens, de matériels, de brevets, d’éléments immatériels du patrimoine de l’entreprise ou d’actifs financiers purs.
Une telle mesure permettrait de promouvoir l’équité entre les entreprises, puisqu’elle améliore singulièrement la lisibilité d’un dispositif qui, au fil du temps, s’est profondément technicisé, au point que l’on peut dire, sans trop se tromper, qu’il existe aujourd’hui une lecture possible de la législation relative à l’impôt sur les sociétés pour chaque entreprise, car il est possible de jouer sur les principes et dérogations de l’article 219 du code général des impôts ou sur les autres dispositions correctrices de l’impôt.
Par ailleurs, il s’agirait également d’une mesure de rendement puisque les plus-values perçues par les entreprises se chiffrent à plusieurs dizaines de milliards d’euros et qu’une progression du moindre point de l’imposition est donc génératrice de plusieurs centaines de millions d’euros de recettes nouvelles.
Notons enfin que la mesure que nous préconisons est en cohérence avec celle que nous avons proposée précédemment sur la fiscalité des plus-values des particuliers. Il n’est en effet pas justifié que seuls les particuliers soient mis à contribution pour rétablir l’équilibre des comptes publics. Il nous semble logique qu’un effort particulier soit demandé aux entreprises.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce taux d’imposition comporte deux niveaux.
Cela vient d’être rappelé, les taux réduits s’appliquent en particulier à des éléments d’actifs immatériels, à des inventions brevetables, au produit net de concession des brevets, à certains procédés de fabrication industrielle par exemple. Sont soumis au taux de droit commun, qui est plus élevé, les titres de société à prépondérance immobilière non cotée, les titres de placement de façon générale, les titres de sociétés établies dans des États et territoires non coopératifs : tous ces éléments sont exclus du régime des plus-values à long terme.
Monsieur Vera, suivre vos préconisations serait une bien mauvaise idée : cela constituerait un élément négatif pour la propriété industrielle française et inciterait moins à la cession de brevets. En d’autres termes, cela irait à l’encontre de la politique conduite en ce domaine.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle demanderait son rejet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement, pour deux raisons.
D’une part, je rappelle, à la suite du rapporteur général, que le taux de taxation des plus-values portant sur ces titres a déjà été relevé en 2009, passant de 16,5 % à 19 %. Nous partageons la même logique que vous, monsieur le sénateur, mais le Gouvernement considère que le pas a été fait de manière suffisante jusqu’à présent.
D’autre part, relever le taux d’imposition des plus-values applicables aux cessions de brevet et aux redevances de concessions de brevet réduira l’attractivité de la France sur le plan de la recherche. Or c’est exactement l’inverse de ce que nous souhaitons tous, vous comme nous.
Par conséquent, il serait préférable de retirer cet amendement ; si tel n’était pas le cas, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-321 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° I-320 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le a quinquies du I de l'article 219 du code général des impôts est abrogé.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Si l’on en croit le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur les niches fiscales et sociales, une grande partie du déficit public et des déficits de la sécurité sociale provient de l’accumulation des baisses d’impôt, parfois même de leur suppression – la taxe professionnelle, par exemple –, des dépenses fiscales et des régimes dérogatoires concernant l’ensemble des activités économiques.
En 2010, selon ce rapport, plus de 170 milliards d’euros auront été consacrés, dans notre fiscalité et notre système de prélèvements, à alléger les obligations fiscales et sociales des entreprises.
La justification de telles mesures, qui se sont empilées au fil du temps, visant parfois les mêmes objectifs et la même « matière fiscale », est connue de tous.
Quand il s’est agi de réduire l’impôt sur les sociétés, il fallait encourager l’emploi et l’investissement.
Quand il s’est agi de réduire puis de supprimer la taxe professionnelle, il fallait encourager l’emploi et l’investissement.
La chute du nombre des emplois salariés dans notre pays, le démantèlement d’une grande partie de l’emploi industriel – aujourd’hui, ce secteur recourt si massivement à l’emploi précaire et à l’emploi intérimaire que c’est la qualité de l’emploi en général et la conception même du travail qui sont en péril – semblent des éléments suffisamment évidents pour démontrer que les intentions affichées dans le passé, à l’appui de telle ou telle mesure, ne se sont qu’assez peu traduites dans les faits.
La dépense fiscale consacrée à l’impôt sur les sociétés dite « niche Copé » est relativement importante, de l’ordre de 35 milliards d’euros, soit, pratiquement, la dépense budgétaire du ministère de l’éducation. Mais les régimes particuliers d’imposition se révèlent encore plus coûteux, avec un total estimé à 71,5 milliards d’euros par le Conseil des prélèvements obligatoires.
En d’autres termes, la niche Copé qui vise à exonérer les plus-values de cession de titres de participation de nos grandes entreprises à vocation transnationale représente un coût de 6 milliards d'euros ! Une telle dépense permet à quelques-unes de nos plus grandes entreprises de vendre à qui elles souhaitent et comme elles l’entendent telle ou telle filiale membre de leur groupe sans avoir à rendre le moindre compte à la collectivité.
En outre, le régime dérogatoire intervient même si la cession de participation se traduit in fine par un plan social de liquidation d’emplois ou d’activité mis en œuvre par le nouveau groupe « propriétaire », aussi rapidement qu’il a acquitté le prix de cession.
Autrement dit, l’opération peut non seulement faire perdre quelques recettes fiscales à l’État – « quelques » n’est-il pas de trop ? – mais également se traduire – c’est d’ailleurs souvent le cas – par un coût social complémentaire supporté par la société dans son ensemble.
Devons-nous continuer à financer, sur les deniers publics, des opérations de restructuration industrielle qui peuvent se révéler mortifères pour l’emploi et l’activité dans notre pays ? Nous ne le pensons pas. D’où notre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je persiste à penser que les évaluations qui ont été citées sont tout à fait fantasmatiques. En effet, vous raisonnez comme si le même nombre de transactions aurait eu lieu avec un taux normal d’imposition. Or lorsque celui-ci s’appliquait, il bloquait les transactions ! En d’autres termes, beaucoup de transactions n’auraient pas eu lieu au cours de la période étudiée.
Le mauvais procès qui est fait à une initiative que nous avons prise ici même, lorsque Jean-François Copé occupait les fonctions de ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, relève véritablement de la mauvaise foi. Je suis au regret de devoir observer, à partir de certaines évaluations réalisées par Bercy, que cette mauvaise foi a été alimentée par des chiffrages mécaniques, arithmétiques, sans réflexion. Or les phénomènes économiques que nous tentons de mesurer auraient été différents si ce régime d’abaissement progressif puis d’exonération n’avait pas été adopté.
C'est la raison pour laquelle je pense qu’il ne serait pas raisonnable de revenir sur un tel régime.
Au demeurant, nous n’avons cessé de rappeler que la grande majorité des pays de l’OCDE exonèrent ces plus-values à long terme sur titres de participation. Notre situation ne nous permet pas de nous distinguer. Notre compétitivité et celle de la place de Paris ne sont pas suffisantes pour que nous puissions décider un tel sacrifice.
Aussi, la commission ne peut qu’émettre un avis tout à fait défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement fait siens les arguments développés par le rapporteur général.
Je rappelle que ce régime fiscal a été adopté en 2004, à la suite de la recommandation du Conseil des impôts. Il préconisait d’adopter cette mesure « afin de rendre la France aussi attractive que ses partenaires européens », pour reprendre les termes mêmes du rapport de cette instance. Le Conseil des impôts jugeait le régime en vigueur pénalisant pour la France, pour ses entreprises et donc pour l’emploi. Il rejoignait ainsi le constat que dressait déjà le rapporteur général de la commission des finances du Sénat et qui vient d’être rappelé à l’instant, à savoir que la France était le dernier pays d’Europe à imposer les plus-values de cession de participations et qu’il en résultait inévitablement un handicap de compétitivité.
Je n’entrerai pas dans le détail d’un débat qui a été ouvert maintes fois et sur lequel on peut parler pendant longtemps. Je formulerai simplement deux observations.
En premier lieu, sur le fond, nous sommes tous, vous comme nous, pour la compétitivité, donc pour l’emploi. Par conséquent, nous savons que la situation antérieure à 2004 était pénalisante pour notre pays.
En second lieu, et c’est une précision technique, cette année a eu lieu une révision des bases à partir desquelles ces évaluations ont été réalisées, de telle sorte que celles-ci soient plus justes et plus inattaquables. Je me permets de le souligner, nul n’étant parfait, il y avait matière à corriger ce qui parfois était imparfait ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’entends bien qu’il s’agit de rendre les entreprises plus compétitives. Je suis toutefois au regret de constater que cela ne se traduit pas dans la réalité !
Vous ne cessez de répéter que toutes ces mesures ont eu des effets positifs sur l’emploi. Pourtant, au fil d’opérations de prise de contrôle diverses, Pechiney a été englouti par un conglomérat australo-canadien de l’aluminium. De la même façon, les dirigeants de Renault n’ont pas plus investi dans les usines de Douai, de Sandouville ou de Cléon et la production de la Clio ou de la Twingo a été installée en Turquie, en Espagne, en Roumanie ou en Slovénie.
Il faut absolument reconsidérer votre argumentation. Vous prétendez que les données chiffrées du Conseil des prélèvements obligatoires sur lesquelles nous nous appuyons méritent d’être revues et réexaminées. Il est tout de même étonnant d’affirmer que l’on ne peut se fier aux analyses et aux conclusions d’un rapport très officiel et de remettre ainsi en cause la qualité du travail accompli.
Vos arguments ne me paraissent pas très solides. Aujourd'hui, notre pays compte plus de 3 millions de demandeurs d’emplois : la preuve est faite que les mesures que vous défendez n’ont pas eu l’effet que vous annonciez !
Par conséquent, nous maintenons cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Il s’agit d’un sujet qui alimente le débat entre la droite et la gauche et qui tourne parfois à la polémique.
Ce qui est sûr, c’est que cette mesure a été mal évaluée au moment de sa mise en place.
Monsieur le rapporteur général, vous avez raison : il ne faut pas être dans le fantasme. Compte tenu du taux réel de l’impôt sur les sociétés, cette mesure ne représente pas 33,4 %. D’après le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, les dernières estimations montrent que son coût serait de 6 milliards d'euros en 2009 et son coût cumulé compris entre 9 milliards et 10 milliards d'euros en 2008 et 2009. Certes, nous sommes loin des 22 milliards d'euros évoqués, mais 10 milliards d'euros, ce n’est pas rien ! Ou alors le Conseil des prélèvements obligatoires nous raconte des histoires... Mais je ne crois pas que ce soit le cas.
Du reste, le Conseil des prélèvements obligatoires ne recommande pas de remettre en cause cette disposition, car nous sommes dans un contexte de concurrence internationale et nous avons certainement intérêt à avoir des holdings sur notre territoire. Toutefois, il propose des aménagements, que nous avons repris dans une série d’amendements que nous présenterons tout à l’heure. Ce régime étant devenu le régime de droit commun des grands groupes, c’est tout de même un point important.
Par ailleurs, je note que l’impact économique de cette mesure n’a jamais vraiment été évalué.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il n’est pas évaluable !
Mme Nicole Bricq. C’est le problème des dépenses fiscales que l’on crée : au fil des années, elles galopent. Le grand travers d’une niche, c’est qu’elle galope toute seule et ne peut plus s’arrêter, à la différence d’un mécanisme de subventions auquel on peut décider de mettre fin. C’est là le grand reproche à faire aux niches.
De surcroît, celle qui nous occupe n’a pas été évaluée du point de vue de son impact économique.
Je vous rappelle les deux critères auxquels nous tenons, à savoir un impact économique certain sur l’économie réelle et une utilité sociale démontrée.
En l’absence d’évaluation de cette niche, tout de même substantielle, et de prise en compte de la proposition de l’aménager faite par le Conseil des prélèvements obligatoires, nous voterons l’amendement n° I-320 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Permettez-moi, madame Bricq, d’apporter une petite précision, absolument neutre.
Je crois me souvenir que cette mesure avait été préconisée à la suite de la publication d’un rapport très complet.
Mme Nicole Bricq. Arrêtez de regarder dans le rétroviseur !
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Ce n’est pas regarder dans le rétroviseur que d’évoquer Michel Charzat. La simple évocation de ce nom ne devrait pas être une insulte pour la sénatrice socialiste que vous êtes, ou alors je n’y comprends plus rien ! (Mme Nicole Bricq s’exclame.) Ce n’est pas vous faire injure que de le citer !
Mme Nicole Bricq. C’est un ami !
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Je dis simplement qu’il y a déjà eu des rapports sur ce sujet, celui du Conseil des prélèvements obligatoires, ceux de la commission des finances, ceux qui ont été établis par des parlementaires éminents et respectables émettant des idées qui méritent d’être entendues. En l’occurrence, il s’agit de Michel Charzat, sénateur socialiste, qui avait fait la même préconisation en 2000. Par conséquent la position que je défends en ce moment ne peut être qualifiée de partisane.
Mme Nicole Bricq. Il faut l’évaluer !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-320 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° I-7, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le a sexies du I de l’article 219 du même code, il est inséré un a septies ainsi rédigé :
« a septies. Lorsqu’il existe des liens de dépendance entre l’entreprise cédante et l’entreprise cessionnaire au sens du 12 de l’article 39, le régime des plus-values et moins-values à long terme s’applique aux plus-values et moins-values de cession de titres de participation définis au dix-huitième alinéa du 5° du 1 de ce même article, autres que ceux mentionnés au a sexies-0 bis du présent article ; »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit du troisième train de mesures « anti-abus » pour les sociétés et groupes imposés à l’impôt sur les sociétés. Cet amendement concerne le risque de contournement du régime des plus-values ou moins-values à long terme.
Ce régime prévoit un taux réduit d’imposition de 15 % ou 19 % ou, pour les titres de participation, une exonération sous réserve d’une quote-part de frais et charges.
La crise économique a conduit un grand nombre de sociétés à déprécier leurs titres et à enregistrer des moins-values latentes, ce qui peut conduire à des pratiques d’optimisation.
Le schéma consiste à matérialiser des moins-values sur des titres de participation ayant normalement vocation à être détenus à long terme, et ce en cédant ces derniers à une filiale ou à une société sœur dans les deux années de leur acquisition. La cession n’est alors pas soumise au régime du long terme et la moins-value, qui aurait dû normalement rester latente et ne pas être déductible, est déduite du résultat imposable de la société qui l’a enregistrée. En fait, il s’agit d’une simple optimisation intragroupe qui permet de jouer entre les différentes structures juridiques d’un groupe.
Notre amendement vise à mettre fin à un tel schéma en soumettant au régime du long terme les plus-values ou moins-values de cession de titres de participation entre entreprises liées, autres que les titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées, quelle que soit la durée de détention de ces titres.
En quelque sorte, nous neutralisons les cessions intragroupes éventuelles intervenant dans le délai de deux années après l’acquisition des titres dont il s’agit.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-456, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement I-7, alinéa 3
Remplacer les mots :
le régime des plus-values et moins-values à long terme s'applique aux
par les mots :
il est sursis, jusqu'à leur cession à une entreprise non liée à l'entreprise cédante ou leur annulation, à l'imposition des
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur général, je comprends parfaitement, et pour cause, l’esprit comme la lettre de votre amendement.
Il s’agit de mettre fin à des montages permettant à des groupes de faire tourner les titres de leurs filiales et, ainsi, de céder les titres qui se sont dépréciés à des sociétés sœurs, de façon à révéler leurs moins-values latentes et à déduire tout simplement celles-ci de leur résultat imposable.
Je suis favorable à cet amendement qui va, à l’évidence, dans la bonne direction.
Cependant, pour prévenir d’autres montages potentiels de ce type, je propose, par mon sous-amendement, de remplacer l’exonération que vous envisagez par un sursis d’imposition, afin d’éviter tout risque de détournement du dispositif que vous proposez.
Mme la présidente. Les deux sous-amendements suivants sont identiques.
Le sous-amendement n° I-448 est présenté par M. Jégou.
Le sous-amendement n° I-462, présenté par MM. du Luart et P. Dominati.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Compléter l'amendement n° I-7 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le a septies ne s’applique pas lorsque la cession à l’entreprise cessionnaire est faite dans l’objectif d’une cession à une personne non liée au sens du 12 de l’article 39.
« Les dispositions du a septies s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011. »
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° I-448.
M. Jean-Jacques Jégou. L’application du régime des plus-values et moins-values à long terme aux cessions de titres de participation entre entreprises liées, quelle que soit la durée de détention des titres, est susceptible de pénaliser certaines opérations de restructuration intragroupe, en particulier les fusions, déjà réalisées ou en cours de finalisation, qui obéissent à une logique économique de réorganisation ou de simplification des structures. Les opérations de restructuration préalables à une cession hors groupe doivent donc être exclues du champ du dispositif.
Il apparaît nécessaire, par ailleurs, d’éviter tout impact rétroactif de cette mesure et, en conséquence, d’en limiter l’application aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011.
Là encore, monsieur le ministre, nous avons des positions très proches.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° I-462.
M. Philippe Dominati. Cet amendement, que j’ai cosigné avec mon collègue Roland du Luart, répond à la même préoccupation que celui de M. Jégou.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission se sent plus proche du sous-amendement n° I-456 du Gouvernement, et suggère le retrait des sous-amendements identiques nos I-448 et I-462.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Les auteurs de ces sous-amendements pourraient peut-être se rallier à celui du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. Monsieur le ministre, vous proposez un report, mais, pardonnez-moi de vous le dire, notre sous-amendement est plus précis, puisque nous proposons une date. Il me paraît donc avoir une clarté plus grande. (M. Philippe Dominati acquiesce.) M. Dominati semble être d’accord sur la date que nous proposons.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Vous proposez que le dispositif s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2001, une solution plus bienveillante que la nôtre. Ce que nous proposons, en effet, et ce que maintient le sous-amendement du Gouvernement, c’est d’appliquer tout de suite le dispositif à des situations abusives existantes.
Notre solution me paraît préférable à partir du moment où l’on a identifié des possibilités d’abus. J’ajoute que celles-ci ne sont pas théoriques. Les quelques contacts que j’ai eus avec les services concernés laissent à penser qu’il y a anguille sous roche. Mieux vaut que l’anguille ne se cache pas trop loin !
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Monsieur le rapporteur général, en fixant une date, ce sous-amendement vise précisément à ne pas contrecarrer des opérations en cours de réorganisation de groupes.
Si le sous-amendement n° I-456 du Gouvernement ne tient pas compte de cet impératif de temps, on peut s’interroger sur son utilité, l’objectif étant de faire en sorte que les réorganisations en cours ne soient pas pénalisées par la disposition actuelle.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Monsieur Dominati, je comprends votre argumentation. Cependant, permettez-moi de préciser que le sursis proposé par le Gouvernement a pour effet, entre autres, d’éviter de contrarier les opérations en cours.
De ce point de vue, le sous-amendement gouvernemental devrait vous rassurer, puisqu’il répond à votre préoccupation légitime.
Mme la présidente. Monsieur Jégou, le sous-amendement n° I-448 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Je comprends mieux la raison d’être du sursis d’imposition, point qui me gênait dans le sous-amendement n° I-456. En tout état de cause, j’accepte de me rallier à ce dernier, et je retire mon sous-amendement.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, le sous-amendement n° I-462 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Je me rallie également au sous-amendement du Gouvernement, et je retire le mien.
Mme la présidente. Les sous-amendements nos I-448 et I-462 sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° I-456.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 6.
L’amendement n° I-446, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Le a) du 1 de l’article 220 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le second alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Le surplus peut être imputé sur l’impôt dû sur les revenus de même nature au titre des deux exercices suivants. La fraction non imputée à l’issue de cette période constitue une charge déductible des résultats de l’exercice suivant. »
2° Il est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque ces revenus sont perçus à raison de biens ou droits préalablement détenus par la personne, ou une autre personne qui lui est liée au sens du 12 de l’article 39, qui, dans le contrat ayant conféré au contribuable la détention de ces biens ou droits ou dans un contrat y afférent, s’est engagée à en retrouver ou s’est réservé la possibilité d’en retrouver ultérieurement la détention, ce montant est diminué des charges engagées pour l’acquisition de ces revenus par le contribuable et les personnes qui lui sont liées, y compris :
« - les moins-values de cession de ces biens ou droits ;
« - les sommes, autres que le prix d’acquisition de ces biens ou droits, versées à cette autre personne ou aux personnes qui lui sont liées, au sens du 12 de l’article 39.
« Toutefois, les charges pour lesquelles le contribuable peut démontrer qu’elles auraient été engagées même en l’absence d’imputation du crédit d’impôt ne viennent pas en diminution du montant des revenus mentionnés au deuxième alinéa. »
II. – Le 1° du I est applicable aux revenus perçus au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement tend à lutter contre certaines optimisations fiscales liées aux dividendes de source étrangère perçus par des sociétés françaises. En effet, ces dernières peuvent imputer sur leur impôt sur les sociétés français un crédit d’impôt correspondant à l’impôt déjà payé à l’étranger sur ces revenus.
Cette faculté, très classique en droit fiscal, permet d’éliminer la double imposition. Le montant du crédit d’impôt est alors limité au montant de l’impôt sur les sociétés que la société française a acquitté en raison de la perception de ces revenus.
Toutefois, le crédit d’impôt n’est ni remboursable ni reportable. Cette double restriction a pu conduire à des montages d’optimisation fiscale. En quelque sorte, il s’est créé un « marché des crédits d’impôt ». Des exemples peuvent être donnés, sur lesquels je reviendrai si vous le souhaitez, mes chers collègues.
Le Conseil d’État a jugé, le 7 septembre 2009, que ce type de montages, considérés par l’administration comme abusifs, tant en termes économiques que sur le plan de l’équité, ne constituait pas une fraude à la loi fiscale.
Pourtant, il peut se produire qu’une société détienne des titres, mais qu’elle soit déficitaire et ne puisse profiter du crédit d’impôt. Quelques jours avant le détachement du coupon, elle signe un contrat de vente avec option de rachat ou un contrat de prêt avec une autre société. Cette dernière devient juridiquement propriétaire des titres et perçoit les dividendes qui leur sont attachés. La seconde société peut alors imputer le crédit d’impôt étranger sur son impôt sur les sociétés. Quelques jours plus tard, la première société exerce son option de rachat sur les titres, par exemple son droit de réméré, et ce à un prix qui permet aux deux sociétés de se partager le bénéfice de l’opération.
Il convient de modifier la loi pour mettre un terme à ces pratiques d’opportunisme. Le présent amendement vise, en premier lieu, à modifier la règle de plafonnement du montant des crédits d’impôt, de sorte que ces montages perdent leur intérêt financier, et, en second lieu, à mieux appréhender les situations de double imposition à l’origine des comportements d’optimisation, en permettant l’imputation des crédits d’impôt pendant trois exercices, puis leur déduction, le cas échéant, de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
J’espère que ce mécanisme sera suffisamment efficace et robuste pour convaincre le Conseil d’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Cette mesure est très attendue par les entreprises, qui ont dénoncé la rigueur du régime auquel elles sont soumises actuellement. Ce régime les conduit, en effet, à renoncer au crédit d’impôt lors des années où elles sont en déficit.
Cet amendement a deux objectifs, très simples et très clairs.
Il s’agit, d’abord, de mettre fin à des pratiques d’optimisation fiscale par le biais de rachat et de revente de titres à seule fin de pouvoir bénéficier du crédit d’impôt étranger.
Il s’agit, ensuite, d’imputer le crédit d’impôt étranger sur une période totale de trois exercices, au lieu d’un seul actuellement.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui va dans la bonne direction.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est un encouragement à faire des bénéfices !
Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° I-446 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 6.
L’amendement n° I-228, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, les mots : « l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de » sont supprimés.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Tout à l’heure, le rapporteur général a fait état des travaux préparatoires à l’adoption de l’assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés dans l’Union européenne, l’ACCIS.
En France, une singularité caractérise les reports en arrière. En effet, si la plupart des États européens admettent le report en avant de façon illimitée, notre pays est le seul à admettre le report en arrière sur trois ans.
Notre amendement vise à limiter ce report en arrière des déficits à un an, afin de se rapprocher de la pratique en vigueur dans les pays comparables au nôtre que sont l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l’Irlande.
J’insiste sur ce point, car c’est un sujet à la mode : on parle beaucoup, actuellement, de l’harmonisation avec nos voisins allemands. L’impôt sur les sociétés est peut-être justement celui qui se prête le mieux à cette démarche de rapprochement. Cela ne nous pénaliserait pas et limiterait les effets de cette mesure. C’est d’ailleurs, me semble-t-il, une recommandation contenue dans le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur les niches fiscales et sociales.
Il serait bon de limiter notre régime en la matière, car c’est le plus ouvert de l’Union européenne.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission souhaiterait entendre l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Je suis défavorable à cet amendement, pour trois raisons.
Premièrement, le report en arrière des déficits bénéficie avant tout aux entreprises en difficulté qui estiment ne pas pouvoir utiliser leur déficit à brève échéance, faute d’espérer réaliser des bénéfices à court terme.
Deuxièmement, votre proposition est en contradiction avec la politique mise en œuvre par le Gouvernement, en particulier dans le cadre du plan de relance, et qui visait précisément à assouplir le régime en permettant, à titre exceptionnel, un remboursement immédiat des créances de report en arrière des déficits.
Troisièmement, et je veux souligner ce point important, si vous avez effectivement raison lorsque vous indiquez que le régime français de report en arrière des déficits est plus favorable que celui de la majorité de nos voisins européens, il faut préciser, en contrepoint, que notre dispositif d’imposition des bénéfices des entreprises comporte des dispositions plus rigoureuses, à bien des égards, que celles en vigueur dans ces pays ; je pense notamment au taux d’imposition. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
Nous estimons qu’un point d’équilibre a été trouvé, en France, entre un taux d’imposition élevé et un régime de report en arrière des déficits plus favorable.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission suit l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le secrétaire d’État, nous avons fait état précédemment de l’imposition réelle des sociétés. Le taux facial, en France, n’est pas de 33,4 %. J’indique, par comparaison, que les Allemands ont baissé leur taux d’imposition des sociétés, qui est désormais proche de 29 %.
En France, plus la taille du groupe augmente, plus l’impôt sur les sociétés diminue, et le taux d’imposition est inférieur à la moyenne allemande. Ce n’est pas moi qui le dis, mais le Conseil des prélèvements obligatoires !
Vous savez que notre impôt sur les sociétés est profondément mité. Il faut arrêter cette fuite des ressources fiscales. D’ailleurs, nombre de dispositions de notre régime d’imposition n’ont pas fait la preuve de leur intérêt économique. Si ces dispositions étaient aussi formidables qu’on le dit, la France compterait des PME en forte croissance, puissantes et exportatrices, des sociétés dynamiques implantées partout dans le monde, et les headquarters du monde entier viendraient s’installer sur notre territoire. Ce n’est malheureusement pas le cas !
Il faudra bien, un jour ou l’autre, faire le bilan de ces dispositions fiscales dérogatoires, qui ne renforcent pas nécessairement la compétitivité de nos entreprises.
Mme la présidente. L’amendement n° I-143, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 235 ter ZA du code général des impôts, il est inséré un article 235 ter ZB ainsi rédigé :
« Art. 235 ter ZB - À compter du 1er janvier 2010, lorsque leur bénéfice imposable déterminé conformément à l'article 209 est, au titre de l'année considérée, supérieur de plus de 20 % au bénéfice de l'année précédente, les sociétés dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation sont assujetties à une contribution égale à 40 % de l'impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés aux I et IV de l'article 219. »
II. - Après l'article 39 ter C du même code, il est inséré un article 39 ter D ainsi rédigé :
« Art. 39 ter D. - I Les sociétés dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation sont autorisés à déduire de leur contribution à l'impôt sur les sociétés, dans la limite de 25 % de cette contribution, une provision pour le développement de la recherche dans les énergies renouvelables ainsi que pour les moyens modaux alternatifs au transport routier.
« II. - Les bénéfices affectés à cette provision à la clôture de chaque exercice doivent être employés, dans un délai de deux ans à partir de cette date :
« - soit à des travaux de recherche réalisés pour le développement des énergies renouvelables,
« - soit à une contribution financière à l'agence de financement des infrastructures de transport de France.
« III. - À l'expiration du délai de deux ans, les sommes non utilisées dans le cadre prévu au II sont rapportées au bénéfice imposable de l'exercice en cours. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° I-404, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 776 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'incorporation à une donation-partage transgénérationnelle d'une donation antérieure effectuée conformément à l'article 1078-7 du code civil est soumise au seul droit de partage, y compris lorsque l'attribution du bien précédemment donné ou du bien qui lui est subrogé est réalisée au profit d'un descendant du donataire d'origine. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. La loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions a apporté des aménagements en matière de donation aux petits-enfants. Sur le plan fiscal, certains bureaux d’enregistrement ont une interprétation différente. L’an passé, notre ancien collègue Alain Lambert avait déposé un amendement à la loi de finances afin que soit précisé ce dispositif. Le Gouvernement avait alors souhaité un retrait de cet amendement, arguant qu’un simple rapprochement suffirait à régler ce problème.
Une réunion a eu lieu en février entre les représentants du Gouvernement et le Conseil supérieur du notariat. Depuis, aucune traduction législative concrète n’a été proposée.
Cet amendement ne fait que reprendre les conclusions de cette réunion de travail, tout en précisant que ce dispositif ne vaut qu’en ligne directe.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cette disposition est en quelque sorte « testamentaire » (sourires), puisque notre ancien collègue Alain Lambert avait déjà présenté cet amendement plusieurs fois. Je me souviens qu’il s’était un peu irrité à ce sujet, l’année dernière, et avait obtenu l’engagement du Gouvernement de retravailler le dossier. Il avait alors retiré son amendement.
Lors de la séance du 25 novembre 2009, Éric Woerth avait déclaré : « Je suis d’avis de retravailler le sujet, comme nous le suggère lui-même M. Lambert, qui a déjà déposé des amendements sur ce sujet des donations-partages transgénérationnelles, c’est-à-dire celles qui “ sautent ” une génération. Il faut nous pencher sur la question pour traiter correctement tout ce qui relève des droits de succession et du droit de partage ».
Il serait utile de savoir, monsieur le secrétaire d’État, si ce travail a donné des résultats.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Cet amendement n’est pas vraiment nouveau. Si j’ai bien compris vos propos, monsieur Dominati, vous souhaitez tirer de nouvelles conséquences fiscales de la réforme civile des successions et libéralités prévue par la loi du 23 juin 2006.
La Haute Assemblée a tiré, fin 2006, les conséquences fiscales des nouvelles règles civiles, et plus particulièrement du régime fiscal des donations-partages transgénérationnelles. Un amendement avait été adopté par votre assemblée afin d’introduire dans le code général des impôts un article qui prévoyait expressément qu’« en cas de donation-partage faite à des descendants de degrés différents, les droits sont liquidés en fonction du lien de parenté entre l’ascendant donateur et les descendants allotis ».
Cette proposition aboutirait, de fait, à un allégement des droits de donation aux petits-enfants. Elle n’est donc pas neutre fiscalement, c’est incontestable.
On peut s’interroger sur la justification d’un allégement de cette nature, compte tenu des efforts qui ont déjà été faits, dans le cadre des dispositions d’ensemble sur les successions contenues dans la loi TEPA, en faveur de la transmission du patrimoine.
Le Gouvernement considère qu’il existe d’autres pistes, moins coûteuses, à expertiser. Il conviendrait de conserver le principe applicable en matière de droits de mutation à titre gratuit, à savoir une taxation en fonction du lien de parenté. Une imputation des droits initialement payés pourrait être envisagée, à l’instar de ce qui existe en matière de droits de retour, qui sont régis par une disposition fiscale adoptée sur l’initiative du Sénat.
Pour l’ensemble de ces raisons, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l’amendement n° I-404 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Je vais le retirer, madame la présidente.
Par cet amendement, je tenais à signaler que le Sénat était vigilant quant aux solutions proposées. Vous m’engagez à retirer cet amendement, monsieur le secrétaire d’État, parce que vous comptez soumettre à notre examen d’autres pistes. D’un côté, une réforme fiscale est annoncée, de l’autre, un collectif budgétaire est prévu. J’espère que nous pourrons examiner, très bientôt, étudier ces propositions !
Mme la présidente. L’amendement n° I-404 est retiré.
L’amendement n° I-460, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 88 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 est ainsi modifié :
1° Au XII, l'année : « 2011 » est remplacée par l'année : « 2012 » ;
2° Au XIII, l'année : « 2012 » est remplacée par l'année : « 2013 ».
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Tout d’abord, je remercie M. Dominati d’avoir bien voulu retirer son amendement. La question qu’il a abordée mérite d’être incluse dans le grand débat fiscal que nous aurons l’année prochaine.
J’en viens à mon amendement. L’article 88 de la loi du 30 décembre 2006 a prévu une réforme du régime fiscal des mutuelles et des organismes d'assurance, comportant la fiscalisation progressive des mutuelles, l’exonération des contrats solidaires et responsables, et la possibilité de constituer en franchise d'impôt une provision d’égalisation relative aux contrats de groupe. Ces dispositions sont codifiées au sein de divers articles du code général des impôts.
L’entrée en vigueur de cette réforme a été successivement reportée, compte tenu de la procédure, toujours en cours devant la Commission européenne, visant à vérifier la compatibilité des dispositions précitées avec différentes règles communautaires relatives aux aides d’État.
Le présent amendement vise à reporter d’une année supplémentaire l’entrée en vigueur de la réforme du régime fiscal des mutuelles et des organismes d’assurance, dès lors que la Commission européenne ne rendra pas sa décision en la matière avant la fin de l’année 2010. Il tend aussi à éviter que nous nous retrouvions en contradiction avec cette décision.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il est favorable.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 6.
L’amendement n° I-231, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement détermine précisément le périmètre des petites entreprises individuelles qui doivent être incitées à choisir le régime fiscal de la micro-entreprise, et remet en cause les dispositifs dérogatoires qui incitent à un comportement inverse.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai dans la même intervention les amendements nos I-231 à I-235 et I-237 à I-242.
Cette série d’amendements que je présente au nom du groupe socialiste a été mal accueillie ce matin au sein de la commission des finances. En effet, le rapporteur général et le président de la commission nous ont fait remarquer que ces dispositions constituaient des injonctions au Gouvernement et que, de ce fait, elles auraient pu ne pas être recevables au fond.
Ces amendements ont tous la caractéristique d’attirer l’attention du Gouvernement et de la majorité sénatoriale sur le mitage de l’impôt sur les sociétés. J’en ferai une présentation globale, car ce n’est pas la peine que je me tape la tête contre les murs si je n’obtiens d’écho sur aucun amendement. Mais j’aimerais au moins que l’on écoute ce que nous avons à dire.
La commission des finances de l’Assemblée nationale avait commandé un rapport au Conseil des prélèvements obligatoires pour faire le point sur la fiscalité des entreprises. Sollicité par le Président de la République, le Conseil a remis ce rapport, destiné à préparer la grande réforme fiscale de juin 2011, et fait les comptes de ces mécanismes dérogatoires.
Permettez-moi de vous faire part, mes chers collègues, de quelques-unes de ses conclusions.
Le nombre des dépenses fiscales a augmenté de 13,5 % en huit ans, de 2002 à 2010. Au cours de cette période, 107 dépenses fiscales applicables aux entreprises ont été créées – soit près de 12 dépenses fiscales par an ! –, dont 87 depuis la loi de finances de 2006.
Le coût total de ces dépenses fiscales applicables aux entreprises – qui ne se limitent pas à celles que nous visons dans nos amendements … – serait, pour l’année 2010, de 35 milliards d’euros, comme l’a rappelé Mme Beaufils.
La proportion des mesures prises en faveur des entreprises est de 47,2 %, et leur coût a augmenté de 33 % entre 2005 et 2010. En effet, une fois qu’une niche fiscale a été créée, elle « galope » toute seule : elle est la source d’optimisations, d’effets d’aubaine, sans qu’une réelle évaluation ne soit réalisée.
C’est ce que nous avons traduit dans nos amendements. Je précise que deux d’entre eux sont relatifs au crédit d’impôt recherche, dont nous reparlerons assez longuement lundi après-midi, puisque cette discussion a été réservée sur la demande de M. le ministre du budget.
Je pose la question : allons-nous continuer longtemps comme cela ? Il ne suffit pas de dire qu’il faut harmoniser notre fiscalité avec celle de l’Allemagne ! Si l’on veut aller dans cette direction, l’impôt sur les sociétés ne doit pas encourager certaines pratiques d’un pays à l’autre de l’Union européenne.
À ce propos, monsieur le rapporteur général, nous avons évoqué au cours de la discussion générale la situation d’un pays qui connaît aujourd’hui de grandes difficultés financières et auquel la zone euro s’apprête à apporter son soutien, à hauteur de plusieurs dizaines de milliards d’euros : il s’agit de l’Irlande, qui a été la championne du dumping fiscal. D’autres pays de l’Union européenne connaissent d’ailleurs les mêmes problèmes.
Si l’on continue à jouer à ce petit jeu, l’Europe risque malheureusement de devenir une zone de croissance molle, qui n’interviendra pas suffisamment pour assurer la compétitivité de ses entreprises face à la concurrence mondiale. Nous mourrons heureux, comme les Étrusques, qui ne se sont pas rendu compte que les Romains allaient prendre leur place ; les tombes étrusques de Toscane en témoignent … Est-ce votre souhait ?
Pour éviter cela, il faut, je le répète, être compétitif au niveau européen et, de manière constructive, tous ensemble, faire le ménage chez nous. Or si nous comparons notre système de fiscalité des entreprises avec celui de l’Allemagne, nous sommes loin du compte !
Nous devons agir dans le domaine de l’impôt sur les sociétés, à défaut de mettre en place une fiscalité écologique européenne. Ce n’est pas par hasard si des travaux ont été entrepris. Il est vrai qu’ils ont été « encalminés », mais nous pouvons être proactifs en la matière.
Tel est le sens de cette série d’amendements, dont l’objet est d’inciter le Gouvernement à concrétiser, à un moment ou à un autre, le travail du Conseil des prélèvements obligatoires.
Mme la présidente. L’amendement n° I-232, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre la réintégration de l'ensemble des plus-values de cession professionnelle dans l'assiette des cotisations sociales.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-233, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre l'exclusion du bénéfice de l'article 151 septies du code général des impôts des cessions opérées au profit d'une société contrôlée par le cédant.
Cet amendement a été défendu.
L’amendement n° I-234, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre l'instauration d'un mécanisme de plafonnement de la déductibilité des intérêts d'emprunt.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-235, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre la suppression du crédit d'impôt sur les dividendes.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-237, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010 et, plus particulièrement, afin de diminuer le coût de l'exonération des plus-values à long terme sur la cession de titres de participation, et de limiter l'optimisation fiscale y afférente, le Gouvernement met en œuvre l'accroissement de la quote-part représentative des frais et charges à incorporer dans les résultats soumis à l'impôt sur les sociétés de 5 % à 20 %.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-238, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010 et, plus particulièrement, afin de diminuer le coût de l'exonération des plus-values à long terme sur la cession de titres de participation, et de limiter l'optimisation fiscale y afférente, le Gouvernement étudie la possibilité d'un allongement de la durée de détention des titres permettant de bénéficier de cette mesure d'exonération.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-239, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre la clarification de la délimitation entre dépenses éligibles et dépenses non éligibles au crédit d'impôt recherche.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-240, présenté par M. Marc, Mme Bricq, M. Raoul, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre une amélioration des contrôles a priori et a posteriori du crédit impôt recherche.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-241, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre une réduction significative du coût des exemptions d'assiette en matière d'épargne salariale.
Il a été défendu.
L’amendement n° I-242, présenté par M. Marc, Mmes Bricq et M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de conformer le régime des dépenses fiscales aux orientations budgétaires fixées en Conseil des ministres le 29 septembre 2010, le Gouvernement met en œuvre la réintégration, dans l'assiette des cotisations, des indemnités versées à l'occasion de ruptures du contrat de travail n'engageant pas de préjudice moral pour les salariés.
Il a été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je reprendrai brièvement les différents items qui ont été abordés.
Dans l’amendement n° I-231, il est question du régime de la micro-entreprise. Mme Bricq sait que nous avons pris l’initiative de réunir, au printemps dernier, une table ronde à ce sujet.
Les dispositions fiscales relatives à la micro-entreprise sont entrées en vigueur. Par ailleurs, le régime d’affiliation aux chambres des métiers a été précisé. On ne peut plus dire que ce dispositif, qui est une incitation à créer des entreprises, soit aujourd’hui aussi critiquable qu’il a pu l’être, du point de vue de certains professionnels plus anciens ou d’organisations représentatives, au début de l’existence du régime.
En outre, monsieur le président de la commission, une suggestion que nous avions faite à l’issue de la table ronde du printemps dernier a été mise en œuvre dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 : il s’agit de l’obligation de déclaration du chiffre d’affaires,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Enfin !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … même lorsque celui-ci est nul, et de la réduction de 26 à 24 mois de la durée du bénéfice du statut de micro-entrepreneur en cas d’inactivité.
L’amendement n° I-232 vise à intégrer l’ensemble des plus-values de cessions professionnelles dans l’assiette des cotisations sociales. Nous pouvons nous interroger à bon droit sur la vocation de ces plus-values à être intégrées dans une telle assiette. En effet, en vertu de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, seuls les éléments de rémunération sont soumis à cotisation sociale. En l’espèce, il ne semble pas qu’il s’agisse vraiment d’éléments de rémunération.
L’amendement n° I-233 tend à limiter l’exonération des plus-values professionnelles des plus petites entreprises. Il semble inspiré, d’une certaine façon, de l’amendement Charasse – encore un absent qui nous manque ! –, célèbre dans les montages de leverage buy-out, le LBO, et qui tend à interdire la déductibilité des intérêts lors d’un rachat à soi-même. Je n’ai d’ailleurs pas bien saisi, à cet égard, où se situait l’optimisation que semble craindre Mme Bricq.
L’amendement n° I-234 vise au plafonnement de la déductibilité des intérêts d’emprunt. Nous avons évoqué ce point tout à l’heure : il s’agit de la question de la sous-capitalisation. L’amendement « anti-abus » que vous avez bien voulu adopter tout à l’heure, mes chers collègues, permet de traiter une question connexe, ce qui devrait être de nature à satisfaire Mme Bricq, au moins partiellement.
L’amendement n° I-235 a pour objet la suppression du crédit d’impôt sur les dividendes. Il est satisfait par l’article 4 du présent projet de loi de finances.
L’amendement n° I-237 tend au relèvement de 5 % à 20 % de la quote-part de frais et charges. J’avoue avoir de la peine à comprendre comment les frais et charges se rapportant à la gestion d’une participation pourraient atteindre 20 % dans une entreprise bien gérée. Ce relèvement ne me semble pas vraisemblable.
L’amendement n° I-238 a pour objet d’allonger la durée de détention des titres de participation conditionnant l’exonération des plus-values. Nous avons évoqué ce sujet très largement tout à l’heure.
L’amendement n° I-239 vise à clarifier les dépenses éligibles et les dépenses non éligibles au crédit d’impôt recherche. Il serait bon que le Gouvernement nous présente les efforts qui sont faits en ce domaine, afin que cette distinction soit, pour nous, aussi claire que possible.
L’amendement n° I-240 tend à améliorer les contrôles a priori et a posteriori du crédit d’impôt recherche. Nous retrouverons cette question dans la suite de nos débats. Je suggère à mes collègues, en particulier à Nicole Bricq, de bien vouloir porter une appréciation positive sur l’amendement de la commission qui vise à rendre plus transparentes les dépenses de recherche des grands groupes.
L’amendement n° I-241 a pour objet de réduire significativement le coût des exemptions d’assiette en matière d’épargne salariale. À cet égard, des progrès ont été faits.
Depuis la loi de financement de la sécurité sociale de 2007, les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation, et les abondements de l’employeur au plan d’épargne entreprise sont assujettis au forfait social. Celui-ci, comme cela était vraisemblable au départ, a été successivement augmenté à 4 %, puis à 6 % pour 2011. Si elle devait se poursuivre, une telle progression pourrait devenir un handicap pour les dispositifs d’épargne salariale et de participation au sein des entreprises.
L’amendement n° I-242 tend à réintégrer les indemnités de rupture dans l’assiette des cotisations sociales. Sur ce sujet aussi, des progrès ont été faits, au travers tant de la loi de financement de la sécurité sociale de 2009 que du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, lequel prévoit que, quelle que soit la nature de l’indemnité de rupture, elle soit assujettie normalement aux cotisations sociales pour la part qui excédera trois plafonds de la sécurité sociale.
Ma chère collègue, j’ai souhaité aborder, même brièvement, les questions de fond qui sous-tendent vos amendements. La commission n’a pas voulu s’en tenir à une approche purement juridique, car elle considère que tous ces sujets ont vocation à être traités dans le cadre de nos débats.
Cela étant dit, la forme de vos amendements est telle que je ne peux les approuver. J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. J’adopterai la démarche de Mme Bricq plutôt que celle de M. le rapporteur général, dont je partage par ailleurs l’avis. Je ne présenterai pas la position du Gouvernement sur tous les amendements ; je la développerai seulement s’agissant de l’amendement n° I-239, sur lequel M. Marini a souhaité obtenir des explications.
Les auteurs de cet amendement souhaitent que le Gouvernement clarifie la délimitation entre les dépenses éligibles et les dépenses non éligibles au crédit d’impôt recherche. Une telle précision n’aurait pas de portée normative ; par conséquent, nous n’y sommes pas favorables. En tout cas, une telle disposition n’a pas sa place dans le projet de loi de finances.
Cela étant dit, je peux vous indiquer que la délimitation entre les dépenses éligibles et les dépenses non éligibles au crédit d’impôt recherche est dorénavant bien identifiée.
Le point de savoir si l’entreprise réalise ou non des opérations relevant de la recherche et développement constitue une question de fait qui nécessite une expertise approfondie au cas par cas. Des difficultés d’interprétation sont apparues, sur la base des multiples documents servant de référence à la mise en œuvre du crédit d’impôt recherche.
C’est pourquoi, dans son discours de clôture des États généraux de l’industrie, le Président de la République avait conclu à la nécessité de clarifier les conditions d’éligibilité des dépenses de recherche à ce crédit d’impôt, au moyen d’une harmonisation des définitions des opérations de recherche figurant dans lesdits documents. À cette fin, une mission a été confiée à un groupe de travail ad hoc, composé des différentes administrations en charge de ce dispositif, et dont la réflexion a déjà bien progressé sur différents points tels que l’état de l’art, la frontière du développement expérimental ou les éléments exclus du périmètre de la recherche et développement.
Bien que le Gouvernement émette un avis défavorable sur l’amendement n° I-239, au demeurant dépourvu de portée normative, j’espère avoir répondu aux demandes de précision formulées par M. le rapporteur général.
Pour le reste, je souhaiterais apporter trois éléments de réponse à la présentation générale qu’a faite Mme Bricq d’une position que l’on peut qualifier de politique, au sens noble du terme.
Premièrement, si tout le monde s’accorde en effet à reconnaître l’étroitesse de notre impôt sur les sociétés, il faut rappeler que son taux, fixé à 33,3 %, est le plus élevé d’Europe. Je vous accorde toutefois que, si l’on opère une pondération entre l’assiette et le taux, nous nous situons davantage dans la moyenne européenne.
Deuxièmement, je voudrais rappeler ce chiffre trop souvent oublié : le taux de prélèvements obligatoires qui pèse sur les entreprises en France s’élève à 17,4 %, contre 11,7 % en moyenne dans l’Union européenne. Cela permet sans doute d’avoir une approche plus pondérée, pour ne pas dire plus modérée, de cette question.
Troisièmement, un volet du fameux chantier de la convergence franco-allemande que nous avons lancé portera, bien entendu, sur la fiscalité des entreprises.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je voudrais tout d’abord remercier M. le rapporteur général de nous avoir répondu précisément, amendement par amendement, et le Gouvernement d’avoir affirmé sa volonté de clarifier la délimitation entre les dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche et celles qui ne le sont pas.
Vous avez cité le Président de la République, monsieur le secrétaire d’État, mais, que je sache, sa parole n’a pas plus de valeur normative que celle de Mme Bricq ou des autres membres du groupe socialiste … (Sourires.)
En revanche, j’attends avec impatience le contre-rapport que Mme Parisot, la présidente du MEDEF, a annoncé après qu’elle eut réagi assez vivement au rapport du Conseil des prélèvements obligatoires. Il permettra d’engager un vrai débat public sur la fiscalité des entreprises, l’attractivité du territoire et, plus généralement, sur ce qui est bon ou pas pour notre compétitivité et nos finances publiques. Soyez sûrs que nous serons au rendez-vous de ce débat, rapport contre rapport, en espérant que nous pourrons à cette occasion dépasser le clivage droite-gauche.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-242.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 6 bis
Après l’article L. 225-185 du code de commerce, il est inséré un article L. 225-185-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-185-1. – I. – Il ne peut être consenti au président du conseil d’administration et au directeur général d’une société visée par les articles L. 225-17 à L. 225-56, ou au président du directoire et aux membres du conseil de surveillance d’une société visée par les articles L. 225-57 à L. 225-93 un régime différentiel de retraite, ou “retraite chapeau”, supérieur à 30 % de sa rémunération au titre de la dernière année de l’exercice de sa fonction. Les charges afférentes à ce dispositif ne sont pas déductibles au regard de l’impôt sur les sociétés.
« II. – Le présent article est réputé d’ordre public. »
Mme la présidente. L’amendement n° I-8, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous attachons de l’importance à cet amendement, qui vise à éviter que le législateur ne se substitue à l’entreprise.
L’article 6 bis, issu de l’Assemblée nationale, tend à limiter le montant d’un avantage susceptible d’être apporté par l’entreprise à certains de ses salariés. Or il n’appartient pas à l’État, et encore moins à la loi de finances, de définir la politique salariale ou quasi-salariale des entreprises. C’est en vertu de ce principe que nous souhaitons supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Cet amendement vise à supprimer le plafonnement à 30 % de la dernière rémunération annuelle des retraites à prestations définies ou retraites chapeaux pouvant être accordées par une entreprise.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement pour trois raisons, dont l’une d’elles, que vous avez mentionnée, monsieur le rapporteur général, me paraît essentielle : il ne revient en effet pas à la loi de prévoir un tel plafond pour l’ensemble des sociétés privées – de façon relativement arbitraire au demeurant ! –, alors que la fixation des rémunérations relève des pouvoirs des conseils et des actionnaires. De surcroît, cet article n’a pas sa place dans le projet de loi de finances pour 2011 en ce qu’il vise à modifier des dispositions du code du commerce. Il n’appartient pas à la loi de se substituer à un mode décisionnel qui relève de l’entreprise.
En outre, les pouvoirs publics ont déjà mis en œuvre des mesures qui permettent de modérer les abus. Le régime fiscal des retraites chapeaux a déjà été alourdi par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, notamment pour les rentes excédant huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale, qui se voient appliquer un taux de taxation de 30 %. Un nouvel alourdissement est prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, afin que les retraites chapeaux contribuent au financement du régime des retraites à hauteur d’une centaine de millions d’euros. Nous avons eu l’occasion – n’est-ce pas, M. Jégou ? – d’en parler lors du récent débat sur les retraites.
Il n’y a donc aucun laxisme de la part du Gouvernement, d’autant que le bénéficiaire, qui sera soumis à une nouvelle contribution salariale de 14 % s’ajoutant aux prélèvements sociaux et à l’impôt sur le revenu déjà acquitté, verra sa taxation globale alourdie.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 6 bis est supprimé.
L’amendement n° I-43, présenté par M. Masson, était ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer le pourcentage :
30 %
par le pourcentage :
15 %
Cet amendement n’a plus d’objet.
L’amendement n° I-323, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, était ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
de sa rémunération
par les mots :
de son salaire soumis à cotisations sociales
Cet amendement n’a plus d’objet.
Article additionnel après l'article 6 bis
Mme la présidente. L’amendement n° I-453, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, tel qu’il résulte de l’article 10 de la loi n° … du … 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011, est ainsi rédigé :
« Art. L. 137-11-1.- Les rentes, versées dans le cadre des régimes mentionnés au I de l’article L. 137-11, sont soumises à une contribution à la charge du bénéficiaire pour leur part qui excède 1000 euros par mois. Le taux de cette contribution est fixé à 14 %. La contribution est précomptée et versée par les organismes débiteurs des rentes et recouvrée et contrôlée dans les mêmes conditions que la contribution mentionnée à l’article L. 136-1 due sur ces rentes. »
II.- La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement concerne les retraites d’entreprise, un terme que je préfère à celui de retraites chapeaux qui, outre sa connotation péjorative, me semble trop approximatif.
Mme Nicole Bricq. Elles ont en commun d’être des méga-retraites !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Pas toujours, ma chère collègue…
Mme Catherine Procaccia. En effet, il y a plein de petites retraites !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. De nombreuses entreprises, en particulier les plus grandes d’entre elles, ont depuis longtemps passé des accords avec une très grande partie de leur personnel, y compris les agents de maîtrise et les cadres moyens. Il ne faut pas confondre les rémunérations qui en découlent avec celles qui sont l’apanage des mandataires sociaux et des cadres supérieurs. Or l’article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 vise à instituer une contribution sur ces retraites complémentaires.
Le dispositif initial du Gouvernement, même sensiblement amélioré par l’Assemblée nationale et le Sénat, et encore légèrement rectifié par la commission mixte paritaire – je parle sous le contrôle de Catherine Procaccia ! –, suscite un large émoi, que l’on peut comprendre.
En effet, des personnes dont les retraites sont liquidées, et qui ne disposeraient d’aucune marge de manœuvre leur permettant d’adapter leur niveau global de ressources, se retrouveraient brutalement soumises à une contribution importante de 14 % sur cet élément de leur rémunération, qui se trouve déjà assujetti à l’impôt sur le revenu, à la CSG et à la CRDS. Une fois l’ensemble des prélèvements acquittés, une retraite complémentaire d’un montant de 500 ou 700 euros – ce qui n’est pas rare ! – serait véritablement réduite à la portion congrue.
Ces régimes de retraite résultent des versements qui ont été réalisés, pendant la période d’activité, par les entreprises, mais aussi, dans certains cas, par les salariés eux-mêmes. S’il est compréhensible que l’on veuille rétrospectivement soumettre à une taxation au profit de la sécurité sociale des sommes qui y ont échappé pendant la période de constitution de ces avantages retraite, il n’en reste pas moins vrai que l’effet réel de cette taxation serait celui que je viens de décrire.
Cette mesure suscite donc un grand émoi, et nous sommes nombreux à considérer que, eu égard au nombre de personnes concernées, son rendement financier de 19 millions d’euros semble disproportionné.
C’est pourquoi cet amendement tend à modifier le régime social des retraites d’entreprise versées dans le cadre de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, c’est-à-dire des régimes de retraite à prestations définies, conditionnant la constitution des droits à l’achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l’entreprise.
Il prévoit, d’une part, l’instauration d’un abattement de l’assiette de la nouvelle contribution créée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, qui serait fixé à 1000 euros par mois pour toutes les rentes et, d’autre part, l’application d’un taux unique de 14 % au-delà de 1000 euros.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. La mesure adoptée par la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 prévoit d’exonérer de cette contribution toutes les retraites inférieures à 400 euros, d’appliquer un taux de 7 % pour les rentes comprises entre 400 et 600 euros, et un taux de 14 % pour celles qui dépassent 600 euros.
Si je comprends bien le sens de cet amendement, vous préconisez, monsieur le rapporteur général, de renoncer à tout taux progressif et de revenir sur une mesure que nous avons eu le plus grand mal à faire adopter par la commission mixte paritaire et qui, de surcroît, n’est pas encore définitivement adoptée par le Parlement.
Dans l’amendement que j’avais présenté avec plusieurs collègues, je m’étais fondée sur un montant qui correspondait au minimum vieillesse, et 1 000 euros par mois, c’est un montant supérieur à ce minimum.
Si le Gouvernement est favorable à l’amendement n° I-453, je ne voterai pas contre, mais je trouve que ce sont des sur-retraites par rapport à la retraite de base et à la retraite complémentaire. Ne pas imposer du tout des sommes supérieures au minimum vieillesse et qui sont à un troisième niveau peut paraître quelque peu excessif.
Ce seuil de 1 000 euros est tout de même plus généreux que celui adopté au Sénat, c’est-à-dire 700 euros par mois.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On ne peut pas dire que ces retraites d’entreprise seront exemptes de tout prélèvement, puisqu’elles seront soumises à l’impôt sur le revenu, à la CSG et à la CRDS !
Nous proposons que jusqu’à 1 000 euros, on ne paie rien et qu’au-delà, on s’acquitte de 14 %. Il y a donc une franchise de 1 000 euros. Cette proposition tient compte de ce que nous avons constaté, de l’émoi considérable manifesté par les retraités et les cadres retraités des grandes entreprises, qui ont considéré que ce nouveau prélèvement était véritablement spoliateur ; on ne peut pas, me semble-t-il, leur donner tort.
Mme Nicole Bricq. Vous exagérez !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Certains pensent qu’au-delà de 3 000 euros, on est riche … On peut effectivement se référer à cette limite qu’un futur candidat – peut-être ! – à la candidature avait exprimée voilà quelques années, ce qu’il doit d’ailleurs regretter aujourd’hui.
Mme Nicole Bricq. Pas du tout !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, il faut dans ce domaine faire preuve de modération. Je peux porter témoignage, en tant qu’élu d’une région où le groupe Saint-Gobain est très présent, que tous les anciens personnels, blanchis sous le harnais de l’entreprise, les retraités, les agents de maîtrise, bénéficient d’une retraite d’entreprise. Dès lors, taxer ces retraités à 14 %, en plus des impôts et de la CSG qu’ils doivent acquitter, ne semble vraiment pas très équitable.
Nous nous sommes efforcés de soutenir ce que la commission des affaires sociales avait décidé avec beaucoup de mérite, mais en allant un peu plus loin.
Mme Catherine Procaccia. Contre l’avis du Gouvernement !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les choses progressent ! En effet, l’amendement avait été voté contre l’avis du Gouvernement. Grâce à vous, madame Procaccia, nous avons pu avancer, être encore plus convaincants. La preuve en est que le Gouvernement vient d’exprimer un avis de sagesse.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Je suis assez étonnée d’entendre de tels propos si peu de temps après le débat sur les retraites, au cours duquel nous avons eu tant de mal à faire entendre la voix des milliers de salariés qui, avec les nouveaux régimes de retraite, verront leurs pensions baisser de façon très importante.
Mme Marie-France Beaufils. Je pense, en particulier, à ceux dont les revenus sont moyens ou modestes. Intervenir de nouveau sur ce sujet, alors que l’on a précédemment supprimé l’amendement de l’Assemblée nationale qui visait à introduire un peu plus de rigueur, cela passe la décence !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Point trop n’en faut, monsieur le rapporteur général ! Vous parlez d’un émoi considérable. Or, pour reprendre les mots de Mme Procaccia, il s’agit de « super-retraites », et non de la retraite de base ou de la retraite complémentaire.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit des retraites d’entreprise, prévues par les accords d’entreprise !
Mme Nicole Bricq. C’est le « troisième étage de la fusée », comme vous aimez à le dire.
Je comprends que vous vouliez satisfaire une partie de votre clientèle électorale, mais n’en rajoutez pas : nous parlons de super-retraites ! Je ne dis pas que ces personnes sont forcément riches, mais quand on a encore à l’esprit le débat des dernières semaines sur les retraites,…
Mme Marie-France Beaufils. Tout à fait !
Mme Nicole Bricq. … on ne peut que constater combien vos propos sont décalés par rapport à la réalité de l’immense majorité de ceux qui vont souffrir, ou souffrent déjà, de la baisse de leurs pensions de retraite. (Mme Marie-France Beaufils acquiesce.) N’en rajoutons pas : nous parlons là de retraites chapeaux !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Non, des retraites d’entreprise !
Mme Nicole Bricq. On reparlera de Saint-Gobain !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Je ne reviendrai pas sur l’avis de sagesse exprimé par le Gouvernement sur cet amendement n° I-453 rectifié. Je ne vais pas non plus rouvrir le débat qui, pendant trois semaines, nous a donné l’occasion, avec Éric Woerth, d’expliquer que cette loi portant réforme des retraites permettra de sauver notre système de retraite par répartition. Permettez-moi de dire une seule chose, et j’en resterai là : si le Gouvernement a proposé ce texte, c’est justement parce qu’il ne voulait pas baisser le montant des pensions.
Si l’on examine la réalité avec un peu de recul, on constate que la seule mesure aboutissant à une augmentation des prélèvements était celle, préconisée par l’opposition, consistant à trouver l’équivalent de 35 milliards d’euros sous forme d’impôts et de taxes. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
Je tiens à rétablir certaines vérités. Le texte que nous avons défendu avait deux objectifs : le premier, c’était de ne pas baisser les pensions,…
Mme Nicole Bricq. Mais si !
M. Georges Tron, secrétaire d’État. … et le second, c’était d’éviter qu’un nouveau système d’imposition ne s’ajoute aux impôts existants, comme vous le préconisiez.
Par ailleurs, concernant l’amendement n° I-453, j’accepte de lever le gage.
Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° I-453 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 6 bis.
Article 6 ter
Après le même article L. 225-185, il est inséré un article L. 225-185-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-185-2. – I. – Il ne peut être consenti au président du conseil d’administration et au directeur général d’une société visée par les articles L. 225-17 à L. 225-56, ou au président du directoire et aux membres du conseil de surveillance d’une société visée par les articles L. 225-57 à L. 225-93 une indemnité totale de départ supérieure à deux fois la plus haute indemnité de départ en cas de licenciement d’un salarié prévue par les accords d’entreprise, ou à défaut les accords conventionnels de branche, ou à défaut la loi. Cette indemnité n’est pas déductible au regard de l’impôt sur les sociétés.
« II. – Le présent article est réputé d’ordre public. »
Mme la présidente. L’amendement n° I-9, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Comme dans l’amendement n° I-8, il s’agit d’éviter que le code de commerce ne soit modifié par la loi de finances et que le législateur ne prétende décider de la politique salariale à la place des entreprises.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Pour les raisons invoquées à l’amendement précédent, j’émets un avis favorable.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 6 ter est supprimé.
L’amendement n° I-44, présenté par M. Masson, était ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Supprimer les mots :
deux fois
Cet amendement n’a plus d’objet.
Article 6 quater
Au premier alinéa du 1 de l’article 39 bis A du code général des impôts, l’année : « 2010 » est remplacée par l’année : « 2011 ». – (Adopté.)
Article 6 quinquies
L’article 39 ter du même code est abrogé.
Mme la présidente. L’amendement n° I-49 rectifié, présenté par Mme Des Esgaulx, M. Biwer, Mme B. Dupont, M. César et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Le dispositif de la provision pour reconstitution des gisements permet aux sociétés pétrolières de déduire de leurs bénéfices des sommes qui devront être réemployées dans un délai de deux ans pour rechercher de nouveaux gisements, acquérir des participations, ou valoriser des gisements déjà mis à jour.
Le dispositif ne constitue en rien une niche fiscale exonérant d’impôt les sociétés de façon définitive. Cet outil est essentiel au regard de la nature des nouveaux acteurs de l’exploration pétrolière nationale, sociétés de petite taille qui se sont substituées à la plupart des grandes sociétés internationales qui opéraient sur le sol français.
La suppression de la provision pour reconstitution des gisements enverrait un signal négatif à l’activité de recherche et de production pétrolières assurée, pour la plus large part, par des entreprises de petite taille, qui seraient ainsi pénalisées pour réaliser de nouvelles découvertes d’hydrocarbures en France. Elle serait de nature à affecter les ressources fiscales de l’État et des collectivités territoriales, ainsi que l’emploi dans les zones concernées.
Il est donc proposé, afin de maintenir l’attractivité du domaine minier français, de conserver le régime de la provision pour reconstitution des gisements, qui ne constitue qu’un différé d’intégration dans le résultat imposable des sociétés, et donc de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Quand elle examine cette question, la commission est un peu partagée.
En effet, d’un côté, la provision pour reconstitution des gisements, la PRG, est un régime qui fut assez exceptionnel autrefois, du fait de son importance économique. Aujourd’hui, son coût est de l’ordre de 20 millions d’euros, ce qui n’est pas rien, mais elle ne profite plus qu’à une seule entreprise, québécoise, qui prospecte sur le territoire métropolitain, en particulier en Gironde ; c’est sans doute ce qui a attiré l’attention de notre excellente collègue Marie-Hélène Des Esgaulx.
Il nous serait utile, monsieur le secrétaire d’État, de connaître votre analyse. En effet, si le régime de la PRG est définitivement supprimé, comment la transition sera-t-elle assurée pour cette société ? En effet, la reprise de la provision qui doit être effectuée dans les deux ans ne pourra pas être compensée par de nouveaux passages de provision.
J’avoue ne pas comprendre comment, sur le plan technique, une entreprise encore active en matière de prospection peut sortir du régime de la PRG. Ce doute nous ferait plutôt pencher en faveur de l’amendement…
La commission a décidé de s’en remettre à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d’État. Le Gouvernement avait décidé de s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée. (Rires.) Nous ne sommes donc guère avancés…
Madame la sénatrice, vous proposez de restaurer le régime de la PRG, supprimé en première lecture à l’Assemblée nationale.
Ce dispositif, qui constitue un mécanisme de provision spécial, dérogatoire du droit commun, a un coût budgétaire, selon mes informations, non pas de 20 millions d’euros, monsieur le rapporteur général, mais de 11 millions d’euros. Il faut donc relativiser les choses.
Cette provision était destinée, à l’origine, à favoriser l’exploration pétrolière et gazière sur le territoire français. Il nous faut reconnaître qu’elle n’a aujourd’hui qu’un intérêt assez limité, car la production française d’hydrocarbures ne représente qu’une part très faible de la consommation nationale : environ 1 % pour le pétrole et 3 % pour le gaz.
Des raisons d’ordre économique, liées au très faible taux de succès de l’exploration sur le territoire national et à la dégradation de la rentabilité due à la petite taille des gisements, expliquent cette situation.
Il est vrai que le Gouvernement ne souhaite pas que la suppression de ce dispositif aboutisse à fragiliser les quelques entreprises – peut-être suis-je un peu optimiste ? –, de taille relativement modeste, qui œuvrent dans ce secteur d’activité.
Le Gouvernement émet plutôt un avis favorable, à moins que cela ne heurte le président de la commission des finances et le rapporteur général.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J’ai bien entendu les arguments qui ont été avancés aussi bien par notre collègue Colette Mélot, M. le rapporteur général que par M. le secrétaire d’État. Toutefois, il ne me semble pas indécent d’avoir pour objectif de faire disparaître du code général des impôts cette disposition tout à fait dérogatoire.
Peut-être pourrions-nous convenir de trouver, d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, un mécanisme de transition – je ne sais pas du tout lequel ! – susceptible de ne pas pénaliser les entreprises concernées.
Certes, la provision pour reconstitution des gisements doit être activée deux ans après sa constitution, et ce qui a été mis en provision doit être affecté à son objet. Mais il serait convenable de dire, dès maintenant, que la constitution de telles provisions ne sera plus déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés à partir de 2011.
Aussi serai-je tenté de voter cet amendement, à charge pour nous d’élaborer un texte adéquat d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 6 quinquies est supprimé.
Article 6 sexies
Au I de l’article 220 undecies du même code, l’année : « 2010 » est remplacée par l’année : « 2011 ». – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 6 sexies
Mme la présidente. L’amendement n° I-371, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 6 sexies, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
Les cinquième et sixième alinéas de l'article 223 septies du code général des impôts sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« 32 750 euros pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires majoré des produits financiers est compris entre 75 000 000 euros et 250 000 000 euros » ;
« 110 000 euros pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires majoré des produits financiers est compris entre 250 000 000 euros et 500 000 000 euros » ;
« 200 000 euros pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires majoré des produits financiers est supérieur ou égal à 500 000 000 euros ».
Cet amendement n’est pas soutenu.
Article 6 septies
À la fin du II de l’article 14 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, la date : « 2011 » est remplacée par la date : « 2014 ».
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-35 est présenté par MM. Houel, Beaumont, Bécot et P. Dominati, Mlle Joissains et MM. Fouché et Revet.
L’amendement n° I-116 est présenté par Mmes Sittler et Bruguière, MM. Gilles, Magras, Lefèvre, Milon, Braye, Leleux, Grignon, Cornu et Pierre.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° I-35 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Esther Sittler, pour présenter l’amendement n° I-116.
Mme Esther Sittler. Lors de son élection, le Président de la République s’était engagé à accompagner le développement des entreprises. Conformément à ses engagements, la loi de finances de 2009 prévoyait la suppression totale de l’IFA, l’imposition forfaitaire annuelle, à compter du 1er janvier 2011.
En effet, sur le plan économique, l’IFA est prélevée même lorsque les entreprises assujetties sont en déficit. Cet impôt constitue, par conséquent, un frein au développement des sociétés et à leur compétitivité.
La suppression de cet impôt est désormais remise en cause par l’article 6 septies du projet de loi de finances pour 2011, qui proroge l’IFA jusqu’en 2014. Adopter une telle disposition reviendrait à adresser un signal très négatif aux chefs d’entreprise, et ce d’autant plus que les effets de la crise se font encore sentir. J’ai d’ailleurs lu aujourd’hui dans les Dernières Nouvelles d’Alsace que la reprise économique était vacillante.
Aussi le présent amendement vise-t-il à maintenir la suppression initialement prévue en 2011.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En vertu de la disposition adoptée en 2008, l’imposition forfaitaire annuelle devait en effet disparaître progressivement. C’est chose faite pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 15 millions d’euros, c’est-à-dire les petites et moyennes entreprises, car ce plafond équivaut tout de même à 100 millions de francs !
Au 1er janvier 2011, l’IFA devait disparaître définitivement pour les quelque 22 500 entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 15 millions d’euros. Mais la réforme de la taxe professionnelle, qui est de nature à alléger les charges d’une grande partie de ces entreprises – c’est du moins ce que l’on peut supposer ! –, est passée par là.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En outre, ces entreprises ont bénéficié, au travers du plan de relance, de dispositions favorables à leur trésorerie, qui ne peuvent être considérées pour négligeables.
En reportant la suppression définitive de l’IFA à 2014, notre collègue député Gilles Carrez demande, il est vrai, un effort à ces entreprises par rapport au calendrier prévu initialement. Toutefois, on ne leur demande rien de plus qu’actuellement ; c’est simplement la sortie de ce dispositif qui est un peu plus lente que prévu.
Ce sacrifice, ou plutôt la renonciation provisoire à cet avantage promis, représente certes un effort, mais nous sommes dans une période où les efforts doivent être largement répartis. En l’espèce, l’enjeu est de 434 millions d’euros. Nous ne pouvons pas être aussi souples que nous l’avons été à l’égard des mesures relatives aux retraites d’entreprise ou à la PRG, qui correspondent, pour chacune d’entre elles, à une dizaine de millions d’euros.
Afin de préserver les recettes de l’État, la commission des finances souhaite s’en tenir à la position de l’Assemblée nationale et se voit malheureusement contrainte de vous demander, ma chère collègue, de bien vouloir retirer cet amendement, que vous avez défendu avec conviction.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est vrai !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. J’espère que vous ne m’en voudrez pas trop… (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Sittler, l’amendement n° I-116 est-il maintenu ?
Mme Esther Sittler. Dès lors que le Gouvernement a exprimé un avis de sagesse, je préfère maintenir mon amendement, madame la présidente, pour le bien-être des entreprises, car elles sont toujours confrontées à la crise économique qui sévit actuellement en France et ailleurs.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-116.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
10
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 22 novembre 2010, à dix heures, à quatorze heures trente et le soir :
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (n° 110, 2010-2011). Suite de l’examen des articles de la première partie.
Rapport (n° 111, 2010-2011) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
Le Directeur adjoint
du service du compte rendu intégral,
FRANÇOISE WIART